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° 2260

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 9 octobre 2014.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2015 (n° 2234),

PAR Mme Valérie RABAULT,

Rapporteure Générale

Députée

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ANNEXE N° 4

AGRICULTURE, ALIMENTATION, FORÊT ET AFFAIRES RURALES

POLITIQUES DE L’AGRICULTURE

DÉVELOPPEMENT AGRICOLE ET RURAL

Rapporteur spécial : M. Charles de COURSON

Député

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SOMMAIRE

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Pages

INTRODUCTION 5

I. ANALYSE DES CRÉDITS DE LA MISSION AGRICULTURE, ALIMENTATION, FORÊT ET AFFAIRES RURALES POUR 2015 7

A. LE PROGRAMME 154 ÉCONOMIE ET DÉVELOPPEMENT DURABLE DE L’AGRICULTURE ET DES TERRITOIRES 8

1. Le soutien aux exploitations agricoles 9

a. Les aides à l’installation 9

b. Les aides à la modernisation des exploitations 10

2. Les moyens des opérateurs 17

A. LE PROGRAMME 149 FORÊT 18

1. Les crédits destinés à la gestion de la forêt publique 19

2. Le soutien au développement économique de la filière bois 20

3. Le fonds stratégique de la forêt et du bois 22

B. LE PROGRAMME 215 CONDUITE ET PILOTAGE DES POLITIQUES DE L’AGRICULTURE 23

D. LE COMPTE D’AFFECTATION SPÉCIALE DÉVELOPPEMENT AGRICOLE ET RURAL 26

II. LES RÉPONSES APPORTÉES AUX GRANDS DÉFIS AGRICOLES APPARAISSENT INSUFFISANTES 27

A. LE POIDS DE LA NOUVELLE POLITIQUE AGRICOLE COMMUNE EST PRÉPONDÉRANT PAR RAPPORT AU BUDGET NATIONAL 27

B. LES CAUSES DES DIFFICULTÉS RÉCURRENTES DU SECTEUR DE L’ÉLEVAGE DOIVENT ÊTRE VIGOUREUSEMENT TRAITÉES 30

1. La production laitière 30

2. La production de viande bovine 31

3. La production de viande ovine 32

4. La production avicole 33

5. La production de viande porcine 35

C. LE RÔLE STRATÉGIQUE DES INDUSTRIES AGROALIMENTAIRES N’EST PAS ASSEZ MIS EN LUMIÈRE 37

D. L’INDISPENSABLE EFFORT POUR L’INSTALLATION DES JEUNES EN AGRICULTURE DOIT ÊTRE POURSUIVI 40

E. LA VALORISATION DE LA FORÊT ET DE LA FILIÈRE BOIS DEMEURE TRÈS INSUFFISANTE 43

EXAMEN EN COMMISSION 49

Article 47 : Modification du dispositif d’exonération en faveur de l’emploi saisonnier agricole 53

Après l’article 47 58

ANNEXE : LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LE RAPPORTEUR SPÉCIAL 59

L’article 49 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) : fixe au 10 octobre la date limite pour le retour des réponses aux questionnaires budgétaires.

À cette date, 50 % des réponses étaient parvenues au Rapporteur spécial. Mais, à la date du présent rapport, 100 % étaient parvenues.

INTRODUCTION

Les moyens affectés à la mission Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales pour 2015 sur lesquels l’Assemblée nationale est appelée à se prononcer représentent un montant global de près de 4,7 milliards d’euros en crédits de paiement, enregistrant une baisse de 4,1 % par rapport à 2014.

Cette diminution significative de crédits fait suite à quatre années de baisse.

Il faut noter, qu’à l’exclusion de quelques postes qui restent préservés, la plupart des crédits prévus pour 2015 sont en diminution.

Une ponction sur l’enveloppe annuelle communautaire elle-même en baisse, permettra cependant de limiter la part nationale des dispositifs cofinancés par l’Union européenne (prime à la vache allaitante, aides à l’installation, indemnités compensatoires de handicaps naturels), les taux de cofinancement européens étant ainsi relevés. On peut estimer ainsi que les trois quarts de la baisse des crédits nationaux en 2015 sont compensés par l’évolution des crédits communautaires. Cependant, il convient de rappeler que la masse des aides communautaires (premier et second piliers) est en baisse : 9,331 milliards en 2013, 9,258 milliards en 2014 et 8,995 milliards en 2015.

L’appréciation des concours publics alloués au secteur agricole ne peut se limiter à l’analyse des seuls crédits de la mission Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales.

Il faut faire référence aussi à d’autres financements essentiels, principalement aux aides communautaires, largement consacrées à des interventions économiques qui devraient s’élever, en 2014, à 7,853 milliards d’euros pour les dépenses du « premier pilier », celles qui concernent le soutien des marchés et des prix agricoles (8,364 milliards d’euros en 2013) et, pour celles du « deuxième pilier », relatives au développement rural, à 1,405 milliard d’euros (967 millions d’euros en 2013).

Les prévisions pour 2015 portent sur 7,359 milliards d’euros pour les dépenses du premier pilier et sur 1,636 milliard d’euros en 2013 pour celles du second pilier. Soit 8,995 milliards au total en baisse de 263 millions d’euros, soit de 2,9 % par rapport à 2014.

Il faut également prendre en compte les moyens alloués au financement de la protection sociale agricole, qui atteignaient 13,21 milliards d’euros, les prévisions pour 2014 et 2015 étant respectivement de 13,3 et 13,23 milliards d’euros.

Une évaluation récente des aides versées par les collectivités territoriales n’a pu être menée. Les dernières évaluations datant de 2004 sont de l’ordre d’1 milliard d’euros.

Les montants alloués par la mission ne représentent ainsi, avec 4,7 milliards d’euros, qu’environ 17 % des concours apportés à l’agriculture.

Il faut mesurer enfin que, dans nos économies mondialisées, où les questions agricoles sont plus que jamais un enjeu de puissance majeur, les actions prévues dans le budget de l’État ne peuvent répondre, par elles-mêmes, à tous les défis.

Le Rapporteur spécial mettra l’accent dans ce rapport sur quelques-uns des grands défis auxquels sont confrontés notre agriculture et nos agriculteurs, après avoir procédé à l’examen des moyens pour 2015 de la mission Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales.

I.  ANALYSE DES CRÉDITS DE LA MISSION AGRICULTURE, ALIMENTATION, FORÊT ET AFFAIRES RURALES POUR 2015

Doté pour 2015 de 4,7 milliards d’euros en crédits de paiement, le budget de la mission Agriculture, alimentation, forêt est en diminution (hors charges de pensions et à périmètre constant) de 4,1 % par rapport à 2014.

Le ministère et ses opérateurs réduisent globalement leurs effectifs en 2015 (452 suppressions de postes hors enseignement et sécurité sanitaire, 185 créations de postes pour l’enseignement technique et supérieur agricole) répartis également entre le ministère et ses établissements publics sous tutelle.

La baisse des crédits, imposée par le nécessaire redressement de nos comptes publics va de pair cependant, comme cela a été dit, avec une augmentation inédite des crédits alloués au titre de la politique agricole commune.

Il faut tenir compte aussi des allégements de charges sociales et fiscales de 729 millions d’euros dont vont bénéficier les agriculteurs et les industriels de l’agroalimentaire dans le cadre du Pacte de responsabilité. Ils s’ajouteront au crédit d’impôt compétitivité (CICE) qui a permis des allégements de 662 millions d’euros en 2014 ainsi qu’à des exonérations de charges sur les contrats saisonniers.

Ce rapport s’inscrit dans un contexte particulier, celui de la mise en œuvre de la nouvelle politique agricole commune pour la période 2014-2020, qui a retenu deux objectifs : le renforcement de la compétitivité de notre agriculture et la consolidation du projet agro-écologique dans le cadre de la régionalisation des programmes de développement rural (2° pilier de la PAC).

C’est ainsi que les crédits de la modernisation des exploitations, de l’installation, de l’assurance récolte et de l’agro-écologie sont renforcés.

L’année 2015 est marquée, par ailleurs, par une optimisation du budget européen avec le transfert du financement de plusieurs dispositifs sur le premier et le deuxième pilier de la PAC, en particulier la prime nationale supplémentaire à la vache allaitante.

Comme pour les exercices précédents, le présent rapport spécial porte sur trois programmes de la mission :

– le programme 154 Économie et développement durable de l’agriculture et des territoires qui retrace les moyens consacrés à une agriculture économiquement compétitive, prenant en compte les exigences environnementales et de qualité ;

– le programme 149 Forêt, consacré à la gestion des forêts publiques comme au développement économique de la filière ;

– le programme 215 Conduite et pilotage des politiques de l’agriculture qui correspond aux crédits de fonctionnement du ministère.

Sont donc exclues de ce rapport les questions que posent l’enseignement agricole (programme 143 rattaché à la mission interministérielle Enseignement scolaire) ainsi que la sécurité et la qualité sanitaires de l’alimentation (programme 206). Sont analysés en revanche les moyens du compte d’affectation spéciale Développement agricole et rural.

A. LE PROGRAMME 154 ÉCONOMIE ET DÉVELOPPEMENT DURABLE DE L’AGRICULTURE ET DES TERRITOIRES

(en euros)

 

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

 

Numéro et intitulé du programme et de l’action

Ouvertes en LFI pour 2014

Demandées pour 2015

FDC et ADP attendus en 2015

Ouverts en LFI pour 2014

Demandés pour 2015

FDC et ADP attendus en 2015

154. Économie et développement durable de l’agriculture et des territoires

1 451 814 345

1 623 878 991

 

1 625 951 225

1 419 703 535

 

11. Adaptation des filières à l’évolution des marchés

236 399 008

167 195 334

 

298 429 246

169 442 578

 

12. Gestion des crises et des aléas de la production

28 548 666

27 718 666

 

28 540 399

177 042 300

 

13. Appui au renouvellement et à la modernisation des exploitations agricoles

133 060 128

148 500 000

 

225 799 701

177 042 300

 

14. Gestion équilibrée et durable des territoires

800 266 662

997 213 024

 

819 661 998

763 248 024

 

15. Moyens de mise en œuvre des politiques publiques et gestion des interventions

253 519 881

282 251 967

 

253 519 881

282 251 967

 

Source : projet annuel de performances.

Ce programme regroupe cinq actions : Adaptation des filières à l’évolution des marchés ; Gestion des crises et des aléas de la production ; Appui au renouvellement et à la modernisation des exploitations agricoles ; Gestion équilibrée et durable des territoires ; Moyens de mise en œuvre des politiques publiques et gestion des interventions.

Par rapport à 2014, ses moyens globaux passent de 1,451 milliard d’euros à 1,623 milliard d’euros en autorisations d’engagement (+ 11,9 %) et de 1,625 à 1,419 milliard d’euros en crédits de paiement (– 12,7 %).

La hausse observée des autorisations d’engagement traduit notamment la mise en œuvre des engagements pris par le Président de la République lors du Sommet de l’élevage en 2013, qui ont concerné la revalorisation de l’indemnité compensatoire de handicaps naturels (ICHN), le renforcement des aides à la modernisation et la réforme des mesures agri-environnementales et climatiques.

Quant à la baisse observée sur les crédits de paiement, elle va de pair avec l’application des nouveaux taux de cofinancement du FEADER (80 % sur l’installation des jeunes, 75 % sur l’ICHN).

1. Le soutien aux exploitations agricoles

Les crédits de l’action 13 Appui au renouvellement et à la modernisation des exploitations agricoles, qui représentent 9,2 % des moyens du programme 154 atteignent 149,5 millions d’euros en autorisations d’engagement et 177,04 millions d’euros en crédits de paiement, au lieu respectivement de 133,06 millions d’euros (+ 12,39 %) et 225,79 millions d’euros en 2014 (– 21,58 %).

Cette action vise, selon les indications fournies par le projet annuel de performances, à assurer la pérennité de l’agriculture et contribue, de ce fait, au développement des territoires ruraux.

a. Les aides à l’installation

L’appui au renouvellement des exploitations agricoles prend logiquement la forme d’une aide à l’installation des jeunes agriculteurs.

Pour 2015, les moyens de la dotation aux jeunes agriculteurs (DJA) se montent à 26 millions d’euros en autorisations d’engagement et à 20,7 millions d’euros en crédits de paiement.

Instituée en 1973, la DJA est destinée à faciliter la première installation de porteurs de projets qui satisfont à des conditions d’âge et de capacité professionnelle et qui ont élaboré un plan de développement de leur exploitation.

La DJA constitue une aide qui doit permettre aux bénéficiaires de couvrir les premières dépenses après leur installation. La subvention est allouée en contrepartie d’engagements de l’agriculteur qui s’installe (mise aux normes, maintien de l’activité pendant cinq ans). Depuis 1973, 275 000 exploitants ont bénéficié des aides publiques à l’installation.

L’installation est une priorité de la politique nationale ; les Assises de l’installation organisées en 2013 ont permis précisément d’aboutir à une politique renforcée.

Le dispositif de La DJA bénéficie d’un budget revalorisé par rapport à 2014, ce qui, avec le cofinancement européen (à 80 % par le FEADER) conduit à augmenter les moyens d’engagement totaux alloués à la DJA de 25 millions d’euros par rapport à 2014 (dont 5 millions d’euros de crédits nationaux au titre du programme 154).

Le financement du fonds d’incitation et de communication pour l’installation en agriculture (FICIA) est, quant à lui, à compter de 2015, assuré par la mobilisation de la taxe sur la cession à titre onéreux des terrains nus ou des droits relatifs à des terrains nus rendus constructibles.

Il faut mentionner également les stages à l’installation (2,5 millions d’euros en autorisations d’engagement 3,75 en crédits de paiement au lieu de 5 millions d’euros en 2014, comme en 2013), qui financent le plan de professionnalisation personnalisé, ensemble de préconisations devant permettre à tout candidat éligible aux aides à l’installation en agriculture de se préparer au métier de responsable d’exploitation agricole.

Retenons enfin les prêts à l’installation, 22 millions d’euros en autorisations d’engagement, 63,02 millions d’euros en crédits de paiement, qui financent les charges de bonification des prêts à moyen et long termes destinés au financement de l’installation des jeunes. Ce dispositif fait l’objet d’un cofinancement par le Feader à 80 %.

La baisse enregistrée pour les autorisations d’engagement qui atteignaient 52 millions d’euros en 2013 s’explique par la mise en place d’un nouveau cofinancement communautaire à 80 % à partir de 2014 qui doit permettre de maintenir les bonifications au niveau de 2013.

b. Les aides à la modernisation des exploitations

Le renouvellement des exploitations passe aussi par un soutien à leur modernisation.

Des crédits sont prévus à hauteur de 2,5 millions d’euros en autorisations d’engagement, de 4,3 millions d’euros en crédits de paiement, pour financer les charges de bonification des prêts à moyen terme spéciaux aux coopératives pour l’utilisation de matériels agricoles (CUMA).

À partir de 2015, est mis en place, par ailleurs, un nouveau dispositif important, le plan de compétitivité et d’adaptation des exploitations (PCAE), ce qui explique l’augmentation significative constatée sur les autorisations d’engagement.

Le PCAE poursuit quatre objectifs :

– la modernisation des élevages ;

– la réduction et la maîtrise de l’emploi des intrants pour les productions végétales ;

– l’amélioration de la performance énergétique des exploitations par la réalisation d’économies d’énergie et l’utilisation d’énergies renouvelables ;

– l’encouragement à l’agro-écologie et aux performances économique, environnementale et sociale.

Ce plan bénéficie en 2015 de 56 millions d’euros en autorisations d’engagement et de 44,77 millions d’euros en crédits de paiement.

Les crédits correspondants dans le budget 2014 couvraient le fonctionnement du plan de modernisation des bâtiments d’élevage (PMBE), du plan végétal pour l’environnement (PVE) et du plan de performance énergétique (PPE) ; ils s’accroissent de 26 millions d’euros en autorisations d’engagement, cette dotation traduisant l’engagement du Président de la République au Sommet de l’élevage le 2 octobre 2013 de consacrer chaque année à un plan de compétitivité de 200 millions d’euros annuels, tous financeurs confondus, sur la période de 2014-2020.

Ce dispositif est cofinancé par le FEADER à hauteur de 63 % dans les régions en transition et de 53 % dans les autres régions.

Selon les indications fournies par le projet annuel de performances, le plan de compétitivité et d’adaptation des exploitations agricoles (PCAE) bénéficiera de financements renforcés de l’État, mais également de financements communautaires, de contributions des collectivités territoriales et des agences de l’eau.

Il constitue un outil majeur pour la mise en œuvre par l’agriculture de la nouvelle démarche agro-écologique.

2. Les autres actions du programme

 Les crédits de l’action 11 (10,3 % des moyens du programme 154) Adaptation des filières à l’évolution des marchés s’élèvent à 167,19 millions d’euros en autorisations d’engagement (– 29,4 % par rapport à 2014) et à 169,44 millions d’euros en crédits de paiement (– 43,3 %)

Les moyens affectés à l’action 11 visent à agir sur l’offre de produits agricoles et agroalimentaires, en favorisant son adéquation avec le marché. Sont ainsi recherchés la valorisation des produits et la politique de qualité, l’organisation et la modernisation des filières, l’aide aux entreprises de transformation et de commercialisation de produits agricoles, le soutien des entreprises à l’international, le soutien aussi des filières en crise. C’est la recherche d’une agriculture performante qui inspire l’ensemble de cette action.

Un grand nombre des interventions est mis en œuvre par FranceAgriMer, par l’Office de développement économique agricole des DOM (ODEADOM) et par l’Agence de services et de paiement (ASP).

La baisse importante observée sur les moyens alloués à l’action 11 en 2015 est liée principalement à une réduction des crédits de promotion des produits et d’orientation des filières (organisation des producteurs, valorisation des produits sur les marchés français et étrangers) gérés par FranceAgriMer
(– 61,8 millions d’euros), qui doit être compensée par l’abondement du budget de cet opérateur d’une dotation de 36 millions d’euros en provenance du compte d’affectation spéciale pour le développement agricole (CASDAR) et par un émargement de l’opérateur au Programme d’investissements d’avenir (34 millions d’euros). Ces montants s’ajoutent aux 25,42 millions d’euros alloués par le programme 154.

En ce qui concerne les crédits de paiement prévus pour l’action 11 pour 2015, 66 millions d’euros de baisse sont imputables à la prime nationale supplémentaire à la vache allaitante ; depuis la campagne 2014, ce dispositif est financé en totalité sur le premier pilier de la politique agricole commune.

La promotion collective des produits sur les marchés extérieurs bénéficie de 10,2 millions d’euros en autorisations d’engagement comme en crédits de paiement, ces crédits finançant des conventions annuelles passées avec plusieurs organismes en charge de la promotion à l’étranger des technologies et des produits français : la SOPEXA, qui bénéficie d’une délégation de service public (DSP) pour la promotion de la culture alimentaire française et l’accompagnement des entreprises sur les marchés internationaux, l’ADEPTA, (association de développement des échanges internationaux de produits et techniques agricoles) ou encore UBIFRANCE, l’agence française pour le développement international des entreprises qui finance des études sur les marchés à l’exportation.

L’appui à l’exportation demeure stable en 2015.

Les fonds pour les industries agroalimentaires ensuite sont dotés de 3,52 millions d’euros en autorisations d’engagement (4,81 millions d’euros en 2014) et de 5,77 millions d’euros en crédits de paiement (5,84 millions d’euros en 2014).

Le secteur de l’agroalimentaire représente environ 575 000 salariés, près de 169 milliards d’euros de chiffre d’affaires (soit le premier secteur industriel national) et 16,7 % de la valeur ajoutée de l’industrie.

Les crédits de paiement financent des actions collectives devant accompagner le développement régional des industries alimentaires et l’animation des pôles de compétitivité. Ils financent également les restes à payer du Fonds d’intervention stratégique des industries agroalimentaires (FISIAA) qui a permis de soutenir 64 dossiers et dont le dispositif est clos depuis 2011.

Les aides à la filière canne à sucre dans les départements d’outre-mer, autorisées par l’organisation commune du marché du sucre, pour compenser les baisses de prix atteignent, pour 2015, 84 millions d’euros, soit un niveau légèrement inférieur à celui de 2014. Elles ont traditionnellement beaucoup d’importance pour la Réunion et la Guadeloupe, où la culture de la canne à sucre occupait respectivement 57 % et 47 % de la surface agricole utile en 2012. Ce soutien financier est essentiel au maintien de la filière canne à sucre dans les départements d’outre-mer, dans un contexte d’ouverture du marché du sucre à la concurrence internationale, avec la suppression des quotas sucriers en Europe actée au 1er octobre 2017 dans le cadre de la réforme de la PAC.

Au titre de l’action 11, il faut citer également les mesures qui visent la promotion des signes de qualité, à hauteur de 4 millions d’euros, comme en 2014 et intégralement consacrées au Fonds « Avenir bio » pour le développement de l’agriculture biologique.

Ce fonds créé en 2008 qui a permis de financer 46 projets réunissant plus de 230 partenaires de filières biologiques et ce, sur l’ensemble du territoire a pour objectif de renforcer les filières existantes, mais aussi de faire émerger celles de taille plus modeste, mais qui répondent à de fortes attentes dans l’avenir (grandes cultures notamment). Les moyens qui lui sont accordés doivent permettre d’atteindre l’objectif retenu d’un doublement des surfaces bio d’ici à 2017.

Le Rapporteur spécial regrette que, comme les années précédentes, aucun crédit ne concerne les autres signes de qualité.

● Les crédits de l’action 12 Gestion des crises et des aléas de la production ne regroupent que 1,7 % des moyens du programme et atteignent 27,71 millions d’euros, soit une baisse de – 2,8 % par rapport à 2014.

Ils correspondent aux dispositifs destinés à fournir un appui financier aux exploitations touchées par des crises ou des calamités agricoles et à aider au redressement des agriculteurs en difficulté.

Il s’agit du dispositif Agridiff, destiné aux exploitations endettées, qui, après une analyse technique et économique de leur situation, peuvent bénéficier d’un plan de redressement sur 3 à 5 ans avec une prise en charge partielle des frais financiers de leurs prêts d’exploitation ainsi que d’un suivi technico-économique. La mise en œuvre des dispositifs Agridiff est conditionnée à un engagement financier de l’exploitant, dont la contribution au plan doit représenter au moins 25 % des coûts de restructuration. 500 exploitations en moyenne bénéficient de ce dispositif chaque année.

La dotation d’Agridiff qui avait diminué de moitié en 2008 et atteignait 4 millions d’euros en 2012 est pratiquement maintenue, passant de 1,9 à 1,85 million d’euros de 2014 à 2015.

Par ailleurs, le fonds d’allégement des charges (FAC) prend en charge une partie des intérêts bancaires supportés par des exploitants en difficulté, du fait d’aléas exceptionnels (encéphalopathie spongiforme bovine, fièvre catarrhale ovine, par exemple), mais aussi de crises conjoncturelles de marché ou d’aléas climatiques.

Les moyens du fonds qui avaient été doublés en 2009 et qui étaient de 8 millions d’euros en 2012 passent de 2,16 millions d’euros en 2014 à 1,56 million d’euros en 2015.

Le Rapporteur note qu’une modulation des cotisations de MSA est par ailleurs toujours possible en cas de crises. Selon les indications fournies par le ministère de l’agriculture, de l’alimentation et de la forêt, un montant de 30 millions d’euros est d’ores et déjà provisionné et pourrait être utilisé dans l’hypothèse de crises de filières.

Il s’agit aussi de l’assurance récolte dont les crédits financent le développement des contrats d’assurance qui bénéficie d’un effort budgétaire de 24,3 millions d’euros. Couvrant la plupart des risques climatiques auxquels sont confrontés les exploitants agricoles (gel, grêle, sécheresse, inondations ou excès d’eau), le dispositif de l’assurance récolte est surtout présent dans le secteur des grandes cultures et, de manière limitée, ceux de la viticulture et des fruits et légumes.

Le soutien au développement de l’assurance récolte bénéficie d’un cofinancement communautaire de 75 %.

En 2015, les crédits de l’aide à l’assurance récolte s’élèvent donc à 24,3 millions d’euros, soit 5 millions de plus qu’en 2014, soit + 26 %. Cette dotation complémentaire est associée à un cofinancement européen et vise à reconstituer une dotation de 100 millions d’euros pour aider au développement de l’assurance récolte dans l’ensemble des filières agricoles.

Le budget 2015 permet de payer la campagne 2014, dernière année de prise en charge par le programme 154. À compter de la campagne 2015, le dispositif sera financé en 2016 en totalité sur crédits communautaires dans le cadre du second pilier de la PAC.

● Les crédits de l’action 14 Gestion équilibrée et durable des territoires (61,4 % des crédits du programme) regroupent 997,21 millions d’euros en autorisations d’engagement (au lieu de 800,28 millions d’euros en 2014, soit une augmentation de 24,66 %) et 763,24 millions d’euros en crédits de paiement (au lieu de 819,66 millions d’euros en 2014, soit une baisse de 6,84 %).

Complétant les crédits de l’action 13 qui visent à favoriser une agriculture compétitive et de qualité, les moyens qui lui sont affectés ont pour but de favoriser l’attractivité des territoires ruraux, le maintien de la population, notamment agricole, sur ces territoires, le développement de l’emploi et l’amélioration des pratiques agricoles respectueuses de l’environnement.

Il s’agit principalement des indemnités compensatoires de handicaps naturels (ICHN) qui visent au maintien d’exploitations agricoles durables dans les zones défavorisées dites « simples » ou « de montagne ».

Ces indemnités sont attribuées aux hectares de superficies fourragères et à certaines cultures de montagne sèche exploitées par des agriculteurs des zones défavorisées.

Le dispositif, qui donne lieu à un cofinancement communautaire concerne 75 départements et environ 90 000 exploitations représentant 4,3 millions d’hectares.

Il est une composante essentielle du soutien à l’agriculture de montagne, car il permet de compenser partiellement, de 30 à 40 % du différentiel de revenus avec les agriculteurs des zones de plaine.

Afin de traduire l’engagement du Président de la République lors du Sommet de l’élevage en 2013, l’ICHN s’inscrit pour 2015 dans un cadre renouvelé. Après une revalorisation de 15 % en 2014, l’ICHN bénéficiera d’un complément qui améliorera la valorisation des surfaces fourragères et sera accordé sur une surface maximum de 75 hectares.

Cette aide est cofinancée par le FEADER depuis 2014.

Les montants prévus pour 2015 s’élèvent à 928 millions d’euros, la part nationale financée par le programme 154 s’élevant à 232 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement.

Le mécanisme de la prime herbagère environnementale (PHAE) qui s’est avéré très utile pour les systèmes de production fondés sur la valorisation de l’herbe est supprimé à compter de 2015 avec la mise en œuvre de la nouvelle politique agricole commune ; il doit être intégré au dispositif de l’indemnité compensatoire pour handicap naturel (ICHN).

Il faut mentionner également les mesures agro-environnementales et climatiques (MAEC) et les aides à l’agriculture biologique qui s’élèvent à 303,75 millions d’euros en autorisations d’engagement et à 65,68 millions d’euros en crédits de paiement et l’appui aux sociétés d’aménagement foncier et d’établissement rural (SAFER) dotées de 4,32 millions d’euros ou encore les crédits de formation et d’information des syndicats agricoles (5,7 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement).

Pour les mesures agro-environnementales, l’augmentation prévue permet de réengager pour cinq ans les contrats signés en 2012, 2013 et 2014 et de mettre une nouvelle dynamique d’engagement dans le contexte du projet agro-écologique.

Cette augmentation inclut également la prise en charge des aides à la conversion et au maintien en agriculture biologique financées jusqu’en 2014 par des crédits communautaires et qui, à partir de 2015, seront cofinancées par le deuxième pilier de la PAC.

Les exonérations de charges sociales enfin s’élèvent à 418,06 millions d’euros (437 millions d’euros en 2014). Ces crédits correspondent à la compensation par l’État des moindres recettes perçues par les organismes de sécurité sociale, principalement la Caisse centrale de mutualité sociale agricole, du fait de la mise en œuvre d’une mesure d’exonération dégressive de charges patronales pour l’embauche de travailleurs agricoles occasionnels (TO-DE). Cette mesure bénéficie à 74 000 entreprises et 750 000 contrats et son coût est évalué donc à 418 millions d’euros.

L’exonération est totale pour les rémunérations égales ou inférieures à 1,25 fois le montant mensuel du salaire interprofessionnel de croissance (SMIC) puis devient dégressive et s’annule pour les rémunérations égales ou supérieures à 1,5 SMIC

En 2015, la diminution des crédits de compensation est due à trois facteurs :

– une baisse mécanique de 25 millions d’euros liée à la réduction des cotisations d’allocations familiales d’1,8 point, pour les rémunérations inférieures à 1,6 SMIC, en raison de la mise en œuvre du Pacte de responsabilité ;

– la fin à compter du 1er janvier 2015, de l’exonération de la part salariale des cotisations sociales des contrats vendanges. Le projet annuel de performances précise sur ce point que « les salariés bénéficiant de cette mesure seront couverts à partir de 2015 par les mesures de réduction de l’impôt que le Gouvernement a prévu de mettre en œuvre en faveur du pouvoir d’achat des salariés les plus modestes. » ;

– le recentrage du dispositif TO-DE sur les exploitations agricoles par l’exclusion des entreprises de travaux agricoles, ruraux et forestiers (ETARF) afin de mettre fin à une distorsion de concurrence existant entre ces dernières et les CUMA.

Ces deux dispositions sont prévues par l’article 47 du projet de loi de finances rattaché qui sera analysé plus loin dans ce rapport.

2. Les moyens des opérateurs

Les crédits de l’action 15 Moyens de mise en œuvre des politiques publiques et gestion des interventions (17,4 % des dotations du programme 154), atteignent 282,25 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement (253,51 millions d’euros en 2014).

L’action 15 regroupe les moyens en personnels et de fonctionnement des opérateurs chargés de mettre en œuvre, pour le compte de l’État et de l’Union européenne, les différentes actions menées en faveur des entreprises agricoles et agroalimentaires. Sont concernés :

– l’Établissement national des produits de l’agriculture et de la mer (FranceAgriMer) qui mobilise 96,44 millions d’euros (98,4 millions d’euros en 2014). Cet établissement public qui a succédé en avril 2009 aux offices d’intervention met en œuvre l’ensemble des interventions économiques du ministère et de l’Union européenne en faveur des filières agricoles ; le quasi-maintien de ses crédits en 2015 doit aider à préserver la compétitivité de nos filières agricoles ;

– l’Agence de services et de paiement (ASP) qui mobilise 106,51 millions d’euros (97,68 millions d’euros en 2014). L’ASP résulte elle-même de la fusion en 2009 de l’Agence unique de paiement (AUP) et du Centre national pour l’amélioration des structures des exploitations agricoles (CNASEA) ; elle constitue l’organisme payeur de diverses aides nationales et de la plupart des aides communautaires de la PAC ; l’augmentation de la subvention pour charges de service public allouée à l’ASP s’explique précisément par les nouveaux besoins relatifs à la mise en œuvre de la nouvelle politique agricole commune sur la période 2014-2020 ;

– l’Institut national de l’origine et de la qualité (INAO) qui a en charge la gestion de l’ensemble des signes officiels d’identification de la qualité et de l’origine : appellation d’origine, indication géographique protégée (IGP), label rouge, spécialité traditionnelle garantie (STG) et agriculture biologique (16,66 millions d’euros au lieu de 16,1 millions d’euros en 2014) ;

– l’Institut français du cheval et de l’équitation (IFCE), qui, issu du regroupement en 2010 des Haras nationaux et de l’École nationale de l’équitation est l’opérateur public unique pour accompagner la professionnalisation de la filière équine ; il bénéficie en 2015 de 43,02 millions d’euros en autorisations d’engagement comme en crédits de paiement (35,5 millions d’euros en 2014) ;

– l’Agence nationale pour le développement et la promotion de l’agriculture biologique, groupement d’intérêt public qui bénéficie de 1,25 million d’euros (1,07 million d’euros en 2014, soit + 17 %) ;

– l’Office de développement de l’économie agricole des départements d’outre-mer (ODEADOM) bénéficie de 4,47 millions d’euros (4,37 millions d’euros en 2014) ;

– l’Office de développement agricole et rural de Corse (ODARC) bénéficie, quant à lui, de 295 480 euros en autorisations d’engagement comme en crédits de paiement, soit un niveau identique à celui de 2014 ; placé sous la tutelle de la collectivité territoriale de Corse, il est agréé pour la période 2014-2020 comme organisme payeur des fonds européens agricoles pour les mesures inscrites au Plan de développement territorial de la Corse.

Les moyens alloués aux opérateurs sont ainsi renforcés en 2015 (+ 28 millions d’euros, soit + 11 %), afin de faire face aux investissements nécessaires à la conduite de leurs missions. Ils doivent, dans le même temps, limiter leurs frais de fonctionnement.

A. LE PROGRAMME 149 FORÊT

(en euros)

 

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Numéro et intitulé du programme et de l’action

Ouvertes en LFI pour 2014

Demandées pour 2015

FDC et ADP attendus en 2015

Ouverts en LFI pour 2014

Demandés pour 2015

FDC et ADP attendus en 2015

149. Forêt

317 179 351

279 319 614

 

334 543 920

296 684 183

 

11. Gestion des forêts publiques et protection de la forêt

240 061 785

218 248 048

 

244 065 443

222 251 706

 

12. Développement économique de la filière et gestion durable

66 450 332

50 404 332

 

68 655 287

52 609 287

 

13. Fonds stratégique de la forêt et du bois

10 667 234

10 667 234

 

21 823 190

21 823 190

 

Source : projet annuel de performances.

Sous l’autorité de la directrice générale des politiques agricole, agroalimentaire et des territoires, le programme 149 définit la politique nationale suivie en matière de forêt et de filière bois, à l’exception du boisement des terres agricoles.

Cette politique repose, indique le projet annuel de performances, sur trois grands axes : produire plus et mieux valoriser les ressources en bois, en en développant, en particulier, la commercialisation, la récolte de bois ne portant aujourd’hui que sur 60 % de la production biologique ; gérer les forêts de manière durable et mieux préserver la biodiversité, en aménageant les forêts publiques et en développant les plans de gestion des forêts privées ; anticiper le phénomène du réchauffement climatique.

Le programme 149 prend en compte également la gestion des risques : ses crédits ont visé ainsi à la reconstitution des forêts après les tempêtes de 1999 et 2009 (respectivement 741 et 475 millions d’euros). Ils portent aussi de manière structurelle sur la restauration des terrains en montagne (RTM), pour prévenir les risques naturels et sur la défense des forêts contre les incendies (DFCI).

Les dotations du programme sont réparties traditionnellement en deux actions : l’action 11 Gestion des forêts publiques et protection de la forêt, relative à la pérennisation du régime et du patrimoine forestiers et à la prévention des risques et l’action 12 Développement économique de la filière et gestion durable, qui vise la compétitivité de la filière bois et la gestion durable des forêts.

Le budget pour 2015 prévoit, comme celui de 2014, une nouvelle action 13 Fonds stratégique de la forêt et du bois rassemblant l’ensemble des moyens destinés aux interventions de développement et d’accompagnement de l’investissement dans l’amont et l’aval de la filière bois.

Les dotations globales du programme 149 s’élèvent pour 2015 à 279,31 millions d’euros en autorisations d’engagement (au lieu de 317,17 millions d’euros en 2014, soit – 11,9 %) et à 296,68 millions d’euros en crédits de paiement (au lieu de 334,54 millions d’euros en 2014, soit
– 11,3 %).

Le budget pour 2015 atteint ainsi une valeur minimale jamais observée.

1. Les crédits destinés à la gestion de la forêt publique

Les crédits de l’action 11 Gestion des forêts publiques et protection de la forêt (78,1 % des crédits du programme) s’élèvent en 2015 à 218,24 millions d’euros en autorisations d’engagement, au lieu de 240,6 millions d’euros en 2014 et à 222,25 millions d’euros en crédits de paiement, au lieu de 244,06 millions d’euros en 2014.

Ces crédits concernent les forêts relevant d’un régime spécifique, le régime forestier (forêts domaniales et des collectivités), qui comprend la gestion de ces forêts, l’établissement de plans d’aménagement, la surveillance et la réalisation de programmes de travaux et de coupes. Ces diverses responsabilités sont mises en œuvre par l’Office national des forêts (ONF) qui joue donc un rôle central en matière d’application de la politique forestière de l’État.

Ils financent aussi la restauration des terrains en montagne (RTM) par l’État sur les terrains domaniaux, soit 8,5 millions d’euros en autorisations d’engagement et 9,5 millions d’euros en crédits de paiement (7,5 millions d’euros en 2013) et les acquisitions de forêts par l’État (0,92 million d’euros).

Ils financent surtout le versement compensateur de l’État à l’Office national des forêts (ONF), fixé à 140,4 millions d’euros, soit 20 millions d’euros de plus que le niveau prévu dans le contrat d’objectifs et de performances conclu entre l’ONF, l’État et la Fédération nationale des communes forestières (FNCOFOR) pour la période 2012–2016.

La subvention de l’État à l’ONF diminue de 21 millions d’euros en autorisations d’engagement comme en crédits de paiement.

Cette baisse s’explique, précise le projet annuel de performances, par la nécessité de contribuer à l’objectif national de réduction des dépenses publiques et par des perspectives favorables sur le cours du bois qui permettront un accroissement des recettes de l’Office. L’effort financier supplémentaire de 30 millions d’euros voté en 2014 avait en effet été décidé pour tenir compte du contexte dégradé sur le marché du bois.

22,31 millions d’euros (soit un niveau identique à celui de 2014) sont en outre consacrés au financement de diverses missions d’intérêt général (MIG) confiées par voie de conventions spécifiques à l’ONF (défense contre les incendies en région méditerranéenne, appui aux directions départementales de l’agriculture, de l’alimentation et de la forêt des départements d’Outre-mer, travaux d’investissements nécessaires pour contenir le mouvement des dunes domaniales littorales sur la côte atlantique).

Des subventions à hauteur de 11,8 millions d’euros en autorisations d’engagement et de 13,8 millions d’euros en crédits de paiement (niveau identique à celui de 2014) sont prévues au bénéfice des collectivités territoriales pour la construction d’infrastructures de défense contre les incendies (pistes d’accès, tours de gué, pare-feux…).

Il faut noter enfin qu’a été décidée une anticipation dès 2015 de la négociation d’un nouveau contrat d’objectifs entre l’État, l’ONF et les communes forestières pour la période 2016-2020.

L’ONF reste confronté à des difficultés financières importantes depuis le ralentissement économique constaté en 2012.

2. Le soutien au développement économique de la filière bois

Les crédits de l’action 12 Développement économique de la filière et gestion durable (18 % des moyens du programme) poursuivent deux objectifs : le développement économique de la filière forêt-bois et la gestion durable des forêts.

Les moyens qui y sont consacrés en 2015 atteignent 50,4 millions d’euros en autorisations d’engagement (66,4 millions d’euros en 2014) et, pour les crédits de paiement, 52,6 au lieu de 68,6 millions d’euros en 2014.

La baisse observée, pour une nouvelle année, au niveau des autorisations d’engagement s’explique essentiellement par le transfert des crédits alloués aux investissements forestiers vers une nouvelle action, l’action 13, fonds stratégique de la forêt et du bois (10,5 millions d’euros) et une diminution du budget alloué au nettoyage et à la reconstitution des forêts à la suite de la tempête Klaus de 2009.

Trois grands objectifs sont poursuivis :

– l’amélioration de la compétitivité de la filière bois, afin de valoriser au mieux la ressource disponible ;

– l’accroissement de la récolte de bois, afin d’utiliser le potentiel de production biologique des forêts françaises ;

– l’amélioration de la gestion des forêts privées, qui représentent 75 % de la surface forestière et qui sont particulièrement morcelées, étant réparties entre 3,5 millions de propriétaires privés.

L’action 12 a toujours, comme en 2013 et 2014, pour principal objectif la reconstitution du potentiel de production des forêts sinistrées par la tempête Klaus survenue le 24 janvier 2009 dans trois régions du Sud Ouest (Aquitaine, Languedoc-Roussillon, Midi-Pyrénées) qui a touché près de 700 000 hectares, représentant l’équivalent de plus de cinq années de récolte.

La majorité des crédits prévus est destinée à faciliter la reconstitution du potentiel de production par nettoyage des parcelles et plantation des forêts affectées par cette tempête.

Les crédits en question atteignent, pour 2014, 41,69 millions d’euros en autorisations d’engagement et 42,89 millions d’euros en crédits de paiement. Un cofinancement communautaire du FEADER est également retenu.

Ont été également prévus, dès 2009, dans le cadre de ce « plan chablis » Klaus, des prêts bonifiés garantis par l’État, permettant de financer les coûts de mobilisation et de stockage des bois issus des parcelles sinistrées ; un montant d’1 million d’euros en crédits de paiement est prévu à cet effet en 2015 comme en 2014.

L’action 12 ne prévoit plus de subvention pour charges de service public au Centre national de la propriété forestière (CNPF), à hauteur de 16,05 millions d’euros en 2014. Cet établissement public a pour mission le développement de la forêt privée, la promotion de la gestion durable des forêts, l’agrément des plans simples de gestion, le regroupement des propriétés.

À titre exceptionnel, le CNPF est appelé à mobiliser une part de son fonds de roulement (qui s’élève dans sa totalité à 25 millions d’euros) pour équilibrer son budget initial. Le versement de la subvention qui lui était allouée sera rétabli à compter de 2016.

Des subventions sont enfin allouées à l’Institut technologique Forêt, cellulose, bois-construction, ameublement, le FCBA (7,5 millions d’euros comme en 2014 et en 2013), qui mène des actions de recherche, d’assistance technique, de formation et de conseil dans le domaine du bois et de sa mise en valeur.

3. Le fonds stratégique de la forêt et du bois

Le programme Forêt comporte depuis 2014 une nouvelle action, l’action 13 : Fonds stratégique de la forêt et du bois. Cette action a été alimentée par le transfert d’une partie des crédits de l’action 12 (investissements forestiers, modernisation des scieries, animation de filières, études, recherches), soit 10,5 millions d’euros, complétée par un abondement du budget général provenant d’une part de la taxe additionnelle à la taxe sur le foncier non bâti revenant aux chambres d’agriculture pour les terrains en nature de forêts de 3,8 millions d’euros et par le produit de compensations financières pour défrichement, qui devraient s’élever, en régime de croisière, à 15 millions d’euros.

Le fonds est destiné aux interventions de développement et d’accompagnement de l’investissement dans les filières d’amont et d’aval.

Les crédits prévus en 2015 s’élèvent à 10,66 millions d’euros en autorisations d’engagement et à 21,82 millions d’euros en crédits de paiement.

Les crédits de soutien aux investissements à l’amont et à l’aval s’élèvent à 7,7 millions d’euros en autorisations d’engagement et à 18,92 millions d’euros en crédits de paiement. Ils portent sur l’amélioration de l’accessibilité des massifs forestiers, le renouvellement des peuplements, la préservation de la santé des forêts ou encore l’appui aux scieries qui sont un maillon essentiel pour la valorisation des produits forestiers.

Ces crédits bénéficieront d’un cofinancement communautaire.

Les actions d’animation, d’études, de recherche et d’innovation mobilisent, quant à elles, 2,89 millions d’euros en autorisations d’engagement comme en crédits de paiement (3,4 millions d’euros en crédits de paiement en 2014).

Les crédits correspondants permettront de financer des actions favorisant l’adaptation de la production forestière aux demandes du marché, en matière notamment de connaissance de la ressource, d’amélioration de la qualité des essences forestières ou encore de formation et d’information des acteurs locaux. Les actions seront menées au niveau local par les services déconcentrés de l’État en concertation avec d’autres acteurs (implantations régionales du Centre national de la propriété forestière, organismes locaux à caractère interprofessionnel).

B. LE PROGRAMME 215 CONDUITE ET PILOTAGE DES POLITIQUES DE L’AGRICULTURE

(en euros)

 

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Numéro et intitulé du programme et de l’action

Ouvertes en LFI pour 2014

Demandées pour 2015

FDC et ADP attendus en 2015

Ouverts en LFI pour 2014

Demandés pour 2015

FDC et ADP attendus en 2015

215. Conduite et pilotage des politiques de l’agriculture

720 930 350

716 363 129

6 740 945

731 530 350

724 169 543

6 740 945

1. Moyens de l’administration centrale

204 822 727

204 159 049

415 918

211 263 127

209 785 385

415 918

2. Évaluation de l’impact des politiques publiques et information économique

18 583 211

18 540 433

1 880 000

18 583 211

18 540 433

1 880 000

3. Moyens des directions régionales de l’alimentation, de l’agriculture et de la forêt, des directions de l’alimentation, de l’agriculture et de la forêt et directions départementales des territoires (et de la mer)

430 410 461

421 896 287

4 150 000

430 410 461

421 896 287

4 150 000

4. Moyens communs

67 113 951

71 767 360

295 027

71 273 551

73 947 438

295 027

Source : projet annuel de performances.

Placé sous la responsabilité de la Secrétaire générale du ministère de l’Agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, le programme 215 est dédié au pilotage et à la mise en œuvre opérationnelle sur tout le territoire des politiques publiques ministérielles.

Les crédits relevant de ce programme budgétaire sont essentiellement des moyens en personnel et en fonctionnement de l’administration centrale et des services déconcentrés en métropole et dans les territoires ultramarins. Ils concernent également l’évaluation de l’impact des politiques publiques et l’information statistique ainsi que certaines actions faisant l’objet d’un pilotage national, au titre des grands projets informatiques, de la formation continue, de certains investissements immobiliers, de l’action sanitaire et sociale et de l’information et de la communication institutionnelle du ministère.

Le programme comporte ainsi quatre actions : Moyens de l’administration centrale ; Évaluation de l’impact des politiques publiques et information économique ; Moyens des directions régionales de l’alimentation, de l’agriculture et de la forêt, des directions de l’alimentation, de l’agriculture et de la forêt et des directions départementales des territoires (et de la mer) ; Moyens communs.

Il connaît, comme la plupart des crédits de la mission, une évolution globale négative entre 2014 et 2015, passant, en autorisations d’engagement de 720,93 à 716,36 millions d’euros et, pour les crédits de paiement, de 731,53 à 724,16 millions d’euros.

Le ministère est engagé de fait dans un effort de modernisation de son action et de rationalisation et d’optimisation de ses coûts de fonctionnement, qui lui permet de contribuer à l’indispensable redressement de nos comptes publics. Les diminutions enregistrées correspondent ainsi au cadrage fixé par le Premier ministre sur la baisse des dépenses de fonctionnement.

Les moyens retracés sont essentiellement des moyens en personnel : 630,79 millions d’euros pour 2015, au lieu de 639,2 millions d’euros en 2014 et 8 762 emplois temps plein demandés (ETPT) contre 8 938 en 2014 soit moins 176 emplois correspondant à une baisse de 2 % des effectifs.

Trois objectifs sont retenus par le programme 215 : sécuriser et simplifier l’accès des usagers au droit, aux données et aux procédures du ministère ; optimiser l’efficience de la gestion des ressources humaines et s’assurer de la meilleure adéquation missions/moyens ; mettre en œuvre les actions ministérielles dans des conditions optimales de coût et de qualité de service.

● Les crédits de l’action 1 Moyens de l’administration centrale (28,5 % de l’ensemble) s’élèvent à 204,15 millions d’euros en autorisations d’engagement (204,82 millions d’euros en 2014) et à 209,78 millions d’euros en crédits de paiement (211,26 millions d’euros en 2014).

Cette première action regroupe les fonctions de pilotage des politiques du ministère, soit principalement les moyens consacrés à la rémunération des personnels de l’administration centrale (171,53 millions d’euros), niveau identique à celui de 2014, à la gestion immobilière de cette dernière, à l’action sanitaire et sociale, à la formation continue des agents du ministère, ainsi qu’à l’ensemble des dépenses de fonctionnement courant.

● Les crédits de l’action 2 Évaluation de l’impact des politiques publiques et information économique (2,6 % des moyens du programme 215) atteignent 18,54 millions d’euros en autorisations d’engagement comme en crédits de paiement (au lieu de 18,6 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement en 2014).

Cette action regroupe les moyens mobilisés pour collecter et diffuser les informations relatives à l’agriculture et aux territoires ruraux ainsi que les études et analyses conduites en la matière en termes d’évaluation des politiques publiques comme en vision prospective.

Il s’agit principalement des statistiques agricoles, en particulier du réseau d’information comptable agricole (RICA) et des exercices de prospective et d’analyse stratégique préparatoires aux grandes négociations internationales.

● Les crédits de l’action 3 Moyens des directions régionales de l’alimentation, de l’agriculture et de la forêt (DRAAF), des directions de l’alimentation, de l’agriculture et de la forêt (DDAF) et des directions départementales des territoires (correspondant à 58,9 % des moyens du programme 215) s’élèvent à 421,89 millions d’euros en autorisations d’engagement en 2015 comme en crédits de paiement, au lieu de 430,81 millions d’euros en 2014.

Cette action regroupe certaines fonctions de pilotage et de soutien des DRAAF, qui interviennent sur l’ensemble des politiques conduites par le ministère et certaines actions ministérielles conduites par les directions départementales en métropole ou dans les régions ultramarines. L’action 3 regroupe ainsi l’ensemble des moyens de personnel, d’action sociale et de formation de ces services déconcentrés.

● Les crédits de l’action 4 Moyens communs (10 % des moyens du programme) atteignent 71,76 millions d’euros en autorisations d’engagement, au lieu de 67,11 millions d’euros en 2014 et 73,94 millions d’euros en crédits de paiement au lieu de 71,27 millions d’euros en 2014. Regroupant les moyens communs à l’ensemble des services du ministère, ils concernent essentiellement la formation et portent à hauteur de 41,94 millions d’euros sur les dépenses de personnel (charges de rémunération des élèves et stagiaires en formation, dépenses de personnel des agents mis à disposition).

Sont également concernés les moyens de fonctionnement de l’INFOMA, l’Institut national de formation des personnels du ministère de l’Agriculture, chargé de la formation initiale en deux ans des agents des corps des techniciens supérieurs de ce ministère et d’une grande variété d’actions de formation continue à destination des agents, notamment dans les domaines de la PAC et du contrôle sanitaire.

Les crédits de l’action 4 regroupent aussi les moyens de la politique d’information et de communication interne et externe du ministère ainsi que les moyens consacrés aux frais judiciaires et aux réparations civiles.

Le Rapporteur spécial prend acte du fait que les moyens globaux du ministère retracés dans le programme 215 sont ainsi en décroissance, celle-ci étant justifiée par la nécessité pour le Gouvernement de redresser les comptes publics.

Il veut souligner les progrès sensibles réalisés par le ministère de l’Agriculture en matière de déploiement de procédures dématérialisées : en 2014, le taux d’utilisation des téléprocédures qui concerne notamment les aides allouées au titre de la politique agricole commune était ainsi de 88 %, alors qu’il était proche de 30 % en 2009.

Il remarque enfin que le ministère rationalise ses implantations immobilières. Ayant abandonné, en janvier 2013, le projet de regroupement de plusieurs sites de l’administration centrale sur Picpus dans le 12ème arrondissement de Paris, le ministère a en revanche engagé, sur l’ensemble du triennal, une démarche de consolidation et de réaménagement du pôle Varenne, afin d’améliorer l’accessibilité et la fonctionnalité de ce site.

D. LE COMPTE D’AFFECTATION SPÉCIALE DÉVELOPPEMENT AGRICOLE ET RURAL

Créé par l’article 52 de la loi du 30 décembre 2005 de finances pour 2006, ce compte (CASDAR) retrace traditionnellement :

– en recettes, une fraction égale à 85 % du produit de la taxe sur le chiffre d’affaires des exploitants agricoles prévue à l’article 302 bis MB du code général des impôts ;

– en dépenses, les opérations relatives au développement agricole et rural.

Deux programmes composent ce compte d’affectation spéciale : le programme 775 Développement et transfert en agriculture qui soutient les programmes pluriannuels de développement agricole et rural mis en œuvre par les chambres d’agriculture, les coopératives agricoles, les organismes chargés de la sélection génétique des animaux d’élevage et huit organismes nationaux à vocation agricole et rurale (ONVAR) dans le cadre de contrats d’objectifs passés avec l’État et le programme 776 Recherche appliquée et innovation en agriculture qui permet de soutenir les programmes pluriannuels des instituts et centres techniques agricoles ainsi que des appels à projets.

Le projet de loi de finances pour 2015 prévoit d’élever le niveau du plafond de dépenses du compte d’affectation spéciale à 147,5 millions d’euros, soit + 22 millions d’euros par rapport à 2014, afin de répondre à une demande de la profession agricole. Cette hausse est permise par l’affectation de la totalité du produit de la taxe sur le chiffre d’affaires des exploitations agricoles au CASDAR.

Ce supplément de financement prévisionnel de 22 millions d’euros permettra, d’une part, d’amplifier les actions de recherche et de développement agricole en appui au projet agro-écologique pour la France, en augmentant notamment le budget consacré aux appels à projets du CASDAR, d’autre part, d’intégrer le financement d’actions en matière d’expérimentations et d’assistance techniques conduites par FranceAgriMer et d’animation de la production en agriculture biologique jusque là financées dans le cadre du programme 154.

Ces nouvelles actions financées par le CASDAR seront intégrées dans le Programme national de développement agricole et rural (PNDAR) 2014-2020, ce qui permettra de renforcer la cohérence d’ensemble du dispositif français de recherche appliquée et de développement agricole.

II. LES RÉPONSES APPORTÉES AUX GRANDS DÉFIS AGRICOLES APPARAISSENT INSUFFISANTES

L’analyse stricte de l’évolution des crédits de la mission agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales pour 2015 constitue toujours un exercice indispensable, riche d’enseignements, mais ne permet pas, par lui-même, d’appréhender l’ensemble des problèmes posés à notre agriculture et à ceux qui en vivent.

Il apparaît même que l’essentiel de ce qui peut affecter l’agriculture française ne figure pas dans nos documents budgétaires et que son avenir dépend largement des réponses qui seront apportées à plusieurs défis et à certaines questions clés.

Le Rapporteur spécial estime que cela est particulièrement vrai pour 2015 et que plusieurs grandes questions, qui sont autant d’urgences doivent être clairement posées : celle d’abord de la nouvelle politique agricole commune définie en 2013 pour les années qui viennent, celle ensuite, essentielle, des difficultés de notre élevage, celle aussi de la situation des industries agroalimentaires. Il faut évoquer aussi les problèmes de l’installation des jeunes en agriculture et du devenir de notre forêt et de la filière bois.

A. LE POIDS DE LA NOUVELLE POLITIQUE AGRICOLE COMMUNE EST PRÉPONDÉRANT PAR RAPPORT AU BUDGET NATIONAL

Suite à l’accord obtenu le 26 juin 2013, les règlements définissant la PAC post 2015 ont été adoptés par le Conseil et le Parlement Européen le 17 décembre 2013.

Dans le cadre de la négociation sur le budget européen 2014-2020, le Président de la République a obtenu la préservation du budget global de la PAC attribué à la France. Ainsi, exprimé en euros courants, le budget annuel des aides directes du 1er pilier de la PAC passera de 8 milliards d’euros en 2013 à 7,7 milliards d’euros en moyenne par an sur la période 2014-2020.

Pour les aides au développement rural (2nd pilier de la PAC), le budget passera de 1,27 milliard d’euros en 2013 à 1,42 milliard d’euros en moyenne par an sur la période 2014-2020. La baisse globale est donc de 2 %, ce qui est pour la France une situation favorable en comparaison de l’évolution moyenne pour les anciens États membres et notamment pour l’Allemagne.

Le Président de la République a donné lors de son intervention le 2 octobre 2013 à Cournon les orientations pour la mise en œuvre nationale de la PAC post-2013. Ces orientations ont été déclinées lors des Conseils supérieurs d’orientation et de coordination de l’économie agricole et alimentaire (CSO) des 17 décembre 2013 et 27 mai 2014, à la suite d’une large concertation.

Une première évolution concerne l’aide découplée dans le cadre du 1er pilier. Le régime de paiement de base s’appuiera sur des droits à paiement de base (DPB) qui seront alloués en 2015. Les DPB dont la valeur initiale est en dessous de la moyenne nationale convergeront de manière progressive jusqu’en 2019 : leur valeur augmentera de 70 % de l’écart entre leur valeur initiale et la moyenne nationale. Les DPB dont la valeur initiale est supérieure à la moyenne nationale seront réduits en conséquence, mais cette réduction sera limitée à 30 % maximum de leur valeur initiale.

Le verdissement des aides de la PAC est un des grands objectifs de cette réforme. Le « paiement vert » dépend du respect de trois critères : la diversification des cultures, le maintien du ratio des prairies permanentes et la présence de surfaces d’intérêt écologique.

Le ratio des prairies permanentes sera suivi au niveau national et fera également l’objet d’un « monitoring » régional. Le respect des trois critères du verdissement donnera lieu au paiement d’une aide proportionnelle à la valeur des DPB de l’agriculteur sur une enveloppe de 30 % du budget total dévolu aux soutiens directs, soit 2,2 milliards d’euros.

Le paiement redistributif, qui permet d’accorder une aide supplémentaire aux 52 premiers hectares de chaque exploitation contribue à une redistribution des aides en faveur des exploitations dont la taille est inférieure à la moyenne nationale, permettant de rééquilibrer les aides vers des exploitations souvent plus denses en main-d’œuvre et vers l’élevage. Ce paiement sera mis en place de manière progressive à partir de 2015 et mobilisera 5 % du budget dévolu aux soutiens directs en 2015, 10 % en 2016. Ce taux fera l’objet d’une évaluation en 2017 pour déterminer les étapes suivantes, dans l’objectif d’atteindre 20 % en 2018.

13 % du montant disponible pour les soutiens directs pourra être mobilisé en faveur d’aides « couplées ». Il sera également possible de mobiliser 2 % supplémentaires de l’enveloppe 1er pilier pour soutenir la production de plantes riches en protéines. Ces aides couplées permettront de soutenir des types particuliers d’agriculture ou des secteurs agricoles spécifiques qui rencontrent des difficultés et sont particulièrement importants pour des raisons économiques, territoriales, sociales ou environnementales. Les différentes enveloppes et les principales modalités de leur mise en œuvre ont été annoncées lors des CSO.

L’enveloppe de la prime à la vache allaitante sera de 670 millions d’euros. Elle s’appuiera sur une référence d’animaux éligibles par exploitation sur la base des animaux effectivement présents en 2013, sans interdire les nouveaux entrants, dont l’accès à l’aide sera permis par la création d’une réserve. Les éleveurs devront détenir un minimum de 10 vaches allaitantes par exploitation pour accéder à l’aide. Une dégressivité sera appliquée avec l’objectif d’un montant de 187 euros jusqu’à la 51ème vache allaitante, de 140 euros jusqu’à la 99ème et de 75 euros jusqu’à la 139ème.

L’aide « au veau sous la mère » sera reconduite selon les modalités actuelles, avec une enveloppe de 5 millions d’euros.

Les aides couplées à la filière laitière, aujourd’hui limitées à la montagne seront étendues à l’ensemble du territoire, grâce à la mise en œuvre d’une nouvelle enveloppe de 95 millions d’euros, complétant l’enveloppe actuelle de 45 millions d’euros qui restera dédiée à la montagne. Le niveau d’aide en montagne sera supérieur à l’aide unitaire dans les autres zones. L’aide laitière prendra la forme hors zone de montagne d’une aide unitaire d’au moins 30 euros par vache primée, avec un plafond de 40 vaches primées par exploitation.

L’enveloppe attribuée à l’aide ovine sera de 125 millions d’euros. Le plancher actuel de 50 brebis pour l’accès à l’aide ovine sera maintenu avec une surprime pour les 500 premières brebis. Un taux de productivité minimum de 0,4 agneau vendu par an sera nécessaire pour accéder à l’aide. De nouvelles majorations de l’aide seront appliquées afin notamment d’encourager la valorisation de la production et la structuration des filières.

L’aide caprine sera reconduite selon les modalités actuelles, avec une enveloppe de 15 millions d’euros, soit une augmentation de 50 % par rapport à l’enveloppe initiale.

Certaines productions végétales sensibles feront l’objet d’un soutien couplé. Il s’agit du blé dur (enveloppe de 7 millions d’euros), des prunes, pêches et poires transformées (13 millions d’euros), de la tomate d’industrie (3 millions d’euros), de la fécule de pomme de terre, du lin, du chanvre et du houblon (4 millions d’euros).

L’enveloppe de 2 %, soit 150 millions d’euros, pour les productions riches en protéines s’adressera en priorité aux éleveurs et sera répartie de la manière suivante : un soutien dédié aux éleveurs disposant de plus de 5 Unités Gros Bovins et produisant certaines légumineuses fourragères, en particulier la luzerne ; un soutien aux producteurs produisant certaines plantes riches en protéines dans l’objectif de leur consommation par l’élevage ; un soutien à la production de semences fourragères.

Le soutien à l’installation des jeunes agriculteurs sera renforcé : en plus du soutien prévu dans le 2nd pilier de la PAC qui sera augmenté de 25 millions d’euros, 1 % de l’enveloppe dévolue aux soutiens directs, soit 75 millions d’euros, sera consacré à l’installation, en ciblant les agriculteurs de moins de 40 ans ayant une formation de niveau IV ou une validation des acquis de l’expérience équivalente et s’étant installés depuis moins de 5 ans. Selon les estimations, l’aide octroyée s’élèvera à 70 euros par hectare, avec un plafond de 34 hectares par exploitation, soit environ 2 300 euros par an pendant 5 ans.

Une partie des fonds du 1er pilier sera transférée chaque année vers le 2nd pilier. Dès 2014, 3 % de l’enveloppe des soutiens directs ont été ainsi transférés au profit de la programmation de développement rural, notamment pour financer la gestion des risques et la modernisation des exploitations agricoles (aides à l’investissement).

Les dispositifs de gestion des risques, notamment l’assurance récolte pour les productions végétales seront améliorés et renforcés.

L’indemnité compensatoire de handicaps naturels (ICHN) enfin est revalorisée de 15 % dès 2014. La prime herbagère agro-environnementale sera remplacée, afin de simplifier ses mécanismes, à travers un renforcement de l’ICHN à partir de 2015. L’ICHN sera ainsi augmentée de 70 euros/ha de surfaces fourragères dans la limite de 75 ha. De plus, le bénéfice de l’aide sera étendu à tous les producteurs laitiers en zone défavorisée simple et de piémont.

B. LES CAUSES DES DIFFICULTÉS RÉCURRENTES DU SECTEUR DE L’ÉLEVAGE DOIVENT ÊTRE VIGOUREUSEMENT TRAITÉES

Les grandes difficultés rencontrées par l’agriculture française au cours des dernières campagnes ayant été largement celles du secteur de l’élevage, le Rapporteur spécial souhaite faire un point de la situation des différentes productions animales.

1. La production laitière

La filière bovine laitière évolue dans un contexte de plus en plus internationalisé et concurrentiel, sur les marchés français, européen et mondial.

Cette évolution exige une compétitivité accrue de la filière française, mais elle offre aussi des opportunités en termes de marchés, de développement de la production et de maintien ou de création d’emplois. Dans ce secteur, les tendances de marché évoluent rapidement, en raison de la volatilité liée à une exposition croissante aux marchés internationaux et à la libéralisation du marché européen, avec la fin des quotas laitiers en 2015.

Le principal problème auquel doivent faire face les éleveurs est celui de la volatilité croissante des charges, notamment d’alimentation des animaux, avec une tendance à la hausse sur le moyen terme. L’enjeu est donc la prise en compte de cette volatilité des charges, tout au long de la filière, jusqu’à la commercialisation des produits finis. La volatilité des charges d’alimentation peut être réduite au niveau des élevages par l’amélioration de l’autonomie alimentaire, en particulier en protéines végétales.

Dans le secteur caprin laitier, la concurrence internationale se développe avec la montée en puissance des Pays-Bas et la persistance de la présence de la filière espagnole. En termes de marché, la croissance de la demande portant principalement sur les fromages, se réduit.

La filière caprine est, elle aussi, confrontée à la volatilité des coûts de production, particulièrement dans certains systèmes de production. Elle est également confrontée à la concurrence des productions végétales dans de nombreux bassins de polyculture-élevage (zones Poitou-Charentes et Centre Ouest). La filière caprine est fragile et doit améliorer sa compétitivité. Elle peut néanmoins s’appuyer sur sa bonne image auprès du consommateur.

Le secteur ovin-lait présente la particularité d’être présent essentiellement en zones de montagne (plus de 90 %) et localisé dans trois bassins principaux (Rayon de Roquefort, Pyrénées-Atlantiques et Corse), avec une part importante des valorisations (essentiellement des fromages) sous signes officiels de la qualité et de l’origine (un tiers des fabrications sont des AOP, Roquefort, Ossau Iraty ou Brocciu).

La filière doit faire face à une stagnation, voire à un repli des ventes de produits sous signes officiels de qualité et d’origine et subit fortement la hausse des charges d’alimentation animale. Les soutiens spécifiques aux zones de montagne sont évidemment essentiels dans ce secteur.

2. La production de viande bovine

La production de viande bovine française est issue des cheptels allaitant et laitier. Depuis la mise en place des quotas laitiers en 1984, le cheptel allaitant a progressivement « remplacé » le cheptel laitier. La France détient le premier cheptel allaitant dans l’Union européenne, avec un peu plus de 4 millions de vaches, loin devant l’Allemagne et le Royaume-Uni. Elle est également le premier pays producteur et consommateur de viande bovine en Europe.

Cette filière souffre aujourd’hui :

– d’une inadéquation qualitative croissante entre l’offre et la demande, tant sur le marché national qu’à l’export ;

– d’une forte dépendance à l’égard des marchés à l’exportation, la filière allaitante ayant fait le choix, dès les années 1970, de se tourner vers l’expédition de bovins maigres (broutards) vers l’Italie et l’Espagne ;

– d’un déficit d’organisation de l’offre, alors que les opérateurs de l’aval sont concentrés (grande distribution) ou en cours de concentration (abattage-découpe) ;

– d’une surcapacité du maillon abattage-découpe, même si en dépit d’un mouvement de concentration, sa taille demeure modeste comparée à celle de ses concurrents allemands et danois ;

– d’une hétérogénéité très forte entre exploitations avec des coûts de production élevés et très variables.

La volatilité des charges, principalement d’alimentation animale est également importante dans cette filière, mais moins prégnante que dans la filière laitière ou dans les filières porc et volailles.

La mise en œuvre de la réforme de la PAC 2014-2020, dans le cadre du premier pilier permettra de maintenir les soutiens couplés, de gérer les prairies permanentes à travers le verdissement et de renforcer l’organisation économique des filières.

Dans le cadre du second pilier, les questions essentielles sont celles de la compensation des handicaps naturels et la modernisation des élevages.

L’État et les régions ont, par ailleurs, décidé d’accompagner la compétitivité et l’adaptation des exploitations agricoles à travers un plan de soutien aux investissements d’un montant prévisionnel de 200 millions d’euros par an sur la période 2014-2020.

3. La production de viande ovine

La filière ovine a connu un déclin important depuis 1980 affectant majoritairement le secteur de la viande. La France détient le troisième cheptel allaitant avec 4,1 millions de femelles reproductrices, après le Royaume-Uni et l’Espagne. Les élevages sont situés en majorité dans les zones défavorisées.

La filière souffre d’un manque de structuration, mais tente d’y remédier, en s’appuyant notamment sur l’aide couplée à la production ovine, dont les critères d’éligibilité visent à renforcer l’organisation de la filière, mais aussi la productivité des élevages.

Le nombre d’organisations de producteurs se réduit, du fait notamment de l’augmentation du seuil de reconnaissance qui leur est imposé. Ce mouvement doit se poursuivre et s’amplifier et améliorer les performances économiques de l’amont.

Le maillon abattage doit également continuer son mouvement de restructuration (– 20 % des outils depuis 2001, au gré des fermetures pour raisons sanitaires).

Malgré ses difficultés, la filière ovine est la seule filière viande qui a signé, à la fin de 2010, un premier accord interprofessionnel relatif à la contractualisation en application de l’article 12 de la loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche (LMAP). L’accord a été étendu ensuite en 2011, puis à nouveau en 2014.

La production d’agneaux, qui s’était stabilisée en 2010 avec la mise en œuvre du bilan de santé de la PAC a connu, en 2011, une augmentation, ainsi qu’une amélioration significative de la productivité des brebis. En revanche, les années 2012 et 2013 ont marqué un recul de la production.

Le coût de production de l’agneau français est le plus élevé d’Europe ; il est près de 40 % supérieur à celui de l’agneau irlandais. Bien que le cours de la viande ovine française en 2013 se soit maintenu à un niveau élevé, le revenu des éleveurs d’ovins-viande demeure parmi les plus bas de l’agriculture.

Le manque d’installations est l’une des difficultés importantes de ce secteur et constitue un enjeu essentiel pour l’avenir, d’autant plus que le nombre d’éleveurs partant en retraite sera élevé dans les prochaines années.

Afin de favoriser la poursuite de la professionnalisation à travers la mise en œuvre de la réforme de la PAC 2014-2020, l’aide couplée ovine a été maintenue, mais les critères d’éligibilité ont été adaptés. Les nouveaux producteurs bénéficieront d’une majoration pendant trois ans.

À partir de 2015, la programmation du développement rural favorisera les systèmes herbagers autonomes, grâce notamment aux nouvelles mesures agro-environnementales et climatiques et l’indemnité compensatoire de handicaps naturels sera maintenue et revalorisée.

4. La production avicole

De manière générale, la volaille est un produit bien positionné dans la consommation mondiale, car elle dispose de nombreux atouts (peu onéreuse, adaptable à la plupart des climats et pratiques culturelles) et sa consommation est en hausse régulière dans le monde et en Europe.

Pourtant, bien qu’elle reste le premier producteur européen, la France accuse un recul de sa production depuis une dizaine d’années, alors même que notre pays dispose d’atouts certains et que ses concurrents proches augmentent leurs productions.

La France est ainsi le seul producteur européen de poids à avoir baissé ses volumes de près de 18 % depuis 2000, alors que tous ses concurrents européens ont accru leur production, ce qui a permis à l’Europe d’afficher un taux positif moyen annuel de sa production de 1,3 % entre 2000 et 2012.

Si la France reste le premier producteur européen de volailles, (1,85 million de tec) elle occupe désormais la troisième place en Europe s’agissant de la production de poulets, à quasi égalité avec l’Allemagne, derrière le Royaume-Uni et la Pologne.

Cette situation résulte d’une perte de compétitivité tenant à plusieurs facteurs :

– le coût de production de la viande de poulet plus élevé en France qu’au Brésil, aux États-Unis, en Pologne, aux Pays-Bas et en Allemagne. Avec le Brésil, l’écart de compétitivité est dû au coût de l’alimentation animale, aux coûts de main-d’œuvre et de l’énergie. L’écart avec les autres pays européens producteurs est lié aux raisons suivantes :

– de situations différentes en termes de fiscalité, notamment avec l’Allemagne, même si cette dernière a adopté en juillet 2014, un salaire minimum (8,50 euros bruts de l’heure) applicable à partir du 1er janvier 2015, mais avec des adaptations pour l’agriculture ;

– de fortes disparités dans les résultats technico-économiques des élevages français ;

– d’écarts significatifs dans les coûts d’abattage (notamment à cause d’unités d’abattage trop nombreuses et pas assez automatisées) ;

– de l’interprétation non harmonisée au niveau communautaire de certaines règles d’étiquetage relatives notamment à la viande séparée mécaniquement (VSM).

– le parc de bâtiments est vieillissant (âge moyen de 19 ans), de faible surface (1 533 m² en moyenne par exploitation contre près de 4 000 m² dans les autres pays producteurs), peu modernisé et peu spécialisé (sur 20 000 exploitations, plus des 2/3 tiers ne sont pas spécialisées).

– le manque d’organisation et de structuration de la filière lui porte préjudice, d’autant plus qu’il n’existe toujours pas d’interprofession forte et structurée pour la volaille de chair :

– la segmentation du marché en deux types de produits (volaille label et volaille standard) éparpille les intérêts et contribue à l’absence d’une stratégie commune de gestion du marché ;

– le poids important que la région Bretagne occupe dans la filière contribue à son repli sur des problématiques économiques locales dans un contexte d’émergence de stratégies globales et de grands acteurs de taille mondiale.

Au-delà de ces faiblesses structurelles, la filière volailles de chair française subit de plein fouet les difficultés rencontrées sur le marché « grand-export », où la viabilité des deux opérateurs Doux et Tilly-Sabco est menacée depuis la mise à zéro des restitutions à l’exportation en 2013.

Les risques de répercussion de la crise du secteur sur la filière dans son ensemble sont importants, compte tenu de son poids : le secteur grand-export représente ainsi un quart des poulets abattus au niveau national, la moitié de l’activité volaille bretonne, 30 % de la sélection française et 36 % des poussins au total, 1 450 000 m2 de bâtiments et 3 500 à 4 000 emplois. L’équilibre de chaque maillon de la filière volaille de chair dans son ensemble peut être perturbé : depuis les accouveurs jusqu’aux transporteurs en passant par les éleveurs et les entreprises d’alimentation animale.

Le plan stratégique pour la filière volaille de chair à horizon 2025, présenté en février 2014 reprend dans ses grandes lignes le plan d’avenir de la filière avicole présenté en 2013. Ce plan se décline en six grands axes :

– allier performance économique et environnementale à l’amont de la filière (notamment via la modernisation du parc de bâtiments),

– accompagner la stratégie industrielle des entreprises pour un développement sur tous les marchés identifiés et notamment celui de la découpe du poulet standard,

– construire un nouveau mode de relations entre les industriels et leur aval,

– renforcer la gouvernance de la filière,

– accompagner la filière « grand-export » dans son adaptation à son nouvel environnement économique,

– développer l’attractivité de la filière.

5. La production de viande porcine

La France est le troisième pays producteur de porcs dans l’Union européenne, avec près de 13,8 millions de têtes et près de 10 % de la production communautaire.

Depuis 2010, la production recule, ce qui place la filière française sur une spirale dangereuse : faute de volume, les abattoirs français mobilisent moins bien les économies d’échelles que leurs concurrents, leurs faibles marges les privent des moyens d’investir pour moderniser des installations d’abattage et de découpe en partie vieillissantes, leur performance et leurs parts de marchés reculent ce qui en retour pèse sur la production.

Les analyses comparatives conduites en Europe montrent que la filière a perdu une partie de ses atouts antérieurs et souffre désormais d’un différentiel de compétitivité avec ses concurrents (hausse du coût de production en élevage, taille et efficacité des élevages, moindre soutien financier des partenaires, coût de mises aux normes, différences de mise en œuvre concernant la réglementation communautaire relative au coût de la main-d’œuvre, à la protection de l’environnement, à la production d’énergie ou encore à la fiscalité).

D’autre part, confrontée à la compétition européenne, la filière porcine française souffre d’un manque de cohésion entre ses différents maillons. Entre la production et l’abattage, le clivage est fréquent. Le marché du porc breton (MPB) outil de vente au cadran, créé en 1972 par les producteurs pour regrouper leur offre, a atteint son but initial de défense du prix « entrée abattoir », d’accompagnement de la restructuration des entreprises agricoles (au bénéfice des apporteurs au cadran), de standardisation de l’offre, mais n’a pas permis de construire une cohésion sectorielle.

Les groupements de producteurs sont des acteurs presque incontournables de la mise en marché (89 % de la production porcine). Pour autant, les organisations de producteurs sont encore trop nombreuses (environ 50), laissant les producteurs encore insuffisamment structurés. La plupart des groupements de producteurs offrent aujourd’hui à leurs adhérents une large palette d’activités situées en amont ou aval de l’élevage ou en appui à son activité. Mais un déficit de connexion avec l’aval de la filière rend difficile la concertation en vue d’une adéquation de l’offre et de la demande.

En outre, la filière porcine n’a pas mis en œuvre les outils adéquats en vue d’intégrer la volatilité des prix des matières premières dans les transactions commerciales entre chaque maillon.

Globalement, l’adaptation de l’offre à la demande se réalise moins vite en France que chez nos principaux compétiteurs.

Enfin, aucun groupe de dimension européenne n’a clairement émergé (le premier groupe français, traite 4,9 millions de têtes par an). Comme les autres secteurs d’élevage, cette filière doit faire face à une surcapacité globale d’abattage, qui grève sa compétitivité.

Une restructuration est en train de s’opérer à la faveur malheureusement des pertes importantes subies par la Cecab qui ont conduit les dirigeants à envisager de se séparer du pôle viande porcine. Ainsi, en février 2013, le Groupe Gad a été placé en redressement judiciaire par le Tribunal de commerce de Rennes. Le projet de plan de continuation a préconisé la fermeture notamment du site de Lampaul-Guimiliau dans le Finistère. Ce plan, validé en octobre 2013, a entraîné la suppression de 889 emplois et la fermeture de l’abattoir de Lampaul-Guimiliau. Le regroupement des activités sur le site morbihannais de Josselin n’a pas permis de redresser la situation du Groupe Gad.

À l’été 2014, le groupement des mousquetaires et de sa filiale SVA Jean Roze a annoncé le dépôt d’une lettre d’intention pour la reprise de l’abattoir de porcs de Josselin. Cette reprise, si elle se confirme, préfigure la restructuration du secteur entre les principaux acteurs : Cooperl Arc Atlantique, Groupe Bigard, Kermené (filiale des centres distributeurs E. Leclerc) et donc SVA (Intermarché).

Le plan stratégique pour la filière porcine à horizon 2025, présenté en février 2014 reprend dans ses grandes lignes le plan d’action pour la filière porcine présenté en 2013. Ce plan se décline en 5 grands axes :

– maintenir le niveau de performances techniques des élevages et produire autrement ;

– adapter l’outil industriel abattage-découpe et réduire de façon concertée les surcapacités ;

– vivre avec la volatilité des prix des matières ;

– mieux valoriser la production française ;

– pérenniser une filière attractive pour les éleveurs et reconnue par la société.

C. LE RÔLE STRATÉGIQUE DES INDUSTRIES AGROALIMENTAIRES N’EST PAS ASSEZ MIS EN LUMIÈRE

Pour le Rapporteur spécial, la bonne santé de notre économie dépend largement de celle des industries agroalimentaires (IAA) que notre pays a su développer.

Or ces industries, si elles disposent de remarquables atouts, souffrent sans doute aussi de certaines faiblesses.

Le secteur de l’élevage, en particulier, joue un rôle irremplaçable en matière d’emploi, d’occupation du territoire, de présence sur les marchés extérieurs.

Les entreprises du secteur des industries agroalimentaires (IAA) étaient en 2011 au nombre de 59 400 environ, plus de 95 % d’entre elles comptant moins de 250 salariés et 70 % moins de 50. Elles occupaient la première place au sein de l’industrie, représentant respectivement 19,4 %, 18,7 % et 16,7 % des résultats de l’ensemble du secteur manufacturier pour l’emploi, le chiffre d’affaires et la valeur ajoutée.

Les industries agroalimentaires ont réalisé, toujours en 2011, un chiffre d’affaires d’environ 169 milliards d’euros.

Les industriels français de l’agroalimentaire se distinguent de leurs concurrents européens par la place accordée à la transformation des produits de l’élevage : 42 % de l’emploi sont assurés par les industries de la viande et du lait qui sont à l’origine de 30 % de la valeur ajoutée.

Maillant le territoire au plus près de la ressource agricole dont elles assurent 70 % des débouchés, les industries agroalimentaires sont aussi le premier employeur industriel (576 000 salariés au 31 décembre 2011). L’ensemble des régions françaises participe d’ailleurs à la formation de la valeur ajoutée des IAA.

L’emploi et la production ont mieux résisté à la crise financière de 2008-2009 dans les IAA que dans d’autres secteurs industriels comme l’automobile, du fait de la nature des biens produits (de première nécessité) ainsi que de la croissance démographique mondiale.

En 2013, l’excédent des échanges agroalimentaires français a atteint 11,6 milliards d’euros ; bien que conservant sa place de second excédent commercial après l’aéronautique, le secteur agroalimentaire est celui qui a le plus contribué, avec une progression de 3,3 %, à la croissance totale des exportations françaises en 2013.

Cette évolution s’accompagne d’importantes disparités sectorielles : le solde largement excédentaire des produits du terroir (les produits alcoolisés, en particulier le vin ou les fromages produits sous AOC) compense le déficit des produits de deuxième transformation (tels que les produits alimentaires à base de céréales, les préparations de viandes et de poissons, les confiseries, les aliments pour animaux). Notre solde commercial des IAA après déduction du vin et des spiritueux est ainsi négatif depuis 2004.

Alors que la France était le 2ème exportateur mondial en 2000, ses parts de marché à l’exportation agroalimentaire se sont dégradées, surtout vis-à-vis de nos voisins allemands. Nous sommes désormais le 5ème exportateur mondial après les États-Unis, les Pays-Bas, l’Allemagne et, depuis 2011, le Brésil, devenu, avec la Chine, un acteur incontournable dans les échanges agroalimentaires mondiaux. Les premiers groupes français du classement mondial des IAA sont le groupe Danone (13ème position) et le groupe Lactalis (20ème position). Au plan européen, figurent les groupes Danone (4ème) et Lactalis (8ème), mais aussi Pernod Ricard (12ème), Bigard SA (17ème) et SODIAAL (19ème).

La taille réduite et la faible rentabilité des IAA françaises handicapent leur accès aux financements nécessaires pour investir, innover, exporter et conquérir de nouveaux marchés. Les PME enregistrent ainsi des résultats en baisse, que compense en partie la bonne performance de quelques grands groupes. Le secteur nécessite à cet égard sûrement de profondes restructurations dans une perspective de consolidation, d’internationalisation et de recherche d’une taille critique.

Les IAA sont sans doute aussi parfois victimes d’une image négative auprès des consommateurs et des citoyens, alimentée par des problèmes sanitaires fortement médiatisés (ESB, grippe aviaire, E.Coli…), d’amalgames récurrents avec les problématiques agricoles (OGM, pesticides, crise du « concombre ») et probablement d’un climat général de défiance touchant à l’alimentation.

Les relations commerciales avec la grande distribution (70 % des débouchés des IAA) restent essentiellement de type client-fournisseur et caractérisées par un déséquilibre important dans les pouvoirs respectifs de marchés ; les tensions demeurent, exacerbées par un contexte de plus forte volatilité.

Les métiers spécifiques aux IAA semblent souffrir d’un déficit général d’image du secteur pouvant apparaître insuffisamment attractif notamment pour les jeunes : des conditions de travail parfois difficiles, des salaires sensiblement plus faibles que dans d’autres branches industrielles, des perspectives de carrières professionnelles jugées moins intéressantes, un niveau de qualification parfois faible. Les professionnels estiment que 10 000 postes par an ne seraient ainsi pas pourvus.

Probablement insuffisamment actives en matière de recherche-développement, les IAA doivent constamment innover afin de se différencier, d’améliorer leurs produits et de gagner des parts de marché. Elles sont contraintes d’adapter en permanence leurs stratégies aux attentes du marché et aux besoins des consommateurs, en termes de goût, de nutrition, de diversité, de naturalité. L’innovation reste essentiellement le fait des grandes entreprises et porte en particulier sur les produits, le marketing et de nouveaux modes de production plus respectueux de l’environnement.

Les industries agroalimentaires sont de plus en plus confrontées à des défis structurels dans le cadre de la concurrence européenne, notamment sur l’effet taille, car il existe peu d’entreprises de taille intermédiaire et sur l’amélioration de la performance industrielle. Certains secteurs ont connu récemment ou connaissent des difficultés nécessitant une attention soutenue de la part des pouvoirs publics qui doivent mesurer les enjeux en termes d’économie et d’emploi. C’est le cas notamment des filières avicole (le groupe Doux, notamment) ou porcine.

Si elles sont ainsi confrontées à de réelles difficultés, les industries agroalimentaires demeurent pour notre pays un atout économique considérable. Ce secteur présente d’ailleurs la particularité d’avoir peu délocalisé et d’avoir perdu moins d’emplois que les autres secteurs industriels français

Encore faut-il valoriser ces industries, les développer, si nous voulons rester, dans le monde d’aujourd’hui, des acteurs agricoles majeurs. Une question doit être posée sur ce point : peut-on imaginer une agriculture prospère, sans que celle-ci contrôle une partie de ses activités d’aval ?

Cette question soulève celle de la concentration désormais très marquée du secteur de la distribution. Le Rapporteur spécial suggère qu’une réflexion sérieuse soit menée, pour rééquilibrer les pouvoirs entre les secteurs de la production et de la transformation agricoles par rapport à ceux de la grande distribution. L’intérêt de promouvoir une « décartellisation » de la grande distribution en France pour rétablir un fonctionnement normal des marchés doit être examinée.

D. L’INDISPENSABLE EFFORT POUR L’INSTALLATION DES JEUNES EN AGRICULTURE DOIT ÊTRE POURSUIVI

Le Rapporteur spécial est depuis longtemps convaincu que la vitalité de notre agriculture et du secteur agroalimentaire français suppose que soit mené un effort permanent et vigoureux en faveur de la « relève agricole », tout particulièrement hors du cadre familial.

Initiée par la loi d’orientation agricole de 1960, la politique d’installation des jeunes agriculteurs a permis d’accompagner avec succès depuis cinquante ans le renouvellement des générations et de participer à la modernisation et à l’adaptation de l’agriculture française. Plus d’une installation de jeune agriculteur sur deux est soutenue aujourd’hui par ce dispositif inscrit dans le « deuxième pilier » de la politique agricole commune consacré au développement rural.

Depuis 1973, la politique d’installation s’appuie sur plusieurs dispositifs : la dotation jeune agriculteur (DJA) et l’octroi de prêts bonifiés, complétés par des exonérations fiscales et sociales et par divers droits (droits à paiements uniques gratuits, droits de plantation, quotas laitiers, accès aux aides du Programme pour l’installation et le développement des initiatives locales, le PIDIL et aux aides des collectivités territoriales).

La dotation jeune agriculteur (DJA) est une aide permettant de faire face au démarrage de l’activité. Le montant de la DJA, qui n’a pas été revalorisé depuis 1984 varie de 8 000 à 35 900 euros selon la zone d’installation (de plaine, défavorisée ou de montagne) et les caractéristiques du projet qui permettent au préfet de la moduler. La moyenne nationale des montants proposés, toutes zones confondues, s’établit à 16 900 euros.

Dans le cadre du Programme de développement rural hexagonal 2007-2013 (PDHR), la DJA a été cofinancée à 50 % par des crédits du Fonds européen agricole pour le développement rural (FEADER).

Pour la programmation 2014-2020, le taux de cofinancement par le FEADER a été porté à 80 %.

Quant aux prêts bonifiés à l’installation (dits « à moyen terme spéciaux ou MTS-JA »), ils ont pour objet de faciliter l’installation des jeunes, en leur permettant de réaliser, dans des conditions financières avantageuses, les investissements favorisant le démarrage de leur activité. Ces prêts sont octroyés aux jeunes agriculteurs ou aux sociétés auxquelles ils appartiennent, dans le cadre d’un plan de développement de l’exploitation, d’une durée de 5 ans et servent exclusivement au financement :

– de la reprise ;

– de la mise en état et de l’adaptation du capital mobilier et immobilier nécessaires à l’installation ;

– du besoin en fonds de roulement au cours de la première année d’installation ;

– de l’acquisition de terres ;

– de l’acquisition de parts sociales.

Les prêts « MTS-JA » bénéficient, soit d’un taux de 2,5 % et d’une durée bonifiée de 7 ans, pour les exploitations situées en zone de plaine, soit d’un taux d’1 % et d’une durée bonifiée de 9 ans, pour les exploitations situées en zone défavorisée ou de montagne. Le plafond de subvention équivalente (soit l’avantage financier que représente la bonification d’intérêt) est de 11 800 euros en zone de plaine et de 22 000 euros en zones défavorisées.

Dans le cadre du PDRH 2007-2013, les charges de bonification ont été cofinancées à 50 % par l’État et à 50 % par le FEADER, le cofinancement par le FEADER étant porté à 80 % sur la programmation 2014-2020.

Les aides du Programme pour l’installation des jeunes en agriculture et de développement des initiatives locales (PIDIL) sont destinées à encourager les transmissions d’exploitations à des jeunes s’installant hors cadre familial ou sur de petites structures ayant besoin d’être confortées.

Ce programme, qui n’est pas cofinancé par l’Union européenne (il est simplement notifié à la Commission en tant qu’aide d’État) comporte des actions destinées à encourager financièrement les cédants et les propriétaires fonciers à louer leurs terres et leurs bâtiments aux jeunes qui s’installent. Il comporte des aides à destination des jeunes (audits d’exploitations à reprendre, stages de parrainage, compléments locaux de DJA).

Le PIDIL concourt également au financement des « points info installation » départementaux, qui deviendront les « points accueil-installation » en 2015, mis en place pour accueillir les candidats à l’installation ainsi que diverses actions de communication.

Les exonérations fiscales nationales, réservées aux bénéficiaires de la DJA ou des prêts bonifiés diminuent le poids de différents impôts lors de l’installation.

La DJA est par ailleurs exclue de l’assiette des cotisations sociales et de la CSG–CRDS et les jeunes agriculteurs à titre principal bénéficient d’une exonération partielle de cotisations.

Les droits à paiement unique (DPU) peuvent faire l’objet de transferts entre agriculteurs, effectués à titre gratuit. Les transferts de DPU aux jeunes installés sont exemptés de prélèvements, afin de leur permettre d’obtenir des DPU plus facilement et de préserver la valeur faciale des DPU repris. La réserve de DPU intervient dans les cas où les nouveaux installés ne peuvent effectuer de clause de transferts de DPU.

Dans le secteur laitier, les jeunes agriculteurs installés depuis moins de cinq ans bénéficient de modalités spécifiques de redistribution des quotas laitiers.

Il faut mentionner aussi le dispositif « J’innovations » consistant en aides aux projets innovants présentés par les jeunes agriculteurs ; initialement réservé aux bénéficiaires des aides à l’installation, il a été ouvert en 2013 aux jeunes installés depuis moins de cinq ans non aidés. Ce dispositif ne sera plus utilisé à partir de 2015, en raison de sa faible mobilisation.

La tendance à long terme et, ce point est essentiel, est à la décrue des installations aidées. En 15 ans, le nombre annuel de bénéficiaires de la DJA a diminué de 38 %, passant de 8 164, à un niveau stabilisé au-dessus de 5 000 depuis 2009.

Pour la programmation 2007-2013, l’objectif annoncé par le Gouvernement – qui a fait preuve d’une ambition qui doit être saluée – a été d’atteindre 6 000 installations aidées par an. Cet objectif est reconduit pour la nouvelle programmation. La réforme des aides à l’installation proposée à partir de 2015, à la suite des Assises de l’installation doit concourir à l’atteinte de ce résultat.

Les crises sectorielles de 2009 ainsi que l’abandon des dispositifs de préretraite en 2008 ont pourtant provoqué une chute des installations aidées dont le rythme annuel s’est stabilisé à 5 000 depuis cinq ans.

L’année 2014 a été une année de transition sur laquelle les dispositifs de l’ancienne programmation ont été reconduits à l’identique.

Suite aux assises de l’installation conduite par le Ministre de l’agriculture plusieurs changements seront apportés dès 2015 à la politique d’installation pour la rénover et la renforcer :

● L’ouverture à l’ensemble des porteurs de projets (aidés ou non aidés) du dispositif d’accompagnement :

– les missions des « points accueil installation » seront élargies afin de permettre l’accueil et l’orientation de tous les candidats à l’installation ;

– les candidats non aidés, dans une démarche volontaire, pourront réaliser un plan de professionnalisation personnalisée leur permettant de suivre des formations et des stages en entreprises, afin de compléter leur formation initiale.

● Une adaptation de la procédure d’aide à l’installation pour répondre d’une part à la réglementation européenne et, d’autre part, intégrer les demandes des conseils régionaux, gestionnaires du FEADER depuis cette année :

– un nouveau modèle d’étude prévisionnelle sur 5 ans sera mis en place. Celui-ci privilégiera l’approche projet à la projection de résultats économiques facilitant ainsi l’appropriation du document par le jeune. Les objectifs sont également de simplifier le suivi de la réalisation du projet et de limiter le nombre d’avenants à l’étude ;

– de nouvelles dispositions seront prises afin de permettre l’accès aux aides dans le cadre des installations progressives ;

– un nouveau calcul du montant de DJA sera mis en place. Le montant de base fixé par zone (plaine, zone défavorisée ou montagne) pourra être modulé positivement pour les installations hors cadre familial, pour les projets agro-écologiques ou favorables à l’augmentation de valeur ajoutée et de l’emploi. Il sera, par ailleurs, possible pour les régions de créer des modulations spécifiques en fonction des leurs priorités ;

– la durée de bonification pour les prêts MTS-JA est désormais réduite à 5 ans en application des nouvelles dispositions communautaires.

– le PIDIL sera adapté afin de permettre une meilleure articulation avec les réformes précédemment citées.

● Une réforme des aides du premier pilier de la PAC 

En 2015, les droits à paiement unique (DPU) sont supprimés et remplacés par les droits à paiement de base (DPB).

Les DPB alloués aux jeunes agriculteurs seront revalorisés de 25 % de la valeur moyenne nationale de la totalité des aides directes dans la limite de 34 DPB. Un budget de 75 millions d’euros par an sera mobilisé dans ce but sur le 1er pilier de la PAC à partir de 2015.

Des programmes de réserves visant à soutenir l’installation seront mis en place en 2015.

Il conviendra d’examiner dans les deux à trois années qui viennent si ces dispositions ont permis une relance de l’installation et d’atteindre l’objectif des 6 000 installations par an.

E. LA VALORISATION DE LA FORÊT ET DE LA FILIÈRE BOIS DEMEURE TRÈS INSUFFISANTE

Notre pays a-t-il une politique forestière ?

La forêt doit répondre à l’exigence de produire plus de bois, tout en protégeant la biodiversité et en répondant à de multiples attentes sociales. Elle est aussi au cœur de nos préoccupations sur la question du changement climatique.

La réorientation de la consommation vers des modes plus responsables est une préoccupation essentielle de la filière ; la préparation du « mix énergétique » 2020 ne peut, en effet, se faire sans la contribution majeure de ce secteur et l’effort d’aménagement du territoire ne peut s’entendre, en laissant de côté la forêt.

Le projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte adopté en première lecture par l’Assemblée nationale, a retenu précisément des objectifs ambitieux en matière énergétique : réduction des émissions de gaz à effet de serre de 40 % entre 1990 et 2030 et division de ces émissions par quatre à l’horizon 2050, recours à un budget bas carbone et à une stratégie nationale bas carbone pour améliorer notre politique de lutte contre le changement climatique.

Chacun mesure combien la forêt est ainsi un milieu utile à de nombreux titres, cette multifonctionnalité ayant été justement reconnue dans la loi forestière de 2001 puis confortée dans la loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt.

Et pourtant, ses apports sont trop peu ou mal valorisés comme le Rapporteur spécial l’a très souvent fait remarquer. La question du stockage du carbone en est un exemple, car ce service de « puits de carbone », bien que reconnu par tous, n’est pas rémunéré à ce jour.

Malgré des « fondamentaux économiques » favorables, une ressource disponible importante en métropole (2 500 millions de m3), une demande de produits forte et des compétences humaines avérées, le développement du secteur dont le chiffre d’affaires est voisin de 40 milliards d’euros, reste, par ailleurs, insuffisant.

Le déficit commercial de la filière bois était ainsi de 5,4 milliards d’euros en 2009, 6,4 milliards d’euros en 2010, 6,6 milliards d’euros en 2011 ; les exportations portent essentiellement sur des produits bruts, les importations concernant plutôt des biens de consommation, tels que des meubles ou du papier carton.

Les scieries françaises étant de taille plus modeste que leurs concurrentes européennes, le tiers de la demande en sciages est aujourd’hui satisfait par des produits d’importations. Si le secteur des panneaux à base de bois réalise la moitié de son chiffre d’affaires à l’exportation vers les pays de l’Union européenne, celui de la pâte à papier est confronté à une forte concurrence des producteurs de pays émergents (Brésil, Chine).

Mobiliser et transformer davantage en France, dans le cadre d’une filière économique organisée doit être ainsi un objectif prioritaire de la politique forestière.

La forêt française souffre d’une manière générale de sous-exploitation, alors que la demande est aujourd’hui croissante, que ce soit pour le bois de sciage, la trituration ou le bois destiné à la production d’énergie. Ce défaut de croissance entraîne lui-même la faiblesse de l’investissement forestier et pose sans doute la question du renouvellement de notre forêt, qui pourrait ne plus être garanti. Ceci est d’autant plus préoccupant que, plus que tout autre milieu, la forêt est concernée par les conséquences du changement climatique.

Retrouver un cadre sécurisé d’investissement, pour assurer une régénération efficace de la forêt française, compatible avec les contraintes du changement climatique et les objectifs de protection de la biodiversité et de production de bois est ainsi devenu un impératif pour les années qui viennent. La longueur des cycles forestiers nous impose d’agir dès à présent.

Cette stratégie devra toujours prendre en compte le rôle de protection essentiel que la forêt joue en zone de montagne (dans la lutte contre les éboulements ou l’érosion des sols) et en zone littorale (fixation des dunes et des cordons littoraux), mais aussi les risques que la forêt elle-même encourt, du fait des incendies et des phénomènes de dépérissements dus aux périodes de canicule et de sécheresse.

Le Rapporteur spécial insiste sur le rôle irremplaçable que jouent dans la politique forestière plusieurs organismes nationaux, dont les cadres d’actions ont été récemment consolidés ou renouvelés.

C’est principalement le cas de l’Office National des Forêts (ONF), qui a fait l’objet d’importantes réformes d’organisation depuis dix ans et qui a vu son rôle et son développement confortés dans les contrats pluriannuels d’objectifs et de performances (COP) conclus avec l’État. Le contrat portant sur la période 2012-2016 a été signé également par la Fédération nationale des communes forestières (FNCOFOR), témoignage de son ancrage indispensable au cœur des politiques territoriales.

Pour le budget 2015, ainsi que le Rapporteur spécial l’a indiqué dans la première partie de ce rapport, l’ONF voit sa subvention diminuer de 21 millions d’euros.

Le Centre national de la propriété forestière (CNPF) est issu du regroupement intervenu en 2010 entre les Centres régionaux de la propriété forestière (CRPF), le Centre national professionnel de la propriété forestière (CNPPF) et l’Institut du développement forestier (IDF). Son contrat d’objectifs, sur la même période 2012-2016, fixe les orientations stratégiques de moyen terme, déclinées à partir de la stratégie nationale.

L’Inventaire forestier national (IFN) a vu, quant à lui, ses missions consolidées dans le cadre de sa fusion le 1er janvier 2012 avec l’Institut géographique national (IGN) au sein de l’Institut national de l’information géographique et forestière. Ce regroupement, gage de synergies accrues et de renforcement des compétences, intervient à un moment où les données de caractérisation de la forêt française sont particulièrement nécessaires.

Enfin l’Institut technologique FCBA (forêt, cellulose, bois-construction, ameublement), qui a lui-même regroupé en 2007 le Centre technique du bois et de l’ameublement (CTBA) et l’Association forêt-cellulose (AFOCEL), est devenu l’établissement unique de référence en matière de technologie du bois. Son objectif d’appui aux entreprises pour intégrer les innovations techniques est également décliné dans le cadre d’un nouveau contrat de performances pour la période 2012-2016.

L’action de l’État en faveur des investissements forestiers prend lui-même de multiples formes.

Depuis le début des années cinquante, les investissements forestiers ont été encouragés au moyen de subventions et de prêts du Fonds forestier national (FFN) créé en 1946. Depuis la suppression du FFN en 1999, l’ensemble des aides directes à l’investissement forestier figure désormais, comme le Rapporteur spécial l’a précédemment indiqué, dans le programme 149 de la mission Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales.

Dans le cadre de la programmation 2007-2013 du règlement du développement rural, le programme de développement rural hexagonal (PDRH) avait inscrit, par ailleurs, comme l’une de ses priorités, l’amélioration de la compétitivité du secteur forestier.

L’autorité de gestion a été ensuite transférée, dans le cadre de la programmation 2014-2020, aux régions, qui ont élaboré des programmes de développement ruraux régionaux.

Le premier axe retenu pour le programme de développement rural hexagonal a concerné la reconstitution des peuplements sinistrés par les tempêtes.

L’engagement de l’État pour la reconstitution des forêts après les tempêtes Lothar et Martin de 1999 s’est achevé en 2009. Le bilan du « plan chablis » financé sous deux programmations dans le cadre des aides au développement rural (PDRN 2000-2006 et PDRH 2007-2009) s’établit à environ 340 000 hectares nettoyés et 225 000 hectares reconstitués, pour une enveloppe totale de financement public (État et FEADER) de 732 millions d’euros sur dix ans.

Pour reconstituer les surfaces sinistrées par la tempête Klaus survenue le 24 janvier 2009 dans trois régions du Sud Ouest, l’État a engagé un important plan d’action sur huit ans (2009-2016) doté à l’origine de 415 millions d’euros. Le montant a été porté à 536 millions d’euros (dont 61 du FEADER) sur la période 2009-2017. Au 30 juin 2014, 355 millions d’euros de subventions avaient été engagés.

Le deuxième axe de la politique suivie concerne la desserte forestière permettant d’améliorer la desserte interne aux massifs dans une perspective de mobilisation immédiate du bois. Sont ciblées les actions sur la voirie privée communale et sur les forêts propriétés de particuliers ou de leurs groupements.

Depuis le début de la programmation PDRH en 2007, près de 92 millions d’euros de dépenses publiques ont permis de créer et de mettre aux normes plus de 4 760 km de routes et de pistes forestières et de créer 2 700 places de dépôt et autres travaux annexes.

Les investissements visent aussi à améliorer la valeur économique des forêts.

Les opérations d’amélioration de la valeur économique des forêts ont pour objectif principal d’accompagner les sylviculteurs dans l’amélioration de la valeur d’avenir des peuplements par un accroissement à terme de la qualité technologique des produits au moyen d’opérations, par exemple, d’élagage ou de renouvellement favorisant la stabilité et la vitalité des peuplements.

Entre 2007 et 2013, dans le cadre du PDRH, près de 14 millions d’euros de dépenses publiques ont permis la réalisation de travaux sur près de 12 000 hectares de forêts.

Le contrat d’objectifs et de performances (COP) 2012-2016 de l’ONF insiste enfin sur la nécessité d’investissements dans les forêts domaniales permettant d’en assurer le renouvellement. Le COP vise un objectif moyen de programmation de 87 millions d’euros par an de travaux patrimoniaux (investissement, entretien y compris de desserte et reconstitution), dont 50 % de travaux d’investissement, le minimum de réalisation envisagé étant de 80 millions d’euros par an. Ce montant n’a malheureusement pas été atteint en 2012 et 2013, du fait des difficultés économiques de l’ONF (70,2 et 62,6 millions d’euros en 2013 et en 2014).

Le Rapporteur spécial rappelle enfin, qu’il a proposé qu’une réflexion soit menée sur la possibilité d’affecter une partie des recettes issues du produit de la vente d’actifs carbone, telles que définies par le protocole de Kyoto du 11 décembre 1997 et le produit de la mise aux enchères des quotas d’émission de gaz à effet de serre, telle que prévue par la directive 2003/87 établissant un système d’échanges de quotas d’émission de gaz à effet de serre dans la Communauté, à des actions en faveur de la forêt dans le cadre de la lutte contre le changement climatique. Il convient de rappeler que la forêt française compte de l’ordre de 18 % des émissions de CO2 ; il serait logique d’affecter 18 % du produit des quotas d’émission au Fonds stratégique forêt-bois.

Le Rapporteur spécial prend acte de la création, dans le budget pour 2014, d’un nouvel instrument d’encouragement aux investissements dans l’ensemble de la filière, le fonds stratégique forêt-bois (FSFB), (action 13 du programme 149), tout en s’interrogeant sur la pertinence de l’alimentation de ce nouveau fonds. Celui-ci sera alimenté, en effet, par une partie des crédits de l’action 12 renforcés par un abondement du budget général (+ 3,7 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement) et par le produit de compensations financières au défrichement qui sera rattaché par fonds de concours. Le montant concerné est estimé à un niveau de 15 millions d’euros en « régime de croisière ».

Si l’on peut s’interroger sur le réalisme de ces montants, il faut souligner l’intérêt de ce fonds stratégique, le regroupement dans un fonds unique pouvant donner plus de lisibilité et de cohérence aux interventions financières indispensables de l’État dans le secteur forêt-bois.

EXAMEN EN COMMISSION

Après l’audition de Monsieur Stéphane Le Foll, ministre de l’Agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt (voir le compte rendu de la commission élargie du 4 novembre 2014 à 9 heures 30 (1)), la commission des Finances examine les crédits de la mission Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales, sur le rapport de M. Charles de Courson sur les Politiques de l’agriculture et de M. Éric Alauzet sur la Sécurité alimentaire, rapporteurs spéciaux.

La Commission est saisie de l’amendement II-CF156 de M. Charles de Courson, rapporteur spécial.

M. Charles de Courson, rapporteur spécial. Dans le cadre de la politique agricole commune, les subventions aux assurances climatiques peuvent représenter au maximum 65 % du coût de l’assurance. La France cofinance 25 % de ces subventions, les 75 % restants étant cofinancés par des fonds européens. À noter que c’est la dernière année ou le cofinancement national est obligatoire, l’an prochain la totalité de l’aide à l’assurance sera financée sur crédits européens par un transfert du pilier 1 vers le pilier 2.

L’an dernier, les crédits d’engagement de 19,3 millions d’euros ont permis de mobiliser 57,9 millions d’euros de cofinancements européens. Les besoins totaux pour subventionner les contrats à 65 % ont finalement représenté 105,2 millions d’euros si bien que les producteurs de grandes cultures n’ont pu être aidés qu’à hauteur de 43 % du coût des assurances.

Pour 2015 les crédits d’engagement de la France, fixés à 24,3 millions d’euros, sont en hausse de 26 % par rapport à 2014 (+ 5 millions d’euros). Ils devraient permettre de mobiliser un cofinancement européen de 72,9 millions d’euros (75 %), pour reconstituer une enveloppe totale de 97,2 millions d’euros sur l’assurance récolte. Ce montant reste inférieur aux besoins totaux de l’an dernier nécessaires pour une prise en charge à 65 % des coûts pour toutes les cultures. Cette année encore, les grandes cultures recevront une aide inférieure à 65 % du montant des primes d’assurance.

Tout en prenant acte de la consolidation d’une enveloppe de 97,2 millions d’euros pour le financement de l’assurance récolte il convient de revoir son montant qui s’avère insuffisant pour une prise en charge d’un taux de subvention de 65 % pour toutes les cultures.

L’amendement propose de prélever 10 millions d’euros sur l’action n° 1 Moyens de l’administration centrale pour les reverser sur l’action n° 12 Gestion des crises et des aléas de production.

M. Pascal Terrasse. Il est vrai que le mécanisme qui a été mis en place en 2003 ne fonctionne pas bien et n’a pas atteint les objectifs qui lui avaient été assignés à l’époque.

Cependant, nous venons d’entendre le ministre sur ce sujet important. Il a annoncé que l’année 2015 serait consacrée à une réflexion sur cette question des assurances. Il me semble nécessaire d’attendre les résultats de cette réflexion avant d’adopter ce type d’amendement.

M. Charles de Courson, rapporteur spécial. Justement, l’adoption de l’amendement serait un moyen d’aider le ministre dans ses intentions de réformer un dispositif qui crée aujourd’hui des inégalités selon les filières de production.

La Commission rejette l’amendement II-CF156.

Elle examine ensuite l’amendement II-CF158 du rapporteur spécial.

M. Charles de Courson, rapporteur spécial. Bien que n’étant pas de même nature que le dispositif d’aides aux agriculteurs en difficultés (AGRIDIFF), la priorité de l’État s’était portée en 2009 en faveur du Fonds d’allègement des charges (FAC) dont le montant avait été doublé. Son montant, qui ne variait plus et avait été reconduit à hauteur de 8 millions d’euros en 2012, s’est trouvé à son étiage le plus bas en 2014 avec 2,2 millions d’euros. La chute se prolonge en 2015 avec 1,5 million d’euros.

Ce fonds qui a pour vocation à contribuer à la prise en charge, des aléas exceptionnels (encéphalopathie spongiforme bovine, fièvre catarrhale ovine…), et des aléas climatiques (en remplacement des prêts spéciaux pour calamités agricoles), ou des crises conjoncturelles, perd ainsi au fil des années de son efficacité auprès des exploitations en difficulté.

Compte tenu des difficultés rencontrées par la plupart des filières et des effets de l’embargo imposé par la Russie, le FAC doit se voir doté de moyens équivalents à ceux de 2013. C’est pourquoi l’amendement propose de prélever 6,5 millions d’euros sur l’action n° 1 Moyens de l’administration centrale pour les inscrire sur l’action n° 12 Gestion des crises et des aléas de production.

La Commission rejette l’amendement II-CF158.

Elle est saisie de l’amendement II-CF162 du rapporteur spécial.

M. le Charles de Courson, rapporteur spécial. Après un recul sans précédent en 2013 et une nouvelle baisse en 2014, les crédits dédiés au dispositif relatif aux agriculteurs en difficulté sont reconduits à l’identique.

Alors que la plupart des filières connaissent des difficultés importantes, il est anormal que l’État ne conforte pas les leviers qui ont vocation à favoriser le redressement de certaines exploitations. Il est essentiel d’augmenter le montant des crédits dédiés à ce poste à hauteur de ceux alloués en 2012.

L’amendement propose donc de transférer 2,2 millions d’euros de l’action n° 1 Moyens de l’administration centrale vers l’action n° 12 Gestion des crises et des aléas de production.

La Commission rejette l’amendement II-CF162.

Après que Mme Marie-Christine Dalloz, présidente, ait rappelé que M. Éric Alauzet, rapporteur spécial, donnait un avis favorable à l’adoption des crédits, et malgré l’avis défavorable de M. Charles de Courson,rapporteur spécial, elle adopte les crédits de la mission Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales, ainsi que le compte d’affectation spéciale Développement agricole et rural.

*

* *

Article 47
Modification du dispositif d’exonération
en faveur de l’emploi saisonnier agricole

Texte du projet de loi :

I.– Le code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :

A.– À l’article L. 741-16 :

1° Au deuxième alinéa du I, les mots : «, aux travaux forestiers » sont remplacés par les mots : « mentionnées au 1° et au 4° de l’article L. 722-1 du présent code » ;

2° Le III est abrogé.

B.– Au deuxième alinéa du II de l’article L. 741-16-1, les mots : « ou salariales » sont supprimés.

II.– Le présent article s’applique aux cotisations dues au titre des rémunérations versées à compter du 1er janvier 2015.

Observations et décision de la Commission :

Le présent article vise à exclure les entreprises de travaux agricoles, ruraux et forestiers (ETARF) du champ d’application du dispositif d’exonération en faveur de l’emploi saisonnier agricole et à mettre fin à l’exclusion de la part salariale des cotisations sociales dont bénéficient, un mois par an, les salariés embauchés comme saisonniers agricoles pour les vendanges.

Le Rapporteur spécial est tout à fait défavorable à un dispositif visant à supprimer le contrat vendanges, estimant que la suppression proposée suscite quatre types de questions.

– La première question est sociale ; il y a chaque année environ 315 000 contrats vendanges. Ces contrats sont signés avec des personnes modestes, salariés, étudiants, chômeurs, jeunes retraités, qui trouvent dans cette activité un complément de revenus, pouvant représenter jusqu’à un mois de revenu. Or supprimer cette rémunération revient à réduire, en moyenne, de plus de 52 euros par vendangeur leur revenu de 650 euros en moyenne. Ces 16,7 millions d’économies se traduisent donc par une baisse du pouvoir d’achat de citoyens modestes.

– La seconde question est internationale ; la suppression de ces exonérations va accentuer l’importation de main d’œuvre non nationale ; en effet, cette économie ne frappera que les vendangeurs ayant le statut de salariés français, alors que la main d’œuvre étrangère ne connaîtra pas de baisse de sa rémunération quand elle est employée par des sociétés de service de droit étranger. Ainsi en rendant moins attractive l’activité de vendangeurs pour les salariés français, on va accentuer l’importation de main-d’œuvre qui atteint déjà les 50 % dans certaines régions viticoles.

– La troisième question est économique ; cette suppression va inciter à un recours accru à la mécanisation voire à la suppression des règles existantes dans certaines régions viticoles interdisant la vendange avec des moyens mécaniques.

– La dernière question est culturelle ; les vendanges sont un temps de convivialité ; cette mesure désincitant au travail dégradera encore cette tradition viticole.

Le Rapporteur spécial estime que l’argument selon lequel l’exonération totale de charges sociales salariales serait incompatible avec la nouvelle jurisprudence du Conseil constitutionnel est irrecevable car les contrats n’ouvrent pas de droits en matière de maladie ou de vieillesse.

Quant à l’exonération des ETARF du dispositif d’exonération pour l’emploi des TO-DE, elle aura pour effet de créer une rupture d’égalité entre les CDD signés directement par les exploitants agricoles et les CDD signés par des ETARF, et d’encourager le travail clandestin contrairement à l’argumentaire développé dans l’étude d’impact.

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La Commission est saisie de l’amendement II-CF75 du rapporteur spécial.

M. Charles de Courson, rapporteur spécial. L’article 47 vise notamment à exclure les entreprises de travaux agricoles, ruraux et forestiers (ETARF) du champ d’application du dispositif d’exonération en faveur de l’emploi saisonnier agricole. Toutefois, par sa rédaction, il exclut également les sylviculteurs qui emploient du personnel pour la réalisation de travaux saisonniers.

Cet amendement propose donc de modifier cette rédaction, afin de ne pas pénaliser ces sylviculteurs, qui n’étaient pas visés par cette volonté d’exclusion des entreprises de travaux agricoles, ruraux et forestiers.

M. Philippe Terrasse. Je suis d’accord avec cet amendement et je demande à mon groupe de le voter.

M. le rapporteur spécial. Cet amendement représente un coût très faible. Je pense qu’il s’agit plutôt de réparer une erreur de plume.

La Commission adopte l’amendement II-CF75.

Elle est ensuite saisie de l’amendement II-CF86 du rapporteur spécial.

M. Charles de Courson, rapporteur spécial. Le contrat « vendanges » a été créé en 2002 par un amendement que j’avais déposé et qui avait reçu le soutien de mes collègues socialistes et communistes.

Il y a deux volets à ce dispositif. D’une part, il s’agit d’un contrat particulier et un certain nombre de règles d’exclusion et de non-cumul d’activités avaient été supprimées. D’autre part, il y a un volet d’encouragement avec une exonération des cotisations sociales salariales.

Aujourd’hui, le Gouvernement ne propose pas de supprimer le contrat « vendanges » mais de supprimer son volet d’encouragement en revenant sur l’exonération des cotisations salariales.

Quels sont les arguments du ministre ? Il vient de nous expliquer qu’il s’agit de se conformer à la décision du Conseil constitutionnel de cet été concernant la modulation des cotisations sociales salariales. Le Conseil a jugé que cette modulation n’est pas possible parce que les cotisations ne sont pas un impôt et qu’elles sont la contrepartie de l’ouverture du droit à des prestations égales pour tous.

Je conteste cet argument. D’une part, c’est d’abord la cotisation maladie qui est concernée. Or, les bénéficiaires du contrat « vendanges » sont déjà couverts par ailleurs par un régime d’assurance maladie et il ne s’agit donc pas de l’ouverture d’un droit nouveau. D’autre part, s’agissant de la cotisation vieillesse, pour une grande partie de ses bénéficiaires – les retraités ou les fonctionnaires par exemple – le contrat « vendanges » ne leur ouvre pas de droits à pension supplémentaires.

Par ailleurs, cette mesure pose un problème social. Pour ses 316 000 bénéficiaires, le contrat « vendanges » représente un gain moyen de 650 euros. La suppression de l’exonération des cotisations salariales représenterait une perte de revenus de 8 % soit de 52 euros en moyenne. Pour un gain global modeste pour l’État (16 millions d’euros), cette mesure toucherait des gens modestes (chômeurs, étudiants ou retraités).

Je rappelle que les employeurs sont fortement incités à recourir au contrat « vendanges ». C’est un point d’autant plus important que nous assistons à la concurrence grandissante de sociétés étrangères parfaitement organisées qui font venir des travailleurs de l’étranger. Pour la Champagne, ceux-ci représenteraient déjà près de la moitié des vendangeurs. Sur ce point, l’article 47 n’aura aucun effet sur cette concurrence dommageable.

Enfin, j’ai rencontré les représentants de grandes régions d’appellation d’origine contrôlée (AOC) qui m’ont fait part de leur intention, si le Gouvernement persévère dans le démantèlement du contrat « vendanges », de revenir sur l’interdiction actuelle de la mécanisation des vendanges dans leur aire de production.

M. Pascal Terrasse. Il y a un certain nombre d’amendements qui ne suppriment que le cinquième alinéa de l’article 47, alors que le II-CF86 supprime les alinéas 4 à 6. Pour la clarté de débat, il serait préférable que tous ces amendements fassent l’objet d’une discussion commune puisqu’ils traitent du même sujet.

M. le rapporteur spécial. Je suis d’accord. Je retire l’amendement II-CF86 au profit des amendements identiques suivants, dont le mien.

L’amendement II-CF86 est retiré.

La Commission examine ensuite trois amendements identiques, le II-CF122 du rapporteur spécial, le II-CF2 de M. Pascal Terrasse et le II-CF109 de M. Étienne Blanc.

M. le rapporteur spécial. J’ai déjà défendu l’amendement II-CF122

M. Pascal Terrasse. Il faut rappeler que le contrat « vendanges » est un contrat saisonnier d’un type très particulier, puisqu’il ne saurait avoir une durée supérieure à un mois et qu’en général, il est même inférieur à trois semaines. Dans ces conditions, je ne partage pas l’avis du ministre sur la nécessité de transcrire la récente décision du Conseil constitutionnel : une période aussi courte n’ouvre aucun droit à pension supplémentaire puisqu’elle est inférieure au seuil de validation d’un trimestre.

L’article 47, s’il ne remet pas en cause le contrat « vendanges », aura néanmoins un effet direct sur les revenus de ses bénéficiaires. Même si dans de nombreuses régions viticoles, les salaires versés sont supérieurs au SMIC, il représentera une baisse de 8 % de leur pouvoir d’achat. Il est inexact de dire que cette baisse sera compensée par la suppression de la première tranche de l’impôt sur le revenu, car celle-ci ne concernera pas les mêmes personnes, je pense notamment aux étudiants.

Cette mesure ouvre le débat sur la mécanisation de notre système de production agricole. Or, aucune machine à vendanger actuellement utilisée n’est fabriquée en France. De plus, l’attrait du vin français repose en partie sur son mode de production et notamment sur le fait qu’il soit vendangé à la main.

Tout cela n’a aucun sens.

M. Étienne Blanc. Moi aussi, je ne suis pas d’accord avec la lecture que le ministre fait de la décision du Conseil constitutionnel. Il a censuré une mesure de modulation de portée générale, alors que l’exonération liée au contrat « vendanges » est une mesure spéciale poursuivant un objectif ciblé. Il n’y a pas lieu donc de transposer la décision du Conseil.

J’observe qu’il s’agit également d’une mesure de peu d’impact financier (16 millions d’euros seulement) qui pourtant soulève deux questions. D’une part, si elle conduit à une pénurie de vendangeurs, cela entraînera des difficultés dans certains vignobles peu propices à la mécanisation, notamment dans les zones de coteaux. D’autre part, un élément culturel est en jeu : pour les étudiants par exemple, participer aux vendanges n’est pas seulement une question d’argent mais permet une expérience conviviale appréciée.

M. François André. J’entends la fougue de mes collègues, mais j’éprouve une certaine gêne qui me conduira à m’abstenir sur ces amendements.

Le ministre a expliqué en quoi cette mesure est guidée par la décision du Conseil constitutionnel. En l’espèce, nous sommes en face de deux interprétations différentes de la décision du Conseil : celle du ministre me paraît plus convaincante que celle de Charles de Courson.

Par ailleurs, je ne vois pas en quoi cette mesure pourrait avoir pour conséquence de favoriser le recours à des travailleurs détachés car rien n’est changé pour les employeurs. En outre, les conséquences pour les salariés seront compensées par la suppression de la première tranche du barème de l’impôt sur le revenu.

Mme Marie-Christine Dalloz, présidente. Il ne s’agit pas de se livrer à des suppositions sur les effets de la mesure selon les catégories de vendangeurs. Mais, un certain nombre d’entre eux, notamment les retraités, ne se trouvaient pas tous dans la première tranche du barème de l’impôt sur le revenu. Il me semble qu’il s’agit d’un argument tiré par les cheveux.

Par ailleurs, la durée des contrats « vendanges », trois semaines en moyenne, est trop courte pour permettre la validation de trimestres supplémentaires pour les droits à pension.

M. le rapporteur spécial. Je redis qu’il n’y a pas ouverture de droit nouveau, ni en matière de couverture maladie, ni en matière de retraite. On parle d’une durée moyenne de trois semaines, mais en Champagne c’est plutôt douze jours.

Je partage l’avis d’Étienne Blanc selon lequel la décision du Conseil ne peut s’appliquer qu’à une mesure de portée générale, ce que n’est pas l’exonération de cotisations pour le contrat « vendanges ».

Quant à l’argument de la réforme de l’impôt sur le revenu, il ne tient pas car, sur les 316 000 personnes concernées, il est probable qu’environ les deux tiers ne sont pas imposables et ne seront donc pas concernés par la suppression de la première tranche.

La Commission adopte les amendements II-CF122, II-CF2 et II-CF109, puis l’article 47 ainsi modifié.

Après l’article 47

La Commission est saisie de l’amendement II-CF243 du rapporteur spécial.

M. Charles de Courson, rapporteur spécial. On observe parfois des difficultés de répartition des compétences entre les chambres régionales d’agriculture et les centres régionaux de la propriété forestière. Deux régions, la Franche-Comté et l’Aquitaine, s’interrogent sur la fusion de ces structures. Cet amendement demande au Gouvernement de remettre un rapport pour étudier cette éventuelle fusion permettant d’accroître les synergies entre ces organismes en charge des questions forestières.

La Commission rejette l’amendement II-CF243.

Elle est ensuite saisie de l’amendement II-CF244 du rapporteur spécial.

M. Charles de Courson, rapporteur spécial. Cet amendement a pour objet la présentation d’un rapport gouvernemental envisageant une fusion de la Sopexa et d’UbiFrance, permettant d’accroître les synergies entre deux organismes chargés de la promotion des produits et techniques agricoles français sur les marchés extérieurs.

Mme Monique Rabin. Sur le fond, je suis d’accord avec l’objectif de cet amendement. Cette fusion est déjà en marche et cet amendement n’est sans doute pas utile. En tant que rapporteur spéciale des crédits du commerce extérieur, je vous donne rendez-vous l’année prochaine sur ce point.

M. le rapporteur spécial. Justement, cela justifie de l’adopter en commission, quitte à le retirer en séance. Il s’agirait de montrer au ministre que les parlementaires sont résolus sur cette fusion nécessaire.

M. Pascal Terrasse. C’est vrai que cet amendement ne va pas très loin. Il pourrait être utile d’interroger le ministre sur ses intentions sur cette question. Je n’ai donc pas d’objection à son adoption.

Mme Monique Rabin. Il deviendrait un amendement de la commission et revêtirait donc une portée symbolique forte. Encore une fois, nous sommes d’accord sur l’objectif mais j’observe que, sur le terrain, les esprits ne sont pas encore prêts. Il ne faut pas leur envoyer un mauvais signal car il est indispensable d’associer les intéressés à ce processus.

La Commission rejette l’amendement II-CF244.

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ANNEXE : LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LE RAPPORTEUR SPÉCIAL

Office national des forêts (ONF)

– M. Pascal Viné, directeur général

– M. Bernard Gamblin, conseiller spécial

Assemblée Permanente des Chambres d’agriculture (APCA)

– M. Guy Vasseur, président

– M. Guillaume Baugin, conseiller parlementaire

Coordination rurale

– M. François Lucas, premier vice-président

Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles (FNSEA)

– M. Xavier Beulin, président

– M. Jean-Louis Chandellier, directeur du département Entreprises et territoires

– Mme Nadine Normand, conseillère parlementaire

Jeunes Agriculteurs

– M. Antoine Daurelle, administrateur national

– M. Romain Quesnel, juriste

Confédération paysanne

– M. Josian Palach, secrétaire national

– M. Bernard Breton

Filière BOIS

– Mme Emmanuelle Bour-Poitrinal, déléguée générale de France-Bois Industries Entreprises

– M. Philippe Gaudron, directeur général délégué de Fibre Excellence

– M. Luc Bouvarel, directeur général de la Fédération « Forestiers privés de France »

Ministère de l’Agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt

– Mme Valérie Metrich-Hecquet, secrétaire générale

– Mme Héloïse Pestel, chef du bureau du budget et des opérateurs

– M. Christian Ligeard, Directeur des affaires financières, sociales et logistiques au secrétariat général

© Assemblée nationale

1 () http://www.assemblee-nationale.fr/14/budget/plf2015/commissions_elargies/