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ASSEMBLÉE NATIONALE

COMMISSION de la DÉFENSE NATIONALE et des FORCES ARMÉES

COMPTE RENDU N° 7

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mardi 20 octobre 1998
(Séance de 10 heures 30)

Présidence de M. Robert Gaïa, Secrétaire,
puis de M. Paul Quilès, Président

SOMMAIRE

 

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Projet de loi de finances initiale pour 1999 (n° 1078)

 

– Audition du Général Jean Rannou, Chef d’état-major de l’Armée de l’air

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La Commission a entendu le Général Jean Rannou, Chef d’état-major de l’Armée de l’air, sur le projet de loi de finances pour 1999 (n° 1078).

Accueillant le Général Jean Rannou, Chef d’état-major de l’Armée de l’air, M. Robert Gaïa, Président, a rappelé qu’il allait présenter un projet de budget dont l’évolution paraissait globalement favorable, mais contrastée, puisque les crédits d’équipement connaissent une progression sensible alors que le titre III subit une légère baisse. Il a observé qu’en commentant ces évolutions, il allait pouvoir indiquer en particulier à la Commission comment le projet de budget de l’Armée de l’air pour 1999 traduisait les prévisions de la programmation, telles qu’elles ont été ajustées par la récente revue de programmes.

Estimant tout d’abord que le projet de budget de l’Armée de l’air, conforme aux conclusions de la revue de programmes, permettait de poursuivre la professionnalisation dans de bonnes conditions, le Général Jean Rannou a précisé que son montant de 35,8 milliards de francs correspondait à une augmentation de 2,6 % par rapport à la loi de finances initiale pour 1998. La réduction de 1 % du titre III, fixé à 15,6 milliards de francs masque une forte croissance des crédits consacrés aux rémunérations et charges sociales qui représenteront 81,2 % des dépenses ordinaires et une diminution des dotations destinées au fonctionnement courant ou à l’activité aérienne.

Après avoir rappelé que les effectifs de l’Armée de l’air passeraient de 82 000 à 76 400 (dont 5 603 civils), le Chef d’état-major de l’Armée de l’air a indiqué que la diminution globale de 7 043 postes permettrait d’atteindre l’objectif de la programmation et que l’essentiel de la professionnalisation aurait ainsi été réalisé en trois ans. Il a ajouté que la déflation concernait 60 postes d’officiers, 725 de sous-officiers et 9 144 d’appelés. Parallèlement, seront ouverts 2 371 postes de militaires techniciens de l’air (MTA), 211 de volontaires et 304 de civils.

Le Général Jean Rannou a alors appelé l’attention de la Commission sur le rôle primordial des bases aériennes en matière de professionnalisation, notamment en raison de la responsabilité des commandants de base en matière de recrutement puis de reconversion des MTA. Une structure spécifique est en particulier mise en place sur les bases pour préparer leur retour à la vie civile à la fin de leurs contrats de 4 ou 8 ans.

Le Chef d’état-major de l’Armée de l’air a fait observer que, malgré les efforts entrepris, le recrutement de personnels civils s’avérait difficile dans les bases éloignées des bassins d’emploi touchés par les restructurations. Le déficit des personnels civils devrait cependant être réduit de 785 à 635 grâce à la reprise du recrutement des fonctionnaires et à l’embauche autorisée de 47 ouvriers d’Etat. Il a également souligné l’importance du nombre de pécules alloués aux officiers et aux sous-officiers afin de maintenir les flux de départ, compte tenu en particulier de la prolongation des limites d’âge de 48 à 55 ans pour les adjudants-chefs.

Abordant les crédits de fonctionnement courant, le Général Jean Rannou a indiqué que leur baisse de 79 millions de francs par rapport au budget voté de 1998 (soit 5,2 %) était la conséquence directe des déflations d’effectifs et des restructurations. Il a cependant souligné que la situation des dotations de fonctionnement demeurerait tendue et a émis la crainte que le report de charges de 1997 à 1998 ne puisse être résorbé, le budget de 1998 ayant été construit avec un déficit structurel. Pourtant, les efforts entrepris pour maîtriser les coûts de fonctionnement sont poursuivis, le niveau de productivité s’est élevé et des travaux menés au sein du ministère montrent que le coût de fonctionnement per capita de l’Armée de l’air est le plus faible des armées.

Il a également fait observer que la solution de la sous-traitance était intéressante pour la rationalisation des fonctions non strictement opérationnelles et des activités non spécifiquement militaires dans le cadre de l’accompagnement de la professionnalisation. Rappelant que la sous-traitance était utilisée, par exemple, pour les activités de maintenance lourdes, confiées aux ateliers industriels de l’armement de la DGA ou au secteur privé, il a indiqué qu’elle serait développée pour un grand nombre de tâches de soutien, notamment dans le domaine du fonctionnement général. Il a cité à cet égard l’expérimentation de sous-traitance élargie envisagée sur la base entrepôt de Varennes-sur-Allier par le service des matériels de l’Armée de l’air.

Il a ensuite considéré que la diminution de 8,5 % des dotations en carburant opérationnel restait cohérente avec l’évolution des cours du baril et du dollar et permettrait de maintenir l’activité aérienne au niveau souhaitable. Enfin, il a expliqué la forte baisse de 30 % des crédits d’entretien programmé des matériels par leur transfert à hauteur de 220 millions vers le titre V.

Le Général Jean Rannou a alors abordé la présentation des dépenses en capital. Notant que les titres V et VI de l’Armée de l’air, avec une allocation de 20 238 millions de francs en autorisations de programme et en crédits de paiement, croissent de 5,6 % par rapport à la loi de finances initiale pour 1998, il a estimé que ces dotations, qui correspondent aux conclusions de la revue de programmes, permettaient de poursuivre, sans retard notable, la modernisation des équipements prévue dans la loi de programmation militaire 1997-2002.

Il a exposé qu’en matière de dissuasion, le démantèlement des missiles et des installations du plateau d’Albion s’était achevé en 1998. La définition préliminaire du missile ASMP amélioré prévu pour moderniser la composante aéroportée à l’horizon 2007 devrait être achevée en 1999 pour un lancement du développement en 2000.

S’agissant de la prévention et de la protection, le Chef d’état-major de l’Armée de l’air a indiqué que la force aérienne de combat retrouverait 22 de ses Mirage 2000 DA, transformés en Mirage 2000-5. Parallèlement, elle prendra livraison des 25 premiers missiles air-air MICA figurant dans la commande globale passée fin 1997. Il a conclu que la force aérienne de combat disposerait ainsi en 1999 d’un système d’armes cohérent rivalisant avec les meilleurs.

Il a ajouté que la rénovation du système de commandement et de conduite des opérations aériennes (SCCOA) se poursuivait. Elle donne à l’Armée de l’air les outils indispensables pour garantir l’intégrité de l’espace aérien français et assurer la cohérence d’emploi de l’arme aérienne, notamment dans le cadre d’opérations interarmées ou interalliés.

A ce propos, le Chef d’état-major de l’Armée de l’air a invité le Président Paul Quilès et la Commission de la Défense aux prochains exercices aériens franco-britanniques où le SCCOA sera mis en oeuvre.

Enfin, il a exposé que, dans le cadre de l’amélioration de la protection anti-aérienne des unités projetées par des missiles sol-air, 25 postes de tir SATCP et 90 missiles VT1 destinés au Crotale NG seront livrés.

Il a ajouté que six premières bases seront équipées des moyens de transmission des bases aériennes (MTBA) dont deux projetables.

S’agissant de la projection de puissance, le Général Jean Rannou a indiqué que les capacités de la force aérienne de combat seraient améliorées avec la livraison de 12 Mirage 2000 D qui porterait, fin 1999, sa dotation à 69 appareils sur les 86 prévus. Trois escadrons de combat (de vingt appareils en ligne) auront alors reçu leur dotation complète. Les appareils livrés en 1999 disposeront de deux pods de désignation laser caméra thermique (PDLCT) supplémentaires qui permettent de tirer de manière très précise un missile ou une bombe guidée et ont été utilisés dans les opérations de maîtrise de la paix en Bosnie. Enfin, 500 armements air-sol modulaires (AASM) feront l’objet d’une commande groupée fin 1999 pour des livraisons prévues à partir de 2004.

Le Chef d’état-major de l’Armée de l’air a ensuite exposé que l’année 1999 serait marquée par la livraison du premier Rafale qui servira au développement de ses armements. Il a également rappelé que le projet de budget était construit sur la base de la commande pluriannuelle de Rafale.

Abordant alors la force aérienne de projection, il a indiqué que celle-ci reprendrait possession de 9 avions de transport C 160 Transall, après une rénovation concernant essentiellement leur avionique, et qu’elle recevrait en livraison le douzième cargo léger CN 235 de fabrication espagnole sur les quinze prévus, le treizième exemplaire devant être commandé en 1999.

Il a ajouté que, pour récupérer les membres d’équipage éjectés en zone hostile, deux hélicoptères Cougar, dits Cougar Resco, seraient commandés en 1999, le quatrième et dernier appareil de ce type devant l’être en 2000.

Enfin, il a indiqué qu’après la phase de prédéfinition lancée en 1997, le programme d’Avion de transport futur se poursuivrait en 1999 avec la mise en concurrence de trois solutions, celle d’une coopération européenne sous l’égide d’Airbus Industrie, celle d’une flotte mixte constituée d’appareils C 130 et C 17, et celle d’une coopération autour d’un avion russo-ukrainien Antonov.

Il a ajouté que les premières livraisons du successeur du Transall, fixées initialement en 2004, devraient intervenir en 2005, cette date constituant une butée au-delà de laquelle il faudrait admettre une perte de capacité opérationnelle en matière de projection de force, compte tenu du calendrier de retrait de service du Transall.

Le Chef d’état-major de l’Armée de l’air a enfin exposé que les flux consacrés au maintien en condition opérationnelle (MCO) de l’aviation de combat et de transport avaient été diminués de 5 % par rapport aux ressources prévues en programmation, conformément aux décisions prises lors de la revue de programmes. Sur ce point, il a fait remarquer que la légère croissance de 1,6 % des crédits d’entretien inscrits aux titres III et V du projet de budget par rapport aux ressources de la loi de finances initiale pour 1998 devait être appréciée compte tenu de la sous-dotation de l’annuité 1998 due à la réduction de 10 % de son montant en construction budgétaire. Il a souhaité que l’augmentation relative observée dans le projet de budget permette de rattraper une partie des grandes visites d’aéronef retardées les années précédentes.

Il a également fait ressortir les difficultés créées par la lourdeur des procédures de gestion, en matière notamment de passation des marchés, pour le maintien en condition opérationnelle des matériels. Estimant que c’est à cette lourdeur, beaucoup plus qu’à des raisons financières, qu’il fallait imputer les problèmes de disponibilité d’aéronefs, certains d’entre eux pouvant être immobilisés par manque de pièces de coût modeste, il a espéré que la mise en place d’une structure intégrée associant les armées et la DGA pour le maintien en condition opérationnelle des matériels permette d’améliorer la situation.

Il a attiré l’attention de la Commission sur l’importance que revêtait, pour l’Armée de l’air, l’exécution dans de bonnes conditions du budget de 1998 et souhaité qu’elle bénéficie des ressources correspondant à ses besoins de fonctionnement pour l’exercice en cours, qui n’étaient aujourd’hui couverts que de façon partielle.

Soulignant qu’il était très favorable à la transparence en matière budgétaire et en particulier à la meilleure lisibilité de l’exécution des dépenses que devaient apporter les réformes de la gestion financière en cours au ministère de la Défense, il a estimé qu’il convenait cependant de veiller à ce que ce processus de modernisation indispensable reste compatible avec l’objectif d’atteindre, dans les conditions définies par la loi de programmation et confirmées par la revue de programmes, le modèle d’armée 2015 défini avec l’approbation du Parlement, et pour la réalisation duquel la première tranche de la commande globale d’appareils Rafale et le lancement du programme du futur avion de transport revêtaient une importance essentielle.

En conclusion, le Général Jean Rannou a estimé que le projet de budget pour 1999, conforme aux engagements pris par le Gouvernement, permettrait de poursuivre dans de bonnes conditions la progression, déjà engagée depuis près de deux ans, vers ce nouveau modèle d’armée, après avoir fait remarquer que l’année 1999 allait être cruciale pour la réussite de la professionnalisation de l’Armée de l’air et le renouvellement de ses capacités.

Le Président Paul Quilès a souhaité savoir dans quelles conditions les nouvelles procédures financières du ministère de la Défense avaient été introduites pour la gestion des crédits d’équipement de l’Armée de l’air, s’il en était résulté des ralentissements dans la consommation des crédits et quel niveau de reports de crédits d’équipement le Général Jean Rannou attendait pour la fin de l’exercice 1998. Il lui a également demandé quels étaient les moyens aériens que la France avait mis à la disposition de l’OTAN dans le cadre de l’ordre d’action du 13 octobre dernier, en vue de frappes sur le territoire de la République fédérale de Yougoslavie, quels étaient ceux qu’elle envisageait d’affecter à la surveillance aérienne non-armée du Kosovo et comment se situait cette contribution française aux missions de l’Alliance par rapport à celle de nos principaux partenaires européens, tant en termes qualitatifs que quantitatifs.

Il s’est enfin interrogé sur l’état de la coopération de l’Armée de l’air avec l’organisation militaire intégrée de l’OTAN, en ce qui concerne en particulier la surveillance et l’alerte aériennes et les infrastructures, et a demandé au Général Jean Rannou de préciser si les liaisons de la France avec l’Alliance lui avaient permis d’être associée dans de bonnes conditions à la planification des opérations alliées dans le cadre de la gestion de la crise du Kosovo.

Le Général Jean Rannou a apporté les éléments de réponse suivants :

— c’est la DGA qui est gestionnaire pour 80 % des crédits inscrits au titre V de l’Armée de l’air. L’Armée de l’air ne gère elle-même que ceux qui concernent l’infrastructure et le matériel au sol. Elle assure également la gestion des crédits relatifs au matériel relevant du Commissariat. S’agissant du matériel relevant du Commissariat, il y aura des reports dus à des lenteurs administratives au moment de la passation des marchés. En matière de matériel au sol, la reprise comptable, qui a eu lieu cette année, sera cause de près de six mois de retard. En matière d’infrastructures, la situation est pire, car la nécessité nouvelle de passer les commandes par l’intermédiaire du ministère de l’Equipement a donné lieu à des ralentissements supplémentaires ;

— l’Armée de l’air a participé à la planification des opérations de l’OTAN mais il est du ressort du Chef d’état-major des armées de porter une appréciation sur cette participation ;

— s’agissant des moyens mis à la disposition de l’OTAN, l’Armée de l’air a ajouté 8 Mirage 2000 DA et 4 Mirage 2000 D aux 5 Jaguar déjà déployés en Italie, à Istrana. Elle a également affecté à la force alliée 2 C 135 ravitailleurs, un avion Awacs et deux hélicoptères de recherche et sauvetage ;

— l’Armée de l’air est très performante en matière de surveillance, qu’il s’agisse de l’imagerie aérienne (photo, infrarouge et radar), ou de l’écoute électromagnétique pour la localisation des radars. Elle tient ces moyens prêts pour emploi.

Après avoir souligné la qualité du dialogue qu’il avait mené avec l’Armée de l’air pour la préparation de son avis budgétaire et approuvé l’analyse portée par le Général Jean Rannou sur le projet de budget de l’Armée de l’air pour 1999, M. Yann Galut l’a interrogé sur trois points.

Relevant que les premières livraisons de l’Avion de transport futur avaient été reportées d’un an, à 2005, il a souhaité connaître les conséquences de ce report pour l’Armée de l’air. Il a également souhaité savoir si le Général Jean Rannou considérait le recours à l’avion Antonov comme réaliste et si le choix d’une flotte mixte de C 17 et de C 130 J pourrait répondre aux besoins opérationnels de l’Armée de l’air, alors que l’une des faiblesses de la flotte de transport réside dans l’insuffisante capacité d’emport en volume, non seulement de ses Transall, mais aussi des C 130 dont elle dispose actuellement.

S’agissant du retrait anticipé des Jaguar en 2001, décidé à l’issue de la revue de programmes, il a voulu en connaître les conséquences sur les capacités aériennes tactiques.

Evoquant enfin le cas des militaires techniciens de l’air (MTA) et soulignant qu’il était régulièrement rappelé que ces personnels n’avaient pas vocation à être intégrés au sein du corps des sous-officiers à l’issue de leur contrat, il a rappelé qu’existaient toutefois, dans la fonction publique, des concours internes réservés au personnel déjà en fonction. Il s’est alors interrogé sur la possibilité de faire bénéficier les MTA qui en ont le goût et les capacités de ce mode de promotion. Evoquant la préférence accordée au recrutement local des MTA, il s’est félicité de cette contribution de l’Armée de l’air à l’insertion sociale et à l’aménagement du territoire.

M. René Galy-Dejean, faisant écho aux propos du Général Jean Rannou relatifs aux difficultés du maintien en condition opérationnelle et aux problèmes logistiques que connaissait l’Armée de l’air, a souhaité savoir combien d’avions étaient, de ce fait, immobilisés et quelle était la durée de cette immobilisation. Il a également voulu connaître l’évolution récente du nombre d’heures de vol par pilote.

S’agissant des crédits inscrits dans le projet de loi de finances pour 1999 pour la commande groupée de Rafale, il a souhaité savoir sur combien d’avions cette commande porterait.

Faisant écho aux propos de M. Yann Galut sur l’Avion de transport futur, il a demandé au Général Jean Rannou quelle solution était considérée comme préférable par l’Armée de l’air en la matière.

Le Général Jean Rannou a apporté les éléments de réponse suivants :

— les premières livraisons de l’Avion de transport futur ont effectivement été repoussées d’un an par rapport aux prévisions initiales. Ce choix nécessitera d’être attentif à ménager la flotte actuelle des Transall ;

— s’agissant des trois possibilités d’équipement de l’Armée de l’air en avions de transport, il n’en existait à l’origine qu’une seule, celle proposée par le Consortium Airbus. Puis sont venues successivement s’ajouter à cette proposition initiale les hypothèses de recours à une flotte mixte de C 17 et de C 130, puis à une flotte d’Antonov. Afin d’évaluer la meilleure solution, il est nécessaire d’en revenir à l’analyse des spécifications de ce futur avion de transport. Sauf à passer des accords avec Air France, l’Armée de l’air ne dispose pas des moyens d’entretenir une flotte logistique en temps de paix. L’Avion de transport futur doit donc assurer une fonction logistique. S’agissant de ses capacités tactiques, il doit permettre un déchargement rapide des matériels embarqués, ce qui implique, techniquement, l’existence d’une rampe et d’une porte arrière. Quant à la taille de la soute, elle doit être suffisamment large et haute pour accueillir notamment trois types de matériel : les hélicoptères, les VBCI et les missiles sol-air. Ce sont ces spécifications qui ont été définies en commun par les huit chefs d’état-major européens dans le projet qu’ils ont retenu il y a deux ans. La solution proposée par les Russes et les Ukrainiens est satisfaisante au regard des spécifications de taille concernant la soute, qui sont semblables à celle de l’Avion de transport futur. La crédibilité de la solution Antonov est toutefois entachée par des doutes, essentiellement de nature politique, sur la continuité de la maintenance, notamment en matière de pièces de rechange. Il convient à ce sujet de suivre l’évolution de la position de l’Allemagne, jusqu’alors favorable à la solution proposée par les Russes et les Ukrainiens. En revanche, le recours à une flotte mixte d’appareils C 17 et C 130 ne permettrait pas de satisfaire aux besoins définis, en raison de la taille insuffisante de la soute du C 130 et du prix trop élevé du C 17. Au regard du coût, c’est la solution proposée par Airbus qui est la plus satisfaisante malgré le renchérissement dû aux spécifications techniques propres à la nature militaire de l’avion. Quant au moteur, SNECMA a lancé, sur la base du M88, une coopération avec les Allemands, les Italiens et les Espagnols qui est de nature à répondre aux besoins. Au total, on peut considérer que l’appareil proposé par Airbus offre la meilleure solution en termes techniques et financiers ;

— le retrait anticipé du Jaguar s’effectuera en deux temps, la première étape intervenant en 2001 et le dernier escadron étant retiré en 2005. Si les délais du programme Rafale sont tenus, la soudure entre les deux équipements se fera sans difficulté, même si les transformations à opérer au cours de l’année 2002 seront vraisemblablement difficiles à gérer et si, de façon temporaire, les capacités opérationnelles seront légèrement affaiblies ;

— s’agissant des MTA, si pour les deux premières promotions le recrutement a été national les quatre premiers mois, ils sont depuis recrutés localement. Ce recrutement s’opère dans de bonnes conditions. L’Armée de l’air est très satisfaite des MTA. S’il y a eu des difficultés avec certains cadres anciens, qui n’acceptaient pas qu’on puisse entrer dans l’Armée de l’air sans le baccalauréat, au contraire, les jeunes sous-officiers sont proches des MTA et souhaitent les aider à progresser.

— les textes relatifs aux personnels de l’Armée de l’air vont être modifiés pour créer des passerelles entre les MTA et le corps des sous-officiers. Elles prendront d’abord la forme de la sélection externe, qui suppose pour le candidat d’être titulaire du baccalauréat. Une partie des MTA suit des cours pour réussir cet examen et, en cas de réussite, il sera possible de les recruter comme sous-officiers. Par ailleurs, des épreuves du niveau de la classe de terminale, seront organisées, si possible, en liaison avec l’Education nationale ; l’accès au corps des sous-officiers sera également ouvert aux MTA qui y satisferont. Enfin, un certain nombre de MTA ont les qualifications requises pour passer des concours de recrutement d’ouvrier fonctionnaire ou d’ouvrier d’Etat. Des possibilités de recrutement seront recherchées dans cette voie. Ces actions ne concerneront cependant qu’une proportion modeste de MTA, puisque l’Armée de l’air en recrute 2 500 par an, contre 1 500 sous-officiers seulement.

M. Charles Cova s’est interrogé sur l’intérêt porté par l’Armée de l’air aux jeunes dont le parcours scolaire s’arrête avant la classe de terminale.

Le Général Jean Rannou a répondu que l’Armée de l’air portait une très grande attention à ces personnels et qu’elle aidait à la formation et à l’embauche de milliers de jeunes. Il a fait valoir qu’il avait accepté d’embaucher des jeunes titulaires d’un CAP ou d’un BEP, contre l’avis de certains de ses collaborateurs. Il a souligné que l’Armée de l’air entendait former ces jeunes souvent marqués par l’échec scolaire et leur donner une véritable qualification professionnelle. Il a fait observer que 2 000 à 2 500 sous-officiers les parrainaient et a souligné la contribution que l’Armée de l’air apportait ainsi à leur promotion sociale. Il a toutefois estimé qu’il convenait d’attendre un an à un an et demi pour juger des résultats de cette politique de formation.

Le Général Jean Rannou a ensuite indiqué qu’une trentaine d’avions, de tous types, étaient actuellement immobilisés mais que ce nombre était fluctuant. Pendant la période où un avion est cloué au sol, il sert de « réservoir » de pièces pour dépanner les autres appareils. Il est ensuite remis en état de marche, ce qui permet un « échelonnage » des appareils afin d’optimiser les potentiels de vol.

Il a souligné que le nombre d’heures de vol annuel des pilotes sur les avions de combat avait été stabilisé à 180 heures. Toutefois, ce plafond peut être dépassé par des pilotes effectuant des vols très longs ou être modulé pour permettre la progression des jeunes pilotes. Il a précisé que le projet de budget avait été construit sur la base d’une commande pluriannuelle de 48 Rafale pour l’Armée de l’air et la Marine dont 28 correspondraient à un engagement ferme.

A M. Robert Poujade qui souhaitait savoir si le lien établi entre les spécifications de l’Avion de transport futur et celles du VBCI pouvait permettre de conclure que les caractéristiques de ce dernier programme étaient définitivement arrêtées, le Général Jean Rannou a confirmé qu’elles avaient servi de référence pour déterminer les dimensions de la soute.

M. Michel Voisin a demandé si des personnels de l’Armée de l’air allaient participer aux groupes d’observateurs chargés de suivre l’application des accords récemment conclus pour le règlement de la crise du Kosovo.

Le Général Jean Rannou a précisé qu’il ne lui appartenait pas de décider d’une telle participation mais que, si le Chef d’état-major des armées sollicitait l’Armée de l’air, celle-ci mettrait bien évidemment à sa disposition les effectifs qu’il demanderait.


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