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ASSEMBLÉE NATIONALE

COMMISSION des AFFAIRES CULTURELLES,
FAMILIALES ET SOCIALES

COMPTE RENDU N° 9

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mardi 30 octobre 2001
(Séance de 16 heures 15)

Présidence de M. Jean Le Garrec, président puis de

M. Jean-Paul Durieux, vice-président

SOMMAIRE

 

pages

- Loi de finances pour 2002 :

 

- Avis communication (M. Didier Mathus, rapporteur pour avis)

- Avis travail et emploi (M. Jean-Claude Boulard, rapporteur pour avis).

- Avis formation professionnelle (M. Patrick Malavieille, rapporteur pour avis).

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La commission des affaires culturelles, familiales et sociales a examiné pour avis, sur le rapport de M.  Didier Mathus, les crédits de la communication pour 2002.

Le rapporteur pour avis a tout d'abord indiqué qu'au-delà des aspects strictement budgétaires, son avis étudiera, comme il est désormais d'usage dans les avis budgétaires de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, un aspect particulier de la politique publique en matière de communication : le rôle que le groupe France Télévision va être amené à jouer dans la télévision numérique de terre (TNT).

S'agissant des crédits de la communication pour 2002, le budget de l'audiovisuel public, en hausse de 3,1 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2001, confirme la politique de redressement engagée depuis 1998. Il s'élève à 21,26 milliards de francs. En outre, la part de financement public progresse de plus de 438 millions de francs pour atteindre près de 77 % du budget total. Depuis 1998, la ressource publique a ainsi augmenté de 31,4 %, tout particulièrement grâce au remboursement intégral des exonérations de redevances décidées par l'Etat.

Dans le même temps, le financement assis sur des recettes publicitaires a enregistré une baisse de plus de 500 millions de francs. Cette évolution explique le rééquilibrage des budgets de l'audiovisuel public ainsi que le desserrement de la contrainte publicitaire sur la politique de programmes.

Le budget de l'audiovisuel public pour 2002 traduit en définitive l'effort significatif de l'Etat en faveur du redressement du financement public des organismes et, par voie de conséquence, de la restauration du rôle de l'Etat en tant qu'actionnaire. En outre, les relations entre les organismes de l'audiovisuel public et l'Etat sont désormais placées sous le signe d'une nouvelle régulation grâce à la signature de contrats d'objectifs et de moyens. Cette double évolution marque donc une volonté de réorganisation juridique et financière de l'audiovisuel public.

Les aides à la presse écrite, quant à elles, atteindront 445,71 millions de francs en 2002, hors abonnements de l'Etat à l'AFP, ce qui représente une croissance de 7,2 % par rapport à 2001. Cette progression est principalement assise sur l'augmentation attendue des ressources du fonds de modernisation de la presse, de l'ordre de 30 millions de francs.

Les aides directes à la presse sont reconduites à leur niveau de 2001, soit 255,71 millions de francs, et ce malgré l'achèvement de plusieurs programmes d'aide à caractère pluriannuel. Cette reconduction a pour conséquence de dégager un important potentiel de redéploiement au bénéfice d'une nouvelle aide à la distribution des quotidiens nationaux d'information politique et générale. Cette nouvelle aide a néanmoins été contestée par la commission des finances lors de l'examen des crédits pour 2002.

Le rapporteur pour avis a ensuite fait observer qu'au-delà de l'année 2002, le budget de la communication est également destiné à préparer l'avenir de la télévision publique dans le nouveau contexte de la télévision numérique de terre (TNT).

Le débat relatif à la TNT prend de l'ampleur depuis quelques mois et les prises de position des uns et des autres, sur lesquelles il n'est pas possible de s'attarder, montrent que l'évolution en cours suscite, sans surprise, les réticences des opérateurs privés en place, en particulier TF1 et M6. Pourtant, l'avènement de la TNT est irréversible : la diffusion représente en effet le dernier maillon de la chaîne de production audiovisuelle à n'avoir pas fait l'objet d'une numérisation.

En multipliant par six le nombre de chaînes hertziennes disponibles, ce projet constitue véritablement une chance pour la démocratie et pour la télévision, dont il va sensiblement enrichir les contenus. On ne peut donc qu'approuver les efforts du Gouvernement en faveur du développement de la TNT ainsi que sa volonté de donner à la télévision publique un rôle important dans ce développement.

Les obstacles techniques qui ont été avancés ne semblent pas insurmontables :

- Une intervention sur les antennes sera nécessaire dans 48 % des cas en ce qui concerne l'habitat collectif et dans 30 % des cas pour les maisons individuelles. Le coût de cette intervention représentera respectivement 150 francs par foyer en habitat collectif et 1 000 à 2 000 francs pour les antennes individuelles.

- Parallèlement à cette adaptation, l'achat d'un décodeur coûtera entre 1 000 F et 1 500 F.

Dans la perspective de son développement numérique terrestre, le service public prépare actuellement son projet éditorial qui s'organisera autour de trois « chaînes » :

- une chaîne d'information en continu chargée de proposer une information indépendante et fiable ; un tel projet dispose d'une vraie légitimité au sein de l'offre publique dans une période où l'indépendance de l'information est un bien rare ;

- une « chaîne » dont l'actuel nom de code est « France 4 » et qui sera consacrée à la rediffusion de programmes à dominante familiale et culturelle ; cette chaîne sera détenue à 49 % par Arte et à 51 % par le groupe France Télévision ;

- un réseau de huit télévisions numériques régionales regroupées sur le même canal, préparé par France 3. Ce projet permettra de démultiplier l'offre régionale de la chaîne en tirant partie de son installation sur tout le territoire.

Le projet numérique de France Télévision s'inscrit dans le cadre du contrat d'objectifs et de moyens qui liera ce groupe à l'Etat et sera signé le 14 novembre prochain. Sur le plan financier, l'Etat doit apporter une dotation en capital de un milliard de francs prélevée sur le compte d'affectation spéciale des produits de privatisation. En contrepartie de cet appui financier, le groupe France Télévision s'est engagé à réorganiser son mode de fonctionnement afin de dégager des gains de productivité et des économies. Le contrat d'objectifs et de moyens fixera également le taux d'évolution des dotations en redevance jusqu'en 2006.

Les opérateurs historiques de la télévision hertzienne étant plutôt méfiants et les nouveaux entrants enthousiastes mais fragiles, France Télévision représente une vraie chance pour le développement de la TNT. Réciproquement le numérique de terre constitue une occasion de modernisation inédite pour France Télévision.

Enfin, l'avènement du numérique va permettre à La Cinquième de mettre véritablement en _uvre sa vocation de chaîne éducative par la constitution d'une plate-forme de services multimédias pour l'enseignement et la formation en ligne en partenariat avec le Centre national d'enseignement à distance (CNED) et le Centre national de documentation pédagogique (CNDP). La Cinquième-Education a ainsi fait l'objet d'un accord avec le ministère de l'éducation nationale, en dépit de certaines résistances observées parmi les enseignants.

Ce projet permettra de doter la France d'une véritable télévision éducative et de rattraper ainsi les autres pays européens. Il mérite donc le soutien de l'ensemble des parlementaires.

Le rapporteur pour avis a conclu en donnant un avis favorable à l'adoption des crédits de la communication pour 2002.

Un débat a suivi l'exposé du rapporteur pour avis.

M. Jean-Paul Durieux, président, a souligné la continuité et la cohérence du budget 2002 avec la volonté de développer le financement public au sein de l'audiovisuel public affirmée depuis plusieurs années.

M. Patrice Martin-Lalande a tout d'abord indiqué qu'il ne partageait pas l'optimisme du rapporteur sur le budget de la communication pour 2002, en dépit de quelques éléments positifs, comme le règlement, intervenu depuis l'année dernière, du statut social et fiscal des correspondants de la presse écrite. Il a ensuite posé les questions suivantes :

- S'agissant du financement de la télévision publique, on peut se demander comment vont être traduites en France les dispositions arrêtées par la Commission européenne en vue de clarifier les relations entre télévision et dotations publiques notamment en ce qui concerne la définition des missions du secteur public audiovisuel et l'organisation d'un contrôle de l'adéquation des dotations publiques à ces missions par un organisme indépendant.

- En ce qui concerne le développement de la TNT, les responsables de la télévision publique estiment leurs besoins financiers à 1,5 milliard de francs. Quels seront par conséquent les financements complémentaires envisagés au-delà de la dotation en capital de un milliard de francs ? Sera-t-il en particulier possible pour la télévision publique de conclure des alliances avec le secteur privé ?

Par ailleurs, on doit s'interroger sur les critères retenus par le CSA en ce qui concerne la définition des normes de diffusion sur la TNT. Le rapport d'inventaire des fréquences disponibles rendu en septembre ne fait aucune place à la mobilité et à la portabilité, au prétexte qu'elles nécessitent des puissances de diffusion trop importantes alors que la norme de 4 MegaBits retenue est déjà bien supérieure à ce qui est nécessaire comme l'ont démontré plusieurs expérimentations.

Enfin, il faut rappeler que la TNT n'est pas systématiquement un succès, comme le montre son échec en Grande-Bretagne.

- Dans le secteur de la presse écrite, qu'en est-il du plan de modernisation des NMPP présenté l'année dernière par M. Lagardère ?

- Concernant l'AFP, l'augmentation des abonnements de l'Etat n'est pas suffisante pour lui accorder les moyens de son développement, en particulier sur le plan international.

M. Patrice Martin-Lalande a ensuite fait part de ses inquiétudes quant au développement de l'internet en France. De fait, la loi sur la société de l'information ne verra pas le jour au cours de la présente législature. Cela n'est pas étonnant, ce texte étant trop volumineux. Dans ces conditions, certaines mesures urgentes ne pourront être prises en compte, comme par exemple celles qui concernent la responsabilité des hébergeurs de sites. La censure du Conseil constitutionnel sur les dispositions les concernant dans la loi du 1er août 2000 a créé un vide juridique dangereux.

Une commission travaille par ailleurs actuellement sur le problème des droits d'auteur des journalistes en ligne. Il s'agit là aussi d'une question urgente. A cet égard il est regrettable qu'un amendement présenté par lui-même en première partie de la loi de finances, qui proposait d'appliquer un taux de TVA égal pour la presse en ligne et la presse papier ait été rejeté. De façon générale, le contexte juridique des aides à la presse, hérité des années 50, est inutilement contraignant. Ainsi, une entreprise de presse qui crée des filiales pour faire un site internet ou une TV sur le Web risque de perdre la possibilité de bénéficier d'aides publiques.

Enfin, la France rencontre aujourd'hui des problèmes pour l'accès des particuliers à la connexion illimitée. Du fait des positions rigides de France Télécom, les opérateurs ne peuvent pas proposer un forfait d'interconnexion illimitée à moins de 300 francs, alors que ce coût est de 150 francs en Angleterre. Le coût de la connexion ne doit pas être un frein au développement de l'internet alors que la France connaît en la matière un retard déjà important.

M. Pierre-Christophe Baguet, tout en reconnaissant que le budget de la communication pour 2002 comportait des éléments positifs, a regretté son manque de transparence sur les points suivants :

- le contenu des contrats d'objectifs et de moyens entre l'Etat et les sociétés nationales de programmes, et notamment celui de France Télévision qui doit être signé le 14 novembre prochain ;

- le coût de la collecte de la redevance, qui devait faire l'objet d'une enquête du ministère des finances ;

- le bilan des dispositifs d'aide à la presse arrivés à échéance cette année ;

- le coût de l'extension de l'exonération de la redevance votée par l'Assemblée nationale et la compensation possible de cette exonération par le budget de l'Etat ;

- le coût de l'application des 35 heures dans le service public audiovisuel.

Pour ce qui concerne la télévision numérique terrestre, on peut s'inquiéter de l'économie générale du projet ; les études, notamment relatives au coût, ne sont pas suffisamment précises. En outre, les conséquences du développement du numérique de terre sur le service public ne sont pas connues. Ce sujet devrait faire l'objet d'une étude et d'un débat à l'Assemblée nationale.

En réponse aux intervenants, le rapporteur pour avis a donné les précisions suivantes :

- En ce qui concerne le financement de la télévision publique par des dotations publiques, les négociations avec Bruxelles ont notablement progressé et la situation s'est bien améliorée, pour la France grâce à l'adoption de la loi du 1er août 2000 et, de façon générale, grâce à la mobilisation de certains Etats membres, particulièrement ceux du Nord de l'Europe.

- Il n'y a pas lieu de parler d'échec de la TNT en Grande-Bretagne puisque 1,2 million de personnes y sont abonnées. Le fait que le numérique terrestre était présenté comme concurrent du câble et du satellite a par contre nuit à l'équilibre économique du bouquet.

- Pour ce qui concerne la situation de l'AFP, il faut signaler que, outre l'augmentation du montant de ses abonnements, l'Etat s'est engagé à lui verser un prêt participatif de 100 millions de francs avec différé d'amortissement de deux ans, remboursable en 2007.

- La censure du Conseil constitutionnel, sur la responsabilité des hébergeurs de sites internet a effectivement créé un vide juridique dommageable. Il convient de s'interroger sur l'opportunité de trouver une solution législative avant la fin de la session.

- Un travail satisfaisant a été effectué par l'Etat et France Télévision sur le futur contrat d'objectifs et de moyens. Le rapport pour avis anticipe sur son contenu en livrant les modalités de financement du développement numérique du groupe.

- En ce qui concerne l'extension de l'exonération de redevance, il faut garder à l'esprit que si l'Etat est tenu, par la loi, de compenser, plus le Parlement décidera d'exonérer et plus la redevance deviendra coûteuse pour le budget de l'Etat. Cela ne pourra que renforcer les arguments de ceux qui souhaitent sa suppression.

- Les informations relatives à l'application de la réduction du temps de travail dans le secteur audiovisuel public sont effectivement rares et difficiles à obtenir en raison de la traditionnelle complexité des questions de personnel dans ce secteur.

- S'agissant du débat général sur le numérique terrestre, France Télévision a bien préparé son projet et répond aux besoins essentiels. La question du calendrier d'appel à candidatures et de sélection des opérateurs relève du CSA. On peut souhaiter qu'il ne prenne pas trop de retard par rapport à la date de lancement fixée initialement. La véritable interrogation réside plutôt dans l'adéquation des projets préparés par les opérateurs privés - qui misent sur une offre thématique - et les futures utilisations possibles de la TNT.

M. Michel Françaix a relevé que l'opposition donnait raison au rapporteur. On peut en effet noter qu'aucune des critiques formulées ne porte sur le budget qui est excellent et ne peut qu'être approuvé.

Les interrogations qu'entraîne le passage de six à plus de trente chaînes hertziennes sont légitimes. Il est néanmoins étonnant que l'opposition craigne aujourd'hui que l'on aille trop vite alors qu'elle a, pendant des années, critiqué la lenteur des avancées : serait-ce que le bon rythme a été trouvé ?

M. Pierre-Christophe Baguet a souligné que la bataille sur les standards de diffusion en numérique de terre ne pouvait être réduite à un débat technique, ni même économique. Cette question, qui avait été laissée ouverte par la loi, devrait faire l'objet d'un véritable débat politique.

Le rapporteur pour avis a souscrit à cette dernière observation. La qualité du volet numérique de la loi du 1er août 2000 aurait sûrement été moindre sans l'intervention du Parlement. Il ne faut pas se désintéresser de ce dossier au motif que la loi est votée. Certains points ont été laissés en suspens, comme par exemple la question de la distribution commerciale des nouveaux services : les parlementaires doivent pouvoir intervenir dans le débat. Le passage à plus de trente chaînes sera délicat mais au bout du compte positif pour le paysage audiovisuel et le télespectateur. Le débat ne s'achèvera en fait que lorsqu'aura été fixée la date d'extinction de la diffusion en analogique.

Conformément aux conclusions du rapporteur pour avis, la commission a ensuite donné un avis favorable à l'adoption des crédits de la communication pour 2002.

*

La commission a ensuite examiné pour avis, sur le rapport de M. Jean-Claude Boulard, les crédits du travail et de l'emploi pour 2002.

M. Jean-Claude Boulard, rapporteur pour avis, a indiqué en premier lieu que le projet de budget de l'emploi s'élevait pour 2002 à 110,1 milliards de francs soit 16,77 milliards d'euros, ce qui correspond à une baisse de 1,6 % par rapport à la loi de finances pour 2001. Cette baisse globale des crédits s'explique par un certain nombre de facteurs prévisibles comme par exemple la diminution du nombre de bénéficiaires de l'allocation spécifique de solidarité (ASS) ou le fait que les entreprises soient de plus en plus responsabilisées dans le financement des dispositifs de préretraite.

Ce projet de budget permet la poursuite des grandes priorités fixées par l'actuel Gouvernement en matière de politique de l'emploi. Afin d'accompagner l'évolution de la conjoncture économique tout en soutenant le marché de l'emploi, les dispositifs des contrats aidés continuent d'être mobilisés. Le Gouvernement a ainsi décidé d'ouvrir 80 000 places nouvelles en contrat emploi solidarité (CES) au deuxième semestre 2001, ces contrats devant s'ajouter aux 260 000 initialement budgétés pour cette année. Il faut rappeler que l'année passée, de nombreux observateurs avaient à juste titre plaidé pour l'augmentation des places en CES. Ce souhait a donc fini par être réalisé mais avec quelque retard.

Les contrats emplois consolidés (CEC) font également partie des outils privilégiés en matière d'insertion dans le monde du travail des publics fragilisés. Les crédits accordés sont passés de 4,1 milliards de francs en 1999 à 6,5 milliards de francs en 2002. Il est certain qu'une durée relativement longue de ces contrats est de nature à maximiser les chances d'insertion de leurs bénéficiaires. S'agissant des contrats initiative emploi (CIE), 90 000 conventions devraient être signées en 2002. Ce dispositif a été opportunément recentré sur des publics prioritaires et notamment les personnes au chômage depuis plus de deux ans.

D'une manière générale, il serait souhaitable que soient mis en place des contrats d'insertion à durée indéterminée au bénéfice des personnes se heurtant à de grandes difficultés d'intégration dans le monde du travail. Ces contrats pourraient opportunément être proposés aux personnes âgées de plus de cinquante ans ou handicapées. En effet, chacun sait que l'insertion durable d'un individu rencontrant des problèmes de socialisation importants par exemple ne peut pas toujours être effective au bout de seulement cinq années de contrat aidé.

En 2002, le Gouvernement met par ailleurs en place de nouveaux outils de la politique de l'emploi ; on peut citer la mise en place du système de bourses d'accès à l'emploi prévu par l'article 69 du projet de loi de finances pour 2002. Ces bourses sont destinées aux jeunes du programme Trajet d'accès à l'emploi (TRACE) qui ne bénéficient pas toujours de ressources acceptables pendant la durée de leur parcours d'insertion. Il s'agit d'assurer à ces jeunes une relative stabilité financière susceptible de les aider à construire un projet personnel à long terme. De même, le Gouvernement a mis en place le nouveau dispositif de l'EDEN (encouragement au développement d'entreprises nouvelles). Ce mécanisme, lancé à l'occasion de l'élaboration du programme des emplois-jeunes, constitue une façon pour le Gouvernement de favoriser chez les jeunes les initiatives créatrices de richesses. Le système aujourd'hui proposé ne consiste plus en des avances financières mais en des primes à la création d'entreprise dont le montant doit être modulé en fonction des caractéristiques du projet : 40 000 francs maximum pour un projet individuel et 500 000 francs pour un projet de reprise par les salariés de leur entreprise en difficulté.

Un des grands chantiers du Gouvernement est actuellement la consolidation des emplois-jeunes, près de cinq ans après leur mise en _uvre. Le Gouvernement s'est engagé dans une voie de pérennisation du dispositif puisque est prolongée l'aide forfaitaire à destination des associations grâce à un système d'une aide dégressive sur trois ans. Des problèmes de viabilité des emplois créés se posent en particulier pour les associations. A cet égard, il est permis de douter de la validité du chiffre annoncé officiellement de 30 % des associations dégageant d'ores et déjà suffisamment de ressources pour financer les emplois concernés. Il semble en fait que la majorité des associations n'ont pas les moyens de relayer le soutien financier de l'Etat au terme de la période de cinq ans.

S'agissant des collectivités locales, au delà de l'adaptation des cadres d'emploi et des concours de recrutement organisés dans la fonction publique territoriale - ce qui risque d'ailleurs d'avoir des conséquences lourdes sur les budgets locaux - il est prévu que le Gouvernement attribue des aides spécifiques pour certaines communes situées en zones rurales fragilisées ou dans les quartiers relevant de la politique de la ville.

En conclusion, le rapporteur pour avis a considéré que ce projet de budget pour l'emploi était sincère car il permettait l'ajustement effectif des moyens budgétaires aux évolutions des dispositifs aidés constatés en 2001 tout en contribuant à accompagner efficacement la conjoncture économique plus difficile prévue pour 2002.

Un débat a suivi l'exposé du rapporteur pour avis.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin a fait les observations suivantes :

- Il est pour le moins malaisé d'avoir une vision précise de l'ensemble de la politique de l'emploi et de son coût au travers du seul projet de budget. La politique du Gouvernement a avant tout consisté en une « sanctuarisation » du budget de l'Etat qui, comme prévu, n'est nullement mis à contribution pour le financement des trente-cinq heures. La politique de réduction du temps de travail, présentée comme une politique de créations d'emplois, est ainsi purement et simplement financée par les organismes de sécurité sociale, ce qui constitue un véritable détournement des fonds sociaux.

- On peut se demander de quels outils méthodologiques dispose le ministère pour évaluer l'efficacité des politiques de l'emploi menées depuis quatre ans. Les statistiques et chiffres annoncés par ce ministère apparaissent bien souvent comme le fruit d'extrapolations faisant fi des faits observés sur le terrain. Il est frappant de constater par exemple que la ministre de l'emploi et de la solidarité donne une fourchette large, comprise généralement entre 260 000 et 360 000 emplois, s'agissant du nombre d'emplois qu'aurait permis la mise en place des trente-cinq heures. Au-delà du nombre d'emplois prétendument créés par les trente-cinq heures, les chiffres fournis ne font jamais état, à l'inverse, des pertes d'emplois dues à cette même réduction du temps de travail. Il est avéré que les trente-cinq heures détruisent parfois des emplois dans les petites entreprises notamment, mais cette réalité est volontairement occultée.

- Une véritable évaluation des emplois aidés doit être menée. Il semble difficile de parler de pérennisation des emplois-jeunes alors que les employeurs publics, para-publics ou les associations ne disposent pas des ressources propres suffisantes pour financer les postes correspondants de façon durable.

M. Bernard Perrut, après avoir observé que les éléments financiers n'étaient pas les plus pertinents pour mesurer l'efficacité de la politique de l'emploi, a souhaité obtenir des précisions sur l'annonce faite dans la presse s'agissant d'une modification du mode de calcul relatif au taux de chômage. Il a ensuite fait les remarques suivantes :

- Un bilan précis des emplois-jeunes, département par département, s'avère aujourd'hui nécessaire. La difficulté de financer des emplois qui sont souvent devenus indispensables sur le terrain est évidente et les associations se tournent désormais vers les collectivités locales pour assurer les financements correspondants. On peut donc craindre que celles-ci ne soient appelées à se substituer à l'Etat en la matière.

- Des précisions quant à l'utilisation des crédits supplémentaires affectés à l'Agence nationale pour l'emploi (ANPE) seraient opportunes dans la mesure où l'on constate que, dans certains secteurs, comme le bâtiment ou l'artisanat, les entreprises font de moins en moins appel aux services de l'emploi.

- On peut se réjouir de ce que les moyens affectés aux ateliers protégés et aux centres d'aide par le travail soient en augmentation. Ils restent cependant très en deçà des besoins en ce domaine.

- Les entreprises devraient pouvoir bénéficier d'une assistance pour faire face à la multitude d'obligations administratives auxquelles elles sont soumises en permanence. Il faut souligner la complexité des règles de financement des missions locales et les effets négatifs en termes de trésorerie posés par l'arrivée souvent tardive de certaines aides de l'Etat.

- La bourse d'accès à l'emploi, versée dans le cadre du programme TRACE représente un élément plutôt positif mais son caractère précaire ne permettra pas de résoudre durablement les difficultés des jeunes sans ressources.

Le président Jean Le Garrec a formulé les observations suivantes :

- L'existence du fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale (FOREC) permet d'identifier la part des exonérations des cotisations sociales qui résulte des systèmes d'allégements décidés par le précédent gouvernement (c'est-à-dire les deux tiers) de celles issues des lois relatives à la réduction du temps de travail. Dans les années à venir, il faudra s'engager dans une intégration des exonérations dans le barème des cotisations sociales et, plus encore, dans une réforme des cotisations patronales ; il s'agit là de deux enjeux majeurs.

- Les emplois-jeunes ont permis de sortir certains jeunes de difficultés extrêmes. Le plan d'accompagnement qui a été annoncé en juin 2001 par le Gouvernement revêt la plus grande importance. Il devrait notamment permettre de mettre en place les financements mutualisés, ce qui constitue une condition de la pérennisation de certains emplois.

- Face aux coûts, toujours sous-estimés du chômage des jeunes en terme de conséquences sociales, le programme TRACE a représenté une réponse indispensable. On aurait tort de sous-estimer la valeur des actions de réinsertion menées dans ce cadre.

- Le contrat d'insertion à durée indéterminée tel que décrit par le rapporteur pour avis, c'est-à-dire un contrat destiné notamment aux personnes en situation d'exclusion à partir d'un certain âge ou aux personnes souffrant d'incapacité, constitue une idée intéressante devant être creusée. Elle présente toutefois des risques potentiels : il ne faudrait pas que l'instauration de tels contrats conduise à considérer que certaines personnes sont de fait définitivement hors d'état de s'insérer par elles-mêmes dans la société.

- Le taux de collection des offres d'emploi par l'ANPE est en augmentation, lente mais sensible, depuis deux ans. La professionnalisation des agents de l'ANPE est réelle ; elle permet d'assurer un suivi personnalisé de plus en plus sérieux des demandeurs d'emplois.

- Il est regrettable que les progrès en matière de simplification des procédures administratives restent si lents. Il s'agit là d'une caractéristique de notre organisation sociale qui paraît difficile à faire évoluer.

Mme Hélène Mignon a fait les observations suivantes :

- La mise en _uvre du programme d'action personnalisée pour un nouveau départ (PAP-ND) demande un investissement très important de la part des agents de l'ANPE. Pour leur part, les chambres consulaires ont aussi un rôle à jouer dans l'aide aux entreprises.

- Il faut se féliciter de l'accroissement des crédits finançant l'insertion par l'économique. Pour des personnes en situation d'exclusion, la durée limitée de l'emploi en CES reste manifestement insuffisante et la création d'un contrat d'insertion à durée indéterminée comme cela a été suggéré par le rapporteur pour avis pourrait être intéressante.

- La mise en place d'une bourse d'accès à l'emploi est une avancée très importante. Il faut préciser qu'elle va coexister avec les dispositifs d'aide à l'insertion actuels. Elle permettra dans le cadre du parcours TRACE de garantir aux jeunes une stabilité indispensable à la construction de projets d'avenir.

En réponse aux intervenants, M. Jean-Claude Boulard, rapporteur pour avis, a donné les éléments suivants :

- Il existe des outils globaux d'évaluation des politiques de l'emploi à commencer par l'élaboration des différents taux de chômage - chômage des jeunes, chômage de longue durée. S'agissant des créations d'emplois dues aux trente-cinq heures par exemple, un indicateur fiable est le nombre d'entreprises ayant signé un accord de réduction du temps de travail et les emplois sauvegardés ou créés correspondants. Le problème est que ces indicateurs statistiques peuvent eux-mêmes donner lieu à des interprétations diverses. Cependant, si les membres de l'opposition ont considéré que le Gouvernement n'était en rien responsable d'une partie de la baisse du chômage au cours des dernières années, ils ne pourraient légitimement, le cas échéant, critiquer ce même Gouvernement sur son éventuelle responsabilité dans une possible augmentation des chiffres du chômage étant donné le ralentissement économique actuel et à venir.

- Pour ce qui est des emplois-jeunes, le chiffre de 30 % d'associations pouvant assurer la pérennité de ces emplois sans aide de l'Etat est avancé par le ministère. Cependant il serait plus exact de considérer que plus de la moitié des associations ne pourront pas financer seules des emplois-jeunes après l'échéance prévue par la loi. Les mesures annoncées par le Gouvernement pour aider à la fois les associations et les collectivités locales utilisant des emplois-jeunes prennent tout leur sens. Le rapporteur pour avis a rappelé qu'il avait toujours déclaré, y compris lors de l'examen du projet de loi relatif aux emplois-jeunes devant le Parlement à l'automne 1997, qu'une aide de l'Etat serait toujours indispensable car tous les emplois-jeunes ne pouvaient être solvabilisés. La vocation d'un jeune détenteur d'un emploi jeune ne peut pas être d'intégrer systématiquement la fonction publique en remplacement de fonctionnaires partis à la retraite. L'objectif est bien de transformer ces postes en emplois supplémentaires dans les structures qui les accueillent.

Le dispositif des emplois-jeunes a incontestablement montré son utilité. La preuve est faite que les emplois-jeunes correspondent à des besoins qui n'étaient jusqu'alors pas satisfaits. Cette réponse à des besoins réels doit donc être maintenue et ce, par un système d'aide dégressive.

- Pour ce qui est de l'insertion des jeunes, se pose le problème crucial des ressources des jeunes de moins de vingt-cinq ans notamment pendant les périodes interstitielles entre deux contrats d'insertion ou deux stages. Pour qu'une réelle insertion de ces jeunes soit possible, une certaine continuité des ressources mises à leur disposition est nécessaire. Il faut en effet avoir une approche pragmatique car en l'absence de ce type d'aides, c'est l'économie parallèle qui se développe.

- Concernant l'idée de contrat d'insertion à durée indéterminée, un tel dispositif dont les modalités restent à imaginer s'adresserait à une certaine population caractérisée par sa faible employabilité. En effet, il faut avoir conscience que certaines personnes ne pourront probablement jamais s'insérer dans les dispositifs de droit commun du marché de l'emploi. A l'heure actuelle, ces personnes, lorsqu'elles ont épuisé leur droit à l'insertion, doivent s'inscrire à nouveau au chômage. Un contrat d'insertion à durée indéterminée permettrait d'éviter de tels phénomènes.

Pour finir, le rapporteur pour avis s'est félicité de ce que les commissaires n'ont pas émis l'absence de critiques graves à l'encontre de l'architecture même du budget de l'emploi. Certains peuvent désapprouver les outils mis en place par le Gouvernement mais personne ne peut contester la réalité des financements accordés. Les dotations budgétaires correspondent véritablement aux outils choisis.

Conformément aux conclusions du rapporteur pour avis, la commission a ensuite donné un avis favorable à l'adoption des crédits du travail et de l'emploi pour 2002.

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La commission a ensuite examiné, sur le rapport de M. Patrick Malavieille, les crédits de la formation professionnelle pour 2002.

M. Maxime Gremetz, suppléant M. Patrick Malavieille, rapporteur pour avis, a observé que le projet de loi de finances pour 2002 ne comportait pas d'évolution spectaculaire s'agissant de la formation professionnelle. Il s'inscrit dans la continuité des trois exercices antérieurs en privilégiant des dispositifs recentrés sur les publics les plus en difficulté.

Quelle que soit la présentation retenue, les crédits consacrés à la formation professionnelle sont en baisse : de l'ordre de 34 millions d'euros ou de plus de 156 millions d'euros selon que l'on tient compte des crédits affectés à l'AFPA et aux dispositifs spécifiques ou des seuls moyens affectés à la formation professionnelle stricto sensu.

Ainsi les crédits destinés à la formation en alternance baissent de 0,7 %, même si le nombre des contrats est maintenu. Il convient à ce stade d'attirer l'attention de la commission sur les difficultés que rencontre actuellement l'AGEFAL, organisme chargé de gérer les fonds de l'alternance. Longtemps excédentaire, ce fonds a fait l'objet de prélèvements successifs de l'Etat ; à présent, sa situation semble mettre en péril le financement de 15 000 contrats de qualification. Le rapporteur ne peut qu'inviter le Gouvernement à honorer l'engagement apparemment pris en son temps d'aider en cas de besoin l'AGEFAL, à tout le moins à hauteur de l'impasse actuelle.

Par ailleurs, le rapporteur, tout en regrettant que le Parlement soit appelé à statuer de nouveau sur une modification du dispositif des contrats de qualification adultes, est favorable à celle proposée qui s'accompagne d'un changement de nature. En effet, l'article 70 du présent projet loi de finances prévoit la fusion de la prime et de l'exonération spécifiques à ces contrats dans l'allégement trente cinq heures.

Après une baisse de 19 % en 2001 par rapport à 2000, le présent projet affiche une baisse de 25,8 % des crédits destinés aux actions de formation à la charge de l'Etat qui passent de 719,5 à 527,4 milliards d'euros.

On ne peut que regretter que les sommes affectées au financement des contrats de plan Etat-régions baissent de 16,7 % et celles dévolues à la politique contractuelle de 3,2 % alors que les besoins demeurent les mêmes voire augmentent.

L'essentiel de la baisse est imputable à la suppression de l'allocation formation-reclassement (AFR). La dotation diminue de ce fait de plus de 190 millions d'euros.

Note positive en revanche, le budget intègre les dépenses liées à la validation des acquis qui devrait être introduite par la loi de modernisation sociale.

Enfin, les moyens consacrés aux actions spécifiques en faveur des jeunes sont globalement maintenus (- 3,6 % pour les emplois-jeunes et + 128,3 % pour le programme TRACE).

A la lumière de cet examen rapide des crédits consacrés à la formation professionnelle, deux points apparaissent clairement :

- L'Etat a modifié la nature de son engagement en tendant à se concentrer sur les publics traditionnellement exclus de la formation professionnelle ;

- Il tend à confier trop de responsabilités en matière de formation professionnelles aux partenaires sociaux (AFR, frais de formation des contrats de qualification adultes).

Il conviendrait de ce point de vue de s'assurer que chacun a bien la même vision des liens entre formation professionnelle et travail et que les intérêts des salariés ne sont pas menacés.

L'adoption de la loi relative à la réduction négociée du temps de travail a en effet suscité un débat sur les liens entre travail et formation professionnelle :

- des interrogations ont été soulevées quant à l'incidence directe de la mise en place des trente-cinq heures sur la formation ;

- une réflexion s'est engagée chez les partenaires sociaux dont les premiers effets se sont faits sentir dans les travaux de la « refondation sociale » du MEDEF lancée au début de l'an dernier et dans l'équilibre de la nouvelle convention UNEDIC.

La réduction du temps de travail a tout d'abord été une source de craintes pour la formation professionnelle : crainte qu'elle ne soit l'oubliée de la RTT et que celle-ci conduise à une réduction des actions ; crainte également qu'elle ne soit pas oubliée par ceux qui cherchent à faire de la RTT l'occasion de remettre en cause les acquis des salariés.

On peut se réjouir que les accords illégaux conclus après la première loi Aubry n'aient pas fait école grâce aux verrous posés par le législateur, notamment à l'article 17 de la loi du 19 janvier 2000 relative à la réduction négociée du temps de travail qui pose de façon très ferme le principe selon lequel « L'employeur a l'obligation d'assurer l'adaptation de ses salariés à l'évolution de leurs emplois » et que « toute action de formation suivie par le salarié dans le cadre de cette obligation constitue un temps de travail effectif ».

Les partenaires sociaux ont alors fait du thème de la formation professionnelle l'un des huit chantiers de l'accord conclu le 3 février 2000, bref l'un des éléments de la prétendue « refondation sociale ».

Les discussions ont achoppé principalement sur la question du co-investissement.

Ce sont les divisions de la délégation patronale et la surenchère pratiquée par certaines branches du côté patronal qui ont conduit à l'échec de la négociation le 24 octobre dernier. Témoigne de son jusqu'au-boutisme la proposition de ne pas comptabiliser comme temps de travail effectif les heures de RTT passées par le salarié en formation dans le cadre du plan de formation, c'est-à-dire notamment de ne pas les comptabiliser au titre des heures supplémentaires. Ceci revient naturellement à profiter des trente-cinq heures pour sortir la formation du temps de travail effectif.

On peut dès lors s'interroger sur le bien-fondé de certaines évolutions récentes qui confient des responsabilités accrues aux partenaires sociaux en matière de formation professionnelle :

- sort fait à l'AFR. Si elle est remplacée par l'ensemble aide au retour à l'emploi (ARE) et allocation fin de formation (AFF), on peut légitimement s'inquiéter cependant sur la qualité des actions de formation dispensées dans ce cadre lorsque l'on sait que la convention nécessaire à la mise en _uvre du volet formation du PARE entre Etat, régions et organismes gestionnaires de l'assurance chômage n'est toujours pas signée. Qu'en est-il par ailleurs de la différence de traitement éventuelle par l'ANPE dans les prescriptions de formation selon que l'on est chômeur indemnisé ou non ?

- capacité des partenaires sociaux à prendre en charge dans l'UNEDIC les frais de formation afférents aux contrats de qualification adultes.

Un débat a suivi l'exposé de M. Maxime Gremetz.

M. Jean Ueberschlag a considéré que le budget 2002 de la formation professionnelle était un mauvais budget qui, en cette fin de législature, signe la faillite d'une politique de la formation professionnelle inexistante. Après avoir affiché des ambitions irréalistes, le Gouvernement devrait avoir la modestie de reconnaître son échec.

Mme Hélène Mignon a formulé les observations suivantes :

- La validation des acquis professionnels consacrée par la loi de modernisation sociale constitue un grand progrès social qui ne doit pas être pris à la légère.

- Le budget de la formation professionnelle n'est pas le seul moyen pour l'Etat d'agir en matière de formation : il ne faut pas oublier qu'une part des crédits inscrits au budget de l'éducation nationale y contribue également. La formation initiale joue un rôle essentiel.

- Le rapporteur a évoqué le manque de crédits pour les contrats de qualification : il semble cependant inutile de prévoir des sommes considérables en la matière puisque, en raison du manque d'intérêt des chefs d'entreprises, les jeunes rencontrent des difficultés importantes dans leur recherche de stages. Il y a là une défaillance du monde professionnel.

- Le budget de la formation professionnelle pour 2002 est un budget ciblé sur les personnes en grandes difficultés ; les crédits destinés à soutenir l'application du programme TRACE seront notamment les bienvenus, de même que ceux destinés à lutter contre l'illétrisme.

- De façon plus générale, de l'avis des personnes travaillant sur le terrain, la formation professionnelle « traditionnelle » est aujourd'hui bien souvent démunie lorsqu'il s'agit de réinsérer des personnes en grande exclusion. Il convient plutôt de passer par des formules proches du parrainage ou du compagnonnage.

Le président Jean Le Garrec a déclaré ne pas partager l'analyse sévère du rapporteur. Le budget de la formation professionnelle pour 2002 a fait le choix de cibler son action sur les publics les plus en difficultés, mais il convient de rappeler qu'en la matière, la responsabilité première revient d'abord aux régions. Celles-ci ont fait de gros efforts pour réorganiser leurs aides afin de les adapter aux besoins. Ce choix de la décentralisation doit être soutenu, car le niveau régional est le plus efficace pour faire coïncider l'offre et la demande de formation et utiliser les moyens disponibles de façon pertinente.

On peut par ailleurs regretter que les problèmes de la formation professionnelle soient insuffisamment pris en compte par les partenaires sociaux, comme le montre la difficulté à mettre en _uvre les contrats de qualification. Enfin, il faut rappeler, pour s'en féliciter, l'inscription dans la loi du principe de validation des acquis professionnels qui constitue une vraie révolution tranquille.

M. Jean-Paul Durieux, président, a confirmé que les régions étaient désormais un partenaire incontournable en matière de formation professionnelle.

M. Pierre Hellier a signalé que si les stages de contrats de qualification étaient très difficiles à trouver, ce n'était pas en raison d'une carence des employeurs mais en raison de l'inadaptation du système.

M. André Schneider a également considéré que le budget de la formation professionnelle pour 2002 est un mauvais budget qui marque le désengagement de l'Etat par rapport à l'alternance. Aujourd'hui, 15 000 contrats de qualification sont laissés en suspens par manque de moyens : ce sont donc 15 000 jeunes qui se retrouvent face à de graves difficultés.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin a constaté que ce mauvais budget survient dans un contexte de ralentissement de l'emploi et de pénurie de main d'_uvre qualifiée, ce qui le rend particulièrement difficile à justifier par la majorité. L'effort de formation professionnelle devrait être accru et les chiffres sont là : tous les secteurs sont en baisse, ou au mieux, stables. L'action des conseils régionaux existe mais n'est pas nouvelle ; la loi sur la modernisation sociale existe aussi, mais sera inefficace sans mesures budgétaires. Il s'agit donc d'un mauvais budget et le groupe RPR votera contre.

En réponse aux intervenants, M. Maxime Gremetz, rapporteur pour avis suppléant, a apporté les éléments suivants :

- La validation des acquis professionnels constitue un grand progrès qui s'appliquera dès l'adoption définitive de la loi sur la modernisation sociale, mais cela est sans conséquence sur le budget.

- Face aux problèmes rencontrés pour le financement des contrats de qualification, il serait souhaitable que la commission demande à l'Etat de respecter ses engagements et d'accorder les fonds nécessaires à l'AGEFAL afin qu'elle puisse répondre aux besoins des contrats en cours.

- On doit s'étonner que les crédits affectés au financement des contrats Etat-Régions soit en baisse de 16,7 % alors que les besoins sont en hausse. Cette réduction de crédits est d'autant plus paradoxale que l'on tend à étendre la décentralisation au profit des régions. Une telle évolution montre bien les limites et les dangers de la démarche contractuelle dont témoigne également le fait que la convention Etat-régions-UNEDIC sur la mise en _uvre du volet formation du PARE ne soit pas encore signée.

De façon plus générale, on doit déplorer que le lien entre travail et formation professionnelle se distende de plus en plus, l'Etat abandonnant la responsabilité de la formation professionnelle aux acteurs sociaux.

En conclusion, M. Maxime Gremetz, rapporteur pour avis suppléant, a indiqué qu'il s'abstiendrait sur les crédits de la formation professionnelle pour 2002.

La commission a ensuite donné un avis favorable à l'adoption des crédits de la formation professionnelle pour 2002.


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