ASSEMBLÉE NATIONALE
COMMISSION des LOIS CONSTITUTIONNELLES,
de la LÉGISLATION et de lADMINISTRATION GÉNÉRALE
de la RÉPUBLIQUE
COMPTE RENDU N° 59
(Application de l'article 46 du Règlement)
Jeudi 28 mai 1998
(Séance de 9 heures)
Présidence de Mme Catherine Tasca, présidente,
SOMMAIRE
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Audition de M. Jean-Jack Queyranne, secrétaire dEtat à loutre-mer, sur le projet de loi constitutionnelle relatif à la Nouvelle-Calédonie (n° 937)
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La Commission a procédé à laudition de M. Jean-Jack Queraynne, secrétaire dEtat à loutre-mer, sur le projet de loi constitutionnelle relatif à la Nouvelle-Calédonie.
M. Jean-Jack Queyranne a jugé inutile de rappeler aux membres de la commission des Lois lhistoire institutionnelle et politique de la Nouvelle-Calédonie au cours de ces vingt dernières années, nombre dentre eux connaissant personnellement cette terre du Pacifique, où, dailleurs, une mission de la commission des Lois, conduite par Mme la Présidente Catherine Tasca, sest rendue en mai dernier, afin de constater le chemin parcouru depuis les accords de Matignon. Il a observé que bien quelle soit moins spectaculaire que les nombreux investissements publics réalisés dans ce territoire, lévolution des esprits pour faire vivre le rééquilibrage et pour permettre aux communautés dimaginer ensemble un destin partagé nen était pas moins évidente. Il a rappelé ainsi la position de M. Jacques Lafleur, qui, dès 1991, rejoint sur ce point par le F.L.N.K.S., avait appelé à rechercher une solution consensuelle, pour éviter le « référendum couperet » prévu à larticle 2 de la loi référendaire de 1988 et déterminer une question à laquelle le R.P.C.R. et le F.L.N.K.S. pourraient appeler ensemble à répondre « oui ». Il a souligné que donner à cette ambition politique un aspect concret, navait pas été une chose simple puisquil avait notamment été nécessaire de lever le préalable minier posé par le F.L.N.K.S. en réglant la question de laccès à la ressource pour rendre possible un projet dusine métallurgique en province Nord, la mission confiée sur ce point à M. Philippe Essig ayant été menée à bien jusquà la signature des accords de Bercy le 1er février 1998. Il a indiqué que les négociations avaient alors pu être reprises le 24 février sous lautorité du Premier ministre, aboutissant le 5 mai dernier à la signature de laccord de Nouméa par le Chef du gouvernement et les présidents du F.L.N.K.S. et du R.P.C.R.
Le ministre a ensuite constaté que pour mettre en oeuvre cet accord, une révision constitutionnelle était nécessaire et souhaitable. Observant, en effet, quun certain nombre de points essentiels de ce texte politique étaient probablement contraires à notre loi fondamentale, il a, en outre, souligné que linscription dans la Constitution de ses orientations essentielles était à même de donner aux signataires une plus grande assurance de stabilité. A cet égard, il a rappelé que les accords de Matignon avaient, en leur temps, reçu la garantie dune ratification par la voie dun référendum national. Il a précisé quau plan formel le projet de loi constitutionnelle était un texte autonome qui ne sincorporait pas dans les titres existants de la Constitution, justifiant ce choix original par le caractère très spécifique de ce texte qui ne sapplique quà la Nouvelle-Calédonie et surtout par la nature transitoire de ses dispositions. Il a ajouté quil ne sagissait pas de créer une nouvelle catégorie de collectivités de la République, mais de rendre possible une construction originale limitée dans le temps et lespace.
Puis le ministre a décrit les principales dispositions du projet de loi constitutionnelle. Il a tout dabord indiqué que le premier point important du projet était la garantie que lévolution de la Nouvelle-Calédonie sinscrirait dans les orientations définies par laccord de Nouméa signé le 5 mai et publié le 27 mai au Journal Officiel. Il a précisé que ces orientations étaient principalement une plus grande prise en compte de lidentité kanak, la reconnaissance dune citoyenneté, des institutions rénovées, un transfert progressif et irréversible de compétences de lEtat vers le territoire, un développement économique et social équilibré et, dans quinze à vingt ans, une consultation locale permettant daccéder à la pleine souveraineté.
Puis il a noté que le second article du projet de loi constitutionnelle organisait la consultation locale prévue par les accords de Matignon avant le 31 décembre 1998, insistant sur le fait que cette consultation ne porterait pas sur une éventuelle accession à lindépendance, comme le prévoyait les accords de 1988, mais sur lapprobation de laccord de Nouméa qui se verrait ainsi conféré une légitimité politique élargie. Il a remarqué que le corps électoral spécial défini en 1988 était maintenu, précisant que sur 112.000 électeurs potentiels, les restrictions apportées par les accords de Matignon concernaient environ 8.000 personnes. Quant aux modalités dorganisation du scrutin, il a indiqué quelles seraient déterminées par décret délibéré en Conseil des ministres.
Il a présenté ensuite le troisième et dernier article du projet de loi qui habilite le Parlement à déroger à la Constitution pour mettre en oeuvre laccord de Nouméa, soulignant que ces dérogations seraient inscrites dans une loi organique prise après avis de lassemblée délibérante de la Nouvelle-Calédonie. Il a observé que quatre domaines étaient visés par le projet de loi constitutionnelle :
les modalités du transfert des compétences de lEtat aux institutions de la Nouvelle-Calédonie, sachant que ces transferts se feraient de manière définitive et échelonnée et que les seules compétences conservées par lEtat à la fin de la période de 20 ans seraient celles relatives à lordre public, la défense, la justice, la monnaie et lessentiel des relations diplomatiques ;
les nouvelles institutions locales, avec en particulier la mise en place dune assemblée délibérante dotée dun pouvoir quasi législatif pour certaines catégories dactes qui pourront être soumis au contrôle préalable du Conseil Constitutionnel ;
les effets de la citoyenneté en matière de droit électoral pour les élections locales autres que communales, ainsi quen matière daccès à lemploi et de statut civil coutumier ;
enfin, lorganisation de la consultation locale qui, dans vingt ans, ou plus tôt entre quinze et vingt ans à linitiative de lassemblée délibérante, pourrait conduire la Nouvelle-Calédonie à la pleine souveraineté, cette consultation portant sur le transfert au territoire des dernières compétences exercées par lEtat.
Insistant sur le fait que les règles ainsi définies par les trois articles du projet de loi constitutionnelle avaient reçu lapprobation des principales forces politiques locales, « partenaires historiques », des accords de Matignon, le R.P.C.R. et le F.L.N.K.S, il a considéré quelles constituaient les éléments de ce consensus tant recherché depuis 1988 pour éviter le « référendum couperet » prévu pour 1998. Il a jugé quelles permettaient de fonder un avenir partagé de paix et de progrès pour la Nouvelle-Calédonie.
Le ministre a ensuite insisté sur le rôle déterminant que le Parlement aurait à jouer dans lévolution du territoire souhaité par le Gouvernement et les Calédoniens eux-mêmes. Il a exprimé sa confiance dans les débats parlementaires qui pourront enrichir et améliorer le projet de loi. Il a souligné la continuité historique et politique qui va des accords de Matignon à laccord de Nouméa, puis au projet de loi constitutionnelle soumis à lAssemblée nationale qui permettra lorganisation dun scrutin local, certainement au mois de novembre 1998, sur les orientations fixées à Nouméa.
Il a ajouté que la loi organique organisant les pouvoirs en Nouvelle-Calédonie pourrait être adoptée en février ou mars 1999, son entrée en vigueur effective se faisant au lendemain des élections aux assemblées de provinces, en avril ou mai prochain. Il a considéré quainsi, en une année, la Nouvelle-Calédonie aurait retrouvé la stabilité institutionnelle et la clarté de lavenir à laquelle elle aspire.
Enfin, il a observé que laccord de Nouméa avait été favorablement accueilli par lensemble des partis politiques, tant en métropole quen Nouvelle-Calédonie, relevant quil avait été également salué par la plupart des pays du Pacifique. Constatant que cet accord avait suscité des interrogations et des attentes dans dautres collectivités de loutre-mer français, il a estimé quil ne constituait pas cependant un modèle intégralement transposable, puisquil navait de sens que dans le contexte qui la rendu possible et nécessaire. Il a néanmoins observé que la méthode qui avait permis sa conclusion, faite de patience, découte et de dialogue, pouvait inspirer des évolutions institutionnelles dans dautres territoires.
En conclusion de ses propos, le Ministre a souligné quau-delà des aspects institutionnels qui peuvent être réglés par des textes, lavenir de la Nouvelle-Calédonie reposait sur ses perspectives de développement. Il a insisté sur la place que le territoire occupait dans la région, évoquant la présence à Nouméa du siège de la commission du Pacifique Sud, devenue Communauté du Pacifique.
Evoquant la mission de la Commission en Nouvelle-Calédonie, Mme la Présidente a fait part de ladhésion des différents acteurs locaux à laccord de Nouméa qui ouvre pour le territoire une longue période dévolution institutionnelle dans la paix politique. Elle a souligné le consensus qui existe sur limportance de la reconnaissance de lidentité Kanak, indiquant que linauguration du centre culturel Jean-Marie Tjibaou avait été un temps fort, perçu par la population moins comme une référence au passé que comme un symbole de lavenir à construire en commun. Ayant constaté linégalité entre la province Sud, dune part, et les provinces Nord et des Iles dautre part, tant en matière dinvestissement que dinfrastructure ou de formation de cadres, elle a estimé souhaitable que la période ouverte par les accords de Matignon soit loccasion de procéder au rééquilibrage dont tout le monde reconnaît la nécessité.
M. Dominique Perben a jugé que le débat sur le futur projet de loi organique serait essentiel, soulignant la nécessité de respecter lesprit des accords de Nouméa, malgré leur caractère peu juridique notamment pour ce qui concerne le transfert de compétences. Il a demandé au ministre si ce projet serait déposé avant ou après le référendum organisé en Nouvelle-Calédonie. Evoquant lexposé des motifs du projet de loi constitutionnelle, qui fait référence à une démarche analogue pour les autres territoires doutre-mer, il a souhaité savoir si la disposition qui confère un caractère législatif à certaines catégories dactes de lassemblée délibérante de Nouvelle-Calédonie pourrait être étendue à la Polynésie française, conformément au souhait exprimé par son assemblée, et demandé si le gouvernement envisageait de traiter cette question dans le cadre du présent projet de loi constitutionnelle. Après avoir rappelé que laccord de Nouméa était le fruit dune profonde évolution des deux partenaires qui lont signé avec lEtat, il a insisté sur le fait que son préambule ne se limitait pas à un simple mea culpa de la puissance coloniale, comme certains le laissent entendre, mais évoquait la refondation dun lien social durable entre les communautés qui vivent en Nouvelle-Calédonie, dont la légitimité se trouvait ainsi reconnue.
M. Jean-Jack Queyranne a souligné que le préambule de laccord de Nouméa nétait pas une simple déclaration de principe mais laboutissement dun cheminement commun, marquant la détermination des parties signataires à construire lavenir. Il a considéré quil ne sidentifiait pas à une déclaration de repentance, sa signature, facilitée par laccord de Matignon, constituant la concrétisation de la reconnaissance didentités et de cultures. Après avoir indiqué quil était nécessaire de prévoir que la consultation locale, devant avoir lieu avant la fin de lannée 1998, porterait sur lapprobation de laccord de Nouméa et sappuierait sur le corps électoral défini par la loi référendaire de 1988, il a précisé que loption dun texte constitutionnel limité renvoyant la mise en uvre de laccord à une loi organique avait été jugée préférable à celle dun texte constitutionnel plus important. Ajoutant que laccord prévoyait linstitution dun comité des signataires pour veiller au suivi de son application, il a souligné que celui-ci se réunirait en juillet et en septembre prochains pour examiner le projet de loi organique, appelé à traduire en termes juridiques le contenu, essentiellement politique, de laccord. Précisant que le contenu du projet de loi organique devrait être connu avant le scrutin sur lapprobation de laccord de Nouméa, il a admis que si le Parlement, comme il en a légitimement le droit, lamendait dune manière telle que lesprit de laccord nétait plus respecté, il conviendrait de reprendre le dossier à son début. Rejoignant M. Dominique Perben pour estimer que laccord de Nouméa marquait une étape significative, il en a néanmoins souligné la fragilité.
Le secrétaire dEtat à loutre-mer a, par ailleurs, constaté que lexposé des motifs du projet de loi constitutionnelle prévoyait quune démarche analogue pourrait être suivie pour favoriser lévolution institutionnelle dautres territoires doutre-mer. Il a rappelé que lassemblée territoriale de la Polynésie française sétait dailleurs déjà prononcée pour demander que soit transposé à ce territoire le dispositif applicable en Nouvelle-Calédonie, relatif au contrôle des actes des assemblées délibératives ainsi quà laccès à lemploi et au droit du travail. Il a ajouté que le président du territoire de la Polynésie française devait être reçu sur ce sujet par le Chef de lEtat et le Gouvernement la semaine prochaine. Rappelant que lévolution institutionnelle de la Polynésie française sétait opérée selon une démarche différente, puisquune loi organique avait été adoptée en 1996 sans le préalable dune loi constitutionnelle, M. Jean-Jack Queyranne a déclaré que le Gouvernement était cependant ouvert à la transposition à ce territoire de certaines dispositions applicables à la Nouvelle-Calédonie, soulignant que cette question avait dailleurs été évoquée hier en conseil des ministres par le Président de la République. Sil a considéré quil serait difficile de traiter du cas de la Polynésie dans le cadre de la présente révision constitutionnelle, compte tenu de la référence explicite à laccord de Nouméa, il a cependant insisté sur le fait que dans un proche avenir le Parlement serait conduit à examiner dautres textes constitutionnels, notamment celui relatif au Conseil supérieur de la magistrature.
Sassociant aux propos de M. Dominique Perben sur le chemin parcouru depuis 1988, notamment dans la période récente, et insistant sur les efforts accomplis tant par le R.P.C.R., que le F.L.N.K.S., pour aboutir à laccord de Nouméa, Mme la Présidente a fait part des craintes formulées par les responsables politiques locaux sur une éventuelle remise en cause par le Parlement de ce fragile équilibre. Elle a souligné limportance de concilier la volonté du Parlement dapprouver une solution juridique cohérente et lexistence dun accord politique qui satisfait toutes les parties. Se réjouissant du processus de suivi annoncé par le ministre, elle a conclu en mettant laccent sur la nécessité dexpliquer à la représentation nationale et à lopinion publique limportance de laccord de Nouméa, pour justifier lexistence dun statut dérogatoire aux principes traditionnels de notre droit.
Après sêtre associé au propos de M. Dominique Perben sur le caractère exemplaire de laccord de Nouméa, notamment de son préambule, M. Henry Jean-Baptiste a considéré quil devait être analysé dun point de vue politique et dun point de vue juridique.
Du point de vue politique, il a rappelé que depuis les accords de Matignon, quil avait approuvés, ce qui nallait pas de soi à lépoque, les choses sétaient accélérées. Faisant état des propos de la présidente sur ladhésion de la population à laccord de Nouméa, quelle avait pu percevoir lors de son récent voyage sur le territoire, il a observé que cette adhésion était le fondement même des rapports entre la République et loutre-mer, le lien colonial nexistant heureusement plus, cest pourquoi il a insisté sur lintérêt du projet de loi constitutionnelle, qui prévoit différentes consultations de la population de Nouvelle-Calédonie, à travers les référendums et les élections. Tout en reconnaissant la fragilité de cet accord, il a exprimé sa confiance en lavenir. Il a ensuite souligné la nécessité pour lEtat de respecter ses engagements dans leur principe et dans les dates proposées, rappelant à ce propos que le Président de la République sétait engagé à consulter la population mahoraise sur le statut de lîle avant lan 2000.
Du point de vue constitutionnel, il a fait observer que laccord de Nouméa constituait une innovation fondamentale, la Nouvelle-Calédonie constituant désormais un cas unique dans loutre-mer. Il a indiqué que les parlementaires, lors du débat, auraient à jouer un rôle de relais auprès de lopinion publique. Il a ensuite souhaité savoir si la notion de territoires doutre-mer évoqué dans lexposé des motifs du projet de loi constitutionnelle devait être interprétée au sens juridique ou au sens géographique, faisant référence à la distinction établie par le Conseil Constitutionnel. Il a regretté que le Gouvernement nait pas saisi loccasion de cet accord pour mener une réflexion densemble sur loutre-mer, afin de mettre fin à lorganisation absurde qui superpose dans les départements un conseil général et un conseil régional, soulevant ainsi des problèmes de répartition de compétences et de coût. Il a conclu en indiquant que ladhésion supposait que chaque collectivité approuve son statut, estimant que le processus lancé par le projet de loi constitutionnelle ne devait être quune première étape vers une évolution de lensemble de loutre-mer.
Le Ministre a reconnu que laccord de Nouméa constituait une novation juridique dans la mesure où, contrairement à la tradition française jacobine qui tend à insérer la réalité dans des catégories juridiques prédéfinies, les négociateurs sétaient appuyés sur la réalité pour élaborer un nouveau statut. Il a souligné que la démarche suivie illustrait la possibilité danticiper des évolutions à venir, alors que le cadre de la Communauté défini par la Constitution de 1958 pour organiser les adaptations statutaires outre-mer sétait avéré inadapté et, devenu caduc, avait été finalement supprimé en 1993. Evoquant ensuite léventualité dune démarche comparable pour le reste de loutre-mer, le Ministre a mis en exergue la spécificité de la Nouvelle-Calédonie, notamment au regard des rapports de force démographiques. Il a néanmoins admis quune réflexion simposait, notamment sur lavenir des départements doutre-mer, dès lors que ces derniers, après avoir accédé à la liberté grâce à labolition de lesclavage, puis à légalité par la départementalisation, pouvaient prétendre désormais à la responsabilité et au respect de leur identité. Rappelant que les liens entre ces départements et la France étaient extrêmement forts, il a envisagé léventualité dadaptations, y compris institutionnelles, dans le cadre de la Constitution, à condition que celles-ci surviennent selon des rythmes différents de manière à tenir compte de la spécificité de chacune des collectivités.
Relevant que laccord de Nouméa faisait référence à lirréversibilité des transferts de compétences de lEtat au territoire, Mme Nicole Feidt a souhaité que le ministre explicite la raison dêtre et la portée de ce principe.
Après avoir rappelé que la Nouvelle-Calédonie avait connu neuf statuts au cours des trente dernières années, le Ministre a évoqué les préoccupations du F.L.N.K.S. craignant que laccord de Nouméa ne soit remis en cause à loccasion dune éventuelle alternance, faisant valoir que le recours à une loi constitutionnelle permettait de consacrer le caractère irréversible du processus, seules les compétences régaliennes restant à transférer à léchéance de la période transitoire de vingt ans. Il a par ailleurs insisté sur la nécessité de faire comprendre à lopinion publique lintérêt de laccord de Nouméa et de montrer ainsi que les différences culturelles ne doivent pas être considérées comme une remise en cause de lunité de la République, mais davantage comme un moyen de lenrichir.
M. Michel Buillard a indiqué que la Polynésie française avait suivi avec beaucoup dintérêt laccord de Nouméa, rappelant limportance de la communauté polynésienne sur ce territoire et les difficultés rencontrées par larchipel à la suite des mouvements de population engendrés par les événements de 1984 et de 1988. Après avoir interrogé le ministre sur la qualification juridique du futur statut, il a souhaité connaître les modalités dacquisition de la citoyenneté kanak. Il a alors observé que la Polynésie française, à la différence de la Nouvelle-Calédonie, ne connaissait quune citoyenneté, la citoyenneté maori, et ne parlait quune seule langue en dehors du français, ce qui devrait lui permettre davoir également sa propre citoyenneté. Faisant valoir la situation dantériorité de la Polynésie française en matière dautonomie et évoquant la situation des quartiers sensibles qui veulent que la métropole prenne mieux en compte la spécificité du territoire, il a indiqué que la Polynésie française était prête pour une évolution statutaire. Il a enfin souligné la nécessité dun travail de pédagogie sur les spécificités de loutre-mer aussi bien auprès des parlementaires métropolitains que de lopinion publique.
Le Ministre a fait observer que laccord de Nouméa consacrait une citoyenneté calédonienne et non pas seulement kanak, au profit de lensemble des personnes qui résidaient en Nouvelle-Calédonie avant 1988, soulignant que les kanaks, qui se définissent comme le peuple dorigine en Nouvelle-Calédonie, reconnaissaient ainsi explicitement lapport déterminant pour la Nouvelle-Calédonie, des personnes venues progressivement enrichir le territoire. Il a cependant précisé que, dans le cadre de la citoyenneté calédonienne, le F.L.N.K.S. souhaitait que le statut coutumier puisse être reconnu et quil puisse, le cas échéant, y être fait retour moyennant un droit doption, par dérogation aux prescriptions de larticle 75 de la Constitution. Il a estimé que cette revendication devait être perçue comme reflétant la nature du droit coutumier, traduction dune appartenance à la terre et à un clan, et illustrant une démarche identitaire éloignée de limage négative que peuvent en avoir, à tort, une partie de lopinion publique en métropole.
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