ASSEMBLÉE NATIONALE
COMMISSION DES FINANCES,
DE LÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU PLAN
COMPTE RENDU N° 55
(Application de l'article 46 du Règlement)
Mardi 15 juin 1999
(Séance de 16 heures 30)
Présidence de M. Augustin Bonrepaux, Président
SOMMAIRE
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Table ronde en vue du débat dorientation budgétaire avec MM. Philippe Bouyoux, sous-directeur des synthèses macroéconomiques à la Direction de la Prévision du ministère de lÉconomie, des Finances et de lIndustrie, Michel Didier, directeur de Rexecode et André Gauron, membre du Conseil danalyse économique
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Informations relatives à la Commission
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Le Président Augustin Bonrepaux, après avoir évoqué le relatif optimisme qui caractérise lappréciation portée sur les finances publiques, a affirmé retirer du rapport sur lévolution de léconomie nationale et des finances publiques, remis par le Gouvernement, trois conclusions principales :
un rythme de croissance prévisionnel de 2,5 % à 3 % ;
une situation de lemploi qui montre des perspectives encourageantes, puisque 270.000 emplois devraient être créés en 1999 ;
un déficit budgétaire contenu grâce à la maîtrise des dépenses de lÉtat.
Il a posé trois séries de questions aux intervenants : sur lévolution de la conjoncture de léconomie française et européenne dans les mois à venir, sur les répercussions de cette évolution conjoncturelle sur les grands équilibres des finances publiques et sur les marges de manuvres que ces évolutions confèrent aux pouvoirs publics en ce qui concerne la réduction des déficits publics, le développement de la politique de lemploi et la diminution du poids de la fiscalité.
M. Philippe Bouyoux, sous-directeur des synthèses macro-économiques à la Direction de la Prévision du ministère de lÉconomie, des Finances et de lIndustrie, a tout dabord expliqué que si le relatif optimisme évoqué par le Président Augustin Bonrepaux sappliquait au dynamisme actuel de la conjoncture, il fallait revenir sur un début dannée moins favorable : en effet, après un taux de croissance faible de 0,3 % au premier trimestre de lannée, suivant les comptes trimestriels de lINSEE, les prévisions pour 1999 laissent apparaître un ralentissement du taux de croissance annuel qui pourrait conduire à réviser à la baisse le chiffre initialement retenu lors de lélaboration de la loi de finances pour 1999.
Il a ensuite décrit les causes et les conséquences du ralentissement économique observé au premier trimestre, dû à la crise subie par les pays émergents et provoquant un choc sur les secteurs exposés à la concurrence internationale, et en particulier lindustrie. Il a indiqué que ce « trou dair » avait pourtant eu des effets limités dans le temps grâce à lamélioration de la situation économique des pays émergents et des ÉtatsUnis comme le prouvent les dernières enquêtes de conjoncture réalisées par la Banque de France et par lINSEE comme dans lampleur de la crise, puisque le poids des secteurs abrités dans léconomie française, le maintien à un haut niveau de la confiance des ménages grâce aux résultats favorables du marché du travail, ainsi que la réaction adéquate de la Banque centrale européenne, ont limité limpact du ralentissement économique.
M. Philippe Bouyoux a rappelé que les comptes trimestriels de lINSEE montraient quaprès une certaine déprime de linvestissement des entreprises en octobre dernier, cet indicateur avait retrouvé un bon niveau, malgré un ajustement effectué sur les stocks, réaction cohérente avec la nature transitoire du choc. Il a ensuite souligné que les enquêtes de lINSEE montraient une amélioration particulière des perspectives de production industrielle. Il a attribué la sortie du « trou dair » à lamélioration de lenvironnement économique mondial et à la bonne coordination, dans la zone euro, entre la politique budgétaire, marquée par une baisse des charges dintérêt contribuant à améliorer les soldes budgétaires structurels sans impact restrictif, et une politique monétaire aboutissant à des niveaux favorables des taux de change et dintérêt réels.
Il a précisé quun scénario consensuel fixait le niveau de la croissance pour lannée 1999 à un chiffre compris entre 2,2 et 2,5 % en moyenne annuelle, et que laccélération observée au deuxième semestre porterait le taux de croissance pour 2000 à un chiffre compris entre 2,5 et 3 %. Il a expliqué que le socle de cette croissance était une demande intérieure soutenue, alimentée par la consommation des ménages et linvestissement des entreprises. En ce qui concerne les créations demplois, après une année 1998 particulièrement favorable, le nombre de créations demplois pour 1999 se situerait à 270.000 et à 400.000 en 2000. Il a souligné que les modèles utilisés, dont les paramètres se fondent sur les données passées, narrivaient cependant pas à expliquer le niveau actuel des créations demplois.
Il a conclu en soulignant que la croissance française avait comparativement mieux résisté au « trou dair » que ses partenaires européens, grâce à la situation favorable du marché du travail.
M. Michel Didier, directeur de Rexecode, a évoqué les opportunités existant actuellement dans léconomie européenne mais il a insisté sur les dix-huit mois de ralentissement quelle traversait, le taux de croissance ayant chuté de 4 % au deuxième trimestre 1997 à 2 % au premier trimestre 1999, ce qui constitue une performance très modeste par rapport à la situation observée outre-atlantique. Parce que des freins ralentissent la croissance européenne, il convient de sinterroger sur son évolution future.
Il a posé la question dune éventuelle fin du phénomène de « trou dair » que connaît léconomie française depuis plusieurs mois, alors que les années 1997-1998 avaient été marquées par une situation internationale exceptionnelle, à lorigine dune forte croissance des exportations. M. Michel Didier a indiqué que les données les plus récentes montraient effectivement la fin de la dégradation de la conjoncture, comme latteste la situation dans différents secteurs : la construction est située à son plus haut niveau depuis dix ans, même si un reflux est prévu en 2000 ; la fin de la dégradation dans lindustrie est probable, quoique les stocks demeurent élevés, que les effectifs régressent toujours et que les prix naugmentent pas. Dans les services, la croissance est positive et fait lobjet danticipations favorables, malgré un taux modéré au premier trimestre 1999. Ces données ne semblent pourtant pas de nature à signaler une nouvelle accélération de la croissance : alors que la loi de finances initiale misait sur un taux de 2,7 %, les prévisions de Rexecode étaient de 2,1 à 2,3 %, chiffre qui se confirme.
Afin dévaluer la tendance qui va succéder au « trou dair », M. Michel Didier a analysé lenvironnement économique actuel. Il a dabord mis laccent sur les risques relatifs aux pays émergents : si la croissance doit repartir, ce sera à un niveau inférieur à celui qui était atteint avant la crise asiatique, puisque celle-ci avait pour origine des flux de capitaux dont le retour ne peut être que progressif et parce que le prix des matières premières ne devrait pas connaître de fort rebond. Il sest, de plus, inquiété de la tenue du yuan chinois et de la situation en Amérique latine, en particulier en Argentine et au Brésil.
Il sest ensuite intéressé à lexceptionnelle croissance américaine et à ses perspectives. Il a présenté deux possibilités : un ralentissement spontané jusquà 2 % de croissance, sans inflation, qui entraînerait une baisse des taux dintérêt, ou la persistance dune croissance haute qui provoquerait une hausse des taux dintérêt, une chute de la valeur des titres, voire une récession. Le premier scénario apparaît à la fois plus probable et plus souhaitable, dans la mesure où il conduirait à une baisse des taux et du dollar.
Il a souligné le fait que la croissance des années 1997-1998 en Europe avait été impulsée par la demande mondiale et la diminution des taux dintérêt, mais quelle ne lui semblait pas durable : il est préférable de parler dun retour à une tendance longue de croissance qui se situe autour de 2 % par an.
Pour ce qui est de la France, M. Michel Didier a rappelé que le taux de croissance moyenne annuelle a été de 1,4 % dans les années 1990, et de 2,2 % pour les vingt-cinq dernières années. Il a jugé que la croissance des années 1990 avait été perturbée par les fluctuations monétaires et par la croissance américaine. Sauf changement structurel peu probable, la croissance tendancielle devrait sétablir à environ 2,2 %, taux prévisible pour 2000. Néanmoins, il na pas exclu la possibilité de mouvements conjoncturels et sest inquiété des conséquences du passage aux trente-cinq heures qui constituera un « choc de coût », lequel sera plus ou moins amorti selon le partage qui sera établi entre gains de productivité, modération salariale et pressions sur la production. Dans un scénario optimiste, on peut sattendre à un choc atténué et étalé dans le temps ; dans le cas contraire, il a craint une chute de la production et de lemploi. Si ses prévisions reposent sur le premier scénario, il a déclaré attendre de connaître le contenu de la nouvelle loi pour pouvoir se prononcer plus sûrement et a mis laccent sur le fait que seule la négociation pourrait empêcher quun cercle vicieux ne senclenche.
M. André Gauron, membre du Conseil danalyse économique, a tout dabord décrit lévolution récente des finances publiques : le déficit public a diminué de 20 milliards de francs par rapport à celui de 1997 et de 10 milliards de francs par rapport à la loi de finances initiale. Mais il a noté que le solde primaire demeure négatif, même sil diminue. Il a attribué cette amélioration de la situation au dynamisme des recettes totales et fiscales, et à une augmentation de la dépense publique plus lente que la croissance du PIB en valeur, tout en déplorant que ce ralentissement se soit opéré au détriment des dépenses en capital. Il en a conclu que lamélioration était fragile et plutôt due à la conjoncture économique quà une politique volontariste.
Il a estimé que la crise asiatique avait moins influencé la conjoncture française en 1999 que ne lavait fait le ralentissement conjoncturel en Allemagne et en Italie, ralentissement lié à la crise asiatique, mais aussi à des facteurs internes. Il a donc mis en avant la nécessité de la définition dune réelle politique économique européenne dans la zone euro, qui prenne en compte lensemble du continent.
M. André Gauron a insisté sur la nécessité dutiliser les marges de manuvre de léconomie française pour renforcer sa politique de loffre. Si nos économies ne sont peut-être pas entrées dans une nouvelle ère économique, elles sont néanmoins confrontées à un important changement structurel, notamment en raison de lintroduction des nouvelles technologies de linformation et de la communication, qui ont dimportantes conséquences sur les structures de loffre et de la demande. Il a fait observer que lEurope était à cet égard dans une situation particulière car, contrairement aux États-Unis, elle produisait trop peu de ces nouvelles technologies. Dès lors, elle risque de cumuler les contraintes issues de ladaptation de son appareil productif et des suppressions demplois qui en découlent, sans pour autant bénéficier de créations demplois dans ces secteurs. Il a donc plaidé pour que les mesures visant à soutenir ces secteurs deviennent un axe central de la politique économique de notre pays.
Observant que la plupart des scénarios macro-économiques pour lhorizon 1999-2000 prévoyaient une amélioration globale de léconomie mondiale, un regain de croissance dans la zone euro et un « atterrissage en douceur » des États-Unis, M. Didier Migaud, rapporteur général, sest interrogé sur les risques qui pèsent sur un tel scénario et sur les conséquences quaurait un éventuel éclatement de la bulle financière aux États-Unis. Il sest également inquiété des répercussions sur les perspectives de croissance en France et des faibles performances économiques de lItalie et de lAllemagne. Il a demandé aux économistes sils jugent fondés les reproches formulés par plusieurs organismes, dont lOCDE, sur la rigidité et la segmentation du marché du travail français et sur les risques que labsence de réformes structurelles profondes ferait peser sur la croissance à long terme. Il sest enfin interrogé sur les facteurs qui pourraient compromettre, à lhorizon 2000, la mécanique vertueuse de la confiance, de la consommation et du revenu observée pour les ménages depuis plusieurs trimestres, ainsi que sur la pérennité de lactuel système de « policy mix ».
M. Philippe Bouyoux a rappelé que léconomie française enregistrait, dans les années 90, un rythme de croissance compris entre 1 et 1,5 %. Si lon prend en considération les 25 dernières années, ce rythme sélevait alors à environ 2,2 % lan. Il a considéré que certains éléments pouvaient laisser penser que ce rythme pourrait atteindre à lavenir 2,5 ou 3 %. Dès lors, lhypothèse dune croissance potentielle de 2,2 % est une hypothèse prudente. Il a insisté sur le fait quil fallait distinguer entre la croissance potentielle et la croissance possible : en effet, si léconomie française a connu une croissance inférieure à son potentiel pendant plusieurs années, elle a en quelque sorte accumulé un déficit de croissance autorisant un rattrapage et donc une croissance plus rapide, sans que les équilibres macro-économiques soient, de ce fait, menacés.
Sagissant de léquilibre budgétaire, il a indiqué que le solde primaire serait presque nul en 1999 et quun excédent devrait apparaître en lan 2000.
Il a confirmé que lAllemagne et lItalie avaient connu une croissance plus faible que celle de léconomie française et que tout laissait à penser que cette situation perdurerait au moins jusquà la fin de cette année. Selon lui, cet écart sexplique dabord par la spécialisation différente du commerce extérieur de ces deux pays, tant géographique lAllemagne étant plus engagée vis-à-vis de la Russie et des pays de lEst que sectorielle, lItalie étant spécialisée sur des secteurs où la concurrence des pays émergents est forte. Dès lors, si la croissance des pays émergents se résout, on peut sattendre à un rebond de la croissance allemande ou italienne. En second lieu, il faut observer que lévolution de la demande a été, en Allemagne et en Italie, deux fois plus faible que celle observée en France au cours des deux dernières années, laugmentation constatée dans notre pays sexpliquant par la forte croissance des revenus dactivité, et, donc, par une meilleure tenue du marché du travail. Enfin, il a attiré lattention sur le fait que le « policy mix » a été très différent en Italie, puisque ce pays a mené un ajustement budgétaire à marche forcée pour intégrer la zone euro.
M. Michel Didier a estimé que la notion de déficit de croissance devait être maniée avec prudence car il nest pas exclu, comme cela a dailleurs été le cas dans les années 70, que la croissance ait changé de pente et quil ny aurait donc, dès lors, plus de rattrapage possible.
Sinterrogeant sur la possibilité de parler effectivement de bulle financière aux États-Unis, il a reconnu que la valeur des actifs financiers nets détenus par les ménages américains avait fortement augmenté au cours des dernières années : alors quelle représentait trois ans de revenus disponibles jusquen 1994, elle en représente aujourdhui quatre. Il sagit là dun gain considérable. Sagissant des perspectives dévolution, il a indiqué quil ne fallait pas surestimer la bulle financière constituée par les valeurs liées à lInternet. Celle-ci ne représente en effet quune faible partie de la capitalisation boursière totale : le NASDAQ ne représente quune capitalisation de 2.000 milliards de dollars sur un total de 12.000 milliards de dollars et la part des valeurs informatiques ny est que de 35 %. Ainsi, si les valeurs liées à lInternet diminuaient de 20 %, la capitalisation boursière américaine globale ne diminuerait que de 2 %. Même sil existe une surestimation générale des valeurs boursières, un reflux de 20 % laisserait néanmoins de considérables plus-values constituant un important élément amortisseur. Il a également relativisé les conséquences quun tel reflux aurait sur lEurope, estimant quà moyen terme on observerait une déconnexion assez rapide des marchés boursiers de part et dautre de lAtlantique.
Abordant la question de la situation conjoncturelle de lAllemagne et de lItalie, il a jugé que celle-ci sexpliquait par des causes temporelles et circonstancielles, même sil est vrai que lAllemagne est confrontée au problème plus durable de la baisse de sa productivité moyenne.
Sagissant des éléments qui constituent des rigidités économiques, il faut souligner que la France est toujours un peu hors norme par rapport à ses voisins. En la matière, il ny a pas que les rigidités du marché du travail et lon peut évoquer aussi la part du secteur géré selon des normes publiques, sur lequel un certain nombre de stimulants économiques demeurent sans effet.
En ce qui concerne le développement des nouvelles technologies, il a insisté sur le fait que lEurope affichait un important retard par rapport aux États-Unis. Si le PIB de la zone euro représente 75 % du PIB américain, la production de logiciels en Europe ne représente plus que la moitié de la production américaine et la production de nouvelles technologies de linformation et de la communication seulement 40 % de la production américaine. Dès lors, il a estimé que si lEurope ne se constituait pas une offre dans ces secteurs, alors que les investissements dans ces technologies sont indispensables, elle contribuera à accélérer la croissance aux États-Unis et non pas dans son champ géographique.
Rappelant que la confiance des ménages constitue un indicateur peu prédictif, il a jugé quelle devrait reculer très lentement car les ménages nont pas encore intégré le ralentissement de léconomie ; toutefois cela a peu dimportance à court terme, car ce degré de confiance est très élevé aujourdhui.
Il a fait observer que la pérennité actuelle du « policy mix » ne dépendait pas des économistes mais des choix politiques des différents États européens. Il a fait observer que la réduction progressive des déficits publics était indispensable pour permettre à la Banque centrale européenne de maintenir de faibles taux dintérêt.
Évoquant la situation aux ÉtatsUnis, M. André Gauron a souligné que léconomie de ce pays était en réalité soutenue par les économies du monde entier, en particulier grâce à la demande de nouvelles technologies de linformation et de la communication et, surtout, en raison du financement de son déficit par le système monétaire international. Il a ajouté que cette année se caractérisant par une échéance électorale, la situation nétait sans doute pas susceptible dévoluer.
Il a ensuite abordé la question de leuro en insistant sur lattention qui devait être portée à la situation en Allemagne à la suite notamment des derniers résultats électoraux qui y ont parfois été interprétés comme un signe de mécontentement à légard de la faiblesse de leuro par rapport au mark. Dans ces conditions, il a estimé quun durcissement de la politique monétaire et a fortiori quune absence de baisse des taux dintérêt en Europe au cours des douze prochains mois étaient prévisibles.
Sagissant enfin de la situation de la France, il a considéré que lincertitude liée aux modalités dapplication du passage aux 35 heures pourrait avoir des effets négatifs. Il a notamment insisté sur la nécessité de déterminer, dans les meilleurs délais, le niveau du SMIC, élément crucial pour les entreprises embauchant des personnes à bas salaires, et de régler le problème des heures supplémentaires, afin de permettre ainsi les embauches attendues.
M. Gérard Saumade a appelé lattention sur la difficulté davoir des prévisions fiables. Il a insisté sur la tension existant actuellement dans le secteur du bâtiment et des travaux publics, soulignant quil était désormais rare quune procédure dappel doffres ne soit pas déclarée infructueuse et conduise à recourir à des marchés négociés, ce qui est à lorigine dune hausse des prix préoccupante. Au regard de ces éléments, il sest interrogé sur le risque dune extension de cette augmentation à dautres secteurs de léconomie. Il sest par ailleurs demandé si cette situation ne rendait pas nécessaire une importation de main doeuvre, afin de disposer demplois adaptés aux besoins de léconomie.
Il sest, en outre, déclaré préoccupé par lavenir prévisible de lUnion européenne en soulignant que la France allait progressivement évoluer dune position de « receveur » dans le cas de la politique agricole commune ou des fonds structurels, par exemple, à une position de fournisseur de capitaux. Dans un tel contexte, il sest interrogé sur la possibilité darticuler ces facteurs dévolution avec les perspectives que ne manquerait pas douvrir leffort de reconstruction en ex-Yougoslavie.
Déplorant labsence de diffusion des comptes de la Nation pour lannée 1998 alors même que leurs bases de référence ont été modifiées, M. Philippe Auberger a souhaité que ces documents soient adressés dans les meilleurs délais à la représentation nationale, qui doit en être le destinataire prioritaire.
Évoquant une déclaration du ministre de lÉconomie se félicitant dun taux de croissance en France plus élevé que celui de ses trois principaux voisins, il a estimé quil convenait davantage de se référer au taux de croissance moyen de lensemble des pays européens qui se situait, daprès les prévisions de la Commission européenne, à environ 2,2 %, ce qui plaçait la France exactement dans cette moyenne. Il a considéré quil importait en effet de situer léconomie française au sein de lensemble de la zone euro plutôt que par rapport à celle de ses trois voisins et, ce, dautant que lAllemagne était confrontée à des problèmes particuliers en raison de ses liens privilégiés avec la Russie, et que lItalie avait cherché à entrer à marche forcée dans la zone euro, orientation ayant eu des effets restrictifs sur son économie.
Sagissant de la situation de lemploi en France, il a relevé que léconomie connaissait certes un rythme de croissance des emplois, mais que les créations correspondantes bénéficiaient inégalement aux différentes tranches dâge de la population, un allongement de la durée du chômage pouvant être observé chez les plus de 50 ans, ainsi quun moindre bénéfice de cette croissance pour les jeunes de moins de 25 ans. Il a en outre insisté sur le fait que ces embauches se faisaient le plus souvent par contrat à durée déterminée ou par interim, ce qui a dailleurs incité le ministre de lEmploi et de la Solidarité à envisager une limitation du recours à ces formes dembauche.
Enfin, il sest interrogé sur les effets des « contrats de meilleure gestion » prévus dans les ministères qui constituaient en réalité, selon lui, de véritables gels de crédits. Estimant que ces gels avaient porté sur environ 15 milliards de francs de dépenses budgétaires, il a demandé quelles pouvaient être leurs conséquences sur la croissance et comment on avait pu parvenir à un tel montant alors même quune augmentation de 1 % des dépenses en volume avait été décidée.
M. Pierre Méhaignerie sest inquiété des conséquences de la mise en place des 35 heures sur la situation de lemploi, alors même que des goulots détranglement existent non seulement dans le secteur du BTP mais également dans de nombreux autres secteurs dactivité, comme lagro-alimentaire ou la restauration.
Se référant à un article de presse, il a indiqué que le ministre de lÉconomie et des Finances avait déclaré que la différence entre les économies des pays européens se jouait à plus ou moins un demi point de croissance. Il a souhaité connaître les raisons pour lesquelles léconomie française avait connu une croissance supérieure dun demi point par rapport à celle de ses voisins, durant la période 60-70, puis une croissance inférieure du même taux au cours des années 80-90, soit un écart sur la période dun point de croissance. Sagissant de la mise en place des 35 heures, il sest interrogé sur les conséquences de lapplication de ce dispositif dans le secteur public, caractérisé, selon lui, par de faibles marges de productivité et a souhaité recueillir lavis de différents experts sur limpact prévisible de cette mesure dans ce secteur.
M. Gérard Fuchs a tout dabord souligné que la comparaison de la situation économique française avec celle de ses trois principaux voisins se justifiait par le niveau comparable de leur développement. Il a ensuite mis laccent sur la priorité accordée par le Gouvernement à lemploi des jeunes notamment à travers le dispositif des emplois jeunes. Enfin, sil a admis que la mise en place de la loi sur les 35 heures pouvait provoquer un choc des coûts, il a estimé quelle ne manquerait pas, dans le même temps, de susciter dimportantes réorganisations permettant aux entreprises dembaucher.
Puis il a posé deux questions portant, lune sur la « surveillance mutuelle » entre les États membres, prévue par le Traité sur lUnion européenne, en vue de parvenir à une croissance plus forte, qui pourrait être dépassée au profit dune véritable coopération économique dont lobjectif serait une relance de la croissance et sur la possibilité de faire jouer au budget communautaire un rôle plus dynamique en prévoyant un transfert de certaines compétences actuellement dévolues aux États par exemple, dans le domaine des réseaux de télécommunications ou des biotechnologies, afin de permettre non plus une simple adaptation aux évolutions du marché, mais une production autonome, génératrice demplois.
Sinquiétant de la détérioration du déficit primaire, M. Gilles Carrez a souhaité savoir si cette tendance nétait pas liée à une rigidité des dépenses, susceptible dêtre accrue en 2000 en raison de leffet, en année pleine, de la revalorisation des traitements dans la fonction publique, ainsi que de la mise en place des 35 heures et du dispositif des emplois jeunes.
M. Edmond Hervé a tenu à souligner que la Cour des comptes, dans son rapport préliminaire sur lexécution des lois de finances pour 1998, avait souligné lexistence dune baisse de 14 % des dépenses en capital consacrées aux interventions publiques. Il a, par ailleurs, jugé que le niveau quasi nul de linflation, lexcellence de la profitabilité des entreprises et de leur capacité dinvestissement nétaient pas assez présents dans les débats actuels sur la croissance. Enfin, il a estimé que les ménages navaient que très peu profité du partage de la valeur ajoutée ces dernières années.
En réponse, M. André Gauron a fait observer que, pour réduire les dépenses, il convenait de peser non seulement sur les dépenses de personnel qui représentaient environ 40 % du budget, mais surtout sur les dépenses dintervention et la charge de la dette. Il a précisé quà ce titre, une gestion plus active de la dette, à lexemple de ce qui se pratiquait aux États-Unis, et une réduction des exonérations fiscales qui constituaient, en fait, des dépenses déguisées, accompagneraient utilement des négociations globales avec les organisations syndicales sur la question des effectifs, de la durée du travail et des retraites. Il a constaté que laffaiblissement de la contrainte extérieure par le biais de la contrainte monétaire, imposée par des politiques plus restrictives au début des années quatre-vingts, constituait sans doute lun des événements majeurs de lhistoire économique récente. Il a ajouté que la nouvelle donne monétaire, marquée par le passage du système de Bretton-Woods à un mécanisme de changes flottants généralisé, avait été à lorigine dune révolution dans le pilotage de léconomie mondiale, grâce à laquelle les États-Unis sétaient défait de la contrainte extérieure.
Il a ensuite fait remarquer quune croissance moindre dans des pays partenaires tels que lAllemagne et lItalie aurait, à terme, des conséquences négatives sur la croissance de léconomie française, ce qui justifiait le passage de la simple coordination des politiques économiques des États membres de lUnion à une véritable coopération. Il a noté que cette politique pouvait buter, notamment, sur linnovation, qui constituait pour les pays européens moins une question budgétaire quune question daccès au financement, souvent difficile.
Enfin, il a fait observer que la flexibilité économique, dans les pays européens, se faisait moins par les prix que par le développement dune organisation du travail fondée sur la multiplication des contrats à durée déterminée et le développement du travail à temps partiel, tous deux sources de précarité.
M. Philippe Bouyoux a indiqué que les hypothèses de croissance de léconomie américaine tendent à montrer que celle-ci bénéficie de ressorts internes, indépendants de lévolution, plus timide, de léconomie européenne.
Puis, après avoir souligné quil nexistait pas de tensions inflationnistes dans léconomie en général, il a indiqué quil convenait de ne pas anticiper les risques de surchauffe et dinflation liés à lamélioration forte que connaissait le secteur du bâtiment et des travaux publics, qui était due à la fois à des raisons durables, telles que la baisse des taux dintérêt, et à des causes plus temporaires, telles que des dispositions fiscales.
Il a précisé que les chiffres de lINSEE, fondés sur le nouveau système européen de comptes, avaient dores et déjà été publiés, avant de rappeler que la croissance pour 1998 serait inchangée par rapport aux prévisions, et que le besoin de financement des administrations publiques sétablirait à 2,8 % du PIB. Il a fait savoir que le Rapport sur les comptes de la Nation devrait être rendu public le 18 juin.
Par ailleurs, il a expliqué que la croissance française, fixée à 2,1 % pour 1999, se situerait dans la moyenne de la zone euro, et serait plus forte que celle de lItalie et de lAllemagne, mais plus faible que la croissance tendancielle de lEspagne ou de lIrlande.
Enfin, il a justifié la signature de contrats de gestion entre le ministère chargé du budget et les ministères dits « gestionnaires » par la nécessité que soient prises en compte le fait que les objectifs contenus dans le programme pluriannuel étaient fixés en volume, ce qui impliquait de prendre en compte les différences entre les prévisions dinflation, établies à 1,3 % dans le projet de loi de finances, et les révisions à 0,5 %, effectuées en avril.
Après avoir rappelé quil avait proposé de déconnecter les prévisions budgétaires proprement dites des objectifs de croissance fixés par le Gouvernement, M. Michel Didier a jugé nécessaire de modifier, en conséquence, la procédure délaboration du budget. Il a fait observer que la France se situe dans la moyenne de croissance économique de la zone euro depuis longtemps et quil conviendrait de mettre en place de grands programmes de moyen terme, au-delà du développement des seules nouvelles technologies de linformation et de la communication, domaines dans lequel lEurope a déjà accumulé un retard important.
Enfin, il a tenu à faire état de lensemble des hypothèses qui sous-tendent les prévisions de Rexecode sur le passage aux trente-cinq heures. Ainsi, il a considéré que létape que représente lan 2000 devait être passée avec le minimum de contraintes, ce qui suppose un contingent dheures supplémentaires beaucoup plus fort quil ne lest actuellement, un abaissement des majorations pour heures complémentaires, une stabilisation en valeur de la dépense publique durable qui permettrait dassurer une certaine souplesse dans le partage du revenu national, comme la montré lexemple des Pays-Bas, et enfin la mise en uvre dune transition longue, sous peine de voir certains secteurs, tels que lindustrie ou le bâtiment, éprouver des difficultés à trouver les effectifs adaptés à la demande. Il a conclu quun resserrement de la main-duvre pourrait entraîner des pertes de production, et in fine un risque de décrochage de la croissance française par rapport à la tendance européenne.
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Informations relatives à la Commission
La commission des Finances, de lÉconomie générale et du Plan a procédé aux désignations suivantes :
M. Didier Migaud, rapporteur général, comme rapporteur sur la proposition de résolution (n° 1676) de M. Gérard Fuchs, sur lavant-projet de budget général des Communautés européennes pour lexercice 2000 (n° E 1253) ;
M. Jérôme Cahuzac comme rapporteur pour avis sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2000.
fpfp
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