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ASSEMBLÉE NATIONALE

COMMISSION des AFFAIRES CULTURELLES,
FAMILIALES ET SOCIALES

COMPTE RENDU N° 54

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mercredi 19 septembre 2001
(Séance de 15 heures 30)

Présidence de M. Jean Le Garrec, président

SOMMAIRE

 

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- Audition de M. Jack Lang, ministre de l'éducation nationale.

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La commission des affaires culturelles, familiales et sociales a entendu M. Jack Lang, ministre de l'éducation nationale.

Le président Jean Le Garrec a salué la présence du ministre de l'éducation nationale en rappelant les principales réformes engagées dans le secteur de l'éducation au cours des derniers mois : plan en faveur des enseignements artistiques à tous les niveaux (classes à projets culturels), promotion des langues régionales, généralisation de l'apprentissage d'une langue vivante étrangère dès la classe de CM1, réforme du collège (accueil des sixièmes, relance de l'internat, réaffirmation du collège unique et aménagement de passerelles entre les différentes filières).

En outre, le taux d'encadrement des élèves est satisfaisant, avec la mise en _uvre du plan pluriannuel pour l'éducation (création de 33 200 nouveaux emplois entre 2001 et 2003) et la programmation des recrutements en vue de former près de 185 000 nouveaux enseignants dans les premier et second degrés en cinq ans. Le projet de budget pour 2002 qui confirme la priorité accordée à l'éducation (403 milliards de francs) au terme des arbitrages rendus par le Premier ministre, fait suite à une rentrée sereine, de sorte que l'on ne peut que se féliciter de la poursuite de la rénovation paisible mais en profondeur de notre système éducatif, ainsi que l'avait annoncé le ministre lors de son entrée en fonction.

M. Jack Lang a exprimé sa gratitude envers le président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales et les rapporteurs qui ont su faire entendre aux plus hautes autorités de l'Etat l'importance des choix budgétaires consacrés à l'éducation nationale. Sur ce chapitre, ils ont en effet été entendus et, en 2002, le cap des 400 milliards de francs de dotation budgétaire sera franchi. C'est ainsi que la moitié de l'effort budgétaire nouveau de l'Etat et la moitié des nouveaux postes créés sont affectées à l'éducation nationale. L'effort prévu pour 2002 est d'autant plus considérable que le budget de l'éducation est le premier budget de l'Etat, soit 30 % de son total.

Bien que l'on s'accorde à ne faire le bilan d'une rentrée scolaire qu'à la fin de l'année, on peut en effet considérer que la présente rentrée s'est bien passée :

- Les moyens nouveaux dégagés l'an dernier ont permis de réparer des inégalités sociales et géographiques.

- La volonté de transparence qui a présidé à l'établissement de la carte scolaire sur la base de critères aussi objectifs que possible est emblématique de la concertation mise en place, avec en particulier un réel partenariat entre les parents et les professeurs.

- Tirant les leçons des expériences antérieures, le ministère a anticipé le plus tôt possible, - dès le mois de novembre en réalité - la rentrée 2001. Avant la fin de l'année 2000, les répartitions de postes ont été effectuées dans les grandes masses, puis définitivement arrêtées avant l'été 2001. La préparation de la rentrée 2002 commencera donc dans quelques semaines. La mobilisation de l'ensemble des cadres du ministère a été, dans cette opération, remarquable.

M. Yves Durand, rapporteur pour avis sur le budget de l'enseignement scolaire et professionnel, a salué une rentrée réussie. Celle-ci est en partie due aux réformes en cours engagées l'an passé et à l'établissement de la carte scolaire, qui s'est déroulé de manière satisfaisante.

Le projet de budget pour 2002 est à la fois conséquent et audacieux. Aussi, plus que jamais, l'éducation nationale constitue le premier effort de la Nation. Ce budget accompagne par ailleurs les grandes orientations d'une nouvelle étape en faveur de l'évolution du système scolaire. Parmi les défis à relever, on peut mentionner :

- Le recrutement et la formation des enseignants rendus problématiques par de massifs départs en retraite dans les dix années à venir. L'expression « crise des vocations » a même été employée, probablement à tort.

- La nécessité de rattraper le retard contracté dans l'apprentissage des langues vivantes étrangères ; il convient d'accélérer la réforme engagée l'an dernier et de garantir l'égalité de cet enseignement sur l'ensemble du territoire en organisant des partenariats, notamment avec les collectivités locales.

- L'urgence de placer le collège au c_ur de la cité. A cet égard, le collège ouvert et le développement de l'internat constituent d'importants éléments de réformes. Il faut en effet que l'école soit le lieu où l'on donne un sens à la vie aux côtés des familles.

- L'évaluation des politiques de l'éducation qui doit être améliorée, grâce notamment aux travaux du Haut conseil de l'évaluation de l'école.

M. Jean-Jacques Denis, rapporteur pour avis sur le budget de l'enseignement supérieur, a confirmé que la rentrée scolaire s'était déroulée dans de bonnes conditions. En ce qui concerne le budget de l'enseignement supérieur, on ne peut que se féliciter de l'augmentation des crédits, qui se traduit par des créations de postes, notamment pour les personnels IATOS.

Il a ensuite interrogé le ministre sur les sujets suivants :

- la poursuite du plan social étudiant ;

- la situation préoccupante des services de médecine préventive universitaire et le nécessaire relèvement de la cotisation étudiante, dont le doublement (de 15 à 30 francs) avait été envisagé ;

- la révision du système de répartition des crédits de fonctionnement des universités selon les normes SAN REMO qui conduisent à sous-doter les universités de sciences humaines et sociales par rapport aux universités scientifiques ;

- le bilan des conventions signées entre l'Institut d'études politiques de Paris et certains lycées de ZEP. Cette expérience mériterait d'être étendue à d'autres grandes écoles et à d'autres académies ;

- les mesures envisagées afin de combattre l'insécurité et la délinquance en milieu scolaire. Qu'en est-il en particulier de l'éducation à la citoyenneté, notamment dans les universités ?

M. Jacques Guyard, rapporteur spécial au nom de la commission des finances sur le budget de l'enseignement scolaire et professionnel, a fait observer que la première des priorités en matière de politique scolaire était de rétablir le climat de confiance au sein de l'école. Il a estimé que cet objectif était en voie d'être atteint grâce à la politique de concertation menée par le ministre et à la réalisation des engagements pris. Ce climat de confiance est indispensable alors que le ministère s'apprête à recruter 182 000 enseignants dans le cadre du plan pluriannuel pour l'éducation qui permet d'anticiper les départs à la retraite des prochaines années.

Il a souhaité obtenir des précisions sur les récentes dispositions prises pour lutter contre la violence, l'avenir des emplois-jeunes dans l'éducation nationale, les objectifs assignés aux CES, la poursuite de la réforme des IUFM et les missions poursuivies par l'Institut national de recherche pédagogique (INRP).

Le président Jean Le Garrec a insisté sur la question de la violence à l'école et la précocité des attitudes de violence observées parfois dès la maternelle. Ce problème rend sans doute nécessaire la mise en place d'un accompagnement psychiatrique et pas seulement social.

En réponse aux intervenants, M. Jack Lang a apporté les éléments suivants :

- S'agissant du recrutement et de la formation des enseignants, il est dangereux de dramatiser. Comparé aux difficultés des systèmes éducatifs allemand ou britannique, le système français se porte bien. Contrairement à ce que la presse a pu laisser entendre, il n'existe pas de crise des vocations. Globalement, le nombre des candidats inscrits aux concours reste stable. En effet, si les vocations semblent se réduire pour l'enseignement des sciences dures - mais c'est là un constat mondial - et de certaines langues peu pratiquées, le nombre des étudiants qui se présentent au concours de professeur des écoles est, au contraire, en augmentation. Cette situation est en grande partie le résultat d'une politique volontariste. De fait, la France est le seul pays en Europe à avoir établi un plan pluriannuel de cinq ans pour le recrutement des enseignants. Ce plan constitue un signal fort à l'adresse des étudiants.

A cela s'ajoute la mise en place, cette année, d'un plan de rénovation de la formation des maîtres dans les IUFM, qui met l'accent sur l'apprentissage pratique du métier d'enseignant au-delà du seul enseignement des matières fondamentales. Enfin, le Premier ministre a approuvé le principe consistant à annoncer, pour la première fois bien en amont, le nombre de places qui seront offertes aux prochains concours d'enseignants au printemps 2002. Cette mesure qui sera rendue publique dans les prochaines semaines participe également d'une politique volontariste qui justifie le regain de confiance constaté.

- En ce qui concerne les langues étrangères, leur enseignement doit être généralisé en CM1 et en CM2 dès cette année. L'an prochain, un cap plus difficile sera franchi puisque les enfants apprendront une langue vivante étrangère dès le CE2. Cette politique n'est rendue possible que grâce à la mobilisation de l'ensemble des moyens dont dispose l'école primaire : formation continue des maîtres, accélération du recrutement des assistants en langue étrangère, mise en place d'un enseignement à dominante langue dans les IUFM, amélioration des conditions de recours aux locuteurs natifs.

- Le collège, tout comme l'école, doit être désormais un collège républicain, sollicitant la raison et l'intelligence pour faire utilement barrage au fanatisme, à l'intolérance et à l'obscurantisme.

- Pour ce qui est de l'évaluation, les procédures actuelles sont jugées satisfaisantes, notamment en ce qui concerne les élèves. Les évaluations en classes de maternelle et lors de l'entrée à l'école primaire seront néanmoins perfectionnées cette année. Le Haut conseil de l'évaluation, présidé par M. Claude Thélot, est chargé de l'évaluation des politiques globales. En la matière, l'effort à fournir porte surtout sur l'évaluation des universités, qu'il s'agisse des professeurs ou des enseignements. L'université doit en effet éviter deux écueils, la « marchandisation » et l'absence de contrôle. Bien que délicat, le processus d'évaluation constitue un stimulant qui ne peut conduire qu'au renforcement de la qualité de l'enseignement. On pourrait même imaginer que les étudiants évaluent leurs professeurs.

- En ce qui concerne la médecine universitaire, le décret du 29 août 2001 a fixé à 30 francs le montant de la part allouée à la médecine préventive dans le montant des droits d'inscription à l'université, ce qui correspond à son doublement.

- S'agissant des normes SAN REMO, M. Claude Laugénie, président de l'université de Pau, a récemment remis un rapport, dans lequel il propose de faire évoluer le système de répartition des crédits de fonctionnement. Ces propositions devraient favoriser une plus grande justice et une meilleure équité entre les différentes filières.

- L'ouverture de l'Institut d'études politiques de Paris aux étudiants de certains lycées de ZEP, dispensés de la voie normale du concours, milite en faveur de politiques volontaristes afin d'offrir la possibilité aux étudiants les plus défavorisés d'intégrer les grandes écoles et plus généralement l'ensemble de l'enseignement supérieur. La réforme actuelle des universités devrait permettre d'aller dans le sens d'une plus grande ouverture. Ainsi, le projet de loi de finances pour 2002 prévoit une extension du plan social étudiant avec la création de 12 000 bourses sur critères sociaux en faveur des étudiants poursuivant un DESS.

- S'agissant de la montée de la violence dans les établissements scolaires, il faut rappeler que ce problème est certes très préoccupant mais que la France n'est pas le seul pays à être confronté à un tel phénomène. Les zones urbaines où se développent les actes des violence y compris à l'école ne sont pas parvenues à sortir d'une logique de ghetto. Les banlieues de la région parisienne notamment doivent aujourd'hui relever le défi d'un retour au calme et à la sérénité. Des mesures de lutte contre la violence ont néanmoins été prises : les ministres de l'intérieur, de la justice, de la jeunesse et de la défense ont été réunis au ministère de l'éducation nationale en juin dernier afin de renforcer un dispositif de vigilance applicable dès la rentrée 2001 dans les établissements de la région parisienne. Dans les départements concernés, les rencontres entre les préfets, les élus locaux, les chefs d'établissements et les recteurs d'académies ont permis de sensibiliser chaque acteur à ce problème majeur.

Dès qu'un incident survient dans tel ou tel établissement, les administrations compétentes, immédiatement alertées, sont ainsi en mesure de réagir de manière efficace et concertée. Ces nouvelles méthodes de travail ont fait la preuve de leur utilité ; à tel point qu'une récente circulaire vient d'étendre le dispositif à l'ensemble du territoire national. Dans le cadre d'une mobilisation accrue de tous les responsables locaux et nationaux, il serait d'ailleurs souhaitable que les députés prennent une part active aux manifestations qui se dérouleront au cours de la première quinzaine d'octobre sur le thème de « l'école du respect ». Aujourd'hui plus que jamais, l'école doit rester un lieu préservé où règnent la tolérance et le respect des règles de vie commune. A ce sujet, il faut plaider pour que l'autorité des parents comme celle des maîtres soit restaurée et consolidée. Les affrontements des uns contre les autres ne conduisent qu'à les affaiblir chacun dans leur rôle.

- Concernant les emplois-jeunes, le Gouvernement a déjà annoncé sa volonté de pérenniser, non pas les personnes elles-mêmes, mais les fonctions qu'elles occupent. L'éducation nationale a tout à gagner à ce qu'un maximum de jeunes, qui ont acquis une expérience non négligeable, continuent d'exercer leurs missions. De fait, une fraction supplémentaire de mille emplois-jeunes a été affectée à l'insertion des jeunes handicapés. Le rôle de ces aides éducateurs est donc majeur. Aussi des mesures de formation et d'intégration leur seront-elles proposées, par la voie d'un concours spécifique de recrutement.

- S'agissant de la recherche pédagogique, il faut regretter que ce secteur ait été dans le passé insuffisamment pris au sérieux. Un rapport préparé par M. Antoine Prost sur la recherche en éducation va être rendu public très prochainement. Certaines des préconisations qui y figurent méritent d'être étudiées de près.

M. Georges Colombier a fait part de deux situations particulières rencontrées au niveau local :

- la situation d'une école maternelle dans le département de l'Isère qui a dû fermer cette année, ce qui a provoqué le grand mécontentement des parents concernés, puisque les classes existantes accueillent jusqu'à vingt-huit élèves ;

- la montée des revendications de certains syndicats d'enseignants jugeant anormal que les enseignants soient contraints d'assurer jusqu'à vingt-deux heures de service alors que seules dix-huit heures sont en principe requises.

M. Pierre-Christophe Baguet a fait les observations suivantes :

- Il est inadmissible que le statut des directeurs d'école du premier degré n'ait toujours pas fait l'objet d'une réforme en profondeur, tandis que perdure depuis plus d'un an une grève administrative. Les directeurs d'école se plaignent en effet de ne plus avoir les moyens d'être de véritables animateurs de la vie de leur établissement. Un nombre de 4 000 postes non pourvus a même été avancé.

- On peut déplorer que les parents d'élèves ne soient toujours pas considérés comme des acteurs à part entière, en dépit des annonces faites à ce sujet. Certains recteurs et inspecteurs d'académies agissent au mépris de toute concertation vis-à-vis des parents d'élèves.

Mme Hélène Mignon a formulé les remarques suivantes :

- Dans certains collèges des zones d'éducation prioritaire, le manque d'infirmières et d'assistantes sociales devient criant. On observe que les familles les plus aisées ont tendance à quitter de nombreux quartiers dits difficiles, dans lesquels ne restent que celles qui rencontrent le plus de difficultés sociales, financières voire psychologiques. Il est urgent d'apporter une aide à ces familles, d'ordre psychologique dans certains cas d'enfants très perturbés. En effet, les enseignants ne peuvent pas toujours jouer le rôle de détecteurs de la violence. Ils ne sont pas formés pour faire face à des phénomènes qui dépassent le seul cadre de l'école.

- L'école a un rôle fondamental d'intégration de tous les enfants dans la société et les valeurs de la République. Les parents de familles d'origine étrangère ne maîtrisant pas toujours correctement la langue française comptent sur les écoles pour permettre à leurs enfants de s'intégrer le mieux possible dans la société. Cette mission essentielle ne doit à aucun moment être perdue de vue par les responsables des établissements.

M. Germain Gengenwin a fait les remarques suivantes :

- Il semblerait que certains financements, gérés par le ministère de la coopération en liaison avec le ministère de l'éducation nationale, et destinés à soutenir des jumelages entres des écoles de l'hémisphère nord et de l'hémisphère sud, soient aujourd'hui remis en cause.

- Les personnels ATOS expriment aujourd'hui leur mécontentement à l'égard de la façon dont la réduction de leur temps de travail à trente-cinq heures pourrait leur être appliquée.

- Il est choquant de constater que de jeunes enseignants se voient affectés pour leurs premiers postes dans des académies réputées difficiles, comme par exemple celle de Créteil. Ces jeunes, qui sont souvent très impliqués dans des activités associatives diverses dans leurs lieux d'habitation d'origine, se trouvent ainsi brutalement déracinés. Il est d'ailleurs évident qu'ils tenteront d'obtenir rapidement leur mutation dans d'autres académies. Au surplus, cela n'encourage pas les vocations.

M. Michel Herbillon a formulé les remarques et interrogations suivantes :

- On peut avoir une vision plus nuancée de la situation de l'académie de Créteil que celle précédemment décrite.

- Le nombre des élèves arrivant en sixième sans maîtriser la lecture, le calcul et les mathématiques est préoccupant pour un pays développé comme le nôtre. L'école a le devoir de transmettre ces acquis fondamentaux.

- La lutte contre la violence à proximité mais également à l'intérieur des établissements scolaires constitue une véritable urgence civique. On n'a pas aujourd'hui le sentiment d'une amélioration de la situation mais au contraire celui de son aggravation. On ne peut que souhaiter que les mesures annoncées ou mises en place portent leurs fruits, mais force est de constater qu'elles sont trop souvent des incantations sans résultat. En ce qui concerne le dispositif de concertation départementale, l'expérience montre que les maires des grandes agglomérations n'ont pas tous été sollicités à cet effet.

- Il faut faire preuve de davantage d'audace en matière d'éducation civique ; l'institution scolaire peut et doit jouer un rôle dans la lutte contre l'incivisme, et ce dès l'école maternelle.

M. Edouard Landrain a tout d'abord regretté l'absence de débat et de données chiffrées sur le budget de l'éducation nationale. Il s'est ensuite interrogé sur trois sujets relevant de la compétence de la commission et liés aux missions de l'éducation nationale, la santé, le sport et la culture :

- L'insuffisance de moyens est patente dans le secteur de la médecine scolaire, où l'on manque notamment d'infirmières.

- S'agissant de l'utilisation des équipements sportifs, où en est-on du défraiement des collectivités territoriales mettant à disposition leurs installations ? On ne peut en effet que noter la disparité des situations selon les départements.

- Quelle est la situation en matière d'enseignements artistiques ? Le sentiment dominant est que les choses ne vont pas bien, en dépit des annonces récentes.

Enfin, il a souhaité obtenir des précisions sur le devenir des nombreux emplois-jeunes présents au sein de l'éducation nationale : la consolidation de ces emplois est-elle contenue dans les chiffres de création d'emplois annoncés ?

Mme Catherine Génisson a tout d'abord évoqué la situation des directeurs d'école. Plus encore qu'une amélioration de leur grille indiciaire, ces derniers souhaitent obtenir des décharges de service supplémentaires afin de pouvoir remplir leur rôle d'animation, en particulier dans les petites structures.

La création de bourses permettant à des élèves brillants de milieux défavorisés d'accéder à des études de troisième cycle est une bonne mesure. Le dispositif semble cependant surtout bénéficier aux disciplines scientifiques. Est-il envisagé de l'étendre aux autres filières ?

M. Jean-Pierre Baeumler a relevé d'emblée les efforts consentis dans le projet de loi de finances pour 2002, avec en particulier des mesures exceptionnelles pour l'accueil des enfants handicapés. De nombreuses créations de postes sont également prévues dans les lycées professionnels ; cette mesure qui accompagne la remontée des effectifs devra s'inscrire dans la durée. Nombre de revendications catégorielles ont, en outre, été satisfaites même si un effort reste à accomplir en faveur des PLP1 (professeurs de lycées professionnels de premier grade) retraités qui demandent leur intégration dans le corps des PLP2 avec reconstitution de carrière.

Il s'est ensuite enquis de la situation des enseignements artistiques et culturels ainsi que des moyens affectés à l'éducation physique et sportive en vue d'en faire une discipline à part entière.

M. Bruno Bourg Broc a posé les questions suivantes :

- L'objectif de généralisation de l'enseignement des langues étrangères dans le premier degré, annoncé il y a dix-huit mois et qui se borne en réalité pour cette rentrée aux classes de CM1/CM2 est-il bien réaliste ? Quelle est la part de la langue anglaise dans ce dispositif ?

- Une mission d'information de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales a formulé quarante-cinq propositions pour lutter contre la violence à l'école. Quelles suites entend-on leur donner ? Ne conviendrait-il pas, par ailleurs, lorsque des mesures sont adoptées sur le fondement de ses travaux, comme « l'école du respect », d'en rappeler l'origine ?

- Quelles sont les dispositions prévues pour assurer la sécurité à l'intérieur des universités ?

- Le ministre a sévèrement jugé les réalisations antérieures dans le domaine de l'innovation pédagogique. Un groupe de travail avait cependant formulé des propositions en la matière au milieu des années 80. Quelles suites ont été ou seront données à ces propositions ?

- Serait-il possible de disposer de données chiffrées et d'un bilan des conséquences sur la vie quotidienne dans les écoles du conflit des directeurs d'établissements ? Quelles seront les propositions du ministre à ce sujet ?

- Quelles seront les conséquences de la mise en place des trente-cinq heures pour le monde éducatif et quelles propositions lui fera-t-on en la matière ?

M. Jean Valleix a formulé plusieurs observations :

- Il serait souhaitable d'éviter les expérimentations pédagogiques dans les lycées français à l'étranger, où les enfants se trouvent dans une situation un peu particulière puisqu'ils n'ont pas la possibilité d'utiliser la langue française dans leur vie quotidienne.

- La montée de la violence à l'école peut être regardée comme un échec pédagogique majeur. Si la famille, ruinée par la perte des repères, se défausse de plus en plus sur l'école, celle-ci est aujourd'hui obligée de s'en remettre à la police et à la justice pour régler les problèmes qu'elle ne parvient pas à endiguer.

- L'enseignement de l'histoire devrait être renforcé car un peuple qui connaît bien son passé est un peuple plus solide et plus ouvert.

- Le renforcement de l'enseignement des langues à l'école primaire est une excellente initiative à condition de garantir la continuité de l'enseignement au cours des différents cycles scolaires.

Le ministre a exposé son volontarisme dans la progression vers une « école du respect » ; cette affirmation est néanmoins contradictoire avec le laxisme qu'il prêche en matière de consommation de drogues.

M. Marcel Rogemont s'est tout d'abord félicité de l'action rapide et concrète du ministre en faveur du développement de l'éducation et des pratiques artistiques à l'école. Il a ensuite évoqué la délicate situation des directeurs d'école. Dans bien des cas, ce sont des instituteurs tout juste sortis de l'IUFM qui sont nommés à des postes, qui réclament pourtant une certaine expérience. Dans d'autres cas, les instituteurs préfèrent abandonner leur poste de directeur pour devenir remplaçants : grâce aux primes, la rémunération est identique alors que la charge de travail est fortement diminuée. Les directeurs d'école connaissent aujourd'hui, tout à la fois, un problème de temps, d'argent et de définition de leurs missions.

M. Claude Goasguen a regretté que l'élaboration de la carte scolaire pour les collèges et les lycées se fasse de façon coercitive, dans un esprit peu conforme à l'orientation d'ouverture et de concertation que le ministre souhaite donner au fonctionnement de l'éducation nationale. Pour ce qui concerne plus particulièrement le rectorat de Paris, l'application des dérogations s'est faite de façon très rigide, sans que les critères de choix soient toujours explicités. Il n'est pas question de supprimer la carte scolaire, mais il serait souhaitable d'en assouplir les modalités d'élaboration et d'application et, pourquoi pas, d'y associer les élus et les parents d'élèves.

En réponse aux intervenants, M. Jack Lang, ministre de l'éducation nationale, a donné les informations suivantes :

- Le problème des directeurs d'école n'a jamais été véritablement traité jusqu'à aujourd'hui. Les décisions relatives aux décharges horaires et aux nominations ont été laissées au libre choix des inspecteurs d'académies, ce qui n'a pas permis d'élaborer une politique harmonieuse sur l'ensemble du territoire. La question est à l'étude depuis un an, à la suite de la grève administrative décidée par les directeurs. Il s'agit de trouver un équilibre entre une juste reconnaissance du métier de directeur d'école, le nécessaire encadrement des élèves et la bonne gestion des crédits budgétaires. La discussion est en cours. Une première série de propositions a été présentée et l'on peut espérer s'acheminer vers une prochaine résolution du problème.

Sur ce sujet, M. Pierre-Christophe Baguet s'est étonné que certains rectorats s'opposent à ce que des collectivités locales assurent une compensation financière des décharges accordées aux directeurs d'école ou mettent à disposition des secrétaires administratives à mi-temps.

M. Jack Lang, ministre de l'éducation nationale, a reconnu qu'il y avait certaines résistances, notamment syndicales à une telle participation des collectivités locales. Rien n'interdit néanmoins à une commune de contribuer à l'amélioration des conditions de fonctionnement des établissements scolaires de son territoire. Il serait cependant délicat pour le ministre de l'éducation nationale de prendre à ce sujet une décision de portée nationale.

- En ce qui concerne la médecine scolaire, des efforts importants ont été faits ces dernières années pour augmenter le nombre d'infirmières et d'assistantes sociales présentes dans les écoles. Cet effort sera prolongé dans le budget 2002, notamment pour les postes de médecins. En collaboration avec le ministère de la santé, un plan de mesures novatrices a été préparé et devrait être présenté dans les prochaines semaines.

- La question de la violence à l'école, qu'il convient de ne pas dramatiser, doit être abordée de manière globale en tenant compte des autres instances de socialisation.

- Les négociations relatives aux trente-cinq heures sont en cours dans un climat de responsabilité.

- S'agissant de l'insuffisante maîtrise de la langue française qui concerne de 15 à 18 % des élèves rentrant en sixième, de nombreuses mesures ont été prises, en particulier en grande section maternelle où l'expression orale est évaluée, à l'entrée en cours préparatoire où sera mesurée dès l'an prochain l'étendue du vocabulaire de chacun et tout au long du premier degré par la validation des acquis en matière de lecture et d'écriture. Les statistiques les plus impressionnantes proviennent de l'entrée en cours préparatoire où la maîtrise du vocabulaire varie de 600 à 1 600 mots, ce qui est significatif de l'ampleur des inégalités préscolaires. Des mesures de remise à niveau des élèves à l'entrée en sixième ont également été prises afin de permettre à tous de maîtriser la langue commune. A ce propos, on ne peut qu'admirer le travail accompli par certains enseignants en faveur de l'intégration des enfants étrangers primo-arrivants. C'est là une fierté de l'école de la République ;

- Il est nécessaire de revoir la méthode et le contenu de l'éducation civique car les horaires sont loin d'être insuffisants. Sans doute est-il souhaitable, comme le disait Jules Ferry, de s'appuyer sur les faits eux-mêmes pour déboucher sur une éducation civique plus concrète.

- M. Laurent Cathala a été nommé, par le Premier ministre, parlementaire en mission afin de faire le point sur l'utilisation des équipements sportifs appartenant aux collectivités locales par les établissements scolaires.

- Il est important de souligner qu'à côté des traditionnelles bourses de mérite destinées aux élèves de cycles préparatoires aux grandes écoles, de nouvelles bourses attribuées en fonction de critères sociaux sont prévues dans le projet de loi de finances pour 2002 en faveur des étudiants en DESS ou DEA, sans discrimination de filière.

- Les 25 000 classes à projets artistiques et culturels (PAC) créées cette année connaissent un vif succès.

- Il est prématuré de dresser un bilan de l'enseignement des langues dans le premier degré, la généralisation prévue cette année en CM1 s'étendra l'année prochaine au CE2. Ce cap sera le plus difficile à franchir. Dans ce domaine, la continuité au cours de la scolarité est en effet primordiale.

- Il est nécessaire de favoriser l'information sur la consommation des drogues à l'occasion des diverses manifestations de jeunes et il apparaît souhaitable d'ouvrir un débat dépassionné et adulte sur ce sujet.

- Les critères présidant à l'élaboration de la carte scolaire doivent être aussi objectifs que possible et la procédure doit associer les élus. A ce sujet, une réflexion conduite par M. Hébrard est en cours sur la mixité sociale.


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