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mis en distribution
le 14 novembre 2002
N° 256
______
ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
DOUZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 10 octobre 2002.
RAPPORT
FAIT
AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L'ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU PLAN SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2003 (n° 230)
PAR M. Gilles CARREZ
Rapporteur Général
Député.
--
ANNEXE N° 14 (1ère partie)
CHARGES COMMUNES
Rapporteur spécial : M. Daniel GARRIGUE
Député.
____
Lois de finances.
SOMMAIRE
-
Pages
INTRODUCTION 7
I.- L'AJUSTEMENT DU PROGRAMME « GESTION DE LA DETTE ET DE LA TRÉSORERIE DE L'ÉTAT » 11
II.- LES GRANDS BLOCS DE CRÉDITS DANS LE PROJET DE BUDGET 2003 DES CHARGES COMMUNES 13
A.- UNE LÉGÈRE REPRISE DES REMBOURSEMENTS ET DÉGRÈVEMENTS, APRÈS UN REFLUX MODÉRÉ EN 2002 13
B.- UNE CROISSANCE MODÉRÉE POUR LA CHARGE DE LA DETTE 16
C.- LES DÉPENSES DE PERSONNEL IMPUTÉES SUR LE BUDGET DES CHARGES COMMUNES 17
III.- LES AUTRES AJUSTEMENTS DE CRÉDITS 18
CHAPITRE PREMIER : PERSPECTIVE 2006 : LA RECONDUCTION DU PROGRAMME RELATIF À LA GESTION DE LA DETTE ET DE LA TRÉSORERIE DE L'ÉTAT 20
I.- L'ENDETTEMENT DE L'ÉTAT : UN RÉVEIL DOULOUREUX APRÈS LES ILLUSIONS DE LA PRÉCÉDENTE LÉGISLATURE 22
A.- UN AJUSTEMENT DES FINANCES PUBLIQUES PLUS LIMITÉ QUE CHEZ NOS PRINCIPAUX PARTENAIRES 23
1.- Une réduction du déficit moins prononcée 23
2.- L'État en retard sur les autres administrations publiques 25
B.- UNE SITUATION FINANCIÈRE DE L'ÉTAT TOUJOURS PRÉCAIRE 28
II.- UNE MEILLEURE FORMULATION DES OBJECTIFS ASSIGNÉS À LA GESTION DE LA DETTE ET DE LA TRÉSORERIE 40
A.- L'ENDETTEMENT DE L'ÉTAT : UNE DONNÉE QUI S'IMPOSE AU GESTIONNAIRE DE LA DETTE 40
B.- UN RECADRAGE OPPORTUN DES OBJECTIFS ASSIGNÉS À LA GESTION DE LA DETTE 44
1.- Des objectifs désormais déclinés de façon hiérarchisée 44
2.- La définition des indicateurs de performance reste délicate 48
C.- UNE RECONDUCTION LOGIQUE DES OBJECTIFS ASSIGNÉS À LA GESTION DE LA TRÉSORERIE 50
D.- LA MAÎTRISE DES RISQUES : UN OBJECTIF À PART ENTIÈRE 54
III.- DES INSTRUMENTS DE GESTION ÉPROUVÉS
A.- LA POLITIQUE D'ÉMISSION S'EFFORCE DE RÉPONDRE AUX ATTENTES DU MARCHÉ
1.- La diversité maîtrisée des emprunts de l'État
2.- Une procédure d'émission transparente
B.- L'INSTRUMENT PRINCIPAL DU FINANCEMENT : LE PROGRAMME D'EMPRUNT
1.- Le financement définitif du Trésor en 2001
2.- Les prévisions de financement du Trésor en 2002
3.- Le financement de l'État en 2003
C.- UNE « GESTION ACTIVE » RENOUVELÉE
1.- La poursuite des interventions directes sur le stock de dette
2.- Vers une reprise du programme de swaps ?
D.- LES INSTRUMENTS DE GESTION DE LA TRÉSORERIE
1.- Les opérations de pension du Trésor
2.- L'essor des opérations interbancaires ou avec d'autres États membres de la zone euro
IV.- UNE CROISSANCE MODÉRÉE POUR LA CHARGE DE LA DETTE
A.- UN LÉGER REPLI DES HYPOTHÈSES DE TAUX D'INTÉRÊT
1.- Les hypothèses de taux associées au projet de loi de finances pour 2003
2.- Les perspectives d'évolution des taux d'intérêt
B.- LA CHARGE DE LA DETTE PROGRESSERAIT DE 2% EN 2003
1.- Le service de la dette négociable
2.- Le service de la dette non négociable
3.- Une augmentation sensible des recettes d'ordre
CHAPITRE II : LES CHARGES BUDGÉTAIRES COMMUNES
I.- LES CRÉDITS DES POUVOIRS PUBLICS
II.- LES DÉPENSES RELATIVES À LA FONCTION PUBLIQUE : RÉMUNÉRATIONS, PENSIONS, CHARGES SOCIALES
A.- UNE PROVISION DE 875 MILLIONS D'EUROS POUR LES MESURES GÉNÉRALES AFFÉRENTES AUX RÉMUNÉRATIONS
B.- LES CHARGES DE PENSION SUPPORTÉES PAR L'ÉTAT
1.- Des crédits de pensions éclatés entre les fascicules budgétaires
2.- Les charges liées aux mécanismes de compensation généralisée et spécifique entre régimes d'assurance vieillesse
3.- L'équilibre du régime des pensions civiles et militaires de l'État
4.- Les perspectives du régime de retraite des fonctionnaires civils et militaires
5.- Le régime de pension des ouvriers des établissements industriels de l'État
C.- UNE AUGMENTATION SENSIBLE DES CRÉDITS DE PRESTATIONS SOCIALES
III.- LES DÉPENSES ET « QUASI DÉPENSES » DE FONCTIONNEMENT COURANT DES ADMINISTRATIONS
A.- UNE LÉGÈRE REPRISE DES DÉPENSES EN ATTÉNUATION DES RECETTES DE L'ÉTAT
1.- Les remboursements et dégrèvements de recettes d'État
2.- Les frais de poursuite et de contentieux, les décharges de responsabilité et remises de débets
B.- LES CRÉDITS GLOBAUX POUR « CHARGES COMMUNES » DE FONCTIONNEMENT
CHAPITRE III : LES DÉPENSES D'INTERVENTION DU TRÉSOR
I.- LES INTERVENTIONS À CARACTÈRE SOCIAL : UNE MAJORATION SENSIBLE DES CRÉDITS EN 2003
A.- LES VERSEMENTS À DIVERS RÉGIMES OBLIGATOIRES DE SÉCURITÉ SOCIALE
1.- Le doublement « structurel » de la subvention d'équilibre au profit du BAPSA
2.- La contribution de l'État au Fonds spécial de retraite de la caisse autonome nationale de sécurité sociale dans les mines
3.- La participation de l'État au financement d'autres régimes spéciaux de sécurité sociale
B.- LES INTERVENTIONS SOCIALES À DESTINATION DES PARTICULIERS
1.- Une érosion tendancielle des crédits destinés aux rapatriés
2.- Les majorations légales de rentes viagères
3.- La réparation des préjudices dans le domaine de la santé
II.- DES CRÉDITS D'INTERVENTION ÉCONOMIQUE MAJORÉS PAR UN TRANSFERT DU BUDGET DE LA DÉFENSE
A.- L'ENCOURAGEMENT À LA CONSTRUCTION IMMOBILIÈRE
1.- La suppression programmée des transferts en provenance du budget du Logement
2.- La gestion des crédits en 2001 et 2002 et les demandes budgétaires pour 2003
3.- L'épargne-logement en question : chute des prêts mais augmentation des primes d'État
B.- UNE NOUVELLE DIMINUTION DES CRÉDITS CONSACRÉS AUX GARANTIES
1.- Les garanties afférentes à l'exportation
2.- Les autres garanties
III.- LES RELATIONS FINANCIÈRES DU TRÉSOR AVEC LES COLLECTIVITÉS LOCALES
A.- LES DÉGRÈVEMENTS D'IMPÔTS LOCAUX EN 2003 : LA CONFIRMATION D'UN RALENTISSEMENT TENDANCIEL
1.- Les dégrèvements de taxe professionnelle
2.- Les dégrèvements de taxe d'habitation
3.- Les dégrèvements de taxes foncières
B.- LES AUTRES ACTIONS DU TRÉSOR EN DIRECTION DES COLLECTIVITÉS LOCALES
1.- Le taux réduit de taxe de publicité foncière ou de droit d'enregistrement au profit des jeunes agriculteurs
2.- Le fonds national de péréquation
3.- Les dépenses du plan en faveur de la sécurité dans les écoles financées par les disponibilités en crédits existantes
4.- Le plan d'urgence en faveur des lycées
CHAPITRE IV : LES COMPTES SPÉCIAUX DU TRÉSOR RATTACHÉS AU BUDGET DES CHARGES COMMUNES
A.- LE COMPTE N° 902-33 « FONDS DE PROVISIONNEMENT DES CHARGES DE RETRAITE »
B.- LE COMPTE N° 904-22 « GESTION ACTIVE DE LA DETTE ET DE LA TRÉSORERIE DE L'ÉTAT »
EXAMEN EN COMMISSION
Article 68
EXAMEN EN COMMISSION 169
Article 68 : Extension du champ d'intervention de la Caisse de la dette publique
(ex-CADEP) et suppression du Fonds de soutien des rentes (FSR) 173
L'article 49 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances fixe comme date butoir, pour le retour des réponses aux questionnaires budgétaires, au plus tard huit jours francs à compter du dépôt du projet de loi de finances. Cette date était donc le 9 octobre 2002.
A cette date, une seule réponse n'était pas parvenue à votre Rapporteur spécial, les 104 autres ayant été transmises dans les jours précédents.
· Le budget des Charges communes apparaît toujours comme un assemblage assez composite de crédits dont la destination est très diverse. Pourtant, les transferts de crédits importants décidés en 1999 et en 2000, ainsi que les transferts plus limités effectués en 2001 comme en 2002, l'ont amené à refléter mieux qu'auparavant sa vocation première, la couverture des « charges communes » de l'État. Celles peuvent être réparties en plusieurs catégories :
- les charges qui ne sauraient figurer dans aucun budget : les dépenses budgétaires relatives à la dette publique, les remboursements et dégrèvements d'impôts, les dépenses en atténuation de recettes, les dépenses relatives au fonctionnement des pouvoirs publics, etc. font partie du domaine naturel des « charges communes » ;
- les charges qui possèdent un caractère interministériel : le budget des Charges communes porte par exemple des crédits globaux destinés à être répartis en cours d'exercice, notamment pour des dépenses accidentelles (secours aux victimes de calamités) ou éventuelles (abondement des chapitres du budget général dotés de crédits provisionnels).
- certaines charges qui relèvent des compétences propres du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie : celui-ci assure par exemple les relations financières de l'État avec les organismes de sécurité sociale.
Concrètement, les charges communes sont gérées et liquidées par le « ministère chargé des finances ». Le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ainsi que le ministre délégué au budget, le cas échéant, sont normalement les ordonnateurs principaux des crédits inscrits sur ce budget.
· Traditionnellement, le budget des Charges communes constitue la section budgétaire la plus dotée. Il existe pourtant plusieurs mesures de son volume, qui répondent chacune à des logiques spécifiques.
La plus directe et la plus légitime se réfère à la somme des crédits demandés sur l'ensemble des chapitres qui y sont inscrits. Avec 119,6 milliards d'euros de crédits bruts (+ 2,2%) demandés pour 2003, le budget des Charges communes représente près de 35,2% des crédits bruts du budget général (339,3 milliards d'euros).
Les crédits bruts incluent les remboursements et dégrèvements, couvrant les dépenses dites « en atténuation de recettes », qui sont portés, au sein du budget général, par le seul budget des Charges communes. Les crédits nets de remboursements et dégrèvements, que l'on considère - peut-être à tort - comme plus représentatifs des dépenses réelles de l'État, atteindraient 57 milliards d'euros (+ 5%), soit 20,6% des crédits nets du budget général en 2003.
Depuis 1994, le Gouvernement présente le budget général en défalquant des crédits afférents à la charge de la dette le montant des recettes directement liées aux modalités de gestion de la dette et de la trésorerie, appelées de façon commode, mais impropre, « recettes d'ordre » : il s'agit, pour l'essentiel, des recettes de coupons courus et des recettes tirées du placement de la trésorerie. Cette pratique devrait trouver, dans le présent projet, une sorte de consécration juridique puisque les plafonds des charges inscrits dans le tableau d'équilibre seraient définis en termes de charge nette de la dette. L'analyse du budget effectuée selon cette convention peut être transposée au budget des Charges communes puisque seul celui-ci porte les crédits relatifs à la charge de la dette : on peut donc construire un budget des Charges communes « net » des recettes venant en atténuation des charges de la dette.
Pour 2003, ces recettes sont estimées à 2,99 milliards d'euros. Les crédits du budget des Charges communes, nets de remboursements, de dégrèvements et de recettes d'ordre s'élèveraient ainsi à 54 milliards d'euros (+ 4,7%), soit 19,8% du total des crédits nets hors dépenses d'ordre inscrits sur le budget général.
En exécution, les dépenses nettes du budget des Charges communes représentent près du tiers des dépenses nettes du budget général. En effet, les crédits pour charges de pension, répartis entre les différents fascicules budgétaires dans la loi de finances initiale, sont transférés en cours de gestion sur le budget des Charges communes, qui inclut les chapitres d'imputation de la dépense.
ÉVOLUTION DU BUDGET DES CHARGES COMMUNES
(charges nettes de remboursements et dégrèvements)
1997 |
1998 |
1999 |
2000 |
2001 |
LFI 2002 |
PLF 2003 | |
I.- Budget des Charges communes (a) (en milliards d'euros) |
|||||||
1) Crédits initiaux |
61,23 |
60,47 |
57,01 |
56,53 |
53,87 |
54,27 |
56,99 |
2) Crédits ouverts (b) |
83,60 |
85,32 |
79,58 |
77,39 |
79,15 |
- |
- |
3) Dépense nette |
83,73 |
84,41 |
78,69 |
77,65 |
79,08 |
- |
- |
II.- Part des Charges communes dans le budget général (en pourcentage) |
|||||||
1) Crédits initiaux |
25,4% |
24,8% |
22,2% |
22,0% |
20,4% |
20,2% |
20,6% |
2) Crédits ouverts (b) |
32,2% |
32,1% |
29,0% |
28,1% |
28,0% |
- |
- |
3) Dépense nette |
33,2% |
33,1% |
29,9% |
29,6% |
29,4% |
- |
- |
(a) Hors remboursements et dégrèvements d'impôts (chapitres 15-01 et 15-02) qui s'élèvent à 62,7 milliards d'euros dans la loi de finances initiale pour 2002 et atteindraient 62, 6 milliards d'euros en 2003.
(b) Dont le transfert sur le budget des Charges communes, en cours de gestion, des crédits de pension inscrits en loi de finances initiale sur les différents budgets.
CHARGES COMMUNES :
RÉPARTITION DES CRÉDITS BRUTS PAR TITRE ET PAR PARTIE
(en millions d'euros)
Part dans les crédits bruts 2003 |
NATURE DE LA DÉPENSE |
LFI 2002 |
PLF 2003 |
Écart |
TITRE I - Dette publique et dépenses en atténuation de recettes |
||||
34,0 |
Partie 1 : Dette négociable à long, moyen ou court terme |
38.839,7 |
40.690,0 |
+ 4,8% |
0,5 |
Partie 2 : Dette non négociable, dette à vue |
671,3 |
551,5 |
- 17,9% |
0,0 |
Partie 3 : Charges diverses résultant de la gestion de la dette et frais de trésorerie |
45,0 |
36,3 |
- 19,4% |
0,1 |
Partie 4 : Garanties |
125,3 |
92,7 |
- 26,0% |
52,5 |
Partie 5 : Dépenses en atténuation de recettes |
62.940,0 |
62.793,2 |
- 0,2% |
87,1 |
Total pour le titre I |
102.621,3 |
104.163,6 |
+ 1,5% |
TITRE II - Pouvoirs publics |
||||
0,7 |
Total pour le titre II |
779,1 |
810,7 |
+ 4,1% |
TITRE III - Moyens des services |
||||
0,7 |
Partie 1 : Personnel. Rémunérations d'activité |
445,0 |
875,0 |
+ 96,6% |
5,1 |
Partie 2 : Personnel. Pensions et allocations |
5.901,0 |
6.099,5 |
+ 3,4% |
3,3 |
Partie 3 : Personnel en activité et en retraite. Charges sociales |
4.304,0 |
3.992,0 |
- 7,2% |
0,2 |
Partie 7 : Dépenses diverses |
86,0 |
244,7 |
+ 184,5% |
9,4 |
Total pour le titre III |
10.736,0 |
11.211,1 |
+ 4,4% |
TITRE IV - Interventions publiques |
||||
0,1 |
Partie 1 : Interventions politiques et administratives |
146,0 |
108,7 |
- 25,5% |
1,3 |
Partie 4 : Action économique. Encouragements et interventions |
1.510,8 |
1.503,2 |
- 0,5% |
1,3 |
Partie 6 : Action sociale. Assistance et solidarité |
1.186,7 |
1.606,2 |
+ 35,3% |
2,7 |
Total pour le titre IV |
2.843,5 |
3.218,0 |
+ 13,2% |
99,9 |
Total pour les dépenses ordinaires |
116.979,9 |
119.403,4 |
+ 2,1% |
TITRE VI - Subventions d'investissement accordées par l'État |
||||
0,13 |
Partie 8 : Investissements hors de la métropole |
0,0 |
151,0 |
n.s. |
0,13 |
Total pour le titre VI |
0,0 |
151,0 |
n.s. |
0,13 |
Total pour les dépenses en capital |
0,0 |
151,0 |
n.s. |
100,0 |
Total pour les Charges communes |
116.979,9 |
119.554,4 |
+ 2,2% |
Pour mémoire : |
||||
52,3 |
remboursements et dégrèvements |
62.710,0 |
62.563,2 |
- 0,2% |
47,7 |
crédits nets de remboursements et dégrèvements |
54.269,9 |
56.991,2 |
+ 5,0% |
COMPTES SPÉCIAUX DU TRÉSOR RATTACHÉS AUX CHARGES COMMUNES
(en millions d'euros)
LFI 2002 |
PLF 2003 | |
1. Compte d'affectation spéciale n° 902-33 |
||
Recettes |
1.238,4 |
0,0 |
Dépenses |
1.238,4 |
0,0 |
Charge nette |
0,0 |
0,0 |
2. Compte de commerce n° 904-22 |
||
Recettes |
2.500,0 |
2.574,0 |
Dépenses |
2.300,0 |
2.339,0 |
Charge nette |
- 200,0 |
- 235,0 |
Autorisation de découvert |
1.700,0 |
1.700,0 |
I.- L'AJUSTEMENT DU PROGRAMME « GESTION DE LA DETTE ET DE LA TRÉSORERIE DE L'ÉTAT »
A l'occasion de la loi de finances initiale pour 2002, le Gouvernement a proposé au Parlement d'examiner les crédits relatifs à la charge de la dette dans le cadre d'un « programme », au sens de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances.
Cette loi organique a été publiée au Journal officiel du 2 août 2001, mais ses principales dispositions en matière budgétaire - à savoir l'organisation du budget de l'État autour de « programmes » visant à substituer une logique d'objectifs à l'actuelle logique de moyens - n'entreront en vigueur que dans le cadre de la loi de finances pour 2006. Dans l'intervalle, il appartient aux administrations de s'interroger sur la définition des objectifs assignés aux actions publiques qu'elles mettent en _uvre et sur la façon d'en mesurer les résultats.
Le choix du Gouvernement répond à la nécessité de clarifier les objectifs qui peuvent être fixés au gestionnaire de la dette par l'autorité politique responsable, à savoir le ministre chargé des finances, avec l'approbation du Parlement.
Naturellement, la dette est bien, pour l'essentiel, le résultat des déficits votés par le Parlement puis exécutés par le Gouvernement. En ce sens, elle n'est conçue que comme un « résidu » de l'action publique et, de ce fait, se trouve généralement écartée des débats parlementaires.
Lorsque s'ouvre, pourtant, un débat sur l'endettement de l'État, il répond surtout à la problématique du poids de la dette et de la dynamique de l'endettement. La mise en avant d'un « effet boule de neige », situation dans laquelle la croissance de la dette devient proliférante à cause d'un déficit excessif et du niveau trop élevé des taux d'intérêt, appelle, certes, une action correctrice de la part des responsables politiques, essentiellement par le biais de la réduction du déficit. Mais c'est oublier que la dette elle-même peut être un objet de politique publique, au même titre que les décisions antérieures qui lui ont donné naissance.
Il existe, en effet, de nombreuses stratégies d'endettement, plus ou moins sophistiquées, plus ou moins risquées, plus ou moins coûteuses, etc. L'autorité politique est légitimement fondée à déterminer laquelle de ces politiques elle souhaite voir appliquer par les administrations chargées du financement de l'État.
La « seconde esquisse » du programme relatif à la gestion de la dette et de la trésorerie de l'État repose, comme la première, sur trois éléments fondamentaux :
- les principes généraux qui gouvernent la politique d'endettement et de gestion de la dette de l'État : simplicité de l'offre de titres, organisée autour des trois grandes catégories bien connues que sont les BTF, les BTAN et les OAT ; liquidité du marché, afin d'attirer les investisseurs et de leur donner la possibilité d'effectuer des arbitrages ; transparence, avec la mise en _uvre d'une procédure de vente des titres qui assure l'égalité de tous les investisseurs et leur mise en concurrence ;
- les objectifs assignés à la gestion de la dette et de la trésorerie de l'État, qui sont au nombre de trois : limiter le montant du compte du Trésor à la Banque de France en fin de journée ; placer les excédents ponctuels de trésorerie au meilleur prix ; réduire la durée de vie moyenne de la dette négociable. Chacun de ces objectifs est assorti d'un indicateur de résultats ;
- les instruments susceptibles d'être mis en _uvre par le gestionnaire de la dette, l'Agence France Trésor, « service à compétence nationale » placé sous l'autorité hiérarchique du directeur du Trésor. Il s'agit :
_ du programme d'emprunt de l'État, qui est ici présenté officiellement pour la deuxième fois dans un document budgétaire établi par le Gouvernement. Il s'agit là d'une anticipation des dispositions de la loi organique relative aux lois de finances du 1er août 2001, qui prévoit qu'un tableau de financement sera inclus dans l'article d'équilibre et voté en même temps que le classique tableau d'équilibre ;
_ du programme de swaps de taux d'intérêt qui a été engagé à la fin de l'année 2001 mais suspendu le 3 septembre 2002, à titre provisoire, en raison de conditions de marché jugées trop défavorables ;
_ des procédures et instruments nécessaires à la gestion de la trésorerie (opérations de pension, prêts et emprunts « en blanc » sur le marché interbancaire ou auprès d'autres États membres de la zone euro. La qualité de la prévision quotidienne de trésorerie est un facteur important d'amélioration des résultats et la nouvelle convention de compte conclue avec la Banque de France devrait y contribuer ;
_ des outils et procédures de contrôle des risques, ainsi que du développement de l'information restituée par la comptabilité sur les activités de l'Agence.
La stratégie de financement proposée à l'examen du Parlement consiste à réduire à 5 ans et 4 mois (au lieu de 5 ans et 10 mois actuellement) la durée de vie moyenne de la dette négociable, afin de bénéficier de taux d'intérêt moins élevés.
Cette stratégie est effectivement susceptible de procurer des économies sur la charge de la dette, au prix d'un risque légèrement plus élevé que si la durée de vie constatée en 2000 était conservée (6 ans et 2 mois).
La « seconde esquisse » de programme inclut deux développements nouveaux appelés, vraisemblablement, à être approfondis ultérieurement :
- une présentation de la charge de la dette en droits constatés, en sus de la présentation classique en comptabilité de caisse. L'approche en engagements répartis pro rata temporis permet de faire apparaître dès l'apparition du fait générateur certaines charges ou ressources qui n'auront d'impact budgétaire que sur un exercice ultérieur. Il en est ainsi des ressources et des charges générées par les instruments financiers à terme, notamment les swaps de taux d'intérêt évoqués précédemment. Votre Rapporteur spécial rappelle cependant que le vote du Parlement ne porte que sur les crédits, qui retracent la charge de la dette en comptabilité de caisse ;
- une première approche de la problématique spécifique du « plafond d'emprunt », dont la loi organique relative aux lois de finances exige qu'il soit, à compter de 2006, fixé dans la loi de finances de l'année. La question la plus délicate à trancher tient à la définition d'une marge de man_uvre qu'il conviendrait d'accorder au pouvoir exécutif, par rapport au plafond qui pourrait être déduit directement de la lecture du tableau de financement, pour permettre au gestionnaire de la dette d'« absorber » des fluctuations de marché sur lesquelles le Gouvernement n'a que très peu de prises.
Votre Rapporteur spécial insiste sur le fait que l'activité de contrôle des risques doit connaître des développements importants. La suspension du programme de swaps n'est présentée que comme temporaire et, d'ailleurs, les swaps conclus en 2001 et au premier semestre de 2002 continuent à « vivre » et à générer des flux financiers. Les opérations nouvelles dans lesquelles s'est lancé le Trésor génèrent des risques nouveaux et les stratégies de financement doivent être finement ajustées sur l'état des marchés et les prévisions effectuées quant à leur évolution à moyen terme. L'information du Parlement sur le niveau de risque découlant des stratégies retenues pourra être utilement renforcée.
II.- LES GRANDS BLOCS DE CRÉDITS DANS LE PROJET DE BUDGET 2003 DES CHARGES COMMUNES
Trois grands blocs structurent le budget des Charges communes, alors que l'ensemble des autres crédits ne représente que 4% de leur montant total :
- les remboursements et dégrèvements : 52,3% du total ;
- la charge de la dette : 34,5% du total ;
- les dépenses de personnel : 9,2% du total.
Les remboursements et dégrèvements étant à la fois des dépenses et des recettes, leur montant pour l'exercice en cours (2002) fait l'objet d'une révision dans le cadre du présent projet, comme pour toutes les recettes. Cette évaluation révisée est une base plus pertinente que l'évaluation retenue par la loi de finances initiale pour juger des prévisions de dépenses présentées dans le projet de loi de finances pour 2003.
Les remboursements et dégrèvements atteindraient 60,6 milliards d'euros en 2002 (évaluation révisée) et 62,6 milliards d'euros en 2003, augmentant ainsi de 3,2% d'une année sur l'autre. Il y aurait une certaine « reprise » des remboursements et dégrèvements puisque l'évaluation révisée relative à 2002 fait apparaître un léger recul (- 0,3%) par rapport aux dépenses constatées pour 2001 (60,8 milliards d'euros). Il faut voir dans ces évolutions respectives l'effet du fort ralentissement de la croissance observé en 2001 et 2002, qui pèse notamment sur les remboursements de TVA.
Les remboursements et dégrèvements représenteraient, en 2003, 20,1% des ressources fiscales brutes, après 20% en 2002. Il s'agit toujours d'un niveau très supérieur au niveau moyen observé depuis 1990.
ÉVOLUTION GÉNÉRALE DES REMBOURSEMENTS ET DÉGRÈVEMENTS
(en milliards d'euros)
Années 1995 à 2001 : résultats d'exécution ; année 2002 : évaluation révisée
Source : lois de règlement et PLF
· Les remboursements de TVA progressent de 4,8% par rapport à 2002. Ils atteindraient ainsi 33 milliards d'euros.
Il semble toujours aussi difficile d'évaluer correctement les remboursements de TVA à venir. L'observation des résultats d'exécution des années précédentes montre, d'ailleurs, des à-coups sensibles, une progression de 1,2% ayant été enregistrée en 1997, puis 28,1% en 1998, 2,9% en 1999, 9,8% en 2000, 9,9% en 2001 et enfin 0,5% dans l'évaluation révisée pour 2002 et 4,8% dans l'évaluation initiale pour 2003.
Pourtant, le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie estime qu'« un lien a pu être établi entre l'évolution des remboursements de crédits de TVA et l'évolution des investissements et des exportations ». Sur cette base, le ministère indique que l'évaluation révisée pour 2002 « repose sur la prise en compte de la relative faiblesse de l'évolution des exportations et des investissements observée sur la fin 2001 et le premier semestre 2002 ». Pour 2003, la progression des crédits plus soutenue que l'année précédente « résulte essentiellement de l'augmentation de l'activité économique (hypothèses d'évolutions relativement élevées des exportations et des investissements) ».
· Les dégrèvements au titre des impôts locaux diminueraient de 0,1% par rapport à 2002, après une diminution de 0,3% en 2002 par rapport à 2001. Ils atteindraient 10,1 milliards d'euros.
Les dégrèvements de taxe professionnelle représentent plus de 67% des dégrèvements d'impositions locales. Les réformes du dispositif de plafonnement en fonction de la valeur ajoutée, en 1995 et 1996, ont mis deux à trois ans avant de produire leur plein effet. Les dépenses budgétaires et les ordonnancements effectués par la DGI diminuent à un rythme modéré depuis 1999 (- 1% à - 3%), mais les ordonnancements connaîtraient un recul plus marqué en 2003, évalué à 5,9%. La poursuite de la réforme de la taxe professionnelle engagée dans la loi de finances initiale pour 1999 exerce un fort effet modérateur sur les dégrèvements issus du plafonnement par rapport à la valeur ajoutée : les dépenses seraient réduites de ce fait de 487,8 millions d'euros. Il en est de même pour les dégrèvements autres que le plafonnement, qui seraient réduits à ce titre de 91,5 millions d'euros. L'effet de l'« évolution spontanée » (+ 448,3 millions d'euros) ne parviendrait pas à compenser ce phénomène.
L'année 2000 a été marquée par le fort impact, sur les dégrèvements de taxe d'habitation, de la suppression de la part régionale de la taxe d'habitation décidée par la loi de finances rectificative du 13 juillet 2000. En 2001, la compensation par l'État de la perte de recettes pour les collectivités locales a pris sa forme définitive, par l'intermédiaire d'une dotation imputée sur le budget de l'Intérieur, et le montant des dégrèvements de taxe d'habitation a chuté de près d'un tiers. Pour autant, les prévisions de dépenses relatives à 2002 et 2003 suggèrent que les dégrèvements de taxe d'habitation semblent s'installer sur un sentier de croissance régulier de + 4% par an, malgré le dispositif de « gel » des taux instauré par la réforme de la taxe d'habitation de juillet 2000.
· Les restitutions d'impôt sur les sociétés s'élèveraient à 9,1 milliards d'euros, soit une progression de 4%, légèrement supérieure à celle prévue pour 2002 (+ 2,4%). Le ralentissement économique de 2001-2002 limite la capacité de prévision sur les trois principaux postes de dépenses :
- les remboursements au sens strict (restitution de l'impôt trop perçu) pourraient pâtir très directement du ralentissement économique. Confrontées à un environnement plus hostile, les entreprises pourraient vouloir optimiser leur trésorerie et limiter au strict minimum le montant des acomptes versés à l'État, donc, par voie de ricochet, le montant des restitutions susceptibles d'être demandées sur la base de l'impôt effectivement dû. Cet effet serait plus intense en 2002 qu'en 2003, le retour de l'économie sur son sentier de croissance potentielle pouvant, au contraire, inciter les entreprises à élargir un peu les « marges de sécurité » qu'elles se donnent vis-à-vis de l'administration fiscale par le biais du niveau des acomptes ;
- les remboursements de crédits d'impôts semblent devoir se situer sur une tendance durablement déclinante. La reprise de la croissance, en 2003, devrait permettre à certaines sociétés de réduire ou de résorber leurs déficits, ce qui, en dégageant des bénéfices imposables, devrait avoir un impact sur le volume d'impôt perçu, donc le volume des restitutions à opérer ;
- les transferts d'acomptes, qui représentent près de 18% du montant total des restitutions d'IS, sont très liés au développement des restructurations et des fusions d'entreprises. Ils pourraient ralentir en 2002 et se stabiliser en 2003 sous l'effet des incertitudes afférentes à l'environnement économique.
· Entre la loi de finances rectificative pour 2002 et le projet de loi de finances pour 2003, la charge nette de la dette augmenterait de 757 millions d'euros, soit 2%, pour s'établir à 38,1 milliards d'euros. La charge nette de la dette négociable à moyen et long terme s'accroîtrait de 2% alors que celle de la dette négociable à court terme progresserait de 31%. Ceci reflète une politique délibérée d'accroissement de l'endettement à court terme, qui vise à profiter de taux d'intérêt qui sont structurellement d'autant plus faibles que l'échéance est rapprochée. La charge nette de la dette non négociable reculerait de 51,2%, du fait de l'achèvement du transfert à La Poste de la libre gestion des dépôts des particuliers sur les CCP. Le résultat des opérations de swaps (retracé sur le compte de commerce n° 904-22) serait positif et allégerait de ce fait la charge de la dette de 235 millions d'euros.
LES COMPOSANTES DE LA CHARGE DE LA DETTE
(en milliards d'euros)
2001 |
LFR 2002 |
PLF 2003 | |
Dette négociable à moyen et long terme |
33,89 |
34,29 |
34,97 |
Dette négociable à court terme |
2,14 |
2,47 |
3,23 |
Dette non négociable |
1,12 |
1,14 |
0,55 |
Charges diverses |
0,06 |
0,04 |
0,04 |
A déduire : |
|||
- recettes diverses |
0,52 |
0,44 |
0,50 |
- résultat des swaps |
- |
0,20 |
0,24 |
Total Charge nette de la dette |
36,68 |
37,30 |
38,05 |
La rupture avec la première moitié des années 1990 est confirmée : la progression annuelle de la charge nette de la dette est égale à 660 millions d'euros environ depuis 1997, alors qu'elle atteignait fréquemment 2 à 3 milliards d'euros, auparavant.
En effet, depuis plusieurs années, les charges d'intérêt ont enregistré les effets bénéfiques de la baisse du déficit et de la baisse des taux. Sur ce dernier point, le renouvellement progressif de la dette amène à remplacer des titres anciens, émis à taux élevés, par des titres nouveaux, émis à des taux plus faibles, qui génèrent donc de moindres charges d'intérêt. Cet « effet taux » dure tant que subsiste un décalage entre le taux moyen de la dette et le taux moyen du marché.
Lorsque l'effet taux s'affaiblit, la charge de la dette est gouvernée par l'« effet volume », qui résulte de l'accroissement de l'encours, découlant principalement du déficit budgétaire. Un déficit de 30 milliards d'euros par an financé au taux moyen de 5% génère une charge d'intérêt supplémentaire de 1,5 milliard d'euros chaque année. Cette évaluation sommaire rappelle combien est nécessaire une réduction continue du déficit budgétaire, réduction qui reste l'unique moyen de maîtriser vraiment, sur le long terme, la charge de la dette.
· Le besoin de financement de l'État est constitué, à titre principal, du déficit budgétaire et du montant des amortissements de titres arrivés à échéance. En 2003, le déficit budgétaire s'établirait à 44,6 milliards d'euros, le montant des titres arrivant à échéance serait égal à 67,9 milliards d'euros. Avec l'amortissement d'engagements divers de l'État, pour 1 milliard d'euros, il apparaît que le besoin de financement de l'État s'élèvera à 113,5 milliards d'euros.
Ce besoin serait couvert à hauteur de 111,4 milliards d'euros par des émissions de titres à long et moyen terme (OAT et BTAN). Par ailleurs, la mise à disposition progressive de La Poste des fonds des particuliers aux CCP continuerait de modifier la composition des ressources de financement du Trésor, de même que l'utilisation par le Fonds de réserve pour les retraites de ses ressources, actuellement déposées au Trésor : les dépôts des correspondants diminueraient de 10,4 milliards d'euros. Les émissions nettes de BTF (principal instrument de financement à court terme) progresseraient de 12,5 milliards d'euros environ.
· Une dotation provisionnelle de 875 millions d'euros est demandée sur le chapitre 31-94 « Mesures générales intéressant les agents du secteur public », afin de financer les mesures de revalorisation du point d'indice de la fonction publique à intervenir en décembre 2002.
Votre Rapporteur spécial rappelle que lorsque M. Jean-Paul Delevoye, ministre de la Fonction publique, de la réforme de l'État et de l'aménagement du territoire, a reçu les représentants des sept organisations syndicales de la fonction publique, du 30 septembre au 3 octobre 2002, il a précisé que le dossier salarial pour la période 2003-2004 donnerait lieu « dans un premier temps » à une première « réunion de contact et de méthode » avant la fin de l'année
· Les charges de pension (chapitre 32-97) passent de 5,9 milliards d'euros à 6,1 milliards d'euros. Cependant, les dotations inscrites en loi de finances initiale sur le chapitre 32-97 du budget des Charges communes ne sont pas représentatives des dépenses effectives de pension : le chapitre est abondé en gestion par le transfert des crédits inscrits sur de nombreuses sections ministérielles.
La charge totale du régime de retraite des fonctionnaires civils et militaires pour le budget général peut être évaluée à 24,9 milliards d'euros en 2003, ce qui correspond à un taux de cotisation implicite de 51,9%.
Les crédits destinés à la compensation des ressources et des charges des régimes de sécurité sociale diminuent de 431 millions d'euros et s'établissent à 2,3 milliards d'euros. Trois phénomènes différents interviennent pour expliquer cette évolution :
- les prévisions relatives aux paramètres gouvernant la détermination des versements de compensation aboutiraient à minorer le versement de l'État de 84 millions d'euros ;
- l'abaissement de 30% à 27% du taux de surcompensation procurerait une économie de 275 millions d'euros ;
- la prise en compte des transferts au titre du Fonds de solidarité vieillesse dans les calculs de compensation réduirait de 72 millions d'euros le montant des crédits à ouvrir.
· Les crédits pour cotisations et prestations sociales atteindraient 1.705 millions d'euros en 2003, en augmentation de 119 millions d'euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2002. La majeure partie correspond à l'apurement des cotisations familiales dues par l'État à la Caisse nationale des allocations familiales (1.653 millions d'euros en 2003).
III.- LES AUTRES AJUSTEMENTS DE CRÉDITS
En 2003, le Gouvernement propose d'inscrire sur le fascicule des Charges communes les crédits destinés à financer l'aide à la reconversion de l'économie polynésienne à la suite de l'arrêt des essais nucléaires et des activités du Centre d'expérimentation du Pacifique (CEP). Le transfert porte sur 151 millions d'euros en autorisations de programme et crédits de paiement.
De même, le budget des Charges communes retracerait désormais les crédits nécessaires au versement des indemnités des représentants français au Parlement européen, jusqu'ici inscrits sur le budget des Affaires étrangères. Le transfert représente 8,7 millions d'euros.
Les crédits pour charges de garantie (chapitre 14-01) diminuent de 32,6 millions d'euros et atteignent 92,7 millions d'euros. En particulier, les procédures publiques gérées par la COFACE nécessiteraient 61 millions d'euros, aucune dotation n'étant demandée pour l'assurance-crédit à l'exportation compte tenu de l'excédent attendu pour cette procédure.
Les crédits des pouvoirs publics (titre II) sont portés à 811,7 millions d'euros et augmentent ainsi de 4,1%. Le facteur principal de cette progression est le doublement de la dotation demandée au profit de la Présidence de la République, qui est engagée depuis plusieurs années dans un processus progressif - et parfois mal compris - de mise à niveau des crédits initiaux, visant à refléter de façon plus précise qu'auparavant le véritable coût de la Présidence.
Les crédits pour dépenses accidentelles (chapitre 37-95) passent de 41 millions d'euros dans la LFI 2002 à 191 millions d'euros dans le PLF 2003. On sait, cependant, que cette dotation est parfois mise à profit pour « gager », au cours de la discussion parlementaire, des majorations décidées par le Gouvernement sur d'autres chapitres budgétaires. Pour leur part, les crédits pour dépenses éventuelles (chapitre 37-94) sont stabilisés à 45 millions d'euros.
Les crédits pour primes d'épargne-logement versées par l'État (chapitre 44-91, article 30) seraient quasiment stabilisés, à 1.480 millions d'euros. Le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie estime que l'« attractivité du produit » épargne logement devrait contrebalancer la venue à terme des comptes et plans d'épargne logement ouverts dans les années 1998 et 1999. Il reste cependant très difficile d'évaluer précisément le comportement des souscripteurs de comptes et des emprunteurs, ce qui explique les fréquents décalages entre les prévisions des lois de finances et les dépenses effectives (« excédent » de crédits de 167,7 millions d'euros en 1999 mais dépassement de crédits de 294 millions d'euros en 2000 et de 205,1 millions d'euros en 2001).
Les versements de l'État à divers régimes obligatoires de sécurité sociale (chapitre 46-90) occasionneraient, en 2003, une dépense évaluée à 1.257,7 millions d'euros au lieu de 880,2 millions d'euros en 2002. Les deux tiers de cette augmentation sont imputables à la subvention de l'État au BAPSA, qui est quasiment doublée pour faire face à une dégradation structurelle des conditions de financement du BAPSA. Par ailleurs, la subvention d'équilibre au régime des Mines est majorée de 123 millions d'euros, notamment en raison de la diminution des sommes reçues des autres régimes au titre de la compensation spécifique, de la diminution des masses de cotisations et, en sens inverse, d'une légère érosion des prestations servies.
CHAPITRE PREMIER :
PERSPECTIVE 2006 :
LA RECONDUCTION DU PROGRAMME RELATIF À LA
GESTION DE LA DETTE ET DE LA TRÉSORERIE DE L'ÉTAT
(en milliards d'euros)
LA DETTE DE L'ÉTAT EN 2003 : ENCOURS, CHARGE, GESTION I.- HYPOTHÈSES RETENUES - Déficit à financer (en exercice) : 44,6 (46,0 en LFR 2002) - Amortissements de titres à moyen et long terme : 67,9 (59,3 en LFR 2002) - Émissions à moyen et long terme : 111,4 (85,0 en LFR 2002) - Émissions nettes à court terme (BTF) : + 12,5 (+ 25,2 en LFR 2002) - Taux d'intérêt moyens : - court terme (BTF) en 2003 : 3,9% (LFI 2002 : 4,1%) - moyen terme (BTAN) en 2002 : 4,6% (LFI 2002 : 4,6%) - long terme (OAT) en 2002 : 5,0% (LFI 2002 : 5,3%) II.- ÉVOLUTION ATTENDUE - Encours nominal de dette constaté fin 2001 : 723,7 = 49,4% du PIB dont dette négociable : 653,4 (90,3% du total) - Projections : - 773,8 fin 2002 (51,4% du PIB) - 819,5 fin 2003 (52,3% du PIB) - Charge nette : - constatée en 2001 : 36,7 (solde primaire : + 4,7) - prévue en 2002 : 37,3 (LFR) (solde primaire : - 8,5) - prévue en 2003 : 38,1 (solde primaire : - 6,3) (Après effet du programme de swaps : solde positif de 200 millions d'euros en 2002 et de 235 millions d'euros en 2003) III.- OBJECTIFS DE LA GESTION · Limiter le montant du compte du Trésor à la Banque de France en fin de journée · Placer les excédents ponctuels de trésorerie au meilleur prix · Minimiser à moyen terme la charge de la dette, dans des conditions de sécurité absolues |
CHARGE DE LA DETTE
(en millions d'euros)
1998 |
1999 |
2000 |
2001 |
LFR 2002 |
PLF 2003 | |
1ère PARTIE - DETTE NÉGOCIABLE : |
||||||
11-05 Emprunts d'État et OAT |
25.218,06 |
25.841,36 |
27.445,80 |
28.614,74 |
29.084,14 |
30.251,00 |
11-06 Bons du Trésor à court et moyen terme |
11.087,94 |
9.602,52 |
9.804,46 |
9.521,72 |
9.932,52 |
10.439,00 |
- art. 10 : BTF |
1.799,11 |
1.102,37 |
1.882,17 |
2.135,46 |
2.467,00 |
3.231,00 |
- art. 20 : BTAN |
9.288,84 |
8.500,15 |
7.922,28 |
7.386,26 |
7.465,52 |
7.208,00 |
- art. 30 : Autres bons négociables |
- |
- |
- |
- |
- |
- |
Total Première partie |
36.305,99 |
35.443,89 |
37.250,25 |
38.136,45 |
39.016,66 |
40.690,00 |
2ème PARTIE - DETTE NON NÉGOCIABLE, DETTE À VUE : |
||||||
12-01 Intérêts des comptes de dépôt au Trésor |
1.196,07 |
1.272,31 |
1.104,72 |
690,81 |
632,00 |
143,00 |
- art. 10 : comptes de dépôts |
49,87 |
77,38 |
49,46 |
55,12 |
201,00 |
58,00 |
- art. 20 : rémunération des avoirs CCP |
1.146,20 |
1.194,93 |
1.055,26 |
635,69 |
434,00 |
85,00 |
12-02 Bons du Trésor non négociables |
89,38 |
68,74 |
86,61 |
103,72 |
231,00 |
100,00 |
12-03 Rémunération des dépôts de divers instituts |
270,98 |
214,33 |
229,97 |
319,62 |
271,56 |
306,29 |
12-05 Prise en charge par l'État de la dette de divers organismes |
41,15 |
17,04 |
11,34 |
4,85 |
5,76 |
2,18 |
12-07 Remboursement de créances afférentes à la distribution d'actions ; service d'emprunts, d'annuités et d'intérêts divers (a) |
6,46 |
5,56 |
suppr. |
- |
- |
- |
Total Deuxième partie |
1.604,02 |
1.577,98 |
1.432,65 |
1.119,00 |
1.143,35 |
551,47 |
3ème PARTIE - CHARGES DIVERSES |
||||||
13-01 Charges diverses résultant de la gestion de la dette |
56,45 |
68,31 |
10,41 |
7,81 |
- |
7,50 |
(dont charges FSR) (b) |
(53,01) |
(60,90) |
(5,53) |
(0,37) |
- |
- |
13-03 Frais divers de trésorerie (hors FSC) (b) |
171,69 |
209,18 |
34,34 |
48,25 |
39,00 |
28,76 |
(pour mémoire : charges FSC) |
(198,14) |
(0,00) |
(0,00) |
(0,00) |
- |
- |
Total Troisième partie (hors charges FSC) (b) |
228,14 |
277,49 |
44,74 |
56,06 |
39,00 |
36,26 |
Charge brute de la dette (hors charges FSC) (b) |
38.138,16 |
37.299,37 |
38.727,65 |
39.311,51 |
40.199,00 |
41.277,73 |
Pour mémoire : charge brute y compris FSC (b) |
38.336,31 |
37.299,37 |
38.727,65 |
39.311,51 |
- |
- |
A déduire : Recettes d'ordre (hors FSC) (b) |
3.381,33 |
2.591,40 |
3.038,88 |
2.635,38 |
2.702,00 |
2.989,00 |
(pour mémoire : recettes FSC) |
(198,46) |
(0,06) |
(25,72) |
(0,00) |
- |
- |
_ ligne 806 (c) |
3.332,23 |
2.531,25 |
3.018,64 |
2.610,21 |
2.702,00 |
2.989,00 |
- recettes de coupon couru |
2.653,20 |
1.873,30 |
2.449,93 |
2.110,97 |
2.259,00 |
2.492,00 |
- rémunération de la trésorerie Banque de France ; pensions de titres |
512,03 |
502,52 |
533,48 |
455,86 |
443,00 |
497,00 |
- recettes FSR |
60,90 |
67,64 |
12,33 |
8,06 |
- |
- |
- divers |
106,10 |
87,78 |
22,90 |
35,32 |
- |
- |
_ intérêts des avances au FSR (d) |
49,10 |
60,16 |
20,24 |
25,17 |
- |
- |
Charge nette de la dette (hors FSC) (b) |
34.756,83 |
34.707,96 |
35.688,76 |
36.676,13 |
37.497,00 |
38.288,73 |
A déduire : solde du compte n° 904-22 |
- |
- |
- |
- |
200,00 |
235,00 |
Charge nette après swaps |
34.756,83 |
34.707,96 |
35.688,76 |
36.676,13 |
37.297,00 |
38.053,73 |
Écart sur l'année précédente |
+ 832,34 |
- 48,86 |
+ 980,80 |
+ 987,37 |
+ 620,88 |
+ 756,73 |
Variation sur l'année précédente |
+ 2,5% |
- 0,1% |
+ 2,8% |
+ 2,8% |
+ 1,7% |
+ 2,0% |
(a) Dont rémunération des créances de TVA.
(b) FSC : Fonds de stabilisation des changes ; FSR : Fonds de soutien des rentes.
Leur activité donne lieu à des ressources et des charges budgétaires, qui ne font pas l'objet de prévision en loi de finances.
(c) Ligne de recettes non fiscales retraçant les recettes en atténuation des charges de la dette et des frais de trésorerie.
Montant hors FSC (sous-ligne 806-72 jusqu'à 1996 ; ligne 817-02 à partir de 1997).
(d) Ligne 411-02 des recettes non fiscales à partir de 1997.
I.- L'ENDETTEMENT DE L'ÉTAT : UN RÉVEIL DOULOUREUX APRÈS LES ILLUSIONS DE LA PRÉCÉDENTE LÉGISLATURE
A peine supérieur à 20% du PIB en 1980, le ratio d'endettement public a connu quatre phases d'inégale durée pendant les quelque vingt années qui ont suivi. Jusqu'en 1987, la dette progresse assez vivement, augmentant de près de 1,8 point de PIB chaque année : en 1987, elle atteint 33,3% du PIB. La croissance de la dette est plus modérée entre 1987 et 1991 : elle n'augmente que de 0,6 point de PIB par an et atteint 35,8% du PIB à la fin de cette période. En revanche, la dégradation de la situation économique apparue en 1992 et la dégradation concomitante des comptes publics placent la dette sur une trajectoire très dynamique de 1991 à 1997. Sur cette période, son poids augmente, chaque année, de 3,9 points de PIB. Enfin, l'année 1998 marque une notable inflexion, le ratio de dette publique atteignant un maximum « historique » à 59,5% du PIB et engageant ensuite une décrue bienvenue, à hauteur de 0,5 point de PIB en moyenne jusqu'en 2001.
ÉVOLUTION DU POIDS DE LA DETTE PUBLIQUE DANS LE PIB
(en % du PIB)
Source : Comptes nationaux, juillet 2002
Une vision hâtive et superficielle pourrait donc faire croire que le précédent Gouvernement a réussi ce qui semblait impossible depuis des lustres : stabiliser durablement le poids de la dette dans le PIB et assainir en profondeur les comptes publics. C'est oublier, déjà, que le ralentissement de la croissance que connaît la France depuis 2001 et le freinage brutal observé en 2002 ont rompu le processus apparemment vertueux qui semblait avoir pris corps au tournant de 1998.
Ainsi, le rapport économique, social et financier joint au projet de loi de finances pour 2003 indique que la dette publique progresserait de près d'un point de PIB en 2002 et atteindrait de ce fait 58,4% du PIB. En 2003, le ratio d'endettement ralentirait quelque peu sa progression mais s'élèverait quand même à 58,8% du PIB, grâce à la stabilisation du besoin de financement des administrations publiques et au retour de la croissance sur un rythme proche de son potentiel.
Le retournement de conjoncture de 2001-2002 révèle donc au grand jour la vulnérabilité et la fragilité persistantes des finances publiques, qui ont pu être masquées un temps par l'évolution flatteuse d'indicateurs choisis.
En fait, sous la précédente législature, l'ajustement budgétaire a été plus limité que chez nos principaux partenaires européens. De ce fait, la situation financière de l'État reste précaire, un endettement toujours trop dynamique n'étant pas équilibré par un accroissement équivalent de son patrimoine. Sur ce dernier sujet, votre Rapporteur spécial tient à signaler que la publication de la dernière édition des Comptes nationaux, en juillet 2002, amène à réviser un certain nombre de données chiffrées présentées dans le rapport établi à l'été 2002, au nom de la Commission des finances du Sénat, par M. Philippe Marini, son Rapporteur général, sans toutefois en altérer ni l'économie, ni les conclusions ().
Entre 1996 et 2001, le déficit public s'est réduit, en France, de 2,7 points de PIB environ : il est passé de 4,1% à 1,5% du PIB (hors effet des licences UMTS, comptabilisé par les services de la Commission européenne pour 0,1% du PIB au titre de l'année 2001). Chez nos partenaires de la zone euro, la réduction a été nettement plus vigoureuse, puisque le déficit public de la zone a reculé de 3 points de PIB sur la même période. De même, mesuré dans l'ensemble des pays de l'Union européenne, le déficit public a diminué de 3,6 points de PIB.
L'AJUSTEMENT DES FINANCES PUBLIQUES DE 1996 À 2001 :
UNE COMPARAISON FRANCE - EUROPE
(en % du PIB, hors effet des licences UMTS)
France |
Zone euro |
UE-15 | |
Variation du besoin de financement |
- 2,6 |
- 3,0 |
- 3,6 |
- dont besoin de financement conjoncturel |
(- 1,0) |
(- 0,8) |
(- 0,8) |
- dont besoin de financement structurel |
(- 1,6) |
(- 2,2) |
(- 2,8) |
Variation des recettes |
- 0,2 |
- 0,5 |
- 0,4 |
Variation des dépenses |
- 2,8 |
- 3,5 |
- 4,0 |
- dont variation des dépenses d'intérêts |
(- 0,7) |
(- 1,8) |
(- 1,9) |
- dont variation des dépenses hors intérêts |
(- 2,1) |
(- 1,7) |
(- 2,1) |
Source : Commission européenne, Prévisions économiques de printemps, avril 2002
On observera que la réduction du solde conjoncturel est à peu près équivalente dans les trois pays ou zones concernés : 1 point de PIB en France au lieu de 0,8 point de PIB chez nos partenaires européens. Cette similitude est difficile à expliquer au vu des informations présentées dans les comptes nationaux français ou européens. Si l'on s'intéresse à un seul indicateur - peut-être trop réducteur - à savoir la croissance du PIB, il apparaît que la France a connu une croissance en volume légèrement plus élevée, entre 1996 et 2001, que la moyenne de ses partenaires : + 2,8% par an au lieu de + 2,6% par an dans la zone euro ou dans l'ensemble de l'Union européenne. Si l'on considère la croissance en valeur, la hiérarchie s'inverse : l'Union européenne apparaît comme la zone la plus dynamique (+ 5% par an), alors que la zone euro devance assez nettement la France (+ 3,9% au lieu de + 3,5%).
Les évolutions nominales des variables macroéconomiques ont un impact évident sur les déterminants des finances publiques (notamment sur la progression en valeur des recettes), mais il n'en reste pas moins que les évolutions en volume ne sont pas non plus sans influence sur les soldes publics. Par exemple, une croissance en volume élevée peut se traduire par une augmentation dynamique des revenus des agents, qui gonfle le produit de l'impôt sur le revenu grâce au caractère progressif de celui-ci, alors même que l'augmentation nominale des revenus n'intervient pas du fait de l'indexation du barème sur l'indice des prix à la consommation.
Cette analyse est corroborée, qualitativement, par le fait que la part des recettes dans le PIB n'a reculé, en France, que de 0,2 point de PIB sur la période 1996-2001 au lieu de 0,5 point et 0,4 point, respectivement, dans la zone euro et dans l'Union européenne. Cette moindre réduction des recettes a donc facilité la réalisation de l'ajustement global des finances publiques françaises.
La contrepartie de cette « facilité » relative se trouve, naturellement, du côté des dépenses : dans la zone euro, la réduction des dépenses (en proportion du PIB) a contribué à l'ajustement à hauteur de 3,5 points de PIB. Cette contribution monte même à 4 points pour les pays de l'Union européenne pris dans leur ensemble. En revanche, l'effort consenti par les administrations publiques françaises n'a porté que sur 2,8 points de PIB.
Il est vrai que les économies sur les dépenses d'intérêts ont été, en France, beaucoup plus faibles que dans les autres pays européens. En moyenne, le reflux tendanciel des taux d'intérêt et l'effet de sa propagation progressive au stock existant de dette ont allégé les dépenses de 0,7 point de PIB en France, de 1,8 point de PIB en moyenne dans la zone euro et de 1,9 point de PIB dans l'ensemble de l'Union européenne. De ce fait, le recul des dépenses hors intérêt a été plus élevé en France que dans la zone euro (2,1 points de PIB au lieu de 1,7 point), tout en restant égal à la moyenne des 15 pays de l'Union européenne.
En définitive, le solde structurel des administrations publiques a été réduit, certes, mais moins en France que chez ses partenaires : 1,6 point de PIB au lieu de 2,2 points et 2,8 points, respectivement.
De plus, deux éléments confirment que l'assainissement des finances publiques en France a été moins vigoureux qu'ailleurs en Europe :
- calculé selon la méthodologie des services de la Commission européenne, le déficit structurel restait, en 2001, supérieur à celui de la zone euro : 1,7 point de PIB au lieu de 1,5 point. La comparaison avec la moyenne des quinze pays de l'Union européenne est encore plus défavorable, le déficit structurel y étant évalué à 0,9 point de PIB ;
- les dernières « prévisions de printemps » de la Commission européenne, publiées en avril 2002, montrent que le solde structurel devrait se dégrader en France en 2002 (il passerait de 1,7 à 1,9 point de PIB) alors qu'au contraire, il devrait s'améliorer dans la zone euro (où il passerait de 1,5 à 1,2 point de PIB) et rester stable dans l'Union européenne (0,9 point).
· Si, à la fin de l'année 2001, la situation des finances publiques françaises s'est présentée ainsi sous un jour moins favorable que celle des autres pays européens, c'est parce que l'effort de redressement traduit sur le budget de l'État a été moindre, en intensité, que celui consenti par les autres administrations publiques.
REDRESSEMENT COMPARÉ DU BESOIN DE FINANCEMENT DE L'ÉTAT
ET DES AUTRES ADMINISTRATIONS PUBLIQUES (APU)
(en % du PIB, hors soulte France Télécom)
Source : Comptes nationaux (juillet 2002) et PLF 2003
Ainsi, le besoin de financement des administrations publiques s'est réduit de 2,7 points de PIB entre 1996 et 2001, dont 1,4 point au titre de l'État et 1,3 point au titre des autres administrations publiques : l'effort a donc été très équitablement partagé. Au contraire, entre 1993 et 1996, le besoin de financement des administrations publiques s'est réduit de 1,9 point de PIB - il fallait bien absorber l'impact de la récession de 1992-1993, ce qui ne peut se faire, à l'évidence, en une seule année - dont 1,1 point au titre de l'amélioration des finances de l'État et 0,8 point attribuables aux autres administrations. Faisant face à ses responsabilités, le Gouvernement de l'époque avait donc fait porter les deux tiers de l'effort sur le budget de l'État, tout en soutenant par une politique appropriée le redressement des autres administrations.
L'analyse rétrospective de ces évolutions illustre bien les différences de conception dans la conduite des finances publiques entre les deux législatures concernées. Dans un contexte de croissance très favorable - supérieure, en moyenne, aux évaluations de la croissance potentielle de l'économie nationale - le Gouvernement précédent n'a accentué que fort modérément l'assainissement budgétaire de l'État, préférant se reposer sur le bon comportement des autres administrations - déjà excédentaires, sur la période - pour approfondir la réduction du besoin de financement public.
On observera, en particulier, que le besoin de financement de l'État n'a décru que de 0,1 point de PIB par an entre 1999 (2,5% du PIB), 2000 (2,4% du PIB) et 2001 (2,3% du PIB). L'effort principal a porté sur la période 1996-1999 (pour 1,25 point de PIB), ce qui donner à penser que l'aisance retrouvée au plan économique, donc budgétaire, a quelque peu fait oublier la nécessité d'éviter tout relâchement.
· Il n'est donc pas étonnant que la diminution de la dette publique observée entre 1998 et 2001 ne soit que pour une faible part attribuable à l'État.
ÉVOLUTION COMPARÉE DE LA DETTE DE L'ÉTAT
ET DES AUTRES ADMINISTRATIONS PUBLIQUES
(en % du PIB)
Source : Comptes nationaux (juillet 2002) et PLF 2003
La dette de l'État a atteint un maximum en 1998, à 46,0% du PIB. Elle a ensuite décru très légèrement, pour revenir à 45,9% du PIB en 1999 et 45,3% du PIB en 2000. Ce mouvement est renversé dès l'année 2001, puisque l'on observe une augmentation de la dette, qui passe à 45,8% du PIB. Les prévisions pour 2002 et 2003, associées au projet de loi de finances pour 2003, font apparaître un poids de la dette de l'État évalué à 47,4% et 48,3% du PIB, respectivement. C'est dire le caractère précaire du très modeste reflux observé en 1999 et 2000.
Dans le même temps, fortes de leurs excédents retrouvés, les autres administrations publiques ont commencé à réduire le poids de leur dette dans le PIB à compter de l'année 1997, précédant l'État. Dès 1998, la dette était revenue de 15,1% à 13,5% du PIB, c'est-à-dire un recul tout à fait significatif, compte tenu de la « rigidité » des stocks de dette, plus difficiles à maîtriser que les déficits, qui ne sont que des flux. Le rythme de décroissance a légèrement ralenti par la suite, puisque la dette a reflué d'un point de PIB en 1999 (passant donc à 12,5% du PIB).
De 1999 à 2003, selon les estimations rassemblées des Comptes nationaux et du projet de loi de finances pour 2003, la dette des administrations publiques hors État devrait décroître très régulièrement, à hauteur de 0,5 point de PIB chaque année. Elle devrait ainsi être revenue à 10,5% du PIB environ en 2003. Dans le même temps, la dette de l'État suivrait une trajectoire inverse...
La période 1997-2001 n'aura donc vu qu'une inflexion en trompe-l'_il dans la dynamique d'endettement de l'État, qui, d'ailleurs, n'a pu faire illusion que grâce à l'effet mécanique de la croissance sur le ratio d'endettement.
Fort logiquement, l'évolution du ratio d'endettement dépend tout à la fois des évolutions simultanées du numérateur (le montant de la dette) et du dénominateur (le montant du PIB). Il est clair qu'une croissance dynamique, qui gonfle au fil du temps le dénominateur, exerce une influence modératrice sur le ratio d'endettement. Cela a été justement le cas sur la période considérée.
TRAJECTOIRE DE L'ENDETTEMENT DE L'ÉTAT SELON TROIS SCÉNARIOS DE CROISSANCE APRÈS 1996
(en % du PIB)
Source : Comptes nationaux. Estimations : Commission des finances
Si la croissance avait été égale, sur chacune des années 1996-2003, à la croissance potentielle estimée pour l'économie française, à savoir + 2,5% par an, le ratio d'endettement de l'État aurait tout juste été stabilisé entre 1998 et 2001, avant de repartir à la hausse en 2002. Si la croissance avait été égale, sur la même période, à la croissance tendancielle de l'économie française depuis 1978 (valeur moyenne des taux de croissance mesurés en moyenne annuelle), à savoir + 2,1% par an seulement, la ratio d'endettement n'aurait subi qu'une inflexion mais aurait continué à croître sur l'ensemble de la période.
De plus, la simulation présentée dans le graphique ci-avant ne tient compte que de l'effet purement mécanique de la croissance économique sur le dénominateur du ratio d'endettement. Elle ne reflète pas l'impact défavorable, sur le montant de la dette, de la détérioration des comptes publics qui résulterait d'un profil de croissance plus faible, dans les deux cas, que le profil réellement observé. Cet impact conduirait à décaler à nouveau vers le haut les deux courbes figurant les scénarios respectifs de croissance potentielle et de croissance tendancielle.
La forte croissance enregistrée à la fin de la décennie précédente a donc joué comme un euphorisant néfaste quant à l'appréciation de l'état réel des comptes publics en général et de ceux de l'État en particulier. Elle a fait croire, à tort, que la dynamique incontrôlée de la dette (l'effet « boule de neige ») était enfin remis sous contrôle et elle a occulté le fait que le patrimoine net de l'État ne s'est pas accru à due concurrence de son endettement, ce qui traduit un appauvrissement de l'institution publique.
L'endettement public n'est pas une fatalité ni une charge nécessairement improductive qui pèserait sur les capacités de production de la Nation. La théorie de la « règle d'or » des finances publiques affirme, par exemple, que le déficit public n'introduit pas de distorsions et reste supportable s'il est inférieur au montant de l'investissement public. Fondée sur la méfiance vis-à-vis du processus même de l'endettement, elle en reconnaît pourtant la légitimité dès lors qu'il constitue la contrepartie d'une augmentation du patrimoine de la collectivité endettée. Chacun sait, cependant, que le processus réel d'endettement des deux dernières décennies s'écarte largement des conditions, supposées idéales, définies par la « règle d'or »...
Au demeurant, la « règle d'or » n'est pas par elle-même une garantie de saine gestion des finances publiques. Si, par exemple, le coût de la dette est structurellement supérieur au revenu tiré des actifs acquis par endettement, la situation patrimoniale de la collectivité est fondamentalement dégradée. Or, c'est justement le propre des investissements publics de créer ce que la théorie économique appelle doctement les « externalités », qui bénéficient à l'ensemble des agents privés et publics mais a des « taux de retour » directs très faibles pour la collectivité qui réalise ces investissements. Considéré du point de vue de cette collectivité, l'investissement est, en règle générale, une dépense monétaire qui génère d'autres dépenses monétaires (entretien, renouvellement, fonctionnement courant associé à l'investissement, etc.).
Par ailleurs, une règle rigide comme l'est la « règle d'or » occulte malheureusement le débat nécessaire sur le niveau d'endettement optimal d'une collectivité, du secteur public en général et d'une économie dans son ensemble. Votre Rapporteur spécial rappelle, en particulier, que les économistes débattent de façon récurrente de l'effet de l'endettement public sur les marchés financiers, les uns estimant que l'excès d'endettement crée un « effet d'éviction » vis-à-vis des investisseurs privés, les autres indiquant que le marché des titres publics est un support indispensable à la liquidité générale et au bon fonctionnement des marchés, notamment pour le processus de formation des prix des actifs financiers.
Par ailleurs, il est clair qu'une économie qui connaît des taux de croissance suffisamment élevés peut absorber sans dommage l'augmentation de la dette, dès lors que la dynamique de l'endettement reste maîtrisée.
Cependant, il est des situations où la dette peut devenir « proliférante ».
A l'évidence, le ratio d'endettement reste stable dès lors que l'encours de la dette s'accroît au même rythme que le PIB en valeur. Or, sous réserve de la non prise en compte des flux nets de dettes, la variation de la dette découle directement du déficit budgétaire. Celui-ci peut se décomposer en deux parties : d'une part, la charge des intérêts de la dette et, d'autre part, le solde budgétaire dit « primaire » qui est justement défini comme la différence entre le solde total et la charge d'intérêt. Celle-ci peut être calculée en appliquant à l'encours de dette un taux d'intérêt représentatif de son coût moyen, appelé « taux apparent » de la dette.
Il apparaît que, si le taux apparent de la dette est supérieur au taux de croissance en valeur du PIB, la proportion de la dette dans le PIB s'accroît même en présence d'un solde primaire nul : c'est l'effet « boule de neige ». Stabiliser la dette nécessite alors de dégager un solde primaire positif.
Le niveau du solde primaire qui permet de stabiliser le ratio dette / PIB dépend de trois paramètres : le taux de croissance du PIB (r), le coût moyen de la dette (d) et le montant de la dette (de l'année précédente). L'effort budgétaire qu'il convient d'accomplir doit tendre à égaliser le coût moyen de la dette et le taux de croissance du PIB en valeur. Le solde primaire stabilisant est donc déterminé par l'application à l'encours de dette existant du différentiel d - r. Si le solde primaire effectif est inférieur au solde primaire stabilisant, le poids relatif de la dette dans le PIB s'accroît mécaniquement. Si, au contraire, le solde primaire effectif est supérieur au solde primaire stabilisant, la dette devient maîtrisée : sa part dans le PIB se réduira. Il en est de même de la comparaison entre solde effectif et solde stabilisant.
Comme cela était prévisible, l'effort budgétaire à fournir est d'autant plus important que le pays est endetté et que le taux de croissance est faible. Inversement, une accélération de la croissance exerce un effet stabilisateur plus important pour un pays très endetté que pour un pays peu endetté.
La dynamique de la croissance observée sur les années 1997-2000 a considérablement réduit l'effort nécessaire pour que le solde budgétaire excède enfin le solde stabilisant.
Subissant les effets délétères de l'inertie des finances publiques, le solde effectif avait touché un plus bas en 1995, atteignant - 49,2 milliards d'euros. Il s'est ensuite redressé progressivement jusqu'en 2000, où il ne représentait plus que
- 29,2 milliards d'euros. Dans le même temps, le solde stabilisant déclinait - avec quelques à-coups - pour passer de - 19,8 milliards d'euros en 1995 à
- 33,1 milliards d'euros en 2000 ().
Ainsi, en 2000, le solde effectif était devenu supérieur au solde stabilisant : la dette paraissait enfin maîtrisée. Effectivement, le ratio d'endettement de l'État se stabilisait à 48,2% du PIB, niveau identique à celui atteint l'année précédente.
SOLDE STABILISANT ET SOLDE EFFECTIF DEPUIS 1985
Source : Comptes nationaux (juillet 2002) et documents budgétaires
On observe, là encore, la fragilité du résultat - incontestable - obtenu en 2000, puisque dès l'année suivante, le solde effectif est redevenu inférieur au solde stabilisant : la part de la dette de l'État dans le PIB est ainsi passée de 48,2% en 2000 à 49,4% en 2001. La chute de la croissance et le plongeon du déficit conduisent à un écartement des deux courbes, sur le graphique, ci-avant, qu'il revient au Gouvernement actuel de rapprocher à nouveau pour inverser, ensuite, leur position relative, dans la durée.
De plus, l'effet « euphorisant » de la croissance observée pendant la période sous revue n'a pas manqué de perturber quelque peu les conditions de la stabilisation financière. Comme votre Rapporteur spécial l'a déjà démontré pour l'inflexion du ratio d'endettement, le rapprochement du solde effectif et du solde stabilisant a été facilité par une croissance supérieure, en moyenne, aux capacités effectives de l'économie française.
Le graphique ci-après illustre bien que le caractère illusoire de la stabilisation obtenue en 2000. Dans un scénario de croissance potentielle (+ 2,5% par an en moyenne), le solde stabilisant aurait été égal à - 24,8 milliards d'euros en 2000 (au lieu de - 33,1 milliards d'euros), c'est-à-dire un montant supérieur au solde effectif. Dans un scénario de croissance tendancielle (+ 2,1% par an en moyenne), le solde stabilisant aurait été égal à - 22,2 milliards d'euros.
TRAJECTOIRE DU SOLDE STABILISANT SELON TROIS SCÉNARIOS DE CROISSANCE APRÈS 1996
Source : Comptes nationaux et documents budgétaires. Estimations : Commission des finances
De même, à l'exception de l'année 1997, les trajectoires respectives du solde stabilisant et du solde effectif se seraient trouvées écartées par rapport à la trajectoire suivie dans le scénario réel de croissance, traduisant une maîtrise structurelle de la dette bien plus sujette à caution que sa maîtrise apparente.
Cette conclusion est, une nouvelle fois, renforcée par le fait que le graphique ci-avant ne reflète que les effets mécaniques des différents scénarios de croissance sur le solde stabilisant. Or, naturellement, un scénario de croissance moins favorable a également pour effet de dégrader les conditions d'exécution budgétaire, donc de « tirer » vers le bas la courbe représentant le solde effectif et de l'écarter encore plus du solde stabilisant.
Ainsi, malgré une volonté affichée de maîtriser les finances publiques, il n'a pas été possible, sous la précédente législature, de parfaire le redressement entrepris à partir de 1994, dans des conditions économiques assez sensiblement différentes, et de reprendre les rênes d'une dette qui est restée hors de contrôle.
Ce constat est d'autant plus regrettable que l'amélioration apparente de la situation nette des administrations publiques, entre 1997 et 2001, ne traduit pas une augmentation réelle du patrimoine de ces administrations mais plutôt des effets de valorisation des actifs financiers qui sont - les deux dernières années le prouvent à l'envi - éminemment précaires car fondamentalement réversibles.
ÉVOLUTION DE LA SITUATION NETTE DES ADMINISTRATIONS PUBLIQUES
(en % du PIB)
ODAC : organismes divers d'administration centrale.
APUL : administrations publiques locales
ASSO : administrations de sécurité sociale.
Source : Comptes nationaux, juillet 2002
Il est d'ailleurs légitime de considérer les évolutions comparées de l'endettement et du volume des actifs patrimoniaux, car les phénomènes de valeur qui affectent ces actifs ne sont pas la contrepartie (positive ou négative) de flux nouveaux de dettes. Au demeurant, il existe aussi des phénomènes de valeur qui affectent les passifs financiers, donc la situation patrimoniale nette des institutions concernées.
En proportion du PIB, la situation nette des administrations publiques a décru de 1990 à 1998, avec une chute plus sensible en 1993 et, surtout, en 1995. De 1995 à 1998, la valeur nette s'est progressivement infléchie et stabilisée, aux environs de 15% du PIB, avant de remonter fortement en 1999 à 24,6% du PIB, puis de s'éroder à nouveau en 2000 (24,1% du PIB) et 2001 (22,8% du PIB).
Si, comme précédemment, on analyse les évolutions comparées de l'État et des autres administrations publiques rassemblées, on peut mettre en avant plusieurs phénomènes :
- un « décrochement » brutal de la valeur des nettes des APU hors État en 1995, qui revient en un an de 47,1% à 41,3% du PIB ;
- hormis ce décrochement, la valeur nette des APU hors État évolue peu : elle ne varie que de 3,4 points de PIB entre 1990 et 1994 et de 0,9 points de PIB entre 1995 et 1997 ;
- de 1997 à 2001, la valeur nette des APU hors État se place sur une trajectoire ascendante très régulière, passant de 42,2% à 52% du PIB sur la période, soit + 2,5 points de PIB chaque année ;
ÉVOLUTION COMPARÉE DE LA VALEUR NETTE DE L'ÉTAT
ET DES AUTRES ADMINISTRATIONS PUBLIQUES
(en % du PIB)
Source : Comptes nationaux, juillet 2002
La situation patrimoniale de l'État est intéressante à tous égards : il s'agit de la seule administration publique qui a une situation nette négative (- 29,2% du PIB en 2001), à l'exception des ODAC entre 1996 et 1999 (mais pour des montants qui n'ont jamais excédé - 1,2% du PIB). De plus, sa valeur nette augmente très sensiblement en 1999, à hauteur de 7,6 points de PIB, alors que les années précédentes ont connu une diminution moyenne de près de 4 points de PIB chaque année, entre 1992 et 1998.
Les années 2000 et 2001 voient d'ailleurs une reprise de la décrue tendancielle, à un rythme semble-t-il légèrement moins dynamique : - 3 points de PIB en 2000 et - 3,3 points de PIB en 2001. On peut observer que la dégradation de la situation nette en 2000 puis 2001 est plus importante que le montant du besoin de financement de l'État ces mêmes années, suggérant par là même une évolution défavorable du montant des actifs de l'État.
La nature de ces actifs n'est pas indifférente à ces divers phénomènes. En effet, en 2001, plus de 60% des actifs totaux de l'État sont des actifs financiers. Il en est de même, d'ailleurs, pour les ODAC, mais les masses considérées sont cinq fois plus faibles. De plus, les actifs financiers de l'État sont essentiellement des actifs à revenus variables (notamment les participations dans les entreprises du secteur public), donc soumis aux fluctuations de valeur résultant, notamment, de l'évolution des résultats de ces entreprises et, pour celles d'entre elles qui sont cotées sur une place financière, de l'évolution générale des marchés d'actions.
Au contraire, les administrations de sécurité sociale ont un patrimoine financier plus stable que celui de l'État, bien qu'il soit proportionnellement plus important, puisqu'il représente, en 2001, près de 80% de leurs actifs totaux. De par la nature de leurs activités réalisées par ces administrations, ce patrimoine financier est essentiellement constitué de valeurs de placement, valeurs à revenu fixe.
L'analyse de la répartition du patrimoine financier ou non financier entre les différents sous-secteurs d'administration publique fait apparaître clairement que les administrations locales détiennent environ les trois quarts des actifs non financiers publics alors que les actifs financiers sont répartis majoritairement entre l'État (45% du total en 2001) et les administrations de sécurité sociale (33% en 2001).
RÉPARTITION DES ACTIFS NON FINANCIERS RÉPARTITION DES ACTIFS FINANCIERS
DES ADMINISTRATIONS PUBLIQUES DES ADMINISTRATIONS PUBLIQUES
Anneau intérieur : 1996 ; anneau extérieur : 2001
Source : Comptes nationaux, juillet 2002
Pour analyser dans le détail les déterminants de la situation nette des administrations publiques et, plus particulièrement, de l'État, il convient donc de distinguer, à partir des informations retracées dans les comptes nationaux, les différents phénomènes qui affectent les volumes et les valeurs respectifs des actifs et des passifs.
Les actifs non financiers sont soumis à un processus d'obsolescence qui conduit à ce qu'une partie des flux dépensés pour leur acquisition ne sert, en fait, qu'à compenser la dépréciation due à l'obsolescence. La « consommation de capital fixe » vient donc réduire, chaque année, le stock d'actifs non financiers et doit être compensée si l'on veut maintenir constant le volume des actifs. A titre d'exemple, en 2001, les acquisitions d'actifs non financiers par l'État (7,3 milliards d'euros) ont été plus que compensées par la dépréciation résultant de la consommation de capital fixe (7,6 milliards d'euros). Compte tenu de l'impact des réévaluations (+ 4,9 milliards d'euros) et d'un poste « autres » dans les comptes nationaux (+ 0,7 milliard d'euros), les actifs non financiers de l'État sont passés de 140,3 milliards d'euros à 145,7 milliards d'euros entre la fin de l'année 2000 et la fin de l'année 2001.
Sur la période 1996-2001, les actifs non financiers de l'État sont passés de 130,8 milliards d'euros à 145,7 milliards d'euros, soit une augmentation de 14,8 milliards d'euros qui résulte :
- à hauteur de + 43,6 milliards d'euros, des acquisitions brutes ;
- à hauteur de - 43,4 milliards d'euros, de la consommation de capital fixe ;
- à hauteur de + 22,6 milliards d'euros, des phénomènes de réévaluation ;
- à hauteur de - 7,9 milliards d'euros, du poste « autres ».
Les actifs non financiers de l'État représentaient 11% du PIB en 1996, mais seulement 10% en 2001.
Pour les actifs financiers, le concept de « consommation de capital fixe » est inopérant. La variation du stock dépend directement des acquisitions brutes et des réévaluations (ainsi que du poste « autres » des comptes de patrimoine). Il en est de même pour les passifs.
CONTRIBUTIONS À L'ÉVOLUTION DE LA SITUATION NETTE DE L'ÉTAT ()
(en milliards d'euros)
Source : Comptes nationaux, juillet 2002
L'augmentation de la situation nette observée en 1999 (cf. graphique de la page 32) résulte pour l'essentiel d'un « bonus » de 115,6 milliards d'euros affectant à la fois la valeur des actifs (dont, en particulier, une revalorisation de 69,1 milliards d'euros des actifs financiers) et la valeur des passifs (diminution de 39,1 milliards d'euros, qui joue positivement sur la valeur nette de l'État).
Ce phénomène s'est renversé les deux années suivantes, les actifs financiers de l'État subissant des moins-values de 21,2 milliards d'euros et 30,9 milliards d'euros, respectivement, en 2000 et 2001. Les phénomènes de valeur affectant les actifs non financiers et les passifs sont modestes en 2000 et en 2001 : 4,9 milliards d'euros environ pour les actifs non financiers et 4,3 milliards d'euros pour les passifs en 2000 puis 1,1 milliard d'euros en 2001.
En définitive, la situation financière de l'État a semblé s'améliorer sous la précédente législature, mais l'augmentation, en volume, des passifs financiers de l'État n'a pas été contrebalancée par une augmentation équivalente du volume des actifs financiers ou non financiers : l'endettement de l'État s'est traduit essentiellement par un appauvrissement, reflétant le fait que l'excédent des dépenses sur les recettes ne sert, depuis trop longtemps, qu'à financer des dépenses courantes.
*
* *
L'étude de la situation financière de l'État en termes de comptabilité nationale est indispensable, puisqu'elle offre des outils d'analyse portant sur l'ensemble de son actif et de son passif et qu'elle permet également d'appréhender dans un seul cadre conceptuel, à des fins de comparaison, l'ensemble des administrations publiques. Elle ne saurait pourtant remplacer une approche plus strictement budgétaire, qui seule donne la possibilité de comprendre quelles sont les répercussions de l'endettement de l'État sur ce qui fait la substance même de l'autorisation parlementaire, les crédits et les recettes du budget.
Poursuivant la démarche d'innovation engagée dans le précédent projet de loi de finances, le Gouvernement a souhaité renouveler la présentation sous forme de « programme » des activités de gestion de la dette et de la trésorerie de l'État.
La loi organique relative aux lois de finances n° 2001-692 du 1er août 2001 a été publiée au Journal officiel du 2 août 2001, mais ses principales dispositions en matière budgétaire - à savoir l'organisation du budget de l'État autour de « programmes » visant à substituer une logique d'objectifs à l'actuelle logique de moyens - n'entreront en vigueur que dans le cadre de la loi de finances pour 2006. Dans l'intervalle, il appartient aux administrations de s'interroger sur la définition des objectifs assignés aux actions publiques qu'elles mettent en _uvre et sur la façon d'en mesurer les résultats.
Avec le programme « gestion de la dette et de la trésorerie de l'État », on doit se réjouir de voir la direction du Trésor et l'Agence France Trésor, son « bras armé » en matière de financement de l'État, se positionner de façon résolue comme des expérimentateurs anticipés de la loi organique. Ce n'est certes pas par souci de facilité car la « matière » de la dette est complexe, voire aride... C'est justement la vertu de ce programme que de contribuer à clarifier les enjeux et à donner une ossature solide au développement du débat politique.
- - |
1980 |
1990 |
1993 |
1994 |
1995 |
1996 |
1997 |
1998 |
1999 |
2000 |
2001 | |
1.- Dette négociable |
30,01 |
208,48 |
325,26 |
378,13 |
431,33 |
474,44 |
514,91 |
560,25 |
583,13 |
616,34 |
653,36 |
Part dans la dette publique totale (en %) |
47,1% |
76,8% |
86,7% |
85,4% |
86,9% |
87,9% |
89,1% |
91,4% |
89,2% |
90,2% |
90,3% |
A.- Dette à long terme |
17,36 |
124,65 |
206,20 |
237,81 |
270,49 |
308,29 |
330,87 |
363,53 |
395,17 |
419,20 |
442,55 |
dont OAT |
103,43 |
185,39 |
217,99 |
251,91 |
289,70 |
329,44 |
362,11 |
394,68 |
419,12 |
442,47 | |
(pour mémoire : OAT émises au profit du FSR) |
(1,77) |
(1,65) |
(1,87) |
(3,00) |
(0,40) |
(0,70) |
(0,70) |
- |
- | ||
B.- Bons du Trésor à court et moyen terme |
12,65 |
83,83 |
119,07 |
140,31 |
160,84 |
166,16 |
184,04 |
196,72 |
187,96 |
197,14 |
210,81 |
BTF |
28,79 |
36,39 |
44,92 |
41,26 |
41,23 |
47,19 |
33,69 |
43,01 |
52,44 | ||
(pour mémoire : BTF émis au profit du FSR) |
- |
(0,15) |
- |
- |
- |
- |
- |
- |
- | ||
BTAN |
90,27 |
103,92 |
115,93 |
124,89 |
142,81 |
149,52 |
154,27 |
154,13 |
158,37 | ||
(pour mémoire : BTAN émis au profit du FSR) |
(0,15) |
(0,75) |
(0,91) |
(0,20) |
(0,25) |
(0,20) |
(0,15) |
- |
- | ||
II.- Dette non négociable |
33,76 |
63,12 |
50,03 |
64,66 |
64,79 |
65,57 |
62,91 |
52,79 |
70,30 |
67,02 |
70,37 |
A.- Engagements de l'État et dette d'organismes supprimés prise en charge par l'État |
0,91 |
12,14 |
11,83 |
11,42 |
10,44 |
8,34 |
5,68 |
4,30 |
3,38 |
2,60 |
2,12 |
B.- Bons du Trésor sur formules |
7,41 |
4,61 |
2,32 |
1,92 |
1,55 |
1,47 |
2,14 |
2,31 |
2,05 |
1,76 |
1,42 |
C.- Bons souscrits par des organismes internationaux |
2,11 |
5,83 |
8,82 |
9,55 |
8,99 |
8,70 |
8,59 |
7,60 |
10,28 |
12,13 |
11,20 |
D.- Dépôts des correspondants du Trésor et des particuliers |
24,85 |
49,29 |
49,52 |
55,29 |
58,33 |
60,26 |
63,17 |
68,79 |
74,19 |
68,49 |
66,16 |
E.- Dette nette du Trésor envers la Banque de France (b) |
- 2,75 |
- 11,28 |
- 24,66 |
- 15,47 |
- 6,78 |
- 0,66 |
- 4,07 |
- 11,46 |
0,57 |
- 0,58 |
- 1,45 |
F.- Créances nettes (-) des opérations de pension (c) |
- 9,76 |
- 14,64 |
- 14,77 |
- 20,98 |
- 22,48 |
- 19,77 |
- 11,29 | ||||
G.- Divers (d) |
1,23 |
2,52 |
2,19 |
1,96 |
2,03 |
2,09 |
2,17 |
2,23 |
2,31 |
2,39 |
2,22 |
Dette totale de l'état |
63,77 |
271,59 |
375,29 |
442,79 |
496,12 |
540,01 |
577,82 |
613,04 |
653,42 |
683,36 |
723,74 |
En % du PIB |
14,9% |
27,4 % |
34,1% |
38,7% |
42,0% |
44,5% |
46,2% |
46,9% |
48,4% |
48,6% |
49,4% |
(a) Hors titres émis au profit du Fonds de soutien des rentes (FSR).
(b) Concours de la Banque de France au Trésor (= dette du Trésor) - compte courant du Trésor à la Banque de France (= créance du Trésor).
(c) Valeur des titres pris en pension - valeur des titres mis en pension. Ces créances nettes, venant en atténuation de la dette de l'État, sont affectées d'un signe (-).
(d) Depuis 1990, est prise en compte uniquement la dette résultant de l'émission des monnaies métalliques.
Source pour les années 1990 à 2000 : SROT au 31 décembre. Source pour les années antérieures : Compte de la dette publique.
II.- UNE MEILLEURE FORMULATION DES OBJECTIFS ASSIGNÉS À LA GESTION DE LA DETTE ET DE LA TRÉSORERIE
Intuitivement, le lien entre le déficit budgétaire et l'accroissement de la dette de l'État est évident. Le déficit ne représente rien d'autre que l'excédent des charges supportées par l'État sur les ressources qu'il perçoit. L'article d'équilibre du projet de loi de finances vise précisément à autoriser le ministre chargé du budget à procéder à des emprunts « pour couvrir l'ensemble des charges de trésorerie », en particulier celles qui ne peuvent être couvertes par des ressources permanentes.
Dans cette perspective, le gestionnaire de la dette doit seulement prendre acte du stock de dette en début d'année et du déficit d'exécution des lois de finances, puis dans le cadre de ses compétences propres et des autorisations relatives aux opérations de trésorerie, qui sont délivrées par le Parlement, développer une stratégie de financement et appliquer ses décisions de gestion afin que l'État soit en mesure d'honorer ses engagements financiers en toute circonstance, au meilleur coût pour le contribuable.
Pour autant, le déficit budgétaire tel qu'il est déterminé par la loi de finances ne peut expliquer en totalité les variations annuelles de l'encours de dette. D'une part, le déficit « en exercice », relatif à l'exercice budgétaire, n'est pas égal au déficit « en gestion », qui porte sur l'année calendaire ; seul celui-ci peut permettre de déterminer la contribution annuelle du déficit à la dette. D'autre part, l'État enregistre des flux nets de dette qui concourent à la variation totale de son encours, sans avoir de traduction budgétaire.
Un exercice budgétaire se déroule sur trois années calendaires : certaines dépenses sont payées par anticipation l'année précédente ; l'essentiel du budget s'exécute au cours de l'année éponyme ; certaines dépenses et recettes sont enregistrées l'année suivante, au cours de la « période complémentaire ». Réciproquement, une année calendaire voit s'exécuter trois exercices budgétaires distincts : l'exercice précédent (pour sa période complémentaire), l'exercice principal et l'exercice suivant (pour les dépenses payées par anticipation). Le tableau ci-après présente les éléments permettant de déterminer les soldes budgétaires pour 2001, respectivement en exercice et en gestion.
L'évaluation des flux nets de dette est délicate. Elle ne peut reposer sur la présentation traditionnelle de l'encours de la dette de l'État, telle qu'elle figure, par exemple, dans le tableau de la page 38 du présent rapport spécial. En effet, la dette y est considérée sous l'angle de ses instruments de financement : titres de la dette négociable (OAT, BTAN et BTF) et postes de la dette non négociable (dépôts des correspondants du Trésor, engagements de l'État, etc.). Au contraire, la notion de « flux net de dette » se réfère au fait générateur de l'endettement, indépendamment de son mode de financement.
A ce titre, la prise en charge par l'État d'engagements divers - créances de TVA, emprunts repris à divers organismes, etc. - participe clairement des flux nets de dette enregistrés les années où sont effectuées ces prises en charge. De même, les décisions prises en matière d'émission des titres d'État génèrent des primes et décotes à l'émission, qui traduisent en matière comptable le décalage entre l'encours nominal des titres et l'encaissement en trésorerie.
EXÉCUTION DES LOIS DE FINANCES EN 2001 (y compris FMI et FSC)
(en millions d'euros)
Année 2000 |
Année 2001 |
Année 2002 |
Solde d'exécution des lois de finances pour 2001 (exercice) | |
Exercice 2000 |
- 8.220 |
|||
Exercice 2001 |
- 2.612 (a) |
- 28.002 |
- 606 (b) |
- 31.220 |
Exercice 2002 |
- 2.687 |
|||
Comptes d'attente |
- 428 |
|||
Solde d'exécution des lois de finances en 2001 (gestion) |
- 39.337 |
(a) Dépenses payées par anticipation en 2000.
(b) Solde de la période complémentaire en 2002.
Source : Situation résumée des opérations du Trésor (SROT) au 31 décembre 2001.
La détermination des flux annuels nets de dette et leur interprétation nécessitent d'une part, de définir précisément le périmètre retenu pour la mesure de la dette, d'autre part d'analyser dans le détail la nature des opérations de trésorerie effectuées au cours de l'année. Dans l'ensemble du présent rapport, la dette de l'État est définie comme la somme des agrégats suivants :
- les titres de la dette négociable, hors titres émis au profit du Fonds de soutien des rentes (qui n'ont pas vocation à être vendus sur le marché et qui ne portent pas intérêt) ;
- plusieurs agrégats de dette non négociable : les engagements divers de l'État ; les bons du Trésor sur formule et bons du Trésor souscrits par des organismes internationaux ; les emprunts anciens à caractéristiques spéciales ; les dépôts des correspondants et des particuliers ; les concours de la Banque de France au Trésor ; la dette résultant de l'émission des monnaies métalliques.
Par ailleurs, pour tenir compte des modalités de gestion de la dette par le Trésor, il est effectué une « consolidation » entre le concours de la Banque de France au Trésor et le compte courant du Trésor à la Banque de France, afin de raisonner en termes de dette nette de la position créditrice du Trésor auprès de la Banque de France. Dans le même esprit, le montant des créances résultant des opérations de placement à court terme (prises en pension de titres publics par le Trésor, placements sur le marché interbancaire ou auprès d'États membres de la zone euro) est défalqué du montant brut de la dette, puisque ces opérations sont « interchangeables » avec un maintien des liquidités correspondantes sur le compte courant du Trésor à la Banque de France. Ainsi, la définition retenue pour la dette tient compte de la trésorerie disponible de l'État mais n'est pas affectée par ses modalités d'utilisation.
Votre Rapporteur spécial rappelle que la dette est comptabilisée en « droits constatés » dans la comptabilité générale de l'État depuis 1999. Le rapport sur L'exécution des lois de finances pour l'année 1999 ainsi que le rapport sur L'exécution des lois de finances pour l'année 2000, établis par la Cour des comptes à l'appui des projets de loi de règlement définitif des budgets 1999 et 2000, donnent sur cette question des informations très détaillées, auxquelles votre Rapporteur spécial ne peut que renvoyer ().
Pour sa part, le présent rapport spécial doit analyser la dette de l'État au regard de considérations financières et budgétaires, et non de considérations comptables. C'est pourquoi le tableau sur l'encours de la dette de l'État, présenté en page 38, ainsi que l'ensemble des montants relatifs à la dette font référence à des valeurs nominales et non à des valeurs comptables intégrant les droits constatés.
Le tableau présenté en page 43 décrit, depuis 1994, les facteurs de l'endettement de l'État. Il permet, dans un premier temps, d'isoler l'accroissement de dette résultant du déficit en gestion de l'accroissement résultant d'un flux net de dettes. Leurs contributions respectives peuvent connaître de fortes variations d'une année sur l'autre. Ainsi, entre 1994 et 1995, le déficit en gestion augmente très sensiblement, passant de 43,85 milliards d'euros à 52,52 milliards d'euros. Cependant, ce phénomène est plus que compensé par la forte diminution des flux nets de dette, qui reviennent de + 23,65 milliards d'euros à + 0,81 milliard d'euros. Au total, la progression de la dette par rapport à l'année précédente revient de + 67,5 milliards d'euros en 1994 à + 53,33 milliards d'euros en 1995.
Comme l'année 1993, mais dans une moindre ampleur, l'année 1994 a vu d'importantes prises en charge d'engagements à étaler sur plusieurs exercices (ligne 2.b). Il s'agit de la prise en charge des créances de TVA constituées au profit des entreprises à la suite de la suppression du décalage d'un mois de TVA. Ceci représente 3,69 milliards d'euros en 1994 après 8,75 milliards d'euros en 1993. L'amortissement d'une partie de ces créances, par annuités, a un impact sur la ligne 2.c, à hauteur de 2,88 milliards d'euros pour l'année 1994, de 1,12 milliard d'euros pour l'année 1995 et de moins d'un milliard d'euros les années suivantes.
L'année 1994 a également connu l'impact dans les comptes de l'État de la prise en charge de la dette de l'ACOSS, pour 16,8 milliards d'euros. Cette dette a été amortie l'année même, l'effet étant retracé sur la ligne 5.b du tableau.
ANALYSE DES FACTEURS DE VARIATION DE LA DETTE DE L'ÉTAT (a)
(en milliards d'euros)
1994 |
1995 |
1996 |
1997 |
1998 |
1999 |
2000 |
2001 | |
Dette (en fin d'année) |
442,79 |
496,12 |
540,01 |
577,82 |
613,04 |
653,42 |
683,36 |
723,74 |
Déficit (en gestion) |
+ 43,85 |
+ 52,52 |
+ 45,89 |
+ 40,24 |
+ 33,55 |
+ 39,85 |
+ 28,48 |
+ 39,34 |
A. Opérations relatives à la dette |
||||||||
1. Dette Monnaies métalliques |
- 0,23 |
+ 0,07 |
+ 0,06 |
+ 0,08 |
+ 0,06 |
+ 0,07 |
+ 0,09 |
- 0,17 |
2. Charges à étaler |
- 0,70 |
- 2,15 |
- 2,07 |
- 1,99 |
- 1,39 |
+ 0,57 |
- 0,30 |
- 1,56 |
a. primes et décotes à l'émission |
(- 0,27) |
(- 0,09) |
(- 0,18) |
(- 0,36) |
(- 0,40) |
(+ 1,32) |
(+ 0,36) |
(- 1,16) |
b. prise en charge d'engagements |
(+ 3,70) |
(+ 0,11) |
(+ 0,08) |
(+ 0,02) |
- |
- |
- |
- |
c. à déduire : amortissement d'engagements (-) |
(- 4,13) |
(- 2,17) |
(- 1,96) |
(- 1,65) |
(- 0,99) |
(- 0,75) |
(- 0,65) |
(- 0,40) |
3. Part annuelle des décotes et primes (b) |
- |
- |
- |
- |
- |
- 0,05 |
+ 0,05 |
+ 0,01 |
4. Supplément résultant d'indexation (b) |
- |
- |
- |
- |
- |
+ 0,05 |
+ 0,03 |
- 0,05 |
5. Pertes (+) et profits (-) |
+ 22,03 |
+ 2,32 |
+ 0,30 |
+ 0,39 |
+ 3,29 |
+ 0,78 |
+ 1,11 |
+ 1,62 |
a. amortissements non budgétaires |
(+ 3,66) |
(+ 1,62) |
(+ 1,41) |
(+ 1,21) |
(+ 0,99) |
(+ 0,75) |
(+ 0,65) |
(+ 0,40) |
b. autres pertes et profits |
(+ 18,37) (c) |
(+ 0,70) |
(- 1,11) |
(- 0,83) |
(+ 2,30) (d) |
(+ 0,04) |
(+ 0,46) |
(+ 1,22) |
6. Opérations diverses sur la dette |
- |
- |
- |
- |
- |
- |
- |
- |
Sous-total Opérations relatives à la dette |
+ 21,10 |
+ 0,24 |
- 1,70 |
- 1,53 |
+ 1,97 |
+ 1,43 |
+ 0,99 |
- 0,16 |
B. Opérations relatives à la trésorerie |
||||||||
1. Opérations bancaires |
+ 1,91 |
+1,39 |
- 1,18 |
- 0,52 |
+ 1,03 |
+ 0,66 |
- 0,67 |
+ 2,03 |
2. Variations de liquidité |
+ 0,89 |
+ 0,80 |
- 0,39 |
+ 0,25 |
- 1,37 |
- 0,02 |
+ 0,19 |
- 0,10 |
Sous-total Opérations relatives à la trésorerie |
+ 2,80 |
+ 2,19 |
- 1,56 |
- 0,27 |
- 0,34 |
+ 0,64 |
- 0,48 |
+ 1,93 |
C. Opérations relatives à la gestion courante |
||||||||
1. Tiers débiteurs et créditeurs |
- 0,22 |
- 0,58 |
+ 0,90 |
+ 0,30 |
- 0,85 |
- 0,06 |
- 0,07 |
- 1,41 |
2. Liaisons internes et régularisations |
- 0,03 |
- 1,04 |
+ 0,37 |
- 0,93 |
+ 0,88 |
- 1,47 |
+ 1,03 |
+ 0,67 |
Sous-total Opérations relatives à la gestion courante |
- 0,25 |
- 1,62 |
+ 1,26 |
- 0,63 |
+ 0,03 |
- 1,53 |
+ 0,95 |
- 0,74 |
Flux net de dettes (A+B+C) |
+ 23,65 |
+ 0,81 |
- 2,00 |
- 2,43 |
+ 1,66 |
+ 0,54 |
+ 1,46 |
+ 1,04 |
Variation totale de la dette sur l'année précédente |
+ 67,50 |
+ 53,33 |
+ 43,89 |
+ 37,81 |
+ 35,21 |
+ 40,39 |
+ 29,94 |
+ 40,37 |
(a) Dans le tableau, les nombres sont affectés d'un signe (+) lorsqu'ils accroissent la dette, d'un signe (-) lorsqu'ils la font décroître.
(b) Rubriques introduites dans la comptabilité de l'État en 1999.
(c) Dont 16,8 milliards d'euros au titre de la reprise par l'État de la dette de l'ACOSS.
(d) Dont 2,77 milliards d'euros au titre de l'apurement de l'écart d'intégration des dépôts particuliers aux CCP.
Sources : SROT au 31 décembre, Compte général de l'administration des finances
L'apurement de l'écart d'intégration des dépôts CCP de l'ex-budget annexe des PTT (2,77 milliards d'euros), décidé par l'article 15 de la loi portant règlement définitif du budget de 1995, a été comptabilisé dès 1998, bien que la loi ait été promulguée le 5 janvier 1999. On peut se demander s'il n'aurait pas été plus régulier d'enregistrer cet apurement dans la comptabilité de l'État en 1999 seulement, la mesure législative ad hoc - donc le fait générateur de l'enregistrement comptable - ne prenant effet qu'avec l'entrée en vigueur de la loi. Le montant concerné explique le niveau de la ligne 5.b du tableau, cette année là.
A l'exception des deux opérations évoqués ci-avant, les pertes et profits portés sur la ligne 5.b du tableau concernent essentiellement les emprunts et engagements.
Enfin, le tableau permet de constater que le rythme de traitement des règlements bancaires et la fluctuation des encaisses peuvent avoir une influence non négligeable sur l'encours de dette.
· Dans la LFI 2002, le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie avait indiqué que l'objectif assigné en matière de politique de la dette (stricto sensu, c'est-à-dire en faisant abstraction des considérations spécifiques liées à la trésorerie) était de réduire la durée moyenne de la dette négociable. L'indicateur associé à cet objectif était, fort naturellement, la durée moyenne de la dette négociable, qui devait passer de 6 ans et trois mois en fin d'année 2000 à 6 ans en fin d'année 2001 et 5 ans et six mois en fin d'année 2002
Cette décision se fondait sur des considérations classiques en matière de configuration de la courbe des taux d'intérêt.
Les taux auxquels il est possible de s'endetter sur des maturités courtes (1 mois, 3 mois, 1 an, 2 ans) sont, en moyenne, inférieurs aux taux qu'il faut payer en s'endettant à plus long terme. L'explication théorique de ce constat « historique » est simple : un emprunt est d'autant plus risqué qu'il a une maturité élevée. Deux risques peuvent être évoqués à titre principal : en premier lieu, les taux d'intérêt instantanés du marché peuvent, au fil du temps, s'écarter fortement et durablement du taux d'intérêt auquel a été conclu l'emprunt ; en second lieu, le risque de défaillance du débiteur augmente avec l'horizon temporel. Il en résulte que le taux applicable aux opérations de longue maturité doit intégrer une « prime de risque », d'autant plus élevée que la maturité est longue.
Selon le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, depuis 1994 (ce qui exclut les périodes de crise monétaire pendant lesquelles les taux courts français ont été particulièrement élevés pour défendre le franc), les taux longs ont été supérieurs aux taux courts dans 95% des cas, l'écart moyen entre les taux à 3 mois et les taux à 10 ans s'établissant à 160 points de base. Cette situation n'est pas spécifique à la France : ces écarts sont d'environ 120 points de base et 200 points de base aux États-Unis et en Allemagne respectivement.
COURBE DES TAUX DE MARCHÉ POUR LES TITRES D'ÉTAT ÉMIS PAR LA FRANCE ET L'ALLEMAGNE (à la date du 8 novembre 2002)
Source : Bloomberg
La courbe des taux peut se trouver déformée dans sa partie très courte (inférieure à un an), comme le montre le graphique ci-dessus. Par ailleurs, la courbe des taux peut être « aplatie », comme c'est le cas actuellement au Royaume uni, où l'écart entre le taux à 3 mois et le taux à 10 ans est légèrement inférieur à 80 points de base (en novembre 2002). Elle peut même être inversée sur sa partie longue, comme au Royaume-Uni, où le taux à 30 ans est inférieur de 8 points de base au taux à 10 ans.
Néanmoins, on peut tirer parti de la configuration « standard » des taux d'intérêt pour réduire le coût moyen de la dette en réduisant sa durée de vie moyenne.
· L'objectif tel que formulé dans le programme défini pour 2002 pêchait pourtant pas sa simplicité trop grande, pour ne pas dire son simplisme. En effet, réduire la durée moyenne de la dette permet a priori de diminuer sa charge moyenne mais, en contrepartie, entraîne une augmentation de sa variabilité, c'est-à-dire de la probabilité que cette charge évolue brutalement à la hausse ou à la baisse d'un exercice à l'autre.
Considérons, par exemple, deux stocks de dette équivalents mais différant par leur durée de vie moyenne : 6 ans pour l'un, 4 ans pour l'autre. Dans la première configuration, un sixième du stock de dette doit être renouvelé chaque année, dans la seconde un quart, les émissions nouvelles se faisant au taux du marché. Le stock de dette intègre d'autant plus rapidement les fluctuations annuelles des taux d'intérêt que la proportion qui est renouvelée chaque année est importante. Il en découle que la charge de la dette est plus variable, car l'expérience montre que les taux d'intérêt à long terme sont plus stables dans le temps que les taux d'intérêt à court terme.
On voit que la réduction de la durée de vie moyenne de la dette doit tenir compte d'un arbitrage indispensable entre, d'une part, la diminution moyenne de sa charge qui en est espérée et, d'autre part, l'augmentation de la variabilité de cette charge que le débiteur est prêt à assumer. Sans pour autant en tirer les conséquences au regard de la formulation de l'objectif poursuivi, le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie n'écrivait d'ailleurs pas autre chose dans le fascicule budgétaire des Charges communes pour 2002 : « en définissant un objectif de réduction de la durée de vie moyenne du stock de dette, il s'agit de trouver un compromis entre moindre charge d'intérêts et plus grande variabilité de celle-ci ».
M. Thierry Carcenac, alors Rapporteur spécial du budget des Charges communes, avait estimé que la mise en avant d'un seul objectif (la réduction de la durée de vie moyenne de la dette) ne reflétait qu'imparfaitement la nécessité du « compromis » évoqué par le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie.
Par ailleurs, la formulation de l'objectif officiel du programme en matière de dette faisait l'impasse sur le fait que la stratégie de financement de l'État se réalise sur un marché, donc que l'État doit concevoir son offre de titres pour satisfaire aux attentes des investisseurs. Faute de quoi, il serait obligé de consentir des taux d'intérêt beaucoup plus élevé que la normale, afin d'attirer des investisseurs réticents vers des titres mal adaptés à leurs besoins.
Il est clair, par exemple, que réduire la durée de vie moyenne de la dette en concentrant la totalité des émissions nouvelles sur les titres à très court terme que sont les BTF causerait quelque perplexité chez les investisseurs et écarterait de la dette de l'État ceux qui doivent effectuer des placements longs. De plus, le segment court du marché serait « étouffé » par l'afflux de titres publics et son évolution serait sérieusement perturbée.
Naturellement, dans les faits, la direction du Trésor prend bien soin de construire son programme de financement et d'ajuster les caractéristiques des titres offerts à la vente en liaison avec les professionnels du marché. Le succès rencontré par l'adjudication des valeurs du Trésor prouve chaque semaine et chaque mois l'efficacité de cette démarche.
C'est donc au c_ur de plusieurs dimensions (charge de la dette, variabilité de cette charge, adéquation de la politique d'émission avec les attentes du marché) que doit se développer la stratégie de financement et que se situe, en vérité, le choix politique qu'il convient d'effectuer quant aux objectifs à assigner à la gestion de la dette.
Le programme présenté dans le LFI 2002 était donc incomplet en ce sens que son objectif unique (la réduction de la durée moyenne de la dette négociable) n'était, en fait, que l'une des facettes d'un espace de choix politiques beaucoup plus ouvert et complexe.
A la seule lecture des développements présentés dans le programme, il était d'ailleurs difficile de comprendre pourquoi il convenait de fixer comme « point d'arrivée » à la durée moyenne de la dette de l'État la valeur de 5 ans et 6 mois, plutôt que 2 ans et 3 mois ou 3 ans et 7 mois, par exemple. De même, on voyait mal pourquoi il était utile de faire appel à un programme de swaps, puisqu'il n'était pas clairement indiqué que l'État souhaitait à la fois diminuer la durée de vie de sa dette et conserver une offre de titres en bonne adéquation avec les attentes des investisseurs.
· Votre Rapporteur spécial se réjouit de constater que le volet du programme relatif à la dette, pour 2003, évite en partie ces écueils. En effet, l'objectif retenu pour ce volet est conçu comme une sorte de « holding », avec un objectif principal et deux objectifs secondaires, ceux-ci étant d'ailleurs associés chacun à un instrument de gestion.
L'objectif principal consiste en « la minimisation à moyen terme de la charge de la dette pour le contribuable, dans des conditions de sécurité absolues ». Votre Rapporteur spécial adhère sans réserve à cette formulation, qui repose sur quatre éléments essentiels :
- l'affirmation que le gestionnaire de la dette a pour mission de contribuer à la réduction de la dépense publique, compte tenu de la contrainte fondamentale qui s'impose à lui : le fait qu'il existe une dette de l'État, qui s'accroît en fonction des décisions des autorités politiques et des aléas de la conjoncture économique ;
- la reconnaissance de ce qu'il faut consentir à une certaine variabilité de la charge de la dette, d'une année sur l'autre, et que la performance de la gestion doit être jugée dans la durée ;
- la réaffirmation que la gestion de la dette ne doit pas contrevenir à la mission première et fondamentale du gestionnaire, qui est de permettre à l'État de faire face à ses engagements, à toute heure et en toutes circonstances ;
- le refus de toute intervention spéculative sur les marchés financiers, qui pourrait procurer des économies supplémentaires mais ferait courir à l'État des risques incompatibles avec une bonne gestion des deniers publics.
Les objectifs secondaires concourent à la réalisation de l'objectif primaire. Il s'agit, pour le premier, de rester « en bonne adéquation avec les attentes du marché » et, pour le second, de mettre en _uvre « une stratégie de réduction de la durée de vie moyenne », étant entendu qu'« en définissant un objectif de réduction de la durée de vie moyenne du stock de dette, il s'agit de trouver un compromis entre moindre charge d'intérêts et plus grande variabilité de celle-ci » (). Le lecteur aura reconnu ici la reprise à l'identique de la phrase inscrite dans le bleu « Charges communes » du PLF 2002, citée à la page précédente. Elle prend cependant plus de relief dans le bleu « Charges communes » du PLF 2003, puisque la réduction de la durée de vie de la dette n'est désormais qu'un objectif secondaire, qui doit composer avec d'autres contraintes - dont la nécessité réaffirmée de maîtriser la variabilité de la charge de la dette.
De plus, le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie introduit explicitement la notion d'« objectif optimal de durée de vie moyenne de la dette », qui montre bien que la réduction de cette durée de vie n'est pas une fin en soi mais doit s'insérer dans un réseau complexe de déterminants.
En définitive, votre Rapporteur spécial considère que des progrès importants ont été faits dans la formulation des objectifs poursuivis en matière de gestion de la dette. Il n'en aura que plus de facilité à exprimer deux regrets.
En premier lieu, contrairement à l'année précédente, le programme 2003 ne présente pas d'évaluation chiffrée portant sur les effets théoriques d'une modification de la durée de vie moyenne de la dette. Le bleu 2002 incluait un graphique montrant le résultat de modélisations effectuées par l'Agence France Trésor et illustrant, sous une forme très concrète, les « lieux » du compromis nécessaire entre réduction de la durée de vie et augmentation de la variabilité de la charge de la dette. On doit considérer que la capacité d'appréciation du Parlement sur la pertinence de la stratégie proposée s'en trouve amoindrie.
En second lieu, les deux objectifs secondaires sont plaqués chacun sur un seul instrument, de façon trop rigide et exclusive. A lire le programme 2003, on peut penser qu'il revient à la seule stratégie d'émission primaire de répondre aux attentes du marché... comme si la gestion active de la dette, et notamment le programme de swaps, ne devaient pas, eux aussi, être conçus et réalisés en adéquation avec les attentes du marché. De même, la gestion active de la dette semble avoir pour seul horizon la réduction de la durée de vie de la dette, comme si le programme d'émission de l'État ne pouvait pas y contribuer lui aussi () et comme si la gestion active - notamment à travers les rachats de titres - n'avait pas également pour but d'ajuster la composition du stock de dette pour le faire convenir au mieux aux besoins des investisseurs.
Ces deux défauts, cependant, ne suffisent pas à disqualifier un programme qui est globalement mieux construit que l'année précédente et dont les objectifs, désormais hiérarchisés, s'inscrivent dans un cadre plus cohérent, conformément aux recommandations formulées l'an dernier par le Rapporteur spécial.
Comme dans le programme 2002, l'Agence France Trésor indique que ses travaux futurs porteront, notamment, sur la recherche d'indicateurs de performance de la gestion de la dette.
Il est vrai qu'estimer l'efficacité de la politique de gestion de la dette au regard de l'objectif principal fixé au gestionnaire -minimiser la charge à moyen terme - paraît assez malaisé : la charge de la dette ou sa volatilité ne sont pas de bons indices pour apprécier une qualité de gestion, car ils dépendent également de comportements généraux de marché qui restent hors de contrôle du gestionnaire. Pour sa part, la liquidité de la dette est un concept multiforme () qui se laisse difficilement inscrire dans une démarche normative. En effet, l'évolution de la charge de la dette d'une année sur l'autre dépend, au premier chef, de l'effet taux et de l'effet volume :
- l'effet taux résulte du refinancement, au taux actuel du marché, des titres arrivés à échéance qui portent un taux différent ;
- l'effet volume traduit l'augmentation de la charge de la dette qui résulte de l'accroissement de son volume, notamment du fait du déficit budgétaire.
Ces deux phénomènes échappent largement au gestionnaire de la dette, puisque le niveau des taux d'intérêt comme leur volatilité sont en grande partie exogènes à ses décisions - surtout depuis l'avènement de la zone euro, qui a supprimé les barrières de change entre les États membres et facilite la constitution progressive d'un marché des capitaux unifié.
Peut-être, alors, faut-il s'orienter vers l'analyse des performances relatives, notamment vis-à-vis de nos principaux partenaires sur les marchés financiers. Votre Rapporteur spécial a déjà fait part, dans ses précédents rapports, de la compétition bien connue entre la France et l'Allemagne pour obtenir le statut envié d'« émetteur de référence » au sein de la zone euro.
Est un émetteur de référence celui auquel tous les autres se comparent et celui sur les emprunts duquel les autres emprunts alignent leurs caractéristiques. Les émissions de référence bénéficient d'une « prime de qualité » - c'est-à-dire payent un taux d'intérêt moins élevé. Elles sont moins exposées que les autres en période de turbulences ou d'incertitude des marchés.
La problématique de l'émetteur de référence est devenue plus complexe, dans les toutes dernières années, avec la multiplication des émissions privées et le souci d'investisseurs de plus en plus nombreux d'améliorer le rendement de leur portefeuille en y intégrant une proportion définie de « risque de crédit », mieux rémunéré que les emprunts d'État. Des références autres que les emprunts d'État sont apparues pour fixer les prix des actifs de taux et couvrir l'exposition des portefeuilles. Les acteurs de marché utilisent de plus en plus les produits dérivés pour construire des courbes de taux et, en particulier, pour obtenir une courbe de taux homogène pour l'ensemble de la zone euro, ce qui n'est pas possible en présence d'une pluralité d'émetteurs souverains ().
Déterminer un référentiel de performance par rapport auquel on pourrait évaluer la pertinence de la politique poursuivie en matière de gestion de la dette est donc une tâche d'autant plus ardue que les marchés de taux eux-mêmes connaissent actuellement des transformations profondes et cherchent à définir de nouveaux modes de fonctionnement.
C'est d'ailleurs seulement « à titre d'information » que l'Agence France Trésor a inclus dans le programme 2003 un tableau présentant les écarts de taux (relevés au mois d'août 2002) entre la France et quatre autres pays européens (Allemagne, Italie, Belgique et Espagne), sur les titres de référence respectifs de chaque émetteur à 3 mois, 5 ans et 10 ans. L'Agence estime, notamment, que cet indicateur « intègre en effet le point de vue des acteurs de marché sur les politiques macroéconomiques et structurelles menées par les différents gouvernements, l'effet de la liquidité relative des différentes lignes obligataires ainsi que le développement des marchés dérivés qui favorisent la demande pour le titre sous-jacent. La communication menée par l'Agence France Trésor vis-à-vis des acteurs de marché représente un facteur clé de succès dans la concurrence à laquelle se livrent les différents émetteurs souverains, mais dont le rôle intrinsèque demeure modeste au regard des autres facteurs qui viennent d'être évoqués ».
La situation est presque aussi délicate en matière d'indicateurs associés aux objectifs secondaires. Certes, l'objectif consistant à réduire la durée de vie moyenne de la dette se voit naturellement associer comme indicateur la durée moyenne de la dette négociable. En revanche, on conçoit bien que l'objectif consistant à rester en bonne adéquation avec les attentes du marché est difficile à quantifier.
L'Agence France Trésor indique qu'elle est en train de mettre au point un « automate de marché », simulateur informatique d'une stratégie d'emprunt « en aveugle » fondée sur la reproduction mécanique, pour l'année considérée, du comportement moyen d'emprunt de l'Agence les années précédentes. L'écart entre les données fournies par l'automate et les choix effectifs de l'Agence donneront une mesure de la pertinence de ces choix en matière de calendrier d'émission et de maturité des lignes émises au regard de la demande des marchés.
Le débat parlementaire s'est principalement intéressé, traditionnellement, aux évolutions de la dette. Cependant, la transformation des modalités d'émission de titres publics, engagée en 1985, a conduit à imbriquer de plus en plus étroitement les problématiques respectives de la trésorerie et de la dette.
Il est vrai que l'endettement de l'État a pour objectif de garantir que sa trésorerie reste toujours suffisante pour lui permettre de respecter ses engagement financiers. L'acte principal paraît donc être l'endettement, la gestion de la trésorerie n'étant que secondaire.
Or, la politique d'assimilation des titres d'État conduit à concentrer sur un nombre restreint de jours, dans l'année, les remboursements de titres échus et le versement des intérêts.
Ainsi, la date anniversaire du 25 avril verra, en 2003, l'État payer 13,36 milliards d'euros au titre des intérêts versés sur 16 lignes d'OAT dont les échéances s'étalent de l'année 2003 à l'année 2029, ainsi que le remboursement de deux lignes d'OAT venant à échéance, pour 15,31 milliards d'euros. Par ailleurs, 11,89 milliards d'euros d'intérêts ont été payés le 25 octobre 2002, date sur laquelle sont « calées » 15 autres lignes d'OAT. Le mois de juillet 2003 verra le paiement de 22,09 milliards d'euros d'intérêts sur les cinq lignes existantes de BTAN, auxquels s'ajouteront 3,78 milliards d'euros pour le remboursement d'une ligne échue.
FLUX DE CAPITAL ET D'INTÉRÊT D'OCTOBRE 2002 À SEPTEMBRE 2003
(sur la base de l'encours au 30 septembre 2002)
(en milliards d'euros)
Source : Agence France Trésor, Bulletin mensuel, octobre 2002.
Il en résulte de fortes contraintes sur la trésorerie de l'État, qui imposent, par exemple, de recourir à un volume croissant de BTF afin de « préfinancer » de façon progressive l'arrivée à échéance de lignes dont les volumes sont plus importants au fil des années.
La modernisation de la gestion de la dette, engagée il y a plus de quinze ans, a donc des répercussions sur la gestion de la trésorerie, qui aggravent les tensions « naturelles » dues aux décalages quotidiens entre encaissement des recettes et paiement des dépenses budgétaires classiques.
Le solde du compte du Trésor ouvert dans les livres de la Banque de France doit toujours rester créditeur. La France a rompu depuis de nombreuses années avec la pratique dangereuse du « financement monétaire » du Trésor. D'ailleurs, le traité de Maastricht interdit aux banques centrales d'accorder des concours financiers aux États membres.
Les sommes inscrites sur le compte étant rémunérées à un taux inférieur au taux de l'argent au jour le jour (taux interbancaire de la zone euro), il est légitime de fixer au gestionnaire de la dette et de la trésorerie les deux objectifs suivants :
- limiter au minimum l'encours créditeur du compte du Trésor auprès de la Banque de France ;
- placer les excédents ponctuels de trésorerie de façon à obtenir la meilleure rémunération possible.
Les indicateurs retenus pour juger de la performance de la gestion sont aisés à identifier. Il s'agit, pour le premier objectif, du solde du compte du Trésor en fin de journée et, pour le second objectif, du taux de rémunération moyen applicable à la trésorerie placée sur le marché.
S'agissant du premier objectif et de l'indicateur associé, le « bleu » des Charges communes pour 2003 présente des informations substantielles, que votre Rapporteur spécial tient à présenter in extenso.
« Une nouvelle convention de tenue du compte de l'État à la Banque de France est entrée en vigueur le 1er mai 2002 après un travail de réécriture très précis qui a nécessité plus d'un an. Actualisant et complétant la dernière convention de ce type, qui datait de 1994, elle précise tous les instruments mobilisés par la Banque de France pour permettre à son client, l'État, de suivre en temps réel l'imputation sur son compte des 13 Mds€ d'opérations quotidiennes en recettes, dépenses ou opérations de marché. Des règles de sécurité nouvelles ont été mises en place qui assurent à l'État de ne pas voir son solde se dégrader après 16h15 en raison d'une imputation tardive de certaines opérations de dépenses urgentes. Cela permet à l'Agence France Trésor de diminuer son encaisse de précaution plus rapidement en cours de journée, dans des conditions de marché satisfaisantes (c'est-à-dire dans la plupart des cas avant 17h, heure à laquelle la plupart des contreparties éligibles (SVT) offrent encore des taux de placement attractifs) ».
Par ailleurs, l'Agence France Trésor s'est attachée à expliquer la raison pour laquelle on observera un écart entre l'objectif fixé pour 2002 (niveau moyen égal à 200 M€) et le niveau moyen effectif, évalué à 440 M€.
« Sur les quatre premiers mois de l'année, en cas de mauvaises conditions de marché et aux termes de la précédente convention État / Banque de France, le compte de l'État pouvait être rémunéré au taux marginal des appels d'offre de la BCE jusqu'à un plafond de 1500 M€. Il n'aurait donc pas été de bonne politique, d'un point vue financier, de ne pas continuer à bénéficier de ces taux plus favorables qui étaient la contrepartie d'opérations du Trésor sur les marchés dans des conditions dégradées du fait des imputations tardives sur son compte permises par l'ancienne convention. Cela explique que le compte ait continué à osciller, sur ces quatre premiers mois, entre 300 M€ (en cas de conditions de marché favorables lors de la dernière opération de placement) et 1500 M€ (dans le cas contraire, qui était plus fréquent), soit un solde moyen de 1026 M€ sur ces quatre premiers mois.
« La nouvelle convention de tenue du compte de l'État à la Banque de France est entrée en vigueur le 1er mai 2002, soit plus tard qu'anticipé. Depuis cette date et grâce aux nouveaux engagements de contrôle-qualité pris par la Banque de France vis-à-vis du Trésor (notamment sur la non imputation de grosses opérations de dépenses après 16h15), l'objectif de solde de fin de journée a été fixé à 200 M€ à partir du 1er mai 2002, puis abaissé à 100 M€ à compter du 1er septembre 2002 ».
En conséquence, le solde moyen du compte, qui était légèrement supérieur à 600 M€ à la date de rédaction du bleu, c'est-à-dire fin septembre, devrait décroître continûment jusqu'à la fin de l'année, pour atteindre 440 M€ environ.
S'agissant du second objectif et de son indicateur associé, il convient de remarquer que l'indicateur unique présenté dans la LFI 2002 - le taux de rémunération moyen des dépôts sur le marché interbancaire - est complété, dans le présent projet, par un nouvel indicateur : le taux de rémunération moyen des opérations de pension livrée effectuées par le Trésor. Pour autant, l'Agence France Trésor souligne à plusieurs reprises le caractère « fragile » de ce dernier indicateur, qui résulte de la « très grande volatilité » du marché de la pension livrée.
Le placement des excédents ponctuels de trésorerie, qui font l'objet d'opérations de dépôt sur le marché interbancaire et d'opérations de pension livrée auprès de contreparties sûres (les SVT et certains États européens) vise à obtenir le meilleur taux de rémunération. Un bon critère de référence est le taux de l'EONIA (European Overnight Interbank Average). Ce taux, calculé tous les soirs par la Fédération bancaire européenne, représente le taux moyen auquel un panel d'établissements bancaires de la zone euro a prêté sur le marché interbancaire sur un jour. Les services de trésorerie des grands établissements financiers et des grandes entreprises retiennent d'ailleurs ce taux comme critère de rémunération de leurs placements au jour le jour.
Alors que le programme « Gestion de la dette et de la trésorerie de l'État » de 2002 assigne comme objectif chiffré à l'AFT d'obtenir une rémunération d'EONIA - 1 point de base pour ses placements interbancaires, l'Agence a atteint une rémunération moyenne plus élevée, à savoir le niveau de l'EONIA, depuis le début de l'année. Ce résultat est notamment lié à des actions ciblées de l'AFT qui ont permis de stimuler la concurrence entre SVT, tant sur le marché de la pension livrée que sur le marché interbancaire. L'objectif fixé pour 2003 consiste à confirmer la moyenne des placements interbancaires à EONIA, ce qui représente une amélioration de près de 3 points de base par rapport aux résultats obtenus en 2000.
Pour l'indicateur relatif à la rémunération tirée des opérations de pension, l'Agence France Trésor propose de retenir l'objectif d'EONIA - 2 points de base en 2003. Le décalage avec les opérations de dépôt sur le marché interbancaire s'explique par le fait que les opérations de pension livrée sont par construction généralement effectuées à un taux inférieur à l'EONIA. Cela est lié à l'existence d'un collatéral en papier d'État qui annule, pour l'État, le risque lié à la défaillance de la contrepartie pendant la durée de l'opération.
La présence accrue de l'État sur le marché financier et la mise en _uvre d'instruments toujours plus sophistiqués expose l'État à des risques similaires à ceux rencontrés par les établissements financiers privés.
L'ÉTAT FACE AU RISQUE FINANCIER
_ Les risques de marché : le risque structurel est le risque de taux d'intérêt encouru en cas de variation des taux affectant l'ensemble des opérations de bilan et de hors bilan.
_ Le risque de contrepartie : ce risque est celui de la défaillance d'une contrepartie. Toute défection d'une contrepartie, quelle que soit la nature de l'opération (souscription à l'émission, pensions, swaps...), obligerait à renégocier aux conditions de marché du moment une nouvelle opération. Ces conditions de marché pouvant être moins favorables, la défaillance, même momentanée, est susceptible d'engendrer un surcoût.
_ Le risque de règlement : ce risque survient en cas de non versement par une contrepartie donnée des sommes dues à la suite d'une erreur matérielle ou d'un défaut des circuits de paiement. Certains systèmes de place sont sécurisés, tels ceux d'Euroclear, mais les circuits de dénouement d'autres opérations (swaps...), notamment de gré à gré, n'offrent pas la même sécurité.
_ Les risques opérationnels et informatiques : il s'agit des risques qui ne sont ni de crédit ni de marché. A titre d'exemple, on peut citer les risques de traitement des opérations résultant d'une absence de procédure formalisée ou d'une insuffisance de formation du personnel, les risques de pertes d'information (p.ex. : date et montant exact à payer sur une ligne) suite à une défaillance du système d'information et les risques de litiges suite à une mauvaise rédaction d'un contrat financier.
_ Le risque d'écart prévision / réalisation : la gestion du compte pivot du Trésor impose une information en amont par les différentes directions du ministère, les collectivités locales et les autres correspondants du Trésor des flux qui viendront impacter le compte les jours suivants. Tout défaut dans cette procédure d'annonce préalable par les correspondants de la trésorerie induit des écarts prévision / réalisation qui peuvent nuire à la gestion optimale de la trésorerie.
Source : Agence France Trésor
Le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie a défini un ensemble de mesures destinées à maîtriser les risques précités. Le cadre de contrôle mis en _uvre s'inspire des recommandations de la Commission de réglementation bancaire et financière (CRBF 97-02), tout en les adaptant aux spécificités de l'action de l'État. Il est apparu essentiel de respecter les règles suivantes :
- instaurer un contrôle permanent au sein de chaque unité opérationnelle et périodique de l'efficacité des premiers contrôles réalisés ;
- garantir l'indépendance des fonctions (par exemple entre l'initiation, la validation et le contrôle des risques associés aux opérations) ;
- définir des limites internes ;
- assurer le respect de la « piste d'audit » (c'est-à-dire la reconstitution de l'ordre logique des opérations et des flux associés).
Conformément à ces principes et à l'article 5 de l'arrêté du 8 février 2001, l'Agence France Trésor s'est dotée d'un cahier des procédures et d'une charte de déontologie, publiés dans un arrêté du 18 septembre 2001 :
- le cahier des procédures définit le cadre général dans lequel opère l'Agence, détaille les normes de gestion, d'organisation et de contrôle auxquels elle devra se conformer. Il complète les règles existantes pour les opérations de dette et de placement par un cadre détaillé pour les opérations de swaps ;
- la charte de déontologie s'inspire des textes existants dans le secteur financier. Elle précise l'ensemble des règles auxquelles doit se plier toute personne travaillant pour le compte ou dans le cadre de l'Agence France Trésor.
Votre Rapporteur spécial tient à signaler quelques actions particulières illustrant la stratégie de maîtrise des risques développée par l'Agence France Trésor :
- afin de limiter le risque de contrepartie, toute négociation de swap s'effectue dans le cadre d'une convention de marché à terme conclue entre l'État et sa contrepartie. Ces conventions de marché prévoient qu'il pourra être procédé à des appels de marge, au cas où la valorisation des opérations au prix du marché ferait apparaître un écart positif avec la valeur initiale. La marge appelée reste acquise à son bénéficiaire au cas où la contrepartie fait défaut. Par ailleurs, des limites internes sont définies pour chaque contrepartie, en fonction de la taille et de la notation de chacun des établissements financiers qui se portent contrepartie, afin de ne pas concentrer l'exposition de l'État ;
- pour réduire le risque de règlement, des lignes de crédits ont été négociées avec des banques partenaires, qui pourraient être mobilisées pour maintenir positif le solde du compte du Trésor à la Banque de France en fin de journée, au cas où une contrepartie ferait défaut et où l'État se verrait donc privé d'une recette attendue.
- la modernisation du cadre comptable n'est pas qu'une question purement technique. La comptabilité doit éclairer la situation financière du gestionnaire de la dette, afin de fonder les décisions de gestion sur des éléments objectifs et significatifs et d'éclairer la mesure de la performance. Il a été décidé de retenir le plan comptable des établissements de crédit, qui a la capacité de suivre de manière détaillée, en fonction de normes précises, l'ensemble des opérations de dette et de trésorerie conduites par l'Agence. La mise en _uvre de ce nouveau référentiel comptable, qui s'inscrit dans le cadre de la nécessaire refonte du système d'information de l'Agence France Trésor, devrait voir le jour dans le courant de l'année 2003.
Les efforts entrepris par l'Agence France Trésor pour parvenir à maîtriser correctement ses risques opérationnels sont donc conséquents. Il est pourtant deux autres sujets qui ont attiré l'attention de votre Rapporteur spécial.
En premier lieu, le bon fonctionnement des dispositifs de sauvegarde contre le risque de contrepartie suppose que la défaillance contre laquelle il s'agit de se prémunir ne concerne qu'un seul acteur du marché ou, éventuellement, un nombre limité de ces acteurs. La situation dans laquelle un risque systémique se manifeste, qui affecte par définition l'ensemble des acteurs du marché, est différente. Or il existe une dissymétrie fondamentale entre les établissements financiers et le Trésor : les premiers peuvent se tourner vers la Banque de France au titre de son statut de « prêteur en dernier ressort », afin d'obtenir des liquidités contre remise de titres en collatéral ; le second ne peut faire appel aux concours de la Banque de France car ces concours sont interdits par le traité de Maastricht. Même si le risque systémique correspond à des situations extrêmement critiques, il ne peut être exclu des préoccupations de l'Agence et des « lignes de défense » établies par elle.
En second lieu, il faut rappeler que les risques évoqués dans les développements précédents sont inhérents à la seule conduite des opérations de gestion de la dette, en fonction des instruments utilisés. Or, il existe d'autres risques, qui résultent du contenu même de la stratégie retenue : la réduction de la durée de vie moyenne entraîne une plus grande variabilité de la charge de la dette ; la mise en _uvre de swaps repose sur l'appréciation portée par le Trésor sur la configuration des taux d'intérêt et leur évolution prévisible à un horizon déterminé. La maîtrise de ces risques nécessite la présence, au sein de l'agence, d'une forte compétence en matière de prévision économique et financière. L'évolution sur les 18 derniers mois de l'écart de taux 2 ans / 10 ans sur les obligations de référence émises en zone euro montre, par exemple, qu'une stratégie qui est judicieuse un temps peut devenir inadaptée plus tard.
ÉVOLUTION RÉCENTE DE L'ÉCART DE TAUX 2 ANS / 10 ANS SUR LES TITRES EN EURO
Source : Eurostat, 8 novembre 2002
N° 0256 -14 - Rapport spécial de M. Daniel Garrigue sur le projet de loi de finances pour 2003 - Charges communes
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() M. Philippe Marini, « Dette publique : une législature pour rien. La dette publique 1996-2000, ses contreparties et ses perspectives d'avenir », rapport d'information n° 361, Sénat, 17 juillet 2002.
() Dans tous ces développements, les masses budgétaires sont mesurées en comptabilité budgétaire et non en comptabilité nationale.
() Dans le graphique, la variation des passifs est comptée négativement pour faire apparaître directement leur contribution à la situation nette, puisque les passifs viennent en déduction des actifs.
() Cour des comptes, L'exécution des lois de finances pour l'année 1999, juin 2000 (p. 276) ; L'exécution des lois de finances pour l'année 2000, juin 2001 (p. 143).
() Reprise à l'identique de la phrase inscrite dans le bleu « Charges communes » du PLF 2002.
() La suspension du programme de swaps décidée en septembre 2002 fera d'ailleurs reposer sur la politique d'émissions primaires - si les conditions de marché restent aussi volatiles - l'intégralité des efforts de réduction de durée de vie.
() On peut citer, par exemple : le volume des transactions sur le marché secondaire de la dette, l'articulation du marché des titres avec un marché de produits dérivés performant et actif, l'écart entre cours vendeur et le cours acheteur pour les transactions sur titres publics, la volatilité des cours, etc. Tous ces éléments donnent des informations sur la capacité du marché à absorber un volume important d'achats ou de ventes sans décalage sensible des cours, ce qui est la définition de la liquidité (possibilité de réaliser des transactions sans risque en capital).
() Votre Rapporteur spécial renverra, par exemple, aux travaux du « groupe d'étude sur les marchés de valeurs à revenu fixe », constitué auprès du département économique et monétaire de la Banque des règlements internationaux. Voir, en particulier : « The changing shape of fixed income markets », BIS Working Papers, n° 104, septembre 2001.