Accueil > Archives de la XIe législature > Comptes rendus de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République (1998-1999)

ASSEMBLÉE NATIONALE

COMMISSION des LOIS CONSTITUTIONNELLES,
de la LÉGISLATION et de
l’ADMINISTRATION GÉNÉRALE de la RÉPUBLIQUE

COMPTE RENDU N° 72

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mercredi 23 septembre 1998
(Séance de 15 heures)

Présidence de Mme Catherine Tasca, présidente

SOMMAIRE

 

pages

– Examen des propositions de loi de M. Jean-Pierre Michel visant à créer un contrat d’union civile et sociale (n° 88), de M. Jean-Marc Ayrault relative au contrat d’union sociale (n° 94) et de M. Georges Hage relative aux droits des couples non mariés (n° 249) (rapport)


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– Informations relatives à la Commission

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La Commission a examiné, sur le rapport de M. Jean-Pierre Michel, les propositions de loi de M. Jean-Pierre Michel visant à créer un contrat d’union civile et sociale (n° 88), de M. Jean-Marc Ayrault relative au contrat d’union sociale (n° 94) et de M. Georges Hage relative aux droits des couples non mariés (n° 249).

Constatant que le texte soumis à l’examen de la Commission avait déjà suscité un large débat dans la presse et l’opinion publique, M. Jean-Pierre Michel, rapporteur, a observé qu’il avait pour objet de répondre à un véritable problème de société, qui fait appel à la conscience de chacun. Déclarant qu’il défendait ce texte sans honte et sans gloire particulières, il a souhaité que le débat soit empreint de franchise, de clarté et de tolérance et écarte toute hypocrisie.

Le rapporteur a souligné ensuite que les trois propositions de loi qui avaient été déposées par les trois groupes de la majorité avaient pu être enrichies par les réflexions contenues dans deux rapports rendus publics à la demande de la ministre de la justice. A cet égard, il a rappelé que le rapport Hauser et le rapport Théry relatif au droit de la famille concluaient à la nécessité d’une réforme, même si les solutions juridiques proposées dans ces deux documents étaient différentes de celle aujourd’hui soumise à l’examen de la Commission. Après avoir considéré que cette réforme, prise à l’initiative de députés, était toute à l’honneur du Parlement, il a indiqué que le groupe de travail constitué à la demande de Mme Catherine Tasca, présidente de la commission des Lois, auquel il avait participé avec M. Patrick Bloche, rapporteur pour avis de la commission des Affaires culturelles, familiales et sociales, avait travaillé durant huit mois sur ce dossier, recueillant l’avis des administrations, procédant à de très larges auditions, notamment d’associations familiales, homosexuelles, d’organismes professionnels concernés, tels les avocats et les notaires, ainsi que de personnalités spécialistes du droit civil, tel le professeur Philippe Malaurie.

Rappelant que la première proposition de loi sur ce sujet avait été déposée à la fin de 1992, le rapporteur a constaté que l’idée de ce texte venait effectivement des associations homosexuelles luttant contre le SIDA qui revendiquaient la reconnaissance du couple homosexuel ainsi que le règlement de situations dramatiques en cas de décès de l’un des membres du couple. Il a considéré qu’il s’agissait aujourd’hui de prendre en compte la réalité sociale et de répondre aux difficultés éprouvées par un certain nombre de nos concitoyens.

Le rapporteur a observé que la proposition de loi concernait des situations fort différentes les unes des autres, ce qu’il a jugé naturel puisque, conformément à la tradition républicaine, il ne peut être question de légiférer pour un groupe en particulier. Il a ajouté que ce texte s’adressait à ceux qui refusent le mariage par choix, à ceux qui, sans le refuser, n’éprouvent pas le besoin de recourir à cette institution, mais également aux couples homosexuels ainsi qu’aux personnes qui ont en commun un projet de vie sans lien affectif ou sexuel à proprement parler. Il a estimé que, ce faisant, la proposition de loi rendrait service à la société en stabilisant ces couples au regard du droit, rappelant que, conformément à l’adage ancien, c’est le fait qui fait le droit. Il a ajouté que c’est bien au législateur qu’il appartenait d’intervenir en ce domaine, car la jurisprudence ne pouvait à elle seule régler une question si importante socialement. Par ailleurs, il a également constaté que le Traité d’Amsterdam imposait aux Etats membres d’adopter une législation contre toute discrimination fondée sur l’orientation sexuelle des individus. Il a observé que si le texte présenté à la commission des Lois était adopté, trois voies s’ouvriraient désormais aux couples : l’union libre, qui évoluera peu par la voie jurisprudentielle et qui sera sans doute, par ce biais, ouverte aux couples homosexuels ; le PACS ; le mariage, enfin, avec les droits et devoirs qui y sont attachés, beaucoup plus étendus que dans le cadre du PACS ou de l’union libre.

Après avoir ainsi présenté la philosophie générale de cette proposition de loi, le rapporteur en a décrit le contenu. Il a tout d’abord indiqué que ce texte avait pour objet d’établir un statut pour les personnes qui, quel que soit leur sexe, ont un projet commun de vie. Il a souligné qu’il ne s’agissait pas de donner des droits particuliers aux homosexuels, ajoutant par ailleurs que le PACS n’avait pas pour finalité de concurrencer le mariage. Il a noté qu’il constituait un statut global emportant des conséquences spécifiques pour les partenaires choisissant d’y adhérer et qu’il donnait un cadre légal, avec ses avantages et ses contraintes, à des unions de fait de plus en plus nombreuses. Il a souligné qu’un certain nombre de personnes liées par des liens de parenté ne pourraient pas conclure de PACS, à savoir les parents et leurs enfants, les beaux-parents et leurs enfants par alliance, les frères et sœurs, les oncles et neveux, pour des raisons tenant à l’étroitesse de leurs liens familiaux, la plupart d’entre elles bénéficiant d’ailleurs de droit plus avantageux que ceux ouverts par le PACS, par exemple en matière de successions. Il a précisé également que les questions de filiation n’étaient pas évoquées par le PACS, qui organise exclusivement les relations mutuelles entre deux personnes ayant fait le choix de conduire ensemble leur vie. Il a ajouté que ce cadre juridique était complètement neutre quant au statut des enfants pouvant naître de parents liés par un pacte, les règles de filiation restant régies par le titre VII du livre premier du code civil qui leur est spécifiquement consacré. Il a insisté sur le fait que le PACS n’interférait en rien avec le droit de la famille et n’ouvrait aucun droit nouveau quant aux possibilités d’adoption ou de procréation médicalement assistée. Il a constaté que néanmoins ce nouveau statut permettrait aux parents de bénéficier d’une meilleure sécurité juridique, qui ne peut être que favorable aux enfants qui naissent ou qui sont élevés hors mariage.

En ce qui concerne les modalités concrètes de mise en œuvre du PACS, le rapporteur a indiqué que les personnes ayant décidé de se lier ainsi devraient en faire la déclaration à la préfecture, sans aucune solennité particulière. Il a noté que, puisqu’il ne s’agissait pas là d’un acte d’état civil, la présence d’un officier d’état civil n’était pas nécessaire. Il a indiqué que cette déclaration serait inscrite dans un registre spécial à la préfecture du lieu où le pacte serait conclu, ainsi qu’à la préfecture du lieu de naissance de chacun des partenaires. Il a fait savoir également que la publicité et la transparence de ces pactes seraient assurées, notamment pour permettre l’information des notaires amenés à établir des actes concernant l’un des partenaires. Il a expliqué que le PACS prendrait fin par le décès, le mariage ou la volonté de l’un des deux signataires, précisant qu’à défaut d’accord des partenaires sur les conséquences de la rupture, celles-ci seraient réglées par le juge.

Le rapporteur a fait connaître les droits et obligations engendrés par le PACS. Il a noté que, en se liant par un PACS, les partenaires s’engageaient à vivre en commun et étaient tenus solidairement des dettes contractées par l’un d’entre eux dans le cadre de la vie courante. Il a souligné également que le PACS offrait aux signataires une sécurité juridique en matière de gestion de leurs biens, désormais soumis à un régime d’indivision modulé, éventuellement, par convention écrite. Il a ajouté que des droits particuliers étaient reconnus au partenaire survivant et, que pour la perception des droits de mutation à titre gratuit, il était prévu un abattement de 250.000 F, les droits de successions étant abaissés à 40 % pour la part nette taxable n’excédant pas 100.000 F et 50 % au-delà. Il a indiqué également que, en cas d’abandon du domicile par le locataire, le contrat de location continuait au profit du partenaire auquel il était lié depuis au moins un an par un PACS et que, par ailleurs, en cas de décès du locataire, le partenaire survivant pourrait bénéficier de la reprise du logement par le bailleur. En outre, en matière d’assurance maladie, il a fait savoir que le partenaire lié à un assuré social par un PACS aurait la qualité d’ayant-droit de l’assuré s’il se trouvait à sa charge effective, totale et permanente, et cela sans condition de durée de vie commune. Enfin, pour en terminer avec les droits automatiques attachés à ce statut, il a indiqué que le code du travail serait modifié afin que les partenaires puissent, notamment, prendre leurs vacances ensemble et bénéficier des droits aux congés exceptionnels, en particulier en cas de décès de l’un des partenaires.

Le rapporteur a conclu en mentionnant, à côté de ces droits automatiques, la reconnaissance pour les signataires d’un PACS de leurs liens dans certaines démarches. Il a précisé ainsi que, priorité serait donnée, pour son affectation, au fonctionnaire séparé pour des raisons professionnelles du partenaire avec lequel il est lié par un PACS, que l’étranger lié par un PACS pourrait être considéré comme ayant des liens personnels en France lorsque serait examinée sa demande de titre de séjour, qu’enfin, un étranger demandant à être naturalisé pourrait arguer de son lien à un Français par un PACS pour l’appréciation de son assimilation à la communauté française.

En conclusion, le rapporteur a estimé que le texte soumis à la Commission apporterait des améliorations très concrètes dans la vie quotidienne des couples non mariés en matière de logement, de droits sociaux, de partage des biens et de successions, soulignant qu’il convenait de s’en réjouir.

Plusieurs commissaires sont ensuite intervenus dans la discussion générale.

M. Claude Goasguen s’est tout d’abord étonné qu’un texte affectant si fortement le droit des personnes et l’évolution de la société résulte d’une initiative parlementaire. Insistant sur la vocation normative de la législation, il a estimé que le droit n’avait pas pour vocation essentielle de consacrer des situations de fait. Il a ensuite fait valoir que la proposition de loi conduisait à définir un statut unique pour des situations en réalité très hétérogènes, soulignant que les problèmes posés à la société par les couples homosexuels méritaient un examen serein, tout en n’étant nullement comparables à la situation des concubins hétérosexuels. S’agissant du dispositif de la proposition de loi, il a déploré son caractère hâtif, jugeant que les imprécisions du texte risquaient, en définitive, de porter préjudice aux personnes censées en bénéficier. A cet égard, il a critiqué la déclaration en préfecture, faisant observer que cette formalité n’avait jamais été retenue en matière de droit des personnes dans la mesure où les services préfectoraux sont incapables d’effectuer des études personnalisées. Après s’être interrogé sur les conséquences de la proposition de loi en matière d’état civil, il a regretté qu’elle ne fasse pas intervenir les notaires qui bénéficient de la qualité d’officier public. Il a ensuite fait valoir que le régime des nullités était de nature à poser des difficultés insurmontables dans la mesure où l’abrogation rétroactive du contrat affectera des situations constituées de longue date, puis a émis de vives réserves sur les modalités de dissolution unilatérale du PACS. S’agissant de la gestion des biens, il a considéré que la proposition de loi érigeait l’indivision en règle de fond, alors que le code civil l’assimile à une règle de preuve. Tout en reconnaissant la réalité des difficultés rencontrées par les couples homosexuels, M. Claude Goasguen a estimé que celles-ci auraient été mieux réglées par des actes sous seing privé. Enfin, il a considéré que le texte proposé était dangereux pour la société, qu’il favorisait la fraude fiscale et qu’en tout état de cause, il méritait un réexamen approfondi sur le plan juridique.

M. Alain Tourret a estimé que la proposition de loi constituait une initiative forte, soulignant qu’elle aboutissait à entériner une évolution inéluctable selon laquelle de plus en plus d’unions dans notre société empruntent des formes qui ne sont pas celles de l’institution du mariage. Après avoir suggéré de solliciter l’avis du Conseil d’Etat sur la proposition de loi, il s’est interrogé sur la nature du PACS, estimant que celui-ci était plus qu’un contrat, proche d’un statut, mais ne pouvait être qualifié d’institution à l’instar du mariage. En ce qui concerne le dispositif de la proposition de loi, il a regretté l’utilisation systématique de l’expression « partenaires liés par un pacte », a estimé qu’il serait préférable d’organiser l’enregistrement du PACS au tribunal d’instance dès lors que celui-ci est l’héritier de la justice de paix, puis s’est enfin interrogé sur l’inscription du pacte en marge de l’état civil, voire au registre du tribunal de commerce.

M. Jacques Floch, en préambule, a mis en exergue l’importance d’un débat touchant aux rapports humains, rappelant que les nombreuses discussions sur le même thème n’avaient jusqu’alors pas pu aboutir. Après avoir critiqué les déclarations tendant à travestir la portée réelle de la proposition de loi, il a souligné que plus de cinq millions de personnes vivant actuellement en couple sans être mariées, avec deux millions d’enfants et près de sept millions d’ascendants directs, étaient concernées par les mesures proposées. Considérant que le droit du couple résultant du code civil devait évoluer pour tenir compte des mutations de la société, il a estimé que les améliorations apportées depuis deux siècles avaient conforté la conception initiale du mariage, institution essentiellement destinée à la protection des biens. D’une manière générale, il a insisté sur le fait que cette proposition consacrait un nouvel espace de libertés, dès lors qu’elle garantissait une reconnaissance juridique au profit de deux personnes, quel que soit leur sexe, engagées dans un projet de vie, mettant ainsi fin à la jurisprudence restrictive de la Cour de cassation. En conclusion, il a estimé indispensable de soutenir un texte qui, au-delà de ses dispositions techniques, permettrait de traduire dans le droit des évolutions sociales profondes.

M. Frantz Taittinger s’est interrogé sur l’application des règles de la capacité juridique lors de la signature d’un PACS.

Après avoir rappelé que le groupe communiste avait déposé l’une des propositions de loi soumises à la Commission, M. Bernard Birsinger, intervenant en application de l’article 38, alinéa premier, du Règlement, a souligné que les textes qu’elle examinait avaient pour ambition de mettre un terme aux discriminations entre couples, que ceux-ci soient homosexuels ou hétérosexuels. Reconnaissant que ces propositions répondaient à une initiative de la minorité homosexuelle, il a insisté sur le fait qu’elles bénéficieraient à tous les couples non mariés ayant un projet de vie commun, consacrant ainsi la réalité du couple dans la société contemporaine. Il a toutefois suggéré d’améliorer le dispositif en matière fiscale afin de renforcer l’égalité entre les couples, a estimé que la mairie était le lieu le mieux adapté pour l’enregistrement du pacte, et a enfin jugé préférable de mentionner expressément que le pacte pourrait bénéficier à deux personnes de sexe différent ou de même sexe.

M. Gérard Gouzes a tout d’abord insisté sur les mutations de la société, estimant que le régime actuellement applicable à la famille ne permettait pas de prendre en compte la situation de toutes les personnes ayant un projet de vie commun. Regrettant l’assimilation faite par les opposants au PACS entre celui-ci et le mariage, alors que le texte proposé exprime principalement le souci d’apporter un règlement juridique à certaines situations inextricables, il a rappelé que la jurisprudence avait déjà eu l’occasion de se prononcer sur la situation des couples non mariés. S’agissant du dispositif de la proposition de loi, il s’est interrogé sur la nature du pacte, jugeant que celui-ci ne pouvait être assimilé à une institution. Il a ensuite émis des réserves sur la création d’une solidarité entre les partenaires, considérant qu’elle était de nature à poser plus de problèmes qu’à en résoudre. Après avoir évoqué la situation dans laquelle se trouveraient désormais les couples non mariés n’ayant pas conclu de PACS, il a souhaité obtenir des précisions sur le juge compétent pour régler les difficultés liées à la présence des enfants, sur la protection du partenaire défavorisé en cas de rupture unilatérale du pacte et sur les modalités de dissolution de l’indivision. Il a enfin suggéré que la dissolution du pacte soit signifiée et non pas notifiée, comme le prévoit la rédaction actuelle de la proposition de loi.

M. Robert Pandraud a regretté que, s’agissant d’un texte d’origine parlementaire, le Conseil d’Etat n’ait pas pu être consulté. Il a rappelé qu’il demandait depuis de nombreuses années que les avis de la Haute juridiction sur les projets de loi soit communiqués aux présidents des commissions ou, qu’à tout le moins, ceux-ci puissent en avoir connaissance lorsqu’ils le demandent expressément. Relevant que les modifications successives de la législation sur les étrangers posaient à chaque fois des problèmes d’organisation considérables aux préfectures, il a douté que les personnels de ces administrations disposent des moyens nécessaires pour procéder, dans des conditions satisfaisantes, à un enregistrement du PACS dans leurs locaux ; il a suggéré que cet enregistrement se fasse de préférence chez les notaires.

Tout en précisant qu’il était favorable au principe de l’initiative parlementaire, M. Renaud Donnedieu de Vabres a souhaité connaître la position du Gouvernement sur ce texte.

Après avoir relevé que les nombreuses questions posées par les parlementaires montraient bien que le PACS ouvrait une voie juridique radicalement différente du mariage, Mme la Présidente a fait valoir que cette nouvelle union n’affectait ni le passé des partenaires, ni leurs ascendants, ni leurs enfants.

M. Henri Plagnol a rappelé que, jusqu’à maintenant, la République ne reconnaissait que les individus et la famille à travers l’institution du mariage, le reste relevant du droit des contrats. S’agissant des couples, il a fait valoir que la jurisprudence avait pris en compte, à travers le droit des contrats, l’évolution de la société. Il a regretté qu’un texte de cette importance soit examiné dans la précipitation, sans auditions publiques, estimant que les auteurs de la proposition de loi auraient dû prendre pour modèle le débat sur la bioéthique. Rappelant que la ministre de la justice avait annoncé une vaste réforme du droit de la famille, notamment du droit du divorce, il s’est interrogé sur l’articulation du PACS avec les textes à venir. Après avoir fait valoir que les problèmes spécifiques posés aux concubins avaient dans l’ensemble déjà été réglés par la jurisprudence, il a considéré que le texte était inutile et dangereux dans la mesure où il institutionnalisait un sous-mariage. Il a récusé l’idée selon laquelle le PACS n’aurait aucune conséquence pour les enfants, observant qu’un partenaire ne serait pas informé du mariage du père ou de la mère de son enfant, puisque le mariage entraînerait automatiquement, sans formalité aucune, la dissolution du PACS, et affirmé que la procédure de divorce protégeait les enfants. Après avoir fait valoir que le mariage permettait également de protéger le plus faible des conjoints, il a considéré que le PACS n’apportait aucune garantie dans ce domaine mais organisait au contraire la domination du plus fort sur le plus faible. Il a estimé que le droit ne devait pas courir après la société ni favoriser l’évolution vers un « supermarché de la famille » où les couples pourraient désormais choisir entre le mariage, le PACS et l’union libre. Observant qu’un tel texte était contradictoire avec la volonté affichée de lutter contre la fracture sociale, il a jugé que le législateur ne devait pas être neutre, mais devait favoriser les valeurs qu’il souhaitait voir transmettre. En conclusion, il a indiqué qu’il aurait été préférable de reconstruire le droit de la famille à partir des droits de l’enfant.

Soulignant que le débat actuel était important dans la mesure où il touchait la vie quotidienne des gens, Mme Frédérique Bredin s’est réjouie que ce texte équilibré soit d’origine parlementaire. Elle a considéré que le PACS était très éloigné du mariage, puisqu’il ne reprenait aucun des fondements du mariage que sont l’engagement durable, la fidélité et le renouvellement des générations, et rappelé que le texte ne comportait aucune disposition sur la filiation, l’adoption ou la procréation médicalement assistée. Après avoir fait valoir qu’il s’agissait d’un texte de libertés individuelles, elle a observé qu’il donnait des droits nouveaux permettant de lutter contre la précarité et d’améliorer la justice sociale. Elle a estimé que, loin de contribuer à la déstructuration de la société, le PACS allait créer de nouvelles solidarités. Elle a enfin souligné que le texte concernait également des personnes souhaitant se rapprocher pour des raisons économiques ou tout simplement pour rompre leur solitude.

Après avoir regretté que les auditions aient été réservées aux seuls rapporteurs, M. Christian Estrosi a considéré que le PACS était un sous-mariage qui accordait les droits de cette institution sans en exiger les devoirs, jugeant qu’il était significatif de l’abandon de la politique familiale. Il a regretté que les pouvoirs publics ne luttent pas contre le déclin du mariage et l’augmentation des naissances hors mariage, mais au contraire favorisent ces tendances avec l’adoption d’un tel texte et rappelé que la diminution du nombre de naissances aurait des conséquences très lourdes sur le financement des régimes sociaux. Après avoir souhaité connaître la position du ministère des finances sur ce texte, il a noté que le Gouvernement avait trouvé de l’argent pour financer le PACS, alors que, dans le même temps, il n’y en avait plus pour la politique familiale. Il a également estimé que le texte donnerait lieu à de nombreux détournements, avec notamment la conclusion de « PACS blancs ». Il a considéré que le PACS créait une inégalité avec les célibataires, notamment en cas de mutations de fonctionnaires. Il a conclu en faisant valoir que la proposition de loi était dangereuse pour les enfants, puisque, dans le cadre d’un PACS, le père n’aurait aucune obligation envers eux.

Mme Nicole Catala a souligné l’ambiguïté du texte, rappelant qu’il avait été demandé à l’origine par la communauté homosexuelle qui souhaitait à la fois une reconnaissance sociale et la résolution de problèmes précis qui auraient pu l’être par des aménagements ponctuels. Elle a estimé que l’élargissement du texte aux couples hétérosexuels, rendu nécessaire par les réticences de certains, renforçait cette ambiguïté, puisque ce nouveau statut menaçait désormais directement le mariage. Observant que le mariage instituait des liens de solidarité et favorisait la stabilité nécessaire à l’éducation des enfants, elle a considéré que la société avait besoin de cette institution qui assure également la protection du plus faible, notamment au travers de la procédure du divorce. Tout en faisant valoir que sur certains points le PACS s’apparentait au mariage, elle a estimé que sur d’autres aspects, les règles prévues étaient trop souples et généreraient donc d’importants contentieux ou défavoriseraient le partenaire le plus faible, notamment en matière de rupture.

M. Thierry Mariani a considéré que le texte soumis à la Commission, s’il était souhaité par une minorité agissante, heurtait profondément la majorité de nos concitoyens, était dangereux et source de fraude. Il a regretté qu’il constitue un message négatif à l’égard de l’institution du mariage, qui reste le fondement de notre société et permet de protéger l’enfant, rappelant que les avantages donnés par la collectivité aux familles ayant des enfants avaient précisément pour objet de reconnaître l’intérêt qu’elles présentent pour la société. S’inscrivant en faux contre ceux qui estiment que le droit doit suivre l’évolution de la société, il a considéré que la mission du législateur était de fixer des règles conformes à l’intérêt général et de corriger, s’il y a lieu, des injustices. Il a estimé que la copie du mariage que constituerait le PACS n’était pas nécessaire. Rappelant que lors de la discussion du projet de loi sur l’entrée et le séjour des étrangers, à la fin de l’année 1997, le Gouvernement lui avait donné l’assurance que les étrangers signataires d’un contrat d’union civile – selon la terminologie de l’époque – ne pourraient prétendre à une carte de séjour temporaire, il a observé que la proposition de loi faisait un choix inverse, ouvrant ainsi le champ à toutes les régularisations possibles. Evoquant la situation d’un couple de Rmistes, il s’est demandé, par ailleurs, si le plafond actuel de 3.800 F qui leur était applicable serait transposé aux cocontractants d’un PACS.

Il a considéré que contrairement à certaines affirmations qui n’étaient étayées par aucune démonstration, le PACS n’aurait aucun effet favorable à l’égard des enfants, soulignant, en particulier, qu’il ne constituerait pas une présomption de paternité. Il s’est inquiété du risque que les préfectures élaborent des statuts-types, sans pratiquer aucun contrôle, faute de moyens, et a estimé que le régime de l’indivision qui s’appliquerait aux cocontractants soulèverait quantité de problèmes. Soulignant qu’aucune compensation financière n’était prévue en cas de rupture du PACS, il a estimé que celle-ci pourrait être assimilée à une répudiation, plus proche des coutumes orientales que de la tradition républicaine, avant de conclure que l’on était en présence d’un monstre juridique, inacceptable, qui ne ferait qu’accroître l’insécurité juridique des personnes susceptibles d’être intéressées par cette formule.

M. Patrick Bloche a souligné la nécessité de légiférer sur ce sujet, la chambre sociale de la Cour de cassation ayant confirmé, dans un arrêt du 17 décembre 1997, sa jurisprudence selon laquelle le concubinage ne pouvait recouvrir qu’une union entre deux personnes de sexes différents. Relevant que l’orientation du débat en commission semblait indiquer que le PACS serait mieux accepté, s’il ne concernait que les couples homosexuels, il a estimé qu’en s’adressant à toutes les personnes ayant en commun un projet de vie, il s’inscrivait, au contraire, dans la tradition républicaine d’universalité des droits. Il a ajouté qu’il confèrerait une liberté de choix aux couples. Il s’est étonné que les défenseurs du mariage ne s’intéressent pas de plus près à la crise de cette institution et aux remèdes qu’il conviendrait de lui apporter. Il a rappelé que pour l’Union nationale des associations familiales, la famille recouvrait au demeurant aussi bien le mariage que la filiation ou l’exercice de l’autorité parentale. Il a considéré que le PACS devait être perçu comme un élément de stabilisation des couples servant ainsi les intérêts des enfants, observant que certaines associations familiales n’étaient pas hostiles à ce que le Parlement légifère en la matière. Il a enfin souligné que l’institution du PACS répondait aux vœux exprimés par des millions de nos concitoyens.

M. Philippe Houillon a considéré que le texte de la proposition de loi n’était qu’une copie du code civil. Soulignant que ses dispositions n’étaient pas intégrées dans le livre III traitant notamment des contrats mais bien, symboliquement, dans le livre premier intitulé « Des personnes » où figure notamment le mariage, il a mis en évidence les parallèles existant entre l’article 3 de la proposition de loi et les empêchements à la conclusion d’un mariage régis par les articles 147 et 161 du code civil, entre l’article 4 et l’article 215 dudit code sur la communauté de vie entre époux, ainsi qu’entre l’article 5 et les articles 212 et 220 relatifs à l’obligation de secours et à la solidarité des époux quant aux dettes. Il en a déduit que le PACS s’apparentait à un mariage-bis. Estimant que la démarche suivie était logique, puisqu’elle répondait à des engagements électoraux, il a observé que la référence faite aux concubins hétérosexuels n’était qu’un alibi, puisque seuls les homosexuels avaient besoin, notamment pour des raisons fiscales, de ce dispositif car le mariage ne leur était pas permis. Il a conclu en indiquant qu’une consultation sur ce sujet dans sa circonscription faisait clairement ressortir que la majorité de la population était hostile à une telle initiative.

Intervenant en application de l’article 38, alinéa 1, du Règlement, M. Charles de Courson a estimé qu’en considérant la société comme une simple juxtaposition d’atomes, les auteurs de la proposition de loi risquaient d’aboutir à désagréger le tissu social. Il a fait valoir que le PACS créait une confusion entre les couples homosexuels, les couples hétérosexuels et des communautés de vie ne relevant d’aucune de ces deux situations. S’agissant de cette dernière catégorie, il a fait observer que la proposition de loi permettrait, par exemple, d’attribuer des avantages fiscaux à des veuves sans aucune contrepartie sociale. S’agissant des homosexuels, il a considéré que le droit positif permettait d’ores et déjà de répondre aux problèmes auxquels ceux-ci peuvent être confrontés ; il a ainsi évoqué la colocation comme solution à leur problème de logement, l’assurance-vie, la tontine et les dons manuels, susceptibles de constituer des formules adaptées à leur situation au regard du droit des successions. Il s’est inquiété de l’assimilation des cocontractants à un foyer fiscal, soulignant qu’en matière d’imposition sur le revenu, les avantages reconnus aux familles étaient liés à leur rôle social. Evoquant la priorité qui pourrait être accordée aux fonctionnaires engagés dans un PACS en matière de mutation, il s’est interrogé sur le préjudice ainsi porté aux célibataires. S’agissant des couples hétérosexuels, il a estimé que le déclin du mariage pouvait s’expliquer par la nécessité de réformer cette institution, qu’il s’agisse des conditions mêmes de la célébration du mariage civil ou du régime des pensions de réversion. Après avoir rappelé que l’équilibre d’une société reposait sur la définition de devoirs en contrepartie de droits, il s’est inquiété du coût du dispositif proposé, qu’il a évalué à 2 ou 3 milliards de francs au titre de l’imposition sur le revenu et à 1 ou 1,5 milliard de francs au titre des droits de mutation à titre gratuit. Relevant que cette charge serait supportée in fine par les couples mariés et les célibataires, il s’est interrogé sur le droit des couples homosexuels à bénéficier des mêmes avantages que les couples hétérosexuels alors que, par définition, ils n’assument pas la même fonction sociale de transmission de la vie. Rappelant que la suppression, par la loi de finances pour 1996, de la demi-part supplémentaire de quotient familial dont bénéficiaient les concubins s’était traduite par une augmentation des mariages de 10 %, M. Charles de Courson a considéré qu’en déstabilisant le mariage, le PACS aurait un effet inverse. Soulignant les incertitudes de la définition du PACS identifié, pour les uns, à un contrat et, pour les autres, à une institution, il a estimé qu’il constituait une formule a minima, n’établissant aucune proportionnalité entre les obligations imposées et les droits conférés. Rappelant que les propositions relatives au contrat d’union civile et au contrat d’union civile et sociale prévoyaient un droit à pension de réversion au bénéfice des partenaires d’un PACS, et soulignant que ces initiatives n’avaient été abandonnées que pour tenir compte de l’obstacle résultant de l’article 40 de la Constitution, il s’est inquiété du coût d’une telle mesure qu’il a estimée entre 12 et 14 milliards de francs, ajoutant que cette dépense risquait de peser sur la collectivité au moment même où celle-ci serait contrainte d’engager une réforme du régime général et des régimes spéciaux de sécurité sociale. S’agissant de la fiscalité, M. Charles de Courson a souligné que l’administration des impôts serait incapable de contrôler la réalité d’un PACS, ce qui permettrait toutes les fraudes. Il a également exprimé des craintes sur les dérives qu’une telle législation pourrait provoquer au regard du droit de la nationalité. Il a souligné que le PACS favoriserait les individus ayant des revenus et un patrimoine importants, les personnes non imposables n’ayant, en revanche, aucun intérêt à recourir à cette formule. Doutant de sa compatibilité avec le droit international privé, il s’est demandé quels seraient les droits de cocontractants français établis dans un autre Etat de l’Union européenne et quel serait le statut d’un cocontractant qui se marierait à l’étranger. Considérant qu’il y aurait été de bien meilleure méthode de s’interroger sur les raisons pour lesquelles 12 à 14 % des couples hétérosexuels ne se mariaient pas, il a conclu ses propos en faisant valoir que si la loi n’avait jamais créé l’amour, elle pouvait en revanche le conforter.

S’opposant à M. Thierry Mariani sur les rapports entre la minorité et la majorité en démocratie, M. Guy Hascoët a considéré que le devoir de la majorité était de reconnaître des droits aux minorités pourvu que ceux-ci ne nuisent pas au reste de la population. Or, il a constaté que, manifestement, rien dans le texte soumis à l’examen de la Commission ne fragilisait les droits des personnes qui ne recourraient pas au PACS. Il a observé que rien ne permettait de déterminer par avance les conséquences du PACS sur l’institution du mariage. Par ailleurs, il s’est interrogé sur les raisons qui avaient conduit à abandonner la mairie pour l’enregistrement de ce type de convention. Rappelant que pour obtenir un certificat de concubinage les personnes concernées s’adressaient aujourd’hui aux services des mairies, il a regretté que l’on ait renoncé, pour le PACS, à une procédure identique, sans solennité particulière, qui aurait sans doute été plus simple. Pour ce qui concerne le coût budgétaire induit par le recours au PACS, il a estimé qu’il était difficile aujourd’hui d’en fixer le montant, soulignant qu’en tout état de cause, il n’acceptait pas la logique qui consiste à reconnaître une liberté et ensuite à culpabiliser les personnes qui l’exercent en les accusant de grever le budget de l’Etat et les comptes de la sécurité sociale.

Jugeant que cette proposition de loi constituait un danger pour la société, M. Pascal Clément a observé que si le terme de pacte était en droit synonyme de contrat, selon le sens commun, il renvoyait à l’idée de solennité comme en a convenu, d’ailleurs, le rapporteur. Il a estimé que ce texte confondait la sphère privée et la sphère publique, ce qui constitue la racine même du mal dans les sociétés modernes. Puis il s’est déclaré opposé à ce que des comportements privés qui ne sont qu’acceptés en fait par la société puissent prendre un caractère normatif. Il a souligné que le code civil n’accordait des avantages particuliers que dans l’hypothèse où la société en son entier en tirait bénéfice, observant que tel n’était pas le cas pour le PACS. Il a précisé que s’il comprenait qu’un contribuable paie pour soutenir l’institution familiale, dont l’utilité sociale est évidente, il n’acceptait pas que les couples liés par un PACS bénéficient d’avantages fiscaux. Il a considéré, par ailleurs, que les avantages sociaux accordés aux personnes signataires d’un PACS auraient pu l’être sans qu’un statut particulier leur soit reconnu. En conclusion, il a regretté que ce texte porte finalement atteinte la famille, institution pivot de la société.

Après avoir exprimé son opposition personnelle au PACS, M. Pierre Albertini a indiqué qu’il n’avait pas un attachement de principe à une forme particulière du mariage, jugeant que cette institution pourrait être modernisée. Il s’est interrogé sur l’unicité d’un dispositif juridique qui s’appliquerait à des situations fort différentes. Observant que la proposition de loi offre le même cadre juridique à des couples hétérosexuels et homosexuels, il a estimé que, même s’il l’observait avec tolérance, la relation homosexuelle n’était pas de même nature que la relation entre un homme et une femme, qui seule prépare l’avenir de la société. Il a souligné qu’il existait un fort coefficient d’incertitude sur le contenu des PACS, observant qu’ils pourraient comporter des droits et des devoirs d’intensité très différente et ajoutant que la nature véritable du PACS dépendrait de l’interprétation du juge. Il a regretté que l’on accepte aujourd’hui une situation dont on ne mesure pas l’ensemble des conséquences, notamment pour les enfants, alors même que tout le monde souligne les dégâts sociaux occasionnés par la déresponsabilisation des parents. Il a jugé en outre que si le droit devait, par certains aspects, suivre l’évolution des mœurs, toutes les pratiques sociales ne devaient pas néanmoins être traitées sur un plan d’égalité. Il a conclu que le PACS ainsi institutionnalisé était en définitive un modèle social proposé à nos concitoyens, ce qui constituait une mauvaise réponse à de vraies questions.

A l’issue de la discussion générale, la Commission a rejeté l’exception d’irrecevabilité n° 1 et la question préalable n° 1 présentées par M. Jean-Louis Debré.

En réponse aux différents intervenants, le rapporteur a apporté les précisions suivantes.

—  C’est sur l’insistance des rapporteurs et de la présidente de la commission des lois que la discussion sur le PACS s’engage sur la base d’un texte d’origine parlementaire et n’est pas intégrée à une réforme d’ensemble de la famille. Néanmoins, les rapporteurs ont travaillé avec le Gouvernement et plusieurs réunions interministérielles se sont tenues sur le sujet. Par conséquent, toutes les garanties juridiques ont été prises lors de la phase d’élaboration du texte.

—  L’exclusion des fratries et des collatéraux du champ d’application de la proposition de loi est justifiée par la volonté de ne pas sembler encourager l’inceste et par le fait qu’existent entre parents, notamment en matière de succession, des dispositions plus favorables que celles prévues pour les signataires d’un PACS.

—  S’agissant des règles de capacité, les dispositions générales relatives aux conditions de majorité, au régime de la tutelle et de la curatelle prévues aux articles 481 et 488 du code civil, s’appliquent.

—  Le lieu d’enregistrement du PACS ayant donné lieu à d’importants débats ainsi qu’à des campagnes de presse, des solutions alternatives à la mairie ont été recherchées. L’Association des maires de France ayant été consultée, celle-ci a fait part des fortes réticences de certains de ses membres. Pour cette raison, il est apparu souhaitable d’éviter une inégalité de traitement des demandes d’enregistrement sur le territoire et d’écarter le risque de transformer cette question en enjeu électoral au moment des élections municipales. Les tribunaux d’instance et de grande instance ont été écartés dans la mesure où ils sont perçus avant tout comme des lieux de règlement des contentieux. En revanche, les préfectures sont un lieu favorable pour l’enregistrement du PACS, qui ne constitue d’ailleurs pas un acte d’état civil. La préfecture du lieu d’enregistrement transmettra l’information à la préfecture du département de naissance des intéressés et tiendra un registre contenant la liste des signataires d’un PACS. En cas de mariage, la dissolution du PACS sera automatique. Le pacte civil de solidarité permet ainsi à la fois l’officialisation de l’union dans un lieu public et la mise en place de droits par convention devant notaire.

—  Pour les biens, le régime prévu est celui de l’indivision dont les modalités peuvent être organisées par convention sous seing privé devant notaire. En cas de désaccord, cette convention tombe sur dénonciation unilatérale. Les modalités de notification de cette dénonciation seront précisées par voie réglementaire. En cas de contentieux consécutif à la dissolution d’un PACS, le juge des contrats sera compétent, le juge des affaires familiales étant éventuellement saisi pour les questions liées aux enfants. Le juge appréciera les conditions de rupture et pourra, le cas échéant, reprendre la jurisprudence retenue en cas de rupture de fiançailles ou d’une union libre. L’ensemble du dispositif ne remet donc pas en cause le statut du célibataire ainsi que les droits reconnus par la jurisprudence aux concubins hétérosexuels, mais ouvre de nouveaux droits aux concubins homosexuels.

—  En matière de sécurité sociale, la conclusion d’un PACS permettra sans délai l’extension de la couverture sociale au partenaire non affilié. Elle se traduira également par une imposition commune qui ne sera d’ailleurs pas systématiquement favorable aux signataires. Ainsi, lorsque les deux concubins disposent de revenus faibles ou qu’ils bénéficient de parts supplémentaires, la conclusion d’un PACS sera plutôt défavorable ; elle sera neutre pour les concubins disposant de revenus identiques et favorable principalement lorsqu’un seul des deux concubins dispose de revenus imposables.

—  Le PACS ne modifie pas le droit de la famille : il est ainsi sans conséquence pour les enfants nés dans ce cadre et ne donne pas de droit à l’adoption ou à la procréation médicale assistée. Il constitue avant tout un encouragement à la stabilité des couples en ce qu’il implique un engagement absent de l’union libre, sans pour autant se substituer au mariage.

—  Pour les étrangers, la conclusion d’un PACS sera un des éléments pris en compte pour la procédure de naturalisation et pour la délivrance des titres de séjour. Il n’a pas été créé de nouveau titre de séjour pour les étrangers signataires d’un PACS, mais cet élément conjugué avec la preuve d’une vie commune effective sera pris en compte par les services préfectoraux. Il s’agit ainsi d’éviter les fraudes tout en permettant la délivrance d’un titre de séjour au membre étranger d’un couple homosexuel lorsqu’il est engagé, en France, dans une relation stable.

La Commission est ensuite passée à l’examen du texte proposé par le rapporteur.

TITRE PREMIER

DISPOSITIONS MODIFIANT LE CODE CIVIL

La Commission a rejeté un amendement de M. Henri Plagnol tendant à supprimer le titre premier de la proposition.

Article premier (art. 515-1 à 515-8 du code civil) : Insertion des articles relatifs au pacte civil de solidarité dans le livre premier du code civil :

La Commission a rejeté deux amendements de MM. Henri Plagnol et Renaud Dutreil tendant à supprimer cet article, un amendement de M. Guy Hascoët remplaçant la dénomination de « pacte civil de solidarité » par celle de « contrat civil de solidarité » ayant été retiré.

La Commission a adopté l’article premier sans modification.

Article 2 (art. 515-1 du code civil) : Définition du pacte civil de solidarité :

Après avoir rejeté deux amendements de MM. Henri Plagnol et Renaud Dutreil tendant à supprimer cet article, la Commission a également rejeté deux amendements de M. Renaud Dutreil limitant la possibilité de conclure un pacte civil de solidarité aux couples hétérosexuels et introduisant la notion de capacité pour la conclusion d’un pacte. Le rapporteur a rappelé que les règles générales de capacité étaient fixées par les articles 481 et 488 du code civil.

La Commission a adopté l’article 2 sans modification.

Article 3 (art. 515-2 du code civil) : Empêchements à la conclusion d’un pacte civil de solidarité :

La Commission a rejeté un amendement de M. Henri Plagnol tendant à supprimer cet article. Puis elle a adopté l’article 3 sans modification.

Article 4 (art. 515-3 du code civil) : Réception, inscription et conservation du pacte civil de solidarité :

La Commission a rejeté un amendement de M. Henri Plagnol tendant à supprimer cet article ainsi qu’un amendement de M. Guy Hascoët prévoyant que le PACS est signé en mairie et qu’il est inscrit sur les registres d’état civil. Elle a également rejeté quatre amendements de M. Renaud Dutreil ayant pour objet de supprimer l’obligation d’organiser la vie commune des partenaires dans la déclaration conjointe, de rendre obligatoire l’affichage préalable de la déclaration en préfecture et en mairie, de réserver l’accès au registre sur lequel est inscrite la déclaration aux services de l’Etat et d’imposer aux services préfectoraux d’organiser la diffusion des dispositions régissant le pacte.

La Commission a adopté l’article 4 sans modification.

Article 5 (art. 515-4 du code civil) : Obligations résultant du pacte civil de solidarité :

La Commission a rejeté un amendement de M. Henri Plagnol tendant à supprimer cet article ainsi qu’un amendement de M. Renaud Dutreil interdisant aux partenaires de fixer eux-mêmes les modalités de l’aide mutuelle et matérielle qu’ils doivent s’apporter.

La Commission a adopté l’article 5 sans modification.

Article 6 (art. 515-5 du code civil) : Régime des biens acquis postérieurement à la conclusion d’un pacte civil de solidarité :

La Commission a rejeté deux amendements de MM. Henri Plagnol et Renaud Dutreil tendant à supprimer cet article, ainsi qu’un amendement de M. Renaud Dutreil supprimant la présomption d’indivision pour les biens des partenaires dont la date d’acquisition ne peut être établie.

La Commission a adopté l’article 6 sans modification.

Article 7 (art. 515-6 du code civil) : Droits du partenaire survivant :

La Commission a rejeté un amendement de M. Henri Plagnol tendant à supprimer cet article, qu’elle a adopté sans modification.

Article 8 (art. 515-7 du code civil) : Evénements entraînant la dissolution du pacte civil de solidarité :

La Commission a rejeté un amendement de M. Henri Plagnol tendant à supprimer cet article et un amendement de M. Renaud Dutreil ayant pour objet de supprimer la rupture automatique du pacte en cas de mariage de l’un des partenaires.

La Commission a adopté l’article 8 sans modification.

Article 9 (art. 515-8 du code civil) : Dissolution du pacte civil de solidarité :

La Commission a rejeté deux amendements de MM. Henri Plagnol et Renaud Dutreil tendant à supprimer cet article et un amendement de M. Guy Hascoët prévoyant que la rupture du pacte est enregistrée en mairie et inscrite sur les registres d’état civil.

La Commission a adopté l’article 9 sans modification.

Article 10 : Imposition commune au titre de l’impôt sur le revenu :

La Commission a rejeté un amendement de suppression de cet article présenté par M. Henri Plagnol. Puis elle a examiné un amendement de M. Guy Hascoët tendant à prévoir qu’à défaut d’être liés par un PACS depuis au moins trois ans, les partenaires peuvent bénéficier de l’imposition commune de leurs revenus s’ils apportent la preuve de leur vie commune depuis ce délai. M. Jacques Floch ayant considéré que le principe de cet amendement était intéressant, a souhaité que son dispositif soit amélioré avant le débat en séance publique, M. Guy Hascoët l’a retiré.

La Commission a adopté l’article 10 sans modification.

Article 11 : Application générale des règles liées à l’imposition commune en matière d’impôts directs :

La Commission a rejeté un amendement de M. Henri Plagnol tendant à supprimer cet article et a adopté l’article 11 sans modification.

Article 12 : Tarif des droits sur les successions et donations :

La Commission a rejeté un amendement de M. Henri Plagnol tendant à supprimer cet article qu’elle a adopté sans modification.

Article 13 : Abattement en matière de droits sur les successions et donations :

La Commission a rejeté deux amendements de MM. Henri Plagnol et Renaud Dutreil tendant à supprimer cet article. Puis elle a adopté l’article 13 sans modification.

Article 14 : Imposition commune au titre de l’impôt de solidarité sur la fortune :

La Commission a rejeté un amendement de M. Henri Plagnol tendant à supprimer cet article qu’elle a adopté sans modification.

Article 15 : Droits dérivés en matière d’assurance-maladie :

La Commission a rejeté un amendement de M. Henri Plagnol tendant à supprimer cet article. Elle a adopté l’article 15 sans modification.

Article 16 : Droits à congés :

La Commission a rejeté un amendement de M. Henri Plagnol tendant à supprimer cet article, puis a adopté l’article 16 sans modification.

Article 17 : Priorité de mutation des fonctionnaires :

La Commission a rejeté un amendement de M. Henri Plagnol tendant à supprimer cet article qu’elle a adopté sans modification.

TITRE IV

DISPOSITIONS DIVERSES

Article 18 : Séjour du partenaire en France :

La Commission a rejeté un amendement de M. Henri Plagnol tendant à supprimer cet article. Puis elle a adopté l’article 18 sans modification.

Article 19 : Acquisition de la nationalité française par le partenaire étranger :

La Commission a rejeté un amendement de M. Henri Plagnol tendant à supprimer cet article qu’elle a adopté sans modification.

Article 20 : Continuation du contrat de location :

La Commission a rejeté deux amendements de MM. Henri Plagnol et Renaud Dutreil tendant à supprimer cet article. Puis elle a adopté l’article 20 sans modification.

Article 21 : Droit de reprise du bailleur :

La Commission a rejeté deux amendements de MM. Henri Plagnol et Renaud Dutreil tendant à supprimer cet article, qu’elle a adopté sans modification.

Article 22 : Décret d’application :

La Commission a rejeté un amendement de M. Henri Plagnol tendant à supprimer cet article. Puis elle a adopté l’article 22 sans modification.

Article 23 : Compensation des pertes éventuelles de recettes :

La Commission a examiné deux amendements de MM. Henri Plagnol et Guy Hascoët tendant à supprimer cet article. Le rapporteur ayant fait remarquer que cet article était la condition de la recevabilité financière de la proposition de loi, et annoncé son intention de demander, dès l’adoption de la proposition de loi par la Commission, la saisine, en application de l’article 92 du Règlement, du bureau de la commission des finances pour qu’il se prononce sur sa recevabilité au regard d l’article 40 de la Constitution, M. Guy Hascoët a retiré son amendement. Puis la Commission a rejeté l’amendement de M. Henri Plagnol et a adopté l’article 23 sans modification.

Titre

La Commission a examiné deux amendements de M. Henri Plagnol tendant à intituler le pacte, l’un « pacte de communauté de vie », l’autre « contrat de vie en commun ». Après que M. Henri Plagnol eut fait valoir que la dénomination proposée par le rapporteur était incohérente, un pacte étant intangible par nature, la Commission a rejeté ces deux amendements.

La Commission a adopté la proposition de loi dans le texte proposé par le Rapporteur.

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Informations relatives à la Commission

La Commission a procédé a nommé M. Henri Nallet rapporteur du projet de loi constitutionnelle modifiant l’article 88–2 de la Constitution (n° 1072).

Elle a également nommé M. Jean-Antoine Léonetti, rapporteur pour avis pour le projet de loi de finances pour 1999 : Intérieur (sécurité civile).


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