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ASSEMBLÉE NATIONALE

COMMISSION de la DÉFENSE NATIONALE et des FORCES ARMÉES,

COMPTE RENDU N° 40

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mardi 29 juin 1999
(Séance de 10 heures 30)

Présidence de M. Didier Boulaud, Vice-Président,
puis de M.Paul Quilès, Président

SOMMAIRE

 

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Audition de M. Alain Richard, Ministre de la Défense, sur la crise du Kosovo

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La Commission de la Défense nationale et des Forces armées a procédé à l'audition de M. Alain Richard, Ministre de la Défense, sur la crise du Kosovo.

En préalable à son exposé sur la mise en place de la force internationale de sécurité au Kosovo, le Ministre de la Défense a fait état de l’initiative qu’il avait prise d’engager un débat sur l’évaluation de l’action militaire menée par la France. Il a estimé tout à fait légitime que ce débat soit enrichi par l’apport d’autres enceintes, et notamment du Parlement, dont les initiatives, concertées si possible avec le Gouvernement, pourraient, le cas échéant déboucher sur des critiques, mais aussi conduire utilement à des propositions.

Il a, par ailleurs, rappelé que, si toute opération menée au sein d’une coalition vise à atteindre l’objectif militaire qu’elle s’est fixé, elle traduit également le souci de chacun des pays qui y participent de faire la démonstration auprès de ses alliés, de sa capacité à assurer sa mission. Il s’agit là d’un comportement légitime à condition de ne pas tomber dans la surenchère. A cet égard, il a jugé que la France, qui occupe dans l’OTAN une position originale et stimulante, a montré qu’elle était en mesure de tenir toute sa place.

Abordant ensuite la question de la structure de la force internationale de sécurité au Kosovo, il a rappelé que, même s’il existe une volonté de construire une identité de défense proprement européenne, l’Alliance atlantique est de fait actuellement le seul outil militaire multinational disposant en Europe d’une ligne de commandement unifiée et homogène. Il a ajouté que la mission, la composition et l’organisation de la KFOR s’inscrivaient dans une des possibilités proposées par le texte de base élaboré sous la présidence de la Grande-Bretagne et de la France à Rambouillet, au mois de janvier 1999, et actualisé depuis. L’influence européenne dans la constitution de la force a donc été déterminante, quel qu’ait pu être le droit de regard exercé par les Etats-Unis. Il a indiqué que si, au terme du déploiement de la force internationale de sécurité, les cinq pays initiateurs de la KFOR – Grande-Bretagne, Etats-Unis, France, Allemagne, Italie – en représenteraient 60 % des effectifs, ils en formaient, pour l’heure, la quasi-totalité, les autres pays alliés n’étant pas en mesure de déployer leurs contingents à brefs délais. A cet égard, faisant état de l’incapacité de certains alliés européens à déployer un contingent limité avant un mois, malgré un préavis relativement long, M. Alain Richard a souligné l’ampleur des tâches qu’il reste à accomplir pour construire une défense européenne, d’autant plus que, dans le cas présent, les capacités logistiques de la force sont pourtant déjà en place au Kosovo.

Le Ministre de la Défense a ensuite présenté les difficultés rencontrées par la KFOR dans l’accomplissement de sa mission, soulignant d’emblée qu’elles ne représentaient qu’une partie de l’éventail des situations envisagées initialement. A ce titre, il s’est réjoui que le retrait des forces de la République fédérale de Yougoslavie se soit globalement déroulé conformément au calendrier fixé, en raison de la volonté des autorités serbes de s’afficher comme des partenaires militaires appliquant un accord négocié et non comme les signataires d’un acte de capitulation, et de leur souci de préserver le moral de leurs troupes en sauvant tous les matériels qui pouvaient l’être.

Le Ministre de la Défense a alors abordé la question des réfugiés. Il a exposé que les brigades étaient entrées au Kosovo en se préparant à affronter des milliers de situations individuelles d’une extrême détresse; mais que leur intervention avait eu lieu dans des circonstances moins dramatiques. Beaucoup de gens étaient restés cachés chez eux, comme à Gnjilane. En zone rurale, les paysans qui avaient fui dans les montagnes lors du passage des forces serbes s’étaient ensuite organisés pour assurer un fonctionnement minimal de leurs exploitations. De ce fait, les opérations de distribution de rations et les déploiements d’infirmeries de campagne ont été moins nombreux que prévus.

Il a ajouté que la KFOR avait aussi été confrontée à un certain nombre d'actions désespérées menées par des Serbes, soldats de l’armée régulière, membres de forces paramilitaires ou encore simples résidents, qui accompagnaient leur départ de destructions ou d’actes d’agression. Face à ces exactions, auxquelles elle s’attendait, la KFOR avait eu pour premier objectif de protéger et sauver des vies humaines. La force de 23 000 militaires déployés assure d’ores et déjà une présence militaire suffisante dans les zones les plus peuplées : à Kosovska Mitrovica, la brigade française assure la présence d'un groupe, c'est-à-dire d’un tiers de section, par pâté de maisons, soit un quadrillage assez dense. Dans les villages, en revanche, où la KFOR prend possession du terrain pied à pied, des événements comme le déclenchement d’incendies peuvent plus facilement survenir, le système de sécurité civile étant par ailleurs d’une efficacité médiocre. L’achèvement du contrôle de l’espace par la KFOR devrait permettre de mettre fin à ce type d’exactions.

Le Ministre de la Défense a expliqué aussi que la KFOR devait par ailleurs faire face aux tentations de l’UCK de prendre le contrôle de la situation, la victoire grossissant instantanément ses rangs de renforts nombreux.

Il a ajouté que l’attitude de la brigade française à l’égard de l’UCK ne se comparait pas défavorablement avec celle des forces déployées dans les zones relevant de la responsabilité d'autres pays. Lorsqu'elles se trouvaient à Gnjilane et dans ses environs, les forces françaises ont empêché l’UCK de pénétrer en armes dans les localités. Dans la zone qui leur a été impartie, elles agissent à l’identique, même si ensuite elles entretiennent une coopération institutionnelle avec l’UCK pour l’application des accords passés avec cette organisation.

M. Alain Richard a alors évoqué la situation des populations serbes. Faisant état des regroupements dans certains quartiers ou dans certains villages des Serbes qui ne quittaient pas le Kosovo, il a fait valoir qu’il fallait être conscient des tensions auxquelles pouvaient être confrontées, par exemple, une cinquantaine de familles serbes dans une localité comptant à l'origine quelques milliers d'habitants albanophones et où rentraient des réfugiés qui découvraient l’ampleur des destructions et des agressions commises.

Le Ministre de la Défense a ensuite évoqué la question de la transition entre le déploiement des forces militaires et l'installation de l’administration civile. Il a exposé que la KFOR devait assurer des fonctions civiles comme la logistique du soutien humanitaire ou l'aide à la reprise du fonctionnement des services publics, d’autant que les albanophones avaient été évincés par les Serbes de la gestion des secteurs jugés sensibles, comme le système de distribution d’eau potable.

S’agissant du maintien de l’ordre, il a expliqué que, sur les 3 000 membres de la force de police internationale prévue par l’ONU, 10 % environ étaient désignés. Il a ajouté qu’une difficulté tenait aussi à l’édiction de normes, notamment pénales. À l’heure actuelle, du fait de l’absence de normes préexistantes applicables, chaque brigade applique sa loi nationale. Mais le travail est en cours pour l’établissement de normes transitoires jusqu’au passage à l’autorité de la présence internationale civile de l’ONU.

En conclusion, le Ministre de la Défense a estimé que les conditions dans lesquelles la KFOR accomplissait son rôle paraissaient satisfaisantes eu égard à l'ampleur des difficultés à régler.

Il a aussi précisé que la bonne maîtrise de la situation par la KFOR amenait les réfugiés à revenir de façon massive, et qu’en conséquence on pouvait estimer que les quatre cinquièmes de ceux d’entre eux qui avaient quitté le Kosovo en mars seraient rentrés avant la fin du mois d’août. L'effet de masse produit par ce retour allait cependant maintenir un certain climat de tension entre les communautés quels que soient les efforts déployés pour créer progressivement les conditions de leur vie commune.

Le Président Paul Quilès s’est alors interrogé sur les modalités de la coopération entre la KFOR et l’administration civile provisoire, et notamment sur une éventuelle subordination de la première à la seconde dans certains domaines. Il a également demandé au Ministre quelle était la marge d'autonomie de chacune des composantes de la KFOR relevant des différentes Nations-cadres et si elles faisaient preuve d'une unité satisfaisante dans la conduite des opérations. Il a demandé à ce propos si la brigade française envisageait d’instaurer, si nécessaire, un couvre-feu à l'instar d'autres grands sous-commandements. Il a également exprimé sa préoccupation à l'égard du projet, attribué aux Etats-Unis, d'accepter la transformation de l'UCK en une sorte de garde nationale ou d'en faire le noyau de la future police du territoire. Enfin, il s’est interrogé sur les modalités d’intégration du contingent russe dans la KFOR, en particulier dans la zone de responsabilité française.

Le Ministre de la Défense a apporté les éléments de réponse suivants :

— la résolution 1244 du Conseil de sécurité de l'ONU distingue clairement les missions de la KFOR de celles de l’administration civile intérimaire, de sorte que le représentant spécial du secrétaire général de l'ONU ne dispose d’aucune autorité hiérarchique sur le commandant de la KFOR, même s'il est tenu d'entretenir d’étroits rapports de concertation et de coopération avec lui ;

— l’unité de commandement de la KFOR est réelle, elle est assurée par les instructions quotidiennes que le Général Jackson donne aux commandants de brigades qui doivent cependant tenir compte de situations différenciées. S'agissant de la France, elle a exprimé sa préférence pour un secteur qui ne soit pas contigu à l’Albanie. Etant donné la situation de sa zone de responsabilité, le commandement français n'a pas jugé nécessaire d'établir de couvre-feu ;

— dans la philosophie des accords de Rambouillet, l’UCK n’est qu’une composante de la représentation des Kosovars d’origine albanaise. Sa vocation à se transformer en garde nationale, possibilité mentionnée par l’accord qu’elle a passé avec le commandant de la KFOR, ne constitue qu'une perspective politique de long terme, au-delà de la mise en place de la présence civile internationale. En revanche l'accord l’engage de façon immédiate et concrète à accepter sa démilitarisation selon un échéancier précis. L’alternative d’une démilitarisation de force aurait placé la KFOR  dans une situation beaucoup plus difficile ;

— le niveau de l’engagement de la Russie dans la KFOR n’est pas encore définitivement connu, l’hypothèse d’un contingent de 3 600 hommes retenue par l'accord passé entre les Ministres russes et américains devant être, selon toute vraisemblance, revue à la baisse. Néanmoins, l’insertion des troupes russes dans la chaîne de commandement de la KFOR est désormais fixée selon un schéma proche du modèle de la SFOR. Les bataillons russes présents au sein des brigades française, allemande et américaine, recevront leurs ordres opérationnels d'un officier russe placé auprès du commandant de ces brigades dont il sera en pratique l'adjoint et dont il appliquera les instructions. Toutefois, par souci de cohérence, une compagnie de la Nation-cadre sera présente au sein des bataillons russes. Le commandant de la brigade disposera ainsi d’un point d’appui lui permettant d’assurer la continuité de la chaîne de commandement de la KFOR en toutes circonstances.

Préalablement à ses observations relatives à la crise du Kosovo, M. René Galy-Dejean a souhaité déclarer que les conditions d’examen en séance publique du projet de loi relatif à l’organisation des réserves et du service de défense ne lui paraissaient pas convenables. Ce texte, qui constitue le troisième pilier de la professionnalisation des armées, méritait à ce titre plus qu’une « séance balai » de fin de session.

Le Ministre de la Défense a observé que le calendrier de la session parlementaire pouvait rendre difficile l’examen d'un certain nombre de projets de loi présentés par le Gouvernement.

Le Président Paul Quilès et M. Didier Boulaud ont relevé que le groupe RPR n’avait pas pris position contre l’inscription de l’examen du projet de loi sur les réserves à l’ordre du jour de la séance du 30 juin.

M. René Galy-Dejean s’est alors félicité de l’émergence, au cours de la crise du Kosovo, d’une démarche européenne autonome, aussi bien vis-à-vis des Etats-Unis que de la Russie. Il a demandé quelles mesures le Gouvernement avait l’intention de prendre pour mieux manifester la réalité de cette démarche autonome.

M. Pierre-André Wiltzer, s’inquiétant des difficultés dues notamment à la contiguïté avec le territoire de la Serbie proprement dite du secteur placé sous la responsabilité de la France, s’est demandé s’il ne serait pas souhaitable d’augmenter les effectifs de la brigade française et si ce renforcement était matériellement possible.

M. Guy-Michel Chauveau a questionné le Ministre sur la réflexion stratégique qu'il convenait d'engager sur la base des enseignements du conflit. Il a estimé nécessaire de tirer les conséquences, pour la programmation militaire, de cette réflexion, dont la dimension européenne lui est apparue essentielle. Il a demandé s'il n'était pas opportun, dans ce contexte, de tenir compte des travaux de la commission qui, en Allemagne, est chargée de proposer un modèle de défense répondant à la nouvelle situation stratégique.

M. Charles Cova s’est interrogé sur la gravité de la menace constituée par les mines au Kosovo, malgré la mort des deux militaires britanniques qui en ont été victimes. Il s’est enquis, dans ces conditions, du rôle du 17è RGP de Montauban. Il s’est également demandé si l'effectif de trois mille hommes prévu pour la force de police internationale serait suffisant.

M. François Lamy a interrogé le Ministre sur la découverte, par les troupes de la KFOR, de documents planifiant les massacres et l’épuration ethnique au Kosovo. Il a demandé s’il était concevable que le contingent russe soit déployé dans des zones majoritairement peuplées de Serbes. Enfin, il s’est interrogé sur la nature des forces de police envoyées au Kosovo, se demandant si une priorité ne devait pas être accordée aux éléments spécialisés dans le maintien de l’ordre, comme la gendarmerie mobile.

M. Jean-Noël Kerdraon a questionné le Ministre sur les raisons pour lesquelles le contingent britannique était de loin le plus important au Kosovo, largement devant les autres pays, dont la France. Il s’est également enquis du coût total des opérations militaires menées dans le cadre de la crise du Kosovo pour l’année 1999.

M. Bernard Grasset a demandé quelle serait la provenance géographique des trois mille policiers qu’il est prévu d’envoyer au Kosovo et quelles seraient leurs missions, notamment en ce qui concerne les enquêtes relatives aux charniers dont il a estimé qu’il ne faudrait pas les laisser entièrement au FBI américain.

Mme Martine Lignières-Cassou a interrogé le Ministre sur les raisons des difficultés rencontrées par certains pays européens pour déployer des forces terrestres au Kosovo. Elle a également demandé si les accords de Rambouillet avaient une chance d’être appliqués et si on pourrait éviter une partition de la région.

M. Loïc Bouvard a demandé si le coût des opérations au Kosovo serait imputé sur le budget de la Défense ou sur l'ensemble du budget de la Nation.

Le Ministre de la Défense a apporté les éléments de réponse suivants :

— les "cinq conditions" du règlement du conflit ont été d’abord fixées par les membres du groupe de contact avant d’être reprises par le secrétariat général de l’ONU et d’être adoptées par le Conseil de l’Alliance atlantique mais cette séquence n'a pas été clairement perçue par l'opinion ;

— la brigade française sera complétée par des unités belge, danoise, bulgare et émiratie ainsi que par environ 600 soldats russes. L’effectif d'environ 4 000 soldats français actuellement au Kosovo est inférieur à l’objectif de 7 000 initialement retenu, un contingent important restant en Macédoine mais il faut rappeler que les distances sont au maximum de l'ordre de 100 km d'une extrémité à l'autre de la province ;

— le niveau d'effectif de 53 000 hommes fixé pour la KFOR correspond d’ailleurs aux besoins de la période de crise et de réinstallation des réfugiés. Un niveau moins élevé pourrait être envisagé dans le courant de l’année prochaine, quand les tensions nées du retour des réfugiés se seront réduites ;

— l'Europe de la défense progressera dans la pratique, avec des projets communs comme celui de l'avion de transport futur pour lequel une décision pourrait être prise avant la fin de l'année. Les exercices conjoints dans un cadre européen permettront également de resserrer les liens entre les différentes forces nationales et de renforcer la confiance dans leur capacité d'action commune. Mais il sera nécessaire de concrétiser les décisions du sommet de Cologne et la France présentera des propositions en ce sens ;

— le problème des mines ne doit pas être sous estimé. La plupart d’entre elles ont été signalées car utilisées autour des zones militaires yougoslaves. Ces mines seront traitées méthodiquement car toutes les brigades disposent d’unités de déminage. Le 17ème RGP de la brigade française sera appuyé par une centaine de sapeurs bulgares ;

— il sera nécessaire de répartir les missions de sécurité publique entre la force civile de police sous l'autorité du représentant des Nations Unies et les forces militaires qui conserveront des missions de maintien de l'ordre, qu'elles assureront notamment par des escortes et des patrouilles. Le Secrétaire général de l’ONU a fait une demande portant sur 3 000 policiers mais les réponses des Etats prêts à une contribution ne dépassent pas 400 policiers. La France ne souhaite pas, en règle générale, participer aux forces civiles de police même si, dans le cas présent, elle approuve leur constitution. L’administration provisoire du Kosovo permettra de mettre en place une police locale mais il est encore prématuré de déterminer ses conditions de recrutement ;

— de nombreux éléments montrent qu’il y a eu planification de massacres au Kosovo. Dans leur zone d’intervention, les soldats allemands ont ainsi pu identifier des documents attestant cette planification ;

— il est prévu que les soldats russes affectés à la brigade française soient placés dans une zone albanophone dans laquelle résident peu de Serbes. Dans la négociation menée par les ministres russes et américains, ces derniers se sont efforcés d’éviter que les zones confiées aux forces russes soient contiguës afin d'éviter de créer l'impression que la Russie disposait également d’un secteur de responsabilité, ce qui aurait pu dissuader le retour des réfugiés ;

— l’effectif de soldats britanniques est élevé car le Royaume-Uni souhaite faire la démonstration de sa capacité à piloter une intervention terrestre à dominante européenne ;

— les surcoûts liés aux opérations aériennes et au prédéploiement de 3 000 soldats pour la KFOR représentent près de 1,5 milliard de francs pour le premier semestre de l'année. Le coût d’intervention de la KFOR est estimé à moins de 400 millions de francs par mois, soit un peu plus de 2 milliards pour le second semestre. Au total, la crise risque de représenter pour la France un surcoût de l'ordre de 3,5 milliards de francs pour l’exercice 1999. Ces montants feront l’objet d’arbitrages financiers et seront financés par le collectif budgétaire de fin d’année. Mais ils ne pourront pas être supportés en totalité par le budget de la défense ;

— certains pays européens éprouvent des difficultés à projeter des troupes terrestres rapidement car leurs systèmes de défense ne sont pas adaptés à ce type d'opérations. Contrairement à la France qui, après avoir défini de nouvelles orientations stratégiques dans le Livre Blanc de la Défense de 1994, les a traduites dans la loi de programmation militaire, très peu de pays européens se sont engagés dans une réforme comparable de leurs structures militaires, ce qui explique leurs difficultés à projeter un effectif, pourtant limité, de l'ordre du millier d’hommes ;

— les chances de stabilité au Kosovo sont en tout état de cause plus élevées maintenant qu’il y a six mois même si le retour des réfugiés albanophones crée des tensions et inquiète les populations serbes. Il est difficile d’évaluer si ces populations vont ou non partir. Trois facteurs pourraient favoriser le maintien des populations serbes au Kosovo. La force européenne présente sur le terrain renforce leur sentiment de sécurité ; l'aide financière à la reconstruction du Kosovo est susceptible de créer un environnement économique attractif ; au contraire, la manière dont les réfugiés serbes ont été accueillis en Serbie depuis dix ans est dissuasive. L’objectif politique est bien d’éviter une partition du Kosovo.

——fpfp——


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