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ASSEMBLÉE NATIONALE

COMMISSION DE LA PRODUCTION ET DES ÉCHANGES

COMPTE RENDU N° 28

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mercredi 6 février 2002
(Séance de 16 heures 30)

Présidence de M. André Lajoinie, président

SOMMAIRE

 

pages

- Audition de MM. Dominique Chardon, président, et Jean-Noël Bossé, directeur associé de la SOPEXA).


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- Information relative à la commission :

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La commission a entendu MM. Dominique Chardon, président, et Jean-Noël Bossé, directeur associé de la SOPEXA.

M. André Lajoinie, président, a accueilli M. Dominique Chardon et souligné l'importance qu'ont les activités de la SOPEXA aux yeux des membres de la commission.

M. Dominique Chardon, président de la SOPEXA, a rappelé que la SOPEXA joue aujourd'hui un rôle significatif de promotion de nos produits agricoles et agroalimentaires dans 39 pays. Il a rappelé également que le budget de l'Etat contribue au financement des activités de la SOPEXA et que notre pays est le deuxième exportateur mondial de produits agricoles et agroalimentaires, l'excédent de notre balance commerciale s'élevant à 61 milliards de francs. 75 % de nos exportations, qui concernent principalement les vins et les produits laitiers, sont dirigées vers les pays de l'Union européenne, les Etats-Unis constituant, par ailleurs, notre septième client.

Les exportations agricoles ont ainsi une incidence importante en termes d'aménagement du territoire, d'équilibre commercial et d'emploi. Il faut remarquer que notre pays est passé en quelques années d'une logique de sécurité alimentaire à une situation où la sécurité des aliments eux-mêmes devient prioritaire. Certes, la sécurité des approvisionnements alimentaires reste une donnée importante, mais la sécurité des aliments pèse désormais lourdement sur l'image de la France à l'étranger ; nous devons donc faire un effort important de communication dans ce domaine, pour sauvegarder le « modèle alimentaire » français.

La France est confrontée à l'heure actuelle à des concurrences très vives, les Pays-Bas ayant, par exemple, acquis une réelle puissance à l'exportation ; certains Etats européens affectent d'ailleurs des moyens financiers considérables à la promotion de leurs produits agricoles et agroalimentaires. La confrontation imposée à nos exportateurs est le fait d'ailleurs parfois de certaines entreprises étrangères, notamment américaines, qui font un effort gigantesque de promotion de leurs produits, de leurs vins tout particulièrement, reprenant à leur compte des spécificités françaises, nos cépages, nos techniques et jusqu'à notre concept de « terroir » et faisant valoir que leurs produits sont élaborés par des _nologues d'origine française.

La France demeure un modèle alimentaire ; elle conserve l'image du pays de la qualité, de la gastronomie, du caractère irréprochable des produits. Mais, à côté de cette spécificité française, existe aussi la diversité française, celle de l'offre, celle des terroirs, qui s'exprime, par exemple, dans le concept de « gastronomies régionales ». La SOPEXA s'efforce de travailler ainsi sur cette notion de diversité et d'origine des produits, que caractérisent un espace, un climat, un relief, une terre. Ainsi, toutes nos races de vaches à viande appartiennent-elles à des territoires précis et il en va de même pour nos fromages, qui expriment bien la diversité française.

Dans un marché qui se mondialise, il faut ainsi intégrer l'idée d'une diversité de nos régions, de nos terroirs également liée d'ailleurs au savoir-faire des hommes. Mais il importe également de donner une forme d'unité à ces produits divers et de trouver certains produits « phares ».

La sécurité alimentaire elle aussi est incontournable ; la production agricole française offre une image traditionnelle de sécurité, mais cette donnée ne va plus de soi aujourd'hui et doit être prouvée.

Notre pays souffre de certains handicaps d'image : l'arrogance que l'on nous prête parfois et le manque de simplicité et d'accessibilité de nos produits, la barrière de la langue ou le manque de régularité dans les approvisionnements. Mais la France reste le premier exportateur mondial de produits agricoles transformés.

Il faut provoquer une adhésion des consommateurs français au « produit France », préalablement à la promotion de l'image de ce dernier à l'étranger. Il est ainsi de l'intérêt général que des actions d'information et d'éducation des consommateurs soient menées afin de souligner la spécificité alimentaire française et la diversité des territoires agricoles ; de même, un travail de coopération des diverses filières (métiers de bouche, agriculteurs et industriels) devrait être entrepris. La SOPEXA doit donc à la fois « éduquer » les consommateurs et faire valoir la diversité de l'offre française.

M. Léonce Deprez s'étant interrogé sur la composition de la SOPEXA, M. Dominique Chardon a indiqué que le capital de cette société anonyme, créée il y a quarante ans, était détenu pour un tiers par des représentants des professions agroalimentaires, pour un tiers par des représentants des interprofessions et, pour un tiers, par des organismes publics, en l'espèce, les offices. Rappelant que cette société était implantée dans trente-neuf pays (notamment l'Union européenne, la Chine, le Japon, Taiwan, les Etats-Unis, le Canada et les pays d'Europe de l'Est), il a également signalé que ses moyens provenaient, d'une part, de subventions accordées dans le cadre de la loi de finances et, d'autre part, de fonds accordés par les interprofessions.

M. Léonce Deprez a alors demandé quels étaient les rapports de la SOPEXA avec la grande distribution et a observé que celle-ci avait un rôle non négligeable dans la diffusion, la vente, voire la banalisation de produits français, ce qui pourrait réduire d'autant les interventions de la SOPEXA. Après que M. Dominique Chardon eut indiqué que la grande distribution ne participait pas au groupement SOPEXA, M. Jean-Noël Bossé, directeur associé, a souligné que la SOPEXA avait des contacts réguliers avec les acteurs de la grande distribution et les acheteurs internationaux. Il a en outre observé que, si les produits français étaient demandés dans les grandes surfaces françaises implantées à l'étranger, celles-ci devaient également intégrer les produits locaux dans leurs gammes de produits, ce qui nécessite un arbitrage. Il a également souligné le rôle de la SOPEXA dans de nombreuses opérations avec des spécialistes de la distribution en Pologne, en Allemagne et en Grande-Bretagne.

M. Nicolas Forissier, ayant souligné la diversité des organismes participant au dispositif d'aide à l'export et la spécificité, au sein de celui-ci, de la SOPEXA, a interrogé M. Dominique Chardon sur les perspectives de réforme de ce dispositif en vue d'une meilleure coordination des intervenants, voire d'un regroupement institutionnel.

Il a également souhaité savoir si M. Dominique Chardon estimait suffisant, d'une part, le soutien financier qu'apporte l'Etat à la SOPEXA et, d'autre part, l'effort budgétaire consacré par la France aux foires et salons dont il a rappelé qu'il était très inférieur à celui réalisé par des Etats comparables au nôtre, notamment l'Allemagne, l'Espagne ou l'Italie.

M. Dominique Chardon a estimé que la coordination des différents organismes d'aide à l'export s'était très sensiblement améliorée au cours des dernières années. Puis, il a souligné les difficultés nouvelles liées aux récentes crises alimentaires et surtout au renforcement de la concurrence étrangère, notamment avec l'intensification de la concurrence des pays du Sud de l'Europe et de l'Allemagne, mais aussi des Etats du groupe de Cairns sur des produits à forte valeur ajoutée comme le vin. Il a donc jugé essentiel qu'une action conjointe soit conduite, dans le respect de l'identité de chacun des acteurs, pour cultiver nos spécificités et pour défendre et renforcer le modèle alimentaire français.

M. Dominique Chardon a mis l'accent sur l'importance des moyens consacrés, depuis quelques années, par certains de nos concurrents, à la promotion de leurs produits. Il a rappelé avoir plaidé, à plusieurs reprises, auprès des pouvoirs publics pour obtenir davantage de moyens. Il a également indiqué comprendre les choix budgétaires ayant conduit à la forte réduction des subventions allouées à la SOPEXA qui a permis une remise en cause et une redéfinition des missions et des actions. Il a toutefois jugé nécessaire de consacrer à la promotion de nos produits à l'étranger des moyens qui soient à la hauteur de nos ambitions, en complément de l'action des entreprises, et a souligné les atouts extraordinaires dont la France peut tirer parti.

M. André Godin a évoqué la formidable vitrine que représente pour nos vins Vinexpo et a souhaité savoir si ce modèle pouvait être reproduit pour d'autres produits.

M. Dominique Chardon s'est félicité du succès obtenu pour Vinexpo, société dont il a rappelé que la SOPEXA détenait 20 % des parts. Il a ensuite évoqué le Salon international de l'alimentation (SIAL), organisé par une société dont la SOPEXA détient 41 % du capital, en faisant part de sa vive préoccupation quant à l'avenir de cette entreprise qui risque de passer sous le contrôle d'intérêts étrangers.

M. Léonce Deprez a souhaité savoir si l'insuffisance des moyens financiers évoquée ne provenait pas de l'absence de participation de la grande distribution à la promotion des produits agricoles français à l'étranger.

M. Dominique Chardon a estimé que les difficultés d'exportation des produits agricoles français de terroir étaient largement dues à une identification nationale problématique, faute de politique volontariste en la matière. Il a néanmoins jugé possible de reprendre l'initiative pour surmonter méthodiquement ces problèmes d'image à l'étranger.

Concernant les débouchés de ces productions sur marché intérieur, il a rappelé que l'urbanisation croissante du territoire national avait établi une distance entre la population et ses origines géographiques et historiques, rendant plus délicate et complexe la communication sur les notions de territoire et de terroir.

M. Nicolas Forissier, après avoir indiqué que certains producteurs locaux disposaient aujourd'hui d'une expérience remarquable en matière de terroirs et estimé qu'une promotion par le biais d'Internet permettrait de valoriser cette expérience au niveau mondial, a souhaité savoir si la SOPEXA avait l'intention de favoriser de telles opérations.

M. Jean-Noël Bossé a rappelé que des sites Internet avaient déjà été créés en Europe du Nord, notamment au Danemark, où un site quadrilingue fonctionne actuellement.

Il a indiqué que la politique suivie par la SOPEXA consistait à faire participer les producteurs à des systèmes de vente en ligne, et qu'avaient été mis en place des portails nationaux proposant les produits aux acheteurs au niveau international, toute demande étant répercutée, dans une deuxième phase, au niveau régional.

M. André Godin s'est interrogé sur la capacité réelle de la SOPEXA à accompagner les producteurs français dans leurs opérations de promotion à l'étranger, compte tenu, par exemple, de l'absence de filière internationale pour un produit aussi reconnu que le poulet de Bresse.

M. Jean-Noël Bossé a observé qu'il existait actuellement une démarche collective fondée sur des normes strictes, renforcées au niveau communautaire depuis le 1er janvier 2002, pour effectuer ces opérations. Il a précisé qu'il souhaitait qu'apparaisse au sein des activités de la SOPEXA un volet PME-PMI permettant de développer de telles filières, en s'appuyant sur des modèles reflétant l'adéquation entre produits et régions pour déterminer quelles productions doivent être privilégiées. Il a enfin indiqué que la SOPEXA disposait de bureaux à l'étranger et organisait des rencontres entre partenaires commerciaux, tout en restant ouverte à toutes les initiatives.

M. Dominique Chardon a, pour sa part, souligné le manque de constance et de régularité reproché à la France à l'étranger, avant de se demander si l'objectif d'une présence universelle était réellement pertinent.

Alors qu'il existe des productions d'excellente qualité chez des professionnels modestes, il est difficile pour la SOPEXA d'organiser des filières à l'étranger sans grands moyens budgétaires. Pour surmonter ce problème, la SOPEXA a mis en place de nouvelles méthodes permettant de soutenir les actions de promotion des productions françaises de terroir, l'essentiel étant de rétablir un lien direct et convivial entre l'acheteur et le producteur, comme l'ont permis des actions très réussies telles que le Grand prix du sommelier ou encore la mise en place en Allemagne de la filière Charolux, sans laquelle il aurait été difficile à la France de retrouver ses parts de marché dans un contexte de crise sanitaire.

M. André Godin a fait remarquer que nos grands chefs de cuisine étaient souvent nos meilleurs ambassadeurs à l'étranger.

M. François Perrot ayant déploré que l'origine française de certains produits agroalimentaires, comme le vin, soit insuffisamment promue, M. Dominique Chardon a observé que la mention de l'origine française devait également permettre de traduire la diversité des terroirs et des produits. S'agissant des produits de boucherie, il a noté que la crise de l'encéphalopathie spongiforme bovine avait pénalisé les exportations de viande bovine pendant un temps, mais que les échanges devenaient plus dynamiques et a insisté sur la nécessité de mentionner les spécificités des produits d'origine française, ce qui suppose une « éducation » à la culture française. Il a insisté, pour conclure, sur la nécessité d'une formation, d'une éducation visant spécifiquement les jeunes pour défendre l'exception, la qualité françaises.

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Information relative à la Commission

La commission a procédé à la désignation de M. Joseph Parrenin pour siéger à la Commission d'examen des pratiques commerciales.


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