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ASSEMBLÉE NATIONALE

COMMISSION DES FINANCES,

DE L'ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU PLAN

COMPTE RENDU N° 53

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mercredi 6 juin 2001
(Séance de 10 heures)

Présidence de M. Henri Emmanuelli, Président

SOMMAIRE

 

pages

- Examen pour avis de l'article 46 du projet de loi relatif à la démocratie de proximité (n° 3089).

2

- Informations relatives à la Commission

10

La commission des Finances, de l'Économie générale et du Plan a procédé à l'examen pour avis de l'article 46 du projet de loi relatif à la démocratie de proximité (n° 3089).

M. Augustin Bonrepaux, Rapporteur pour avis, a tout d'abord remercié la commission de l'avoir désigné comme rapporteur pour avis sur cet article relatif au financement des SDIS (services départementaux d'incendie et de secours).

L'article 46 de ce projet doit s'analyser au regard des autres articles du même titre du projet concernant également les SDIS, et qui, comme lui, tirent les conséquences à la fois de l'achèvement de la départementalisation prévue par la loi de 1996, et des récents travaux de la commission présidée par M. Jacques Fleury, député de la Somme. En l'occurrence, le projet prévoit à la fois de donner au conseil général la majorité des 22 sièges des conseils d'administration des SDIS, de supprimer la majorité qualifiée actuellement exigée pour la fixation du projet de budget et la répartition des contributions, et de faire assumer au département l'essentiel de la charge du financement de ces services.

Le dispositif prévu à cet effet s'opère en deux temps. D'une part, la répartition des contributions entre le département, les communes et les établissements publics de coopération intercommunale, serait gelée à compter de l'exercice suivant le transfert au SDIS des personnels et des biens prévu par la loi de 1996, au niveau atteint à ce moment-là. D'autre part, l'augmentation du budget du SDIS, votée par son conseil d'administration, serait supportée à 80% au minimum par le département, et pour le solde, c'est-à-dire dans la limite d'un plafond de 20% de l'augmentation, par les communes et les établissements publics intercommunaux. Ce plafond serait fixé par le conseil d`administration du SDIS, comme, d'ailleurs, les modalités de répartition des contributions entre les communes et les établissements publics de coopération intercommunales (EPCI). Actuellement le coût global des SDIS est de 12,2 milliards de francs, dont la charge est supportée à 46 % par les départements, 34 % par les communes, et le solde, soit 20 %, par les EPCI.

Le dispositif proposé, qui correspond aux orientations du rapport Fleury, paraît acceptable dans son principe, même si la part du financement qui reviendra aux communes peut encore faire l'objet de discussions. Diverses propositions sont avancées à cet égard, soit dans le sens d'un transfert intégral aux départements du financement et des compétences administratives et financières, soit par un gel complet de la participation des communes au niveau actuellement atteint, soit encore par une indexation de la progression de leur contribution, limitée à l'inflation.

En dehors de ces orientations possibles, le dispositif prévu par le projet peut également être amélioré sur plusieurs points.

Outre un amendement de simple clarification du texte, deux points paraissent devoir être soulignés. En premier lieu, il faut plus de transparence dans le financement, du point de vue de celui qui le supporte en réalité, c'est-à-dire le contribuable local, lequel ne perçoit pas toujours que la demande accrue de sécurité génère des coûts qu'il faut bien financer. Deux voies peuvent être proposées dans cette perspective :

- d'une part, puisque la contribution du département est appelée à croître sensiblement, par la création de taxes additionnelles aux quatre taxes traditionnelles, finançant de manière tout à fait claire la contribution du département ;

- d'autre part, par une information systématique des redevables de la taxe d'habitation, du coût total et moyen par habitant du financement du SDIS et de sa progression.

En second lieu, dans le sens des préconisations du rapport Fleury, il serait particulièrement opportun de prévoir une ressource supplémentaire pour les SDIS, dont les dépenses sont appelées à croître, à court et moyen terme. Pourrait notamment être retenu le principe consistant à faire contribuer ceux qui créent des charges spécifiques pour les SDIS sans en supporter le coût, par exemple, comme l'unanimité des membres de la commission Fleury l'a suggéré, avec la création d'une taxe sur les conventions d'assurance, additionnelle à la taxe de 15% perçue au profit de la sécurité sociale sur les contrats d'assurance automobile, mais, bien sûr, à un niveau bien moindre. Cette ressource additionnelle pourrait se substituer à l'enveloppe annuelle de 100 millions de francs prélevée sur la dotation globale d'équipement (DGE) pour les investissements des SDIS, complétée par 200 millions de francs en gestion, mais qui est prévue seulement jusqu'en 2002. Cette proposition permettrait, en tout état de cause, de poser au Gouvernement la question de l'avenir de cette enveloppe spécifique.

M. Jean Rigal a rappelé que la réforme des SDIS constituait un problème très important, compte tenu notamment des disparités entre les différents départements. La loi de 1996, qu'il est aujourd'hui proposé de corriger, contenait trois orientations : l'homogénéisation des matériels et des équipements, l'harmonisation des statuts des personnels, enfin la recherche d'une certaine mutualisation des dépenses entre les collectivités locales concernées, -objectif qui, cependant, paraît loin d'être atteint. Certains proposent un transfert de la compétence au profit du département, solution qui serait la plus simple. D'autres souhaitent limiter la part des communes. La répartition proposée par le projet est intéressante, en ce qu'elle plafonne l'augmentation des contributions laissées à la charge des communes. Il y a, en revanche, lieu de regretter qu'elle ne prévoit rien en ce qui concerne l'existant, c'est-à-dire la répartition actuelle, avant le « gel », alors que les communes et les structures intercommunales paient aujourd'hui autant, sinon plus, qu'avant la départementalisation.

Le président Henri Emmanuelli a indiqué que, en tout état de cause, les dépenses des SDIS augmentaient considérablement, et qu'il était donc difficile d'imaginer que la charge des communes diminue.

M. Jean Rigal a ajouté que, s'agissant du financement, trois orientations pouvaient être envisagées : la fiscalisation du financement des SDIS, qui ne lui paraît pas la solution la plus souhaitable ; le financement intégral par le département, ou l'encadrement de la répartition des charges, qui correspond à l'esprit du projet de loi. En tout état de cause, les réformes envisagées doivent viser à la fois le financement du fonctionnement et des investissements, ceux-ci représentant des montants importants, qui, par exemple dans l'Aveyron, sont financés exclusivement par le département. A cet égard, il a félicité M. Charles de Courson pour la maîtrise des coûts qu'il recherchait pour le SDIS dont il est président.

M. Michel Bouvard, après avoir remercié le Rapporteur pour avis de sa démarche pragmatique, a indiqué que le financement des SDIS posait trois types de problèmes :

- la progression très rapide de leurs dépenses. Celles-ci, pour une grande partie, ne sont pas maîtrisables par les collectivités locales, qu'il s'agisse du coût de la professionnalisation des sapeurs-pompiers ou des normes imposées par l'État. Ainsi, le fait que l'oxygène ait été requalifié en médicament se traduit par un surcoût, dans son département, de 600.000 francs. Pour le reste, les dépenses importantes sont généralement liées à des opérations exceptionnelles ;

- la répartition des contraintes financières est une alchimie complexe qui pèse notamment sur les communes rurales, dont il est difficilement possible d'accroître la contribution sans contrepartie en terme d'amélioration du service qui leur est directement rendu. C'est la raison pour laquelle la Savoie a mis en place un fonds de mutualisation ;

- l'hétérogénéité des situations des SDIS et de leur coût pour les départements, ainsi que de la situation des départements au regard des risques. Ainsi, selon la nomenclature et la carte des 43 risques élaborée par l'administration centrale, la Savoie est concernée par la quasi-totalité des types de risques, n'échappant qu'à ceux liés à l'activité volcanique, au littoral, et à la présence de centrales nucléaires. Ceci implique une spécialisation des personnels, par exemple pour les interventions dans les tunnels.

Par ailleurs, se pose la question de l'appel systématique au contribuable pour financer les services de secours, sans que soit recherchée, par exemple, une récupération, qui semble pourtant normale, sur les assurances, notamment en ce qui concerne les accidents de la route. De même, à titre d'illustration, est-il normal que le SDIS supporte le coût, élevé, des secours aux spéléologues ? Ainsi, une opération récente d'intervention spéléologique menée sur une commune de 130 habitants a-t-elle coûté 500.000 francs.

M. Charles de Courson a estimé que le texte du Gouvernement, notamment dans son volet financier, ne représente que la moitié du chemin à parcourir. Évoquant son expérience de président d'un SDIS, il a souligné que rares étaient les élus qui acceptaient aujourd'hui d'assumer cette charge, car il s'agit d'un poste très exposé.

Contrairement à ce qui est parfois présenté, la réforme de 1996 a consisté à diviser les SDIS, et cela a été une erreur. La logique de décentralisation n'a alors pas été menée à son terme. C'est pourquoi les SDIS doivent désormais être transformés en services des Conseils généraux, dotés de budgets annexes. Un tel transfert, recommandé par la Commission présidée par M. Pierre Mauroy et appelé de ses v_ux par M. Augustin Bonrepaux, est évidemment nécessaire tant la situation actuelle est dégradée.

La hausse des coûts des services de secours est due à un mode de fonctionnement qui relève de l'« usine à gaz », dans lequel le pouvoir opérationnel appartient au préfet, donc à l'État, tandis que la gestion incombe aux élus locaux à la tête des SDIS.

Dans les faits, les prérogatives de l'État sont plutôt exercées par le sapeur-pompier d'astreinte que par le Directeur de la Sécurité civile ou le préfet. Gaston Defferre, en son temps, s'était heurté au refus de la Direction de la Sécurité civile de perdre sa tutelle sur le corps des sapeurs-pompiers, une tutelle qui va jusqu'à englober la gestion des carrières, au mépris des préoccupations des SDIS, dont les présidents se retrouvent en porte-à-faux, puisque responsables de la gestion des personnels ils sont dépourvus de pouvoirs en la matière, notamment sur le régime de travail et les carrières.

Dans toutes les démocraties occidentales, la sécurité civile relève de la compétence des pouvoirs publics locaux ; c'est cette voie qu'il faut suivre en France en adoptant l'échelon départemental, qui semble le plus approprié, hormis les cas particuliers comme Paris. C'est aux élus locaux d'assumer cette compétence, au lieu de se voir imposer des réglementations élaborées en dehors d'eux au niveau national, d'autant que les cas de figure se révèlent sur le terrain aussi nombreux qu'il y a de villes concernées. A cet égard, les disparités constatées dans les rémunérations comme dans le régime des congés sont patentes : la durée théorique des congés alloués aux sapeurs-pompiers peut varier, entre deux villes voisines, de 82 jours à 120 jours annuels, sans compter les problèmes que soulève la durée effective desdits congés. Les 35 heures interfèrent d'ailleurs dans cette question. Tout ceci explique qu'aujourd'hui il n'y a que deux députés et trois sénateurs qui acceptent de présider un SDIS. La fonction est trop exposée, alors que précisément il faut un poids politique certain pour l'exercer de façon satisfaisante, en évitant notamment l'envolée des coûts que les conseils généraux payent sans les maîtriser. Dans de nombreux départements, faute de président capable d'en freiner l'augmentation, la participation financière a crû de dix, quinze ou vingt pour cent, ce qui satisfait sans doute les communes et leurs groupements, mais porte préjudice aux finances des départements.

Leurs participations financières varient très fortement d'un département à l'autre. Dans la Marne, elle a doublé en quatre ans.

Outre la question centrale des risques proprement dits se pose celle de la gestion des personnels et des matériels, qui appelle à son tour la question du partage entre pompiers volontaires et sapeurs-pompiers professionnels. Le coût est bien différent selon les catégories, allant de 110 ou 120 francs par habitant pour des volontaires à 300 ou 400 francs par habitant pour des corps urbains professionnels. Or, il faut bien voir qu'il existe un seuil minimum de sécurité, en deçà duquel on ne peut pas descendre même dans une petite ville. Toutes ces appréciations, à l'évidence, seront mieux effectuées si l'on achève la décentralisation conformément aux recommandations de la Commission Mauroy et si l'on va au bout de la départementalisation. Les présidents de Conseils généraux qui se trouveront en charge de ces dossiers pèseront alors de plus de poids que bien des présidents de SDIS à l'heure actuelle. La commission des Finances doit mettre un point d'honneur à dénoncer la situation actuelle et à préconiser une autre solution.

Répondant à l'observation du Président Henri Emmanuelli estimant que dans la plupart des cas les présidents délégueraient alors cette compétence, M. Charles de Courson a jugé que même un président délégué exercerait une autorité plus grande que celle qui existe actuellement.

M. Charles de Courson a ensuite évoqué le cas des transports sanitaires. Certains départements ont obtenu, en lien avec l'Agence régionale de l'hospitalisation (ARH) compétente, une convention sur le transport sanitaire, pour alléger la charge financière qu'entraîne l'obligation de déplacement des pompiers à titre gratuit. Il est souhaitable de généraliser cette technique du conventionnement entre les ARH et les SDIS, qui pourrait reposer sur le principe d'une gratuité « atténuée ». En effet, malgré sa valeur incontestable, le principe actuel de gratuité - qui ne connaît que quelques dérogations, comme ce qui concerne la montagne - ne peut perdurer. Est-il normal, par exemple, de faire payer par les SDIS les opérations de sauvetage de spéléologues ?

Sur ce point précis, M. Michel Bouvard a indiqué qu'un tel risque était assurable pour 1 000 francs par an, mais que la loi imposait la gratuité des secours.

M. Charles de Courson a mentionné trois autres exemples récents tirés de son expérience de Président de SDIS : la mobilisation de très nombreux pompiers pour assurer la sécurité autour des chantiers de destruction de carcasses animales, ou bien à l'occasion de « rave parties », ou encore lors de l'évacuation des habitants de Vimy. Le coût de cette opération a été de 220.000 francs ; elle a mobilisé 100 pompiers. A chaque fois, le préfet a refusé de décharger le SDIS de la moindre part du financement de ces déploiements qui, disait-il, incombait entièrement à ce service étant donné la nature opérationnelle des interventions.

La troisième question est celle du financement du risque. On peut envisager une taxe sur l'automobile ou sur les assurances, laquelle a fonctionné avant 1945. Mais l'assiette ne correspond pas au risque, beaucoup plus large. Aussi, l'idée du rapporteur pour avis d'un financement par une taxe sur les assurances qui se rapproche du système suisse d'un financement assurantiel, via l'impôt, ne semble pas aller dans la bonne direction. La seule solution est une fiscalisation, qui peut se traduire de deux façons, soit dans le cadre de la fiscalité générale des départements, soit dans celui d'une fiscalité optionnelle progressive, laquelle ouvrirait la possibilité aux conseils généraux de lever un impôt spécifique, pour sensibiliser les administrés au coût croissant du risque incendie et éviter les dérives constatées en la matière.

M. Gérard Saumade a exprimé son accord global avec les propos de M. Charles de Courson mais a formulé deux remarques : d'une part on constate une professionnalisation croissante du métier de sapeurs-pompiers, ce qui prouve qu'il s'agit de plus en plus d'un problème de sécurité civile d'ordre régalien. Jadis, la lutte contre l'incendie représentait 90 % de l'activité des sapeurs-pompiers. Aujourd'hui, ce chiffre est à peine de 25 %. Il serait donc logique que les compétences en la matière soient transférées à l'État, détenteur des pouvoirs régaliens. Il s'agit malheureusement d'un v_u pieux, surtout si l'on considère que l'État a précisément tendance à se décharger de certaines de ses responsabilités vers les collectivités locales, ce qui entraîne des inégalités insoutenables.

D'autre part, on constate que le principe fondamental « qui commande paye » n'est pas respecté dans ce domaine, ce qui favorise la création d'une féodalité supplémentaire dans un pays qui n'en manque pas. Il est donc nécessaire de clarifier les compétences, comme le propose l'amendement de M. Augustin Bonrepaux, rapporteur pour avis, mais en allant jusqu'au bout de cette logique et en transférant l'intégralité du bloc de compétences aux départements. Il n'y aurait dès lors qu'une seule autorité compétente, le département, le préfet assurant le contrôle de légalité.

M. Pierre Méhaignerie a rappelé qu'il n'avait pas voté la loi dite « Debré » car elle entraînait une déresponsabilisation des départements. La solution idéale serait, bien sûr, la reprise par l'État de cette activité régalienne, mais cela étant impossible dans les faits, même si le Parlement peut juridiquement l'imposer, seules des solutions moins satisfaisantes sont envisageables. Il convient, dans tous les cas, de conserver un lien de responsabilité avec les communes, faute de quoi on risque d'assister à une déresponsabilisation générale qui entraînera inéluctablement une aggravation des dépenses. Il est en tout cas évident que, quelle que soit la solution adoptée, elle doit donner plus de poids aux élus, toujours en situation difficile par rapport à un système dans lequel l'opinion publique est très favorable aux pompiers.

M. Alain Rodet a souligné que le problème principal était celui de la péréquation. La loi de 1996 est en effet défectueuse, mais ni la solution étatique ni la départementalisation ne permettront de mettre en place une véritable péréquation. Ce qui est sûr c'est que l'on se dirige vers une hausse des dépenses, et en particulier des coûts de personnels, dus à la diversification des états-majors.

M. Didier Migaud, rapporteur général, a confirmé que le choix devait se faire entre des solutions imparfaites. Il est clair que l'État ne voudra pas prendre en charge des dépenses qui, jusque là, ne lui incombaient pas. Aussi est il nécessaire d'aller jusqu'au bout de la départementalisation. Certaines orientations doivent néanmoins être précisées : d'une part le financement doit se faire dans le cadre de la fiscalité générale, et non via une fiscalité additionnelle ou affectée. Ceci n'empêche pas de répondre à une exigence de transparence permettant d'identifier la dépense. Les communes doivent conserver un rôle, afin de maîtriser l'évolution des dépenses et d'éviter toute déresponsabilisation. Enfin, il faudrait éviter que les collectivités locales se voient imposer de nouvelles normes qui imposent de nouveaux investissements et de nouvelles dépenses. Le cas est d'ailleurs le même s'agissant des équipements sportifs, où l'on impose aux élus, des normes techniques dont la mise en _uvre s'avère très difficile en pratique.

M. Augustin Bonrepaux, rapporteur pour avis, a estimé que les différentes interventions ont permis de faire avancer le débat. Il est en effet clair que si la participation des communes ne doit pas augmenter, autant transférer la compétence aux départements.

Le Président Henri Emmanuelli, après avoir rappelé les disparités de financement par les départements, s'est déclaré favorable à ce que les SDIS entrent dans la compétence des départements, à condition de garder le principe d'une participation des communes sous la forme d'un ticket modérateur.

M. Jean-Louis Dumont a jugé utile que les citoyens soient informés sur le coût de leur sécurité.

M. Michel Bouvard a fait observer que, s'il est courant de demander aux pompiers de détruire un nid de guêpes, personne ne connaît le coût d'une telle intervention.

Le Président Henri Emmanuelli après avoir souligné le risque d'une individualisation du coût de chaque service public, par exemple si on l'applique à l'éducation, a rappelé que l'essentiel du coût des SDIS résultait des interventions liées aux accidents. S'il est utile de responsabiliser les départements, moyennant un ticket modérateur des communes, reste à régler le problème de la structure de financement. Alors qu'une partie du coût doit être remboursée par l'assurance maladie, certaines agences régionales de l'hospitalisation sont réticentes à prendre en charge la part qui leur incombe logiquement. Il serait en outre justifié que les compagnies d'assurance participent au financement des SDIS. En effet, pourquoi le transport d'une personne accidentée ne serait pas pris en charge par les assurances lorsqu'il est effectué par les pompiers, alors qu'il est pris en charge lorsqu'il est effectué par une ambulance ? Ainsi, un conducteur est-il assuré à son volant, mais s'il est victime d'un accident, il cesse de l'être jusqu'à son arrivée à l'hôpital lorsqu'il est transporté par les pompiers. En l'absence des SDIS, le montant des dépenses à la charge des assurances serait plus élevé, notamment s'agissant du risque incendie.

M. Pierre Méhaignerie s'est déclaré hostile au principe d'une participation minimale s'imposant aux départements de manière uniforme. Il est en effet indispensable de tenir compte des différences de situation entre les départements, qui sont nées d'une négociation portant aussi sur l'aide sociale. Si certains départements font des efforts d'aide sociale considérable, il faut en tenir compte.

M. Augustin Bonrepaux, rapporteur pour avis, a proposé que la Commission se prononce en faveur de trois principes : transfert de la responsabilité des SDIS aux départements, création dans chaque département d'un budget annexe permettant d'identifier les dépenses des SDIS et maintien d'une participation limitée des communes, par exemple en prenant comme norme l'inflation.

M. Didier Migaud, rapporteur général, a déclaré qu'il n'était pas hostile à la proposition du rapporteur pour avis, mais qu'il importait que la loi n'empêche pas que, dans certains départements, puisse être passé un accord prévoyant une répartition « à la carte » du financement des SDIS, mettant par exemple à la charge du département le coût de la lutte contre les incendies et à celle des communes celui du transport.

M. Charles de Courson a insisté sur les inconvénients que présenterait une mutualisation totale. A titre d'exemple, dans la mesure où seule la moitié des communes du département dont il est l'élu ont procédé à la réfection de leur caserne, la mutualisation de cette dépense aurait pour effet de pénaliser les communes qui ont déjà payé. Un mécanisme régulateur s'impose donc à l'évidence. Sur ce point, le texte du Gouvernement est acceptable dans son principe. En outre, les risques n'étant pas les mêmes en zone urbaine et en zone rurale, la mutualisation se ferait au détriment des communes rurales.

Le Président Henri Emmanuelli a alors souligné que la discussion avait mis en évidence le fait que l'État décide et que ce sont les autres qui payent.

Après avoir observé que l'étatisation n'était pas la bonne solution à cet égard, sauf pour le déclenchement de grands plans comme le plan ORSEC, M. Charles de Courson a indiqué que la compétence opérationnelle devait être transférée aux départements. Le Président Henri Emmanuelli a jugé que l'étatisation ne devait pas a priori être écartée, si elle s'accompagne d'un transfert corrélatif du financement.

Concernant la modification des compétences, M. Pierre Méhaignerie a souligné que les responsables départementaux des sapeurs pompiers avaient tendance à professionnaliser progressivement les postes occupés par des pompiers volontaires, risquant ainsi d'atténuer l'esprit de responsabilité.

M. Charles de Courson a indiqué qu'il souhaitait la création d'un Conseil supérieur de la fonction de sapeur pompier dans lequel les élus auraient un rôle significatif et siégeraient en majorité, et pourraient, de ce fait, participer à la réglementation du fonctionnement de ces services, notamment s'agissant du régime du travail, et dialoguer avec les organisations représentatives.

M. Jean Rigal a constaté que l'ensemble des intervenants s'accordait sur le constat, mais qu'il est nécessaire de mener jusqu'au bout le débat initié par le Gouvernement, car l'occasion ne se représentera pas immédiatement d'aborder à nouveau cette question.

Puis, la Commission est passée à l'examen des articles.

Article 46 (Art. 1424-35 du code général des collectivités territoriales) : Financement des services départementaux d'incendie et de secours

La Commission a adopté un amendement de M. Augustin Bonrepaux, rapporteur pour avis, tendant à fixer le plafonnement de l'évolution de la contribution des communes non pas en fonction du montant de l'ensemble des contributions mais selon leur taux de croissance.

Elle a ensuite adopté un amendement du même auteur permettant d'informer les contribuables du coût du service d'incendie et de secours, par le biais d'une mention jointe à l'avis d'imposition de taxe d'habitation.

La Commission a ensuite examiné un autre amendement de M. Augustin Bonrepaux rapporteur pour avis, instaurant une contribution, perçue sur les assurances automobiles, destinée à financer les SDIS. M. Didier Migaud, Rapporteur général, a exprimé sa préférence pour un mécanisme de conventionnement entre les SDIS et les agences régionales de l'hospitalisation. Le Rapporteur pour avis estimant fondé le principe d'un prélèvement, a retiré l'amendement et annoncé qu'il le déposerait à titre personnel, mais qu'il élaborerait l'amendement souhaité par le Rapporteur général.

La commission des Finances a ensuite émis un avis favorable à l'adoption de cet article, ainsi modifié.

Articles additionnels après l'article 47 :

La Commission a adopté un amendement de M. Augustin Bonrepaux, rapporteur pour avis, introduisant un titre sur le financement des collectivités locales. Puis elle a examiné un amendement du même auteur prévoyant que 200 millions de francs, provenant de la régulation de D.G.F. pour 2000, seraient répartis entre les communautés de communes n'appliquant pas une taxe professionnelle unique, afin de corriger les effets du succès de la formule des communautés d'agglomération. M. Didier Migaud, rapporteur général, s'étant interrogé sur la provenance des 200 millions de francs, M. Augustin Bonrepaux, rapporteur pour avis, a précisé qu'ils provenaient d'une régularisation de la D.G.F. pour 2000 d'un montant d'un milliard de francs. La loi avait prévu que les crédits supplémentaires accordés aux communautés d'agglomération entraînaient une baisse de la compensation de la taxe professionnelle. De fait, on observe une diminution de la D.G.F. pour les EPCI visés par l'amendement. Il convient donc de rétablir un peu de justice en corrigeant les effets négatifs de la régularisation. M. Charles de Courson ayant demandé au rapporteur pour avis pourquoi il n'avait pas déposé d'amendement sur la reconduction à hauteur de 300 millions de francs de la DGE spécifique aux SDIS, M. Augustin Bonrepaux, rapporteur pour avis, a précisé qu'il ne pouvait le faire en raison de l'article 40 de la Constitution, la DGE étant une dotation et non un prélèvement sur recettes, mais que le présent amendement inciterait au débat sur cette question. Il a ajouté qu'il déposerait deux amendements l'un sur la création d'un Conseil supérieur de la fonction de sapeur pompier souhaité par M. Charles de Courson et un autre, transférant aux départements l'ensemble des compétences concernées, financées par un budget annexe. Répondant à M. Pierre Méhaignerie, qui l'interrogeait sur l'injustice de la baisse de la compensation de la taxe professionnelle, M. Augustin Bonrepaux, rapporteur pour avis, a souligné que cette baisse serait moins sensible cette année. La commission a alors adopté l'amendement.

Elle a enfin adopté un autre amendement de M. Augustin Bonrepaux, rapporteur pour avis, donnant compétence à la Commission d'évaluation des charges pour les transferts de compétences provenant des régimes obligatoires de sécurité sociale.

Le Rapporteur spécial a annoncé qu'il déposerait incessamment l'ensemble des autres amendements souhaités par la commission des Finances, le Président Henri Emmanuelli ayant indiqué qu'ils bénéficient d'une opinion favorable de la commission des Finances, même s'ils n'ont pas été formellement examinés par elle.

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Informations relatives à la Commission

La commission des Finances, de l'Économie générale et du Plan a désigné pour siéger à une éventuelle commission mixte paritaire sur le projet de loi portant mesures urgentes de réformes à caractère économique et financier :

- M. Henri Emmanuelli, Mme Nicole Bricq, MM. Augustin Bonrepaux, Michel Bouvard, Jean-Jacques Jégou, Jean Vila et Bernard Charles, comme candidats titulaires ;

- MM. Gérard Bapt, Jean-Louis Dumont, Dominique Baert, Yves Deniaud, Gilles Carrez, Charles de Courson et Gilbert Gantier, comme candidats suppléants.

Elle a par ailleurs désigné M. Augustin Bonrepaux comme rapporteur pour avis sur l'article 46 du projet de loi relatif à la démocratie de proximité (n° 3089).

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