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ASSEMBLÉE NATIONALE

COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES

COMPTE RENDU N° 31

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mercredi 13 février 2002
(Séance de 9 heures 30)

Présidence de M. François Loncle, Président,

puis de M. Pierre Brana, Secrétaire

SOMMAIRE

 

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- Accord France-Italie, ligne ferroviaire Lyon-Turin, n° 3581 rectifié (rapport)

- Accords de partenariat Etats ACP-Communauté européenne, nos 3583-3584 (rapport)
- Accord investissements France-Cambodge, n° 3510 (rapport)
- Conventions d'entraide judiciaire France-Cuba , nos 3161 et 3511 (rapport)

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Accord France-Italie

La Commission a examiné, sur le rapport de Mme Bernadette Isaac-Sibille, le projet de loi autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République italienne pour la réalisation d'une nouvelle ligne ferroviaire Lyon-Turin (n° 3581 rectifié).

Mme Bernadette Isaac-Sibille a souligné l'importance du projet de la nouvelle liaison Lyon-Turin qui constitue le lien indispensable entre l'Europe occidentale et l'Europe orientale. Ce projet avait naguère été soutenu par M. Charles Beraudier, premier président de la région Rhône-Alpes, qui était attaché à développer le trafic ferroviaire. Il répond à une double nécessité : celle tout d'abord de développer un réseau ferroviaire transeuropéen à grande vitesse ; celle ensuite de construire une alternative ferroviaire à l'accroissement prévisible du trafic de poids lourds à travers les Alpes. Le coût global du projet est estimé à 10 milliards d'euros.

La Rapporteure a retracé la chronologie du projet en rappelant que le présent accord renvoie explicitement à un avenant qui devra être adopté avant 2006 et qui précisera les modalités de réalisation des ouvrages définitifs.

Ce projet dépasse par son enjeu celui d'une simple liaison ferroviaire. Certes, la future ligne à grande vitesse Lyon-Turin permettra des gains horaires conséquents qui pourront atteindre 1 heure 45 entre Lyon et Turin. Mais le véritable enjeu de ce projet se situe bien davantage dans la volonté de développer durablement le fret ferroviaire et d'éviter que l'Europe de l'Ouest ne demeure excentrée par rapport au reste de l'Europe. Cette dernière préoccupation est à la fois une priorité pour les politiques française et européenne de transport.

La question du trafic des marchandises est devenue particulièrement aiguë dans la région transalpine. Globalement, sur les passages français des Alpes du nord, les tonnages de marchandises ont été multipliés par quatre depuis 1970, et la part de marché de la route est passée de 25% à près de 75%. En 1997, le trafic de marchandises au tunnel du Mont-Blanc s'établissait à 12,7 millions de tonnes contre 12,6 au tunnel de Fréjus. Depuis la fermeture du tunnel du Mont-Blanc, le trafic au tunnel de Fréjus est monté à 22 millions de tonnes par an, ce qui représente un trafic annuel de poids lourds de 1,5 million de véhicules.

Le renforcement du fret ferroviaire ne peut se limiter à la construction d'infrastructures. Il demande également une politique plus globale alliant l'augmentation des péages des tunnels routiers pour les poids lourds, le contrôle de l'application de la législation sociale par les transporteurs routiers - la fatigue au volant est un facteur important d'accidents dans les tunnels - et une politique de qualité du service du fret ferroviaire de nature à modifier les comportements. Il n'en demeure pas moins que la levée de la saturation de la ligne ferroviaire constitue un préalable indispensable. Il est vrai également que les grèves répétées ces dernières années à la SNCF ont été lourdes de conséquences sur la diminution du fret...

La Rapporteure a développé les infrastructures prévues pour la nouvelle ligne. L'accord désigne un promoteur, dénommé « Lyon Turin Ferroviaire », pour conduire les études de faisabilité. Au vu de ses propositions, la conférence intergouvernementale en charge du projet arrêtera le tracé et les caractéristiques des ouvrages définitifs, les modalités de leur réalisation et de leur financement, ainsi que les conditions d'exploitation.

Le coût global des études et travaux de cette première phase devrait se monter à 371 millions d'euros, pris en charge pour moitié par chacun des deux pays. Il est prévu une contribution communautaire de 50 millions d'euros respectivement pour chacun des deux Etats.

Le calendrier initial du projet prévoyait un achèvement total du projet en 2015. Les gouvernements français et italien ont souhaité avancer ce terme à 2012. Votre Rapporteure prend acte de ces v_ux qui ont pour principal avantage d'afficher clairement une volonté politique. Mais l'expérience prouve qu'en ce domaine, il est sage de ne pas exclure tout glissement de calendrier.

Votre Rapporteure souhaiterait obtenir du ministre lors de la séance publique diverses précisions, notamment sur l'absence de date butoir pour le projet, sur la nature des dispositions législatives et réglementaires auxquelles renvoie l'article 8 de l'accord, sur les modalités d'association des régions Rhône-Alpes et Piémont ainsi que sur les délais de règlement des différends prévus à l'article 12.

Le Président François Loncle a partagé l'avis de la Rapporteure sur le caractère incontournable de l'investissement en cause. Il s'est félicité du choix du préfet François Lépine comme président de la société « Lyon-Turin ferroviaire ».

Mme Marie-Hélène Aubert a rappelé que la question du financement des infrastructures ferroviaires alternatives au transport routier était une question récurrente. La nécessité existe d'une participation communautaire, chacun en est conscient mais souvent malheureusement la volonté fait défaut. Le recours à l'emprunt devrait être envisagé. Ceci explique que le rail marque le pas.

Mme Bernadette Isaac-Sibille a souligné que le sommet européen d'Essen de décembre 1994 avait inscrit la nouvelle ligne Lyon-Turin parmi les quatorze projets d'infrastructures de transport européens désignés comme prioritaires mais qu'elle partageait l'analyse de Mme Marie-Hélène Aubert.

Le Président François Loncle a rappelé la difficulté de convaincre le Gouvernement britannique de l'utilité du tunnel sous la Manche. Il est toujours nécessaire de maintenir la pression des opinions publiques et des élus nationaux pour traduire les priorités dans les faits.

Mme Bernadette Isaac-Sibille a souligné avec satisfaction que l'Europe redécouvrait sa partie méditerranéenne.

Suivant les conclusions de la Rapporteure, la Commission a adopté le projet de loi (n° 3581 rectifié).

Accords de partenariat Etats ACP-Communauté européenne

La Commission a examiné, sur le rapport de M. Jean-Yves Gateaud, le projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant la ratification de l'accord de partenariat entre les membre du groupe des Etats d'Afrique, des Caraïbes et du Pacifique, d'une part, et la Communauté européenne et ses Etats membres, d'autre part (n° 3583), et le projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant la ratification de l'accord interne entre les représentants des gouvernements des Etats membres, réunis au sein du Conseil, relatif au financement et la gestion des aides de la Communauté dans le cadre du protocole financier de l'accord de partenariat entre les Etats d'Afrique, des Caraïbes et du Pacifique et la Communauté européenne et ses Etats membres, signé à Cotonou (Bénin) le 23 juin 2000, et à l'affectation des aides financières destinées aux pays et territoires d'outre-mer auxquels s'appliquent les dispositions de la quatrième partie du traité CE (n° 3584).

M. Jean-Yves Gateaud a rappelé que les deux accords soumis à la Commission constituent le résultat du processus de renégociation de la convention de Lomé, entrepris par l'Union européenne en 1998. Ce processus s'est achevé par la signature à Cotonou, le 23 juin 2000, d'un nouvel accord de partenariat liant pour vingt ans l'Union européenne et soixante-et-onze pays d'Afrique, des Caraïbes et du Pacifique.

Il a mentionné les caractéristiques de la convention de Lomé, signée en 1975 et renouvelée depuis tous les cinq ans, soulignant qu'il n'existe aucun autre exemple de partenariat Nord-Sud avec un ensemble géographique aussi vaste. Cependant, le soutien inconditionnel des Etats membres de l'Union aux pays ACP s'est progressivement érodé, certains Etats membres soulignant le bilan décevant de l'aide apportée à travers les différents accords successifs. La remise en cause apparaît clairement si l'on considère la part des pays ACP dans les financements extérieurs de l'Union : cette part est passée de 65% en 1988 à 33% en 1996, en prenant en compte la dotation du Fonds européen de développement. L'Union a peu à peu réorienté son aide vers d'autres zones, en particulier l'Europe centrale et orientale.

La convention de Lomé, modèle unique de coopération internationale, n'a pu empêcher la marginalisation des pays ACP, et en particulier de l'Afrique subsaharienne, qui est toujours « aussi mal partie », comme l'écrivait René Dumont. Les pays les moins avancés ont bénéficié de moins de 1% des flux d'investissements directs privés vers les pays du sud. L'Afrique subsaharienne ne représente que 2% du commerce international. Enfin, la part du marché communautaire tenue par les pays ACP est tombée de 6,7% à 2,7% entre 1975 et 1995. Il s'agit aussi de la région du monde la plus endettée.

Il convient de rappeler que la gestion de l'aide a montré de graves défauts : une partie seulement des volumes d'aide décidés a été versée : 35 à 40 % seulement des ressources disponibles au titre des différends FED ont été versées, ce qui a généré un énorme reliquat de 10 milliards d'euros, justifiant la question soulevée par certains Etats membres de la pertinence de doter un neuvième FED alors qu'on est en présence d'un tel reliquat. Se posait aussi la question de l'efficacité des interventions, très limitée dans certains domaines comme l'agriculture.

L'enjeu des négociations était aussi de faire évoluer le régime commercial du partenariat pour le rendre compatible avec les règles de l'OMC. En effet, les préférences de la convention de Lomé ne sont pas réciproques et sont discriminatoires envers les pays en développement non ACP.

L'accord de Cotonou ne se contente pas de prolonger « Lomé », il renouvelle et enrichit le partenariat ACP-Union européenne. Il comporte quatre piliers.

Le premier pilier consiste en un renforcement du dialogue politique, qui pourra concerner à peu près tous les domaines. L'accord définit des éléments essentiels - respect des droits de l'Homme, des principes démocratiques et de l'Etat de droit - dont la violation peut entraîner la suspension de la coopération. Une des innovations de l'accord est l'ajout d'un élément « fondamental » du partenariat : la bonne gestion des affaires publiques. Si celle-ci n'est pas constatée, une clause comparable à la clause de non exécution sera mise en _uvre : l'on doit espérer qu'elle sera un outil pour lutter contre la corruption et les malversations.

Le deuxième pilier est l'introduction d'une clause standard de réadmission. L'Union s'est montrée plus exigeante en prévoyant la conclusion d'accords bilatéraux avec un Etat ACP incluant l'obligation de réadmettre les ressortissants d'autres pays et les apatrides qui sont arrivés dans un Etat membre de l'Union en provenance de l'Etat tiers concerné.

Le troisième pilier a pour objectif l'insertion graduelle des Etats ACP dans l'économie mondiale. Des zones de libre échange seront mises en place progressivement entre l'Union et des régions ACP, à partir de 2008, ce qui ménage à ces pays la période de transition de huit ans qu'ils avaient souhaitée. Pour y parvenir, des accords de partenariat économique (APE) doivent être négociés entre 2002 et 2008. Ce processus doit favoriser l'intégration régionale des pays de la zone. Au terme du processus, soit en 2020, le libre échange réciproque sera instauré. Pendant la période transitoire de huit années, le régime commercial de Lomé est maintenu pour l'essentiel.

Le quatrième pilier est le renouvellement de l'effort de coopération financière : la dotation du neuvième FED pour 2000-2005 est maintenue au niveau du fonds précédent, ce qui n'a été possible que grâce au renforcement de la contribution française. Le neuvième FED est doté de 13,5 milliards d'euros, auxquels s'ajoute une dotation de 1,7 milliard d'euros pour la Banque européenne d'investissement (BEI). De nombreuse mesures ont été prises dans l'accord interne relatif au FED pour remédier aux graves défauts de la gestion antérieure, surtout afin d'accélérer la prise de décision et la phase du paiement des aides.

En conclusion, le Rapporteur a soulevé trois interrogations. Quelles seront les conséquences de la libéralisation des échanges prévue par le nouvel accord ? Aucune certitude ne permet d'affirmer qu'elle entraînera un développement accru ou au contraire une aggravation des retards. La réussite du mouvement de régionalisation est aussi une hypothèse : si quelques ensembles régionaux existent déjà, de nombreux pays et zones ne sont pas parvenus à former des ensembles économiques régionaux. La procédure sera-t-elle suffisamment incitative ? Enfin, les mesures de réforme de la gestion de l'aide (avec la création d'EuropAid, le renforcement du personnel chargé de la gestion et la réforme des procédures) entraînera-t-elle une amélioration significative ? Le processus ouvert par l'accord de Cotonou étant prévu pour se dérouler sur vingt ans, des examens à échéances régulières permettront en tout cas d'en évaluer les effets.

M. Pierre Brana a estimé que les accords de Cotonou présentaient des améliorations incontestables et qu'il fallait adopter ce texte ne serait-ce que parce qu'il fixe pour objectif l'éradication de la pauvreté. Néanmoins, des points restent à approfondir. Ainsi, l'Union européenne doit dépasser le stade des incitations dans l'organisation des sous-régions et s'engager plus nettement. Par ailleurs une meilleure coordination avec les ONG est indispensable, de même avec la coopération décentralisée. Il ne faut pas non plus oublier qu'il existe des opposants à ces accords. Par exemple, les Philippines et la Thaïlande sont contre, en particulier s'agissant des boîtes de conserve de thon, sujet qui a été longuement débattu à Doha récemment. En effet, ces deux pays sont producteurs de boîtes de thon et estiment subir une concurrence déloyale de la part des pays ACP qui bénéficient d'aides de l'UE en la matière. Une opposition interne existe également puisque la Scandinavie, les Pays-Bas et la Grande-Bretagne souhaitent que l'on supprime ces accords pour les remplacer par une aide aux pays les plus pauvres. Les pays ACP répondent sur ce point en disant que ces accords sont leur "carte d'identité internationale". Enfin, si les conditionnalités inclues dans ces accords sont importantes, comme le respect de l'Etat de droit ou des droits de l'Homme par exemple, il est néanmoins nécessaire de souligner plus fortement la définition en amont de projets sectoriels très précis servant directement les populations et de veiller au suivi de leur réalisation.

Mme Marie-Hélène Aubert a tout d'abord regretté que ce dossier très important soit soumis au vote de l'Assemblée nationale une semaine seulement avant la fin de ses travaux. Elle a par ailleurs estimé que ces accords souffraient essentiellement d'un gros problème de crédibilité et cité à l'appui l'exemple de l'exploitation du bois et de la déforestation. Les règles minimales de gestion durable de la forêt ne sont pas respectées, ni par les locaux, ni par nos propres entreprises d'ailleurs. La faiblesse essentielle de ce partenariat, qui est forcément louable par certains aspects tels que la lutte contre la corruption, le respect de l'Etat de droit, pour n'en citer que deux, réside dans la validation et le contrôle indispensables de l'application des conditionnalités. C'est là un grand débat qui mériterait que la Commission des Affaires étrangères s'y intéresse. En outre, dans l'état actuel des choses, la question se pose de savoir si chercher à obtenir une libéralisation sous dix ou vingt ans ne risque pas d'aggraver les choses pour ces pays. Des doutes subsistent dans la mesure où l'on peut réellement se demander si les accords de Cotonou constituent une réponse adaptée à la situation.

Suivant les conclusions du Rapporteur, la Commission a adopté les projets de loi (nos 3583 et 3584).

Accord investissements France-Cambodge

La Commission a examiné, sur le rapport de M. Pierre Brana, le projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant l'approbation d'un accord de protection et d'encouragement réciproques des investissements entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume du Cambodge (n° 3510).

M. Pierre Brana a tout d'abord rappelé que ce pays entretenait des liens historiques très forts avec la France pour plusieurs raisons. Puis il a salué les efforts importants qu'il fournit pour réunir des conditions favorables à l'investissement étranger.

Ainsi, le Cambodge passe peu à peu d'une économie dirigée à une économie de marché, notamment en privatisant de nombreuses entreprises publiques (une centaine de 1991 à 1997), même si dans la pratique une règle constitutionnelle interdit aux étrangers d'accéder à la propriété foncière au Cambodge. Cependant, dans les faits, les investisseurs étrangers peuvent contourner cet obstacle en prenant à bail des terrains pour une durée maximale de soixante-dix ans, éventuellement reconductible. De plus, la loi sur l'investissement du 4 août 1994 accorde des avantages fiscaux particulièrement incitatifs pour les projets ayant une utilité économique pour le pays, ainsi que des exonérations partielles ou totales de droits de douane et d'impôts. Par ailleurs, en 1994, un organe gouvernemental de régulation et de gestion administrative des activités liées à la réhabilitation, au développement et à l'investissement a été créé sous le nom de Conseil pour le Développement du Cambodge (CDC). Toutefois, malgré ces efforts, l'investissement étranger est relativement faible puisqu'en l'an 2000 il a atteint 125 millions de dollars, soit à peine le tiers des contributions effectivement versées au Cambodge par ses bailleurs de fonds. C'est pourquoi le gouvernement a immédiatement réagi en prenant trois décisions : simplifier et accélérer la procédure d'approbation des projets d'investissement gérés par le CDC ; ouvrir le champ des activités de négoce international aux entreprises étrangères qui jusqu'à présent était réservé aux seules entreprises à capitaux majoritairement cambodgiens ; relancer les autres formes d'appel aux capitaux étrangers.

S'agissant plus particulièrement de la convention signée avec la France, le Rapporteur a souligné qu'elle ne présentait aucun caractère particulier du fait qu'elle a été rédigée selon le modèle des quelque quatre-vingts conventions type OCDE conclues par la France avec d'autres Etats dans le monde. Il a préféré insister sur la faiblesse des investissements français au Cambodge, puisque la France figure en huitième position des investisseurs étrangers. En revanche, l'aide accordée par notre pays est substantielle dans la mesure où elle représente 11 % de l'aide internationale accordée au Cambodge, qui fait partie de la ZSP (Zone de Solidarité Prioritaire). Plus précisément, il a témoigné du travail remarquable que l'Ecole française d'Extrême-Orient réalise pour la sauvegarde des chefs d'_uvre d'Angkor.

Abordant ensuite la situation politique actuelle, le Rapporteur a indiqué que les élections communales organisées le 3 février 2002 s'étaient bien passées et que les premières estimations donnaient 61 % des suffrages au Parti du Peuple Cambodgien, 23 % au parti royaliste, qui est en perte de vitesse et devra revoir sa stratégie pour les prochaines élections législatives prévues en 2003, et 16 % au PSR, l'opposition.

Enfin, il a signalé que l'ONU venait de rompre les négociations avec le Cambodge portant sur l'organisation du futur procès des Khmers rouges. Les deux Parties s'étaient récemment mises d'accord sur la constitution d'un tribunal national avec la participation de juges internationaux, mais l'ONU a estimé que "l'indépendance et l'objectivité d'un tribunal ne pouvaient pas être garanties" et son principal négociateur, Hans Corell, a reproché au gouvernement d'avoir "apparemment traîné les pieds pour traduire en justice des dirigeants khmers rouges vieillissants". Il est vrai que seuls deux anciens Khmers rouges sont actuellement en prison dans l'attente d'un jugement et que l'actuel Premier ministre, Hung Sen, est lui-même un ancien Khmer rouge, ainsi que quatre autres membres du gouvernement.

Conformément aux conclusions du Rapporteur, la Commission a adopté le projet de loi (n° 3510).

Conventions d'entraide judiciaire France-Cuba

La Commission a examiné, sur le rapport du Président François Loncle, suppléant M. Georges Hage, empêché, le projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant l'approbation de la convention d'entraide judiciaire en matière pénale entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Cuba (n° 3161), et le projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant l'approbation de la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Cuba relative au transfèrement des personnes condamnées aux fins d'exécution de la peine (ensemble un échange de lettres) (n° 3511).

Le Président François Loncle a expliqué que les liens importants existant entre la France et Cuba, en termes de flux d'investissements ou touristiques, rendaient nécessaires un approfondissement de la coopération judiciaire. Ainsi, la France et Cuba ont conclu le 22 septembre 1998 une convention d'entraide judiciaire en matière pénale, et le 21 janvier 2000 une convention relative au transfèrement des personnes condamnées.

La convention d'entraide judiciaire en matière pénale est conforme aux principes inspirant la convention européenne sur l'entraide judiciaire en matière pénale de 1959. Elle est également très proche des nombreuses conventions de ce type signées par la France avec des pays d'Amérique latine depuis le début des années 1990. Elle est notamment quasiment identique à la convention signée avec la République dominicaine examinée par notre Commission le 16 janvier dernier.

La convention relative aux transfèrement des personnes condamnées aux fins d'exécution de la peine est également classique dans ses modalités. Elle reprend pour l'essentiel les dispositions de la convention du Conseil de l'Europe du 21 mars 1983. Ce type de convention est très utile lorsqu'il existe un risque d'accroissement du nombre de ressortissants de l'une des Parties condamnés et emprisonnés par l'autre Partie. En effet, il est préférable pour la réinsertion future d'une personne condamnée que celle-ci purge sa peine dans un environnement culturel et social qui lui est habituel. Or, l'augmentation du nombre de touristes français à Cuba et l'accroissement du trafic de drogue dans la région des Caraïbes font craindre une augmentation du nombre de ressortissants de notre pays condamnés par la justice cubaine.

Le Président François Loncle a précisé que le champ d'application de la convention est très large puisqu'elle ne prévoit pas de possibilités de refus de transfèrement lorsque les conditions juridiques sont réunies. Parmi ces conditions figure l'obligation d'un consentement de la part de la personne intéressée. Ainsi aucun détenu ne peut être transféré contre son choix de France à Cuba ou inversement. De plus, les modalités de l'expression du consentement sont étroitement encadrées. Il faut noter par ailleurs que Cuba a demandé que la convention ne s'applique qu'aux ressortissants cubains résidant dans leur pays, elle ne pourra donc pas s'appliquer aux réfugiés cubains installés en France.

Ainsi, ces conventions respectant scrupuleusement les droits des personnes condamnées, le Président François Loncle a indiqué que le Rapporteur, M. Georges Hage, recommandait l'adoption des présents projets de loi.

M. Jean-Yves Gateaud a estimé que le modèle type de conventions judiciaires n'était peut-être pas adapté aux spécificités de chaque pays. Dans le cas de Cuba, les problèmes qui se posent concernent davantage le scandaleux tourisme sexuel que la présence de personnes cherchant à échapper à des accusations de blanchiment. Cuba n'est par exemple pas une destination adaptée pour des personnes telles que Didier Schuller.

M. Pierre Brana a déclaré partager cette opinion et souhaité qu'à l'avenir les conventions de ce type soient davantage adaptées aux problèmes spécifiques de chaque pays.

Suivant les conclusions du Rapporteur, la Commission a adopté les projets de loi (nos 3161 et 3511).

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Italie

ACP-Communauté européenne

Cambodge

Cuba


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