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ASSEMBLÉE NATIONALE

COMMISSION des AFFAIRES CULTURELLES,
FAMILIALES ET SOCIALES

COMPTE RENDU N° 3

(Application de l'article 46 du Règlement)

MERCREDI 4 OCTOBRE 2000
(Séance de 16 heures 30)

Présidence de M. Jean Le Garrec, président

SOMMAIRE

 

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- Audition, en présence de la presse, de Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité, de Mme Ségolène Royal, ministre déléguée auprès de la ministre de l'emploi et de la solidarité, chargée de la famille et de l'enfance, et de Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat auprès de la ministre de l'emploi et de la solidarité, chargée de la santé et des handicapés, sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 (n° 2606)

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La commission des affaires culturelles, familiales et sociales a entendu Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité, Mme Ségolène Royal, ministre déléguée auprès de la ministre de l'emploi et de la solidarité, chargée de la famille et de l'enfance et Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat auprès de la ministre de l'emploi et de la solidarité chargée de la santé et des handicapés, sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 (n° 2606).

Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité, a tout d'abord souligné l'amélioration des données budgétaires fondamentales relatives à la sécurité sociale. Le solde du régime général devrait être positif de 3,3 milliards de francs en 2000, l'excédent prévisionnel s'élevant à 15,4 milliards de francs en 2001. A structure constante, le régime général dégage, hors fonds de réserve pour les retraites, 16,2 milliards de francs d'excédent en 2000 et 18,9 milliards de francs en 2001. Ces chiffres, à eux seuls, témoignent du chemin parcouru depuis 1997. L'ensemble des régimes sociaux dégage cette année 45 milliards de francs d'excédent, soit un demi-point de PIB.

Le redressement des comptes en lui-même n'aurait pas grand sens s'il ne s'était accompagné d'une meilleure protection sociale pour l'ensemble de nos concitoyens. S'agissant en particulier des plus démunis d'entre eux, la création de la couverture maladie universelle (CMU) est une mesure particulièrement importante. Il en va de même de la politique menée en matière de médicaments, comme de la nécessité de toujours mieux prendre en compte les besoins des familles et des personnes âgées.

S'agissant de la branche famille, l'excédent de 6,8 milliards de francs prévu pour 2000 doit être comparé avec le déficit de 14,5 milliards de francs de 1997. Ce rétablissement des comptes permet de mener une politique ambitieuse, caractérisée par le report à 20 ans de l'âge ouvrant droit au bénéfice des prestations familiales, l'amélioration du complément familial et des aides au logement, l'extension de l'allocation de rentrée scolaire, le développement des actions sociales menées par la Caisse nationale d'allocations familiale (CNAF). Le Premier ministre, le 15 juin dernier, à l'issue de la Conférence de la famille a annoncé d'autres mesures. Celles-ci permettront notamment de mener des actions en faveur de la petite enfance par le biais du fonds d'aide aux crèches et d'améliorer les aides au logement. L'ensemble de ces mesures représente un effort de 10,5 milliards de francs en faveur des familles, supporté pour un montant de 3,7 milliards de francs par l'Etat et de 6,8 milliards de francs par la branche famille.

En matière d'accidents du travail et de maladies professionnelles, des progrès importants ont déjà été accomplis. On doit souligner en particulier la réduction des délais dans lesquels les caisses répondent aux demandes et l'amélioration des aides aux victimes. S'agissant en particulier de la question de l'amiante, si beaucoup a déjà été fait, il est nécessaire aujourd'hui d'étendre le champ de la protection à certains établissements actuellement non concernés par l'indemnisation. Il faut rappeler que les victimes endurent des souffrances très lourdes, et qu'il convient donc de trouver le mode de réparation et de traitement des pathologies le plus approprié possible. Un fonds d'indemnisation sera créé qui concerne autant les salariés du secteur privé que les agents de l'Etat. Il convient, en outre, de réfléchir à une modification de la loi de 1898 sur les accidents du travail afin d'assurer une réparation plus large des maladies professionnelles.

S'agissant de la branche maladie, le Gouvernement s'est attaché à améliorer la couverture maladie par la mise en place de la Couverture maladie universelle qui concerne aujourd'hui 4,5 millions de personnes. En outre, la multiplication par deux du nombre des IRM, le développement de la vaccination contre la grippe, l'amélioration de la contraception, comme de la prise en charge des prothèses auditives font partie des priorités du Gouvernement. S'agissant de la prévention, la lutte contre le cancer fait l'objet d'un programme ambitieux qui a une approche globale de la maladie s'adressant au malade comme à ses proches. 1,8 milliard de francs y sont consacrés. Le projet de loi de financement de la sécurité sociale prévoit également une amélioration de la couverture maladie des non salariés non agricoles.

Il reste que la croissance des dépenses de santé est trop importante. A cet égard, on ne peut que regretter le dépassement de l'ONDAM en 2000 de 11 milliards de francs, déduction faite de la contribution due par l'industrie pharmaceutique. L'augmentation est de 4,1 %, à comparer cependant avec la croissance, plus rapide, du PIB (4,7 %). Les objectifs sont dépassés, mais il faut cesser de parler de dérapage quand on voit les dépenses maladie croître moins vite que la richesse nationale. Le dépassement est principalement dû aux dépenses de médicaments (6,2 milliards de francs), aux honoraires de certaines professions médicales (3,8 milliards de francs), aux indemnités journalières (1,7 milliard de francs), et aux dispositifs médicaux (1,6 milliard de francs).

S'agissant de l'hôpital, trois priorités demeurent : la réduction des inégalités dans l'accès aux soins, l'adaptation par rapport aux besoins de la population, la sécurité des soins. La mise en place d'une agence technique d'information sur l'hospitalisation permettra d'obtenir des données fiables et claires sur le traitement des pathologies. La transparence des données est nettement préférable à certains « classements » parfois publiés dans la presse dont les critères sont très imprécis. Le mouvement de recomposition de l'offre hospitalière se poursuivra, avec le soutien du fonds de modernisation des établissements de santé créé par le présent projet de loi.

Pour ce qui est du médicament, le taux de croissance des dépenses remboursées reste élevé (6 à 7 %), mais il doit être mis en balance avec la croissance plus importante constatée les années précédentes (10 à 12 %). Cette croissance est en outre plus faible que celle constatée chez nos principaux voisins. Il est nécessaire de mener à bien une politique d'information vis-à-vis de nos concitoyens sur les risques de surconsommation, voire de combinaison dangereuse de certains produits. La Commission de transparence a évalué le service médical rendu (SMR) par 2 663 spécialités. Un seul laboratoire a refusé de signer une convention avec le Comité économique permettant de diminuer le prix des spécialités dont le SMR a été jugé insuffisant. Ces diminutions, qui ont été décidées après qu'une procédure contradictoire a été menée avec les laboratoires, doit aboutir à une baisse de 20 % du prix des produits concernés sur trois ans puis au déremboursement de certains produits. Cette politique de transparence et de baisse des coûts ne doit pas faire obstacle au développement de l'innovation, et au maintien de prix élevés pour les médicaments innovants. Ces mesures permettront d'aboutir à 1 milliard de francs d'économies en 2001. Le développement des médicaments génériques permettra, en outre, de réduire la dépense de 500 millions de francs en 2001 et 1,5 milliard de francs en 2002. A cet égard, il faut souligner que les pharmaciens jouent le jeu, même si le Gouvernement leur a demandé de ne pas procéder à des substitutions lorsqu'elles peuvent présenter un risque, notamment pour des personnes âgées.

En ce qui concerne les dispositifs médicaux, une partie des dépassements enregistrés sur certains produits comme les seringues ou les fauteuils roulants est due à des prix libres et élevés. A l'issue de la vérification du service médical rendu, une négociation menée par le Comité économique des produits de santé avec les producteurs devrait permettre de fixer des prix plus justes, et d'améliorer les taux de remboursement.

Le calcul de la contribution de l'industrie pharmaceutique au financement des dépenses de santé - la clause de sauvegarde - va être modifié afin de supprimer les actuels effets de seuil. Un calcul linéaire permettra de faire financer 70 % des dépassements liés aux dépenses pharmaceutiques par l'industrie pharmaceutique.

En ce qui concerne les médecins, cet été, la Caisse nationale d'assurance maladie (CNAM) a pris, en application du nouveau dispositif voté l'an dernier, des mesures en réaction aux dépassements dus à certaines dépenses non pharmaceutiques : elle l'a fait sans une concertation préalable suffisante, ce qui est regrettable et ne devrait pas se reproduire, l'explication étant nécessaire à l'acceptation des mesures prises. Le Gouvernement a néanmoins agréé ces décisions, à l'exception de celle relative à la baisse des tarifs des infirmières à domicile en service la nuit ou le week-end pour des raisons de santé publique car cette mesure était susceptible de restreindre l'offre pour un service répondant à un besoin bien réel.

La fixation de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie (ONDAM) pour 2001 répond à la volonté de renforcer l'efficacité du système de santé grâce à une politique structurelle et en tenant compte du cadre économique et financier. Il progresse de 3,5 %, soit 1 % de plus qu'en 2000. En effet, le pays a les moyens de tenir un tel engagement qui permettra de mener à bien de grands programmes comme la lutte contre le cancer et la politique en faveur du développement des greffes. Les établissements médico-sociaux bénéficient de la plus forte hausse, à 5,8 %. Pour les hôpitaux, l'ONDAM est de 3,4 %, mais comme les autres ressources des hôpitaux augmenteront moins vite, le montant du forfait hospitalier n'étant pas modifié, les dépenses autorisées progresseront de 3,3 %. Le même objectif de 3,3 % a été retenu pour les cliniques privées qui ont réalisé des efforts importants de mise en réseau avec les hôpitaux publics. Les dépenses de soins de ville pourront croître de 3 %, soit 1 % de plus qu'en 2000. Tous ces objectifs sont crédibles et doivent permettre l'amélioration de la santé des Français.

Les retraites seront également revalorisées, à hauteur de 2,2 %, afin que les retraités participent au partage des fruits de la croissance. Leur pouvoir d'achat aura ainsi progressé de 1,2 % depuis 1997. Cette hausse est complétée par la suppression de la contribution pour le remboursement de la dette sociale (CRDS) de 0,5 % pour les retraités non assujettis à l'impôt sur le revenu, soit 50 % environ des retraités. Pour ceux-là, le gain de pouvoir d'achat atteindra 2,7 % en 2001. Quant au Fonds de réserve des retraites, il sera abondé de manière à atteindre 50 milliards de francs à la fin de l'année 2001.

Ce projet de loi témoigne donc des bons résultats de la politique structurelle menée depuis trois ans et de la volonté du Gouvernement de poursuivre dans cette voie.

Le président Jean Le Garrec a observé que l'évolution des dépenses d'assurance maladie qui était proposée, comparée à l'évolution attendue du produit intérieur brut, répondait effectivement à un souci de maîtrise et à la demande sociale de rattrapage des inégalités. La fixation de l'ONDAM est très satisfaisante : les efforts réalisés par les hôpitaux publics et les cliniques privées sont à souligner. La politique de lutte contre le cancer et de développement de l'imagerie à résonance magnétique (IRM) est fondamentale. Pour ce qui concerne les médicaments, l'effort en faveur des médicaments génériques doit être accentué, tant les résultats, positifs, sont encore loin de ceux obtenus par les pays voisins.

M. Alfred Recours, rapporteur pour les recettes et l'équilibre général, s'est réjoui que la ristourne de la contribution sociale généralisée (CSG) soit abordée dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale et non du projet de loi de finances. En effet, de la pérennité de la CSG dépend celle du financement de la sécurité sociale. Après avoir souligné les difficultés qu'il y avait à fixer un taux de progression couvrant des dépenses très différentes et évoluant indépendamment les unes des autres, il a estimé que l'ONDAM choisi était bien mesuré : ni laxiste, ni limité au taux d'inflation prévu, il permettra de corriger certaines inégalités. Le fait que les taxes sur les tabacs n'alimentent plus du tout le budget de l'État renforce la crédibilité d'une augmentation des prix ; de même, le fait que la taxe sur les alcools ne revienne plus en partie au Fonds de solidarité vieillesse constitue une simplification appréciable.

M. Alfred Recours a souhaité savoir si l'augmentation de l'ONDAM permettrait à la CNAM de revoir la situation de certaines professions, comme les masseurs-kinésithérapeutes, dont le prix des prestations a été réduit de 3 % sans réelle justification. En effet, ces professionnels ne sont pas prescripteurs et l'augmentation du nombre de leurs actes tient plus au vieillissement de la population qu'à un quelconque laxisme.

En réponse, Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité a apporté les précisions suivantes :

- La CNAM a décidé la mesure de régulation des honoraires des masseurs-kinésithérapeutes en raison d'une forte évolution des dépenses au cours des quatre premiers mois de l'année, avec un rythme annualisé de 5,5 %. Cette évolution résulte certes de facteurs démographiques, comme le fait valoir la profession, mais également de pratiques contestables de la part de certains kinésithérapeutes qui se livrent à un véritable « abattage ». La mise en place de l'Office sur les professions paramédicales est de nature à permettre l'établissement, avec l'aide de la profession, d'un code de déontologie et de bonnes pratiques. Par ailleurs, différentes mesures favorables ont été décidées : un aménagement de la nomenclature, permettant, pour des raisons médicales, une certaine récupération du manque à gagner consécutif à la baisse tarifaire ; la faculté pour les masseurs kinésithérapeutes de proposer aux médecins traitants un protocole de soins, ce qui leur donne le statut d'acteur de santé à part entière.

- La ristourne sur la CSG est bien traitée dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale, et non dans celui du projet de loi de finances pour 2001 ;

- Le transfert au budget de la sécurité sociale de la totalité du produit des droits sur le tabac est en partie le résultat des travaux et propositions sur la lutte contre le tabagisme faits par M. Alfred Recours.

M. Claude Evin, rapporteur pour l'assurance maladie et les accidents du travail, a fait les observations suivantes :

- Le rebasage systématique de l'ONDAM en fin d'exercice devrait conduire à revoir la procédure des objectifs délégués qui conduit la CNAM à discuter avec les professions médicales à partir d'un ONDAM voté mais non actualisé.

- Il ne faut pas s'étonner de voir l'ONDAM systématiquement dépassé puisqu'aucun mécanisme global de respect de cet objectif n'a été mis en place depuis 1996. Mais ceux qui s'indignent de ces dépassements seraient les premiers à protester contre l'instauration d'un tel mécanisme.

- Pour le traitement des cancers, le coût plus important des médicaments doit être pris en compte.

- S'agissant des maladies professionnelles, si la mise en place du Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante a représenté un progrès, une réforme de l'indemnisation de ces pathologies est nécessaire. A cet égard une modification des dates d'exposition aux risques amiante dans les entreprises recensées dans l'arrêté du 7 juillet 2000, doit être envisagée, dans la mesure où des contentieux montrent que certaines personnes sont restées exposées au-delà des périodes mentionnées.

Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure pour la famille, s'est félicitée de la bonne situation financière de la branche famille, qui permet la mise en _uvre des décisions arrêtées lors de la Conférence sur la famille du mois de juin dernier. Une enveloppe supplémentaire de 10,5 milliards de francs sera ainsi redistribuée aux familles.

Elle a ensuite demandé si des financements étaient prévus en direction des collectivités locales bénéficiaires de l'aide exceptionnelle de 1,5 milliard de francs du fonds d'investissement pour l'accueil de la petite enfance, afin d'assumer l'augmentation correspondante de leurs coûts de fonctionnement.

Puis elle a demandé des précisions sur les incidences de la réforme des aides au logement, avant de s'interroger sur la possibilité de faire bénéficier les parents isolés, dans le cadre du dispositif de congé pour enfant malade et d'allocation de présence parentale, des mêmes avantages que les couples cumulant deux allocations à temps partiel. Le montant alors servi s'avère en effet dans ce cas supérieur au montant à temps plein.

Elle a enfin souhaité une amélioration de la situation des conjoints survivants vis-à-vis des règles de cumul des pensions de réversion, de manière que les différences actuelles entre les régimes ne pénalisent plus les personnes modestes.

Après s'être félicité du « coup de pouce » prévu pour les retraites en 2001, M. Denis Jacquat, rapporteur pour l'assurance vieillesse, a demandé si une modification des modalités d'indexation des retraites, qui évolueraient comme les salaires et non plus comme les prix, était envisagée.

Puis il s'est interrogé sur l'opportunité d'un transfert de l'Etat vers le Fonds de solidarité vieillesse de la validation des points de retraite complémentaire correspondant aux périodes de chômage et de préretraite, dans le contexte du conflit entre l'AGIR et l'ARRCO et l'Etat, avant d'insister sur la nécessité d'une égalisation des modalités d'attribution des pensions de réversion entre les différents régimes de retraite et de demander les mesures envisagées pour résorber la pénurie de moyens en matière de soins à domicile des personnes âgées, domaine pour lequel les demandes sont importantes.

En réponse, Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité a fait part des éléments suivants :

- Différentes mesures ont été prévues pour intégrer l'incidence budgétaire des médicaments du traitement du cancer, dont le coût s'est établi à 2,2 milliards de francs en 1999, soit une progression du prix unitaire de l'ordre de 5,5 % sur cinq ans. La prise en compte de nouveaux médicaments est déjà effective pour le PMSI, afin que les établissements hospitaliers spécialisés ne soient pas pénalisés.

- S'agissant de l'amiante, certaines pathologies sont très longues à se déclarer et les recherches nécessaires à l'identification des causes sont complexes en raison de la disparition de certaines entreprises. La liste publiée n'est pas définitive. Des établissements peuvent être ajoutés. Les dates d'exposition au risque peuvent également être modifiées.

- L'indexation des retraites sur les salaires ne permet pas le maintien du pouvoir d'achat à la différence de l'indexation sur les prix, effective depuis 1997. Aujourd'hui, ce qui est proposé est encore plus bénéfique puisque les retraités devraient bénéficier selon les cas d'une revalorisation supérieure de 1 ou 1,5 % par rapport à l'inflation prévisionnelle.

- Il est effectivement nécessaire d'harmoniser les règles de réversion pour les pensions que ce soit pour les taux ou les plafonds. C'est une question soumise au Conseil d'orientation des retraites.

- Des mesures d'exonération totale de charges sociales ont été prévues pour les personnes âgées nécessitant des soins à domicile. Certaines associations ne les appliquent pas, des contrôles sont en cours. L'évolution du secteur des soins à domicile passe par la professionnalisation et la revalorisation du statut des personnels. Des sommes nouvelles ont été dégagées dans le cadre de la nouvelle prestation autonomie pour financer une augmentation du nombre des personnes concernées qui devrait passer de 120 000 à 700 000 ou 800 000. Cette revalorisation passe par des salaires plus attrayants  :  il est normal que les personnes effectuent la toilette ou certains soins soient mieux payées que celles qui font simplement le ménage ou les repas. Par ailleurs, le Gouvernement favorisera les soins infirmiers à domicile.

Mme Ségolène Royal, ministre déléguée auprès de la ministre de l'emploi et de la solidarité, chargée de la famille et de l'enfance, a souligné l'importance de la réforme des allocations logement qui porte sur deux points : la mise en place d'un barème unique et le mode de calcul des ressources prises en compte pour traiter de la même façon les salaires et les minima sociaux. La réforme sera mise en place en deux étapes au 1er janvier 2001 et en 2002. Son coût total s'élèvera à 6,5 milliards de francs.

Le budget du Fonds national d'action sanitaire et sociale de la CNAF est augmenté de façon conséquente. Sur un total de 1,7 milliard d'actions nouvelles, 900 millions de francs sont consacrés au soutien des modes d'accueil collectif pour la petite enfance, 300 millions de francs à des actions en faveur des enfants et des adolescents et à des actions de soutien de réseaux de parents. En outre, le fonds d'investissement pour les crèches est à la disposition des collectivités sociales qui peuvent bénéficier des subventions allant jusqu'à 70 000 F par place d'accueil.

On estime à 13 000 le nombre d'enfants gravement malades dont les parents pourront bénéficier du nouveau congé. Ce congé devrait pouvoir être accordé rapidement - l'accord médical hospitalier devant être octroyé sous quinze jours - et l'allocation de présence parentale passera de 3 000 à 4 000 lorsque le congé sera pris par les deux parents dans le cadre d'un mi-temps. La question des familles monoparentales pourra être réexaminée.

M. Jean-Luc Préel a rappelé que Mme Martine Aubry s'était fixé deux objectifs à son arrivée au ministère : maîtriser les dépenses de santé et gagner la confiance des professionnels.

Au regard de ces deux objectifs, son action a subi un grave échec. Il n'y a pas eu de maîtrise des dépenses de santé : l'ONDAM a augmenté de 4,5 % l'année dernière et son rebasage ne facilite pas les comparaisons. Quant aux professionnels, ils ne sont pas satisfaits : les décisions sont prises sans concertation et les sanctions et les modifications des lettres-clefs flottantes sont prises à partir d'un ONDAM sans rapport avec la réalité. Certains hôpitaux au bord de la cessation de paiement et on ne sait pas comment ils pourront financer le passage aux trente-cinq heures.

Rappelant que la formation de spécialistes nécessitait dix années, il a demandé comment l'avenir des spécialités sinistrées était préparé et s'est inquiété de l'état d'avancement de la tarification à la pathologie.

Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité, a précisé que son objectif avait été de mieux maîtriser les dépenses de santé pour mieux soigner. Les mesures adoptées ont sur ce plan porté leurs fruits puisque, sans elles, le déficit de la sécurité sociale s'élèverait à 20 milliards de francs. Il est normal que les dépenses de santé d'un pays développé augmentent. La question n'est donc pas de les faire baisser mais de mieux justifier chaque franc dépensé. Cela permet de faire face à des maladies de plus en plus coûteuses et de mieux rembourser certaines dépenses, par exemple les prothèses auditives.

L'évolution des dépenses de santé doit être comparée à celle du produit intérieur brut (PIB). De 1990 à 1996, les dépenses de santé ont augmenté plus vite que la croissance. En 1999, elles lui sont inférieures de 0,3 % et en 2000 de 0,6 %. Il est prévu qu'elles le soient de 1,3 % en 2001.

Si les relations avec les professionnels de santé sont parfois difficiles, elles sont cependant empreintes de confiance, comme en témoignent les accords signés avec plusieurs professions qui ont reconnu l'existence d'abus et la nécessité d'y mettre fin.

En ce qui concerne le financement des 35 heures à l'hôpital public, 600 millions de provisions sont prévus en 2001, hors ONDAM.

Mme Martine Aubry a tenu à remercier, au moment de quitter le Gouvernement, l'ensemble de la commission pour la qualité du travail qui a été fait en commun depuis 1997.

M. Alain Veyret s'est interrogé sur la justesse de l'allocation des ressources dans le secteur hospitalier privé. En effet il existe plusieurs types d'établissements : certains, de petite taille, offrent une qualité de soins qui peut être critiquée mais bénéficient d'une allocation des ressources qui leur est favorable. Dans le même temps, des établissements de plus grande taille ont fait d'importants efforts de modernisation, de formation du personnel et de restructuration (4000 lits ont été supprimés dans le secteur) et font face à de réelles difficultés financières. De plus, à travail équivalent, le personnel reçoit des rémunérations inférieures de 20% à celles du secteur public. Il est anormal que ces établissements qui font des efforts de restructuration et de coopération avec les hôpitaux publics soient traités de la même façon que ceux qui n'en font pas. Pour remédier à cette situation, il faudrait revoir la tarification et davantage utiliser l'instrument du Fonds de modernisation prévu à l'article 35, dont le montant n'est pas encore suffisant (100 millions de francs en 2000, 150 en 2001).

M. Bernard Outin a fait les observations suivantes :

- Des moyens supplémentaires pour les remplacements dans le secteur hospitalier ont été débloqués, ce qui est positif, mais ces remplacements ne sont parfois pas pourvus faute de personnels disponibles : cela pose la question du nombre d'infirmières en formation.

- Certains établissements médico-sociaux qui pratiquant le paiement à l'acte et ayant le statut d'association doivent faire face à des difficultés financières importantes, faute d'avoir bénéficié du rebasage de l'ONDAM dans lequel ils ne sont pas inclus.

- Les évolutions différenciées d'objectifs de dépenses entre les régions sont nécessaires pour établir une plus grande égalité dans l'accès aux soins. Mais, à l'intérieur des régions, il est beaucoup plus difficile de réaliser cette évolution différenciée en fonction des besoins de chaque établissement.

M. Patrice Martin-Lalande a rappelé qu'il avait attiré l'attention au printemps dernier sur le retard de la France en matière de médicalisation des maisons de retraite et de soins infirmiers à domicile. Un important effort serait fait dans cette matière. Mais aujourd'hui il y a lieu de s'inquiéter sur la réalisation du financement de cet effort annoncé.

M. Maxime Gremetz a formulé les remarques suivantes :

- Dans un contexte de croissance, d'explosion des profits et d'excédent de la sécurité sociale, il convient de bien mieux répondre aux besoins. Concernant les hôpitaux, le Gouvernement n'avait voulu entendre les mises en garde des communistes au moment de la discussion de la loi de financement pour 2000, et il a fallu une explosion sociale pour obtenir un déblocage de 10 milliards de francs. Alors que les besoins restent substantiels, il ne faut pas recommencer la même erreur. Sur la prévention, il faudrait faire davantage pour la médecine scolaire et la médecine du travail dont le développement serait source d'économies pour la branche maladie.

- Il est prévu que les prestations familiales n'augmentent que de 0,5 % et que l'AJE reste sous condition de ressources. Alors que le pouvoir d'achat stagne, ces dispositions ne sont pas acceptables. En outre, même si un petit effort a été fait pour les retraites, c'est tout à fait insuffisant car les retraités ne bénéficient pas de la baisse de la CSG alors que leur pouvoir d'achat a baissé ces dernières années.

- Au sujet des remboursements, des améliorations pour la lunetterie, les soins dentaires sont indispensables. Il n'est pas possible de se contenter de promesses pour l'année prochaine.

- La mise en place d'une participation du capital au financement de la sécurité sociale, qui était une nouveauté importante, est beaucoup trop lente et modeste. D'après le Conseil d'orientation pour les retraites, le prélèvement opéré sur le capital en direction du fonds de réserve se montait à 5,4 milliards de francs en 2000 et seulement à 5,7 milliards en 2001.

Mme Jacqueline Mathieu-Obadia, contestant la déclaration de Mme Martine Aubry selon laquelle certains médicaments ne servaient à rien et ne devaient donc plus être remboursés, a fait remarquer que les veinotoniques visés s'étaient révélés utiles après des tests en double aveugle.

Par ailleurs, elle s'est interrogée sur la cohérence des mesures prises par la CNAM qui pénalisent des professionnels sollicités par des patients pour des motifs justifiés. Le Gouvernement a décidé de ne pas diminuer les honoraires des infirmières pour des motifs de santé publique : la demande de soins provenant de la population n'était-elle pas également une raison de santé publique justifiant la revalorisation des honoraires ? Elle s'est ensuite interrogée sur les raisons pour lesquelles l'ensemble de la profession des kinésithérapeutes a été pénalisé alors que seuls certains d'entre eux n'ont pas respecté les règles en vigueur.

Concernant l'ONDAM, elle a critiqué la manière purement comptable dont les objectifs sont fixés et a considéré qu'il était indispensable d'avoir une autre approche et un autre regard pour déterminer ces objectifs. Dès lors, il est justifié de critiquer les sanctions pour ces dépassements d'objectifs.

M. Jean-Paul Bacquet a rappelé que plusieurs intervenants avaient dénoncé le manque de concertation dans le fonctionnement des caisses de sécurité sociale. Il a noté le décalage qui pouvait exister entre les mesures annoncées par le Gouvernement et leur application par les caisses qui adoptent des mesures sans concertation préalable. Il a souhaité savoir ce qu'envisageait le Gouvernement pour améliorer la concertation.

Rappelant l'accord des professionnels sur la suppression des Comités médicaux régionaux qu'ils considèrent comme des tribunaux d'exception, il a demandé comment les dossiers en cours ainsi que les sanctions prononcées seraient traités.

Il a ensuite attiré l'attention sur la « désertification médicale » qui gagne les campagnes où il est désormais difficile de trouver des successeurs aux médecins prenant leur retraite. Les mesures portant sur le relèvement des numerus clausus ne porteront leurs fruits que dans dix ans.

Rappelant qu'en tant que praticien il prescrivait des anxiolytiques en complément d'antidépresseurs, comme ses professeurs le lui avaient enseigné afin notamment de prévenir les suicides, il s'est interrogé sur les effets des mesures de restriction proposées par le Gouvernement et s'est demandé si elles ne devaient pas porter en priorité sur le dernier décile des actes prescrits chaque année par un médecin ; en moyenne, un praticien prescrit 8 000 actes par an, mais les déciles moyens portent ce nombre jusqu'à 12 000 alors que dans le dernier décile le nombre d'actes atteint 18 000.

M. Denis Jacquat, rapporteur pour l'assurance vieillesse, a évoqué le régime local d'Alsace-Moselle régi par la loi du 14 avril 1998 qui subordonne l'affiliation des retraités à une durée de cotisation de cinq années en continu avant la cessation d'activité. Cette disposition conduit à rejeter des demandes d'affiliation de manière inéquitable, notamment vis-à-vis d'ouvriers de la sidérurgie qui ont cotisé pendant 30 ans. Il a demandé si le Gouvernement envisageait de proposer une modification de la loi.

Concernant les travailleurs handicapés, il a, à nouveau, demandé quand une mesure serait prise pour permettre leur départ à la retraite à taux plein. Il a également souhaité connaître quelle était la position du Gouvernement français en matière de chirurgie réparatrice du cancer du sein alors que l'interdiction des implants en silicone a été levée dans beaucoup de pays étrangers ainsi que sur la situation des diététiciens qui demandent la reconnaissance de leur profession par un décret de compétence et un arrêté de nomenclature de leurs actes et de référencement de leurs interventions.

M. Jean-Pierre Baeumler a approuvé l'intervention de M. Denis Jacquat concernant l'adaptation du régime local d'Alsace-Moselle et souhaité savoir si cette modification ne pourrait pas être effectuée à l'examen de la discussion du projet de loi de modernisation sociale. Il a également demandé des précisions sur la situation des titulaires de pensions d'invalidité en matière de CSG et de CRDS. En dernier lieu, il a souhaité avoir des informations sur le statut des infirmières libérales.

En réponse aux différents intervenants, Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat auprès de la ministre de l'emploi et de la solidarité, chargée de la santé et des handicapés, a donné les informations suivantes :

- Le Gouvernement a mis en place plusieurs plans pluriannuels de prévention des causes de maladie mortelle : le plan de prévention du cancer, le plan de lutte contre le suicide qui est la deuxième cause de mortalité des jeunes de 15 à 25 ans et la première cause de mortalité pour les personnes de 25 à 35 ans, le plan de lutte contre les conduites addictives, la coopération avec le ministère de l'éducation nationale pour développer l'éducation à la santé.

- La loi de financement de la sécurité sociale pour 2000 a établi un mécanisme de régulation des cliniques privées. Le 1er mars 2000 un accord a été signé avec les trois fédérations des établissements de soins privés pour une réévaluation de 1,33 % des tarifs. La responsabilité a été confiée à l'ARH pour négocier avec les fédérations régionales. Le projet de fusion de deux des fédérations devrait faciliter les discussions. Par ailleurs, le fonds de modernisation, dont la dotation a été portée de 100 à 150 millions de francs, sera reconduit. En dernier lieu, un article du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 permet le financement du comité technique Etat-cliniques.

- Une concertation est engagée avec les cliniques pour le recrutement de personnels soignants. Un arrêté sera prochainement publié pour faciliter l'accès aux écoles d'infirmières afin d'accélérer le recrutement. En outre, le décret de 1956 sur les normes en matière de personnel sera modifié afin d'asseoir les normes sur le nombre de patients et non sur le nombre de lits et d'autoriser l'emploi d'étudiants en quatrième année de médecine. En dernier lieu, des actions de formation seront conduites auprès des infirmières ayant cessé d'exercer.

- S'agissant des personnels infirmiers des établissements publics hospitaliers, une augmentation des quotas est intervenue, permettant la création de 8 000 places de formation, 60 % de ces places ayant d'ailleurs été pourvues dès cette rentrée. Une concertation est engagée entre la direction générale de la santé, la direction des hôpitaux et les professionnels concernés pour améliorer l'adhésion à ces places ; cette concertation vise également à faire en sorte que les subventions d'Etat et les bourses déléguées soient réparties en fonction des besoins ; elle comportera enfin une réflexion sur la situation pour 2001.

- Le financement de la médicalisation des lits dans les établissements médico-sociaux porte sur un montant de 6 milliards de francs. Il paraît souhaitable de parvenir à une réforme de la loi de 1975 permettant d'obtenir une plus grande transparence dans les financements.

- De nombreuses mesures ont été prises par le Gouvernement depuis trois ans dans le domaine de la médecine d'urgence, dont 230 créations de postes de praticiens hospitaliers.

- Le déremboursement des médicaments ayant une efficience insuffisante est une mesure délicate, s'agissant de médicaments qui rencontrent une forte adhésion, mais il faut noter qu'il s'opérera sur trois années, ce qui permettra aux personnes intéressées de trouver d'autres habitudes de soins. Le déremboursement devrait rapporter à terme plus de 9 milliards de francs permettant des financements visant d'autres médicaments.

- Pour l'extension du bénéfice du régime local d'Alsace-Moselle, un support législatif reste à trouver car il ne s'agit pas d'un régime de base. Il ne relève donc pas de la loi de financement de la sécurité sociale.


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