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ASSEMBLÉE NATIONALE

COMMISSION DE LA PRODUCTION ET DES ÉCHANGES

COMPTE RENDU N° 18

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mercredi 29 novembre 2000
(Séance de 10 heures )

Présidence de M. Pierre Ducout, vice-président

SOMMAIRE

 

pages

- Examen de la proposition de résolution de M. Didier Boulaud (n° 2695) sur la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 97/67/CE en ce qui concerne la poursuite de l'ouverture à la concurrence des services postaux de la Communauté (COM [2000] 319 final / E 1520)

 

(M. François BROTTES, rapporteur)

2

- Informations relatives à la commission :

13

La commission a examiné, sur le rapport de M. François Brottes, la proposition de résolution de M. Didier Boulaud sur la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 97/67/CE en ce qui concerne la poursuite de l'ouverture à la concurrence des services postaux de la Communauté (COM [2000] 319 final / E 1520) (n° 2695).

M. François Brottes, rapporteur, a rappelé que le 9 novembre dernier, la délégation de l'Assemblée nationale pour l'Union européenne avait adopté une proposition de résolution, sur la base d'un rapport très bien argumenté établi par M. Didier Boulaud. La commission de la production et des échanges avait déjà abordé cette question lors de l'examen des crédits des postes et télécommunications pour 2001. Par ailleurs, avec d'autres députés, le rapporteur a rappelé qu'il avait eu l'occasion, à plusieurs reprises, lors des questions au Gouvernement, de demander à celui-ci de faire état de sa position et de l'avancée des discussions entre Européens sur ce dossier.

Il a ensuite souligné que la discussion de la proposition de résolution adoptée par la délégation constituait bien un débat engageant lourdement l'avenir du service public postal, même si la résolution qui sera adoptée ne représentera qu'un élément d'influence, puisque l'adoption de la proposition de directive relève d'une codécision entre le Parlement européen et le Conseil des ministres européen qui seuls détermineront le sort définitif de la proposition de directive adoptée par la Commission européenne le 20 mai 2000. Leur décision pourrait intervenir avant la fin de l'année.

Le rapporteur a ensuite appelé l'attention sur le fait que, faute d'accord sur une codécision en faveur d'une nouvelle directive postale, la directive 97/67/CE du 15 décembre 1997 deviendrait caduque le 1er janvier 2005. Ainsi, en l'absence de révision, donc en cas de caducité, la Commission européenne serait en droit d'utiliser l'article 86 du traité instituant la Communauté européenne pour réglementer le marché postal. Or, les directives de la Commission prises sur ce fondement juridique ne peuvent avoir pour objectif que la réalisation d'une concurrence libre et loyale en faisant fi, éventuellement, des préoccupations sociales et d'aménagement du territoire.

Pour ces raisons le rapporteur a redit son attachement au fait qu'une solution soit trouvée dans le cadre de la codécision. Cela implique une attitude responsable de la part de notre assemblée qui, dans le contexte de la présidence française de l'Union, se doit de tout faire pour convaincre et pour favoriser l'aboutissement d'un compromis qui préserve totalement le service public postal, sans ignorer l'évolution des exigences d'un marché mondial qui, elles non plus, ne doivent pas être incompatibles avec les nécessités d'un service postal de proximité de qualité.

Le rapporteur a ensuite résumé l'objet de la proposition de résolution et les enjeux, autres qu'une ouverture plus large à la concurrence, de la proposition de modification de la directive postale.

La directive du 15 décembre 1997, qui a été en partie transposée par l'article 19 de la loi du 25 juin 1999 d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire, définit tout d'abord un service universel postal qui doit être fourni « de manière permanente en tout point du territoire à des prix abordables pour tous les utilisateurs ». Le ou les opérateurs en charge du service universel désignés par les Etats membres doivent assurer une levée et une distribution au domicile au moins cinq fois par semaine, « sauf circonstances ou conditions géographiques jugées exceptionnelles par les autorités réglementaires nationales ». La loi française a choisi d'aller au-delà du minimum européen en prescrivant une distribution six jours par semaine.

Le service universel postal comprend au minimum - et la France a repris le maximum des possibilités offertes dans sa transposition de la directive européenne - les prestations suivantes (qui portent aussi bien sur des services nationaux que transfrontières) :

- la levée, le tri, le transport et la distribution des envois postaux jusqu'à 2 kg ;

- la levée, le tri, le transport et la distribution des colis jusqu'à 10 kg, limite pouvant être portée à 20 kg par les Etats membres, ce que la France a retenu ;

- les services relatifs aux envois recommandés et aux envois à valeur déclarée.

Des exigences de qualité sont imposées aux prestataires de service universel par la directive (respect d'exigences essentielles comme la confidentialité, principe d'égalité et de non-discrimination, continuité du service sauf cas de force majeure, adaptabilité du service en fonction de l'environnement technique, économique et social). Ces caractères tendent à rapprocher le service universel postal du service public postal français.

Le rapporteur a rappelé que les contours de ce service universel ne sont pas modifiés par la proposition de directive. Le problème majeur porte sur le nouveau périmètre des services réservés.

Dans les zones difficiles d'accès, d'habitat dispersé ou économiquement défavorisées, la fourniture de ce service universel peut se révéler fortement déficitaire, ce qui est le cas en France où le coût de la présence territoriale de La Poste dans les zones déficitaires serait de l'ordre de 5 milliards de francs . Pour garantir son financement, la directive du 15 décembre 1997 a donc autorisé les Etats membres à réserver certains services au(x) prestataire(s) du service universel. Ces services susceptibles d'être réservés sont « la levée, le tri, le transport et la distribution des envois de correspondance intérieure, que ce soit par courrier accéléré ou non, dont le prix est inférieur à cinq fois le tarif public applicable à un envoi de correspondance du premier échelon de poids de la catégorie normalisée la plus rapide, lorsqu'elle existe, pour autant que leur poids soit inférieur à 350 grammes. Dans le cas du service postal gratuit pour les aveugles et les malvoyants, des dérogations aux limites de poids et de prix peuvent être autorisées. Dans la mesure où cela est nécessaire au maintien du service universel, le courrier transfrontière et le publipostage peuvent continuer d'être réservés dans les limites de prix et de poids (...) Les échanges de documents ne sont pas susceptibles d'être réservés » (article 7).

Le rapporteur a noté que plusieurs mesures de transposition plutôt techniques manquent après l'adoption de la loi du 25 juin 1999 d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire. Il faut établir un régime de licence d'opérateur postal (contenu des obligations, modalités d'attribution, contrôle) pour ne pas livrer le marché à n'importe quel intervenant ; il faut modifier le régime de sanction et de contrôle qui repose totalement sur le respect du monopole postal de La Poste dans sa définition antérieure à celle qui prévaut aujourd'hui pour le secteur réservé ; il faut rectifier des dispositions législatives obsolètes en matière de distribution.

Le Gouvernement ne souhaite pas créer une autorité indépendante de régulation du marché postal. La directive européenne ne contient d'ailleurs aucune obligation en ce sens. La régulation sera donc assurée, y compris pour l'attribution des licences et le contrôle, par le ministre chargé des postes.

Le rapporteur a considéré que la nécessité qu'il y a à maintenir un large secteur réservé à La Poste pour garantir ses missions de service public n'impose pas la création d'une autorité de régulation. Il a partagé la préoccupation d'une transposition rapide, même par ordonnance, de la dernière partie de la directive du 15 décembre 1997 afin que la France participe dans les meilleures conditions aux débats concernant le contenu de la prochaine directive postale.

Le rapporteur a indiqué que, conformément à l'article 7 de la directive du 15 décembre 1997, la Commission avait mandat de présenter des propositions de révision de cette directive pour franchir une nouvelle étape dans la libéralisation des services postaux à compter du 1er janvier 2003. Il a ensuite présenté les principales modifications apportées au régime actuel, à compter de cette date, par la proposition de directive adoptée par la Commission européenne le 20 mai 2000 :

- les limites de poids et de prix utilisées pour définir le champ des services réservés sont ramenées à 50 grammes et 2,50 fois le tarif de base (y compris pour le publipostage et le courrier transfrontière entrant) ;

- les flux transfrontières sortants sont entièrement libéralisés ;

- une nouvelle catégorie de services, en dehors du service réservé et du service universel, est introduite : les services spéciaux. Ce sont :

. le courrier express, défini dans la proposition par un certain nombre de critères,

. les services clairement distincts du service universel répondant à des exigences particulières de clients et qui proposent des caractéristiques additionnelles à valeur ajoutée non proposées dans le cadre du service postal traditionnel (par exemple : la remise sur rendez-vous, le suivi des envois, l'heure de distribution garantie). Ne sont cependant pas compris dans ce type de service ni la collecte au domicile de l'expéditeur, ni la transmission/réception électronique à l'opérateur pour impression et préparation du courrier ;

- une nouvelle étape de libéralisation au 1er janvier 2007 ;

- la réaffirmation vigoureuse de l'encadrement des subventions croisées des services réservés vers les activités concurrentielles ainsi que les pratiques tarifaires.

Le rapporteur a proposé de faire le constat suivant. Sous l'apparence de mesures techniques, la proposition de directive risque de vider de toute consistance les garanties de service universel postal faute de financement permettant de couvrir les coûts de sa fourniture. L'abaissement important proposé des seuils de poids et de prix ne constitue pas une évolution marginale mais déstabilise l'équilibre précaire des comptes des opérateurs historiques des États où la géographie rend coûteuse la fourniture des prestations de service universel avec une même qualité de service et au même prix sur tout le territoire ; ce serait la fin de la péréquation.

Contrairement aux affirmations « expéditives » de la Commission européenne - exprimées sans véritable étude d'impact pays par pays - en France, les services réservés représentent une fraction très substantielle de l'activité de La Poste. La Poste réalise près de 70 % de son chiffre d'affaires courrier et colis dans les secteurs réservés à l'opérateur en charge du service universel par la directive postale du 15 décembre 1997 soit 47 milliards de francs, dont 2,25 milliards pour le courrier transfrontière sortant, sur 67,5 milliards de chiffre d'affaires en 1998.

Il est certain qu'une perte de recettes significative ne pourra que se traduire par une baisse de la qualité du service rendu (par exemple, la suppression de la distribution et des levées du samedi, qui ne sont pas imposées au titre du service universel par les directives européennes, et la fermeture des points de contact dans les communes les moins peuplées). Le rapporteur a fait observer que cela se passait ainsi là où la privatisation et la libéralisation s'étaient mises en place.

Entre la recherche d'une concurrence maximale sur le marché et le maintien de prestations de service public de qualité, et dans la ligne de l'avis du 27 septembre 2000 de la commission supérieure du service public des postes et télécommunications, le rapporteur a souhaité que la commission de la production et des échanges juge indispensable que de substantielles modifications soient apportées à la proposition de directive pour rendre acceptable son adoption. Il a fait valoir que c'était tout à fait l'esprit de la proposition de résolution adoptée par la délégation. Pour autant, il a indiqué qu'il proposerait quelques amendements à cette résolution, d'une part, pour en préciser et clarifier certains termes et, d'autre part, pour juger très constructifs les amendements adoptés le 22 novembre 2000 par la commission de la politique régionale, des transports et du tourisme du Parlement européen, saisie au fond de la proposition de directive, et qui témoignent d'une prise de conscience large des députés européens sur la nécessité de ne pas suivre les propositions déraisonnables et dangereuses de M. Frits Bolkestein, commissaire européen chargé du marché intérieur.

M. Jean Besson a estimé que si la proposition de résolution soumise à l'examen de la commission de la production et des échanges était globalement satisfaisante, des observations s'imposaient. S'agissant du troisième considérant (neuvième alinéa), il s'est félicité qu'ait été soulignée la récente publication par la Commission européenne d'une communication portant sur les services d'intérêt général en Europe.

Il a en revanche regretté que le sixième considérant (douzième alinéa) mette l'accent sur le fait que la directive 97/67/CE a été transposée de manière fort différente dans les États membres. En effet, à ses yeux, une telle rédaction tend à exonérer le Gouvernement français de sa responsabilité pour le retard pris dans la transposition de cette directive. Ce retard conduit d'ailleurs maintenant le Gouvernement a avoir recours à la procédure des ordonnances, peu démocratique. Il a en outre déploré qu'aucun décret d'application de l'article 19 de la loi n° 99-533 du 25 juin 1999 d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire n'ait pour l'instant été pris, alors que ces décrets conforteraient le service universel postal qui ne repose, en France, que sur cet article de loi, en lui donnant une meilleure et plus précise base juridique.

M. Jean Besson a par ailleurs signalé que ce décret permettrait de renforcer la portée du point 2 (vingt-huitième alinéa) de la proposition de résolution. Soulignant que cette disposition insistait sur le principe de péréquation tarifaire, présenté comme un moyen de faire bénéficier les zones rurales ou les quartiers sensibles de prestations comparables à celles en vigueur dans les autres quartiers urbains, il a estimé que la rédaction ainsi proposée n'était pas satisfaisante et qu'il convenait de l'amender afin de préciser que les prestations fournies devaient non seulement être comparables mais aussi répondre aux besoins des zones précitées.

Abordant le point 8 (trente-quatrième alinéa), M. Jean Besson a regretté que ce dernier ne propose aucune solution de compromis et notamment qu'il ne prenne pas acte des progrès récemment accomplis, et quasiment inespérés, par la commission de la politique régionale, des transports et du tourisme du Parlement européen. Il a rappelé que cette dernière avait proposé une limite de poids de 150 grammes et une limite de prix égale à 4 fois le tarif de base et estimé que cette proposition constituait une bonne base de repli à laquelle il fallait faire référence.

Puis, M. Jean Besson a demandé, concernant le point 3 (vingt-neuvième alinéa), les raisons de la distinction opérée entre équilibre économique et équilibre financier des opérateurs postaux. Concernant le point 10 (trente-sixième alinéa), il s'est étonné que ce dernier condamne le fonds de compensation, alors qu'au même moment, la France se bat dans les instances communautaires pour défendre le fonds de service universel des télécommunications ; il a en outre souligné que la France avait fait l'objet d'une mise en demeure de la part de la Commission européenne s'agissant de ce dernier fonds.

Il a enfin déclaré qu'il convenait de compléter la proposition de résolution pour inviter le Gouvernement à mieux préparer le secteur postal à la libéralisation, qu'il a acceptée en mars 2000 à Lisbonne, tout en apportant des garanties quant à la fourniture d'un service public postal de qualité. En conclusion, il a signalé que le débat public était plus que jamais nécessaire sur cette question.

M. Félix Leyzour a souligné que certains aspects de la procédure d'adoption de la nouvelle directive postale devaient être précisés, de nombreux points étant encore en discussion au niveau des instances européennes. Même si l'adoption d'une nouvelle directive avant la fin de l'année pourrait être souhaitable en raison de la présidence française de l'Union européenne, les points litigieux semblent encore trop nombreux pour aboutir aussi rapidement.

Il a ensuite expliqué que le groupe communiste souhaitait amender la proposition de résolution sur des aspects essentiels pour promouvoir un service public postal dynamique. La proposition de résolution doit ainsi énoncer clairement la nécessité de maintenir les services réservés dans leur périmètre actuel, elle doit également rappeler qu'un bilan de l'application de la directive du 15 décembre 1997 devait être présenté par la Commission au Parlement européen et au Conseil au plus tard le 31 décembre 2000. Ce bilan est une condition préalable indispensable avant d'étudier la possibilité d'une nouvelle ouverture à la concurrence du service public postal.

En réponse aux intervenants, M. François Brottes, rapporteur, a indiqué qu'il partage le point de vue de M. Jean Besson sur le troisième considérant (9ème alinéa) : un débat public sur la question des services d'intérêt général serait utile. Ceux-ci constituent une meilleure garantie de la qualité du service fourni aux usagers qu'une approche secteur par secteur. La semaine prochaine, la commission de la production et des échanges examinera la proposition de résolution adoptée sur ce sujet par la délégation pour l'Union européenne.

Concernant les termes du 6ème considérant (12ème alinéa), il proposera un amendement à la commission. Il a ensuite également déploré l'absence de décret d'application de l'article 19 de la loi du 25 juin 1999 d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire.

Puis le rapporteur a estimé possible un compromis à Bruxelles avant la fin de l'année. La délégation pour l'Union européenne ne pouvait pas faire état des avancées intervenues au Parlement européen puisqu'elle a examiné la proposition de résolution le 9 novembre dernier. Il proposera à la commission un amendement tendant à soutenir la position adoptée par la commission de la politique régionale, des transports et du tourisme du Parlement européen le 22 novembre.

Au point 3 de la proposition de résolution, l'équilibre économique s'apprécie au regard du marché tandis que l'équilibre financier traduit les résultats comptables de l'entreprise. Certes, les deux équilibres sont totalement liés.

La position de la délégation pour l'Union européenne au sujet du fonds de compensation est fondée. Dans le secteur des télécommunications, le fonds de service universel est de plus en plus malmené en France et le secteur postal réservé ne saurait être comparé au regard des volumes financiers aux contributions versées au fonds de service universel des télécommunications. Plusieurs opérateurs postaux privés ont fait connaître leur refus catégorique de financer un fonds de compensation. Pour ces raisons, il est indispensable de maintenir l'alinéa adopté par la délégation pour l'Union européenne.

Sur le plan de la procédure, il a rappelé les termes de l'article 151-3 du Règlement et indiqué qu'il était souhaitable que le texte de la proposition de résolution soit considéré comme définitif le plus rapidement possible.

M. Jean Besson a précisé qu'il partageait la préoccupation du rapporteur quant à la nécessité d'une adoption rapide de la proposition de résolution relative à l'ouverture à la concurrence des services postaux et que le débat qu'il souhaitait était un débat d'ensemble sur l'organisation postale en France. Il a également indiqué son accord avec le rapporteur en ce qui concerne le fonds de compensation. Il a précisé qu'il craignait simplement que la rédaction actuelle de la proposition de résolution n'apparaisse comme une condamnation du principe même du fonds de compensation que la France défend pourtant en matière de télécommunications et qu'il conviendrait plutôt d'indiquer explicitement qu'un tel dispositif n'était pas adapté au secteur postal.

La commission a ensuite procédé à l'examen de l'article unique de la proposition de résolution.

· Article unique

Après le sixième alinéa, la commission a adopté un amendement du rapporteur insérant un nouvel alinéa, prenant en compte les exigences des entreprises clientes qui souhaitent disposer d'une offre mondiale.

Au quinzième alinéa, elle a adopté un amendement du rapporteur complétant cet alinéa, pour préciser les effets pervers de la libéralisation du service postal en Espagne et en Suède.

Aux points 3 et 5 du dispositif de la proposition de résolution, la commission a adopté deux amendements rédactionnels du rapporteur.

Au point 6, la commission a examiné deux amendements soumis à discussion commune, l'un de M. Félix Leyzour, visant à maintenir les services réservés dans leur périmètre actuel, l'autre du rapporteur tendant à garantir aux opérateurs postaux, en charge du service universel, le nécessaire équilibre financier dans un contexte de concurrence accrue.

M. Félix Leyzour a fait valoir que, la suppression progressive du domaine réservé entraînant mécaniquement une perte de revenus pour les opérateurs publics, il convenait d'être plus directif pour préserver le périmètre actuel des services réservés.

M. François Brottes, rapporteur, a fait valoir que la simple défense du maintien du statu quo n'avait aucune chance d'aboutir et risquait même de priver la France d'arguments de négociation pour éviter une libéralisation totale en 2005 et de l'adoption d'un compromis favorable à ses thèses. Considérant que les deux amendements en discussion étaient plus opposés par la forme que par le fond, il a estimé que sa propre rédaction était préférable puisqu'elle précisait le périmètre des services réservés.

M. Jean Besson, tout en déclarant comprendre la démarche de M. Félix Leyzour, a cependant estimé que son amendement conduisait à considérer la défense des services réservés comme un combat d'arrière-garde, qui figeait dans leur forme actuelle ces services et ne tenait pas compte des évolutions technologiques à venir. En effet, on peut estimer que des nouveaux services, qui apparaîtront dans les années à venir, pourront être incorporés dans les services réservés.

M. Félix Leyzour s'est opposé à cette lecture de son amendement et a rappelé que le périmètre des services réservés devait être défendu dès lors que l'évolution engagée dans le service postal n'avait pas été précédée d'un bilan sur les conséquences de l'application des dispositions de la directive du 15 décembre 1997.

A l'issue du débat, la commission a rejeté l'amendement de M. Félix Leyzour et adopté l'amendement du rapporteur.

Au point 7, la commission a examiné un amendement de M. Félix Leyzour modifiant la rédaction de la fin de cet alinéa et demandant notamment que toute révision du cadre réglementaire prévue par la directive 97/67/CE soit précédée d'un bilan destiné à présenter les conséquences de son application dans le cadre juridique actuel.

M. François Brottes, rapporteur, a déclaré partager la préoccupation de l'auteur de l'amendement, la Commission européenne ayant voulu précipiter les évolutions sans procéder aux études préalables sur les conséquences de ses propositions. En revanche, il a estimé que l'adoption de l'amendement offrirait des arguments aux tenants d'un report de l'examen de la proposition de directive, prévu pour la semaine du 11 décembre au Parlement européen. Le renvoi de cet examen après la fin du semestre sous présidence française conduirait à rechercher un compromis entre le Parlement et le Conseil sous la présidence de l'Union par la Suède, qui a une approche du dossier radicalement opposée à celle de la France. En outre, il a rappelé qu'en l'absence de modification de la directive du 15 décembre 1997, cette dernière deviendrait caduque en 2005, ce qui autoriserait la Commission européenne à libéraliser le secteur par une directive prise sur le fondement de l'article 86 du traité instituant la Communauté européenne.

M. Jean Besson a également regretté que la précipitation soit une pratique récurrente dans l'élaboration des normes communautaires, les réformes n'étant pas précédées d'un bilan de la situation existante. Il est toutefois convenu avec le rapporteur qu'il ne fallait pas retarder l'examen par le Parlement européen de la proposition de directive postale. Il a proposé de sous-amender l'amendement de M. Félix Leyzour afin de prévoir qu'à l'avenir tout projet de révision fasse préalablement l'objet d'une étude.

M. Félix Leyzour s'est prononcé contre ce sous-amendement, expliquant que le contenu de la réforme était au moins aussi important que le calendrier de son adoption.

M. Pierre Micaux s'est déclaré favorable au sous-amendement proposé par M. Jean Besson.

En réponse, le rapporteur, partageant le point de vue de M. Jean Besson, a proposé un sous-amendement excluant la demande de bilan préalable pour la révision du cadre réglementaire actuel, mais prévoyant ce bilan pour toute révision ultérieure et précisant que l'étude devra porter sur la situation de chaque Etat membre.

M. Félix Leyzour a clairement manifesté sa préférence pour un bilan dans tous les cas.

La commission a adopté le sous-amendement du rapporteur et de M. Jean Besson, M. Félix Leyzour se prononçant contre. Elle a ensuite adopté l'amendement de M. Félix Leyzour ainsi sous-amendé, l'auteur de l'amendement ayant indiqué qu'il ne prenait pas part au vote.

Au point 8, la commission a examiné, en discussion commune, un amendement de M. Félix Leyzour et un amendement du rapporteur. Présentant son amendement, M. Félix Leyzour a expliqué qu'il visait à substituer à la dénonciation des risques liés à l'adoption de limites de poids et de prix trop basses, la dénonciation des risques entraînés par la simple diminution de ces limites, qui conduirait à une libéralisation excessive des services postaux.

M. François Brottes, rapporteur, a expliqué que son amendement reflétait la même préoccupation puisqu'il insistait sur les risques que présenterait, pour la pérennité du service universel, une libéralisation excessive fixant les limites du secteur réservé à 50 grammes et à 2,5 fois le tarif postal de base, telle que la préconise la Commission. Il a toutefois estimé que l'amendement présenté par M. Félix Leyzour supprimait toute possibilité de compromis et a fait valoir que l'amendement qu'il présentait permettait à la fois d'exprimer un fort mécontentement et de rester ouvert à des solutions alternatives.

M. Jean Besson s'est alors prononcé en faveur d'une proposition offensive et non pas défensive et a souligné que la proposition de résolution déposée au Sénat par M. Gérard Larcher fixait les limites de poids et de prix à 150 grammes et trois fois le tarif postal de base, ce qui se rapprochait des propositions de PostEurop situées à 150 grammes et quatre fois le tarif postal de base.

M. François Brottes, rapporteur, a alors rappelé que le point 8 de la proposition de résolution avait pour objet d'établir un constat de défiance vis-à-vis des propositions de la Commission ; il a signalé qu'il présentait plus loin un amendement soutenant notamment les limites de poids et de prix retenues par la commission de la politique régionale du Parlement européen, mais qu'il convenait, avant toutes choses, de contester clairement les propositions de la Commission.

Après que M. Pierre Micaux eut déclaré qu'il voterait contre l'amendement du rapporteur car il était favorable à une ouverture plus importante du marché postal, la commission a rejeté l'amendement de M. Félix Leyzour et a adopté l'amendement du rapporteur.

Au point 10, la commission a examiné un amendement du rapporteur visant à prendre en compte les préoccupations exprimées par M. Jean Besson concernant le fonds de compensation.

Après un échange entre M. Jean Besson et M. François Brottes, rapporteur, l'amendement modifié par ces deux auteurs, visant à préciser que le dispositif de fonds de compensation n'était pas adapté au secteur postal pour assurer la viabilité du service universel a été adopté par la commission.

Au point 13, la commission a adopté un amendement rédactionnel du rapporteur.

Après le point 15, la commission a examiné un amendement du rapporteur visant à compléter l'article unique par un point 16. M. François Brottes, rapporteur, a rappelé que par 43 voix sur 58, la commission de la politique régionale, des transports et du tourisme du Parlement européen avait adopté une série d'amendements très importants, qui allaient au-delà des espérances des postes européennes et au-delà de la proposition de résolution déposée au Sénat par M. Gérard Larcher. Il a estimé que l'Assemblée nationale ne pouvait donc pas se situer en retrait par rapport à ce compromis et a indiqué que les amendements ainsi adoptés portaient sur les points suivants :

- la suppression de la notion de services spéciaux ;

- la fixation de nouvelles limites de poids et de prix des services réservés à 150 grammes et quatre fois le tarif de base ;

- la suppression de l'étape de libéralisation de 2007 tout en demandant à la Commission européenne de présenter une évaluation de l'état du secteur postal avant le 31 décembre 2003 ;

- le report au 31 décembre 2004 de la date limite de transposition de la nouvelle directive ;

- la meilleure prise en compte des différences géographiques et du coût variable du service universel selon les configurations géographiques propres à chaque Etat membre ;

- le renforcement du principe d'adaptation du service universel aux évolutions technologiques ;

- la modification de l'exposé des motifs touchant au fonds de compensation.

Le rapporteur a par conséquent défendu son amendement, reprenant les quatre premiers points qu'il avait exposés.

M. Jean Besson a déclaré soutenir cet amendement et souligné que si l'équilibre entre limite de poids et limite de prix était important, le maintien du courrier express, du publipostage et du courrier transfrontalier dans les services réservés l'était plus encore.

La commission a adopté l'amendement du rapporteur.

Après le point 15, la commission a adopté un amendement du rapporteur complétant l'article unique par un point 17, visant à préciser qu'il était souhaitable que la négociation en cours sur la proposition de directive postale puisse aboutir sous la présidence française, afin de supprimer toute incertitude sur le cadre réglementaire des activités postales en Europe.

Lors des explications de vote, M. Claude Billard a indiqué que le groupe communiste s'abstiendrait lors du vote de la proposition de résolution malgré les avancées faites par la commission de la production et des échanges. Il a précisé que la négociation en cours impliquait de procéder à un véritable choix de société quant à l'avenir du service public postal. Face à la logique libérale, une toute autre vision de l'avenir de La Poste, fondé sur la réponse aux besoins des usagers et sur l'élargissement du service public par exemple aux nouveaux modes de communication doit être défendue.

La Poste, et plus généralement les services publics, doivent contrebalancer la libéralisation, voire la freiner, et non être à la pointe de celle-ci. Telle était la préoccupation centrale animant l'ensemble des amendements des commissaires communistes et en particulier celui demandant la réalisation d'un bilan de la libéralisation. Un tel bilan humain, social et économique, qui était prévu par la directive, n'a pas été réalisé. Il serait pourtant éclairant en particulier au regard de l'expérience suédoise où, avec la libéralisation, les prix ont augmenté de 72 %, l'emploi a reculé de 25 % et une partie du réseau a été abandonnée.

M. François Brottes, rapporteur, a estimé que le secteur postal présentait la spécificité de reposer essentiellement sur le capital humain et les personnels des entreprises du secteur. Il a jugé que les perspectives ouvertes par la commission de la politique régionale du Parlement européen qui vont dans le même sens que la proposition de résolution constituaient non une limitation apportée à la proposition de la Commission européenne mais bien un véritable changement de doctrine. Il s'agit de considérer que le service universel n'a pas vocation à être réduit au minimum vital, que son contenu peut évoluer pour être enrichi et que la logique de marché n'est pas la seule susceptible de permettre le développement du secteur postal. Le rapporteur a donc estimé que les préoccupations du groupe communiste étaient pour l'essentiel satisfaites par la proposition de résolution.

M. Pierre Micaux a indiqué qu'il voterait contre cette proposition de résolution car le bilan d'activité de La Poste n'est pas satisfaisant. Sans méconnaître la qualité du service postal sur le terrain dans les zones rurales notamment, on doit néanmoins constater que l'usager n'est pas assez pris en compte dans l'organisation actuelle de La Poste qui demeure entravée par une technocratie rigide.

M. Jean Besson a tenu à souligner que La Poste réalisait actuellement une grosse part de son chiffre d'affaires sur le secteur concurrentiel et qu'elle ne pouvait donc pas s'affranchir des règles du marché.

Il a rappelé que la définition du service postal universel constituait une sorte de minimum qualitatif pour l'organisation du service postal au plan européen mais que rien n'empêchait la France d'organiser un service public postal offrant une gamme de prestations de services plus complète avec une large péréquation des tarifs.

La France a renoncé à faire valoir ses règles d'organisation du service public postal pour les étendre à l'ensemble des autres pays européens car, compte tenu de l'état du service postal dans certains pays européens, ces nouvelles normes d'organisation du service postal universel auraient nécessité l'intervention massive des fonds structurels européens pour permettre à certains pays de pallier leur retard. Il lui paraît donc plus efficace de chercher à parfaire le service public français de la Poste plutôt que de tenter, sans grande chance de succès, de faire évoluer le service postal universel pour le rapprocher de la conception française du service public postal.

Puis, la commission a adopté la proposition de résolution ainsi modifiée.

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Informations relatives à la Commission

_  La commission a procédé à la désignation de M. Jacques Masdeu-Arus (suppléant) comme candidat au Conseil national du bruit.

_  Elle a ensuite procédé à la désignation de candidats pour siéger à la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine des transports; ont été nommés :

comme membres titulaires : comme membres suppléants :

Mme Odile Saugues MM. René Leroux

MM. Gilbert Le Bris Jean-Claude Bois

Jean-Yves Le Drian Jean-Jacques Filleul

Jean-Yves Besselat Jean-Marc Nudant

Léonce Deprez Jean-Claude Lemoine

André Lajoinie Marc-Philippe Daubresse

Jean-Michel Marchand Gilbert Gantier


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