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ASSEMBLÉE NATIONALE

COMMISSION des AFFAIRES CULTURELLES,
FAMILIALES ET SOCIALES

COMPTE RENDU N° 56

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mardi 25 septembre 2001
(Séance de 15 heures)

Présidence de M. Jean Le Garrec, président

SOMMAIRE

 

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- Audition, en présence de la presse, de Mmes Elisabeth Guigou, ministre de l'emploi et de la solidarité, et Paulette Guinchard-Kunstler, secrétaire d'Etat aux personnes âgées, sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2002

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La commission des affaires culturelles, familiales et sociales a entendu Mme Elisabeth Guigou, ministre de l'emploi et de la solidarité et Mme Paulette Guinchard-Kunstler, secrétaire d'Etat aux personnes âgées sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2002.

Mme Elisabeth Guigou, ministre de l'emploi et de la solidarité, a tout d'abord tenu à souligné la solidité de la situation financière de la sécurité sociale. Selon les comptes qui ont été présentés à la commission des comptes de la sécurité sociale le 20 septembre 2001, il apparaît qu'entre 1999 et 2002 la sécurité sociale a dégagé un excédent cumulé de 23 milliards de francs, alors qu'entre 1994 et 1997 elle avait enregistré un déficit cumulé de 265 milliards de francs.

En 2002, le régime général de sécurité sociale devrait dégager, avant toute mesure nouvelle, un excédent de 6,1 milliards de francs en droits constatés. Ce résultat est obtenu malgré des perspectives de croissance de la masse salariale moins favorables qu'en 2001. Ceci démontre que le redressement des comptes de la sécurité sociale enregistré au cours de cette législature est solide. C'est cette continuité du redressement qu'il convient aujourd'hui de relever et de saluer. Le rétablissement des excédents des comptes sociaux a permis d'améliorer la protection sociale de nos concitoyens.

Au vu des comptes présentés le 20 septembre dernier, le FOREC présente les déficits suivants : 5 milliards de francs environ en 2001 et 2,7 milliards d'euros (18,1 milliards de francs) en 2002. Face à cette situation, le Gouvernement a décidé que les déficits prévisionnels seraient financés par des ressources stables et pérennes.

Le FOREC sera en équilibre à compter de l'exercice 2001 : pour 2001, l'équilibre sera assuré par l'affectation de droits sur les alcools actuellement perçus par l'assurance maladie ; pour 2002, diverses recettes fiscales seront mobilisées pour assurer l'équilibre ;

- 1,07 milliard d'euros (7 milliards de francs) seront affectés par l'Etat au FOREC sous la forme d'une augmentation des droits sur les tabacs et d'une augmentation de la fraction de la taxe spéciale sur les conventions d'assurance qui revient à ce fonds ;

- 440 millions d'euros (3 milliards de francs) proviendront de l'affectation au FOREC de la contribution sur les contrats de prévoyance actuellement affectés au fonds de solidarité vieillesse ;

1,8 milliard d'euros (11,8 milliards de francs) iront de l'assurance maladie au FOREC à travers les droits sur les alcools et la taxe sur les véhicules à moteur, et en sens inverse 580 millions de francs de droits sur les tabacs seront transférés du FOREC à l'assurance maladie.

Cet équilibre sera réalisé dans le respect des principes du financement de la sécurité sociale puisque le FOREC bénéficiera exclusivement de recettes de nature fiscale. Par ailleurs, le décret installant l'établissement public qui assurera la gestion du fonds est en cours de signature. La création du FOREC et les conditions de son équilibre répondent ainsi au souhait des partenaires sociaux d'aller vers une clarification des comptes.

L'assurance maladie doit s'adosser sur une politique de santé clairement définie par le Gouvernement. Pour la santé publique, on peut évoquer le cas de la lutte contre le cancer. Le plan national de lutte contre le cancer a été lancé en février 2000 pour cinq ans. En 2002, il mobilisera des crédits de l'Etat et de l'assurance maladie pour plus d'un milliard de francs supplémentaires. Deux programmes de dépistage seront généralisés pour les pathologies où existe une surmortalité importante : le cancer du sein et le cancer du colon. Ces actions spécifiques en matière de cancer, comme les autres priorités de santé publique, sont intégrées dans l'objectif national de dépenses d'assurance maladie (ONDAM) qu'il sera proposé au Parlement d'approuver.

En matière hospitalière, trois priorités sont mises en _uvre : l'adaptation de l'offre de soins aux besoins de la population, la promotion de la qualité et de la sécurité des soins et la réduction des inégalités dans l'accès aux soins.

Les schémas régionaux d'organisation sanitaires (SROS) de seconde génération continueront à se mettre en place. Ils entraînent des réorganisations importantes : 111 communautés d'établissements sont constituées ou en cours de constitution dans les 150 secteurs sanitaires et 120 réseaux sont agréés ou en cours d'agrément par les agences régionales de l'hospitalisation. En matière de qualité et de sécurité des soins, les crédits inscrits dans la loi de financement pour 2001 ont permis la mise aux normes des stérilisations ; cet effort sera poursuivi en 2002.

Un effort considérable a été réalisé en matière de prise en charge des dépenses à l'hôpital liées à l'arrivée de nouvelles molécules pour lutter contre le cancer ou la polyarthrite rhumatoïde : la dotation d'un milliard de francs en 2001 sera encore abondée de 200 millions de francs. En outre, pour 2002, une enveloppe supplémentaire de 1,5 milliard de francs a été débloquée pour l'innovation thérapeutique : au total, 2,7 milliards de francs financeront en 2002 la prise en charge de ces traitements. Par ailleurs, pour poursuivre la réduction des inégalités d'accès aux soins, il a été décidé de mener une politique d'autorisations déconcentrées de certains équipements lourds, afin de répondre plus rapidement, sur le terrain, aux besoins de la population.

La réduction du temps de travail à l'hôpital doit répondre aux attentes des personnels en matière de conditions de vie au travail et de vie personnelle, tout en améliorant la qualité de la prise en charge des usagers. Compte tenu de la spécificité des missions des établissements dont les personnels relèvent de la fonction publique hospitalière, le Gouvernement a décidé d'accompagner la réduction du temps de travail par la création de 45 000 emplois. Ces emplois seront pourvus dans les trois années qui viennent (2002-2004). Pour soutenir ces recrutements, un effort important sera fait sur la formation initiale des professions de santé (paramédicale, sage-femme) et sur celle des aide-soignants.

En ce qui concerne les cliniques privées, l'accord du 4 avril 2002 a marqué une volonté de prendre pleinement en compte leur situation sociale et économique. En 2002, seront ainsi pris en compte :

- la poursuite de la mise en _uvre des mesures de sécurité sanitaires décidées pour faire face notamment aux risques liés au prion ;

- le renforcement de l'effort de remise à niveau des tarifs des maternités dans la continuité des décisions prises en 2000 et 2001 ;

- le plan pluriannuel de convergence des rémunérations des salariés des secteurs privé et public : l'accord de 2001 a déjà permis aux cliniques de financer des augmentations de salaires et de résorber partiellement l'écart existant. Conformément aux engagements pris cette année, cet effort sera poursuivi et amplifié en 2002.

En ce qui concerne les soins de ville, la politique menée depuis 1997 a permis des améliorations importantes en matière d'optique, de prothèses externes et de dispositifs médicaux, comme l'inscription au remboursement des pompes à insuline pour les patients diabétiques. Il est important d'amplifier ce mouvement à l'occasion du présent projet de loi de financement, par exemple en matière d'optique pour les jeunes ou de prothèses auditives (pour les dispositifs stéréophoniques). Un examen de prévention dentaire sera généralisé pour deux classes d'âges (6 et 12 ans), soit 1,4 million d'enfants concernés. Ce dispositif permettra d'offrir à l'ensemble des enfants l'accès à un examen de prévention gratuit et les soins qui peuvent ensuite s'avérer nécessaires.

L'objectif de la politique du médicament est de permettre l'accès de tous les Français aux innovations. La progression des dépenses de médicament reste rapide (+ 7,7 % en 2001). Ce rythme s'est toutefois ralenti par rapport à l'année 2000, et ceci grâce aux premiers effets des mesures annoncées en juin 2001 en termes de baisses de prix.

Les efforts ont porté en premier lieu sur le bon usage du médicament, par l'amélioration de l'information des patients et des prescripteurs. En matière de régulation de la publicité pharmaceutique, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2002 prévoit une augmentation de la taxe sur la publicité pharmaceutique, qui devrait apporter 50 millions d'euros de ressources supplémentaires à l'assurance maladie.

En second lieu, le développement du générique doit être encouragé. Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2002 prévoit ainsi la possibilité de prescrire en dénomination commune internationale (et non plus uniquement en nom de marque). Les procédures d'inscription sur le répertoire des groupes génériques ont également été simplifiées et améliorées par un décret du 27 août 2001. Des discussions sont en cours avec les pharmaciens afin de relancer la substitution. L'efficacité de la régulation des dépenses a également été notablement renforcée. L'objectif de 2,4 milliards de francs de baisses de prix concernant principalement les spécialités dont le service médical rendu a été jugé insuffisant et les médicaments déjà amortis dont le volume et la croissance sont élevés a été mis en _uvre.

Compte tenu de l'ensemble de ces éléments, le Gouvernement a retenu un objectif national de dépenses d'assurance maladie (ONDAM) pour 2002 de 112,62 milliards d'euros en droits constatés (738,7 milliards de francs), en progression de 3,8 % par rapport aux dépenses de 2001. Cet objectif correspond aux priorités de santé publique et aux actions de modernisation du système de soins. Il se compose de quatre éléments principaux :

- Pour les hôpitaux, l'objectif est de 4,8 % : il s'agit d'une progression très importante, qui prend en compte, outre les priorités de santé publique et les mesures découlant des protocoles signés avec les syndicats, l'incidence de la réduction du temps de travail à compter du 1er janvier 2002.

- Les établissements médico-sociaux demeurent un secteur prioritaire avec une croissance de 4,8 %, compte tenu du rythme de consommation des crédits en 2001. 2002 verra la pleine réalisation de la réforme de la tarification, en liaison avec la mise en _uvre de l'allocation personnalisée d'autonomie.

- Pour les cliniques privées, un objectif de 3,5 %, supérieur de 0,2 point à celui de 2001, a été retenu.

- L'objectif des dépenses de soins de ville a été fixé à 3 % comme l'an passé ; les mesures sur le médicament contribueront à atteindre cet objectif pour ce secteur.

La fixation des objectifs financiers doit s'accompagner d'une démarche de dialogue avec l'ensemble des partenaires du système de santé. Ainsi, pour prendre en compte les interrogations et le malaise des professionnels s'agissant de leurs conditions d'exercice et des modalités du dispositif de régulation, une mission de concertation a fait une série de propositions portant sur les modalités d'exercice des professionnels libéraux, leurs missions et la rénovation du cadre conventionnel qui les lie aux caisses d'assurance maladie. Ces propositions ont été examinées lors de la réunion du 12 juillet 2001 avec les professionnels, les caisses et les partenaires sociaux. Certaines mesures doivent entrer en vigueur rapidement :

- La création de l'observatoire de la démographie et des métiers qui sera chargé de rassembler, d'expertiser et de diffuser des connaissances relatives à la démographie des professionnels de santé, au contenu de leurs métiers et à leurs évolutions.

- La mise en place de dispositifs d'appui à l'installation afin de prendre en compte les difficultés que rencontrent le recrutement, le maintien et le remplacement de médecins et d'infirmiers dans certaines zones rurales.

- L'extension de l'évaluation des pratiques professionnelles aux professions paramédicales.

- La mise en place de financements pérennes et d'une harmonisation des procédures au niveau régional pour soutenir le développement des réseaux.

- La création d'un haut conseil de santé chargé de constituer une ressource d'expertise et de propositions pour le Gouvernement en vue de la définition des priorités, prévue par le projet de loi relatif aux droits des malades et à la qualité du système de santé. Cette instance d'expertise contribuera, comme l'instance démocratique que constitue la conférence nationale de santé, à conseiller le Gouvernement pour préparer dans de bonnes conditions et articuler les débats devant le Parlement au mois de juin (politique de la santé) et à l'automne (financement de la sécurité sociale).

- Cette exigence sera encore renforcée par la pluri-annualisation des priorités de santé. L'ONDAM devra progressivement évoluer afin de prendre en compte, dans une logique de programmes, cette même approche pluriannuelle.

A la demande du Premier ministre, une concertation a été engagée avec les partenaires sociaux sur l'organisation de l'assurance maladie, la composition et les missions des conseils d'administration, les relations avec l'Etat, l'ordonnancement du réseau de la CNAM, la régionalisation, les compétences et l'organisation du service médical. Ces éléments seront discutés au cours de l'année à venir, en étroite concertation avec les organisations syndicales.

Le Gouvernement entend progresser sur la voie d'une meilleure réparation des accidents du travail et des maladies professionnelles. Les pistes ouvertes par le rapport du professeur Roland Masse doivent maintenant faire l'objet d'une véritable expertise, notamment sur la question complexe de la réparation intégrale des accidents du travail et des maladies professionnelles. Sans attendre les résultats de cette expertise, le Gouvernement améliore dès cette année la réparation allouée aux victimes : en premier lieu, il abaissera de 66 % à 25 % le seuil ouvrant droit à l'accès au système dérogatoire de reconnaissance des maladies professionnelles ; en deuxième lieu, il introduira un mécanisme d'indexation pour les indemnités en capital versées aux victimes ; enfin, le décret d'application de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2000 sur les accidents du travail successifs sera publié dans les prochaines semaines, permettant une application effective de cette mesure très attendue.

Tant les travaux de la commission présidée par Mme Lévy-Ronsewald que le rapport Masse soulignent l'existence d'une sous-déclaration des accidents du travail. Il est donc envisagé, comme dans le cas des maladies professionnelles dont la sous-reconnaissance est compensée à la branche maladie, que les accidents du travail fassent l'objet d'une telle compensation à la branche maladie, sur la même base que celles utilisée pour évaluer la sous-reconnaissance des maladies professionnelles.

Le Gouvernement poursuivra également ses efforts en matière de réparation des préjudices subis par les victimes de l'amiante. Le décret créant le fonds d'indemnisation voté l'an dernier sera publié avant la fin septembre, permettant au fonds d'accueillir ses premières demandes d'indemnisation. Le conseil d'administration du fonds devrait pouvoir être installé dans le courant du mois d'octobre 2001. Le fonds sera doté en 2001 d'un versement de la branche accidents du travail de 2,875 milliards de francs et, à titre provisionnel, de 500 millions de francs (76 millions d'euros) en 2002. Ces montants seront alimentés, dans le cadre de la loi de finances rectificative pour 2001, par une dotation de l'Etat.

La politique à l'égard des personnes handicapées a pour objectif de garantir une solidarité en faveur de ceux que le handicap a le plus durement touchés et de favoriser l'autonomie de tous ceux qui peuvent s'intégrer dans le milieu de vie ordinaire. Poursuivant les orientations présentées par le Premier ministre devant le conseil national consultatif des personnes handicapées (CNCPH), le Gouvernement s'est ainsi engagé sur la création de places pour les enfants les plus lourdement handicapés, le développement des moyens permettant l'intégration des jeunes handicapés et la généralisation des sites pour la vie autonome sur tout le territoire en 2002 et 2003, afin que les personnes handicapées trouvent dans un lieu unique les moyens de répondre à leurs demandes d'aide technique, d'aide humaine et d'aménagement de logement ou de leur lieu de vie ordinaire.

Par ailleurs, répondant à la demande des parents d'enfants handicapés, le Gouvernement va mettre en _uvre une réforme de l'allocation d'éducation spéciale. Ses nouvelles modalités de calcul permettront notamment de mieux prendre en compte les problèmes de l'autisme.

Le Gouvernement poursuit également le chantier de la rénovation de la politique familiale qu'il a entrepris depuis 1998. La conférence de la famille du 11 juin 2001 a arrêté le principe de plusieurs mesures nouvelles, qui vont trouver leur traduction dans le présent projet de loi de financement de la sécurité sociale, en particulier : la création d'un congé paternel de deux semaines à la naissance d'un enfant ; la poursuite de la réforme des barèmes des aides au logement et l'atténuation des effets pervers de l'évaluation forfaitaire des ressources des jeunes de moins de vingt-cinq ans ; une dotation supplémentaire de 229 millions d'euros (1,5 milliard de francs) pour le fond d'investissement pour la petite enfance, permettant la création de 30 000 nouvelles places de crèches.

La nouvelle convention d'objectifs et de gestion signée entre la CNAF et l'Etat est, par l'ampleur des mesures qu'elle contient et la manière dont elle été élaborée, exemplaire de la démarche que le Gouvernement a impulsée depuis 1998 en matière de politique familiale. Destinée à guider l'action des caisses d'allocations familiales jusqu'en 2004, elle leur offre les moyens de mener une action sociale ambitieuse et de qualité et, en prévoyant une progression sans précédent de 6 milliards de francs en quatre ans des moyens du fonds national d'action sociale, leur permettra d'aider la petite enfance, les loisirs et le soutien aux initiatives locales.

Enfin, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2002 poursuivra le transfert à la branche famille, ainsi que le Parlement l'a approuvé en 2001 et selon le calendrier annoncé, de la charge des majorations de pensions, actuellement assumée par le fonds de solidarité vieillesse. Il s'agit de confirmer l'orientation prise l'an dernier de mobiliser les excédents importants de la CNAF au service de l'allégement des contraintes de financement des retraites, puisque les majorations de pensions à raison des enfants élevés bénéficient à des familles ayant élevé des enfants.

Avec la création de la nouvelle allocation personnalisée d'autonomie dont vont pouvoir bénéficier près de 800 000 personnes au 1er janvier 2002, l'effort du Gouvernement à l'égard des personnes âgées se développe sur deux axes, en fonction des choix du lieu de vie de ces personnes :

- le développement du maintien à domicile avec la création de services de soins à domicile dans le cadre d'un plan pluriannuel de cinq ans à hauteur d'un milliard de francs ;

- la mise en _uvre d'un plan ambitieux pour les structures accueillant des personnes âgées dépendantes : six milliards de francs en cinq ans de crédits supplémentaires pour assurer la médicalisation de tous les établissements.

En matière de retraite, le Gouvernement veille par son action à consolider le pacte entre les générations au sein de notre société. La branche vieillesse était en déficit en 1997 ; elle renoue dorénavant avec les bénéfices et devrait afficher un milliard d'euros d'excédents en 2002. Ces excédents permettent d'associer les retraités aux fruits de la croissance, tout en préparant l'avenir des régimes de retraite.

Pour 2002, le Gouvernement propose de revaloriser les pensions de 2,2 % alors que l'inflation prévisionnelle est de 1,5 %. Ce coup de pouce supplémentaire portera à 1,4 % le gain de pouvoir d'achat des retraités depuis 1997. Par ailleurs, grâce à la suppression de la CRDS depuis 2001 pour les retraités non imposables, la hausse de pouvoir d'achat pour ces derniers s'élèvera sur la même période 1997-2002 à 1,9 %.

Mais il faut également prendre en compte les préoccupation des retraités de demain, qui sont les actifs et futurs actifs d'aujourd'hui. Conformément à l'engagement pris par le Premier ministre en mars 2000, le Gouvernement poursuit la préparation de l'avenir des retraites, en abondant le fonds de réserve pour les retraites et en organisant la concertation sur les réformes nécessaires. Ainsi le conseil d'orientation des retraites installé en mai 2000 par le Premier ministre devrait-il remettre son premier rapport d'ici la fin de l'année. Le premier acquis de ce conseil est d'avoir réussi à établir un diagnostic partagé sur les changements démographiques et leur incidence prévisible sur les régimes de retraite. Le conseil a par ailleurs montré qu'il était capable d'aborder sans tabou la concertation sur l'ensemble des politiques possibles pour garantir les retraites, ainsi que le prouve l'examen serein le 4 juillet 2001 des modalités concrètes pour augmenter la durée de cotisation des fonctionnaires ou encore l'examen attentif de la notion de taux de remplacement. Le conseil d'orientation mène donc à son terme la concertation sur les réformes.

Enfin, le fonds de réserve pour les retraites, créé en 1998, a été institué sous forme d'établissement public par le loi portant diverses dispositions d'ordre social, éducatif et culturel du 17 juillet 2001. Son plan de financement initial est conforté et ses ressources cumulées devraient s'élever à plus de douze milliards d'euros (80 milliards de francs) fin 2002. Il est proposé au Parlement de porter en 2002 la part de la contribution de 2 % les revenus du patrimoine affectée au fonds de 50 % à 65 %. En 2002, le fonds de réserve se verra également attribué la totalité du produit de l'attribution des licences de téléphonie mobile. Grâce à ses sources de financement actuelles, le fonds de réserve pour les retraites disposera de plus de 152 milliards d'euros (1 000 milliards de francs) en 2020, en conformité avec son objectif, qui lui permettront de couvrir une partie des déficits prévisionnels des régimes de retraite entre 2020 et 2040.

Après l'exposé de la ministre, le président Jean Le Garrec a souligné les points suivants :

- On ne peut que ce féliciter de la clarification du financement du FOREC - assuré exclusivement par des recettes de nature fiscale - à l'issue d'un débat qui n'a que trop duré, ainsi que de l'annonce de la prochaine publication du décret installant l'établissement public qui assurera la gestion du fonds. Il serait toutefois opportun de distinguer les dépenses engagées au titre de la réduction du temps de travail de celles qui résultent d'autres dispositions, parfois antérieures.

- Il est important de souligner la solidité de la situation financière de la sécurité sociale en rappelant le montant de l'excédent cumulé de 23 milliards de francs entre 1999 et 2002, par comparaison au déficit cumulé de 265 milliards de francs enregistré entre 1994 et 1997.

- En ce qui concerne l'ONDAM, la prise en compte de l'évolution du PIB en valeur, de la santé en tant que bien premier et sa nécessaire pluriannualisation rejoignent les préoccupations de la commission.

- S'agissant de l'assurance maladie, le maintien d'un principe de péréquation des dotations régionales hospitalières est essentiel pour la poursuite de la réduction des inégalités d'accès aux soins qui affectent plus particulièrement certaines régions. La déconcentration de la mise en place des réseaux s'inscrit également dans la continuité de l'action entreprise en faveur de leur développement et correspond à cet égard à des dispositions adoptées par la commission à l'occasion de l'examen du projet de loi relatif aux droits des malades et à la qualité du système de santé. Il serait cependant opportun de mieux individualiser leur financement.

- La création d'un haut conseil de santé prévu par le projet de loi relatif aux droits des malades et à la qualité du système de santé a été approuvée par la commission.

- S'agissant de l'installation des professionnels de santé qui exercent à titre libéral, l'approche ne saurait se borner aux seules zones rurales car les difficultés rencontrées sont plus générales.

- En ce qui concerne la branche accidents du travail, on ne peut que se féliciter de l'amélioration de la prise en charge des accidents du travail et des maladies professionnelles, et notamment de la prochaine publication des décrets relatifs respectivement à la réparation des accidents successifs et à l'installation du fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante, qui témoignent de la politique volontariste du Gouvernement en la matière.

- S'agissant de la politique à l'égard des personnes handicapées, la mise en _uvre du plan pluriannuel doit être accélérée.

M. Claude Evin, rapporteur pour l'assurance maladie et les accidents du travail, a formulé les remarques et questions suivantes :

- Il est utile de stabiliser les sources de financement du FOREC mais, les ressources de l'assurance maladie qui sont en relation directe avec les risques encourus, comme les droits sur les alcools, doivent être conservées autant que possible en raison de l'aspect pédagogique de l'affectation de la taxation.

- On ne peut bien évidemment que se féliciter de l'amélioration de la prise en charge des soins dentaires et de l'optique qui a été annoncée.

- S'agissant de la branche accidents du travail, en dépit du délai observé depuis l'adoption de la loi, la publication prochaine du décret sur la réparation des accidents successifs est également satisfaisante, de même que celle du décret installant le fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante. Il convient toutefois de s'interroger sur le dispositif de préretraite prévu en faveur des victimes de l'amiante, actuellement limité aux maladies figurant au tableau 30 B qui exclut donc les plaques pleurales.

- Il serait utile de pouvoir disposer d'indications précises relatives à la déclinaison de l'ONDAM, en particulier en ce qui concerne les dépenses hospitalières et les dépenses résultant de l'entrée en vigueur de la réduction du temps de travail dans la fonction publique hospitalière.

- La mise en place des réseaux de santé est en réel progrès, notamment grâce à la régionalisation, mais il est nécessaire de prévoir, au sein de l'ONDAM, une enveloppe budgétaire spécifique afin d'assurer un financement pérenne et satisfaisant de ces réseaux.

Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure pour la famille, s'est félicitée de l'excédent constaté pour la troisième année consécutive s'agissant de la branche famille. Les mesures mises en _uvre au cours de l'année 2001 ont correspondu aux attentes des familles et celles annoncées lors de la conférence de la famille de juin dernier, telles que le congé de paternité et l'amélioration de l'accueil de la petite enfance, répondront de nouveau à de réels besoins.

Puis elle a interrogé la ministre sur les points suivants :

- la réforme des aides au logement, en particulier dans le cas de la séparation d'un couple et en ce qui concerne l'articulation de l'aide aux jeunes adultes autonomes avec l'allocation parentale d'éducation ;

- la nature des actions susceptibles d'être engagées par les caisses d'allocation familiales sur la base des moyens nouveaux dégagés au profit du fonds national d'action sociale en application de la convention d'objectifs et de gestion signée entre l'Etat et la caisse nationale d'allocations familiales, notamment en faveur de l'accueil de la petite enfance et d'une meilleure conciliation entre vie familiale et vie professionnelle.

M. Denis Jacquat, rapporteur pour l'assurance vieillesse, a formulé les observations et questions suivantes :

- Quelles suites, autres que la mise en place du conseil d'orientation pour les retraites, le Gouvernement entend-il donner aux conclusions du rapport Charpin ?

- Quelles sont les intentions du Gouvernement s'agissant du minimum contributif ?

- On ne peut qu'être inquiet sur le caractère pérenne et le niveau des ressources du fonds de réserve pour les retraites.

- Est-il envisagé de relever le plafond de cumul applicable au conjoint survivant, à l'origine d'un profond sentiment d'injustice chez les personnes concernées ?

- L'évolution négative du taux de remplacement tend à accentuer les inégalités de traitement entre régimes.

En réponse, Mme Elisabeth Guigou, ministre de l'emploi et de la solidarité, a apporté les éléments suivants :

- L'un des apports du présent projet de loi de financement de la sécurité sociale est la clarification des comptes du FOREC. La transparence du dispositif sera accrue par la parution du décret régissant le FOREC et la stabilisation de ses ressources. La commission suggère de mieux distinguer entre les exonérations de cotisations liées à la réduction du temps de travail et les autres exonérations prises en charge par le FOREC : il s'agit là d'une démarche utile. Ainsi, en 2001, les exonérations liées à la réduction du temps de travail et leurs majorations s'élèvent à 30,8 milliards de francs sur un total de dépenses de 94,9 milliards. En 2002, ils représenteront 34,6 milliards de francs sur un total de 102 milliards. Il est essentiel de mieux définir les concepts utilisés : le FOREC ne sert pas uniquement, loin s'en faut, au financement des trente-cinq heures.

- La lutte contre les inégalités régionales entre hôpitaux est une priorité. L'inspection générale des affaires sociales a été chargée d'une mission d'évaluation sur cette question dont les résultats devraient être connus avant le débat sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale.

- Le financement des réseaux est permis par l'article 15 du projet de loi de financement qui prévoit le maintien jusqu'à 2006 du fonds d'aide à la qualité des soins de ville. L'identification du financement des réseaux au sein de l'ONDAM mérite d'être étudiée car la coordination des soins est une priorité.

- L'accélération du plan pluriannuel en faveur des personnes handicapées n'est pas prévue pour le moment.

- S'agissant de l'ouverture du bénéfice du dispositif de préretraites aux salariés victimes de plaques pleurales, une étude doit être menée.

- En ce qui concerne l'affectation de ressources fiscales à la CNAM, il convient de rappeler que tant les taxes sur les boissons alcooliques et les prémix que l'affectation des droits sur les tabacs constituent des formes de financement prenant en compte le risque encouru et son incidence sur les comptes sociaux. Ce type de financement sera maintenu.

- L'objectif de dépenses pour l'hôpital croîtra de 4,8 % : après un rebasage supplémentaire de 500 millions de francs lié aux médicaments, l'objectif évolue de 3,6 % sans prise en compte de la réduction du temps de travail. La prévision globale de 4,8 % inclut les conséquences de cette dernière qui correspond donc à 1,2 %. Pour les cliniques, la hausse sera de 3,5 % après rebasage tandis que dans le secteur médico-social, la montée en charge plus lente que prévue de la nouvelle tarification conduit à de moindres dépenses. Il est de ce fait tenu compte de l'effet-report à attendre.

- En matière de politique familiale, le fonds national d'action sociale de la CNAF voit ses crédits augmenter de 1,6 milliard de francs, notamment afin d'améliorer le fonctionnement des structures d'accueil de la petite enfance et de favoriser les activités préscolaires des enfants et adolescents. Au total, à travers la convention d'objectifs et de gestion, les ressources seront accrues d'un milliard d'euros sur quatre ans.

- Les moyens consacrés à l'allocation d'éducation spéciale augmenteront de 250 millions de francs et leur répartition tiendra compte des autres aides existantes et de la diversité des situations des bénéficiaires.

- S'agissant des aides au logement, la réforme sera poursuivie l'objectif demeurant d'une égalité de traitement eu égard au revenu. Elles seront revalorisées d'environ cent francs par mois pour les actifs les plus modestes.

- S'agissant de l'assurance-veuvage, le Gouvernement a mis en place une réforme visant à améliorer le niveau du minimum des pensions de reversion afin d'augmenter le pouvoir d'achat des personnes concernées.

- Le fonds de réserve pour les retraites sera abondé à hauteur de 83,2 milliards de francs en 2002, ce qui représente davantage que les sommes annoncées précédemment. Il a en effet été décidé que les 16,2 milliards de francs provenant de la vente des licences UMTS seront désormais affectés en totalité au fonds. On peut légitimement se réjouir de cette décision même si cette ressource n'est pas nécessairement reconductible année après année.

- La réforme des retraites devra être mise en _uvre. Il faut se féliciter de ce qu'elle soit aujourd'hui préparée dans de bonnes conditions financières - la branche est en excédent - puisque nous ne connaissons plus actuellement la situation d'urgence absolue observée il y a quelques années. Il est heureux que les partenaires sociaux siégeant au conseil d'orientation des retraites, à l'exception regrettable du MEDEF, soient parvenus à dresser un diagnostic commun des perspectives d'avenir en la matière. Selon les études les plus récentes, les déficits prévisibles des régimes de retraite devraient atteindre approximativement quatre points du produit intérieur brut. Les acteurs doivent désormais déterminer, par un dialogue responsable, le taux de remplacement des revenus d'activité qu'il convient de garantir aux retraités. Si rien n'est fait, les écarts entre revenus d'activité et pensions de retraite risquent en effet d'être beaucoup trop importants. D'une manière générale, la réforme d'ensemble aujourd'hui en préparation devra tenir compte des spécificités de chaque régime. Elle s'étalera sur une période assez importante, jusqu'aux années 2020 à 2040. Une succession de négociations interviendra donc nécessairement durant les décennies à venir. D'ores et déjà, on peut se féliciter de la qualité des débats engagés au sein du conseil d'orientation des retraites, ce qui contraste, fort heureusement, avec la méthode extrêmement brutale qui a été utilisée, en vain d'ailleurs, en 1995.

M. Bernard Accoyer a fait les remarques suivantes :

- Il est regrettable de constater combien le discours de la ministre est parsemé d'imprécisions voire de contre-vérités : ce n'est pas une loi de financement mais une loi de flottement de la sécurité sociale. Les chiffres annoncés apparaissent pour le moins flous et il n'est pas fait de différence claire entre ce qui relève des dépenses réalisées, estimées ou prévues. L'ensemble paraît totalement déconnecté des perspectives réelles de croissance économique en France et dans le monde dans un avenir proche et surtout de données démographiques incontournables.

- Le Gouvernement se gargarise à tort d'avoir remis les comptes de la sécurité sociale à l'équilibre. La Cour des comptes a d'ailleurs fort justement démontré qu'en 2000, ces comptes présentaient en réalité un déficit à cause des manipulations liées au FOREC et au financement de la réduction du temps de travail. Il faut mettre fin au détournement actuel qui permet d'affecter de façon très discutable les taxes sur l'alcool et le tabac au financement des trente-cinq heures.

- On ne dispose pas d'évolutions chiffrées réelles de l'ONDAM qui tiennent compte d'objectifs sanitaires. Le taux de l'enveloppe hospitalière de l'ONDAM, compte tenu de la réduction du temps de travail à l'hôpital, correspond seulement à la moitié des demandes de la fédération hospitalière de France (FHF).

- Il ne faut pas amalgamer la logique de la ristourne Juppé, qui vise à alléger le coût du travail sur les bas salaires pour créer de l'activité, et celle de la réduction de charges sociales liée aux trente-cinq heures qui tend en réalité à organiser un partage du travail, la masse globale d'activité restant la même.

- L'hospitalisation privée est dans une situation grave. La régulation se fait par la suppression des lits. Beaucoup d'établissements sont au bord de la faillite. Si l'on n'y prend pas garde, le personnel des cliniques risque de délaisser les établissements privés pour les structures publiques du fait notamment de différentiels de rémunération importants. A terme, c'est la liberté même de choix entre deux systèmes concurrents - le privé et le public - qui est menacée.

- Il est scandaleux que l'excédent de la branche famille soit utilisé pour combler d'autres déficits. La politique familiale s'en trouve considérablement affaiblie. C'est le pacte de solidarité entre les générations qui est ainsi fragilisé.

- La branche vieillesse aura à faire face à des déficits effrayants, qui ne pourront pas être comblés par les mille milliards de francs du fonds de réserve. Le plus gros des mensonges du Gouvernement est de faire croire qu'une réforme des retraites est engagée.

M. Jean-Luc Préel a souligné le paradoxe de notre système de soins qui est reconnu comme l'un des meilleurs du monde par l'Organisation mondiale de la santé et qui pourtant traverse une crise extrêmement grave à laquelle il n'est apporté aucune solution. Les praticiens sont désabusés, la crise hospitalière du privé comme du public est profonde. Le financement de l'hôpital public ne tient pas compte de l'activité réelle des établissements, ce qui engendre des reports de charges et des retards dans les investissements, auxquels s'ajoutera l'effet des trente-cinq heures.

La Cour des comptes a été sévère sur l'insincérité des comptes et sur l'opacité des fonds. La maîtrise financière des dépenses est inefficace. Des propositions doivent donc être faites. Plus encore, on ne peut que regretter que les réformes nécessaires n'aient pas été engagées alors que les conditions économiques étaient favorables.

Pour le calcul de l'ONDAM 2002, le taux de croissance est appliqué aux dépenses prévisionnelles sans tenir compte des besoins. En vérité, l'ONDAM augmente de 6,55 % par rapport à celui voté en 2001 et non de 3,8 %. Pourquoi ne pas l'énoncer clairement et pourquoi ne pas indiquer la répartition des enveloppes en masses plutôt qu'en pourcentages par rapport à des dépenses rebasées ? En tout état de cause, cet ONDAM est irréaliste. Les pays proches du nôtre connaissent tous une croissance des dépenses médicales autour de 6 %. Il faut fixer un taux réaliste et le tenir par une maîtrise médicalisée des dépenses.

Beaucoup d'autres questions demeurent : la correction des inégalités régionales, le financement des trente-cinq heures, la revalorisation des gardes et des astreintes, le développement de nouvelles molécules, l'adaptation des services d'urgence, les besoins en infirmières et l'absence d'enveloppe dédiée à la prévention sanitaire.

M. Maxime Gremetz a d'abord regretté que l'analyse de la Cour des comptes n'ait pas été prise en compte par le Gouvernement. Celle-ci fait en effet apparaître que, compte tenu des conditions économiques favorables que la France a connues, la sécurité sociale devrait être en excédent considérable. Or ce n'est pas le cas parce que les exonérations de charges patronales ont atteint des niveaux inédits (+ 43 % depuis 1999), parce que la contribution sociale sur les bénéfices des sociétés ne rapporte que 3,8 milliards de francs en 2000 et le prélèvement de 2 % sur les revenus du patrimoine seulement dix milliards de francs. Aucune étude n'a été effectuée, ni sur le contenu, ni sur l'évolution de l'assiette des cotisations ; or la part patronale ne cesse de décroître et la part salariale d'augmenter.

Contrairement à ce qui a été dit par la ministre, les travaux du conseil d'orientation sur les retraites ont montré que l'indexation des retraites sur les prix conduit à une baisse du pouvoir d'achat de celles-ci de 9 %. Le consensus n'est pas réuni au sein du conseil d'orientation sur les retraites, si ce n'est sur la nécessité de garantir le régime par répartition et de réformer les retraites sans recourir à la capitalisation ; l'augmentation de la durée de cotisations et l'indexation sur les prix sont toujours en débat. Le fonds de réserve pour les retraites nécessite également des ressources pérennes et le conseil d'orientation sur les retraites a convenu que sa gestion n'était pas conforme à ce qui était indiqué : son conseil de surveillance n'a aucun pouvoir car les trois personnes désignées au directoire décident seules.

La vigilance est de mise sur les décrets d'application de l'APA. En outre, cette réforme positive fait craindre la suppression des services communaux d'aide ménagère. En Nord-Picardie par exemple, on constate une baisse considérable du nombre d'heures de mises à disposition.

Le décret relatif à l'indemnisation des victimes par le fonds amiante n'est toujours pas paru.

L'hôpital public est au bord de l'explosion.

M. François Goulard a noté que la ministre justifiait l'attribution au FOREC de ressources de la sécurité sociale par leur caractère fiscal. Ceci ouvre donc la voie à un financement pérenne pour les trente-cinq heures par le biais de la CSG.

Il a été indiqué que le fonds de réserve pour les retraites recevrait la totalité des revenus des licences UMTS au lieu de la moitié. Mais il ne faut pas oublier que seules deux licences sur quatre ont été attribuées. En outre, on peut s'interroger sur leur perception effective compte tenu de leur montant. Enfin, et c'est le point le plus important, les prévisions économiques retenues par le Gouvernement ne tiennent aucunement compte de la crise mondiale. Il serait indispensable qu'à côté du scénario optimiste, un second soit présenté lors de l'examen du projet de loi. Personne ne peut ignorer l'impact de l'attentat du 11 septembre sur la croissance qui, en France, devrait se situer en 2002 autour de 1 %.

En réponse aux intervenants, Mme Elisabeth Guigou, ministre de l'emploi et de la solidarité, a apporté les précisions suivantes :

- Il n'y a pas eu de révision des prévisions de croissance mais le taux de croissance retenu pour l'année 2002, à 2,3 %, tient compte du ralentissement observé avant même la crise récente. Le Gouvernement ne fait pas de scénario fictif qui ne ferait que crédibiliser les inquiétudes, mais il demeure extrêmement attentif à l'évolution de la conjoncture. L'hypothèse de progression de la masse salariale pour l'année prochaine est fixée à 5 %, contre 5,8 % en 2001, ce qui montre la prudence en la matière.

- La Cour des comptes ne parle pas de manipulations des comptes. Ce sont au contraire des choix de vérité sur les créances qui ont été opérés, comme l'annulation de la créance de 130 milliards de francs sur le FOREC pour 2000, année où elle a été constatée.

- Sur l'utilisation des bénéfices de la croissance, il faut rappeler que de 1993 à 1997 les résultats ont été déficitaires et que le redressement des comptes de la sécurité sociale n'est intervenu qu'ultérieurement, malgré l'héritage de déficits colossaux. Il faut rappeler aussi que le déficit budgétaire a été réduit de cent milliards de francs, que la dette publique a été diminuée et que des réformes fondamentales et créatrices d'emplois ont été entreprises. Les bénéfices de la croissance ont été utilisés pour financer des réformes fondamentales comme la réduction du temps de travail ou la couverture maladie universelle qui permettent aujourd'hui que les résultats de la France soient meilleurs que ceux des autres pays.

- Le fonds de modernisation des cliniques privées bénéficiera de 150 millions de francs en 2001 et en 2002. Cela permettra notamment d'assurer le financement de l'accord du 4 avril dernier prévoyant un rattrapage salarial de 3,5 % afin d'assurer une harmonisation des rémunérations dans l'ensemble du secteur hospitalier.

- L'accroissement de l'enveloppe consacrée à l'hôpital public était limité à 1,7 % en 1997 ; il sera de 3,6 % en 2002. Quant à la rémunération des infirmières, le protocole signé le 14 mars 2001 va permettre une nette amélioration des rémunérations et des profils de carrière de tous les personnels. A titre d'exemple, le traitement d'une infirmière de bloc opératoire sera augmenté de 1 444 francs par mois en début de carrière et de 2 890 francs par mois en fin de carrière.

- La contribution sociale sur les bénéfices des sociétés (CSB) s'élèvera à 6 milliards de francs en 2001 et 2002 .

- Le pouvoir d'achat des pensions de retraites aura connu une croissance nette de prélèvements sociaux de 1,4 % entre 1997 et 2002, contre une baisse de 2,3 % entre 1993 et 1997.

Mme Odette Grzegrzulka s'est interrogée sur les perspectives d'amélioration du fonctionnement de la couverture maladie universelle et notamment sur :

- un éventuel relèvement du plafond de ressources conditionnant l'accès au dispositif,

- les modalités de sortie du dispositif des personnes dont les revenus sont supérieurs au plafond de ressources,

- la possibilité de faire bénéficier de la CMU les titulaires du minimum vieillesse et de l'allocation pour adulte handicapé.

M. Pascal Terrasse a tout d'abord salué la hausse du pouvoir d'achat des pensions de retraite, qui augmentera de 2,2 % en 2002 alors que la hausse du coût de la vie est évaluée à 1,5 %, et a rappelé la nécessité de faire un effort supplémentaire en faveur du minimum contributif.

Il a ensuite évoqué les difficultés soulevées par la mise en place de la réduction du temps de travail dans le secteur de l'aide aux personnes âgées dépendantes. Aussi bien en ce qui concerne les aides soignantes que les aides à domicile, le passage à 35 heures va entraîner un sérieux problème de recrutement, tant en terme de moyens -les associations ne disposant pas toujours des crédits nécessaires- que d'absence de professionnels qualifiés. Il serait donc souhaitable de pouvoir procéder par validation des acquis professionnels.

M. Maxime Gremetz a posé des questions sur :

- le statut des services communaux d'aide à domicile qui doivent être considérés comme des services prestataires ;

- les personnes relevant des GIR 5 et 6 qui craignent que la mise en _uvre de l'APA conduisent les caisses à ne plus prendre en charge les prestations à domicile qu'elles servaient habituellement au titre de l'aide extra-légale ;

- les épreuves du certificat d'aptitude à la formation à l'aide à domicile (CAFAD) où la proportion de reçus n'est que de 12 %, et dont le statut n'est pas garanti.

En réponse aux différents intervenants, Mme Paulette Guinchard-Kunstler, secrétaire d'Etat aux personnes âgées, a apporté les éléments d'information suivants :

- Les décrets d'application de la loi sur l'allocation personnalisée d'autonomie (APA) seront tous publiés d'ici début novembre 2001. Ils seront fidèles aux dispositions de la loi et tendront, comme l'avait demandé l'Assemblée nationale, à renforcer la mobilisation des associations de maintien à domicile et des services de maintien à domicile des CCAS. Il est notamment prévu que les départements soient incités à associer systématiquement ces structures lors de la mise en place de l'APA. Par ailleurs, les conventions collectives existantes seront maintenues et l'utilisation de services prestataires rendue obligatoire dans les cas de dépendance lourde.

- Il n'y a pas de désengagement des caisses de retraite en matière d'aide à domicile : elles ont simplement dû affronter un accroissement considérable des demandes, suite à l'échec de la prestation spécifique dépendance qui a conduit les personnes concernées à se détourner des départements pour s'adresser directement aux caisses.

- En ce qui concerne les problèmes liés à l'application de la réduction du temps de travail dans le secteur de l'aide aux personnes dépendantes, le taux de rémunération par la CNAV des associations d'aide à domicile sera revalorisé dès le mois de novembre prochain afin de permettre le passage aux 35 heures.

- La validation des acquis professionnels sera effectivement utilisée pour revaloriser le travail des personnes qui sont déjà sur le terrain depuis de nombreuses années. Cela n'exonérera cependant pas les associations et les services des CCASS chargés du maintien à domicile de procéder à de nouveaux recrutements.

- Il n'est pas question, pour les caisses de retraite, de se retirer du dispositif de l'aide à domicile en faveur des personnes classées en GIR 5 et 6.

- Un décret sera bientôt publié, prévoyant une réforme du CAFAD combinée avec une plus grande validation des acquis professionnels.

- Le fonds de modernisation de l'aide à domicile créé par la loi créant l'APA permettra de financer des actions de formation professionnelle. A cet égard, il faut rappeler la gravité du traumatisme vécu par les associations exclues du dispositif de la PSD.

- Les conventions collectives des services communaux d'aide à domicile seront agréées.

- Le débats parlementaire sur le présent projet de loi de financement de la sécurité sociale sera l'occasion d'ouvrir des discussions sur le seuil de ressources permettant de bénéficier de la CMU.


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