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mis en distribution

le 12 novembre 1999

N° 1861

    ______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

    ONZIÈME LÉGISLATURE

    Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 14 octobre 1999.

RAPPORT

FAIT

    AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU PLAN (1) SUR
    LE PROJET DE
    loi de finances pour 2000 (n°1805),

PAR M. DIDIER MIGAUD,

Rapporteur Général,

Député.

——

ANNEXE N° 36


OUTRE-MER


DÉPARTEMENTS d’OUTRE-MER

Rapporteur spécial : M. François d’AUBERT

Député

____

    (1) La composition de cette commission figure au verso de la présente page.

                      Lois de finances.

    La commission des finances, de l’économie générale et du plan est composée de  M. Augustin Bonrepaux, président ; M. Didier Migaud, rapporteur général ; MM. Michel Bouvard, Jean-Pierre Brard, Yves Tavernier, vice-présidents, MM. Pierre Bourguignon, Jean-Jacques Jégou, Michel Suchod, secrétaires ; MM.  Maurice Adevah-Poeuf, Philippe Auberger, François d'Aubert, Dominique Baert, Jean-Pierre Balligand, Gérard Bapt, François Baroin, Alain Barrau, Jacques Barrot, Christian Bergelin, Eric Besson, Alain Bocquet, Jean-Michel Boucheron, Mme Nicole Bricq, MM. Christian Cabal, Jérôme Cahuzac, Thierry Carcenac, Gilles Carrez, Henry Chabert, Didier Chouat, Alain Claeys, Charles de Courson, Christian Cuvilliez, Arthur Dehaine, Jean-Pierre Delalande, Francis Delattre, Yves Deniaud, Michel Destot, Patrick Devedjian, Laurent Dominati, Raymond Douyère, Tony Dreyfus, Jean-Louis Dumont, Daniel Feurtet, Pierre Forgues, Gérard Fuchs, Gilbert Gantier, Jean de Gaulle, Hervé Gaymard, Jacques Guyard, Pierre Hériaud, Edmond Hervé, Jacques Heuclin, Jean-Louis Idiart, Mme Anne-Marie Idrac, MM. Michel Inchauspé, Jean-Pierre Kucheida, Marc Laffineur, Jean-Marie Le Guen, Guy Lengagne, Maurice Ligot, François Loos, Alain Madelin, Mme Béatrice Marre, MM. Pierre Méhaignerie, Louis Mexandeau, Gilbert Mitterrand, Jean Rigal, Alain Rodet, Nicolas Sarkozy, Gérard Saumade, Philippe Séguin, Georges Tron, Philippe Vasseur, Jean Vila.

INTRODUCTION 7

I.– L’ÉVOLUTION CONJONCTURELLE ET LA SITUATION DES FINANCES LOCALES DEMEURENT INQUIÉTANTES 11

A.– DES ÉCONOMIES PEU DIVERSIFIÉES 12

    1.– Les productions naturelles, fragiles, traversent une période difficile 12

    a) La banane : une année de crise 12

    b) La filière canne – sucre – rhum : une campagne décevante 15

    c) L’essoufflement des productions traditionnelles de Mayotte 16

    d) La pêche à Saint-Pierre-et-Miquelon en voie de redressement 17

    2.– En 1998, le secteur du bâtiment et des travaux publics n’a pas connu de reprise significative 18

    3.– Le tourisme continue de progresser, mais les difficultés structurelles sont réelles 19

B.– DES INDICATEURS ÉCONOMIQUES ET SOCIAUX MARQUÉS PAR LA PERSISTANCE D’UN TAUX DE CHÔMAGE ÉLEVÉ 21

    1.– L’évolution des prix reste satisfaisante 21

    2.– La croissance du chômage se poursuit 21

    a) Un chômage en croissance continue qui cache un travail illégal mal combattu 21

    b) Des niveaux de revenu contrastés dans les départements d’outre-mer 23

    3.– Les échanges commerciaux marquent une forte dépendance
    vis-à-vis de la métropole
    24

    4.– Les piètres performances économiques des voisins des DOM 25

C.– LES DIFFICULTÉS DES FINANCES LOCALES 27

    1.– Les budgets des collectivités locales 27

    a) Des régions connaissant des situations contrastées 27

    b) Des collectivités territoriales très endettées 30

    c) Des départements en situation financière très dégradée 32

    d) Des communes en difficultés récurrentes 35

    2.– Les dotations globales 36

    a) La dotation globale de fonctionnement 37

    b) La dotation globale d’équipement 39

    c) La dotation générale de décentralisation 40

    3.– Les subventions aux collectivités locales inscrites au budget de l’Outre-mer 42

    a) Les subventions de fonctionnement 42

    b) Les subventions d’investissement (chapitre 67-51) 43

D.– LES NOMBREUX SOUTIENS PUBLICS SPÉCIFIQUES 44

    1.– Les subventions de fonctionnement aux compagnies de transport 44

    a) Les dessertes aériennes 45

    b) La desserte maritime de Saint-Pierre-et-Miquelon 45

    2.– Les subventions d’investissement 45

    a) Le Fonds d’investissement des départements d’outre-mer 45

    b) La section générale du Fonds d’investissement des départements d’outre-mer finance les contrats de plan 47

    c) Les infrastructures de la Guyane (chapitre 58-01) 49

    3.– Les aides européennes aux départements d’outre-mer 50

    a) Des montants élevés pour des aides inégalement utilisées 50

    b) Une réforme destinée à favoriser une meilleure gestion 53

II.– L’INSERTION CONSTITUE LA PRIORITÉ AFFICHÉE DU GOUVERNEMENT 55

A.– L’EMPLOI 56

    1.– Le Fonds pour l’emploi dans les départements d’outre-mer et à Saint-Pierre-et-Miquelon  56

    2.– Bilan et perspectives pour 2000 57

    a) Les actions du Fonds en 1999 57

    b) Les perspectives pour 2000 58

    c) Les emplois-jeunes 59

B.– LE REVENU MINIMUM D’INSERTION 62

    1.– L’évolution non maîtrisée du nombre de bénéficiaires 62

    2.– L’insertion des allocataires du revenu minimum d’insertion 63

    a) Le mécanisme de la créance de proratisation 63

    b) Le rôle des agences départementales d’insertion 64

    c) La réforme institutionnelle en cours 65

    3.– L’exception de Mayotte : les « chantiers de développement local » 66

C.– LE LOGEMENT 67

D.– LA POLITIQUE SOCIALE ET CULTURELLE 69

    1.– Des actions diversifiées 69

    2.– L’insertion en métropole : l’agence nationale pour l’insertion et la promotion des travailleurs d’outre-mer 71

    a) Les crédits 71

    b) Les mesures ébauchées à la suite des critiques de la Cour des comptes. 73

E.– LE SERVICE MILITAIRE ADAPTÉ 75

    1.– La nature du service militaire adapté 75

    2.– Le financement 76

    3.– Préserver l’insertion malgré la réforme du service national 77

III.– LES MOYENS SONT MANIFESTEMENT UTILISÉS À MAUVAIS ESCIENT 79

A.– DES « SUR-RÉMUNÉRATIONS » COÛTEUSES ET NÉFASTES 79

    1.– Le principe de la « sur-rémunération » 79

    2.– Un coût financier et social élevé 82

    a) Une estimation du coût financier pour l’ensemble des organes concernés 82

    b) Des conséquences néfastes dans tous les domaines 83

    3.– Vers une remise en cause ? 84

B.– DES DÉFISCALISATIONS INCONTRÔLÉES ET D’UNE EFFICACITÉ DOUTEUSE 86

    1.– Le dispositif de défiscalisation 86

    2.– La faible efficacité du dispositif a été démontrée 87

    3.– À quand la sortie du dispositif de défiscalisation des investissements ? 89

C.– UNE IMMIGRATION CLANDESTINE ENDÉMIQUE 91

    1.– L’immigration clandestine aux Antilles 91

    a) Martinique et Guadeloupe 92

    b) Les problèmes particuliers à Saint-Martin 93

    2.– Un phénomène qui touche très fortement la Guyane 93

    3.– Des difficultés qui commencent à concerner la Réunion 95

D.– L’AGGRAVATION DES PROBLÈMES DE DROGUE 96

    1.– L’intensification rapide du trafic et de la consommation de stupéfiants 96

    a) La forte présence de stupéfiants 97

    b) La consommation de drogue 97

    c) Le trafic de stupéfiants 98

    2.– La mise en œuvre d’actions appropriées aux particularités de la zone caraïbe s’avère insuffisante 99

    a) Une multiplicité d’acteurs 99

    b) Une coopération peu opérationnelle à cause d’importants problèmes structurels 100

    3.– Le blanchiment d’argent est inégalement combattu 101

    a) Des flux relativement maîtrisés 101

    b) La situation de Saint-Martin et Saint-Barthélémy est très préoccupante 103

EXAMEN EN COMMISSION 105

    ARTICLE 72 : Prorogation du régime d’exonération des charges patronales dans les départements d’outre-mer et de Saint-Pierre-et-Miquelon 109

INTRODUCTION

    Le projet de loi de finances pour 2000 fixe le budget du secrétariat d’État à l’outre-mer à 6.365 millions de francs en dépenses ordinaires et crédits de paiement, ce qui représente une hausse de près de 13,6 % par rapport à la loi de finances pour 1999. Le budget de l’Outre-mer est ainsi, en apparence, celui qui connaît cette année la plus forte progression. Comme son augmentation entre les lois de finances pour 1998 et pour 1999 avait déjà été de 7 %, ce budget a connu une hausse de 21,6 % entre 1998 et 2000. La progression atteint 31 % par rapport aux crédits votés en loi de finances pour 1997.

    Il faut néanmoins nuancer la progression apparente de la dotation proposée pour 2000 : elle intègre, en effet, un transfert de plus de 326 millions de francs en provenance des ministères de l’Éducation nationale, de l’Économie et de la Jeunesse et des sports dans le cadre de la mise en œuvre de la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie ; cette hausse comprend aussi un transfert, récurrent depuis plusieurs années, en provenance du budget de l’Emploi. En 1999, il atteignait 380 millions de francs et était destiné à financer le dispositif emploi-jeunes. Dans le projet de budget pour 2000, un transfert de 291,7 millions de francs à destination du Fonds pour l’emploi dans les départements d’outre-mer et la collectivité territoriale de Saint-Pierre-et-Miquelon financera les contrats emplois consolidés et un transfert de 44,75 millions de francs alimentera le nouvel article relatif à l’emploi, la formation et l’insertion à Mayotte.

    Les transferts atteignent donc plus de 662 millions de francs alors que le budget progresse optiquement de 761 millions de francs : l’augmentation de la dotation budgétaire, hors transferts, se réduit donc à 1,76 %.

    L’état récapitulatif de l’effort budgétaire consacré aux départements d’outre-mer (document annexé au projet de loi de finances, conformément à l’article 85 de la loi de finances pour 1969) évalue à près de 45.244 millions de francs de dépenses ordinaires et crédits de paiement le total des crédits budgétaires nationaux consacrés à l’Outre-mer, en hausse de près de 12 %. Seuls 10,1 % transitent par le budget de l’Outre-mer, le plus gros contributeur étant le ministère de l’Éducation nationale, de la recherche et de la technologie, qui apporte plus de 32 % du total.

    L’examen du projet de budget de l’Outre-mer pour 2000 se limite ici aux départements d’outre-mer et aux deux collectivités territoriales de Mayotte et de Saint-Pierre-et-Miquelon. Cette analyse est donc centrée sur les crédits budgétaires qui leur sont directement consacrés. La présentation du budget de l’Outre-mer ne permet pas de connaître exactement la part des crédits consacrée aux DOM : si le partage est impossible pour ce qui est relatif à l’administration centrale, il est souvent malaisé, dans la mesure où certains articles sont communs aux DOM et aux TOM.

    Le budget total du secrétariat d’État augmente certes de 13,6 % entre la loi de finances pour 1999 et le projet de loi de finances pour 2000, mais le budget exclusivement consacré aux DOM connaît une progression moins forte : + 10,32 % en dépenses ordinaires (titres III et IV), + 3,49 % en crédits de paiement, + 8,62 % en dépenses ordinaires et crédits de paiement, + 1,34 % en autorisations de programme. La part des DOM dans l’ensemble du budget tend à se réduire : 78,1 % en 1998, 75,5 % en 1999, 70,2 % dans le projet de loi de finances pour 2000. Les départements d’outre-mer profitent donc moins fortement que les territoires d’outre-mer de la hausse des crédits consacrés à l’outre-mer.

    En ce qui concerne les DOM et les deux collectivités territoriales, les priorités du Gouvernement sont l’emploi, les moyens du Fonds pour l’emploi dans les départements d’outre-mer (FEDOM) augmentant de plus de 16 %, ainsi que la culture et l’action sociale, dotées de moyens nouveaux élevés. L’effort en faveur du logement demeure soutenu, tout comme celui relatif au service militaire adapté. L’insertion constitue ainsi la priorité affichée du Gouvernement.

    Cette priorité, qui est soulignée depuis plusieurs années par le secrétariat d’État à l’Outre-mer, s’impose comme une évidence lorsque l’on connaît la situation économique et sociale des DOM. Si les chiffres témoignent clairement de l’ampleur des problèmes de tous ordres que rencontrent les DOM, les crises sociales qui les agitent régulièrement en montrent l’extrême gravité.

    Après une année 1998 marquée par plus de 21.000 journées de travail perdues à cause de grèves, soit 40% de plus que l’année précédente, l’automne 1999 restera dans toutes les mémoires antillaises comme particulièrement « chaud », moins pour des raisons climatiques habituelles à cette latitude, que pour des raisons sociales. Les Antilles connaissent en effet des tensions telles qu’elles semblent au bord de l’explosion sociale. La Guadeloupe a traversé une flambée de violence à la suite de la condamnation par la Justice d’un syndicaliste. A la Martinique, les conflits sociaux s’enlisent : deux mouvements de grève désorganisent toute l’activité de l’île depuis plus de trois mois, et les appels à la grève générale se multiplient. Le malaise est évident, et se retrouve aussi, quoique de manière moins violente à l’heure actuelle, dans les autres départements français d’outre-mer. Partout, le moindre incident est susceptible de déclencher des réactions démesurées.

    Face à cette situation, le Gouvernement ne peut pas rester totalement inactif. Plusieurs missions d’enquête ont été réalisées en 1999, dans le cadre de la préparation de la future loi d’orientation relative aux départements d’outre-mer : elles ont élaboré des rapports parmi lesquels figurent celui des parlementaires en mission Claude Lise et Michel Tamaya, portant sur des questions institutionnelles, et celui de Bertrand Fragonard qui traite du problème de l’emploi. Ils font une description bien inquiétante de la situation dans les DOM et proposent des voies de réforme, dont certaines présentent un réel intérêt.

    Pourtant, et en dépit de la forte augmentation, affichée et proclamée, des crédits du secrétariat d’État à l’Outre-mer, la volonté politique ne semble pas à la hauteur des enjeux. Aussi, si le présent rapport est avant tout budgétaire, il est impossible de ne pas y aborder l’ensemble des maux qui gangrènent les DOM, sinon d’une manière exhaustive, du moins en soulignant les questions les plus brûlantes.

    La présentation de la situation économique et sociale de l’année 1999 revient à une énumération de crises : des taux, jamais atteints auparavant, de chômage et de bénéficiaires du revenu minimum d’insertion, des secteurs productifs – agriculture, bâtiments et travaux publics – en déclin, alors que les activités touristiques progressent moins qu’elles devraient, des finances locales en grandes difficultés, en dépit de l’importance des transferts publics à leur profit, qu’ils soient nationaux ou communautaires. C’est donc un tableau bien sombre que votre rapporteur spécial doit dresser.

    Certes, les dotations budgétaires progressent fortement et les efforts accomplis par l’ensemble de la collectivité nationale au profit des DOM sont énormes, mais bien des dispositifs sont, sinon tout à fait contestables, du moins clairement perfectibles.

    Enfin, une partie des fonds publics sont mal utilisés, alors qu’ils pourraient être consacrés à d’autres fins. Ainsi, la « sur-rémunération » des fonctionnaires entraîne de graves conséquences financières, économiques et sociales : les 8 milliards de francs annuels qu’elle représente pourraient être dépensés de manière plus efficace. Le coût de la défiscalisation des investissements outre-mer est tout aussi excessif : ses avantages sont de loin inférieurs à ses répercussions négatives, alors que son coût financier, mal évalué, est, en toute hypothèse, très élevé.

    A côté de cela, les DOM souffrent de manques de moyens : l’immigration clandestine, le trafic de drogue s’y développent sans que l’État soit en mesure de les combattre. Ils jouent pourtant un rôle certain dans l’approfondissement du malaise et l’exacerbation des tensions qui agitent les DOM. C’est l’ensemble de ces problèmes, au-delà de celui, réel, du chômage, que votre rapporteur spécial souhaite voir pris en compte.

I.– L’ÉVOLUTION CONJONCTURELLE ET LA SITUATION DES FINANCES LOCALES DEMEURENT INQUIÉTANTES

    Dans un contexte marqué par la reprise de l’économie métropolitaine, les économies des DOM restent peu diversifiées et marquées par un chômage très important. Cette situation économique défavorable se reflète dans la situation des finances de nombreuses collectivités locales.

    Les tableaux suivants rassemblent des données synthétiques extraites du rapport annuel de l’Institut d’émission des départements d’outre-mer (IEDOM).

ÉVOLUTION DES PRIX AU 31 DÉCEMBRE (1)

(en %)

 

1995

1996

1997

1998

Guadeloupe

3,1

0

1,5

+ 1,9

Martinique

1,7

1,9

0,9

+ 1,2

Guyane

1,1

1

0,9

– 0,3

Réunion

2

1,9

1,5

+ 0,9

Mayotte

1,3

2,9

2,1

+ 1,7

Métropole

2,1

1,7

1,1

+ 0,3

(1) indice général des prix à la consommation des ménages

Source : Rapport annuel de l’IEDOM pour 1998

TAUX DE CHÔMAGE AU 31 DÉCEMBRE (1)

(en % de la population active)

 

1995

1996

1997

1998

Guadeloupe

25,5

26,8

27,8

28,8

Martinique

26,2

27

27,2

30,3

Guyane

20

19,2

21,4

21,4

Réunion

37,3

40,2

42,8

35,7

Mayotte

33,6

42,7

42

41,2

Métropole

11,7

12,7

12,2

11,5

(1) indicateur de chômage déterminé à partir des estimations des populations actives

Source : Rapport annuel de l’IEDOM pour 1998

ÉVOLUTION DU NOMBRE D’ALLOCATAIRES DU RMI

 

1995

1996

1997

1998

Variation
1998/1997

(en %)

Guadeloupe

22.492

22.185

22.152

22.922

+ 3,5

Martinique

22.200

24.226

24.991

26.563

+ 6,3

Guyane

7.304

7.674

7.910

8.195

+ 3,6

Réunion

51.310

50.876

54.126

57.778

+ 6,7

Total

103.306

104.961

109.179

115.458

+ 5,75

Source : Rapport annuel de l’IEDOM pour 1998

    Selon l’IEDOM, l’année 1998 s’est achevée plutôt favorablement pour la Martinique, la Réunion, Saint-Pierre-et-Miquelon et même la Guyane. Seule la Guadeloupe, affectée par une succession de conflits sociaux aurait vu son économie fortement perturbée.

    Pourtant, les données officielles relatives à l’emploi et au RMI ont affiché, dans l’ensemble, une nouvelle dégradation de la situation sociale, ce qui conduit à s’interroger sur la pertinence des chiffres et la réalité des situations individuelles, d’autant que la consommation continue de croître.

    Les données conjoncturelles de l’IEDOM pour 1998 conduisent à dresser un tableau bien sombre de la situation des DOM.

      A.– DES ÉCONOMIES PEU DIVERSIFIÉES

      1.– Les productions naturelles, fragiles, traversent une période difficile

    L’IEDOM relève que les secteurs traditionnels ont connu une année difficile qui ne fait que renforcer les composantes structurelles de leur fragilité.

        a) La banane : une année de crise

    ·   Une situation conjoncturelle délicate

    Le 20 juin 1997 est née l’Association des planteurs de banane des Antilles qui fédère les quatre groupements martiniquais et les deux groupements guadeloupéens qui défendent les intérêts des planteurs. Cette association a pour objet leur défense auprès des pouvoirs publics nationaux et européens. Cette action est relayée auprès des instances communautaires par EURODOM.

    En Guadeloupe, alors que la campagne de 1997 avait été prometteuse, le cyclone Georges qui a détruit 85 % de la bananeraie en septembre 1998 a anéanti les efforts des planteurs, déjà confrontés à la sécheresse du premier semestre et à de multiples conflits sociaux pénalisant l’expédition des bananes.

    En Martinique, les surfaces consacrées à la culture de la banane augmentent régulièrement, notamment grâce à la nouvelle Organisation commune de marché (OCM) de 1993. En 1998, contrairement aux trois années précédentes, les exportations ont régressé de 13 %. Cette baisse est surtout marquée au quatrième trimestre : le blocage du port de Fort-de-France par les ouvriers de la banane exigeant des augmentations de salaires a empêché toute exportation en décembre.

    Ces difficultés ont des conséquences particulièrement graves dans la mesure où on estime à 30.000, en Guadeloupe et en Martinique, le nombre d’emplois dépendants du secteur de la banane, qui fournit une grande partie des recettes d’exportation de ces deux régions. Le tableau ci-après récapitule les exportations de bananes de la Martinique et de la Guadeloupe entre 1994 et 1998 :

EXPORTATIONS DE BANANES DE GUADELOUPE ET DE MARTINIQUE

(en tonnes)

 

1994

1995

1996

1997

1998

Martinique

151.638

193.865

246.415

280.520

243.363

Guadeloupe

83.163

63.573

60.249

97.601

78.658

Source : Rapport annuel de l’IEDOM pour 1998

    Les perspectives pour 1999 ne sont guère positives : en Guadeloupe les pertes de production liées au cyclone Georges sont estimées à 45.000 tonnes pour cette seule année et les exportations n’ont repris qu’au mois de juin. Ce sont les conséquences du conflit social de décembre 1998 qui vont peser sur la production martiniquaise.

    ·   La « guerre de la banane »

    Avec une production de 60 millions de tonnes par an, la banane est au premier rang de la production fruitière mondiale. On distingue trois groupes de producteurs, qui exportent 13 millions de tonnes selon la répartition suivante :

    - les producteurs communautaires : 0,7 million de tonnes ;

    - les producteurs Afrique, Caraïbe, Pacifique (ACP) : 2,2 millions de tonnes ;

    - les producteurs de « bananes dollars » : 10 millions de tonnes.

    L’Union européenne est le premier consommateur mondial de bananes. Depuis la signature du Traité de Rome, le marché communautaire de la banane fait l’objet de dissensions entre les États membres. Certains, comme l’Allemagne, souhaitent consommer des bananes à moindre prix. D’autres, comme la France, veulent garantir à leurs producteurs des DOM un niveau de vie suffisant et maintenir des liens privilégiés avec certains pays producteurs d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique.

    Mais la crise s’est intensifiée depuis 1997, conduisant à une véritable « guerre de la banane » qui oppose l’Union européenne aux États-Unis.

    Le règlement CEE n° 404/93 a mis en place une Organisation commune du marché de la banane (dite « OCM-banane »). Le schéma est entré en vigueur le 1er juillet 1993 pour une durée de dix ans. Le volet interne de ce règlement fixe des normes communes de qualité et un mécanisme d’aides à la production prévoyant une aide compensatoire à la perte de recettes, dans la limite d’un quota global de 854.000 tonnes. Le volet externe fixe des seuils d’importation et des contingents tarifaires sur les « bananes dollars ».

    Certains pays producteurs ont alors saisi le GATT. L’organe d’appel de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), le 25 septembre 1997, n’a pas remis pas en cause les fondements de l’OCM-banane, mais en a invalidé certaines dispositions, notamment le régime d’attribution automatique d’une partie des licences d’importation de bananes provenant des pays tiers (« bananes dollars ») aux producteurs communautaires – les licences B. Cette condamnation imposait certaines modifications, la réforme du marché de la banane devant entrer en vigueur le 1er janvier 1999.

    Le « marathon agricole » du Conseil agricole européen de juin 1998 a finalement donné lieu à un accord entre les quinze ministres de l’agriculture. Le nouveau système ouvre davantage le marché européen aux « bananes dollars ». En compensation, les planteurs originaires des Antilles, de Madère et des Canaries obtiennent une revalorisation de 8 % du plafond de référence servant à calculer les subventions européennes. Cette revalorisation était pour la France une condition sine qua non de son accord, les professionnels de la banane réclamant quant à eux une hausse de 20 %.

    Lors de l’été 1998, les États-Unis ont fait part de leur souhait de rouvrir le dossier devant l’OMC, affirmant que la réforme était discriminatoire à l’égard des bananes d’Amérique latine exportées par les sociétés américaines, à un prix inférieur à celui des bananes ACP. De possibles mesures de rétorsion américaines ont été officiellement évoquées. L’Europe a alors supprimé les licences d’importation de « bananes dollar » dont disposaient les groupements des bananiers communautaires.

    En avril 1999, l’OMC a condamné à nouveau la Communauté et lui a imposé des sanctions au profit des États-Unis d’un montant de 77 millions d’euros. Aujourd’hui Bruxelles doit donc relancer le processus de discussions devant aboutir à une nouvelle organisation. Il s’agira d’une étape décisive pour l’avenir de la banane antillaise.

    A l’automne 1999, les producteurs de bananes antillais font appel à l’aide d’urgence du Gouvernement afin de pérenniser leur production malgré les maux qui les accablent : outre les attaques à répétition contre l’OCM-banane et les concessions successives faites aux Américains, ils évoquent les catastrophes naturelles, le surapprovisionnement du marche et les insuffisances du cadre financier. En visite aux Antilles, le Premier ministre a annoncé un « plan d’urgence pour la banane » comprenant 50 millions de francs de subventions, un dispositif d’avances de 120 millions de francs et un mécanisme d’allégement de la dette. Si ces dispositions peuvent aider temporairement les producteurs, et détendre un peu la situation sociale, elles ne sauraient permettre le maintien durable d’une production qui souffre de problèmes évidents de compétitivité.

        b) La filière canne – sucre – rhum : une campagne décevante

    La culture de la canne à sucre joue un rôle important dans les économies des DOM. C’est la deuxième activité agricole et la deuxième source de devises pour la Guadeloupe et la Martinique, où le secteur emploie 2.400 personnes. En 1997 et 1998, les résultats de la filière dans les DOM ont été les suivants :

LA FILIÈRE CANNE - SUCRE - RHUM (1996-1997)

(en  milliers de tonnes ou hectolitres d’alcool pur)

 

1997

1998

Canne

   

Guadeloupe

583

431,2

Guyane

4,6

(nd)

Martinique

181

189

Réunion

1.910

1.676

Sucre

   

Guadeloupe

57,4

38,3

Martinique

7,2

6,5

Réunion

207

180

Rhum

   

Guadeloupe

57.827

62.679

Guyane

2.252

2.753

Martinique

70.040

68.716

Réunion

71.822

68.169

Source : Rapport annuel de l’IEDOM pour 1998

    En Martinique, la canne à sucre est destinée à la production directe de rhum à partir du vesou et non pas à la fabrication de sucre. Après une forte régression au cours des trois dernières décennies, les surfaces cultivées restent stables, mais les chiffres de production de cannes broyées et de sucre diminuent tendanciellement, même si la récolte de cannes a augmenté de 4 % en 1998, après une récolte 1997 médiocre. L’industrie du rhum reste rentable et bien intégrée au marché national et régional. L’attribution au rhum agricole de la Martinique d’un label d’appellation d’origine contrôlée, depuis novembre 1997, a eu un rôle bénéfique. La production 1998 est en recul de près de 2 % par rapport au niveau de 1997, la baisse touchant principalement le rhum industriel. Les distillateurs cherchent en effet à développer des produits à haute valeur ajoutée.

    En Guadeloupe, selon le rapport de l’IEDOM, la culture cannière est en déclin depuis 1970. La surface des terres cultivées diminue, l’atomisation des exploitations se poursuit, les rendements restent bas. La campagne 1998 a enregistré une forte baisse de 26 %, après deux années de progression. La production de sucre a diminué d’un tiers alors que la production de rhum a augmenté de 8 %. La forte pluviométrie de la période d’inter-campagne laisse espérer une meilleure récolte pour 1999.

    A la Réunion, la canne à sucre demeure la culture dominante de l’île, bien que la surface agricole consacrée à cette culture diminue. La campagne 1998 est décevante : le volume de canne est en baisse de 12 %, inférieur à la moyenne décennale, tout comme la production de sucre, en chute de 13 %, tandis que le prix de ce dernier est en légère baisse. L’application du Plan de modernisation et de consolidation de l’économie sucrière (PCES) se poursuit, ce qui n’a pourtant pas empêché la chute du rendement moyen. La Réunion fabrique également un rhum (rhum agricole et rhum industriel) qu’elle exporte : sa production a régressé de 5 % entre 1997 et 1998.

    Tant la culture et l’exploitation de la canne que le produit final (rhum) bénéficient d’aides importantes, non seulement dans le cadre national, mais aussi dans le cadre communautaire. Le prix de la canne comprend une part industrielle (appelée « part usine ») et une part payée aux planteurs par l’État, fonctionnant comme une garantie de prix. Une « aide au complément de prix » peut s’y ajouter pour les petits et moyens planteurs. Les rhums traditionnels vendus en France sous contingent bénéficient d’une protection fiscale ; ils ne donnent lieu au paiement de droits d’accises qu’à un taux minoré, dans la limite d’un contingent. La France a obtenu, dans le cadre communautaire, l’autorisation d’appliquer un taux d’accises réduit de 50 % au maximum à un volume annuel de 90.000 hectolitres d’alcool pur de rhum traditionnel jusqu’en 2002.

        c) L’essoufflement des productions traditionnelles de Mayotte

    Les cultures d’exportation sont de deux ordres : l’ylang-ylang et la vanille. Selon le rapport 1998 de l’IEDOM, les jeunes délaissent ces « cultures de rente » ; elles représentent pourtant un atout économique certain qui pourrait être étendu à d’autres cultures telles que les épices et les plantes aromatiques.

      · L’ylang-ylang

    C’est un arbre de la famille des annonacées dont les fleurs jaunes donnent, après distillation, un produit très apprécié de l’industrie de la parfumerie. La production de cette plante a constitué, en 1998, 78 % des recettes d’exportation de la collectivité. Plusieurs problèmes se posent à la filière : marché stagnant, coût élevé de la production, vieillissement des plantations, concurrence des produits de synthèse et, surtout, baisse des cours mondiaux depuis 1994. Les exportations ont connu une contraction de 20 % en volume et 28 % en valeur entre 1997 et 1998 et les prix ont chuté de 10 %.

    Face à la crise que traverse le secteur et à l’augmentation des stocks d’invendus, la collectivité territoriale a décidé depuis 1996 de racheter les stocks en confiant cette mission à la Gestion des coopératives agricoles de Mayotte (GECOPAM). Elle a dû procéder à de nouveaux achats en cours d’année 1998, qui maintiennent ses stocks à un niveau élevé.

      · La vanille

    C’est la seconde culture d’exportation de la collectivité. Le marché mondial de la vanille noire se monte à 1.800 tonnes et il est dominé à 85 % par Madagascar et l’Indonésie, qui bénéficient de faibles coûts de main d’œuvre. Là aussi, les cours mondiaux chutent.

    La situation de cette filière est très préoccupante : la coopérative en charge de la collecte et de la commercialisation de la vanille noire a connu d’importantes difficultés financières en 1998, qui ont nécessité l’intervention de la Collectivité. Beaucoup de producteurs sont tentés de délaisser leur plantation et la mauvaise récolte de 1998 augure des résultats médiocres pour l’année 1999 : seulement huit tonnes de vanille verte ont pu être récoltées, soit la moitié de la cueillette effectuée en 1997.

        d) La pêche à Saint-Pierre-et-Miquelon en voie de redressement

    Ce secteur indispensable à l’équilibre économique de la collectivité se compose de la pêche artisanale et de la pêche industrielle.

    L’importance de la pêche artisanale (moules, crabes, oursins...) reste assez marginale en termes d’emplois et de tonnage pêché : 33 bateaux ont pris 1.203 tonnes de poissons en 1998, soit une progression substantielle de 35 % par rapport à 1997.

    La pêche industrielle est une activité plus importante mais soumise à des conditions d’exercice parfois handicapantes (quotas, dates d’ouverture de la saison, conditions météorologiques éprouvantes...). En 1998, les produits de la pêche industrielle s’établissaient à 1.752 tonnes, hors pétoncles, ce qui correspond à plus du double des résultats de 1996. Malgré l’augmentation des prises et des quotas de pêche, qui ont permis la forte progression (+ 69 %) des exportations de poissons vers le Canada et les États-Unis, les industries de la pêche sont toujours dans une situation délicate.

      2.– En 1998, le secteur du bâtiment et des travaux publics n’a pas connu de reprise significative

    Le secteur du bâtiment et des travaux publics (BTP) occupe une place importante en terme d’emplois et de richesse produite au sein des départements d’outre-mer. En 1998, sa situation varie selon les départements, essentiellement en fonction de l’importance des commandes publiques, mais il ne connaît nulle part une reprise très forte.

    Alors que 8 % des actifs martiniquais occupés travaillent dans le BTP, l’amélioration constatée en 1997 ne se confirme que partiellement en 1998. L’activité du secteur est tirée par la commande publique : en 1998, certains chantiers comme le Centre culturel de Fort-de-France ou les archives départementales ont été achevés ; de nombreux autres, dont le Palais de Justice, un collège et la Maison des syndicats ont débuté ou devraient débuter en 1999.

    A la Réunion, la situation du bâtiment s’est dans l’ensemble améliorée en 1998, en dépit des mauvais résultats enregistrés dans le domaine du logement social, marché qui génère à lui seul plus du tiers du volume d’affaires annuel de l’ensemble du secteur. Dans la continuité de l’année précédente, l’activité est en effet restée soutenue dans les secteurs de la construction des logements privés, des constructions publiques et des investissements routiers, tandis qu’elle a sensiblement repris dans le domaine du génie civil.

    Le secteur du BTP, en Guadeloupe, continue de traverser, depuis 1992, une crise due à la baisse de la commande publique. L’année 1998 a enregistré un fléchissement de l’activité par rapport à 1997, en raison d’un mauvais second semestre : le long conflit du port de Jarry, entraînant ruptures de stock et difficultés de trésorerie, les conditions climatiques plutôt défavorables au dernier trimestre et le peu d’ouvertures de chantiers significatifs en sont les principales raisons. Cette baisse d’activité est d’autant plus regrettable que 12 % des actifs occupés travaillent dans ce secteur.

    En Guyane, après une année 1997 morose, les commandes publiques ont relancé l’activité du bâtiment et des travaux public en 1998.

      3.– Le tourisme continue de progresser, mais les difficultés structurelles sont réelles

    Comme en 1998, l’activité touristique continue sa progression et constitue le principal moteur d’un développement économique endogène. Cette activité relativement récente au sein des DOM est vite devenue un secteur indispensable à l’équilibre de ces territoires. Il convient de l’encourager et de ne pas entraver son développement.

    En Guadeloupe, on estime à 20.000 le nombre d’emplois directs et indirects concernés par l’activité touristique. A la Réunion, le nombre d’emplois induits par le tourisme est estimé à 15.000. Cette activité représente 7 % du PIB marchand de la Martinique.

    Le développement du tourisme est encouragé par la baisse des tarifs aériens, les mécanismes de défiscalisation des investissements réalisés outre-mer et la croissance des capacités hôtelières.

    Le tableau ci-dessous décrit l’évolution récente du nombre de visiteurs dans les DOM :

NOMBRE DE VISITEURS (1997-1998)

 

1997

1998

Guadeloupe

660.000

693.000

Guyane

66.700

(nd)

Martinique

370.255

390.643

Réunion

693.308

716.980

Saint-Pierre-et-Miquelon

10.188

10.325

Source : Rapport d’activité de l’IEDOM pour 1998

    Le tourisme est l’une des principales activités économiques de la Martinique, avec près de 1,7 milliard de francs de recettes directes en 1998, soit 3,9 % de plus qu’en 1997. Ce constat globalement favorable dissimule cependant une situation plus nuancée, en raison notamment d’événements ayant contribué à ternir l’image de cette destination en 1998 : rapport critique de la Cour des comptes sur la gestion de l’office du tourisme, conflit social très médiatisé au Club Méditerranée de Sainte-Anne, menace d’un armateur de croisière de renoncer à y faire escale. De manière diffuse mais récurrente, la destination Martinique a aussi fait l’objet de critiques, relatives aux conflits sociaux ou à la qualité de l’accueil.

    En Guadeloupe, l’activité reste soutenue : elle a crû de 140 % en 12 ans. On constate une érosion de la durée moyenne des séjours et la part croissante prise par les touristes nord-américains. Le chiffre d’affaires du secteur, difficile à évaluer, serait de 3 milliards de francs en 1998.

    Il rencontre néanmoins des difficultés de développement liées à la très vive concurrence qui règne entre hôteliers – ce qui nuit à la promotion de la destination –, au niveau élevé des charges, aux faiblesses persistantes dans l’aménagement des sites, à la concurrence d’autres destinations et au caractère récurrent des conflits sociaux. Enfin, la défiscalisation a engendré des effets pervers qui ont conduit certains investisseurs à privilégier l’aspect fiscal des projets au détriment de leur intérêt social et de leur équilibre financier.

    Générant plus de 1,5 milliard de francs de recettes directes en 1998, en croissance annuelle de 7,4 %, et plus de 15.000 emplois directs et indirects, l’activité touristique continue de croître à la Réunion. Il convient néanmoins de distinguer les flux de touristes, dont la progression est ralentie, du nombre de clients dans les établissements hôteliers, qui a enregistré une hausse exceptionnelle de près de 30 % en un an.

    La Guyane tente de mieux exploiter ses richesses touristiques, malgré une image qu’il convient d’améliorer et une situation géographique particulière. L’ouverture de nouvelles liaisons aériennes en 1998 a contribué à l’augmentation du nombre des voyageurs (+ 12,9 %) mais 60 % des touristes restent originaires de métropole et 20 % des Antilles, du fait de la desserte aérienne.

    L’activité touristique a progressé modérément en 1998 à Saint-Pierre-et-Miquelon, mais le nombre de touristes de croisière a triplé. La proportion de touristes canadiens est toujours la plus forte, mais le nombre d’Américains augmente rapidement. Le Francoforum, lieu d’échanges culturels et économiques, institut d’études linguistiques sur le continent nord-américain, dispense des enseignements sous forme de stages et séminaires et contribue à renforcer l’attractivité de la collectivité.

    Au vu de la concurrence très forte qui règne dans le secteur des Antilles-Caraïbes et dans l’océan Indien, les DOM devront fournir des efforts importants, notamment dans l’aménagement des sites et le niveau des prix pratiqués. A titre d’exemple, une enquête de l’Organisation du tourisme dans la Caraïbe a montré que le nombre moyen d’employés par chambre dans la plupart des îles était deux à trois fois supérieur à celui de la Martinique, ce qui s’explique notamment par les salaires élevés pratiqués dans les DOM.

      B.– DES INDICATEURS ÉCONOMIQUES ET SOCIAUX MARQUÉS PAR LA PERSISTANCE D’UN TAUX DE CHÔMAGE ÉLEVÉ

      1.– L’évolution des prix reste satisfaisante

    En 1998, les prix (hors tabac) ont progressé de 0,3 % en métropole. Sauf en Guyane, où le taux est négatif (– 3 %), l’inflation est supérieure au taux de la métropole dans tous les DOM, mais ce dernier est si bas que cette évolution n’a rien d’inquiétant. Mayotte et la Guadeloupe ont les taux les plus élevés, respectivement de 1,7 et 1,9 %.

    Après une forte hausse des prix de 4,74 % durant l’année 1997, Saint-Pierre-et-Miquelon a connu une baisse des prix de 0,8 % en 1998, en relation avec la dépréciation de la devise canadienne.

      2.– La croissance du chômage se poursuit

        a) Un chômage en croissance continue qui cache un travail illégal mal combattu

      · La croissance continue du chômage

    Le chômage a poursuivi la progression enregistrée depuis la fin de 1994, sauf à la Réunion.

DEMANDEURS D’EMPLOI ET TAUX DE CHÔMAGE AU 31 DÉCEMBRE

 

1995

1996

1997

1998

 

Nombre de demandeurs d’emploi

Taux
de chômage

(en %)

Nombre de demandeurs d’emploi

Taux
de chômage

(en %)

Nombre de demandeurs d’emploi

Taux
de chômage

(en %)

Nombre de demandeurs d’emploi

Taux
de chômage

(en %)

Guadeloupe

44.387

25,5

47.056

26,8

49.765

27,8

52.425

28,8

Martinique

43.145

26,2

44.541

27

44.919

27,2

49.993

30,3

Guyane

9.757

20

10.782

19,2

12.555

21,4

13.073

21,4

Réunion

87.107

37,3

94.072

40,2

100.055

42,8

95.769

35,7

Métropole

3.019.400

11,7

3.092.500

12,7

3.027.800

12,2

2.899.900

11,5

Source : Rapports d’activité successifs de l’IEDOM.

    A la Réunion, le niveau du chômage est très élevé. Le dynamisme démographique et l’élévation du taux d’activité des femmes conduit à l’augmentation rapide de la population active. Le seuil de 100 000 chômeurs a été dépassé durant l’année 1997 : une diminution du chômage de 4,3 % a permis de le franchir dans l’autre sens au cours de 1998. Elle est due à la création de 3.430 emplois-jeunes, tandis que la situation des chômeurs de longue durée se détériore.

    Le taux de chômage en Guyane, à 21,4 %, bien qu’élevé, est stabilisé et reste inférieur à celui de l’ensemble des DOM (33,8 % en décembre 1998). Il apparaît pourtant que le marché de l’emploi guyanais se rapproche progressivement de celui des autres départements d’outre-mer.

    En Guadeloupe, malgré une certaine embellie sur l’emploi des jeunes, le marché du travail a connu une nouvelle dégradation d’un point.

    Après plusieurs années de relative stabilité, la situation du marché de l’emploi martiniquais s’est dégradée entre 1997 et 1998, le taux de chômage augmentant de plus de 3 points. Le chômage de longue durée atteint 59 %, contre 38,1 % en métropole, et la dégradation de l’emploi touche surtout les hommes. Même si l’emploi informel, difficile à chiffrer, y est particulièrement élevé, c’est la Martinique qui enregistre la plus forte progression annuelle des demandeurs d’emploi parmi les DOM.

      · Un travail illégal considérable peu combattu

    L’annexe 2 du rapport de M. Bertrand Fragonard, Les départements d’outre-mer : un pacte pour l’emploi, est consacré au travail illégal. Y est d’abord soulignée la diversité des pratiques observées et des populations concernées selon les départements : en Guyane, comme à Saint-Martin, ce sont surtout les immigrés, réguliers ou non, qui sont embauchés illégalement ; à la Réunion, il s’agit plutôt de « travail dissimulé ».

    Quel que soit le vocable choisi, la réalité est bien celle d’un travail illégal fortement répandu.

    A la Réunion, une enquête de 1995, citée par ce rapport, estime à 27.000 le nombre d’actifs concernés par le phénomène. Leurs revenus cumulés atteindraient 1,2 milliard de francs, évaluation que le rapport juge fortement sous-estimée. 18.000 personnes travailleraient ainsi à plein temps, pour un revenu de 80.000 francs par an pour ceux qui travaillent à leur compte et de 62.000 francs pour les salariés illégalement embauchés. Leurs revenus échappent à toute imposition, et ils ne bénéficient d’une protection sociale qu’en tant que chômeurs ou allocataires du RMI, sans que les cotisations sociales correspondant à leur emploi ne soient versées à la sécurité sociale. Le coût pour la collectivité, qui n’a pas été chiffré, est certainement énorme, d’autant qu’il est encore accru par le versement de prestations sociales à des personnes qui se prétendent en difficulté sans l’être réellement.

    Aux Antilles, la situation des travailleurs illégaux est plus difficile : seul un quart a un emploi durable et le revenu moyen est faible (22.000 francs par an).

    Si le travail illégal atteint un telle ampleur, c’est que l’action des services de contrôle n’est guère efficace : le rapport Fragonard parle de « services démobilisés ». En matière de lutte contre le travail illégal, les DOM ne souffrent pourtant d’aucune exception législative ou réglementaire par rapport à la métropole, mais les services s’avouent en permanence débordés et impuissants. Les parquets refusent souvent de s’engager fermement dans la lutte contre cette délinquance et les pouvoirs publics semblent avoir démissionné.

    Votre rapporteur spécial regrette cette absence de stratégie cohérente de lutte contre le travail illégal qui témoigne d’un manque certain de volonté politique. Des moyens doivent être donnés aux services, et des instructions aux parquets, pour que le travail illégal soit combattu : il est inacceptable qu’il soit considéré comme une fatalité, alors qu’il représente un coût élevé pour la collectivité.

    Si l’allégement des charges sociales pour les petites entreprises, annoncé pour 2000, est susceptible de faciliter le retour à la légalité de certains emplois dissimulés, ce sont le niveau élevé du coût du travail en général, d’une part, et le manque de rigueur dans le contrôle du versement des revenus de remplacement, d’autre part, qui expliquent pour l’essentiel l’importance du travail illégal dans les DOM.

        b) Des niveaux de revenu contrastés dans les départements d’outre-mer

    Les disparités de revenus entre les départements d’outre-mer et la métropole sont fortes, mais du même ordre que les disparités entre les DOM eux-mêmes, ou l’Ile-de-France et la province, selon une étude de l’INSEE publiée à l’automne 1998.

    En 1995, le revenu médian par ménage s’établissait, après impôts, à 123.000 francs dans les DOM contre 152.000 en métropole, soit 20 % de moins, malgré le rattrapage opéré avec l’alignement du SMIC sur le niveau métropolitain.

    En tenant compte de la taille des familles, plus grande outre-mer, l’INSEE calcule un « revenu médian par unité de consommation » qui fait apparaître un creusement des écarts. Il s’établit à 52.000 francs dans les DOM contre 83.000 francs en métropole.

    La Réunion « semble être la région dans laquelle le niveau de vie est le plus bas » et, « à l’inverse, en Guyane, le niveau de vie moyen est comparable à celui de la métropole grâce à l’activité spatiale », indique l’INSEE.

    La Guyane, le département d’outre-mer le moins peuplé, apparaît en effet comme celui ayant le niveau de vie le plus élevé, avec 75.000 francs par unité de consommation. A l’opposé, la Réunion, le plus peuplé et le plus touché par le chômage, a le revenu médian par unité de consommation le plus faible, avec 41.000 francs. Il est de 59.000 francs à la Martinique et de 47.000 francs à la Guadeloupe.

    L’INSEE note enfin que la pauvreté touche davantage les DOM que la métropole, même si l’on tient compte du fait que le seuil de pauvreté est calculé différemment pour chaque département.

    Votre rapporteur spécial reviendra sur le problème des « sur-rémunérations » des fonctionnaires, qui sont en partie responsables du creusement injustifié des inégalités de revenus.

      3.– Les échanges commerciaux marquent une forte dépendance vis-à-vis de la métropole

    Comme les années précédentes, les résultats du commerce extérieur traduisent l’extrême dépendance économique des DOM et des collectivités territoriales d’outre-mer vis-à-vis de l’extérieur, et tout particulièrement envers la métropole.

    Les taux de couverture sont compris entre 2 et 17 %. Le commerce extérieur de ces départements et collectivités territoriales se caractérise par son asymétrie.

    En effet, ces collectivités importent en grande quantité des biens de consommation (généralement le premier poste d’importation), des produits des industries agro-alimentaires et des biens d’équipement. Les exportations sont concentrées sur quelques produits de base.

LA BALANCE COMMERCIALE DES DOM (1998)

(en millions de francs)

 


Importations


Exportations


Solde

Taux de couverture
(en %)

Guadeloupe

10.704

704

– 10.000

6,6

Guyane

3.449

597

– 2.852

17,3

Martinique

9.997

1.692

– 8.305

16,9

Mayotte

914

19

– 895

2,1

Réunion

15.310

1.215

– 14.095

7,9

Saint-Pierre-et-Miquelon

359

38

– 321

10,6

Source : Rapport d’activité de l’IEDOM pour 1998

    Bien qu’on note, en 1998 comme en 1997, une forte augmentation des échanges entre la Guadeloupe et la Martinique, et même entre la Guyane et les Antilles françaises, la métropole tient une place prépondérante dans ces échanges, comme en témoigne le tableau ci-après :

EXPORTATIONS ET IMPORTATIONS DES DOM EN VALEUR :
RÉPARTITION GÉOGRAPHIQUE (1998)

(en %)

 

Exportations

Importations

 

Vers la métropole

Vers le reste de l’Union européenne

De la métropole

Du reste
de l’Union européenne

Guadeloupe

(nd)

(nd)

63,5

15,1

Guyane

50,5

13,8

59

9,7

Martinique

51,8

17,8

64,2

16

Réunion

69,7

8,9

65,8

14,3

Saint-Pierre-et-Miquelon

0,4

46,6

Source : direction générale des douanes.

      4.– Les piètres performances économiques des voisins des DOM

    Les DOM se situent dans des zones de grande pauvreté. Les indicateurs en termes de PNB par habitant des pays voisins (Porto Rico, Trinidad et Tobago, Maurice, Seychelles...) sont très inférieurs à ceux des DOM. Pourtant, comme le constatait en 1998 le rapport d’information de la commission des Finances de notre Assemblée sur les incitations fiscales à l’outre-mer, « les concurrents immédiats des DOM, qui ne bénéficient pas de la « loi Pons » ni d’autres formes de soutien économique, sauf l’aide au développement et des mesures fiscales internes favorables à l’implantation d’activités, réalisent, en règle générale, de meilleures performances. On constate que, sur dix ans, le taux de croissance dans les Antilles françaises est nettement inférieur à celui d’États voisins très immédiats comme Sainte-Lucie, Saint-Vincent et les Grenadines ou La Dominique. Dans l’ensemble médio-américain, la Guyane fait exception grâce, évidemment, aux activités du Centre national d’études spatiales (CNES), qui n’est pas financé par la « loi Pons » » (Rapport d’information n° 1060 sur les incitations fiscales à l’investissement outre-mer, présenté par M. Didier Migaud, Rapporteur général, le 9 juillet 1998).

    Les deux tableaux suivants illustrent ce décalage :

LES PAYS AU VOISINAGE DES DOM

 

Population
(milliers)

Superficie
(km2)

Densité
(hab/km2)

Espérance
de vie

PIB/habitant
(dollars/hab)

Antilles

La Dominique

82

400

205

67 ans

2.020

Barbade

255

400

638

76 ans

5.400

Sainte Lucie

153

600

255

71 ans

2.700

Porto-Ricco

3.480

8.900

391

76 ans

10.300

Cuba

10.600

110.900

96

76 ans

1.560

Haïti

6.500

27.700

235

57 ans

360

Jamaïque

2.460

11.000

224

74 ans

1.200

Guadeloupe

387

1.700

228

75 ans

7.330

Martinique

360

1.100

327

76 ans

9.597

Guyane

Guyana

810

215.000

4

65 ans

450

Surinam

430

163.300

3

70 ans

310

Venezuela

21.050

882.000

24

70 ans

7.942

Brésil

159.000

8.457.000

19

67 ans

4.479

Guyane

115

83.500

1

70 ans

8.070

La Réunion

Madagascar

12.934

587.041

22

52 ans

239

Maurice

1.100

2.045

532

69 ans

3.446

Seychelles

73

455

160

71 ans

5.629

Comores

511

1.862

274

58 ans

522

Réunion

653

2.507

261

73 ans

10.609

Source : secrétariat d’État à l’outre-mer.

CROISSANCE MOYENNE ANNUELLE 1985/1995

(en %)

Sainte-Lucie

5,9

Saint-Vincent et les Grenadines

4,7

Dominique

4,2

Guadeloupe (1987/1992)

3,5

Grenade

3,4

Antigua et Barbuda

3,2

Martinique (1987/1992)

2,8

Barbade

1,1

Trinidad et Tobago

– 0,9

Guyane (1987/1992)

14,4

Surinam

3,8

Venezuela

2,9

Guyana

1,2

Maurice

6,4

Mozambique

4,8

Tanzanie

4,6

Seychelles

4,3

La Réunion (1987/1992)

3,5

Comores

1

Madagascar

0,9

Source : L’état du monde, Éditions La Découverte, 1998.

    Les écarts de rémunérations, accrus avec l’alignement du SMIC dans les DOM sur le SMIC métropolitain au 1er janvier 1996, augmentent l’attractivité des départements français pour les populations environnantes. En revanche, ces écarts aggravent leur compétitivité-prix vis-à-vis des concurrents immédiats.

      C.– LES DIFFICULTÉS DES FINANCES LOCALES

    Ces difficultés sont une des conséquences d’une conjoncture économique souvent difficile. Les collectivités territoriales manquent de ressources propres mais sont confrontées à d’énormes besoins, notamment sociaux.

      1.– Les budgets des collectivités locales

        a) Des régions connaissant des situations contrastées

    Au cours des dernières années, les régions des Antilles-Guyane ont connu des difficultés financières qui ont nécessité la mise en œuvre de dispositions nouvelles de nature fiscale, introduites dans la loi de finances du 31 décembre 1993. Il s’agit de la possibilité de porter le taux du droit additionnel régional de l’octroi de mer de 1 % à 2,5 %, de la possibilité d’affecter une part de la taxe spéciale sur les carburants au redressement financier des régions, et de la possibilité, pendant une période de trois ans, d’instituer une taxe d’embarquement sur les billets de transport aériens et maritimes. Dans le même temps, les régions ont entrepris un effort important de redressement afin de rétablir l’équilibre budgétaire.

    Certaines régions d’outre-mer ont une situation financière encore précaire et des recettes complémentaires sont indispensables pour rembourser les emprunts de rééquilibrage qu’elles ont souscrits. Aussi, la reconduction jusqu’en 2001 de la taxe sur les billets d’avions a-t-elle été insérée dans la loi de finances pour 1997. Par ailleurs, les deux autres mesures (taxe spéciale sur les carburants et droit additionnel à l’octroi de mer) ne sont pas modifiées. Les régions peuvent donc y recourir en tant que de besoin.

    L’examen des budgets des quatre régions montre néanmoins que la situation reste marquée par les conséquences des difficultés financières de ces dernières années.

    ·   Guadeloupe

    Le budget primitif pour 1999 atteint 1.453 millions de francs en recettes comme en dépenses, soit une hausse de 4 % par rapport au budget primitif 1998. Les dépenses de fonctionnement augmentent de 11 %, plus modérément qu’en 1997 (+ 20 %), mais plus fortement qu’en 1998 (+ 6 %).

    Le remboursement en capital (142,7 millions de francs) est stable après une augmentation de 46 % en 1998, mais il ne représente plus que 16 % de la section dépenses d’investissement, comme en 1998, contre 24 % dans le budget primitif pour 1997. L’épargne brute est élevée (469 millions de francs) et en augmentation de 5 % par rapport à 1998, tout comme l’épargne nette, à 327 millions de francs.

    Le ratio épargne brute sur recettes de fonctionnement, soit le taux d’épargne, est de 46 % (moyenne métropolitaine en 1999 : 39 %) ; le ratio annuités de la dette sur recettes de fonctionnement est de 23 % (moyenne métropolitaine en 1999 : 14,1 %). Le ratio annuités de la dette sur capacité courante de financement est de 41,6 % (moyenne métropolitaine en 1999 : 32 %).

    La collectivité régionale bénéficie d’une situation financière saine. Toutefois, le taux d’équipement brut, 74 % en 1999, est en baisse par rapport à celui des années précédentes (80 % en 1997 et 1998) et l’augmentation des frais de personnel doit être maîtrisée.

    ·   Guyane

    Le budget primitif 1999 est arrêté à 538,8 millions de francs en recettes et en dépenses, en hausse de 15,7 % par rapport à 1998. Les dépenses de fonctionnement (208,2 millions de francs) sont en forte augmentation (+ 12 %). La croissance des frais de personnel, ralentie en 1998, est de 17 % : ils représentent 12 % des dépenses de fonctionnement, contre moins de 6 % en métropole.

    Après avoir été freinées en 1998, les dépenses d’investissement (330,6 millions de francs) croissent de près de 18 %.

    Les annuités de remboursement de la dette, d’un montant de 155 millions de francs augmentent plus vite qu’en 1997 (+ 15 % au lieu de + 5 %). L’épargne nette est en diminution : 28,3 millions de francs inscrits au budget primitif 1999, contre 32,7 millions de francs en 1998. Le ratio épargne brute sur recettes de fonctionnement est de 39,7 %, très proche de la moyenne métropolitaine de 39 %. Le ratio annuité de la dette sur capacité courante de financement est de 84,5 % (moyenne métropolitaine en 1999 : 32 %).

    La dette représente ainsi une part très importante de l’utilisation des ressources de fonctionnement et monopolise toujours fortement la capacité d’épargne, tendance qui s’est encore renforcée en 1999.

    ·   Martinique

    Le budget primitif pour 1999 est arrêté à 1.298 millions de francs en recettes et en dépenses, soit une hausse de 6 % par rapport au budget primitif pour 1998. Contrairement à la situation de 1998, les dépenses d’investissement augmentent plus vite que les dépenses de fonctionnement.

    Les dépenses de fonctionnement sont inscrites à hauteur de 599 millions de francs, en augmentation de 3,4 %. Après avoir enregistré une progression spectaculaire en 1998 (+ 30,54 %), due à la création de postes nouveaux, les frais de personnel diminuent de 6 % mais représentent encore près de 12 % des dépenses de fonctionnement. Les frais financiers sont marqués par une réduction de 55 %, qui les porte à 7 % des dépenses de fonctionnement.

    Les dépenses d’investissement (699 millions de francs) sont couvertes par 222,5 millions de francs de recettes réelles, en hausse de près de 14 %, mais surtout par les dotations de l’État, et notamment la dotation régionale à l’équipement scolaire, qui, à 133 millions de francs, enregistre une progression de 12,4 %.

    Les annuités de la dette atteignent 163 millions de francs, en diminution de 22 %. L’épargne nette s’accroît de 20 %. Le ratio dette sur recettes de fonctionnement descend à 14 % pour une moyenne métropolitaine de 15 %. Le ratio annuités de la dette sur capacité courante de financement est de 31,4 %, tout proche de la moyenne métropolitaine de 32 % en 1999.

    Après avoir connu de grandes difficultés financières, la région Martinique est donc parvenue à redresser sa situation.

    ·   Réunion

    Le budget primitif 1999 est arrêté à 2.466,8 millions de francs en recettes et en dépenses, soit une hausse de 8 % par rapport au budget primitif 1998. Cette augmentation tient à la prévision d’un accroissement de 11,9 % des dépenses de fonctionnement (50,8 % des dépenses totales) ; les frais de personnel représentent 6,6 % de cette catégorie de dépenses. Les frais financiers sont réduits de 20 % si bien que les participations et subventions peuvent progresser de 12 %, pour atteindre 48 % des dépenses de fonctionnement.

    Les dépenses d’investissement (1.437 millions de francs) devraient progresser de 8 %, comme en 1998. La région prévoit de porter ses efforts sur les équipements pour l’enseignement et la formation ( 402 millions de francs en 1999, contre 315,9 millions de francs en 1998), le développement rural et l’aménagement de l’espace (83 millions de francs), les transports et les télécommunications (492 millions de francs dont 420 millions de francs pour les routes nationales).

    Les annuités de la dette diminuent (239 millions de francs en 1999 contre 305 millions de francs en 1998). Le ratio épargne brute sur recettes de fonctionnement, soit le taux d’épargne, est de 37 %, grâce à une augmentation de 19 % de l’épargne brute.

    La situation de la région est donc saine.

        b) Des collectivités territoriales très endettées

    ·   Mayotte

    Le budget principal primitif pour 1999 a été adopté en équilibre à hauteur de 976,6 millions de francs, soit une hausse de 4,75 % par rapport à 1998. Les recettes de la fiscalité sont en progression, 78,6 % étant constitués d’impôts indirects.

    La dotation globale de fonctionnement versée atteint 90 millions de francs, en nette progression de 28 % par rapport à 1998. Les frais de personnel augmentent moins vite qu’en 1998 (+ 8 % au lieu de + 15,4 %), alors que la convention de développement économique et social d’avril 1995 prévoyait que l’État prenait en charge l’intégralité des rémunérations des instituteurs pour un coût estimé à 362 millions de francs : l’estimation retenue s’avère bien inférieure aux besoins.

    Le taux d’épargne poursuit sa baisse : 14,2 % en 1997, 9 % en 1998, 5,9 % en 1999. Le remboursement des emprunts continue à absorber presque entièrement l’épargne dégagée par la section de fonctionnement.

    La situation financière de la collectivité demeure donc fragile. D’une part, la faiblesse de ses ressources propres la rend largement dépendante de la solidarité nationale, d’autre part, les recettes de fonctionnement incluent des créances irrécouvrables ou forcloses.

    ·   Saint-Pierre-et-Miquelon

    Le budget primitif pour 1999 s’élève à 247,3 millions de francs, en hausse de 3,3 % par rapport à 1998. On observe une nouvelle croissance des dépenses de fonctionnement (+ 8,4 %), alors que les dépenses d’investissement continuent à baisser (– 2 %). Les dotations de l’État sont stables après une très forte progression.

    Les dépenses de personnel augmentent de 5,7 % du fait de l’intégration du personnel dans la fonction publique territoriale et représentent 8,6 % des dépenses de fonctionnement.

    Les dépenses d’investissement baissent moins vite qu’en 1998
    (– 2 %, contre – 18 % en 1998) mais les annuités de la dette augmentent de 14 %. Le ratio annuité de la dette sur capacité courante de financement atteint 62 %.

    L’encours de la dette total par rapport à la population progresse, ce qui est dû notamment à l’emprunt contracté pour les travaux de l’aéroport. Le financement de ce chantier pèsera longtemps sur le budget de la collectivité.

        c) Des départements en situation financière très dégradée

    La situation financière des départements est souvent encore moins satisfaisante que celle des régions. Les budgets primitifs pour 1999 sont décrits de manière synthétique dans les trois tableaux suivants :

DÉPENSES TOTALES PAR HABITANT EN 1999

(en francs)

 

Dépenses totales

Dépenses de fonctionnement

Dépenses d’investissement

Guadeloupe

6.923

4.053

2.870

Guyane

6.491

5.074

1.417

Martinique

5.823

4.123

1.700

Réunion

6.335

4.434

1.900

Métropole (hors Paris)

3.960

2.643

1.317

Source : secrétariat d’État à l’Outre-mer.

RECETTES TOTALES PAR HABITANT EN 1999

(en francs)

 

Dépenses totales

Dépenses de fonctionnement

Dépenses d’investissement

Guadeloupe

6.923

5.091

1.832

Guyane

6.491

5.225

1.266

Martinique

5.823

4.667

1.156

Réunion

6.335

5.122

1.213

Métropole (hors Paris)

3.960

3.260

701

Source : secrétariat d’État à l’Outre-mer.

L’ENDETTEMENT DES DÉPARTEMENTS EN 1999

(en francs)

 

Dépenses
en capital
par habitant

Annuité
de la dette
par habitant

Annuité/épargne
de gestion

(en %)

Guadeloupe

2.839

662

54

Guyane

2.104

444

140

Martinique

2.721

560

77

Réunion

3.798

759

82

Métropole (hors Paris)

2.411

393

53

Source : secrétariat d’État à l’Outre-mer.

      · Guadeloupe

    Devant la chambre régionale des comptes depuis 1996, la collectivité territoriale est sous tutelle financière : le représentant de l’État règle et rend exécutoire le budget départemental depuis 1997 dans le cadre de la mise en œuvre d’un plan pluriannuel de redressement visant à l’équilibre du budget.

    Le montant du budget primitif pour 1999 est arrêté à la somme de 2.918,8 millions de francs tant en dépenses qu’en recettes, soit une forte augmentation de 9,9 % par rapport au budget primitif 1998 qui prévoyait une baisse de 2 %.

    Les frais de personnel, qui avaient diminué de 1 % en 1998, vont connaître une hausse de 6,2 % et représentent une part plus importante de la section de fonctionnement (19,6 % dans le budget primitif 1999 contre 8,4 % dans le budget primitif 1997).

    La section d’investissement est essentiellement constituée de reports d’opérations déjà engagées. L’objectif est d’accroître le taux d’épargne et de diminuer le poids de la dette. Un effort a été fait : le recours à l’emprunt est en diminution de 30 % et l’épargne nette progresse de 48 %. Le taux d’équipement brut, à 20,2 %, augmente de près de 3 %, mais reste insuffisant.

    Les difficultés financières du département proviennent en grande partie des sommes dues à la caisse générale de sécurité sociale : cette dette continue de grever la section de fonctionnement du département.

    En dépit des efforts réalisés, la chambre régionale des comptes vient de faire connaître des observations très sévères. Elle estime que le compte administratif du département pour 1998 présente un déficit de 335 millions de francs, et non un excédent de 82 millions de francs, comme l’avait voté le Conseil général, ce déficit trouvant son origine dans le refus de ce dernier d’inscrire à son budget le paiement des cotisations d’assurance personnelle des bénéficiaires du RMI, dues à la Caisse de sécurité sociale. La chambre conclut en outre que les documents budgétaires qui lui sont présentés sont insincères.

    ·   Guyane

    L’amélioration générale de la situation financière du département entre 1991 et 1994, constatée par la chambre régionale des comptes dans son rapport du 3 mars 1997, n’est plus qu’un souvenir déjà lointain, comme l’atteste le budget 1999.

    Après une phase de stabilisation, le budget primitif pour 1999 connaît une forte hausse de 9,8 %, à 1.021 millions de francs en recettes et en dépenses. Il se décompose en 798,1 millions de francs pour la section de fonctionnement et 223 millions de francs pour la section d’investissement. Les dépenses de fonctionnement, soit 78,2 % du budget, progressent de 3,4 %.

    La composition des recettes de fonctionnement est spécifique à la Guyane. Les dotations de l’État, quoique en hausse de 4,6 %, constituent seulement 27,8 % des recettes de fonctionnement, alors qu’elles atteignent 38 % en Guadeloupe et 61 % à la Réunion. Les ressources fiscales (547,5 millions de francs) représentent 66 % des recettes de fonctionnement, ce qui est très proche de la moyenne nationale et très différent de la situation des autres DOM.

    Les annuités de la dette sont stables. Le taux d’épargne est très faible : 2,88 %, quand il est proche de 19 % en métropole hors Paris, et l’épargne nette est négative. La situation du département se dégrade ainsi à nouveau.

    ·   Martinique

    Le budget primitif pour 1999 s’élève en recettes comme en dépenses, à 2.227 millions de francs, en hausse de 1,5 % par rapport au budget primitif pour 1998.

    Les dépenses de fonctionnement (1.611,7 millions de francs) augmentent de 4,8 %. Le poste le plus important, et dont la charge croît sans cesse, demeure l’aide sociale légale qui représente 53 % des dépenses de fonctionnement, contre 43,5 % en 1998. Les frais de personnel représentent 26 % des dépenses de fonctionnement.

    Les dépenses d’investissement (650,2 millions de francs) diminuent de 5,7 %, les programmes départementaux chutant de 12 %.

    Les annuités de la dette, 214,7 millions de francs, augmentent de 6,6 %. La capacité courante de financement est en diminution (397,8 millions de francs en 1996 et 294 millions de francs en 1998).

    Le ratio épargne brute sur recettes de fonctionnement est de 11,4 % alors que la moyenne métropolitaine hors Paris s’élève à 18,9 %. Le ratio annuités de la dette sur capacité courante de financement (épargne brute + intérêts de la dette) est de 77 % au lieu de 67 % en 1998. Enfin, le taux d’épargne nette est devenu négatif, alors que le ratio prudentiel est fixé à 10 %.

    Les marges de manœuvre du département sont ainsi fortement réduites par le poids des dépenses sociales.

    ·   Réunion

    Le budget primitif pour 1999 a été déféré par le préfet devant la chambre régionale des comptes pour avoir été voté en déséquilibre : il incluait en effet une recette fictive de 100 millions de francs.

    Le Conseil général a voté le budget primitif 1999 rectifié en forte hausse de 8,5 % par rapport à 1998 à 4.656,5 millions de francs.

    Les dépenses de fonctionnement enregistrent une augmentation de 5,8 %, à 3.126 millions de francs : elle est essentiellement due à la progression de plus de 25 % des dépenses de personnel, qui passent de 15,6 à 18,5 % du total, alors que les dépenses d’aides sociales, qui en représentent 53 % ont le même poids qu’en 1998.

    Les dépenses d’investissement croissent de 14,6 %. Le département prévoit de faire porter ses efforts sur les équipements ruraux et agricoles pour 262 millions de francs, l’équipement scolaire et culturel pour 161 millions de francs et les programmes de subventions et d’avances pour les communes et leurs établissements publics à hauteur de 139 millions de francs. Cette progression est permise par une augmentation de 39 % des subventions d’équipement et par un recours important à l’emprunt (+ 32 %).

    Le ratio épargne brute sur recettes de fonctionnement, soit le taux d’épargne, est de 13,4 %. Mais le taux d’épargne nette (sur recettes de fonctionnement) est négatif d’1 %.

    La situation financière du département s’est donc dégradée, alors que le prochain partage de l’île en deux départements, demandé par les élus ne fait plus de doute.

        d) Des communes en difficultés récurrentes

    Nombreuses sont les communes de l’outre-mer connaissant des difficultés financières, souvent depuis plusieurs années. Le contrôle des chambres régionales de comptes est, à cet égard, indispensable, mais le caractère récurrent de ces difficultés montre ses limites.

    Si les communes de Martinique ont sensiblement amélioré leur situation financière, 5 communes sur 24 à la Réunion, 11 sur 34 à la Guadeloupe, une sur deux à Saint-Pierre-et-Miquelon et 10 sur 22 en Guyane ont fait l’objet d’une procédure devant la chambre régionale des comptes en 1998.

    Les déficits observés sont souvent dus à des dépenses de personnel trop élevées, et au lancement de programmes de travaux sans maîtrise des financements.

    La situation de Cayenne est en nette amélioration mais cette évolution positive a été obtenue par l’utilisation des réserves antérieures, et la limitation des dépenses d’investissement, sans une réelle amélioration du niveau des dépenses de fonctionnement.

    L’ensemble des collectivités locales ultramarines souffre ainsi, à de rares, et souvent brèves, exceptions près, des mêmes maux : dépendance croissante des dotations de l’État, qui ne cessent d’augmenter, part écrasante des dépenses de personnel parmi les dépenses de fonctionnement, faiblesse de l’investissement, rareté de l’épargne. Cette situation est résumée dans les tableaux suivants.

LES CHARGES DE FONCTIONNEMENT DANS LES DOM EN 1998

 

Frais de personnel

Intérêts de la dette

Transferts versés

Travaux fournitures services

Total
dépenses de fonctionnement

 

Francs/
habitant

Part
(en %)

Francs/
habitant

Part
(en %)

Francs/
habitant

Part
(en %)

Francs/
habitant

Part
(en %)

Francs/
habitant

DOM

887

21

220

5

2.607

62

282

7

4.187

Métropole

406

16

142

6

1.719

67

158

6

2.573

Source : les budgets primitifs des départements en 1998, direction générale des collectivités locales.

ENDETTEMENT ET CHARGES FINANCIÈRES PAR HABITANT EN 1998

(en francs)

 

Communes (1)

Départements

Régions

Total

Métropole

       

· dettes/habitant

7.285

2.511

1.086

10.882

· charges d’intérêt/habitant

455

142

63

660

· annuité en capital/habitant

1.319

406

136

1.861

DOM

       

· dettes/habitant

5.784

3.255

2.778

11.817

· charges d’intérêt/habitant

441

220

201

862

· annuité sur capital/habitant

1.223

726

500

2.449

(1) communes de plus de 10.000 habitants.

Source : les budgets primitifs 1998, direction générale des collectivités locales.

      2.– Les dotations globales

    Ces dotations ne sont pas inscrites dans le budget de l’outre–mer mais apparaissent dans l’état récapitulatif de l’effort de la Nation consacré aux départements d’outre–mer.

        a) La dotation globale de fonctionnement

    Dans les DOM, les communes aussi bien que les départements sont éligibles à la DGF.

    ·   Les communes

    Les textes applicables sont les articles L. 2563-1 à 4 et L. 2334-13 du code général des collectivités territoriales. Conformément à ces dispositions, toutes les communes d’outre-mer bénéficient de la dotation forfaitaire et de la dotation d’aménagement :

      · Leur dotation forfaitaire est égale à la somme des dotations perçues en 1993, majorée en 1994 de 30 millions de francs répartis au prorata de la population. Cette majoration a été consolidée dans la base de calcul de la dotation forfaitaire pour 1995.

      · Le montant de la dotation d’aménagement des communes d’outre-mer est une quote-part prélevée sur la masse globale en appliquant un rapport majoré de 10 % entre la population des départements d’outre-mer et la population nationale. Cette quote-part évolue de façon telle que le total de leur DGF progresse au moins comme l’ensemble des ressources affectées à cette dotation. La dotation d’aménagement est ensuite répartie proportionnellement à la population des communes.

      · La loi du 26 mars 1996 portant diverses dispositions relatives au concours de l’État aux collectivités territoriales et aux mécanismes de solidarité financière entre les collectivités territoriales a modifié le régime de la DGF des communes :

      – la modification de la clé de répartition entre la dotation de solidarité urbaine et la dotation de solidarité rurale ne concerne pas la dotation d’aménagement des communes d’outre-mer, car ces deux dotations ne sont pas individualisées mais globalisées au sein de la dotation d’aménagement ;

      – le taux de progression de la dotation forfaitaire peut être fixé entre 50 et 55 % du taux de progression de la DGF. Le comité des finances locales a décidé de porter ce taux à 52 % pour l’année 1997, 53 % en 1998 et à 54 % en 1999 (le taux de progression de la DGF est de 2,78 % en 1999).

    Enfin, les groupements à fiscalité propre reçoivent une quote-part de la dotation d’aménagement dans les conditions de droit commun.

    Le tableau ci-après retrace l’évolution de la DGF des communes d’outre-mer de 1997 à 1999. L’impact du recensement effectué en 1996 dans les territoires d’outre-mer a conduit à défavoriser à l’intérieur de la « quote-part outre-mer » les départements dans la répartition de la dotation d’aménagement. L’incidence est particulièrement forte pour la Martinique et la Réunion.

DGF DES COMMUNES

(en millions de francs)

Départements

1997

1998

Progression

1998/1997

(en %)

1999

Progression

1999/1998

(en %)

Guadeloupe

578

585

+ 1,20

597,6

+ 2,15

Guyane

165

168,5

+ 2,13

172,9

+ 2,6

Martinique

516,8

524,7

+ 1,54

540,6

+ 3

Réunion

866

881,9

+ 1,87

934,2

+ 5,9

Total

2.125,8

2.160,1

+ 1,60

2.245,3

+ 3,9

Source : secrétariat d’État à l’Outre-mer.

    La dotation forfaitaire par habitant en 1999 est en moyenne de 1.316,6 francs (1.301,40 francs en 1998) et la DGF par habitant de 1.400,9 francs (1.350,72 francs en 1998) pour les quatre DOM.

    ·   Les départements et les collectivités territoriales

    Conformément aux articles 35, 36 et 37 de la loi n° 85-1268 du 29 novembre 1985, les DOM perçoivent une DGF, constituée d’une dotation forfaitaire, d’une dotation de péréquation et d’un concours particulier, la dotation de fonctionnement minimale (DFM). Les crédits réservés à la dotation forfaitaire s’élèvent à 221,1 millions de francs, ceux réservés à la dotation de péréquation à 533,3 millions de francs. Les départements peuvent recevoir une attribution au titre de la garantie de progression minimale qui est de 10 millions de francs pour la Guyane. La DFM est de 31,6 millions de francs et la majoration de cette dotation minimale de 16,6 millions de francs.

    Au total, la DGF pour 1998 est de 812,6 millions de francs, en progression de 2,7 % par rapport à 1998, alors qu’elle n’avait crû que de 1,19 % entre 1997 et 1998.

    Le tableau ci-dessous retrace le montant de la DGF en 1997, 1998 et 1999.

DGF DES DÉPARTEMENTS 1997-1999

(en millions de francs)

Départements

1997

1998

Progression 1998/1997
(en %)

1999

Progression 1999/1998
(en %)

Guadeloupe

199,5

201,8

+ 1,18

207,1

+ 2,61

Guyane

65

65,6

+ 1,37

67,5

+ 2,44

Martinique

199

201,4

+ 1,18

206,7

+ 2,65

Réunion

318,4

322,2

+ 1,16

331,3

+ 2,85

Total

781,9

791,3

+ 1,19

812,6

+ 2,7

Source : secrétariat d’État à l’Outre-mer.

        b) La dotation globale d’équipement

    Dans les départements d’outre-mer, les communes et les départements bénéficient également de la dotation globale d’équipement (DGE).

    ·   Les communes

    Créée par la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983 afin de financer les travaux d’équipement des communes et de globaliser les subventions spécifiques d’équipement des différents ministères, la DGE des communes, dont la gestion est déconcentrée, a vu ses modalités de répartition et d’attribution sensiblement modifiées par la loi n° 95-1346 du 30 décembre 1995 portant loi de finances pour 1996 et par la loi n° 96-241 du 26 mars 1996 portant diverses dispositions relatives aux concours financiers de l’État aux collectivités territoriales et aux mécanismes de solidarité financière entre collectivités territoriales.

    En effet, à la suite de l’adoption du pacte de stabilité dans la loi de finances pour 1996, il a été nécessaire de supprimer la première part de la DGE des communes (2,1 milliards de francs en 1995). Dans le même temps, la deuxième part de la DGE a été étendue, sous condition de ressources et de population. Les communes d’outre-mer sont désormais éligibles à la DGE avec des seuils plus favorables que les communes de métropole.

    Parallèlement, la loi a modifié la composition de la commission départementale d’élus, formée désormais des maires des communes et des présidents de groupements dont la population n’excède pas 20.000 habitants (35.000 dans les départements d’outre-mer) et chargée dorénavant de déterminer les catégories d’opérations prioritaires ainsi que les fourchettes de taux de subvention correspondantes, dans la limite de 20 % à 60 % du montant de l’investissement hors taxe.

    Pour les départements d’outre-mer, la répartition de la DGE des communes est, pour 1996, 1997 et 1998, la suivante :

DGE DES COMMUNES 1997-1999

(en millions de francs)

Départements

1997

1998

Progression 1998/1997

(en %)

1999

Progression

1999/1998

(en %)

Guadeloupe

19,738

19,895

+ 0,79

20,596

+ 3,5

Guyane

5,8

6,177

+ 6,50

6,418

+ 3,9

Martinique

11,955

12,148

+ 1,61

13,59

+ 11

Réunion

16,679

17,06

+ 2,28

17,36

+ 1

Total

54,172

55,28

+ 2,04

57,964

+ 4,85

Source : secrétariat d’État à l’Outre-mer.

    ·   Les départements

    La DGE d’un exercice est chiffrée à partir des investissements financés dans l’année. Il n’est donc pas possible à ce jour de fournir son montant pour 1999.

DGE DES DÉPARTEMENTS 1997-1998

(en millions de francs)

Départements

1997

1998

Progression

1998/1997

(en %)

Guadeloupe

17,88

18,69

+ 4,5

Guyane

6,68

7,78

+ 16,46

Martinique

15

15,86

+ 5,7

Réunion

35,16

36,56

+ 4

Total

74,72

78,89

+ 5,6

Source : secrétariat d’État à l’Outre-mer.

        c) La dotation générale de décentralisation

    La dotation globale de décentralisation (DGD) évolue comme la DGF en fonction d’un indice égal à la somme du taux prévisionnel d’évolution de la moyenne annuelle du prix de la consommation des ménages (hors tabac) de l’année de versement, et de la moitié du taux d’évolution du produit intérieur brut en volume de l’année en cours. Une collectivité locale ne perçoit une DGD que lorsque les transferts de fiscalité ne compensent pas les transferts de charges.

    La DGD n’est pas une dotation unique et globale ; elle s’accompagne de divers concours particuliers destinés à couvrir des charges particulières, notamment dans les domaines des dépenses d’équipement.

    ·   La dotation générale de décentralisation des DOM

    Dans le domaine de l’enseignement, les compétences en matière de fonctionnement, d’entretien et de construction des collèges ont été transférées aux départements. Les charges de fonctionnement sont compensées en totalité dans la DGD. Les dépenses d’investissement sont compensées par la dotation départementale d’équipement des collèges.

    Les autres transferts de compétence au profit des départements (action sociale, santé, ports maritimes de commerce et de pêche, transports scolaires, bibliothèques départementales de prêt...) ouvrent droit à compensation financière, soit au moyen d’impôts transférés (vignette automobile, droit d’enregistrement), soit au moyen de la DGD.

    Le tableau ci-après donne les montants de la DGD des DOM pour les années 1997, 1998 et 1999.

DOTATION GÉNÉRALE DE DÉCENTRALISATION DES DÉPARTEMENTS 1997-1999

(en millions de francs)

Départements

1997

1998

1999

Guadeloupe

514,875

554,675

593,261

Guyane

150,88

152,479

161,11

Martinique

646,613

654,804

687,729

Réunion

1.806,236

1.828,798

1.901,107

Total

3.118,604

3.190,756

3.343,208

Source : secrétariat d’État à l’Outre-mer.

    ·   La dotation générale de décentralisation des régions d’outre-mer

    Les montants de la DGD des régions d’outre-mer intègrent depuis 1998 un concours particulier, le développement culturel des régions d’outre-mer. La DGD des régions d’outre-mer connaît donc un taux élevé de croissance (+ 15 %). En 1999, elle est de 2,77 %.

    La DGD des régions d’outre-mer, pour les années 1997, 1998 et 1999, est la suivante :

DOTATION GÉNÉRALE DE DÉCENTRALISATION DES RÉGIONS D’OUTRE-MER

(en millions de francs)

Départements

1997

1998

1999

Guadeloupe

21,745

24,999

25,693

Guyane

5,529

7,216

7,416

Martinique

20,321

23,638

24,294

Réunion

31,575

35,41

36,395

Total

79,172

91,263

93,798

Source : secrétariat d’État à l’Outre-mer.

      3.– Les subventions aux collectivités locales inscrites au budget de l’Outre-mer

    Le budget de l’Outre–mer prévoit, en ce qui concerne les collectivités des DOM-TOM, des subventions de plus de 103 millions de francs en dépenses ordinaires et crédits de paiement. La part globale revenant aux DOM atteint plus de 50 millions de francs.

        a) Les subventions de fonctionnement

      · Le chapitre 41-51 – Subventions de caractère obligatoire en faveur des collectivités territoriales des départements d’outre-mer

    Ce chapitre a pour vocation de compenser les ressources fiscales aux collectivités locales. Il s’agit de subventions versées par l’État aux communes des DOM en compensation des pertes de ressources fiscales consécutives aux exonérations temporaires de taxe foncière sur les propriétés bâties, conformément à l’application de l’article L. 2335-3 du code général des collectivités territoriales.

    La dotation proposée pour 2000 est égale à celle de 1998 et 1999, soit 32 millions de francs.

    Le tableau suivant montre l’exécution des crédits, selon les DOM, pour 1997, 1998 et 1999.

DOTATIONS DU CHAPITRE 41-51 EN EXÉCUTION (1997-1999)

(en millions de francs)

DOM

1997

1998

1999

    Guadeloupe

4,28

3,78

0,99

    Guyane

4,65

5,51

5,77

    Martinique

10,01

6,15

2,13

    Réunion

15,71

14,59

14,24

    Total

34,67

30,05

23,13

Source : secrétariat d’État à l’Outre-mer.

      · Le chapitre 41-91 – Subventions de caractère facultatif aux collectivités locales des départements d’outre–mer, aux budgets locaux des territoires et à divers organismes

    L’article 70 de ce chapitre comprend des crédits destinés à la collectivité territoriale de Mayotte dans le cadre de la convention de développement signée en 1995. La subvention a été portée à 7,2 millions de francs en 1998, permettant ainsi de rattraper les retards pris au cours des précédents exercices. Conformément à la convention, la dotation proposée pour 2000 se monte à 3,6 millions de francs, comme c’était déjà le cas en 1999.

    L’échéancier établi dans le cadre du règlement de la dette de l’ex-territoire de Saint-Pierre-et-Miquelon prévoit un versement annuel de 76.764,64 francs, de 1997 à 2002. 80.000 francs sont donc prévus à l’article 80.

    Un article 32 nouveau est créé : il est doté de 11 millions de francs, consacrés à la desserte maritime de Saint-Pierre-et-Miquelon. Lui est ainsi transférée la dotation auparavant inscrite à l’article 30 du chapitre 44-02 
    – Subventions à diverses compagnies de transport, ce chapitre étant supprimé.

        b) Les subventions d’investissement (chapitre 67-51)

    Elles consistent notamment en des subventions aux travaux d’intérêt local, dont les crédits sont inscrits au chapitre 67-51 – Travaux divers d’intérêt local. Comme le relève le rapport du contrôleur financier : « l’intitulé du chapitre est assez vague pour accueillir des opérations de toute nature ». Pour être éligibles, les opérations ne doivent pas faire apparaître d’autres subventions en provenance du budget du même département ministériel. Les opérations généralement subventionnées se situent entre 100.000 francs et 500.000 francs.

    Les dotations demandées pour 2000 sont les mêmes que celles demandées pour 1999, les crédits votés dans la loi de finances initiales pour 1999 ayant été très nettement supérieurs aux crédits demandés du fait de l’ouverture de crédits en provenance de la réserve parlementaire :

    · 5 millions de francs en autorisations de programme (15 millions de francs en dotations au titre de 1999) ;

    · 5 millions de francs de crédits de paiement (contre 15 millions de francs au titre de 1999).

    Ce chapitre souffre d’une sous-exécution de caractère structurel liée à l’obligation, pour les collectivités locales, de mobiliser d’autres financements. Ainsi, certaines opérations ont purement et simplement été abandonnées. Comme en 1998, les reports ont donc été très élevés en 1999, aussi bien en crédits de paiement (20,36 millions de francs) qu’en autorisations de programme (9,69 millions de francs). Au 30 juin 1999, seuls 9,46 millions de francs d’autorisations de programme avaient bénéficié aux DOM et aux collectivités territoriales. Pour l’année 1998, sur les 25,05 millions de francs de crédits disponibles, seuls 8,24 millions de francs ont été consommés (pour l’outre-mer dans sa globalité).

    Le montant total des crédits de paiement affectés en 1998 pour les DOM et les collectivités territoriales d’outre-mer s’est élevé à 7,054 millions de francs, soit plus de 85 % du total. Le tableau suivant récapitule les actions menées sur les crédits de paiement en 1998.

RÉPARTITION GÉOGRAPHIQUE DE L’UTILISATION DES CRÉDITS DE PAIEMENT DU CHAPITRE 67-51

(en francs)

Départements et collectivités

Crédits délégués

Crédits consommés

Crédits sans emploi

Guadeloupe

800.000

320.000

480.000

Guyane

350.000

350.000

Martinique

606.000

606.000

Mayotte

Réunion

3.798.023

1.705.786

2.092.237

St-Pierre-et-Miquelon

1.500.000

1.477.182

22.817

Total

7.054.548

3.502.968

3.551.054

Source : contrôle financier.

      D.– LES NOMBREUX SOUTIENS PUBLICS SPÉCIFIQUES

      1.– Les subventions de fonctionnement aux compagnies de transport

    L’État s’est engagé en 1987, par conventions, à apporter une contribution financière destinée à couvrir les déficits des dessertes aériennes de service public de Saint-Pierre–et-Miquelon, Wallis-et-Futuna et Mayotte.

    Pour la desserte maritime de Saint-Pierre-et-Miquelon, l’État a signé le 29 décembre 1994 deux conventions par lesquelles il accorde des subventions forfaitaires à deux sociétés distinctes pour les dessertes de Saint-Pierre–et-Miquelon (à partir d’Halifax) et de Miquelon (à partir de Saint-Pierre–et-Miquelon).

        a) Les dessertes aériennes

    Les compagnies Air Saint-Pierre et Air Austral sont désormais gérées par le Fonds de péréquation des transports aériens. Les articles 10, 20 et 40 du chapitre 44-02 n’ont donc plus lieu d’être dotés, ce qui justifie leur suppression dans le projet de loi de finances pour 2000. C’est en fait tout le chapitre qui disparaît.

        b) La desserte maritime de Saint-Pierre-et-Miquelon

    En effet, jusqu’ici, la subvention pour la desserte maritime de Saint-Pierre-et-Miquelon figurait à l’article 30 du chapitre 44-02. Ce dernier chapitre étant supprimé, elle est transférée à l’article 32 (nouveau) du chapitre 41-91 et reconduite au même niveau (11 millions de francs) qu’en 1999. Au cours des dernières années, la subvention a connu l’évolution suivante :

SUBVENTION À LA DESSERTE MARITIME
DE SAINT-PIERRE-ET-MIQUELON (1996-2000)

(en millions de francs)

 

1996

1997

1998

1999

2000

Crédits inscrits

11,80

11

11

11

11

Crédits consommés

11,35

11,30

11,18

8,8 (1)

(1) au 31 août 1999

Source : contrôle financier près le secrétariat d’État à l’Outre-mer.

      2.– Les subventions d’investissement

        a) Le Fonds d’investissement des départements d’outre-mer

    Le Fonds d’investissement des DOM (FIDOM) est régi par le décret n°84-712 du 17 juillet 1984 modifié. Il est formé de deux chapitres, correspondant à deux sections :

    · chapitre 68-01 : section générale, pour les interventions du fonds relevant de l’action directe de l’État (FIDOM général) ;

    · chapitre 68-03 : la section régionale et départementale alimentait une dotation globale aux budgets des régions et des départements des DOM ainsi qu’à ceux des collectivités territoriales. L’extinction de cette section locale, décidée dans le projet de loi de finances pour 1997, est maintenant réalisée. Le chapitre n’est néanmoins pas supprimé, car des crédits de paiement y sont encore inscrits en loi de finances rectificative.

    Depuis 1996, les crédits du FIDOM ont évolué comme suit :

FIDOM (1996-2000)

(en millions de francs)

   

1996

1997

1998

1999

2000

Section générale

Autorisations de programme

234,1

232,5

225

205

220

 

Crédits de paiement

370,9

218

232,5

198,7

217,5

Section régionale

Autorisations de programme

17,7

 

Crédits de paiement

28,8

14,65

6,6

Section départementale

Autorisations de programme

23,5

 

Crédits de paiement

34,4

18,65

8,4

Total

Autorisations de programme

275,4

232,5

225

205

220

 

Crédits de paiement

434,2

251,3

247,5

198,7

217,5

Source : secrétariat d’État à l’Outre-mer.

    En 1998, à la suite de différents mouvements de régulation, la section générale a reçu une dotation de 218,17 millions de francs en autorisations de programme et de 311,85 millions de francs en crédits de paiement. La section départementale a bénéficié de 10 millions de francs supplémentaires provenant de crédits reportés.

    En 1999, les crédits reportés sur la dotation en crédits de paiement (41,41 millions de francs) leur a permis d’atteindre 240,16 millions de francs.

    En 1998 et 1999, la répartition des autorisations de programme attribuées aux départements et collectivités territoriales s’établit comme suit :

OPÉRATIONS RÉALISÉES PAR LE FIDOM EN 1998 ET 1999

(en millions de francs)

FIDOM général

1998

1999

Guadeloupe

32,3

47,75

Martinique

36,17

49,91

Guyane

106,81 (1)

16,91

Réunion

51,33

51,08

Saint-Pierre-et-Miquelon

8,07

7,07 (2)

Mayotte

32,96

32,99

Opérations communes

0,62

0,01

Total

268,26

205,72

(1) dont 42,9 millions de francs pour le plan vert.

(2) dont 2 millions de francs en réserve pour Archipel SA

Source : secrétariat d’État à l’Outre-mer.

    Le FIDOM finance principalement les opérations inscrites aux contrats de plan État-régions et la convention de développement économique et social de Mayotte.

    Depuis plusieurs années, afin de remédier au décalage entre les autorisations de programme et les crédits de paiement, la priorité a été donnée aux crédits de paiement en les faisant progresser plus vite que les autorisations de programme. Sur le FIDOM décentralisé, qui n’est plus doté en autorisations de programme depuis 1997, il subsiste un retard de crédits de paiement, malgré une dotation de 10 millions de francs en 1998. Un audit est actuellement en cours pour expertiser le montant exact de la dette.

    La liste des opérations susceptibles d’être financées avec le concours du FIDOM pour 2000 n’est pas encore arrêtée. Le secrétariat d’État à l’Outre-mer a donné les indications suivantes, en précisant que ces orientations devront être soumises au Comité du FIDOM :

LISTE INDICATIVE DES OPÉRATIONS SUSCEPTIBLES
D’ÊTRE FINANCÉES SUR LE FIDOM EN 2000

(en millions de francs)

Contrats de plan

187,8

Plan social dockers à la Réunion

0,1

Études

0,1

Constructions scolaires

15

Dotation non affectée

17

Source : secrétariat d’État à l’Outre-mer.

        b) La section générale du Fonds d’investissement des départements d’outre-mer finance les contrats de plan

    Sur la période 1994-1999, l’État consacrera 3.853 millions de francs aux contrats de plan passés entre l’État et les quatre départements-régions d’outre-mer : Martinique, Guadeloupe, Guyane, la Réunion.

    Il faut y ajouter les contrats de plan passés entre l’État et les collectivités de Saint-Pierre-et-Miquelon et de Mayotte, cette dernière bénéficiant également d’une convention de développement, ce qui représente près de 2.400 millions de francs supplémentaires.

    Dans les DOM, les opérations contractualisées constituent la contrepartie nationale des programmes européens 1994-1999, pour lesquels la commission européenne a doublé les fonds structurels par rapport à la période 1989-1993 (12 milliards de francs).

    Les crédits affectés aux contrats de plan 1994-1999 se répartissent selon quatre orientations équilibrées :

    · 894 millions de francs (23,2 %) concernent des opérations de cohésion sociale (équipements sanitaires et sociaux, emploi et formation professionnelle, politique de la ville) ;

    · 1.126 millions de francs (29,23 %) sont attachés aux infrastructures (routes, ports, aéroports, foncier et environnement) ;

    · 901 millions de francs (23,38 %) sont consacrés à l’éducation et à la culture (constructions scolaires et universitaires, équipements sportifs et culturels) ;

    · 932 millions de francs (24,2 %) relèvent du développement économique (développement rural, aide à la compétitivité des entreprises, du commerce et de l’artisanat).

    Sur l’ensemble des contrats de plan et de la convention précitée, le taux d’engagement moyen au 31 décembre 1998 est de 84,34 % au terme de la cinquième année du contrat, alors qu’elle n’était que de 43 % un an plus tôt. Mais la situation varie avec la collectivité concernée, comme le montre le tableau suivant, ce qui est lié à la situation financière des régions et départements cosignataires.

BILAN D’EXÉCUTION DES CONTRATS DE PLAN ET CONTRATS DE VILLE

PAR L’ÉTAT AU 31 DÉCEMBRE 1998

(en millions de francs)

 

Montant
du contrat

Délégations
1998

Engagements 1998

Total
engagements

Engagements
(en %)

Martinique

842,88

166,63

231,58

427,28

50,69

Guadeloupe

986,9

162,89

164,52

604,22

61,22

Guyane

679,5

90,98

88,92

306,38

45,09

Réunion

1344

370,47

350,86

983,86

73,2

Saint-Pierre-et-Miquelon

108,56

20,84

23,07

96,79

89,15

Mayotte

503

54,56

85,81

357,48

71,07

Source : secrétariat d’État à l’Outre-mer.

    La réalisation des contrats de plan rencontre trois types de problèmes :

    · les variations de trésorerie des partenaires de l’État ;

    · la difficulté pour certains maîtres d’ouvrage (agriculteurs, chefs de PME/PMI) de mobiliser des crédits bancaires pour financer leur apport personnel ;

    · les problèmes rencontrés par certains porteurs de projets (petites communes et personnes privées) pour constituer les dossiers techniques réclamés par l’administration.

    S’agissant des projets de contrats pour la période 2000-2006, le comité interministériel pour l’aménagement du territoire, qui s’est tenu le 23 juillet 1999, a réparti une première enveloppe pour les DOM d’un montant global de 4.527 millions de francs, dont 1.346 à la charge de secrétariat d’État à l’Outre-mer.

        c) Les infrastructures de la Guyane (chapitre 58-01)

    Ce chapitre a été créé dès 1980 afin de compenser la faiblesse du fonds d’investissement des routes et des transports (FIRT), alimenté par la taxe sur les carburants.

    Entre 1980 et 1999, 692 millions de francs d’autorisations de programme et 656 millions de francs de crédits de paiement ont été délégués. Ils ont permis différents aménagements routiers, portuaires et aéroportuaires, certaines de ces opérations bénéficiant par ailleurs de concours du FEDER.

    En 1998, les crédits ont été accrus, tant en autorisations de programme (+ 37,1 %) qu’en crédits de paiement (+ 12,9 %). Cette augmentation correspond à un financement supplémentaire pour trois ans de la route Régina-Saint-Georges (5 millions de francs).

    La dotation pour 1999 a poursuivi cet effort et celle proposée pour 2000 ne connaît qu’une faible baisse de 71.000 francs en crédits de paiement, pour un total de 18,25 millions de francs, et de 470.000 en autorisations de programme, à 18 millions de francs, comme en 1998.

    Les travaux en cours, financés sur ce chapitre, concernent essentiellement la construction de la route Régina-Saint-Georges, l’aménagement de la route Balata-Maringouins, et dans un proche avenir l’aménagement du quai A du port de Larivot.

      3.– Les aides européennes aux départements d’outre-mer

        a) Des montants élevés pour des aides inégalement utilisées

    · Les aides au titre de l’« objectif 1 »

    Les DOM français font partie, depuis 1989, des régions en retard de développement, dites d’« objectif 1 », des fonds structurels communautaires (le PIB par habitant, est inférieur à 75 % de la moyenne communautaire). A ce titre, leur sont accordés des financements communautaires regroupés actuellement, principalement, en deux catégories de programmes :

    – le document unique de programmation (DOCUP), qui rassemble les financements émanant des fonds structurels (Fonds européen de développement régional – FEDER –, Fonds social européen – FSE –, Fonds européen d’orientation et de garantie agricole – FEOGA –) ;

    – les programmes d’initiative communautaire, regroupés sous le nom de REGIS II (pour régions isolées). Adopté en 1991 sous le nom de REGIS I, ce programme a pour vocation la diversification économique et la compensation des handicaps liés à l’isolement. Reconduit en 1993 (REGIS II), il intègre d’autres programmes d’initiative communautaire (Leader, Ruban, Pesa...). Son intervention dans les DOM est orientée vers cinq priorités : le soutien aux entreprises, l’aménagement du territoire, l’environnement, la politique de la ville, la protection du patrimoine.

    Les deux programmes couvrent la période 1994-1999. Ils prennent le relais de financements effectués sur 1989-1993 dans le cadre précédent des fonds structurels. Les montants consacrés aux DOM ont été considérablement accrus. Ils ont été portés de 875 millions d’écus pour 1989-1993 à 1,760 milliard d’écus pour les années 1994-1999.

    Ces financements, réévalués chaque année, se répartissent comme suit en 1999 :

FINANCEMENTS COMMUNAUTAIRES DES DOM

DÉCOMPOSITION PAR DOM (1)

(en millions de francs)

 

Versements des fonds structurels

Total

Répartition par DOM

 

DOCUP

PIC Régis II

 

(en %)

Guadeloupe

2.358

402

2.760

23

Martinique

2.255

399

2.654

22

Guyane

1.128

186

1.314

11

La Réunion

4.511

758

5.269

44

(1) prix indexés 1999.

Source : secrétariat d’État à l’Outre-mer.

DÉCOMPOSITION PAR FONDS STRUCTURELS (1)

(en millions de francs)

 

FEDER

FSE

FEOGA

IFOP

Guadeloupe

1.048

684

489

41

Martinique

1.091

584

349

22

Guyane

605

235

25

9

Réunion

2.100

1.200

977

49

TOTAL

4.844

2.703

1.840

121

Part du total (en %)

50,9

28,4

19,3

1,2

(1) prix 1994.

Source : secrétariat d’État à l’Outre-mer.

    Ces fonds représentent donc des sommes considérables, toujours renforcées par des cofinancements nationaux ou locaux. Mais, alors qu’ils étaient prévus pour la période 1994-1999, ils ne sont, à l’heure actuelle, engagés qu’à hauteur de 74,68 % et payés à hauteur de 42,66 %.

    Ces taux varient selon les départements, en fonction de l’avancement des programmes : le plus élevé concerne les fonds structurels en Guadeloupe où 86 % de crédits communautaires ont été engagés et 52 % payés, ce qui n’est pas un taux exceptionnel.

    En Guadeloupe, l’ensemble des opérations agréées a permis de programmer l’engagement de plus de 3 milliards de francs de crédits publics. L’aéroport international du Raizet est ainsi achevé à hauteur des engagements prévus. D’importants crédits (162 millions de francs, dont 60 millions de francs du FEDER) ont été mobilisés à la suite des cyclones Luis et Marilyn pour permettre la reconstruction des infrastructures routières, aériennes et maritimes. Le FEOGA, engagé à hauteur de 56 %, est utilisé principalement au financement des mesures de développement de la filière banane et à des projets d’irrigation.

    En dépit des difficultés de démarrage, la Martinique a redressé en 1998 la situation de l’exécution des programmes communautaires prévus dans le DOCUP, ce qui lui permet d’afficher un taux d’engagement des fonds structurels de 75 %. Grâce au FEDER, qui lui attribue 206 millions de francs, les travaux d’infrastructures de la zone industrialo-portuaire de la pointe des Grives ont pu démarrer en juin 1998.

    En Guyane, les crédits FEDER ont principalement bénéficié au financement d’infrastructures de désenclavement et des équipements de formation.

    A la Réunion, les crédits communautaires sont globalement plus importants que dans les autres DOM (environ 5,3 milliards de francs). Le FEDER contribue principalement au financement du grand projet « basculement des eaux d’ouest en est ». Le FEOGA présente un très bon niveau d’engagement et les crédits du FSE sont consommés chaque année à 100 %.

    · Le programme POSEIDOM

    Ce programme offre la possibilité de maintenir, étendre ou adapter les mesures communautaires afin de mieux répondre aux spécificités des DOM, d’arrêter des mesures particulières applicables à ces seuls départements en fonction de la situation locale, et permettre ainsi leur rattrapage économique et social. Il se décline en trois volets : agriculture, pêche et environnement.

    Malgré le retard de mise en œuvre et la lourdeur de la gestion de ce programme, les DOM ont perçu, en 1998, 200 millions de francs pour le volet agricole : 40 % ont été attribués au secteur de la canne à sucre, 20 % à l’approvisionnement en céréales et 27 % au secteur des productions animales.

    Dans le cadre du volet pêche, on notera l’aide de 4,5 millions de francs destinée à un programme aquacole martiniquais et le soutien important, à hauteur de 12 millions de francs, à la certification et la promotion de la crevette de Guyane.

    · Les interventions du Fonds européen de développement (FED)

    Mayotte et Saint-Pierre-et-Miquelon n’ayant pas le statut de département d’outre-mer, ils ne bénéficient pas des fonds communautaires au même titre que les départements. En vertu d’un statut d’associés, ils reçoivent en revanche des aides du FED.

    Pour Mayotte, elles se sont élevées à 6,7 millions d’euros, soit 44 millions de francs, provenant du VIIème FED, auxquels il faut ajouter 500.000 euros, près de 3,3 millions de francs, provenant d’un reliquat de VIème FED et versés aux pays et territoires d’outre-mer les moins développés. Les engagements ont atteint 97,67 %, les interventions se concentrant sur la mise à niveau des infrastructures, avec des résultats satisfaisants.

    A Saint-Pierre-et-Miquelon, le concours de VIIème FED de 3,4 millions d’euros (22,3 millions de francs) a permis de financer une partie de la construction de l’aérogare dont le coût global était de 21,5 millions de francs.

        b) Une réforme destinée à favoriser une meilleure gestion

    La réforme, initiée par la Commission européenne dans l’Agenda 2000 du 18 mars 1998, et achevée lors du sommet de Berlin de mars 1999, s’est concrétisée pour les fonds structurels par l’adoption et la publication de nouveaux règlements, le 26 juin 1999.

    En ce qui concerne les DOM, elle a des conséquences de trois ordres :

    · Les montants financiers leur revenant sont accrus

    La réforme obéit en effet à une logique de concentration des aides communautaires en faveur des régions en retard de développement, ce qui se traduit par la réduction du nombre des objectifs de six à trois.

    L’objectif 1 intitulé « promouvoir le développement et l’ajustement structurel des régions en retard de développement » reste pratiquement inchangé dans ses enjeux et s’est vu attribuer près de 70 % de l’enveloppe des fonds structurels.

    Le montant alloué aux DOM est de 3,254 milliards d’euros, soit 21,344 milliards de francs, pour une période de sept ans (2000-2006). Cette enveloppe représente une augmentation de 64,1 % par rapport au paquet Delors (1994-1999). Le partage entre les DOM n’est pas encore connu.

    · La continuité des objectifs est assurée

    Les règles d’éligibilité aux fonds structurels restent globalement inchangées en ce qui concerne le FEDER, le Fonds européen d’orientation de la pêche (IFOP) et le FSE.

    · De nouvelles règles doivent favoriser une gestion plus rigoureuse et incitative

    Les modalités de gestion ont été profondément modifiées en vue d’assurer une exécution plus efficace des programmes. Les tranches annuelles des crédits d’engagement seront désormais fixes et indexées de manière forfaitaire (à 2 %). Afin d’accorder une facilité de trésorerie aux régions, un acompte de 7 % sur la totalité des programmes sera versé dès l’adoption des documents uniques de programmation.

    En revanche, les crédits devront être consommés régulièrement puisqu’il est prévu désormais de dégager d’office tout engagement sur lequel n’est intervenu aucun paiement pendant deux ans.

    Enfin, le règlement général prévoit qu’une réserve de 4 % des crédits des documents uniques de programmation, affectée à la réserve de performance, sera versée à mi-parcours des programmes (31 mars 2004) en fonction de la réalisation effective des objectifs que se seront fixés les régions dans leurs plans.

    Concernant les contrôles, la nouvelle réglementation a confirmé la responsabilité des États membre et aggravé les sanctions.

    Pour ce qui est des deux collectivités d’outre-mer, à l’issue des négociations relatives à la révision à mi-parcours de la décision d’association, la France a obtenu une enveloppe de 50,3 millions d’euros (330 millions de francs) au titre du VIIIème FED, soit une augmentation de 25 % par rapport au VIIème FED.

    Le secrétariat d’État à l’outre-mer a effectué le partage entre les différents pays et territoires d’outre-mer : Mayotte recevra 10 millions d’euros (65,6 millions de francs), soit une augmentation de 49 % par rapport au VIIème FED, qu’elle consacrera à un projet de traitement et assainissement des eaux ; Saint-Pierre-et-Miquelon se voit attribuer 4 millions d’euros (26,2 millions de francs), soit 17,6 % d’augmentation, qui financeront la reconstruction de l’hôpital de Saint-Pierre, la rénovation du système d’assainissement des eaux et l’amélioration de la piste de l’aérodrome de Miquelon.

    Il apparaît ainsi que les fonds européens apportent, bon an mal an, un complément nécessaire aux faibles investissements des départements et collectivités territoriales d’outre-mer et aux dotations encore insuffisantes de l’État.

II.– L’INSERTION CONSTITUE
LA PRIORITÉ AFFICHÉE DU GOUVERNEMENT

    Depuis 1996, un regroupement a été effectué au sein du budget de l’Outre-mer de tous les fonds concourant à la lutte contre l’exclusion. Cela permet une meilleure lisibilité de la politique suivie à l’égard des DOM, même si DOM et TOM ne font pas l’objet d’une distinction claire. Mais l’effort de solidarité doit aussi prendre en compte les dépenses fiscales en faveur de l’outre-mer.

    Le tableau ci-dessous, qui rassemble des données extraites de l’annexe au projet de loi de finances pour 2000 « Évaluation des voies et des moyens », retrace les principales mesures de dépenses fiscales pour 1999 et 2000. Le document ne chiffre pas le coût de certaines dépenses fiscales (comme, par exemple, la mesure 910101 – Droit de consommation particulier sur les tabacs consommés dans les départements de Martinique et Guadeloupe). De plus, là encore, certains dispositifs sont communs aux DOM et aux TOM mais leur coût est évalué globalement. La liste qui suit donne néanmoins une idée assez juste de l’importance de l’effort consenti.

ÉVALUATION POUR 1999 ET 2000 DES DÉPENSES FISCALES BÉNÉFICIANT AUX DOM

(en millions de francs)

Impôt concerné

N° de la mesure

Nature de la mesure

Estimation

1999

Estimation

2000

IR

110210

Réduction d’impôt au titre des investissements effectués dans les DOM-TOM par les personnes physiques

500

500

IR

110302

Réduction, dans la limite d’un certain montant, pour les contribuables des DOM de la cotisation résultant du barème (30 % en Guadeloupe, Martinique et Réunion, et 40 % en Guyane)

1.500

1.200

IR

180303

Imputation sur le revenu global, sur agrément antérieur au 15 septembre 1997, des déficits industriels et commerciaux non professionnels correspondant à des investissements effectués dans certains secteurs économiques de l’outre-mer et à leur exploitation

760

760

IR – IS

230104

Déduction des revenus et bénéfices investis dans les départements d’outre-mer et dans les territoires d’outre-mer

900

100

IS

300302

Exonération, sur agrément, des bénéfices en cas de création d’activité nouvelle dans les départements d’outre-mer

110

110

IS

320102

Taxation sur une base réduite des résultats provenant d’exploitations situées dans les départements d’outre-mer.

Disposition applicable jusqu’au 31 décembre 2001

300

300

Taxe
sur les salaires

600201

Diminution du taux de la taxe dans les DOM (taux applicables : 2,95 % dans les départements de la Guadeloupe, de la Martinique et de la Réunion, 2,55 % pour la Guyane)

560

600

TVA

710102

Exonération de certains produits et matières premières ainsi que des produits pétroliers

730

730

TVA

710103

Régime des départements d’outre-mer ; fixation des taux à :

– 9,5 % pour le taux normal
– 2,1 % pour le taux réduit

2.900

3.000

TVA

710104

Régime particulier des départements d’outre-mer. Déductibilité de la taxe afférente à certains produits exonérés

600

610

TIPP

800401

Exclusion des DOM du champ d’application de la TIPP

500

500

Source : Évaluation des voies et des moyens, projet de loi de finances pour 2000.

    Quant aux exonérations de cotisations patronales définies par les articles 3,4 et 5 de la loi n° 94–638 du 25 juillet 1994 tendant à favoriser l’emploi, l’insertion et les activités économiques dans les DOM, leur montant pour 1997 s’élevait à 872,1 millions de francs ; il atteint 969,4 millions de francs en 1998. Elles sont prises en charge par le budget des charges communes.

      A.– L’EMPLOI

      1.– Le Fonds pour l’emploi dans les départements d’outre-mer et à Saint-Pierre-et-Miquelon 

    Le Fonds pour l’emploi dans les DOM et à Saint-Pierre-et-Miquelon (FEDOM) regroupe les financements des actions spécifiques menées par l’État en faveur de l’emploi et de l’insertion.

    Conformément aux dispositions du décret n° 95-984 du 25 août 1995 qui organise le fonctionnement et la gestion du FEDOM, les décisions relatives à la gestion du fonds sont arrêtées par un comité directeur qui comprend, outre les représentants des administrations centrales concernées (budget, emploi-solidarité et outre-mer), des parlementaires d’outre-mer ainsi que les préfets des départements concernés, ce qui permet d’adapter la gestion des mesures aux situations locales.

    Les actions financées par le FEDOM sont les suivantes :

      · le financement du programme des contrats emploi-solidarité (CES) ;

      · le versement aux agences d’insertion d’une participation financière aux contrats d’insertion par l’activité (CIA) ;

      · l’exonération des charges sociales et les primes des contrats d’accès à l’emploi (CAE) ;

      · l’exonération des charges sociales pour les contrats de retour à l’emploi (CRE) en cours ;

      · le financement du dispositif instituant une prime à la création d’emplois ;

      · la dotation des agences d’insertion de la part de la créance de proratisation réservée à l’insertion ;

      · le financement du dispositif « nouveaux services – nouveaux emplois » (emplois-jeunes) ;

      · le financement des contrats emplois-consolidés, (CEC) à partir de 2000, alors qu’il était auparavant assuré par le ministère de l’Emploi et de la solidarité.

    Le principe de fongibilité des crédits des FEDOM (hors les crédits destinés à financer les emplois-jeunes) permet de redéfinir les priorités et de modifier les différentes enveloppes budgétaires en fonction du nombre de solutions retenues et de leur répartition.

      2.– Bilan et perspectives pour 2000

        a) Les actions du Fonds en 1999

    Pour 1999, le montant total des crédits inscrits au chapitre 44-03 s’est élevé à 1.808 millions de francs, dont 1.363 millions de francs pour assurer le financement des mesures d’insertion et 445 millions de francs pour celui des emplois-jeunes. Cette dotation a été abondée en cours de gestion des crédits d’un montant de 193,59 millions de francs correspondant à la part d’insertion de la créance de proratisation pour 1999. Viennent également s’y ajouter 121 millions de francs de crédits reports de 1998. En cours de gestion, l’enveloppe globale du FEDOM s’élève donc à 2.123,68 millions de francs.

    L’action du FEDOM pour 1999 a été définie par le comité directeur du 13 janvier 1999 puis complétée par le comité permanent du 8 juillet 1999. L’effort réalisé en 1998 a été maintenu, avec la mise en place de 34.000 CES, 15.000 CIA et 7.000 CAE. Par ailleurs, l’ouverture de 3.500 nouveaux postes d’emplois-jeunes a également été décidée, ce qui portera à 7.200 le nombre total de ceux qui sont financés par le FEDOM.

    Un premier bilan effectué au 30 juin 1999 a fait apparaître certaines divergences entre les départements en ce qui concerne l’utilisation des CES : si le nombre global de conventions signées sur cette période reste conforme aux prévisions établies en début d’année, la Réunion a témoigné de forts besoins, à l’inverse de la Martinique, en sous-consommation.

    Sur l’exercice 1999, les prévisions en matière d’exécution s’inscrivent comme le montre le tableau suivant :

EXÉCUTION DES CRÉDITS DU FEDOM EN 1999

(prévisions)

 

Loi de finances initiale 1999

Exécution 1999

(prévisions)

Mesures d’insertion

Dotation budgétaire (en millions de francs)

Nombre
de contrats

Dotation budgétaire (en millions de francs)

Solde prévisionnel

(en millions de francs)

CES

662,2

34.000

660,42

1,78

CIA

179,4

15.000

182,03

– 2,63

CAE

495,8

7.000

182

313,8

Primes

14,6

148

12

2,6

CRE

10

10

Études

1

(nd)

0,66

0,34

Emplois-jeunes

567,08

3.500

586,12

– 19,04

Total

1.930,08

59.648

1.645,2

284,85

Source : secrétariat d’État à l’Outre-mer.

        b) Les perspectives pour 2000

    Le montant des crédits du FEDOM est porté pour 2000 à 2.101,7 millions de francs, soit une augmentation de 16,24 %, provenant essentiellement du transfert de 291,7 millions de francs en provenance du ministère de l’Emploi et de la solidarité pour financer les contrats emplois-consolidés.

    A hauteur de 1.463,2 millions de francs, il financera environ 64.500 mesures nouvelles d’insertion :

    · 35.000 contrats emploi–solidarité (pour un coût de 631,5 millions de francs, inscrit à l’article 11 nouveau du chapitre 44-03) ;

    · 7.000 contrats emplois–consolidés, jusque là financés sur le budget du ministère de l’Emploi (291,7 millions de francs, inscrits à l’article 12, nouveau)

    · 15.000 contrats d’insertion par l’activité , destinés à des bénéficiaires du RMI (186 millions de francs) ;

    · 7.500 contrats d’accès à l’emploi (354 millions de francs).

    Le rapport Fragonard estime qu’une rénovation et une adaptation du CIA sont nécessaires : durée hebdomadaire plus longue, mais durée du contrat plus courte, le renouvellement n’étant possible qu’une fois et n’étant pas automatique, participation financière des collectivités locales à hauteur de 15 %… Il juge les moyens insuffisants : « Au strict minimum, c’est un doublement de l’enveloppe budgétaire affecté aux CIA qui est nécessaire, sans la prendre sur celles des CES comme cela a été le cas ces dernières années ».

    Pour ce qui est des CAE, il salue le recentrage de mars 1999 mais souhaite que l’on aille plus loin : « l’enveloppe budgétaire doit être rééquilibrée à 10.000 embauches par an, et être garantie sur plusieurs années à ce niveau, afin de permettre à tous les acteurs locaux de travailler dans la durée, sans à coup ».

        c) Les emplois-jeunes

    Depuis le 1er janvier 1998, le fonds pour l’emploi dans les départements d’outre-mer et dans la collectivité territoriale de Saint-Pierre-et-Miquelon assure le financement des emplois-jeunes créés par les collectivités locales, leurs établissements et diverses associations, dans le cadre du dispositif « nouveaux services – nouveaux emplois » défini par la loi n° 97–940 du 16 octobre 1997.

    A cet effet, une enveloppe de 300 millions de francs a été ouverte en 1998 permettant d’assurer, compte tenu de la montée en charge, le financement de 5.000 emplois-jeunes. En 1999, une dotation globale de 3.500 nouveaux emplois-jeunes a été prévue, hors adjoints de sécurité et aides éducateurs, rémunérés sur le budget des ministères de l’Intérieur et de l’Éducation nationale.

    A ces emplois-jeunes, s’ajoutent donc ceux pris en charge par le ministère de l’Éducation nationale (2.591 aides éducateurs) ainsi que ceux financés par le ministère de l’intérieur (134 adjoints de sécurité).

    Le tableau ci-dessous établit le bilan des emplois-jeunes créés à la date du 30 juin 1999 :

EMPLOIS-JEUNES DANS LES DOM : BILAN

 

FEDOM

Éducation nationale

Intérieur

Total

général

 

Emplois créés au 30 juin

1999

Embauches non encore effectuées

Total emplois prévus par convention

Postes aides éducateurs
créés

Postes adjoints sécurité créés

 

Guadeloupe

586

41

627

568

34

1.188

Guyane

364

37

401

265

16

645

Martinique

1.742

138

1.880

487

27

2.256

Réunion

3.077

361

3.438

1.271

57

4.405

Saint-Pierre-et-Miquelon

15

15

15

Total

5.784

577

6.361

2.591

134

8.509

Source : secrétariat d’État à l’Outre-mer.

    Ces résultats sont en forte hausse par rapport à ceux enregistrés au 1er juillet 1998 pour ce qui concerne les emplois-jeunes financés par le FEDOM. Quand le nombre de postes d’aides éducateurs est stable – ils étaient déjà 2.527 au 1er juillet 1998 – et celui des adjoints de sécurité en progression de 50 %, le nombre total d’emplois prévus par convention marque une croissance de près de 125 %, ce qui témoigne de la montée en puissance du nouveau dispositif. Au 1er juin 1999, 60 % de l’objectif de 3.500 nouveaux postes en 1999 étaient déjà atteints, si bien que l’enveloppe prévue pour cet exercice sera certainement dépassée avant la fin de l’année.

    Pour ce qui est des embauches effectuées, les employeurs sont essentiellement :

    · les collectivités locales, à hauteur de 32,48 % de l’effectif total : l’implication des collectivités locales est moins forte qu’en métropole où elles représentent 38,51 % des employeurs des emplois-jeunes, mais l’écart tend à se réduire (il était de 32,48 % au 1er juillet 1998 lorsque la proportion était de 40,4 % en métropole) ; de plus, il faut souligner que les conseils généraux et régionaux, essentiellement en Martinique et à la Réunion, ont cofinancé de manière importante les emplois créés par les communes et les associations ;

    · les associations (54,95 % des emplois créés) ;

    · les établissements publics (9,46 % de l’effectif), dont la part baisse nettement (15,25 % au 1er juillet 1998).

    Les tâches effectuées concernent principalement les secteurs :

    · de la famille, de la santé et de la solidarité, secteur qui regroupe 15,74 % des emplois créés ;

    · de l’éducation, pour 15,12 % ;

    · du sport, avec 14,37 % de l’effectif global ;

    · puis ceux de la culture, du logement et de la vie du quartier, ou encore celui de l’environnement (respectivement 9,67 %, 9,55 % et 12,41 %).

    La répartition entre ces différents secteurs d’activités reste à peu près stable et conforme à celle de la métropole, sauf en ce qui concerne le secteur de l’environnement, plus développé en métropole (14,39 %), mais qui connaît une hausse outre-mer depuis le 1er juillet 1998.

    S’agissant du financement de ce dispositif, l’aide de l’État s’élève à 94.670 francs par an et par emploi-jeune, soit 80 % du coût d’un salarié payé au SMIC. Au titre de l’exercice 1999, l’effet report de l’effectif de 1998 est évalué à 350 millions de francs.

    Pour 1999, l’ouverture de 3.500 nouveaux emplois-jeunes étant prévue, une dotation de 445 millions de francs a été accordée à l’article 80 du chapitre 44–03 pour financer les emplois-jeunes : le projet de loi de finances pour 2000 propose de l’augmenter de 38,3 %, à 615,5 millions de francs.

    Le bilan des contrats aidés par le FEDOM, pour chaque département et Saint-Pierre-et-Miquelon, figure dans le tableau ci-après, qui montre l’ampleur du phénomène des contrats aidés dans ces zones aux prises avec des difficultés économiques et sociales considérables :

NOMBRE DE BÉNÉFICIAIRES DE CONTRATS AIDÉS DEPUIS 1994 FINANCÉS PAR LE FEDOM

Départements

1994

1995

1996

1997

1998

1999 (1)

2000 (2)

Guadeloupe

CES

9.851

7.826

9.372

6.368

4.641

4.760

nd

CIA

2.500

3.450

3.450

3.450

nd

CAE

1.276

2.906

2.610

1.730

1.731

nd

CRE

1.399

123

nd

Emploi-jeunes

ns

ns

ns

ns

339

748

nd

Total

11.250

9.225

14.778

12.428

10.160

10.689

nd

Guyane

             

CES

2.595

3.147

3.229

2.376

2.529

2.725

nd

CIA

944

1.050

1.050

1.050

nd

CAE

431

628

729

434

444

nd

CRE

533

18

nd

Emploi-jeunes

ns

ns

ns

ns

209

250

nd

Total

3.128

3.596

4.801

4.155

4.222

4.469

nd

Martinique

CES

5.018

4.844

3.593

3.301

2.244

3.500

nd

CIA

1.055

3.150

3.150

3.150

nd

CAE

1.355

2.277

2.388

1.621

1.626

nd

CRE

1.530

235

nd

Emploi-jeunes

ns

ns

ns

ns

1.022

790

nd

Total

6.548

6.434

6.925

8.839

8.037

9.066

nd

Réunion

CES

24.278

34.130

28.552

26.043

26.594

22.865

nd

CIA

4.595

7.350

7.350

7.350

nd

CAE

3.737

6.482

4.853

3.157

3.179

nd

CRE

2.296

295

nd

Emploi-jeunes

ns

ns

ns

ns

2.114

1.700

nd

Total

26.574

38.162

39.629

38.246

39.215

35.094

nd

Saint-Pierre et Miquelon

CES

82

63

90

73

122

150

nd

CAE

14

12

20

17

20

nd

CRE

6

nd

Emplois-jeunes

ns

ns

ns

ns

9

12

nd

Total

88

77

102

93

148

182

nd

Total DOM

CES

41.833

50.010

44.836

38.161

36.130

34.000

35.000

CIA

9.094

15.000

15.000

15.000

15.000

CAE

6.813

12.305

10.600

6.959

7.000

7.500

CRE

5.755

671

Emplois-jeunes

ns

ns

ns

ns

3.693

3.500

3.000

Total

47.588

57.494

66.235

63.761

61.782

59.500

60.500

(1) Enveloppes physiques arrêtées par le comité permanent du FEDOM lors de sa réunion du 8 juillet 1999.

(2) Les enveloppes physiques prévues pour 2000 n’ont été définies pour le moment que de façon globale et ne peuvent être réparties par département et collectivité. Cette répartition sera effectuée par le comité directeur du FEDOM de janvier 2000.

Source : secrétariat d’État à l’outre-mer.

      B.– LE REVENU MINIMUM D’INSERTION

    Comme en métropole, le dispositif du revenu minimum d’insertion (RMI) est un maillon essentiel de la lutte contre l’exclusion dans les DOM. Le mécanisme connaît pourtant quelques modifications liées à leurs particularités.

      1.– L’évolution non maîtrisée du nombre de bénéficiaires

    Depuis août 1993, on constate une augmentation ininterrompue du nombre d’allocataires du RMI. Fin décembre 1998, ce chiffre se monte à 118.822 bénéficiaires, dont 27,2 % de familles monoparentales et 52,6 % d’allocataires isolés. La croissance par rapport à fin 1997 est de + 6,8 % quand elle était en métropole de + 3,8 %. Les RMistes représentent plus de 15 % de la population.

    Corrélativement, le montant des dépenses d’allocation augmente depuis 1994, pour atteindre 2.138 millions de francs en 1997 et 2.271 millions de francs en 1998.

    Le rapport Fragonard explique le nombre très élevé d’allocataires de RMI par une série de raisons : la situation sociale et économique difficile, bien sûr, mais aussi la faiblesse de l’accès des habitants des DOM à d’autres dispositifs de revenu ou d’indemnisation (allocation parentale d’éducation, allocation chômage) et le caractère lacunaire des contrôles.

    Évoquant ce dernier problème, le rapport parle d’un « dispositif mal maîtrisé ». Il regrette la quasi-absence de dénonciation des situations anormales (travail non déclaré, concubinage…) par les services sociaux ou par les maires, qui en ont pourtant l’obligation légale, déplore que les commissions locales d’insertion ne proposent pratiquement jamais de suspension au préfet pour refus d’insertion, ce qui fait que, faute de suspension, « le RMI est devenu un dispositif d’assistance pour une bonne partie des bénéficiaires ». Le rapport conclut que « l’avis général est qu’une partie importante, voire une majorité pour certains, des bénéficiaires du RMI exercent une ou plusieurs activités non déclarées ».

    Le RMI perd ainsi une partie de sa raison d’être et constitue une sorte de « rente », indûment perçue. Étant donné le coût du dispositif, pour l’État, mais aussi pour les départements, souvent exsangues, qui financent une partie des mesures d’insertion, votre rapporteur spécial estime nécessaire que plus de rigueur soit appliquée dans l’avenir.

      2.– L’insertion des allocataires du revenu minimum d’insertion

    Rappelons que, dans le système en place actuellement, le barème du RMI applicable dans les DOM est égal à 80 % du montant fixé pour la métropole. L’allocation mensuelle moyenne s’élève à 1.655 francs, alors qu’elle est de 2.011 francs en métropole.

        a) Le mécanisme de la créance de proratisation

    En compensation du taux inférieur du RMI dans les DOM, l’État participe au financement d’actions d’insertion au profit des bénéficiaires du RMI, en plus de celles de droit commun. Ces crédits, appelés créance de proratisation du RMI, représentent la différence entre les allocations versées dans les DOM chaque année et le montant qu’elles auraient atteint, en prenant en compte le nombre de personnes qu’elles auraient concerné, si le barème métropolitain avait été appliqué.

    En 1999, le montant de cette créance s’est élevé à 815 millions de francs. La dotation prévue par le projet de loi de finances pour 2000 se monte à un total de 851,58 millions de francs.

    La créance est répartie, après avis des conseils d’administration des agences d’insertion et du comité directeur du FEDOM, entre une part insertion et une part logement social. En 1999, la part insertion était de 198,8 millions de francs, la part logement de 638,3 millions de francs.

    La créance de proratisation, hors la part consacrée au logement, est versée par le Fonds pour l’emploi dans les DOM (FEDOM) au budget des agences d’insertion créées pour élaborer et mettre en œuvre la politique d’insertion en faveur des bénéficiaires du RMI. La répartition s’opère en fonction du nombre d’allocataires dans chaque département.

DÉCOMPOSITION DE LA CRÉANCE DE PRORATISATION EN LOI DE FINANCES INITIALE POUR 1999

(en millions de francs)

 

Créance 1998

Part insertion

Part logement

Part insertion
(en %)

Part logement
(en %)

Guadeloupe

171,77

45,23

126,54

26,33

73,67

Guyane

60,09

14,71

45,37

24,49

75,51

Martinique

170,45

41,26

129,18

24,21

75,79

Réunion

429,35

96,35

333

22,44

77,56

DOM

831,66

197,55

634,1

23,75

76,25

Source : secrétariat d’État à l’Outre-mer.

    Si les prestations du RMI outre-mer sont relevées au niveau des prestations versées en métropole, comme le Gouvernement semble décidé à le faire, ce mécanisme disparaîtra, ce qui risque d’avoir des conséquences négatives en termes d’insertion et de logement social.

        b) Le rôle des agences départementales d’insertion

    La loi du 25 juillet 1994 a créé les agences départementales d’insertion afin d’améliorer les conditions de l’insertion des bénéficiaires du RMI. Ces quatre agences disposent aujourd’hui de 428 emplois permanents et sont les employeurs uniques des bénéficiaires du RMI recrutés en contrats d’insertion par l’activité (CIA).

    Les budgets des agences se sont répartis comme suit en 1998 et en 1999 :

BUDGETS PRIMITIFS DES AGENCES D’INSERTION (1998-1999)

(en millions de francs)

 

1998

1999

Guadeloupe

206,6

199,5

Guyane

76,7

74,7

Martinique

186,8

202,7

Réunion

359,6

404,5

Total

865,7

881,4

Source : ministère de l’Emploi et de la solidarité.

    Le budget des agences d’insertion regroupe :

      · une participation financière de l’État, comportant la part insertion de la créance de proratisation et la contrepartie de l’allocation du RMI pour les bénéficiaires d’un contrat d’insertion par l’activité (193,6 millions de francs, contre 179,1 millions de francs en 1998) ;

      · une participation financière du département qui correspond au moins à 20 % du montant des sommes versées par l’État au titre de l’allocation du RMI, déduction faite des 3,75 % consacrés à la couverture complémentaire de la sécurité sociale. Ces crédits représentaient en 1999 389,77 millions de francs ;

      · la participation du FEDOM au financement des contrats d’insertion par l’activité (182,03 millions de francs en 1999) ;

      · la contribution financière des utilisateurs auprès desquels l’agence place des personnes en CIA.

    Compte tenu des réformes institutionnelles, en voie d’achèvement, sur lesquelles nous allons revenir, les agences n’ont pas entrepris de changements radicaux de leurs programmes durant l’année 1999, d’autant que la loi n’a pas modifié leur mission. Le comité directeur du FEDOM leur a fixé un objectif initial de 15.000 contrats d’insertion par l’activité.

    Les agences élaborent le programme départemental d’insertion, qui représente 40 % du budget global, et le programme annuel de tâche d’utilité sociale qui représente 48 % des dépenses et consiste principalement dans la mise en œuvre des contrats d’insertion par l’activité.

        c) La réforme institutionnelle en cours

    Les agences ont été mises en place le 1er janvier 1995 mais les élus locaux ont rapidement émis des reproches à l’encontre du dispositif de lutte contre l’exclusion spécifique aux DOM, en particulier concernant la trop grande complexité des procédures administratives et budgétaires, imposée par les textes, et la remise en cause de certains des principes fondamentaux de la décentralisation.

    Le système devait évoluer dans le sens d’une plus grande déconcentration des décisions et d’une meilleure prise en compte du rôle des élus d’outre-mer. Il fallait mettre en place un cadre de fonctionnement rénové, permettant néanmoins aux agences de demeurer l’instrument partenarial privilégié de l’État et des départements dans la lutte contre l’exclusion.

    La loi du 29 juillet 1998 a donc transformé les agences d’insertion, antérieurement établissements publics nationaux, en établissements publics locaux à caractère administratif. Cette évolution a pour effet à la fois d’alléger les procédures administratives et les tutelles des ministères chargés de l’outre-mer et du budget, et d’accroître le rôle des autorités locales, notamment lors de la nomination des directeurs, les présidents de conseil généraux disposant désormais d’un pouvoir de proposition.

    Le rapport Fragonard souligne les difficultés auxquelles se heurtent les agences : elles n’ont pas pour mission d’assurer l’instruction et le suivi social de l’ensemble des bénéficiaires et ne s’occupent réellement que d’une partie d’entre eux, faute de moyens humains adéquats. En conséquence, des dizaines de milliers de bénéficiaires du RMI ne bénéficient d’aucun suivi social, ni d’insertion. Ce manque de moyens est accentué par le fait que, depuis la création des agences, les autres services publics ont tendance à leur renvoyer toute la responsabilité en matière d’insertion.

    Il est donc suggéré de supprimer les commissions locales d’insertion et de confier aux agences un double rôle : la contractualisation d’un plan local d’insertion avec chaque commune et l’élaboration et la signature des contrats d’insertion. Des emplois qualifiés doivent être créés et les agences doivent se recentrer sur l’insertion professionnelle, en renforçant leur partenariat avec l’ANPE.

    Les réformes en cours sont d’ordre purement institutionnel et ne tirent pas – pas encore ? – les conséquences des constats de dysfonctionnements faits par la mission Fragonard.

    Le Premier ministre, au cours de son voyage aux Antilles, a seulement promis que la future loi d’orientation favorisera « le retour à l’emploi des bénéficiaires du RMI, en permettant un cumul partiel de l’allocation et la rémunération du travail, notamment du travail intermittent ».

      3.– L’exception de Mayotte : les « chantiers de développement local »

    Le dispositif du RMI n’existe pas à Mayotte : la collectivité territoriale, tout comme les trois territoires du Pacifique Sud, continue à bénéficier d’un autre dispositif, celui des « chantiers de développement local ».

    Mis en place par plusieurs circulaires du ministère chargé du travail et de l’emploi des 22 décembre 1971, 12 février 1978 et 10 juin 1983, au titre de l’aide aux travailleurs sans emploi, il a été rénové par la circulaire du 15 juillet 1991. Les DOM n’en bénéficient plus depuis 1990, compte tenu du développement des actions d’insertion menées dans le cadre du RMI et de la création des contrats emploi-solidarité.

    Ce dispositif permet aux services de l’État, aux collectivités locales et à leurs établissements publics de donner à des catégories de population particulièrement défavorisées et rencontrant des difficultés d’accès à l’emploi, une activité rémunérée, en contrepartie d’un travail d’intérêt général, pendant une durée déterminée de trois ans au plus. Il permet d’apporter une aide à la réinsertion sociale et professionnelle des travailleurs privés d’emploi. Les chantiers de développement local s’adressent à la fois aux adultes et aux jeunes, ces derniers bénéficiant de dispositions destinées à compléter leur formation initiale.

    Les activités concernées sont de deux types :

    · travaux d’entretien, d’assainissement et de remise en état du patrimoine public (bâtiments, routes, voies d’eau, forêts) ;

    · actions sociales, service de l’usager, activités culturelles et sportives, lutte contre la pauvreté.

    Ce dispositif était financé sur les crédits de l’article 41 du chapitre 46-94 jusqu’au projet de loi de finances pour 2000. Désormais, la partie revenant à Mayotte est séparée des fonds attribués aux territoires d’outre-mer et à la Nouvelle-Calédonie, qui figurent toujours à l’article 41 : les chantiers de développement local à Mayotte bénéficient d’une dotation de 8 millions de francs, incluse dans le nouvel article 42 du chapitre 46-94
    – Emploi, formation et insertion à Mayotte.

      C.– LE LOGEMENT

    La situation du logement dans les DOM est toujours un point préoccupant. La pression démographique, confirmée par les résultats du dernier recensement, les difficultés liées à la viabilisation foncière et les ressources modestes des ménages concourent à y créer des conditions difficiles.

    Le parc de logement est assez réduit, créant une inflation des loyers nourrie également par les « sur-rémunérations » de la fonction publique. Le niveau des loyers à La Réunion dépasse par exemple celui de la région parisienne.

    Après avoir connu une très forte hausse de 58 % en loi de finances initiale pour 2000, les crédits de la ligne budgétaire unique d’aide au logement dans les DOM, à Mayotte et Saint-Pierre-et-Miquelon augmentent modestement de 2,3 %, passant de 897,4 millions de francs à 918 millions de francs en crédits de paiement. L’augmentation constante des crédits fait suite à une consommation très forte, en 1998, des crédits de paiement affectés à la politique de logement dans les DOM, consommation qui prouve l’importance des besoins.

    L’effort total au titre du logement permettra de financer la construction ou l’amélioration de 13.400 logements :

    · 11.000 constructions neuves aidées dans le cadre notamment du prêt locatif intermédiaire ;

    · 2.400 logements aidés au titre de la résorption de l’habitat insalubre.

    La ligne budgétaire unique finance l’ensemble des aides à la pierre dans les DOM et à Mayotte, tant sur la location, l’accession à la propriété et l’amélioration du parc locatif social et des logements des propriétaires occupants. Son montant a évolué ainsi depuis 1997 :

LIGNE BUDGÉTAIRE UNIQUE
(autorisations de programme)

(en millions de francs)

1997

1998

1999

2000

1.150

1.096

1.096

1.100

Sources : budgets votés et projet de loi de finances.

    Il faut souligner que ces crédits, en autorisations de programme, avaient diminué en 1998 compte tenu de la baisse du taux de TVA applicable au logement social dans les DOM.

    Comme en 1999, à 4 millions près, les autorisations de programme se montent à 1.100 millions de francs, mais leur répartition est partiellement modifiée :

    · 974 millions de francs seront consacrés aux diverses aides au logement (chapitre 65-01, article 10), les crédits diminuant de 30 millions de francs, au profit du nouvel article 30 ;

    · à 96 millions de francs, le chapitre 65-01, article 20 – Résorption de l’habitat insalubre voit ses dotations en autorisations de programme stagner mais les crédits de paiement croissent de 50 % par rapport au niveau de la loi de finances pour 1999 qui prévoyait leur doublement ;

    · un nouvel article 30 constitue l’aide exceptionnelle de l’État prévue à l’article 3 de la loi n° 96-1241 du 30 décembre 1996 relative à l’aménagement, la protection et la mise en valeur de la zone dite des cinquante pas géométriques dans les DOM, destinée à faciliter les acquisitions de terrains, situés dans cette zone, sur lesquels des habitations ont été construites. Il est doté de 30 millions de francs, pris sur la dotation de l’article 10.

    Pour financer le logement, il faut ajouter à ces crédits 75 % de la créance de proratisation du RMI, qui s’élève à 861,58 millions de francs, en hausse nette de 5,7 %. Le tableau suivant fait le point sur l’évolution du montant de la créance de proratisation consacré au logement. Environ 650 millions de francs devraient abonder les crédits en 2000.

PART DE LA CRÉANCE DE PRORATISATION
BÉNÉFICIANT AU LOGEMENT

(en millions de francs)

1996

1997

1998

1999

575

556

592

638

Source : secrétariat à l’Outre-mer.

      D.– LA POLITIQUE SOCIALE ET CULTURELLE

      1.– Des actions diversifiées

    Le chapitre 46-94 – Action sociale et culturelle est doté de 185,53 millions de francs, en hausse de près de 28 %. Si on inclut la subvention de 43,65 millions de francs à l’Agence nationale pour l’insertion et la promotion des travailleurs d’outre-mer (ANT), agence sur le fonctionnement de laquelle nous allons revenir, ce sont 135,89 millions de francs qui bénéficient aux DOM et aux collectivités locales d’outre-mer, principalement au travers des trois articles suivants.

    L’article 10 – Activités sportives, culturelles et de jeunesse dans les DOM est doté de crédits qui permettent de subventionner des associations, organismes à but non lucratif, ou encore d’établir des conventions avec d’autres ministères, pour mettre en place des actions d’animation, de formation, de préparation à des échéances sportives, et de manifestations diverses touchant au cinéma, à la danse, à la musique comme aux arts plastiques. Par ailleurs, le secrétariat d’État à l’Outre-mer participe financièrement à l’aide à l’édition ou à l’organisation de colloques. Le Gouvernement souhaitant mettre l’accent sur la politique culturelle, la dotation, de 3 millions de francs en 1999, est portée à 7,5 millions dans le projet de loi de finances pour 2000, grâce à l’ouverture de moyens nouveaux.

    Dans le secteur sportif, l’année 1999 a été marquée par le soutien à la présence des délégations de Nouvelle-Calédonie et Wallis-et-Futuna aux Jeux du Pacifique sud, à Guam.

    Dans le secteur de la jeunesse et des actions socio-éducatives, des conventions signées avec le ministère de la Jeunesse et des sports et avec les fédérations nationales d’éducation populaire et autres organismes, ainsi que le soutien à des associations attestent de la volonté du secrétariat d’État à l’Outre-mer de poursuivre les efforts entrepris en matière de prévention, de formation et d’insertion des jeunes. En 1999, ont été menées ainsi, avec l’aide de l’État, des actions d’information sur la toxicomanie et la contraception en direction des jeunes de la Caraïbe.

    En matière culturelle, 1999 fut l’année de la création d’un fonds d’échanges culturels en partenariat avec le ministère chargé de la Culture et de la communication. La dotation, qui pourra atteindre 6 millions de francs, imputés à parité sur les budgets des deux ministères, vise à soutenir les manifestations et les projets permettant de favoriser la circulation des œuvres et des artistes et de développer les échanges entre l’outre-mer et la métropole, l’Europe et les pays situés dans leur environnement régional (Amérique latine et centrale, Caraïbes, Océan indien et Pacifique sud).

    Parmi les autres actions culturelles, on peut citer le partenariat établi par convention en 1998 pour trois ans avec le centre national du livre et créant une « librairie de l’outre-mer », visant à aider l’édition de livres de et sur l’outre-mer. Le secrétariat d’État a également aidé des éditeurs de Guyane, Martinique, Guadeloupe et Nouvelle-Calédonie à être présents au salon du livre de Paris, et soutenu l’organisation de l’exposition « Tropiques métis » au Musée des arts et traditions populaires de Paris.

    En l’an 2000, le renforcement des crédits inscrits sur ces deux articles donnera la possibilité de reconduire et de développer cette politique en matière de sports, de jeunesse et culture, en particulier pour contribuer à mettre en place, en étroite liaison avec le ministère de la Jeunesse et des sports, un fonds d’aide aux déplacements des jeunes et des sportifs d’outre-mer et un dispositif de soutien aux projets des associations d’originaires d’outre-mer vivant en métropole.

    L’article 31 – Préformation et formation professionnelle dans les DOM et collectivités territoriales dispose de crédits utilisés pour le financement du contrat de plan État-collectivité territoriale de Saint-Pierre-et-Miquelon (mesure de 466.666 francs prévue en 1999) et la subvention d’actions de formation menées par des associations à but non lucratif.

    Depuis 1998, une action nouvelle est inscrite à l’article 31 : la formation individualisée mobilité qui est un dispositif permettant de faire suivre une formation qualifiante de niveau V en métropole à de jeunes originaires des DOM dans le cadre du crédit formation individualisée. Dans le projet de loi de finances pour 2000, la dotation pour l’ensemble de ces actions est quasiment stable, à 28,87 millions de francs en crédits de paiement (+ 0,87 %).

    L’article 32 – Bourses en faveur des étudiants mahorais est doté de crédits destinés au versement des bourses d’enseignement supérieur aux étudiants mahorais. Il importe de ne pas pénaliser ces étudiants, de plus en plus nombreux. Ainsi, les crédits prévus en projet de loi de finances pour 2000 sont stables par rapport à 1998 et 1999 (0,861 million de francs).

    Jusqu’au projet de loi de finances pour 2000, étaient notamment inscrits à l’article 41 du chapitre 46-94 – Actions d’insertion et de développement dans les TOM et dans la collectivité territoriale de Mayotte  les crédits destinés au financement du dispositif des chantiers de développement local à Mayotte. L’actuel projet de loi de finances crée un nouvel article 42 – Emploi, formation et insertion à Mayotte doté de 55,25 millions de francs : 44,75 millions de francs proviennent d’un transfert depuis le ministère de l’Emploi et de la solidarité, 8 millions de francs ont pour origine la dotation de l’article 41 et 2,5 millions de francs sont des moyens nouveaux destinés à l’action culturelle. Le transfert depuis le ministère de l’Emploi servira au financement des contrats emplois-solidarité et des contrats emplois consolidés dans la collectivité territoriale.

      2.– L’insertion en métropole : l’agence nationale pour l’insertion et la promotion des travailleurs d’outre-mer

        a) Les crédits

    L’article 20 du chapitre 46-94 – Action sociale et culturelle est doté de crédits permettant à l’agence nationale pour l’insertion et la promotion des travailleurs d’outre-mer (ANT) de mettre en œuvre la politique d’aide en faveur des originaires des DOM dans les domaines de la mobilité et l’insertion professionnelle.

    Afin de soutenir le développement de cette politique de mobilité, la subvention de l’État pour 2000 (43,65 millions de francs) traduit quasiment la reconduction des crédits accordés en 1999.

ÉVOLUTION DE LA DOTATION DE L’ÉTAT À L’ANT

(en millions de francs)

1991

100

1992

98

1993

84

1994

66

1995

64

1996

53

1997

50

1998

45

1999

43,70

2000

43,65

Sources : budgets votés et projet de loi de finances.

    L’ANT perçoit des ressources provenant du Fonds social européen et des crédits accordés dans le cadre des programmes « Leonardo da Vinci » et Regis II. Le tableau suivant décompose les ressources de l’ANT pour 1999.

LES RESSOURCES DE l’ANT (1999)

 

(en millions de francs)

(en %)

Subvention de l’État

44

33,9

Participation des collectivités territoriales

38

29,2

Financements communautaires

36

27,7

Prestations et divers

12

9,2

Total

130

100

Source : secrétariat d’État à l’Outre-mer.

    L’agence devrait connaître une augmentation de son activité en 2000. Cette évolution entraînera une augmentation des dépenses liées à l’insertion professionnelle. A cela s’ajoutera la prise en charge de dépenses nouvelles consécutives au désengagement du conseil général de la Réunion sur les prestations d’accueil. Ses dépenses de fonctionnement devraient enregistrer une croissance modérée.

    L’action de l’ANT passe principalement par deux dispositifs :

    · commandes de formation à l’Association pour la formation professionnelle des adultes (AFPA) : 1.500 places de stages en métropole sont ouvertes depuis 1998 en faveur des personnes originaires des DOM, avec des résultats décevants ;

    · le système de la formation individualisée mobilité, qui permet à des jeunes de faible niveau de qualification de suivre, dans le cadre du crédit de formation individualisée, une formation en métropole. Les crédits correspondants (27,94 millions de francs) ont été transférés au budget du secrétariat d’État à l’Outre-mer en 1998.

    Les autres outils sont les contrats de travail en alternance, les programmes régionaux de formation professionnelle, les programmes européens, ainsi que la mobilité des sportifs.

    Selon les chiffres fournis par l’ANT, la mobilité professionnelle dans les DOM aurait augmenté de 38,4 % entre 1995 et 1998 : ces résultats sont moins bons que les précédents (+ 66 % entre 1994 et 1997, en comptant la petite province des Iles Loyautés, en Nouvelle-Calédonie).

        b) Les mesures ébauchées à la suite des critiques de la Cour des comptes.

    La Cour des Comptes dans son rapport du 9 juillet 1998 insiste sur les questions suivantes :

    · La Cour indique que « en 1998 est apparue une nouvelle interrogation sur l’opportunité de reprendre une action sociale, sinon directe, du moins par le truchement d’associations subventionnées ».

    L’ANT a dû renoncer à l’action sociale directe pour concentrer son action sur l’insertion professionnelle par la mobilité qualifiante.

    Elle a signé des conventions-relais avec les associations afin de mieux assurer le suivi de la vie quotidienne des stagiaires présents dans des régions géographiquement éloignées de la délégation, notamment en facilitant l’accès au logement, ou à des moments où les services de l’ANT ne sont pas ouverts.

    A cette fin, la subvention ANT a été redéfinie plus précisément selon le type de relais, entre aide au fonctionnement des permanences et aides aux usagers, ou encore en calculant plus précisément le coût horaire.

    · Elle estime que « la réforme du règlement général devra être l’occasion :

      ù de refondre la grille des rémunérations principales, en tenant compte de l’attribution systématique, au titre des gratifications, d’un treizième mois ;

      ù de délimiter le champ et l’objet des primes et indemnités, en fonction des responsabilités exercées ;

      ù de supprimer l’automaticité des avancements à l’ancienneté tous les deux ans ».

    La réforme du règlement général est en cours et devrait permettre de supprimer et d’intégrer dans le salaire une part importante de primes et indemnités qui étaient demeurées distinctes en raison du caractère rigide de la grille jusqu’à ce jour.

    La direction de l’ANT a entamé, dès juillet 1998, des négociations avec les organisations syndicales afin de revoir le système de grille salariale.

    Au terme de sept mois de négociations, un accord sur l’automaticité des avancements à l’ancienneté, ayant reçu l’aval de la Commission interministérielle de coordination des salaires, a été conclu le 4 mars 1999 avec les organisations syndicales et notamment toutes celles ayant des représentants élus au comité d’entreprise.

    La mise en œuvre d’un nouveau système de rémunération devrait pouvoir générer une marge supplémentaire pour les augmentations individuelles par le jeu du différentiel avec le cadrage salarial.

· Elle considère qu’il est anormal que « l’essentiel de l’activité de l’agence (…) ne soit pas mentionné dans son objet social ».

    La réforme des statuts est à l’étude. Cette modification doit mentionner plus clairement l’activité de l’agence et notamment la mobilité.

· La Cour préconise l’établissement d’une convention cadre pluriannuelle avec les ministères de tutelle dans laquelle seraient définis de manière contractuelle les objectifs de l’agence. L’établissement d’un contrat de progrès n’a pas abouti à ce jour.

· La Cour recommande d’accroître le montant du capital de l’Agence et d’y faire entrer les quatre régions d’outre-mer.

    Une étude est actuellement en cours sur la meilleure structure à adopter par l’agence.

    Lors du renouvellement partiel des membres du conseil d’administration de l’ANT du 27 novembre 1998, afin d’ouvrir le conseil d’administration aux représentants des conseils régionaux, deux représentants des conseils régionaux de la Guyane et de la Réunion ont été nommés membres en qualité de personnalités qualifiées.

    La Cour préconise une modification de la composition du conseil de l’agence et s’interroge sur l’utilité de cette instance. En effet, le conseil d’orientation, dans sa forme actuelle, n’est plus adapté. Des conseils d’orientation régionaux sont envisagés.

· La Cour plaide pour la mise en place de critères qualitatifs pour conduire, suivre et évaluer l’action de l’ANT. La mise en place de critères qualitatifs est déjà une réalité en terme d’objectifs. Un dispositif d’accompagnement qui se met en place dans les différentes délégations de métropole est l’occasion d’enrichir le système informatique de questionnaires et d’entretiens permettant d’avoir une meilleure connaissance des stagiaires, de leurs difficultés…

    Trois emplois-jeunes ont été recrutés afin de mieux appréhender la situation des anciens stagiaires à l’issue de la formation et de les accompagner jusqu’à leur insertion professionnelle. Le système informatique comportera des tableaux permettant de rendre compte de ces éléments.

    · La Cour indique qu’il serait utile de disposer d’informations sur l’ensemble des moyens financiers publics correspondant aux actions de l’ANT, qu’ils transitent ou non par les comptes de l’agence.

    Les moyens mis à disposition, notamment ceux de l’AFPA, figurent en annexe aux comptes, depuis l’exercice 1998.

    Même si quelques efforts ont déjà été consentis, votre rapporteur spécial ne peut qu’appeler de ses vœux l’accélération d’un mouvement de réforme dont le rapport de la Cour des comptes a souligné la nécessité et l’urgence.

      E.– LE SERVICE MILITAIRE ADAPTÉ

      1.– La nature du service militaire adapté

    Le service militaire adapté (SMA) consiste à dispenser aux appelés la formation militaire et civique nécessaire à tout combattant, mais aussi à les préparer à une meilleure insertion dans la vie active lors de leur retour à la vie civile, par une formation professionnelle dont le volume horaire correspond à 70 % des dix mois de conscription. Enfin, il doit les faire participer à la mise en valeur des collectivités d’outre-mer, ainsi qu’à l’exécution des plans de défense, de protection, de secours et d’aide au service public.

    Les chantiers-écoles réalisés par les unités du SMA permettent d’appliquer les enseignements théoriques reçus durant les premiers mois de service militaire et de participer au développement économique des départements et territoires d’outre-mer (construction de nombreuses routes bétonnées de désenclavement d’habitation et de terres agricoles, réalisation d’installations sportives, travaux de curage de rivières). Ils sont financés avec des crédits de la loi de finances initiale, des crédits FSE et des crédits des collectivités locales. Leur coût a été de 12,35 millions de francs en 1999, dont 9,7 millions de francs financés par les collectivités locales elles-mêmes.

      2.– Le financement

    Le coût total du SMA dans les DOM, les TOM et en métropole est, pour le budget de l’État, de 440 millions de francs, comme en 1998, en baisse de 10 millions de francs par rapport aux prévisions pour 1999. A cette somme s’ajoute une contribution du Fonds social européen destinée à la formation professionnelle. Le financement total du SMA atteindra ainsi 507 millions de francs. La part bénéficiant au SMA dans les DOM est de plus 336 millions de francs.

    En ce qui concerne le projet de loi de finances pour 2000, la réforme du service national conduit à supprimer, pour l’ensemble des DOM-TOM, 1.000 emplois d’appelés et 80 emplois de militaires d’encadrement du SMA : dans les DOM, ce sont 895 postes d’appelés qui disparaissent et 79 emplois d’encadrement (soit une économie de 31,07 millions de francs). Sur les 600 emplois de volontaires qui sont créés, 494 le sont dans les DOM, pour un surcoût de 38,158 millions de francs. Le tableau suivant décompose le coût du SMA pour les seuls DOM et en présente l’évolution.

COÛT DU SMA POUR LES DOM (1999-2000)

(en millions de francs)

 

1999

Prévisions 2000

Soldes et rémunération des personnels militaires, civils et ouvriers (chapitres 31–90 et 31-98)

239,81

236,72

Charges sociales (chapitre 33-90)

13,54

14,63

Prestations sociales (chapitre 33-91)

8,94

8,29

Alimentation (chapitre 34–42)

38,98

32,08

Fonctionnement (chapitre 34–96)

40,88

34,88

Frais de justice et réparations civiles (chapitre 37-91)

1,07

1,07

Infrastructure et matériel techniques (chapitre 57–91) (1)

6,29

5

Total

349,51

332,67

(1) en crédits de paiement

Source : secrétariat d’État à l’Outre–mer

    L’économie de près de 17 millions de francs provient ainsi principalement des dotations d’alimentation et de fonctionnement.

      3.– Préserver l’insertion malgré la réforme du service national

    La loi du 28 octobre 1997 portant réforme du service national prévoit la fin de l’appel obligatoire sous les drapeaux pour les jeunes gens nés après le 31 décembre 1978, seuls ceux en report d’incorporation pouvant être appelés jusqu’au 31 décembre 2001. La possibilité d’un volontariat dans les armées est instituée : les jeunes des DOM pourront donc effectuer ce volontariat au sein des unités du service militaire adapté.

    Il est ainsi prévu le remplacement progressif des appelés par des volontaires, sous enveloppe budgétaire constante et la réduction d’un tiers des effectifs d’ici 2002, pour tenir compte d’un coût individuel supérieur dans la mesure où la rémunération des volontaires sera nettement plus élevée que celle des appelés actuels. Une féminisation accrue a également été décidée.

    Dès 1998, les effectifs incorporés ont baissé à cause de la diminution du nombre de jeunes encore soumis à l’obligation du service national. En octobre 1998 est intervenue la convocation des jeunes de l’outre-mer à « l’appel de préparation à la défense ». En janvier 1999 est intervenue l’incorporation des premiers volontaires. De 2000 à 2002, se poursuivra la transformation initiée en 1999, conduisant d’un effectif global de 3.840 militaires à un effectif d’environ 2.600.

    Les bons résultats du SMA en terme d’insertion sociale, certainement liés à la qualité de l’encadrement militaire, justifient pleinement le maintien de ce dispositif même s’il s’avère relativement onéreux pour la collectivité.

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III.– LES MOYENS SONT MANIFESTEMENT
UTILISÉS À MAUVAIS ESCIENT

      A.– DES « SUR-RÉMUNÉRATIONS » COÛTEUSES ET NÉFASTES

      1.– Le principe de la « sur-rémunération »

    Les départements, territoires et collectivités territoriales d’outre-mer ouvrent droit, pour les fonctionnaires de l’État qui y servent, à une rémunération majorée, instituée par un ensemble de dispositions législatives (lois du 3 avril 1950 pour les DOM et du 30 juin 1950 pour le TOM) et réglementaires. Le coût de ces majorations est supérieur à 4 milliards de francs par an pour 66.500 fonctionnaires civils de l’État. Leur quantification exacte est délicate, en raison notamment des mouvements continus d’agents en cours d’année, les relèves pouvant être effectuées par des fonctionnaires non éligibles à l’indemnité d’éloignement ou dans une situation différente dans le déroulement de la carrière.

    Les majorations agissent sur la rémunération selon deux techniques :

      · Application au traitement d’un coefficient multiplicateur

    Ce coefficient est servi sans limitation de durée à tous les fonctionnaires de l’État, qu’ils soient affectés depuis la métropole ou résidents permanents de la collectivité. Seule Mayotte ne possède pas ce dispositif, mais un système compense l’éloignement pour les fonctionnaires sous affectation provisoire. Les agents titulaires des fonctions publiques locales perçoivent également leur traitement majoré par l’application du coefficient multiplicateur.

    En revanche, les agents non titulaires (contractuels ou vacataires) ne disposent pas d’un droit identique et cette situation, notamment en ce qui concerne les collectivités locales, a engendré des difficultés en raison des effectifs importants parfois constatés : ainsi, 13.000 employés communaux non titulaires à la Réunion ne bénéficient d’aucune majoration. Inversement, certains emplois publics pourvus par des non titulaires (maîtres-auxiliaires de l’Éducation nationale) sont cependant affectés du coefficient multiplicateur.

    Le secteur parapublic, et certaines branches d’activité du secteur libre (entreprises d’envergure nationale dites « à comptoir » : banques, assurances, compagnies aérienne), reproduisent fréquemment un tel système, à des taux divers.

      · Versement d’une indemnité d’éloignement

    Cette indemnité, fréquemment dénommée « prime d’installation », n’est servie que si un déplacement réel – depuis la métropole ou un autre DOM et TOM – a été occasionné. Les résidents permanents n’en bénéficient donc pas.

    Elle est exprimée en mois de traitement indiciaire brut, et son montant total n’est versé que sous la condition de services effectifs sur place. Au contraire du coefficient multiplicateur, il s’agit d’un élément temporaire conduisant à majorer la rémunération. En raison de la montée en charge progressive des recrutements locaux, sa part dans le volume total des majorations ainsi que le nombre d’attributaires tend à se réduire.

    Dans les DOM, cette indemnité est versée au taux plein sur la base d’une durée de services de quatre ans. Elle disparaît en cas d’affectation prolongée au-delà, et n’est pas renouvelable.

    Dans les TOM, elle est versée sur la base du séjour de deux ans qui constitue, selon les décrets du 26 et 27 novembre 1996, la période normale d’affectation des fonctionnaires de l’État dans ces territoires. Elle est renouvelable une seule fois consécutivement. L’indemnité TOM ne rétribue donc désormais que quatre ans de service au plus, ce qui constitue un alignement sur le système DOM et met fin à des situations abusives, parfois constatées sous l’empire de la réglementation de 1910, aujourd’hui abrogée.

    Le tableau suivant présente les taux en vigueur, pour le coefficient multiplicateur du traitement et l’indemnité d’éloignement.

TAUX DES « SUR-RÉMUNÉRATIONS »

   

Coefficient (1)

Indemnité

d’éloignement (4)

DOM

Guadeloupe

x 1,4

12 mois pour 4 ans

 

Martinique

x 1,4

12 mois pour 4 ans

 

Guyane

x 1,4

16 mois pour 4 ans

 

Réunion

x 1,35 (2)

12 mois pour 4 ans

TOM

Polynésie française

de x 1,84 à x 2,08 (3)

10 mois pour 2 ans

 

Nouvelle-Calédonie

de x 1,73 à x 1,94 (3)

10 mois pour 2 ans

 

Wallis et Futuna

x 2,05

18 mois pour 2 ans

Collectivités

Saint-Pierre-et-Miquelon

x 1,4 (5)

12 mois pour 4 ans

 

Mayotte

(néant)

23 mois pour 2 ans

(1) Sur traitement brut dans les départements d’outre-mer et à Saint-Pierre-et-Miquelon ; sur traitement net dans les territoires d’outre-mer

(2) Le traitement net majoré est également affecté d’un index de correction complémentaire de ´ 1,138 (soit = 13,8 %) par rapport au franc CFA, ce qui porte la majoration totale à environ ´ 1,53.

(3) Selon subdivision d’affectation.

(4) Condition obligatoire d’éloignement de la résidence habituelle. Dans les départements d’outre-mer et à Saint-Pierre-et-Miquelon, non renouvelable mais bilatérale (depuis et vers le département). Unilatérale pour les TOM et Mayotte (vers le territoire), renouvelable une fois.

(5) Le traitement net majoré est également affecté d’une indemnité spéciale compensatrice actuellement fixée à + 30,67 %, ce qui porte la majoration totale à environ ´ 1,75.

Source : secrétariat d’État à l’Outre-mer.

    Dans certaines collectivités d’outre-mer, les retraites publiques sont également bonifiées. Le décret du 10 septembre 1952 majore ainsi de 75 % les pensions servies aux fonctionnaires civils et militaires retraités et résidant effectivement dans un TOM. Cette disposition est également applicable dans le département de la Réunion et à Mayotte, au taux réduit de 35 %, ainsi qu’à Saint-Pierre-et-Miquelon (40 %).

    Les frais de déménagement induits par les mutations et affectations de fonctionnaires sont pris en charge par les employeurs publics. La procédure est réglementée par le décret n° 89-271 du 12 avril 1989 en ce qui concerne les DOM et donne globalement satisfaction. Une revalorisation des taux, inchangés depuis 1989, devrait prochainement intervenir. Pour ce qui est des territoires, le texte d’origine (décret du 3 juillet 1897) a été remplacé par une réglementation moderne, incluant un principe de forfaitisation en remplacement du remboursement sur factures (décret n° 98-844 du 22 septembre 1998).

    Le champ d’application de ses majorations de rémunération est très large. Les différents secteurs concernés par les majorations de rémunérations sont : l’État ; les collectivités locales pour leurs agents titulaires ainsi que certains non titulaires indiciés ; les personnels hospitaliers avec deux régimes différents pour les personnels médicaux ou non médicaux ; la plupart des établissements et organismes publics ; certains secteurs de droit privé (les agents de la sécurité sociale, Air France, les établissements médico-sociaux, les sociétés d’économie mixte, certaines associations locales gravitant dans l’orbite des collectivités locales, le secteur bancaire). Il faut encore ajouter à cette liste, déjà fort longue, les majorations des droits et émoluments des avocats et officiers publics et ministériels (+ 40 %) et la valeur de certains actes médicaux et paramédicaux (+ 20 %).

      2.– Un coût financier et social élevé

        a) Une estimation du coût financier pour l’ensemble des organes concernés

    Le rapport Pêcheur, de juillet 1996, s’efforce d’évaluer le coût financier global de ces dispositifs. En fait, il sous-estime les enjeux financiers : les données sont partielles pour les organismes publics et parapublics ; il n’a pas valorisé les congés bonifiés et vraisemblablement pas la prime de mobilité dans le sens DOM/métropole. De même, il n’a pris en compte qu’une partie des bénéficiaires – notamment pour les actes médicaux et paramédicaux ; les charges sociales versées à raison de ces compléments de rémunération ne sont, semble-t-il, pas décomptées… Cette étude étant néanmoins la plus récente et la plus précise, et l’approximation étant quasiment inévitable tant il est difficile de connaître ne serait-ce que le nombre exact de fonctionnaires des collectivités locales, elle peut pourtant être retenue.

    Sur cette base minorée, l’agrégat des « sur-rémunérations » atteint près de 8 milliards de francs.

    Sa structure appelle les remarques suivantes :

    · Sur le champ « personnel » :

    – l’État représente 53 % du total ;

    – l’enjeu pour le secteur hospitalier et médico-social est important ;

      – les caisses de sécurité sociale et organismes publics et parapublics ne sont pas un enjeu négligeable ;

      – le coût du service bancaire est alourdi par les « sur-rémunérations ».

    · Sur le poids relatif des différents éléments pour l’État :

    – l’indemnité d’éloignement représente 7 % des compléments recensés (2,4 % de la masse salariale). On ignore son incidence financière dans les autres secteurs ;

    – l’indexation spécifique à la Réunion représente 10 % du coût total des compléments de rémunérations versés par l’État ;

    – sur le ratio compléments/masse salariale, on constate une relative dispersion (de 26,7 % dans les établissements médico-sociaux à 33,8 %).

        b) Des conséquences néfastes dans tous les domaines

    Le rapport remis par M. Bertrand Fragonard en mai 1999 évalue, au-delà du strict coût financier, déjà considérable, les coûts économique, social et politique de ces majorations de rémunérations.

      · Un enjeu économique

    Après avoir entendu de nombreuses personnalités domiennes, M. Fragonard estime que l’importance des « sur-rémunérations » dans la sphère publique pèse sur les prix et exerce une influence à la hausse des rémunérations dans le secteur privé, notamment dans l’encadrement intermédiaire. Il est très vraisemblable qu’elles dissuadent les employeurs publics – et l’État ne fait pas exception – de recruter à hauteur des besoins, comme s’ils récupéraient partiellement en effectifs le surcoût unitaire de leurs agents. Constater que ces « sur-rémunérations » se diffusent dans l’économie des DOM et font « tourner la machine » en entretenant la consommation ne suffit pas à les rendre acceptables : une partie de ce pouvoir d’achat est recyclé sur la métropole sous forme d’importations ou d’épargne, et il va de soi qu’il n’est dans l’intention de personne d’exercer une pression déflationniste en supprimant 8 milliards de francs injectés dans l’économie des DOM. La vraie question est d’apprécier l’intérêt respectif du système actuel et de systèmes alternatifs à enveloppe constante.

      · Un enjeu politique

    L’éclatement de la société des DOM entre un secteur à garantie d’emploi et forte rémunération et un secteur exposé à salaires inférieurs, et enfin, à la marge de la société, une population en sous-emploi ou au chômage est profondément malsain. Il ne peut que renforcer le sentiment d’exclusion des jeunes et susciter des réactions contre la métropole.

      · Un enjeu pour les finances des collectivités locales

    Au-delà du surcoût actuel, les budgets de ces collectivités sont exposés à la pression de demandes de titularisation d’un nombre élevé d’agents, qui souhaitent que celle-ci se fasse à la valeur majorée actuelle des titulaires.

    Il est certes difficile de chiffrer l’impact total d’une mesure généralisée de titularisation. L’estimation d’un milliard de francs est cependant régulièrement avancée. Ce montant représente, à titre de comparaison, environ 40 % des dépenses d’investissements des communes des DOM, hors remboursement d’emprunts, pour 1997.

      3.– Vers une remise en cause ?

    Après avoir déploré les différents effets pervers du système de majorations de rémunération, le rapport Fragonard propose des voies pour en sortir progressivement.

      · Pour ce qui concerne la fonction publique de l’État

    En ce qui concerne la majoration de traitement, le scénario suggéré consiste à mettre en discussion et notamment à soumettre à la concertation avec les syndicats, reposerait sur deux principes :

    · pour les agents actuellement en fonction, une réduction progressive du taux de majoration serait prévue et s’étalerait sur la durée de la loi d’orientation ;

    · pour les embauches, celles-ci se feraient au niveau où s’établirait le coefficient de majoration. Il n’y aurait donc pas de système dualiste des rémunérations en fonction de la date d’embauche.

    Le coefficient « cible » pour 2007 serait fixé à 1,35 pour la Réunion (suppression du correctif CFA qui n’a plus de base légale) et 1,33 pour les Antilles-Guyane (baisse de 1 point par an dans l’hypothèse d’une période de sept ans, retenue pour la loi d’orientation).

    L’effort ainsi demandé serait de 1,67 % par an à la Réunion et de 0,7 % aux Antilles-Guyane ; il serait sensiblement inférieure après impôt et après les mesures d’alignement proposées ci-après :

    · l’alignement des prestations familiales (actuellement inférieures de 14 % à celles de métropole) ;

    · l’extension des allocations de logement (actuellement non attribuées) ; cela avantagerait en termes relatifs les fonctionnaires les plus modestes (condition de revenu), ceux qui ont des charges locatives ou d’accession à la propriété (les propriétaires sans charge d’accession n’y ont pas droit) ;

    · l’extension de l’indemnité de résidence en se calant sur le taux de la région parisienne (3 % du salaire brut).

    Toutes choses égales par ailleurs, une telle politique, favorable aux fonctionnaires jeunes et bénéficiant d’un indice modeste ou moyen, semble positive en termes de dynamique sociale.

    On pourrait compléter cette option de base par un mécanisme spécifique aux fonctionnaires les plus âgés : suppression de la majoration à 60 ans ; incitation au départ par le versement sous forme de prime de tout ou partie de la majoration restant à courir entre le départ et 60 ans. Ce serait le pendant du régime des préretraites dans le privé.

    La prime d’éloignement et la réforme des congés bonifiés représentent un enjeu financier moindre : il peut être évalué (dans le sens métropole/DOM) à une dépense de l’ordre de 200 à 250 millions de francs.

        · Les autres secteurs

    · Les collectivités locales

    Elles devraient s’aligner sur l’État pour la rémunération des agents titulaires. La loi d’orientation devrait prévoir que la régularisation éventuelle des agents contractuels se ferait sans application des coefficients de majoration, afin de ne pas peser sur les finances locales.

    · Le secteur hospitalier

    Dans ce secteur, les sommes dégagées pourraient être affectées à un programme finalisé d’embauches pour assurer le service public.

    · Les organismes publics

    Ils seraient invités à prendre des mesures cohérentes avec les options dégagées par la loi d’orientation.

    · Les caisses de sécurité sociale

    Les ministres de tutelle de ces caisses saisiraient l’Union des caisses nationales de sécurité sociale (UCANSS) en indiquant l’objet de l’affectation des économies (notamment le renforcement des politiques de contrôle – RMI et recouvrement – et des budgets d’action sociale).

    · Le secteur bancaire

    L’Association française des banques doit être saisie du problème. L’enjeu est important pour l’ensemble de l’activité économique car, combinée avec les mesures tendant à faciliter l’accès des entreprises au crédit, la baisse du coût de gestion des banques contribuerait à réduire l’écart actuel des taux qui pénalise les entreprises.

    Si ces propositions semblent très modérées et si l’objectif de réductio, voire de suppression des « sur–rémunérations » apparaît absolument nécessaire à votre rapporteur spécial, l’opportunité de la réforme est encore controversée. Dans le rapport au Premier ministre des parlementaires en mission M. Claude Lise et M. Michel Tamaya, les départements d’outre-mer aujourd’hui : la voie de la responsabilité, il est seulement proposé de plafonner l’indemnité d’éloignement versée aux agents de catégorie A. Le Gouvernement ne semble d’ailleurs pas du tout décidé à prendre les mesures indispensables dans ce domaine.

      B.– DES DÉFISCALISATIONS INCONTRÔLÉES ET D’UNE EFFICACITÉ DOUTEUSE

    Le régime actuellement applicable dans les DOM, connu sous le nom de « loi Pons », concerne soit l’impôt sur le revenu des personnes physiques, soit l’impôt sur les sociétés. Il a été plusieurs fois amendé, en dernier lieu par la loi de finances pour 1998, qui a supprimé la déduction supplémentaire liée à l’imputation des déficits des activités concernées imposées dans la catégorie des bénéfices industriels de commerciaux, et par la loi de finances pour 1999, qui a prorogé le régime jusqu’au 31 décembre 2002.

      1.– Le dispositif de défiscalisation

      · L’impôt sur le revenu

    Au titre de l’impôt sur le revenu, les contribuables qui investissent jusqu’au 31 décembre 2002 dans les DOM (ainsi que dans les TOM) bénéficient pour les années 1990 à 2006 d’une réduction d’impôt de 25 % du prix de revient ou d’acquisition de leur investissement.

    Les investissements concernés sont :

    – la construction ou l’acquisition d’immeubles neufs ;

    – les souscriptions de parts ou d’actions de sociétés ou de société civile de promotion immobilière dont l’objet est de construire des logements neufs ;

    – la souscription au capital des sociétés de développement régional locales ou des sociétés soumises à l’impôt sur les sociétés effectuant des investissements productifs dans les secteurs de l’industrie, de la pêche, de l’hôtellerie, du tourisme, des énergies nouvelles, de l’agriculture, du bâtiment et des travaux publics, des transports, de l’artisanat, de la maintenance industrielle, de la production et de la diffusion audiovisuelles et cinématographiques, des concessionnaires de services publics locaux à caractère industriel et commercial.

    L’assiette de la réduction d’impôt est étalée sur 5 ans, à raison de 20 % par an, tandis que la réduction d’impôt est portée à 50 % pour les investissements relatifs à l’acquisition ou à la construction de logements neufs à usage locatif.

      · L’impôt sur les sociétés

    Jusqu’au 31 décembre 2002, les sociétés assujetties à l’impôt sur les sociétés peuvent déduire de leurs résultats imposables la totalité des sommes qu’elles consacrent à des investissements productifs dans les DOM dans les domaines suivants : industrie, pêche, hôtellerie, tourisme, énergies nouvelles, agriculture, bâtiment et travaux publics, transports, artisanat, maintenance industrielle, production et diffusion audiovisuelles et cinématographique, concession de service public local à caractère industriel et commercial, acquisition de logements neufs à usage locatif. Le déficit qui peut en résulter est reportable dans les conditions de droit commun.

    De même, elles déduisent de leurs résultats le montant des souscriptions au capital des sociétés investissant dans les domaines énumérés ci-dessus, y compris celles en difficulté.

      2.– La faible efficacité du dispositif a été démontrée

    Le groupe de travail interministériel chargé d’établir le bilan de ce dispositif a dû fonder ses analyses sur l’année 1994, puisque c’est la plus récente pour laquelle on dispose de comptes économiques d’ensemble pour les DOM, ce qui reflète un manque d’intérêt certain et une faible volonté de contrôle. Le groupe a mis en évidence les éléments suivants :

    · la dépense fiscale réelle liée à la défiscalisation peut être estimée à 2,9 milliards de francs en 1994 (dont 2 milliards de francs liés aux déductions opérées et 0,9 milliard de francs lié à la remontée des déficits dans le revenu des défiscalisateurs). Elle serait passée à 3 milliards de francs en 1996 ;

    · le supplément d’investissement lié à la défiscalisation serait du même ordre de grandeur que la dépense fiscale, soit 2,9 milliards de francs en 1994 ;

    · le nombre d’emplois nouveaux induits par les investissements défiscalisés est difficilement quantifiable ; les chiffres d’emplois directs créés figurant dans les dossiers de demande d’agrément déposés par les entreprises aboutissent à un total annuel compris entre 1.000 et 3.000 emplois, mais ils restent très incertains et le nombre des emplois indirects n’a pas pu être évalué.

    L’analyse des effets par secteur économique met en évidence la forte augmentation des capacités d’accueil dans le secteur hôtelier, la création d’une véritable activité économique dans le secteur de la plaisance aux Antilles, un effet de modernisation de l’appareil productif dans le secteur industriel, un développement incontestable du BTP, la création de flottilles ambitieuses dans le secteur de la pêche. Le secteur des transports a également profité à la défiscalisation, au prix parfois de la création de surcapacités dans le domaine des transports terrestres.

    Les effets dans le secteur du logement méritent une mention particulière, dans la mesure où ils ont représenté une part importante de la dépense fiscale. Ainsi, 15.700 foyers fiscaux ont bénéficié de la réduction d’impôt à ce titre en 1996. Pour la Réunion, une étude de l’INSEE estime que, de 1986 à 1996, la loi de défiscalisation explique en moyenne 38 % du volume de l’investissement en logement des ménages.

    Mais dans le même temps la défiscalisation a contribué à l’augmentation des prix du foncier, à la dégradation du marché secondaire (revente) et a eu, faute d’une maîtrise suffisante de l’urbanisme, des effets indésirables sur l’aménagement de l’espace entraînant des coûts pour les collectivités locales (« mitage » du territoire) avec des problèmes d’assainissement et de voirie à gérer.

    S’agissant des investissements dans les secteurs concourant au service public, la défiscalisation semble avoir eu surtout pour effet des transferts de charge. Par exemple, tel a été le cas entre Électricité de France, qui allège ses obligations de service public, et d’autres producteurs locaux d’énergie, dont l’activité ne devient rentable que grâce à la défiscalisation.

    L’analyse micro-économique montre, quant à elle, d’après le groupe de travail, que la défiscalisation est une mesure très attractive pour les entreprises qui peuvent en bénéficier. Cependant, elle perturbe la sélection des projets d’investissement et favorise l’apparition de surcapacités sur certains petits marchés. En outre, elle favorise une composition productive déséquilibrée au profit du facteur capital, et donc défavorable au facteur travail.

    Au total, le groupe de travail recommande une évolution du dispositif. Selon lui, les améliorations à apporter au dispositif actuel n’auraient qu’une efficacité limitée et il conviendrait plutôt de définir un nouveau système d’aide.

      3.– À quand la sortie du dispositif de défiscalisation des investissements ?

    À la suite des travaux du groupe de travail interministériel, le rapport Fragonard estime « raisonnable » – le terme est bien faible ! – d’envisager une sortie du dispositif de défiscalisation existant actuellement, et ce, pour deux raisons principales.

    En premier lieu, et si l’on excepte la Guyane, qui conserve une situation à part et qui n’a d’ailleurs que modérément utilisé le dispositif, on peut sans doute beaucoup moins qu’il y a quinze ans parler de retard d’investissement dans les secteurs visés par la défiscalisation. Dans certains cas, on peut même évoquer un suréquipement. On peut donc considérer que le dispositif a joué son rôle et qu’il est moins nécessaire aujourd’hui. Aux yeux de beaucoup de commentateurs, c’est désormais l’emploi qui représente le principal facteur de déséquilibre dans les DOM et c’est vers lui que l’aide devrait être réorientée.

    En second lieu, si l’effet d’augmentation du volume des investissements induit par la dépense fiscale ne peut guère être contesté, il a été montré que l’effet de levier sur la mobilisation des capitaux privés est faible, voire nul. En d’autres termes, le montant de 3 milliards de francs par an environ qui est mobilisé à ce titre par la solidarité nationale ne génère pas un volume d’investissement supérieur à son propre montant. Ceci suggère l’idée qu’il existe probablement d’autres manières, plus productives, d’orienter le même effort budgétaire en faveur des DOM.

    Toutefois, la prudence s’impose s’agissant d’une éventuelle sortie du dispositif.

    Celle-ci n’est en tout état de cause pas envisageable avant le 31 décembre 2002, date limite fixée par la loi de finances pour 1999, pour le dispositif actuel. L’année 2000 et le début de l’année 2001 pourront donc être utilisés pour des études approfondies et une concertation avec les élus et les milieux socioprofessionnels à partir des différentes hypothèses envisageables, conformément à la lettre du 24 décembre 1998 du Premier ministre au Président de l’Assemblée nationale accompagnant la transmission du rapport du groupe de travail interministériel. Il est rappelé que cette lettre précise que le Gouvernement « n’envisage pas de proposer une remise en cause du dispositif sans concertation préalable avec les élus de l’outre-mer et, si des modifications devaient être soumises au Parlement, ce serait à effort budgétaire constant, sans rupture de continuité et en recherchant plus d’efficacité dans l’allocation des fonds publics ».

    Le groupe de travail interministériel avait étudié trois pistes pour remplacer à terme l’incitation fiscale actuelle.

    · La première suggestion, celle d’un fonds de garantie des prêts aux entreprises des DOM, doté de 700 millions de francs par an environ, répond à un réel besoin exprimé par les entreprises et serait de nature à soutenir l’investissement.

    Il convient de noter que cette orientation est pour partie en cours de mise en œuvre, dans le cadre de la réforme de l’IEDOM. Est en effet prévue la création d’un fonds de garantie dotée de 200 millions de francs, dont 100 millions de francs en provenance du FEDER. Sur la base d’un coefficient multiplicateur de 5, ce fonds permettrait de couvrir un encours nouveau de 1 milliard de francs par an, à condition que l’État et le FEDER abondent tous les ans le fonds de 100 millions de francs chacun, ce qui ne paraît pas assuré aujourd’hui.

    Dans ces conditions, la sortie du système de défiscalisation amènerait à compléter, le cas échéant, ce dispositif par une dotation de 500 millions de francs environ, ce qui reste très inférieur aux 3 milliards de dépense fiscale moyenne annuelle que représente le dispositif actuel dans les DOM.

    · La deuxième suggestion consisterait en un allégement de 50 % de la taxe professionnelle, auquel pourrait être consacré un montant de 900 millions de francs par an.

    Si l’intérêt d’un allégement de taxe professionnelle ne peut-être contesté, la mesure proposée ne semble pas suffisamment orientée vers la création d’emplois. Les prélèvements sur le travail seraient abaissés d’un point environ et les prélèvements sur le capital de 1,5 point.

    Par ailleurs, le Gouvernement a mis en chantier la réforme de la taxe professionnelle selon un autre schéma, avec la suppression de la part de la taxe assise sur les salaires.

    · La troisième orientation proposée par le groupe de travail interministériel est celle d’un allégement complémentaire des charges sociales concentré sur les bas salaires, à hauteur de 400 millions de francs.

    Cette solution ne semble guère ambitieuse, mais est envisagée à l’heure actuelle par le Gouvernement : figureraient dans la future loi d’orientation sur les DOM des baisses de charges sociales et patronales, qualifiées par le Premier ministre de « dispositif sans précédent d’allégement des charges sociales pour les entreprises les plus fragiles et pour les secteurs les plus exposés ». Quel que soit l’intérêt potentiel d’une telle mesure, elle ne saurait constituer une alternative à la défiscalisation des investissements, sa portée étant nettement moindre et son orientation très différente.

    Au total, la sortie du dispositif de défiscalisation laisserait des marges budgétaires importantes pour financer des mesures susceptibles d’avoir un effet plus bénéfique pour l’activité économique et l’emploi ou pour combler les manques évidents de moyens dans les domaines de la lutte contre l’immigration clandestine et contre le trafic de stupéfiants.

      C.– UNE IMMIGRATION CLANDESTINE ENDÉMIQUE

    Malgré la situation difficile des DOM par rapport à celle de la métropole, ils sont souvent nettement plus riches que les États qui les voisinent, ce qui entraîne des flux d’immigrés clandestins que les pouvoirs publics ne parviennent pas à maîtriser.

      1.– L’immigration clandestine aux Antilles

    L’arc Caraïbe est constitué de nombreuses îles qui relèvent de législations différentes (française, hollandaise, d’influence anglaise ou américaine pour celles qui sont devenues indépendantes.). Certaines d’entre elles connaissent de graves difficultés économiques qui peuvent être aggravées en cas d’instabilité politique (par exemple Haïti). Bon nombre de leurs ressortissants, confrontés à la pauvreté et à la précarité, recherchent alors des pays proches et plus prospères sur le plan économique et social.

        a) Martinique et Guadeloupe

    C’est à ce titre que la Guadeloupe et la Martinique subissent une forte immigration clandestine, les nationalités concernées (Haïtiens, Sainte-Luciens, Dominicains, ressortissants de Saint-Domingue) étant soumises à l’obligation de visa pour entrer sur le territoire français. Du fait de cette obligation de visa, cette immigration utilise essentiellement la voie maritime, par nature difficilement contrôlable compte tenu de l’étendue et du relief des côtes. La population étrangère est évaluée à 6.500 personnes en Martinique : 500 personnes seraient en situation irrégulière. En Guadeloupe, la population étrangère est évaluée à 21.819 personnes, contre 10.596 en 1996. La régularisation des étrangers intervenue depuis deux ans, en application des réformes sur l’entrée et le séjour des étrangers, a permis de diminuer de moitié la population clandestine, évaluée à 10.000 personnes en 1998.

    La lutte contre l’immigration clandestine, outre les contrôles d’entrée aux ports et aéroports, s’organise avec une surveillance permanente de la brigade frontalière mobile de la police aux frontières et une surveillance des côtes par les vedettes des douanes et de la gendarmerie.

    En Martinique, 192 mesures de reconduite à la frontière ont été exécutées en 1998, contre 194 en 1997, ainsi que 24 mesures d’expulsion, contre 32 en 1997. En Guadeloupe, 753 mesures de reconduite à la frontière ont été exécutées en 1998 (932 en 1997) ainsi que 102 expulsions (66 en 1997).

    Dans le domaine de l’emploi, les contrats sont soumis à la direction départementale du travail et de l’emploi qui effectue en principe un contrôle approfondi.

    La loi n° 98-349 du 11 mai 1998 relative à l’entrée et au séjour des étrangers et au droit d’asile prévoit de maintenir, pour la Guyane et la commune de Saint-Martin, le dispositif dérogatoire relatif au caractère non-suspensif des recours contre les arrêtés de reconduite à la frontière, précédemment en vigueur pour une période de cinq ans dans les DOM.

    Les commissions du titre de séjour ont été rétablies en métropole par la loi du 11 mai 1998 précitée. A titre dérogatoire, cette disposition n’est pas applicable, pendant une durée de cinq ans, dans le département de la Guyane, ni dans la commune de Saint-Martin.

        b) Les problèmes particuliers à Saint-Martin

    Le problème de l’immigration clandestine est particulièrement délicat à Saint-Martin, qui appartient au département de la Guadeloupe, compte tenu de la localisation de l’aéroport international (Princess Juliana) dans la zone hollandaise et de l’absence de contrôle à la frontière entre les deux parties de l’île.

    Pour une population totale d’environ 35.000 habitants, la commune de Saint-Martin compte un tiers d’étrangers. A ce chiffre, s’ajoutent environ 5.000 étrangers en situation irrégulière. La population étrangère est composée à 60 % de Haïtiens et à 20 % de Dominicains.

    Au titre de l’année 1998, 365 mesures de reconduites à la frontière, sur les 753 comptabilisées pour toute la Guadeloupe, ont été exécutées à Saint-Martin.

    La présence de nombreux immigrés clandestins ne manque pas de poser de sérieuses difficultés à la commune, au point de vue social et économique. En effet, les infrastructures de santé, de scolarité et de logement sont sous-dimensionnées par rapport à la demande, en général non solvable. A cela s’ajoutent les problèmes d’insécurité, de trafic de drogue et de zones d’habitats insalubres.

    L’accord franco-néerlandais du 17 mai 1994 relatif au contrôle conjoint dans les aéroports de Saint-Martin, ratifié par la France le 20 juillet 1995, et dont l’entrée en vigueur est subordonnée à la ratification des Pays-Bas, devrait faciliter l’éloignement des étrangers non admis ou trouvés en situation irrégulière. Il permettrait, en outre, l’arrestation provisoire de personnes appréhendées aux fins d’extradition.

      2.– Un phénomène qui touche très fortement la Guyane

    Frontalière du Surinam et du Brésil (avec une frontière longue de près de 3.000 kilomètres, dont la plus grande partie en forêt dense), située à proximité immédiate de pays sud-américains confrontés aux problèmes du développement, la Guyane apparaît pour nombre de ressortissants de ces pays comme un espace de liberté et de richesse relative. C'est ce qui explique la forte immigration en provenance du Brésil, de Guyana, du Surinam et de Haïti.

    Par conséquent, la lutte contre l’immigration clandestine doit être une priorité de l’action de l’État en Guyane, d’autant plus qu’elle est un facteur important d’insécurité, en particulier dans l’agglomération de Cayenne.

    Pour une population estimée à 157.274 habitants, on dénombre environ 20.000 étrangers en situation régulière, répartis comme suit :

    Haïtiens 37 %

    Brésiliens 20 %

    Surinamiens 20 %

    Chinois 3,5 %

    Guyanas 8 %

    Saint-Luciens 2,7 %

    Dominicains 2,5%

    A cette population immigrée s’ajoutent probablement environ 30.000 individus en situation irrégulière.

    Le phénomène de l’immigration clandestine s’organise autour de deux axes : le contrôle de frontières et la lutte contre l’emploi clandestin.

    La localisation de la plus grande partie du territoire guyanais dans la forêt amazonienne rend difficile le contrôle de l’accès du territoire français par les forces de police ou de gendarmerie.

    Avec 1.016 policiers et gendarmes, le département de Guyane possède un ratio de représentants des forces de l’ordre de 6,6 pour 1.000 habitants, pour une moyenne nationale de 3,7. Le poste de la police aux frontières de Saint-Laurent du Maroni a été restructuré en 1993, son effectif passant à 35 policiers. L’effectif total de la police aux frontières est actuellement de 138 agents dont 39 à Saint-Laurent du Maroni, où un troisième escadron de gendarmerie a été déployé.

    Un centre de rétention, destiné à faciliter la gestion des reconduites à la frontière (50 % du total des reconduites aux frontières françaises) a été construit en 1996 près de l’aéroport de Rochambeau. En 1998, 6.582 reconduites à la frontière (8.366 en 1997 et 10.057 en 1996) ont été exécutées. Le nombre de ces mesures diminue d’une année sur l’autre dans la mesure où les refoulements à la frontière sont en progression constante et rendus possibles par le dispositif de contrôle aux frontières décrit ci-après.

    Un dispositif de surveillance et de contrôle particulier a été mis en place avec les plans « Alizé-bis » et « Galerne » sur les fleuves Maroni et Oyapock (patrouilles sur les fleuves, surveillance sur les rives), le renforcement du contrôle à l’aéroport, au bac international et au poste d’Iracoubo (point de passage obligé en arrière du Maroni).

    La loi n 97-396 du 24 avril 1997 permet, en outre, les contrôles d’identité et les contrôles sommaires des véhicules autres qu’individuels sur une zone s’étendant à 20 kilomètres au-delà des frontières terrestres et littorales. Cette mesure, associée au dispositif de contrôle susmentionné, devrait, à terme, contribuer à réguler plus efficacement les flux migratoires.

    Par ailleurs, les contrôles dans les quartiers à forte densité de population étrangère ont été multipliés, sous formes d’opérations conjointes de la police, de la gendarmerie et de la douane.

    En 1990, l’État a lancé un programme de lutte contre l’emploi clandestin, dont votre Rapporteur spécial doit constater le faible succès. Une antenne de l’Office des migrations internationales a été mise en place à Cayenne à la fin de cette même année afin de tenter de renforcer les contrôles.

    Une étroite concertation entre l’État, les élus locaux et les socioprofessionnels, notamment dans le secteur du BTP, doit favoriser un meilleur contrôle des flux migratoires.

    Il en est de même dans le cadre d’une politique active de coopération régionale. Depuis un accord franco-brésilien de 1984, des réunions bilatérales, où la France est représentée par le préfet de la Guyane, permettent d’examiner les problèmes liés à l’immigration clandestine brésilienne et facilitent les rapports entre les services de police.

    Dans ce contexte d’immigration particulièrement sensible et difficile, la loi du 11 mai 1998 a prévu des dispositions dérogatoires, pour la Guyane comme pour la commune de Saint-Martin concernant le caractère non suspensif des recours contre les arrêtés de reconduites à la frontière et, pour une période de cinq ans, la non application des mesures relatives à l’institution de commissions du titre de séjour.

      3.– Des difficultés qui commencent à concerner la Réunion

    Située au nord-ouest de l’Océan indien, éloignée des grands axes de circulation, à 800 kilomètres au large de Madagascar, la Réunion a été relativement tenue à l’abri des grands flux migratoires.

    Néanmoins, la libéralisation des transports aériens a contribué à ouvrir l’île sur son environnement régional immédiat (Madagascar, les Comores et l’île Maurice) dont le niveau de vie est nettement inférieur à celui de ce département.

    Aussi, le problème de l’immigration se pose désormais à la Réunion, même si l’ampleur du phénomène est bien moindre que celle relevée dans les autres DOM.

    Les Comoriens en provenance de Mayotte constituent la principale filière d’immigration clandestine à la Réunion. Cette immigration peut être évaluée entre 1.000 et 2.000 personnes par an, à rapprocher d’une population totale de l’île de 700.000 habitants.

    La lutte contre l’immigration irrégulière s’organise autour du dispositif de contrôle aux frontières aéroportuaires et maritimes et avec le renforcement de l’action contre le travail clandestin. 68 mesures de reconduites à la frontière ont été exécutées en 1998 (194 en 1997).

      D.– L’AGGRAVATION DES PROBLÈMES DE DROGUE

    Si les TOM et la Réunion restent encore relativement épargnés par le phénomène de la drogue (4 faits constatés à Nouméa en 1998, 60 à Papeete, 230 à La Réunion), en revanche les départements des Antilles-Guyane connaissent actuellement une profonde évolution. Ils placent la France au contact du grand trafic international de cocaïne, spécialement la zone de Saint-Martin – Saint-Barthélémy où des prises parfois très spectaculaires sont réalisées. Le trafic et la consommation locale de cocaïne et de crack sont en pleine expansion, phénomène nouveau depuis cinq ans.

      1.– L’intensification rapide du trafic et de la consommation de stupéfiants

    La zone des Antilles-Guyane présente une situation géographique propice au trafic de drogue.

    Constituée d’une trentaine d’États, pour la plupart de petite taille, elle est vulnérable au trafic de stupéfiants. En effet, elle est située entre les régions de production (Amérique du sud et Amérique centrale) et les régions de consommation (Amérique du nord et Europe).

    En matière de délinquance, le phénomène de la drogue est, sans conteste, un problème majeur dans ces départements d’Amérique où en peu de temps, la situation au regard de la drogue s’est profondément transformée.

        a) La forte présence de stupéfiants

    Traditionnellement, ces départements étaient traversés par le trafic international de cocaïne, dont les lieux de destination finale se trouvaient ailleurs. Localement on consommait des dérivés de cannabis, sans grand effet sur la délinquance. En somme la cocaïne passait mais ne s’arrêtait pas.

    Aujourd’hui, si les Antilles-Guyane restent une zone importante du trafic de passage, le fait majeur, et relativement nouveau, est l’apparition de la consommation locale du crack en Guadeloupe et Martinique et de cocaïne en Guyane.

    Quelques données statistiques confirment le phénomène :

    · Cocaïne : 1997 : un peu plus de 167,5 kg saisis ;

    1998 : 175 kg dont près de 50 % en Guyane ;

    · Crack : 1997 : 9,75 kg dont 66,5 % en Martinique ;

    1998 : 20,3 kg dont 92 % en Martinique.

    Une prise de 15,15 kg en Martinique est la plus importante jamais réalisée en France.

    En 1996, 959 individus ont été interpellés dans les trois départements des Antilles-Guyane pour infractions à la législation sur les stupéfiants, en 1997, 1247 et en 1998, 1215.

        b) La consommation de drogue

    Si le cannabis demeure le produit le plus utilisé, le développement de la consommation de crack est plus inquiétant.

    En effet, produit dérivé de la cocaïne obtenu par adjonction d’ammoniac ou de bicarbonate de soude, le crack, moins cher que certaines autres drogues mais qui produit des effets encore plus désastreux, est particulièrement nocif en raison de la dépendance quasi immédiate et des dégâts qu’il entraîne sur l’organisme. Les besoins impérieux de consommer génèrent de la part des utilisateurs de crack des actions violentes : agressions physiques, vols à main armée… Ce phénomène connaît actuellement une progression dans les trois départements français d’Amérique et en particulier en Martinique où ont été réalisés 92 % des saisies de l’année dernière et où les vols à main armée et les vols avec violence sur la voie publique ont augmenté de plus de 31 %.

    Par ailleurs, et principalement en Guadeloupe, une toxicomanie liée à l’usage de l’héroïne commence à voir le jour.

        c) Le trafic de stupéfiants

      · Le trafic local

    Ce trafic alimente la consommation locale des départements français. Il est organisé entre la Guyane française et le Surinam, entre la Guadeloupe et Antigua, la Dominique ou Saint-Martin, entre la Martinique et Sainte-Lucie ou Saint-Vincent. Il est associé au phénomène de l’immigration dont il emprunte les filières. Il permet l’acheminement sur le territoire français, le plus souvent de petites quantités de produits qui sont, soit directement revendues, soit remises aux trafiquants locaux.

      · Le trafic international

    Situés au cœur d’une zone stratégique pour l’acheminement des stupéfiants vers l’Europe et les États-Unis d’Amérique, les aéroports internationaux des Antilles-Guyane sont utilisés comme des points de passage. Les saisies de drogues confirment cette réalité.

    La Guyane sert de point de départ pour des passages de cocaïne, essentiellement importée du Surinam vers l’Europe et principalement la France métropolitaine et la Hollande.

    La Martinique sert également de point de départ pour des passages de cocaïne, de cannabis ou de crack vers l’Europe – France métropolitaine et Royaume-Uni principalement.

    La Guadeloupe, quant à elle, avec sa principale dépendance, l’Ile de Saint-Martin, est le territoire des Antilles françaises où le trafic international est le plus développé.

    En exerçant une forte pression sur le trafic, les services répressifs ont réussi en 1998 plusieurs affaires importantes dont le démantèlement de plusieurs filières en Guadeloupe, en Martinique et en Guyane, mais n’ont pas réalisé de saisie spectaculaire.

    Ce phénomène peut trouver une explication dans le succès enregistré par ces mêmes services, les années précédentes, obligeant les trafiquants à orienter différemment les routes de trafic, les aires de stockage et d’acheminement.

    En effet la proximité d’îles ou de pays indépendants moins bien armés pour lutter contre les trafics ou moins hostiles à l’activité des trafiquants, a conduit ces derniers à privilégier des secteurs pour poursuivre leur commerce. C’est ainsi que le rôle prépondérant de l’Ile de Saint-Vincent et l’Ile de Sainte-Lucie dans le trafic régional a été confirmé au travers de plusieurs affaires importantes.

      2.– La mise en œuvre d’actions appropriées aux particularités de la zone caraïbe s’avère insuffisante

    La coordination locale des services d’État est satisfaisante même si elle doit toujours être renforcée.

    En revanche la coopération internationale paraît faible au regard du poids des États-Unis dans la zone.

        a) Une multiplicité d’acteurs

    Compte tenu des particularités de cette région, l’Office Central pour la Répression du trafic illicite des stupéfiants (OCRTIS) a mis en place, au plus près des zones de production et de transit, des officiers de liaison spécialisés « drogue », basés à Bogota en Colombie, à Caracas au Venezuela, à Miami et à Key-West aux USA, à Porto Rico et au Brésil.

    Ce dispositif est complété par le service régional de police judiciaire, dont l’état major est situé à Pointe-à-Pitre et qui dispose de trois antennes opérationnelles à Saint-Martin, à Fort-de-France et à Cayenne. Les autres services de la police nationale, les forces de la gendarmerie nationale et de la douane complètent les structures répressives chargées de la lutte contre le trafic des stupéfiants.

    La coopération maritime organisée par la circulaire interministérielle du 5 mai 1997 a mis en place des structures anti-drogue régionales spécifiques aux Antilles-Guyane :

    · un comité zonal placé sous l’autorité conjointe du préfet de la Martinique, préfet de zone, et du procureur général est chargé de coordonner les actions de lutte contre le trafic de stupéfiants notamment par voie maritime ;

    · une cellule de coordination judiciaire ;

    · un bureau de liaison permanent placé auprès du service général de police judiciaire et chargé de développer les échanges entre les services et de définir un fichier d’objectifs.

    La coopération internationale s’articule aussi autour du réseau Interpol, des attachés de police du service de coopération technique internationale de police (SCTIP), du centre interministériel de formation anti-drogue (CIFAD) et du traitement du renseignement et action contre les circuits financiers clandestins (TRACFIN). Elle mobilise également de multiples organisations et enceintes internationales, auxquelles la France participe.

        b) Une coopération peu opérationnelle à cause d’importants problèmes structurels

    Malgré les progrès enregistrés dans la coopération policière, force est de constater que la disparité des législations, des procédures judiciaires (notamment en matière de blanchiment d’argent) et l’absence de conventions d’entraide judiciaire avec certains pays voisins nuisent à une action efficace.

    Les moyens mis en place restent très en deçà des besoins pour les raisons suivantes :

    · les États-Unis pèsent de tout leur poids sur cette zone, et les relations sont donc déséquilibrées ;

    · la coopération avec les pays qui concernent principalement les Antilles françaises se heurte à des problèmes structurels : différence de traditions juridiques avec des pays de culture anglo-saxonne, fiabilité toute relative des services de police de ces pays ;

    · la coopération policière avec les services étrangers, intense à certains égards mais trop disparate, repose en partie sur des affinités et des solidarités d’enquêteurs.

    En outre, il n’existe pas de conventions d’extradition ni d’entraide judiciaire, par exemple avec Sainte-Lucie et La Dominique.

    Par ailleurs, des discussions ont été engagées avec Haïti et Cuba et une réunion internationale avec les autorités de police du Surinam s’est tenue à Paramaribo les 6 et 7 janvier 1999.

    Cette rencontre qui avait pour but de mettre en place les bases d’un mécanisme de coopération simple, direct et rapide entre la Guyane et le Surinam, tant en ce qui concerne la circulation des personnes que celle des marchandises, a permis de réunir les conditions pour que la police judiciaire développe avec ce pays des actions de coopération, notamment dans le domaine du trafic des stupéfiants et du blanchiment d’argent. Le projet d’ouvrir un poste d’officier de liaison OCRTIS à Paramaribo a également été évoqué.

      3.– Le blanchiment d’argent est inégalement combattu

    Le développement, mal endigué, du trafic de stupéfiants dans les DOM, et en particulier dans la zone des Caraïbes, se traduit par un risque accru d’entrée de capitaux illégaux.

    La situation du blanchiment dans le bassin des Caraïbes requiert une vigilance constante car cette zone présente, par ses particularismes, une grande sensibilité dans le domaine du recyclage des capitaux illicites.

    Tout d’abord, il s’agit d’une région où coexistent des micro-États, qui sont souvent des places offshore où prédominent les sociétés écrans, et des territoires sous souveraineté américaine, française ou néerlandaise, donc autant de points d’entrée possibles pour l’argent blanchi.

    Cette zone est par ailleurs située sur les routes maritimes ou aériennes des produits stupéfiants vers l’Amérique du Nord et l’Europe.

    Enfin les îles Caraïbes développent une forte activité touristique et attirent, dans un contexte de défiscalisation, les convoitises du secteur de la promotion immobilière, bien connu pour servir de placement idéal à des capitaux blanchis.

        a) Des flux relativement maîtrisés

    Les risques étant importants, des efforts ont été faits pour que toute la vigilance et la rigueur nécessaires soient mises en œuvre.

    Il convient d’abord de souligner que la loi dite « anti-blanchiment n° 90-614 du 12 juillet 1990 relative à la participation des organismes financiers à la lutte contre le blanchiment des capitaux provenant du trafic des stupéfiants s’applique intégralement dans les départements français des Antilles, ce qui présente un net avantage par rapport à la situation que connaissent d’autres pays dans leurs possessions des Antilles.

    Cette loi s’applique à un grand nombre d’organismes financiers et notamment aux organismes régis par les dispositions de la loi du 24 janvier 1984 relative à l’activité et au contrôle des établissements de crédit, aux entreprises régies par le code des assurances ou par le code de la mutualité, aux sociétés de bourse et aux commerçants changeurs manuels. Cette loi définit la déclaration obligatoire de certaines sommes ou opérations ainsi que des obligations de vigilance, dans le cas de l’ouverture d’un compte par exemple. Les casinos font l’objet de dispositions spécifiques (article 18) et certains aménagements sont adoptés dans le code des douanes, le code de santé publique et le code de procédure pénale.

    Les organismes financiers sont donc soumis à l’obligation de vigilance et au système de la déclaration de soupçon. Ainsi, la cellule chargée du traitement du renseignement et de l’action contre les circuits financiers clandestins (TRACFIN) reçoit-elle des informations en provenance des départements français des Antilles, dont la pertinence varie selon les correspondants anti-blanchiment locaux. Le service veille à sensibiliser ses partenaires financiers de la zone et à leur porter les connaissances techniques et la formation nécessaire. Ces efforts ont porté leurs fruits, en terme de remontée d’information.

    D’autre part, il existe localement d’autres pays beaucoup mieux placés pour attirer les blanchisseurs.

    Concrètement, les départements français des Antilles constituent le fer de lance de l’action anti-blanchiment de la France dans la région des Caraïbes ; action qui, de surcroît, se présente comme l’alternative au modèle américain fortement implanté.

    TRACFIN a déjà organisé plusieurs semaines anti-blanchiment au centre international de formation anti-drogue (CIFAD) de Fort-de-France, à l’intention des pays anglophones ou hispanophones de la zone. Cette démarche sera renouvelée, afin de répondre à la forte demande des États de la région. En outre, TRACFIN joue un rôle central au sein du groupement d’action financière Caraïbes (GAFIC) que la nomination du nouveau directeur exécutif adjoint – un fonctionnaire de police français – vient conforter.

    Parallèlement à ces actions, qui sont l’occasion de nouer des contacts fructueux, la coopération s’est instaurée avec différents pays d’Amérique latine (Argentine, Brésil, Colombie, Vénézuela) ou centrale (Mexique, Costa-Rica).

    Enfin, l’action anti-blanchiment menée par TRACFIN sur la zone a été utilement complétée par l’implantation d’un échelon de la direction des enquêtes douanières à Fort-de-France, compétent pour la région Antilles-Guyane, et d’une antenne du même service pour la partie française de l’île de Saint-Martin, dont la situation est particulièrement délicate.

        b) La situation de Saint-Martin et Saint-Barthélémy est très préoccupante

    Ces deux îles du Nord présentent un intérêt particulier pour les blanchisseurs d’argent.

    Administrativement, elles dépendent de la Guadeloupe, où sont localisés les services d’inspection des établissements bancaires de la région et les correspondants anti-blanchiment de TRACFIN.

    Sur le plan touristique, Saint-Martin et Saint-Barthélémy drainent des flux de voyageurs plus importants que la Martinique et la Guadeloupe. De nombreuses liaisons maritimes et aériennes directes sont en effet assurées vers ces îles depuis les continents américain et européen.

    Une population hétérogène y réside, composée notamment de ressortissants italiens, américains, russes et, fait nouveau, jordaniens. Bon nombre ces ressortissants ont créé des sociétés offshore, notamment à Saint-Thomas et Sainte-Croix, (îles Vierges américaines) et sont titulaires de comptes en devises, phénomène courant dans la partie française de Saint-Martin.

    La proximité d’Anguilla et d’Antigua accroît les risques de blanchiment. S’y trouvent de nombreuses structures traditionnellement recherchées par les blanchisseurs : casinos sur Internet, centres offshore attirant notamment les groupes mafieux russes et les International Business Companies (IBC), etc. Ces entités s’analysent comme des sociétés fantômes, qui n’existent que de nom et sont totalement dépourvues de documents d’enregistrement.

    Les déclarations de soupçon transmises à TRACFIN concernant Saint-Martin et Saint-Barthélémy mettent principalement en cause des non-résidents français.

    Dans la typologie du blanchiment, Saint-Martin offre des opportunités de placement (dépôts d’espèces d’origine illicite) et d’intégration des sommes blanchies par l’achat de biens immobiliers.

    Ainsi, un dossier transmis par TRACFIN au parquet de Basse-Terre a-t-il permis, en coordination avec les services des États-Unis, d’extrader un ressortissant américain impliqué dans un trafic de marijuana et de saisir des biens immobiliers qu’il avait acquis avec des fonds frauduleux.

    L’attrait qu’exercent les deux îles sur les capitaux criminels explique et justifie l’intensification de l’action de TRACFIN sur la zone, au travers, d’une part d’un renforcement de la sensibilisation de ses correspondants financiers et des intermédiaires immobiliers locaux (notaires et agents immobiliers assujettis au mécanisme de la déclaration de soupçon par la loi n° 98-546 du 2 juillet 1998 portant diverses dispositions d’ordre économique et financier dans ses articles 98 à 100, qui élargissent le champ d’application de la loi anti-blanchiment), et, d’autre part, d’un resserrement de ses liens avec les autres acteurs institutionnels engagés dans le combat contre le recyclage de l’argent sale (police, douane et justice).

    La lutte anti-blanchiment est aussi indispensable que difficile à mener, comme en témoignent les obstacles auxquels se heurtent les simples contrôles fiscaux à Saint-Martin et Saint-Barthélémy. Les tentatives du ministère des Finances pour rendre effectif le recouvrement des impôts (directives strictes, envoi de personnels supplémentaires, poursuites fiscales et sociales, sanctions, perquisitions…) ont rencontré l’opposition des contribuables dont l’hostilité a pris des formes variées : violences physiques à l’encontre des inspecteurs des impôts, opération « ville morte » en juillet 1998 à Saint-Barthélémy et à Marigot en février 1999, motion remise au sous-préfet en novembre 1998… De tels comportements sont plus dignes d’un État de non-droit que d’un département français et ne sauraient être tolérés. Tout renoncement en la matière de la part des pouvoirs publics ne peut que stimuler les fraudes et les trafics en tout genre.

    Des redéploiements de fonds semblent ainsi nécessaires : les économies qui pourraient être faites sur les « sur-rémunérations » et la défiscalisation seraient bien plus utiles pour lutter contre l’immigration clandestine et le trafic de stupéfiants. Si les premiers ont eu une utilité dans la passé, ils constituent aujourd’hui des maux pour les sociétés ultramarines ; les seconds exacerbent les tensions en accroissant l’insécurité. Les combattre permettrait, sinon de résoudre tous les problèmes, du moins de rendre ces sociétés plus saines et plus sereines, ce qui ne peut que faciliter la résolution des autres problèmes qui les touchent.

EXAMEN EN COMMISSION

Au cours de sa séance du 7 octobre 1999, la commission des Finances, de l’Économie générale et du Plan a examiné les crédits des Départements d'outre-mer.

Après l’exposé de votre rapporteur spécial, M. Alain Rodet s’est interrogé sur les raisons de l’intensification du trafic de drogue depuis cinq ans.

M. Michel Inchauspé a souligné le rôle de Saint-Martin dans les flux financiers d’origine incertaine, alors que l’île est française. Il a évoqué la crise traversée par le Crédit martiniquais : l’État alimente la trésorerie de cet établissement bancaire par l’intermédiaire de la Caisse de coopération pour lui éviter une faillite, que le laxisme des autorités de tutelle n’a pas permis de prévenir. Des systèmes de prises de participations complexes, voire de faillites organisées, sont en cause. Dans la mesure où ce scandale se rapproche de celui qui a touché le Crédit lyonnais, la justice commerciale se doit d’intervenir.

M. Gilbert Gantier a félicité votre rapporteur spécial d’avoir souligné aussi nettement les problèmes qui touchaient les DOM, notamment en ce qui concerne les salaires locaux, la lutte contre la drogue et les problèmes d’immigration clandestine et il lui a demandé s’il pouvait analyser les causes des troubles qui ont affecté récemment la Guadeloupe.

M. Jean-Pierre Delalande a souhaité avoir des précisions sur le fonctionnement, le statut et les missions du Fonds pour l’emploi dans les départements d’outre-mer et la collectivité territoriale de Saint-Pierre-et-Miquelon (FEDOM) et a demandé si la ligne budgétaire du FEDOM figurait dans le budget du ministère de l’Emploi. Il s’est étonné du grand nombre de fonds existant dans les différents ministères et suggéré qu’une liste en soit dressée.

Votre rapporteur spécial a rappelé que le FEDOM qui, à lui seul, représente le tiers des crédits relatifs aux DOM, était exclusivement alimenté par des crédits inscrits au titre IV du secrétariat d’État à l’Outre-mer, à hauteur de 2,1 milliards de francs, et qu’il finançait les nombreuses actions d’insertion existant dans ces départements, notamment les contrats emploi-solidarité.

Il a analysé les tensions sociales en Guadeloupe comme le résultat d’ensemble de la situation sociale : aux fortes disparités de revenus s’ajoutent le taux élevé de chômage, surtout parmi les jeunes, et la paupérisation dont témoigne le nombre d’allocataires du revenu minimum d’insertion (RMI).

L’étude du blanchiment de l’argent sale à Saint-Martin mériterait la création d’une mission d’information. Il convient également que soit approfondie l’information du Parlement sur la crise du Crédit martiniquais, mais aussi sur la récente faillite de la société Stardust, filiale du Crédit lyonnais, contrainte de reverser les aides qu’elle a reçues à la suite d’une décision de la Commission européenne et qui, donc, est en situation de dépôt de bilan.

Il a illustré l’aggravation du problème de la drogue aux Antilles en rappelant que c’est là qu’a été réalisée la plus grosse prise de stupéfiants en 1998 et que les statistiques témoignent d’une aggravation nette de la situation depuis cinq ans.

Usant de la faculté que l’article 38 du Règlement de l’Assemblée nationale confère aux députés d’assister aux réunions des commissions dont ils ne sont pas membres, M. Gérard Grignon a approuvé l’analyse des causes sociologiques des tensions dans les DOM. Il a souligné que le fait que des fonctionnaires métropolitains occupaient l’essentiel des postes et bénéficiaient d’une indexation salariale et de primes d’éloignement, était très mal accepté par les habitants originaires de ces départements, qui sont, pour certains emplois, tout aussi qualifiés que des métropolitains. Le taux de chômage outre-mer est souvent proche de 40 % et touche surtout les jeunes, les nominations de fonctionnaires métropolitains pouvant être ressenties comme aggravant l’absence de débouchés.

Après avoir regretté que le dispositif de la loi dite « Pons » soit si souvent décrié alors que ses résultats sont mal connus et, surtout, qu’aucun autre mécanisme n’est proposé, il a insisté sur la nécessité de pérenniser les allégements de charges sociales spécifiques aux DOM et à Saint-Pierre-et-Miquelon, citant l’exemple d’une brasserie de Terre-Neuve qui est prête à s’installer à Saint-Pierre-et-Miquelon, si elle reçoit la garantie de cette pérennisation. En dépit du surcoût salarial qu’une telle installation induit, elle peut parfaitement être bénéfique, à la fois pour des raisons géographiques de desserte et sur le plan économique. Les dispositions de l’article 72 du projet de loi vont donc dans le bon sens, mais nécessiteraient d’être pérennisées.

Enfin, il convient de souligner que l’outre-mer a une image connotée de plus en plus négativement, ce qui nuit au développement économique local.

Après avoir rappelé que la rémunération des fonctionnaires de métropole posait effectivement un réel problème, certains, comme M. Paul Vergès, postulant même la suppression des primes d’éloignement, M. Jean-Pierre Brard, Président, a indiqué que la Commission pourrait opportunément se pencher sur le régime juridique et fiscal de Saint-Martin et sur le « crédit martiniquais » et « stardust ».

La Commission a ensuite adopté, contre l’avis de votre rapporteur spécial, les crédits des Départements d'outre-mer. Puis elle a adopté l’article 72 du projet de loi de finances, rattaché à ces crédits.

    La Commission vous demande d’émettre un vote favorable à l’adoption des crédits des Département d’outre-mer.

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Article 72

Prorogation du régime d’exonération des charges patronales
dans les départements d’outre-mer et de Saint-Pierre-et-Miquelon

Texte du projet de loi :

    Au II de l’article 4 de la loi n° 94-638 du 25 juillet 1994 tendant à favoriser l’emploi, l’insertion et les activités économiques dans les départements d’outre-mer, à Saint-Pierre-et-Miquelon et à Mayotte, les mots « pendant cinq ans à compter de la publication du décret en Conseil d’État susmentionné » sont remplacés par les mots « jusqu’au 31 décembre 2000. ».

Exposé des motifs du projet de loi :

    Le II de l’article 4 de la loi n° 94-638 du 25 juillet 1994 précise que le régime d’exonération sectorielle prévu par le I du même article est applicable pendant 5 ans à compter de la date de publication du décret d’application nécessaire à sa mise en œuvre. Ce décret, daté du 27 février 1995, ayant été publié le 1er mars 1995, le régime prend fin le 1er mars 2000.

    Afin de maintenir ce dispositif en faveur des DOM et de Saint-Pierre-et-Miquelon et d’assurer sa mise en œuvre pour une durée suffisante, il est proposé de le proroger jusqu’au 31 décembre 2000.

Observations et décision de la Commission :

    L’article 72 du projet de loi de finances pour 2000 propose de proroger le régime d’exonération des charges patronales dans les départements d’outre-mer et de Saint-Pierre-et-Miquelon jusqu’au 31 décembre 2000.

    L’article 4 de la loi n° 94-638 du 25 juillet 1994 tendant à favoriser l’emploi, l’insertion et les activités économiques dans les départements d’outre-mer, à Saint-Pierre-et-Miquelon et à Mayotte crée un régime d’exonération sectorielle qui s’applique aux départements d’outre-mer et à Saint-Pierre-et-Miquelon. Sont exonérées de cotisations au titre des assurances sociales, des allocations familiales et des accidents du travail les entreprises immatriculées au registre du commerce et des sociétés ou inscrites au répertoire des métiers qui en font la demande à la caisse de sécurité sociale compétente, si elles exercent leur activité dans une série de secteurs : l’industrie, l’hôtellerie et la restauration, la presse, la production audiovisuelle, l’agriculture et la pêche, y compris l’aquaculture. Le coût pour les organismes sociaux est pris en charge par l’État et est inscrit sur le budget des charges communes : la compensation s’élevait à 872,1 millions de francs en 1997.

    Le II de l’article 4 de la loi de 1994 précise que ces dispositions sont applicables pendant cinq ans à compter de la publication du décret. Ce décret, daté du 27 février 1995 a été publié le 1er mars 1995 : le régime prend donc fin le 1er mars 2000.

    Le présent article propose de le proroger jusqu’à la fin de l’année 2000 afin d’assurer sa mise en œuvre pendant une durée suffisante. Il s’agit en fait d’aménager une période de transition, avant la mise en place de nouveaux dispositifs dans le cadre de la prochaine loi d’orientation relative aux départements d’outre-mer.

    La Commission a adopté cet article sans modification et vous demande d’émettre un vote favorable à son adoption.

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N°1861-36. - Rapport de M. François d'Aubert, au nom de la commission des finances, sur le projet de loi de finances pour 2000. - Outre-mer: départements d'outre-mer.

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