Accueil > Archives de la XIe législature > Comptes rendus de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République (1998-1999)

ASSEMBLÉE NATIONALE

COMMISSION des LOIS CONSTITUTIONNELLES,
de la LÉGISLATION et de l’ADMINISTRATION GÉNÉRALE
de la RÉPUBLIQUE

COMPTE RENDU N° 40

(Application de l'article 46 du Règlement)

Jeudi 11 mars 1999
(Séance de 14 heures 30)

Présidence de M. Gérard Gouzes, vice-président,

puis de Mme Catherine Tasca, présidente

SOMMAIRE

 

pages

– Projet de loi renforçant la protection de la présomption d’innocence et les droits des victimes (n° 1079) (suite de l’examen des articles)

2

La Commission a poursuivi l’examen, sur le rapport de Mme Christine Lazerges, du projet de loi renforçant la protection de la présomption d’innocence et les droits des victimes (n° 1079).

Articles additionnels avant l’article 10 (art. 137 du code de procédure pénale et art. L. 611-1 du code de l’organisation judiciaire) : Statut de la personne mise en examen – Rattachement du juge d’instruction au tribunal de grande instance :

La Commission a adopté un amendement du rapporteur procédant à une nouvelle rédaction de l’article 137 du code de procédure pénale, afin d’énoncer clairement que la personne mise en examen est maintenue en liberté et, exceptionnellement, placée sous contrôle judiciaire ou mise en détention provisoire. Un débat s’est ensuite engagé sur un amendement du rapporteur tendant à supprimer l’article L. 611-1 du code de l’organisation judiciaire, selon lequel il y a un ou plusieurs juges d’instruction dans chaque tribunal de grande instance. M. Gérard Gouzes, président, s’est déclaré hostile à cet amendement au motif que la présence de l’Etat devait être affirmée sous toutes ses formes sur l’ensemble du territoire, tout en ne s’opposant pas à ce que les juges d’instruction puissent se déplacer et ne pas être rattachés à une seule juridiction. Exprimant la crainte que cet amendement ne se traduise par la présence de juges d’instruction au niveau des seules cours d’appel, M. Alain Tourret a estimé qu’une départementalisation des juges d’instruction serait plus adaptée. Favorable à une meilleure organisation et répartition des cabinets d’instruction sur le territoire national, pouvant aller jusqu’à une spécialisation, Mme Frédérique Bredin a soutenu cet amendement. Après que le rapporteur eut précisé que, par anticipation sur la nécessaire réforme de la carte judiciaire, le fait de couper le lien entre juge d’instruction et tribunal de grande instance permettrait de constituer des pools de juges mobiles, la Commission a adopté l’amendement.

Elle a également adopté un amendement de M. Alain Tourret imposant la révision de la carte judiciaire dans les deux années suivant la promulgation de la présente loi, ce dernier amendement n’ayant pas l’aval de M. Gérard Gouzes mais obtenant l’approbation de M. Robert Pandraud. Elle a ensuite rejeté un amendement de M. Pierre Albertini et un amendement de M. Alain Tourret, tendant à modifier l’intitulé de la section 1 du chapitre II du projet afin de faire référence, le premier, au juge des libertés et, le second, au juge de la détention provisoire et des libertés.

Article 10 (art. 137-1 à 137-5 [nouveaux] du code de procédure pénale) : Institution du juge de la détention provisoire – rapports avec le juge d'instruction et le parquet :

—  Article 137-1 (nouveau) du code de procédure pénale : Création du juge de la détention provisoire :

La Commission a rejeté l’amendement n° 40 de M. André Gerin instituant une chambre d’examen des mises en détention provisoire, un amendement de M. Pierre Albertini substituant au juge de la détention provisoire le juge des libertés et un amendement du même auteur confiant à la chambre d’accusation, et non au juge de la détention provisoire, le pouvoir de prolonger la détention provisoire. Puis, la Commission a adopté un amendement du rapporteur tendant à supprimer les modalités de remplacement du juge de la détention provisoire, le président du tribunal de grande instance pouvant désigner un autre juge à titre provisoire. La Commission a ensuite été saisie de l’amendement n° 20 de M. Patrick Devedjian, ainsi que d’un amendement de M. Philippe Houillon à même finalité, tendant à préciser que le juge de la détention provisoire est saisi, non par une ordonnance motivée du juge d’instruction, mais par un réquisitoire du procureur de la République. M. Philippe Houillon a estimé que si le juge d’instruction transmettait le dossier de la procédure, cela signifiait nécessairement qu’il n’envisageait pas de laisser en liberté la personne mise en examen, ce qui revenait à un préjugement. Le rapporteur et Mme Frédérique Bredin ont jugé cet amendement incompatible avec la logique retenue par le projet de loi, consistant à faire intervenir deux magistrats du siège pour décider de la détention provisoire alors qu’un seul est suffisant pour le maintien en liberté. M. Robert Pandraud a estimé qu’en pratique, le juge de la détention provisoire ne contredirait pas la décision prise par l’un de ses collègues du siège. La Commission a rejeté l’amendement n° 20 de M. Patrick Devedjian et l’amendement de M. Philippe Houillon, de même qu’un amendement de M. Alain Tourret substituant aux termes d’ordonnance motivée ceux d’avis motivé, le rapporteur ayant fait observer que certaines ordonnances sont insusceptibles d’appel. Puis, elle a adopté un amendement de précision du rapporteur. Enfin, la Commission a rejeté un amendement de M. Alain Tourret tendant à prévoir que le juge de la détention provisoire statue par une ordonnance motivée sur toutes les demandes dont il est saisi, le rapporteur ayant fait observer que l’article 145-1 lui fait déjà obligation de motiver les ordonnances prolongeant la détention.

—  Article 137-2 (nouveau) du code de procédure pénale : Contrôle judiciaire :

La Commission a rejeté un amendement de M. Alain Tourret tendant à confier au juge de la détention provisoire le soin de prescrire les mesures de contrôle judiciaire. Dans l’intérêt de la personne mise en examen, le rapporteur et M. Robert Pandraud ont jugé préférable que le juge d’instruction puisse assortir le maintien ou la remise en liberté d’un contrôle judiciaire sans avoir à en référer au juge de la détention provisoire, seule la décision de priver de liberté nécessitant d’être approuvée par deux magistrats et justifiant une procédure plus lourde. Elle a également rejeté l’amendement n° 21 de M. Patrick Devedjian et un amendement identique de M. Philippe Houillon tendant à priver le juge de la détention provisoire de la faculté d’ordonner un contrôle judiciaire, le rapporteur et Mme Frédérique Bredin ayant considéré que le juge de la détention provisoire, saisi d’une demande de placement, devait disposer du choix de maintenir la personne en liberté moyennant des obligations de contrôle judiciaire.

—  Article 137-3 (nouveau) du code de procédure pénale : Modalités de certaines décisions du juge de la détention provisoire :

La Commission a rejeté un amendement de M. Alain Tourret supprimant les articles 137-3 à 137-5 pour que le juge d’instruction statue par ordonnance en toute hypothèse, le rapporteur s’étant interrogé sur l’intérêt de cette disposition lorsque la personne mise en examen n’est placée ni sous contrôle judiciaire ni en détention provisoire. En conséquence, la Commission a également rejeté deux amendements ayant le même objet, l’amendement n° 22 de M. Patrick Devedjian et un amendement identique de M. Philippe Houillon. Enfin, après avoir adopté un amendement rédactionnel du rapporteur, la Commission a rejeté un amendement de précision de M. Philippe Houillon.

—  Article 137-4 (nouveau) du code de procédure pénale : Modalités de certaines décisions du juge d'instruction :

La Commission a rejeté un amendement de M. Philippe Houillon tendant à supprimer cet article.

—  Article 137-5 (nouveau) du code de procédure pénale : Prérogatives du procureur de la République :

La Commission a rejeté l’amendement n° 23 de M. Patrick Devedjian et un amendement identique de M. Philippe Houillon tendant à supprimer cet article.

La Commission a adopté l’article 10 ainsi modifié.

Après l’article 10 :

La Commission a rejeté un amendement de M. Alain Tourret prévoyant que le procureur de la République a le droit d’interjeter appel des ordonnances du juge de la détention provisoire et des libertés. Mme Frédérique Bredin a reconnu, à cette occasion, que les termes de « juge de la détention » n’avaient pas une connotation très positive et qu’il faudrait sans doute, avant le passage en séance publique, trouver une expression plus satisfaisante. Le rapporteur a exprimé son accord avec cette remarque, M. Louis Mermaz ayant noté que la garde des sceaux avait ouvert une piste à ce sujet en évoquant le « contrôle de la détention ». Puis la Commission a rejeté un amendement, également présenté par M. Alain Tourret, prévoyant que les parties ou les témoins assistés pourraient interjeter appel des ordonnances du juge de la détention. Le rapporteur a fait remarquer que ce recours était déjà ouvert par le code de procédure pénale, en application du présent projet de loi, le témoin assisté bénéficiant des mêmes droits que les personnes mises en examen.

Article 11 (art. 145-3 du code de procédure pénale) : Prolongation de la détention provisoire :

La Commission a rejeté un amendement d’ordre rédactionnel présenté par M. Pierre Albertini puis a adopté l’article 11 sans modification.

Article 12 (art. 146 du code de procédure pénale) : Prolongation de la détention provisoire en cas de requalification correctionnelle :

La Commission a rejeté l’amendement n° 24 de M. Patrick Devedjian ainsi qu’un amendement de M. Philippe Houillon ayant le même objet, aux termes desquels le juge de la détention provisoire doit être saisi par le procureur et non pas par le juge d’instruction pour statuer sur la détention ou la mise en liberté d’une personne mise en examen. Elle a également rejeté un amendement de M. Pierre Albertini modifiant la dénomination du juge de la détention provisoire. Elle a ensuite adopté un amendement de M. Alain Tourret harmonisant les délais laissés au juge de la détention provisoire pour statuer. Puis elle a adopté l’article 12 ainsi modifié.

Article 13 (art. 147 du code de procédure pénale) : Mise en liberté du prévenu à l’initiative du procureur :

La Commission a rejeté un amendement n° 25 de M. Patrick Devedjian et un amendement similaire de M. Philippe Houillon prévoyant que le juge d’instruction doit passer par le procureur de la République pour saisir le juge de la détention provisoire. Elle a également rejeté un amendement d’ordre rédactionnel de M. Pierre Albertini. Puis elle a examiné un amendement du rapporteur prévoyant que le juge d’instruction saisit le juge de la détention provisoire par voie d’ordonnance, plutôt que par simple transmission du dossier accompagné d’un avis motivé. M. Philippe Houillon a estimé que cet amendement risquait d’aggraver le système, la prise d’une ordonnance relevant d’une logique de prédécision, alors même que le juge de la détention provisoire n’a pas encore statué. M. Jean-Pierre Michel a relevé qu’une ordonnance, étant un acte qui fait grief, était donc susceptible d’appel, ce que M. Alain Tourret a confirmé. Le rapporteur a souligné la portée purement technique de son amendement, mais, constatant que le débat n’était pas clos sur cette question, l’a retiré.

La Commission a adopté cet article sans modification.

Article 14 (art. 148 du code de procédure pénale) : Demande de mise en liberté par le prévenu :

La Commission a rejeté un amendement n° 26 de M. Patrick Devedjian et un amendement de M. Philippe Houillon ayant le même objet, prévoyant, là encore, la saisine par le procureur du juge de la détention provisoire. Après avoir rejeté un amendement d’ordre rédactionnel de M. Pierre Albertini, elle a adopté un amendement du rapporteur rectifiant une erreur formelle. Puis elle a adopté l’article 14 ainsi modifié.

Après l’article 14 :

La Commission a rejeté un amendement présenté par M. Michel Hunault fixant des critères objectifs aux fins de limiter la possibilité laissée au juge de mettre une personne en détention provisoire, en augmentant en particulier le seuil de la peine encourue nécessaire pour justifier une telle détention.

Article 15 (art. 143-1 [nouveau] et 144 du code de procédure pénale) : Conditions autorisant le placement en détention provisoire :

—  Article 143-1 (nouveau) du code de procédure pénale : Quantum de peines :

La Commission a adopté un amendement d’ordre rédactionnel présenté par le rapporteur. Puis, elle a été saisie d’un amendement de M. Alain Tourret exigeant pour la mise en détention provisoire que la peine encourue soit désormais de cinq ans d’emprisonnement en cas de délit contre les biens et de trois ans en cas de délit contre les personnes. M. Alain Tourret a rappelé que ce dispositif avait été adopté en avril 1998 par la Commission et par l’Assemblée nationale, lors de la discussion de la proposition de loi qu’il avait présentée. Il a notamment souligné que les commissaires socialistes avaient voté à l’unanimité cette disposition, tandis que la chancellerie, qui s’y était opposée en avril 1998, demeurait hostile à cet amendement. Il a regretté que les commissaires socialistes puissent changer de position sur un problème aussi important. Rappelant qu’il s’était prononcé contre cet amendement l’an passé, M. Robert Pandraud a indiqué qu’il le voterait néanmoins parce qu’il jugeait nécessaire que l’Assemblée soit cohérente et adresse ainsi à la chancellerie un message clair. Il a estimé que le présent débat confirmait le fait que le groupe socialiste considérait l’ordre du jour d’initiative parlementaire comme un simple accessoire dans le travail législatif. Il a conclu en indiquant qu’il ne souhaitait pas, sur ce texte, une « revanche des bureaux », trop souvent synonyme d’absence de volonté politique dans notre pays. M. Patrick Devedjian a fait savoir qu’il avait également voté contre cette élévation des seuils, parce que la proposition de M. Alain Tourret n’instituait pas de juge de la détention et que, dès lors, il n’était pas opportun de trop conforter les pouvoirs du juge d’instruction. Constatant que le présent projet de loi s’inscrivait dans une autre logique, distinguant la question de la détention provisoire et l’enquête judiciaire, il a fait part de son accord sur l’amendement de M. Alain Tourret. Mme Frédérique Bredin a indiqué que cet amendement lui paraissait intéressant et qu’elle regrettait de ne pas avoir été suivie par le groupe socialiste sur ce sujet. Elle a ajouté qu’un certain nombre d’autres amendements seraient proposés pour renforcer le débat contradictoire en matière de détention provisoire dans le souci de protéger les libertés individuelles.

M. Arnaud Montebourg a fait savoir qu’il n’avait jamais exprimé son soutien à la proposition de loi présentée par M. Alain Tourret en avril 1998, se déclarant opposé à l’utilisation de seuils pour lutter contre les excès de la détention provisoire. Jugeant que le recours à ce procédé constituait un moyen trop uniforme et trop aveugle pour réellement contrecarrer les effets pervers de la mise en détention, il a ajouté qu’ils auraient également pour conséquence d’empêcher la détention dans un certain nombre de cas relevant des délits économiques et financiers. Il a précisé qu’il n’était pas, par principe, opposé à la détention provisoire, jugeant qu’il s’agissait d’un instrument judiciaire à préserver, dès lors qu’elle ne donnait pas lieu à des excès, insistant sur le fait qu’il ne fallait pas totalement déstabiliser l’appareil répressif. M. Alain Tourret a jugé que l’argument avancé par M. Arnaud Montebourg au sujet des délits économiques et financiers n’avait guère de fondement, puisque la plupart d’entre eux étaient punis d’une peine d’au moins cinq années d’emprisonnement, sauf en ce qui concerne l’abus de confiance. Il a fait savoir qu’il réserverait son vote sur le projet de loi en fonction de l’accueil fait à sa proposition. M. Jean-Pierre Michel a indiqué qu’il soutiendrait cet amendement, regrettant le changement d’attitude du groupe socialiste sur ce sujet. Il a insisté sur la nécessité de créer des seuils objectifs afin de limiter strictement la pratique de la détention provisoire qui, la plupart du temps, apparaît inutile. Constatant que la discussion sur cette question était riche, le rapporteur a observé qu’une solution médiane pourrait peut-être être trouvée d’ici le passage en séance publique, soulignant qu’en tout état de cause, ce débat méritait une réflexion approfondie. Mme Frédérique Bredin s’est réjouie de l’ouverture faite par le rapporteur, estimant en effet nécessaire de poursuivre la discussion sur cette question. MM. Louis Mermaz et Jean Codognès ont fait savoir qu’ils ne participeraient pas au vote sur cet amendement, espérant que le débat permettrait d’aboutir à un accord. La Commission a rejeté l’amendement de M. Alain Tourret, de même que l’amendement de M. Pierre Albertini modifiant le seuil de la peine de prison encourue pour justifier une détention provisoire.

—  Article 144 du code de procédure pénale : Motifs justificatifs :

La Commission a rejeté l’amendement n° 41 présenté par M. André Gerin supprimant le motif de troubles à l’ordre public pour justifier le placement en détention provisoire. Elle a également rejeté un amendement de M. Pierre Albertini prévoyant que seul le procureur de la République peut apprécier la réalité du trouble exceptionnel à l’ordre public justifiant une mise en détention provisoire. M. Patrick Devedjian a souligné qu’il était normal que la notion d’ordre public soit appréciée par le procureur et non par le juge d’instruction. Estimant que le parquet, devenu aujourd’hui indépendant, n’aurait plus de légitimité à invoquer l’ordre public, M. Robert Pandraud a fait savoir qu’il s’abstiendrait sur cet amendement. Puis la Commission a adopté un amendement du rapporteur excluant que le motif d’ordre public soit invoqué pour une prolongation de la détention provisoire en matière correctionnelle, cette possibilité étant maintenue lorsque le prévenu encourt une peine criminelle. Le rapporteur a indiqué que cet amendement rapprochait le droit positif français de la convention européenne des droits de l’homme. Mme Frédérique Bredin a souhaité qu’on envisage également la disparition du motif d’ordre public pour la mise en détention provisoire initiale en matière correctionnelle. M. Alain Tourret a fait connaître son accord sur ce dispositif qu’il avait lui-même proposé en avril dernier. Puis la Commission a rejeté un amendement de M. Alain Tourret qui, ayant un objet identique, a été considéré comme satisfait.

La Commission a adopté l’article 15 ainsi modifié.

Article 16 (art. 145-1 du code de procédure pénale) : Durée de la détention en matière correctionnelle :

La Commission a rejeté un amendement de M. Pierre Albertini confiant, en matière correctionnelle, la décision de prolongation de la détention provisoire à la Chambre d’accusation. Elle a ensuite été saisie d’un amendement présenté par le rapporteur permettant de fixer des durées de détention provisoire maximales en matière correctionnelle, prolongées éventuellement lors de délivrance de commission rogatoire internationale. Estimant qu’un tel amendement présentait une avancée importante, notamment au regard de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme, Mme Frédérique Bredin a déploré les temps de détention provisoire actuellement constatés. Elle a ajouté que les possibilités de prolongation en cas de commission rogatoire internationale permettraient de faire face aux lourdeurs inhérentes à cette procédure. M. Jean-Pierre Michel a approuvé la teneur de cet amendement, qui fonde sur des critères objectifs la durée de la détention provisoire, regrettant cependant que le problème du nombre de placements en détention provisoire ne soit pas abordé. Il s’est élevé en revanche contre le fait que la détention provisoire puisse être plus longue lorsque la personne mise en examen est récidiviste, estimant qu’une telle disposition constituait une atteinte au principe de la présomption d’innocence. M. Alain Tourret a considéré que la possibilité de prolonger la détention provisoire en cas de commission rogatoire internationale soulevait un réel problème, dès lors que la délivrance d’une telle commission pouvait être décidée à tout moment par le juge, sans qu’aucun contrôle ne soit exercé sur cette décision. Mme Frédérique Bredin a reconnu que les dispositions introduites pour les récidivistes pouvaient susciter des interrogations puisqu’elle introduisait dans la décision du juge un critère, non plus objectif, mais subjectif tenant à la personne mise en examen. Tout en écartant l’idée que les juges puissent utiliser les dispositions relatives aux commissions rogatoires internationales pour prolonger, de manière détournée, la durée des détentions provisoires, elle a admis qu’il conviendrait de mieux définir les affaires complexes sur la base d’éléments objectifs susceptibles d’être contrôlés précisément par les chambres d’accusation. Elle a ajouté qu’en l’état, l’amendement présentait une avancée par rapport au droit existant, notamment dans un contexte de délits financiers internationaux en augmentation, et permettrait de concilier efficacité de la procédure et présomption d’innocence. Revenant sur les objections formulées à l’encontre des dispositions concernant les récidivistes, M. Arnaud Montebourg a précisé que, dans les faits, le juge prenait déjà en compte, avant de décider la mise en détention provisoire, la personnalité du mis en examen et son éventuel passé judiciaire. Estimant que, dans les cas de délivrance de commission rogatoire internationale, il reviendrait aux chambres d’accusation de contrôler, au cas par cas, les conditions de délivrance, il a considéré que le texte proposé laissait une souplesse indispensable. Soulignant que la détention provisoire constituait une forme de précondamnation, ce qui est attesté par le fait que sa durée est décomptée de la condamnation finale, M. Patrick Devedjian s’est inquiété des dispositions relatives aux commissions rogatoires internationales, jugeant néfaste qu’une durée de détention soit soumise à des aléas de procédure et à la capacité de l’accusation à avancer dans ses investigations. Il a regretté que les droits de la défense ne puissent s’exercer de la même manière lors du débat sur le placement en détention provisoire qu’à l’occasion du prononcé de la peine définitive. La Commission a adopté l’amendement présenté par le rapporteur donnant une nouvelle rédaction à l’article 16, ce qui a rendu sans objet l’amendement n° 42 de M. André Gerin limitant à un an la durée de la détention provisoire en matière correctionnelle.

Article 17 (art. 145-2 du code de procédure pénale) : Durée de la détention provisoire en matière criminelle :

La Commission a rejeté un amendement de M. Pierre Albertini confiant, en matière criminelle, la décision de prolongation de la détention provisoire à la chambre d’accusation ; elle a ensuite rejeté deux amendements, l’un, n° 43 présenté par M. André Gerin, l’autre présenté par M. Philippe Houillon, ayant pour objet de limiter la durée de la détention provisoire en matière criminelle, au profit d’un amendement, présenté par le rapporteur, permettant de fixer des dates butoirs plus strictes que celles proposées par le projet, qu’elle a adopté. Elle a ensuite été saisie d’un amendement de M. Alain Tourret substituant à la disposition, prévue dans le projet, qui écarte toute durée maximale de détention provisoire lorsque la personne mise en examen est soupçonnée de plusieurs crimes, une autre maintenant cette exception dans le seul cas de récidive. M. Alain Tourret a constaté que cette disposition méconnaissait la procédure qui consiste, en cas de pluralité des crimes, à traiter séparément chaque affaire. Le rapporteur ayant admis qu’il convenait de mieux définir la notion de pluralité de crimes, la Commission a adopté l’amendement de M. Alain Tourret ainsi que l’article 17 ainsi modifié.

Avant l’article 18 :

La Commission a examiné un amendement de M. Alain Tourret ayant pour objet d’aligner les quantums de peine applicables aux placements en détention provisoire dans le cadre d’une comparution immédiate sur ceux fixés dans le cadre d’une instruction. Le rapporteur ayant indiqué que cette disposition devait faire l’objet d’une coordination avec les dispositions retenues sur les seuils, la Commission a rejeté cet amendement.

Article 18 (art. 141-3 du code de procédure pénale) : Prolongation de la détention provisoire en cas de révocation du contrôle judiciaire :

La Commission a adopté deux amendements du rapporteur, l’un supprimant une mesure de coordination figurant déjà à l’article 33, l’autre permettant de limiter à quatre mois la durée de détention provisoire en cas de révocation du contrôle judiciaire. Elle a adopté l’article 18 ainsi modifié.

Article 19 (art. 149 et 149-2 du code de procédure pénale) : Indemnisation à raison d’une détention provisoire :

Après avoir rejeté un amendement de M. André Gerin instaurant un recours contre les décisions de la commission d’indemnisation des détentions provisoires, la Commission a examiné un amendement du rapporteur améliorant les conditions d’indemnisation afin de réparer le préjudice moral et matériel subi par les personnes ayant fait l’objet d’une détention provisoire au cours d’une procédure terminée par une décision de non-lieu, de relaxe et d’acquittement, tout en excluant la réparation lorsque cette décision résulte de la reconnaissance de leur irresponsabilité pénale, de la prescription ou de l’amnistie ou lorsque les personnes se sont laissées accuser à tort. Mme Frédérique Bredin s’est félicitée de l’indemnisation systématique proposée par l’amendement, mais s’est déclarée plus réservée sur les exceptions prévues, notamment sur l’auto-accusation. M. Jean Codognès s’est également interrogé sur la pertinence des exceptions, faisant valoir que la prescription pouvait s’appliquer à une personne non encore jugée et donc peut-être totalement innocente. Reprenant les propos de M. Jean Codognès, M. Alain Tourret a estimé qu’il serait préférable de laisser les magistrats décider du bien-fondé d’une indemnisation. M. Patrick Devedjian et M. Philippe Houillon se sont également déclarés hostiles aux exceptions. La Commission a néanmoins adopté l’amendement.

La Commission a été saisie d’un amendement de MM. Philippe Houillon et Claude Goasguen prévoyant que la décision de la commission d’indemnisation allouant une indemnité est communiquée aux magistrats du siège ayant concouru à la mise en détention provisoire ou à son maintien, au président de la juridiction concernée ainsi qu’au représentant du parquet. M. Patrick Devedjian a indiqué qu’il avait déposé un amendement n° 33 dont l’objet était plus large, puisqu’il visait aussi la communication des décisions de relaxe et d’acquittement, faisant valoir que les juges d’instruction ignoraient trop souvent les décisions rendues par les juridictions de jugement. M. Jean-Pierre Michel a estimé que les dispositions proposées par M. Patrick Devedjian, aussi justifiées soient-elles, n’étaient pas de nature législative mais relevaient davantage de la circulaire. Tout en approuvant l’esprit de cet amendement, le rapporteur a estimé qu’il n’était pas nécessaire de diffuser cette décision auprès du parquet et a indiqué que l’amendement de M. Alain Tourret ayant un objet similaire, mais limitant la communication de la décision aux magistrats ayant concouru à la mise en détention provisoire ou à son maintien, lui paraissait préférable. La Commission a alors rejeté l’amendement de MM. Philippe Houillon et Claude Goasguen, ainsi que l’amendement n° 33 de M. Patrick Devedjian et adopté, en revanche, l’amendement de M. Alain Tourret, de même que l’article 19 ainsi modifié.

Après l’article 19 :

La Commission a adopté un amendement du rapporteur prévoyant une enquête sur la situation matérielle, familiale ou sociale des personnes placées en détention provisoire dans un délai de deux mois à compter de leur entrée dans la maison d’arrêt. Son auteur a fait valoir que cette enquête permettrait d’avoir tous les éléments nécessaires pour apprécier la nécessité d’une prolongation de la détention provisoire.

La Commission a ensuite été saisie de deux amendements, présentés respectivement par M. Alain Tourret et Mme Frédérique Bredin, tendant à instituer une commission de suivi de la détention provisoire ayant pour mission principale de réunir des données juridiques, statistiques et pénitentiaires concernant la détention provisoire. M. Alain Tourret a indiqué qu’il était actuellement extrêmement difficile d’obtenir des statistiques de la Chancellerie sur cette question. Après que M. Jean-Pierre Michel et le rapporteur eurent souligné que l’amendement de Mme Frédérique Bredin leur paraissait préférable, dans la mesure où il prévoyait la présence au sein de la commission de deux représentants du Parlement, et non d’un seul comme l’amendement de M. Alain Tourret, la Commission l’a adopté. L’amendement de M. Alain Tourret a été retiré.

Avant l’article 20 (art. 75-1 du code de procédure pénale) : Délai des enquêtes préliminaires :

La Commission a adopté un amendement du rapporteur qui prévoit que, lorsque l’enquête est menée sur instruction du procureur de la République, celui-ci fixe le délai à l’issue duquel elle devra être achevée et, lorsqu’elle est déclenchée d’office, les officiers de police judiciaire doivent prendre en compte son état d’avancement tous les quatre mois à compter de la date à laquelle les faits ont été portés à la connaissance de la police. Son auteur a indiqué que cet encadrement de la durée de l’enquête préliminaire, permettrait au ministère public, le cas échéant, d’en accélérer le déroulement.

Article 20 (art. 77-2 et 77-3 [nouveaux] du code de procédure pénale) : Délai raisonnable en matière d’enquêtes de police judiciaire :

—  Article 77-2 (nouveau) du code de procédure pénale : Durée de l’enquête :

La Commission a adopté un amendement de coordination de Mme Frédérique Bredin avec l’amendement limitant la garde à vue aux seuls suspects, ainsi que deux amendements du rapporteur, l’un d’ordre rédactionnel et l’autre réduisant de huit à six mois le délai au-delà duquel une personne ayant fait l’objet d’une garde à vue qui n’a été suivie d’aucune procédure peut saisir le procureur de la République. La Commission a ensuite été saisie d’un amendement de M. Alain Tourret supprimant les dispositions qui prévoient la saisine du tribunal de grande instance par le procureur de la République. Son auteur a souligné la complexité du dispositif proposé par le projet de loi, jugeant préférable de prévoir une simple réponse par le procureur de la République. Après que le rapporteur eut fait valoir que le projet de loi permettait d’assurer un contrôle de l’enquête par le président du tribunal de grande instance, la Commission a rejeté l’amendement. Elle a, en revanche, adopté deux amendements du rapporteur permettant au procureur de la République de prononcer une mesure alternative aux poursuites à l’encontre de la personne qui n’a fait l’objet d’aucune procédure après avoir été gardée à vue. Elle a également adopté un amendement de Mme Frédérique Bredin supprimant la référence au bon déroulement de l’enquête des exceptions susceptibles de justifier le refus de publicité du débat contradictoire devant le président du tribunal de grande instance et prévoyant une motivation de la décision de ce dernier sur la demande de publicité. Elle a enfin rejeté un amendement de coordination de M. Alain Tourret.

Puis elle a adopté l’article 20 ainsi modifié.

Article 21 (art. 89-1, 116, 175-1, 186-1, 207 et 207-1 du code de procédure pénale) : Délai raisonnable de l’information :

La Commission a rejeté un amendement de M. Alain Tourret prévoyant la saisine de la chambre d’accusation deux ans après la date d’ouverture de l’instruction, celle-ci pouvant, par une décision spécialement motivée, autoriser la poursuite de l’information pour un nouveau délai qui ne pourra excéder un an. Un amendement de MM. Philippe Houillon et Claude Goasguen, ayant un objet similaire, sans toutefois prévoir de délais-butoir, a été retiré.

La Commission a alors adopté un amendement du rapporteur proposant une nouvelle rédaction de l’article, afin de prévoir, à l’issue d’un délai d’un an en cas de délit ou de dix-huit mois en cas de crime, la possibilité pour les parties, lorsque l’information n’est pas close, de saisir le juge d’instruction qui devra alors transmettre le dossier au président de la chambre d’accusation. Son auteur a indiqué que ce dernier pourrait alors, soit accorder un délai supplémentaire de six mois, soit saisir la chambre d’accusation qui pourra, à son tour, soit clôturer l’affaire, soit accorder un nouveau délai d’un an en matière délictuelle ou de dix-huit mois en matière criminelle. Elle a fait valoir que cette proposition, sans fixer des délais-butoir d’instruction qui pourraient conduire à des situations absurdes, permettrait à la chambre d’accusation d’assurer un suivi plus rigoureux des instructions anormalement longues. Les amendements de M. Alain Tourret supprimant les dispositions sur les délai prévisionnels donnés par le juge d’instruction sont devenus sans objet, ainsi que les amendements de Mme Frédérique Bredin, l’un de précision, l’autre prévoyant que le juge d’instruction statue par ordonnance spécialement motivée sur la poursuite de l’information.

La Commission a ensuite rejeté un amendement présenté par Mme Frédérique Bredin prévoyant que la décision de prolongation de l’instruction par le président de la chambre d’accusation doit être spécialement motivée. Puis elle a adopté l’article 21 ainsi modifié.

Après l’article 21 :

La Commission a adopté un amendement de Mme Frédérique Bredin associant les victimes au déroulement de l’information en obligeant le juge d’instruction à les informer, tous les six mois, de l’état d’avancement de la procédure. Puis, elle a adopté un amendement de MM. Philippe Houillon et Claude Goasguen associant les officiers de police judiciaire chargés de l’exécution d’une commission rogatoire et les experts à l’évaluation de la durée de leur mission. L’amendement de Mme Frédérique Bredin ayant un objet similaire a été considéré comme satisfait.

La Commission a ensuite adopté deux amendements du rapporteur, le premier instituant un délai d’audiencement maximal de six mois pour les délits, le second un délai maximal de deux ans en matière criminelle. En conséquence, les amendements de MM. Alain Tourret et Philippe Houillon, visant à réduire la durée de la détention provisoire après le passage devant la chambre d’accusation, sont devenus sans objet. Puis le rapporteur a présenté un amendement instituant une commission paritaire composée de magistrats du siège et du parquet en vue de définir l’organisation de l’audiencement dans les tribunaux de grande instance et de répondre aux dysfonctionnements constatés dans ces juridictions. M. Philippe Houillon a approuvé l’esprit de cette disposition nouvelle, tout en soulignant qu’elle ne résoudrait pas les problèmes d’organisation des juridictions qui s’expliquent par la capacité du parquet à choisir, en pratique, le juge saisi de l’affaire. La Commission a adopté l’amendement du rapporteur.

Elle a ensuite été saisie d’un amendement de M. Alain Tourret, tendant à préciser la durée des délais de prescription des délits. Son auteur a considéré qu’il convenait d’instituer un délai de prescription d’un an, courant à compter de tout acte d’instruction devant lui-même intervenir dans le délai de trois ans à compter de la date des faits, afin d’éviter la prolongation indue des procédures judiciaires. Il a, par ailleurs, estimé qu’il était nécessaire de mettre un terme aux hésitations de la jurisprudence de la chambre criminelle de la Cour de cassation en matière de prescription des délits d’abus de biens sociaux. Indiquant qu’il avait recueilli l’avis de magistrats et de commissaires de police spécialisés dans la lutte contre la corruption, il a jugé qu’une limitation du délai maximal de prescription à six ans, à compter du jour où les faits ont été commis, était satisfaisante, faisant observer qu’il était anormal que le délai de prescription applicable à un délit soit équivalent à celui applicable aux crimes contre l’humanité et ajoutant que ce délai de six ans n’aurait pas fait obstacle aux enquêtes en cours sur les affaires de corruption. Le rapporteur et Mme Frédérique Bredin ont, pour leur part, indiqué que cette disposition ne trouvait pas sa place dans un projet de loi consacré à la présomption d’innocence et aux droits des victimes et qu’il était, par ailleurs, trop complexe pour être réglé de la sorte. En conséquence, la Commission a rejeté cet amendement.

Article 22 (art. 226-30-1 [nouveau] du code de procédure pénale) : Interdiction de publier l’image d’une personne portant des menottes ou de réaliser un sondage sur la culpabilité d’une personne mise en cause :

La Commission a adopté un amendement de Mme Nicole Catala modifiant l’intitulé du titre de la section VII du code pénal pour y introduire une référence à la notion de dignité. Puis elle a adopté un amendement du rapporteur corrigeant une erreur matérielle. Elle a ensuite été saisie d’un amendement de Mme Nicole Catala, instituant une peine d’amende de 100 000 F à l’encontre des personnes diffusant l’image d’individus mis en cause à l’occasion d’une procédure pénale et n’ayant pas encore fait l’objet d’un jugement de condamnation. M. Philippe Houillon a souligné que cet amendement aurait pour effet de renforcer le secret de l’instruction, puisqu’il allait au-delà de l’interdiction de la diffusion d’images de personnes menottées ou entravées. Il a regretté que le projet de loi n’aborde pas davantage le problème du respect du secret de l’instruction. M. Jean-Pierre Michel a estimé que cet amendement améliorerait le dispositif proposé par le Gouvernement en permettant une meilleure protection de la présomption d’innocence. M. Patrick Devedjian a, pour sa part, fait observer que cet amendement créait une infraction qui n’était pas définie d’une manière suffisamment précise. Le rapporteur a également jugé que cet amendement ne respectait pas le principe de légalité des peines et qu’il était, de ce fait, contraire à la déclaration des droits de l’homme et du citoyen et à la jurisprudence du Conseil constitutionnel. La Commission a rejeté cet amendement.

Elle a ensuite examiné un amendement de M. Alain Tourret, portant de 100 000 à 500 000 F le montant de l’amende applicable aux personnes diffusant des images de nature à porter atteinte à la présomption d’innocence et à 1 000 000 F le montant encouru en cas de récidive. Celui-ci a indiqué que le plafond des amendes devait être augmenté pour tenir compte des moyens financiers colossaux dont disposent certains organes de presse. M. Patrick Devedjian a émis des doutes sur l’opportunité de pénaliser cette matière en indiquant que la procédure civile devait suffire pour que les victimes obtiennent réparation du préjudice subi. Prolongeant sa réflexion, il a considéré qu’il était immoral que l’Etat gagne de l’argent en percevant des amendes et qu’il était illogique de mélanger compassion et répression. La Commission a rejeté cet amendement. Elle a, en revanche, adopté un amendement de Mme Frédérique Bredin, portant à 200 000 F l’amende applicable aux personnes ayant diffusé des images portant atteinte à la présomption d’innocence. Puis elle a rejeté un amendement de Mme Nicole Catala, tendant à réprimer la publication ou la diffusion de documents couverts par le secret de l’enquête et de l’instruction. Elle a enfin adopté un amendement du rapporteur, rappelant que les autorités ne doivent imposer que dans des circonstances exceptionnelles, définies de manière limitative, le port de menottes.

Article 23 (art. 13 de la loi du 29 juillet 1881 et art. 6 de la loi du 29 juillet 1982) : Droit de réponse exercé par le ministère public :

La Commission a été saisie de trois amendements identiques tendant à la suppression de l’article, le premier, n° 27 de M. Patrick Devedjian, le deuxième de M. Philippe Houillon, le troisième de M. Pierre Albertini. M. Patrick Devedjian a fait part de son hostilité de principe à ce qu’il est convenu d’appeler les « fenêtres de publicité », considérant qu’il était aberrant de confier à l’accusation la mission d’assumer le droit de réponse des personnes accusées mises en cause. Il a jugé qu’il serait préférable de confier cette fonction à un magistrat du siège. La Commission a rejeté ces trois amendements. Elle a, en revanche, adopté un amendement de M. Alain Tourret donnant une nouvelle rédaction à l’article 23, qui supprime la possibilité pour l’accusé mis en cause par la presse de demander au ministère public d’exercer à sa place un droit de réponse, tout en maintenant les dispositions portant à trois mois le délai du droit de réponse en cas de non-lieu, de relaxe ou d’acquittement. En conséquence, l’amendement de même nature du rapporteur est devenu sans objet, ainsi que l’amendement de Mme Frédérique Bredin, visant à rendre automatique l’intervention du ministère public en cas de demande d’un droit de réponse par une personne mise en cause dans une procédure judiciaire, de même que l’amendement du rapporteur précisant le régime des délais applicables en la matière.

Après l’article 23 ( article 9-1 du code civil) : Publication d’un communiqué en cas d’atteinte à la présomption d’innocence :

La Commission a adopté un amendement de Mme Frédérique Bredin, étendant le droit à la présomption d’innocence aux personnes qui, sans être directement concernées par la procédure, sont présentées publiquement comme pouvant être coupables de faits donnant lieu à enquête ou instruction judiciaire. M. Alain Tourret s’est félicité de l’adoption de cet amendement, soulignant qu’il rejoignait une proposition de loi qu’il avait lui-même déposée sur le sujet.

Article 24 (art. 64 de la loi du 29 juillet 1881) : Arrêt de l’exécution provisoire d’une décision tendant à limiter la diffusion de l’information :

La Commission a adopté l’amendement de précision n° 28 de M. Patrick Devedjian puis l’article 24 ainsi modifié.

Avant l’article 25 :

La Commission a rejeté un amendement de M. Pierre Albertini limitant la portée du secret de l’instruction aux personnes qui, concourant à la procédure, sont tenues au secret professionnel.

Article 25 (art. 11, 145, 177-1, 199, 199-1, 212-1 et 803 du code de procédure pénale) : « Fenêtres de publicité » dans la procédure pénale :

La Commission a tout d’abord été saisie d’un amendement de M. Philippe Houillon proposant une nouvelle rédaction de cet article afin de supprimer le secret de l’instruction. Celui-ci a estimé que le maintien du secret de l’instruction, même assorti de « fenêtres de publicité », conduisait à pérenniser une hypocrisie qui ne correspondait plus à la réalité de la pratique judiciaire, soulignant, en outre, que les délais de la justice apparaissaient peu compatibles avec le besoin immédiat d’informations. M. Alain Tourret a estimé que le secret de l’instruction n’était, en fait, jamais assuré dans les affaires importantes et médiatiques, dans la mesure où il n’est pas opposable aux personnes mises en examen. Après avoir jugé difficile sa disparition complète, alors même qu’il contribue à protéger la présomption d’innocence, tout en reconnaissant qu’on ne pouvait pas interdire aux personnes mises en examen de faire des communications, il a néanmoins considéré que la situation actuelle était absurde, puisque le secret de l’instruction prévu par le code de procédure pénale n’était pas respecté et que ses violations n’étaient pas sanctionnées. M. Patrick Devedjian a fait valoir qu’on ne pouvait évidemment pas empêcher une personne mise en examen de procéder à des déclarations pour faire part de son innocence et a considéré que les réflexions sur l’évolution du secret de l’instruction conduiraient inévitablement à mettre en place une procédure accusatoire pour garantir une information transparente et loyale, préférable aux errements actuels. Après que le rapporteur, reconnaissant qu’il n’y avait pas de solution idéale, eut indiqué que le projet de loi proposait néanmoins un dispositif équilibré reposant sur le maintien du secret de l’instruction, tempéré par des rendez-vous périodiques de publicité permettant à chacune des parties d’effectuer des déclarations et de faire valoir son point de vue, la Commission a rejeté cet amendement, ainsi qu’un amendement de M. Philippe Houillon aggravant les sanctions en cas de violation du secret de l’instruction, après que son auteur eut précisé qu’il fallait choisir clairement entre la suppression du secret de l’instruction s’il apparaissait inutile, indiquant que telle était, en fait, son opinion, ou son strict respect, s’il était nécessaire, ce qui impliquait de sanctionner lourdement ses violations.

Après avoir rejeté l’amendement n° 29 de M. Patrick Devedjian supprimant les communiqués du procureur de la République, la Commission a adopté un amendement du rapporteur encadrant strictement leur pratique, Mme Frédérique Bredin ayant toutefois exprimé ses réserves sur le principe de ces communiqués, tout en reconnaissant que l’amendement proposé permettrait d’éviter les dérapages. Elle a ensuite adopté un amendement de Mme Frédérique Bredin limitant les communiqués du parquet aux éléments objectifs de la procédure et excluant les mentions nominatives, après que M. Alain Tourret eut souhaité connaître les sanctions en cas de non-respect de ces obligations et que Mme Frédérique Bredin eut précisé, en réponse, que la violation de ces dispositions pouvait entraîner la mise en jeu de la responsabilité civile et disciplinaire du magistrat. En raison des votes précédemment émis par la Commission, deux amendements de M. Philippe Houillon et de M. Alain Tourret supprimant les dispositions permettant au procureur de parler au nom de la juridiction de l’instruction sont devenus sans objet.

La Commission a ensuite adopté un amendement présenté par Mme Frédérique Bredin prévoyant que le critère du bon déroulement de l’information ne peut plus être invoqué pour empêcher la publicité de l’audience devant le juge de la détention provisoire. Elle a, en revanche, rejeté l’amendement n° 30 de M. Patrick Devedjian et un amendement de M. Philippe Houillon supprimant l’ensemble des exceptions à la publicité des audiences, M. Philippe Houillon ayant estimé que les règles applicables au stade de l’audience du jugement devaient être étendues au niveau de l’instruction, tandis que le rapporteur soulignait, au contraire, que certaines situations objectives, tenant notamment à la dignité de la personne ou à l’intérêt des tiers, pouvaient justifier le refus de publicité. La Commission a ensuite adopté un amendement de M. Philippe Houillon prévoyant que le juge de la détention provisoire statue sur la demande de publicité par ordonnance motivée.

La Commission a ensuite adopté un amendement de Mme Frédérique Bredin précisant que le critère du bon déroulement de l’information ne pourra plus être invoqué pour empêcher la publicité de l’audience devant la chambre d’accusation, ainsi qu’un amendement du rapporteur indiquant que l’avocat de la personne mise en examen devra pouvoir demander la publicité des débats devant cette même chambre ; elle a, en revanche, rejeté l’amendement n° 31 de M. Patrick Devedjian supprimant l’ensemble des exceptions à la publicité des débats, puis, adopté un amendement du rapporteur maintenant la possibilité pour les parties civiles d’obtenir la publicité des débats en cas d’appel d’une ordonnance de non-lieu motivée par l’irresponsabilité pénale de l’auteur de l’infraction, ainsi qu’un amendement de coordination du même auteur. Elle a adopté l’article 25 ainsi modifié.

TITRE II
DISPOSITIONS RENFORÇANT LES DROITS DES VICTIMES

Article 26 (art. 226-30-1 [nouveau] du code pénal) : Atteinte à la dignité de la victime d’un crime ou d’un délit :

La Commission a été saisie de l’amendement n° 44 de M. Patrick Devedjian visant à supprimer le I de cet article, qui sanctionne le fait de diffuser la reproduction des circonstances d’un crime ou délit lorsqu’elle porte atteinte à la dignité de la victime. Considérant que l’« atteinte à la dignité de la victime » était une notion floue, son auteur a jugé qu’il fallait s’en tenir aux dispositions du code civil qui sont très réparatrices. Le rapporteur a indiqué que l’article 26 n’introduisait pas de nouvelles mesures, mais ne faisait que reprendre, en la précisant, une disposition qui figure actuellement dans la loi sur la presse. La Commission a rejeté l’amendement n° 44 de M. Patrick Devedjian, de même qu’un amendement de M. Alain Tourret portant l’amende punissant la diffusion de la reproduction des circonstances d’un crime ou d’un délit de 100 000 F à 500 000 F. Elle a, en revanche, adopté un amendement du rapporteur complétant le I de cet article pour intégrer dans le code pénal les dispositions de la loi sur la presse sanctionnant le fait de diffuser des renseignements concernant l’identité d’une victime d’une agression ou atteinte sexuelle.

La Commission a adopté l’article 26 ainsi modifié.

Article 27 (art. 227-24-1 [nouveau] du code pénal) : Interdiction de publier l’identité d’un mineur victime d’une infraction :

La Commission a adopté un amendement présenté par le rapporteur intégrant également dans le code pénal les dispositions de la loi sur la presse relatives à l’interdiction de diffusion de l’image d’un mineur victime d’une infraction, puis rejeté un amendement de M. Alain Tourret accroissant le montant des amendes encourues en cas d’atteinte à la vie privée. Elle a ensuite adopté l’article 27 ainsi modifié.

Après l’article 27 :

La Commission a adopté un amendement du rapporteur introduisant dans le code pénal les dispositions de la loi de 1881, qui interdisent de révéler l’identité des mineurs en cas de fugue ou de suicide. Puis elle a été saisie de l’amendement n° 34 de M. Patrick Devedjian autorisant la présence d’une caméra fixe lors des audiences de jugement. Précisant que cette faculté existait déjà dans de nombreux pays, M. Patrick Devedjian a insisté sur les vertus civiques de la publicité des procès, rappelant que la justice était rendue au nom du peuple français. Le rapporteur s’est inquiété des conséquences d’une telle mesure, notamment pour les victimes qui se retrouveraient livrées à la curiosité du public. Tout en reconnaissant l’intérêt civique des procès filmés, elle a considéré qu’il fallait adopter une démarche inverse, ayant pour objet d’accroître la protection de la victime afin de lui éviter tout nouveau traumatisme. Après avoir rappelé que, dans la grande majorité des cas, les victimes se font représenter au procès, M. Patrick Devedjian a observé que les procès étaient déjà publics. M. Alain Tourret a estimé qu’un problème pouvait aussi se poser pour les personnes relaxées et a conclu que l’enregistrement vidéo des procès ne devait être possible qu’en cas d’accord exprimé par toutes les parties. La Commission a rejeté l’amendement n° 34, ainsi que l’amendement n° 36 du même auteur prévoyant un enregistrement sonore des procès.

Puis, elle a examiné deux amendements ayant le même objet, le premier présenté par M. Alain Tourret et le second par Mme Frédérique Bredin, donnant au juge d’instruction la possibilité de constituer un dossier sur la victime, afin d’évaluer l’ampleur du préjudice subi. Le rapporteur ayant précisé que la rédaction de l’amendement de Mme Frédérique Bredin lui paraissait préférable puisqu’il prévoyait l’accord de la victime pour la constitution du dossier, la Commission a adopté l’amendement de Mme Frédérique Bredin et rejeté celui de M. Alain Tourret. Elle a ensuite été saisie de trois amendements, présentés respectivement par MM. Alain Tourret, Philippe Houillon et Pierre Albertini, ayant pour objet de mieux informer la victime de ses droits et notamment des possibilités de saisine de la commission d’indemnisation des victimes d’infraction. Le rapporteur ayant indiqué qu’elle avait présenté un amendement sur le sujet après l’article 28, la Commission a rejeté ces amendements.

Article 28 (art. 41 du code de procédure pénale) : Rôle des associations d’aide aux victimes :

La Commission a adopté un amendement présenté par M. Pierre Albertini ayant pour objet de conventionner de plein droit les associations d’aides aux victimes reconnues d’utilité publique, puis adopté l’article 28 ainsi modifié.

Après l’article 28 : Information des victimes sur leurs droits dès le début de l’enquête :

La Commission a adopté un amendement présenté par le rapporteur permettant, dès le début de l’enquête, une meilleure information des victimes sur leur droit à obtenir réparation du préjudice subi.

Avant l’article 29 (art. 80-2 du code de procédure pénale) : Information des victimes sur leur droit de se porter partie civile dès le début de l’information :

La Commission a adopté un amendement présenté par le rapporteur prévoyant l’information des victimes sur leur droit de se constituer partie civile par le juge d’instruction.

Article 29 (art. 420-1 du code de procédure pénale) : Conditions dans lesquelles la victime d’une infraction peut se constituer partie civile :

La Commission a adopté l’article 29 sans modification.

Article 30 (art. 464 du code de procédure pénale) : Renvoi de la décision sur l’action civile à une audience ultérieure :

La Commission a adopté un amendement présenté par M. Alain Tourret permettant d’accorder de plein droit aux parties civiles le renvoi de l’audience. Puis elle a adopté l’article 30 ainsi modifié.

Article 31 (art. 618-1 [nouveau] du code de procédure pénale) : Remboursement des frais irrépétibles :

La Commission a adopté l’article 31 sans modification.

Après l’article 31 :

La Commission a examiné un amendement du rapporteur ayant pour objet de mieux informer les victimes de leur possibilité de saisir la commission d’indemnisation des victimes d’infraction. M. Alain Tourret a regretté que cet amendement ne prévoie pas, en cas d’absence d’information, que le délai d’un an pour saisir la commission est suspendu. La Commission a cependant adopté cet amendement, ainsi qu’un autre amendement du rapporteur prévoyant que les efforts faits par les personnes détenues pour indemniser leurs victimes sont pris en compte dans l’octroi des réductions de peines supplémentaires ou des libérations conditionnelles.

La Commission a ensuite examiné un amendement présenté par le rapporteur confiant au juge d’application des peines le soin de déterminer les modalités du versement des dommages-intérêts à la victime. Remarquant que les modalités du versement faisaient partie intégrante du droit à réparation des victimes et qu’elles pouvaient en cela constituer grief, M. Patrick Devedjian s’est déclaré défavorable à cette disposition, observant qu’en donnant compétence au juge d’application des peines, elle portait atteinte au principe de la procédure contradictoire. Soulignant que cet amendement ne faisait que reprendre des dispositions déjà prévues par circulaire, le rapporteur a cependant retiré son amendement. Puis, la Commission a adopté un amendement du rapporteur regroupant les dispositions relatives à l’indemnisation des victimes dans un chapitre spécifique. Elle a ensuite adopté un amendement de Mme Frédérique Bredin prévoyant la notification écrite à la victime du classement sans suite par le procureur, ainsi qu’un amendement de M. Alain Tourret prévoyant la prise en charge par l’Etat, des frais irrépétibles en cas de décision de relaxe ou d’acquittement. Elle a également adopté un amendement de M. Alain Tourret supprimant l’obligation faite au prévenu ou à l’accusé de se constituer prisonnier pour faire examiner son pourvoi. Elle a enfin rejeté un amendement présenté par M. André Gerin permettant d’autoriser la révision d’un procès même en l’absence de faits nouveaux, lorsque la demande est légitime.

TITRE III
DISPOSITIONS DE COORDINATION

Article 32 (art. 104, 105, 152 et 183 du code de procédure pénale) : Coordinations liées à la réforme du statut de témoin assisté :

La Commission a adopté un amendement de forme et un amendement de coordination présentés par le rapporteur puis a adopté l’article 32 ainsi modifié.

Article 33 (art. 83, 116, 122, 135, 136, 137, 138, 141-2, 144-1, 145, 145-1, 145-2, 185, 187-1 et 207 du code de procédure pénale) : Coordinations liées à la création d’un juge de la détention provisoire :

La Commission a d’abord repoussé un amendement rédactionnel de M. Pierre Albertini. Elle a ensuite adopté deux amendements de M. Alain Tourret précisant que le juge de la détention provisoire peut décerner mandat de dépôt ou mandat d’arrêt, après que ce dernier eut fait valoir que le mandat d’arrêt valait mandat de dépôt, ainsi qu’un amendement du rapporteur supprimant la référence à la procédure de prise à partie, qui n’existe plus pour les magistrats professionnels. Elle a ensuite adopté deux amendements du rapporteur procédant à la correction d’erreurs matérielles ainsi que deux amendements de coordination du même auteur, et l’article 33 ainsi modifié.

Article 34 (art. 145 du code de procédure pénale) : Coordination liée aux conditions de mise en détention provisoire :

La Commission a adopté un amendement du rapporteur corrigeant une erreur matérielle, puis cet article ainsi modifié.

Articles 35 (art. 420-2 et 460-1 du code de procédure pénale) : Coordinations liées à la simplification des modalités de constitution de partie civile ; 36 (art. 154 du code de procédure pénale) : Coordination des modalités de gardes à vue dans le cadre de commissions rogatoires ; 37 (art. 82 du code de procédure pénale) : Coordination relative aux droits du procureur de la République en cas de demandes d’actes :

La Commission a adopté ces articles sans modification.

Article 38 (art. 4 et 11 de l’ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945) : Coordination avec le droit applicable aux mineurs délinquants :

Après avoir rejeté un amendement rédactionnel de M. Pierre Albertini, la Commission a adopté cet article sans modification.

Article 39 : Délai d’application des dispositions relatives à la détention provisoire :

La Commission a adopté cet article sans modification.

Article 40 : Application dans les territoires d’outre-mer et à Mayotte :

La Commission a adopté un amendement de précision du rapporteur tenant compte du nouveau statut de la Nouvelle-Calédonie, puis cet article ainsi modifié.

Titre :

La Commission a rejeté un amendement de M. Pierre Albertini modifiant l’intitulé du projet de loi.

La Commission a adopté l’ensemble du projet de loi ainsi modifié.

——fpfp——


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