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ASSEMBLÉE NATIONALE

COMMISSION de la PRODUCTION et des ÉCHANGES

COMPTE RENDU N° 13

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mercredi 8 novembre 2000
(Séance de 16 heures 15)

Présidence de M. André Lajoinie, président

SOMMAIRE

 

pages

Projet de loi de finances pour 2001 : Outre-mer

- Audition conjointe avec la commission des lois de M. Christian Paul, secrétaire d'Etat à l'outre-mer

- Avis : Outre-mer


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La Commission a procédé à l'audition de M. Christian Paul, secrétaire d'Etat à l'outre-mer, sur les crédits de son ministère pour 2001.

M. Christian Paul, secrétaire d'Etat à l'outre-mer, a indiqué que le budget qu'il présentait connaissait une progression très satisfaisante de près de 7 %, qui le plaçait en troisième position pour le taux d'augmentation, après les budgets de la ville et de l'environnement. Soulignant qu'il s'inscrivait dans une démarche d'ensemble du Gouvernement tendant au renforcement du soutien à l'outre-mer, il a précisé en particulier qu'à ce titre, il dégageait les moyens nécessaires à la mise en _uvre, dès l'année prochaine, des dispositions du projet de loi d'orientation pourtant encore en discussion devant le Parlement. Ajoutant que d'autres ministères participaient à l'effort consenti par la République en faveur des DOM-TOM, qui marque une augmentation globale de 7,8 % en crédits de paiement, il a insisté sur la contribution toute particulière inscrite au budget de l'emploi pour permettre la mise en _uvre de l'exonération des charges patronales de sécurité sociale votée dans le cadre du projet de loi d'orientation et qui devrait concerner près de 120 000 salariés pour un coût total de 3,5 milliards de francs en année pleine. Il a rappelé, en outre, que l'article 12 du projet de loi de finances pour 2001 tendait à la mise en place d'un nouveau mécanisme de soutien à l'investissement outre-mer se substituant à celui de la « loi Pons » ; il a estimé que, tout en maintenant à un niveau identique le coût fiscal pour l'Etat, ce nouveau dispositif devrait être plus juste et efficace et a souligné qu'il avait d'ores et déjà reçu un accueil favorable de la part des milieux professionnels concernés.

Abordant ensuite la présentation du budget du secrétariat d'Etat à l'outre-mer, il a précisé qu'il s'élevait à 6,8 milliards de francs pour 2001, ce qui représentait, depuis 1998, une augmentation des dotations de 22 % à structure constante. Observant que ce budget était essentiellement un instrument d'intervention économique et social en faveur du développement de l'outre-mer, il a précisé que sa structure se répartissait à raison de 16,5 % pour les dépenses de fonctionnement et de 83,5 % pour les actions économiques et de soutien de l'emploi. Rappelant que le taux de chômage en outre-mer était 2,5 fois supérieur à celui observé en métropole, il a souligné que le soutien à l'emploi et au développement économique représentait la première priorité de son administration et a indiqué, dans cette perspective, que le chapitre budgétaire du fonds à l'emploi dans les départements d'outre-mer augmentait de 25 %, afin de permettre la mise en _uvre des mesures nouvelles prévues par le projet de loi d'orientation. Il a précisé que les crédits du FEDOM pour 2001 permettraient de financer 88 000 actions individuelles pour l'emploi et l'insertion, contre 63 800 cette année. A ce titre, il a relevé qu'une enveloppe de 290 millions de francs était prévue pour permettre l'entrée en vigueur des mesures nouvelles en faveur de l'emploi prévues dans la loi d'orientation : 10 000 projets initiatives jeunes, 3 000 départs en préretraite à 55 ans, 10 000 allocations de retour à l'activité, 1 200 primes à la création d'emplois ainsi que l'inscription de dotations budgétaires suffisantes au fonctionnement des agences départementales d'insertion. Observant que ces mesures nouvelles s'ajoutaient aux dispositifs d'insertion déjà en vigueur cette année, tels que les contrats emplois-solidarité, les contrats d'insertion par l'activité et les contrats d'accès à l'emploi, il a souligné qu'au total près de 13 000 emplois jeunes auront ainsi été créés en outre-mer d'ici à la fin de l'année 2001. C'est pourquoi il a estimé que l'objectif du Gouvernement de parvenir à une baisse du chômage outre-mer était réaliste. Faisant également référence à un autre dispositif qui favorise l'insertion des jeunes, il a indiqué que 900 emplois supplémentaires de volontaires seraient créés en 2001 dans le cadre du service militaire adapté, ce qui devrait porter à 2 000 le nombre total de volontaires.

Evoquant ensuite la politique d'aide au logement, M. Christian Paul a précisé qu'il s'agissait également d'une priorité de l'action de son ministère qui entend faire face aux besoins locaux résultant notamment de l'évolution démographique ultra-marine. Relevant que ce poste budgétaire augmentait de 23 % en autorisations de programme et de 3,5 % en crédits de paiement, il a observé qu'il représentait aussi le deuxième poste de dépenses du budget de l'outre-mer et a estimé qu'il devrait permettre la réhabilitation et la construction d'environ 16 500 logements en 2001, contre 15 760 en 2000.

S'agissant de l'action sociale et culturelle, il a noté que les crédits qui y sont consacrés augmentaient de 23,5 % en 2001, en raison, notamment, de la prise en compte des effets de certaines mesures prévues par le projet de loi d'orientation. A ce titre, il a précisé que 12 millions de francs étaient consacrés au fonds de promotion des échanges éducatifs, sportifs et culturels, tandis que 20 millions étaient affectés aux quatre fonds de coopération régionale institués au bénéfice des quatre départements d'outre-mer. Il a ajouté que 12 millions de francs étaient destinés aux actions de formation et d'insertion dans les territoires d'outre-mer et en Nouvelle-Calédonie ainsi qu'au nouveau programme de formation des cadres de Mayotte. Evoquant ensuite les actions de développement économique menées dans l'outre-mer, il a observé qu'elles augmentaient de 21 % en autorisations de programme compte tenu des effets des contrats de plan et de développement. En outre, il a indiqué que la subvention au fonds d'investissement dans les départements d'outre-mer progressait de 250 millions de francs en crédits de paiement tandis que les dotations allouées au fonds d'investissement pour le développement économique et social augmentaient de 20 % en autorisations de programme. Enfin, il a relevé que les crédits destinés à compenser les transferts de compétences prévus par la loi organique du 19 mars 1999 au profit de la Nouvelle-Calédonie, augmentaient de 16 %.

Pour conclure, le ministre a souligné que le Gouvernement était déterminé à poursuivre l'action entreprise en faveur du développement de l'outre-mer menée en concertation avec l'ensemble de ses élus.

Constatant avec satisfaction la nette progression du budget du secrétariat d'Etat à l'outre-mer par rapport à l'année précédente, qui marque l'attention du Gouvernement aux problèmes spécifiques de l'outre-mer, M. Jérôme Lambert, rapporteur pour avis pour les crédits des départements d'outre-mer pour la commission des Lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, a noté également que cette croissance accompagnait de manière très fidèle les choix ambitieux opérés par la loi d'orientation pour l'outre-mer.

Il a souhaité évoquer aussi, au-delà des simples questions budgétaires, la réforme du dispositif d'aide fiscale à l'investissement, adoptée récemment par l'Assemblée nationale dans le cadre de l'examen du projet de loi de finances. Il a estimé que l'ensemble des dispositions contenues à la fois dans la loi d'orientation pour l'outre-mer, dans la première partie du projet de loi de finances et dans le budget du secrétariat d'Etat à l'outre-mer permettraient de dessiner des orientations nouvelles et ambitieuses pour l'avenir de l'outre-mer.

M. Jean-Yves Caullet, rapporteur pour avis sur les crédits des territoires d'outre-mer et de la Nouvelle-Calédonie pour la commission des Lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, a rappelé que le budget pour l'outre-mer intervenait dans le contexte d'un système de contractualisation des soutiens de l'Etat vers les territoires et la Nouvelle-Calédonie et d'une large autonomie administrative de ses collectivités. Il a constaté avec satisfaction que les crédits inscrits dans le projet de loi de finances pour 2001 étaient à la hauteur des engagements contractuels que l'Etat se doit d'honorer, s'inscrivant ainsi dans une perspective pluriannuelle respectée par les dernières lois de finances. Il a observé également que l'Etat avait donné à la Nouvelle-Calédonie et à la Polynésie française les moyens de financer leur développement, regrettant cependant que la mise en _uvre des contrats de plan ait connu des rythmes différenciés, notamment dans les trois provinces calédoniennes. Sur ce point précis, il a observé que l'insuffisante formation des personnels ou des élus de ces collectivités représentait un facteur limitant pour mener à bien des projets parfois complexes. Afin d'accroître la capacité des services territoriaux, provinciaux et communaux pour concevoir et engager des opérations de développement, il a souhaité que les actions de formation, comme celle mise en place en Nouvelle-Calédonie après 1988, soient développées. Il a également insisté sur la nécessité de prendre en compte les communes dans le cadre des relations entre l'Etat et la Polynésie française. Rappelant que, lors de l'examen à l'Assemblée nationale et au Sénat des propositions de loi relatives à la composition de l'assemblée territoriale de la Polynésie française, les particularités des communes des archipels éloignés avaient été invoquées pour justifier une représentation politique suffisante de ces archipels, il a estimé qu'elles devaient également être prises en compte dans la gestion concrète des communes, qui manquent aujourd'hui d'autonomie. Il a donc souhaité que ces collectivités deviennent des partenaires à part entière, soulignant le rôle essentiel qu'elles doivent jouer pour répondre aux préoccupations les plus concrètes des Polynésiens. Enfin, après avoir constaté que l'Etat mettait à disposition de Wallis et Futuna les moyens financiers nécessaires dans le cadre du contrat de développement, il s'est interrogé sur l'état d'avancement de la réflexion engagée récemment sur l'évolution possible du statut de l'archipel. Il a, en effet, noté qu'à ce jour, aucune proposition n'avait été faite de la part des élus locaux alors que les institutions de Wallis et Futuna, malgré leurs mérites évidents, présentent également de très nettes limites.

M. Claude Hoarau, rapporteur pour avis des crédits de l'outre-mer, a tout d'abord exprimé sa satisfaction de constater que le projet de budget comportait déjà des crédits spécifiques pour mettre en _uvre la loi d'orientation pour l'outre-mer que les députés devraient, très prochainement, adopter définitivement. Rappelant que cette loi d'orientation avait suscité de grandes attentes parmi les populations d'outre-mer, il a jugé très positif que les nouvelles mesures en faveur de l'emploi puissent être concrétisées dès le début de l'année 2001 grâce à des moyens financiers adéquats. Puis soulignant la forte augmentation du budget du secrétariat d'Etat à l'outre-mer ces dernières années, il a estimé que ces moyens financiers considérables lui permettaient d'impulser une politique déterminée en faveur de l'outre-mer et de coordonner les actions menées en matière de développement économique et social par les autres ministères pour une meilleure prise en compte des spécificités et des handicaps structurels des départements d'outre-mer. Il a souligné également que les deux grands axes du budget pour 2001 que sont les aides à l'emploi et la politique d'aide au logement, reflétaient bien les préoccupations majeures des populations des départements d'outre-mer. A ce titre, il a salué la mobilisation opérée en faveur de l'emploi des jeunes, constatant qu'avec 13 000 emplois-jeunes depuis la création du dispositif, un premier pas significatif avait été fait pour faire reculer le chômage des moins de 25 ans.

Abordant ensuite la question du financement de la politique d'aide au logement, il s'est félicité de voir figurer, dès le budget 2001, des crédits spécifiques d'un montant de 250 millions de francs pour compenser la baisse de la créance de proratisation résultant de l'alignement progressif du niveau du RMI dans les départements d'outre-mer sur celui de la métropole. Il a, par ailleurs, souligné l'importance de deux nouveaux dispositifs mis en _uvre pour la loi d'orientation : la création de quatre fonds de coopération régionale permettant aux départements d'outre-mer de mieux s'insérer dans leur environnement et du fonds de promotion des échanges éducatifs, culturels et sportifs, dont l'objectif est de compenser les surcoûts de transport lors des déplacements des clubs sportifs.

M. Claude Hoarau a ensuite souhaité faire part de certaines inquiétudes quant à la future organisation du marché du sucre. A ce titre, il a insisté pour que la France demande aux autorités européennes le maintien du système de quotas sucriers et de garantie des prix. Puis il a évoqué le très vif mécontentement des PME et des travailleurs indépendants, actuellement confrontés à une sévérité accrue des services fiscaux, alors même que la loi d'orientation prévoit des dispositifs d'apurement des dettes fiscales et sociales. Constatant que les financements communautaires ont atteint des niveaux considérables et apportent un soutien très efficace au développement des départements d'outre-mer par le biais des fonds structurels, il a enfin souhaité que la France intervienne auprès des autorités européennes pour obtenir une définition beaucoup plus claire de la notion de région ultrapériphérique. Il lui a paru, en effet, indispensable que soit clairement reconnue la notion de handicaps structurels des départements d'outre-mer qui justifieront, au-delà de la période 2000-2006, des dispositifs dérogatoires au sein de l'Union européenne.

M. Dominique Bussereau a appelé l'attention du ministre sur la situation de plus en plus difficile qui semble prévaloir à Wallis et Futuna. Fondant son jugement sur des éléments recueillis à l'occasion d'une récente mission effectuée en Nouvelle-Calédonie avec M. René Dosière, il s'est demandé si la France, en concentrant ses efforts sur la Nouvelle-Calédonie, d'une part, dans le cadre du suivi des « accords de Matignon », et sur la Polynésie, d'autre part, en application des engagements pris après l'arrêt des essais nucléaires dans le Pacifique, ne prenait pas la responsabilité de laisser se développer une « poche de pauvreté » au milieu de l'océan, à Wallis et Futuna. Il a jugé qu'il n'était plus possible de se désintéresser d'une population qui ne bénéficie d'aucun projet de développement sur son sol et qui tend à émigrer massivement vers la Nouvelle-Calédonie, où elle subit pourtant des phénomènes de rejet croissants. Il a, par ailleurs, souhaité que le ministre se penche sur le dossier des sur-rémunérations que perçoivent les fonctionnaires métropolitains lorsqu'ils choisissent de s'installer, à l'occasion de leur retraite, outre-mer. Il a considéré que ce privilège, dont il avait déjà constaté la réalité l'année dernière à l'occasion d'une mission à la Réunion conduite par Mme Catherine Tasca, soulevait des problèmes éthiques.

Pour sa part, M. Camille Darsières a jugé « correct » le budget du ministère pour les départements d'outre-mer, d'autant que celui-ci s'inscrit dans un contexte général marqué par l'examen d'une très bonne loi d'orientation et la mise en _uvre de mesures fiscales utiles et appréciées des milieux économiques locaux. Il a, néanmoins, dénoncé un manque de transparence de la part des ministères techniques chargés de gérer des crédits qui intéressent les départements d'outre-mer. Il a cité l'exemple du ministère de la santé, qui ne prend pas suffisamment en compte les surcoûts inhérents à la situation particulière des départements d'outre-mer, aussi bien en ce qui concerne l'acheminement des médicaments que la gestion des personnels médicaux, voire les investissements et l'entretien des infrastructures de santé. Il a surtout regretté que le ministère de l'éducation nationale, et plus particulièrement de l'enseignement supérieur, n'apprécie pas convenablement la réalité des efforts qu'il est nécessaire de consentir au profit des départements d'outre-mer, au regard des surcoûts que ces derniers subissent effectivement. Sans nier que des dotations plus importantes soient accordées à l'outre-mer par rapport à celles qui sont attribuées à la métropole, il a considéré qu'elles ne couvraient pas, cependant, les charges qui pèsent sur ces territoires éloignés. Il a regretté l'opacité des procédures mises en _uvre et a recommandé que les crédits relatifs à l'enseignement supérieur outre-mer soient présentés, dès l'année prochaine, sous la forme d'un budget annexe, ou rattachés au budget du ministère des départements d'outre-mer. Il a également souhaité être rassuré sur le devenir du programme communautaire POSEIDOM. Rappelant que celui-ci avait pour ambition de rehausser le niveau de développement des départements d'outre-mer à hauteur de celui qui prévaut dans la région française la moins développée, il s'est étonné que certains envisagent de restreindre ses crédits, alors que cet objectif de rééquilibrage paraît encore très éloigné. Enfin, faisant référence à un récent rapport de la délégation de l'Assemblée nationale pour les affaires européennes sur la situation de la production bananière dans les départements d'outre-mer, il a recommandé un réexamen de « l'aide compensatoire » accordée aux producteurs locaux. Il a jugé que sa réévaluation était indispensable pour préserver leur niveau de vie et, plus généralement, pour garantir un avenir à l'exportation bananière martiniquaise.

M. Ernest Moutoussamy a estimé que le budget des DOM-TOM pour 2001, qui doit être suivi des mesures nécessaires au financement du projet de loi d'orientation pour l'outre-mer, était assez satisfaisant. Exprimant, en outre, son approbation sur la nouvelle politique de communication du ministère de l'éducation nationale en ce qui concerne ses interventions outre-mer, il a, en revanche, regretté le manque d'information sur les interventions budgétaires des autres ministères, formulant le souhait que ceux-ci procèdent, à l'avenir, de la même manière. Par ailleurs, il a jugé souhaitable que l'expérience d'accession différée à la propriété, actuellement conduite dans une partie du parc de logement social, soit pérennisée par le Gouvernement. Il a également souhaité qu'un bilan de la baisse du taux de TVA applicable aux travaux de rénovation des logements soit rapidement tiré. Il s'est ensuite inquiété des conséquences possibles de la baisse des crédits du POSEIDOM, faisant suite à la décision des instances communautaires. Puis, il a interrogé le ministre sur l'avenir de l'usine sucrière de Marie-Galante. Il a également souhaité, qu'à l'instar de la métropole, les services en charge de la sécurité puissent procéder à des écoutes téléphoniques sur les téléphones portables. Enfin, il a manifesté son inquiétude sur l'ouverture éventuelle du marché européen aux productions agricoles des pays les moins avancés, soulignant qu'une telle politique aurait de lourdes conséquences sur la production des départements d'outre-mer.

M. Léo Andy a fait part de sa grande satisfaction à l'égard du budget de l'outre-mer ainsi que du projet de loi d'orientation pour l'outre-mer, pour lequel il a souhaité une publication rapide des décrets d'application. S'agissant de la compensation mise en _uvre par l'Etat pour répondre à la réduction de la créance de proratisation, il a jugé qu'il serait préférable qu'elle soit effectuée en crédits de paiement plutôt qu'en autorisations de programme. Il a ensuite approuvé la décision du ministère de l'éducation nationale d'instaurer un CAPES de créole dans les départements français d'Amérique, tout en s'interrogeant sur le niveau des moyens financiers et humains correspondants. Par ailleurs, observant que de nombreux services publics avaient uniquement un siège en Martinique, il a souhaité qu'ils disposent d'une implantation parallèle en Guadeloupe, afin de faciliter les démarches des usagers. Il a enfin exprimé sa préoccupation devant la baisse envisagée des crédits versés au titre du POSEIDOM.

Rappelant que Mayotte ne bénéficie pas de certains fonds consacrés à l'outre-mer, M. Henry Jean-Baptiste a souhaité, afin d'assurer une meilleure lisibilité de l'effort budgétaire consenti en faveur de cette collectivité territoriale, la création d'un chapitre budgétaire qui lui soit spécifiquement consacré. Faisant observer que le budget du secrétariat d'Etat ne représente que 10 à 12 % de l'effort financier consenti en faveur de l'outre-mer, il a regretté que le fascicule « jaune » publié en annexe au projet de loi de finances qui récapitule l'effort budgétaire et financier consacré à ces collectivités soit publié avec retard et a souhaité une amélioration de son contenu. Soulignant les difficultés que connaît le système sanitaire mahorais, il a, enfin, rappelé son souhait de voir Mayotte bénéficier d'un fonds de coopération régionale grâce auquel pourraient notamment être menées des campagnes de vaccination.

Faisant état de la récente mission qu'il a effectuée en Nouvelle-Calédonie avec M. Dominique Bussereau, M. René Dosière a tout d'abord approuvé les observations faites par celui-ci sur la situation précaire de Wallis et Futuna, avant d'appeler l'attention du ministre sur le fait que cet archipel est toujours débiteur du centre hospitalier de Nouméa qui a, par ailleurs, des besoins. Il a, ensuite, exprimé le souhait que le Gouvernement adapte les modalités de recrutement du personnel surveillant de la prison de Nouméa afin que celui-ci ne soit pas exclusivement européen alors que la population détenue est majoritairement kanak. Puis, il a demandé des précisions sur l'application des dispositions de la loi organique du 19 mars 1999 relatives à la titularisation des personnels du haut-commissariat. Par ailleurs, il a fait observer que le décalage existant entre les rythmes scolaires de la métropole et de Nouvelle-Calédonie suscitait d'importantes difficultés, tant pour les étudiants kanak désireux de poursuivre leur scolarité en métropole que pour le personnel de l'éducation nationale affecté dans les établissements de la Nouvelle-Calédonie. Enfin, il a dénoncé la possibilité pour les fonctionnaires prenant leur retraite dans un territoire d'outre-mer de bénéficier d'un doublement de leur pension, estimant que ce dispositif ne répondait à aucune justification et avait une forte connotation coloniale.

Après avoir souligné la nécessité d'avoir une vision plus claire de la totalité des crédits consacrés aux départements d'outre-mer par l'ensemble des ministères, M. Emile Blessig a estimé que la notion de « région ultrapériphérique », d'origine communautaire, devrait être précisée et que le « jaune » budgétaire consacré aux départements d'outre-mer devrait indiquer le montant des crédits communautaires qui leur sont attribués, dont la pérennité n'est pas assurée.

En réponse aux différents intervenants, le ministre a apporté les éléments d'information suivants :

-  S'il existe effectivement des obstacles dans les territoires d'outre-mer et en Nouvelle-Calédonie pour l'exécution des contrats de développement, on constate cependant que le taux de consommation des crédits dans ces collectivités est satisfaisant, puisqu'il s'élève à 70 % en moyenne, 72 % en Nouvelle-Calédonie, 76 % à Wallis et Futuna et 89 % en Polynésie française. Ces taux d'exécution pourraient sans doute être améliorés en développant la formation des cadres des collectivités territoriales. C'est pourquoi, en Nouvelle-Calédonie, un second programme de formation va être engagé, les hauts-commissaires ayant par ailleurs comme instruction de veiller à ce que les crédits inscrits dans les contrats de développement soient effectivement consommés.

-  Mener à bien la réforme communale en Polynésie française est indispensable, puisque les communes de ces archipels connaissent, aujourd'hui encore, un régime de tutelle a priori et des règles électorales dérogatoires au droit commun. La réforme engagée devant le Sénat, au début de la législature, qui est aujourd'hui en suspens, doit être relancée, afin de permettre la constitution d'un maillage des collectivités de proximité dans une géographie polynésienne très atomisée. Une telle démarche, indispensable à la constitution d'un bon équilibre territorial, est l'une des priorités du secrétariat d'Etat. Dans cette perspective, un débat doit s'ouvrir sur la rénovation du fonds intercommunal de péréquation, dont le mécanisme peut paraître trop lourd et trop compliqué.

-  On ne doit pas se désintéresser de l'avenir de Wallis et Futuna. En matière institutionnelle, il est nécessaire de relancer le travail mené conjointement par l'assemblée territoriale, le représentant du Gouvernement et les autorités coutumières. Il est, en tout état de cause, indispensable que d'éventuelles évolutions soient proposées ou acceptées par les principaux intéressés dans l'archipel. En attendant, l'effort de l'Etat à destination de Wallis et Futuna connaît une progression très importante, puisque, dans le prochain contrat de développement, il passe de 58 à 244 millions de francs.

-  La signature d'un accord entre Wallis et Futuna et la Nouvelle-Calédonie, prévu par la loi organique du 19 mars 1999, devrait intervenir d'ici la fin de l'année ou au début de 2001. La mise en ordre de la question de la dette de Wallis et Futuna à l'hôpital de Nouméa est également envisagée à court terme.

-  Concernant l'administration pénitentiaire en Nouvelle-Calédonie, un effort doit être mené pour trouver un équilibre entre les recrutements locaux et nationaux.

-  Les avantages pécuniaires dont bénéficient les fonctionnaires outre-mer varient d'un territoire et d'un département à l'autre en fonction de situations locales spécifiques. Ils se justifient en partie par la nécessité de pourvoir certains postes, ce qui n'est pas toujours aisé, par exemple en Guyane. Néanmoins, on ne peut apporter à ces questions une réponse exclusivement financière, un traitement global étant nécessaire. Pour ce qui concerne les retraites majorées pour les pensionnés de la fonction publique qui s'installent outre-mer, une réflexion doit également être menée conformément à l'éthique républicaine. Ce type d'avantages doit faire l'objet d'un examen précis ; le Gouvernement n'entend nullement s'y soustraire.

-  La situation des hôpitaux de l'outre-mer doit également être traitée rapidement pour faire face à des problèmes criants, notamment en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, en Guyane et à Wallis et Futuna.

- Conformément aux engagements du Gouvernement lors de l'examen de la loi d'orientation, l'effort en faveur du logement dans les départements d'outre-mer est poursuivi, malgré la baisse prévisible des crédits disponibles sur la ligne budgétaire dénommée « créance de proratisation » ; cet effort se traduit par un abondement des crédits afférents au logement en compensation de la diminution de la créance de proratisation due à l'alignement du RMI attribué dans les départements d'outre-mer sur le niveau du RMI métropolitain. Il prend également la forme d'une aide fiscale directe, avec la baisse de la TVA pour le logement social pour un coût de 150 millions de francs.

- La présidence de l'Union européenne par la France a permis de faire avancer l'idée de la reconnaissance d'un statut de région ultrapériphérique pour les départements d'outre-mer ; une rencontre est prévue prochainement avec le commissaire européen compétent sur la question ; cette démarche s'effectue en coordination avec l'Espagne et le Portugal, qui sont également concernés par le sujet des régions ultrapériphériques. Concernant également la question de la place des départements d'outre-mer dans l'Union européenne, le principe d'un doublement du montant global des fonds accordés dans le cadre du document unique de préparation -DOCUP- sur la période 2000-2006 a été adopté. Les inquiétudes exprimées au sujet de la réduction des crédits dans le cadre du programme POSEIDOM ont un fondement tangible, tant la concertation avec les partenaires européens s'annonce difficile. Le Gouvernement français reste néanmoins très vigilant sur le dossier en exigeant le rétablissement des crédits prévus. L'avenir de la production sucrière, dans le cadre des contingents communautaires, soulève, à juste titre, les mêmes inquiétudes. La France, très attachée au dispositif de quotas sucriers mis en place, doit d'abord convaincre ses partenaires européens avant d'affronter l'organisation mondiale du commerce.

- L'expertise des projets d'exploitation de canne à sucre en Guyane n'a pas été menée jusqu'à son terme ; les opinions sur la pertinence de ces projets divergent tant en Guyane que dans les autres départements d'outre-mer ou en métropole. La continuité de l'exploitation de la production sucrière à l'usine de Marie-Galante en Guadeloupe est assurée pour 2001. Un audit juridique et technique sera mené prochainement sur les perspectives d'avenir de cette entreprise.

- S'agissant de la mise en _uvre de la loi d'orientation, le travail d'élaboration des décrets d'application est déjà engagé. Concernant les mesures prévues aux articles 5 et 6 de la loi mettant en place des plans d'apurement des dettes sociales et fiscales, il est injustifié, comme l'ont fait récemment certains sénateurs ou journalistes, de présenter ces mesures comme une « prime à l'incivisme » ou une amnistie fiscale générale pour les départements d'outre-mer. Il s'agit, avec ce dispositif, de proposer un apurement, et en aucun cas un effacement des dettes. La nouvelle lecture à l'Assemblée nationale a permis de clarifier sur ce point la rédaction proposée ; des décrets sont en cours ; d'ores et déjà, des instructions du ministère des finances ont été préparées en tenant compte de la nouvelle rédaction et devront, très prochainement, parvenir aux services fiscaux des départements d'outre-mer.

- La mise en place d'un CAPES de créole nécessite une définition de la teneur de cette formation, avec une intervention de linguistes et de pédagogues, au vu de l'expérience menée à la Martinique et à la Réunion.

- Le document relatif à l'effort de la Nation en faveur des départements d'outre-mer, dénommé « jaune », souffre effectivement d'un manque de lisibilité ; s'il permet de donner une évaluation globale des crédits en direction de l'outre-mer, qui, cette année, connaissent la même progression que les crédits attribués au secrétariat d'Etat à l'outre-mer, ils ne font pas clairement apparaître les montants par département. Ces chiffres sont pourtant indispensables à la bonne information du Parlement, car eux seuls permettent de faire apparaître l'ampleur de l'effort mené en direction des départements d'outre-mer, dans les domaines de l'éducation, de la culture ou de justice. Sur ce dernier point, il s'agit essentiellement, avec le budget prévu pour 2001, de remédier à la situation critique des établissements pénitentiaires dans les départements d'outre-mer, situation qui a été dénoncée par la commission d'enquête parlementaire sur les prisons.

- Il est nécessaire, suivant cette même logique, de rendre plus lisibles, en les individualisant clairement, les dotations concernant Mayotte, d'autant plus qu'un effort considérable a été prévu cette année avec une dotation de 1 milliard de francs affectée à un programme de constructions scolaires. Il est également indispensable de soutenir les actions de coopération régionale menée par la collectivité de Mayotte, tant dans le domaine de la santé qu'en matière économique et technique.

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Après le départ du ministre, la Commission a procédé à l'examen pour avis des crédits du ministère de l'outre-mer pour 2001.

Conformément aux conclusions de son rapporteur pour avis pour l'outre-mer, M. Claude Hoarau, elle a émis un avis favorable à l'adoption des crédits du secrétariat d'Etat à l'outre-mer pour 2001.

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