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ASSEMBLÉE NATIONALE

COMMISSION de la DÉFENSE NATIONALE et des FORCES ARMÉES

COMPTE RENDU N° 14

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mercredi 25 octobre 2000
(Séance de 9 heures 30)

Présidence de M. Didier Boulaud, Vice-Président

SOMMAIRE

 

Pages

· Projet de loi de finances pour 2001 (n° 2585) : Défense

Avis : Dissuasion nucléaire (M. René Galy-Dejean, rapporteur pour avis)

Armée de l'Air (M. Yann Galut, rapporteur pour avis)


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La Commission a tout d'abord examiné les crédits de la Dissuasion nucléaire pour 2001, sur le rapport de M. René Galy-Dejean, rapporteur pour avis.

M. René Galy-Dejean, rapporteur pour avis, a exposé que le triste constat de l'érosion continue des moyens consacrés à la dissuasion nucléaire représentait le principal enseignement du projet de budget de la Dissuasion pour 2001. En effet, si ce projet de budget n'était optiquement pas mauvais, il n'en portait pas moins le risque d'une anémie de notre dissuasion. Avec 13,32 milliards de francs en autorisations de programme et 15,43 milliards de francs en crédits de paiement, les crédits destinés aux forces nucléaires marquent un nouveau recul, limité (-1,81 %) en ce qui concerne les crédits de paiement, conséquent (- 27,03 %) pour ce qui est des autorisations de programme. Le rapporteur pour avis a reconnu que la loi de programmation militaire disposait, en son rapport annexé, que la part des crédits du ministère de la Défense consacrée aux forces nucléaires s'établirait, en fin de période, à un niveau inférieur à 20 % (contre 31,4 % en 1990), d'un budget d'équipement lui-même en diminution. De fait, le budget de la dissuasion représente 18,4 % des crédits d'équipement militaire inscrits au projet de loi de finances initiale. Mais M. René Galy-Dejean a fait observer que la loi de programmation militaire ne se contentait pas de fixer la part relative des crédits de la dissuasion puisqu'elle précisait également que leur montant total s'établirait à 105,8 milliards de francs, en application d'un échéancier précis. Dans les prévisions de la programmation, l'annuité 2001 avait été fixée à 18 milliards de francs en crédits de paiement. Par conséquent, chaque annuité successive creusait un peu plus l'écart entre les crédits prévus par la loi de programmation et les crédits ouverts en loi de finances initiale. Ainsi, les crédits demandés dans le projet de loi de finances initiale pour 2001 sont inférieurs de 14,3 % au montant des crédits prévus par la loi de programmation, écart qui s'établit à 9,83 % si l'on raisonne en termes de montants cumulés. Il a ajouté que, même en prenant en compte les conséquences de la revue des programmes, qui s'est traduite par la diminution de deux milliards de francs de l'enveloppe attribuée à la dissuasion, l'écart avec les ressources prévues restait élevé, à plus de 7 %. D'ailleurs, le montant des crédits d'équipement (85 milliards de francs 1998) établi lors de la revue des programmes n'est pas respecté par le projet de loi de finances initiale pour 2001.

M. René Galy-Dejean s'est alors interrogé sur les conséquences physiques de ces écarts financiers, soulignant que la réponse fournie par le ministère de la Défense, qui affirme qu'ils ne remettent pas en cause les programmes prévus par la loi de programmation militaire n'était qu'à moitié rassurante.

Le rapporteur pour avis a précisé à cet égard que :

- le programme SNLE-NG se poursuit comme prévu. En 2000 est intervenue la commande du dernier bâtiment de la flotte, le Terrible, qui devrait entrer en service en 2008 ;

- s'agissant du programme M 51, le DGA et le chef d'Etat-major des armées sont confiants dans la notification du contrat à EADS pour la deuxième tranche de développement du missile avant le 31 décembre 2000 ;

- en ce qui concerne les forces aériennes stratégiques, le développement du missile ASMP amélioré vient d'être notifié à EADS ;

- par ailleurs, le programme de simulation se poursuit conformément au calendrier prévu ;

- enfin, le démantèlement des usines de Pierrelatte et Marcoule se poursuit.

M. René Galy-Dejean a observé que, dans le même temps néanmoins, le ministère de la Défense admettait que la limitation des ressources disponibles imposait de prendre des paris techniques pour respecter les échéances fixées tout en restant dans les enveloppes financières allouées. Ainsi, les chercheurs du CEA étaient contraints de choisir à un stade très précoce de leurs recherches les solutions qu'ils privilégient pour la conduite d'un programme. Par conséquent, et nonobstant l'excellence des services compétents dans les métiers relatifs à la dissuasion, qu'un pari échouât et c'étaient plusieurs années de retard qui pouvaient être prises sur un programme, ce qui était susceptible de remettre en cause la cohérence qu'entretiennent les programmes de la dissuasion entre eux.

Le rapporteur pour avis a jugé plus préoccupant encore le fait que les gestionnaires du ministère de la Défense reconnaissent eux-mêmes qu'il était difficile d'évaluer sur le long terme les conséquences des annulations de crédits et, plus largement, des non-inscriptions de crédits. Du fait de l'ampleur des programmes concernant la dissuasion nucléaire, les délais de réaction de ces derniers à une annulation de crédits ne s'expriment en effet pas en mois, mais en années. De ce fait, les annulations survenant en cours de gestion ne conduisent pas directement à des retards dans les différents programmes touchant à la dissuasion nucléaire. L'effet d'éventuelles annulations est indirect, de même que les conséquences liées à l'absence de consommation des crédits de paiement ou des autorisations de programme.

Sur la base de ce constat, M. René Galy-Dejean a évoqué le blocage du programme de missile balistique M 51, tout en précisant que son propos n'était nullement de s'immiscer dans les négociations entre la DGA et un industriel, privé qui plus est. Faisant observer que le devis présenté par EADS, supérieur de 6 à 7 milliards de francs aux moyens dont dispose la DGA était motivé, aux yeux de l'industriel par le problème de la couverture des risques, la notification par l'Etat d'un contrat de deux ans, et non de cinq et la modification du taux horaire, notamment du fait de la mise en place des trente-cinq heures, il a souhaité insister davantage sur les leçons qui pouvaient être tirées de ce différend et sur les conséquences d'un éventuel retard du programme.

En premier lieu, il a estimé que ce blocage illustrait le nouveau paysage industriel de l'armement et les règles du jeu qu'il induisait. Pendant longtemps, la puissante DGA disposait de moyens conséquents pour traiter avec des industriels, le plus souvent publics, peu soumis aux règles de la concurrence. Aujourd'hui, les entreprises de l'armement sont de plus en plus des sociétés privées soumises à une compétition intense, tandis que la DGA doit gérer une réduction drastique de ses budgets. Dans le cas du missile M 51, alors que jusqu'alors le maître d'_uvre des programmes balistiques était un industriel public, qui pouvait, si nécessaire, accepter des contrats à perte, la DGA a aujourd'hui affaire à un groupe européen, soumis à des contraintes de rentabilité fortes, qui intervient dans un domaine où le retour sur investissement est faible, la dissuasion mettant en jeu des techniques tout à fait spécifiques. Il a jugé que cette nouvelle configuration justifiait pleinement la réforme de la DGA lancée en 1996, qui visait à la rénovation des liens avec l'industrie. Mais en l'occurrence, il s'est demandé si la DGA disposait bien des moyens qui lui permettaient de jouer le rôle que l'on voulait lui attribuer. Il a estimé par ailleurs que le nouveau paysage industriel obligeait l'Etat à pratiquer une politique contractuelle différente, les grandes entreprises d'armement étant privées ou destinées à l'être, comme la SNECMA par exemple.

Une autre conséquence du blocage des discussions entre l'industriel et l'Etat sur le programme M 51 est d'ordre social. D'ores et déjà, des mesures de chômage technique ont été mises en _uvre dans les établissements d'EADS en Aquitaine. Si aucune notification n'intervenait avant la fin du mois de décembre, le risque existe de voir des ingénieurs aux compétences tout à fait spécifiques quitter les bureaux d'études.

Le rapporteur pour avis a jugé impensable qu'une solution ne soit pas trouvée, les conséquences d'une persistance du désaccord pouvant être graves. Au vu du contexte budgétaire contraint dans lequel la dissuasion évolue maintenant, si les autorisations de programme conséquentes - 5 milliards de francs - ouvertes en 2000 pour le programme M 51 n'étaient pas consommées, elles devraient accroître le volume des dotations consommées au cours de l'exercice suivant, ce qui semble difficile au regard du contrôle financier très restrictif qui pèse sur le ministère de la Défense. M. René Galy-Dejean a fait observer que le retard pris sur le programme M 51 serait plus grave encore, étant donné qu'en raison du lien établi avec le programme SNLE-NG, il conduirait à un décalage global des programmes de la Force océanique stratégique, qui constitue le c_ur de la dissuasion. Il ne faudrait pas qu'insidieusement, à la suite des retards cumulés et du fait de l'érosion graduelle des crédits de la dissuasion, nous soyons amenés à constater un jour que la cohérence des programmes est menacée et que des impasses ont été faites.

M. René Galy-Dejean a fait valoir que l'accent qu'il mettait sur la cohérence des efforts en faveur de la dissuasion était également lié à un autre indicateur, celui du niveau des études amont. Il a souligné à ce propos que l'exécution de la loi de programmation militaire était insuffisante dans le domaine des études amont relatives à l'armement nucléaire, la recherche étant, depuis 1997, le parent pauvre de la dissuasion. Il a indiqué que l'enveloppe initiale attribuée aux études amont du domaine nucléaire avait été fixée par la programmation militaire à 12,86 milliards de francs en autorisations de programme et 13,6 milliards de francs en crédits de paiement. Puis il a constaté que, si l'on cumulait les crédits effectivement exécutés et les crédits inscrits au projet de loi de finances pour 2001, ce seraient 6,3 milliards de francs en autorisations de programme et 7,1 milliards de francs qui auront été effectivement consommés en ce domaine soit, un an avant le terme de la programmation militaire, 49,2 % des autorisations de programme et 52,2 % des crédits de paiement prévus. Il a indiqué qu'en réponse, le ministère de la Défense avançait que des choix avaient été opérés en faveur des secteurs prioritaires de la dissuasion, tels que les études liées à la pénétration des missiles balistiques ou l'invulnérabilité des sous-marins. Il s'est demandé s'il fallait en conclure que des pans de recherches avaient été abandonnés, ce qui signifiait que des compétences tout à fait spécifiques étaient perdues. Il a toutefois indiqué que, malgré une érosion continue de ses ressources, qui diminueront en 2001 de 2 %, la Direction des applications militaires du CEA avait décidé de préserver le domaine des études, même au détriment d'autres activités. Il a expliqué que, pour cette direction, l'enjeu était de préserver les compétences concentrées dans ses services où 250 chercheurs travaillent sur les métiers de base de la dissuasion, qui n'existent nulle part ailleurs dans notre pays.

Avant d'en venir à sa conclusion, M. René Galy-Dejean a souhaité évoquer un fait d'actualité qui avait profondément marqué les esprits, à savoir la tragédie du Koursk, survenue au mois d'août dernier. Observant que beaucoup avait été dit, souvent de manière excessive, sur la décadence de la marine russe, qui n'est pas dans l'état de délabrement décrit par les médias, il s'est interrogé sur les moyens dont la France disposait aujourd'hui dans l'hypothèse où elle aurait à faire face à un incident sur l'un des SNLE ou des SNA qui concourent à la dissuasion.

Il a indiqué que la France avait développé des compétences propres en ce domaine, mais qu'elle s'appuyait également sur des coopérations, avec les Etats-Unis notamment. Pour faire face à une avarie, outre les entraînements réguliers des équipages, il existe trois systèmes d'intervention externes :

- le recours à des branchements extérieurs afin d'injecter de l'air dans le bâtiment ;

- des dispositifs d'intervention extérieurs, qu'il s'agisse de plongeurs ou de robots divers agissant sur convention ;

- enfin, en matière de sauvetage, l'intervention en 48 heures d'un sous-marin de sauvetage américain (DSRV), prévue en vertu d'un accord avec les Etats-Unis dont la validité expire en 2005. Après cette date, un système différent conçu et développé par un groupe de pays européens prendra le relais. Des exercices mutuels avec les Américains et plusieurs exercices de l'OTAN ont par ailleurs permis de valider les matériels et les procédures. De même, un entraînement régulier pour l'ensemble du personnel des sous-marins est conduit dans un centre spécifique situé à l'Ile Longue.

Le rapporteur pour avis a, par conséquent, jugé que, si la France n'avait pas la maîtrise de l'ensemble des systèmes de sauvetage, elle était cependant en mesure de faire face à des accidents ou incidents affectant ses sous-marins du fait de ses coopérations avec des pays étrangers.

En conclusion de son exposé, M. René Galy-Dejean a constaté, pour les regretter, la démobilisation et le désintérêt des Français dans le domaine de la défense, et de la dissuasion en particulier dont il a estimé qu'elle ne faisait plus florès. Il a jugé cette évolution dangereuse, alors que de nombreux pays réalisent des investissements très lourds dans la défense. Sans parler des Etats-Unis, qui déboursent des sommes considérables, ou du Royaume-Uni, dont l'effort en faveur de la défense reste soutenu, un certain nombre de pays asiatiques - Inde, Pakistan, Chine - consentent de très lourds efforts dans le domaine militaire, notamment pour développer leurs forces nucléaires. Les principales interrogations émanent de la Chine dont on ignore les capacités précises, mais qui dispose de lanceurs lui permettant d'attaquer n'importe quel pays et tenterait de constituer une flotte de SNLE. Par conséquent, le XXIème siècle restera marqué par le phénomène nucléaire : la dissuasion française, dont on peut espérer qu'elle sera un jour celle de l'Europe, doit donc se maintenir au meilleur niveau.

Au vu de ces différentes observations il a proposé que la Commission émette un avis défavorable à l'adoption du projet de budget de la Dissuasion pour 2001, dont il a jugé qu'il privilégiait une approche comptable de court terme dans un domaine qui implique au contraire une prise en compte permanente de l'avenir.

M. Guy-Michel Chauveau a fait observer que l'efficacité de la dissuasion dépendait moins de variations limitées du montant des crédits qui y étaient affectés que de la perception qu'un agresseur éventuel pouvait avoir de sa solidité. Or, la valeur de la dissuasion française est aujourd'hui reconnue dans le monde.

Considérant ensuite que la dissuasion française s'inscrivait aussi dans un contexte international où les pays européens et notamment la France, le Royaume-Uni ou l'Allemagne travaillaient au renforcement des dispositifs du traité de non-prolifération nucléaire, notamment à l'occasion de ses conférences d'examen, il a conclu que l'effort d'équipement nucléaire devait viser à garantir la sécurité du pays sans tomber dans des excès qui offriraient à d'autres des arguments à présenter à l'appui du développement de leur propre potentiel. Il a à cet égard attiré l'attention de la Commission sur les risques de course aux armements nucléaires pouvant naître de la politique d'armement chinoise ou du programme américain de défense antimissile nationale.

Soulignant la crédibilité de la dissuasion française qui contribuait d'ores et déjà à la sécurité de l'Union européenne, il a indiqué que les membres du groupe socialiste étaient favorables à l'adoption des crédits.

Faisant au contraire observer les très grandes difficultés des négociations internationales sur le désarmement nucléaire, dont il a rappelé qu'il les avait qualifiées dans son rapport pour avis de l'année dernière de « désespérante quête du désarmement », et soulignant qu'elles n'empêchaient pas l'accroissement du nombre de pays disposant de l'arme nucléaire, M. René Galy-Dejean a répondu que, pour ces raisons, il lui était apparu que l'effort français en faveur de la dissuasion n'était pas assez appuyé, même dans le cadre d'une politique de stricte suffisance, l'exemple du niveau trop faible des études amont lui paraissant particulièrement éloquent.

La Commission a alors émis un avis favorable à l'adoption des crédits de la Dissuasion nucléaire pour 2001.

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La Commission a ensuite examiné les crédits de l'armée de l'Air pour 2001, sur le rapport de M. Yann Galut, rapporteur pour avis.

M. Yann Galut a d'abord exposé que le budget de l'armée de l'Air en 2001 serait de 34,5 milliards de francs, se situant à peu près au même niveau que celui de 2000, le titre III s'établissant à 15,7 milliards de francs et les titres V et VI à 18,8 milliards de francs. Il s'est félicité que les autorisations de programme, avec 20,7 milliards de francs, soient en hausse sensible et s'établissent à un niveau supérieur à celui des crédits de paiement, comme il convient dans une situation de bonne gestion.

Renvoyant ensuite, pour l'analyse détaillée des crédits à l'exposé du Chef d'état-major de l'armée de l'Air devant la Commission et à son propre rapport écrit, il a voulu en mettre en évidence les points saillants.

Indiquant qu'en matière de personnel, 1 059 postes budgétaires d'appelés étaient ouverts contre 32 000 en 1996, il en a conclu que la conscription n'était plus le souci de l'armée de l'Air.

Il a alors abordé la situation des militaires techniciens de l'Air (MTA) qui formaient le nouveau personnel de soutien de l'armée de l'Air et dont l'effectif était désormais d'environ 15 000, soit 90 % du nombre prévu en programmation. Il a indiqué que le recrutement de ces personnels soulevait dans certains cas des difficultés, puisque parmi les 22 spécialités offertes, certaines subissaient la concurrence du secteur privé, comme les conducteurs routiers ou les métiers de bouche et que d'autres qui devraient représenter pourtant le tiers de l'effectif semblaient peu attractives, comme les fusiliers commando. Il a jugé que, pour remédier à ces difficultés, il était probable que des réorganisations devraient être poursuivies et que, sur certains points, le statut des MTA devrait sans doute évoluer.

Il a souligné que la problématique était rendue plus complexe par le caractère militaire des fonctions des MTA qui ont vocation à être envoyés en opérations extérieures pour y assurer les tâches de soutien.

Enfin, indiquant que, compte tenu de la localisation de certains de ses établissements, l'armée de l'Air rencontrait parfois des difficultés à recruter des personnels civils pour assurer des tâches de soutien non projetable, il a précisé que, pour y remédier, elle pratiquait une politique d'externalisation et de recours à la sous-traitance.

Il s'est alors interrogé sur la façon dont les volontaires, mis à part ceux-ci dits de « haut niveau » pour lesquels le passage dans l'armée de l'Air devait représenter une première expérience valorisante, pourraient trouver leur place par rapport aux militaires du rang engagés. Il a fait observer que cette situation se retrouvait dans les autres armées.

Le rapporteur pour avis s'est alors réjoui que, la professionnalisation faite, l'armée de l'Air mette l'accent sur l'amélioration et l'intensification de l'entraînement opérationnel. Il s'est à cet égard félicité du doublement de sa participation aux grands exercices interalliés, facteur d'efficacité et de motivation des pilotes, souhaitant qu'elle égale bientôt celle de nos principaux alliés.

M. Yann Galut a ensuite souligné l'efficacité de la solution adoptée depuis quelques années pour la gestion des dépenses de carburant opérationnel, qui consiste à fixer en loi de finances initiale un montant de crédits vraisemblable et à l'abonder en cours de gestion pour permettre la réalisation quoi qu'il arrive du programme d'entraînement. Faisant remarquer que les crédits accordés en 2000, dont il n'était à l'époque pas sûr qu'ils soient suffisants, auront bien été abondés en fonction du besoin et soulignant que le Ministre de la Défense avait indiqué devant la Commission qu'il en serait de même en 2001, il a jugé cette démarche satisfaisante.

Abordant alors la politique d'équipement de l'armée de l'Air, M. Yann Galut a estimé que 2001 promettait d'être aussi dynamique que 2000 avait été atone.

Précisant que les 12 Rafale Air qui devaient être commandés en 2000 le seront en 2001, pour livraison comme prévu en 2005, et soulignant que les autorisations de programme nécessaires avaient été mises en place, il a rappelé les propos tenus par le Chef d'état-major de l'armée de l'Air devant la Commission aux termes desquels : « en l'état actuel des spécifications définies par l'armée de l'Air et auxquelles elle reste attachée, le Rafale est un excellent avion, tant par ses capacités d'évolution aérodynamique, ses commandes de vol qui lui confèrent d'exceptionnelles qualités et sa polyvalence ».

Le rapporteur pour avis a également exposé que les conséquences de l'expérience du Kosovo étaient tirées puisque, par exemple, le nombre de « pods » de désignation laser à caméra thermique passera progressivement de 31 à 41, quatre étant livrés et cinq commandés en 2001. De même étaient commandées 7 nacelles de reconnaissance de nouvelle génération, dont les données pourront être utilisées en temps quasi réel. Après avoir brièvement évoqué les autres livraisons, notamment des cinq derniers Mirage 2000 D, des vingt-neuf premiers missiles de croisière Apache antipiste et des missiles air-air Mica pour les Mirage 2000-5, M. Yann Galut a évoqué les commandes des Armements Air Sol modulaires, livrables à partir de 2004. Il s'est ensuite réjoui sans réserve des décisions prises concernant l'A 400 M, de la mise en place annoncée de la moitié des autorisations de programme nécessaires à ce programme dès la loi de finances rectificative pour 2000 et du caractère européen de la solution apportée au problème du transport aérien militaire.

Le rapporteur pour avis a achevé son propos en évoquant la réforme du maintien en condition opérationnelle des matériels aéronautiques, avec la mise en place de la Structure Intégrée de Maintien en condition opérationnelle des Matériels Aéronautiques de la Défense (SIMMAD).

Après avoir fait observer qu'une économie de 20 % du coût de maintenance en année pleine était attendue de cette réforme, qui vise à créer une structure unique pour le maintien en condition opérationnelle des aéronefs de l'ensemble des armées et à réorganiser les procédures et les relations avec les industriels en ce domaine, il a souligné que, pour la seule armée de l'Air, c'était un montant d'un milliard de francs par an qui pourra être ainsi libéré soit, hors développement, de l'ordre de trois avions Rafale ou un A 400 M et demi par an.

Il a alors proposé à la Commission d'adopter une observation affirmant son soutien à cette réforme.

Il a ensuite proposé à la Commission de donner un avis favorable à l'adoption des crédits de l'armée de l'Air pour 2001.

M. René Galy-Dejean a estimé que le qualificatif de vraisemblable employé par le rapporteur pour définir le niveau des crédits prévus pour les carburants n'était pas approprié. Il a exprimé son espoir que de nouveaux abondements permettent de pallier cette situation au cours de l'exercice budgétaire, tout en craignant que des redéploiements de crédits, qui modifieraient les équilibres prévus par le projet de budget, soient privilégiés.

Se félicitant de la décision française d'acquérir des avions de transport A 400 M, il s'est interrogé sur la mise en place des financements nécessaires au lancement de ce programme, qui n'étaient pas prévus par le projet de loi de finances pour 2001.

Il s'est par ailleurs déclaré favorable à la création de la SIMMAD, mais s'est étonné du caractère solennel de la proposition d'observation présentée par le rapporteur, se demandant si elle ne signifiait pas que la mise en place de cette structure se heurtait dans la pratique à des obstacles. Il a indiqué que les membres du groupe RPR voteraient néanmoins la proposition d'observation. Puis il a précisé qu'ils émettraient un vote défavorable à l'adoption des crédits du projet de loi de finances pour 2001 relatifs à l'armée de l'Air.

Comprenant les inquiétudes formulées concernant le niveau des crédits relatifs aux carburants, M. Yann Galut a rappelé les propos rassurants du Ministre de la Défense quant aux solutions qui seront apportées en cours d'exécution budgétaire à cette difficulté dont il a souligné qu'elle intervenait pour la troisième année consécutive. Il a déclaré que, comme les années précédentes, il se montrerait attentif à ce que des crédits supplémentaires soient prévus à cet effet au cours de l'exercice 2001 si nécessaire, de manière à garantir un niveau satisfaisant d'entraînement des forces.

Observant que le Premier Ministre s'était publiquement engagé à ce que des autorisations de programme soient inscrites en faveur du programme A 400 M dans le projet de loi de finances rectificative pour 2000 et que le montant de ces autorisations de programme était aujourd'hui évalué à 20 milliards de francs, il a exprimé sa confiance dans la volonté politique forte de la France de faire aboutir ce premier programme structurant européen.

Il a ajouté que sa proposition d'observation n'avait pas un objet critique mais tendait à marquer l'appui de la représentation nationale à une initiative de l'armée de l'Air, dont les effets attendus sont incontestablement bénéfiques.

La Commission a alors adopté une observation tendant à demander au Gouvernement de veiller à ce que la Structure intégrée de maintien en condition opérationnelle des matériels aéronautiques de la Défense (SIMMAD) soit constituée sans retard et bénéficie des moyens et des prérogatives nécessaires pour remplir une tâche d'un intérêt essentiel pour la gestion budgétaire de la Défense et l'équipement des forces, notamment de l'armée de l'Air, dans les meilleures conditions.

La Commission a ensuite émis un avis favorable à l'adoption des crédits de l'armée de l'Air pour 2001.

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