Accueil > Archives de la XIe législature > Comptes rendus de la commission des finances, de l'économie générale et du plan (2000-2001)

ASSEMBLÉE NATIONALE

COMMISSION DES FINANCES,

DE L'ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU PLAN

COMPTE RENDU N° 61

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mercredi 11 juillet 2001
(Séance de 15 heures 00)

Présidence de M. Gilbert Gantier, Doyen d'âge

SOMMAIRE

 

pages

- Examen du rapport d'information sur la taxe de séjour (M. Michel Bouvard, Rapporteur spécial)

2

- Examen de la proposition de résolution (n° 3221) présentée par M. Gérard Fuchs au nom de la Délégation pour l'Union européenne sur l'avant-projet de budget général des Communautés européennes pour l'exercice 2002 (M. Didier Migaud, Rapporteur général)



6

- Examen du rapport d'information sur l'application de la loi fiscale (M. Didier Migaud, Rapporteur général)


9

- Examen du rapport d'information sur la sécurité des cartes bancaires (M. Jean-Pierre Brard, Rapporteur)


11

- Information relative à la Commission

13

La Commission des finances, de l'économie générale et du Plan a tout d'abord examiné le rapport d'information de M. Michel Bouvard, rapporteur spécial, sur la taxe de séjour.

M. Michel Bouvard, rapporteur, a tout d'abord précisé que son rapport d'information, en marge des crédits du tourisme dont il est le rapporteur spécial, s'inscrivait dans une réflexion engagée par le Comité des finances locales, sur les rapports financiers liant l'Etat et les collectivités locales. La taxe de séjour constitue en effet une ressource non négligeable pour les communes touristiques. Cependant, la réglementation en vigueur présente de réelles difficultés d'application. Le rapport comporte, d'une part, une description du dispositif en vigueur et des propositions résultant des entretiens et des réflexions livrées par les personnes consultées, représentants des associations d'élus et des organisations professionnelles ainsi que des visites effectuées sur place. La taxe de séjour est une taxe ancienne dont la réglementation a subi huit modifications législatives importantes, dont la plus profonde, intervenue récemment, date de 1988. Le système initialement réservé aux stations thermales peut aujourd'hui concerner toutes les communes puisqu'il vise celles qui réalisent des efforts pour la promotion du tourisme. Deux formes de la taxe cohabitent : l'une perçue au réel et l'autre introduite en 1988, perçue de manière forfaitaire. Concernant la taxe traditionnelle, son assiette couvre l'ensemble des personnes séjournant dans une commune et n'y possédant pas de résidence passible de la taxe d'habitation. Cette définition très large est assortie de très nombreux cas d'exonération et de réduction dont la superposition aboutit à un véritable maquis législatif et réglementaire. La perception de la taxe s'exerce dans un cadre légal assez précis. Le tarif de la taxe de séjour est arrêté par le conseil municipal conformément à un barème établi par décret en Conseil d'Etat. Ce barème, échelonné entre un minimum, un franc, et un maximum, 7 francs, fixés par la loi, répartit les différents types d'hébergement selon leur niveau de confort et propose pour chacune des catégories une fourchette de tarifs. Ce système présente l'inconvénient de laisser de côté certaines formes nouvelles d'hébergement. Par ailleurs, ces tarifs qui n'ont pas été réévalués depuis 1988 sont très éloignés de ceux pratiqués dans les pays voisins.

Un problème important concerne le recouvrement de la taxe. En effet, obligation est faite au logeur de percevoir la taxe et d'en effectuer le reversement à la commune. Toutefois, les manquements à ces obligations ne peuvent être sanctionnés que sur plainte des maires.

Depuis 1988, par souci de simplification, un système de taxe forfaitaire a été institué. Introduit par un amendement au projet de loi d'amélioration de la décentralisation, le système repose sur la capacité d'hébergement des établissements. Le barème applicable est sensiblement identique à celui de la taxe de séjour traditionnelle, à la différence des dispositions concernant les campings. Le recouvrement s'exerce, lui aussi, dans des conditions analogues. A ces deux formes de taxe peut s'ajouter une taxe additionnelle départementale. Celle-ci est actuellement perçue par douze départements, à savoir les plus touristiques.

Ressource nécessaire pour les communes dont elle permet de financer un certain nombre de charges induites par la fréquentation touristique, la taxe de séjour représente environ 677 millions de francs, pour autant que l'on puisse se fier aux statistiques du ministère de l'intérieur. Ce chiffre représente une moyenne de 350 000 francs par commune, à peine plus qu'avant 1988. Cependant, les disparités entre communes sont extrêmement grandes puisque pour certaines d'entre elles le produit de la taxe de séjour suffit à peine à couvrir les frais d'hébergement des renforts de police appelés à surveiller les plages, tandis que la ville de Paris perçoit, à elle seule, 143 millions de francs.

On doit donc constater que cette taxe qui ne rapporte pas autant qu'on le dit représente néanmoins une ressource nécessaire. Il n'est pas inutile de réaffirmer ici la non moins grande utilité de la dotation touristique désormais incluse dans la dotation globale de fonctionnement des communes.

S'agissant de la difficulté d'application de la loi auparavant constatée, la réforme de 1988 n'a pas répondu aux attentes de ses promoteurs. Le rendement de la taxe ne s'est pas amélioré et les difficultés de perception dues à la complexité des textes ont persisté. Il n'est pas rare, dans la pratique, de voir les hôteliers ou logeurs fixer eux-mêmes les règles d'application de la loi quant aux exonérations ou au classement des meublés par exemple, ce qui aboutit à une application de la loi "à la carte". Le mode de recouvrement de la taxe équivaut à une délégation aux bailleurs d'une fonction que la collectivité n'a pas les moyens de contrôler. A ces problèmes s'ajoute la difficulté d'identifier les locations meublées, secteur qui génère une importante économie souterraine.

La taxe de séjour forfaitaire présente, de surcroît, une difficulté résidant dans la mise en _uvre de la concertation qu'elle suppose entre les professionnels et les communes. Son dispositif même est contesté sur plusieurs points : considéré comme une charge d'exploitation, le montant de la taxe est soumis à la T.V.A., ce qui est considéré par les professionnels comme une avance de trésorerie. Le caractère obligatoire du forfait pour tous les établissements appartenant à une catégorie assujettie est contesté pour son manque de souplesse. L'impossibilité dans laquelle se trouvent les communes d'accorder des dégrèvements dans les cas exceptionnels ayant eu des répercussions sur la fréquentation des établissements constitue une lacune qui s'est particulièrement illustrée à la suite des tempêtes et de la marée noire de la fin de l'année 1999.

Enfin, en imposant aux communes l'obligation de verser l'intégralité du produit de la taxe de séjour à l'office du tourisme lorsque celui-ci est constitué en EPIC, la loi de 1988 a limité la liberté des collectivités locales dans la définition de leur politique touristique. Ainsi, les communes qui souhaitent pour des motifs liés aux règles de comptabilité publique, constituer leur office du tourisme en EPIC se trouvent dans l'impossibilité de le faire si, dans le même temps, elles ne veulent pas lui affecter toute la recette de la taxe de séjour. Enfin, les obligations prévues par la loi en ce qui concerne la publicité de l'emploi du produit de la taxe de séjour ne permettent pas une information suffisante des professionnels.

Les propositions énoncées par le rapport d'information visent à améliorer la lisibilité de la loi par une simplification des textes.

- Elles envisagent de mettre un terme à la multitude des cas d'exonération et de réduction par l'adoption d'une formule simple n'exonérant que les saisonniers des stations et les enfants de moins de 16 ans.

- Il est également proposé de simplifier l'établissement des tarifs par l'adoption d'une grille obligatoire répartissant les hébergements en catégories taxées entre 0,5 € et 2 €, à un niveau proche de ce qui est pratiqué dans les autres pays européens.

- Pour éviter les cas d'illégalité constatés dans un très grand nombre de communes, la loi devra laisser aux conseils municipaux le soin d'organiser les opérations de perception de la taxe.

- Le rapport propose d'adapter le régime de la taxe de séjour forfaitaire par des dispositions permettant d'une part, aux établissements d'opter pour le régime du réel et, d'autre part, aux communes d'accorder des dégrèvements en cas de chute de fréquentation due à une catastrophe naturelle ou à une pollution grave.

- Le besoin de transparence et d'information des professionnels devra être satisfait par l'obligation faite aux maires de présenter au conseil municipal un rapport détaillé sur la collecte de la taxe et l'emploi de son produit. Enfin, les communes obtiendront les moyens de faire respecter la loi par une remobilisation des services fiscaux, qui seuls disposent des moyens, notamment informatiques, de déceler les anomalies.

Il importe en effet que ces services, normalement chargés du recouvrement de l'impôt, assument les tâches attachées à leurs missions. Cette clarification pourra mettre un terme à des pratiques plus ou moins admissibles développées par des sociétés commerciales qui proposent différents produits et prestations allant de logiciels de gestion à des contrats d'assistance, qui prévoient une rémunération tirée du produit de la taxe, pratique digne de l'ancien régime.

- Pour mettre un terme à l'inadaptation de la loi aux nouvelles formes d'hébergement touristique, notamment les mobile home, il est proposé d'assujettir à la taxe de séjour les personnes séjournant au maximum 28 jours. Au-delà, devra leur être appliquée une taxe d'habitation dont les bases d'imposition auront été adaptées.

- Le rapport propose enfin d'abroger les dispositions faisant obligation aux communes de verser l'intégralité du produit de la taxe de séjour à l'office du tourisme lorsque celui-ci est constitué en EPIC.

Après avoir résumé l'ensemble de ses propositions, le rapporteur a souligné la nécessité de réformer un dispositif législatif et réglementaire devenu inadapté afin de renforcer l'efficacité et la légitimité d'une ressource bien utile au développement touristique local.

M. Augustin Bonrepaux a souhaité avoir des précisions sur la proposition du Rapporteur tendant à rétablir le délai de 28 jours. Il s'est, par ailleurs, félicité de la proposition de suppression de l'obligation de perception en fin de période qui permettra d'appeler la taxe plus tôt et d'éviter de l'imputer à l'exercice suivant. Par ailleurs, il a rappelé que l'instauration d'une imposition au forfait s'applique à l'ensemble des établissements de même nature. L'obligation d'affectation de la taxe de séjour aux opérations visant à améliorer l'accueil touristique permet d'en contrôler l'utilisation. Cependant lorsqu'elle est affectée à un office du tourisme, elle ne suffit pas toujours à financer son fonctionnement. Il convient de favoriser l'intercommunalité, les offices de tourisme promouvant souvent l'ensemble du pays et non la seule commune qui les finance. Enfin, la taxe départementale ne peut actuellement être instaurée que dans les communes où existe une taxe de séjour. Élargir cette taxe départementale à tous les hébergements poserait des problèmes de contrôle difficiles à résoudre.

M. Charles de Courson a insisté sur la nécessité de développer l'intercommunalité et rappelé qu'il avait déposé un amendement dans ce sens. Le dispositif actuel n'incite pas à l'intercommunalité dans la mesure où l'unanimité des communes est nécessaire à l'instauration d'une taxe communale, et où chaque commune conserve la possibilité de se retirer. Il conviendrait de modifier ce dispositif en encourageant l'affectation de la taxe de séjour à des structures intercommunales dotées d'une fiscalité propre. Par ailleurs, les communes qui ont transféré leurs compétences touristiques peuvent continuer à percevoir la taxe. Il conviendrait de mettre fin à cette curiosité juridique.

M. Jean-Pierre Brard a souhaité connaître de quelle manière le Rapporteur comptait mettre en _uvre ses propositions. La proposition du Rapporteur tendant à prévoir l'intervention des services fiscaux est une bonne initiative, susceptible d'améliorer le contrôle de recouvrement de la taxe. Il faudrait également prévoir une définition légale des mobile home susceptible de permettre une taxation de ce type d'habitations lorsqu'elles sont utilisées de manière permanente.

M. Jean-Jacques Jégou, président, a attiré l'attention de la Commission sur le développement des mobile home sans essieux, occupés toute l'année. La présence permanente d'un local d'habitation devrait entraîner l'imposition au titre du foncier bâti, de la taxe d'habitation pour l'utilisation supérieure à 30 jours et de la taxe de séjour pour les utilisations inférieures à 30 jours.

Répondant aux différents intervenants, M. Michel Bouvard, rapporteur spécial, a apporté les précisions suivantes :

- l'instauration de taxes de séjour intercommunales se heurterait à des difficultés de perception qui ne pourraient être résolues que par la création d'établissements publics de coopération intercommunale dotés d'une fiscalité propre. La possibilité de retrait des communes est effectivement un frein à l'intercommunalité ;

- l'imposition forfaitaire qui s'impose actuellement à l'ensemble des établissements de même nature interdit aux redevables concernés de choisir une imposition au réel. Il serait souhaitable d'assouplir cette disposition ;

- la règle des 28 jours est un retour au dispositif en vigueur avant la réforme de 1988. Il est impossible aux professionnels de contrôler avec précision l'occupation des mobile home. Il est donc proposé de revenir à la règle des 28 jours au-delà desquels le redevable est imposé à la taxe d'habitation. Cette simplification permettra de réduire la fraude ;

- la taxe départementale est égale à 10  % de la taxe communale et ne s'applique qu'aux communes qui ont instauré une taxe communale. Il serait difficile de généraliser la taxe départementale à tout le département. Cependant, il appartient aux départements d'inciter les communes à instaurer la taxe de séjour. De ce point de vue, la grille tarifaire unique permet de lever les obstacles qui, dans de nombreuses communes, s'opposent à l'instauration de la taxe ;

- la loi prévoit la possibilité de créer une taxe touristique. Cependant, cette disposition n'est pas appliquée, les communes n'ayant recours qu'à la taxe de séjour et la taxe sur les remontées mécaniques. Dans de telles conditions, il vaudrait mieux abroger les dispositions relatives à la taxe touristique ;

- les propositions du Rapporteur pourraient faire l'objet d'amendements au projet de loi de finances pour 2002 lorsqu'elles sont du domaine de la loi. Pour le reste, le Rapporteur se rapprochera des services des ministères du Tourisme et de l'Intérieur ;

- les services des ministères du Tourisme et de l'Intérieur préparent une définition des mobile home ;

- la taxe de séjour est affectée directement à l'office du tourisme lorsque celui-ci est un établissement public industriel et commercial. Dans le cas contraire, le code général des collectivités territoriales prévoit des conditions d'utilisation qui peuvent être interprétées de manière extrêmement large. Il est donc essentiel d'instaurer un rapport au conseil municipal sur l'utilisation de la taxe et de promouvoir la coopération avec les professions concernées.

La Commission a ensuite autorisé, conformément à l'article 146 du Règlement, la publication de ce rapport.

*

* *

La Commission a procédé, sur le rapport de M. Didier Migaud, Rapporteur général, à l'examen de la proposition de résolution (n° 3221) de M. Gérard Fuchs, Rapporteur au nom de la Délégation pour l'Union européenne, sur l'avant-projet de budget général des Communautés européennes pour l'exercice 2002 (E 1739).

Le Rapporteur général a critiqué, comme M. Gérard Fuchs dans son rapport au nom de la Délégation pour l'Union européenne, le retard avec lequel les documents budgétaires communautaires ont été transmis à l'Assemblée nationale. Alors que l'avant-projet de budget a été adopté le 8 mai 2001 par la Commission européenne, l'introduction générale n'a été transmise à l'Assemblée que le 18 juin, imposant des délais d'examen trop brefs, compte tenu des masses financières en jeu. Il est vrai, cependant, que l'impact sur les finances publiques nationales, sous la forme du prélèvement sur recettes au profit des Communautés européennes, résultera du projet de budget proprement dit qui sera adopté par le Conseil en première lecture. L'avant-projet de budget examiné aujourd'hui traduit, cependant, les grandes orientations de la Commission. Il servira de base à la discussion budgétaire et mérite donc d'être étudié attentivement.

Cet avant-projet approfondit la démarche d'établissement sur la base des activités (EBA), entreprise par la Commission, qui permet d'affecter les ressources en fonction de domaines politiques clairement identifiables. Cette méthode a permis de répartir les missions de la Commission en quelque deux cents activités regroupées en trente domaines politiques. Les crédits pour les dépenses opérationnelles, administratives et de personnels peuvent être ainsi plus clairement visualisés, même si la démarche mérite d'être encore améliorée dans le sens d'une plus grande lisibilité des priorités.

La progression générale des crédits pour 2002 est significative. Les crédits pour engagements devraient s'élever au total à 100,33 milliards d'euros, soit une progression de 3,5% par rapport au budget rectifié pour 2001. Les crédits pour paiements connaîtraient, pour leur part, une progression encore plus rapide de 4,8%, atteignant 97,77 milliards d'euros. Si l'on compare les crédits pour paiements prévus pour 2002, au budget voté initialement pour 2001 la croissance est même de 5,6%. La Commission européenne a d'ailleurs reconnu que cet accroissement des paiements est plus élevé que l'accroissement de la dépense publique des Etats membres qui s'élève en moyenne à 3,8%. Le Rapporteur général a souligné que le programme pluriannuel de finances publiques de la France à l'horizon 2004 a retenu un taux de progression cumulé des dépenses en volume sur trois ans de 1%. Même en tenant compte de l'inflation, il apparaît que cet objectif de maîtrise des dépenses publiques est nettement plus ambitieux que celui retenu par la Commission pour le budget communautaire. Le ralentissement économique actuel entraînant pour les Etats membres une probable érosion de leurs recettes fiscales, il serait opportun que les dépenses du budget communautaire soient revues à la baisse, préservant ainsi une marge d'adaptation, à moins que l'on considère que le budget européen est susceptible de jouer un rôle contracyclique.

Abordant les dépenses agricoles, le Rapporteur général a indiqué qu'elles progresseraient de 5% par rapport au budget rectificatif et supplémentaire de 2001, en raison notamment des dépenses découlant des épizooties d'encéphalopathie spongiforme bovine et de fièvre aphteuse. Le chapitre « viande bovine » serait doté de 8,37 milliards d'euros en 2002, soit 20% d'augmentation. Le chapitre « mesures vétérinaires et phytosanitaires » progresserait de 254 millions d'euros (+153%) pour atteindre 419,5 millions d'euros, dont 250 millions d'euros consacrés à la fièvre aphteuse. Ces montants pouvant s'avérer néanmoins insuffisants, la Commission a annoncé la présentation, en octobre prochain, d'une lettre rectificative prenant en compte l'évolution des besoins. La création d'une réserve d'un milliard d'euros est d'ailleurs proposée par la Commission afin de couvrir d'éventuelles nouvelles dépenses liées aux épizooties. Le Rapporteur général a émis des réserves sur l'opportunité de cette proposition, en raison de l'existence d'importantes marges disponibles sous le plafond de la rubrique.

S'agissant des dépenses d'actions extérieures, si les crédits pour engagements baissent de 2,2% par rapport à 2001, les crédits pour paiements augmentent de 9,6% principalement en raison du reste à liquider. La réduction de ce dernier ne devrait pas résulter de l'augmentation des crédits de paiement mais davantage de mesures d'amélioration de la gestion des programmes et d'une prise en compte de la capacité réelle d'absorption des bénéficiaires dans la fixation des dotations.

Enfin, les crédits pour paiements des dépenses de préadhésion augmentent de 39%. Il s'agit certes d'une priorité politique mais les dotations sont élevées au regard du retard pris dans la mise en _uvre de l'instrument agricole de préadhésion et de l'instrument structurel de préadhésion qui n'ont procédé à aucun règlement au cours de leur première mise en _uvre en 2000. Les leçons de gestion prodiguées par la Commission font preuve de leurs limites au vu de la façon dont elle gère son propre budget.

Le Rapporteur général a conclu en proposant à la Commission d'adopter la proposition de résolution de la Délégation pour l'Union européenne sous réserve des trois amendements qu'il proposait.

M. Maurice Ligot a fait état de trois points qui ont particulièrement fait débat au sein de la Délégation pour l'Union européenne. En ce qui concerne le problème de la réserve au sein de la rubrique agriculture, il serait maladroit, de la part de la France, de demander la réduction de dépenses agricoles. Sur le rôle du budget européen dans la régulation économique conjoncturelle, M. Maurice Ligot s'est déclaré en accord avec les objectifs poursuivis par la proposition, tout en indiquant que la rédaction proposée par le Rapporteur général recevait son approbation. Enfin, la proposition de création d'un impôt communautaire n'a pas recueilli l'assentiment de l'opposition, l'affectation d'une partie du produit de l'impôt sur le revenu à l'Union européenne n'apparaissant pas adaptée compte tenu du faible nombre de ses redevables en France. M. Maurice Ligot s'est déclaré favorable à l'amendement du Rapporteur général sur ce point.

M. Michel Bouvard a regretté l'impossibilité dans laquelle se trouve la Commission de mener des politiques nouvelles. En particulier, aucune suite n'est donnée aux grands projets d'infrastructures communautaires qui devraient être au c_ur d'une réelle politique européenne, et qui ne doivent pas se résumer, contrairement à ce que sous-entend la proposition de résolution, au domaine des satellites. Le retard dans la mise en _uvre des politiques financées par les fonds structurels est également préoccupant même si la lourdeur des procédures de mise en _uvre au niveau national en est largement responsable : les programmes qui auraient dû voir le jour au 1er janvier 2000 n'ont en réalité été mis en place que depuis deux mois. Ce retard risque d'affecter le taux de retour pour la France par rapport à ce qu'il sera dans les autres Etats membres puisque les crédits n'auront pas été utilisés.

Le Rapporteur général a rejoint M. Michel Bouvard dans son appréciation sur la lourdeur des procédures nationales de mise en _uvre des fonds structurels. Il a ensuite souligné que la proposition de résolution de la Délégation pour l'Union européenne n'évoquait les satellites qu'à titre d'exemple d'une action nouvelle.

La Commission a ensuite examiné les amendements à l'article unique de la proposition de résolution.

La Commission a adopté l'amendement n° 1, rédactionnel, présenté par le Rapporteur général.

Puis, elle a examiné l'amendement n° 2, du même auteur, souhaitant qu'il soit procédé à une étude sur l'impact, en termes de régulation conjoncturelle favorable à la croissance et à l'emploi, par exemple en finançant les grands réseaux, de l'éventuelle mise en réserve d'une partie de l'excédent de recettes redistribué aux Etats membres à l'issue de la clôture d'un exercice antérieur.

Le Rapporteur général a précisé qu'il convenait de s'interroger sur la possibilité réelle pour le budget européen d'assurer une forme de régulation conjoncturelle économique, comme l'affirme la proposition.

M. Maurice Ligot a considéré que l'amendement répondait à la préoccupation de M. Michel Bouvard d'un financement des grands réseaux.

Mme Nicole Bricq a regretté que l'exposé des motifs semble établir un lien entre la question des effets de l'insuffisance de croissance et la question éminemment politique du rôle dévolu au budget communautaire.

Le Rapporteur général a convenu qu'il s'agissait bien d'un débat politique. Il a rappelé que, dans le cas où, du fait de la sous-consommation des crédits communautaires, le budget de l'Union européenne dégageait des excédents de recettes, les contributions des Etats membres au budget des Communautés européennes étaient diminuées. Il a considéré que les crédits ainsi restitués étaient sans doute mieux utilisés par les budgets nationaux.

La Commission a ensuite adopté l'amendement n° 2.

Puis elle a examiné l'amendement n° 3 du Rapporteur général, tendant à modifier la rédaction du dernier alinéa de la proposition de résolution.

Le Rapporteur général a indiqué qu'il souhaitait mieux faire apparaître à chaque citoyen la part représentée par l'Union européenne dans le financement des administrations publiques et que la perspective d'une réforme des institutions devait s'accompagner d'une réflexion sur le poids souhaitable du budget communautaire. Il a ajouté que cette réflexion ne devrait pas exclure l'hypothèse, à pression fiscale constante, d'un « impôt européen ».

La Commission a adopté cet amendement.

Elle a ensuite adopté l'article unique ainsi amendé de la proposition de résolution.

*

* *

La Commission des finances, de l'économie générale et du plan a ensuite examiné, sur le rapport de M. Didier Migaud, Rapporteur général, un rapport d'information sur l'application des mesures fiscales contenues dans les lois de finances, dans la loi n° 98-546 du 2 juillet 1998 portant diverses dispositions d'ordre économique et financier (DDOEF) et dans la loi n° 2001-458 du 30 mai 2001 portant création d'une prime pour l'emploi.

Le Rapporteur général a expliqué que l'examen de l'application des dispositions fiscales contenues dans les lois de finances, dans la loi n° 98-546 du 2 juillet 1998 portant diverses dispositions d'ordre économique et financier et dans la loi n° 2001-458 du 30 mai 2001 portant création d'une prime pour l'emploi constituait le douzième de ce type. Il a rappelé que cet exercice avait pour but d'examiner les conditions juridiques de l'application des dispositions fiscales sans porter de jugement sur leur évaluation. Cette année, 127 articles contenus dans 13 lois promulguées depuis 1994 ont été analysés. On constate que 33,8% de ces articles sont en attente de texte d'application, ce qui signifie qu'ils renvoient à un texte réglementaire non publié ou à une instruction non publiée, mais jugée nécessaire par l'administration, ce qui constitue une légère augmentation par rapport aux années précédentes.

Dans certains cas, le défaut de parution de textes d'application rend difficile la mise en _uvre effective de la disposition en cause, comme dans le cas de l'article 19 de la loi de finances pour 2001, relatif à l'aide fiscale à l'investissement outre-mer, de l'article 79 de la loi de finances pour 2001 qui étend le champ géographique des investissements éligibles à la réduction d'impôt au titre des résidences de tourisme classées dans certaines zones rurales prioritaires et de l'article 24 de la loi de finances pour 2001 qui supprime la taxe sur les passagers pour lui substituer un droit de port de droit commun.

Le Rapporteur général a salué certains efforts de rattrapage réalisés par les administrations depuis son précédent rapport : ainsi, sur les 37 articles qui restaient en souffrance au 30 juin 2000, 21 ont fait l'objet d'un texte d'application. Il reste que 14 mesures votées antérieurement au 31 décembre 1999 ne sont pas dans ce cas.

On peut regretter que certaines précisions nécessaires à l'application de la loi n'ont été publiées qu'après l'expiration du délai imparti aux contribuables pour déposer leur déclaration. C'est le cas par exemple pour l'aménagement de la réduction d'impôt au titre de l'hébergement en établissement de long séjour ou en section de cure médicale (article 20 de la loi de finances rectificative du 30 décembre 2000). A l'inverse, la publication rapide de textes d'application de dispositions d'importance, comme le régime de la prime à l'emploi, doit être saluée.

Dans certains cas, quelques libertés ont été prises avec la loi : en matière de déclarations électroniques d'impôt sur les sociétés et de télérèglement de la TVA, les délais de mise en _uvre prévus par la loi ont été repoussés par un communiqué de presse. Le Gouvernement a également décidé de prolonger le dispositif de baisse de la taxe intérieure de consommation sur certains produits pétroliers au-delà du 20 avril 2001 (article 12 de la loi de finances initiale pour 2001), ce qui apparaît conforme à l'esprit du dispositif voulu par le législateur. En revanche, les dispositions facilitant la mise en _uvre du nouveau régime de la provision pour reconstitution de gisements d'hydrocarbures (article 11 de la loi de finances initiale pour 2001), plus restrictif que le précédent, ne sont pas encore parues.

Enfin, on pourrait s'interroger sur un possible manque de mobilisation des administrations pour l'application de dispositions issues d'une initiative parlementaire : il en est ainsi de la continuité du régime fiscal de TVA en cas de décès d'un exploitant agricole (article 10 de la loi de finances initiale pour 1999), de la taxe communale sur les activités commerciales non salariées à durée saisonnière (article 71 de la loi de finances initiale pour 2001) et de l'extension du champ géographique des investissements éligibles à la réduction d'impôt au titre des résidences de tourisme classées dans certaines zones rurales prioritaires (article 79 de la loi de finances initiale pour 2001).

Le Rapporteur général a souhaité souligner qu'il est inévitable que l'exercice de suivi, auquel se livre chaque année la Commission des finances, conduise à mettre l'accent sur certains dysfonctionnements. Comme pour les années précédentes, il ne faut pas pour autant en conclure que nous sommes confrontés à une situation préoccupante marquée par le fait que la volonté du législateur serait trahie ou, au mieux, ignorée. En réalité, globalement, les administrations fiscales, dans leurs instructions, commentent et appliquent précisément et loyalement les dispositions adoptées par le législateur, et, dans un certain nombre de cas, les retards constatés traduisent de réelles difficultés. Cela dit, les administrations doivent maintenir leur effort pour accélérer leurs travaux d'application.

M. Gilbert Gantier, Président, a déploré que face à la paralysie parfois voulue par l'administration en matière d'application de la loi, les parlementaires se trouvaient désarmés. Il est anormal que l'administration s'exonère de son devoir d'application quand les initiatives parlementaires ne correspondent pas à ses propres priorités.

M. Augustin Bonrepaux a jugé très regrettable que le Parlement n'ait pas les moyens de faire accélérer la procédure et a espéré que la réforme de l'ordonnance organique permettrait de mieux se faire entendre par l'administration.

La Commission a autorisé, en application de l'article 145 du Règlement, la publication du rapport d'information.

*

* *

La Commission a ensuite examiné, sur le rapport de M. Jean-Pierre Brard, Rapporteur, un rapport d'information sur la sécurité des cartes bancaires.

M. Jean-Pierre Brard, Rapporteur, a rappelé qu'une bonne partie du sujet avait déjà été traitée dans le cadre du rapport pour avis sur le projet de loi relatif à la sécurité quotidienne. A cette occasion, plusieurs propositions ont pu connaître une traduction législative, au travers notamment de l'augmentation du rôle de la Banque de France en matière de sécurité des moyens de paiement scripturaux, de l'adaptation du dispositif pénal et de l'approfondissement des garanties des titulaires de cartes bancaires. En outre, il convient de signaler la création de l'Observatoire de la sécurité des cartes de paiement, qui devrait comporter, en son sein, une cellule de veille technologique, associant les diverses administrations concernées par la lutte contre la fraude, ce qui devrait permettre d'assurer une meilleure coordination de leurs actions.

Il a noté que le rapport présenté aujourd'hui était davantage orienté sur l'évolution et la diversification des moyens de paiement ainsi que sur la sécurisation des transactions dans le domaine du commerce électronique. La perspective est différente et s'attache davantage à l'enjeu industriel de ces questions, dans la mesure où les entreprises françaises restent leader sur le marché de la carte à puce. Si les mesures nécessaires en matière de sécurisation des transactions ne sont pas prises, on peut craindre que cette avance ne s'érode. La France a, à cet égard, transmis, en 1998, un mémorandum à la Commission européenne, en vue de la mise en _uvre d'un cadre réglementaire visant à assurer la promotion d'un modèle européen de sécurité des cartes bancaires. Il convient, en effet, de ne pas s'enfermer dans des initiatives hexagonales et de faire face aux tentatives hégémoniques des Etats-Unis, qui souhaitent combler leur retard. La question de la délocalisation aux Etats-Unis des centres de décision d'une entreprise comme Gemplus est, à cet égard, très significative.

Il a déploré que le projet de loi relatif à la sécurité quotidienne n'ait pu être adopté définitivement. Par ailleurs, le projet de loi sur la société de l'information aborde également la question de la sécurité des moyens de paiement, notamment au travers de son titre III, traitant du commerce électronique et de son titre V, portant sur la sécurité dans la société de l'information, lequel renforce les moyens de lutte de la justice et de la police contre la cybercriminalité et procède à une adaptation des mesures relatives à la cryptologie.

Faisant part des propositions contenues dans le rapport, il a indiqué qu'il conviendrait d'associer davantage les commerçants aux procédures de sécurisation. Cette observation vaut notamment pour les opérateurs de téléphonie mobile qui, à l'exception de France Télécom, ont privilégié une surenchère commerciale et la croissance de leur chiffre d'affaires au détriment de l'amélioration de la sécurité. Le taux de fraude d'un des opérateurs a d'ailleurs dépassé les 10%.

Il convient, afin de ne pas fragiliser la confiance des consommateurs envers la carte de paiement, que les nouveaux entrants dans le marché de la vente à distance prennent toutes les mesures de sécurité nécessaires, s'inspirant en cela des procédures mises en _uvre par les entreprises habituées à travailler depuis longtemps dans le domaine de la vente par correspondance.

Afin de sensibiliser les entreprises à l'importance d'une telle sécurisation, il serait possible d'imaginer une labélisation par une autorité publique, permettant de reconnaître les sites présentant un niveau de garantie suffisant. Il conviendrait, en outre, d'inciter les compagnies d'assurance à diminuer les primes demandées aux entreprises investissant dans les dispositifs de sécurisation. Par ailleurs, la mise en cause de la responsabilité des commerçants imprévoyants, se faisant piller leurs bases de données trop peu protégées, pourrait être envisagée.

D'un point de vue plus général, il faut favoriser la mise en _uvre de dispositifs interopérables au niveau européen, afin de préserver l'avance de l'Union européenne en la matière. Actuellement, il est inenvisageable d'imposer tel ou tel moyen de sécurisation, qu'il s'agisse du protocole Cyber-COMM ou du système belge Proton. Inversement, il convient d'aller vers un cadre réglementaire favorisant l'interopérabilité. En effet, il est absurde, par exemple, que les divers dispositifs de porte-monnaie électroniques ne soient pas compatibles. La norme GSM en matière de téléphonie mobile a bien montré qu'une telle interopérabilité était possible, à condition de s'appuyer sur une véritable volonté politique. Des initiatives dans ce sens sont d'ailleurs en cours, s'agissant du porte-monnaie électronique et des lecteurs sécurisés. Des normes communes ne suffisent pas ; les pouvoirs publics devront aussi veiller à maintenir régulièrement un niveau de sécurisation suffisant.

Il faut aller plus loin dans le développement des dispositifs de sécurisation et marquer de l'intérêt, non seulement pour des systèmes comme Cyber-COMM, mais aussi pour des technologies encore plus innovantes comme la biométrie. Déjà utilisée par les militaires, celle-ci nécessite des recherches supplémentaires pour améliorer la fiabilité de la reconnaissance des individus et réduire les marges d'erreur sur l'analyse des empreintes digitales ou de la voix.

En définitive, il est incontestable que les moyens existent de sécuriser fortement le commerce électronique, qui pourra de ce fait se développer et s'imposer.

Dans le rapport qu'il a remis récemment au Secrétaire d'Etat à l'industrie, M. Jean-Michel Yolin estime à juste titre que, sans prétendre imposer une hégémonie sur un secteur en plein développement, les Etats-Unis devraient favoriser les entreprises qui leur sont proches, aux plans culturel et économique. Il est donc nécessaire de prendre des initiatives visant à promouvoir un « modèle européen de sécurisation », afin, d'une part, de préserver la confiance et l'intérêt des consommateurs et, d'autre part, d'assurer la pérennité d'un secteur industriel qui pâtit des difficultés rencontrées, par ailleurs, dans le domaine de la téléphonie mobile. Le commerce électronique est, pour sa part, un « créneau » porteur spécifique qui justifie que des efforts particuliers soient entrepris en sa faveur. De plus, on peut imaginer une extension des technologies mises en _uvre à d'autres domaines, comme par exemple le développement des téléprocédures. Sans vouloir faire preuve d'un excès d'optimisme, le temps n'est peut-être pas loin où l'on pourra disposer d'une carte électronique « citoyenne », servant à la fois de carte d'identité, de porte-monnaie électronique et de carte de paiement.

M. Gilbert Gantier, Président, a souligné que, si l'usage des cartes de paiement pose peu de problèmes de fraude, en France, grâce à la généralisation de la carte à puce, il n'en va certainement pas de même à l'étranger, où l'on voit encore beaucoup de « fers à repasser ».

M. Jean-Pierre Brard a confirmé la justesse de cette analyse, mais a rappelé qu'en France, les banques avaient parfois tardé à mettre en _uvre leurs engagements en matière de sécurité des moyens électroniques de paiement. Par exemple, il est de notoriété publique que certains réseaux bancaires ont été longs à s'équiper de distributeurs de billets capables de lire la carte à puce. De tels distributeurs et des terminaux de paiement commencent à apparaître aux Etats-Unis, qui ont découvert beaucoup plus récemment les vertus de la carte à puce. Mais la bataille industrielle n'est pas gagnée : on doit se souvenir que les Etats-Unis ont, semble-t-il, caressé un temps le projet de modifier l'emplacement de la puce sur la carte, ce qui aurait disqualifié de facto le système français.

La Commission a ensuite autorisé, en application de l'article 145 du Règlement, la publication du rapport d'information.

*

* *

Information relative à la Commission

La Commission des finances, de l'économie générale et du Plan a nommé :

- M. Didier Migaud comme rapporteur sur la proposition de résolution (n° 3221) de M. Gérard Fuchs, au nom de la Délégation pour l'Union européenne, sur l'avant-projet de budget général des Communautés européennes pour 2002 (E 1739).


© Assemblée nationale