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ASSEMBLÉE NATIONALE

COMMISSION DES FINANCES,

DE L'ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU PLAN

COMPTE RENDU N° 11

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mardi 24 octobre 2000
(Séance de 21 heures)

Présidence de M. Yves Tavernier, Vice-Président

SOMMAIRE

 

pages

- Suite de l'examen de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2001 (n° 2585)

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· Tourisme Ville

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· Défense et articles 33 et 34 rattachés à ce budget

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· Secrétariat général de la Défense nationale

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La Commission a poursuivi l'examen de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2001 (n° 2585).

Elle a tout d'abord examiné, sur le rapport de M. Michel Bouvard, Rapporteur spécial, les crédits du Tourisme.

Le Rapporteur spécial a rappelé les données de base qui démontrent l'importance du tourisme dans l'économie nationale. Les activités caractéristiques du tourisme représentent 204.700 entreprises et 624.370 emplois salariés, leur chiffre d'affaires annuel est de l'ordre de 700 milliards de francs, soit 7,4 % du produit intérieur brut. En matière de flux, notre pays reste toujours la première destination touristique au monde avec une fréquentation en progression moyenne de 3,7 % par an. Ainsi, le nombre d'arrivées comptabilisées en 1999 s'est élevé à 73,042 millions, soit 4,3% de mieux qu'en 1998, et l'année 2000 s'annonce meilleure encore. La fréquentation des touristes étrangers est à la source d'un excédent de la balance des paiements qui a atteint 91,5 milliards de francs en 1999, presque deux fois supérieur à celui de l'agro-alimentaire (47,1 milliards de francs).

Cependant, parmi les observations habituelles, on remarque encore que la France ne parvient pas à retirer de son activité touristique des recettes aussi importantes, proportionnellement, que celles de ses concurrents ; en effet, avec 11% des arrivées mondiales, ses recettes (31,699 millions de dollars) sont inférieures à celles de l'Espagne (32,913 millions de dollars) qui ne reçoit, pourtant, que 7,8% des touristes. Ceci doit nous inciter à affermir notre effort en faveur de ce secteur économique.

Un autre phénomène préoccupant réside dans la stagnation, voire la baisse, des départs en vacances des Français, tant en été qu'en hiver, et le raccourcissement de leurs séjours. Le chiffre total de nuitées enregistré a en effet subi une érosion quasi continuelle de 1995 (1,045 millions) à 1999 (929,9 millions).

A l'inverse, de plus en plus de Français choisissent de voyager à l'étranger, vers les « destinations soleil ». En particulier, vers l'Afrique, les départs sont, depuis 1999, devenus aussi importants que les séjours en Espagne. Cette évolution est d'autant plus préoccupante que l'arrivée sur le marché national des grands voyagistes de l'Europe du Nord, capables de proposer des forfaits très compétitifs, risque de détourner une bonne partie des clientèles à petit budget des vacances en France. Le rachat de Nouvelles Frontières par le groupe allemand Preussag constitue plus qu'une illustration de ce phénomène.

Cette exploitation du marché émetteur français sera d'ailleurs encore facilitée par l'introduction de l'euro qui accentuera les économies d'échelles que réalisent déjà ces « voyagistes industriels » et permettra une meilleure lisibilité des tarifs. Il s'agit pour les grands tours opérateurs et les voyagistes qui opèrent actuellement des concentrations, de se positionner sur un marché qui s'annonce porteur. En effet, l'Organisation mondiale du tourisme prévoit que le passage à l'euro induira une demande touristique supplémentaire de 1.500 millions de dollars entre les pays de la zone, engendrant des centaines de milliers de nouveaux emplois. Il y a donc une impérieuse nécessité à valoriser au mieux les atouts de notre économie touristique et d'accroître la qualité de notre offre. Cette amélioration passe nécessairement par la réhabilitation de certains équipements et par une meilleure répartition spatiale des activités.

Le projet de loi de finances propose une hausse des crédits du tourisme, fixés à 473,58 millions de francs. Cette progression, qui représente 11,9 % des crédits inscrits et 5,88 % des crédits votés en loi de finances initiale pour 1999, s'insère dans l'objectif de la Ministre visant à porter les crédits du tourisme à 700 millions de francs, au terme de la présente législature. On ne soulignera jamais assez, à l'heure des grands défis, la modestie de ce budget, quelle que soit la base de comparaison : 0,03 % du budget de l'État, 3 % du budget de la culture, seulement 46 % du montant de la TVA encaissée par l'État sur les billets d'entrée à Disneyland Paris. L'objectif fixé par la Ministre du Tourisme est satisfaisant, cependant cette hausse des crédits doit être mesurée par rapport à l'importance du tourisme dans l'économie et aux recettes fiscales qu'il génère. La hausse proposée pour 2001 est significative, même si une partie des crédits est affectée à la compensation de l'assujettissement de l'Agence française de l'ingénierie touristique (AFIT) et de l'Observatoire national du tourisme à la taxe sur la valeur ajoutée. Le Gouvernement entend mobiliser ces moyens en priorité sur les domaines suivants : l'aménagement du territoire et le développement local, la politique sociale et la promotion du tourisme français à l'étranger.

La politique du tourisme ne se limite pas aux seuls crédits du Secrétariat d'État, dont le rôle essentiel consiste à assurer la cohérence et la coordination des différents acteurs, notamment au travers des contrats de plan État-régions, qui permettent de faire converger avec les crédits communautaires les dotations nationales et les financements régionaux. A cet égard, la ministre du Tourisme s'est engagée à publier un compte consolidé du tourisme. L'effort consenti par les régions en faveur du tourisme est également considérable. On peut citer, à titre d'exemple, la contribution financière des conseils régionaux aux budgets des comités régionaux du tourisme (CRT). Cette contribution représente 82 % du budget total des CRT qui est de l'ordre de 530 millions de francs par an. L'intervention la plus significative de l'État est constituée par la dotation aux communes touristiques, « cristallisée » dans la dotation globale de fonctionnement (DGF) et qui s'est élevée pour 2000 à 1.133 millions de francs. L'avenir de cette dotation devra être arrêté au terme de la réflexion engagée par le Comité des finances locales.

Les moyens de fonctionnement des services du tourisme sont marqués par la stabilité des dépenses de personnel, leur légère hausse (+ 0,93 %) est, en effet, presque entièrement compensée par une réduction des crédits d'études. Les dotations des délégations régionales au tourisme enregistrent une progression de 10%, passant de 8 à 8,8 millions de francs. Le renforcement de leurs moyens est particulièrement nécessaire au moment où se mettent en place les nouveaux contrats de plan État-régions. S'agissant des effectifs, qui restent stables par rapport à l'an 2000, on doit noter l'absence d'un dispositif permettant d'assurer la pérennité des postes mis à la disposition des deux structures transversales de l'administration du tourisme que sont l'AFIT et le service d'études et d'aménagement touristique de la montagne (SEATM). Il conviendrait, en effet, de donner à ces services les moyens d'engager, par contrat de droit privé, les experts nécessaires aux missions qui leur sont confiées. Cette stabilité conditionne le développement d'activités indispensables à l'expansion du secteur touristique.

Les crédits consacrés au développement de l'économie touristique, inscrits au chapitre 44-01, s'élèvent à 290 millions de francs, ce qui représente une hausse de 15,96 % par rapport au projet de loi de finances pour 2000.

Les contrats de plan État-régions bénéficient d'un montant global de 897 millions de francs, soit en moyenne annuelle, 128,1 millions de francs, répartis à raison de 45 % sur le titre IV et 55 % sur le titre VI. Pour 2001, 60 millions de francs seront consacrés au financement des contrats de plan conclus par 22 régions métropolitaines et 6 départements et collectivités d'outre-mer. A ce jour, 6 des 22 régions n'ont toujours pas établi les documents d'application de ces plans.

Avec 180 millions de francs, la promotion du tourisme français à l'étranger, confiée à Maison de la France, repose sur des crédits qui marquent une stabilité, abstraction faite des crédits supplémentaires (6,5 millions de francs) qui ont été attribués à cet organisme pour réaliser la campagne « Bonjour » et la poursuite des campagnes de restauration de l'image touristique des régions touchées par la marée noire et les intempéries.

Les deux derniers budgets consacraient au fonctionnement de Maison de la France, des subventions en progression, importante en 1999 (+13,4%), la suivante presque entièrement absorbée par l'assujettissement du groupement d'intérêt économique à la TVA à compter du 1er janvier 2000. La stabilité de cette dotation dans le présent budget semble insuffisante à l'accomplissement des missions de Maison de la France, compte tenu des charges supplémentaires que font peser sur son budget les lourdes pertes de change résultant de la faiblesse de l'euro. Pour l'année 2000, ces pertes sont évaluées à près de 6,4 millions de francs, ce qui a obligé à réviser à la baisse les actions de promotion sur les marchés extérieurs à la zone Euro. A cet égard, la Ministre du tourisme a annoncé, au cours de son audition par la commission de la Production, qu'une dotation complémentaire au bénéfice de Maison de la France serait inscrite dans la loi de finances rectificative, afin de compenser la perte de change subie. Il apparaît indispensable de mettre en place un mécanisme stabilisateur capable de prévenir les effets de ces pertes de change.

Parmi les autres crédits d'intervention, la dotation de l'article 10 consacrée à l'observation économique, subit une réduction de 21,8% du fait de l'absence d'inscription de crédits au paragraphe 20 (conventions régionales), doté, dans le budget précédent, de 1,2 million de francs. L'Observatoire national du tourisme bénéficie, quant à lui, d'une hausse de ses crédits de 0,5 million de francs appelée à compenser son assujettissement à la TVA à partir de 2001.

Le paragraphe 20 du même article enregistre une augmentation de 3,7% de sa dotation, ainsi portée à 12,7 millions de francs. Après deux années consécutives de renforcement de ses crédits, l'AFIT reçoit ici les moyens de faire face à son assujettissement à la TVA.

Le paragraphe 30 de l'article 21 prévoit, au titre du soutien au secteur associatif, 16,5 millions de francs de crédits, en hausse de 39,8%. Cet effort est destiné à consolider le groupement d'intérêt public, « Bourse Solidarité Vacances » ainsi qu'à financer les conventions d'objectifs entre l'État et les associations de tourisme dans le domaine du développement local et de l'action sociale. Il permettra aussi de poursuivre les actions entreprises en faveur des personnes handicapées et de lancer une campagne institutionnelle de grande ampleur pour valoriser le tourisme social et associatif.

Enfin, les crédits d'investissement progressent significativement, grâce aux dotations de l'article 10 consacrées aux contrats de plan État-régions, qui passent de 20,3 millions de francs à 29,39 millions de francs en crédits de paiement (+44,83%) et de  34,7 millions de francs à 65 millions de francs en autorisations de programme (+87,31%).

Reconduites au niveau des deux années précédentes, 24,3 millions de francs en autorisations de programme et 13,4 millions de francs en crédits de paiement, les dotations de l'article 30 permettront d'aider les associations de tourisme à rénover leurs hébergements. Le premier programme de rénovation, dit : « Plan patrimoine » a dépassé ses objectifs en permettant, entre 1990 et 2000, la réalisation de 528 opérations portant sur 100.000 lits, soit plus de 60% de la capacité d'accueil des structures visées. Le secrétariat d'État a engagé une étude d'évaluation du programme achevé. A partir de ses résultats, un nouveau plan pour la période 2000-2008 sera défini.

Pour conclure, le Rapporteur spécial a salué le redressement des crédits du tourisme engagé depuis 1999 et l'action de la Ministre pour la meilleure prise en compte de son département ministériel. Cependant trois points importants pour l'économie touristique n'ont pas fait l'objet de réelles avancées.

Tout d'abord, il est dommage que n'ait toujours pas été saisie l'opportunité de réduire le taux de la TVA sur la restauration traditionnelle malgré une déclaration favorable de la Ministre. Par ailleurs, l'élargissement aux salariés des petites et moyennes entreprises du bénéfice des chèques vacances n'a pas produit les effets attendus. Il s'avère, en effet, qu'au-delà des difficultés structurelles inhérentes à l'atomisation du secteur, certaines dispositions de la loi voulues par le Gouvernement sont difficilement applicables et freinent le développement du produit. Enfin, il faut souligner l'absence de publication des décrets concernant le dispositif de réhabilitation de l'immobilier de loisir, voté à l'initiative de l'Assemblée nationale en loi de finances pour 1999. Cette mesure, adoptée à l'unanimité, ne peut donc toujours pas entrer en application. Comme les mesures fiscales initiales, le dispositif législatif permettant aux collectivités locales d'initier les opérations de réhabilitation a, d'ailleurs, été adopté sur initiative parlementaire. Les dispositions qui, de ce fait, figurent dans le projet de loi relatif à la solidarité et au renouvellement urbains permettent désormais de remplir toutes les obligations imposées pour l'établissement des textes réglementaires. La mise en place de ce dispositif est une nécessité pour l'amélioration et le maintien de la qualité de notre offre touristique à long terme.

M. Pierre Hériaud s'est interrogé sur la pertinence de la comparaison entre le budget du tourisme, d'une part, et l'ensemble du PIB, d'autre part, ainsi que sur l'absence, dans l'exposé du Rapporteur, de références aux intempéries et à la marée noire subies par les régions Atlantiques. La baisse de fréquentation qui a résulté de ces sinistres y a atteint jusqu'à 30 %, pour certains équipements.

M. Alain Rodet s'est félicité du fait que notre pays occupe la première place dans le monde pour l'accueil des touristes étrangers, avec plus de 70 millions d'entrées. Cependant, si certaines régions de France demeureront toujours favorisées par leurs conditions géographiques, il conviendrait d'agir pour mieux diriger les flux touristiques sur l'ensemble du territoire. Les difficultés des régions touchées par les calamités nécessitent, en particulier, une vigilante attention de la part des pouvoirs publics.

M. Augustin Bonrepaux s'est demandé si le différentiel mis en évidence entre le nombre des touristes visitant la France et le montant des recettes retirées résultait d'une évaluation pertinente. Les critères utilisés sont-ils identiques dans les différents pays considérés ? Le niveau atteint par les crédits du tourisme est tout à fait satisfaisant, particulièrement lorsqu'on le compare à celui de 1996. Le souci manifesté par le Rapporteur au sujet des emplois dont dispose l'AFIT est tout à fait justifié. Il est, en effet, inadmissible que l'instabilité des personnels mis à la disposition de ce service compromette ses capacités d'intervention. Le dispositif voté en 1999 pour faciliter la réhabilitation des hébergements de loisir est-il toujours opportun, après qu'a été décidée la baisse de la TVA sur les travaux de réfection de l'habitat ? Quant à la réduction du taux de TVA sur la restauration traditionnelle, on s'interroge sur les effets qu'elle pourrait produire sur l'emploi et les bénéfices qu'en retireraient les consommateurs. Si on en juge par la faible répercussion de la baisse du taux normal, elle ne semble pas opportune, à moins que des engagements précis soient pris en contrepartie en matière d'emploi et de prix. Il est tout à fait justifié de voter ce budget dont les crédits connaissent une progression significative.

En réponse aux intervenants, M. Michel Bouvard, Rapporteur spécial a précisé que son rapport faisait une large place aux dommages subis du fait des tempêtes et de la marée noire. Les mesures d'urgence mises en place y sont présentées en détail. Le rapport conclut d'ailleurs sur la nécessité de poursuivre dans la durée les campagnes de restauration de l'image touristique de la France. Mme Michèle Demessine a d'ailleurs annoncé que les crédits nécessaires à la réalisation d'une nouvelle campagne sur ce thème seraient rapidement mobilisés.

La répartition des activités touristiques sur l'ensemble du territoire fait également l'objet de développements dans le rapport spécial. Y est exposée l'utilisation des crédits des fonds structurels européens, notamment au titre de l'objectif 5b, dont dépendent de nombreux équipements dans les régions sensibles du territoire. Les préoccupations relatives à l'aménagement du territoire sont également présentes dans l'exigence d'une subvention suffisante à Maison de la France. En effet, la prépondérance de financements publics dans la promotion du tourisme français à l'étranger garantit que seront pris en compte certains territoires moins favorisés. Les incertitudes qui pèsent sur la fiabilité des statistiques en matière de flux touristiques internationaux résultent, pour une part, de la situation de lieu de passage de notre pays, qui fait que les personnes en transit sont comptabilisées au même titre que les vacanciers. Par ailleurs, les outils statistiques utilisés nécessitent d'être améliorés. Des mesures ont déjà été prises en ce sens et la Ministre du tourisme s'est engagée à agir pour l'harmonisation des statistiques au niveau européen.

Quant aux opérations de réhabilitation de l'immobilier de loisir, il n'y a pas lieu de mettre en cause leur utilité. La réduction du taux de TVA sur les travaux de rénovation a, certes, répondu à un tiers des besoins. Cependant, la mise en chantier de la majeure partie des réhabilitations dépend de l'organisation d'opérations globales qui permettent, d'une part, aux propriétaires de se décharger des contraintes liées aux travaux et d'autre part, par la mise en marché des logements, d'assurer le volume et la qualité de l'offre touristique de certaines stations. Le dispositif institué permet, en outre, l'intervention des collectivités territoriales, élément mobilisateur du système. Enfin, il est nécessaire d'observer l'expérience sur une période d'au moins un à deux ans pour juger valablement de ses effets.

Le Rapporteur spécial proposant l'abstention sur ces crédits, la Commission a ensuite adopté les crédits du Tourisme.

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Puis, la Commission a examiné, sur le rapport de M. Jean-Michel Boucheron, rapporteur spécial, les crédits de la Défense et les articles 33 et 34 rattachés à ces crédits.

Après avoir remarqué que le projet de budget de la défense pour 2001 augmentait de 0,8 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2000 et qu'il était proche globalement de la loi de programmation militaire dont il respectait les principes, M. Jean-Michel Boucheron, Rapporteur spécial, a observé que le titre III, hors pensions, augmentait de 0,5 % par rapport à l'année dernière.

Ce budget se situe dans la continuité des tendances observées les années précédentes, c'est-à-dire la progression du titre III au détriment du titre V et la prépondérance des crédits de rémunérations et charges sociales au sein du titre III en raison de la professionnalisation. En matière de crédits de fonctionnement, des efforts significatifs sont faits en faveur de la Gendarmerie et de l'activité des forces, ce qui permettra une participation accrue aux exercices interalliés. La préoccupation principale porte sur les carburants, puisque la construction budgétaire pour 2001 repose sur un taux de change du dollar à 6,50 francs et sur un cours du baril de brut à 20 $, ce qui paraît manifestement insuffisant. Il faut se souvenir que la consommation en carburants est de l'ordre de 3 milliards de francs. Tout renchérissement du cours du pétrole a donc de fortes incidences budgétaires.

Le titre V, avec 83,4 milliards de francs de crédits de paiement, est trop serré et encore inférieur, aussi bien à l'annuité de la loi de programmation militaire (90,3 milliards) qu'à celle de la revue de programme (86,1 milliards de francs) malgré l'augmentation du potentiel résultant de la baisse du taux normal de la TVA.

La subvention au Centre national d'études spatiales est encore d'un montant de 1,250 milliard de francs alors que 623 millions de francs sont inscrits au titre des compensations données à la Polynésie pour l'arrêt des essais nucléaires. Il est très difficile d'assurer le contrôle de l'utilisation de ces fonds publics, compte tenu du caractère irrationnel, qui semble présider à leur affectation et de l'absence de moyens de contrôle indépendants sur le Territoire.

Les anciens arsenaux, c'est-à-dire GIAT Industrie et la Direction des constructions navales, largement subventionnés, pèsent toujours fortement sur le budget. La principale préoccupation du titre V est la baisse de 2,7 % des crédits destinés aux études, ce qui ne permettra même pas de stabiliser le fossé technologique qui nous sépare des États-Unis dans le domaine de la recherche de défense.

Le rapport écrit contiendra enfin des développements spécifiques consacrés aux services de renseignements militaires, à savoir la Direction générale de la sécurité extérieure et la Direction du renseignement militaire, qui rendent des services éminents au pays et qui souffrent d'un manque de reconnaissance alors qu'il convient de souligner leur appartenance de plein droit à l'organisation de l'État.

En conclusion, il faut souligner l'efficacité avec laquelle les armées sont en train d'affronter quatre révolutions majeures de leur environnement :

- la professionnalisation, qui constitue un mode de réforme de l'État d'une ampleur considérable sans aucun trouble ou contestation ; si l'armée de terre vit durement la réforme, elle l'applique cependant de manière continue ;

- l'internationalisation des programmes d'armement, la plupart des programmes ayant désormais une gestion multinationale, ce qui pose un problème de fond quant à la latitude de décision du Parlement français ;

- le changement dans les missions et les modes d'intervention, qui relèvent désormais de la projection et non plus de la dissuasion, avec toutes les conséquences sur la formation des hommes et l'évolution des matériels ;

- la baisse significative des crédits d'équipement de l'ordre de 30 % en 5 ans.

Tout en ayant conscience des faiblesses de ce budget, le Rapporteur spécial a cependant appelé à l'adopter.

M. Alain Rodet a successivement interrogé le rapporteur sur :

- les matériels mis à la disposition de l'armée de terre pour la projection de troupes ;

- l'admission au service actif du porte-avions Charles de Gaulle et les perspectives de réalisation d'un second porte-avions ;

- le montant et les modalités d'attribution des crédits du Fonds d'accompagnement de la professionnalisation.

M. Jean-Michel Boucheron, Rapporteur spécial, a apporté les réponses suivantes :

- s'agissant des moyens de projection, le projet de budget ne prévoit pas d'autorisations de programme pour le lancement de l'avion de transport, mais le Gouvernement s'est engagé à fournir les moyens correspondants prochainement. En revanche, le budget permettra de financer le véhicule de combat d'infanterie indispensable au transport de troupes, notamment sur des théâtres extérieurs ainsi que les nouveaux transports de chalands de débarquement ;

- le porte-avions Charles de Gaulle a connu quelques problèmes de réglage, ce qui n'est pas étonnant au regard de la haute technologie déployée sur ce programme, mais il sera déclaré opérationnel dans les six mois, au terme de sa traversée de haute mer ;

- un second porte-avions est indispensable et, ce, à brève échéance, compte tenu des périodes d'indisponibilité du premier et il serait préférable qu'il soit à propulsion nucléaire pour des raisons financières, puisque cela permettra d'économiser le coût de la recherche et du développement ;

- le Fonds d'accompagnement est doté de 917 millions pour 2001, dont 627 millions de francs pour les pécules qui permettent le départ anticipé des cadres militaires et leur retour à la vie civile.

Sur la proposition du Rapporteur spécial, la commission a adopté les crédits de la défense, ainsi que les articles 33 et 34 du projet de loi de finances pour 2001, rattachés à ces crédits.

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Enfin, la Commission a examiné, sur le rapport de M. Pierre Hériaud, rapporteur spécial, les crédits du Secrétariat général de la Défense nationale.

Après avoir salué le dynamisme du nouveau secrétaire général de la Défense nationale nommé à l'été 1998, M. Pierre Hériaud a indiqué que le Secrétariat général de la défense nationale était en train de conforter son intégration dans l'appareil d'État en se dotant non plus de pôles, mais de directions comme la direction de la sécurité de l'État, la direction des affaires internationales et stratégiques, la direction de la technologie et des transferts sensibles et la direction de la sécurité des systèmes d'information.

Il est satisfaisant de constater, sur un plan budgétaire, que les crédits augmentent de plus de 16 % à structure constante par rapport à l'année dernière avec un montant de 193 millions de francs, que les créations de postes sont au nombre de 26 pour un effectif global de 241 postes en 2000 dont 40 militaires et que les remarques du Rapporteur relatives à l'identification des crédits du Comité interministériel du renseignement ont été entendues, puisque l'annexe consacrée au SGDN comporte désormais un agrégat « renseignement » pour un montant de 32 millions de francs.

La subvention à l'Institut des hautes études de la défense nationale (IHEDN) sera désormais inscrite au budget du SGDN pour un montant de 9,6 millions de francs. Le rapport d'activité de l'IHEDN témoigne de son dynamisme, puisqu'il a organisé environ 20.000 journées auditeurs en 1999. L'Institut cultive aussi le lien armée-Nation grâce aux trinômes académiques qui rassemblent le recteur d'académie, le général commandant la place et le président régional des anciens auditeurs de l'IHEDN. Il convient de soutenir cette activité, notamment à l'occasion de la journée qui lui sera consacrée à Toulouse le 27 octobre prochain.

M. Alain Rodet a observé que les postes budgétaires de militaires avaient largement décrus au SGDN depuis 1995 et il a souhaité savoir quelle était la répartition par grade des militaires encore affectés.

M. Pierre Hériaud, Rapporteur spécial, a indiqué que si l'ensemble des effectifs du SGDN avait fortement décru du fait de la réforme intervenue suite au rapport de M. Jean Picq, des militaires étaient mis à la disposition du SGDN en plus des effectifs budgétaires. Cette mise à disposition concerne environ 180 personnes. Les cadres du SGDN sont essentiellement des officiers supérieurs et des généraux.

Sur la proposition du Rapporteur spécial, la commission a alors adopté les crédits du SGDN.

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