Accueil > Archives de la XIe législature > Comptes rendus de la commission des finances, de l'économie générale et du plan (1999-2000)

ASSEMBLÉE NATIONALE

COMMISSION DES FINANCES,

DE L'ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU PLAN

COMPTE RENDU N° 18

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mardi 2 novembre 1999
(Séance de 17 heures)

Présidence de M. Augustin Bonrepaux, Président

SOMMAIRE

 

pages

- Suite de l'examen de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2000 (n° 1805)

 

Agriculture et article 64 rattaché à ce budget

2

Poste et télécommunications

6

Budget annexe des Prestations sociales agricoles

7

La commission des Finances, de l'Économie générale et du Plan a poursuivi l'examen de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2000 (n° 1805).

Elle a tout d'abord examiné, sur le rapport de Mme Béatrice Marre, rapporteure spéciale, les crédits de l'Agriculture.

Mme Béatrice Marre a d'abord souligné que la baisse apparente du budget de l'Agriculture, hors budget annexe des prestations sociales agricoles (BAPSA), de 0,5 % - il passe de 28.197 millions de francs en 1999 à 28.048 millions de francs en 2000 -, traduisait en fait une augmentation de moyens de 3 % (800 millions de francs) dans la mesure où le budget enregistre une baisse mécanique en raison de la chute des dépenses de bonification des prêts (chute de 900 millions de francs), liée à la baisse des taux d'intérêts observée ces dernières années.

Ce projet de budget pour 2000 correspond à la volonté du Gouvernement de traduire la loi d'orientation agricole par des moyens budgétaires supplémentaires, autour de trois grands objectifs : financer la mise en _uvre des contrats territoriaux d'exploitation (CTE), renforcer la qualité de la production agricole et la sécurité alimentaire et consolider les moyens de l'enseignement agricole. 950 millions de francs, dont 350 millions de francs de moyens nouveaux, seront consacrés en 2000 au financement de 40.000 CTE, qui s'ajouteront aux 10.000 dont le financement était prévu pour 1999. Cette somme atteindra 2 milliards de francs, grâce aux cofinancements communautaires.

Les CTE permettront d'aider les jeunes, jusque là exclus de tout dispositif, à s'installer grâce à la prise en compte de « l'installation progressive » ; la politique « traditionnelle » de soutien à l'installation n'en est pas pour autant abandonnée : 490 millions de francs financeront la dotation d'installation des jeunes agriculteurs (DJA) pour 8.000 installations ; la dotation au fonds d'installation en agriculture est redéployée au profit des CTE, mais les mesures en cours seront poursuivies ; enfin, la dotation destinée aux stages de préparation à l'installation est reconduite. Dans tous les cas, les dotations témoignent du volontarisme du gouvernement sur cette question fondamentale.

La sécurité et la qualité des aliments - sujets essentiels - seront renforcées grâce à l'augmentation de 43 % de la dotation destinée à l'évaluation des risques par l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments (AFSSA), la création de 18 emplois et la mise à disposition de 80 agents supplémentaires. De même, les autres actions de sécurité et de qualité sont accentuées : doublement des moyens affectés au développement du système d'identification permanente généralisée des bovins, augmentation de plus de 100 % des crédits consacrés à la politique incitative en faveur de la sélection végétale, renforcement des moyens budgétaires de l'Institut national des appellations d'origine (INAO).

La priorité en faveur de l'enseignement agricole est poursuivie : avec 7.292 millions de francs, ses moyens croissent de 3,65 %. Ils profitent à l'enseignement public, permettant notamment la création de 218 postes, comme à l'enseignement privé, dont la subvention de fonctionnement croît de 3 %.

Mme Béatrice Marre, rapporteure spéciale, a en outre insisté sur le respect des engagements pris antérieurement. Ils concernent d'abord la solidarité : la revalorisation des petites retraites est poursuivie, pour un coût de 1,6 milliard en année pleine ; le financement de l'indemnité viagère de départ et des préretraites est assuré à hauteur respectivement de 630 et 306 millions de francs ; le Fonds national de garantie des calamités agricoles, dont la trésorerie est très importante, reçoit 50 millions de francs ; l'aide aux agriculteurs en difficulté bénéficie de 100 millions de francs, l'aide alimentaire de 255 millions de francs.

Dans la mesure où, lors de la table ronde agricole du 21 octobre 1999, le Premier ministre s'est engagé à accorder au Fonds d'allégement des charges une dotation budgétaire de 200 millions de francs dès 2000, on doit s'interroger sur le moment et les modalités que choisira le Gouvernement pour respecter cet engagement.

Pour ce qui est de la protection de l'environnement, la « prime à l'herbe » sera financée par 819 millions de francs au niveau national, auxquels s'ajoute un cofinancement communautaire. Les programmes régionaux agri-environnementaux et la conversion à l'agriculture biologique sont encore dotés en 2000, avant d'être intégrés dans les CTE. De plus, 175 millions de francs vont au programme de maîtrise des pollutions d'origine agricole.

La consolidation des filières repose sur les crédits de bonification des prêts, dont la dotation est encore de 1.460 millions de francs, sur la prime à la vache allaitante, dont la part nationale atteint 650 millions de francs, sur les offices agricoles dotés de 2.959 millions de francs et sur les actions de promotion, pour un coût de 163 millions de francs.

Ces dispositifs sont complétés par la politique de la montagne, qui comprend 1.560 millions de francs de financement national pour l'indemnité compensatoire de handicaps naturels et 49 millions de francs d'aide à la modernisation des exploitations. Enfin, 45 millions de francs visent à assurer le fonctionnement des sociétés d'aménagement foncier et de développement rural (SAFER), tandis que les dotations revenant aux sociétés d'aménagement rural et à l'hydraulique agricole sont réduites respectivement à 30 et 102 millions de francs, ce qui doit être mis en perspective avec la hausse de la participation des collectivités locales.

L'ensemble de cette politique peut être conduit grâce à des moyens de fonctionnement accrus de plus de 9 %, à 744,7 millions de francs, qui assurent la création de 284 emplois nouveaux et de 263 postes accompagnant la poursuite de la « déprécarisation » au sein du ministère, dont la réorganisation en cours est garante d'une efficacité renforcée. Parallèlement, 703 postes de maîtres d'internat et surveillants d'externat passent sur la ligne des crédits de vacation et 634 postes quittent le ministère au profit du nouvel établissement public des Haras nationaux.

La rapporteure spéciale a mis l'accent sur les efforts de clarification budgétaire réalisés : transfert de la subvention au BAPSA (3.959 millions de francs) sur le budget des charges communes, budgétisation des 440 millions de francs de rémunérations de l'ingénierie publique et intégration dans le budget de l'Agriculture du Fonds forestier national, doté de 417 millions de francs, intégration qui constitue un premier pas en direction du renouveau de la politique forestière préparé par le Gouvernement pour 2000.

Elle a enfin présenté l'article 64, rattaché à ce budget qui proroge la majoration exceptionnelle des cotisations additionnelles aux contrats d'assurances perçues au profit du fonds national de garantie des calamités agricoles.

M. Alain Barrau a demandé des précisions sur la mise en place des CTE, quant au montant de la dotation, aux crédits communautaires et au calendrier d'entrée en vigueur du mécanisme. Il a insisté sur l'importance du problème de l'installation et s'est interrogé sur son cofinancement communautaire.

M. Charles de Courson a abordé le projet de financement futur des CTE par le biais de la modulation des aides communautaires. S'étonnant que le budget pour 2000 ne prenne pas en compte cette ressource, il a posé la question de la nature de ce dispositif : s'agit-il d'un prélèvement obligatoire ? En toute hypothèse, la nature de la modulation n'est pas budgétaire. Il a regretté que l'on confonde trop souvent montant des aides communautaires et niveau de revenu des exploitants et a indiqué que des simulations montraient que la modulation risquait d'entraîner l'effondrement de certaines filières et aurait des conséquences graves sur l'occupation du territoire. Il a aussi exprimé ses inquiétudes face à la mise en place de la taxe générale sur les activités polluantes, qui ne répond pas au principe « pollueur-payeur ».

Après avoir salué l'avancée que constituent les CTE pour favoriser l'installation des jeunes, M. Jean-Louis Dumont a expliqué combien il leur était difficile de trouver des terres qui se libèrent. Il a déploré que la gestion des forêts publiques soit bien moins efficace que celle des forêts privées et s'est interrogé sur le rôle du Fonds forestier national.

M. Pierre Hériaud s'est inquiété des conséquences possibles des CTE sur le volume des productions : une baisse trop forte pourrait provoquer la délocalisation de certaines activités agro-alimentaires. Les efforts en faveur de l'enseignement agricole d'une part, des petites retraites d'autre part, lui semblent devoir être poursuivis sur le long terme. 45 % des pensionnés ont une retraite inférieure à 1.300 francs par mois. Ce chiffre, à lui seul, justifie pleinement qu'un effort supplémentaire soit programmé.

Jugeant que la revalorisation des retraites agricoles constitue un impératif et se pose en terme de dignité humaine, alors que les agriculteurs, même s'ils n'ont que très faiblement cotisé, ont largement contribué à la croissance économique et ont dégagé des gains de productivité importants, M. Pierre Méhaignerie a demandé l'assurance que les collectivités locales n'auraient pas à cofinancer les CTE. Il a posé le problème du passage aux 35 heures des entreprises de l'agro-alimentaire. Dans la mesure où le projet de loi sur la réduction du temps de travail prévoit d'intégrer dans ce temps la durée des opérations d'habillage et de déshabillage, qui prennent quatre heures par semaine dans ce secteur, le temps de travail va y passer en réalité de 39 heures à 31 heures, ce qui affectera sa compétitivité alors même que ce temps d'habillage répond à un souci de sécurité alimentaire et que ces entreprises ont souvent spontanément réalisé de très nets efforts dans ce domaine. Enfin, il a douté que la dotation destinée aux agriculteurs en difficulté soit suffisante.

Le Président Augustin Bonrepaux a demandé s'il était envisagé d'intégrer les indemnités compensatoires de handicaps naturels dans les CTE.

En réponse, Mme Béatrice Marre, rapporteure spéciale, a précisé que l'intégration des indemnités compensatoires de handicaps naturels dans les CTE n'était pas prévue et a rappelé l'origine de la dotation de 300 millions de francs inscrite en loi de finances initiale pour 1999 en faveur des CTE. L'objectif du Gouvernement est la signature de 50.000 CTE avant la fin de l'année 2000, les premiers devant être conclus dès la mi-novembre 1999.

Elle a rappelé que les critères de modulation des aides européennes sont le volume d'aide par exploitation, l'emploi et la marge brute d'exploitation, choix qui avait été fait en concertation avec les syndicats agricoles. Seules 3 à 4 % des exploitations devraient être concernées par la modulation. Après avoir souligné le fait que les aides à la production continuaient à exister parallèlement à la mise en place des CTE, elle a expliqué que l'on attendait 2.000 nouvelles installations grâce à ceux-ci, en particulier de la part de jeunes non issus du milieu agricole, le cumul d'un CTE avec la DJA étant d'ailleurs parfaitement possible.

Elle s'est félicitée de la poursuite de la revalorisation des petites retraites et de la baisse du nombre d'années de cotisation nécessaires pour en bénéficier, en reconnaissant qu'une revalorisation plus rapide pour être souhaitable, n'aurait pas été tenable d'un point de vue financier : 6 milliards de francs sont dégagés en quatre ans. M. Germinal Peiro travaille d'ailleurs à un rapport sur ces questions sociales, notamment sur celle des pensions de réversion.

Après avoir indiqué que le problème du passage à 35 heures dans l'agro-alimentaire relevait de la négociation de branche, votre rapporteure spéciale a souligné que le surcoût serait facilement absorbé par de nouveaux progrès de productivité.

M. Charles de Courson a critiqué la logique de l'article 64, qui conduit à une délocalisation des contrats d'assurances et qui ne répond pas à un principe de responsabilité puisqu'il fait supporter par des personnes qui s'assurent le coût d'un risque encouru également par des personnes non assurées.

Mme Béatrice Marre, tout en soulignant que le fonds dispose de réserves importantes et que chacun s'accorde à trouver le système actuel assez bancal a cependant jugé que à titre transitoire, le maintien du fonds s'imposait, dans l'attente de la mise en place d'un autre système.

Sur la proposition de la Rapporteure spéciale, la Commission a adopté le budget de l'Agriculture et l'article 64 rattaché.

Elle a ensuite examiné un amendement présenté par M. Charles de Courson visant à ce que la France renonce à mettre en _uvre le dispositif de modulation des aides communautaires, son auteur ayant jugé que la modulation aurait des conséquences graves sur certaines filières, comme celle de la pomme de terre, le Président Augustin Bonrepaux ayant indiqué qu'il avait jugé cet amendement recevable, après réflexion, même si sa présence en loi de finances est discutable puisque, de l'aveu même de M. Charles de Courson, la modulation n'est pas de nature budgétaire. Il a jugé que l'amendement posait un problème d'injonction qui ne relève pas de l'article 40 de la Constitution et a indiqué son désaccord de fond à la suppression de la modulation.

La Commission a rejeté cet amendement.

Elle a enfin adopté l'amendement de Mme Béatrice Marre et du Président Augustin Bonrepaux qui étend à l'ensemble des opérations effectuées par les SAFER l'exonération de droits d'enregistrement.

*

* *

Elle a ensuite examiné, sur le rapport de M. Edmond Hervé, rapporteur spécial, les crédits de la Poste et des Télécommunications.

M. Edmond Hervé, rapporteur spécial, a, tout d'abord, souligné que les crédits de la Poste et des Télécommunications, qui s'élevaient à 2,77 milliards de francs en 2000, augmentaient, à structure constante, de 4,12 % par rapport à 1999, tandis que l'évolution entre 1998 et 1999 avait été limitée à 1,35 %. Cette progression résulte essentiellement d'une réorganisation et d'une augmentation des moyens des institutions mises en place le 1er janvier 1997. Ainsi, l'Autorité de régulation des télécommunications (ART) voit les rémunérations de son personnel augmenter de 4,34 %. L'an passé, le Rapporteur spécial s'était inquiété du rythme élevé de la hausse des indemnités offertes, qui atteignait 7,07 %. Cette année, la progression sera, de manière opportune, limitée à 1,53 %. L'Agence nationale des fréquences (ANF) disposera également de moyens supplémentaires, en raison, notamment, du transfert des activités radiomaritimes exercées aujourd'hui par France Télécom. Le Groupe des écoles des télécommunications bénéficiera, lui aussi, d'un transfert de 41 emplois, en provenance du Centre national d'études des télécommunications. Conformément au contrat de progrès et d'objectifs signé entre l'État et La Poste, la contribution du premier à la seconde, au titre du transport de la presse, passera à 1,9 milliard de francs. Celle de l'État aux organismes des postes et télécommunications des territoires d'outre-mer passe de 2,7 millions de francs à 5,43 millions de francs, en raison de la création d'une mission permanente auprès du Haut-Commissariat de la République en Nouvelle-Calédonie, résultant du transfert de compétences de l'État au territoire de l'Office des postes et télécommunications. Enfin, la Commission supérieure du service public des postes et télécommunications verra ses moyens reconduits.

Puis, le Rapporteur spécial a souhaité faire deux séries d'observations. En premier lieu, s'agissant du secteur postal, les autorités européennes, lorsqu'elles délibèrent d'une politique tarifaire, devraient avoir le souci de permettre aux autorités postales de dégager les investissements nécessaires au développement de l'activité de leur opérateur. Si la réduction de la dette de La Poste peut apparaître comme positive, il conviendrait qu'elle ne se fasse pas au détriment d'emprunts finançant des investissements très importants d'un point de vue technologique. Par ailleurs, l'État ne peut imposer des obligations à La Poste sans en prendre à sa charge les conséquences financières. Ainsi, la seule obligation de présence postale entraîne, pour La Poste, une dépense non compensée estimée à 2,1 milliards de francs. Cette présence est importante en milieu rural, mais également en milieu urbain. Le moratoire sur les services publics en zone rurale a été respecté, et La Poste n'a fermé aucun bureau. Mais son réseau n'a pas suivi le transfert démographique vers les zones urbaines, ce qui l'obligera à ouvrir, sur la période 1998-2002, 600 nouveaux bureaux, dont 10 % dans les zones urbaines difficiles. Enfin, puisque la concurrence à laquelle La Poste est soumise s'avère de plus en plus rude, il convient que l'exploitant public soit dans la même situation fiscale et réglementaire que ses concurrents privés.

En second lieu, s'agissant du secteur des télécommunications, le Rapporteur spécial a fait remarquer que les succès boursiers de France Télécom ne devaient pas l'exonérer des investissements nationaux et internationaux nécessaires à son développement. La politique commerciale active, qui a nécessité de nombreux redéploiements, ne doit pas faire oublier les impératifs d'une politique de recherche avancée.

Enfin, il conviendrait qu'un ministère soit désigné comme chef de file dans ces deux secteurs, notamment dans le secteur postal, qui voit s'affronter divers départements, au premier rang desquels figurent l'Industrie et les Transports. Un effort de coordination est nécessaire.

Après s'être déclaré en accord avec le Rapporteur spécial sur les orientations que doivent suivre les autorités européennes en matière postale, M. Alain Barrau a estimé que la réglementation européenne tendait systématiquement à pénaliser les opérateurs nationaux. Puis, il a interrogé le Rapporteur spécial sur l'évolution des relations entre opérateurs publics et opérateurs privés, sur la concurrence de ces derniers et sur la nécessité et les modalités d'une action, en amont des négociations européennes.

Constatant que de nombreuses entreprises publiques françaises investissaient dans le capital d'opérateurs européens privés, M. Jean-Louis Dumont a demandé au Rapporteur spécial quelle était la stratégie européenne d'alliances de La Poste. En outre, quelle analyse fait-il de l'action de l'ART, en tant qu'autorité de régulation, à l'heure où se multiplie ce type d'instances, dont le nombre atteint aujourd'hui la quinzaine, au risque d'un manque de cohérence de notre système administratif ?

Le Rapporteur spécial a estimé qu'avec l'ART, la France avait adopté un modèle institutionnel qui n'appartenait pas à sa culture et qui contrevenait au principe d'unité de l'administration. Il a rappelé, à cet égard, que la distinction, faite par Edgard Pisani, dans un numéro de la Revue française de science politique, en 1956, entre administration de mission et administration de gestion, n'avait jamais été appliquée. L'ART dispose de véritables moyens, et devient sans aucun doute un véritable pouvoir.

La Poste est entrée dans le champ de la concurrence, mais elle est soumise à un régime réglementaire et fiscal pénalisant par rapport à ses concurrents privés. C'est pourquoi, il est souhaitable que le texte autorisant La Poste à développer des activités d'assurance soit réellement appliqué. En outre, il serait sain que l'État puisse honorer ses engagements. Il faut, ainsi, rappeler que la Commission supérieure du service public des postes et télécommunications chiffre entre 5,2 milliards de francs et 8 milliards de francs le coût non compensé, pour La Poste, des charges résultant de l'obligation de présence postale et du transport de la presse. Il a salué le dynamisme dont La Poste fait preuve en matière d'alliances. Cette stratégie est le chemin le plus court pour préserver les acquis de compétences de l'exploitant public.

La Commission a ensuite adopté, sur la proposition du Rapporteur spécial, les crédits de la Poste et des Télécommunications.

*

* *

Elle a enfin examiné, sur le rapport de M. Charles de Courson, rapporteur spécial, le budget annexe des Prestations sociales agricoles.

Le Rapporteur spécial a tout d'abord souligné que les évaluations de recettes et de dépenses du projet de BAPSA pour 2000 pouvaient être contestées, car elles ne tenaient pas compte de l'ensemble des mesures proposées ou adoptées dans d'autres cadres :

- les recettes de cotisations sociales apparaissent surévaluées de plus de 200 millions de francs, en l'absence de prise en considération de l'incidence sur le revenu agricole de la modulation des aides communautaires, de la taxation des produits phytosanitaires et de l'élargissement de l'exonération de cotisations pour les jeunes agriculteurs, décidée lors du débat sur le financement de la sécurité sociale ;

- les cotisations de solidarité dues respectivement par les agriculteurs dont l'exploitation est inférieure au seuil d'affiliation à la MSA et par les associés minoritaires apporteurs de capitaux à des sociétés agricoles perdent de leur légitimité dès lors que les revenus concernés sont, depuis 1999, assujettis à la CSG et au prélèvement complémentaire sur les revenus du patrimoine. La première de ces cotisations devrait être réduite de manière à neutraliser le prélèvement supplémentaire lié à la CSG et la seconde supprimée, vu ses coûts de gestion très élevés ;

- parmi les autres ressources du budget annexe, l'attribution forfaitaire, suite à un amendement du Gouvernement, d'un milliard de francs, non reconductible, sur le produit de la contribution sociale de solidarité des sociétés (C3S), appelle le même commentaire que l'année dernière : il n'est pas sérieux de financer une dépense pérenne, telle que la revalorisation des retraites agricoles, par une recette exceptionnelle. En outre, ce montant d'un milliard ne couvrira pas la totalité de la mesure de revalorisation des retraites, dont le coût brut atteindrait 1,2 milliard de francs (1,05 milliard après défalcation des économies sur le minimum vieillesse) ;

- les dépenses de maladie qui sont présentées, et plus généralement le budget annexe, ne tirent pas toutes les conséquences de l'institution de la couverture maladie universelle, laquelle brouille le périmètre du BAPSA, en instituant un régime complémentaire obligatoire et financé par la solidarité, et devrait, légitimement, entraîner la suppression des cotisations forfaitaires minimales imposées aux agriculteurs les plus modestes ;

- les dépenses de prestations familiales et de prestations vieillesse sont sous-évaluées, car il n'est pas tenu compte dans le BAPSA des « coups de pouce » accordés dans la loi de financement de la sécurité sociale, qui ont porté leur taux de revalorisation à 0,5 % ;

- il convient toutefois de saluer la mesure de revalorisation des retraites que propose le Gouvernement. La décision d'étendre le bénéfice des revalorisations aux retraités agricoles dont la carrière est comprise entre 27,5 et 32 années et qui n'ont comme ressource que leur seule pension agricole répond aux préoccupations exprimées l'année dernière par la commission des Finances, qui avait relevé que l'obligation d'avoir cotisé 32,5 ans pour bénéficier des revalorisations pouvait conduire à des injustices. On pourrait sans doute aller plus loin dans les mesures de revalorisation en réservant leur bénéfice aux retraités dont l'ensemble des avantages propres de vieillesse (tous régimes confondus) est inférieur à un certain montant.

Contre l'avis du Rapporteur, qui a prôné l'abstention pour protester contre le financement non pérenne de la revalorisation des retraites agricoles, la Commission a adopté les crédits du budget annexe des Prestations sociales agricoles.

Le Rapporteur a ensuite présenté une proposition d'observation qui demandait au Gouvernement d'étudier le dispositif de coordination entre les régimes sociaux pour les validations de cotisations pour enfants des femmes ayant acquis des droits dans plusieurs régimes. Il a également présenté plusieurs amendements tendant respectivement à :

- supprimer les cotisations minimales forfaitaires des agriculteurs en assurance maladie, par équité avec la gratuité de la couverture de base offerte à d'autres catégories par la loi sur la couverture maladie universelle ;

- réduire à 9 % le taux de la cotisation de solidarité des exploitants sous le seuil d'affiliation au régime agricole, afin de neutraliser l'effet de leur assujettissement à la CSG ;

- supprimer la cotisation de solidarité des associés minoritaires apporteurs de capitaux, qui n'est plus justifiée dès lors que leurs revenus sont assujettis à la CSG et dont le coût de gestion est très élevé ; il a précisé que ce coût était de 26,5 % du produit de la cotisation, ce qui constitue sans nul doute un record ;

- instituer une attribution pérenne de C3S au BAPSA à due concurrence de la C3S perçue sur les organismes mutualistes et les coopératives relevant du régime agricole ; il a critiqué les évolutions législatives récentes, contradictoires dans ce domaine ;

- unifier le taux du prélèvement opéré sur les primes d'assurance de base et complémentaire accidents du travail au profit du fonds commun des accidents du travail agricole (FCATA), afin de rendre plus attractive l'assurance complémentaire, actuellement complètement découragée par une ponction confiscatoire.

Mme Béatrice Marre a observé que l'ensemble des suggestions du Rapporteur entrait dans le cadre de la mission qui lui a été confiée, ainsi qu'à M. Jérôme Cahuzac, par le Gouvernement, sur la fiscalité et les charges sociales agricoles. Cette mission devant se conclure en mars 2000, l'adoption des propositions du Rapporteur serait prématurée.

Le Président Augustin Bonrepaux a, en outre, indiqué qu'une affectation spécifique de la C3S au budget annexe n'était pas nécessaire puisque son équilibre était de toute façon assuré par la subvention de l'État, et que l'unification du taux des prélèvements affectés au FCATA entraînerait une augmentation du coût de l'assurance de base obligatoire pour les agriculteurs en accidents du travail, même si le problème posé par cet amendement est réel.

La Commission a rejeté l'observation et l'ensemble de ces amendements.


© Assemblée nationale