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N° 2574

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 11 février 2015.

PROPOSITION DE LOI

visant à lutter contre les comportements irrespectueux
des valeurs fondamentales de la République à l’école,

(Renvoyé à la commission des affaires culturelles et de l’éducation, à défaut de constitution
d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par Mesdames et Messieurs

Éric CIOTTI, Philipe GOUJON, Guillaume LARRIVÉ, Philippe GOSSELIN, Jean-Pierre DECOOL, Alain MOYNE-BRESSAND, Franck GILARD, Annie GENEVARD, Véronique LOUWAGIE, Lucien DEGAUCHY, Denis JACQUAT, Michel HERBILLON, Valérie LACROUTE, Alain MARTY, Michel VOISIN, Lionnel LUCA, Camille de ROCCA SERRA, Marie-Louise FORT, Virginie DUBY-MULLER, Bernard REYNÈS, Sylvain BERRIOS, Jean-Jacques GUILLET, Laurent FURST, Patrick HETZEL, Marc-Philippe DAUBRESSE, David DOUILLET, Claude GOASGUEN, Étienne BLANC, Arlette GROSSKOST, Jacques Alain BÉNISTI, Jean-Claude MATHIS, Fernand SIRÉ, Jean-Pierre DOOR, Julien AUBERT, Paul SALEN, Valérie BOYER, Didier QUENTIN, Élie ABOUD, Jean-Claude GUIBAL, Édouard COURTIAL, Philippe COCHET, Patrice MARTIN-LALANDE, Bernard GÉRARD, Alain MARLEIX, Patrice VERCHÈRE, Guy GEOFFROY, Thierry MARIANI, Jean-Luc REITZER, Bérengère POLETTI, Daniel FASQUELLE, Marcel BONNOT, Luc CHATEL, Dominique DORD, Bernard PERRUT, Guy TEISSIER, Georges FENECH et Michel SORDI,

députés.


EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Lors de la minute de silence en hommage aux victimes des attentats terroristes, plus de 200 incidents dans les établissements scolaires auraient été signalés au ministère de l’éducation nationale.

Cette situation est inacceptable. Il est indispensable que le cadre scolaire soit le lieu privilégié au sein duquel les jeunes apprennent à respecter les valeurs fondamentales de la République.

La réaction de ces jeunes ne peut donc être ignorée car elle témoigne non seulement d’une défiance à l’égard des valeurs et des symboles de la République mais elle traduit également des failles majeures de l’autorité parentale. En outre, les actes de ces enfants reflètent parfois des propos et attitudes de leurs parents.

C’est pourquoi, la présente proposition de loi propose de rétablir le contrat de responsabilité parentale supprimé en janvier 2013 par le gouvernement. Ce contrat aura pour objectif de rappeler aux parents qu’il est de leur devoir d’exercer effectivement l’autorité parentale dont ils ne sauraient se désengager.

La proposition de loi instaure un dispositif contractuel équilibré et gradué d’accompagnement des parents d’enfants dont le comportement perturbateur aura été signalé par l’Éducation nationale au président du Conseil général en charge de la protection de l’enfance. Ce dispositif pourrait aller jusqu’à la suspension ou la suppression des allocations familiales en cas de refus manifestes et réitérés de la part des parents de faire respecter les valeurs de la République par leurs enfants.

Il convient de rappeler que le lien entre attribution de prestations familiales et exercice de l’autorité parentale représente un principe ancien et constant de notre droit. L’ordonnance du 6 janvier 1959 a notamment prévu un double mécanisme de sanctions pénales et administratives.

La loi du 31 mars 2006 relative à l’égalité des chances avait supprimé l’échelon de sanction administrative en mettant en place le contrat de responsabilité parentale (CRP), en vertu duquel le président du conseil général proposait une aide de ses services sociaux et pouvait en cas de démission des parents demander au directeur de la caisse d’allocations familiales (CAF) la suspension de tout ou partie des prestations familiales afférentes à l’enfant.

La suspension des allocations familiales doit être perçue comme une mesure de dissuasion pour faire prendre conscience aux parents de la gravité de la situation pour leur enfant et pour les inciter à transmettre à leurs enfants des valeurs respectueuses de la République.

Les parents sont les premiers éducateurs de leurs enfants et il s’agit de faire de la responsabilisation et de l’accompagnement des parents un élément clef de leur apprentissage de la vie en société et du respect des institutions de la République.

L’école et les enfants doivent être particulièrement protégés. La présente proposition de loi vise à assurer le respect des valeurs fondamentales de la République dans les lieux d’enseignement mais également à associer efficacement les parents dans l’apprentissage de ces valeurs à leurs enfants. Elle confère, en outre, aux responsables pédagogiques, aux enseignants et aux chefs d’établissements des outils pour intervenir effectivement. Elle positionne, enfin, le président du Conseil général dans son rôle de responsable des politiques de la protection de l’enfance, à l’échelle du département, en liaison étroite avec l’ensemble des acteurs institutionnels concernés et des parents.


PROPOSITION DE LOI

Article 1er

L’article L. 131-8 du code de l’éducation est complété par deux alinéas ainsi rédigés :

« Dans le cadre scolaire, les enfants doivent avoir un comportement respectueux des valeurs fondamentales de la République. Lorsque le comportement d’un enfant porte atteinte à celles-ci, le directeur ou la directrice de l’établissement d’enseignement saisit l’inspecteur d’académie afin qu’il adresse, par courrier ou à l’occasion d’un entretien avec lui ou son représentant, un avertissement aux personnes responsables de l’enfant, leur rappelant les sanctions applicables et les informant sur les dispositifs d’accompagnement parental auxquels elles peuvent avoir recours. L’inspecteur d’académie signale au préfet et au président du conseil général, responsable de la protection de l’enfance, les élèves concernés.

« Lorsque, malgré l’invitation du directeur ou de la directrice de l’établissement d’enseignement, l’enfant commet d’autres actes portant atteinte aux valeurs fondamentales de la République, l’inspecteur d’académie saisit sans délai le président du conseil général du cas des enfants pour lesquels un premier avertissement est déjà intervenu, en vue de la mise en place d’un contrat de responsabilité parentale ou de toute autre mesure contractualisée d’accompagnement que le président du conseil général pourrait proposer aux familles en application de l’article L. 222-4-1 du code de l’action sociale et des familles. »

Article 2

Dans le cas où, au cours d’une même année scolaire, l’enfant dont la famille est concernée par un contrat de responsabilité parentale, commet de nouveaux actes irrespectueux des valeurs de la République, le président du conseil général, après avoir mis les personnes responsables de l’enfant en mesure de présenter leurs observations, saisit le directeur de l’organisme débiteur des prestations familiales, lequel suspend le versement de la part des allocations familiales dues au titre de l’enfant en cause, calculées selon les modalités prévues à l’article L. 552-3-1 du code de la sécurité sociale. Le préfet est informé de cette décision. Le directeur de l’organisme débiteur des prestations familiales informe le préfet, l’inspecteur d’académie ainsi que le président du Conseil général de la date de mise en œuvre de cette suspension. Il en informe aussi les personnes responsables de l’enfant ainsi que des dispositifs d’accompagnement parental auxquels elles peuvent avoir recours.

Si, au terme d’une période de six mois à compter de la signature du contrat de responsabilité parentale, aucun comportement remettant en cause les valeurs de la République n’a été constaté pour l’enfant concerné, le président du conseil général saisit l’organisme débiteur des prestations familiales en vue du rétablissement des allocations.

Le rétablissement du versement des allocations familiales est rétroactif. Si, depuis les comportements ayant donné lieu à la suspension, un ou plusieurs actes irrespectueux des valeurs fondamentales de la République ont été constatés, à la demande de l’inspecteur d’académie et après que les personnes responsables de l’enfant ont été mises en mesure de présenter leurs observations, aucun versement n’est dû au titre du ou des mois au cours desquels ces nouveaux actes ont été constatés.

Article 3

Le titre préliminaire du livre IV de la deuxième partie du même code est complété par un article L. 401-5 ainsi rédigé :

« Art. L. 401-5. – Dans chaque école et établissement d’enseignement scolaire public, lors de la première inscription d’un élève, le projet d’école ou d’établissement et le règlement intérieur sont présentés aux personnes responsables de l’enfant par le directeur de l’école ou le chef d’établissement au cours d’une réunion ou d’un entretien. »

Article 4

Après l’article L. 552-2 du code de la sécurité sociale, il est rétabli un article L. 552-3 ainsi rédigé :

« Art. L. 552-3. – En cas de manquement à l’obligation d’avoir un comportement respectueux des valeurs de la République, le directeur de l’organisme débiteur des prestations familiales suspend, sur demande du président du Conseil général, le versement de la part des allocations familiales due au titre de l’enfant en cause, selon les modalités prévues à l’article L. 131-8 du code de l’éducation. Le rétablissement des allocations familiales s’effectue selon les modalités prévues à ce même article. Les modalités de calcul de la part due au titre de l’enfant en cause sont définies par décret en Conseil d’État. »

Article 5

L’article L. 222-4-1 du code de l’action sociale et des familles est rétabli dans la rédaction suivante :

« Art. L. 222-4-1. – Lorsque le président du Conseil général est saisi par l’inspecteur d’académie en cas de comportement irrespectueux des valeurs de la République, tel que défini à l’article L. 131-8 du code de l’éducation, il peut proposer aux parents ou représentants légaux du mineur concerné la signature d’un contrat de responsabilité parentale ou toute autre mesure contractualisée d’accompagnement.

« En cas de trouble porté au fonctionnement d’un établissement scolaire ou de toute autre difficulté liée à une carence de l’autorité parentale, le président du Conseil général, de sa propre initiative ou sur saisine de l’inspecteur d’académie, du chef d’établissement d’enseignement, du maire de la commune de résidence du mineur, du directeur de l’organisme débiteur des prestations familiales ou du préfet, propose aux parents ou au représentant légal du mineur un contrat de responsabilité parentale ou prend toute autre mesure d’aide sociale à l’enfance adaptée à la situation. Un contrat de responsabilité parentale peut également être signé à l’initiative des parents ou du représentant légal d’un mineur. Ce contrat rappelle les obligations des titulaires de l’autorité parentale et comporte toute mesure d’aide et d’action sociales de nature à remédier à la situation. Son contenu, sa durée et les modalités selon lesquelles il est procédé à la saisine du président du Conseil général et à la conclusion du contrat sont fixés par décret en Conseil d’État. Ce décret fixe aussi les conditions dans lesquelles les autorités de saisine sont informées par le président du Conseil général de la conclusion d’un contrat de responsabilité parentale et de sa mise en œuvre.

« Lorsqu’il constate que les obligations incombant aux parents ou au représentant légal du mineur n’ont pas été respectées ou lorsque, sans motif légitime, le contrat n’a pu être signé de leur fait, le président du Conseil général peut :

« 1° Demander au directeur de l’organisme débiteur des prestations familiales la suspension du versement de tout ou partie des prestations afférentes à l’enfant, en application de l’article L. 552-3 du code de la sécurité sociale ;

« 2° Saisir le Procureur de la République de faits susceptibles de constituer une infraction pénale ;

« 3° Saisir l’autorité judiciaire pour qu’il soit fait application, s’il y a lieu, des dispositions de l’article 375-9-1 du code civil. »


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