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ASSEMBLÉE NATIONALE

COMMISSION des AFFAIRES CULTURELLES,
FAMILIALES ET SOCIALES

COMPTE RENDU N° 20

(Application de l'article 46 du Règlement)

Jeudi 2 décembre 1999
(Séance de 9 heures 30)

Présidence de M. Jean-Paul Durieux, vice-président

SOMMAIRE

 

pages

- Examen de la proposition de loi de M. Charles de Courson visant à améliorer la détection d'enfants maltraités - n° 1797.

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- Information relative à la commission .

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La commission des affaires culturelles, familiales et sociales a examiné, sur le rapport de M. Charles de Courson, sa proposition de loi visant à améliorer la détection d'enfants maltraités - n° 1797.

Le rapporteur, après avoir rappelé l'intérêt pédagogique que représente le Parlement des enfants, a indiqué qu'il avait dans cette proposition de loi mis en forme le texte adopté par les enfants en juin dernier mais qu'il proposerait des amendements pour le rendre plus opérationnel. Le texte répond à une nécessité, car si de nombreuses normes juridiques existent déjà en matière de lutte contre la maltraitance des enfants, une augmentation du nombre de faits révélés peut être constatée.

Aucune étude tendant à faire apparaître le pourcentage d'enfants maltraités n'existe en France. Cependant, celles conduites dans les pays anglo-saxons font apparaître un taux proche de 10 % d'enfants victimes de violences. Près de 19 000 cas ont été signalés en France au cours de l'année 1998, ce qui traduit une légère diminution après la vague de révélations liée à « l'effet Dutroux ». On peut estimer que sur l'ensemble d'une classe d'âge un tiers des cas seulement sont révélés.

Partant, il est légitime de poser la question de savoir s'il existe une augmentation des actes de violence eux-mêmes. L'augmentation de la violence entre les jeunes est vraisemblable, mais il est difficile d'apprécier l'évolution des violences familiales et extra-familiales.

Parmi l'ensemble des révélations, la part venant de l'éducation nationale est faible : elle est de 8 % dans la Marne et environ 10 % au plan national. Ce n'est pas que les textes réglementaires relatifs aux signalements des cas de maltraitance fassent défaut mais il faut tenir compte de certains freins : les enseignants ne veulent pas se placer dans une situation difficile envers les familles, tandis que les médecins scolaires craignent de faire l'objet de condamnations pour dénonciation abusive, comme cela s'est récemment produit.

L'ordre de grandeur donné par les études américaines semblant vraisemblable, on peut estimer que, dans chaque classe, en moyenne deux élèves sont victimes de maltraitance, ce chiffre pouvant aller jusqu'à trois ou quatre dans les zones difficiles.

Les enfants proposent deux réformes dans la présente proposition. D'une part, l'institution d'une séance d'information annuelle obligatoire. Il s'agirait en fait de généraliser une pratique encore trop peu répandue, puisque des supports vidéo existent dont la qualité pédagogique est indéniable. Il importe aussi d'intégrer les familles dans ces actions.

D'autre part, la deuxième suggestion contenue dans la proposition consiste à instituer une visite médicale annuelle. Aujourd'hui, trois contrôles médicaux sont prévus au cours de la scolarité : l'un dans le cadre de la protection médicale infantile (PMI), un contrôle lors de la sixième année (95 % des enfants étant alors examinés), un contrôle en fin de collège dont seulement deux tiers des enfants font l'objet.

Il ressort de ces chiffres que le dispositif existant n'est pas suffisant. Cependant, l'institution d'un contrôle annuel ne répondrait pas aux besoins liés à la révélation de la maltraitance. En effet, de telles visites ne permettraient pas de déceler les abus sexuels ou les maltraitances psychiques et il n'est pas sûr qu'elles seraient très efficaces pour détecter les violences physiques. En outre, cette proposition soulève le problème des moyens. Le corps des médecins scolaires comporte 1 800 personnes, il en manque donc environ 800 pour atteindre la norme théorique d'un médecin pour 5 000 enfants. La réalisation d'un contrôle médical annuel obligatoire exigerait la multiplication par sept de ces effectifs.

M. Jean-Paul Durieux, président, a interrogé le rapporteur sur la réalisation pratique des séances d'information, en demandant qui en aurait l'initiative.

Mme Marie-Françoise Clergeau, après avoir approuvé la démarche du rapporteur, a souligné la difficulté inhérente à la détection de la maltraitance au sein des établissements scolaires. Cependant, des initiatives prises par les collectivités locales peuvent, à l'instar de ce qui est pratiqué dans la ville de Nantes, instituer un nombre significatif de visites médicales au-delà de l'obligation légale. Par ailleurs, il convient d'améliorer la formation des enseignants et de faire intervenir les agents spécialisés des écoles maternelles (ASEM).

M. Bernard Perrut a fait les observations suivantes :

- La protection de l'enfance en danger comprend, outre l'enfance maltraitée, les enfants « en risque », qui ont besoin d'une intervention précoce.

- Tant qu'un enfant n'est pas scolarisé, il risque d'échapper à tout contrôle, ce que prouve le nombre de cas de très jeunes enfants maltraités signalés par les hôpitaux.

- Les psychologues scolaires sont en nombre insuffisant et ne bénéficient pas d'un véritable statut.

- Les associations ont parfois des difficultés d'accès aux milieux scolaires. Il est par ailleurs regrettable que les initiatives prises par les départements ne soient pas mieux coordonnées.

En réponse aux intervenants, le rapporteur a donné les précisions suivantes :

- Les séances d'information des élèves doivent être organisées à l'initiative du chef d'établissement.

- Les initiatives locales des départements et communes doivent être encouragées.

- La formation des enseignants a progressé puisque les programmes d'IUFM comportent des modules relatifs à la maltraitance et qu'il existe aussi des actions de formation continue. La formation des ASEM pose un autre problème, ces personnels relevant de la fonction publique territoriale et non pas de la fonction publique d'Etat.

- Tous les enfants n'allant pas en maternelle, la détection de la maltraitance par la PMI est difficile, cette difficulté est augmentée du fait de l'isolement croissant des familles et des individus au sein de la société.

- L'accès des associations au milieu scolaire doit être facilité.

- Le message adressé aux enfants ne doit pas être trop négatif, il doit insister sur le caractère exceptionnel de la maltraitance.

La commission est ensuite passée à l'examen des articles de la proposition de loi.

Article 1er : Insertion dans le code de la santé publique d'un titre relatif à la maltraitance

La commission a adopté un amendement du rapporteur modifiant l'intitulé du titre II bis nouveau du code de la santé publique, la formulation : « Prévention et détection des faits de mauvais traitements à enfants » permettant d'insister sur le rôle de la médecine scolaire et de l'école dans la prévention des maltraitances.

La commission a examiné un amendement du rapporteur supprimant l'annualité des visites médicales obligatoires à l'école et indiquant dans la loi que la prévention et la détection des maltraitances sont une des missions de la médecine scolaire.

Le rapporteur a précisé que l'organisation de visites médicales annuelles représenterait une dépense publique inutile au regard des résultats escomptés, en tout cas dans la lutte contre les maltraitances.

La commission a adopté cet amendement.

La commission a examiné un amendement du rapporteur visant à préciser que les actions de prévention donneront lieu « à au moins une séance dans l'année » et non une seule séance de sensibilisation et d'information comme le prévoit le texte initial.

Le rapporteur a précisé que de telles actions ne peuvent être réellement efficaces avec une seule séance dans l'année.

La commission a adopté l'amendement.

La commission a examiné un amendement du rapporteur visant à associer les familles aux actions de prévention de la maltraitance organisée à l'école.

La commission a adopté cet amendement.

La commission a adopté l'article 1er ainsi modifié.

Article 2 : Compensation des conséquences financières de la loi

La commission a adopté l'article 2 sans modification.

Titre

La commission a adopté un amendement de conséquence visant à modifier le titre de la proposition de loi.

La commission a ensuite adopté l'ensemble de la proposition de loi ainsi rédigée.

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Information relative à la commission

La commission a décidé la création d'un groupe de travail de quinze membres sur la modernisation du système de santé et a nommé M. Claude Evin président et rapporteur du groupe de travail.


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