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Assemblée nationale

COMPTE RENDU

ANALYTIQUE OFFICIEL

Session ordinaire de 1998-1999 - 3ème jour de séance, 5ème séance

1ère SÉANCE DU MARDI 6 OCTOBRE 1998

PRÉSIDENCE DE M. Patrick OLLIER

vice-président

          SOMMAIRE :

QUESTIONS ORALES SANS DÉBAT 1

    RÉGIME DE RETRAITE DES AGENTS EDF-GDF 1

    AVENIR DE L'ENTREPRISE MOREL-BARNERON DE VALRÉAS 2

    FINANCEMENT DE LA RÉNOVATION DES INSTITUTS UNIVERSITAIRES DE FORMATION DES MATRES 3

    STATUT DES CHEFS D'ÉTABLISSEMENTS SPÉCIALISÉS 4

    FERMETURE DE LA GENDARMERIE DE CHAUMERGY DANS LE JURA 4

    POLITIQUE DE L'AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE DANS LE CHER 5

    AVENIR DU PARC NATUREL DU GÂTINAIS FRANÇAIS 6

    AMÉLIORATION DE LA SÉCURITÉ DES TRANSPORTS SCOLAIRES 7

    AMORTISSEMENT DES INVESTISSEMENTS IMMOBILIERS LOCATIFS 8

    FERMETURE DU COMMISSARIAT DE VENDÔME 9

    FINANCEMENT DES SERVICES D'INCENDIE ET DE SECOURS 10

    INDEMNISATION DES JUIFS SPOLIÉS PENDANT L'OCCUPATION 11

    SITUATION DES FAMILLES AGRÉÉES ACCUEILLANT DES PERSONNES ÂGÉES OU HANDICAPÉES 12

    SITUATION DE CERTAINS RETRAITÉS DU GROUPE CREUSOT-LOIRE INDUSTRIES 12

    INDEMNISATION DES PROPRIÉTAIRES DE VÉHICULES ENDOMMAGÉS À LA SUITE DE VIOLENCES URBAINES 14

    STATUT DES GUIDES INTERPRÈTES ET DES GUIDES CONFÉRENCIERS 15

    UTILISATION DE SEMENCES FERMIÈRES PAR LES AGRICULTEURS 15

    MESURES EN FAVEUR DES PRODUCTEURS DE COGNAC 17

La séance est ouverte à dix heures trente.


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QUESTIONS ORALES SANS DÉBAT

L'ordre du jour appelle les questions orales sans débat.

RÉGIME DE RETRAITE DES AGENTS EDF-GDF

M. Michel Grégoire - Ma question s'adresse au secrétaire d'Etat à l'industrie. Les retraités d'EDF-GDF et les titulaires d'une pension de veuf s'inquiètent de l'avenir du système. Ils souhaitent des éclaircissements du Gouvernement sur la revalorisation des retraites, des pensions minima et du taux de réversion, ainsi que sur les dispositions relatives à la mutuelle et à la protection sociale.

Qu'en est-il du retrait des décrets sur la mutuelle rendant caducs les articles 23 et 25 du statut national ?

M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'industrie - Compte tenu de l'importance du sujet, ma réponse sera d'une exceptionnelle longueur et technicité, je vous prie de m'en excuser.

Les électriciens et gaziers bénéficient d'un régime de retraites spécial, organisé par le statut national du personnel de ces industries ; l'une de ses caractéristiques réside dans l'indexation des pensions sur les rémunérations des actifs.

Ce dispositif généreux est financé pour l'essentiel par une contribution d'équilibre prélevée sur les entreprises électriques et gazières. Le régime doit faire face actuellement à une évolution démographique défavorable : la charge des pensions devrait dépasser celle des rémunérations principales en 2020, le nombre des retraités passant de 89 000 à 131 000 -ce qui ne remet pas en cause l'attachement du Gouvernement à ce régime spécial.

La revalorisation annuelle des retraites se fera donc par le jeu des règles d'indexation, dans le cadre des négociations salariales au sein d'EDF et de GDF, sans qu'il y ait lieu pour les pouvoirs publics d'intervenir. Une éventuelle évolution du minimum de pension serait également de la compétence des partenaires sociaux.

En ce qui concerne le taux des pensions de réversion, le Gouvernement considère qu'il n'y a pas lieu de le modifier, d'une part en raison de la situation générale du régime, d'autre part parce qu'il est déjà plus avantageux que les régimes de droit commun. Certes, pour ceux-ci le taux de reversion a été porté de 52 à 54 % -et à 60 % pour les régimes complémentaires. Mais les agents d'EDF-GDF bénéficient dès 55 ans d'une retraite à taux plein - 75 % du dernier salaire contre 70 % dans le secteur privé- et, en pratique, les pensions de réversion aux veufs et aux veuves ont un niveau au moins équivalent à celles du secteur privé. En outre, aucune condition de ressources n'est exigée et des avantages en nature sous forme de tarifs préférentiels pour le gaz et l'électricité leur sont accordés.

Il est vrai qu'un quart des pensions sont inférieures à 4 000 F par mois : mais elles correspondent le plus souvent à des carrières courtes et sont alors complétées par les pensions du régime général, sauf quand la condition de ressources s'y oppose. En outre, la pension de réversion étant calculée au prorata de la durée de vie commune, la rupture de celle-ci peut expliquer certains niveaux faibles.

Le problème se limite donc à un petit nombre de cas individuels, qui devraient faire l'objet d'une évaluation particulière dans les instances appropriées, pour rechercher des correctifs tels que des compléments bénévoles des entreprises ou des secours au titre de l'aide sociale.

En ce qui concerne le régime spécial d'assurance maladie et maternité des électriciens et des gaziers, les pouvoirs publics ont décidé de reporter d'un an l'entrée en vigueur du décret de réforme du 11 avril 1997 pris par le précédent gouvernement ; cette initiative s'accompagnera à l'automne d'une large concertation entre les partenaires sociaux de nature à permettre au Gouvernement de consolider la situation fragile de ce régime par des mesures appropriées et comprises, souhaitons-le, par les principales organisations syndicales de la branche.

M. Michel Grégoire - Je vous remercie de la clarté de votre réponse, qui devrait rassurer la profession.

AVENIR DE L'ENTREPRISE MOREL-BARNERON DE VALRÉAS

M. Thierry Mariani - Pour la troisième fois je reviens à la charge pour évoquer le problème de l'entreprise Morel-Barneron que plus de 50 personnes occupent depuis mars 1997 -la longueur de ce conflit social prouve la gravité de l'affaire !

Il s'agit d'une entreprise de cartonnage située à Valréas, commune dont je suis maire. C'était une propriété familiale qui fonctionnait bien mais qui a été ensuite absorbée par le groupe Altus Finances et finalement emportée par le naufrage du Crédit Lyonnais : alors qu'elle comptait 180 emplois, il y a quelques années, il n'en restait que 60 à 80 au moment de la fermeture.

Aujourd'hui, tout espoir de reprise d'activité n'est pas perdu. En effet, un repreneur, le groupe Accent-Thales, a manifesté son intérêt pour cette entreprise, qui est en état de marche puisque son personnel l'occupe. Il est certes paradoxal qu'un député RPR doive défendre auprès d'un gouvernement de gauche l'action de la CGT, mais quand les gens font des choses sensées, il faut le reconnaître ! Donc je vous demande, à vous, ministre socialiste, de prendre en compte cette situation particulièrement digne d'intérêt ; je ne vous réclame pas des dizaines de millions, mais simplement, comme je l'avais fait auprès de vos prédécesseurs, d'organiser une réunion entre Slibail et le CDR qui sont les successeurs du Crédit Lyonnais, propriétaire des locaux, le personnel en place et la mairie qui, avec le conseil général, s'est beaucoup investie pour la construction de cette entreprise.

Je vous avais interrogé une première fois le 21 avril, une deuxième par question écrite le 6 juillet ; mais les salariés qui occupent l'entreprise depuis le 22 mars 1997 viennent de passer leur deuxième été sans salaire... Mme Guigou est venue les voir pendant la campagne électorale, puis elle les a sans doute oubliés. Qu'on leur dise enfin ce qu'on veut faire de leur entreprise ! Ils ont le sentiment qu'on les traite par le mépris. Rendez-leur leur dignité et dites-leur, si, oui ou non, il y a encore un espoir !

M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'industrie - Le Gouvernement soyez-en assuré, est attaché au moins autant que vous au respect de la dignité des individus et à la concertation. Nous prenons en considération les efforts consentis par le conseil général et par votre commune. Il faut parvenir à une solution par le dialogue et je vous confirme ma volonté de rester toujours à la disposition des parlementaires. Le 21 avril, je vous avais répondu que l'appréciation de la solidité du plan de reprise ne relevait pas du CDR, mais du liquidateur et du tribunal de grande instance de Carpentras siégeant en formation commerciale ; j'ajoutais que le CDR s'était engagé à participer a une renégociation du contrat de crédit-bail immobilier.

Il n'est pas exact de dire que les salariés sont toujours en attente d'une date pour la réunion promise au printemps : le 16 juillet dernier, des membres du cabinet de M. Strauss-Kahn et du mien ont reçu leurs représentants. L'organisation, après cette réunion, d'une table ronde réunissant le Gouvernement, les élus, les salariés, les industriels et le CDR ne m'apparait pas opportune car je suis, comme vous l'êtes certainement, très attaché à l'indépendance du CDR : le Gouvernement n'entend pas lui donner des instructions sur des dossiers individuels.

Néanmoins, le Gouvernement suit bien sûr au jour le jour l'évolution de la situation et il est très soucieux de l'avenir des salariés. Il fera tout pour que le dialogue s'instaure dans l'entreprise, dans le respect des procédures.

M. Thierry Mariani - Des représentants des salariés ont en effet été reçus au ministère le 16 juillet ; mais nous croyons nécessaire d'organiser une table ronde réunissant l'ensemble des partenaires. Le bâtiment est occupé depuis un an et demi, et le CDR ne perçoit pas le moindre loyer. Sans doute l'ancienne majorité et la nouvelle ont-elles accordé une trop grande confiance à certaines institutions ; il arrive un moment où les politiques doivent faire entendre leur voix. J'ai l'intime conviction qu'une réunion de tous les partenaires serait très utile.

FINANCEMENT DE LA RÉNOVATION DES INSTITUTS UNIVERSITAIRES DE FORMATION DES MATRES

M. Bernard Roman - La loi de juillet 1990 portant création des IUFM a reconnu aux départements la possibilité de continuer à exercer leurs responsabilités sur les biens meubles et immeubles affectés aux anciennes écoles normales. A défaut d'une telle décision, ces biens devaient être mis à disposition de l'Etat. La situation est très inégale : certains départements ont assumé complètement leurs charges de propriétaires, d'autres ont fait les travaux indispensables, préalablement à une cession à l'Etat.

Dans le Nord, le conseil général, avant les cantonales de mars 1998, avait prévu de céder à l'Etat l'ancienne école normale, l'IUFM de Douai proposant un cofinancement à hauteur de 150 millions. Le nouveau conseil général souhaite garder la maîtrise de l'outil, mais sollicite de l'Etat une participation à la remise en état des bâtiments. Je souligne qu'il sera nécessaire d'intégrer tous les IUFM dans le plan U3M qui va succéder à Université 2000. L'Etat peut-il prendre aujourd'hui un engagement ?

M. Jean-Pierre Masseret, secrétaire d'Etat aux anciens combattants - Je vous prie d'excuser M. Allègre, qui participe au sommet franco-italien à Rome.

Dans le cadre du régime prévu à l'article 3 de la loi du 4 juillet 1990, l'Etat se substitue au département dans ses droits et obligations relatifs aux biens mis à disposition et affectés aux IUFM. En contrepartie de la prise en charge directe par l'Etat des dépenses incombant antérieurement au département, un prélèvement d'un montant égal à celui constaté par une convention conclue entre l'Etat et le département est effectué sur la dotation générale de décentralisation du département, affecté au budget de l'enseignement supérieur et reversé à l'IUFM. En conséquence, il appartient à cet établissement de mobiliser les financements nécessaires à la mise en sécurité des locaux qui lui ont été affectés. L'accent mis sur la rénovation des universités parisiennes n'implique nullement que les financements U3M leur soient réservés ; la grande majorité des crédits sera destinée à des actions en région et les IUFM seront concernés. D'ailleurs, certains IUFM ont bénéficié du précédent contrat de plan Etat-régions, notamment celui de Versailles, qui a obtenu 50 millions de l'Etat.

Par conséquent, la négociation d'éventuels financements venant en complément de la DGD prendra place dans celle des prochains contrats de plan Etat-régions : c'est dans ce cadre que l'Etat pourra contribuer aux projets tels que celui que vous venez d'évoquer.

M. Bernard Roman - Merci de cette réponse. Je rappelle que les bâtiments en cause sont souvent ceux des premières écoles normales et qu'ils nécessitent donc d'importants travaux. Cependant, je me félicite que, malgré l'importance des investissements à réaliser dans les universités parisiennes, celles de province ne soient pas oubliées. Je prends également acte, pour m'en réjouir, que le plan U3M s'appliquera aux IUFM.

STATUT DES CHEFS D'ÉTABLISSEMENTS SPÉCIALISÉS

Mme Dominique Gillot - Lionel Jospin, lorsqu'il était ministre de l'éducation nationale dans le gouvernement Rocard, a créé le corps des professeurs des écoles. Aux termes de cette réforme, les directeurs d'établissements, y compris d'établissements spécialisés, se voient appliquer une grille indiciaire unique, prenant en compte le nombre de classes.

Or, les directeurs d'établissements spécialisés ne peuvent accéder à ce poste qu'au terme de huit années d'études après le baccalauréat : comme tout professeur d'école, ils doivent justifier du certificat d'aptitude pédagogique, qui se prépare en deux ans, mais aussi du certificat d'aptitude aux professions spécialisées d'adaptation et d'intégration, qui s'acquiert également en deux années, ainsi que du diplôme de directeur d'établissement spécialisé, qui exige une année supplémentaire, passée dans le centre de Suresnes. L'obtention de ces qualifications militerait contre la grille unique...

D'autre part, l'indemnité de fonctions particulières attribuée à ces chefs d'établissement, qui représente 2,1 % de leur traitement brut, n'est pas prise en compte dans le calcul de leur pension de retraite.

Une meilleure reconnaissance de la fonction serait le gage d'une valorisation du rôle des établissements spécialisés, et donc de l'action en faveur des jeunes en difficulté. Une révision de la grille indiciaire est-elle à l'étude ? Sinon, dans quels délais peut-on l'attendre ?

M. Jean-Pierre Masseret, secrétaire d'Etat aux anciens combattants - J'ai déjà excusé M. Allègre : voici la réponse, très technique comme votre question, qu'il m'a prié de faire.

Les instituteurs et professeurs des écoles justifiant de certaines conditions de diplômes et de services peuvent être nommés dans les différents emplois de directeur d'établissement spécialisé : directeur d'école autonome de perfectionnement, d'école annexe et d'école d'application, directeur d'école comportant au moins trois classes spécialisées, directeur d'école d'éducation spéciale ouverte dans les établissements ou organismes ayant passé un protocole avec le ministre de l'éducation nationale, ou directeur de centre médico-psychopédagogique. Leur sont versées une bonification indiciaire qui est fonction du nombre de classes dans l'établissement, ainsi qu'une indemnité de sujétions spéciales qui varie de 3 378 à 5 202 F par an.

Ces enseignants continuent en outre à percevoir, en leur qualité de maître spécialisé, une bonification indiciaire de quinze points, pour les instituteurs, ou une indemnité de fonctions particulières de 4 929 F, pour les professeurs des écoles.

Comme les directeurs d'école, les directeurs d'établissement spécialisé bénéficient enfin depuis peu d'une nouvelle bonification indiciaire de huit points, prise en compte pour la liquidation de leur pension, ainsi que d'une augmentation de leur indemnité de sujétions spéciales lorsque l'école compte plus de dix classes.

Il n'est pas envisagé de modifier ce régime de rémunération, d'autant que les intéressés, quand ils sont à l'origine instituteurs, accèdent plus rapidement au corps des professeurs des écoles et à la hors-classe de ce corps.

Mme Dominique Gillot - La réponse est en effet technique, mais elle ne me satisfait que partiellement, car les enseignants qui acceptent d'assumer de telles responsabilités doivent faire preuve d'une compétence toute particulière : il n'est pas aisé de traiter les déficits d'intégration scolaire, aux causes souvent très diverses -sociales, psychologiques, psycho-motrices ou psycho-sensorielles... Ces maîtres qui acceptent de compléter leur formation de façon à pouvoir élaborer des projets pédagogiques adaptés méritent qu'on les prenne en considération mieux qu'en leur appliquant une grille indiciaire uniforme. Mais nous y reviendrons certainement lors du débat sur la réforme de l'éducation.

FERMETURE DE LA GENDARMERIE DE CHAUMERGY DANS LE JURA

M. le Président - L'ordre du jour appellerait la question de M. Jacques Pélissard sur la fermeture de la gendarmerie de Chaumergy, mais son auteur m'a fait savoir qu'il ne pourrait être présent. Comme il n'a par ailleurs pas désigné de suppléant, la question ne sera par conséquent pas appelée.

POLITIQUE DE L'AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE DANS LE CHER

M. Jean-Claude Sandrier - Bourges et, plus généralement, le bassin d'emploi de Bourges-Vierzon sont durement touchés par la crise de l'industrie d'armement et par la restructuration de notre défense. A lui seul, le chef-lieu regroupe la moitié des emplois de ce secteur situés dans la région Centre, l'une des cinq premières en France pour l'importance de l'industrie d'armement. En 15 ans, l'agglomération a perdu environ 40 % de ses emplois directs, soit quelque 3 000 emplois, et plusieurs centaines devraient encore disparaître dans les quatre années à venir.

Le Gouvernement ayant décidé que le prochain CIAT étudierait en décembre des mesures exceptionnelles pour les bassins ainsi frappés, j'aimerais connaître les lignes directrices retenues pour cette action et faire quelques suggestions.

A mon sens, ce CIAT devrait d'abord viser à contenir, sinon à annuler, les effets d'une "logique d'entreprise" qui est en fait une logique financière sacrifiant emplois, territoires, savoir-faire et potentiel technologique. Les plans de charge du GIAT et de l'ETBS doivent être améliorés, la recherche et le développement renforcés. Dans l'immédiat, un simple mouvement interne au budget de la défense peut y suffire. En outre, la charge "avion" de l'Aérospatiale-Bourges doit être sensiblement accrue.

En second lieu, il faut mobiliser les moyens pour une diversification qui ne soit plus un simple gadget. Au sein même des établissements de défense, il convient d'élaborer un cadre et les directives permettant aux ingénieurs et aux bureaux d'études d'orienter leurs recherches vers des activités civiles ou duales. Ensuite, à l'extérieur, il faut mettre sur pied un projet vraiment structurant, sur un thème reconnu d'avenir pour Bourges : le risque industriel, la sécurité et les capteurs et mesures. Les structures existantes, les potentialités humaines, technologiques, les capacités d'essais, mais aussi l'école d'ingénieurs peuvent être mobilisées en ce sens.

Ce projet devrait pouvoir s'appuyer sur des laboratoires de recherche, sur la création d'un Institut national des sciences du risque et sur des formations de troisième cycle, ainsi que sur une unité d'intervention spécialisée de type "Casques verts". L'ancien hôpital des armées Baudens pourrait en outre se spécialiser dans le traitement des polytraumatisés victimes des grandes catastrophes, avec la contribution d'un centre national de recherche anti-douleur.

Enfin, ce CIAT pourrait prendre une série de mesures relatives aux infrastructures et aux aides spécifiques : extension de la PAT et aides au taux maximum pour l'installation d'entreprises nouvelles ou l'extension d'entreprises existantes, effort particulier pour la mise à 2 fois 2 voies d'un axe en direction de Nevers, de l'autoroute A77 et de la Nationale 7, et pour la réalisation concomitante de la rocade nord de Bourges, ainsi que pour une amélioration accélérée de la desserte ferroviaire Lyon-Nantes, notamment entre Tours et Saincaize, et pour la réalisation d'une plate-forme multimodale à Vierzon, parte-forme qui assurerait la rentabilité de cette transversale.

Ces trois séries de propositions devraient faire l'objet de décisions rapides, suivies d'effets concrets. Nous ne pouvons en effet attendre le contrat de plan en laissant se dégrader notre potentiel humain, industriel et technologique... En outre, par la voix de son président, la région Centre a déjà fait savoir qu'elle était prête à accompagner l'effort du Gouvernement.

M. Louis Besson, secrétaire d'Etat au logement - Mme Voynet, retenue par le conseil des ministres européens de l'environnement a pris connaissance avec intérêt de votre question. Elle m'a chargé de vous dire que le Gouvernement est vivement préoccupé par les conséquences qu'entraîne la restructuration des industries de l'armement, notamment pour les bassins économiquement fragilisés comme celui de Bourges-Vierzon. C'est pourquoi, en sus des mesures spécifiques prévues pour limiter les effets sociaux de cette restructuration, le comité interministériel réuni le 6 juillet a décidé d'inscrire à l'ordre du jour du prochain CIADT l'étude de décisions en faveur des zones les plus gravement affectées.

Une réflexion est en cours pour favoriser la diversification économique en développant la recherche et le pôle universitaire ainsi qu'en apportant un soutien économique au bassin de Bourges. Le développement de pôles spécialisés en risque industriel et en sécurité est une des pistes étudiées par les missions mises en place, en coordination avec la délégation interministérielle aux restructurations de défense et le ministère de l'industrie.

S'agissant de l'hôpital des armées Baudens, une étude sur les possibilités de réutilisation des locaux est menée par la mission pour la réalisation des actifs immobiliers.

En ce qui concerne les activités liées à la défense et le plan de charge des divers établissements, Dominique Voynet tient à rappeler que, pour GIAT Industries, le ministère de la défense a confirmé les orientations de l'Etat en matière de commande dans la loi de programmation.

Concernant l'ETBS, la DGA est en train d'étudier la réorganisation des centres d'essais en vue de développer une activité civile. Pour l'Aérospatiale, la répartition du plan de charge résultant des commandes d'Airbus Industrie relève normalement de l'entreprise.

Enfin, en matière d'infrastructure et de communication, l'amélioration des liaisons ferrées et routières est-ouest constitue un enjeu important pour la région Centre. Les projets seront examinés dans le cadre des futurs schémas de services collectifs correspondants, et bien entendu des futurs contrats de plan Etat-Région. Les premières options devraient pouvoir être dégagées à l'horizon du prochain CIADT.

Ce dossier important que vous maîtrisez parfaitement, retient toute l'attention du Gouvernement.

AVENIR DU PARC NATUREL DU GÂTINAIS FRANÇAIS

M. Jean-Claude Mignon - Je souhaite appeler l'attention de Mme le ministre de l'environnement sur l'avenir du parc naturel du Gâtinais français et du syndicat mixte d'étude et programmation chargé d'élaborer sa charte.

Comme vous le savez, des élus de Seine-et-Marne et de l'Essonne ont décidé, en 1991, de créer un parc naturel régional entre Etampes et Fontainebleau, pour mettre en place une zone de préservation du patrimoine culturel et naturel concernant, sur plus de 63 000 hectares, une population de 63 567 habitants.

En 1994, le conseil régional d'Ile-de-France prescrivait l'élaboration de la charte et constituait un syndicat mixte réunissant conseils généraux et communes.

A l'issue d'une large concertation avec l'ensemble des partenaires locaux et les associations, la charte a été votée à l'unanimité, démontrant ainsi la réalité de la concertation.

Au début de l'année 1998, le conseil régional a transmis le dossier au préfet de région ainsi qu'au ministère de l'environnement.

Tandis que la Fédération des parcs naturels de France et le Comité national pour la protection de la nature émettaient un avis favorable, le préfet de région a rendu un avis réservé sur deux points : le projet d'infrastructure de la C5 reliant les autoroutes A5 et A6 et l'exploitation de carrières actuelles et futures.

Comme preuve de sa bonne volonté, le comité syndical a accepté de faire figurer le tracé de principe de la C5 sur le plan et de citer cette infrastructure dans la charte, bien qu'il ne soit pas obligatoire de mentionner de tels projets. Il semblait d'ailleurs prématuré de mentionner sur un document valable pendant dix ans seulement une infrastructure inscrite dans le schéma routier à long terme du schéma directeur routier d'Ile-de-France.

En ce qui concerne l'exploitation de la carrière de Chapelle-la-Reine et l'ouverture d'une nouvelle carrière à Baulne, le syndicat souhaite limiter les extractions de matériaux afin de protéger les zones boisées, le paysage et la faune.

Par ailleurs, le syndicat réfute l'argumentation de M. le préfet de région sur le risque économique pour les sociétés exploitantes. D'après les chiffres du syndicat des carriers, la survie des entreprises n'est pas menacée par les prescriptions de la charte. Ce malentendu bloque un dossier préparé avec conviction pendant plusieurs années. Il est temps de débloquer cette situation, d'autant que la survie du syndicat mixte est en jeu. En effet, la charte étant rédigée, il n'a plus d'objet et son personnel devra être licencié le 31 octobre.

Or ce syndicat mixte pourrait devenir un organe de gestion et participer à la mission relative à la réserve de biosphère que l'UNESCO s'apprête à créer près de Fontainebleau.

M. Louis Besson, secrétaire d'Etat au logement - Mme la ministre de l'environnement m'a chargé de vous dire qu'elle est très attachée à la création de ce parc naturel, qui doit résulter de la mobilisation des élus, habitants et associations du Gâtinais français.

A l'issue de la phase de consultation, M. le préfet de région a émis un avis réservé sur le projet d'infrastructure de la C5, l'exploitation de la carrière de La Chapelle-la-Reine et le projet de carrière de Baulne.

Des consultations avec les ministères de l'équipement et de l'industrie sont en cours. Le ministère de l'environnement ne manquera pas de faire valoir les positions du syndicat mixte d'étude et de programmation.

Une fois les consultations achevées, le Premier ministre sera appelé à approuver la charte de ce parc naturel régional, conformément aux dispositions réglementaires. Selon Dominique Voynet, tout laisse à penser que les échéances auxquelles vous vous référez, Monsieur le député, pourront être respectées.

AMÉLIORATION DE LA SÉCURITÉ DES TRANSPORTS SCOLAIRES

M. René André - Monsieur le Président, je tiens à saluer votre première présidence.

M. le Président - Merci !

M. René André - Le 2 juin 1998, un car transportant quarante-quatre lycéens d'Avranches était accidenté. Une jeune fille a été tuée, une autre a eu le bras arraché, quatre jeunes ont été grièvement blessés et beaucoup d'autres sérieusement atteints.

Une nouvelle fois se pose le problème de la sécurité des transports en autocar. Les associations de parents d'élèves et les établissements scolaires utilisent souvent ce mode de transport et le nombre de voyages augmente chaque année. Malgré l'amélioration du réseau routier, les limitations de vitesse et la mise en service d'une nouvelle génération d'autocars, le nombre des accidents faisant beaucoup de morts ou de blessés graves semble augmenter, si bien que les parents hésitent de plus en plus à autoriser leurs enfants à utiliser ce mode de transport. Selon les statistiques, il y a eu, dans des accidents impliquant un véhicule de transport en commun, 106 morts en 1996 et 179 en 1997. De même, on a compté 438 blessés graves en 1996 et 445 en 1997. Parmi les tués, les passagers de ces véhicules étaient 8 en 1996, mais 34 en 1997.

Il faut chercher des remèdes.

L'installation et le port de la ceinture de sécurité ne sont pas obligatoires dans les cars. Elles ne le deviendront que dans les véhicules neufs, à partir de 2001. Ne serait-il pas souhaitable que cette mesure prenne effet plus rapidement ? Dans la Manche circulent de nombreux cars étrangers : tous les jeunes britanniques sont déjà protégés par une ceinture.

Par ailleurs, ne faudrait-il pas former les chauffeurs à apporter les premiers secours aux blessés ?

De même, ne conviendrait-il pas de réserver les longs trajets aux chauffeurs expérimentés et de les interdire aux chauffeurs occasionnels ? Et deux chauffeurs ne devraient-ils pas se relayer pour effectuer les parcours de nuit ?

Le respect réel des temps de repos est aussi un problème. Sous réserve des conclusions judiciaires, il semble que dans l'accident dont ont été victimes les enfants d'Avranches, il n'y a eu qu'un respect formel des temps de conduite, sans véritable repos. Un véritable temps de repos avant de prendre le volant ne doit-il pas être imposé, avec interdiction de conduire quelque véhicule que ce soit et d'effectuer aucune activité rémunérée ?

Enfin, on est surpris par la faiblesse des structures des cars modernes. Ne sacrifie-t-on pas trop à la vue du panorama ? Les chauffeurs sont-ils suffisamment protégés en cas de collision ? Lors des renversements, nombre de pavillons sont écrasés. N'y aurait-il pas moyen de renforcer la résistance des montants latéraux des autocars ? Existe-t-il des tests qui permettent de contrôler la résistance des pavillons, comme pour les tracteurs agricoles ? Ces tests sont-ils suffisamment sévères ?

Les parents d'élèves inquiets attendent du Gouvernement qu'il prenne rapidement les mesures nécessaires pour assurer la sécurité des usagers des autocars.

M. Louis Besson, secrétaire d'Etat au logement - M. Jean-Claude Gayssot, qui participe au sommet franco-italien, m'a chargé de vous répondre.

Soucieux d'améliorer la sécurité routière, il en a fait une des priorités de son action.

Les accidents d'autocars, souvent graves et spectaculaires, nous touchent tout particulièrement lorsqu'ils concernent des enfants ou des adolescents.

Ils sont heureusement relativement rares. Aussi convient-il de développer l'usage des modes de transport collectifs, globalement bien plus sûrs que les modes de transport individuels.

De plus, le nombre d'accidents d'autocars est trop faible pour permettre de tirer des conclusions statistiques quant à leur évolution d'une année sur l'autre.

Le Gouvernement s'efforce néanmoins de faire progresser la réglementation.

Ainsi l'équipement en ceinture de sécurité sera imposé à tous les autocars neufs qui seront mis en circulation à partir du 1er octobre 1999 et la mesure est d'ores et déjà applicable pour les nouveaux types de véhicules réceptionnés depuis un an.

Pour le transport des enfants de moins de douze ans, il est nécessaire de poursuivre les études sur les systèmes de retenue les mieux adaptés à leur morphologie et à l'aménagement intérieur des autocars.

Quant à la formation des conducteurs, elle comprend depuis de nombreuses années un apprentissage de la conduite à tenir en cas d'accident de la route.

Le programme national de formation à la conduite prévoit en effet l'apprentissage du balisage du lieu de l'accident, de l'alerte des secours et de la connaissance des gestes à exécuter sans délais, ainsi que ceux qu'il convient de ne pas faire. Les candidats peuvent être interrogés sur ces questions lors de l'épreuve théorique générale de l'examen du permis de conduire.

De plus, à la suite d'une concertation étroite entre mes services, ceux de la direction de la défense et de la sécurité civile du ministère de l'intérieur, et le professeur Lareng, président de la Fédération nationale de la protection civile, il vient d'être instauré une formation de secourisme adapté aux préoccupations de sécurité routière, à l'intention des conducteurs et usagers de la route. Elle vise notamment à permettre à un témoin d'un accident de la route d'être capable d'alerter les secours, de protéger du "sur-accident" et de porter les premiers secours aux personnes en détresse.

Les chauffeurs occasionnels effectuant de petits trajets comme ceux qui voyagent sur de longues distances sont, de plus, soumis en France à un même examen dont le niveau est supérieur à celui exigé par la législation européenne. L'objectif d'une formation maximale pour tous les conducteurs est d'ailleurs partagé par les professionnels.

J'ai, d'autre part, rappelé aux services de contrôle des transports la nécessité de vérifier régulièrement le respect des temps de conduite et de repos des conducteurs. Le nombre des postes de ces contrôleurs augmentera encore cette année.

Enfin, il semble que les structures des cars panoramiques ne posent pas de problème en cas de collision, la résistance principale étant alors fournie par les châssis. En revanche, ce type de véhicule serait plus fragile en cas de retournement et il est désormais question, au niveau européen, d'imposer aux constructeurs un essai de résistance en cas de retournement.

M. René André - Présent lors de l'accident qui a fait l'an dernier quatorze morts sur l'autoroute A13, j'ai constaté que des passagers voyageant au premier rang d'un autocar avaient été grièvement blessés. Je crois qu'un vrai problème de sécurité se pose.

Il est exact que le nombre d'accidents reste peu important. Les chiffres de la DDE montrent toutefois une forte augmentation du nombre de victimes. Cinq passagers de transports en commun sont ainsi décédés sur notre territoire en 1996 et 27 en 1997.

Je regrette donc que le port de la ceinture de sécurité ne soit pas rendu obligatoire dans les autocars plus tôt, comme c'est déjà le cas chez la plupart de nos amis européens. C'est là une disposition réglementaire. Il vous appartient, Monsieur le ministre, d'agir vite pour préserver la sûreté des transports en commun.

AMORTISSEMENT DES INVESTISSEMENTS IMMOBILIERS LOCATIFS

M. Jean-Jacques Weber - Le Gouvernement a décidé de réformer le dispositif d'amortissement Périssol et de mettre en place un nouveau régime fiscal pour les logements locatifs privés.

Il s'agit d'augmenter le parc du logement social grâce à une nouvelle catégorie de logements conventionnés à mi-chemin entre le parc privé et le logement social. Vous entendez faire financer le logement social par les bailleurs privés. L'Etat se désengage ainsi au profit d'un secteur privé très encadré.

Il est d'autant moins défendable d'explorer ainsi de nouvelles voies que les crédits votés par le Parlement pour les PLA et les PLA sociaux n'ont pas été consommés en 1997.

Je m'étonne de plus que le Gouvernement, qui avait déjà cherché à stigmatiser le propriétaire-bailleur dans le projet de loi contre l'exclusion, persévère dans cette voie malgré les critiques du Conseil constitutionnel qui a émis les plus extrêmes réserves sur la taxe d'inhabitation.

Votre dispositif prévoit que le bailleur n'aura le droit de bénéficier d'un traitement fiscal plus favorable qu'à condition de louer selon des critères que l'Etat fixera unilatéralement.

Les professionnels, notamment la Chambre syndicale des promoteurs constructeurs de la région Alsace et les associations de propriétaires-bailleurs du Haut-Rhin, s'en émeuvent, car s'ils sont disposés à consentir un effort social en échange d'un avantage fiscal, cette mesure leur apparaît comme totalement anti-économique. N'envisagez-vous pas de rendre le dispositif plus incitatif, par exemple en supprimant les plafonds ? Le dispositif pourrait alors fonctionner, au bénéfice de ceux qui ont besoin de se loger.

M. Louis Besson, secrétaire d'Etat au logement - Je dois d'abord rectifier quelques inexactitudes dans votre analyse.

Tout d'abord, il était prévu dans le dispositif antérieur, qui devait jouer comme un soutien conjoncturel, qu'il cesserait de s'appliquer au 31 décembre 1998.

La réforme en cours vise à mettre en place un régime stable, dont les acteurs et les professionnels ont besoin pour engager des projets sur le moyen et le long terme. Et quelle meilleure garantie de stabilité pour une mesure que sa légitimité sociale ? Le Gouvernement a donc retenu cette formule de conventionnement, dans laquelle une aide fiscale a une contrepartie sociale et l'a étendue au parc ancien.

Les paramètres du nouveau dispositif ont été définis avec soin pour lui conserver un caractère attractif pour les épargnants : un loyer qui reste à un niveau intermédiaire, une aide fiscale significative, et une sécurité sur les loyers.

En outre, ce régime conventionné est optionnel et il subsistera un secteur totalement libre.

Aussi, le Gouvernement n'envisage-t-il pas de supprimer les plafonds de loyers ni de revenus, qui constituent l'essence même de ce dispositif. Nous suivrons toutefois avec soin les effets concrets de cette réforme.

Quant au prétendu désengagement de l'Etat du logement social que vous avez évoqué, je vous rappellerai que le parc public a bénéficié en 1998 d'un accroissement de près de 50 % de ses moyens.

Vous avez évoqué à juste titre la sous-consommation des crédits. Aussi bien me suis-je rendu, ces dernières semaines, dans plusieurs départements pour mobiliser les acteurs, organismes de HLM et collectivités locales. La représentation nationale peut participer à mon effort.

Vous avez rappelé la position du Conseil constitutionnel sur la taxe sur la vacance. Reprenez donc les propos que j'ai tenus ici même en présentant cette mesure : vous verrez qu'entre mon analyse et celle du Conseil constitutionnel, il n'y a pas la moindre divergence !

Au demeurant, vous avez sans doute noté, à la lecture du projet de loi de finances pour 1999, que le Gouvernement ne néglige pas pour autant le parc privé, puisqu'il baisse les droits de mutation ainsi que la TVA sur certains travaux.

Ce que veut le Gouvernement, c'est une offre de logements diversifiée, capable de répondre à des besoins variés. Dans le cas des bailleurs privés, il ne s'agit pas de faire financer le logement social par le parc privé, mais de susciter une offre à loyers maîtrisés pour les ménages des classes moyennes qui n'ont pas accès au logement social. Je souhaite que les professionnels de votre région se rassurent, car l'accueil est favorable au niveau national. Au reste, si le secteur du bâtiment a régressé pendant six ans -il a encore perdu 20 000 emplois en 1997-, ses effectifs sont aujourd'hui stabilisés, et des créations d'emplois pourraient même être enregistrées au second semestre. Cela montre qu'on peut concilier l'efficacité sociale et l'efficacité économique.

M. Jean-Jacques Weber - Je m'attendais à une différence d'approche politique...

M. Jean-Pierre Brard - Elle est rassurante.

M. Jean-Jacques Weber - Mais je constate que la différence d'approche est aussi sémantique. Nous sommes au moins d'accord sur la légitimité sociale du logement. Mais si vos intentions sont excellentes, il faut bien dire que le système ne fonctionne pas très bien -on peut inscrire des crédits en sachant qu'ils ne seront pas consommés. Or, les crédits PLA, notamment ceux des PLA très sociaux ne sont pas même consommés à moitié, car difficiles à utiliser par les maires. Le plafond que vous fixez est arbitraire. C'est pourquoi, d'accord avec vous sur le droit au logement, je crains que vous ne preniez pas les meilleures voies pour le mettre en oeuvre.

FERMETURE DU COMMISSARIAT DE VENDÔME

M. Maurice Leroy - Ma question s'adresse au ministre de l'intérieur et concerne le projet gouvernemental -ajourné, mais non retiré définitivement- de redéploiement des effectifs de police nationale.

Mais je tiens d'abord, en mon nom personnel, mais aussi j'en suis sûr au nom de mes collègues de l'opposition, à former des voeux chaleureux de rétablissement complet pour Jean-Pierre Chevènement, dont l'accident de santé nous a tous profondément touchés comme nous nous réjouissons de l'amélioration progressive de son état de santé. (Applaudissements sur tous les bancs)

Ma question n'est pas politicienne, car la sûreté publique est un enjeu majeur pour nos compatriotes.

Partout en France, dans les 94 zones de police concernées par votre projet de redéploiement, se sont exprimés un fort mécontentement populaire, et une vive protestation des élus comme des organisations syndicales de police.

A Vendôme, 9 000 signatures ont été recueillies en faveur du maintien du commissariat de police.

Dans cette affaire, la concertation inhérente à la méthode Jospin a pour le moins fait défaut ! Le député que je suis n'a appris le projet de fermeture du commissariat -comme d'ailleurs le maire socialiste de Vendôme- par un reportage télévisé !

Sans doute me répondrez-vous que tout cela provient d'un rapport parlementaire, celui de nos collègues Hyest et Carrez -c'est bien commode. En réalité, ce rapport ne comportait aucune carte des redéploiements. C'est le Gouvernement qui a envisagé 143, puis décidé 94 fermetures de commissariats, lors du conseil de sécurité intérieur du 27 avril. Certes, la loi d'orientation de janvier 1995, puis son décret d'application de septembre 1996, signé par Charles Pasqua, mentionnaient "la possibilité d'un retrait de la police nationale pour les villes de moins de 20 000 habitants ne connaissant pas une délinquance comparable à celles des zones urbaines". Mais la zone de police de Vendôme, qui englobe Saint-Ouen, concerne bien plus de 20 000 habitants.

Je conçois que des redéploiements soient nécessaires et qu'il faille prendre des décisions courageuses. Mais faisons-le en concertation. Et en tout cas, assumez vos propres décisions sans renvoyer la responsabilité sur vos prédécesseurs.

Pourriez-vous me dire clairement quel seuil est retenu par le conseil de sécurité intérieure ? Quels critères détermineront les décisions de fermeture ? Le maire de Vendôme a déclaré cette semaine que le commissariat ne serait pas fermé : pouvez-vous le confirmer ? Qu'en sera-t-il de Romorantin, cher à mon collègue Martin-Lalande ? Le fait que la concertation avec les préfets ait été arrêtée à la demande du Gouvernement signifie-t-il un retrait pur et simple ou n'est-ce que reculer pour mieux sauter ?

M. Louis Besson, secrétaire d'Etat au logement - Il ne s'agit pas d'opposer la police et la gendarmerie : nulle part il n'y aura retrait de compétence, mais des changements.

Le Gouvernement a en effet repris certaines conclusions du rapport parlementaire que vous avez cité, après un examen par le conseil de sécurité intérieure du 27 avril. L'objectif était de parvenir à une plus efficace répartition des effectifs et des moyens de la police et de la gendarmerie nationales.

M. Maurice Leroy - Mais selon quels critères ?

M. le Secrétaire d'Etat - En tenant compte des évolutions démographiques et de la délinquance constatée, notamment sur la voie publique, le conseil de sécurité intérieure a envisagé des hypothèses, dont l'expertise a été confiée d'abord aux préfets, avec le souci d'une large consultation des élus, des administrations et des personnels concernés.

Le ministre de l'intérieur sera très attentif au cas de Vendôme que vous signalez. En toute hypothèse, le Gouvernement a décidé récemment d'élargir encore la concertation en confiant l'ensemble de la mission à M. Guy Fougier, conseiller d'Etat. Le résultat des expertises techniques et des consultations locales sera communiqué en fin d'année aux ministres de l'intérieur et de la défense. Alors seulement, des décisions seront prises.

M. Maurice Leroy - Vous n'avez pas répondu sur les 20 000 habitants.

M. le Secrétaire d'Etat - C'était en effet le seuil retenu. Il ne sera éventuellement modifié qu'après la consultation dont je viens de parler.

M. Maurice Leroy - La zone police Vendôme-Saint-Ouen totalise plus de 21 000 habitants, alors que selon le décret le seuil est de 20 000 ! Pourquoi Vendôme figure-t-elle sur cette carte ?

Quant à la concertation, je répète qu'elle n'a pas eu lieu.

FINANCEMENT DES SERVICES D'INCENDIE ET DE SECOURS

M. Yves Dauge - Le financement des services départementaux d'incendie et de secours est une question très grave. Si nous n'arrivons pas à définir, entre le département et les communes d'une part, l'Etat d'autre part, un plan précis d'évaluation des besoins en équipement et moyens de fonctionnement et à clarifier les financements, nous allons aboutir à des tensions et conflits graves avec les personnels, eux-mêmes soumis à de fortes demandes de la part de la population. Ce plan sur cinq ans devrait être établi dans chaque département et préciser les modalités de financement.

A ce propos, on évoque souvent l'exemple des pays étrangers, en particulier la Suisse, où les compagnies d'assurances participent au financement des services de secours. Cela parait assez logique. Si on ne fait appel qu'aux seuls contribuables locaux, il sera impossible de répondre aux besoins sans une augmentation insupportable des dotations communales. On n'y arrivera pas ! Il est temps de mettre ce dossier à plat, sinon nous risquons de graves tensions et des arrêts de travail dans un secteur qui ressort pourtant des missions de service public élémentaires -la population ne le comprendrait pas.

M. Louis Besson, secrétaire d'Etat au logement - Le ministre de l'intérieur lira avec attention vos observations. Dans l'immédiat, il m'a prié de vous communiquer les éléments suivants.

En juin dernier M. Chevènement a rencontré les présidents des conseils d'administration des services départementaux d'incendie et de secours et le problème du financement a été évoqué. Il ressort des analyses menées conjointement par le ministère et l'association des présidents des conseils d'administration que la réforme opérée par les lois du 3 mai 1996 n'a pas entraîné de hausse mécanique des dépenses, sauf dans certains départements où la départementalisation n'avait pas encore été engagée. Les dispositions relatives au statut et aux indemnités des pompiers professionnels, ainsi que celles encourageant le volontariat peuvent également induire des augmentations de charges.

Aussi convient-il de bien maîtriser l'évolution des dépenses par la recherche d'une bonne adéquation des moyens aux objectifs et aux besoins, déterminés notamment par les schémas départementaux d'analyse et de couverture des risques, schémas actuellement en cours d'élaboration. Par ailleurs, certaines actions telles que l'acquisition des matériels ou la formation peuvent être effectuées en commun par plusieurs départements.

Quant à la recherche de ressources extra-budgétaires provenant notamment des compagnies d'assurances, elle est actuellement en cours d'examen.

L'analyse des expériences menées à l'étranger est également entreprise.

La réflexion sur cette importante réforme doit se poursuivre, particulièrement avec les nouveaux interlocuteurs que sont les responsables des nouveaux établissements publics départementaux.

INDEMNISATION DES JUIFS SPOLIÉS PENDANT L'OCCUPATION

M. Jean-Pierre Brard - Ma question s'adresse à Mme Guigou, ministre de la justice, et concerne la spoliation des juifs, français ou réfugiés en France, par l'occupant nazi et par l'Etat français de Vichy.

Cette spoliation nécessite des réparations équitables, à l'initiative du Gouvernement -réparations qui devraient d'ailleurs s'étendre aux personnes spoliées du fait de leurs actes d'opposition à l'occupant au premier chef, les résistants.

Le précédent Premier ministre a engagé cette démarche en février 1997, par une mission confiée à M. Matteoli qui a présenté, en décembre 1997, un rapport d'étape.

M. Matteoli y reconnait, avec un certain sens de la litote, que la conservation et l'accès aux archives n'est généralement pas une priorité des administrations concernées. Il relève néanmoins une exception notable, la Caisse des dépôts et consignations, où depuis quatre ans une vingtaine de personnes mènent des recherches approfondies, sous l'impulsion des directeurs successifs de l'établissement, M. Philippe Lagayette, puis M. Daniel Lebègue.

Les spoliations ont été multiformes, les bénéficiaires divers et souvent mal connus. Se pose donc la question des moyens humains et matériels à mettre en oeuvre pour effectuer les recherches et celle des outils juridiques à créer pour remplir l'objectif de réparation. Ce dernier point concerne particulièrement les secteurs de la banque, des assurances et du notariat ; on ne saurait admettre que des obstacles juridiques s'opposent à l'accomplissement de ce qui constitue un devoir moral.

Quelles sont les dispositions prévues concernant les travaux de la mission d'étude, les indemnisations incombant à l'Etat et les évolutions législatives nécessaires pour aboutir à une juste réparation ?

Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice - Le Gouvernement, comme vous, tient à ce que toute la lumière soit faite sur cet événement dramatique que constitue la spoliation des juifs, français ou réfugiés sur notre sol, par l'occupant et les autorités de Vichy et souhaite que toutes les conséquences en soient étudiées et réparées.

Depuis son installation en février 1997 par le précédent Premier ministre, la mission Matteoli qui poursuit ses travaux dans la plus totale indépendance, a déjà accompli un important travail d'exploitation des archives. L'ensemble des administrations concourt à faciliter sa tâche dans la plus complète transparence.

M. Matteoli a remis un rapport d'étape au Premier ministre le 12 janvier dernier, rapport qui ne se voulait pas définitif.

En ce qui concerne les secteurs de la banque et de l'assurance, deux comités de surveillance ont été mis en place, au cours du premier semestre de cette année, en accord avec les professions. Le premier, concernant le secteur bancaire, a été constitué sous l'égide du Conseil national du crédit par le ministre des finances et placé sous la direction de Jean Saint-Geours, ancien président de la commission des opérations de bourse. Le second, qui travaille sur le secteur des assurances, a été mis en place par la commission Matteoli ; il est présidé par Jacques-Henri Gougenheim, ancien directeur général de l'UAP et président de la banque Worms. La mission Matteoli recevra leurs conclusions avant la fin de l'année. Elle remettra son prochain rapport annuel au Premier ministre le 31 décembre prochain ; le Gouvernement examinera, le moment venu, les conséquences à en tirer.

M. Jean-Pierre Brard - Je vous remercie, Madame la ministre : je constate que le Gouvernement ne faiblit pas dans sa volonté de transparence. Le récent procès Papon a montré qu'il n'était pas toujours facile de l'assurer. Votre détermination est nécessaire pour obtenir des administrations le concours qui convient. Notre pays doit être en règle avec son passé ; trop de criminels ont quitté ce monde sans rendre des comptes.

SITUATION DES FAMILLES AGRÉÉES ACCUEILLANT DES PERSONNES ÂGÉES OU HANDICAPÉES

M. André Godin - Ma question s'adresse à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité. Les familles qui accueillent des personnes âgées ou handicapées assurent à celles-ci un environnement affectif sans équivalent, pour un coût généralement beaucoup moins élevé que celui des institutions de long séjour. Mais leur travail ne trouve pas toujours sa juste contrepartie en termes de garanties sociales : leur couverture sociale est souvent incomplète du fait de la faiblesse des rémunérations, un seul trimestre de retraite est validé pour quatre réellement travaillés ; les accueillants ne bénéficient ni des congés payés ni des allocations de chômage. Le contrat qui les lie aux accueillis n'étant pas un contrat de travail, mais un accord relatif à un régime indemnitaire, ils sont exclus du champ d'application du droit du travail et ne bénéficient de notre système social qu'en matière de maladie et de retraite. Des améliorations sont-elles possibles ?

Mme Nicole Pery, secrétaire d'Etat à la formation professionnelle - Aujourd'hui près de 9 000 personnes agrées accueillent plus de 11 700 personnes âgées ou handicapées adultes : c'est dire l'importance de l'accueil familial, formule qui a longtemps été sous-estimée malgré ses nombreux avantages, tant pour la collectivité que pour les personnes accueillies, dont les liens avec l'environnement antérieur peuvent être ainsi plus facilement maintenus.

Les familles d'accueil, au regard des efforts importants qui leurs sont demandés, ont des conditions de rémunération et une couverture sociale qui ne paraissent pas totalement satisfaisantes. L'absence d'un véritable statut de salarié a limité le développement de ce mode d'accueil -qui, en outre, peut générer des emplois de proximité. Mme Aubry a donc demandé à un groupe de travail associant des représentants des conseils généraux et son administration de réaliser une étude. Après avoir auditionné les principaux organismes intéressés, il a dressé un état des lieux, sans parvenir malheureusement à formuler des propositions de réforme. La concertation doit donc se poursuivre avec l'assemblée des présidents des conseils généraux et les principales fédérations. Soyez assuré que Mme Aubry sera très attentive à ces travaux, dont l'aboutissement est essentiel pour ces familles dont il faut à nouveau saluer le dévouement.

SITUATION DE CERTAINS RETRAITÉS DU GROUPE CREUSOT-LOIRE INDUSTRIES

M. François Rochebloine - Ma question s'adresse à Mme le ministre de l'emploi, dont je regrette l'absence.

A la fin de 1992, alors qu'il fallait accompagner de nouvelles restructurations dans le secteur sidérurgique, Mme Aubry, déjà à ces mêmes fonctions, avait accepté le recours à l'article 36 de la convention sur l'emploi signée le 29 octobre 1990, prévoyant le départ anticipé, dès 50 ans, selon la procédure du congé longue durée, de certains personnels. Plusieurs milliers de salariés ont été concernés sur l'ensemble des sites sidérurgiques. Pour beaucoup, cette mesure apparaissait comme le prolongement de la procédure CGPS. Or lors de la reconstitution de leur carrière, quelle ne fut pas la surprise de certains à constater que leur employeur s'était dispensé de verser, pendant les cinq années de CLD, soit quand ils avaient entre 50 et 55 ans, sa part de cotisation vieillesse ! Comment ne pas comprendre l'amertume des quelque 5 000 anciens salariés du groupe Creusot-Loire Industries, dont les années de CLD ne sont pas incluses dans la période de référence ?

Une première réponse avait certes été apportée avec la validation des trimestres de CLD à l'issue des discussions, en 1996, entre le groupement des entreprises sidérurgiques et minières et la CNAVTS, permettant le départ en retraite à 60 ans. Reste le problème de la non valorisation de ces trimestres, qui entraîne pour les retraités une perte de revenu de 8 à 10 %.

L'article 36 de l'accord de 1990 caractérisait ainsi le CLD : adhésion individuelle des salariés ; maintien dans les effectifs de l'établissement et suspensions d'activité ; sécurité sociale identique à celle d'une situation d'activité ; régime de cotisations de retraite identique, les cotisations étant à la charge exclusive de l'employeur... Mme la ministre de l'emploi a été alertée par plusieurs préfets et par des élus sur le non-respect de ces dispositions ; elle a dû également être informée de l'organisation d'une manifestation devant le siège du GISIM à Metz le 9 juin dernier. Mais, à ma connaissance, les pouvoirs publics n'ont pas réagi.

Je voudrais aussi évoquer la retraite complémentaire de ces salariés. Aujourd'hui, l'attribution de points gratuits est suspendue, l'Etat n'ayant, semble-t-il, toujours pas honoré ses engagements auprès des caisses. Un agent aurait été nommé l'an dernier ; où en est-on ? De nombreux préretraités découvrent cette situation et se sentent pris en otage. Là aussi, il y a urgence. Sur ces deux dossiers, quelles sont les intentions du Gouvernement ?

Mme Nicole Pery, secrétaire d'Etat à la formation professionnelle - Ma réponse ne sera peut-être pas aussi précise que votre question...

M. François Rochebloine - C'est pourquoi j'ai déploré l'absence de Mme la ministre de l'emploi !

Mme la Secrétaire d'Etat - ...Mais, si l'écart apparaissait trop grand, je ne manquerais pas de saisir Mme Aubry, que je dois rencontrer à 13 heures.

Le congé de longue durée est une mesure sectorielle temporaire en faveur des entreprises qui, dans le cadre d'accords professionnels ou interprofessionnels, nationaux ou régionaux, lancent un programme de reclassement de leurs effectifs ; ce programme doit comporter des actions de réinsertion professionnelle préalables aux suppressions d'emplois, et garantir aux salariés concernés un revenu égal à un pourcentage de la rémunération brute perçue antérieurement.

Quelque 5 000 salariés de la sidérurgie sont entrés dans le dispositif ouvert, aux termes d'une convention du 22 octobre 1990, jusqu'au 31 décembre 1995. Cependant, je ne saurais vous suivre lorsque vous affirmez qu'Usinor-Sacilor a manqué à ses obligations d'employeur : selon le code du travail, les revenus perçus par les bénéficiaires du congé de longue durée sont exonérés de toute cotisation de sécurité sociale, patronale comme salariale ...

M. François Rochebloine - Quid, dans ce cas, de l'article 36 ?

Mme le Secrétaire d'Etat - Je vous ai entendu mais il s'agit ici du code du travail.

Comme vous l'avez vous-même signalé, les périodes passées en CLD ont été validées gratuitement par le régime d'assurance vieillesse, à raison de quatre trimestres par an.

M. François Rochebloine - Oui, mais dans un deuxième temps !

Mme le Secrétaire d'Etat - Cette mesure a amélioré le taux de la pension de retraite versée aux intéressés et majoré la durée d'assurance prise en compte, de sorte que la situation de ces personnes est strictement identique à celle des titulaires d'allocation de chômage ou de préretraites, par exemple.

Les accords de 1990 sont donc parfaitement conformes au régime de droit commun.

L'absence de tout prélèvement de cotisations vieillesse signifie, selon vous, que les salaires ou revenus perçus au titre des années passées en CLD ne sont pas pris en compte pour déterminer le salaire annuel moyen servant à calculer la pension du régime général. Je vous ferai observer qu'en toute hypothèse, la prise en compte d'allocations égales à 70 % seulement du salaire de référence a peu de chance d'améliorer le salaire annuel moyen.

Le problème des régimes complémentaires est sensiblement différent. En effet, conformément aux accords conclus, les employeurs acquittent les cotisations et les périodes de congé de longue durée sont donc régulièrement validées. Il n'y a donc pas sur ce point, à ma connaissance, de contentieux.

En revanche, pour les salariés qui, depuis le 1er juillet 1996, ont basculé après leur congé de longue durée dans un régime de préretraite du Fonds national pour l'emploi, il est exact qu'ils sont touchés par la décision, prise par les partenaires sociaux gestionnaires des régimes ARRCO et AGIRC, de suspendre les points attribués au titre du CLD dans l'attente d'un remboursement de l'Etat.

M. François Rochebloine - Eh bien ?

Mme le Secrétaire d'Etat - Cette décision soudaine a naturellement conduit Mme Aubry à rencontrer personnellement les présidents de l'ARRCO et l'AGIRC, en vue d'une expertise technique. Chacun est convenu qu'il fallait étudier toutes les solutions propres à répondre aux inquiétudes des salariés et les services et le cabinet du ministre y travaillent actuellement.

M. François Rochebloine - Tout cela n'est guère conforme à l'article 36 ! Selon vous, les anciens salariés de Creusot-Loire n'auraient rien à attendre de la valorisation : c'est extrêmement grave car ce n'est pas ce qui était dit dans les accords qu'ils ont signés !

D'autre part, il importe de mettre au plus vite fin à la suspension de l'attribution gratuite de points : les discussions durent depuis déjà un an ! Je compte sur vous, Madame, pour transmettre ce voeu à Mme Aubry.

INDEMNISATION DES PROPRIÉTAIRES DE VÉHICULES ENDOMMAGÉS
À LA SUITE DE VIOLENCES URBAINES

M. Jacky Darne - Pour nombre de familles modestes, la voiture est le principal élément du patrimoine. Or, dans certains quartiers ou dans certaines communes, il arrive trop fréquemment que ces véhicules soient incendiés. Les victimes en ressentent un sentiment de révolte compréhensible, tandis que les élus ne peuvent assister impassibles à ces violences -comment pourraient-ils tolérer, par exemple, que le feu mis à trois voitures se propage à l'école voisine ? Mais se pose aussi le problème de l'indemnisation de ces dommages : à moins que les propriétaires ne soient assurés tous risques, cette indemnisation est nulle ou très inférieure à la valeur d'usage du véhicule, souvent ancien.

Le ministre de l'intérieur, que j'avais interrogé à ce sujet, a transmis ma question à son collègue des finances. Celui-ci m'a fait savoir que les communes pourraient dorénavant souscrire un contrat d'assurance permettant d'indemniser les propriétaires dès lors que ceux-ci relèveraient de l'aide sociale obligatoire. Outre que ces collectivités ne sont pas toujours en mesure de souscrire de telles polices, cette assurance ne bénéficierait qu'à un public bien restreint. Pourquoi ne pas créer un fonds spécial permettant de réparer intégralement le dommage dès lors qu'il aurait été constaté par la police ou par la gendarmerie ? Le dispositif existe déjà pour d'autres sinistres, moyennant une cotisation à la charge des compagnies d'assurances, et ce ne serait là aussi que l'exercice d'une juste solidarité.

Mme Nicole Pery, secrétaire d'Etat à la formation professionnelle - Les victimes de ces dommages sont souvent, en effet, des personnes de condition modeste, demeurant dans les quartiers mal desservis par les transports en commun, de sorte que l'immobilisation ou la perte de leur véhicule aggrave encore leur situation.

M. Roland Carraz avait, en début d'année, déposé une proposition de loi visant à faire indemniser ces personnes par les commissions d'indemnisation des victimes d'infractions. Cette proposition n'a pas été retenue dans la mesure où elle majorait fortement la taxe additionnelle, actuellement de 20 F par contrat d'assurance automobile souscrit, qui abonde le fonds d'indemnisation. D'autre part, le Gouvernement réfléchissait, de son côté, à un autre dispositif.

Celui-ci, aujourd'hui mis en oeuvre, est une formule novatrice d'assurance : dans le cadre de l'aide sociale facultative, quand une commune choisit d'accorder des aides aux propriétaires de véhicules incendiés, elle peut souscrire un contrat d'assurance garantissant partiellement les dépassements du budget qu'elle affecte à ce type de mesure sociale. L'assureur intervient dès que le total des aides versées dépasse une franchise fixée entre lui-même et la collectivité.

Ce dispositif, clairement défini, se met actuellement en place et il faut contribuer à le faire mieux connaître. Le Gouvernement en dressera un bilan d'ici à quelques mois.

Parallèlement, le Premier ministre a souhaité que se constitue un groupe de travail interministériel et partenarial sur la question de l'aide aux victimes d'infractions. La politique, lancée par M. Badinter au début des années 1980, a permis d'améliorer considérablement l'indemnisation des victimes d'agressions, de préjudices corporels graves ou d'attentats terroristes, de même que des personnes disposant de faibles ressources victimes de vols ou d'escroqueries. Les sommes sont versées par des juridictions, les commissions d'indemnisation des victimes d'infractions, sur un fonds alimenté par des prélèvements sur les contrats d'assurance automobile.

Aujourd'hui, il faut donner une nouvelle impulsion à cette politique de solidarité nationale. C'est à quoi travaillera le groupe de réflexion, qui doit d'ailleurs être associé au prochain conseil de sécurité intérieure, prévu pour le 12 octobre.

M. Jacky Darne - Je vous remercie pour ces informations. Cependant, on ne peut demander à des communes victimes de la violence urbaine de financer elles-mêmes les mécanismes de solidarité. Les contrats d'assurance devraient être souscrits par l'Etat et gérés par les préfectures. En outre, pour être indemnisé, il faut bénéficier non pas de l'aide sociale facultative, mais de l'aide sociale obligatoire, ce qui limite considérablement le nombre des intéressés. Le dispositif est donc loin d'être satisfaisant.

STATUT DES GUIDES INTERPRÈTES ET DES GUIDES CONFÉRENCIERS

M. Jacky Darne, suppléant M. Pierre Forgues - M. Pierre Forgues m'a demandé de vous interroger sur la situation des guides interprètes et des guides conférenciers, qui ne jouissent d'aucun statut alors que leur compétence est connue et qu'ils sont utiles à la valorisation des sites touristiques. Ils sont parfois recrutés par des employeurs étrangers qui peuvent les rémunérer dans des conditions privilégiées. Pour assurer leur couverture sociale, les guides sont souvent amenés à se déclarer travailleurs indépendants ou à se regrouper en association. Il leur est alors appliqué un taux de TVA de 20,6 %, ce qui est injuste en comparaison des impositions pratiquées dans les autres pays.

Quelles mesures comptez-vous prendre en matière de statut et d'imposition ?

Mme Michelle Demessine, secrétaire d'Etat au tourisme - Les difficultés liées à la situation professionnelle des guides m'ont été signalées par les représentants de la profession au printemps dernier.

J'ai immédiatement mis en place un groupe de travail associant la Fédération nationale des guides interprètes, le syndicat national des professions du tourisme, le ministère de la culture et mon secrétariat d'Etat. Une première réunion s'est tenue en avril 1998 et la plus récente le 11 septembre dernier.

Ces réunions ont permis d'élaborer un programme de travail sur les conditions d'exercice de la profession, la fiscalité et le statut. Sur la base de ces travaux, je vais saisir M. le secrétaire d'Etat au budget, afin qu'il réfléchisse à une évolution du régime fiscal, en prenant en compte les conditions de concurrence au sein de l'Union européenne.

S'agissant du statut, je vais m'adresser à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité, afin que la spécificité de cette profession soit davantage prise en compte.

De plus, j'ai chargé l'Inspection générale du tourisme de procéder à une étude et de me faire des propositions, en liaison avec les professions et les administrations intéressées, sur les métiers de guides, en vue de clarifier les usages et de simplifier les réglementations.

J'ajoute que les guides-conférenciers réclamaient, depuis plusieurs années, l'organisation d'un examen national sanctionnant leur qualification. Il a eu lieu au mois de septembre.

Monsieur le député, je suis très attentive à tout ce qui concerne le statut professionnel des travailleurs, salariés ou non, dans le secteur du tourisme, car la qualité des ressources humaines et des relations sociales conditionne la qualité de notre offre touristique. C'est pourquoi j'entends traiter ces questions dans la plus large concertation.

UTILISATION DE SEMENCES FERMIÈRES PAR LES AGRICULTEURS

Mme Marie-Hélène Aubert - Au moment où nous examinons le projet de loi d'orientation agricole, je souhaite évoquer le problème des semences fermières, qui préoccupe un grand nombre d'agriculteurs. En Eure-et-Loire, 80 % des exploitants utilisent ces semences.

Nous approuvons la récente interdiction du Lindane, car il s'agit d'un produit dangereux, mais les produits de substitution ne sont pas disponibles -ils sont conditionnés de telle manière qu'on ne peut les acquérir individuellement. J'ai d'ailleurs interrogé vos services à ce propos, pour savoir s'il n'y a pas là une forme de refus de vente.

En outre, la prime au blé dur n'est plus attribuée que si le bénéficiaire utilise des semences certifiées.

Enfin, la SICASOV a imposé une redevance sur les semences fermières équivalente à 50 % de celle qui est prélevée sur les semences certifiées, en s'appuyant sur une réglementation européenne.

Les grandes firmes phyto-pharmaceutiques resserrent leur emprise dans le domaine des semences, sachant que des profits considérables peuvent y être réalisés.

Quant au Gouvernement, il n'a toujours pas pris position. Il n'existe à ma connaissance aucune réglementation en France, si bien que nous nous référons toujours aux textes européens.

Comment comptez-vous résoudre le problème des substituts au Lindane ? Allez-vous fixer des objectifs à la recherche publique dans le domaine des variétés végétales ? Actuellement, ce sont les firmes privées qui définissent les axes de recherche.

Enfin, qu'il s'agisse des organismes génétiquement modifiés ou des semences, que comptez-vous faire pour que nos agriculteurs conservent leur autonomie ?

M. Louis Le Pensec, ministre de l'agriculture et de la pêche - Le Lindane est un insecticide polyvalent très rémanent, qui pollue l'eau. C'est pourquoi, le 1er juillet 1998, j'ai décidé de l'interdire.

A ma demande, la direction générale de l'alimentation de mon ministère a traité rapidement les dossiers de demandes d'homologation de produits équivalents. C'est ainsi que les spécialités à base d'immidaclopride, de fipronil et de téfluthrine ont pu recevoir les autorisations de mise sur le marché.

Vous savez que les sociétés phytopharmaceutiques décident elles-mêmes du conditionnement des traitements des semences. Mes services ont eu l'occasion de les sensibiliser aux besoins des agriculteurs. Nous ne manquerons pas de vous tenir informée des évolutions observées.

En ce qui concerne l'obligation d'utiliser des semences certifiées de blé dur, la Commission européenne a jugé qu'il fallait adapter la production aux besoins des industries utilisatrices. Ces dernières années, nous avions en effet constaté qu'une partie de la production de blé dur était destinée à des utilisations fourragères, ce qui n'est pas compatible avec les exigences de qualité des industries. Le nouveau dispositif adopté par le conseil des ministres de l'agriculture européen, s'appliquera à compter de la récolte 1999. Mais un dispositif progressif, échelonné sur trois campagnes, à compter de 1998-99, a été prévu à la demande de la France.

En outre, j'ai obtenu que la quantité de semences certifiées à utiliser en France soit fixée à un niveau très raisonnable.

Lors du Conseil des ministres du 20  juillet 1998, j'ai une nouvelle fois signalé les difficultés provoquées par ce nouveau dispositif.

Enfin, les mouvements de concentration en cours dans les secteurs phytosanitaire et des semences vous inquiètent à juste titre. Ils résultent de l'analyse stratégique que font les firmes des applications de la recherche dans le domaine des biotechnologies. Nous souhaitons qu'en tout état de cause, les agriculteurs puissent bénéficier des progrès qui pourraient être obtenus. Les pouvoirs publics ont donc décidé de soutenir le programme Genoplante, auquel participent l'INRA, le CNRS, l'OSTOM et le CIRAD.

Il importe de préserve le secteur semencier français qui se place au troisième rang mondial. Les agriculteurs français ont besoin de ne pas être dépendants de firmes et de technologies étrangères pour leur approvisionnement en semences. C'est une question stratégique. Par conséquent, lors d'un prochain Conseil des ministres de l'agriculture, je proposerai à mes homologues une politique des biotechnologies qui corresponde réellement à nos intérêts agricoles pour l'avenir.

Mme Marie-Hélène Aubert - Je vous remercie. L'argument de la fraude ne peut en aucun cas justifier l'obligation d'utiliser des semences certifiées pour le blé dur. Il s'agit là d'une mauvaise solution. Nous comptons sur votre détermination pour préserve ce secteur.

MESURES EN FAVEUR DES PRODUCTEURS DE COGNAC

M. Dominique Bussereau - Monsieur le ministre de l'agriculture, ma question aurait pu être posée par chacun de mes collègues des deux départements charentais, touchés par une crise sans précédent.

Une manifestation importante a eu lieu la semaine dernière. Elle s'est déroulée sans violence, mais les élus et les producteurs de cognac ont montré leur détermination.

On connaît les causes de cette crise : surproduction, sur-stokage, et là-dessus la crise en Asie et en Russie...

J'ai déclaré à votre directeur de cabinet que les mesures prises par le Gouvernement étaient insuffisantes. Je ne l'ai pas fait simplement parce que je suis un parlementaire de l'opposition : le Gouvernement doit faire un effort sans précédent pour cette région en difficulté. Il doit prévoir d'urgence des aides à la trésorerie et prendre en charge à 50 % les cotisations de la Mutualité sociale agricole.

La mise en place d'un système spécifique d'allègement des charges patronales sur la main-d'oeuvre viticole salariée est également nécessaire.

La renégociation des prêts bancaires et des trésoreries structurelles agricoles s'impose aussi. Il faudrait en particulier une baisse des taux d'intérêt et un élargissement de bonification pour tous les établissements de crédit ayant des encours viticoles.

Une revendication forte de notre région est également la création d'une incitation financière à la distillation préventive dont une aide à l'hectare d'environ 1 000 F.

Il faudrait de plus que nous connaissions au plus tard le 1er octobre l'organisation de la future campagne viticole.

En matière fiscale, l'étalement des impôts est absolument nécessaire. Il conviendrait encore de réviser l'assiette des cotisations sociales et les dispositions régissant l'imposition des stocks et la transmission du patrimoine.

En outre une charte des prix doit garantir les revenus des producteurs.

Enfin il faut défendre les marchés d'exportation en accroissant le budget de promotion du cognac, en empêchant l'utilisation de sa notoriété par d'autres produits spiritueux et en accordant à chaque viticulteur la possibilité de disposer en franchise de droits et taxes d'un stock de bouteilles pour assurer eux-mêmes leur promotion.

M. Louis Le Pensec, ministre de l'agriculture et de la pêche - La crise que traverse la viticulture charentaise est grave et ancienne.

La diminution des ventes, perceptible depuis quelques années, s'est amplifiée avec la crise financière des pays du Pacifique, que n'a pas compensé le développement du marché américain.

Face à cette situation, j'ai d'abord souhaité que soient légitimés les porte-parole contestés de la profession. Des élections ont donc été organisées, à l'initiative des pouvoirs publics, en juin dernier. L'interprofession renouvelée a ainsi pu adopter en juillet un plan d'adaptation du vignoble.

Bien que ce plan me paraisse trop conjoncturel, j'ai pris la décision de l'accepter et de mettre sans délai en application les propositions de l'interprofession.

Les mesures de campagne sont donc en cours de publication.

Ce dispositif ne suffira pas à redonner des perspectives à la viticulture charentaise : une adaptation structurelle plus ambitieuse est nécessaire.

Elle nécessitera incontestablement des moyens adéquats, que je souhaite pouvoir orienter vers ceux des viticulteurs qui feront clairement le choix, d'une part d'un allégement à court terme des volumes excédentaires par le biais de la distillation préventive dont j'ai demandé la mise en place au niveau européen, et d'autre part d'un engagement dans une restructuration de leur vignoble, selon des modalités à définir. J'ai proposé un calendrier de discussions avec les représentants de la profession, dont l'objectif est d'aboutir à un dispositif opérationnel début novembre.

Un effort spécifique doit en particulier être fait en faveur des jeunes viticulteurs, ainsi que pour ceux qui feront un effort d'organisation collective accru.

M. Dominique Bussereau - Vous avez pris conscience de la gravité de la situation. Il faut toutefois annoncer rapidement des mesures financières concrètes. L'amertume était en effet grande quand les barrages autour de Cognac ont été levés mercredi et peut laisser craindre des violences après les vendanges tant la désespérance est grande.

M. le Président - Nous avons terminé les questions orales sans débat.

Prochaine séance cet après-midi, à 15 heures.

La séance est levée à 13 heures 5.

          Le Directeur du service
          des comptes rendus analytiques,

          Jacques BOUFFIER

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ERRATUM

au compte rendu analytique de la 2ème séance du lundi 5 octobre 1998

Page 9, dans l'intervention de M. Michel Grégoire, à la fin du 1er paragraphe, lire :
à la place de "ce n'est pas bon", "ce n'est pas trop".


© Assemblée nationale


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