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N° 2391

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 25 novembre 2014

RAPPORT D’INFORMATION

DÉPOSÉ

PAR LA COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

sur les négociations internationales relatives au changement climatique

ET PRÉSENTÉ

PAR MM. Bernard DEFLESSELLES, Jérôme LAMBERT et Arnaud LEROY

Députés

——

La Commission des affaires européennes est composée de : Mme Danielle AUROI, présidente ; Mmes Marietta KARAMANLI, MM. Jérôme LAMBERT, Pierre LEQUILLER, vice-présidents ; MM. Christophe CARESCHE, Philip CORDERY, Mme Estelle GRELIER, M. André SCHNEIDER, secrétaires ; MM. Ibrahim ABOUBACAR, Jean-Luc BLEUNVEN, Alain BOCQUET, Jean-Jacques BRIDEY, Mmes Isabelle BRUNEAU, Nathalie CHABANNE, MM. Philip CORDERY, Jacques CRESTA, Mme Seybah DAGOMA, MM. Yves DANIEL, Bernard DEFLESSELLES, Mme Sandrine DOUCET, M. William DUMAS, Mme Marie-Louise FORT, MM. Yves FROMION, Hervé GAYMARD, Jean-Patrick GILLE, Mme Chantal GUITTET, MM. Razzy HAMMADI, Michel HERBILLON, Laurent KALINOWSKI, Marc LAFFINEUR, Charles de LA VERPILLIÈRE, Christophe LÉONARD, Jean LEONETTI, Arnaud LEROY, Mme Audrey LINKENHELD, MM. Lionnel LUCA, Philippe Armand MARTIN, Jean-Claude MIGNON, Jacques MYARD, Rémi PAUVROS, Michel PIRON, Joaquim PUEYO, Didier QUENTIN, Arnaud RICHARD, Mme Sophie ROHFRITSCH, MM. Jean-Louis ROUMEGAS, Rudy SALLES, Gilles SAVARY

SOMMAIRE

___

Pages

SYNTHÈSE DU RAPPORT 9

SUMMARY OF THE REPORT 11

INTRODUCTION 13

PREMIÈRE PARTIE : L’URGENCE RÉAFFIRMÉE DE LA LUTTE CONTRE LE RÉCHAUFFEMENT CLIMATIQUE 15

I. DANS SON CINQUIÈME RAPPORT, LE GROUPE D’EXPERTS INTERGOUVERNEMENTAL SUR L’ÉVOLUTION DU CLIMAT (GIEC) RECOMMANDE D’AGIR SANS ATTENDRE CONTRE LE RÉCHAUFFEMENT CLIMATIQUE 15

A. LES DIMENSIONS SCIENTIFIQUE, TECHNOLOGIQUE, ENVIRONNEMENTALE, ÉCONOMIQUE ET SOCIALE DE L'ATTÉNUATION DU CHANGEMENT CLIMATIQUE 15

1. Le niveau record des émissions mondiales de gaz à effet de serre (GES) 15

2. La nécessité de mettre en œuvre des mesures ambitieuses d'atténuation 17

a. Tous les secteurs économiques (énergie, transport, habitat, agriculture…) devront faire leur révolution 17

b. Le GIEC recommande de s’appuyer sur l’urbanisation 17

3. Les objectifs à atteindre 17

B. LE RAPPORT DE SYNTHÈSE DU GIEC 18

1. Les changements observés et leurs causes 18

a. Changements observés dans le système climatique 18

b. Causes du changement climatique 19

c. Impacts du changement climatique 19

d. Événements extrêmes 19

2. Changements climatiques, risques et impacts futurs 20

a. Facteurs clés contrôlant le climat futur 20

b. Changements projetés du système climatique 20

c. Risques et impacts futurs associés au changement climatique 21

d. Changement climatique au-delà de 2100, irréversibilités et changements brusques 23

3. Futures voies pour l’adaptation, l’atténuation et le développement durable 23

a. Bases pour la prise de décisions relatives au changement climatique 23

b. Risques liés au changement climatique réduits par l'atténuation et l'adaptation 24

c. Caractéristiques des voies pour l'adaptation 24

d. Caractéristiques des trajectoires d'atténuation 24

4. Adaptation et atténuation 25

a. Facteurs facilitants communs et contraintes pour l'adaptation et l'atténuation 25

b. Options d'adaptation 25

c. Options d'atténuation 25

d. Approches politiques de la technologie et de la finance de l'adaptation et de l'atténuation 25

e. Compromis, synergies et interactions avec le développement durable 26

C. LA TRAGÉDIE DU RÉCHAUFFEMENT CLIMATIQUE 26

II. LE BILAN DE LA CONFÉRENCE DE VARSOVIE : DES AVANCÉES FIXANT LE CAP SUR 2015 31

A. LA DIMENSION JURIDIQUE 31

1. Les décisions concernant l’accord universel de décembre 2015, qui entrera en vigueur en 2020 31

2. Les décisions visant à remédier aux disparités en matière d’ambitions d’ici à 2020 32

B. LA DIMENSION FINANCIÈRE 32

1. Le renforcement des efforts visant à mobiliser 100 milliards de dollars d’ici 2020 32

a. L’absence d’objectif chiffré 33

b. En matière d’adaptation, des promesses de financement… 33

c. … en attente de capitalisation 33

2. La réduction des émissions liées au déboisement : « le Cadre de Varsovie pour REDD+ » 34

C. LA RÉPARATION DES DOMMAGES 34

D. LES AUTRES DÉCISIONS 35

1. Des progrès en matière de responsabilisation 35

2. Les technologies au service de l’action sur le climat 35

E. LES DÉCISIONS DE VARSOVIE SUR LE MRV OUVRENT LA VOIE VERS UN ACCORD INTERNATIONAL « APPLICABLE À TOUS » 35

DEUXIÈME PARTIE : LES ENJEUX DE LA CONFÉRENCE CLIMATIQUE DE LIMA : FIXER UN CADRE POUR UN ACCORD MONDIAL EN 2015 37

I. L’ÉVOLUTION HISTORIQUE DES NÉGOCIATIONS INTERNATIONALES SUR LE CLIMAT 37

A. LES PREMIERS PAS : LE DÉPLOIEMENT D’UNE APPROCHE COHÉRENTE DE LA POLITIQUE SUR LE CHANGEMENT CLIMATIQUE 37

1. La Conférence de Stockholm : le point de départ 37

2. Le Protocole de Kyoto : consolidation, ratification et mise en œuvre entre 1997 et 2005 38

B. LES ACTIONS ENTREPRISES DEPUIS 2005 EN VUE DE NÉGOCIER UN RÉGIME SUCCESSEUR 39

II. LE NÉCESSAIRE ACCORD DE TOUTES LES PARTIES EN PRÉSENCE 43

A. LA DIFFICULTÉ À TROUVER UN COMPROMIS 43

1. La recherche d’un accord intergouvernemental 43

2. Vers un dépassement des difficultés récurrentes de la négociation climatique mondiale 44

3. Les perspectives ouvertes par l’évolution sino-américaine 47

a. Le premier pas effectué par les États-Unis a stimulé les négociations internationales 47

b. L’espoir né de la conclusion par la Chine et les États-Unis d’un accord inédit sur le climat 48

B. LA QUESTION DU CONTRÔLE ET DE LA VÉRIFICATION 49

1. Un système d’enregistrement des objectifs et des actions des pays développés et en développement, assorti d’un suivi et d’un contrôle destinés à en assurer la transparence, a été progressivement mis en place 49

2. Quelles modalités de contrôle sur l’accord de 2015 ? 51

C. VERS UN OBJECTIF DE LONG TERME ? 51

III. LE CALENDRIER 53

A. LA CONFÉRENCE CLIMAT DE VARSOVIE A DRESSÉ UNE FEUILLE DE ROUTE VERS PARIS 2015 53

B. UN CALENDRIER NON CONTRAIGNANT POUR L’ACCORD EN 2015 54

IV. LE NÉCESSAIRE ÉLARGISSEMENT DES SOURCES DE FINANCEMENT 57

A. LA NÉCESSAIRE MISE EN PLACE DU FONDS VERT 57

1. Le Fonds vert pour le climat 57

2. Les avancées de Varsovie en matière financière 58

3. Les annonces d’abondement du Fonds vert 58

B. LES AUTRES SOURCES DE FINANCEMENT POSSIBLES 62

1. La volonté de trouver les moyens d’un financement du cadre de développement pour l’après-2015 63

2. Le prix du CO2 nécessaire mais non suffisant 64

V. PROTECTION DU CLIMAT ET CROISSANCE ÉCONOMIQUE PEUVENT ALLER DE PAIR 67

TROISIÈME PARTIE : L’UNION EUROPÉENNE MOBILISÉE POUR PRÉPARER 2015 75

I. LE MANDAT DE L’UNION EUROPÉENNE À LIMA 75

II. LA RÉSOLUTION DU PARLEMENT EUROPÉEN, RELATIVE AUX NÉGOCIATIONS SUR LE CHANGEMENT CLIMATIQUE 77

A. LES DÉPUTÉS EUROPÉENS ONT TRACÉ LA VOIE DE LIMA À PARIS 77

B. RÉDUIRE LES ÉMISSIONS DE GAZ À EFFET DE SERRE DE 50 % D'ICI 2050 77

C. LA CONTRIBUTION DE L'UNION EUROPÉENNE 78

D. LES PAYS EN DÉVELOPPEMENT 78

E. L’AIR ET LA MER 78

III. LES AUTRES INITIATIVES EUROPÉENNES 79

A. L'ALLIANCE MONDIALE CONTRE LE CHANGEMENT CLIMATIQUE (AMCC) 79

B. LES OBJECTIFS CLIMAT-ÉNERGIE DE L’UNION EUROPÉENNE POUR 2030 81

1. Le contexte 81

2. Les objectifs 81

3. Les éléments clés du cadre stratégique pour 2030 présenté par la Commission européenne 83

a. Un objectif contraignant de réduction des émissions de gaz à effet de serre 83

b. Un objectif contraignant en matière d’énergies renouvelables à l’échelle de l’Union européenne 83

c. L’efficacité énergétique 84

d. La réforme du SEQE de l’Union européenne 84

e. Une énergie compétitive, abordable et sûre 84

f. Un nouveau système de gouvernance 85

4. Les effets de cette annonce européenne 85

5. Les objectifs climat-énergie de l’Union européenne pour 2030 : un compromis (nécessaire ?) sur la trajectoire de 2050 86

C. UN MAUVAIS SIGNAL : LA BAISSE DU FINANCEMENT DES INVESTISSEMENTS EN MATIÈRE DE CAPTAGE ET DE STOCKAGE GÉOLOGIQUE DU CO2 ET DE TECHNOLOGIES INNOVANTES LIÉES AUX ÉNERGIES RENOUVELABLES 87

CONCLUSION 93

TRAVAUX DE LA COMMISSION 95

ANNEXES 97

ANNEXE N° 1 : LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LES RAPPORTEURS 99

ANNEXE N° 2 : LES CONCLUSIONS DU CONSEIL EUROPÉEN DES 23 ET 24 OCTOBRE 2014, DANS LE DOMAINE DU CHANGEMENT CLIMATIQUE 103

ANNEXE N° 3 : LA RÉSOLUTION DU PARLEMENT EUROPÉEN SUR LA CONFÉRENCE SUR LE CHANGEMENT CLIMATIQUE À LIMA (PÉROU, COP 20) 111

SYNTHÈSE DU RAPPORT

Le constat des scientifiques est clair et alarmant : les efforts actuels sont insuffisants pour limiter la hausse de la température mondiale au-delà de 2 °C, objectif que s'est fixé la communauté internationale pour éviter un emballement catastrophique des dérèglements climatiques.

Dans leur cinquième rapport, les experts du GIEC recommandent de limiter d'ici à la fin du siècle la concentration des gaz à effet de serre dans l'atmosphère à 450 parties par million (ppm) – valeur associée par les scientifiques à un réchauffement de 2° C – ce qui suppose de réduire les émissions mondiales entre 40 % et 70 % d'ici à 2050 et de les ramener à un niveau « proche de zéro » d'ici à la fin du siècle.

La précédente Conférence des Nations Unies sur les changements climatiques qui s’est tenue à Varsovie fin 2013 (COP19) était une « conférence d’étape  », selon les termes mêmes des participants. Afin de garder le cap sur l’accord universel sur le climat de 2015, deux séries de décisions y ont été prises : 

- rassembler les nations dans le cadre d’une initiative mondiale visant à réduire les émissions assez rapidement pour permettre à l’humanité de s’écarter à long terme du seuil de danger du changement climatique, tout en renforçant les capacités d’adaptation ;

- faire en sorte d’accélérer et d’amplifier le plan d’action actuel.

La Conférence de Varsovie est parvenue à baliser le chemin vers la Conférence de Paris sur le climat qui aura lieu en 2015 et où un nouvel accord climatique mondial devrait être conclu. Cependant, elle a aussi montré que la route sera longue et difficile. Des questions fondamentales restent sans réponse, et appellent à un niveau élevé d’engagement politique.

Les négociations sur le changement climatique de la 20ème Conférence des Parties ou COP, se dérouleront à Lima entre le 1er et le 12 décembre 2014. Il s’agira donc de la dernière Conférence dans le cadre de la Convention-Cadre des Nations Unies sur les Changements Climatiques (CCNUCC) avant le nouvel accord mondial attendu pour 2015.

Cet accord devrait notamment traiter d’atténuation, d’adaptation, de financements, de développement et de transfert de technologies, de renforcement de capacités et de la transparence des actions et des soutiens.

L’une des questions cruciale réside dans le financement du Fonds vert pour le climat. Ce Fonds est destiné à aider les pays les plus exposés au réchauffement climatique en soutenant des projets « verts » concrets contribuant, par exemple, à diminuer les émissions de gaz à effet de serre, à faire reculer la déforestation où encore à se protéger contre la montée des eaux. Malgré un démarrage difficile, suite à la réunion de Berlin des 19 et 20 novembre 2014, les promesses de financement à destination du Fonds vert pour le climat émanant des pays avoisinent 9,6 milliards de dollars, sur les 10 milliards espérés avant fin 2014.

La tentation est en effet récurrente de réduire les financements destinés à la lutte contre le changement climatique en raison de la crise économique. Protection du climat et croissance économique peuvent pourtant aller de pair, comme le montre la publication du dernier rapport de la commission mondiale pour l’économie et le climat, intitulé « une meilleure croissance, un meilleur climat ». Ce rapport démontre qu’il est possible de réduire les émissions de carbone, tout en améliorant les performances économiques, et ce dès à présent.

L’Union européenne est quant à elle mobilisée pour préparer 2015, où tous les pays devront en effet s’engager sur des objectifs de réduction de leurs émissions, différenciés selon les capacités nationales, et compatibles avec l’objectif global d’augmentation maximale de la température terrestre de 2 degrés en 2100 par rapport à l’ère préindustrielle.

La capacité d’entraînement de l’Union européenne sera de ce point de vue essentielle. Pour obtenir des engagements volontaires des différents pays, les négociations entre l’Union européenne et les deux principaux émetteurs que sont la Chine et les États-Unis seront cruciales.

Le fait que les États-Unis et la Chine, traditionnellement considérés comme les leaders de deux camps opposés dans les négociations sur le climat, avancent désormais ensemble, devrait l’y aider.

La COP20 de Lima constitue ainsi un tremplin pour assurer la conclusion à Paris, en décembre 2015 (COP 21), d’un accord mondial ambitieux pour le climat, avec tout le monde à bord, qui permette de maintenir de réchauffement climatique en dessous de 2 degrés Celsius.

SUMMARY OF THE REPORT

The conclusion put forward by scientists is clear-cut and alarming : the current efforts to limit the increase in global temperature to 2° C are insufficient. This was the aim which the international community set itself in order to avoid the catastrophic effect of climate change.

In their fifth report, the experts of the IPCC recommend the limitation, before the end of the century, of the concentration of greenhouse gases in the atmosphere, to 450 parts per million. This level is equivalent, according to the scientists, to a rise in global temperature of 2° C and would imply a reduction of between 40 % and 70 % of global emissions between now and 2050 and would envisage decreasing them to an “almost zero level” before the end of the century.

The last Conference of the United Nations on Climate Change which was held in Warsaw at the end of 2013 (COP19) was a “stepping-stone” conference according to the very words of its participants. In order to remain on track concerning the global agreement on climate for 2015, two types of decision were taken there :

- the notion of bringing nations together in the framework of a global initiative aiming to reduce emissions quite quickly so as to allow humanity to avoid, in the long term, the dangerous threshold concerning climate change, whilst, at the same time, strengthening the capabilities for adaptation ;

- the idea of moving so as to speed up and bolster the current plan of action.

The Warsaw Conference managed to chart the way towards the Paris Conference on Climate in 2015 during which a new world agreement on climate should be signed. However, it also showed that the road will be long and difficult. Basic questions remain unanswered and require a high level of political commitment.

The negotiations on climate change of the 20th Climate Change Conference or COP, will take place in Lima between December 1 - 12, 2014. The Conference will thus be the last within the United Nations Framework Convention on Climate Change (UNFCCC) before the new global agreement expected in 2015.

This agreement should, in particular, deal with the notions of mitigation, adaptation, financing, the development and transfer of technologies, the strengthening of capacities and with transparency in action and support.

One of the crucial issues will concern the financing of the Green Climate Fund. The aim of this fund is to help those countries which are most exposed to global warming by aiding concrete “green” projects which can contribute, for example, to the reduction of greenhouse gas emissions, to the decrease of deforestation or to protection against the rise in water levels. Despite a sluggish beginning, the funding pledges, in the wake of the Berlin meeting on November 19 - 20, 2014, have reached 9.6 billion dollars out of the 10 billion dollars hoped for before the end of 2014.

There is an ever-present temptation to decrease the financing of the fight against climate change on account of the economic crisis. However, the protection of the climate and economic growth can go hand-in-hand, as is shown in the last report of the Global Commission of the Economy and Climate, entitled “Better Growth, Better Climate”. This report demonstrates that it is possible, as of today, to reduce carbon emissions whilst, at the same time, improving economic performance.

The European Union is indeed mobilized and preparing for 2015 when all countries should, in fact, commit to the target of reducing their emissions, according to national capacities. This should be in line with the global aim concerning the maximum increase in global temperature of 2° C in 2100 by comparison with the pre-industrial era.

The ability of the European Union to provide an example and lead will, from this point of view, be essential. In order to obtain voluntary commitments from different countries, the negotiations between the European Union and the two main emitting countries (i.e. China and the United States) will be crucial.

The fact that the United States and China, who are traditionally considered as the leaders of the two opposing camps in climate negotiations, are now progressing together, should help in this field.

COP 20 in Lima also represents a real springboard for an agreement in Paris, in December 2015 (COP 21). This agreement could be an ambitious global one with everyone on board which would enable global warming to be kept below 2° Celsius.

However, it must not be forgotten that the 2015 Conference will not bring a definitive solution. It must also be hoped that the states will propose new long-term objectives between now and 2020.

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

Le changement climatique est un fait, dont plus personne ne conteste la réalité. Ses conséquences sont déjà sensibles et ne vont faire que s’amplifier au cours des années et des décennies à venir : élévation du niveau des mers, accentuation des phénomènes climatiques exceptionnels, désertification, risque de multiplication des guerres de l’eau. La lutte contre le changement climatique est donc à la fois une urgence et une nécessité vitale.

En tant que phénomène en grande partie imputable aux activités humaines, le réchauffement climatique menace de plus en plus les établissements humains et les habitats naturels, ainsi que la stabilité économique, les ressources pour le développement et, à terme, même des vies humaines. Les experts scientifiques mettent en garde que ce processus risque de devenir impossible à enrayer et irréversible si la communauté internationale échoue à réduire les émissions de gaz à effet de serre de manière efficace rapidement.

Le constat des scientifiques est clair et alarmant : les efforts actuels sont insuffisants pour limiter la hausse de la température mondiale au-delà de 2 °C, objectif que s'est fixé la communauté internationale pour éviter un emballement catastrophique des dérèglements climatiques.

Le Protocole de Kyoto, qui fixait les premiers objectifs de réduction des émissions pour les pays industrialisés, a été prolongé pour une deuxième période d’engagement allant de 2013 à 2020. Toutefois, la plupart des grandes économies – et les plus grands pollueurs – n’ont encore souscrit aucun engagement formel. Tandis que le temps presse et le coût de l’inaction ne fait que croître, tous les pays sont invités à conclure un accord mondial ambitieux d’ici 2015 au plus tard.

Un récent rapport (1) a proposé d’adopter une approche mixte à la fois « ascendante et descendante » pour réduire les émissions de gaz à effet de serre au plan mondial, incluant – pour la première fois – la reconnaissance formelle des législations nationales sur le changement climatique dans la partie juridiquement contraignante de l’accord. Il préconise une coopération bilatérale intensifiée avec les pays clés et une implication plus forte des parlements afin de faire progresser les législations nationales sur le climat, de diffuser les meilleures pratiques, de renforcer les capacités et de promouvoir des approches communes.

En tout état de cause, l’objet de la COP 21 – ou encore la Conférence Paris - climat 2015 – sera de prévoir le régime des réductions d’émissions de gaz à effet de serre pour l’après-Kyoto.

Or dans le cadre du protocole de Kyoto, en 1997, seuls les pays industrialisés s’étaient engagés sur des objectifs de réduction pour la période 2005 - 2012. Même si un amendement au protocole qui en prolongera l’application jusqu’en 2020 devrait prochainement être adopté, Kyoto ne concerne aujourd’hui que 15 % des émissions mondiales.

Il faudra donc, dans le cadre du nouvel accord, aller beaucoup plus loin en mobilisant toute la communauté internationale.

Les négociations sur le changement climatique de la 20ème Conférence des Parties ou COP, se dérouleront à Lima entre le 1er et le 12 décembre 2014. Il s’agira donc de la dernière Conférence dans le cadre de la Convention-Cadre des Nations Unies sur les Changements Climatiques (CCNUCC) - laquelle met en place un cadre global de l'effort intergouvernemental pour faire face au défi posé par les changements climatiques - avant le nouvel accord mondial attendu pour 2015.

Après l'échec de la Conférence de Copenhague en 2009, celle de Paris, en décembre 2015, doit donc sceller le premier accord mondial sur le climat. Il entrerait en vigueur en 2020 pour une période de cinq ou dix ans.

Il existe toutefois une différence notable par rapport à Copenhague, dont l'échec continue de hanter tous les négociateurs. Il existe en effet désormais une dynamique sino-américaine : les États-Unis et la Chine se parlent et sont entrés depuis un an dans une coopération concrète, notamment dans les domaines de l'efficacité énergétique et de la réduction des émissions des véhicules. Ces deux acteurs majeurs de la négociation semblent avoir définitivement admis qu'ils ne pouvaient plus uniquement rejeter le blâme sur leurs voisins. Certes, cela ne sera pas suffisant pour assurer un succès à Paris en 2015, mais c'est néanmoins encourageant.

La COP 20 de Lima doit être un tremplin pour assurer la conclusion à Paris, en décembre 2015 (COP 21), d’un accord mondial ambitieux pour le climat, avec tout le monde à bord, qui permette de maintenir de réchauffement climatique en dessous de 2 degrés Celsius.

PREMIÈRE PARTIE :
L’URGENCE RÉAFFIRMÉE DE LA LUTTE CONTRE LE RÉCHAUFFEMENT CLIMATIQUE

I. DANS SON CINQUIÈME RAPPORT, LE GROUPE D’EXPERTS INTERGOUVERNEMENTAL SUR L’ÉVOLUTION DU CLIMAT (GIEC) RECOMMANDE D’AGIR SANS ATTENDRE CONTRE LE RÉCHAUFFEMENT CLIMATIQUE

A. LES DIMENSIONS SCIENTIFIQUE, TECHNOLOGIQUE, ENVIRONNEMENTALE, ÉCONOMIQUE ET SOCIALE DE L'ATTÉNUATION DU CHANGEMENT CLIMATIQUE

Après le volet sur les preuves physiques du réchauffement publié en septembre 2013 et celui sur les impacts du réchauffement en mars 2014, le troisième volet du rapport du GIEC, est paru dimanche 13 avril 2014 à Berlin. Ce troisième volet du rapport du GIEC a été élaboré par le groupe de travail III. Il s’agit du troisième des rapports de trois groupes qui, avec un rapport de synthèse paru en octobre 2014, constituent le cinquième rapport d'évaluation du GIEC sur l'évolution du climat.

Sept ans après le précédent, ce rapport confirme l'échec des politiques publiques mises en œuvre jusqu'à présent. Il s'appuie sur les travaux du Groupe de travail III au quatrième Rapport d'évaluation du GIEC (RE4), le rapport spécial sur les énergies renouvelables et atténuation du changement climatique (SRREN) et les rapports précédents et intègre les derniers résultats et recherches.

Le rapport évalue également les options d'atténuation à différents niveaux de gouvernance et dans différents secteurs économiques et les conséquences sociétales des différentes politiques d'atténuation, mais ne recommande pas de choix particulier pour l'atténuation.

1. Le niveau record des émissions mondiales de gaz à effet de serre (GES)

En vue du dernier rapport du GIEC, la communauté scientifique a élaboré quatre scénarios. Le rapport met en avant les deux scénarios « extrêmes ». Dans le premier, dit scénario RCP8.5, ou scénario « haut », les émissions continuent de croître, donc les concentrations de gaz à effet de serre et la température également. Le second, dit RCP2.6, repose sur l’hypothèse d’une politique extrêmement volontariste de réduction des émissions de gaz à effet de serre en vue de respecter l’objectif de limitation à deux degrés de la hausse de température par rapport à l’époque préindustrielle : c’est une grande nouveauté de ce rapport. Ce scénario suppose une diminution très rapide et très importante des émissions : la réduction devrait débuter dès maintenant, jusqu’à quasiment atteindre à la fin du siècle des émissions négatives, c’est-à-dire que l’on capterait une partie du CO2 présent dans l’atmosphère, par différents systèmes qui n’existent d’ailleurs pas nécessairement aujourd’hui. Ces scénarios sont ensuite intégrés aux modèles climatiques, qui calculent en conséquence les évolutions des concentrations de CO2, de méthane, d’aérosols, etc., puis la hausse de température, les changements affectant les précipitations, la fonte de la glace de mer et des calottes polaires.

Le principal message de ce rapport du GIEC sur « l'atténuation du changement climatique » est que le temps est compté : si les États veulent encore limiter la hausse moyenne des températures mondiales à 2°C, ils doivent agir dès maintenant en déployant des politiques d'une envergure sans commune mesure avec les initiatives prises jusqu'à présent.

Afin d’éclairer les gouvernements dans leurs choix, les experts ont compilé l'état des connaissances sur les possibles scénarios de décarbonisation de l'économie mondiale. Près de 1 200 projections ont été analysées et 235 scientifiques de 57 pays ont participé à sa rédaction.

Les émissions mondiales de gaz à effet de serre atteignent des niveaux record et leur croissance n'a jamais été aussi rapide, rappellent les experts. L'utilisation accrue du charbon a annulé les progrès réalisés dans le secteur énergétique grâce au développement des renouvelables. À ce rythme, le seuil des 2° C supplémentaires sera franchi dès 2030 et il faudra se préparer à un réchauffement compris entre 3,7° C et 4,8° C en 2100.

Ainsi, les émissions d’origine anthropique de GES au niveau mondial ont continué d’augmenter entre 1970 et 2010 avec une augmentation décennale en valeur absolue plus importante vers la fin de la période. Malgré un nombre croissant de politiques visant à l’atténuation du changement climatique, les émissions annuelles de GES ont augmenté en moyenne de 2,2 % par an entre 2000 et 2010, contre 1,3 % par an sur la période. Les émissions anthropiques totales de GES ont été les plus hautes de l’histoire humaine entre 2000 et 2010. La crise économique mondiale de 2007/2008 a réduit les émissions de manière temporaire seulement.

Les émissions de CO2 dues à l'usage de combustibles fossiles et aux procédés industriels ont contribué à environ 78 % de l’accroissement de l’émission totale de GES de 1970 à 2010, avec un pourcentage similaire pour la période 2000 - 2010. Les émissions de CO2 dues aux combustibles fossiles ont augmenté d’environ 3% entre 2010 et 2011 et d’environ 1 à 2 % entre 2011 et 2012.

Sur le total des émissions anthropiques en 2010, le CO2 demeure le principal GES anthropique avec environ 76 % des émissions totales de GES en 2010. 16 % des émissions proviennent du CH4, 6,2 % d'oxyde nitreux N2O et 2 % de gaz fluorés. Annuellement, depuis 1970, environ 25 % des émissions des GES anthropiques l’ont été sous la forme de gaz autres que le CO2.

2. La nécessité de mettre en œuvre des mesures ambitieuses d'atténuation

a. Tous les secteurs économiques (énergie, transport, habitat, agriculture…) devront faire leur révolution

Tous les secteurs économiques (énergie, transport, habitat, agriculture…) devront faire leur révolution. Il faudra pour cela réaliser « de rapides progrès dans le domaine de l'efficacité énergétique, parvenir à tripler, voire quadrupler, l'énergie neutre en carbone produite à partir des énergies renouvelables, du nucléaire, des agrocarburants », sans oublier le développement massif des techniques de séquestration et de stockage du CO2 ainsi que des programmes à grande échelle de reforestation pour créer des puits de carbone.

De même, les obstacles pour accéder aux nouvelles technologies devront être levés, il faudra un prix mondial du carbone permettant de bien orienter les investissements et que les États coopèrent. Toutes ces conditions sont loin d'être réunies aujourd'hui. Le GIEC insiste aussi sur « la transformation des modes de vie » qui devra accompagner cette mutation radicale.

b. Le GIEC recommande de s’appuyer sur l’urbanisation

L’urbanisation massive attendue au cours des vingt prochaines années – la population urbaine dépassera 70 % en 2030 – est une « opportunité », selon le GIEC. L'urbanisation doit être l'occasion de construire des villes plus denses, de développer des transports en commun propres et des habitats sobres en énergie. Cette transformation se déroulera principalement dans les pays en développement, où il faudra ériger autant de villes nouvelles qu'il en existe aujourd'hui.

Selon le GIEC, concentrer les actions sur les villes permet d'agir sur près du quart des émissions mondiales de gaz à effet de serre. Les experts insistent sur les progrès qui en découleront en matière de santé, grâce à la réduction de la pollution.

3. Les objectifs à atteindre

Les experts du GIEC recommandent de limiter d'ici à la fin du siècle la concentration des gaz à effet de serre dans l'atmosphère à 450 parties par million (ppm) – valeur associée par les scientifiques à un réchauffement de 2 °C – ce qui suppose de réduire les émissions mondiales entre 40 % et 70 % d'ici à 2050 et de les ramener à un niveau « proche de zéro » d'ici à la fin du siècle.

Est-ce réaliste ? « Il est encore possible d'atteindre les 2° C avec les technologies - de production énergétiques - existantes. Mais plus les politiques attendent, plus ce sera coûteux. Et plus ils seront dépendants de solutions dont les risques sont mal maîtrisés, comme par exemple la séquestration et le stockage du carbone » (2).

« La balle est dans le camp des politiques. Des choix de société doivent être faits. Combien sommes-nous prêts à payer pour ne pas laisser ce fardeau aux générations futures ? » (3)

« De nombreuses mesures peuvent permettre de respecter la limite des 2° C, mais elles exigeront toutes des investissements importants. On peut limiter les frais associés en évitant de retarder encore les dispositions d'atténuation et en faisant appel à des techniques très variées ». (4)

B. LE RAPPORT DE SYNTHÈSE DU GIEC

Ce rapport de synthèse est base sur les différents rapports des trois groupes de travail du GIEC, et également sur les rapports spéciaux pertinents. Comme contribution finale au cinquième rapport d'évaluation du GIEC (AR5), il fournit une vision intégrée du changement climatique.

1. Les changements observés et leurs causes

L'influence humaine sur le système climatique est claire, les émissions de gaz à effet de serre d'origine anthropique sont les plus élevées de l'histoire. Les changements climatiques ont eu des impacts étendus sur les systèmes naturels et humain.

a. Changements observés dans le système climatique

Le réchauffement du système climatique est sans équivoque, et depuis les années 1950, la plupart des changements observés sont sans précédent depuis des décennies à des millénaires. L'atmosphère et l'océan se sont réchauffés, les quantités de neige et de glace ont diminué, et le niveau de la mer a augmenté.

Chacune des trois dernières décennies a été successivement plus chaude a la surface de la Terre que la décennie précédente depuis 1850. La période 1983-2012 fut probablement la période de 30 années consécutives la plus chaude des 1400 dernières années dans l'hémisphère Nord, ou une telle évaluation est possible. La moyenne globale combinant des données de température de surface des terres et des océans montre par un calcul de tendance linéaire un réchauffement de 0,85 [0,65 à 1,06]° C2 sur la période 1880 - 2012.

b. Causes du changement climatique

Les émissions de gaz à effet de serre ont augmenté depuis l'ère préindustrielle, largement contrôlées par la croissance démographique et la croissance économique et sont aujourd'hui plus élevées que jamais. Ceci a conduit à des concentrations atmosphériques de dioxyde de carbone, de méthane et d'oxyde nitreux sans précédent depuis au moins 800 000 ans. Leurs effets, conjugués à ceux d'autres facteurs anthropiques, ont été détectés au sein du système climatique et sont, avec une probabilité extrêmement élevée, la cause dominante du réchauffement observé depuis le milieu du XXème siècle.

c. Impacts du changement climatique

Au cours des dernières décennies, les changements climatiques ont eu des impacts sur les systèmes naturels et humains sur tous les continents et à travers les océans. Les impacts sont dus au changement climatique observe, quelle que soit sa cause, indiquant la sensibilité des systèmes naturels et humains au changement climatique.

La preuve des impacts observés du changement climatique est la plus forte et la plus complète pour les systèmes naturels. Dans de nombreuses régions, l'évolution des précipitations ou de la fonte de la neige et de la glace modifient les systèmes hydrologiques, affectant les ressources en eau en termes de quantité et de qualité. De nombreuses espèces terrestres, d'eau douce et marines ont modifié leur répartition géographique, leurs activités saisonnières, leurs caractéristiques migratoires, leur abondance et les interactions entre espèces en réponse au changement climatique en cours. Certains impacts sur les systèmes humains ont également été attribués au changement climatique, avec une contribution majeure ou mineure du changement climatique distinguable des autres influences. L'évaluation de nombreuses études couvrant un large éventail de régions et de cultures montre que les impacts négatifs du changement climatique sur les rendements des cultures ont été plus fréquents que les impacts positifs. Certains impacts de l'acidification des océans sur les organismes marins ont été attribués à l'influence humaine.

d. Événements extrêmes

Des changements dans de nombreux phénomènes météorologiques et climatiques extrêmes ont été observés depuis 1950 environ. Certains de ces changements ont été associés à des influences humaines, y compris une diminution des événements extrêmes de température froide, une augmentation des événements extrêmes de température chaude, une augmentation des événements extrêmes de hauts niveaux de la mer et une augmentation du nombre d'événements de fortes précipitations dans un certain nombre de régions.

Il est très probable que le nombre de jours et de nuits froids a diminué et que le nombre de jours et de nuits chauds a augmenté à l'échelle globale. Il est probable que la fréquence des vagues de chaleur a augmenté dans de grandes parties de l'Europe, de l'Asie et de l'Australie. Il est très probable que l'influence humaine a contribué aux changements observés à l'échelle globale de la fréquence et de l'intensité des températures extrêmes quotidiennes depuis le milieu du XXème siècle.

Il est probable que l'influence humaine a plus que double la probabilité d'occurrence de vagues de chaleur dans certains endroits. Il y a une confiance moyenne dans le fait que le réchauffement observe a augmenté la mortalité humaine liée à la chaleur et diminué la mortalité liée au froid dans certaines régions.

Il y a probablement plus de régions continentales ou le nombre d'évènements de fortes précipitations a augmenté que de régions où elle a diminué. La détection récente d'une tendance croissante dans les précipitations extrêmes et le débit de certains bassins versants induit de plus grands risques d'inondation a l'échelle régionale. Il est probable que des niveaux des mers extrêmes (par exemple, telle que cela arrive dans les surcotes liées aux tempêtes) ont augmenté depuis 1970, étant principalement le résultat de l'élévation du niveau moyen de la mer.

Les impacts des extrêmes récents lies au climat, tels que les vagues de chaleur, les sécheresses, les inondations, les cyclones et les incendies de forêt révèlent une vulnérabilité et une exposition importante de certains écosystèmes et de nombreux systèmes humains a la variabilité actuelle du climat.

2. Changements climatiques, risques et impacts futurs

La poursuite des émissions de gaz à effet de serre va entraîner un réchauffement supplémentaire et provoquer des changements à long terme dans l’ensemble des composantes du système climatique, augmentant la probabilité d’impacts sévères, envahissants et irréversibles pour les personnes et pour les écosystèmes. Limiter le changement climatique nécessiterait des réductions substantielles et soutenues des émissions de gaz à effet de serre, ce qui, combiné à des mesures d’adaptation, peut limiter les risques du changement climatique.

a. Facteurs clés contrôlant le climat futur

Les émissions cumulées de CO2 déterminent largement le réchauffement moyen de surface à l’échelle globale à la fin du XXIème siècle et au-delà. Les projections des émissions de gaz à effet de serre couvrent un éventail très large, en fonction à la fois du développement socio-économique et des politiques climatiques.

b. Changements projetés du système climatique

La température de surface devrait augmenter au cours du 21ème siècle dans tous les scénarios d'émissions évalués. Il est très probable que les vagues de chaleur se produiront plus souvent et dureront plus longtemps, et que les événements extrêmes de précipitation deviendront plus intenses et plus fréquents dans de nombreuses régions. L'océan continuera de se réchauffer et de s'acidifier, et le niveau moyen de la mer continuera d'augmenter.

c. Risques et impacts futurs associés au changement climatique

Le changement climatique amplifiera les risques existants et créera de nouveaux risques pour les systèmes naturels et humains. Les risques sont inégalement répartis et sont généralement plus importants pour les personnes et les communautés défavorisées à tous les niveaux de développement.

Le risque d'incidences liées au climat découle de l'interaction entre des aléas climatiques (y compris les tendances et les phénomènes dangereux) et la vulnérabilité et l'exposition des systèmes anthropiques et naturels, y compris leur capacité d'adaptation. L'augmentation de la vitesse et de l’ampleur du réchauffement et autres changements dans le système climatique, accompagnés d'une acidification des océans, augmentent la probabilité d’incidences graves, généralisées, et dans certains cas d’impacts néfastes irréversibles. Certains risques sont particulièrement pertinents au niveau régional, alors que d'autres sont globaux.

L'ensemble des risques futurs lies au changement climatique peuvent être réduits en limitant la vitesse et l'ampleur du changement climatique, y compris l'acidification des océans. Les niveaux précis de changement climatique suffisant pour atteindre un seuil ou un point de basculement (changements soudains et irréversibles) restent incertains, mais les risques engendrés par le franchissement de plusieurs de ces points de basculement du système terrestre ou des systèmes humains et naturels interconnectes augmentent avec l’accroissement des températures.

Concernant l'évaluation des risques, il est important d'évaluer la plus large gamme d'impacts, y compris ceux à faible probabilité avec de lourdes conséquences.

Une grande partie des espèces font face à un risque accru d'extinction en raison du changement climatique au cours et au-delà du XXIème siècle, en particulier depuis que le changement climatique interagit avec autres facteurs de stress. La plupart des plantes ne peuvent pas naturellement changer suffisamment rapidement leur aire géographique pour leur permettre de s’adapter à la vitesse du changement climatique à travers la plupart des sites : la plupart des petits mammifères et des mollusques d'eau douce ne pourront pas se maintenir au XXIème siècle à la vitesse projetée et surtout dans les paysages plats. Les futurs risques seraient élevés dans la mesure où un changement climatique naturel global à une vitesse inférieure au changement climatique anthropique actuel aura cause des évolutions importantes de l'écosystème et l'extinction d'espèces au cours des derniers millions d'années.

Les organismes marins devront progressivement faire face à des niveaux d'oxygène plus faibles et a une vitesse et une ampleur élevées d'acidification des océans, associes a des risques exacerbes par l'élévation des températures océaniques extrêmes. Les récifs coralliens et les écosystèmes polaires sont très vulnérables. Les systèmes côtiers et les zones de faible altitude sont menacés par l'élévation du niveau de la mer, qui se poursuivra pendant des siècles, même si la température moyenne mondiale est stabilisée.

Le changement climatique devrait aggraver la sécurité alimentaire. En raison du changement climatique projeté d’ici le milieu du XXIème siècle et au-delà, la redistribution des espèces marines à l’échelle mondiale et la réduction de la biodiversité marine dans les régions sensibles auront une incidence sur la pérennité de la productivité de la pêche et d’autres services écosystémiques. S’agissant du blé, riz et mais des régions tropicales et tempérées, le changement climatique, à défaut d’une adaptation, devrait avoir une incidence négative sur la production en cas de hausses locales de la température moyenne de 2° C ou plus par rapport aux niveaux de la fin du XXème siècle, bien que certaines zones particulières risquent d’être favorisées.

Une augmentation de 4° C ou plus d’ici la fin du XXIème siècle, combinée à un accroissement de la demande alimentaire croissante, présenterait des risques pour la sécurité alimentaire à l'échelle mondiale. Au cours du XXIème siècle, on prévoit que le changement climatique conduira à un appauvrissement sensible des ressources renouvelables en eaux de surface et en eau souterraine dans la plupart des régions subtropicales arides, ce qui exacerbera la concurrence pour les ressources hydriques entre les secteurs.

Jusqu’au milieu du siècle, le changement climatique influera la santé humaine principalement en exacerbant les problèmes de santé existants. Pendant toute la durée du XXIème siècle, il devrait provoquer une détérioration de l’état de santé dans de nombreuses régions, et en particulier dans les pays en développement à faible revenu, comparativement à une situation de référence sans changement climatique. D’ici 2100, selon le scenario à émissions élevées, la combinaison de conditions de température et d’humidité élevées dans certaines régions au cours de certaines parties de l’année devraient entraver les activités humaines normales, notamment l’agriculture ou le travail à l’extérieur.

Dans les zones urbaines le changement climatique devrait accroitre le risque sur les personnes, les biens, les économies et les écosystèmes, y compris les risques liés au stress thermique, aux précipitations extrêmes, aux inondations sur les côtes et à l’intérieur des terres, les glissements de terrain, la pollution atmosphérique ; les sécheresses et les pénuries d’eau posent des risques dans les zones urbaines pour les personnes, les biens, les économies et les écosystèmes. Ces risques sont amplifiés pour ceux qui sont privés des infrastructures et services essentiels ou qui vivent dans des habitations de piètre qualité ou dans des zones exposées.

Le changement climatique pourrait avoir des incidences importantes, à court et à long terme, dans les zones rurales en influant sur la disponibilité et l’approvisionnement en eau, sur la sécurité alimentaire et sur les revenus agricoles, notamment en provoquant des déplacements des zones de production de cultures vivrières ou non à travers le monde.

Les pertes s’accélèrent lorsque le réchauffement est plus important, mais les impacts économiques à l'échelle globale du changement climatique sont actuellement difficiles à estimer. Tout au long du XXIème siècle, les incidences du changement climatique devraient ralentir la croissance économique, entraver les efforts de lutte contre la pauvreté, continuer d’éroder la sécurité alimentaire, entretenir les poches de pauvreté existantes et en créer de nouvelles, ce dernier effet étant particulièrement marque dans les zones urbaines et dans les « points chauds de la faim ». Les dimensions internationales telles que le commerce et les relations entre les États sont aussi importantes pour comprendre les risques que pose le changement climatique à l’échelle régionale.

Le changement climatique devrait provoquer une augmentation des déplacements de populations. Les populations qui ne possèdent pas les moyens de planifier leur migration font face à une exposition plus élevés aux évènements météorologiques extrêmes, en particulier dans les pays en développement à faible revenu. Le changement climatique peut accroitre indirectement les risques de conflits violents — guerre civile, violences interethniques — en exacerbant les sources connues de conflits que sont la pauvreté et les chocs économiques.

d. Changement climatique au-delà de 2100, irréversibilités et changements brusques

De nombreux aspects du changement climatique et de ses impacts continueront pendant des siècles, même si les émissions anthropiques de gaz à effet de serre sont stoppées. Les risques de changements abrupts ou irréversibles augmentent avec la magnitude croissante du réchauffement.

3. Futures voies pour l’adaptation, l’atténuation et le développement durable

L’adaptation et l'atténuation sont des stratégies complémentaires pour réduire et gérer les risques du changement climatique. Des réductions substantielles des émissions au cours des prochaines décennies peuvent réduire les risques climatiques au XXIème siècle et au-delà, améliorer les perspectives d'adaptation efficace, réduire les coûts et les défis de l'atténuation à long terme, et contribuer à des voies résilientes au changement climatique pour le développement durable.

a. Bases pour la prise de décisions relatives au changement climatique

Une prise de décision efficace pour limiter le changement climatique et ses effets peut être éclairée par une large gamme d'approches analytiques pour l'évaluation des risques et bénéfices attendus, reconnaissant l'importance de la gouvernance, des dimensions éthiques, de l'équité, des jugements de valeur, des évaluations économiques et des perceptions et réponses variées aux risques et incertitudes.

b. Risques liés au changement climatique réduits par l'atténuation et l'adaptation

Sans effort d'atténuation supplémentaire au-delà de ceux actuellement déployés, et même avec de l'adaptation, le réchauffement d'ici la fin du XXIème siècle conduira à des niveaux élevés à très élevés de risques d'impacts sévères, étendus et irréversibles au niveau mondial. L'atténuation implique certains niveaux de co-bénéfices et de risques dus aux effets induits néfastes, mais ces risques n'impliquent pas la même possibilité d'impacts sévère, étendus et irréversible que les risques liés au changement climatique, augmentant les bénéfices des efforts d'atténuation à court terme.

Sans les efforts d'atténuation supplémentaires au-delà de ceux en place aujourd'hui, et même avec l'adaptation, le réchauffement d'ici la fin du XXIème siècle conduira à un risque élevé à très élevé des impacts graves, globaux et irréversibles à l'échelle mondiale.

Une réduction drastique des émissions de gaz à effet de serre au cours des prochaines décennies peut réduire considérablement les risques de changement climatique en limitant le réchauffement dans la seconde moitié du XXIème siècle et au-delà. Les émissions cumulées de CO2 déterminent en grande partie le réchauffement climatique de la surface moyenne d’ici la fin du XXIème siècle et au-delà. Limiter les risques sur les motifs de préoccupation impliquerait une limite des émissions cumulées de CO2. Une telle limite demanderait que les émissions nettes mondiales de CO2 finissent par baisser à zéro et limiteraient les émissions annuelles au cours des prochaines décennies. Mais certains risques de dommages climatiques sont inévitables, même avec l'atténuation et l'adaptation.

c. Caractéristiques des voies pour l'adaptation

L'adaptation peut réduire les risques des impacts du changement climatique, mais il y a des limites à son efficacité, particulièrement avec des changements climatiques de plus grande ampleur et plus rapides. La considération de perspectives de plus long terme, dans un contexte de développement durable, accroît les moyens de subsistance.

d. Caractéristiques des trajectoires d'atténuation

Il existe de multiples trajectoires d'atténuation probablement capables de limiter le réchauffement à moins de 2° C par rapport aux niveaux préindustriels. Ces trajectoires nécessiteraient des réductions substantielles des émissions au cours des prochaines décennies et des émissions de CO2 et des autres GES à longue durée de vie voisines de zéro d'ici la fin du siècle. La mise en œuvre de telles réductions pose d'importants défis technologiques, économiques, sociaux et institutionnels, qui augmentent lorsque l'atténuation supplémentaire est différée et si les technologies ne sont pas disponibles. Limiter le réchauffement à un niveau plus ou moins élevé implique des défis similaires mais à des échelles de temps différentes.

4. Adaptation et atténuation

De nombreuses options d'adaptation et d'atténuation peuvent contribuer à relever le défi du changement climatique, cependant, aucune option considérée individuellement n'est suffisante en elle-même. La mise en œuvre efficace dépend des politiques et des coopérations à toutes les échelles, et peut être renforcée via des réponses intégrées reliant l'adaptation et l'atténuation à d'autres objectifs sociétaux.

a. Facteurs facilitants communs et contraintes pour l'adaptation et l'atténuation

Les réponses d'adaptation et l'atténuation sont sous-tendues par des facteurs facilitants communs. Ceux-ci incluent les institutions et la gouvernance, l'innovation et l'investissement dans des technologies et des infrastructures respectueuses de l'environnement, les moyens de subsistances durables et les choix de mode de vie et de comportement.

b. Options d'adaptation

Des options d'adaptation existent dans tous les secteurs, mais le contexte pour leur mise en œuvre et leur potentiel de réduction des risques liés au climat varie en fonction des secteurs et des lieux. Certaines réponses d'adaptation impliquent des co - bénéfices, synergies et compromis significatifs. Un changement climatique accru augmenterait les défis de nombreuses options d'adaptation.

c. Options d'atténuation

Les options d'atténuation existent dans chaque secteur majeur. L'atténuation peut être rentable si elle s'appuie sur une approche intégrée combinant des mesures pour réduire la consommation d'énergie et l'intensité en GES des secteurs de finaux, décarboner la fourniture d'énergie, réduire les émissions nettes et accroitre les puits de carbone dans le secteur de l'usage des terres.

d. Approches politiques de la technologie et de la finance de l'adaptation et de l'atténuation

Les réponses d'adaptation et d'atténuation efficaces dépendront des politiques et mesures à différentes échelles : international, national et infra-national. Les politiques au travers des échelles, soutenant le développement, la diffusion et le transfert de technologie, tout comme le financement des ripostes au changement climatique peuvent compléter et accroitre l'efficacité des politiques qui promeuvent directement l'atténuation et l'adaptation.

e. Compromis, synergies et interactions avec le développement durable

Le changement climatique est une menace pour le développement durable. Cependant, il y a de nombreuses opportunités de lier atténuation, adaptation et la poursuite d'autres objectifs sociétaux au travers de réponses intégrées. La mise en œuvre avec succès repose sur des outils adéquats, des structures de gouvernance appropriées et une capacité de réponse renforcée.

C. La tragédie du réchauffement climatique (5)

L’évolution de l’acidité des océans qui entraîne la disparition des massifs coralliens et menace plus généralement la vie marine, la fonte des glaces, la montée du niveau de la mer, la répétition des phénomènes climatiques extrêmes et de plus en plus intenses (tornades, inondations, canicules, sécheresse, etc.) montrent que le changement climatique est à l’œuvre et que nous serons témoins, sinon victimes, de ses conséquences beaucoup plus rapidement que prévu.

La liste des principaux phénomènes météorologiques et climatiques survenus en 2013 est à cet égard impressionnante.

PRINCIPAUX PHÉNOMÈNES MÉTÉOROLOGIQUES ET CLIMATIQUES SURVENUS DANS LE MONDE EN 2013

- Le typhon Haiyan (Yolanda), l’un des plus violents qui ait jamais atteint les côtes, a eu des effets dévastateurs dans le centre des Philippines.

- Dans l’hémisphère Sud, la température de l’air à la surface des terres était particulièrement élevée, ce qui a entraîné des vagues de chaleur de grande étendue ; en 2013, l’Australie a enregistré des températures records : 2013 se classe au deuxième rang des années les plus chaudes en Argentine et au troisième rang, en Nouvelle Zélande.

- Une partie de l’Europe et le sud-est des États-Unis ont été balayés par de l’air polaire glacial.

- Une grave sécheresse a sévi en Angola, au Botswana et en Namibie.

- De fortes pluies de mousson ont entraîné de graves inondations à la frontière indo-népalaise.

- Le nord-est de la Chine et l’est de la Fédération de Russie ont subi des pluies abondantes et des inondations.

- De fortes pluies et des inondations ont frappé le Soudan et la Somalie.

- Le sud de la Chine a été confronté à une grave sécheresse.

- Le nord-est du Brésil a souffert de la pire sécheresse de ces cinquante dernières années.

- Aux États-Unis, la tornade la plus large jamais observée a frappé la ville d’El Reno, dans l’Oklahoma.

- Des précipitations extrêmes ont entraîné de graves inondations dans les Alpes, en - Allemagne, en Autriche, en Pologne, en République tchèque et en Suisse.

- Israël, la Jordanie et la République arabe syrienne ont subi des chutes de neige sans précédent.

- Une tempête de vent extratropicale a balayé plusieurs pays de l’ouest et du nord de l’Europe.

- Les concentrations de gaz à effet de serre dans l’atmosphère ont atteint des maximums records.

- Le niveau des océans a atteint de nouveaux maximums records.

- L’étendue de la banquise de l’Antarctique a atteint un maximum record.

Source : La liste des principaux phénomènes météorologiques et climatiques survenus dans le monde en 2013 est extraite de la déclaration de l’Organisation météorologique mondiale sur l’état du climat mondial en 2013, publié en mars 2014.

Les enseignements des trois volumes scientifiques du cinquième rapport du GIEC sont clairs : le réchauffement du système climatique est incontestable ; l'influence de l'homme est, de manière quasi-certaine, la cause majeure du réchauffement observé depuis le milieu du XXème siècle ; les événements climatiques extrêmes seront probablement plus violents et plus nombreux dans les prochaines années : canicules et sécheresses plus fréquentes, plus longues et dont la succession à des rythmes accrus plusieurs années de suite renforceront les conséquences négatives, irruptions d’air polaire glacial, pluies diluviennes et inondations, cyclones tropicaux probablement plus intenses, récoltes insuffisantes, etc.

90 % de la chaleur accumulée depuis 1970 se concentre dans les océans (surtout, depuis 2000, entre 700 et 2 000 mètres de profondeur), menaçant encore plus les écosystèmes marins.

Alors même que l’année 2012 marquait le vingtième anniversaire du sommet de la Terre à Rio, symbolisant le début de la lutte contre le changement climatique et la naissance de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques, jamais les émissions mondiales de gaz effet de serre n’auront augmenté aussi rapidement que durant la décennie 2000 - 2010, en moyenne de plus d’une gigatonne de CO2 par an.

Pour encore avoir une chance de limiter à la fin de ce siècle à moins de 2° C l’augmentation de la température de notre planète, il faut modifier profondément les économies, les investissements actuels et les modes de vie, et réduire de 40 à 70 % les émissions d’ici à 2050. De plus, il faut agir très rapidement !

Même si elle ne figure pas dans le résumé à l’intention des décideurs, une figure est particulièrement intéressante dans le rapport du GIEC publié à Berlin en avril 2014 : il s’agit de celle qui donne les émissions de GES annuelles des différents pays du monde selon la classification en quatre groupes des économies retenue par la Banque mondiale en 2013. Cette division repose sur les estimations du revenu national brut (RNB) par habitant en 2012. Le résultat est flagrant : sous l’impulsion principale de la Chine, et à un degré moindre du Brésil et de l’Afrique du Sud, les émissions des 55 pays de la seconde tranche, autrement dit des pays dits à « revenus intermédiaire de la tranche supérieure », ont émis en 2010 autant de gaz à effet de serre que les 76 pays de la première tranche, dite des pays à revenu élevé.

La division du monde de la première conférence de Rio qui, au sortir de la guerre froide, considérait d’un côté les pays développés qui devaient être soumis à des obligations de réduction de leurs émissions (protocole de Kyoto et son annexe B), des autres pays dont les émissions étaient négligeables et qui n’étaient soumis à aucune autre contrainte, n’est donc plus pertinente.

Cette figure montre de plus qu’en 20 ans, les pays développés n’ont réussi qu’à stabiliser leurs émissions tandis que l’essentiel de la croissance des émissions provient des pays émergents.

Émissions mondiales de gaz à effet à effet de serre depuis 1990 répartis entre les pays suivant la classification de la Banque mondiale

escription : http://www.strategie.gouv.fr/sites/strategie.gouv.fr/files/thumbnails/image/image-auverlot-billet-2.jpg

Source : Figure 1-6, p. 25, rapport IPCC, Working Group III – Mitigation of Climate Change Chapter 1, Introductory Chapter, Https ://.ipcc.ch/report/ar5/wg3/

Les pays développés ne doivent donc plus être les seuls soumis à des obligations de réduction. Cette manière de raisonner a naturellement entraîné de fortes réactions au début du mois d’avril à Berlin lors de la mise au point du résumé à l’intention des décideurs : certains pays émergents craignant de voir occulter la responsabilité historique des pays développés et cherchant à éviter les conséquences qui pourraient en être tirés ont demandé le retrait des figures et tableaux correspondants, ce qu’ils ont obtenu... La question du partage du fardeau devient ainsi de plus en plus inextricable.

Les enseignements des rapports du GIEC sont donc extrêmement simples : il faut agir vite et les pays émergents doivent se mobiliser aux côtés des pays développés.

II. LE BILAN DE LA CONFÉRENCE DE VARSOVIE : DES AVANCÉES FIXANT LE CAP SUR 2015

La Conférence des Nations Unies sur les changements climatiques qui s’est tenue à Varsovie était une «  conférence d’étape  », selon les termes mêmes des participants. Il s’agissait de mettre en œuvre les accords techniques issus des conférences précédentes.

Lors de cette Conférence, les gouvernements ont toutefois pris de nouvelles décisions essentielles en vue de garder le cap sur l’accord universel sur le climat de 2015.

L’accord présente deux volets : 

- rassembler les nations dans le cadre d’une initiative mondiale visant à réduire les émissions assez rapidement pour permettre à l’humanité de s’écarter à long terme du seuil de danger du changement climatique, tout en renforçant les capacités d’adaptation ;

- faire en sorte d’accélérer et d’amplifier le plan d’action actuel.

A. LA DIMENSION JURIDIQUE

1. Les décisions concernant l’accord universel de décembre 2015, qui entrera en vigueur en 2020

À Varsovie, les gouvernements ont avancé le calendrier de l’accord de 2015. Les éléments du nouvel accord seront élaborés en vue de la première réunion en mars 2014, le projet de texte initial sera soumis en décembre 2014, et le projet de texte officiel d’ici mai 2015, toutes ces étapes visant à faciliter la conclusion des négociations en décembre 2015.

Les gouvernements ont décidé soit d’amorcer, soit d’intensifier les préparatifs à l’échelon national pour les contributions auxquelles ils se sont engagés dans le cadre de l’accord, de manière à ce que tout soit prêt bien avant l’échéance de décembre 2015, et idéalement d’ici le premier trimestre de la même année. Il s’agit d’une phase importante du calendrier des négociations. 

Il a par ailleurs été décidé de présenter les contributions décidées à l’échelle nationale de manière claire et transparente. On a exhorté les gouvernements des pays industrialisés à aider les pays en développement lors de cette importante étape.

Enfin, les gouvernements ont décidé de préciser l’information que les pays fourniront en proposant leurs contributions d’ici le début de la Conférence sur les changements climatiques de Lima, prévue à la fin de 2014.

2. Les décisions visant à remédier aux disparités en matière d’ambitions d’ici à 2020

Les gouvernements ont décidé de renforcer les mesures visant à combler les écarts au niveau des ambitions, c’est-à-dire les disparités entre les ressources engagées et les ressources nécessaires pour limiter la hausse des températures mondiales à deux degrés ou moins, et ce, avant que le nouvel accord universel n’entre en vigueur en 2020.

Ils intensifieront ainsi l’examen technique des projets à fort potentiel de réduction des émissions de gaz à effet de serre et feront fréquemment appel aux ministres à ce sujet.

À cette fin, les gouvernements accéléreront également l’application des politiques et la mise en place des technologies viables sur le plan environnemental.

Ils encouragent, par ailleurs, l’annulation volontaire les réductions d’émissions certifiées (CER) en vertu du Mécanisme pour un développement propre du Protocole de Kyoto.

B. LA DIMENSION FINANCIÈRE

1. Le renforcement des efforts visant à mobiliser 100 milliards de dollars d’ici 2020

Dans le cadre de leur engagement à mobiliser 100 milliards de dollars chaque année d’ici 2020, en vue d’aider les pays en développement à mettre en œuvre leurs mesures de lutte contre le changement climatique, les pays industrialisés ont accepté de rendre publics leurs efforts à intervalle de deux ans au cours de la période 2014 - 2020. Seront également organisés des ateliers techniques sur les meilleures façons d’accroître le financement.

Il a également été décidé de convoquer tous les deux ans des réunions ministérielles sur le financement à long terme tout au long de la période 2014-2020. Ces réunions devraient donner une impulsion politique aux discussions.

Par ailleurs, le Fonds vert pour le climat est opérationnel et amorcera son processus de mobilisation initiale des ressources au milieu de 2014.

Cette série de décisions représentent un grand pas vers l’adoption de l’accord universel de 2015, qui reposera sur les faits scientifiques et visera à protéger les populations les plus vulnérables. Les gouvernements ont par ailleurs mené à bien des travaux qui  renforcent les efforts permanents visant à prendre en charge la question des changements climatiques.

a. L’absence d’objectif chiffré

Alors que certains pays en développement souhaitaient des objectifs intermédiaires, aucun engagement chiffré n’a été pris dans ce sens : il est simplement demandé aux pays développés de maintenir la continuité des financements dédiés au climat tout en augmentant leur niveau pour atteindre l’objectif des 100 milliards de dollars par an en 2020. Il a été rappelé que ces financements peuvent être de différentes formes : publics ou privés, bilatéraux ou multilatéraux et venants de « sources alternatives ».

Néanmoins, des initiatives ont été prises afin de clarifier les actions actuelles et futures des pays développés. Ces derniers devront décrire leurs stratégies en matière de niveaux de financements, d’actions financées et de transparence pour la période 2014 - 2020 dans des soumissions biennales. De plus, un dialogue ministériel de haut-niveau sur les financements dédiés au climat doit débuter en 2014 pour se terminer en 2020.

En parallèle, le Standing Committee on Finance (SCF) doit conclure la 5ème revue des mécanismes financiers pour la prochaine COP. Il doit également terminer son travail sur les flux financiers actuels et continuer celui sur la définition des flux dédiés au climat et la mobilisation de financements privés.

b. En matière d’adaptation, des promesses de financement…

Les 48 pays les moins avancés Parties à la CCNUCC ont finalisé une série de plans détaillés pour la lutte contre les effets des changements climatiques. Ces plans visent à mieux évaluer les répercussions immédiates du phénomène et à aider les pays à déterminer l’aide et les mesures dont ils ont besoin pour accroître leur résilience.

Des promesses de financement ont malgré eu lieu. Parmi celles-ci, l’abondement du Fonds d’adaptation par des pays européens a permis d’atteindre l’objectif attendu des 100 millions de dollars pour la recapitalisation du Fonds. D’autres engagements financiers sont intervenus, comme celui du Japon, qui a promis 16 milliards de dollars sur trois ans, jusqu’en 2016.

c. … en attente de capitalisation

En revanche, la capitalisation initiale du Fonds vert pour le climat devrait seulement avoir lieu au cours de l’année 2014. Cette capitalisation, de par les montants en jeu et son caractère politique fort, devrait être l’un des moments forts des négociations en 2014. Les gouvernements australien et canadien ont d’ores et déjà annoncé ne pas souhaiter participer au financement du Fonds vert.

À Varsovie, les liens institutionnels entre la COP et le Fonds vert ont été établis. Cela concerne notamment les dispositifs de revue, d’évaluation, de reporting et d’indépendance.

Les décisions de financement sont ainsi entièrement sous la responsabilité du conseil du Fonds vert, même si la COP peut émettre des orientations sur la politique d’investissement.

2. La réduction des émissions liées au déboisement : « le Cadre de Varsovie pour REDD+ »

Les gouvernements se sont entendus concernant une série de décisions sur les façons de diminuer les émissions issues du déboisement et de la dégradation des forêts. Ces décisions sont le fruit de sept années de travail et constituent une grande avancée en matière d’action dans le domaine du climat.

Le déboisement génère quelque 20 % des émissions de CO2 à l’échelle mondiale. La série de décisions renforce la préservation et l’utilisation durable des forêts au bénéfice direct des populations qui l’habitent ou qui vivent à proximité.

Ces résultats offrent une base pour la transparence et l’intégrité des actions et éclaircissent la coordination du soutien.

Les conditions sont ainsi créées pour établir des modes de paiement axés sur les résultats, si les pays en développement peuvent démontrer que les efforts de protection des forêts ont été menés à bien. C’est la raison pour laquelle les décisions s’appuient sur des engagements initiaux de 280 millions de dollars.

C. LA RÉPARATION DES DOMMAGES

Les décisions prises à Varsovie entérinent l’urgence de l’aide à apporter aux populations touchées par les effets des changements climatiques.

Sur la question des « pertes et dommages » que le réchauffement va leur faire subir, les pays du Sud ont en partie été entendus. Un dispositif international d’échanges d’expertises, qui porte déjà le nom de « mécanisme de Varsovie », va être mis en place pour améliorer les connaissances dans certaines situations extrêmes (ouragans, montée des océans) et, éventuellement, augmenter les soutiens financiers et technologiques.

Les gouvernements ont ainsi mis sur pied le Mécanisme international de Varsovie sur les pertes et dommages. Celui-ci sera chargé de gérer les questions relatives aux pertes et dommages associés aux impacts des changements climatiques à long terme dans les pays en développement, qui sont particulièrement vulnérables à ce phénomène.

La mise en œuvre provisoire du mécanisme sera confiée à un comité exécutif, qui rendra compte à la COP et sera réévalué en 2016.

Le mécanisme aura pour mission de faciliter l’échange d’information et de pratiques exemplaires relativement aux pertes et dommages causés par les changements climatiques, ainsi que de renforcer l’action et les activités d’appui, notamment en facilitant la mobilisation de fonds.

La première réunion du comité exécutif devait avoir lieu en mars 2014.

D. LES AUTRES DÉCISIONS

1. Des progrès en matière de responsabilisation

Le cadre de mesure, compte rendu et vérification des activités d’atténuation, y compris celles menées par les pays en développement, est maintenant entièrement opérationnel. Il s’agit d’une réalisation déterminante, après de nombreuses années de travail acharné ; l’accord conclu par les gouvernements est important car cela signifie que l’on peut maintenant mieux mesurer les efforts déployés par les pays sur le plan de l’atténuation, de la durabilité et du soutien.

Cela donnera aussi confiance aux donateurs et investisseurs qui sont intéressés à financer des mesures d’atténuation nationales adaptées.

2. Les technologies au service de l’action sur le climat

Le Centre et Réseau de technologie climatique (CTCN), chargé de stimuler la coopération en matière de technologie et le transfert technologique dans les pays en développement, est maintenant prêt à commencer ses activités.

Le Conseil consultatif du CTCN a adopté les règles du mécanisme. Cela signifie que le CTCN, établi à Cancún en 2010, est maintenant en mesure d’appuyer les actions menées par les pays en développement suite à la présentation de demandes d’aide par les autorités nationales désignées.

Le CTCN est prêt à répondre aux demandes des pays en développement en ce qui a trait aux questions se rapportant au développement et au transfert de technologie.

E. LES DÉCISIONS DE VARSOVIE SUR LE MRV OUVRENT LA VOIE VERS UN ACCORD INTERNATIONAL « APPLICABLE À TOUS » (6)

La conférence de Varsovie s’est déroulée dans un environnement particulier. Divers évènements se sont succédés comme le typhon Haiyan, le limogeage du ministre de l’environnement polonais – et président de la COP, la tenue en parallèle d’une conférence sur le charbon « propre », la baisse des engagements japonais, l’abandon de la taxe carbone australienne, et jusqu’au départ des organisations non-gouvernementales avant la fin des négociations.

Si l’on attend de l’accord prévu pour 2015 des engagements « contraignants » de réduction des émissions, Varsovie n’offre guère qu’un calendrier de négociation. Mais si l’on attend surtout de Paris 2015 l’émergence d’outils communs, internationalement reconnus, en matière de suivi, notification et vérification (MRV en anglais), Varsovie représente une grande avancée.

Alors que le sujet hante les négociations depuis plusieurs années, les pays se sont mis d’accord sur un cadre commun et ambitieux conditionnant les financements dédiés à la lutte contre la déforestation et la dégradation des sols et à la reforestation. Les émissions forestières des pays qui souhaitent recevoir des financements REDD+ seront soumises à un MRV aussi rigoureux que celui actuellement en vigueur pour les pays de l’annexe 1. Cette exigence s’applique aux financements CCNUCC, dont le Fonds vert pour le climat, mais il est très probable qu’elle soit également appliquée aux financements bilatéraux ou multilatéraux en cours sur REDD+.

La forêt peut ainsi être considérée comme le premier NAMA sectoriel. Les « Nationally appropriate mitigation actions » sont des politiques d’atténuation mises en place dans les pays en développement.

Concernant le MRV des actions REDD+, les données utilisées, présentées tous les deux ans, devront être cohérentes avec celles qui ont été utilisées dans la construction des scénarios de référence. Elles seront vérifiées par une équipe de revue dans le cas où le pays-hôte souhaite être rémunéré pour ses actions REDD+. Sur le papier, ces exigences sont proches de celles existant pour les inventaires de GES des pays développés. Cette décision précise également que toutes les actions REDD+ basées sur ces résultats pourraient être éligibles par toute approche de marché qui pourrait être développée par la Conférence des parties – comme les NAMA.

C’est la première fois que des pays en développement acceptent un processus de MRV audité internationalement dont les règles sont proches de celles appliquées aux pays de l’annexe I. Cela devrait créer un précédent qu’il sera difficile de ne pas prendre en compte dans les prochaines discussions, notamment sur le MRV des NAMA financés internationalement.

C’est un signe encourageant dans la perspective d’un accord de 2015 applicable à tous.

DEUXIÈME PARTIE :
LES ENJEUX DE LA CONFÉRENCE CLIMATIQUE DE LIMA : FIXER UN CADRE POUR UN ACCORD MONDIAL EN 2015

I. L’ÉVOLUTION HISTORIQUE DES NÉGOCIATIONS INTERNATIONALES SUR LE CLIMAT (7)

A. LES PREMIERS PAS : LE DÉPLOIEMENT D’UNE APPROCHE COHÉRENTE DE LA POLITIQUE SUR LE CHANGEMENT CLIMATIQUE

1. La Conférence de Stockholm : le point de départ

En 1972, la Conférence de Stockholm adopte une déclaration énonçant des principes et un programme d’action en faveur de la préservation et de l’amélioration de l’environnement humain. Elle soulève également pour la première fois le problème du changement climatique, recommandant aux gouvernements d’être attentifs aux activités susceptibles d’avoir une influence sur le climat.

En 1988, le Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE) organise un séminaire interne afin d’identifier les secteurs environnementaux susceptibles d’être sensibles au changement climatique. Le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), instance chargée d’enquêter sur les causes potentielles et l’ampleur du changement climatique, est établi. Depuis sa création, le GIEC a publié cinq rapports (en 1990, 1995, 2001, 2007 et 2014) rassemblant des données scientifiques sur le changement climatique, ses causes et ses conséquences.

Le premier rapport du GIEC fait prendre conscience du problème aux dirigeants et aux responsables politiques du monde entier ainsi qu’à l’opinion publique, les alertant des dangers potentiels du réchauffement planétaire.

Il conduit à l’organisation, en 1992, de la Conférence des Nations Unies de Rio de Janeiro à l’issue de laquelle est adoptée la Convention-Cadre des Nations Unies sur les changements climatiques. Ce traité non contraignant – ne fixant pas de plafond obligatoire aux émissions de gaz à effet de serre et ne prévoyant aucun mécanisme d’application – avait pour objectif d’inciter les nations signataires à agir volontairement afin de stabiliser les concentrations de gaz à effet de serre dans l’atmosphère. Ces actions visaient avant tout les pays développés et industrialisés répertoriés dans Annexe I à la Convention (dits «pays de l’Annexe I»). La Convention-cadre compte à l’heure actuelle195 Parties qui se réunissent chaque année à l’occasion de la Conférence des Parties (COP).

2. Le Protocole de Kyoto : consolidation, ratification et mise en œuvre entre 1997 et 2005

La troisième Conférence des Parties se tient à Kyoto (Japon) en décembre 1997. À l’issue de négociations intenses, les parties adoptent le Protocole de Kyoto. Ce document énonce des objectifs spécifiques de réduction des émissions de gaz à effet de serre pour les pays développés, selon le principe de « responsabilités communes, mais différenciées ». Les pays de l’Annexe I acceptent des engagements juridiquement contraignants prévoyant des réductions de leurs émissions de gaz à effet de serre de l’ordre de 5 % en deçà des niveaux de 1990 entre 2008 et 2012, période définie comme la première période de réduction des émissions.

Le Protocole de Kyoto repose sur cinq concepts fondamentaux :

- des objectifs juridiquement contraignants pour les pays de l’Annexe I ;

- la mise en œuvre : les pays de l’Annexe I étaient tenus d’élaborer des politiques et des mesures visant à réduire les émissions, d’accroître l’absorption des gaz à effet de serre et d’adopter des « mécanismes souples » ;

- la minimisation des impacts sur les pays en développement : grâce à l’établissement d’un fonds d’adaptation au changement climatique ;

- la transparence, avec l’obligation de rendre des comptes, d’établir des rapports et de procéder à un examen périodique ;

- l’établissement d’un Comité de conformité chargé de veiller à la mise en œuvre des engagements souscrits au titre du Protocole.

Le Protocole de Kyoto a adopté des « mécanismes souples » chargés de faciliter la réalisation des objectifs en matière de réduction des émissions :

- le négoce des droits d’émission – c’est-à-dire la possibilité pour les pays de vendre les unités d’émission non «utilisées», mais auxquelles ils ont droit à des pays ayant dépassé leurs objectifs ;

- le Mécanisme de développement propre – c’est-à-dire la possibilité pour les pays de l’Annexe I de réaliser des projets de réduction dans des pays en développement. Ces projets permettent d’obtenir des unités de réduction certifiée des émissions (URCE) négociables, qui peuvent être évaluées par rapport aux objectifs fixés par le Protocole de Kyoto ;

- la mise en œuvre conjointe – c’est-à-dire la possibilité pour les pays de l’Annexe I d’obtenir des unités de réduction des émissions dans le cadre d’un projet de suppression ou de réduction d’émissions réalisé dans un autre pays de l’Annexe I, qui peut être évalué par rapport à son objectif.

Les quatre années suivant la signature du Protocole de Kyoto furent consacrées à la résolution de questions spécifiques n’ayant pas été réglées à Kyoto, ainsi qu’à la planification de la mise en œuvre et de la ratification du Protocole. Les conférences COP 4 (1998, Buenos Aires), COP 5 (1999, Bonn), COP 6 (2000, La Haye et Bonn) et COP 7 (2001, Marrakech)26 furent marquées par la tenue de discussions d’experts sur les mécanismes de Kyoto, l’élaboration de plans en vue de la ratification du Protocole et l’arrêt, en 2001, de la participation active au processus de Kyoto des États-Unis – de loin le plus gros émetteur de gaz à effet de serre de tous les pays de l’Annexe I. Le Protocole de Kyoto est entré en vigueur en février 2005 après sa ratification par la Russie, l’Australie et les États-Unis ayant maintenu leur refus.

La signature, en 2000, de la Déclaration du Millénaire par 189 Chefs d’État fut l’occasion de mettre en lumière un objectif intitulé « Protéger notre environnement commun » et de réaffirmer l’engagement de respecter le Protocole de Kyoto.

B. LES ACTIONS ENTREPRISES DEPUIS 2005 EN VUE DE NÉGOCIER UN RÉGIME SUCCESSEUR

Les réunions et événements clés tenus depuis lors en vue de négocier un nouvel accord censé remplacer le Protocole de Kyoto sont les suivants :

Date et nom de l’événement

Principaux résultats

2005, Montréal : COP 11/MOP

La première réunion des Parties (MOP) au Protocole de Kyoto lance les discussions

2007, Déclaration de Washington

Un accord non contraignant est conclu entre les chefs de gouvernement du G8, ainsi que du Brésil, de la Chine, de l’Inde, du Mexique et de l’Afrique du Sud, sur les

grandes lignes d’un régime censé succéder au Protocole de Kyoto. Il envisage un système mondial d’échange applicable à la fois aux nations industrialisées et aux pays en développement.

2007, Quatrième rapport

d’évaluation du GIEC

Le GIEC prévient les décideurs politiques que le rythme du changement climatique est supérieur aux prévisions initiales et que ses effets sur la planète sont plus graves que prévu.

Le même rapport estime par ailleurs que, pour maintenir l’augmentation de la température à 2° C, il faudrait réduire les émissions de gaz à effet de serre de 25 à 40 % d’ici à 2020 et de 50 à 85 % d’ici à 2050 par rapport aux niveaux de 2000.

Date et nom de l’événement

Principaux résultats

2007, Bali : COP 13/MOP 3

Accord sur un calendrier et la structure des négociations relatives au régime post-2012 (« Plan d’action de Bali » ou « Feuille de route Kyoto II »).

Création d’un Groupe de travail spécial de l’action concertée à long terme au titre de la Convention (AWG–LCA), nouvel organe subsidiaire chargé de conduire les négociations.

L’Australie ratifie enfin le Protocole de Kyoto.

Juin 2009, réunion du G8 en Italie

Les nations du G8 conviennent de la nécessité de respecter l’objectif des 2° C et d’élaborer un régime pour succéder à Kyoto.

2009, Copenhague : COP 15/

MOP 5

Aucun accord juridiquement contraignant n’est adopté en raison de l’absence de consensus politique sur la manière de répartir le fardeau représenté par la réduction requise de 50 % à 85 % des émissions de gaz à effet de serre d’ici à 2050 et des dissensions encore plus profondes sur la fixation d’objectifs quantitatifs à moyen terme pour 2020.

Le seul résultat concret est un modeste «accord politique» non contraignant contenant à peine 13 paragraphes, négocié hors du cadre de la COP et dont la réunion COP 15 se contente de « prendre note ».

2010, Cancun : COP 16/MOP 6

La Conférence de Cancún ne permet d’enregistrer aucun progrès dans les négociations d’un régime pour succéder à Kyoto.

2011, Durban : COP 17/MOP 7

La Conférence convient de la nécessité d’achever d’ici à 2015 au plus tard les négociations sur un accord « ayant valeur juridique » qui prendrait effet à compter de 2020. Les Parties conviennent également que le nouvel instrument devrait être « applicable à toutes les Parties ».

Création d’un Fonds vert pour le climat visant à aider les pays en développement à réduire leurs émissions. Le Fonds doit être doté d’une enveloppe de 100 milliards de dollars d’ici à 2020, mais leur provenance n’a toutefois pas été clairement définie.

2012, Rio de Janeiro : Conférence

Rio+20

La Conférence des Nations Unies sur le développement durable a pour objectif de susciter un engagement politique renouvelé en faveur de l’économie verte et du

cadre institutionnel du développement durable. Le document final intitulé « L’avenir que nous voulons » souligne que la lutte contre les changements climatiques exige de prendre d’urgence des mesures ambitieuses.

Date et nom de l’événement

Principaux résultats

2012, Doha : COP 18/MOP 8

Durant cette Conférence, les Parties adoptent un calendrier pour l’élaboration d’un nouvel accord international d’ici à mai 2015.

38 pays industrialisés conviennent d’une deuxième période d’engagement du Protocole de Kyoto qui démarrera en janvier 2013 et s’étendra sur huit ans. Elles décident également du maintien des «mécanismes souples» après 2013.

Les pays développés réitèrent leur engagement de maintenir sur le long terme l’aide financière climatique aux pays en développement. L’Allemagne, le Royaume-Uni, la France, le Danemark, la Suède et la Commission européenne annoncent des contributions financières concrètes pour la période allant jusqu’en 2015, s’élevant au total à 6 milliards de dollars.

Source : rapport de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe du 10 décembre 2013 Commission des questions sociales, de la santé et du développement durable ; rapporteur : M. John PRESCOTT, Royaume-Uni, Groupe socialiste.

II. LE NÉCESSAIRE ACCORD DE TOUTES LES PARTIES EN PRÉSENCE

A. LA DIFFICULTÉ À TROUVER UN COMPROMIS

1. La recherche d’un accord intergouvernemental

L’accord qui pourrait être annoncé le 12 décembre 2015 sera nécessairement intergouvernemental. À la différence du protocole de Kyoto, il s’agit en effet de négocier un accord universel et crédible, qui engage toutes les parties et pas seulement les pays développés.

Quelle que soit la forme qu’il prendra, l’accord devra définir des règles et fixer des points de rendez-vous pour réévaluer et corriger les trajectoires. Parallèlement, les États vont présenter pour la période qui va débuter – l’Union européenne a proposé 2030 comme horizon – leur contribution nationale. L’objectif est de les avoir rassemblées au premier semestre 2015, si possible au premier trimestre.

Cet accord devra bien sûr s’accompagner d’un volet financier. Le Fonds vert a connu, certes, un lent démarrage à New York.

Par ailleurs, la Conférence de Lima devrait être l’occasion de voir émerger la contribution des acteurs non gouvernementaux. Jusqu’à présent, il n’y avait pas d’espace pour ceux qui sont sur le terrain. L’objectif est d’obtenir la création d’une plateforme pour donner, après 2020, une voix au chapitre aux collectivités, aux entreprises innovantes et aux institutions internationales. Cette plateforme leur permettrait de rapporter leurs efforts en faveur de la transition. Elle sera à la fois un lieu de démonstration et d’engagement.

Les gouvernements prendront des engagements et se reverront régulièrement – tous les cinq ans serait un bon objectif – pour faire le point et examiner les solutions afin d’améliorer les propositions de chacun car le chemin à parcourir pour limiter la hausse des températures reste long. Les collectivités et les entreprises feront également tous les cinq ans le bilan de leur action et se projetteront dans l’avenir.

La plupart des pays sont bien mieux préparés que lors de la Conférence de Copenhague en 2009, notamment les pays émergents ; cette Conférence ne pouvait déboucher sur une solution politique. Mais, depuis 2009, de nombreux pays ont réfléchi à la transformation de leur économie. La préparation est importante dans les pays émergents et un changement est à l’œuvre aux États-Unis.

Cet accord ne donnera vraisemblablement pas la solution pour respecter la limitation de la hausse à deux degrés Celsius en 2015, car les contributions des pays ne seront pas dès à présent à la hauteur de ce qu’il faut faire. Néanmoins, les émissions mondiales devraient déjà avoir commencé à diminuer. L’objectif est donc de s’entendre sur un cadre de discipline pour les pays, des solutions et une feuille de route. Il faudra qu’à l’issue de la Conférence de Paris, un plan ait été établi pour revenir à deux degrés, un plan partagé par les gouvernements, les collectivités et les entreprises, même si ce plan dessine une trajectoire qui fait l’objet de rendez-vous tous les cinq ans pour s’assurer qu’elle est respectée.

Un plan d’action climatique ambitieux sera-t-il en mesure d’être adopté afin d’introduire de nouveaux comportements ? Tout le monde s’accorde en tout cas sur la nécessité de changer. Un effet de masse apparaît ainsi progressivement. Le récent prix Nobel d’économie (8) a, comme d’autres, travaillé sur les anticipations des marchés, en montrant que les marchés sont dirigés par une forme de psychologie. Les attentes des acteurs évoluent jusqu’au moment où la minorité cesse d’en être une pour déterminer à son tour l’opinion majoritaire (mainstream).

Du point de vue juridique, l’accord pourra prendre de nombreuses formes différentes. Il pourra être contraignant seulement sur le plan procédural, en imposant une obligation de présenter des résultats et de se plier à des mesures de vérification. Il marquerait une première étape vers la définition de nouveaux objectifs à l’horizon 2050.

2. Vers un dépassement des difficultés récurrentes de la négociation climatique mondiale

Fin octobre 2014 s’est tenue à Bonn une réunion technique destinée à préparer les prochaines conférences climatiques mondiales : celle de Lima fin 2014, puis le sommet de Paris fin 2015 (9). Elle rassemblait près de 190 délégations et plus de 1 000 participants. Selon l’avis général, cette semaine de préparation s’est avérée décevante. Trois sujets étaient à l’ordre du jour :

- les éléments du futur accord international qui devrait être signé à Paris l’année prochaine,

- la nature et le contenu des engagements nationaux que doivent prendre les États,

- et la révision à la hausse des objectifs déjà fixés pour 2020.

Aucun de ces trois sujets n’a véritablement avancé alors même que la parution début novembre du cinquième rapport du GIEC montre que l’homme est désormais de façon quasi-certaine le responsable du réchauffement climatique, que la concentration de CO2 ne cesse d’augmenter dans l’atmosphère et que, face à l'ampleur du réchauffement, il faut agir vite pour réduire les émissions de gaz à effet de serre.

Cependant, la préparation des différents sommets climatiques a toujours été marquée par une succession de phases de stagnation voire de recul, suivies par des phases d’accélération. Les questions de procédure constituent un rituel de ces négociations. Le début de la conférence de Lima reprendra un point qui a soulevé de vives réactions à Bonn et sera donc consacré à la méthode de travail : faut-il discuter à partir d’un document préparé par des rapporteurs ? Faut-il travailler sur un projet de texte final ? Ou faut-il se concentrer sur des points clefs ? Au-delà de ces questions procédurales, deux questions non résolues jusqu’à présent méritent cependant d’être soulignées :

- la première porte sur la distinction - certains diraient la fracture - qui sépare depuis le premier Sommet de la Terre les pays riches des pays pauvres. La Convention cades des Nations-Unies sur le changement climatique adoptée en 1992 distingue en effet les pays riches qui, au terme du protocole de Kyoto, se sont engagés à réduire leurs émissions, des pays pauvres qui ne sont soumis à aucune contrainte. Cette division du monde doit-elle subsister ? La réponse est positive pour les pays en développement qui soulignent la responsabilité historique des pays développés dans les émissions passées ; elle est négative pour les pays développés qui ont beau jeu de montrer que, désormais,  les pays émergents émettent quasiment autant de gaz à effet de serre qu’eux.

Dans un futur accord, dit bottom up dans lequel chaque pays choisit ses engagements de réduction, cette distinction pourrait et devrait ne plus guère avoir de sens : à chaque État de faire ce qu’il peut, qu’il soit pays développé, pays émergent ou pays en développement. Elle peut cependant conduire à un véritable blocage. Dans un discours à l’université de Yale, mi-octobre, le principal négociateur américain (10), tout en reconnaissant  que la priorité des pays en développement est de réduire la pauvreté et que le recours aux hydrocarbures a traditionnellement été le meilleur moyen de favoriser la croissance économique, s’oppose fermement à la reconduction d’une distinction qui lui apparaît dater d’une autre époque. Il ajoutait même que si les pays en développement voulaient absolument préserver ce système à deux niveaux, ce serait un point de rupture pour les États-Unis.

À l’inverse, les pays émergents lors de leur sommet du mois d’août en Inde ont souligné que le futur accord devrait respecter les principes de la convention–cadre de 1992 en particulier ceux d’équité et de responsabilité commune mais différenciée, autrement dit la distinction entre pays riches et pays en développement. Le ministre indien soulignait pour sa part juste après le sommet de Bonn que cette distinction devait constituer l’un des éléments du nouvel ordre mondial dans la lutte contre le changement climatique.

Dans une démocratie des États dans laquelle chacun adopte ses propres engagements, cette distinction est de plus en plus dépourvue de sens.  Les Brésiliens proposent ainsi de classer les pays suivant des cercles concentriques qui correspondraient à l’ampleur de leurs engagements : dans le cercle intérieur, se trouvent les pays qui s’engagent à réduire leurs émissions, les plus éloignés du centre sont ceux qui n’adoptent aucune mesure particulière contre le changement climatique. L’idée brésilienne consiste à dire qu’au terme de l’accord chaque pays doit être incité à se rapprocher du centre : elle permet ainsi de regarder la distinction binaire pays riches/pays pauvres sous une perspective tenant compte des réalités actuelles et évolutive dans le temps ;

- la deuxième question porte sur le financement. À Copenhague, puis à Cancún, les pays développées se sont engagés à verser une aide publique immédiate (dite « fast start ») de 30 milliards de dollars de 2010 à 2012, puis à augmenter progressivement ce montant qui devrait atteindre 100 milliards annuels en 2020. La crise économique et ses effets ont conduit les pays développés à oublier cette promesse au regard de leurs contraintes budgétaires : le Fonds vert qui devait en être le principal instrument n’a pour le moment reçu qu’un montant de 3 milliards de dollars (dont un en provenance de la France) : les pays en développement attendent 15 milliards de dollars. Cette somme ne constitue de plus que la capitalisation initiale du fonds.

Cette promesse de financement et notamment les 100 milliards à l’horizon 2020 est fortement attendue par les pays en développement. Le nouveau ministre de l’environnement indien répète régulièrement que les pays développés doivent joindre le geste à la parole. Son dernier message, juste après la conférence de Bonn, est dépourvu d’ambiguïté : les pays développés ne doivent pas seulement parler de réduction d’émissions, ils doivent également porter plus d’attention à l’adaptation et aux transferts technologiques et financiers afin que les nations pauvres puissent se préparer aux évolutions attendues du climat. À Bonn, la Malaisie, pour le groupe des 77, a souligné que les pays développés devaient verser les financements prévus dans cadre des accords climatiques. La Jordanie, au nom d’une vingtaine de pays en  développement, dont l’Inde et la Chine, a souhaité la mise en place d’une trajectoire annuelle jusqu’à 2020 des financements attendus de la part des pays développés : cette trajectoire doit être croissante et atteindre 100 milliards par an en 2020.

Dans la logique de sa proposition, le Brésil a souhaité que les pays du Sud indiquent dans leurs contributions nationales les financements sud-sud qu’ils mettaient en place. Cette contribution, pour positive qu’elle soit, ne saurait faire oublier l’engagement des pays développés qui ont un peu plus d’un an pour trouver les sources de financement nécessaires au respect de leurs engagement financier ou pour définir les montages qui permettront de trouver chaque année un flux de 100 milliards de dollars à partir de 2020. Alors que les BRICS (11) viennent de créer en juillet leur propre banque pour le développement, la mise au point des transferts technologiques et financiers attendus par les pays en développement favorisera sans nul doute à la réussite de la Conférence de Paris.

3. Les perspectives ouvertes par l’évolution sino-américaine

a. Le premier pas effectué par les États-Unis a stimulé les négociations internationales

Début juin 2014, les États-Unis ont annoncé la réduction des émissions polluantes des centrales électriques, envoyant ainsi un signal clair aux autres nations. Si les États-Unis prennent au sérieux les menaces liées au changement climatique, cela devrait pousser les autres grands pays émetteurs à faire des annonces concrètes.

L'Agence fédérale pour la protection de l'environnement (EPA) a donné des précisions sur les objectifs de la Maison Blanche qui, pour contourner le Congrès, toujours hostile à légiférer sur le changement climatique, a choisi de s'appuyer sur la réglementation de la qualité de l'air (Clean Air Act) pour agir.

Les nouvelles normes anti-pollution, que l'EPA finalisera d'ici un an, conduiront à une réduction des émissions du millier de centrales fonctionnant aux énergies fossiles (charbon, gaz, pétrole) de 30 % d'ici à 2030 par rapport à 2005.

Celles-ci sont à l'origine de près d'un tiers des rejets de gaz à effet de serre des États-Unis qui, bien que détrônés par la Chine en 2010, demeurent le deuxième pays pollueur au monde.

Chaque État américain disposera d'une grande latitude pour parvenir à cet objectif dont l'EPA, pour en souligner l'ampleur, prend soin de préciser qu'il équivaut à supprimer une année d'émissions de 150 millions de voitures.

Si les marges de manœuvre du Président américain demeurent limitées en l'absence de majorité au Congrès, ces nouvelles mesures donnent de la crédibilité à son Plan climat promis en juin 2013. « Cette réforme est la plus ambitieuse jamais prise par un gouvernement américain pour lutter contre le changement climatique. Si elle est mise en œuvre comme prévu, elle permettra au pays d'atteindre les objectifs qu'il s'est fixé d'ici à 2020 – réduire ses émissions de CO2 de 17 % par rapport à 2005. Cela envoie bien sûr un signal positif. Mais, pour que l'accord de Paris soit à la hauteur de ce qui est nécessaire pour contenir le réchauffement en deçà de 2° C, tous les pays, y compris les États-Unis, devront faire bien plus », a souligné la commissaire européenne au climat (12).

b. L’espoir né de la conclusion par la Chine et les États-Unis d’un accord inédit sur le climat

La Chine et les États-Unis sont parvenus, le 12 novembre 2014, à un accord pour réduire leurs émissions de gaz à effet de serre. Les deux premiers pollueurs de la planète représentent à eux seuls 42 % du total des émissions de CO2.

La Chine, pays qui produit le plus de gaz polluants, s'est fixé l'objectif d'un pic de ses émissions de gaz à effet de serre « autour de 2030 », avec l'intention « d'essayer d'y arriver plus tôt ». C'est la première fois que ce pays s'engage sur l'année à partir de laquelle la courbe s'inversera. De leur côté, les États-Unis promettent une réduction de 26 à 28 % de leurs émissions d'ici à 2025 par rapport à 2005.

Le secrétaire général de l'Organisation des Nations unies (13) a salué une « importante contribution au nouvel accord sur le climat qui doit être signé l'an prochain à Paris » et a appelé « tous les pays, notamment toutes les grandes économies, à suivre la voie de la Chine et des États-Unis. »

Le président des États-Unis (14) a quant à lui salué un « accord historique ». L'objectif américain « est à la fois ambitieux et réalisable ». Il pourrait toutefois se heurter à l'opposition des élus du Congrès. Dès cette annonce, le tout nouveau leader républicain au Sénat (15) a fustigé un « projet irréaliste que le président refourguera à son successeur ». Selon lui, cet accord annonce « des prix de l'énergie encore plus élevés et encore beaucoup moins d'emplois ».

Dans les négociations sur le climat, la Chine insiste quant-à-elle systématiquement pour ne pas être logée à la même enseigne que les pays industrialisés. Elle met en avant le principe des « responsabilités communes mais différenciées », selon lequel la responsabilité de la lutte contre le réchauffement planétaire incombe principalement aux pays développés. Or, la Chine est le premier émetteur de gaz à effet de serre ; d’ici à 2030, elle sera probablement le plus grand pays responsable des émissions globales.

Le fait que les États-Unis et la Chine, traditionnellement considérés comme les leaders de deux camps opposés dans les négociations sur le climat, avancent ensemble va avoir un gros impact. Cela est encourageant quant à l’objectif de la conférence annuelle sur le climat qui se tiendra à Paris fin 2015, de décrocher un accord suffisamment ambitieux pour limiter le réchauffement à 2 °C.

B. LA QUESTION DU CONTRÔLE ET DE LA VÉRIFICATION

1. Un système d’enregistrement des objectifs et des actions des pays développés et en développement, assorti d’un suivi et d’un contrôle destinés à en assurer la transparence, a été progressivement mis en place

Apparu avec la COP de Bali en 2007, le MRV(16) a été développé et amélioré au fil des différentes sessions de négociations.

À Copenhague, le droit de regard de la communauté internationale sur les mesures que les pays mettaient en œuvre pour lutter contre le changement climatique avait donné lieu à une controverse entre les États-Unis et la Chine. Cette dernière estimait en effet que le contrôle de sa politique climatique, tel que voulu par les États-Unis, constituait une ingérence dans ses affaires intérieures. Suite à une proposition émanant de l’Inde, un compromis avait finalement été trouvé à Cancún.

Ainsi, lors de la Conférence de Cancún en 2010, le processus de transparence et de contrôle global des actions entreprises par les pays a été renforcé, selon les modalités suivantes :

- l’ensemble pays développés et en développement s’engage à clarifier ses objectifs et politiques respectifs (énumération des gaz et des secteurs concernés, affichage des équivalences en quantité de CO2, définition d’une trajectoire de référence des émissions des pays en développement à horizon 2020) ;

- des procédures internationales de contrôle et de vérification de financements des pays développés sont mises en place ;

- des procédures internationales de contrôle et de vérification des engagements d’émissions des pays en développement, induisant de plus grandes obligations de compte rendu de la part de ces pays, sont mises en place : les pays émergents acceptent de s’y soumettre, sous réserve de leur caractère « non punitif ».

Les actions d’atténuation sont contrôlées à l’échelon national selon des orientations générales développées par la CCNUCC ; en cas de financement international, ce contrôle national est doublé d’un contrôle international. Par ailleurs un processus international de consultation et d’analyse est mené par un groupe d’experts indépendants, dans le but d’améliorer la transparence des politiques nationales d’atténuation, notamment les hypothèses et outils sur lesquelles elles s’appuient, et la compréhension de leurs effets.

Conformément à la demande de la Chine, cet audit « non intrusif et non punitif » s’exerce « dans le respect de la souveraineté nationale », et donne lieu à la publication d’un rapport synthétique axé sur les aspects méthodologiques. L’examen exclue donc tout jugement de valeur sur la stratégie suivie. La CCNUCC dispose donc d’un droit de regard d’ordre technique sur l’ensemble des politiques climatiques des pays en développement, qu’elles soient subventionnées ou non : ces pays doivent lui transmettre des rapports biannuels sur leurs politiques, avec un inventaire d’émissions. Ces comptes rendus nationaux font l’objet « de consultations et d’analyses internationales » par des experts de la Convention. Ce mécanisme de « mesure, compte rendu et vérification » prévoit également d’instaurer une transparence accrue des mesures bénéficiant de transferts technologiques et financiers, qui doivent être publiées dans un registre international.

Le MRV

La notion de « MRV » est un ensemble de processus et procédures qui permettent la collecte et le compte rendu d’informations factuelles, leur évaluation et leur vérification dans le but de déterminer si, quand et comment les pays ont atteint leurs obligations respectives. Le système prévoit un compte rendu sur les données de réduction d’émission, ainsi que sur l’aide financière, technologique et en renforcement de capacité apportée par les pays développés aux pays en développement. Il est différent du Protocole de Kyoto dans lequel les parties se sont engagées à réduire leurs émissions d’un certain pourcentage. Les pays en développement disposent actuellement d’une certaine latitude quant à la fréquence et au contenu de leur compte rendu.

Le système « MRV » a pour finalité de garantir l’intégrité environnementale du régime international des changements climatiques en responsabilisant les pays, en améliorant la crédibilité et la cohérence de leurs actions d’atténuation, et en assurant la mise en oeuvre effective des actions ainsi que de leurs résultats. Le terme « MRV » a émergé suite à la Conférence des Parties organisée à Bali en 2007 (COP 13). Cette conférence s’est traduite par un plan d’action (Bali Action Plan), précisant que :

- les engagements en termes d’atténuation des pays développés doivent être mesurables, notifiables et vérifiables, y compris les objectifs chiffrés de limitation et de réduction des émissions en veillant à ce que les efforts des uns et des autres soient comparables, compte tenu des différences existant dans la situation de chaque pays ;

- les pays en développement doivent quant à eux prendre des mesures d’atténuation dans le cadre d’un développement durable, soutenues et rendues possibles par des technologies, des moyens de financement et un renforcement des capacités, d’une façon mesurable, notifiable et vérifiable.

L’Accord de Copenhague a franchi une étape de plus dans la définition de ce nouveau système en posant que :

- les réductions d’émissions entreprises par les pays développés ainsi que les moyens de financement fournis aux pays en développement seront mesurés, notifiés et vérifiés, la comptabilisation de ces objectifs et de ces moyens de financement devant être rigoureuse, fiable et transparente ;

- les pays en développement devront quant à eux soumettre tous les deux ans un rapport comprenant les mesures d’atténuation prises. En outre, ces mesures d’atténuation seront mesurées, notifiées et vérifiées au niveau national, le résultat obtenu étant présenté dans leurs rapports qui seront soumis à des consultations et analyses au niveau international. Les mesures d’atténuation pour lesquelles un appui international est sollicité seront consignées dans un registre (tout comme les technologies, les moyens de financement et l’appui au renforcement des capacités correspondants) et seront mesurées, notifiées et vérifiées au niveau international.

La conférence de Copenhague a également renforcé les enjeux du système « MRV », en lui donnant le rôle de vecteur de confiance entre les pays : en exposant de manière transparente leurs actions d’atténuation ainsi que les obligations de financement des pays développés, une confiance devrait s’installer entre les pays, permettant de construire un régime post-2012. En outre, ce système devrait également permettre d’obtenir les données nécessaires afin de vérifier si, collectivement, les parties à la CCNUCC sont effectivement sur la voie permettant de maintenir le réchauffement de la planète à un niveau inférieure à 2° C.

Les Accords de Cancún ont précisé la nature des comptes rendus exigés ainsi que les processus de vérification des données :

- les pays développés devront soumettre un rapport biennal contenant non seulement des informations relatives à leurs engagements d’atténuation mais aussi au soutien financier, technologique et en renforcement de capacité qu’ils ont accordé aux pays en développement. Ces informations feront l’objet d’un processus d’évaluation et d’examen international (International Assessment and Review) qui reste à définir ;

- les pays en développement devront soumettre un rapport biennal contenant des informations relatives à leurs actions d’atténuation et au soutien financier, technologique et en renforcement de capacité reçu. Ces informations feront l’objet d’un processus de consultation et d’analyse internationale (International Consultation and Analysis) qui reste à définir.

2. Quelles modalités de contrôle sur l’accord de 2015 ?

Lors de la Conférence de Paris qui se tiendra fin 2015, il ne suffira pas de parvenir un premier accord climatique mondial, encore faudra-t-il s’assurer du respect de leurs objectifs par les États.

Pour cela, il sera possible de s’appuyer sur le MRV, à condition toutefois d’unifier le système, qui fonctionne actuellement différemment pour les pays développés et les pays en développement.

Une première ébauche a été faite lors de la Conférence de Varsovie, avec l’instauration d’un système national de suivi des forêts encadré. Ainsi, le MRV devra reposer sur un système national de suivi de forêts. Pour mettre en place ces systèmes, les pays doivent se référer à la version la plus récente des lignes directrices du GIEC. Toutes ces décisions représentent une avancée importante dans la mise en œuvre d’un mécanisme REDD+ à l’échelle mondiale : elles donnent les moyens à la CCNUCC de devenir la référence mondiale en matière de MRV des actions REDD+. Cependant, les fonds nécessaires afin de financer les actions de la troisième phase 3 de REDD+ – ceux basés sur les résultats – ne sont pas encore garantis ; c’est également le cas de la logistique comptable – registre, certificats ou crédits REDD+, etc. – chargée d’assurer la traçabilité d’éventuels actifs issus de ce mécanisme, qui n’a pas été définie.

C. VERS UN OBJECTIF DE LONG TERME ?

L’accord qui sera trouvé en 2015 devra être porteur d’une vision partagée de l’avenir et d’une méthode pour faire converger les anticipations. Il devra également être dynamique. Le cinquième rapport du GIEC réaffirme en effet la nécessité de diviser au minimum par deux les émissions mondiales de gaz à effet de serre jusqu’en 2050, pour avoir 66 % de chances de rester en dessous d’une hausse des températures de 2° C.

Il faudra donc à la fois définir un cadre qui va durer trente ans, et prévoir des rendez-vous réguliers pour faire le point des transformations, améliorer les propositions des uns et des autres, et examiner le déploiement des technologies en fonction de l’innovation, de la baisse des coûts et de la coopération internationale.

Si le premier objectif est bien sûr la conclusion d’un accord, le deuxième objectif à atteindre réside dans l’engagement des pays à proposer un plan en faveur du climat pour 2025 - 2030 qui se décline en diverses politiques : la politique climatique, mais aussi la fiscalité pour ceux utiliseront des instruments comme la taxe carbone, les marchés carbone, les transports publics ou encore les innovations technologiques. Pour chaque État, il y aura d’une part, les engagements pris au regard des pairs de la communauté internationale en matière de réduction des émissions et d’autre part, le corps de politiques déployées. Cela est très important pour les acteurs économiques.

Lorsque les pays auront annoncé leurs objectifs en matière d’énergie propre ou d’énergies renouvelables, cela enverra un signal considérable aux marchés. Le pourcentage de véhicules électriques ou propres, l’intensité de l’effort dans les transports publics, la part d’énergies renouvelables, le nombre de bâtiments à énergie positive sont autant d’éléments susceptibles de redessiner les marchés mondiaux, de renseigner les acteurs économiques et de les rassurer.

Par ailleurs, des pays qui s’étaient par le passé retrouvés sur une ligne défensive, comme l’Inde, la Chine, le Brésil et l’Afrique du Sud commencent à évoluer : l’Afrique du Sud et le Brésil voudraient aboutir à bonne solution en 2015, tandis que l’Inde s’interroge sur la conduite à tenir et que la Chine semble décidée à obtenir un accord à Paris. Les changements intervenus dans le paysage politique laissent penser que les grands pays souhaitent arriver à un accord en décembre 2015. Tout l’enjeu sera de conclure un accord, non pas au rabais, mais qui indique la direction.

III. LE CALENDRIER

A. LA CONFÉRENCE CLIMAT DE VARSOVIE A DRESSÉ UNE FEUILLE DE ROUTE VERS PARIS 2015

La Conférence de Varsovie sur le changement climatique (COP19) est parvenue à baliser le chemin vers la Conférence de Paris sur le climat qui aura lieu en 2015 et où un nouvel accord climatique mondial devrait être conclu (17). Cependant, elle a aussi montré que la route sera longue et difficile. Des questions fondamentales restent sans réponse, et appellent à un niveau élevé d’engagement politique.

Les pays ont tous convenu d’un calendrier pour élaborer et soumettre de nouveaux engagements de réduction des émissions : « bien en amont » de la Conférence de Paris, « dès le premier trimestre 2015 pour les Parties qui y seront prêtes ». Bien que vague, ce calendrier est important car il envoie un signal fort : les pays doivent commencer à préparer leurs offres pour Paris.

Le plus important est que les engagements arrivent tôt, de sorte qu’ils puissent être évalués. Même si Varsovie n’a pas permis de définir un processus formel d’évaluation des engagements en 2015, l’absence actuelle d’un tel processus convenu dans le cadre de la CCNUCC (Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques) ouvre la voie à des options d’évaluation complémentaires, par exemple dans le cadre du Forum des grandes économies (FEM, The World Economic Forum, ou WEC), venant alimenter la CCNUCC, ce qui permettrait de garantir une clarté et une ambition suffisantes des engagements.

Les pays n’ont pu aboutir à un accord sur ce calendrier que parce que des concessions ont été faites sur la nature des offres initiales de réduction des émissions. À ce stade des négociations visant l’adoption d’engagements d’atténuation de la part de tous les pays, avec le même cadre qu’ils soient développés ou en développement, les grands pays émergents n’étaient tout simplement pas prêts à accepter le terme d’« engagements », qui revêt une signification juridique très précise et contraignante. C’est pourquoi, afin d’être certains que le terme d’« engagements » sera remplacé par celui de « contributions », ces pays ont joué un jeu tactique efficace, insérant des références à l’article 4 de la Convention, lequel distingue nettement ce qui incombe aux pays développés et aux pays en développement. Comme c’est là, à l’évidence, une limite inacceptable pour les États-Unis et l’Union européenne, qui espèrent faire évoluer le régime vers une attribution universelle mais plus nuancée des responsabilités, ces références ont in fine disparu du texte, en échange du remplacement du terme « engagements » par « contributions », moins fort.

Ceci montre que les grands pays émergents ne sont pas fondamentalement opposés à une évolution des responsabilités. Ils sont disposés à conclure un nouvel accord. Mais jusqu’à ce que le contenu en soit clair, ils seront prêts à jouer cette « carte de l’article 4 », pour le cas où les négociations s’approcheraient par trop de ce qu’ils considèrent comme les limites actuellement admissibles. En acceptant de faire disparaître cette référence à l’article 4, les grandes économies émergentes ont également mis au jour leur absence de réelle volonté de défendre les intérêts des pays en développement plus petits, lesquels pourraient avoir un intérêt légitime au financement et à une définition plus « traditionnelle » des responsabilités des pays en développement. Ce constat ouvre, en parallèle, la possibilité pour les pays développés de renouer des alliances mises à mal avec de petits pays en développement, en concrétisant les financements promis dans le cadre des accords de Copenhague, et en prenant les devants sur les questions d’équité.

B. UN CALENDRIER NON CONTRAIGNANT POUR L’ACCORD EN 2015

À Doha, en 2012, les pays s’étaient engagés à étudier un projet de texte de négociation à partir de la COP20 qui aura lieu à Lima cette année, l’accord final étant attendu pour 2015 à Paris. Cet accord devrait notamment traiter d’atténuation, d’adaptation, de financements, de développement et de transfert de technologies, de renforcement de capacités et de la transparence des actions et des soutiens.

Conscients que cet accord nécessite à la fois des avancées politiques et techniques, les pays ont mis en place un calendrier permettant d’identifier les délais pour lever les différents obstacles à l’accord. Il ressort donc de la COP19 de Varsovie que les pays devraient communiquer leurs « contributions » en matière de réduction des émissions « bien en amont » de la COP21 en décembre 2015. Pour les pays qui sont « prêts », le premier trimestre 2015 est annoncé.

Ces « contributions » n’auront pas d’impact juridique. Il s’agit de pouvoir connaitre, comprendre et évaluer ce que les différents pays seraient prêts à faire pour mieux trouver un consensus. Les informations attendues dans ces contributions devraient être précisées d’ici décembre 2014.

Des décisions encourageant les pays à accélérer la mise en place de politiques et à prendre des engagements plus ambitieux pour la période d’ici 2020 ont également été prises. Dans ce contexte, l’annonce du Japon de revoir à la baisse son objectif a ravivé les oppositions entre pays développés et pays en développement sur la détermination des États devant limiter ou réduire leurs émissions.

Dès après la COP de Lima, une réunion se tiendra - par anticipation à ce qui se pratique habituellement - dès le début de l’année 2015, du 8 au 13 février, à Genève. Le texte qui sera proposé à Paris devra avoir été traduit au moins six mois auparavant dans les six langues des Nations-Unies.

L’objectif serait donc de disposer de ce texte pour la fin du mois d’avril ou le début du mois de mai 2015, incluant les quelques semaines nécessaires à sa traduction. Les co-présidents de la COP devront donc idéalement proposer un texte pour la fin mars 2015.

À cet égard, à Lima, deux nouveaux co-présidents devraient être nommés : il devrait s’agir des États-Unis pour les pays développés, tandis que le Zimbabwe pourrait représenter les pays en développement.

En juin 2015 se tiendra la session habituelle de négociations qui se déroule à Bonn, puis aura lieu la session de rentrée.

De son côté, l’ONU organisera en 2015 un sommet pour déterminer les prochains objectifs du millénaire pour le développement (OMD).

IV. LE NÉCESSAIRE ÉLARGISSEMENT DES SOURCES DE FINANCEMENT

Les négociations de Varsovie ont montré à quel point le financement était une question essentielle. Afin de contribuer à l'échelle requise pour remédier à l’iniquité fondamentale du changement climatique, une représentation beaucoup plus large de la question du financement est nécessaire. Elle doit englober un vaste ensemble de politiques nationales, de financement public renforcé, d'investissements du secteur privé et le lancement de réformes de la gouvernance et de la régulation de la finance internationale, de façon à ce qu’elles intègrent davantage les préoccupations climatiques. À défaut, les négociations ne répondront pas aux besoins politiques ou pratiques concernant le financement de la lutte contre le changement climatique.

A. LA NÉCESSAIRE MISE EN PLACE DU FONDS VERT

1. Le Fonds vert pour le climat

Décidé à Copenhague fin 2009, le Fonds vert pour le climat a été officiellement crée en 2010 par les accords de Cancún.

Ce Fonds est, avec le Fonds pour l’environnement mondial (FEM), l’un des instruments financiers de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques. L’instrument du Fonds vert a été adopté par la conférence des Parties à la Convention-climat à Durban fin 2011.

La création de ce fonds répond à une demande forte des pays en développement qui souhaitaient la mise en place d’un fonds qui financerait à grande échelle la transition des pays en développement vers un modèle de développement sobre en carbone et résilient au changement climatique. D’après l’instrument, ce fonds pourrait à terme devenir le « principal fonds international pour le financement de la lutte contre le changement climatique ».

Durant la phase pilote du Fonds vert (2012-2013), la Banque mondiale a assuré les fonctions d’administrateur fiduciaire, tandis que le secrétariat intérimaire du fonds était conjointement assuré par le secrétariat de la Convention cadre des Nations unies sur les changements climatiques (CCNUCC), et le secrétariat du FEM.

La Conférence de Varsovie devait préciser les modalités pour rendre le Fonds vert pour le climat opérationnel. Ce fonds doit ainsi servir à mobiliser – à partir de 2020 - 100 milliards de dollars par année pour la mise en œuvre de la politique climatique dans les pays en développement, grâce à un financement public et privé. Une table ronde à haut niveau sera d’ailleurs consacrée à ce thème durant la Conférence.

La définition de ce que signifie le « financement climatique » par des moyens publics et privés devait également encore être clarifiée. L’adoption de mesures assurant la transparence dans le financement et élargissant la base des donateurs était considérée comme étant la bienvenue.

2. Les avancées de Varsovie en matière financière

Les pays du Sud, pour lesquels la conférence de Varsovie devait être celle des financements, estiment cependant y avoir été oubliés. L’annonce d’un abondement de plus de 100 millions de dollars du Fonds d’adaptation au changement climatique, presque entièrement fourni par les pays européens, devait remettre à flot ce fonds tombé à sec avec l’effondrement des marchés du carbone qui lui assurent ses recettes.

Il s’agit cependant de peu au regard de ce que va devoir dépenser l’Afrique pour résister au changement climatique  : 200 milliards par an au minimum selon un rapport de l’ONU.

En définitive, la Conférence de Varsovie a surtout rappelé les pays développés à leurs engagements, comme celui pris à Cancún de porter le niveau annuel de leur aide à 100 milliards de dollars en 2020.

Il a été instamment demandé aux États d’y augmenter la part des fonds publics. En effet,  les capitaux privés se concentrent sur les opérations rentables, comme certaines peuvent l’être dans l’énergie (centrales solaires, barrages). En revanche, la remise à niveau d’infrastructures de protection, comme le relèvement de digues pour faire face à la montée des océans, relève plus d’une politique d’investissements publics qui ne doit pas faiblir avec l’extinction des financements « fast start » (30 milliards de dollars sur la période 2010 - 2012).

La première capitalisation du Fonds vert pour le climat devra « atteindre un niveau très significatif », insiste à ce titre le texte final adopté à Varsovie, sans préciser lequel.

La réponse précise à cette question devrait intervenir en 2014 à la Conférence sur le climat de Lima, où cette nouvelle institution, décidée en 2009 à Copenhague, remettra à son premier rapport annuel.

3. Les annonces d’abondement du Fonds vert

L'objectif du Fonds vert est d'aider les pays les plus exposés au réchauffement climatique en soutenant des projets « verts » concrets contribuant, par exemple, à diminuer les émissions de gaz à effet de serre, à faire reculer la déforestation où encore à se protéger contre la montée des eaux.

La France a annoncé vouloir contribuer au Fonds vert à hauteur d’un milliard de dollars sur 4 ans, tout comme l’Allemagne.

Plusieurs annonces notamment de pays européens comme la Suisse (100 millions de dollars), la Suède, le Danemark (70 millions de dollars), la Norvège (33 millions de dollars) ou la République tchèque (5,5 millions de dollars) ainsi que la Corée du Sud (100 millions de dollars) ont porté le montant global des engagements à environ 3 milliards de dollars.

La capitalisation de ce Fonds, principal outil destiné à soutenir les pays en développement face au changement climatique, a connu un véritable coup d’accélération avec les annonces attendues des États-Unis et du Japon.

Le 15 novembre dernier en effet, le Président des États-Unis a promis, en marge du G20 de Brisbane en Australie, une contribution de 3 milliards de dollars.

De son côté, le Japon a également annoncé une contribution à hauteur de 1,5 milliard de dollars.

Selon la presse britannique, la Grande-Bretagne devait quant-à-elle annoncer une contribution d'environ 1 milliard de dollars tandis qu'en marge du G 20, le Canada a aussi annoncé son intention de contribuer ce mécanisme financier, sans toutefois avancer de chiffres.

Jusqu’ici, les différentes annonces étaient restées modestes au regard des ambitions affichées par la communauté internationale sur le front de la lutte contre le réchauffement climatique dans les pays en développement.

Le Fonds vert, institué par les accords de Copenhague puis Cancún entend en effet centraliser les financements de l’adaptation et la réduction des émissions au sein des pays en développement.

Les pays développés se sont engagés à débloquer quelque 100 milliards de dollars par an d’ici à 2020 pour ce projet ambitieux, dont une partie importante devrait transiter via ce nouveau fonds.

Au-delà des objectifs à l’horizon 2020, la capitalisation initiale de 15 milliards de dollars du Fonds vert attendue par les pays en voie de développement est surtout une condition sine qua non pour la réussite du sommet Paris Climat 2015, qui doit aboutir à un accord international permettant de limiter le réchauffement climatique.

Du côté des contributeurs, l’objectif affiché est d’obtenir 10 milliards de dollars de contribution avant la fin de l’année 2014, objectif qui semblait jusqu’alors hors d’atteinte. 

« Le démarrage à New York a été un peu lent. J’espère qu’on sera au moins à 7 milliards d’euros d’annonces fin novembre pour le Fonds vert pour le climat » avait reconnu la représentante spéciale pour la conférence Paris Climat 2015 (18).

« Afin de doter [le Fonds vert] des moyens nécessaires, la conférence de capitalisation […] doit être un succès. Près de trois milliards de dollars ont déjà été annoncés, mais cet effort reste insuffisant » a rappelé le ministre des Affaires étrangères (19) dans un communiqué commun avec le ministre de l’Environnement du Pérou (20), pays chargé d’accueillir la COP 20 en décembre.

Déclaration conjointe de Laurent Fabius et Manuel Pulgar-Vidal, ministre péruvien de l’environnement et président de la COP20 le 14 novembre 2014

L’apport de nouveaux financements sera une pierre angulaire du futur accord mondial sur le climat qui doit être adopté lors de la 21e conférence des parties à la Convention cadre des Nations unies sur les changements climatiques qui se tiendra à Paris fin 2015 et doit permettre de maintenir la hausse de la température sous les 2° C. Une étape essentielle dans la préparation de cet accord sera la 20ème conférence des parties à Lima en décembre prochain.

C’est pourquoi la communauté internationale a souhaité créer le Fonds vert. L’objectif est de lutter contre le dérèglement climatique et de constituer un véritable levier pour changer l’échelle de notre action collective.

Afin de le doter des moyens nécessaires, la conférence de capitalisation du Fonds vert à Berlin les 19 et 20 novembre prochain doit être un succès. Près de trois milliards de dollars ont déjà été annoncés, mais cet effort reste insuffisant.

En tant que présidents de la COP20 et de la COP21, nous lançons un appel solennel à nos partenaires pour qu’ils annoncent des contributions ambitieuses dès le 20 novembre à Berlin. Il s’agit de créer les conditions de la confiance et du succès pour cette négociation essentielle qui s’engage. Ce n’est évidemment pas une dépense superflue, mais un investissement capital pour l’avenir de notre planète.

En attendant la confirmation des annonces américaines et japonaise, les deux ministres avaient lancé « un appel solennel à nos partenaires pour qu’ils annoncent des contributions ambitieuses dès le 20 novembre à Berlin ».

La réunion spéciale des donateurs - les représentants de 22 pays contributeurs, pour la plupart des pays riches - pour la capitalisation du Fonds vert s’est déroulée à Berlin les 19 et 20 novembre 2014.

Au cours de cette réunion, les annonces des différents pays donateurs ont été finalisées, et la forme de leur contribution a été arrêtée.

En effet, les donateurs ont la possibilité de contribuer sous forme de dons, mais aussi de prêts très concessionnels, c’est-à-dire à des taux bien inférieurs à ceux du marché, dans la limite par donateur de 40 % de leur contribution totale. Le total des prêts reçus par le Fonds ne devra par ailleurs par dépasser 20 % de l’ensemble des dons.

Du côté français, l’annonce de la contribution d’un milliard de dollars est en train de prendre forme. Paris divisera sa participation entre un prêt très concessionnel  de 285 millions d’euros, qui devrait être décaissé rapidement, dès début 2015.

La partie la plus importante – 489 millions d’euros répartis sur 4 ans – se fera sous forme de dons, financés par la Taxe sur les transactions financières et celle sur les billets d’avion.

Malgré un démarrage difficile, les caisses du Fonds vert pour le climat se sont finalement remplies lors de cette réunion de Berlin des 19 et 20 novembre, portant à 9,3 milliards de dollars les promesses de financement, sur les 10 milliards espérés avant fin 2014.  

Les contributions ont finalement émané de 21 pays.

Contributions au Fonds vert par pays 

Contributions au Fonds vert suite à la réunion de Berlin

Puis, à l’issue de cette réunion, le Canada a annoncé qu’il participerait au Fonds vert à hauteur de 300 millions de dollard, ce qui porterait en définitive le montant total à environ 9,6 milliards de dollars.

B. LES AUTRES SOURCES DE FINANCEMENT POSSIBLES

L’ensemble des flux financiers en faveur du développement – qu’ils soient publics ou privés, domestiques ou internationaux – doivent être pris en considération dans une approche globale du financement du développement. À cette fin, une meilleure mobilisation des ressources nationales est souhaitable, ainsi qu’une plus grande implication des acteurs privés et une coopération plus efficace. Les financements innovants peuvent quant-à-eux permettre de mobiliser des ressources complémentaires à l’aide publique au développement.

1. La volonté de trouver les moyens d’un financement du cadre de développement pour l’après-2015

Dans le cadre des travaux en cours sur la définition d’un cadre de développement pour l’après-2015, la question du financement est de nouveau au cœur des débats. Le comité intergouvernemental d’experts sur le financement du développement durable y joue un rôle particulièrement important.

Ce comité, mis en place par l’Assemblée générale (décision 67/559) conformément au paragraphe 255 du document final issu de la conférence des Nations unies sur le développement durable (Rio, 20 - 22 juin 2012), est composé de trente experts, nommés par les cinq groupes régionaux des Nations unies.

Il a pour mandat « d’évaluer les besoins de financement, d’examiner l’efficacité, la cohérence et les synergies des instruments et cadres existants et d’évaluer d’autres initiatives, l’objectif étant d’établir un rapport proposant des options pour une stratégie efficace de financement du développement durable qui favorise la mobilisation de ressources et leur utilisation judicieuse en vue de réaliser les objectifs du développement durable ».

Le comité a remis son rapport le 8 août 2014 ; celui-ci constitue une contribution importante à l’élaboration du cadre de développement pour l’après-2015. Il conclut qu’il n’existe pas de solution politique simple :

« Nous avons commencé notre analyse en évaluant les besoins de financement du développement durable, les flux de financement actuels et les sources potentielles de financement. Nous avons constaté que les besoins sont énormes et les difficultés à les respecter sont énormes - mais surmontables. En effet, les économies publiques et privées mondiales seraient suffisantes pour répondre aux besoins. Pourtant, il est clair que les modes de financement et d'investissement actuels ne pourront pas assurer un développement durable.

En particulier, les rendements attendus sur les investissements liés au développement durable ne sont pas aussi attrayants que d'autres possibilités, en particulier à court terme. Dans le même temps, il y a beaucoup de demandes concurrentes sur les ressources publiques, et les gouvernements ne sont pas parvenus à mobiliser un financement public adéquat pour entreprendre les investissements nécessaires, que par ailleurs les investisseurs à but lucratif évitent.

La solution consiste à mieux aligner les incitations privées avec les objectifs publics et dans la création d'un cadre politique qui encourage l'investissement à but lucratif dans ces domaines, tout en mobilisant des ressources publiques pour des activités essentielles de développement durable. La qualité de la finance a aussi son importance. Les efforts pour réduire la corruption et adopter des politiques publiques socialement efficaces sont donc importants. Les politiques et les incitations devraient également viser à mieux adapter la préférence des investisseurs aux besoins d'investissement, de sorte que, par exemple, les besoins de développement durable à long terme ne soient pas financés par des fonds à court terme.

Notre travail conclut qu'il n'y a pas une solution politique simple. Au lieu de cela, un ensemble de mesures sera nécessaire, englobant un ensemble d'outils et d'options politiques, règlements, institutions, programmes et instruments, à partir desquels les gouvernements pourront choisir des combinaisons de politiques appropriées. Nous recommandons une approche cohérente, avec des stratégies nationales de financement étant partie intégrante des stratégies nationales de développement durable. Bien que la conception et la mise en œuvre des politiques se fassent au niveau national, la réalisation du développement durable nécessitera un appui et une coopération internationale. Notre approche est basée sur le principe de l'appropriation nationale, soutenue par un partenariat mondial renforcé pour le développement durable. (…)

Nous nous attendons à ce que les recommandations et analyses figurant dans notre rapport stimulent les discussions entre toutes les parties prenantes et inspirent de nouvelles idées et des solutions innovantes. Bon nombre de nos recommandations appellent à l'échange d'idées et le partage d'expériences entre les pays, ainsi qu’au renforcement de la coopération internationale fondée sur un partenariat mondial renouvelé pour le développement durable. La troisième Conférence internationale sur le financement du développement réunira toutes les parties prenantes et fournira une opportunité pour faire avancer ces discussions. »

2. Le prix du CO2 nécessaire mais non suffisant (21)

Le sommet du Climat à New York  le 23 septembre dernier a montré que nombreux sont les pays à souhaiter trouver une solution face au risque climatique avéré.

Ainsi, un an avant la conférence Paris Climat 2015 où sera négocié un nouvel accord climatique international, un thème fédérateur émerge parmi les décideurs économiques : le prix du carbone.

Rendues publiques en septembre, plusieurs initiatives internationales appellent à l’introduction nécessaire d’une valeur économique de la tonne de carbone dans les circuits de décision d’investissements. L’enjeu est de taille : limiter la hausse des températures en deçà de 2° C d’ici 2100 en soutenant les investissements à déployer dans les prochaines décennies – plus de mille milliards de dollars par an selon l’Agence Internationale de l’Énergie.

Le sujet du prix du carbone revient de loin. Il a joué sur la dernière décennie un rôle important pour mobiliser les décideurs en attribuant une valeur économique à la tonne de carbone. Cependant, plusieurs évènements ont animé une vague de défiance à la mise en œuvre de ce type de politique publique :

- la crise de confiance du système européen de quotas (EU ETS ou SEQE) après la forte baisse du prix du CO2 et les longues négociations pour la première mesure d’intervention de la Commission européenne ;

- la chute vertigineuse du prix du crédit carbone Kyoto dès lors que la demande européenne a été satisfaite, sans rebond probable à moyen terme ;

- enfin, le marché international d’échanges de quotas Kyoto pour les pays, qui n’a jamais révélé une valeur économique.

Son récent retour au centre du débat est notamment encouragé par le rapport intitulé « Une meilleure croissance pour un meilleur climat », publié mi-septembre par l’économiste Nicolas Stern et l’ancien président mexicain Felipe Calderón, qui présente dix recommandations nécessaires à mettre en place d’ici 2035 pour contenir le réchauffement en deçà de 2°C. Parmi ces recommandations, figure l’introduction d’un prix du carbone, valeur nécessaire pour orienter les décisions et investissements en faveur des choix les moins émetteurs de gaz à effet de serre. Plus encore, à New York, lors du Sommet du Climat le 23 septembre 2014, le secrétaire général des Nations Unies et quelques 74 États, 11 gouvernements infranationaux (régions, provinces), 11 villes et plus de 1 000 entreprises ont à leur tour appuyé l’introduction de prix du carbone, en soutenant l’initiative de la Banque mondiale Put a price on carbon.

Si un grand nombre de décideurs s’accordent désormais sur le déploiement d’un prix du carbone, aucun d’entre eux ne précise le niveau du prix du carbone qu’il estime nécessaire, pas plus que le ou les moyens par lesquels ce prix du carbone serait introduit. Ce prix diffèrera vraisemblablement dans chaque système de tarification du carbone mis en œuvre par les régulateurs (système de quotas, taxe, ou autres moyens) en fonction des spécificités nationales ou régionales, ou défini par des opérateurs eux-mêmes – financiers notamment – lorsqu’il s’agira de valeur tutélaire.

Certes, ce soutien international en faveur du prix du carbone ne pourra aboutir à l’émergence d’un prix du carbone international avant de longues années. Un puzzle géographique et sectoriel de prix du carbone, si ceux-ci sont suffisamment crédibles sur le long terme, sera néanmoins utile pour favoriser le déploiement de technologies à faible émission de carbone dans la sphère économique.

Des instruments ou politiques complémentaires seront indispensables. Il faudra notamment assurer d’autres canaux favorisant l’offre de financements dédiés à des investissements bas-carbone. Par exemple, les obligations vertes ont été maintes fois mentionnées à New York le 23 septembre dernier, notamment par le secrétaire général des Nations Unies (22), par le président de la Banque mondiale (23), ou encore par des acteurs financiers – privés et publics. D’autres acteurs financiers se sont également engagés sur la décarbonation de leur portefeuille ou bien l’accroissement de leurs financements dédiés à la lutte contre le changement climatique.

En tout état de cause, ces actions ou outils visant notamment à faire baisser le coût de la dette bas-carbone ne porteront leurs fruits que si le cadre institutionnel est globalement favorable aux projets verts. C’est aussi pour cela que le prix du carbone reste nécessaire.

V. PROTECTION DU CLIMAT ET CROISSANCE ÉCONOMIQUE PEUVENT ALLER DE PAIR

Le 16 septembre 2014, a été publié le dernier rapport de la commission mondiale pour l’économie et le climat, intitulé « une meilleure croissance, un meilleur climat ». Il démontre que qu’il est possible de réduire les émissions de carbone, tout en améliorant les performances économiques, et ce dès à présent.

La Commission Mondiale sur l’Économie et le Climat a été établie pour déterminer s’il est possible de parvenir à une croissance économique durable tout en luttant contre les risques liés au changement climatique.

Son rapport vise à informer les décideurs économiques du secteur public et du secteur privé, nombre desquels admettent les graves risques que représente le changement climatique, mais sont également confrontés à des préoccupations plus urgentes telles que l’emploi, la compétitivité et la pauvreté. Le rapport rassemble faits et analyse, puisant dans l’expérience pratique de pays, villes et entreprises du monde entier.

Le rapport conclut que tous les pays, quel que soit leur niveau de revenus, ont dès à présent l’occasion de construire une croissance économique durable tout en réduisant les immenses risques du changement climatique. Ceci est rendu possible par des changements structurels et technologiques qui se produisent dans l’économie mondiale et par des possibilités pour une plus grande efficacité économique. Le capital nécessaire aux investissements requis est disponible, et le potentiel d’innovation est immense. Il faut donc un leadership politique fort et des politiques crédibles et cohérentes.

Les 15 prochaines années seront décisives, à mesure que l’économie mondiale subit une transformation structurelle profonde. Ce sera la fin du « statu quo ». L’économie mondiale verra une croissance de plus de 50 %, un milliard de personnes supplémentaires habiteront dans les villes, et les avancées rapides en matière de technologies continueront à changer les entreprises et les vies. Environ 90 000 milliards de dollars seront probablement investis dans l’infrastructure des systèmes mondiaux urbains, d’utilisation des terres et énergétiques. La gestion de cette transformation aura un impact sur la croissance, la productivité et la qualité de vie futures.

Les 15 prochaines années d’investissement détermineront également l’avenir du système climatique mondial. Le changement climatique provoqué par les émissions antérieures de gaz à effet de serre a déjà des conséquences économiques graves, particulièrement dans les régions les plus exposées du monde. Sans des mesures plus ambitieuses sur les 10 - 15 prochaines années, entrainant un pic puis la chute des émissions mondiales, il est presque certain que le réchauffement mondial moyen dépassera 2  C, le niveau que la communauté internationale s’est engagée à ne pas dépasser. Selon les tendances actuelles, le réchauffement pourrait dépasser 4° C d’ici la fin du siècle, avec des conséquences extrêmes, potentiellement irréversibles. En accumulant les concentrations de gaz à effet de serre et en privilégiant des actifs à fortes émissions de carbone, nous engendrons un retard dans la réduction des émissions qui rend progressivement plus coûteux la transition vers une économie à faible intensité de carbone.

Il n’est pas nécessaire pour la croissance économique future de reproduire les modèles du passé, avec ses fortes émissions de carbone et sa répartition inégale. Il y a dès à présent un potentiel d’investissement énorme menant à une meilleure efficacité, une transformation structurelle et un changement technologique dans trois systèmes clés de l’économie :

les villes sont des moteurs de la croissance économique. Elles représentent environ 80 % de la production économique mondiale, et environ 70 % de la consommation mondiale d’énergie et des émissions de gaz à effet de serre. La façon dont les plus grandes villes connaissant les taux de croissance les plus rapides au monde se développent sera essentielle l’évolution future de l’économie et du climat au niveau mondial. Mais une grande partie de la croissance urbaine aujourd’hui n’est ni planifiée, ni structurée, et engendre des coûts économiques, sociaux et environnementaux considérables. Comme le démontrent des villes pionnières dans le monde, un développement urbain plus compact et mieux intégré, construit autour d’un réseau de transport en commun, peut créer des villes qui sont économiquement dynamiques, plus saines et qui produisent moins d’émissions. Une telle approche de l’urbanisation pourrait réduire les besoins en capital des infrastructures urbaines de plus de 3 000 milliards de dollars sur les 15 prochaines années ;

- la productivité de l’utilisation des terres déterminera si le monde est en mesure de nourrir une population qui devrait atteindre plus de huit milliards d’ici à 2030, tout en préservant les environnements naturels. Il est possible d’accroître la production alimentaire, de protéger les forêts et de réduire les émissions liées à l’utilisation des terres en augmentant la productivité des cultures et du bétail, grâce aux nouvelles technologies et à des approches complètes de la gestion du sol et de l’eau. La restauration de seulement 12 % des terres agricoles dégradées dans le monde permettrait de nourrir 200 millions de personnes d’ici 2030, tout en renforçant la résistance au climat et en réduisant les émissions. Ralentir, et au bout du compte, mettre fin à la déforestation est possible en associant un soutien international et un engagement national forts pour la protection des forêts et le développement des revenus en milieu rural ;

les systèmes énergétiques alimentent la croissance dans toutes les économies. Nous sommes à l’orée d’un avenir propre sur le plan énergétique. Le charbon est plus risqué et plus coûteux qu’autrefois, avec une croissance de dépendance sur l’importation et de pollution atmosphérique. Une baisse des coûts rapide, particulièrement dans l’énergie éolienne et solaire, pourrait permettre aux énergies renouvelables et à d’autres sources d’énergie à faibles intensité de carbone de représenter plus de la moitié de la production totale d’électricité nouvelle dans les 15 prochaines années. Un investissement élevé dans l’efficacité énergétique – dans les entreprises, les bâtiments et les transports – représente un énorme potentiel pour réduire et gérer la demande. Dans les pays en développement, les énergies renouvelables décentralisées peuvent contribuer à fournir de l’électricité à plus d’un milliard de personnes qui n’y ont pas accès.

Dans tous ces systèmes, trois « moteurs du changement » doivent être exploités pour surmonter les obstacles commerciaux, politiques et institutionnels à la croissance à faibles intensité de carbone :

l’accroissement de l’efficacité des ressources est au cœur de la croissance et de la réduction des émissions. Dans de nombreuses économies, les défaillances du marché et des politiques déforment l’allocation efficace des ressources et augmentent simultanément les émissions. Tandis que les subventions en faveur des énergies propres représentent environ 100 000 milliards de dollars, les subventions en faveur des combustibles fossiles polluants sont aujourd’hui estimées à environ 600 milliards de dollars par an. L’abandon progressif des subventions en faveur des combustibles fossiles peut améliorer la croissance et libérer des ressources qui pourront être réparties au profit de personnes à faibles revenus. Un prix fort et prévisible du carbone suscitera une productivité énergétique plus forte et fournira de nouveaux revenus fiscaux, qui pourront servir à alléger d’autres taxes. Des réglementations bien conçues, telles que des normes de performance plus élevées pour les appareils domestiques et véhicules, sont également nécessaires ;

l’investissement dans les infrastructures constitue le fondement de la croissance économique moderne. Des formes d’infrastructures à faible intensité de carbone sont essentielles pour réduire les trajectoires d’émissions actuelles. Pourtant aujourd’hui encore, de nombreuses économies ne parviennent pas à mobiliser des financements suffisants pour satisfaire leurs besoins en matière d’infrastructures. Cela n’est pas dû à une pénurie de capitaux dans l’économie mondiale. Pour de nombreux pays ceci est le résultat, pour de nombreux pays, d’un manque de capacité de financement public et de la perception du marché selon laquelle de tels investissements présentent un risque élevé. Les innovations financières, notamment les obligations vertes, les instruments et produits de partage du risque qui alignent le profil de risque des actifs à faible intensité de carbone avec les besoins des investisseurs, peuvent réduire les coûts de financement, potentiellement jusqu’à 20 % pour l’électricité à faible intensité de carbone. Les banques de développement nationales et internationales doivent être renforcées et élargies ;

Stimuler l’innovation dans les technologies, les business models et les pratiques sociales peuvent favoriser la croissance et la réduction des émissions. Les avancées dans la numérisation, les nouveaux matériaux, les sciences de la vie et les processus de production pourront transformer les marchés et de réduire drastiquement la consommation des ressources. Mais la technologie n’évoluera pas d’elle-même vers une faible intensité de carbone. Cela nécessite des signaux politiques clairs, notamment la réduction des obstacles dressés par le marché et par la réglementation auxquels font face les nouvelles technologies et les nouveaux modèles d’affaires, ainsi que des dépenses publiques bien ciblées. Pour contribuer à la création de la nouvelle vague de technologies économes en ressources et à faible intensité de carbone, les investissements publics en recherche et développement (R&D) dans le secteur de l’énergie doivent tripler, pour dépasser les 100 milliards de dollars par an d’ici le milieu des années 2020.

La mise en œuvre de politiques bien conçues dans ces domaines peuvent entraîner le renforcement mutuel des objectifs de croissance et des objectifs climatiques à court et moyen terme. Sur le long terme, si le changement climatique n’est pas adressé, la croissance à proprement parler sera mise en danger.

Des signaux indiquant la mise en œuvre de politiques cohérentes et crédibles sur le long terme sont essentiels. En orientant les attentes du marché, une telle politique encourage davantage d’investissement, réduisant les coûts de la transition vers une économie à faible intensité de carbone. Par contraste, l’incertitude concernant la mise en œuvre de ces politiques qui règne dans de nombreux pays a augmenté le coût du capital, nuisant aux investissements, à l’emploi et à la croissance. Sur le long terme, il existe un risque notable que les investissements à fortes émissions de carbone soient dévalués ou « bloqués » lors du renforcement des mesures visant à réduire les émissions de gaz à effet de serre.

La qualité de la croissance importe, sa rapidité aussi. De nombreuses politiques favorisant la faible intensité de carbone offrent d’autres nombreux avantages, notamment une meilleure sécurité énergétique, moins de congestion routière, une meilleure qualité de vie, une meilleure résistance au changement climatique et la protection environnementale. Beaucoup de ces politiques peuvent contribuer à réduire la pauvreté. Dans les 15 pays ayant les plus forts taux d’émissions de gaz à effet de serre, le coût des dommages de santé résultant de la mauvaise qualité de l’air, un phénomène largement associé à la combustion des combustibles fossiles, sont évalués à plus de 4 % du PIB en moyenne. De nombreux pays reconnaissent désormais les coûts issus d’un modèle de développement à fortes émissions de carbone.

Bien gérés, les investissements supplémentaires dans les infrastructures nécessaires pour réaliser la transition vers une économie à faible intensité de carbone seront modestes. Les besoins d’infrastructures pour une économie à forte émissions de carbone, dans le transport, l’énergie, l’eau et les villes, sont estimés à environ 90 billions de dollars, soit 6 billions de dollars par an en moyenne sur les 15 prochaines années. En combinant l’énergie renouvelable à un investissement réduit dans les combustibles fossiles, des villes plus compactes, et une gestion plus efficace de la demande en énergie, les infrastructures à faible intensité de carbone augmenteront les besoins en investissements de seulement 270 milliards de dollars par an. Ces coûts de capital plus élevés pourraient être entièrement compensés par des coûts d’exploitation inférieurs, par exemple par une réduction des dépenses en carburant. Investir dans une économie à faible intensité de carbone est une forme rentable d’assurance contre le risque climatique.

Le rapport propose un Plan d’Action Mondial de dix recommandations clés, qui enjoint les décideurs de :

1) accélérer la transformation en faible intensité de carbone en intégrant le climat dans les processus de décisions économiques fondamentaux. Cela est nécessaire à tous les niveaux de gouvernements et entreprises, en apportant des changements systématiques aux politiques et outils d’évaluation des projets, indicateurs de performance, modèles de risque et exigences de signalement ;

2) conclure un accord international fort, durable et équitable sur le climat, pour augmenter la confiance nécessaire à la réforme des politiques nationales, fournir le soutien nécessaire aux pays en développement, et envoyer un signal fort du marché aux investisseurs ;

3) supprimer progressivement les subventions pour les combustibles fossiles et intrants agricoles, ainsi que les incitations à l’extension urbaine, en vue de susciter une utilisation plus efficace des ressources et libérer les fonds publics pour d’autres usages, notamment des programmes qui soutiennent des personnes à faibles revenus ;

4) introduire des prix forts et prévisibles du carbone dans le cadre d’une solide réforme fiscale et de meilleures pratiques d’affaires, envoyant ainsi des signaux forts à travers toute l’économie ;

5) réduire substantiellement les coûts du capital pour les investissements dans les infrastructures à faible intensité de carbone, en élargissant l’accès au capital institutionnel et en réduisant ses coûts pour les actifs à faible intensité de carbone ;

6) intensifier l’innovation dans les technologies clés à faibles émissions de carbone et résistantes au climat, en triplant l’investissement public en R&D sur les énergies propres et en éliminant les obstacles à l’entrepreneuriat et à la créativité ;

7) faire des villes intégrés et compactes la forme préférée de développement urbain, à travers des programmes favorisant des villes plus denses et accordant la priorité aux investissements dans des systèmes de transport en commun sûrs et efficaces ;

8) mettre fin à la déforestation des forêts naturelles d’ici 2030, en renforçant les incitations pour l’investissement à long terme et la protection des forêts, et en augmentant le financement international à environ 5 milliards de dollars par an, et en le liant de manière progressive à la performance ;

9) restaurer au moins 500 millions d’hectares de forêts ou terres agricoles perdues ou dégradées d’ici 2030, renforçant ainsi les revenus ruraux et la sécurité alimentaire ;

10) accélérer l’effacement de la production d’électricité au charbon, particulièrement polluante, en éliminant progressivement les nouvelles usines de charbon sans stockage et captage du carbone dans les économies développées dès maintenant, et dans les pays à revenu intermédiaire d’ici 2025.

Les six premières recommandations représentent les conditions nécessaires pour un cadre fort et crédible favorisant l’investissement et la croissance à faible intensité de carbone et résistants aux impacts climatiques. Les quatre dernières recommandations portent sur des occasions à ne pas manquer pour parvenir à un changement qui pourra susciter la croissance future et réduire le risque climatique dans les villes, l’utilisation des terres et les systèmes énergétiques.

La mise en œuvre des politiques et investissements proposés dans ce rapport pourrait assurer au moins la moitié de la réduction des émissions nécessaire d’ici 2030 pour réduire le risque de changement climatique dangereux. Avec une mise en œuvre déterminée et large, un apprentissage rapide et le partage de bonnes pratiques, ce chiffre pourrait potentiellement atteindre 90 %. Toutes les mesures offriraient de nombreux avantages économiques et sociaux, sans même parler de leurs avantages pour le climat. D’autres mesures seront également nécessaires. Certaines d’entre elles, comme le développement des technologies de captage, d’utilisation et de stockage du carbone, engendreront des coûts qu’il faudra supporter exclusivement à fin de réduire le risque climatique. Au-delà de 2030, les émissions mondiales devront diminuer davantage, jusqu’à un niveau proche de zéro, voire au-delà dans la seconde moitié du siècle. Mais les coûts seront bien inférieurs et les opportunités de croissance bien supérieures si les bases d’une économie à faible intensité de carbone sont mis en place dès maintenant.

Un accord international fort et équitable est essentiel pour soutenir une action nationale ambitieuse. Les pays développés devront faire preuve de leadership en réduisant fortement leurs propres émissions, et en mobilisant un soutien financier et technologique pour les pays en développement. En même temps, les pays en développement représentent déjà environ deux tiers des émissions annuelles de gaz à effet de serre. Il sera donc impossible d’atteindre le niveau de réduction mondial requis sans que tous les pays participent.

La transition vers une trajectoire de croissance et de développement à faible intensité de carbone, résistant au climat, ne sera pas facile, et les gouvernements devront s’engager à une transition juste. Toutes les politiques sur le climat ne profitent pas à tous, et certains compromis sont inévitables, particulièrement à court terme. Bien que de nombreux emplois seront créés, et que de nombreuses entreprises bénéficieront de marchés et de profits plus importants, certains emplois seront perdus, notamment dans les secteurs à fortes émissions de carbone. Les coûts humains et économiques de la transition doivent être gérés par l’intermédiaire d’un soutien aux travailleurs déplacés, aux communautés touchées et aux foyers à faibles revenus. Un leadership politique fort et la participation active de la société civile seront nécessaires, avec la prise de décisions d’affaires clairvoyantes et éclairées.

Les nombreuses preuves présentées dans ce rapport montrent qu’il existe désormais un vaste champ d’action pour à la fois améliorer la croissance et réduire le risque climatique. Des entreprises, villes et pays pionniers montrent déjà la voie du succès. Une remarquable opportunité de mettre le monde sur la voie de la prospérité durable s’offre aux leaders de l’économie mondiale. La récompense est immense, et le moment de décision est venu. Il est possible de parvenir à une croissance meilleure et à un climat meilleur.

TROISIÈME PARTIE :
L’UNION EUROPÉENNE MOBILISÉE POUR PRÉPARER 2015

I. LE MANDAT DE L’UNION EUROPÉENNE À LIMA

Les chefs d'État et de gouvernement de l'Union européen ont donné, après une longue discussion dans la nuit du jeudi au vendredi 24 octobre 2014 à Bruxelles, leur feu vert à un plan de lutte ambitieux contre le réchauffement climatique afin de persuader leurs partenaires internationaux de prendre des engagements similaires lors de la conférence de Paris sur le climat en décembre 2015.

Dans ses conclusions (24) , le Conseil européen des 23 et 24 octobre 2014 a souligné que des progrès substantiels ont été accomplis dans la réalisation des objectifs de l'Union européenne relatifs à la réduction des émissions de gaz à effet de serre, aux énergies renouvelables et à l'efficacité énergétique, qui doivent être pleinement atteints d'ici 2020.

Sur la base des principes énoncés dans les conclusions de sa réunion de mars 2014, le Conseil européen est parvenu à un accord sur le cadre d'action de l'Union européenne en matière de climat et d'énergie à l'horizon 2030. L'Union européenne présentera donc sa contribution au plus tard avant la fin du premier trimestre de 2015, respectant ainsi le calendrier que les parties à la convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques ont arrêté à Varsovie en vue de la conclusion d'un accord global sur le climat. Le Conseil européen engage tous les pays à présenter des politiques et des objectifs ambitieux bien avant la 21ème conférence des parties, qui se tiendra à Paris.

L'Europe s'est ainsi engagée de réduire les émissions de gaz à effet de serre (GES) d'au moins 40 % d'ici 2030 par rapport à 1990. Par ailleurs, l'Union européenne a l'ambition de porter la part des énergies renouvelables à 27 % de la consommation et de faire 27 % d'économies d'énergie. En outre, les Européens ont aussi décidé d'augmenter les «interconnexions» entre réseaux électriques au sein de l'Union à 15 % d'ici 2030.

L'Europe s'est enfin engagée à prendre en considération les multiples objectifs du secteur de l'agriculture et de l'utilisation des terres. La Commission européenne est chargée d'examiner les meilleurs moyens d'encourager l'intensification durable de la production alimentaire, tout en optimisant la contribution du secteur à l'atténuation des émissions de GES et au piégeage de ces gaz, y compris via le reboisement. Une stratégie sera mise en place avant 2020 sur la manière d'intégrer l'utilisation des terres, le changement d'affectation des terres et la foresterie dans le cadre de la réduction de 40 % des GES d'ici 2030.

L'Union européenne a ainsi montré la voie en annonçant la première ses engagements chiffrés en vue de la conférence sur le climat de décembre 2015. Toutefois, elle n’a pas été plus loin, en termes d'économie d'énergie, qu'un effort de 27 %, cet objectif perdant par ailleurs beaucoup de son intérêt puisqu'il n'est pas contraignant.

II. LA RÉSOLUTION DU PARLEMENT EUROPÉEN, RELATIVE AUX NÉGOCIATIONS SUR LE CHANGEMENT CLIMATIQUE (25)

A. LES DÉPUTÉS EUROPÉENS ONT TRACÉ LA VOIE DE LIMA À PARIS

Les négociations de Lima le mois prochain devraient permettre aux partenaires mondiaux de conclure un accord ambitieux sur le climat à Paris en 2015, afin de rester sur la voie d'un réchauffement climatique inférieur à 2° C, a affirmé la commission de l'environnement dans une résolution (26). Les députés ont rappelé que l'Union européenne et ses États membres se sont engagés à augmenter les contributions au Fonds vert pour le climat de l'ONU, dans le but de mobiliser 100 milliards de dollars par an d'ici 2020.

« Notre objectif final est de faire en sorte que nos économies suivent le scénario d'un réchauffement climatique en-deçà des 2° C. Le mois prochain à Lima, les parties de la CCNUCC devraient travailler de manière constructive pour mettre en place les éléments de l'accord qui devrait être conclu à Paris, et nous devrions jouer un rôle central », a affirmé le président de la commission de l'environnement (27), qui sera à la tête d'une délégation parlementaire à Lima en décembre.

« Bien sûr, nous sommes confrontés à un défi politique et nous devons convaincre tous les acteurs que la voie vers une économie faible en carbone n'est pas punitive, mais qu'elle nous permettra au contraire de créer des emplois et de développer des technologies et des produits dont la communauté internationale aura besoin », a-t-il ajouté.

Tous les pays devraient contribuer, car des mesures dilatoires ne feront qu'accroître les coûts et réduire les possibilités, affirme la résolution adoptée par cinquante-six voix pour, deux voix contre et neuf abstentions. La conférence de Lima devrait également convenir des obligations d'information qui devraient garantir que les contributions nationales soient quantifiables et comparables, ajoute le texte.

B. Réduire les émissions de gaz à effet de serre de 50 % d'ici 2050

Les députés considèrent la conférence de Lima des 1er - 12 décembre comme l'occasion de fixer des objectifs clés avant l'accord international de 2015 qui sera débattu à Paris (COP 21) du 30 novembre au 11 décembre 2015. Selon les parlementaires, cet accord devrait inclure des mesures pour une stratégie d'atténuation, d'adaptation et de mise en œuvre afin de pouvoir réduire les émissions de gaz à effet de serre d'au moins 50 % d'ici 2050.

C. la contribution de l'Union européenne

Les députés font remarquer qu'en 2012, l'Union européenne avait réduit ses émissions de gaz à effet de serre de 19 % par rapport aux niveaux de 1990, conformément au protocole de Kyoto, tout en ayant augmenté son PIB de plus de 45 %. Elle a donc presque réduit de moitié l'intensité moyenne des émissions entre 1990 et 2012, et diminué de 25 % ses émissions par habitant.

Par ailleurs, les députés rappellent que l'Union européenne et ses États membres se sont engagés à augmenter les financements en faveur de la lutte contre le changement climatique en finançant le Fonds vert pour le climat des Nations unies et en mobilisant conjointement 100 milliards de dollars par an d'ici 2020, dans le cadre de leur contribution à l'accord de Copenhague de décembre 2009, qui vise à maintenir le réchauffement climatique en-dessous de 2° C. Les parlementaires appellent les autres donateurs à agir également en ce sens, afin de mobiliser davantage de fonds pour les mesures de lutte contre le réchauffement climatique.

D. Les pays en développement

Les députés soulignent que les accords sur le financement des mesures de lutte contre le changement climatique, les transferts de technologies et le renforcement des capacités seront essentiels pour aider les pays en développement - à savoir ceux qui émettent le moins de gaz à effet de serre mais qui sont les plus vulnérables au changement climatique, en raison de leur faible capacité de réaction et d'adaptation.

E. L’Air et la mer

Les députés soulignent que l'Organisation maritime internationale (OMI) et l'Organisation de l'aviation civile internationale (OACI) doivent prendre des mesures pour obtenir des résultats satisfaisants en temps voulu, à la mesure de l'ampleur et de l'urgence de l'enjeu climatique.

III. LES AUTRES INITIATIVES EUROPÉENNES

A. L'ALLIANCE MONDIALE CONTRE LE CHANGEMENT CLIMATIQUE (AMCC)

De nombreux acteurs peuvent s’engager aux côtés des gouvernements en vue de la lutte contre le changement climatique, parmi lesquels les collectivités locales et les entreprises. Les acteurs non gouvernementaux doivent être mobilisés pour appuyer et mettre en œuvre l’accord qui doit être trouvé à Paris en 2015. C’est le sens de l’Alliance pour le climat que l’Union européenne souhaite promouvoir.

L'Alliance mondiale contre le changement climatique est une initiative de l'Union européenne, lancée en 2007 et coordonnée par la Commission européenne, visant à renforcer le dialogue et la coopération dans le domaine du changement climatique avec les pays en développement les plus vulnérables et à appuyer leurs efforts de développement et de mise en œuvre de réponses en termes d'adaptation et d'atténuation. L'AMCC concentre ses efforts sur les pays les moins avancés (PMA) et les petits États insulaires en développement (PEID), qui ont le moins contribué aux émissions de gaz à effet de serre mais sont souvent les plus touchés par le changement climatique et ne disposent que de ressources limitées pour y faire face.  

L'AMCC est une alliance mondiale, réunissant une grande diversité de partenaires à travers le monde en vue d'aider les pays en développement les plus vulnérables à faire face avec une efficacité accrue aux défis associés au changement climatique. L'AMCC repose sur deux piliers :

- une plateforme de dialogue et de coopération :

•  l'AMCC encourage le dialogue entre l'Union européenne et les pays en développement sur la politique climatique.  Elle favorise aussi l'échange d'expérience sur les moyens concrets d'intégrer le changement climatique dans les politiques de développement et les budgets, en prenant en compte le fait que les pays en développement font souvent face à des problèmes climatiques similaires ;

• les résultats alimentent les discussions sur l’accord climatique postérieur à 2012 en vertu de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC) et inspirent la coopération technique et financière appuyée par l’AMCC ;

• le dialogue se déroule aux niveaux mondial, régional et national.

- un soutien technique et financier :

• l’AMCC offre un soutien technique et financier aux pays en développement visés pour qu’ils intègrent le changement climatique dans leurs politiques de développement et leurs budgets et mettent en œuvre des actions d’adaptation et d’atténuation, en privilégiant cinq domaines prioritaires (voir ci-dessous) ;

 • afin de trouver les meilleures solutions pour faire face au changement climatique, l'AMCC travaille avec des ministères et des agences gouvernementales, des organisations régionales, des organisations non gouvernementales, des institutions universitaires et scientifiques, ainsi qu'avec des représentations locales d'organisations internationales, d'agences multilatérales et bilatérales de développement – pour une mise en commun des ressources, de l’expertise et des connaissances ;

• ce soutien technique et financier permet à son tour d'alimenter le dialogue et l’échange d’expérience aux niveaux régional et mondial entre l’Union européenne et les pays partenaires. 

L’AMCC axe son appui technique sur cinq domaines prioritaires :

- l'intégration du changement climatique dans les efforts de réduction de la pauvreté et de développement : l’AMCC favorise l’intégration systématique des questions liées au changement climatique dans la planification du développement national, de l’élaboration des politiques et de la budgétisation jusqu'à la mise en œuvre et au suivi. Ce domaine prioritaire, qui porte essentiellement sur le renforcement institutionnel, est souvent associé à l’adaptation ;

- l'adaptation : l'AMCC entend contribuer à l'amélioration des connaissances relatives aux effets du changement climatique et à l'élaboration ainsi qu’à la mise en œuvre d'actions d'adaptation appropriées, notamment dans les secteurs de l'eau et de l'agriculture, afin de réduire la vulnérabilité des populations à ces effets.  L’AMCC s’appuie sur les programmes d’action nationaux d’adaptation (PANA) et d’autres plans nationaux ;

- la réduction des émissions dues à la déforestation et à la dégradation des forêts (REDD) : dans les PMA, 60 % des émissions sont dues à des changements dans l’utilisation des terres, principalement la déforestation. L’AMCC appuie la mise en œuvre de solutions visant à réduire les émissions de dioxyde de carbone (CO2) dues à la déforestation et à créer des mesures d’incitation en faveur de la protection des forêts, tout en préservant les moyens de subsistance des populations et les écosystèmes tributaires des forêts ;

- le renforcement de la participation au marché mondial du carbone : l’AMCC entend promouvoir une répartition géographique plus équitable des possibilités de financement liées au Mécanisme de développement propre (MDP) en renforçant les capacités des pays partenaires à accéder à cette source de financement, notamment dans le domaine de l’énergie ;

- la réduction des risques de catastrophe (RRC) : l’AMCC cherche à aider les pays en développement à se préparer aux catastrophes naturelles liées au climat, à réduire ces risques et à limiter leur impact.

B. LES OBJECTIFS CLIMAT-ÉNERGIE DE L’UNION EUROPÉENNE POUR 2030

1. Le contexte

Le cadre se fonde sur les objectifs pour 2020 du paquet « climat et énergie » ainsi que sur la feuille de route de la Commission pour l'énergie à l'horizon 2050 et sur sa feuille de route vers une économie compétitive à faible intensité de carbone à l'horizon 2050. La communication sur le cadre stratégique pour 2030 fait suite au livre vert de la Commission de mars 2013, qui a lancé une vaste consultation publique pour déterminer la gamme d'objectifs en matière de climat et d'énergie pour 2030 qui serait la plus appropriée et la structure de ces objectifs qui serait la plus adéquate. Ces documents reflètent l’objectif de l’Union européenne consistant à réduire d'ici à 2050 les émissions de gaz à effet de serre de 80 à 95 % par rapport aux niveaux de 1990, dans le cadre des efforts à déployer par les pays développés.

2. Les objectifs

Le 22 janvier 2014, la Commission européenne a défini ses objectifs pour 2030 en matière de climat et d’énergie en faveur d'une économie de l'Union européenne compétitive, sûre et à faibles émissions de carbone.

Les piliers du nouveau cadre de l’Union européenne en matière de climat et d’énergie pour 2030 sont :

- une réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES) de 40 % par rapport au niveau de 1990,

- un objectif contraignant pour l'ensemble de l'Union concernant la part des énergies renouvelables, qui est portée à au moins 27 %,

- de nouvelles ambitions pour les politiques en matière d’efficacité énergétique, un nouveau système de gouvernance et une série de nouveaux indicateurs pour garantir un système énergétique compétitif et sûr.

Étayé par une analyse détaillée des prix et des coûts de l’énergie, le cadre pour 2030 permettra de garantir la sécurité juridique aux investisseurs et une approche coordonnée entre les États membres, conduisant ainsi à la mise au point de nouvelles technologies. Ce cadre vise à faire progresser l' Union européenne de manière continue sur la voie d'une économie à faibles émissions de carbone et d'un système énergétique compétitif et sûr qui garantisse une énergie à un prix abordable pour tous les consommateurs, accroisse la sécurité de l’approvisionnement énergétique de l’Union, réduise notre dépendance à l’égard des importations d’énergie et crée de nouvelles opportunités pour la croissance et l’emploi, en tenant compte de l’incidence potentielle sur les prix à plus long terme.

La communication définissant le cadre pour 2030 a été débattue au plus haut niveau, notamment au Conseil européen et au Parlement. Elle est accompagnée d’une proposition législative concernant une réserve de stabilité du marché pour le système d’échange de quotas d’émission de l’ Union européenne (SEQE de l' Union européenne) qui devrait être opérationnelle à partir de 2021 et qui vise à améliorer l'efficacité du système. Un rapport sur les prix et les coûts de l’énergie en Europe, publié en même temps que cette communication, indique que la hausse des prix de l’énergie peut être partiellement atténuée en mettant en œuvre des politiques énergétiques et climatiques efficaces sur le plan des coûts, en créant des marchés de l’énergie compétitifs et en améliorant l'efficacité énergétique.

Le président de la Commission européenne (28), a déclaré à ce sujet : « si la lutte contre le changement climatique revêt une importance capitale pour l'avenir de notre planète, une véritable politique européenne de l'énergie est essentielle pour notre compétitivité. Le paquet présenté aujourd'hui montre qu'agir simultanément sur les deux aspects n'est pas contradictoire, et qu'au contraire, ceux-ci se renforcent mutuellement. Il est dans l'intérêt de l'Union européenne de créer une économie génératrice d'emplois qui soit moins dépendante de l'énergie importée en améliorant l'efficacité énergétique et en ayant davantage recours à l'énergie propre produite dans l' l'Union européenne. Une réduction de 40 % des émissions de gaz à effet de serre pour 2030 constitue un objectif ambitieux et le jalon le plus efficace sur le plan des coûts sur la voie menant à une économie à faibles émissions de carbone. De plus, l'objectif consistant à porter à au moins 27 % la part des énergies renouvelables envoie un signal important : il garantit la stabilité aux investisseurs, stimule les emplois verts et soutient notre sécurité d'approvisionnement »

Le commissaire européen chargé de l'énergie (29), s'est exprimé en ces termes : « le cadre pour 2030 incarne la détermination de l'Union européenne à progresser vers une économie compétitive à faibles émissions de carbone, vers la stabilité des investissements et vers la sécurité de l'approvisionnement énergétique. Mon objectif est de garantir que l’énergie reste abordable pour les ménages et les entreprises. Le cadre pour 2030 fixe un niveau d’ambition élevé pour la lutte contre le changement climatique, tout en tenant compte de la nécessité d'atteindre le but au moindre coût. Le marché intérieur de l’énergie sert de base à la réalisation de cet objectif et je continuerai à œuvrer en faveur de son achèvement afin d’exploiter tout son potentiel, et notamment en faveur de l’« européanisation » des politiques en matière d’énergies renouvelables. »

La commissaire chargé de l'action pour le climat (30) a ajouté : « la Commission a prouvé à tous ceux qui prétendaient qu'elle ne présenterait aucune mesure ambitieuse aujourd'hui qu'ils avaient tort. Une réduction des émissions de 40 % est l'objectif le plus efficace sur le plan des coûts pour l’Union européenne et elle tient compte de notre responsabilité au niveau mondial. Bien entendu, l’Europe doit continuer à mettre fortement l’accent sur les énergies renouvelables. C’est pourquoi il est important que la Commission propose aujourd’hui un objectif contraignant pour l'ensemble de l’Union européenne. Les détails du cadre doivent maintenant être établis, mais la direction que l’Europe doit prendre a été fixée. Si toutes les autres régions du monde étaient tout aussi ambitieuses en matière de lutte contre le changement climatique, la planète se porterait beaucoup mieux. »

3. Les éléments clés du cadre stratégique pour 2030 présenté par la Commission européenne

a. Un objectif contraignant de réduction des émissions de gaz à effet de serre

Élément essentiel de la politique de l’Union européenne en matière d’énergie et de climat pour 2030, l’objectif d’une réduction de 40 % des émissions de gaz à effet de serre par rapport au niveau de 1990 serait atteint uniquement par des mesures à l'échelle nationale. La réduction annuelle du « plafond » des émissions des secteurs couverts par le SEQE de l'Union européenne serait portée de 1,74 % aujourd'hui à 2,2 % après 2020. Les émissions des secteurs non couverts par le SEQE de l'Union européenne devraient être réduites de 30 % par rapport au niveau de 2005, et ces efforts seraient partagés équitablement entre les États membres. La Commission invite le Conseil et le Parlement européen à convenir, d'ici la fin de 2014, que l'Union européenne devrait s’engager à réduire les émissions de 40 % au début de l’année 2015 dans le cadre des négociations internationales relatives à un nouvel accord mondial sur le climat, qui devrait être conclu à Paris à la fin de l'année 2015.

b. Un objectif contraignant en matière d’énergies renouvelables à l’échelle de l’Union européenne

Les énergies renouvelables joueront un rôle essentiel dans la transition vers un système énergétique compétitif, sûr et durable. Fondé sur une approche davantage orientée vers le marché et offrant des conditions favorables pour les technologies émergentes, l'objectif contraignant pour l'ensemble de l'Union européenne fixant à au moins 27 % la part des énergies renouvelables en 2030 s'accompagne d'importants avantages en ce qui concerne la balance commerciale pour les produits énergétiques, le recours à des sources d'énergie autochtones, l’emploi et la croissance. Il est nécessaire d'établir un objectif en matière d’énergies renouvelables au niveau de l'Union européenne pour garantir la continuité des investissements dans le secteur. Toutefois, il ne serait pas traduit en objectifs nationaux par la législation de l’Union, laissant ainsi aux États membres une certaine souplesse pour transformer le système énergétique d’une manière qui soit adaptée aux préférences et aux spécificités nationales. La réalisation de l’objectif de l'Union européenne en matière d'énergies renouvelables serait garantie par le nouveau système de gouvernance fondé sur les plans énergétiques nationaux.

c. L’efficacité énergétique

L’amélioration de l’efficacité énergétique contribuera à tous les objectifs de la politique énergétique de l'Union européenne et aucune transition vers un système énergétique compétitif, sûr et durable n'est possible sans cette amélioration. Le rôle de l’efficacité énergétique dans le cadre pour 2030 sera analysé de manière plus approfondie lors d’une révision de la directive sur l’efficacité énergétique, qui devrait être finalisée dans le courant de l’année. Une fois cette révision achevée, la Commission examinera la nécessité d'apporter des modifications à la directive. Les plans énergétiques nationaux des États membres devront également couvrir l’efficacité énergétique.

d. La réforme du SEQE de l’Union européenne

La Commission propose d’établir une réserve de stabilité du marché au début de la prochaine période d’échange de quotas d’émission du SEQE en 2021. La réserve devrait à la fois remédier au problème des excédents de quotas d'émission qui se sont constitués ces dernières années et améliorer la résilience du système aux chocs importants en adaptant automatiquement le volume de quotas à mettre aux enchères. La création de cette réserve - outre le report récemment convenu de la mise aux enchères de 900 millions de quotas jusqu'à 2019-2020 (« gel de quotas ») - est soutenue par un large éventail de parties prenantes. En vertu du dispositif législatif proposé aujourd'hui, la réserve fonctionnerait intégralement selon des règles prédéfinies qui ne laisseraient aucun pouvoir d’appréciation à la Commission ni aux États membres en ce qui concerne sa mise en œuvre.

e. Une énergie compétitive, abordable et sûre

La Commission propose une série d'indicateurs clés permettant d’évaluer les progrès réalisés au fil du temps et de fournir une base factuelle qui servirait, le cas échéant, à mettre au point une réponse stratégique. Ces indicateurs ont trait par exemple aux écarts de prix de l’énergie par rapport aux principaux partenaires commerciaux, à la diversification de l’approvisionnement énergétique et au recours à des sources d’énergie autochtones, ainsi qu'à la capacité d’interconnexion entre les États membres. Grâce à ces indicateurs, les politiques garantiront à l'horizon 2030 un système énergétique compétitif et sûr qui continuera à s'appuyer sur l'intégration du marché, la diversification de l'approvisionnement, une concurrence accrue, le développement des sources d'énergie autochtones, ainsi que sur un soutien à la recherche, au développement et à l'innovation.

f. Un nouveau système de gouvernance

Le cadre pour 2030 propose un nouveau cadre de gouvernance basé sur des plans nationaux pour une énergie compétitive, sûre et durable. Fondés sur les prochaines orientations de la Commission, ces plans seront établis par les États membres dans le cadre d’une approche commune, qui garantira aux investisseurs une meilleure sécurité juridique et une plus grande transparence et renforcera la cohérence, ainsi que la coordination au sein de l'Union européenne et la surveillance. Un processus itératif entre la Commission et les États membres garantira d'une part que les plans sont suffisamment ambitieux et d'autre part qu'ils restent cohérents et conformes au fil du temps.

La communication fixant le cadre pour 2030 s'accompagne d'un rapport sur les prix et les coûts de l'énergie, qui évalue les facteurs clés et compare les prix de l’Union européenne avec ceux de ses principaux partenaires commerciaux. Les prix de l’énergie ont augmenté dans presque tous les États membres depuis 2008, essentiellement en raison des impôts et des prélèvements, mais également du fait de la hausse des coûts de réseau. La comparaison avec les partenaires internationaux met en évidence une augmentation des écarts de prix, notamment par rapport aux cours du gaz aux États-Unis – qui pourrait nuire à la compétitivité de l’Europe, en particulier pour les industries grandes consommatrices d'énergie. Néanmoins, la hausse des prix de l’énergie peut être en partie compensée par des politiques énergétiques et climatiques efficaces sur le plan des coûts, des marchés de l'énergie concurrentiels et des mesures d’amélioration de l'efficacité énergétique, telles que le recours à des produits plus économes en énergie. Il faudra peut-être que les efforts de l'industrie européenne en matière d'efficacité énergétique aillent encore plus loin, compte tenu des limites physiques, étant donné que les concurrents font la même chose et que l’industrie européenne décide d’investir à l’étranger pour se rapprocher des marchés en expansion. Ces éléments sont pris en compte dans le cadre pour 2030.

4. Les effets de cette annonce européenne

L’annonce européenne, qu’on aurait pu rêver plus ambitieuse, a eu un effet très positif vis-à-vis des partenaires. L’Union européenne a été la première à afficher un chiffre ambitieux de réduction des émissions. Malgré la récession qui l’affecte, l’Europe affirme ainsi sa croyance dans une économie sobre en carbone. Le travail de mise en œuvre de ce paquet européen est très important, et celle-ci est conditionnée à la conclusion d’un accord international en 2015.

En tout état de cause, l’Europe a montré qu’elle considère unilatéralement que la transition écologique est bonne pour elle et, en même temps, elle a envoyé un signal très positif à tous les pays qui doutent encore.

5. Les objectifs climat-énergie de l’Union européenne pour 2030 : un compromis (nécessaire ?) sur la trajectoire de 2050 (31)

Suite à la publication de la Commission européenne de son paquet climat-énergie 2030 le 22 janvier 2014, les premières observations ont révélé de nettes différences avec le paquet 2020 quant à l’ambition et la nature des mesures. Le paquet climat-énergie 2020 était une proposition politique ambitieuse afin de mettre en place une trajectoire de décarbonisation pour l’Union européenne. Le paquet actuel constitue davantage un accord « économique » essayant d’établir un consensus entre des intérêts très divers. La Commission européenne ne précise pas la feuille de route exacte des États membres, contrairement à ce qu’elle avait fait dans le paquet climat-énergie 2020. Désormais, elle s’assurera simplement que tous les pays membres sont « sur la bonne voie », ce qui offrira plus de souplesse.

Le nouveau paquet climat-énergie apporte trois principaux éléments : deux nouveaux objectifs contraignants, une nouvelle structure de gouvernance et de nouveaux paramètres du SEQE.

Premièrement, le paquet propose un objectif de 40 % de réduction des émissions de GES au-dessous de leurs niveaux de 1990 d’ici à 2030, ce qui est un bon point de départ. Doubler le plafond de 2020 est le minimum nécessaire pour atteindre les objectifs en 2050. Cependant, l’Union européenne s’est fixée un objectif climatique domestique : plus de crédits internationaux, sauf en cas d’accord international sur le climat.

Deuxièmement, la Commission propose que les énergies renouvelables représentent au moins 27 % de la consommation énergétique au niveau de l’Union européenne par rapport aux niveaux de 1990. Cependant, aucun objectif n’est établi par État membre. Cette décision vise probablement à considérer les pays comme l’Allemagne, qui ont beaucoup investi dans les technologies de production d’énergie renouvelable, la Pologne et le Royaume-Uni, qui souhaitent étudier d’autres possibilités, telles que l’énergie nucléaire et le gaz de schiste.

Enfin, aucun objectif d’efficacité énergétique explicite n’a été avancé, dans l’attente du réexamen de la directive sur l’efficacité énergétique mi-2014.

Concernant la gouvernance, la Commission européenne se donne le rôle de superviser la politique climat/énergie des États membres sans que des objectifs nationaux ne soient définis, leurs donnant de la flexibilité. En complément des plans énergétiques nationaux, la Commission européenne a annoncé le développement d’indicateurs de suivi du système énergétique, tels que l’écart de prix des énergies entre l’Union européenne et ses grands partenaires commerciaux pour garder un œil sur l’évolution des marchés internationaux de l’énergie.

Le SEQE reste clairement l’instrument majeur pour atteindre l’objectif de GES après 2020 : d’après la Commission, les secteurs du SEQE devront réduire leurs émissions de 43 % par rapport à leurs niveaux de 2005, contre 30 % pour les secteurs hors SEQE. Le SEQE s’établira sur des paramètres révisés, tel qu’un nouveau facteur linéaire de 2,2 %, aucun crédit Kyoto et un nouveau mécanisme de réserve de stabilité du marché. Toutefois, la proposition de réserve de stabilité du marché suscite beaucoup d’incertitude : la modélisation des effets potentiels de ce mécanisme sur le prix du carbone est à considérer avec précaution. Il faut veiller à ce que cette réserve n’entraîne pas de coûts supplémentaires en raison de cette incertitude.

Alors que la communication est la bienvenue pour donner une certaine visibilité sur le futur cadre réglementaire aux investisseurs, le choix politique d’un objectif pour le développement des énergies renouvelables soulève deux questions en matière de gouvernance et de prix du carbone. Premièrement, selon l’étude d’impact de la Commission européenne, l’atteinte de l’objectif de 40 % de réduction des GES impliquerait automatiquement une part des énergies renouvelables de 27 % d’ici 2030. Alors, quel est l’intérêt de définir un objectif ENR si la Commission européenne estime qu’il sera de toute façon atteint par l’objectif de GES ?

Par ailleurs, la Commission européenne laisse aux États membres le soin de définir leurs objectifs et politiques d’énergies renouvelables et examinera leurs plans s’ils sont jugés insuffisants. Comment ces « ambitions » nationales seront coordonnées ? Deuxièmement, selon l’étude d’impact, un objectif d’énergies renouvelables supérieur à 30 % conduirait à une baisse significative du prix du carbone. Si le SEQE est l’instrument central de la politique climatique, quels seront les effets sur les coûts et les options de réduction si le développement des ENR est supérieur à l’objectif de 27 % – même avec une réserve de stabilité de marché dans le SEQE ?

C. UN MAUVAIS SIGNAL : LA BAISSE DU FINANCEMENT DES INVESTISSEMENTS EN MATIÈRE DE CAPTAGE ET DE STOCKAGE GÉOLOGIQUE DU CO2 ET DE TECHNOLOGIES INNOVANTES LIÉES AUX ÉNERGIES RENOUVELABLES

Une décision de la Commission européenne du 29 octobre 2014 (32) met à mal le mécanisme visant à inciter les États membres et le secteur privé à réaliser les investissements nécessaires à la construction et à l’exploitation, d’ici à 2015, d’un maximum de douze installations de démonstration de captage et stockage de carbone (CSC), ainsi que sur le financement pour la mise en œuvre du plan stratégique européen pour les technologies énergétiques (plan SET) qui avait pourtant fait l’objet d’une communication de la Commission européenne le 7 octobre 2009, intitulée « Investir dans le développement des technologies à faible intensité carbonique».

Laconiquement, la Commission européenne indique qu’« en raison de la crise économique, il ne sera pas possible, pour un nombre significatif de projets faisant l'objet d'une décision d'attribution au titre de la décision 2010/670/UE, de parvenir à une décision d’investissement définitive dans les 24 mois suivant l’adoption de la décision d’attribution, dans le cas des projets de démonstration de technologies innovantes liées aux énergies renouvelables (SER), ou dans les 36 mois suivant l’adoption de la décision d’attribution, dans le cas des projets de démonstration axés sur le captage et le stockage géologique du CO2 (CSC).

Il ne sera donc pas non plus possible de lancer la mise en œuvre de ces projets dans un délai de quatre ans à compter de l’adoption de la décision d’attribution. Il convient dès lors que les délais d'adoption de la décision d'investissement définitive et de début de mise en œuvre soient reportés de deux ans. Il convient également de prévoir un délai de grâce d'une année en ce qui concerne la date de mise en œuvre. »

Cette décision revient ainsi sur la décision de la Commission européenne du 3 novembre 2010 établissant les critères et les mesures pour le financement de projets commerciaux de démonstration axés sur le captage et le stockage géologique du CO2 sans danger pour l’environnement, ainsi que de projets de démonstration de technologies innovantes liées aux énergies renouvelables, dans le cadre du système d’échange de quotas d’émission de gaz à effet de serre dans la Communauté établi par la directive 2003/87/CE du Parlement européen et du Conseil.

Cette précédente décision établissait les règles et critères pour :

- la sélection des projets de démonstration commerciale axés sur le captage et le stockage géologique du CO2, dans des conditions de sûreté pour l’environnement (ci-après « projets de démonstration CSC ») et des projets de démonstration de technologies innovantes liées aux énergies renouvelables (« projets de démonstration SER ») visés à la directive 2003/87/CE ;

- la monétisation des quotas visés à la directive 2003/87/CE pour soutenir des projets de démonstration CSC et SER, et la gestion des recettes y afférentes ;

- le versement des recettes et la mise en œuvre de projets de démonstration CSC et SER.

Elle couvrait 300 millions de quotas de la réserve pour les nouveaux entrants du système d’échange de quotas d’émission de l’Union, ainsi que les règles de base régissant la monétisation des quotas et la gestion des recettes qui en découlent.

Il faut préciser que les financements accordés en application de cette décision ne font pas partie du budget général de l’Union européenne et peuvent donc s’ajouter à des financements provenant d’autres instruments, notamment des Fonds structurels et du Fonds de cohésion, ainsi que du programme énergétique européen pour la relance (PEER). Ils peuvent également être combinés avec des prêts accordés dans le cadre du mécanisme de financement du partage des risques (MFPR) créé par l’Union et la Banque européenne d’investissement (BEI).

Le premier appel de propositions, suite auquel la commission européenne devait ensuite décider des décisions d’attribution destinées aux États membres concernés - et précisant le montant des financements attribués aux projets correspondants - était initialement fixé au 31 décembre 2015 au plus tard, sauf si la décision d’attribution était adoptée après le 31 décembre 2011, auquel cas le début de mise en œuvre ne pourrait avoir lieu plus de quatre ans après la date de la décision d’attribution.

La date limite est désormais reportée au 31 décembre 2017, et le début de mise en œuvre en cas de décision d’attribution tardive à un maximum de six ans (au lieu de quatre) après la décision d’attribution.

Les décisions d’attribution étaient par ailleurs subordonnées à l’adoption, par les promoteurs des projets, des décisions d’investissement définitives, dans un délai de vingt-quatre mois à compter de l’adoption des décisions d’attribution. Ce délai est porté à quarante-huit mois.

De même, d’adoption, par les promoteurs des projets, des décisions d’investissement définitives, dans un délai de trente-six mois à compter de l’adoption des décisions d’attribution est porté à 60 mois.

En outre, la nouvelle décision stipule que « si la mise en œuvre du projet n'a pas commencé à la date de début de mise en œuvre fixée pour ce projet, cette date est automatiquement reportée d’un an. Les décisions d’attribution cessent de produire tout effet juridique si la mise en œuvre du projet n’a pas commencé à la date de début de mise œuvre applicable en vertu du troisième alinéa. Dans ce cas, tout financement versé ou reçu aux fins d’un versement est restitué.

La présente décision s’applique également aux projets de démonstration du CSC et SER pour lesquels une décision d’attribution a été adoptée avant l’entrée en vigueur de la présente décision. »

La Commission européenne s’appuie donc sur la crise économique pour restreindre les financements des investissements en matière de captage et de stockage géologique du CO2 et de technologies innovantes liées aux énergies renouvelables.

Non seulement il s’agit d’un mauvais signal tendant à démontrer que la lutte contre le réchauffement climatique n’est pas une priorité, mais cette décision ignore l’importance et l’urgence de progresser en matière de stockage de CO2.

Or, le captage et le stockage du carbone (CSC) est une nouvelle technologie susceptible d’apporter une contribution importante à la lutte contre le changement climatique. Comme pour toutes les nouvelles technologies, il est essentiel de bien prendre en considération ses effets potentiels sur l’environnement et la santé humaine.

En 2009, l’Union européenne a adopté une législation (33) visant à garantir que la technologie CSC peut être utilisée en toute sécurité et, dans la mesure du possible, à prévenir et supprimer tout risque pour l’environnement et la santé humaine.

La technologie CSC consiste à capter1le dioxyde de carbone (CO2) émis par les centrales électriques ou les installations industrielles, à le transporter vers des sites désignés et à l’injecter dans des formations géologiques dont il ne peut plus s’échapper. Des formations géologiques appropriées peuvent être trouvées en mer ou sur terre, par exemple dans des champs de pétrole ou de gaz épuisés ou dans des aquifères salins, parfois à une profondeur de plusieurs kilomètres sous le niveau de la mer ou du sol.

L’Europe se positionne clairement comme l’un des chefs de file mondiaux dans le développement de la technologie CSC. Les procédés en tant que tels (captage, transport et stockage) n’ont rien de nouveau. Le premier projet de démonstration de captage et de stockage du CO2 a vu le jour en 1996, dans le champ gazier norvégien de Sleipner. Les États-Unis et le Canada comptent des milliers de kilomètres de conduites de CO2.

Le principal défi consiste à intégrer le captage, le transport et le stockage dans un cycle complet pouvant être appliqué à l’échelle commerciale dans des centrales électriques ou des installations industrielles. C’est dans cette optique qu’ont été élaborés les programmes de démonstration cofinancés par l’Union européenne.

La directive CSC a ainsi été adoptée dans le cadre d’un paquet de mesures dans le domaine de l’énergie et du climat visant à réduire les émissions de gaz à effet de serre responsables du réchauffement planétaire, à renforcer la sécurité énergétique et à favoriser la transition vers une économie sobre en carbone.

L’Union européenne souhaitait que la technologie CSC devienne commercialement viable et puisse réaliser pleinement son potentiel en tant que technologie clé pour réduire les émissions de CO2 dans l’UE et dans le monde.

L'Agence internationale de l'énergie (AIE) plaide quant-à-elle de longue date pour un développement massif du captage et du stockage de CO2, qu’elle considère comme une technologie « essentielle pour des réductions importantes d'émissions ».

Selon elle, non seulement les capacités de stockage dans le monde sont suffisantes pour des centaines d'années d'émissions de CO2, mais se passer du captage et du stockage du CO2 signifierait que les coûts des réductions d'émission nécessaires pour atteindre les objectifs du GIEC augmenteraient de 70 %. Au niveau mondial, il serait donc nécessaire d'atteindre les 10.000 sites de stockage à l'horizon 2050.

CONCLUSION

Tous les pays doivent agir rapidement face aux changements climatiques et faire tous les efforts nécessaires pour arriver à un accord mondial contraignant et ambitieux sur le climat en 2015.

Les faits scientifiques les plus récents montrent au-delà de tout doute que les changements climatiques sont la conséquence des activités humaines ; mais le temps presse si l’on veut limiter la hausse des températures mondiales à deux degrés ou moins. Pour y arriver, il est indispensable de prendre et de coordonner le plus rapidement possible toutes les mesures nécessaires et ce, à tous les niveaux : international, national, entreprises, milieux financiers.

La voie tracée par les experts du GIEC est étroite. Limiter d'ici à la fin du siècle la concentration des gaz à effet de serre dans l'atmosphère à 450 parties par million (ppm) – valeur associée par les scientifiques à un réchauffement de 2° C – suppose de réduire les émissions mondiales entre 40 % et 70 % d'ici à 2050 et de les ramener à un niveau « proche de zéro » d'ici à la fin du siècle.

Certes, le dernier rapport du GIEC ne cache pas les difficultés des défis à relever, mais il montre aussi qu'il existe un espoir, même s'il est modeste. D'après les experts en effet, il serait possible, grâce à toute une gamme de mesures techniques et de changements de comportement, de limiter la hausse de la température mondiale à 2°C au-dessus des niveaux préindustriels. Toutefois, ce n'est que grâce à des bouleversements institutionnels et technologiques majeurs qu'il y aura plus d'une chance sur deux pour que le réchauffement mondial ne dépasse pas ce seuil.

À la fin de 2015, à Paris, la conférence annuelle sur le climat devra décrocher un accord suffisamment ambitieux pour limiter le réchauffement à 2 °C.

Le fait que les États-Unis et la Chine, traditionnellement considérés comme les leaders de deux camps opposés dans les négociations sur le climat, avancent désormais ensemble, devrait y aider.

En 2015, tous les pays devront en effet s’engager sur des objectifs de réduction de leurs émissions, différenciés selon les capacités nationales, et compatibles avec l’objectif global d’augmentation maximale de la température terrestre de deux degrés en 2100 par rapport à l’ère préindustrielle.

La capacité d’entraînement de l’Union européenne sera de ce point de vue essentielle. Pour obtenir des engagements volontaires des différents pays, les négociations entre l’Union européenne et les deux principaux émetteurs que sont la Chine et les États-Unis seront cruciales.

Il faudra de plus prévoir des révisions régulières des engagements des différents pays et tenir compte, dans le chiffrage, du dérapage prévisible dans le futur des émissions d’un certain nombre de pays qui seront confrontés à de fortes difficultés économiques, qui n’arriveront pas à réduire leurs émissions ou dont les gouvernements, à un moment donné, ne croiront pas en la nécessité de lutter contre le changement climatique ou, par pur égoïsme ne voudront pas s’y lancer, se comportant ainsi en véritables passagers clandestins, bénéficiant de l’effort commun sans y participer.

Il faudra également répondre aux préoccupations exprimées par les pays en développement en particulier, qui souhaitent un engagement sur une trajectoire permettant une capitalisation annuelle de 100 milliards d’euros du Fonds vert destiné à financer leurs investissements en faveur du climat.

L’adaptation, c’est-à-dire de la gestion préventive des conséquences du changement climatique, auxquelles certains de ces pays sont particulièrement exposés, constitue également une attente forte.

Cependant, il ne faut pas oublier que la conférence de 2015 n’apportera pas de solution définitive. Il faut également aspirer à ce que les États proposent d’ici à 2020 de nouveaux objectifs à plus long terme.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

La Commission s’est réunie le 25 novembre 2014, sous la présidence de Mme Danielle Auroi, Présidente, pour examiner le présent rapport d’information.

L’exposé des rapporteurs a été suivi d’un débat.

M. Marc Laffineur. Que se passe-t-il si un pays ne respecte pas ses engagements ?

L’accord Chine/États-Unis va dans le bon sens, mais qu’en est-il de l’Inde, du Canada et de l’Afrique ?

En Allemagne, il y a un débat contradictoire sur les centrales au charbon : certains veulent en fermer, et d’autres non.

M. Philip Cordery. Quelles sont les perspectives pour la Conférence de Paris ? Les attentes sont grandes et il y a urgence.

Vous avez évoqué l’accord entre les États-Unis et la Chine, mais l’ambition est moindre. Quel rôle joueront la France et l’Union européenne à paris en 2015 ?

M. Jérôme Lambert, co-rapporteur. S’agissant de la question du respect des engagements, avant qu’il y ait une sanction, il s’agit déjà de contrôler. Si les États-Unis et la Chine n’ont pas été signataires d’un accord jusqu’à présent, c’est notamment en raison du rejet de l’idée même d’un contrôle.

Ensuite, si le contrôle démontre que les engagements n’ont pas été tenus, quelles sanctions appliquer ? Pour le moment, il n’existe aucune possibilité d’envisager des sanctions internationales. On peut simplement espérer un accord sur ce sujet majeur.

M. Bernard Deflesselles, co-rapporteur. L’objectif de la Conférence de Paris est d’emporter l’ensemble de la communauté internationale dans un accord, si possible juridiquement contraignant. Pour mémoire, seul un tiers de pays s’était engagé sur le Protocole de Kyoto. Ensuite, la nature juridique de l’accord reste à déterminer.

Comment contrôlera-t-on les engagements de chacun ? Certes, tout le monde a une feuille de route pour réduire ses émissions de CO2, mais lorsque l’on coordonne le tout, on réalise que l’on se situe très largement au-dessus des deux degrés Celsius ! Les feuilles de route des différents pays devront en tout état de cause être connues au printemps 2015, et être validées.

Pour mémoire, les émissions de CO2 de l’Inde sont de 1,5 tonnes par habitant, celles des États-Unis de 16 à 17 tonnes par habitant et celles de la Chine de 7 tonnes par habitant, à multiplier par 1 350 millions d’habitants. Ces deux derniers pays représentent 42 % des émissions mondiales. En France, les émissions sont de 5,5 tonnes par habitants.

L’Union européenne ne doit pas être la seule à faire des efforts. L’accord entre les États-Unis et la Chine a été qualifié d’historique par la presse, mais il ne l’est pas. En quinze ans, les émissions de CO2 ont très fortement augmenté et seule l’Union européenne est vertueuse, dans la mesure où elle prend l’année 1990 comme référence. En choisissant l’année 2005 comme référence, les États-Unis ne réalisent en fait que moins de 10 % de réduction de leurs émissions, tandis que la Chine en réalise zéro puisqu’elle s’est simplement engagée à stabiliser son pic en 2030, et à partir de 2030 seulement elle pourra décroître.

M. Arnaud Leroy, co-rapporteur. Deux éléments sont importants :

- on fabrique en marchant. Il y aura notamment des sanctions commerciales, on y travaille ;

- 2015 sera malgré tout un point d’étape. Si la Conférence de Paris ne marche pas, ce sera la fin de cette façon d’élaborer la norme avec la COP et on entrera dans une zone de turbulence assez longue.

La Conférence de Paris devrait également permettre de dépasser la distinction entre pays développés et pays en développement, qui subsistait avec les annexes de Kyoto et qui n’a plus grand sens. Ce classement de 1997, lui-même issu de 1992, commence à dater. La Conférence de 2015 devrait permettre d’aborder ce système des annexes subtilement, pour aligner la responsabilité de tout le monde.

Enfin, la COP de 2015 sera un point d’étape pour la convention qui débutera en 2020. Il restera cinq ans pour se doter des différents outils, tels que les sanctions, etc. Il faudra donc utiliser cette tranche de temps allant de 2015 à 2020 pour agir, travailler sur les outils qui devront être en place pour fonctionner à partir de 2020, et prendre conscience de l’urgence.

ANNEXES

ANNEXE N° 1 :
LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LES RAPPORTEURS

Les rapporteurs tiennent à témoigner leur gratitude à l’ensemble des personnalités avec lesquelles ils se sont entretenus dans le cadre de la préparation de ce rapport d’information.

À PARIS :

- Mme Marie-Hélène AUBERT, Conseillère pour les négociations internationales, Climat et Environnement, Cellule diplomatique Présidence de la République ;

M. Arnaud BUISSÉ, Sous-directeur « Affaires financières multilatérales et développement », Service des affaires multilatérales et de développement, Direction générale du trésor, Ministère de l'économie et des finances ;

- Mme Doriane HUBER, Bureau « Politiques Sectorielles », en charge de l’environnement et de l’agriculture, Direction générale du trésor, Ministère de l'économie et des finances ;

- M. Frédéric GLANOIS, Chef du bureau « Aide au développement et institutions multilatérales de développement », Direction générale du trésor, Ministère de l'économie et des finances ;

- M. Pierre Henri GUIGNARD, Secrétaire général chargé de la préparation et de l'organisation de la 21e Conférence des Parties (CoP) à la Convention Cadre des Nations unies sur le Changement Climatique ;

- M. Jean JOUZEL, Vice-président du groupe scientifique du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC) ;

- M. Paul WATKINSON, chargé de la coordination des négociations internationales au Ministère de l’Écologie, du développement durable et de l’énergie.

À BUCAREST :

- Mme Liliana BARA, Directrice de la Direction Affaires européennes (Ministère de l’Environnement) ;

- M. Mihnea CONSTANTINESCU, conseiller énergie et climat du Premier ministre roumain ;

- M. Thierry DAVY, Senior Climate Change Specialist Europe and Central Asia Region (Banque mondiale) ;

- M. Narcis JELER, Conseiller affaires européennes au sein de la Direction Changements Climatiques (Ministère de l’Environnement) ;

- Mme Iulia MATEI, Directrice générale adjointe affaires européennes (Ministère des Affaires étrangères).

À BUDAPEST :

- M Gábor BARANYAI, Secrétaire d'État adjoint à la politique sectorielle européenne ;

- M. Zsolt BODA Chercheur à l’Académie hongroise des Sciences, professeur en sciences politiques ;

- M. Tibor FARAGÓ, professeur, ancien Secrétaire d’Etat responsable des politiques environnementales et climatiques, ancien négociateur climat de 1991 à 2010 ;

- M. Roland GALHARAGUE, Ambassadeur de France à Budapest ;

- M. Miklós GYALAI-KORPOS, Directeur du programme climat auprès du « Climate KIC » ;

- M. Ákos LUKÁCS, négociateur climat pour la Hongrie auprès du Ministère du Développement National ;

- M. Benedek SALLAI, Président de la Commission du Développement durable ;

- Mme Timea SZABÓ, députée, co-présidente du parti politique « Dialogue pour la Hongrie ».

À PRAGUE :

- M. Jean-Pierre ASVAZADOURIAN, Ambassadeur de France à Prague ;

- M. Peter J. KALAŠ, Conseiller en chef du Ministre de l’environnement ;

- Mme Zuzana KREJCIRIKOVA, directrice des relations publiques de CEZ ;

- M. le professeur Bedrich MOLDAN, directeur du Centre environnemental de l’Université Charles ;

- M. Vladimír ŠPIDLA, conseiller du Premier ministre ;

- Mme Klára SUTLOVIČOVÁ, Climate Campaigner de Greenpeace RT ;

- M. Martin TESARIK, vice-président de la commission de l’administration publique, du développement régional et de l’environnement du Sénat de la RT ;

- Mme Barbora URBANOVA, coordinatrice de l'ONG Coalition pour le Climat ;

- M. Lukáš VACÍK, département de l’Union européenne du Sénat ;

- M. Milos VYSTRCIL, membre de la commission de l’administration publique, du développement régional et de l’environnement du Sénat de la RT ;

- M. Pavel ZAMYSLICKY, directeur du département de l’énergie et de la protection du climat.

À ROME :

- M. LA CAMERA, Directeur général du climat et de l’énergie au Ministère de l’environnement ;

- M. Andrea BARBABELLA, responsable énergie à la fondation ;

- Mme Catherine COLONNA, Ambassadrice de France à Rome ;

- M. Antonio FEDERICO, Président du comité scientifique de la Fundazione per lo Sviluppo sostenibile ;

- M. Ermete REALACCI, Commission Environnement à la Chambre des députés.

À SOFIA :

- M. Ramadan ATALAÏ, président de la commission énergie du Parlement ;

- M. Ivan AYOLOV, vice-ministre de l’économie et de l’énergie ;

- M. Dimitar BRANKOV, vice-président de la chambre de commerce bulgare ;

- M. Konstantin DELISIVKOV, directeur exécutif de la fédération bulgare des consommateurs industriels d’énergie ;

- Mme Diana ISKREVA de l’ONG « Earth Forever » ;

- M. Xavier LAPEYRE DE CABANES, Ambassadeur de France à Sofia ;

- Mme Iskra MIHAÏLOVA, ministre de l’environnement et des eaux ;

- M. Djevdet TCHAKAROV, membre de la commission affaires européennes du Parlement (et ancien ministre de l’environnement) ;

- M. Todor TODOROV de l’ONG « Pour la Terre » ;

- M. Kristian VIGUENINE, ministre des affaires étrangères ;

- M. Martin VLADIMIROV, du programme économie et énergie de l’institut pour l’étude de la démocratie.

ANNEXE N° 2 :
LES CONCLUSIONS DU CONSEIL EUROPÉEN DES 23 ET 24 OCTOBRE 2014, DANS LE DOMAINE DU CHANGEMENT CLIMATIQUE

Dans ses conclusions, le Conseil européen des 23 et 24 octobre 2014 a souligné que des progrès substantiels ont été accomplis dans la réalisation des objectifs de l'Union européenne relatifs à la réduction des émissions de gaz à effet de serre, aux énergies renouvelables et à l'efficacité énergétique, qui doivent être pleinement atteints d'ici 2020.

Sur la base des principes énoncés dans les conclusions de sa réunion de mars 2014, le Conseil européen est parvenu à un accord sur le cadre d'action de l'Union européenne en matière de climat et d'énergie à l'horizon 2030. L'Union européenne présentera donc sa contribution au plus tard avant la fin du premier trimestre de 2015, respectant ainsi le calendrier que les parties à la convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques ont arrêté à Varsovie en vue de la conclusion d'un accord global sur le climat. Le Conseil européen engage tous les pays à présenter des politiques et des objectifs ambitieux bien avant la 21ème conférence des parties, qui se tiendra à Paris.

L’OBJECTIF DE RÉDUCTION DES ÉMISSIONS DE GAZ À EFFET DE SERRE

Le Conseil européen a approuvé un objectif contraignant consistant à réduire les émissions de gaz à effet de serre dans l'Union européenne d'au moins 40 % d'ici 2030 par rapport aux niveaux de 1990. À cette fin :

- l'objectif sera atteint collectivement par l'Union européenne, de la manière la plus efficace possible au regard des coûts, les réductions à opérer d'ici 2030 dans les secteurs relevant du système d'échange de quotas d'émission (SEQE) et dans les secteurs qui n'en relèvent pas s'élevant respectivement à 43 % et 30 % par rapport à 2005 ;

- tous les États membres participeront à cet effort, en conciliant équité et solidarité ;

-un système d'échange de quotas d'émission efficace et réformé, doté d'un instrument visant à stabiliser le marché, conformément à la proposition de la Commission, constituera le principal instrument de l'UE pour atteindre cet objectif ; le facteur annuel de réduction du plafond d'émissions maximales autorisées sera modifié, passant de 1,74 % à 2,2 % à partir de 2021 ;

- l'attribution gratuite de quotas ne sera pas supprimée : les mesures en vigueur seront maintenues après 2020 pour prévenir le risque de fuite de carbone lié à la politique en matière de changement climatique, tant qu'aucun effort comparable n'est entrepris par d'autres grandes économies, le but étant de fournir un niveau de soutien approprié aux secteurs exposés à un risque de perte de compétitivité internationale. Les valeurs de référence applicables aux attributions gratuites seront réexaminées périodiquement en fonction des évolutions technologiques dans les différents secteurs d'activité.

Tant les coûts directs que les coûts indirects du carbone seront pris en considération, dans le respect des règles de l'Union européenne en matière d'aides d'État, de manière à garantir des conditions de concurrence équitables. Afin de préserver la compétitivité internationale, les installations les plus efficaces dans ces secteurs ne devraient pas être exposées à des coûts du carbone excessifs entraînant une fuite de carbone. À l'avenir, les attributions garantiront une meilleure prise en compte des variations des niveaux de production dans différents secteurs. Dans le même temps, les mesures destinées à stimuler l'innovation dans l'industrie seront intégralement préservées et la complexité administrative ne sera pas augmentée. Il sera tenu compte de la nécessité de garantir une énergie à des prix abordables et d'éviter des bénéfices exceptionnels ;

- dans ce contexte, les États membres dont le PIB par habitant est inférieur à 60 % de la moyenne de l'Union européenne peuvent choisir de continuer d'accorder jusqu'en 2030 des quotas gratuits au secteur énergétique. Le montant maximal alloué à titre gracieux après 2020 ne devrait pas dépasser 40 % des quotas alloués, pour être mis aux enchères, aux États membres faisant usage de cette faculté. Les modalités actuelles, y compris la transparence, devraient être améliorées afin que les fonds soient utilisés pour favoriser des investissements réels propres à moderniser le secteur de l'énergie, tout en évitant de fausser le marché intérieur de l'énergie ;

- l'initiative NER300 existante sera reconduite, y compris pour le piégeage et le stockage du CO2 et les énergies renouvelables, et son champ d'application sera étendu aux innovations à faibles émissions de CO2 introduites dans des secteurs industriels, tandis que la dotation initiale sera portée à 400 millions de quotas d'émission (NER400). Les projets d'investissement de tous les États membres, y compris les projets de faible ampleur, pourront en bénéficier ;

- une nouvelle réserve de 2 % des quotas dans le cadre du SEQE sera constituée pour répondre à des besoins d'investissement complémentaires particulièrement importants d'États membres à faible revenu (PIB par habitant1 inférieur à 60 % de la moyenne de l'Union européenne). Ses caractéristiques seront les suivantes :

• les recettes provenant de la réserve seront utilisées pour améliorer l'efficacité énergétique et moderniser les systèmes énergétiques de ces États membres, afin que leurs citoyens aient accès à une énergie abordable, sûre et plus propre :

• l'utilisation des fonds se fera de manière totalement transparente ;

• les quotas de la réserve seront mis aux enchères selon les mêmes principes et modalités que les autres quotas ;

• la réserve servira à instituer un fonds qui sera géré par les États membres bénéficiaires, la BEI participant à la sélection des projets. Des arrangements simplifiés seront prévus pour les projets de faible ampleur. Jusqu'au 31 décembre 2030, la répartition des fonds se fera selon une formule combinant pour moitié les émissions vérifiées et pour moitié le critère du PIB, mais la base pour la sélection des projets sera réexaminée d'ici la fin de 2024 ;

- dans un souci de solidarité, de croissance et d'interconnexion, 10 % des quotas du SEQE à mettre aux enchères par les États membres seront répartis entre les pays dont le PIB par habitant ne dépassait pas 90 % de la moyenne de l'Union européenne (en 2013) ;

- le reste des quotas sera réparti entre tous les États membres sur la base des émissions vérifiées, sans que la part des quotas à mettre aux enchères ne soit réduite ;

- la méthode de fixation des objectifs de réduction nationaux pour les secteurs ne relevant pas du SEQE, laquelle comporte tous les éléments prévus dans la décision de répartition de l'effort pour 2020, continuera de s'appliquer jusqu'en 2030, cette répartition des efforts étant effectuée sur la base du PIB par habitant relatif. Tous les États membres contribueront à la réduction totale prévue pour l' l'Union européenne à l'horizon 2030, avec des objectifs allant de 0 % à -40 % par rapport à 2005 ;

- les objectifs des États membres dont le PIB par habitant est supérieur à la moyenne de l' l'Union européenne feront l'objet d'un ajustement relatif, pour tenir compte de l'efficacité au regard des coûts d'une manière équitable et équilibrée ;

- l'accès et le recours aux instruments de flexibilité qui existent dans les secteurs ne relevant pas du SEQE seront sensiblement renforcés afin d'assurer que l'effort collectif de l' l'Union européenne soit efficace au regard des coûts et qu'il y ait convergence des émissions par habitant d'ici 2030. Une nouvelle flexibilité dans la réalisation des objectifs - pour les États membres dont les objectifs nationaux de réduction sont nettement supérieurs à la fois à la moyenne de l' l'Union européenne et à leur potentiel de réduction des émissions réalisable dans des conditions présentant un bon rapport coût-efficacité, ainsi que pour les États membres qui ne bénéficiaient pas d'une attribution gratuite de quotas pour des installations industrielles en 2013 - sera instaurée grâce à un réduction limitée, non renouvelable, des quotas du SEQE, qui fera l'objet d'une décision avant 2020 ; cette flexibilité nouvelle préservera la prévisibilité et l'intégrité environnementale ;

- il importe de réduire les émissions de gaz à effet de serre et les risques liés à la dépendance à l'égard des combustibles fossiles dans le secteur des transports. Le Conseil européen invite dès lors la Commission à continuer d'étudier des instruments et des mesures en vue d'une approche globale et technologiquement neutre pour la promotion de la réduction des émissions et l'efficacité énergétique dans les transports, l'électrification des transports et le recours aux sources d'énergie renouvelables dans ce secteur, également après 2020. Le Conseil européen demande que soit rapidement adoptée la directive établissant des méthodes de calcul et des exigences en matière de rapports au titre de la directive 98/70/CE du Parlement européen et du Conseil concernant la qualité de l'essence et des carburants diesel. Par ailleurs, il rappelle qu'en vertu de la législation en vigueur, un État membre peut décider d'inclure le secteur des transports dans le cadre du SEQE ;

- il convient de prendre en considération les multiples objectifs du secteur de l'agriculture et de l'utilisation des terres, dont le potentiel d'atténuation est plus faible, ainsi que la nécessité d'assurer la cohérence des objectifs de l'UE en matière de sécurité alimentaire et de changement climatique. Le Conseil européen invite la Commission à examiner les meilleurs moyens d'encourager l'intensification durable de la production alimentaire, tout en optimisant la contribution du secteur à l'atténuation des émissions de gaz à effet de serre et au piégeage de ces gaz, y compris via le reboisement. Une stratégie sera mise en place, dès que les conditions techniques le permettront et en tout état de cause avant 2020, sur la manière d'intégrer l'utilisation des terres, le changement d'affectation des terres et la foresterie dans le cadre 2030 pour l'atténuation des émissions de gaz à effet de serre.

SOURCES D'ÉNERGIE RENOUVELABLES ET EFFICACITÉ ÉNERGÉTIQUE

Un objectif d'au moins 27 % est fixé au niveau de l' l'Union européenne en ce qui concerne la part des énergies renouvelables dans la consommation énergétique de l'Union européenne à l'horizon 2030. Cet objectif sera contraignant pour l'Union européenne. Il sera réalisé grâce à des contributions des États membres, guidés par la nécessité d'atteindre collectivement l'objectif de l'Union européenne, ce qui n'empêchera pas les États membres de fixer leurs propres objectifs nationaux plus ambitieux et de prendre des mesures à l'appui de ces objectifs, dans le respect des lignes directrices concernant les aides d'État, compte tenu également du degré d'intégration des États membres dans le marché intérieur de l'énergie. L'intégration de la part croissante des énergies renouvelables intermittentes exige un marché intérieur de l'énergie davantage interconnecté et des mesures d'appoint appropriées, une coordination devant être assurée en tant que de besoin au niveau régional.

Un objectif indicatif d'au moins 27 % est fixé au niveau de l'UE pour améliorer l'efficacité énergétique à l'horizon 2030 par rapport aux scénarios de consommation future d'énergie, sur la base des critères actuels. Cet objectif sera réalisé d'une manière efficace au regard des coûts et respectera pleinement l'efficacité du SEQE en termes de contribution aux objectifs généraux en matière de changement climatique. La question sera réexaminée d'ici 2020, dans l'optique d'un objectif de 30 % pour l'UE. La Commission proposera des secteurs prioritaires dans lesquels des gains d'efficacité énergétique importants peuvent être obtenus, ainsi que les moyens d'y parvenir à l'échelle de l'UE, l'UE et les États membres concentrant leurs efforts réglementaires et financiers sur ces secteurs.

Ces objectifs seront atteints dans le plein respect de la liberté des États membres de déterminer leur propre bouquet énergétique. Ils ne seront pas traduits en objectifs contraignants sur le plan national. Chaque État membre est libre de fixer des objectifs nationaux plus élevés.

MISE EN PLACE D'UN MARCHÉ INTÉRIEUR DE L'ÉNERGIE PLEINEMENT OPÉRATIONNEL ET CONNECTÉ

Le Conseil européen a pris acte de l'importance fondamentale que revêt un marché intérieur de l'énergie pleinement opérationnel et connecté. Rappelant les conclusions relatives à l'achèvement de ce marché qu'il a adoptées en mars 2014, le Conseil européen a souligné qu'il faut mobiliser tous les efforts pour atteindre d'urgence cet objectif. Les mesures destinées à prévenir des situations dans lesquelles des États membres disposeraient d'interconnexions insuffisantes avec les réseaux européens de gaz et d'électricité et à assurer la synchronisation des activités des États membres dans le cadre des réseaux continentaux européens, comme le prévoit la stratégie européenne pour la sécurité énergétique, resteront également prioritaires après 2020. À cet égard, le Conseil européen a décidé ce qui suit :

– la Commission européenne, avec l'appui des États membres, prendra des mesures urgentes dans le but d'atteindre l'objectif minimum de 10 % d'interconnexion électrique, ce de toute urgence, et au plus tard en 2020 au moins pour les États membres qui n'ont pas encore atteint un niveau minimum d'intégration dans le marché intérieur de l'énergie, à savoir les États baltes, le Portugal et l'Espagne, et pour les États membres qui constituent leur principal point d'accès au marché intérieur de l'énergie.

La Commission fera le bilan des progrès réalisés et présentera au Conseil européen un rapport sur toutes les sources de financement possibles, y compris sur les possibilités d'un financement de l'Union européenne afin de garantir la réalisation de l'objectif de 10 %. À cet égard, le Conseil européen invite la Commission à faire des propositions, y compris en matière de financement, dans les limites des instruments pertinents du CFP, si cela se justifie. Rappelant les conclusions des Conseils européens de mars et de juin, dans lesquelles était soulignée la nécessité de veiller à ce que tous les États membres participent pleinement au marché intérieur de l'énergie, la Commission fera en outre régulièrement rapport au Conseil européen, le but étant d'atteindre l'objectif de 15 % d'ici 2030, comme la Commission l'a proposé. Les deux objectifs seront atteints par la mise en œuvre de projets d'intérêt commun ;

- les États membres et la Commission faciliteront la mise en œuvre de projets d'intérêt commun, y compris des projets définis dans la stratégie européenne pour la sécurité énergétique en vue de connecter notamment les États baltes, l'Espagne et le Portugal au reste du marché intérieur de l'énergie, et feront en sorte que cet objectif figure au premier rang des priorités et soit atteint d'ici 2020. Les parties périphériques et/ou moins bien connectées du marché unique, telles que Malte, Chypre et la Grèce, feront l'objet d'une attention particulière. Dans ce contexte, le Conseil européen se félicite, estimant qu'il s'agit là d'un premier pas, de la récente stratégie commune des gestionnaires de réseaux de transport destinée à renforcer l'interconnexion de la péninsule Ibérique avec le marché intérieur de l'électricité, y compris par des projets concrets visant à accroître les capacités. Le Conseil européen demande la mise en œuvre de la stratégie et encourage les gestionnaires de réseaux de transport et les autorités de régulation à inclure les projets concernés dans les prochains plans décennaux de développement des réseaux ;

– s'il s'avère que la mise en œuvre de ces projets ne suffit pas à atteindre l'objectif de 10 %, de nouveaux projets seront définis, ajoutés en priorité lors du prochain réexamen de la liste de projets d'intérêt commun et mis en œuvre rapidement. Un cofinancement par l'Union européenne devrait être assuré pour ces projets. La Commission est invitée à présenter avant le Conseil européen de mars 2015 une communication sur les meilleures options permettant d'atteindre efficacement l'objectif précité.

SÉCURITÉ ÉNERGÉTIQUE

Rappelant ses conclusions de juin 2014, le Conseil européen a approuvé de nouvelles mesures visant à réduire la dépendance énergétique de l'Union européenne et à accroître sa sécurité énergétique, tant pour l'électricité que pour le gaz. La modération de la demande énergétique grâce à une efficacité énergétique accrue contribuera également à la réalisation de cet objectif. Le Conseil européen a pris acte du rapport de la présidence sur la sécurité énergétique1. Il s'est félicité du rapport de la Commission concernant des mesures immédiates visant à accroître la capacité de l'Union européenne à faire face à une éventuelle rupture majeure de l'approvisionnement au cours de l'hiver prochain. Ce rapport dresse un tableau complet de la solidité du système énergétique européen (tests de résistance). À cet égard, le Conseil européen a salué les contributions de tous les États membres, des principaux acteurs du domaine de l'énergie, ainsi que des pays voisins et des partenaires. Le Conseil européen a également estimé que la sécurité énergétique de l'Union européenne pouvait être accrue grâce au recours à des sources d'énergie autochtones et à des technologies sûres et durables à faibles émissions de CO2.

Le Conseil européen est convenu des points suivants :

– mettre en œuvre des projets d'intérêt commun cruciaux dans le secteur du gaz, tels que le corridor gazier Nord-Sud, le corridor gazier sud-européen et la promotion d'une nouvelle plateforme gazière dans le Sud de l'Europe, ainsi que les grands projets d'infrastructure améliorant la sécurité énergétique de la Finlande et des États baltes, afin d'assurer la diversification des fournisseurs d'énergie et des voies d'approvisionnement et le fonctionnement du marché ;

– améliorer les dispositifs visant à un meilleur usage des capacités de regazéification et de stockage dans le système gazier afin de mieux faire face aux situations d'urgence ;

– inviter la Commission à renforcer son soutien afin d'assurer une meilleure coordination des efforts visant à mener à bien les projets d'intérêt commun cruciaux et à élaborer des mesures ciblées telles que la fourniture d'avis techniques ou la mise en place, avec les États membres concernés, de groupes de travail multilatéraux portant sur des interconnecteurs spécifiques, afin de résoudre rapidement les problèmes de mise en œuvre ;

– rationaliser les procédures administratives nationales conformément aux orientations de la Commission et poursuivre la politique axée sur la protection des infrastructures énergétiques critiques, notamment contre les risques liés aux TIC ;

– afin d'améliorer la position de négociation de l'UE dans le domaine de l'énergie, tirer pleinement parti de la décision établissant un mécanisme d'échange d'informations en ce qui concerne les accords intergouvernementaux conclus entre des États membres et des pays tiers dans le domaine de l'énergie, en particulier en ce qui concerne les dispositions types et l'assistance de la Commission durant les négociations ;

– encourager les États membres et les entreprises concernées à transmettre les informations pertinentes à la Commission et à solliciter son soutien tout au long des négociations, y compris en ce qui concerne l'évaluation ex ante de la compatibilité des accords intergouvernementaux avec la législation de l'Union européenne et avec les priorités de cette dernière en matière de sécurité énergétique ;

– poursuivre le renforcement de la Communauté de l'énergie, qui vise à étendre l'acquis de l'Union européenne dans le domaine de l'énergie aux pays visés par l'élargissement et aux pays voisins, à la lumière des préoccupations de l'Union européenne liées à la sécurité de l'approvisionnement ;

– mettre à profit les instruments de politique étrangère dont disposent l'UE et ses États membres pour adresser des messages cohérents en matière de sécurité énergétique, en particulier aux partenaires stratégiques et aux grands fournisseurs d'énergie.

Le Conseil européen reviendra sur la question de la sécurité énergétique en 2015 afin d'évaluer les progrès réalisés.

GOUVERNANCE

Le Conseil européen est convenu qu'un système de gouvernance fiable et transparent, sans charges administratives superflues, sera mis au point pour contribuer à ce que l'Union européenne atteigne les objectifs de sa politique énergétique ; ce système de gouvernance, qui offrira la souplesse nécessaire aux États membres et respectera pleinement la liberté de ces derniers de déterminer leur propre bouquet énergétique, aura les caractéristiques suivantes :

- il s'appuiera sur les principaux éléments existants, tels que les programmes nationaux pour le climat et les plans nationaux pour les énergies renouvelables et l'efficacité énergétique. Les volets relatifs à la planification et à l'établissement de rapports, actuellement distincts, seront rationalisés et regroupés ;

- il renforcera le rôle et les droits des consommateurs ainsi que la transparence et la prévisibilité pour les investisseurs, notamment au moyen d'un suivi systématique d'indicateurs clés permettant de mettre en place un système énergétique abordable, fiable, compétitif, sûr et durable ;

- il facilitera la coordination des politiques énergétiques nationales et favorisera la coopération régionale entre États membres.

Le Conseil européen rappelle que, comme il l'a indiqué dans son programme stratégique, il a pour objectif de mettre en place une Union de l'énergie visant à assurer la disponibilité d'une énergie abordable, sûre et durable, objectif dont la réalisation fera l'objet d'un suivi régulier.

ANNEXE N° 3 :
LA RÉSOLUTION DU PARLEMENT EUROPÉEN SUR LA CONFÉRENCE SUR LE CHANGEMENT CLIMATIQUE À LIMA (PÉROU, COP 20)

A. Considérant que les changements climatiques représentent une menace imminente et potentiellement irréversible pour les sociétés humaines, la biodiversité et la planète, et qu'ils doivent donc faire l'objet d'un plan d'action international impliquant toutes les parties ;

B. considérant que, selon les données scientifiques présentées dans les rapports 2014 des groupes de travail du cinquième rapport d'évaluation du GIEC : le réchauffement du système climatique est indéniable ; des changements climatiques sont en train de se produire et l'activité humaine est la principale cause du réchauffement observé depuis le milieu du XXème siècle ; les nombreuses et importantes incidences du changement climatique sont déjà manifestes sur les systèmes humains et naturels, sur tous les continents et les océans ; le maintien des émissions de gaz à effet de serre accentuera le réchauffement et modifiera les terres, l'atmosphère et les océans dans toutes les régions du monde ; tous les pays seront touchés par les effets du changement climatique, quel que soit leur niveau de

Richesse ; les émissions de gaz à effet de serre dans le monde entre 2000 et 2010 ont été les plus importantes de toute l'histoire de l'humanité ; sans mesures d'atténuation ambitieuses prises à l'échelle planétaire pour réduire les émissions de gaz à effet de serre, la température moyenne est susceptible de croître de 5° C d'ici la fin du siècle ;

C. considérant que l'Union européenne a diminué ses émissions de 19 % entre 1990 et 2012 dans le cadre du protocole de Kyoto, alors que son PIB progressait de plus de 45 %, ce qui a divisé par deux l'intensité moyenne des émissions de gaz à effet de serre sur cette période et allégé de 25 % ses émissions par habitant, qui ont été ramenées à 9 teqCO2 (tous gaz et toutes sources d'émission confondus, à l'exception des puits) ;

Nécessité d'agir

1. rappelle qu'il faut, selon les résultats du GIEC, que les émissions mondiales de gaz à effet de serre cessent d'augmenter au plus tard en 2015, qu'elles soient réduites d'au moins 50 % par rapport à leur niveau de 1990 d'ici 2050 et qu'elles continuent de diminuer après cette date jusqu'à un niveau proche ou inférieur à zéro en 2100 pour qu'il reste possible de conserver l'élévation de la température moyenne mondiale en-deçà des 2°C par rapport aux niveaux pré-industriels ; souligne qu'il est impératif que tous les pays participent à cet effort et que des mesures dilatoires ne feront qu'accroître les coûts et réduire les possibilités ;

Avancement de la plate-forme de Durban

2. rappelle que toutes les parties ont adopté, à Varsovie, la décision 1/CP.19, qui les invite à entamer ou à intensifier les préparatifs des contributions qu'elles sont censées apporter et qui doivent être déterminées au niveau national, ainsi qu'à les communiquer bien avant la COP 20 (au premier trimestre de 2015 pour les parties disposées à le faire) de manière telle que les contributions soient claires, transparentes et suffisamment compréhensibles ;

3. souligne que les pays qui se sont déjà engagés à réduire les émissions pour l'ensemble de leur économie devraient intensifier leur action en diminuant encore leurs émissions, tandis que les autres, notamment ceux dont les responsabilités et les capacités sont les plus importantes, devraient également se fixer des objectifs pour l'ensemble de leur économie établissant des plafonds d'émission et réduisant l'intensité des gaz à effet de serre ;

Éléments de l'accord de 2015

4. est d'avis que la conférence de Lima devrait présenter les principaux éléments de l'accord de 2015, en s'appuyant sur les progrès accomplis tout au long de l'année 2014 au titre de la plate-forme de Durban, et rappelle que l'atténuation, l'adaptation et les moyens de mise en œuvre seront des éléments essentiels de cet accord ;

5. souligne la nécessité d'un mécanisme d'exécution efficace applicable à toutes les parties dans le cadre de l'accord de 2015 ; met en évidence que l'accord de 2015 doit créer les conditions propices à la transparence et à la mise en œuvre de la responsabilité et doit pour ce faire être assorti d'un système commun permettant de mesurer, de retracer et de vérifier la mise en œuvre des engagements de chacune des parties, en s'appuyant sur les enseignements tirés de la convention et du protocole de Kyoto ;

Objectifs avant 2020 et protocole de Kyoto

6. insiste plus particulièrement sur la nécessité de resserrer de toute urgence l'écart

considérable qui existe entre les conclusions des scientifiques et les engagements actuels des parties ; met en avant l'importance des autres mesures prises, au nombre desquelles l'efficacité énergétique, la réalisation d'économies d'énergie substantielles, le développement des énergies renouvelables et la réduction progressive des hydrofluorocarbures (HFC), pour contribuer à combler ce fossé colossal ;

7. se réjouit de ce que l'Union européenne et certains de ses États membres, ainsi que d'autres parties, se plient, lors de la conférence de Lima, à une évaluation multilatérale des progrès réalisés dans leurs engagements de réduction pour 2020, dans le cadre du processus d'évaluation et d'examen internationaux ; estime que cette transparence est nécessaire pour aider à comprendre les efforts communs et instaurer la confiance entre les Parties ;

Financement de la lutte contre le changement climatique

8. rappelle que l'Union européenne et ses États membres se sont engagés à amplifier la mobilisation de fonds en faveur de la lutte contre le changement climatique, de manière à concourir à l'engagement pris à Copenhague de réunir, chaque année, d'ici 2020, 100 milliards de dollars, et demande aux autres pays donateurs de participer à cet effort pour permettre de recueillir davantage de financements au profit de la lutte contre le changement climatique ;

Adaptation ; pertes et dommages

9. rappelle que si les pays pauvres ont le moins contribué à la hausse de gaz à effet de serre présents dans l'atmosphère, ce sont eux qui sont les plus vulnérables aux incidences du changement climatique et les moins aptes à s'y adapter ; demande que l'Union européenne œuvre à la mise en place d'accords en matière de financement de la lutte contre le changement climatique, de transfert de technologies et de renforcement des capacités ;

Secteur agricole

10. souligne que, selon les conclusions du GIEC, les secteurs agricoles sont les pans les plus exposés et les plus vulnérables de nos économies ; note qu'il importe que toutes les parties incluent dans leurs contributions nationales un volet sur les terres agricoles, constitué de données appropriées permettant de suivre, de retracer et de vérifier de manière quantifiable la réalisation de plusieurs objectifs corrélés (à savoir l'atténuation, la productivité et la résilience), ainsi que de principes généraux permettant de mener à terme la mise en place de règles de comptabilisation d'ici 2020 ;

Transport aérien et maritime international

11. rappelle que le transport maritime et le transport aérien sont des secteurs particulièrement importants pour la réduction globale des émissions de gaz à effet de serre et que des avancées rapides et une ambition forte sont nécessaires pour parvenir en temps voulu à des résultats satisfaisants, aussi bien au sein de l'Organisation maritime internationale (OMI) qu'au sein de l'Organisation de l'aviation civile internationale (OACI), à la mesure de l'ampleur et de l'urgence de l'enjeu climatique ;

Diplomatie en matière de climat

12. souligne, dans ce contexte, qu'il importe que l'Union européenne, en tant qu'acteur de premier plan, s'exprime d'une seule voix lors de cette conférence pour aider à la recherche d'un accord international, et qu'elle reste unie dans cette optique ;

HFC et protocole de Montréal

13. invite les parties à prendre exemple sur les mécanismes de vote et de prise de décision du protocole de Montréal, sur l'approche différente en matière de responsabilités, sur les mécanismes de mise en œuvre et de sanctions ainsi que sur le mécanisme de financement afin que ceux-ci soient éventuellement mis en place dans le cadre de la CCNUCC ; demande que l'Union européenne intensifie ses efforts en vue de la mise en place de PE537.364v02-00 8/8 RE\1035006FR.doc

1 () Rapport de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe du 10 décembre 2013 Commission des questions sociales, de la santé et du développement durable ; rapporteur: M. John PRESCOTT, Royaume-Uni, Groupe socialiste.

2 () Youba Sokona, vice-président du GIEC.

3 () Christian Gollier, Université Toulouse-I, coauteur du rapport du GIEC.

4 () Ottmar Edenhofer, vice-président du GIEC.

5 () « La tragédie du réchauffement climatique : Du cinquième rapport du GIEC à la conférence du Bourget 2015 » ; note du 7 mai 2014 de Dominique Auverlot, chef du département Développement durable au Commissariat général à la stratégie et à la prospective.

6 () CDC Climat Recherche ; N°86 Décembre 2013 ; Valentin Bellassen.

7 () Rapport de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe du 10 décembre 2013 ; Commission des questions sociales, de la santé et du développement durable ; rapporteur: M. John PRESCOTT, Royaume-Uni, Groupe socialiste.

8 () Jean Tirole

9 () « Le surplace de la négociation climatique mondial à 400 jours du Sommet climatique de Paris » ; Dominique Auverlot ; 17 novembre 2014.

10 () Todd Stern

11 () BRICS est un acronyme anglais pour désigner un groupe de cinq pays qui se réunissent en sommet annuels : Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud. Avant l'ajout de ce dernier pays en 2011, le groupe était appelé BRIC.

12 () Connie Hedegaard

13 () Ban Ki-moon

14 () Barack Obama

15 () Mitch McConnell

16 () Le sigle provient de l’anglais « mesurable, reportable et vérifiable », soit « measurement, reporting and verification » (MRV).

17 () La lettre de l’IDDRI ; novembre 2013 ; n°46.

18 () Laurence Tubiana

19 () Laurent Fabius

20 () Manuel Pulgar-Vidal

21 () « Retour du Sommet du Climat à New York : le prix du CO2, nécessaire mais non suffisant. » ; Émilie Alberola, Benoît Leguet et Romain Morel ; CDC Climat Recherche ; Octobre 2014 – N°95.

22 () Ban Ki-moon

23 () Jim Yong Kim

24 () Cf annexe II

25 () Cf annexe III

26 () Résolution du 6 novembre 2014 de la Commission : Environnement, santé publique et sécurité alimentaire.

27 () Giovanni La Via

28 () M. José Manuel Barroso

29 () M. Günther Oettinger

30 () Mme Connie Hedegaard

31 () Publication N°88 de CDC Climat Recherche ; Zuheir Desai et Émilie Alberola ; février 2014.

32 () Décision de la Commission du 29 octobre 2014 modifiant la décision 2010/670/UE en ce qui concerne la prolongation de certains délais prévus à l’article 9 et à l’article 11, paragraphe 1, de cette décision.

33 () Directive 2009/31/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 avril 2009 relative au stockage géologique du dioxyde de carbone et modifiant la directive 85/337/CEE du Conseil, les directives 2000/60/CE, 2001/80/CE, 2004/35/CE, 2006/12/CE et 2008/1/CE et le règlement (CE) n° 1013/2006 du Parlement européen et du Conseil.