Accueil > Archives de la XIe législature > Comptes rendus de la commission des Affaires culturelles (2000-2001)

Session ordinaire de 2000-2001

COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES, FAMILIALES
ET SOCIALES

RÉUNION DU MERCREDI 8 NOVEMBRE 2000

Projet de loi de finances pour 2001

Audition de Mme Marie-George Buffet, Ministre de la Jeunesse et des Sports
sur les crédits de son ministère

PRÉSIDENCE de M. Jean LE GARREC
président de la commission

La séance est ouverte à neuf heures.

M. Jean Le Garrec, président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales - Pour la deuxième fois, nous examinerons le budget de la jeunesse et des sports en commission élargie. La discussion s'est fort bien déroulée l'année dernière mais, comme tous bons sportifs, nous espérons toujours faire mieux. Pour cela, j'appelle tous les orateurs à la concision. Après que Mme la ministre aura présenté le projet de budget, je donnerai la parole au rapporteur de la commission des finances, M. Alain Barrau, puis à notre rapporteur pour avis, M. Alain Néri, qui traitera plus particulièrement de la santé des sportifs et de la lutte contre le dopage, sujet d'une grande actualité. J'ai d'ailleurs le grand plaisir de vous annoncer que Mme Buffet vient d'être nommée représentante de l'Union européenne à l'Agence mondiale anti-dopage. C'est la reconnaissance du travail considérable qu'elle a accompli avec notre entier soutien.

Mme Marie-George Buffet, ministre de la jeunesse et des sports - Le projet de budget pour 2001 du ministère de la jeunesse et des sports s'élève à 3,4 milliards, en augmentation de 3,7 %. A ce montant, il convient d'ajouter 1,9 milliard du Fonds national pour le développement du sport -dont 150 millions provenant de la taxe sur les émissions télévisées- et les 40 millions dont disposera le Fonds national de développement de la vie associative. Pour la quatrième année consécutive, ce budget est en hausse. Certes, les amoureux du sport l'estiment encore insuffisant, et j'ai reçu une pétition signée de diverses associations et de certains élus, parlementaires compris, pour me le dire. Je considère pour ma part que la tendance est bonne et que, jusqu'à présent, nous étions plutôt habitués à des baisses consécutives qu'à des hausses consécutives.

M. Alain Néri, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales - C'était l'époque des vaches maigres et non des vaches folles !

Mme la Ministre - Je me félicite tout particulièrement de la création de nouveaux postes d'inspecteurs et de quinze nouveaux contrats de préparation olympique, chiffre très élevé, vous en conviendrez.

Le projet de budget poursuit huit objectifs. Il tend, en premier lieu, à favoriser l'insertion. Ainsi, les moyens budgétaires alloués au coupon-sport sont augmentés afin de faire face aux besoins, très importants dans certains départements tels que le Nord ou le Pas-de-Calais. De même, nous accroîtrons l'aide à la formation au BAFA et au BAFD. Enfin, la mobilisation conjointe du ministère, des collectivités locales et des associations a permis de créer 47 807 emplois-jeunes, dont 29 000 dépendent du secteur associatif. Se pose désormais la question de leur pérennisation, qui passera par la professionnalisation. Déjà, 5 000 jeunes ont été formés en 1999. Nous comptons multiplier les formations menant aux brevets sportifs, pour 15 000 autres jeunes. Par ailleurs, une mesure nouvelle permettra la création de cent emplois dans le cadre du plan sport-emploi.

Notre deuxième objectif est de renforcer les formations, car notre besoin de diplômés très qualifiés a été souligné. La nécessaire réforme des diplômes est presque achevée ; elle vise à mieux répondre à une pluridisciplinarité indispensable. A cette fin, 14,5 millions sont destinés à réduire le coût des formations par une aide aux établissements d'enseignement, et 1,8 million concourront à la validation des acquis en facilitant l'accès des bénévoles aux concours.

Le troisième objectif consiste à poursuivre le dialogue engagé avec les jeunes. On le sait, le conseil national de la jeunesse est le lieu officiel de la concertation. Le Festival de la citoyenneté a connu un très grand succès et nous voulons multiplier les rencontres entre les élus et les jeunes, qui ont tout particulièrement apprécié leur visite à l'Assemblée. Ils apprécieraient qu'elle se reproduise pour faire valoir leur point de vue sur les projets envisagés pour 2001. Nous souhaitons que les conseils départementaux de la jeunesse comprennent des représentants des conseils municipaux ; c'est pourquoi nous avons dégagé les moyens d'une aide aux communes considérées. Par ailleurs, le réseau des centres information-jeunesse, qui accueille 5 millions de jeunes par an, est encore fragile. Un effort de 22,4 millions sera donc consenti en sa faveur, et le programme « Cyber jeunes » prévoit d'équiper 600 points d'information en matériel d'accès au multimédia.

Nous entendons également poursuivre notre action internationale de défense de la francophonie ; plus de 80 millions y seront consacrés. Les contributions à l'OFAJ et à l'OFQJ seront augmentées. Nous avons préparé le prochain conseil des ministres chargés de la jeunesse qui se tiendra demain à Bruxelles en rassemblant plus de 400 jeunes des pays membres de l'Union mais aussi des pays candidats pour leur demander ce qu'ils attendent de l'Europe en matière sportive et ce qu'ils savent des dispositifs existants. Nous avons eu le sentiment que leurs attentes étaient considérables, et très grande leur méconnaissance des mécanismes en vigueur. Nous avons donc obtenu, avec une certaine difficulté, qu'une délégation d'une vingtaine d'entre eux assiste à l'ouverture du Conseil pour exprimer leur sentiment devant les ministres réunis.

Nous allons d'autre part poursuivre l'action de contrôle des centres de vacances avec une vigilance sans faille. Ce sont 8 000 contrôles qui ont été réalisés cette année, conduisant à la fermeture de 22 centres -de 22 centres seulement, serais-je tentée de dire, ce qui témoigne de l'excellente qualité de l'offre générale. Le projet de budget permettra aussi, par une allocation de 32,5 millions, de poursuivre l'effort de rénovation des centres de vacances par une aide spécifique aux communes.

Le quatrième objectif du Gouvernement est d'aider au développement des pratiques sportives, ce qui signifie une assistance aux clubs amateurs. Un grand nombre de mesures ont déjà été prises en leur faveur. J'ai déjà parlé du coupon-sport, de l'aide à la formation, de l'emploi sportif. Mais il y a aussi le congé-formation, les déductions fiscales accordées aux bénévoles ou encore la validation de l'expérience acquise. D'autres mesures sont néanmoins nécessaires, telles que le congé de représentation. Les clubs ont en outre le plus grand besoin de moyens de fonctionnement. C'est pourquoi, depuis trois ans, un effort soutenu a été consenti en ce sens. La part régionale du FNDS a augmenté de 40 % et le pourcentage de clubs qui en bénéficient augmente de 32 % pour atteindre 30 500, l'aide moyenne passant de 4 500 F à 6 000 F. Le Fonds Fernand Sastre a commencé d'être réparti après qu'un acompte de 150 millions a été versé, dont 73 millions ont été affectés à 498 projets. Le financement des 1 200 projets qui nous ont été présentés demeure donc possible, d'autant que nous espérons recevoir, en tout, 285 millions.

Nous avons d'autre part décidé que le fonds de mutualisation serait affecté à la part régionale du FNDS, et destiné à la formation dans les districts. Nous souhaitons éviter aux clubs de devoir remplir des dossiers différents, et nous ferons tout pour simplifier au maximum les démarches administratives préalables à l'attribution des aides. 2 millions supplémentaires seront alloués aux initiatives particulières de clubs amateurs tournés vers les jeunes au comportement difficile, qui ont besoin d'un encadrement renforcé.

Les Jeux paralympiques de Sydney ont mis en lumière une équipe de France remarquable. Cependant, les deux fédérations spécialisées ont appelé mon attention sur la difficulté d'accès aux sports des enfants handicapés, qu'ils soient scolarisés à l'école ou dans des centres spécialisés. Une réflexion aura lieu à ce sujet, qui associera à mes services ceux de M. Lang et de Mme Gillot. Nous entendons préparer dans les meilleures conditions le championnat du monde handisport qui se tiendra à Villeneuve-d'Asq en 2002 et faire en sorte que cet événement sportif de premier plan recueille toute l'attention qu'il mérite.

Le cinquième objectif du Gouvernement est de contribuer davantage encore au succès du sport français de haut niveau. Les Jeux olympiques de Sydney ont montré la qualité de notre dispositif, mais nous devons en tirer tous les enseignements nécessaires.

Il convient de prolonger le GIP « préparation olympique » qui a prouvé son efficacité et de mieux coordonner son action avec celle de la commission nationale du sport de haut niveau. Nous devons aussi veiller à replacer l'INSEP au c_ur du dispositif de réflexion. L'augmentation des effectifs des cadres techniques, qui sont passés de 1 643 en 1999 à 1 693 en 2001, doit également être saluée, de même que le meilleur encadrement du pôle « espoirs » et que les efforts en faveur de l'insertion professionnelle des athlètes.

Il nous reste à préparer Salt Lake City et Athènes et à réussir l'accueil des grands événements qui se dérouleront en France dans les prochains mois : championnats du monde de hand-ball, d'escrime, de lutte, championnats féminins de hockey, de basket, de biathlon. Nous devons également préparer les Jeux méditerranéens de Nice et les Jeux de la francophonie d'Ottawa. Nous avons d'ores et déjà dégagé 27,5 millions pour appuyer la candidature de Paris aux Jeux olympiques de 2008.

S'agissant du Stade de France, un bénéfice de 20 millions hors impôt a été dégagé en 1999 et le consortium a versé 16,4 millions au ministère mais, le problème du club résident restant en suspens, le ministère a reversé 76 millions au consortium.

La réunion des ministres des sports européens, qui s'est tenue à Paris lundi dernier, a permis de franchir une étape importante puisqu'un consensus s'est dégagé sur une déclaration reconnaissant la spécificité et le rôle du sport. Le texte insiste sur le rôle des fédérations, sur l'importance de la formation, sur la protection des jeunes sportifs, sur l'équité des épreuves, sur les droits de retransmission et sur les transferts. Il ne s'agit évidemment pas d'un article additionnel aux traités, mais j'ai bon espoir que la déclaration puisse être annexée aux décisions du conseil de Nice. La Commission européenne sera ainsi conduite à tenir compte de la volonté politique qu'ont exprimée les Quinze. Nous sommes notamment assurés qu'elle traitera du problème spécifique des transferts en se fondant sur les principes de la Déclaration de Paris.

Notre sixième objectif est d'intensifier les actions en faveur de la santé des sportifs, de la lutte contre le dopage et contre la violence dans les stades. S'agissant du dopage, l'actualité récente montre le bien fondé de notre action et si le cyclisme semble particulièrement touché, beaucoup d'autres sports sont également concernés comme l'a montré Sydney, même si le « dopage du pauvre » y a été plus combattu que les techniques de fraude les plus avancées.

Nous souhaitons étendre le suivi médical des sportifs de haut niveau : 3 500 athlètes sur 6 000 ont été concernés au cours de deux dernières années, il convient de poursuivre l'effort.

Le laboratoire national de dépistage de Chatenay-Malabry a fait la preuve de son efficacité et le président Samaranche m'a confirmé récemment le bien fondé des tests de dépistage qu'il a mis au point. Leur validation devrait intervenir rapidement et, contrairement à certaines allégations fantaisistes, nous n'avons nullement l'intention de détruire les prélèvements congelés, qui, du reste, appartiennent aux individus sur lesquels ils ont été pratiqués.

Les médecins régionaux sont en place et les décrets d'application de la loi sont en cours d'achèvement : un seul, relatif aux antennes, « piétine » mais j'ai bon espoir que la situation soit rapidement débloquée.

Pour ce qui concerne la lutte contre la violence dans les stades, le dispositif expérimental de la Seine-Saint-Denis s'est révélé particulièrement efficace et je m'apprête, avec le concours de Daniel Vaillant, à l'étendre à 26 autres départements particulièrement touchés par ce problème.

Le septième objectif concerne l'éducation populaire. Nous sommes au terme de l'appel à réflexion : 472 groupes de réflexion ont rendu leurs propositions à l'Université d'automne de l'éducation populaire qui s'est tenue en novembre dernier et un Livre blanc sera publié prochainement. Les subventions aux associations augmentent de manière sensible -de 52 millions à 65 millions- et les grandes associations d'éducation populaire en seront soulagées d'autant. Enfin, le fonctionnement du FNDVA a été amélioré, ce qui permettra de multiplier les expériences et de faire un effort tout particulier en faveur de la formation.

Le huitième et dernier objectif s'attache aux contrats éducatifs locaux qui constituent une mesure nouvelle. La circulaire les instituant affirme que l'éducation est une mission partagée de l'éducation nationale, des collectivités territoriales, des associations et des familles. La reconnaissance de ce multipartenariat constitue par elle-même un grand pas en avant. Près des deux tiers des contrats éducatifs locaux concernent des communes de moins de 2 000 habitants. L'accès aux activités culturelles et sportives y sera donc particulièrement favorisé.

Ces chantiers prioritaires n'ont, je le reconnais bien volontiers, pas valeur de « scoops ». Je m'attache en effet depuis trois ans à inscrire mon action dans la continuité et dans le long terme.

Enfin, pour célébrer le centenaire de la loi sur les associations de 1901, outre les mesures nouvelles que j'ai annoncées en faveur des bénévoles associatifs, une cérémonie commémorative aura lieu à l'INSEP le 28 novembre prochain avec la projection d'un film inédit sur Léo Lagrange. Vous y êtes tous cordialement invités.

M. le Président - Je vous remercie, Madame la ministre, de vous en être tenue aux grandes orientations de votre budget. Cela nous laissera davantage de temps pour la discussion.

M. Alain Barrau, rapporteur spécial de la commission des finances - Je salue l'action que vous menez au plan européen et le pas supplémentaire qui vient d'être franchi. Je souhaite, comme vous, que le sommet de Nice permette de le valider.

Comme les précédents, le quatrième budget que vous nous présentez connaît un taux de progression supérieur au taux moyen d'augmentation du budget de l'Etat. Il atteint 4,6 milliards et augmente de 5,3 % d'un exercice à l'autre. La commission des finances l'a adopté à une large majorité et je vous en félicite.

Depuis plusieurs années, des crédits importants sont mobilisés en vue de préparer les rencontres sportives de haut niveau. Pourrait-on, dans la perspective du budget 2002, imaginer que la priorité soit donnée au volet « jeunesse et éducation populaire » ? Certes, la pression médiatique est toujours favorable au sport de haut niveau mais il faut aussi que le Gouvernement mette l'accent sur la jeunesse et l'éducation populaire. Je sais, Madame la ministre, que vous aurez à c_ur de faire entendre cette demande.

S'agissant du Stade de France que vous avez brièvement évoqué, force est de constater que vous avez hérité d'un contrat de concession qui « pompe » bien inutilement votre budget. Il convient de trouver sans plus tarder une solution au problème du club résident.

Des efforts importants sont réalisés en faveur des installations des centres de vacances et des équipements sportifs. Un plan de programmation pluriannuel nous semblerait cependant bien venu en ce qu'il tendrait à corriger les disparités entre les collectivités et à assurer à moyen terme une remise à niveau globale des installations, tant du point de vue de la sécurité que de l'utilisation.

En matière de formation, les BAFA et les BAFD sont bien diffusés. Il n'en va pas de même de l'animation sportive où le cursus de formation n'est pas encore clairement validé. Nous ne pouvons rester dans une situation contradictoire où les filières d'animation sont professionnalisées alors que l'animation sportive reste dans un processus mal défini.

J'en viens au problème crucial de la pérennisation des emplois-jeunes qui sont nombreux dans les domaines d'activité dont vous avez la charge. Il s'agit, chacun le sait d'un sujet politique de fond : que va-t-on faire ? Dans votre secteur, beaucoup d'emplois-jeunes aidés par l'Etat sont portés par des associations et par des collectivités locales. La première vague d'emplois-jeunes est à deux ans de son terme : quelle stratégie allons-nous adopter ? L'extension du système communal d'action sportive, qui n'est pas sans danger, doit-elle être envisagée ? Un statut d' « ancien emploi-jeune » va-t-il être mis en place ? La participation de l'Etat sera-t-elle pérennisée ? Certes, le sujet concerne l'ensemble des ministères et je vois le président Le Garrec sourire mais il s'agit d'un sujet très important pour les collectivités locales.

M. le Président - Il me semblerait en effet de très bonne méthode de réfléchir à partir de l'exemple des emplois-jeunes accueillis dans le secteur de la jeunesse et des sports.

M. le Rapporteur spécial - Tout à fait !

Peut-être auriez-vous pu, Madame la ministre, mettre davantage en valeur dans votre présentation l'augmentation de l'aide de l'Etat au FONJEP.

Mme la Ministre - J'avais peur d'être trop longue.

M. le Rapporteur spécial - Outre la création, non négligeable de 100 postes supplémentaires, la participation du ministère au financement des postes est enfin relevée. Le montant « tabou » de 45 000 F, fixé en 1993, évolue enfin pour atteindre 47 000 F.

Je reste plus sceptique sur la stratégie que vous poursuivez à l'égard des petites associations. Si je perçois clairement votre intention d'aider des groupes éphémères à évoluer vers un statut associatif, je vois mal comment on va les aider en pratique. Le statut de « Junior association » est une bonne chose, mais je ne suis pas convaincu de son efficacité.

Monsieur Néri parlera plus en détail du dopage. Je me félicite de l'effort important mené sous votre impulsion et avec les fédérations au niveau national mais aussi européen. Cela va dans la bonne direction. En revanche, je suis très préoccupé par la diffusion d'une sorte de « dopage du pauvre » chez les très jeunes sportifs, sans aucun contrôle. Je n'ai pas de suggestion précise, mais il faudrait vraiment agir pour ces enfants comme on l'a fait pour les sportifs de haut niveau.

Pour le reste, je renvoie à mon rapport écrit.

M. le Président - Je vous remercie d'avoir posé des questions de fond pour engager le dialogue. Monsieur Néri suivra à coup sûr votre exemple.

M. Alain Néri, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales - Je vais essayer.

Je me félicite d'abord de l'augmentation cette année encore des crédits de votre ministère. Renforcés par ceux du FNDS et du FNDVA, ils permettent une action significative.

Mais je regrette que ces crédits ne soient pas mieux utilisés dans certains domaines, même si cela n'est pas de votre responsabilité. Ainsi, il n'est pas normal que votre ministère soit le seul à ne pas être logé par l'Etat et doive consacrer 38 millions en 2001 au loyer de la tour Olivier de Serres. Je dénonce également les termes du contrat passé en 1995 qui oblige à indemniser le consortium du Stade de France. D'autre part, l'Office franco-allemand de la jeunesse absorbe pour son fonctionnement 37,5 des 64 millions de subventions que nous lui accordons. C'est beaucoup. Ne devrait-on pas aussi envisager d'élargir cette action à l'ensemble de l'Europe ?

Parmi vos priorités, vous avez placé la lutte contre l'exclusion, menée avec succès grâce au « coupon sport » et aux contrats éducatifs locaux, l'emploi grâce aux emplois-jeunes, la formation avec la validation des acquis professionnels, le dialogue avec les jeunes et le soutien au sport.

Je me félicite également du passage de 45 000 à 47 000 F de l'aide au financement des postes FONJEP et de la création de 100 postes supplémentaires.

S'agissant de la protection de la santé des sportifs, on réalisera en 2001 des opérations qui n'avaient pu l'être auparavant faute d'avoir publié les textes. Je me félicite de l'intensification de la lutte contre le dopage. La surveillance médicale qui concerne déjà 3 500 des 6 000 athlètes de haut niveau sera étendue aux 2 500 autres. 69,5 millions, dont 18 millions de mesures nouvelles, y seront consacrés. J'avais souligné la nécessité de reloger le Laboratoire national de dépistage de Chatenay-Malabry. C'est maintenant prévu.

Au cours de cette législature, nous avons fait un effort important pour le sport en adoptant cinq lois dans ce domaine, dont deux très importantes, l'une relative à la protection de la santé des sportifs et à la lutte contre le dopage et l'autre réglementant les activités physiques et sportives. Mais je déplore le retard pris dans la parution des dispositions réglementaires.

En ce qui concerne la première, cinq décrets seulement, soit trois de plus qu'il y a un an, sont parus. Ils permettent certes d'améliorer les contrôles antidopage et les procédures disciplinaires. Mais plus de vingt mois après la promulgation de la loi, les dispositions relatives à la prévention du dopage et à la protection de la santé ne font pas encore toutes l'objet de textes réglementaires.

Sans attendre ces textes, un certain nombre de dispositions de la loi ont déjà été appliquées et je m'en félicite. Pour la prévention, je citerai le numéro de téléphone vert essentiel pour les jeunes, le lieu d'accueil et de communication « sport et dépendance » qui rend beaucoup de services, la mallette pédagogique qui rencontre un grand succès. Une convention a été signée en novembre 1999 avec le Syndicat national de l'industrie pharmaceutique, qui a diffusé deux fiches d'information intitulées « sport et médicament » destinées aux collèges. En décembre se tiendra à Paris un séminaire européen sur les conduites à risques des jeunes sportifs ; on y évoquera la possibilité de mettre sur pied un réseau européen de surveillance du dopage en dehors du sport de haut niveau. Le dopage touche en effet tous les sportifs, à tous les âges, et dans toutes les disciplines.

13 millions sont prévus pour mettre en place les antennes médicales régionales. Nous voulons vous aider à le faire, d'autant que trois antennes pourraient ouvrir immédiatement. Il serait important également de contacter le ministère de la culture pour que les services publics de radio et de télévision aient l'obligation de passer des messages contre le dopage à l'occasion de retransmissions de grands événements sportifs.

La surveillance médicale des sportifs est essentielle pour leur santé et il s'agit là d'une mesure novatrice qui a d'ailleurs fait école. Elle vaut actuellement pour les 6 000 sportifs de haut niveau. Je souhaiterais que soit pris le décret en Conseil d'Etat précisant les conditions dans lesquelles cette surveillance médicale sera exercée sur les jeunes licenciés inscrits dans les filières d'accès au sport de haut niveau. Il faut que ces jeunes et leurs familles soient bien conscients des risques du dopage. Nous aurons l'occasion en fin d'année, je pense, de faire le bilan de l'action du Conseil de prévention et de lutte contre le dopage. Je souhaite que l'on prenne le décret relatif à la communication des renseignements obtenus lors des enquêtes entre les agents des douanes, de la DGCCRF, ceux de la Jeunesse et des sports et les officiers de police judiciaire, pour améliorer la coopération. Il est, dit-on, en cours de préparation. J'insiste sur le fait que cette absence de textes réglementaires rend la politique menée moins crédible.

Pour ce qui est de la loi relative à l'organisation des activités physiques et sportives, ses 61 articles nécessitent la publication d'une trentaine de décrets, dont 17 en Conseil d'Etat et autant d'arrêtés. Quatre mois après sa promulgation, nous n'avons toujours aucun texte réglementaire. Je sais votre volonté et votre pugnacité. Mais ce décalage est trop important. Il serait vraiment souhaitable que les services du ministère préparent les décrets en même temps que le texte de la loi, ainsi qu'on l'avait fait pour les emplois-jeunes. Si votre ministère manque de juristes pour ce faire, il faudrait l'en doter. Sous votre impulsion, nous avons marqué un essai ; il faut maintenant le transformer. Nous serons à vos côtés car il y a là une question de santé publique.

Ce budget est un bon budget pour le sport. Je terminerai en posant quelques questions précises.

En 1999 on a réalisé 8 000 contrôles antidopage. Il en était prévu 10 000 cette année. Combien seront effectués ? Dans ce domaine, je suis un peu agacé par le comportement des fédérations internationales. C'est le cas en particulier pour l'UCI, parce qu'actuellement c'est du cyclisme qu'il est question. Mais il ne faut pas montrer cette discipline du doigt : on y relève plus de contrôles positifs parce qu'on effectue plus de contrôles au total. Que deviennent les prélèvements effectués lors des championnats du monde de cyclisme de Plouay ? Que l'UCI s'en soit accaparée pour les envoyer à Cologne est une marque de défiance inadmissible envers la France. Quelle suite les contrôles effectués sur le Tour de France auront-ils et que deviennent les flacons congelés ? Il serait inadmissible de les détruire. La loi française doit s'appliquer à Monsieur Verbruggen comme à tous sur le territoire français. Je souhaite que l'on soit vraiment intransigeant sur ce point.

Je me félicite enfin des progrès réalisés en ce qui concerne les transferts, notamment des jeunes. Pouvez-vous nous donner des précisions à ce sujet ? A l'occasion de la loi sur l'organisation du sport, nous avions proposé qu'il n'y ait qu'un transfert par an par club ; il semble qu'on ait repris cette mesure au niveau européen. C'est utile.

M. le Président - Je remercie les deux rapporteurs, qui ont fait là un bon travail. A ceux de nos collègues qui n'étaient pas présents à l'ouverture de la séance, j'indique que Mme la ministre va siéger à partir de mardi à l'Agence mondiale antidopage, où elle représentera l'Union européenne : on ne peut que se féliciter de cette marque de reconnaissance donnée à son action et à celle du Gouvernement.

Nous ne saurions trop insister, Madame la ministre, sur la nécessité de pérenniser les emplois-jeunes au sein du mouvement associatif. Pour tenir compte de ce qu'a dit M. Barrau, je suggérerais qu'on réfléchisse à une forme de mutualisation des financements. Il me semble que nous aurions là la possibilité de progrès intéressants, dans la ligne de ce que vous avez entrepris par ailleurs.

Concernant le dopage, nous devons mettre en avant le premier terme figurant dans l'intitulé de la loi : le mot « santé ». Le procès de Lille a révélé des pratiques qu'aucun de nous n'aurait jamais imaginées. Il faut par conséquent lancer des campagnes efficaces et je compte évoquer ce point avec le président de la holding « France 2, France 3, la Cinq », que je dois rencontrer prochainement. En tout cas, ce doit être un de nos axes de travail dans les mois à venir.

M. Barrau a raison de s'inquiéter du dopage des « petits ». Il faut en finir avec l'hypocrisie dans ce domaine, même si ce n'est pas facile, et je crois qu'à cet égard aussi, c'est sur la notion de santé qu'il faut insister. La commission, dont c'est une des vocations, vous y aidera.

Mme la Ministre - Le problème du loyer payé par le ministère est réel. Cela étant, nous n'allons vraisemblablement pas renouveler le bail, car un deuxième désamiantage se prépare. Nous souhaiterions bien évidemment pouvoir nous installer dans un bâtiment de l'Etat, car ce serait le signe que mon ministère n'est pas un ministère provisoire, mais aucun n'est disponible actuellement. Or, les prix du marché parisien sont trop élevés pour l'enveloppe dont je dispose...

M. le Président - Venez à Lille. Cela vous coûtera moins cher, vous serez remarquablement accueillie, et Paris n'est qu'à une heure par le TGV.

Mme la Ministre - Lille est déjà candidate pour accueillir l'Agence antidopage !

M. Barrau a raison de se préoccuper de la répartition des crédits entre les différentes compétences de mon ministère : jeunesse, éducation populaire, sport -et pratique amateur, qu'il ne faut surtout pas oublier. Nous avons essayé de constituer des agglomérats. Pour l'instant, la jeunesse représente environ 844 millions, le sport près de 1 400 millions, l'emploi et la formation 165 millions, l'administration et le fonctionnement absorbant 1 milliard. Les déséquilibres ne sont donc pas niables -il y a par exemple 530 millions pour les conventions d'objectifs mais seulement 65 pour les associations de jeunesse et d'éducation populaire- mais j'essaie de corriger progressivement la situation sans déshabiller Pierre pour habiller Paul grâce à l'augmentation de mon budget.

On compte actuellement 10 000 centres de vacances avec hébergement et 20 000 centres de loisirs, à peu près. La plupart dépendent des collectivités. Pour les investissements, les crédits sont passés de 10 à 32,5 millions entre 1998 et 2000, ce qui peut effectivement sembler dérisoire encore. J'avais espéré trouver une solution dans le cadre des contrats de plan Etat-région mais très peu de crédits y ont été inscrits pour la rénovation du patrimoine associatif. La plupart du temps, on a privilégié les grands équipements. Je serais donc favorable à un plan pluriannuel. Le même dispositif serait d'ailleurs utile, à mon sens, pour l'INSEP, qui a longtemps été une institution modèle mais qui prend maintenant du retard par rapport aux institutions similaires d'autres pays. Il faut tirer là les enseignements de Sydney et travailler à échéance de cinq ans.

Ce que nous avons fait pour les postes FONJEP répondait à une forte demande des associations. Plusieurs ministères ont suivi la même démarche que le mien, mais deux hésitent encore, et en particulier le ministère de l'emploi et de la solidarité. Or il serait évidemment dommage qu'on ne marche pas partout du même pas et qu'on en reste dans certains cas à 45 000 F. Par ailleurs, mon v_u est que la mesure soit rétroactive.

Les « Junior associations » ont été mises en place avec le soutien des grandes associations afin d'aider les jeunes pendant un an. Il s'agit en quelque sorte de pépinières grâce auxquelles ces jeunes peuvent être encouragés à devenir bénévoles dans les grandes associations. Quant à l'aide aux petites associations, dont la vie est souvent courte, il s'agit d'une aide au projet, la convention d'objectif étant exclue dans ce cas. Les préfets ont souhaité disposer de dotations utilisables de façon souple, afin de soutenir les initiatives qui le méritent, et une expérience a été lancée en ce sens dans la Marne. Nous avons d'autre part décidé de « démultiplier », de généraliser, les conventions sur trois ans. Enfin, nous accorderons libéralement des crédits de fonctionnement aux associations, afin de leur permettre d'agir au service de leurs objectifs, quitte à ne pas renouveler ces enveloppes si elles étaient mal utilisées.

L'Office franco-québecois de la jeunesse manque cruellement de moyens puisqu'il ne dispose que de 12 millions pour 3 500 jeunes concernés. Avec l'association parlementaire France-Québec, nous avons lancé une opération en direction des classes de CM2 parce que c'est à ce niveau qu'on peut le plus utilement encourager la pratique du français. Or, l'insuffisance des crédits représente à l'évidence un obstacle.

La situation n'est pas du tout la même en ce qui concerne l'Office franco-allemand, dont la dotation est augmentée à chaque rencontre bilatérale au sommet. En revanche, il apparaît nécessaire de réorienter l'action de cette institution, qui est demeurée vouée à un travail de réconciliation entre Français et Allemands. Les jeunes attendent maintenant autre chose et il faut négocier un tournant. D'autre part, il faut sortir d'un strict bilatéralisme. Nos amis allemands sont favorables à une ouverture en direction des jeunes Polonais et des initiatives semblent donc pouvoir être prises prochainement.

On ne pérennisera pas les emplois-jeunes en recourant à un dispositif unique. Les collectivités territoriales ont, c'est clair, besoin de réponses sur de nombreux points, par exemple pour l'organisation de nouvelles filières. MM. Sapin et Vaillant, notamment, travaillent sur ce dossier. Quant aux associations, leur situation est très diverse. Il en est, comme les associations d'aide à domicile, dont on ne peut exiger qu'elles deviennent solvables. Les associations de jeunesse et les petits clubs sportifs sont dans le même cas. Et il faut donc imaginer pour eux des solutions particulières. On ne peut non plus comparer la situation de la Fédération française de football, qui dispose de 500 emplois-jeunes mais qui peut recourir à des entreprises sponsors, et celle de la Fédération de randonnée pédestre, qui a 300 emplois-jeunes... Par conséquent, dans beaucoup de cas, la seule solution réside dans le renouvellement des conventions triennales avec l'Etat, dans l'aide publique. C'est à ce prix que nous parviendrons à maintenir la confiance créée chez les jeunes, à leur donner l'espoir d'un emploi durable.

Le Stade de France est bénéficiaire et le sera de plus en plus, il faut s'en féliciter. Reste le problème créé par l'absence d'un club résident, problème qui apparaît difficile à résoudre au vu des résultats de beaucoup de clubs. En attendant, le Gouvernement a chargé un négociateur d'entamer une renégociation de la concession avec le consortium. Ces 76 millions seraient en effet mieux utilisés ailleurs.

M. Néri a raison d'insister sur le retard pris dans la publication des décrets relatifs au dopage. Cependant, depuis un an, nous avons mis « le paquet ». J'ai un conseiller qui ne s'occupe pratiquement que de cela : ce matin même, il est au Conseil d'Etat pour les décrets sur le contrôle et sur le règlement des fédérations. Malheureusement, il n'y a pas que le Conseil d'Etat : il y a aussi la Commission, qui demande deux mois pour examiner chaque décret et qui, 48 heures avant l'expiration du délai, nous adresse une liste de 24 questions, ce qui lui donne deux nouveaux mois pour se prononcer.

Il y avait déjà le passage devant le Conseil d'Etat, mais il travaille rapidement et je lui rends hommage pour cela ; ensuite, il y a le passage dans les différents ministères. Mais il est vrai que la Commission pèse beaucoup, notamment en raison du tirage qui existe entre elle et nous sur la conception du sport. Prenons l'exemple du décret sur les subventions publiques que nous avons orienté vers la formation : la Commission me dit que la formation des jeunes, c'est de la valeur ajoutée, et que donc cela relève du marchand et de l'économique. Vous mesurez ainsi nos difficultés. J'espère que ce qui s'est passé lundi va nous aider. Chaque semaine je fais le point sur les décrets. Fin décembre 2000, tout sera fait pour la loi sur le dopage ; j'espère achever début 2001 ce travail sur la loi relative au sport professionnel. Quant à la grande loi sur le sport, nous achevons le décret sur le CNATS. Il a été très long à mettre au point parce que nous avons voulu consulter tous les partenaires ; mais maintenant il est prêt, ce qui était une condition préalable pour prendre tous les autres décrets.

Sur le dopage, je serai franche : si les ministres européens ont fortement réaffirmé lundi leur volonté de lutte, certains obstacles subsistent, qui nous empêchent d'aller aussi vite que nous le voudrions. La Grande-Bretagne refuse en effet d'admettre la base juridique nécessaire pour que, fin 2001, l'Europe puisse participer officiellement comme telle, avec quatre ou cinq représentants, à l'Agence mondiale anti-dopage. Nous aborderons le problème sous l'angle de la santé publique, et sur ce point je dois reconnaître que la Commission a bien travaillé. Les hésitations de la Grande-Bretagne et du Danemark ne portent d'ailleurs pas sur le dopage lui-même, mais sur l'idée de donner à l'Europe des compétences supplémentaires.

Sans une Agence mondiale anti-dopage -AMA- forte, il n'y aura pas d'harmonisation de la lutte contre le dopage, et nous aurons toujours une fédération internationale ou un pays qui refusera d'appliquer les décisions : la chose est déjà arrivée, et de la part d'un pays de l'Union européenne... Il faut donc donner de la force à l'AMA. La liste des produits interdits pour 2001 va encore être élaborée par la commission médicale du CIO. L'AMA veut aussi faire une liste. Or il en faut une seule : il importe donc de décider quelle instance en est responsable.

D'autre part, sept villes de l'Union européenne sont candidates pour accueillir le siège de l'AMA. Ce problème n'est pas mineur, car Montréal est également candidate : si nous ne parvenons pas à nous mettre d'accord, elle aura le siège. Or il n'est pas sûr que le continent nord-américain soit le mieux placé pour animer la lutte contre le dopage.

Pour mener cette lutte en France auprès des jeunes, vous avez voulu que la loi prévoie des spots. Le président Teissier souhaite une nouvelle chaîne sportive publique : nous serons d'autant plus attentifs à ce souhait qu'elle participera à cette lutte. Par ailleurs, nous multiplions les contrôles, selon des modalités adaptées, auprès des jeunes amateurs. Mais l'essentiel réside dans le travail de prévention et d'information. Il est frappant de constater, quand on mène des débats dans les lycées, que les jeunes ne mesurent pas les conséquences du dopage sur la santé. Il faut donc développer l'information, et le procès de Lille nous y aide. La fondation créée par le CNOSF y travaille également. Je rappellerai aussi le procès de Berlin qui nous a incités à entamer un travail sur ce qu'a été l'avenir des anciens sportifs de haut niveau. Le lien entre dopage et toxicomanie commence à devenir perceptible. Nous disposons également d'éléments médicaux nouveaux concernant les sportives. Mais il faut aussi que les médecins sportifs nous aident et qu'ils parlent ; nous devons travailler avec nos médecins fédéraux. Quant aux jeunes qui sont déjà dans les pôles espoir, ils ont besoin d'un accompagnement attentif de leur santé physique et morale : nous entendons commencer en 2001 à les faire bénéficier d'un suivi médical.

Sur la question des transferts, je dirais presque que la décision de la Commission sera finalement positive en nous obligeant à sortir de la situation actuelle. J'ai reçu la FIFA, l'UEFA, l'Association internationale des joueurs professionnels, etc. Je leur ai dit « ni, ni » : ni la situation actuelle, ni la proposition de la Commission qui serait pire encore. Ceci a conduit le mouvement sportif à faire des propositions alternatives intéressantes : interdiction des transactions commerciales sur les mineurs, protection des clubs formateurs grâce à une indemnisation, un seul transfert annuel, et un calcul réel des indemnités. Ce dernier point reste une pierre d'achoppement entre les joueurs professionnels et quelques grands clubs, mais pas la FIFA, qui a tranché en faveur des indemnités réelles. Les négociations vont continuer avec la Commission, et j'ai bon espoir qu'elle avance vers une acceptation, fût-ce avec quelques corrections, des propositions de la FIFA. Ce serait un grand pas en avant. Il ne règlera pas tout, et notre pays doit maintenir sa pression pour un contrôle de la gestion des clubs au niveau européen ; je m'attends à être moins en accord avec mon collègue espagnol sur ce point que sur d'autres...

M. Denis Jacquat - J'aborderai ce budget, comme chaque année, dans un esprit d'opposition constructive. Il progresse, mais demeure le plus petit budget de l'Etat, avec 0,2 %. Même l'économie solidaire est passée devant nous ! A mes yeux le sport et la culture sont les deux piliers de l'insertion et de l'intégration dans les quartiers sensibles. Je suis donc gêné de voir persister l'ampleur du différentiel entre leurs budgets respectifs. Je sais, Madame la ministre, que cela ne vient pas de vous, mais de Bercy. Peut-être devrions-nous, tous partis confondus, organiser un blocus de Bercy... (Sourires)

Mme Catherine Picard - Gauchiste !

M. Denis Jacquat - Je ne veux pas non plus tomber dans un esprit trop laudateur. Certains collègues ont dit que ce budget augmentait depuis quatre ans, alors qu'avant ce n'était pas bon. Mais si nous avons été battus en 1997, c'est que nous n'étions pas bons ! Il ne faut donc pas regarder le passé, mais l'avenir. Si l'on parle trop d'héritage, c'est pour le coup que l'opposition redeviendra majorité...

On a abordé la question des emplois-jeunes. Pour nous la solution tient en deux mots, pérennisation et formation : il faut les former pour en faire de meilleurs professionnels, afin de les pérenniser. Ce ne sera pas facile. Mme la ministre a pris l'exemple de la fédération de randonnée pédestre : on a transformé en emplois-jeunes d'anciens CES des conseils généraux pour leur faire flécher les trajets. C'est bien, mais qui va payer ? Il y aura un vrai problème de financement. Mais je n'insiste pas sur les emplois-jeunes, car nous sommes globalement d'accord.

Certains petits problèmes subsistent. On n'a pas évoqué depuis longtemps celui de la visite médicale gratuite pour la première licence : maintenant que les comptes s'équilibrent un peu, on pourrait peut-être en reparler. Il y a aussi la question de la TVA et du droit d'utilisation des installations sportives. Certains disent que cette question ne concerne que des sports riches : mais le tennis en était un il y a vingt ans, et il s'est beaucoup popularisé depuis. Qui nous dit qu'il n'en ira pas de même pour le golf par exemple ?

Sur le dopage, je suis d'accord avec vous : il faut définir des règles mondiales. Il faut une liste unique de produits interdits et un seul règlement : ras le bol de tous ces bras de fer ! Mais la mise au point de règles communes se heurtera au problème de la fiscalité, et là notre pays risque d'être perdant.

Nous discutons du Stade de France depuis des années. Il était indispensable à la Coupe du monde. C'est un stade vitrine, qui est aujourd'hui bénéficiaire. Mais ne nous faisons pas trop d'illusions sur la question du club résident. Si j'étais président de club, je n'irais pas en raison des charges. Par ailleurs, à ceux qui nous adressent des reproches au sujet du Stade de France, je pourrais rétorquer Magny-Cours et le Castellet : ne soyons pas unilatéraux...

Madame la ministre, vous nous avez invités aux manifestations qui commémoreront la loi de 1901. Que ce soit l'occasion de rappeler que trois départements dont le mien, la Moselle, ne sont pas régis par cette loi, mais par celle de 1908.

M. Christian Estrosi - Après la présentation idyllique que vous avez faite de votre budget, Madame la ministre, largement appuyée par l'indulgence des rapporteurs, je souhaite apporter une critique objective et poser quelques questions. Il est vrai que vos crédits augmentent pour la troisième année consécutive. La hausse a été de 3,4 % en 1999, de 3,5 % en 2000, et sera de 6,9 % en 2001. Mais ce dernier chiffre intègre les cotisations patronales au régime d'assurance maladie des personnels civils de l'Etat, pour 99,3 millions, qui étaient précédemment inscrites au budget des charges communes. Il intègre aussi les crédits de fonctionnement des services de la jeunesse et des sports de Nouvelle-Calédonie. A structure constante, la progression de votre budget n'est donc que de 3,8 %, tout à fait comparable à celle des années précédentes.

Sur le FNDS, je pourrais répéter en changeant seulement quelques chiffres mon intervention de l'an dernier. On fait la part belle à la jeunesse et à l'éducation populaire au détriment du sport : il ne reçoit que 35,8 millions contre 70,8 pour la jeunesse et la vie associative. Le monde sportif serait pourtant en droit d'espérer la parité. Les investissements de l'Etat sont en baisse : les crédits de paiement du titre V diminuent de 48,3 %. Certes, les autorisations de programme augmentent de 15 %, mais c'est artificiel par rapport à 2000 : sur deux exercices on observe en réalité une baisse de 11,9 %. Quant à l'évolution du titre VI, relatif aux subventions d'équipement, elle remet en cause le rôle de votre ministère dans le développement des équipements sportifs.

Ce titre perd près de 40 % de ses crédits, ce qui confirme la courbe amorcée depuis 1998, avec des crédits de paiement qui ont fondu de 50 % en trois ans. Comment mieux dire le désengagement de l'Etat, alors même que le Gouvernement supprime progressivement les moyens propres des collectivités locales en prétendant qu'il les compensera par une dotation calculée sur l'existant. Comment s'étonner que ma demande, exprimée depuis trois ans de manière réitérée, et visant à ce que soit établi l'état des investissements respectifs des collectivités locales et de l'Etat en matière d'équipements sportifs reste lettre morte ? Un tel bilan démontrerait de manière flagrante le désengagement que l'on nie. Dans un tel contexte, je ne vois pas comment les équipements sportifs seront mis aux normes de sécurité, comme vous l'affirmez.

La lutte contre le dopage est le seul élément positif de ce projet de budget, et je me félicite que l'effort engagé se poursuive. J'invite cependant mes collègues et le Gouvernement à ne pas jeter le discrédit sur nos sportifs, présumés coupables alors qu'ils méritent les encouragements et l'admiration de tous, tant pour leur engagement que pour leurs exploits. Parler de dopage et de toxicomanie, c'est bien, mais encore faudrait-il ne pas passer sous silence que certaines associations sont des lieux favorables à la consommation de substances toxiques (Protestations). Plutôt que de montrer du doigt les sportifs de haut niveau, parlons donc des fédérations affinitaires, désormais autorisées à fixer leurs propres règles ! Il y aurait fort à faire, et de manière énergique, pour faire cesser certains comportements (Mêmes mouvements).

Par ailleurs, le Gouvernement entend-il laisser la Commission européenne se substituer aux fédérations nationales pour décider des conditions de transfert des joueurs de football ?

Parlons encore des emplois-jeunes. Le recrutement massif que vous avez encouragé a eu pour effet un télescopage avec le plan sport-emploi défini par Guy Drut, fondé, celui-là, sur la responsabilisation et non sur l'assistanat. Le risque n'est pas mince de voir arriver dans les clubs de pseudo-animateurs sans compétences réelles. Ainsi aurez-vous créé des sous-métiers du sport, sans savoir d'ailleurs comment pérenniser ces emplois lancés à l'aveuglette. Votre seule réponse, à ce jour, consiste à expliquer que vous allez vous arranger avec le secteur privé et avec les collectivités locales. Comment pourrions-nous nous satisfaire d'une telle réponse ? Il vous revient de prendre vos responsabilités et d'assumer le bébé que Mme Aubry vous a laissé en partant (Mme Catherine Picard proteste).

S'agissant de l'encadrement, on observera que les postes passent de 2 491 à 2 406, cependant que l'administration centrale gagne 85 postes. Comment mieux dire le délaissement dans lequel sont tenus les clubs ? C'est bien à une dérive morale, politique et financière que nous assistons.

Enfin, l'augmentation du FNDS résulte en partie du produit de la taxe sur les droits de retransmission télévisée et du prélèvement sur les recettes de la Française des Jeux, tous prélèvements d'une remarquable opacité, et dont le principe résulte, chacun le sait, d'un amendement voté à trois heures du matin, avec le prétexte de faire bénéficier les petits clubs de ressources jusqu'alors réservées aux plus grands. L'étrange, dans cette affaire, est que les 300 petits clubs auxquels j'ai demandé quelles avaient été, pour eux, les retombées de cette disposition nouvelle, m'ont tous répondu qu'elles avaient été nulles.

M. Jean-Claude Beauchaud - Cela n'a rien d'étonnant ! Comment pourrait-on anticiper ?

M. Christian Estrosi - En conclusion, je m'interroge toujours davantage sur la place d'un ministère de la jeunesse et des sports archaïque dans l'organisation nationale du sport en France, dont les acteurs se tournent de plus en plus vers les collectivités locales, sachant que l'administration est incapable d'apporter des solutions aux problèmes qu'ils doivent affronter.

M. le Président - Vous avez très largement dépassé votre temps de parole, Monsieur Estrosi, mais je vous ai laissé poursuivre, car j'ai bien compris que vous entendiez nous faire part d'une analyse extrêmement nuancée.

M. Bernard Outin - Je serai plus concis que l'orateur qui m'a précédé, car la présentation détaillée de Mme la ministre a répondu à certaines des questions que M. Leroy et moi-même nous posions. L'idée a été exprimée qu'il faudrait en arriver à un budget de la jeunesse et des sports correspondant à 1 % du budget général de l'Etat. Cette demande avait été exprimée au cours des années 1970, alors que le champ d'action du ministère était beaucoup plus réduit qu'il ne l'est aujourd'hui. Chacun se réjouirait d'une telle augmentation, mais le projet de budget qui nous est présenté n'en est pas moins en hausse significative, et il tranche avec les réductions constatées en 1993 et en 1997, que certains, si j'ai bien compris, prétendent positives. Il n'empêche qu'un décalage entre ce budget et les attentes des populations concernées existera toujours. Mais les interventions, nécessaires, de l'Etat sont décuplées par le travail des bénévoles, qui doivent conserver toute leur place.

Nous approuvons les orientations définies, qui visent à privilégier l'action sociale en faveur de la jeunesse et l'éducation populaire, tout en préservant la diversité des pratiques sportives. Nous pensons que la lutte contre l'exclusion et les inégalités sociales, notamment par le biais du coupon-sport, est une bonne formule, comme en témoigne le succès de ce dispositif. Nous espérons que les crédits supplémentaires débloqués permettront que l'importante demande constatée soit entièrement satisfaite en 2001.

Les précisions apportées par Mme la ministre en ce qui concerne les contrats éducatifs locaux sont intéressantes. On se félicitera que l'idée de « co-éducateurs » fasse son chemin. Le mécanisme mis au point permettra que l'enfant soit appréhendé dans sa globalité. L'effort consenti en faveur des points information-jeunesse est tout aussi judicieux, et il est particulièrement important de mener à son terme le programme « Cyber jeunes », qui facilitera l'accès à l'information de tous les jeunes intéressés -et ils sont extrêmement nombreux.

Nous nous réjouissons encore des mesures prises pour faciliter l'accès à la formation au BAFA et au BAFD. C'est une excellente initiative, car ces formations structurent la personnalité des jeunes appelés à encadrer plutôt qu'à être encadrés.

L'évolution du FONJEP est un autre exemple de rupture avec l'époque où les postes fondaient comme neige au soleil. D'une manière générale, l'insertion par le sport est une démarche intéressante, et les conseils locaux de la jeunesse sont des instances de concertation utiles.

Je ne conclurai pas sans dire que la création du fonds Fernand Sastre a fortement intéressé les clubs sportifs, dont bon nombre ont décidé de constituer de nouveaux dossiers, persuadés qu'ils sont, cette fois, d'obtenir une aide significative et non quelques picaillons. Je me félicite singulièrement que Mme la ministre ait annoncé une simplification administrative qui sera la bienvenue.

En revanche, nous attendons quelques précisions sur les actions locales en faveur des emplois-jeunes et sur les contrats éducatifs locaux.

M. Edouard Landrain - J'ai bien compris, Madame la ministre, que vous préfériez vous attarder sur vos objectifs plutôt que sur les chiffres, car ceux-ci sont cruels. Ne représentant que 0,211 % du budget de l'Etat, votre budget reste à un niveau comparable à celui qu'il avait atteint en 1991. Telle est la vérité des chiffres.

Vous avez insisté sur le secteur de la jeunesse : là encore, je renvoie aux chiffres qui attestent de l'ampleur des progrès qui restent à accomplir.

S'agissant du sport proprement dit, la dotation globale inscrite à votre budget est de 1,387 milliards, mais, si l'on exclut les dépenses obligatoires, il ne reste que 700 millions pour conduire une véritable politique sportive. 700 millions pour faire tourner la boutique, vous conviendrez que c'est bien peu ! Ce budget, on lui voit les côtes !

M. le Président - N'est-ce pas tout indiqué pour un sportif bien entraîné ?

M. Edouard Landrain - Il y a deux ans, vous nous avez déclaré que pour bien fonctionner votre budget devrait tourner autour de 3,8 milliards. Deux ans après, on en est loin et on pleure. Nous avons pourtant tenté de vous aider pour mettre en phase vos ambitions -surtout en cette année olympique où l'on pousse facilement le cocorico- et la réalité. Las, nous en sommes toujours à 0,211 % du budget de l'Etat.

Nous sommes tout prêts à reconnaître que vous avez progressé sur nombre de sujets. Je pense notamment à l'augmentation de la part régionale du FNDS qui doit être saluée. Pour autant, votre budget ne représente aujourd'hui qu'un cinquième de celui de la culture, alors que l'ambition de naguère était de les rendre équivalents. Notre vieux pays continue donc de privilégier la culture sur le sport. Quelle différence avec l'Australie, pays neuf, où la cohésion sociale passe par le sport ! Les situations sont certes peu comparables mais l'exemple est tout de même stimulant.

Globalement insuffisant, votre budget est très insuffisant en matière sportive. S'agissant de la TVA sur toutes les activités en rapport avec le sport, je soumets à votre réflexion une déclaration de Lionel Jospin du 22 mars 1995, dans le cadre de la campagne présidentielle : « Le sport remplit une importante fonction d'intégration sociale. Une baisse significative de la TVA contribuerait à en développer la pratique ». Où en est-on aujourd'hui ? Pouvez-vous nous donner votre sentiment sur ce problème ? Une harmonisation européenne est-elle envisageable ?

La lutte contre le dopage a été très correctement menée et les moyens de coercition semblent seuls efficaces pour mettre fin aux pratiques frauduleuses. Je suis favorable à la généralisation des contrôles inopinés sur les jeunes sportifs, lorsqu'ils participent à des compétitions d'une certaine envergure ou dans les centres de sélection.

Le problème des transferts ne sera résolu que lorsqu'une harmonisation fiscale de grande ampleur sera intervenue. En attendant, les comparaisons entre salaires n'ont aucun sens.

La formation est de plus en plus souvent confiée aux collectivités territoriales qui s'y investissent fortement. A ce sujet, je ne puis que déplorer que le programme de formation sur trois ans des bénévoles de la fédération française de football ait été confié à Cégetel -et je m'étonne du reste que vous y soyez favorable. Je veux bien que le privé rentre partout mais est-ce à la gloire d'une nation sportive d'ôter aux conseils généraux et aux conseils régionaux leurs prérogatives au bénéfice d'un opérateur privé ?

M. Jean-Claude Beauchaud - Et aux communes !

M. Edouard Landrain - Le devenir des emplois-jeunes nous inspire les plus vives inquiétudes. Ne nous leurrons pas, ce sont les collectivités qui paieront et l'impôt qui augmentera. Leur principal mérite est cependant d'avoir permis de constater des besoins qui n'avaient pas jusqu'alors été détectés.

S'agissant des échanges internationaux de jeunes, notamment sous la forme de jumelages, les bonnes volontés ne manquent pas et il est toujours possible de dégager les moyens. En revanche, la méthode fait souvent défaut et votre ministère pourrait utilement injecter un peu de matière grise pour aider les bénévoles à les organiser.

J'applaudis à l'initiative des contrats éducatifs locaux mais ils ne doivent pas faire oublier ce qui existe depuis cent ans : les patronages, confessionnels ou non, jouent un rôle culturel et social de proximité irremplaçable. Il faut les aider et les reconstituer là où ils ont disparu. Ils remplissent à leur manière le rôle des équipements de proximité voulus par Mme Bredin.

Mme Catherine Picard - Je ne m'attarderai pas sur les aspects positifs de votre budget : renforcement de la lutte contre le dopage, démocratisation de l'accès au sport, soutien aux associations, généralisation des contrats éducatifs locaux, création de 100 postes FONJEP, modernisation des centres régionaux d'information jeunesse, meilleure prévention des risques dans l'encadrement des activités sportives et d'animation.

Je déplore en revanche que l'augmentation des crédits ne profite pas à l'emploi au sein de votre ministère. Il avait été annoncé que mille emplois seraient créés en trois ans : avec trois -selon moi- ou quinze -d'après vous- créations de postes, nous sommes loin du compte.

Je constate cependant avec satisfaction que les moyens des services de l'inspection de la jeunesse et des sports sont renforcés car elle joue un rôle essentiel dans la protection des mineurs.

La formation des personnels du ministère et des acteurs du monde associatif a également été enrichie et je m'en réjouis. S'agissant des BAFA et des BAFD, il convient cependant de s'interroger sur le contenu des formations dispensées et sur les méthodes pédagogiques retenues. Il importe que le service public de la jeunesse et des sports reste très présent car il est seul à même d'exercer un contrôle impartial à tous les échelons.

M. Jean-Claude Beauchaud - Pouvez-vous, Madame la ministre, préciser comment l'augmentation de la part régionale du FNDS s'articule avec la simplification des circuits que vous avez précédemment évoquée ?

M. Henri Nayrou - S'agissant des cadres techniques, dont l'effectif est passé de 1 643 à 1 693, je ne demande pas que le ministère prenne tout en charge, mais je souhaiterais que vous précisiez la nature des tutelles et des missions et que vous incitiez au partenariat entre l'éducation nationale, les fédérations et les associations.

M. Patrick Leroy - Je ne reviens pas sur les effets négatifs de la marchandisation du sport car il en a déjà largement été question.

Il me semble que votre budget manque un peu de visibilité en matière d'accès à la citoyenneté et d'insertion par le sport. Considérant le rôle essentiel que joue le sport en matière de cohésion sociale, votre ministère devrait être un lieu de recherche et d'expérimentation sans équivalent sur ces sujets.

Pouvez-vous également nous indiquer les actions concrètes qui seront privilégiées pour développer les pratiques sportives féminines et le sport en entreprise, qui bénéficieront respectivement de 5 millions et 4,5 millions de mesures nouvelles ?

S'agissant du coupon sport, les moyens disponibles seront-ils suffisants si l'on dépasse encore les évaluations initiales ?

Mme Yvette Benayoun-Nakache - Je souhaiterais, Madame la ministre, que vous précisiez à nouveau la forme que prendra votre soutien à la pratique du sport par les handicapés.

Le sport en milieu pénitentiaire doit également être encouragé. Je salue les progrès qui ont permis à un nombre croissant de détenus de bénéficier d'installations sportives mais comment peut-on aller plus loin ?

Mme la Ministre - J'observerai d'abord pour M. Estrosi et M. Landrain que je n'ai pas prétendu disposer d'un budget extraordinaire, j'ai simplement indiqué de façon très objective qu'il augmente depuis quatre ans. Qu'il reste insuffisant, bien sûr, et je l'ai dit moi-même en introduction, lorsqu'on tient compte à la fois des besoins qui vont croissants -on se tourne de plus en plus vers le sport, les associations, la culture et les 35 heures amplifieront le mouvement- et du champ couvert par mon ministère : du sport de haut niveau aux petits clubs, de la formation à l'éducation populaire que je veux moderniser, de la jeunesse à toutes les pratiques amateur. Face à tout cela, 3,4 milliards ne suffisent pas ; je suis lucide et vous le savez.

Monsieur Estrosi, je ne peux accepter les propos que vous avez tenus sur le ministère. Les personnels de nos services déconcentrés sont admirables. Il s'agit là d'une véritable administration de proximité qui sait répondre aux demandes du monde associatif au-delà même de son champ de compétence. Les préfets confient d'ailleurs à nos directeurs départementaux des responsabilités qui sont une reconnaissance de leur rôle. Je veux à mon tour rendre hommage à cette administration qui entretient avec le mouvement sportif des rapports chaleureux.

Effectivement, Madame Picard, nous modernisons les métiers. Nous avons mis en place avec les syndicats et les associations une table ronde pour améliorer les qualifications. Comme des métiers disparaissent, le bilan net est une augmentation de trois postes seulement. Mais on ne peut en reprendre à une administration centrale déjà si réduite qu'elle se contente de quelques étages de la tour Olivier de Serres.

D'autre part, c'est me faire un mauvais procès que de prétendre que j'ai voulu prendre au Sport pour donner à la Jeunesse. Ne faudrait-il rien faire pour les jeunes et l'éducation populaire ? Grâce à l'augmentation du budget, nous pouvons mieux répondre aux besoins des deux secteurs : 65 millions de dotations pour les associations de jeunesse et d'éducation populaire, mais 530 pour les fédérations sportives ; 844 millions sur le budget de la jeunesse et de l'éducation populaire, 1 364 sur celui du sport. Je ne cherche pas de rééquilibrage, nous progressons partout, mais bien sûr dans la limite du budget.

La formation doit rester et même redevenir une responsabilité d'Etat. J'ai souhaité que le coût de formation diminue dans les CREPS afin qu'ils accueillent plus de monde. Il n'y aura pas de diplôme au rabais, Monsieur Estrosi, mais pour tous les jeunes de vrais diplômes professionnels de même qualité que ceux des adultes. Si nous organisons cette formation au niveau local, c'est que beaucoup de ces jeunes n'ont pas fait d'études et n'ont même pas le bac : ils ont donc besoin d'une mise au niveau et d'une formation individualisée qu'on ne pourrait leur donner dans un cadre plus global.

Quant au personnel du ministère, Madame Picard, nous consacrons 18,9 millions à la formation interne afin de réduire une précarité très importante.

En ce qui concerne les emplois-jeunes, je me suis peut-être mal exprimée. Bien entendu les collectivités locales qui font déjà beaucoup en prenant en charge une part des dépenses des associations et qui devront assumer le coût de la pérennisation de leurs propres emplois-jeunes pourront difficilement payer pour celle des emplois-jeunes dans les associations. Le secteur privé peut être mis à contribution, mais je ne souhaite vraiment pas que l'on procède comme la Fédération française de football. Dans la plupart des cas, il faudra donc maintenir une aide publique. Elle pourrait être triennale ou dégressive, nous y réfléchirons.

Pour les contrats éducatifs locaux, tous les crédits sont déconcentrés car il convient de rester au plus près du terrain. Les comités de pilotage départementaux ou locaux joueront un rôle décisif. Ces contrats, Monsieur Landrain, ne remettent pas en cause des structures plus anciennes. Je pense au patronage de la Madeleine à Gisors, que je connais bien. Bien des dirigeants sportifs proviennent de ces associations qui sont en quelque sorte les ancêtres des clubs multisports. Il faut continuer à les aider car elles ont un rôle important pour maintenir le lien social.

Nous progressons en ce qui concerne la prévention des risques dans l'encadrement, que ce soit pour le sport ou pour l'éducation populaire. Le travail doit se faire en commun car des personnes exclues de l'encadrement des centres de vacances ou de loisirs pouvaient se retrouver dans certains clubs.

Le développement d'Internet est essentiel pour assurer l'égalité des chances. Nous allons installer 500 accès dans les points information jeunesse.

J'en viens au sport. Pour les cadres techniques, j'ai constaté à mon arrivée qu'il existait des inégalités énormes selon la richesse des fédérations. J'ai essayé d'assainir la situation sans faire d'éclats et aujourd'hui il n'y a plus de cas limite. Ces cadres, Monsieur Nayrou, se sentent porteurs d'une mission d'Etat. Ils ne nous reprochent pas de trop les encadrer, mais plutôt de ne pas suffisamment les réunir. Nous avons fait participer leur association à la table ronde sur les métiers. Même si le financement peut être assuré par différents partenaires, le ministère garde un rôle essentiel à leur égard.

Monsieur Estrosi, les petits clubs n'ont rien perçu du fonds de mutualisation puisqu'il n'est pas encore en place. C'est à l'unanimité que le FNDS a décidé en octobre de l'affectation des 5 % : ils seront ajoutés à la part régionale du FNDS pour financer le fonctionnement des clubs ou la formation des bénévoles. C'est la solution la plus simple, il n'y aura pas de nouveau dossier à remplir. Les CROS décideront de cette répartition comme de celle de la part régionale du FNDS. Suite au rapport établi par le Parlement, j'ai souhaité qu'un élu local soit associé à la répartition de cette part régionale. Les CROS ont effectué un remarquable travail d'évaluation. Il apparaît que 54 % de la part régionale va directement aux clubs et non au fonctionnement des CROS. Leur objectif est de parvenir à 60 %. On est passé de 23 189 clubs bénéficiaires en 1997 à 30 500 en 2000 et le montant moyen de la subvention qui était de 4 500 F par club en 1997 est passé à 5 500 F en 1999. L'utilisation de ces crédits se fait dans une totale transparence, le mouvement sportif y est d'ailleurs très vigilant.

En ce qui concerne les transferts, je pense que nous allons parvenir à une bonne solution. Deux problèmes subsistent. Il s'agit d'abord du contrôle de la gestion des clubs : tant que certains pays accepteront qu'un club ait un milliard de déficit, il y aura concurrence déloyale. Il s'agit ensuite de la fiscalité. Mme Parly a lancé une étude concernant la TVA sur la billetterie, l'étalement de l'imposition pour les joueurs et leur intéressement dans le club. Il n'y a donc aucun blocage de la part du ministère du budget. Il faut avancer sur ces sujets qui ne sont pas tabous. S'agissant de la TVA en particulier, je ne pense pas qu'on puisse mettre en avant une contrainte européenne, on se trouve dans le cadre des exceptions reconnues par l'Union.

M. le Président - Pensez-vous que, si nous vous apportions un appui déterminé, nous pourrions aboutir lors du prochain débat budgétaire ? Nous pourrions organiser une audition de Mme Parly...

Mme la Ministre - La réponse de Mme Parly a été clairement favorable, déjà.

Renforcer l'encadrement des clubs ne peut que favoriser l'insertion par le sport. C'est en outre une nécessité, compte tenu du public « difficile » que ces clubs ont à accueillir. En Seine-Saint-Denis par exemple, lorsque nous avons institué des officiers de police référents, nous avons aussi créé des postes d'éducateurs qualifiés. C'est dans cette direction que nous devons continuer à travailler.

Des progrès ont été enregistrés en ce qui concerne la pratique féminine. Nous avons mis en place un réseau de correspondantes régionales et le CNOSF s'apprête à introduire des femmes dans son comité directeur. J'espère aussi que le prochain renouvellement permettra de renforcer la présence des femmes à la tête des fédérations, où l'on n'en compte qu'une actuellement. Il y a beaucoup à faire car, à Sydney, si douze délégations ne comportaient aucune femme, la France, avec 38 % seulement, était en dessous de la moyenne, qui se situait entre 40 et 41 %.

Je salue les résultats de nos équipes aux Jeux paralympiques et je me félicite du rapprochement intervenu entre la Fédération du sport adapté et la Fédération « handisports ». Une réflexion est en cours sur un certain nombre de sujets, comme les relations entre la compétition et le sport adapté. Pour ce qui est des subventions à la Fédération « handisports », les crédits sont passés de 4,3 à 8,8 millions depuis 1997. En revanche, la Fédération du sport adapté est moins bien lotie, ses subventions n'étant passées que de 1,9 à 2,4 millions. Nous avons toutefois fait un effort en faveur de l'encadrement technique, même si je considère personnellement qu'il demeure insuffisant.

Reste cependant à lever un obstacle signalé par M. Auberger et qui entrave la pratique sportive des handicapés à l'école. Il arrive par exemple qu'on interdise à des jeunes pratiquants d'handisports de se présenter aux épreuves sportives du baccalauréat, sous prétexte qu'ils sont dispensés ! M. Lang et Mme Gillot ont décidé de s'attaquer à cette question et de constituer un groupe de travail, dans le cadre de « Handiscole ».

S'agissant du sport en prison, la situation n'est pas trop mauvaise pour les hommes. En effet, depuis l'accord intervenu en 1986 entre mon ministère et celui de la justice, nous fournissons un certain nombre d'éducateurs. En revanche, la pratique sportive est impossible dans un certain nombre de prisons de femmes et j'ai donc saisi la Garde des sceaux de cette discrimination inacceptable.

Le propos de M. Estrosi m'a choquée. Luttant contre le dopage, je n'entends montrer aucun athlète du doigt et je combats résolument la thèse du « tous dopés », d'abord parce qu'elle est fausse et qu'une majorité de sportifs ne doivent leurs résultats qu'à leur effort personnel, ensuite parce qu'elle revient à un renoncement. Or rien ne serait pire que de ne rien faire. Il faut convaincre les sportifs de haut niveau comme les sportifs amateurs que se doper est prendre un risque effroyable pour sa santé physique et morale et il faut combattre le système ou l'entourage qui les y pousse. Je ne cesserai de répéter que ce sont eux les premières victimes. Et, puisque M. Estrosi est parti, je prendrai une autre occasion de le rencontrer afin de mettre les choses au point avec lui.

Le mouvement sportif assume ses responsabilités sans attendre les décisions de l'Union européenne ou du ministère, et c'est une bonne chose. L'Etat doit faire de même. Lorsque le président d'une ligue européenne de football m'a demandé de servir de courroie de transmission auprès de la Commission, sur la question des transferts, j'ai nettement refusé, disant que je n'entendais pas cautionner le système actuel mais qu'en revanche, je transmettrai les propositions alternatives que les fédérations pourraient élaborer. Il faut que chacun fasse son travail, de façon complémentaire mais dans le respect de ses missions propres. M. Sérandour, qui a pu grâce à moi assister à la réunion des ministres des sports, peut témoigner que, pour sa part, ce Gouvernement a su défendre les spécificités sportives, permettant ainsi au mouvement sportif d'affirmer ses propres priorités, contre les intérêts privés.

M. le Président - Je vous remercie, et croyez bien que ce n'est pas une simple formule de courtoisie, pour votre engagement au service du sport, de la jeunesse et de l'éducation populaire. Nous continuerons de soutenir votre action avec force. Nous vous savons gré aussi de votre professionnalisme, de votre maîtrise des dossiers, qui facilitent grandement nos rapports.

Mme la Ministre - Je vous remercie à mon tour de ce que vous venez de dire. C'est avec grand plaisir que, depuis trois ans, je travaille avec votre commission, sans polémiques vaines -sauf rares exceptions- mais avec le souci d'avancer vers un but commun.

Comme vous l'avez dit, je dois représenter l'Europe au sein de l'Agence antidopage, mardi prochain. Or la discussion de mon budget en séance plénière était prévue pour ce jour-là. Après consultation avec le ministre chargé des relations avec le Parlement, il semble que cette discussion puisse être reportée au lundi 20 novembre, à dix heures.

M. le Président - Il est très important que vous participiez à la réunion du 14 et je pense donc que tous nos collègues consentiront à ce report sans hésitation.

VOTE INDICATIF SUR LES CRÉDITS

M. le Rapporteur pour avis - Je demande à la commission de donner un avis favorable à l'adoption des crédits de la jeunesse et des sports.

Les crédits sont adoptés.

La séance est levée à 11 heures 55.

Le Directeur du service
des comptes rendus analytiques,

Jacques BOUFFIER

_____________

Mercredi 8 novembre 2000
(séance de 9 heures)

Loi de finances pour 2001 : audition de Mme Marie-George Buffet, ministre de la jeunesse et des sports, sur les crédits de son ministère.


© Assemblée nationale