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ASSEMBLÉE NATIONALE

COMMISSION de la DÉFENSE NATIONALE et des FORCES ARMÉES

COMPTE RENDU N° 22

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mercredi 12 décembre 2001
(Séance de 10 heures 30)

Présidence de M. Paul Quilès, Président

SOMMAIRE

 

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- Examen du rapport de la mission d'information sur les conséquences pour la France des attentats du 11 septembre


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La Commission a procédé à l'examen du rapport de sa mission d'information sur les conséquences pour la France des attentats du 11 septembre.

Après avoir indiqué que cette mission d'information, créée le 19 septembre, avait auditionné 31 personnes, le Président Paul Quilès a précisé qu'elle s'était, dans son rapport, interrogée sur la pérennité du phénomène du terrorisme islamiste international à travers une analyse de ses origines et qu'elle avait recherché les mesures susceptibles de lutter contre ce phénomène. Il a souhaité que le rapport de la mission d'information, adopté à l'unanimité, et notamment les 33 propositions qu'il formule puissent constituer le point de départ d'une réflexion sur le terrorisme international et sur les moyens de contrer cette menace.

Présentant ensuite l'architecture globale du rapport, il a expliqué que la mission s'était tout d'abord efforcée de comprendre le phénomène de l'islamisme radical, au nom duquel les actes de terrorisme de masse du 11 septembre 2001 avaient été commis. Il a jugé que deux dates importantes expliquaient le passage de l'islam politique à l'islamisme radical :

- 1979, qui voit successivement la victoire des intégristes en Iran, la tentative de prise de la Mosquée de la Mecque par un groupe de rebelles et l'invasion de l'Afghanistan par les Soviétiques. L'islamisme prend la forme d'un mouvement politique, victorieux en Iran et mis en échec par les Saoudiens. L'invasion de l'Afghanistan lui permet de devenir également une force de combat, qui sera bientôt alimentée par tous les agitateurs politiques du monde arabo-musulman, dont les Etats n'auront de cesse de se débarrasser en les envoyant combattre l'envahisseur soviétique en Afghanistan. Ces combattants du djihad seront armés et soutenus par le Pakistan, lui-même massivement épaulé par les Etats-Unis et l'Arabie saoudite ;

- 1990 ensuite, avec la guerre du Golfe et l'appel solennel du roi Fahd aux Américains, le 8 août 1990, pour qu'ils viennent protéger les lieux saints. L'internationale islamique d'Afghanistan, qui assiste alors victorieuse au départ des troupes soviétiques, se tourne vers un autre ennemi : les Etats-Unis. En 1994, l'arrivée au pouvoir des Taliban en Afghanistan, soutenue par le Pakistan, fournit une base arrière idéale à l'organisation Al Qaida, créée en 1988 par Oussama Ben Laden à partir des listes de combattants du djihad contre l'Union soviétique,.

Le nouveau terrorisme naît dans les camps d'entraînement d'Afghanistan. Il est financé par la fortune de Ben Laden, qui se fixe comme objectif de chasser les Etats-Unis des lieux saints et profère, dans ses fatwas successives, autant de déclarations de guerre contre la superpuissance américaine. Au cours des années 1990, la création échappe à ses maîtres : pakistanais, saoudiens, américains. La propagande terroriste se nourrit du ressentiment que provoque l'oubli, par les Etats-Unis, des promesses qu'ils avaient faites, lors de la guerre du Golfe, à un monde arabe malade du conflit israélo-palestinien. C'est donc également dans les cendres de la guerre froide et des illusions du nouvel ordre mondial que le terrorisme du XXIème siècle est né.

Le Président Paul Quilès a alors souligné qu'il s'agissait d'une forme nouvelle de terrorisme, de grande ampleur.

Ce terrorisme est nouveau dans ses motivations, dans la mesure où il refuse la notion même d'Etat, donc de frontière ou de souveraineté, et n'a pas de visée politique. Il n'a de compte à rendre qu'au Dieu au nom duquel il prétend combattre. Aucun dialogue, aucune négociation, aucun compromis ne sont donc possibles. Ce terrorisme utilise la société médiatique de manière tout à fait nouvelle : en l'absence de tout message politique, c'est le pouvoir de l'image qui doit répandre la terreur.

La nouveauté du terrorisme d'Al Qaida tient aussi aux hommes qui fournissent ses rangs. Il ne s'agit pas des désespérés de Gaza. Le terroriste d'Al Qaida appartient à des milieux plutôt aisés, fréquente les universités et possède une capacité parfaite à s'intégrer dans la société où il vit. Il se peut même qu'il n'ait jamais vécu en dehors du monde occidental.

Ce terrorisme est enfin nouveau dans sa logistique et son organisation. Il n'existe ni tête, ni hiérarchie, mais seulement un lien lâche, réactivé de temps à autre, avec un « donneur d'ordres ». Le « franchisé » terroriste est autarcique : il dispose d'une très large marge de man_uvre pour décider d'attaquer les cibles qui ont pu lui être fixées plus d'un an auparavant. Et aucun moyen n'est rejeté a priori : conventionnel ou non. A cet égard, le Président Paul Quilès a rappelé que Ben Laden n'avait jamais caché son souhait d'utiliser, dès qu'il en aurait la possibilité, des moyens nucléaires, bactériologiques, chimiques ou radiologiques.

Alors que les sociétés occidentales se découvrent vulnérables, à commencer par la plus puissante d'entre elles, la communauté internationale engage la lutte contre le terrorisme dans trois directions.

Un premier axe d'intervention, qui vise la source du phénomène, conduit notamment à utiliser l'outil militaire. Le Président Paul Quilès a, à ce propos, jugé que l'intervention militaire des Etats-Unis en Afghanistan était pleinement justifiée puis il a ajouté que la participation de forces alliées à cette riposte militaire avait relevé davantage de l'affichage politique que du besoin opérationnel. Il a également observé que les recettes éprouvées du Pentagone (large emploi de l'arme aérienne, engagement au sol minimal des forces américaines, participation essentiellement indirecte aux opérations terrestres par soutien à l'Alliance du Nord) s'étaient révélées efficaces.

Abordant ensuite le deuxième axe de l'intervention internationale, qui vise à neutraliser les réseaux terroristes, il a expliqué que, dans ce domaine, l'action était multiforme. Elle est tout d'abord judiciaire : entre le 11 septembre et la fin du mois de novembre 2001, six cellules d'Al Qaida ont été démantelées en Europe et plusieurs dizaines de suspects interpellés. Le Président Paul Quilès a ajouté que les services de renseignement européens, informés de l'existence de risques graves, avaient même déjoué avant le 11 septembre 2001 plusieurs attentats visant notamment la France (lors de la Coupe du monde de football en 1998 ou du marché de Noël à Strasbourg l'année passée). Puis il a souligné que cette forme de lutte contre le terrorisme international reposait sur la coopération des services de police et de justice. Elle s'étend à la sphère financière : le combat, classique bien qu'encore trop rudimentaire, contre le blanchiment de l'argent sale, doit désormais être complété par une action extrêmement complexe visant à déjouer les filières de « noircissement » de l'argent propre.

Enfin, le troisième axe d'intervention de la communauté internationale vise à traiter l'environnement qui a favorisé l'émergence et le renforcement de la menace terroriste. Sur ce point, se pose notamment la question d'une deuxième phase de l'action militaire, une fois la phase afghane terminée. Le Président Paul Quilès a évoqué la liste souvent présentée des pays pouvant constituer des bases arrière d'Al Qaida : Somalie, Yémen, Soudan, Irak. Il a jugé qu'une action militaire contre ces pays ne pouvait pas être tenue pour légitime a priori. Des preuves incontestables devraient, le cas échéant, être apportées pour la justifier.

Le Président Paul Quilès a estimé qu'en revanche, la nécessité d'agir sur les facteurs d'humiliation des populations arabo-musulmanes ne faisait pas de doute. Ben Laden n'a certes jamais combattu pour le peuple irakien ou pour la cause palestinienne, lui qui ne connaît de combat que contre l'hérétique ou l'infidèle. Néanmoins les événements récents ont révélé combien des situations comme celles de l'Irak ou des territoires palestiniens peuvent favoriser le développement du terrorisme.

Le Président Paul Quilès a alors estimé que les actions menées par la communauté internationale devaient être complétées et amplifiées, ajoutant que la mission présentait de nombreuses propositions en vue de contribuer à la réflexion dans ce domaine. Rappelant que les sociétés démocratiques étaient aussi des sociétés fragiles, il a jugé qu'elles étaient actuellement confrontées à la difficulté de définir des moyens conformes à leurs valeurs pour lutter contre les ennemis de la démocratie. Trahir ces valeurs reviendrait à donner la victoire aux terroristes.

M. Bernard Grasset, rapporteur, a tout d'abord observé que l'islamisme radical incarné par les réseaux d'Al Qaida ne datait pas d'aujourd'hui mais qu'il puisait son origine dans une tradition de radicalisme commune à toutes les religions du Livre, dont certains tenants se sont toujours indignés de la distance qui sépare la cité de Dieu de celle des hommes. A l'appui de sa remarque, il s'est notamment référé à Saint Thomas d'Aquin et Luther. Il a estimé que, pour lutter efficacement contre le terrorisme islamiste radical, il fallait au préalable en comprendre les rouages, les tenants et les aboutissants. Il a attiré l'attention, à cet égard, sur le fait qu'Oussama Ben Laden n'était pas le fils de n'importe quel immigré yéménite en Arabie Saoudite, mais bien le descendant d'une lignée croyante et accueillante pour les pélerins de l'islam.

Analysant les moyens employés dans la lutte contre le terrorisme islamiste radical, il a souligné la nécessité d'accroître la coopération internationale et européenne tout en craignant qu'une fois le danger passé, chaque pays retrouve ses égoïsmes nationaux traditionnels. Il a plaidé pour l'adoption d'un Livre blanc européen établissant une analyse commune des menaces et pour le renforcement de la coopération entre les services de police, de renseignement et de justice, dont il a tenu à souligner qu'ils n'avaient pas été pris en défaut en France par le passé. Il a ensuite mis l'accent sur la nécessité de lutter plus efficacement contre le financement international du terrorisme, notamment par la création d'un observatoire international contre l'utilisation criminelle des fonds qui soit plus représentatif que le groupe d'action contre le financement international (GAFI).

Revenant sur la coordination des services de renseignement, il a estimé qu'il fallait s'interroger sur le rôle du Secrétariat général de la Défense nationale (SGDN), dont il a regretté que les fonctions ne soient pas décisionnelles comme celles du Conseil national de sécurité américain, qu'il a cité, à titre personnel, comme un exemple dont il faudrait s'inspirer. Il a également insisté sur la nécessité de développer la défense civile, dont l'état lui est apparu embryonnaire et d'organiser à brefs délais, au niveau territorial, un système de réserves opérationnelles, capables d'appuyer et de suppléer éventuellement les interventions de la Gendarmerie départementale.

Parmi les propositions de la mission d'information dont il a souligné le caractère réaliste, notamment dans leurs aspects techniques, M. Bernard Grasset a plus particulièrement cité l'attribution d'effectifs supplémentaires aux services de renseignement, l'étude approfondie du potentiel des drones et l'acquisition d'un second porte-avions. Mettant en exergue le rôle déterminant du renseignement dans le combat contre le terrorisme, il a estimé que l'accroissement de ses capacités tant humaines que techniques devait à présent faire l'objet d'un traitement prioritaire.

Concluant son propos, il a fait valoir que le terrorisme international d'inspiration islamiste ne s'éteindrait pas avec l'élimination des principales infrastructures logistiques et de commandement d'Al Qaida. Il a souligné que les moyens de communication et d'action modernes lui offraient de considérables capacités de nuisance et jugé que cette alliance de l'archaïsme religieux et d'Internet représentait une menace particulièrement difficile à traiter.

Exprimant sa satisfaction que la Commission se soit saisie de la question essentielle du terrorisme et qu'elle ait ouvert un débat utile pour le pays, M. Pierre Lellouche a cependant souligné la faible association du Parlement aux actions de sensibilisation de l'opinion publique à cette menace et aux mesures destinées à la combattre. Il a regretté à cet égard que sa demande de convocation du Parlement en session extraordinaire immédiatement après les attentats du 11 septembre n'ait pas été satisfaite, contrairement à la pratique suivie par de nombreux autres pays européens et que les débats parlementaires tenus par la suite aient été largement convenus.

Estimant que la justesse d'une grande partie des analyses du rapport contrastait avec la modestie de ses recommandations, il a considéré que des propositions beaucoup plus ambitieuses s'imposaient face à ce tournant dans les évolutions stratégiques. Il s'est, à ce propos, inquiété des conséquences d'une atténuation de la pression de l'opinion publique lorsque les opérations d'Afghanistan seraient terminées et du risque d'une baisse de vigilance devant une menace qui perdurerait.

Il s'est ensuite demandé si, en faisant de l'humiliation du monde musulman l'une des causes majeures du terrorisme international, le rapport de la mission d'information ne témoignait pas d'une certaine timidité dans l'analyse.

Après avoir fait valoir que, ni le judaïsme ni les différentes confessions chrétiennes, notamment depuis la séparation des pouvoirs temporel et spirituel, n'envisageaient la conversion de force et la conquête, il a estimé que, s'il fallait se garder d'identifier islam, islamisme et terrorisme, il n'était en revanche pas possible d'écarter tout lien entre l'islamisme radical et l'organisation politique et sociale prescrite par le Coran et reconnue comme modèle par de nombreux pays du monde musulman.

Il a alors récusé l'argument selon lequel l'humiliation du monde musulman et l'absence d'accord de paix au Proche-Orient seraient à l'origine du terrorisme international. Il a, à ce propos, fait observer que les mouvements islamistes radicaux et terroristes comme Al Qaida s'étaient précisément développés pendant la période qui avait suivi la conclusion des accords d'Oslo et au cours de laquelle jamais le processus de paix au Proche-Orient n'avait autant progressé. Il a également jugé que la cause de l'humiliation ressentie par le monde musulman tenait à l'absence de perspectives démocratiques et d'enracinement de l'économie de marché. Ajoutant que nombre d'intellectuels musulmans réfléchissaient aux moyens de surmonter cette situation, il a estimé qu'une aide devait leur être apportée sur ce point.

M. Pierre Lellouche a ensuite convenu que, comme l'indiquait le rapport, les Etats-Unis n'avaient aucun besoin du concours de leurs alliés pour mener leurs opérations en Afghanistan. Il a toutefois estimé que la faiblesse de la contribution des pays européens mettait en lumière le décalage grandissant de leurs capacités avec celles des Etats-Unis. Il s'est alors demandé si l'accroissement de cet écart n'allait pas conduire à une situation où les Européens ne pourraient plus participer à des actions militaires conduites par les Etats-Unis et devraient limiter leur rôle au maintien de la paix et à la reconstruction civile.

Après avoir souligné l'importance que revêtait le recueil des preuves pour permettre aux Etats-Unis d'obtenir l'accord de leurs alliés et l'aval de l'ONU pour leurs actions actuelles et peut-être futures, il a observé qu'une attaque de grande ampleur dirigée contre les symboles de la puissance nationale, dès lors qu'elle n'était pas signée et qu'elle ne prenait pas elle-même la forme d'une frappe nucléaire, ne pouvait pas donner lieu à une riposte nucléaire. Il a alors considéré que le contournement de la dissuasion observé à cette occasion appelait un débat sur les limites de la protection offerte par l'armement nucléaire, quelle qu'en soit par ailleurs la nécessité pour la France.

Après s'être déclaré en accord avec la proposition d'acquisition d'un deuxième porte-avions mais contesté le lien établi entre cette acquisition et les choix britanniques, il a estimé que le rapport ne se prononçait pas de manière assez nette sur la nécessité d'un accroissement sensible de l'effort d'équipement militaire au moment où d'importantes annulations de crédits étaient opérées sur le titre V du budget de la Défense. Il a regretté à ce propos que les nouvelles nécessités de la défense n'aient donné lieu ni à la présentation d'un collectif budgétaire ni à une révision du projet de loi de programmation militaire.

Enfin, estimant que la question de la défense du territoire méritait d'être réexaminée, il a considéré qu'une réorganisation des réserves était indispensable pour assurer le maillage du territoire. Il s'est alors demandé si, pour assurer cette défense, un volant de jeunes gens, formés pendant deux ou trois mois, ne devait pas venir en renfort des réservistes issus de l'armée professionnelle. Il s'est enfin interrogé sur la prise en compte des menaces radiologiques, chimiques et biologiques, se demandant si les crédits nécessaires avaient été inscrits pour financer notamment la fabrication d'antidotes et la formation des personnels.

Après avoir souligné le danger des régimes théocratiques, M. Robert Poujade a observé que la plupart des pays du monde arabo-musulman, à l'exception notable de la Turquie, n'étaient pas encore parvenus à se dégager de cette forme de pouvoir.

Après avoir salué la qualité des analyses et des propositions du rapport, M. Guy-Michel Chauveau s'est interrogé sur la nécessité d'étendre la réflexion à l'examen de la place d'une Europe élargie, y compris au Bassin méditerranéen, dans le dispositif de lutte contre le terrorisme, en insistant sur l'importance du rôle de l'Union européenne ainsi que de l'ONU.

Il a estimé que la nouvelle situation stratégique issue des attentats du 11 septembre nécessitait la création d'un espace européen de sécurité sur la base d'un approfondissement de la coopération entre l'OTAN et la Russie. Il a par ailleurs considéré que la mise à disposition de capacités militaires par de nombreux pays alliés ou partenaires des Etats-Unis revêtait une signification plus politique qu'opérationnelle. Après avoir insisté sur l'importance pour la sécurité internationale des mesures de confiance élaborées dans le cadre de l'ONU, il a déploré que les Etats-Unis aient rejeté, pour des motifs essentiellement économiques, tout dispositif de transparence et de contrôle permettant de vérifier le respect de l'interdiction des armes biologiques prévue par la convention de 1972. Il a ajouté que la question de l'approfondissement d'un dialogue entre l'Union européenne et le monde arabo-musulman restait posée, en se déclarant néanmoins optimiste quant aux possibilités de lui donner une nouvelle dimension dans un cadre englobant à la fois les pays du Bassin méditerranéen mais également ceux du Caucase et associant la Russie. Enfin, il a souligné le contraste entre l'admission de la Chine au sein de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) et la suspicion que font encore peser à son égard les Etats-Unis quant à ses intentions militaires.

M. Jean Briane a souligné que les attentats du 11 septembre nécessitaient, de la part des pays occidentaux, de profondes mises en question de leurs conceptions de défense et de sécurité. Puis, il a insisté sur l'importance de la dimension européenne dans le réexamen général des politiques de défense.

M. Jean-Noël Kerdraon a regretté que les difficultés du déploiement des éléments français destinés à intervenir en Afghanistan aient nui à la perception, par l'opinion, de l'état des capacités militaires de la France. Il a ensuite considéré que les événements du 11 septembre avaient mis en lumière la vulnérabilité des principales infrastructures civiles mais aussi militaires. Il a, à ce propos, mentionné la base sous-marine de l'Ile Longue dont la défense aérienne a d'ailleurs été récemment renforcée avec le prépositionnement de Mirage 2000 et le déploiement de missiles Crotale.

M. Jean-Claude Viollet a tenu à souligner la qualité du rapport rappelant qu'il avait été réalisé dans des délais particulièrement brefs. Concernant le rôle joué par les armées françaises en Afghanistan, il a relevé que l'intervention militaire de notre pays avait strictement répondu aux demandes formulées par les Etats-Unis.

Il a par ailleurs insisté sur la nécessité de réactiver le concept de défense globale en en tirant toutes les conséquences tant en matière de projection des forces que de défense du territoire. Il a souligné l'importance de la défense civile, jugeant que des moyens appropriés devaient lui être affectés notamment pour la protection NBC et la sécurisation des centres d'approvisionnement en énergie et eau potable. La complémentarité et l'interopérabilité des moyens civils et militaires doivent être mieux assurés. Les difficultés à résoudre portent notamment sur la mise en place des réserves, la répartition des moyens sur le territoire, l'établissement d'une chaîne de commandement efficace, la mise en cohérence des structures territoriales civiles et militaires, le développement des capacités de projection intérieure et l'information ainsi que l'association de la population.

M. Jean-Yves Le Drian a rappelé que le chef d'état-major des armées, interrogé sur les inflexions à apporter à la politique d'équipement militaire après les événements du 11 septembre, avait fait état d'un besoin de financement de 9 milliards de francs. Or, 3 milliards ont d'ores et déjà été inscrits dans la loi de finances rectificative.

M. Jean-Yves Le Drian a ensuite regretté le mépris dont les armées font trop souvent l'objet alors qu'elles sont très présentes sur de nombreux théâtres, des Balkans à l'Afrique et que leurs capacités en font un instrument de premier ordre.

Le Président Paul Quilès a jugé que certains commentaires sur la participation des différents pays européens à la gestion de la crise afghane donnaient l'impression regrettable qu'il s'agissait des « jeux olympiques de la guerre » où l'on chercherait à occuper la meilleure place sur le podium.

M. René Galy-Dejean, rapporteur, a souligné le caractère consensuel du travail réalisé, tant en ce qui concerne la démarche que les conclusions du rapport. Il a ajouté que ce rapport n'avait pas l'ambition de répondre à l'ensemble des questions soulevées par les attentats du 11 septembre mais d'offrir une base de travail utile.

M. Jean-Claude Sandrier a qualifié le rapport d'excellent. Il a indiqué qu'il proposerait une contribution qui viserait à approfondir l'analyse des causes du conflit actuel et de certaines motivations des Etats-Unis, notamment en matière d'approvisionnement en énergie.

M. Roland Garrigues a demandé si un inventaire des travaux réalisés par d'autres parlements sur le terrorisme international pouvait être établi.

M. Robert Poujade a évoqué le risque qu'il y aurait à abandonner l'Afghanistan à ses luttes ethniques et tribales sitôt le conflit terminé. Un éventuel retour des Taliban serait alors à redouter.

Le Président Paul Quilès a précisé que le rapport proposait une aide économique massive à ce pays de la part de la communauté internationale.

La Commission de la Défense a alors décidé, à l'unanimité, d'autoriser, conformément à l'article 145 du Règlement, la publication du rapport d'information sur les conséquences pour la France des attentats du 11 septembre.


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