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ASSEMBLÉE NATIONALE

COMMISSION DE LA PRODUCTION ET DES ÉCHANGES

COMPTE RENDU N° 25

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mercredi 23 janvier 2002
(Séance de 10 heures)

Présidence de M. Jean-Pierre Defontaine, vice-président

SOMMAIRE

 

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- Désignation d'un rapporteur pour la proposition de résolution de M. Daniel Paul (n° 3518) sur la Communication de la Commission au Parlement européen et au Conseil : Améliorer la qualité des services dans les ports maritimes : un élément déterminant du système de transport en Europe, et sur la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant l'accès au marché des services portuaires (COM [2001] 35 final/E 1702) et examen de cette proposition de résolution






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- Information relative à la commission.. :

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La commission a tout d'abord désigné M. Dominique Dupilet, rapporteur pour la proposition de résolution de M. Daniel Paul (n° 3518) sur la communication de la Commission au Parlement européen et au Conseil : Améliorer la qualité des services dans les ports maritimes : un élément déterminant du système de transport en Europe, et sur la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant l'accès au marché des services portuaires (COM [2001] 35 final/E 1702) et procédé à l'examen de cette proposition de résolution.

La commission a procédé à l'examen de l'article unique de la proposition de résolution.

· Article unique

M. Dominique Dupilet a tout d'abord rappelé que les instances européennes s'étaient intéressées depuis longtemps à la politique portuaire qui avait fait l'objet en 1997 d'un livre Vert soulignant la nécessité d'intégrer les ports dans le réseau transeuropéen de transports en renforçant la coordination entre modes de transports maritimes et ferroviaires notamment, afin de parvenir à la mise en place d'un véritable réseau multimodal.

Il a ensuite indiqué qu'en 1999 le Parlement européen avait adopté une résolution qui demandait à la Commission de procéder à une enquête afin de mieux connaître les structures juridiques des ports maritimes et les mécanismes d'aides publiques au financement des infrastructures, cette enquête devant permettre d'analyser les principales distorsions de concurrence entre les ports. Il a souligné que cette résolution envisageait le recours à une directive dans la seule hypothèse où la Commission démontrerait l'impossibilité de satisfaire à un libre accès des ports en appliquant la législation communautaire déjà existante.

En 2001, la Commission a donc publié une communication sur l'amélioration de la qualité des services dans les ports maritimes et a présenté un projet de directive concernant l'accès au marché des services portuaires qui font l'objet du rapport présenté par M. Daniel Paul, rapporteur pour la délégation pour l'Union européenne, et d'une résolution adoptée par la Délégation visant à profondément remanier le projet de directive.

M. Dominique Dupilet a souligné que même si ce projet de directive comportait des éléments intéressants, notamment dans son effort d'imposer des procédures transparentes pour l'attribution des concessions portuaires et pour clarifier les comptes des autorités portuaires en distinguant fonctions régaliennes et activités commerciales, il comportait de graves lacunes, notamment parce qu'il ne définit pas ce que devrait être une politique portuaire communautaire et parce qu'il minimise les problèmes de sécurité. Rappelant que différentes parties prenantes comme l'Organisation des ports européens (ESPO) ou la Fédération CGT des ports et docks, avaient fait part de leur opposition à ce projet de texte, il a déploré que la directive ne traite pas des financements publics aux infrastructures portuaires alors qu'ils constituent un des principaux facteurs de distorsion de concurrence entre les ports. Il a d'ailleurs indiqué que le Parlement européen avait amendé le projet de directive pour demander que l'on définisse les aides publiques pour le soutien des investissements dans les ports compatibles avec la législation communautaire.

Abordant les questions de sécurité, il a insisté sur le rôle fondamental du pilotage, du lamanage et du remorquage et souligné qu'il s'agit d'activités de service public qui ne peuvent être soumises aux lois du marché. Il a indiqué que la reconnaissance de l'auto-assistance dans le domaine portuaire comportait de nombreux risques pour la sécurité et qu'il convenait de permettre aux Etats de restreindre les possibilités d'auto-assistance pour les équipages des pavillons de complaisance. Il a estimé qu'il était essentiel de préserver toutes les prérogatives des Etats en matière de sécurité, les Etats membres ne pouvant soumettre aux lois du marché une de leurs principales fonctions régaliennes.

Il a ajouté que le projet de directive passait complètement sous silence le problème de la qualification des personnels alors même que les armements européens ont tendance à embaucher du personnel extra-communautaire sous-qualifié. Il a donc déploré que ce texte ne tente pas d'harmoniser les conditions d'emploi et de travail des personnels alors qu'il s'agit d'une des sources majeures de concurrence déloyale.

En conclusion, tout en reconnaissant que des efforts devaient être faits pour améliorer la transparence des services portuaires, le rapporteur a jugé que le projet de directive ne pouvait être adopté en l'état car il risque de favoriser une concentration accrue, l'ouverture à la concurrence des services portuaires conduisant à renchérir les services qui ne sont pas très rentables et qui, jusqu'à présent, bénéficient d'une péréquation des tarifs.

Il a souligné que la Commission aurait dû faire des propositions en matière de coopération entre ports pour favoriser l'intermodalité et améliorer la coordination entre transports maritimes et transports terrestres au lieu de limiter ses préoccupations à la mise en oeuvre d'une concurrence accrue.

Il a invité en conséquence les membres de la commission à adopter la résolution proposée par la délégation pour l'Union européenne en l'amendant pour préciser que le personnel assurant les services portuaires doit posséder une qualification professionnelle reconnue afin d'éviter tout risque de dumping social.

Répondant à la question de M. Jean-Pierre Defontaine, vice-président, concernant les perspectives d'harmonisation des services portuaires européens, M. Dominique Dupilet, rapporteur, a souligné que les statuts des ports européens étaient très disparates. Ainsi, la France comporte des ports autonomes, départementaux ou d'intérêt international ; certains ports européens peuvent être communaux, provinciaux - par exemple en Belgique - ou encore d'intérêt national, tel Hambourg. Il a indiqué que les instances communautaires ne souhaitaient pas pour le moment remettre en cause ces différents statuts mais que la directive avait pour but une harmonisation des services portuaires destinée à éviter la concurrence déloyale.

M. Jean-Claude Lemoine s'est déclaré favorable à l'amendement présenté par le rapporteur mais a estimé souhaitable que celui-ci soit rectifié afin de préciser que les personnels chargés d'effectuer les services portuaires doivent posséder une qualification professionnelle identique dans chaque Etat membre, car de grandes disparités peuvent être constatées en ce domaine, de même que pour d'autres professions, telles celle d'infirmière. Il a par ailleurs souligné que si l'harmonisation des qualifications professionnelles était souhaitable, il était également indispensable d'harmoniser les coûts des services portuaires, faute de quoi les ports français auraient du mal à faire face à la concurrence.

M. Dominique Dupilet, rapporteur, a estimé que le terme « identique » serait trop contraignant et souligné les risques liés à l'emploi croissant de personnels non ressortissants des pays européens.

M. Daniel Paul s'est associé aux propos du rapporteur s'agissant de l'emploi du terme « identique ». Il a souligné qu'il existait en effet peu de domaines dans lesquels les diplômes ou formations pouvaient être considérés comme identiques au plan européen. Il a également attiré l'attention sur la grande diversité des statuts des ports européens : il a indiqué qu'en Grande-Bretagne une grande partie des ports était privée ; ainsi, a-t-il observé, le Conseil général de Haute-Normandie a fait acquisition d'un de ces ports ; l'Allemagne se caractérise, quant à elle, par un véritable foisonnement des aides octroyées par les länder ; en Espagne, le système est également différent. Il a estimé que dans ce contexte, la Communauté européenne devait tendre à une harmonisation des statuts et à une meilleure coopération entre les ports comme ceux de Calais, Boulogne et Dunkerque. Relevant que contrairement à une idée reçue, les tarifs des ports français n'étaient pas forcément plus onéreux que ceux des autres ports européens et qu'on n'observait pas de différences majeures entre les tarifs pratiqués par les ports de Dunkerque, Rouen, Le Havre, Anvers ou Rotterdam ou entre les ports de Marseille, Barcelone ou Gênes, il a insisté sur l'importance des infrastructures terrestres dans l'attraction exercée par un port et sur la nécessité de développer l'intermodalité. Il a estimé qu'il convenait donc de poursuivre les efforts en matière de développement des infrastructures terrestres de pré et post acheminement, qu'il s'agisse de plates-formes intermodales, du mode ferroviaire ou du mode fluvial notamment pour relier l'Est de la France aux grands ports français. Après avoir observé que les anversois regrettaient la main-mise d'entreprises internationales de manutention comme P&O et Hutchinson sur le port d'Anvers, il a jugé que la concurrence entre ports pouvait aboutir à freiner la mise en _uvre de réseaux transeuropéens de transport, comme le montre le retard apporté à la modernisation de la liaison « Rhin d'acier » en raison de la concurrence entre Rotterdam et Anvers.

Il a estimé que la priorité aujourd'hui n'était donc pas d'introduire des mécanismes concurrentiels à l'intérieur des ports, mais plutôt de favoriser des transports rapides permettant par exemple d'acheminer efficacement un conteneur du Havre à Bordeaux. Il a jugé que la mise en concurrence des personnels chargés du lamanage était une question secondaire pour les usagers des ports compte tenu de la modicité du coût de ce service mais aurait pour conséquence de supprimer le lamanage pour y substituer la pratique de l'auto-assistance.

M. Patrick Rimbert a rappelé que le problème central était de permettre un transport rapide des produits, les ports ne constituant qu'un maillon de la chaîne des transports et les services portuaires n'étant qu'un élément minime de cet ensemble. Il a estimé naïf de la part de la commission de vouloir régler la question du transport des marchandises par le seul biais d'une concurrence accrue entre les ports. Il s'est d'autre part inquiété du risque que la mise en _uvre de la concurrence n'aboutisse à déposséder les Etats membres et les instances européennes de leur rôle dans la définition de la politique des transports maritimes, la recherche du moindre coût ne pouvant tenir lieu de politique des transports.

Il a conclu, en soulignant que la Commission européenne aurait du procéder à un état des lieux exhaustif servant de base à une stratégie des transports combinés et organiser un large débat sur une question aussi essentielle pour l'Europe plutôt que de la traiter par cette directive.

M. Jean Claude Lemoine a rappelé que, dans le cadre européen et à l'heure de la mondialisation des échanges, les ports étaient un maillon de plus en plus important de notre économie.

Il a souligné la nécessité d'un effort important en faveur des transports terrestres afin d'instaurer une plus grande complémentarité entre les différents modes de transports. Il a estimé que la France possédait de nombreux atouts en matière maritime et il a suggéré de spécialiser davantage les ports français pour accroître les complémentarités.

M. Dominique Dupilet, après avoir souligné le travail réalisé par M. Daniel Paul dans le cadre de la Délégation pour l'Union européenne, a déclaré partager les critiques formulées par M. Patrick Rimbert et indiqué que, selon lui, le problème de ce secteur, particulièrement en France, était l'intermodalité. Notant que, à l'heure actuelle, les différents opérateurs ne sont pas encore assez coordonnés, il a déploré qu'il n'existe aucune « chaîne » de transport, du bateau au destinataire final, chaîne pourtant indispensable pour accroître la rapidité et l'efficacité de ces activités et en diminuer les coûts.

Il a par ailleurs souligné les enjeux environnementaux et de sécurité routière du développement du transport maritime, observant que les porte-conteneurs disposent de capacités de stockage très importantes et que le transport maritime est, sauf accident grave, bien moins polluant que le transport routier.

Il a enfin accepté de sous-amender son amendement afin de tenir compte des différentes remarques des membres de la commission, et de préciser que les qualifications requises doivent être équivalentes dans l'ensemble des Etats-membres, afin de souligner l'importance de l'harmonisation des qualifications et d'éviter la tentation d'embaucher du personnel sous qualifié.

Puis, la commission a adopté la proposition de résolution ainsi modifiée.

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Information relative à la Commission

La commission a ensuite décidé la création d'une mission d'information parlementaire sur l'application de la loi n° 99-245 du 30 mars 1999 relative à la responsabilité en matière de dommages consécutifs à l'exploitation minière et à la prévention des risques miniers après la fin de l'exploitation et a désigné M. Jean-Yves Le Déaut, rapporteur.


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