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ASSEMBLÉE NATIONALE

COMMISSION de la DÉFENSE NATIONALE et des FORCES ARMÉES

COMPTE RENDU N° 8

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mercredi 20 octobre 1999
(Séance de 9 heures)

Présidence de M. Charles Cova,
puis de M. Paul Quilès, Président

SOMMAIRE

 

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Projet de loi de finances pour 2000 (n° 1805) 

- Audition des représentants des associations de retraités militaires

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La Commission a entendu les représentants des associations de retraités militaires sur le projet de loi de finances pour 2000 (n 1805).

M. Jean-Michel Bernard, représentant l'association nationale des officiers de carrière en retraite (ANOCR), a tout d'abord appelé l'attention de la Commission sur la situation des lieutenants et sous-lieutenants, retraités avant le 1er janvier 1976 après avoir accédé à un grade d'officier au terme d'une longue carrière et dont la situation n'a pas été prise en compte par la grille Durafour. Ces retraités ou leurs veuves perçoivent une retraite inférieure à celle de leurs collègues restés sous-officiers. Un consensus semble s'être dégagé pour remédier à cette situation qui concerne une population peu nombreuse et en diminution constante mais des désaccords entre les administrations compétentes sur les moyens d'y parvenir empêchent de trouver une solution.

Puis M. Jean-Michel Bernard a évoqué la situation des veuves allocataires dont le mari est décédé avant le 1er décembre 1964 en soulignant que, si leur allocation était inférieure au minimum légal, elles pouvaient obtenir sur leur demande une allocation complémentaire mais que la majoration ainsi accordée était récupérable sur leur succession dès lors qu'elle excède 300 000 francs. Il a alors demandé que la situation de ces veuves soit alignée sur celle des bénéficiaires d'une pension de réversion. Il a estimé qu'au minimum le seuil de patrimoine au-delà duquel la majoration était récupérée devait être porté de 300 000 à 500 000 francs. Puis il a fait observer les conséquences pénalisantes des effets de seuil pour les veuves titulaires d'une pension modeste qui perdent, pour quelques centaines de francs de pension par mois, le bénéfice d'aides diverses et s'est prononcé pour un lissage des disparités existantes.

M. Henri Lacaille, président de l'Union nationale de coordination des associations militaires (UNCAM), a rappelé que les allocations de chômage versées aux anciens militaires étaient, jusqu'à la loi de professionnalisation des armées de 1996, réduites dans des proportions souvent importantes au prétexte qu'ils bénéficiaient d'une retraite considérée comme un avantage vieillesse. Il s'est donc félicité de la reconnaissance, par la loi de 1996, du principe selon lequel la pension militaire ne peut pas être considérée comme un avantage vieillesse avant l'âge de 60 ans. Il s'est toutefois inquiété de la persistance de litiges avec l'UNEDIC qui ont dû être tranchés par la Cour de Cassation.

Il a également regretté que les anciens militaires âgés de plus de 60 ans ne soient pas concernés par les dispositions de la loi de 1996 alors que leur retraite est faible s'ils ont quitté les armées avant 45 ans et que les revenus que leur procure leur emploi civil leur restent souvent nécessaires pour faire face à leurs charges de famille.

M. Pierre Ingouf, représentant la confédération nationale des retraités militaires et des veuves de militaires de carrière (CNRM), a souligné la volonté des associations siégeant au Conseil permanent des retraités militaires (CPRM), de développer une démarche commune dans l'expression des demandes des retraités militaires et de leurs ayants cause. Il a ajouté que cet effort d'union avait abouti à un renforcement du rôle et des modes de fonctionnement du CPRM dont il a fait valoir qu'il constituait le seul organisme réellement représentatif du monde de la retraite auprès du ministère de la Défense. Il a alors indiqué que le CPRM s'était doté d'une commission permanente apte à répondre rapidement à toutes les questions qui lui sont soumises. Puis, évoquant la loi sur les réserves, il a exprimé sa préoccupation à l'égard de la disposition ne soumettant que les anciens militaires de carrière ou sous contrat à l'obligation de disponibilité pendant cinq ans. Il a estimé que cette disposition, d'une part, créait une rupture d'égalité et, d'autre part, tendait à « professionnaliser » la réserve opérationnelle en raison de la faiblesse probable du nombre de volontaires. Il a émis la crainte que cette situation provoque un relâchement de l'esprit de défense et des relations entre la Nation et les armées.

M. Bernard Lefevre, Président du Syndicat professionnel des Anciens Médecins des Armées (SAMA) après avoir souligné que son organisation est membre de l'UNCAM et partage, à ce titre, l'ensemble de ses préoccupations, a indiqué qu'elle a pour particularité essentielle de rassembler des médecins souvent bénéficiaires d'une retraite très partielle et qui entament une deuxième carrière dans un milieu lui-même en pleine crise.

Il a alors souhaité attirer l'attention de la Commission sur l'ordonnance du 30 mars 1982, modifiée par la loi du 17 janvier 1986 relative aux possibilités de cumul entre pensions de retraite et revenus d'activité, créant une contribution de solidarité à payer par l'employeur et pénalisant plus particulièrement ceux qui entament une deuxième carrière salariée. Précisant que l'application de cette disposition a pu être aménagée et repoussée d'année en année jusqu'au 31 décembre 1999, il a indiqué que le SAMA demandait son abrogation définitive ou, à défaut, un nouveau report. Insistant sur l'urgence à se préoccuper de cette disposition qui pouvait auparavant paraître socialement compréhensible mais qui se révélait en fait très injuste et discriminatoire pour tous ceux qui bénéficiaient uniquement d'une pension de retraite partielle, il a tenu à saluer l'action de M. Etienne Pinte, député des Yvelines, qui est intervenu à plusieurs reprises par des questions écrites à ce sujet. Il a alors souligné que la professionnalisation des armées, dont le corollaire est la possibilité amplifiée de carrières courtes et mi-longues, rendait encore plus nécessaire la modification de la législation dans ce domaine.

Il a ensuite ajouté qu'un problème de portée beaucoup plus limitée mais moralement sensible concernait les médecins anciens combattants, qui souhaitaient bénéficier d'une retraite anticipée mais ne pouvaient y prétendre au motif qu'ils avaient droit à une retraite normale à 60 ans. Il a regretté que, de ce fait, ils perdent le bénéfice d'une retraite plus élevée pendant plusieurs années, ce qui apparaissait comme une situation particulièrement anormale pour des citoyens ayant mérité la reconnaissance de la Nation. Il a estimé qu'il était donc urgent que des dispositions plus favorables soient prises pour ce petit nombre de médecins, anciens militaires de carrière ou appelés.

Evoquant enfin le problème des médecins des armées ayant passé tardivement leur concours de spécialité plusieurs années après leur assistanat, il a indiqué que le temps écoulé entre ces deux concours était actuellement considéré comme une période de formation et prolongeait l'engagement initial, ce qui empêchait le médecin de pouvoir bénéficier du droit de retraite après 25 ans de carrière, contrairement au statut des officiers. Relevant qu'une décision du Conseil d'Etat était actuellement attendue sur ce point, il a souhaité obtenir des précisions sur les intentions de la représentation nationale.

Faisant part de la réflexion du SAMA sur les nouvelles orientations des armées, il a précisé qu'une conférence faite au CHEAR et intitulée « Quel avenir pour un syndicat dans l'armée ? » lui avait donné l'occasion de défendre le caractère constitutionnel du principe d'universalité du droit syndical qui devait selon lui s'appliquer également aux militaires, contrairement aux dispositions de l'article 10 du règlement de discipline générale des armées. Il a fait valoir à ce propos qu'une réflexion approfondie sur les conditions d'exercice du droit syndical en milieu militaire s'imposait, sa reconnaissance au sein d'une armée professionnelle, liée aux autres armées européennes, dont la plupart ont l'expérience de sa pratique, paraissant inévitable à plus ou moins court terme.

M. André Arrouet, Président national de l'Union nationale des sous-officiers en retraite (UNSOR), a souhaité insister plus particulièrement sur la prise en compte de certaines indemnités et divers accessoires de solde pour le calcul de la pension de retraite.

Déplorant le rejet systématique de cette revendication, sans cesse renouvelée, il a contesté le principe édicté à l'article L15 du Code des Pensions Civiles et Militaires de Retraite, en vertu duquel seuls les éléments de base sont pris en compte dans la liquidation des pensions de retraite. Constatant que ce principe n'était pas toujours respecté puisque les refus actuels faisaient état de l'intégration de l'indemnité de résidence entre les années 1968 et 1982 puis de l'intégration progressive sur 15 ans, à partir de 1984 de l'ISSP dans le calcul de retraite des militaires de la Gendarmerie, il a relevé que d'autres catégories de fonctionnaires, relevant de ministères différents, avaient obtenu satisfaction pour des demandes de même nature au cours de la décennie écoulée.

Après avoir rappelé qu'à l'occasion de la 59ème session du CSFM les militaires en activité avaient renouvelé leur demande de prise en compte des indemnités pour service en campagne dans le calcul des droits à pension et souhaité que les militaires de la Gendarmerie bénéficient dès l'âge de 50 ans de leur pension de retraite complète sur une base intégrant l'ISSP, il a estimé que l'on ne pouvait, sur cette question, opposer actifs et retraités.

Il a enfin considéré comme particulièrement légitime de demander la prise en compte de l'indemnité pour charges militaires dans le calcul de la retraite afin de maintenir le pouvoir d'achat des retraités et en particulier des veuves, au moment où l'état des finances publiques connaissait une amélioration.

M. Roland Candy, représentant l'Association nationale des Officiers de carrière en retraite (ANOCR) a préalablement précisé que son association avait pour vocation d'accompagner les cadres militaires dans leur reconversion professionnelle et de maintenir leurs liens de solidarité dans cette deuxième partie de leur carrière.

Constatant avec satisfaction que les officiers ou sous-officiers quittant le service dans la trentaine parvenaient sans trop de mal à trouver un emploi acceptable, il s'est inquiété de ce qu'ils acceptaient souvent une régression sensible de leur niveau de ressources. Regrettant qu'une telle situation aggrave le traumatisme d'un départ forcé dans la majorité des cas, il a estimé que ses conséquences étaient également ressenties par les personnels restés en service dans les armées et dont le tour de départ approchait.

Il a donc demandé que l'effort consenti pour la préparation de ce difficile passage soit maintenu et renforcé, notamment au bénéfice des plus jeunes, afin d'éviter que la profession militaire qui a toujours été la plus astreinte et la plus risquée des fonctions publiques ne devienne la plus précaire.

Qualifiant la situation des cadres quittant les armées après 45 ans de beaucoup plus préoccupante, il a précisé que leur pension de retraite proportionnelle, après 25 années de service, ne correspondait, le plus souvent, qu'à une demi-solde. Or, à cet âge, les chances de trouver un emploi offrant un revenu complémentaire sont d'autant plus faibles qu'une large majorité des officiers ne disposent d'aucune expérience dans un métier intéressant les entreprises.

Reconnaissant que ces départs étaient presque tous volontaires, il s'est interrogé sur le caractère fortement contraignant de l'environnement psychologique dans lequel l'administration formulait ses offres, et s'est déclaré préoccupé des effets que le risque de connaître une situation de gêne ou de précarité durant la quarantaine et la cinquantaine peut provoquer sur le moral des cadres susceptibles d'être concernés par les mesures de dégagement.

Il a demandé si, dans de telles conditions, il ne serait pas envisageable de transférer une partie de l'effort financier d'incitation au départ volontaire vers une plus large possibilité d'intégration des cadres militaires dans la fonction publique civile. Il a relevé que, pour l'Etat, le coût d'une telle mesure ne devrait pas être bien supérieur à celui du dispositif actuel, puisque le versement de la pension serait différé à la fin des services civils.

Il a en conclusion souligné le rôle que pouvait jouer la Commission dans la défense des intérêts professionnels des militaires jusqu'à ce que la loi leur accorde le droit d'association et la possibilité de les défendre eux-mêmes.

M. Jacques Tupet, Vice-Président de l'Association des Officiers de la Marine (AOM), a rappelé que le bénéfice des emplois réservés aux anciens militaires dans les grandes administrations de l'Etat demeurait une forme de reconversion recherchée par les ayants droit, et ce d'autant plus que les ressources du marché du travail s'amenuisaient.

Tout en reconnaissant que les diverses mesures prises pour l'aide à la préparation du concours des emplois réservés avaient amélioré les conditions d'accès, il a néanmoins fait état des modalités de nomination aux postes à pourvoir, qui entraînerait une relative incompréhension, voire le découragement des candidats et donnait lieu à une publicité négative auprès de leurs camarades militaires.

Prenant l'exemple d'un candidat reçu à son examen avec la note N et inscrit à ce titre sur une liste d'attente pour le type d'emploi retenu et le département choisi, il a précisé que sa nomination ne pouvait intervenir qu'en fonction des emplois disponibles. Si elle était reportée à l'année suivante, cette nomination pouvait alors être empêchée par l'admission de nouveaux candidats dont les notes étaient supérieures.

Il a considéré que, si le système avait sans doute sa logique interne, il paraissait discutable sur le plan de l'aide à la reconversion civile qui restait tout de même l'objectif premier des emplois réservés depuis leur instauration par le Second Empire. Il a donc proposé de revoir les modalités de nomination en privilégiant les candidats déjà inscrits et ajournés, une telle réforme interne à la fonction publique ne coûtant rien au budget. Il a estimé qu'en tout état de cause, il conviendrait, au moins, d'améliorer l'information des candidats sur les aléas des nominations, la nature des postes ouverts et leurs chances statistiques de réussite.

M. Guy Ximena, Président adjoint de la Fédération nationale des Officiers mariniers en retraite et Veuves (FNOM), a insisté sur la convergence des revendications de son association avec celles des autres associations de militaires en retraite. Il a néanmoins souhaité attirer plus particulièrement l'attention de la Commission sur deux problèmes déjà abordés par des questions écrites de parlementaires.

Evoquant la question des bonifications annuitaires, qui s'appliquent au calcul d'une pension après 15 années de service actif, il a précisé qu'elles étaient accordées lorsque le militaire remplissait certaines fonctions spécifiques sur un théâtre d'opérations ou sur des équipements particuliers tels que les sous-marins. Ainsi un militaire faisant valoir ses droits à retraite après avoir accompli vingt années de service actif et ayant acquis dix bonifications annuitaires, percevait une pension calculée sur trente annuités, soit 60 % de sa solde de base.

M. Guy Ximena a souligné que seuls pouvaient avoir droit aux bonifications d'annuités les personnels réunissant les conditions requises pour percevoir la retraite proportionnelle, c'est-à-dire ayant accompli quinze ans de service actif. Les personnels qui ne remplissaient pas ces conditions perdent de ce fait toutes les bonifications acquises. Or, si jusqu'à présent les conséquences de cette disposition restaient marginales, le militaire engagé étant pratiquement assuré de rester quinze ans en service, la professionnalisation et les carrières courtes soulèvent de réelles difficultés. En effet, de nombreux militaires non renouvelés dans leurs fonctions après huit et onze ans de service risquent de perdre, non seulement un emploi, mais aussi des bonifications annuitaires, ce qui entraîne de fait une forte distorsion entre leur situation et celle des militaires ayant accompli au moins quinze ans de service actif.

Précisant que le ministère de la Défense entreprenait des démarches auprès du ministère de l'Emploi et de la Solidarité pour régler cette difficulté, M. Guy Ximena a souhaité que le législateur lui accorde également une attention toute particulière.

La prise en compte par la Caisse nationale d'assurance vieillesse (CNAV) des trimestres passés lors du service national obligatoire dans le calcul des pensions constitue le second point qui préoccupe la FNOM. En effet, la CNAV prend en compte les trimestres passés sous les drapeaux seulement pour ceux qui ont travaillé avant leur incorporation, ne serait-ce que lors d'un stage accordant un trimestre d'annuités. Etant donné qu'il faudra justifier à l'avenir de davantage de trimestres de travail qu'auparavant pour obtenir une retraite complète, la FNOM s'inquiète de l'accroissement des disparités de traitement qui résultera inéluctablement de cette disposition.

M. Guy Ximena a également souligné que la CNAV validait dans certains cas de nombreux trimestres non cotisés et que la Cour des Comptes, dans un récent rapport, préconisait la validation de tous les trimestres de service national, même pour les personnes n'ayant pas exercé auparavant d'activité professionnelle.

Se prononçant en faveur d'une intervention du législateur pour procéder à cette validation avec effet rétroactif en raison de la suspension du service national, il a souligné le souci des associations de militaires en retraite de prendre en compte également les intérêts professionnels des plus jeunes générations.

M. Elie Gambier, Président de la Confédération française d'associations de retraités et pensionnés de la Gendarmerie, a indiqué que son association, composée uniquement de retraités de la Gendarmerie et de leurs ayants droit, était très attentive à l'évolution des nouvelles dispositions mises en _uvre dans le cadre de la professionnalisation des armées. Il a par ailleurs fait part de ses préoccupations à propos de plusieurs questions relatives à l'emploi des personnels de la Gendarmerie nationale, évoquant les nouvelles missions qui devaient incomber particulièrement à la Gendarmerie mobile dans le domaine de la police de proximité ainsi que l'accroissement du nombre de brigades de prévention de la délinquance juvénile et s'est demandé si l'ensemble de ces redéploiements pourraient s'effectuer dans de bonnes conditions sans augmentation des effectifs. Il s'est également interrogé sur les problèmes suscités par la mise en place progressive dans la Gendarmerie du nouveau système de volontariat, mentionnant le recrutement et la modeste rémunération des gendarmes adjoints. Il s'est inquiété des difficultés soulevées par le remplacement de 1 500 sous-officiers par 208 emplois d'officiers et par la création de 1 227 emplois d'appelés ou volontaires dont la montée en puissance apparaît en retrait par rapport aux prévisions de la programmation.

Il a demandé que la Gendarmerie puisse obtenir les moyens financiers nécessaires pour faire face aux besoins nouveaux suscités par les missions et les tâches imprévisibles confiées à ses personnels. Soulignant que la protection des biens et des personnes était garantie par la Constitution, il a fait valoir que cette mission ne pouvait s'exercer au rabais alors que les menaces d'insécurité s'amplifient, comme l'attestent les zones sensibles et, après avoir souligné qu'une solide formation des personnels était nécessaire, il a estimé qu'il était inquiétant d'entendre parler d'un éventuel relâchement des liens entre les élus locaux et la Gendarmerie.

Il a renouvelé les demandes de la CFARPG exprimées l'an passé, notamment la fixation d'un minimum décent pour les pensions de réversion allouées aux veuves des personnels militaires, certaines disposant de moins de 4 000 francs de revenus mensuels, l'augmentation progressive du taux, figé à 50 %, pour celles n'ayant pas d'autres ressources, l'assouplissement des conditions d'admission ou d'élévation dans les ordres nationaux non seulement pour les personnels d'active, mais également pour ceux qui, retraités, assument avec dévouement depuis de nombreuses années des responsabilités dans des associations à caractère social et de solidarité corporative, et la participation effective des associations nationales représentant les retraités militaires à l'ensemble des organismes consultatifs et de gestion, au même titre que les syndicats professionnels.

M. Léon Lebrec, Président de l'union nationale de personnel en retraite de la Gendarmerie (UNPRG), a d'abord évoqué les difficultés d'hébergement des gendarmes adjoints. Faisant remarquer que ceux-ci n'étaient pas logés par nécessité de fonction mais simplement hébergés à titre individuel, il a souligné la distorsion qui était ainsi créée entre la situation qu'ils connaissaient malgré leur rémunération modeste et la faible aide sociale au logement qu'ils pouvaient percevoir et celles des jeunes gendarmes bénéficiant d'un logement avec leur compagne ou leur épouse.

Evoquant alors la décision prise, dans le cadre de la « fidélisation », d'employer six escadrons de Gendarmerie mobile dans les zones urbaines dites sensibles, pour moitié en zone de Gendarmerie et pour moitié en zone de police d'Etat, il s'est inquiété de l'apparition de pratiques tendant à confier systématiquement aux gendarmes des missions que leurs homologues policiers ne veulent pas accomplir telles que les gardes statiques d'édifices publics.

Intervenant au nom de l'ensemble des associations, il s'est ensuite inquiété du devenir des régimes spéciaux de retraite. Il a rappelé que le rapport Charpin envisageait d'aligner les régimes du secteur public sur le régime général et que, dans ce cas, il faudrait réunir 170 trimestres de cotisations pour pouvoir bénéficier d'une pension de retraite à taux plein, soit 42 années et demie d'activité, le retraité se voyant appliquer un taux dégressif, différencié dans le temps, en fonction du nombre de trimestres manquants. Il a exposé que compte tenu de l'âge moyen d'entrée dans la vie active et de l'âge limite de départ à la retraite fixé par les statuts des militaires, ceux-ci seront inévitablement pénalisés, la diminution du montant de la pension pour un militaire entré à 20 ans dans l'armée et parti à la retraite à 55 ans atteignant 27 % en 2009 et 36 % en 2019.

Rappelant que le même rapport admettait la légitimité des régimes spéciaux quand ils sont justifiés par des spécificités, il a exposé que, dans cet esprit, un argumentaire avait été élaboré en janvier 1998 au CSFM en faveur du maintien du régime des pensions militaires de retraite, pour tenir compte des sujétions qui s'attachent au métier militaire, notamment dans la Gendarmerie.

S'inquiétant du silence du ministère de tutelle, il a conclu que les personnels des Armées et de la Gendarmerie souhaitaient pouvoir être rassurés sur le devenir des pensions militaires de retraite.

M. André Polet, Président de la Fédération nationale des retraités de la Gendarmerie, a exposé que, pour compenser le déséquilibre existant entre les statuts des gendarmes et des policiers, il serait nécessaire que l'ISSP soit intégré dans la retraite après 25 ans de service, et dès l'âge de 50 ans, pour les personnels de la Gendarmerie nationale qui effectuent les mêmes missions que leurs homologues de la Police nationale, indépendamment de la possibilité de pouvoir bénéficier d'une retraite proportionnelle à partir de 15 ans de service, qui n'était qu'une juste compensation des charges entraînées par un régime spécifique.

Il a ensuite expliqué qu'une grille indiciaire spécifique de la Gendarmerie nationale devrait être instituée, permettant ainsi de supprimer des écarts de traitement entre les différents grades de l'échelle 4 des sous-officiers de Gendarmerie, la grille actuelle prévoyant un indice 426 majoré pour un gendarme à l'échelon exceptionnel, alors qu'elle n'accorde qu'un indice 417 majoré à un maréchal des logis-chef. Il a suggéré que les différents échelons accordés dans les divers grades puissent être répartis, dans le cadre de l'échelle 4, de l'indice 257 (élève-gendarme) à l'indice 472 (échelon exceptionnel d'adjudant-chef), cette nouvelle grille étant l'occasion de rééquilibrer les échelons des différents grades en tenant compte des responsabilités assumées.

Après avoir assuré les représentants des associations que la Commission ferait part de leurs revendications au Gouvernement, M. Charles Cova, Président, a souligné que l'ensemble de ses membres avaient été tout particulièrement sensibles à la situation des sous-lieutenants et lieutenants retraités avant le 1er janvier 1976 et à celle de leurs ayants cause.

Soulignant qu'il était unanimement reconnu que ces personnes avaient été lésées, et rappelant que la Commission avait adopté une observation pour remédier à leur situation lors de l'examen de la précédente loi de finances, il a fait remarquer qu'un amendement d'initiative parlementaire en ce sens tomberait sous le coup de l'irrecevabilité financière instituée par l'article 40 de la Constitution.

Il a alors vivement souhaité que le Gouvernement reprenne à son compte cette initiative, eu égard à la faiblesse des sommes en cause -deux millions de francs par an-, ainsi qu'au petit nombre, au grand âge et à la modestie de la condition des personnes concernées.

Exposant ensuite qu'à titre personnel il était opposé à l'institution du syndicalisme dans les armées, il a fait savoir qu'il avait néanmoins demandé au Président Paul Quilès de procéder, dans le cadre d'un rapport d'information qu'il établissait avec M. Bernard Grasset, à une enquête auprès des militaires sur les questions relatives à leur droit d'expression et d'association, voire à leur droit d'être élus membres d'un conseil municipal.

Rappelant que ce n'était pas la première fois qu'une telle enquête serait menée, puisqu'en 1974 Mme Florence d'Harcourt avait déposé un rapport sur le moral des armées qui traitait de questions semblables, il a indiqué qu'il entendait avec M. Bernard Grasset, procéder à des auditions nombreuses, sur le terrain, dans les bases aériennes, les régiments, sur les navires et dans les brigades de Gendarmerie, de militaires du rang, de sous-officiers et d'officiers.

Sans préjuger des résultats de cette enquête, il a indiqué qu'à son avis, le dispositif qui pourrait être adopté devrait être construit de façon autonome, et non en référence à des modèles étrangers comme celui des armées allemandes.

Après avoir remercié les représentants des associations de retraités militaires pour les informations précieuses apportées à la Commission, le Président Paul Quilès a tenu à apporter des précisions sur deux points particuliers :

- estimant que la question du droit d'expression des militaires au sein des armées et de la société prenait une tournure nouvelle avec la professionnalisation, il a insisté sur l'importance de la mission d'information confiée sur ce sujet à MM. Charles Cova et Bernard Grasset et sur la possibilité pour la Commission d'aboutir à un consensus.

Il a rappelé être à l'origine, à l'époque où il était Ministre de la Défense, d'une des premières initiatives favorisant l'expression des militaires au sein de la revue « Armées d'aujourd'hui ». L'armée se professionnalisant et son environnement se modifiant, le système d'expression des militaires doit certainement évoluer dans le cadre de réformes profondes ;

- s'agissant de l'avenir des retraites, il a indiqué que, pour intéressant qu'il soit, le rapport Charpin faisait une bonne analyse de la situation, sans que ses conclusions engagent le Gouvernement. Mais le moment venu, le Parlement sera associé aux travaux relatifs à l'avenir des retraites et la Commission de la Défense nationale sera alors attentive à ce que les spécificités de la situation des militaires soient bien prises en compte.

M. Gérard Charasse a déclaré avoir pris bonne note, en sa qualité de rapporteur pour avis du titre III de la Défense, des demandes exprimées par les représentants des associations de retraités, en particulier en ce qui concerne la situation des lieutenants et sous-lieutenants retraités avant le 1er janvier 1976 et celle des veuves allocataires.

Insistant sur le fait que la professionnalisation allait se traduire par la gestion de carrières plus nombreuses et plus courtes, il a insisté sur l'importance des mesures de reconversion des anciens militaires. Il a également mis l'accent sur la nécessité de développer au sein des armées les procédures de concertation.

M. Robert Poujade a estimé que, loin de se distendre, le lien entre la Gendarmerie et les élus locaux restait la plupart du temps très étroit.

Par ailleurs, il a considéré qu'il serait fâcheux, sous prétexte d'affecter des gendarmes mobiles à de la police de proximité, que ceux-ci reçoivent la charge des gardes statiques.

M. Georges Lemoine est intervenu pour souligner qu'il jugeait les liens entre la Gendarmerie et les élus, en particulier ruraux, excellents. Il a, également tenu à mettre en exergue le rôle que la Gendarmerie était appelée à jouer dans le domaine des réserves.

Considérant les gardes statiques comme un mal parfois nécessaire, M. Bernard Grasset a assuré que les relations entre la Gendarmerie et les élus d'une part et la population locale d'autre part restaient excellentes. Il a également insisté sur la nécessité d'assurer aux militaires ayant effectué des carrières courtes ou moyennes de bonnes conditions de reconversion dans la perspective, notamment, du renforcement du lien entre la Nation et son armée.

Rappelant que le projet de loi sur les réserves dont il était rapporteur venait d'être adopté définitivement, M. Michel Dasseux a considéré que l'obligation de disponibilité qui s'imposera pendant cinq ans aux anciens militaires ne rompra pas le principe d'égalité, puisque les personnes concernées s'engageront dans les armées en connaissance de cause.

M. André Vauchez a insisté sur le fait que la Gendarmerie allait devenir la force militaire la plus présente sur le territoire, notamment en raison de la disparition de nombreux régiments d'autres armées. Il a estimé que l'organisation des journées d'appel et de préparation à la défense ainsi que la mise en _uvre des contrats locaux de sécurité en zones périurbaines contribueraient à la faire mieux connaître et à tisser des liens avec des administrations (éducation nationale, justice) ou des associations avec lesquelles elle ne travaillait habituellement pas.

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