Accueil > Archives de la XIe législature > Les comptes rendus > Les comptes rendus analytiques (1998-1999)

Assemblée nationale

COMPTE RENDU

ANALYTIQUE OFFICIEL

Session ordinaire de 1998-1999 - 5ème jour de séance, 12ème séance

3ème SÉANCE DU JEUDI 8 OCTOBRE 1998

PRÉSIDENCE DE M. Patrick OLLIER

vice-président

          SOMMAIRE :

LOI D'ORIENTATION AGRICOLE (suite) 1

    APRÈS L'ART. 16 1

    ART. 17 2

    APRÈS L'ART. 17 2

    AVANT L'ART. 18 5

    ART. 18 5

    APRÈS L'ART. 18 7

    ART. 20 7

    ART. 21 8

    ART. 22 8

    ART. 23 10

    ART. 22 (précédemment réservé) 11

    ART. 24 11

    APRÈS L'ART. 24 12

    ART. 25 12

    APRÈS L'ART. 25 13

    ART. 26 13

    ART. 27 13

    APRÈS L'ART. 27 15

    ART. 28 16

La séance est ouverte à vingt et une heures.


Top Of Page

LOI D'ORIENTATION AGRICOLE (suite)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi d'orientation agricole.

APRÈS L'ART. 16

M. Christian Jacob - L'amendement 794 de M. Baroin permet aux CDOA de constituer des sections spécialisées par régions naturelles.

M. François Patriat, rapporteur de la commission de la production - La commission l'a repoussé, pour les motifs que j'ai déjà exposés cet après-midi (Exclamations sur les bancs du groupe du RPR).

M. Louis Le Pensec, ministre de l'agriculture et de la pêche - L'organisation des CDOA est du domaine réglementaire.

M. Christian Jacob - J'en conviens, mais j'aurais souhaité que le rapporteur soit plus prolixe...

L'amendement 794 est retiré.

ART. 17

M. le Rapporteur - L'amendement 118 est rédactionnel, et l'amendement 119 est de précision.

Les amendements 118 et 119, acceptés par le Gouvernement, successivement mis aux voix, sont adoptés, de même que l'article 17, ainsi modifié.

APRÈS L'ART. 17

M. Jean Proriol - L'amendement 791 de M. Gatignol tend à abroger l'article L. 123-6 du code rural, qui impose aux propriétaires exploitants une contrainte inutile en interdisant la création de plus d'une parcelle dans une masse de répartition, ce qui fait problème lorsqu'une partie du terrain est hypothéquée, ou encore, dans le cas d'un remembrement, lorsque l'importance de la surface totale requiert l'intervention d'un géomètre. L'amendement 790 est de repli : il s'agit d'autoriser le regroupement de plusieurs numéros de cadastre dans une même parcelle.

M. le Rapporteur - La commission a repoussé ces amendements, car la question du remembrement n'a rien à voir avec celle du contrôle des structures.

M. le Ministre - Aucun de ces deux amendements n'est opportun, car des dérogations sont possibles si la situation le justifie, et le projet de décret les rendra même systématiques en pareil cas, par exemple afin d'éviter que ne disparaisse une dénomination de lieu-dit. Je crois que le problème des hypothèques pourra être réglé dans ce cadre.

M. Christian Jacob - L'amendement présente un intérêt supplémentaire : celui de simplifier les déclarations d'assolement. Il n'est pas rare, dans mon département, qu'une exploitation de 50 hectares comporte quelque 70 ou 80 parcelles.

M. Jean Proriol - Le remembrement n'est-il pas le plus sûr remède à l'éclatement des structures ? Je donne acte au ministre de ses propos, mais il faut encore simplifier les choses sur le plan cadastral.

M. le Ministre - Je ne suis pas sûr que l'argument de M. Jacob serve vraiment la défense des amendements... (Protestations sur les bancs du groupe du RPR)

Les amendements 791 et 790, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. François Guillaume - Notre amendement 335 tend à soumettre à un barème fixé par arrêté préfectoral les taux de fermage des biens agricoles du domaine public appartenant aux collectivités publiques. Actuellement, ces biens -je pense par exemple à des parcelles de base aérienne non occupées par des pistes- sont loués, après mise aux enchères, à des agriculteurs ou des éleveurs à des prix qui sont ensuite réévalués annuellement, sur la base de je ne sais quel indice, par le service des Domaines. De sorte qu'on atteint des taux très élevés, alors même que ces biens sont mis en location pour un temps très limité. Il est tout de même paradoxal de combiner précarité et taux de fermage élevés. Les encadrer par un barème préfectoral, négocié entre l'autorité administrative et les représentants des organisations agricoles, serait de nature à éviter de tels abus.

M. le Rapporteur - Vous posez un vrai problème et sur le fond je suis d'accord avec vous. Mais il y a un problème de forme car les baux ruraux n'entrent pas dans le champ du contrôle des structures.

M. le Ministre - M. Guillaume a été entendu puisque le ministre de l'économie et des finances a été saisi de ce dossier. La direction générale des impôts a fait des propositions de tarifs dans l'esprit souhaité par M. Guillaume et le tout fera l'objet d'une instruction aux services fiscaux.

M. François Guillaume - Je remercie le ministre de m'avoir compris et, tout en espérant que les décisions finales nous seront vite communiquées, je retire mon amendement.

M. François Colcombet - Mon amendement 812 rectifié tend à ce que les élevages hors-sol qui émettent au moins 2 000 kg d'azote par an avant tout procédé de dépollution ou tout épandage relèvent du régime de l'autorisation.

Actuellement, la création d'un élevage hors-sol obéit à plusieurs régimes. Au-dessous de 50 porcs, aucune déclaration n'est nécessaire. De 50 à 449 porcs, il en faut une et de 500 à plus, c'est le régime de l'autorisation, plus lourd, qui s'applique. Résultat : dans certaines régions, on voit se multiplier les installations hors-sol comptant 449 truies.

Sachant qu'une truie produit 7,5 unités d'azote par an, le seuil que je propose correspond à environ 250 truies avec porcelets, de sorte qu'une déclaration serait nécessaire pour tout élevage hors-sol comptant 50 à 250 animaux, tandis qu'il faudrait une autorisation au-delà de ce chiffre. L'éleveur devrait donc constituer un dossier, faire une étude d'impact et ne se lancerait ensuite qu'en connaissance de cause. Faute d'un tel encadrement, on va au-devant d'une révolte des gens contre ces installations.

M. le Rapporteur - Parlez-vous de truies ou de porcs, Monsieur Colcombet ? Car 250 truies représentent un tonnage bien supérieur à celui que vous évoquez. C'est pourquoi la commission, qui approuve totalement votre démarche, a adopté votre amendement mais avec un seuil de 10 000 kg d'azote.

M. François Colcombet - Accepter un tel seuil serait se montrer encore plus laxiste qu'aujourd'hui !

M. le Président - Je n'ai pas d'amendement de la commission évoquant un seuil de 10 000 kg, Monsieur le rapporteur. Si vous voulez 10 000 au lieu de 2 000, il faut que vous présentiez un sous-amendement.

M. le Ministre - L'amendement de M. Colcombet est intéressant dans son principe mais fin juillet, le Gouvernement a annoncé son intention de modifier le décret d'application de la loi de 1976 sur les installations classées, afin précisément d'éviter la multiplication des installations hors-sol soumises à simple déclaration. Et le Gouvernement tiendra ses engagements.

En tout état de cause, il ne me paraît pas approprié en la matière de procéder par voie législative. Voyez d'ailleurs à quels tâtonnements cela donne lieu... En réalité, 250 "naisseurs-engraisseurs" produisent 20 000 unités d'azote.

Au bénéfice de ces remarques, je demande le retrait de l'amendement.

M. François Sauvadet - Cet amendement qui prend en compte les impératifs de protection de l'environnement rencontre notre accord de principe mais il faudrait se mettre d'accord sur les chiffres. Or, Monsieur le ministre, entre l'ambition que vous affichez et la réalité, le fossé se creuse. Il y a quelques jours, M. Christian Jacob, se fondant sur un document officiel, a dit que votre projet de budget était en baisse de 6 %, ce que vous avez nié. C'est pourtant le chiffre qui ressort du document transmis par M. Strauss-Kahn.

Aujourd'hui, le ministre fait état d'un effort très important en faveur du programme de maîtrise des pollutions d'origine animale. Je me suis procuré les chiffres : en 1997, les crédits du PMPOA se sont élevés à 175 millions, auxquels s'ajoutent 150 millions au titre du FNDAE ; en 1998, encore 175 millions et 150 millions ; pour 1999, les chiffres sont rigoureusement identiques. N'affirmez donc pas que le Gouvernement a réalisé un effort supplémentaire pour répondre aux préoccupations exprimées par Mme Voynet sur le ton que l'on sait ! Dites que les crédits sont maintenus, sans que vous y ayez ajouté un franc. Pour que le débat conserve toute sa qualité, il faut dire ce qui est : les chiffres sont les chiffres !

M. le Président - Nous nous éloignons de l'amendement.

M. Christian Jacob - Pas du tout ! Il s'agit du financement de la lutte contre les pollutions d'origine animale. Au rapporteur qui soutient l'amendement de M. Colcombet, expliquez, Monsieur le ministre, que 20 000 unités d'azote, soit 2 000 kg, correspondent à 25 truies, et qu'aucun éleveur ne peut vivre avec 25 truies !

M. Jean-Michel Marchand - Il ne s'agit pas d'empêcher des éleveurs de s'installer, il s'agit de changer la grille. En raison de la nécessité de trouver de nouvelles surfaces d'épandage, on voit fleurir un peu partout en France des installations hors sol qui demeurent juste au-dessous du seuil déclenchant l'autorisation, et des associations de défense qui veulent empêcher les exploitants de poursuivre leur activité. Abaisser la grille permettrait de traiter les problèmes en amont, si bien que les éleveurs s'installeraient dans les meilleures conditions. Nous devons parvenir à ce que, dans nos territoires ruraux, producteurs et résidents vivent en harmonie. Pour cela, une règle est nécessaire, et celle qui existe actuellement, c'est l'autorisation.

M. Joseph Parrenin - Le ministre vient d'annoncer qu'il proposera de modifier les règles en vigueur. Sur un dossier aussi complexe, il me paraît hasardeux de légiférer ce soir sans préparation.

M. le Ministre - Depuis lundi, on me cherche des querelles sur mon budget. Je croyais pourtant avoir purgé cette discussion : le budget de l'Agriculture, je l'ai démontré, augmentera de 3 % et le BAPSA de 1,1 %. Je veux bien recommencer tous les jours à présenter mon budget mais je crois avoir été clair.

Le PMPOA bénéficie de notre part d'un effort continue. J'ai mobilisé en sa faveur des moyens supplémentaires. Les DDA ont reçu du personnel pour instruire les dossiers. Aucune opération n'a nulle part été compromise par manque de crédit.

M. François Sauvadet - Si !

M. le Ministre - Actuellement, est soumis à autorisation tout atelier comptant 450 porcs charcutiers, ce qui équivaut à 25 truies dans un élevage de naissage-engraissage. M. Colombet souhaite diminuer ces quantités par deux.

De plus en plus d'éleveurs, il est vrai se spécialisent dans le naissage et sous-traitent l'engraissage à des ateliers comptant moins de 450 places. Il y a là un vrai problème. Mais le débat d'aujourd'hui ne me paraît pas le cadre approprié pour légiférer sur ce sujet.

M. Christian Jacob - S'agissant de votre budget, j'ai cité un document du ministre de l'économie, validé par le Premier ministre, contre lequel vous vous inscrivez en faux. Alors, qui croire ? J'y lis que le budget de l'Agriculture diminue de 6 %, soit une baisse de 2,141 milliards. Vous prétendez que le BAPSA apporte une correction à hauteur de 1,2 milliard. La baisse n'en est pas moins incontestable.

De même, vous affirmez que le PMPOA dispose de moyens accrus, que vous avez affecté des personnels pour instruire les dossiers. C'est donc que ces personnels existent déjà, et que vous les avez pris ailleurs. Il s'agit d'un redéploiement à moyens constants

M. le Ministre - A la tribune, j'ai réfuté les arguments de M. Jacob relatifs à un budget. Que M. Jacob consulte le Journal officiel.

M. Christian Jacob - Je me réfère à un document émanant du Gouvernement !

M. François Colcombet - Je résume ma position. Pour les sociétés commerciales, pour les usines à cochons, la règle doit être la construction d'une station d'épuration. Quand on sait qu'une truie représente cinq chrétiens (Murmures sur les bancs du groupe UDF) et donc 1 000 truies une petite ville de 5 000 habitants, cette exigence est légitime.

M. le Ministre - C'est bien ce qui se passe !

M. François Colcombet - Mais non ! Nous savons ce qu'il en est chez vous ! Nous souhaitons que votre expérience nous serve pour ne pas la recommencer. Nous aiderons les Bretons à s'en tirer. Mais le jour où l'on fera savoir combien coûte à l'Agence du Bassin Loire-Bretagne où figure l'Auvergne, la dépollution à l'oeuvre en Bretagne, les Auvergnats rouspéteront. Les vrais agriculteurs doivent pouvoir créer librement de petites installations mais nous devons encadrer davantage les installations de taille moyenne. Faites vite car une bonne partie des Français, principalement ruraux, risquent de se dresser contre les agriculteurs.

Nous devons faire passer un massage de pacification.

Cela dit, il y a très longtemps que nous attendons, en vain, différents décrets et, pendant ce temps, des porcheries de grande taille s'installent qui continueront à empuantir une partie du pays.

Nous veillerons, Monsieur le ministre, à ce que vos engagements soient tenus rapidement, faute de quoi nous risquons de devoir affronter des situations très violentes.

M. Jérôme Cahuzac - Actuellement, des regroupements de références laitières sans mouvement de foncier correspondant sont opérés à seule fin de contourner la réglementation, en particulier le décret de janvier 1996. L'objet de notre amendement 574 est d'exercer un contrôle sur ces regroupements afin d'accroître les capacités de redistributions essentiellement au profit des jeunes agriculteurs.

M. Jean-Claude Lemoine - Mes amendements 385 corrigé et 386 corrigé ont le même objet que le précédent : lutter contre les montages juridiques destinés à contourner le décret du 22 janvier 1996, qui permet d'opérer un prélèvement lors du transfert de références laitières résultant de l'agrandissement ou de la réunion d'exploitations. Les quantités prélevées sont ensuite attribuées à de jeunes agriculteurs ou à d'autres producteur.

L'arrêt Ballmann de la Cour de justice européenne autorise le rapprochement entre deux ou plusieurs exploitations pour leur activité laitière, sans transfert du foncier. Ce rapprochement n'entraîne pas de prélèvement sur les quotas laitiers sous réserve que leur gestion reste totalement distincte et que plusieurs conditions cumulatives soient respectées : existence d'un contrat entre le propriétaire du bâtiment et de ses équipements et l'utilisateur ; autonomie de gestion et de décision de chacun des membres par rapport à son exploitation.

La vérification du respect de ces conditions implique que ces regroupements soient connus de l'administration. A cette fin, je propose de rendre obligatoire le dépôt d'une demande d'autorisation préalable.

M. le Rapporteur - La commission a approuvé, à l'unanimité, l'amendement 574, qui devrait satisfaire M. Lemoine puisqu'il reprend, plus synthétiquement, le contenu de ses deux amendements.

M. le Ministre - Je suis favorable à l'amendement 574 qui institue un contrôle, assorti de sanctions, du regroupement des ateliers de production laitière. Il répond aussi aux interrogations de M. Lemoine.

M. Christian Jacob - Je pourrais accepter l'amendement 574 si toute liberté était laissée à l'administration départementale pour agir en fonction de la situation locale. Ainsi, dans un département où la production laitière est très peu concentrée, si trois exploitants ont chacun un quota de 50 000 litres, on peut installer un jeune avec 150 000 litres, sauf si les trois exploitations sont géographiquement trop éloignées l'une de l'autre. Voilà pourquoi je suis favorable à ce qu'un lien soit établi, non avec le foncier, mais avec un territoire.

Je propose donc un sous-amendement oral laissant toute responsabilité à la DDA pour que les quotas restent dans la zone de production.

M. Michel Bouvard - En effet, l'amendement est acceptable, à condition qu'il n'ouvre pas la possibilité de sortir des quotas laitiers des zones de production éligibles aux appellations d'origine contrôlée. Il faut trouver une solution à cette fin.

M. le Rapporteur - Je partage le point de vue de M. Jacob sous réserve que deux principes soient respectés : l'accroche au territoire et au bassin de production ; l'efficacité économique. Cela dit, tout cela relève du domaine réglementaire. Mais, sur le principe, nous sommes d'accord.

M. Christian Jacob - Ne pourrait-on réserver l'amendement afin de trouver une rédaction conforme à nos souhaits ?

M. le Ministre - Cela ne me paraît pas judicieux car ce que vous souhaitez est compatible avec le texte de l'amendement puisque nous sommes dans une procédure d'autorisation.

L'amendement 574, mis aux voix, est adopté.

Les amendements 385 corrigé et 386 corrigé tombent.

AVANT L'ART. 18

M. le Rapporteur - L'amendement 121 de la commission est identique au 878 de M. Leyzour.

M. Félix Leyzour - Je retire le mien.

L'amendement 121, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

ART. 18

Mme Jacqueline Lazard - La loi d'orientation sur la pêche vous avait donné l'occasion, Monsieur le ministre, d'accomplir un grand progrès social en instituant un statut des conjoints de patrons-pêcheurs. Le présent projet vous permet d'aller dans le même sens pour les conjoints d'exploitants. Ce statut représente un réel progrès notamment pour ce qui est des salaires différés et des retraites, qui sont actuellement parmi les plus faibles du monde agricole avec un montant forfaitaire de 17 336 F par an. C'est là une seconde avancée importante dont les femmes d'agriculteurs vous sauront gré.

J'appelle toutefois votre attention sur un amendement ultérieur du Gouvernement, disant que le statut du conjoint de patron-pêcheur instauré s'applique dans les mêmes conditions au conjoint du copropriétaire embarqué, afin d'éviter une interprétation restrictive de la loi. Cet amendement tire aussi les conséquences de l'article 18 du présent projet. Ce qui est prévu pour les conjoints d'exploitants agricoles s'appliquera aux conjoints des chefs d'exploitations de cultures marines lorsque ces derniers relèvent du régime agricole : c'est notamment le cas des conchyliculteurs. Il faut donc préciser que le statut du conjoint du chef d'exploitation s'applique également au conjoint de l'associé d'une exploitation de cultures marines, lorsque celui-ci relève du régime spécial des marins.

C'est une mesure de justice qui complète utilement l'article 18.

Mme Béatrice Marre - Dans un rapport remis au Premier ministre en 1985, Gérard Gouzes rappelait que la loi d'orientation agricole de 1980 avait reconnu les responsabilités professionnelles des épouses. L'article 789-1 du code rural créait en effet la présomption d'un mandat réciproque d'accomplir des actes d'administration de l'exploitation. Cela était mince.

L'actuel statut de "conjoint participant aux travaux", imaginé par l'article 1122-1 du code rural concernerait aujourd'hui 140 000 personnes environ. Couvert par l'assurance maladie, les conjoints ne bénéficient que d'une couverture de base obligatoire en matière de retraite. Cette retraite forfaitaire était au 1er juillet 1998 de 17 336 F par an.

Voilà le sort que nous réservons à la conjointe du chef d'exploitation à la veille du XXIème siècle !

Certes, elle peut choisir le statut d'associé d'une EARL ou celui de co-exploitante, mais le travail d'une femme en agriculture doit devenir un métier choisi. Or, l'émergence juridique de l'exploitation agricole est un préalable indispensable pour que l'agriculture soit un véritable métier. Jean Foyer a pu dire que si l'homme tirait sa dignité et sa sécurité de son emploi, la femme devait l'une ou l'autre à son mariage. Cela doit finir aussi, pour l'agriculture, et je serais heureux de voir disparaître le mot de "conjoint" pour le remplacer par celui de "collaborateur du chef d'exploitation", qui acquerra, outre une retraite proportionnelle, le bénéfice d'un salaire différé le plus souvent bien mérité, de points de retraite gratuits et le droit de racheter des points de retraite proportionnelle.

Je sais que la reconnaissance de la pleine égalité des agricultrices professionnelles pourrait poser la question de la compensation démographique. Mais si le problème est financier, ce n'est pas un problème de financement. Diverses directives européennes, le Parlement européen lui-même nous ont demandé d'agir dans ce sens.

Il est donc temps de faire avancer les choses dans ce domaine, afin que tous ces conjoints, qui travaillent souvent autant que le chef d'exploitation, passent d'un statut subi à un statut choisi. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. Germain Gengenwin - L'article 18 crée un statut de conjoint collaborateur, et je m'en réjouis. C'est l'aboutissement d'une longue démarche. Aujourd'hui, les conjoints qui n'ont pas opté pour le statut de coexploitant sont présumés participer aux travaux de l'exploitation familiale et ne peuvent prétendre qu'à une retraite forfaitaire de l'ordre de 17 000 F. Il est vrai que c'est dérisoire, c'est moins que l'allocation de vieux travailleur. Ces femmes retraitées, dites si injustement "sans profession", méritent notre reconnaissance et nous approuvons cette avancée, en espérant que la discussion sur les articles permettra de clarifier les choses. (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF, du groupe DL et du groupe du RPR)

M. Jean Proriol - S'il y a un domaine où nous devons tous être modestes, c'est celui-ci, puisqu'il aura fallu près de vingt ans pour faire évoluer les choses depuis la loi du 4 juillet 1980 qui avait reconnu l'activité professionnelle des conjoints. Certes, la loi du 11 juillet 1986 avait institué le statut d'EARL et reconnu quelques droits supplémentaires aux conjoints. Puis le décret Guillaume, en 1988, a permis à chaque membre d'un couple de solliciter des aides à l'installation. (Applaudissements sur les bancs du groupe DL, du groupe UDF et du groupe du RPR)

Si, dans ce projet, il y a une disposition qui peut faire l'unanimité, c'est bien celle-ci. Nous avons néanmoins déposé quelques amendements, notamment pour permettre aux épouses de bénéficier de congés de maternité. La nouvelle loi s'attaque au salaire différé, qui est une idée lancée en 1980, et qui chemine ! Si l'on parle budget, les gouvernements Balladur et Juppé ont fait un effort de 5 milliards, mais il est vrai qu'avec moins de 20 000 F pour une retraite, chacun doit être modeste et l'effort doit être commun. (Applaudissements sur les bancs du groupe DL, du groupe UDF et du groupe du RPR)

M. François Guillaume - Je relève moi aussi l'intérêt de ce nouveau statut, et je m'interroge sur sa portée. C'est une avancée incontestable pour le monde agricole, qui avait quelques difficultés à s'y retrouver entre les différents statuts. Il y avait le statut originel de conjoint d'exploitation, qui permettait à l'épouse de bénéficier d'une retraite minimale. Puis on a créé le statut de coexploitant, qui est devenu à peu près la règle, et qui permet à une agricultrice de s'installer si elle en a la capacité : elle peut alors gérer avec son mari et bénéficier, outre la retraite de base, d'une retraite proportionnelle. Aux uns et aux autres, une disposition de 1994 a accordé le droit à réversion, mais avec deux statuts différents selon qu'on était devenu veuf avant ou après le 1er janvier 1995.

Vous proposez un troisième statut, celui de conjoint collaborateur d'exploitation. Il est intéressant au moins dans les GAEC où il ne saurait y avoir de conjoint d'exploitation, alors que le statut de coexploitant est préférable dans les exploitations à responsabilité personnelle.

Cela dit, je voudrais savoir, Monsieur le ministre, quelle incidence aura ce statut sur les cotisations sociales. Les collaborateurs d'exploitation bénéficient d'une "créance de salaire différé", sans perception de rémunération mensuelle. Quel sera le montant de la pension du conjoint collaborateur et pourra-t-il bénéficier d'une pension de réversion ?

J'espère que toutes ces interrogations seront dissipées lorsque nous examinerons ce texte en seconde lecture.

Un mot sur deux amendements que j'avais déposés et qui sont passés à la trappe. Le premier visait à ce que le conjoint exploitant bénéficie d'une demi-retraite proportionnelle car l'épouse d'un foyer agricole éclaté est souvent démunie et le second à uniformiser le régime des pensions de réversion.

M. Charles de Courson - L'article 18 améliore la situation des retraités de l'agriculture, ce qui est tout à fait nécessaire puisque le régime des retraites agricoles est le moins favorable de tous les régimes, six fois moins que celui des agents de la Banque de France.

L'ancienne majorité avait d'ailleurs entrepris cette revalorisation à laquelle cinq milliards ont été affectés en quatre ans. Vous avez prolongé nos mesures, à un rythme comparable de 1,2 à 1,3 milliard de francs par an.

Le problème se pose cependant du financement de ces retraites revalorisées même si, contrairement à une idée reçue, les cotisations des agriculteurs ne sont pas insuffisantes -les cotisations financent seulement 10 % des pensions servies par le régime des agents de la Banque de France, 13 % de celles du régime des électriciens-gaziers et 12 % de celles des agriculteurs.

Le statut de conjoint collaborateur apporte une amélioration incontestable. Une amélioration rapide des retraites agricoles exige toutefois que l'on prenne en considération l'ensemble des diverses pensions dont bénéficient les retraités agricoles, ce qui n'est pas votre démarche.

M. le Ministre - Le nouveau statut qui fait l'objet de l'article 18 est proposé pour les conjoints qui ne souhaitent pas ou ne peuvent pas devenir coexploitant ou associés d'une exploitation sociétaire. Il remplace celui de conjoint participant aux travaux et confère des droits plus complets notamment en matière de retraites. Il permet surtout, comme l'a dit Béatrice Marre, de passer d'un statut subi à un statut choisi. C'est pourquoi nous souhaitons la suppression de la disposition de l'article 1122-1 du code rural qui pose le principe de présomption de participation aux travaux de l'exploitation.

Notre réforme fait passer la retraite forfaitaire minimale pour le conjoint collaborateur de 17 336 F à 29 570 F par an, sans cotisations sociales supplémentaires. La cotisation de retraite reste fixée à 12,5 % d'une assiette forfaitaire de 400 SMIC.

M. le Rapporteur - L'amendement 120 de la commission réécrit l'article, afin de soumettre le bénéfice du nouveau statut à deux conditions : la première, que le conjoint ait reçu mandat pour les actes d'administration, la seconde qu'il agisse avec l'accord de la société d'exploitation dans le cas d'une exploitation sociétaire.

M. le Ministre - Avis favorable.

L'amendement 120 rectifié, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 18

M. le Ministre - L'amendement 958, qui répond aux voeux de Mme Lazard, vise à ce que le statut de collaborateur d'exploitation soit applicable au conjoint de l'associé d'une exploitation ou d'une entreprise de cultures marines ou du copropriétaire embarqué qui exerce son activité lorsque cet associé ou ce copropriétaire relève du régime spécial de sécurité sociale des marins. Le financement sera assuré par l'établissement public des invalides de la marine.

M. le Rapporteur - La commission n'a pas examiné cet amendement, auquel je suis favorable à titre personnel.

L'amendement 958, mis aux voix, est adopté.

L'article 18, ainsi modifié, mis aux voix, est adopté.

L'article 19, mis aux voix, est adopté.

ART. 20

M. Christian Jacob - L'amendement 337 vise à faire passer de deux à cinq ans le délai pendant lequel il est possible au conjoint d'acquérir des droits à pension.

M. le Rapporteur - La commission a préféré s'en tenir à la règle habituelle, c'est-à-dire au rachat de deux ans.

M. le Ministre - Aller au-delà compliquerait la gestion du système par la MSA, sans apporter d'avantage substantiel aux assurés (Exclamations sur les bancs du groupe du RPR).

L'amendement 337, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 122 est rédactionnel.

L'amendement 122, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté, de même que l'article 20, ainsi modifié.

ART. 21

M. le Rapporteur - L'amendement 123 corrige une référence au code.

L'amendement 123, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté, de même que l'article 21, ainsi modifié.

ART. 22

M. André Angot - Les retraités agricoles, au nombre de 2,1 millions, représentent 16 % de l'ensemble des retraités, mais ne perçoivent, à eux tous, que 4,9 % du total des pensions versées, et seuls 2 % d'entre eux touchent plus de 75 % du smic ! Encore les choses se sont-elles améliorées grâce aux lois du 18 janvier 1994 et du 1er février 1995, ainsi qu'aux lois de finances pour 1997 et 1998, mais il reste un effort important à accomplir pour témoigner la reconnaissance de la société à des hommes et à des femmes qui, par leur travail acharné, sans guère de congés ni de jours de repos, tout au long d'une vie de travail dépassant de beaucoup les 37 années et demie du régime de la fonction publique, ont amené notre agriculture aux premiers rangs mondiaux. Il serait légitime que les chefs d'exploitation reçoivent, après 37 ans et demi d'activité, 75 % du SMIC, et ce dès 2001, comme la promesse en avait été faite au cours de la campagne de 1997. Ce serait là une belle occasion de montrer que, pour une fois, les promesses n'engagent pas seulement ceux qui les écoutent -mais je crains que ce ne soit encore une occasion manquée ! (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL ; protestations sur les bancs du groupe socialiste)

M. Germain Gengenwin - Mme Boisseau, qui avait posé une question orale sur la revalorisation des retraites forfaitaires des conjoints collaborateurs et des aides familiaux, s'était attiré une réponse qui se voulait rassurante, en ce qu'elle annonçait qu'une disposition serait prise dans le cadre de la présente loi d'orientation. Or, l'article 22 est quelque peu abscons, et en particulier son dernier alinéa : "Le nombre de points attribué au titre du présent article afin d'assurer à ces personnes un niveau minimum de pension de retraite proportionnelle est déterminé en fonction de l'année de prise d'effet de la retraite selon des modalités fixées par décret en tenant compte de la durée d'assurance justifiée par l'intéressé et du nombre de points de retraite proportionnelle qu'il a acquis ou, lorsqu'il s'agit d'un conjoint d'exploitant agricole, qu'il aurait pu acquérir à compter du 1er janvier 1998 s'il avait opté pour le statut de conjoint collaborateur mentionné à l'article L. 321-5." Cela mérite, me semble-t-il, quelques explications de la part du Gouvernement, tous les agriculteurs n'étant pas polytechniciens... (Sourires)

M. François Sauvadet - J'avais moi-même interrogé, sur la question des retraites agricoles, M. Strauss-Kahn, qui s'était targué d'un effort sans précédent, mais il s'agit en vérité de la poursuite de l'effort engagé par ses prédécesseurs. Suffira-t-il à atteindre sans trop tarder les 75 % du SMIC ou, à défaut, le niveau du minimum vieillesse ? Des manifestants ont dénoncé ce matin, près d'Angers, le niveau indigne des pensions agricoles, et la loi d'orientation devrait, à notre avis, marquer une volonté plus résolue.

M. Jean-Michel Marchand - L'effort budgétaire consenti l'an dernier n'est pas passé inaperçu dans nos campagnes, même si les 2 000 F promis n'ont été, en fin de compte, que 1 994 F... Il est poursuivi cette année, mais les manifestants de ce matin ont fait leurs comptes, et ont bien dû se rendre à l'évidence : il sera très difficile, au rythme actuel, d'atteindre les trois quarts du SMIC d'ici la fin de la législature.

Nous ne désespérons pas d'obtenir plus lors de la discussion de votre budget, Monsieur le ministre, mais nous avons besoin de savoir quel sera le schéma de rattrapage les années suivantes.

M. Maurice Adevah-Poeuf - J'observe d'abord que M. Angot a affaibli son raisonnement par des propos polémiques qui ne sont pas à la hauteur de l'enjeu. (Protestations sur les bancs du groupe du RPR et du groupe UDF) Ensuite que l'effort prévu pour 1999 est bel et bien, par son ampleur, sans précédent.

Cela étant, Monsieur le ministre, nous avons vu arriver dans nos permanences, au premier trimestre 1998, des gens qui nous disaient que la revalorisation des retraites les plus faibles ne se passait comme nous leur avions annoncé, sur la foi des discussions budgétaires, qu'elle se ferait. A partir de 32,5 années de cotisations s'applique en effet un coefficient de minoration de 100 %, qui ramène à zéro la majoration annoncée !

Le taux plein ne s'appliquant qu'à partir de 37,5 années de cotisation, nous comprenons bien qu'une minoration existe en-deça, mais il nous semble qu'elle devrait être proportionnelle à la durée de cotisation.

M. Charles de Courson - Les retraités agricoles qui manifestent aujourd'hui en France demandent d'une part que les retraites proportionnelles soient portées au minimum vieillesse, d'autre part que les pensions forfaitaires atteignent 75 % du SMIC net. Atteindre le premier objectif a un coût net de 4 milliards, dont 1,6 est programmé dans le budget pour 1999, de sorte que trois ans seront nécessaires pour y arriver. Et pour atteindre le second, il faudra 4 milliards supplémentaires.

Or une étude montre que 41 % des 885 000 retraités agricoles anciens chefs d'exploitation sont polypensionnés, soit parce qu'ils étaient pluriactifs, soit parce qu'ils sont passés par d'autres professions. Quoi qu'il en soit, 29 % de leur pension viennent de la MSA, 30 % du régime général et 41 % d'autres régimes. Si nous voulons atteindre l'objectif de 75 % du SMIC net, nous devons, je crois, tenir compte de cette réalité. Et ce faisant, nous pourrions réduire de 30 à 40 % le coût de la revalorisation pour atteindre le minimum, et par conséquent accélérer le rythme de celle-ci. En tenir compte suppose bien sûr que nous ayons une bonne connaissance des autres régimes, raison pour laquelle je me bats depuis des années pour l'établissement d'un fichier central des retraites. Je crois au total que ce que je propose est juste, sage et pragmatique. (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF et du groupe du RPR)

M. le Ministre - L'article 22 permet aux conjoints qui prendront leur retraite à compter du 1er janvier 1998 de bénéficier d'une majoration de leur retraite proportionnelle jusqu'à ce qu'ils aient pu se constituer des droits suffisants, notamment par le rachat d'années antérieures. Cette majoration concernera aussi les aides familiaux.

Je rappelle d'autre part que le Gouvernement a engagé un plan pluriannuel de revalorisation des petites retraites agricoles, qui s'est traduit dès 1998 par 5 100 francs supplémentaires de retraite forfaitaire pour les aides familiaux, les conjoints et ceux d'entre eux devenus chefs d'exploitation pendant une courte période. Pour 1999, la loi de finances comportera une mesure de revalorisation -dont je redis qu'elle est sans précédent- de 1,6 milliard en année pleine, ce qui portera les pensions des chefs d'exploitation qui ont une carrière complète à 3 000 F par mois, les pensions de veuves à 2 800 F, celles des aides familiaux à 2 500 et celles des conjoints à 2 200.

Monsieur Sauvadet, il ne faut pas avoir la mémoire courte : il y a quelques jours, l'Assemblée a voté à l'unanimité un amendement disant que le Gouvernement déposerait avant le 31 mars 1999...

M. Christian Jacob - Ce n'était pas à l'unanimité, car je n'approuvais pas la date !

M. le Ministre - Quel dommage !...un rapport décrivant catégorie par catégorie l'évolution qu'il compte imprimer aux retraites agricoles d'ici le 30 juin 2002. Il a été dit à cette occasion qu'un développement particulier serait consacré à la revalorisation des plus faibles pensions, étant entendu qu'un effort plus important serait consenti au début. Voilà ce que j'appelle une orientation.

M. de Courson vient d'apporter, par avance une utile contribution à ce rapport. Quant à M. Adevah-Poeuf, je lui réponds que notre objectif est bien de revaloriser les retraites de ceux qui ont consacré l'essentiel de leur carrière à l'agriculture, soit 37,5 années pour une carrière pleine. Entre 32,5 et 37,5 années s'applique un coefficient de minoration fixé par décret. En-dessous de 32,5 années, les intéressés sont des polypensionnés qui ne sauraient entrer dans l'objectif que je viens d'énoncer.

M. François Sauvadet - Je n'oublie pas le rapport en faveur duquel nous nous sommes prononcés, Monsieur le ministre, mais je vous réclamais des précisions, étant entendu qu'un rapport n'est pas un objectif mais seulement un moyen. Et je regrette que le rapport que nous demandions sur les effets des CTE ne vous ait pas, lui, paru utile...

M. le Rapporteur - L'amendement 805 est rédactionnel.

L'amendement 805, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - Il en va de même de l'amendement 124.

M. le Ministre - Favorable.

L'amendement 124, mis aux voix, est adopté.

M. le Ministre - L'amendement 959 tend à adapter aux conjoints, aides familiaux et chefs d'exploitation visés à l'article 22 la nouvelle revalorisation des retraites forfaitaires figurant dans la loi de finances pour 1999. En cas de carrière complète dans l'agriculture, ces nouveaux pensionnés toucheront une majoration exprimée en points de retraite proportionnelle égale à 6 600 F par an. Cette disposition d'équité s'appliquera à 31 500 actifs familiaux en 1999.

M. le Rapporteur - La commission n'a pas examiné cet amendement, auquel je suis personnellement favorable. En matière de retraites agricoles, j'ai dit que chaque gouvernement a fait ce qu'il a pu. Reconnaissez que l'effort d'aujourd'hui est appréciable, et mérite d'être salué. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. Yves Deniaud - Cet amendement n'appelle pas d'observations particulières. Je suis même prêt à l'encenser. En revanche, prenons garde à ne pas aller trop loin dans la voie de la multifonctionnalité. Tenir compte des autres ressources dans le calcul des pensions aboutirait à placer sous conditions de ressources la revalorisation des retraites. Evitons de pénaliser des personnes qui ont consenti un effort.

M. André Angot - L'amendement nous a été distribué voilà quelques minutes seulement. Je propose de le sous-amender ainsi : "A compter du 1er janvier 2001, les pensions versées aux chefs d'exploitation agricole retraités ayant cotisé 150 trimestres ne peuvent être inférieures à un niveau équivalent à 75 % du SMIC net". Accepter ce sous-amendement prouverait votre volonté de concrétiser vos promesses.

M. le Président - Veuillez me communiquer le texte écrit de votre sous-amendement.

M. Charles de Courson - L'amendement du Gouvernement est-il cohérent avec le BAPSA pour 1999, ou faudra-t-il amender ce dernier en conséquence ?

M. le Ministre - Le financement de cette mesure figure déjà dans le prochain BAPSA.

M. Joseph Parrenin - Pourquoi, Monsieur Angot, ne pas proposer 100 % du SMIC ?

M. André Angot - Parce que nous sommes raisonnables. Nous reprenons un engagement du Premier ministre.

M. Joseph Parrenin - C'était aussi un engagement du Président de la République ; il a eu M. Vasseur pour ministre, et on sait ce qu'il en est advenu. Pour mesurer les efforts respectifs dans le domaine des retraites, vous comparez des choux et des choux-fleurs. Vous additionnez l'ensemble des progressions de retraite et vous le comparez à l'effort réalisé sur les plus petites retraites. En réalité l'effort accompli en 1996-1997 est bien moins important que celui de 1998-1999. Il faut être un peu courageux dans la vie, Monsieur Angot. Les smicards retraités ne touchent pas 75 % du SMIC. Faut-il que le budget de la nation amène à 75 % du SMIC des gens qui, hélas.... (Interruptions sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL) Relisez les débats qui ont eu lieu dans les années 1950 sur la mise en place de la protection sociale dans l'agriculture. Tous les conservateurs ont voté contre, je l'ai vérifié pour la Franche-Comté. Tous ! (Protestations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL) Nous héritons d'une situation difficile. Le Gouvernement, courageusement, a décidé un plan de progression des plus petites retraites. Cela mérite d'être salué ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. Christian Jacob - C'est de la démagogie !

M. le Président - Je réserve le vote sur le sous-amendement de M. Angot, sur l'amendement 959 et sur l'article 22.

Le vote est réservé.

ART. 23

M. Jean Proriol - L'article 23 porte sur l'assurance maladie, invalidité et maternité des personnes non salariées. La commission avait adopté un amendement que j'avais déposé.

Le Gouvernement propose simplement d'améliorer les congés de maternité des agricultrices, par une prise en charge totale des frais de remplacement. Cette avancée est modeste, mais appréciable. Mon amendement allait beaucoup plus loin ; les agricultrices bénéficieraient du même congé de maternité que les salariés, passant de 8 ou 10 semaines à 16 semaines au moins. Mais cet amendement n'a pas franchi le barrage de la commission des finances, qui l'a déclaré irrecevable. Le Gouvernement pourrait, lui, reprendre à son compte cette simple mesure de justice sociale.

Dans nos campagnes, des épouses salariées d'agriculteurs bénéficient de 16 semaines, alors que leurs voisines, épouses d'agriculteurs non salariées, ne disposent que de 8 à 10 semaines de prise en charge. Cette injustice est choquante. Notre proposition nous paraît essentielle pour la politique familiale dans le secteur agricole. Quelles sont vos orientations dans ce domaine ?

M. Christian Jacob - Je souscris aux propos de M. Proriol, et je réponds à M. Parrenin, qui a cru bon d'attaquer le Président de la République, et de taxer la proposition des 75 % du smic de démagogique.

M. Yvon Montané - C'était une promesse du président Chirac, qu'il n'a pas tenue !

M. Christian Jacob - Calmez-vous ! Vous n'êtes dans l'hémicycle que depuis un quart d'heure ! (M. Yvon Montané proteste)

M. le Président - Monsieur Montané, laissez parler M. Jacob !

M. Christian Jacob - En s'attaquant au Président de la République, M. Parrenin a, en fait, traité de démagogue et de menteur à la fois François Mitterrand et l'actuel ministre de l'agriculture car porter les retraites agricoles à 75 % du SMIC figurait parmi la proposition du premier et dans les documents de campagne du second aux dernières élections législatives. Quant à l'actuel Président de la République, il a commencé d'améliorer le niveau de ces retraites avec Philippe Vasseur.

Sur le présent texte, M. Angot a déposé un sous-amendement à l'amendement 959, qui a été déclaré irrecevable. Mais si le ministre en approuve l'objectif, il ne dépend que de lui de ne pas opposer l'article 40.

M. le Président - Je crois que vous souhaitez intervenir sur l'article 23, Monsieur de Courson. (M. Yvon Montané proteste)

Je donne la parole sur les articles à tous les orateurs qui le demandent et je souhaite ne pas entendre, de la part des parlementaires, de réflexions désobligeantes pour la présidence.

M. Charles de Courson - Le coût de la mesure inscrite à l'article 23 est évalué à 6 millions mais il serait de l'ordre d'une centaine de millions si tous les bénéficiaires potentiels de cette mesure l'utilisaient. Or, elle ne figure pas dans le BAPSA. Pourquoi ? Le Gouvernement peut-il nous éclairer sur cette évaluation ?

M. Yvon Montané - Je n'ai pas une grande expérience parlementaire et ne suis pas encore habitué à ces propositions démagogiques dilatoires destinées à allonger la durée du débat. Mais je ne peux laisser M. Jacob dire que je ne suis présent que depuis un quart d'heure alors que j'ai assisté à toutes les séances et voté tous les articles du projet.

M. le Ministre - Sur le fond, Monsieur Proriol, le Gouvernement est favorable à l'allongement de la durée de prise en charge du remplacement des agricultrices en cas de maternité. Mais, conformément à l'article 1106-3-1 du code rural, une telle disposition est d'ordre réglementaire. Un projet de décret fait actuellement l'objet d'une concertation avec les représentants des professions agricoles. Il devrait notamment comporter une disposition relative à l'allongement de la durée du remplacement indemnisé. J'ai le plaisir de faire ainsi écho aux interrogations de M. Proriol.

Pour ce qui est de la question de M. Jacob, la présidence a répondu ce qu'il convenait de répondre.

Enfin, Monsieur de Courson, nous avons inscrit dans le projet de BAPSA pour 1999, que votre Assemblée examinera au mois de novembre, la dépense certaine pour 6 500 bénéficiaires. Le surcoût de dépenses qu'entraînerait l'augmentation éventuelle de leur nombre serait pris en charge par la MSA.

L'article 23, mis aux voix, est adopté.

ART. 22 (précédemment réservé)

M. le Président - Le sous-amendement de M. Angot ayant été déclaré irrecevable au titre de l'article 40 de la Constitution, nous passons au vote de l'amendement 959.

L'amendement 959, mis aux voix, est adopté.

M. André Angot - Nous avons voté cet amendement car il va dans le sens d'une amélioration des retraites agricoles mais rien ne vous empêchait, Monsieur le ministre, de reprendre à votre compte mon sous-amendement qui a été déclaré irrecevable. Ce n'est pas être démagogue que de vous demander de traduire dans vos actes ce que vous avez maintes fois promis par écrit et oralement.

L'article 22 amendé, mis aux voix, est adopté.

ART. 24

M. Charles de Courson - Cet article tend à aménager les cotisations des agriculteurs nouvellement installés et nous nous en félicitons. Mais nous avions expliqué l'an dernier à Mme Aubry que la substitution de la CSG à des cotisations sociales pénalisaient les jeunes agriculteurs puisque ces dernières font l'objet d'abattements qui ne s'appliquent pas à la contribution sociale. A l'époque, nous avions déposé un amendement pour remédier à cet inconvénient. Etes-vous prêt, Monsieur le ministre, à accepter aujourd'hui un amendement de même nature ?

M. Jean Proriol - Mon amendement 670 tend à compléter le cinquième alinéa de l'article par "Il en est de même lorsqu'une entreprise est transformée par des conjoints en société."

L'amendement 670, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'article 24, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 24

M. Jean Proriol - L'amendement 671 est cosigné par le président Giscard d'Estaing et par notre collègue Aimé Kergueris.

Il s'agit de rétablir le mécanisme incitatif d'abattement sur leurs cotisations sociales dont bénéficient les jeunes agriculteurs lorsqu'ils s'installent. Tel est l'objet de cet amendement qui dit : "Les cotisations sociales des jeunes agriculteurs bénéficiant des aides à l'installation, affiliées en tant que chef d'exploitation sont réduites de 65 % au titre de la première année civile d'affiliation, de 55 % au titre de la seconde et de 35 % au titre de la troisième.

"Le montant des cotisations dues ne peut être inférieur à un minimum, sans que le montant de l'exonération ne soit plafonnée.

"L'exonération s'applique aux cotisations AMEXA mais également aux cotisations de prestations familiales et d'assurance vieillesse agricole dont les jeunes agriculteurs sont redevables pour eux-mêmes et au titre de leurs ayants droits."

En effet, le basculement des cotisations d'une assiette AMEXA sur une assiette CSG a considérablement réduit l'aide qui était apportée aux jeunes et qui facilitait le démarrage de leur activité. Augmenter les taux d'exonération peut être un moyen de compenser cela. Par ailleurs, pour que cette mesure joue à plein, il convient de déplafonner le montant de l'exonération.

M. le Rapporteur - Défavorable.

M. le Ministre - Avis défavorable. Pour les jeunes agriculteurs, comme pour les autres exploitants, le passage de l'AMEXA à la CSG a été neutre. Quant à la part exonérée des jeunes agriculteurs, elle n'a baissé que parce que les cotisations ont diminué.

L'amendement 671, mis aux voix, n'est pas adopté.

La séance, suspendue à 23 heures 35, est reprise à 23 heures 45.

ART. 25

M. le Rapporteur - L'amendement 127 est défendu.

L'amendement 127, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 126, comme l'amendement 672 de M. Proriol qui lui est identique, tend à préciser que "le conjoint survivant du chef d'une exploitation agricole ou de l'associé d'une société dont l'objet est l'exploitation agricole qui a participé à l'activité de l'exploitation pendant au moins dix années, sans recevoir de salaire ni être associé aux bénéfices et aux pertes de celles-ci, bénéficie d'un droit de créance d'un montant égal à trois fois le salaire minimum interprofessionnel de croissance annuel en vigueur au jour du décès dans la limite de 25 % de l'actif successoral. Le cas échéant, le montant des droits propres du conjoint survivant dans les opérations de partage successoral est diminué de celui de cette créance.

"Cette créance est réglée, le cas échéant, avant que les descendants aient pu faire valoir la créance visée à l'article L. 321-13".

M. le Ministre - Cet amendement conduirait à donner une priorité au conjoint survivant sur les descendants bénéficiant d'une créance visée à l'article L. 321-13 lors du partage successoral. Il modifierait donc profondément les règles de dévolution successorale ce à quoi la Chancellerie est opposée.

Je ne peux donc accepter cet amendement qu'en le sous-amendant pour supprimer son dernier alinéa. En outre, je souhaite améliorer la rédaction du premier alinéa en précisant qu'il s'agit de l'associé exploitant d'une société.

Le sous-amendement du Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Ministre - Je demande la réserve sur le vote de l'amendement 126.

Le vote sur l'amendement 126 est réservé.

M. Christian Jacob - Nous soutenons bien évidemment l'article 25 qui alloue un salaire différé au conjoint survivant du chef d'exploitation.

L'amendement 341 vise à l'améliorer en étendant son bénéfice aux conjoints divorcés qui se retrouvent parfois sans aucune ressource après avoir travaillé des années et qui néanmoins considérés comme sans profession peinent à retrouver une activité.

M. le Rapporteur - Je suis sensible à vos arguments. Mais le juge qui prononce le divorce a déjà la possibilité d'accorder un tel droit au conjoint qui a participé à l'exploitation.

M. le Ministre - Même avis.

M. Charles de Courson - La possibilité que vous avez évoquée existe, Monsieur le rapporteur. Mais je ne suis pas sûr qu'un juge prévoit nécessairement lors d'un divorce de régler un problème de retraite qui peut se poser des décennies plus tard.

L'amendement de M. Jacob n'a pas de conséquences sur l'état de droit mais constitue une précaution utile. Je ne comprends donc pas votre opposition.

M. le Rapporteur - Je ne peux exprimer que la position de la commission même si, à titre personnel, je partage vos préoccupations.

M. Christian Jacob - Vous avez déjà fait preuve d'initiative, Monsieur le rapporteur.

M. le Rapporteur - Je ne voudrais pas être accusé de mettre en cause la famille en protégeant les conjoints divorcés. (Sourires)

M. Christian Jacob - L'amendement n'a pas de conséquences financières et peut permettre d'éviter des drames.

M. le Ministre - La question mérite un examen approfondi que nous conduirons d'ici à ce que le texte revienne en seconde lecture dans votre Assemblée. (Approbations bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL)

M. Christian Jacob - Je souhaite donc que vous réserviez cet amendement.

M. le Ministre - Je demande en effet la réserve.

Le vote sur l'article 25 est réservé.

APRÈS L'ART. 25

M. Maurice Adevah-Poeuf - Mme Marre a éloquemment évoqué les difficultés que peuvent rencontrer les conjoints divorcés d'exploitant. Non seulement ils peuvent être privés de ressources, mais ils sont de plus très généralement spoliés. Ils ont en effet contribué pendant des années à l'enrichissement du patrimoine de leur conjoint sans en retirer aucun bénéfice après la séparation.

Mon amendement 623 pose le principe d'une compensation pour le conjoint ayant participé effectivement au moins dix ans à l'activité de l'exploitation. Il laisse à un décret en Conseil d'Etat le soin de préciser les modalités techniques de cette prestation.

Il faut mettre fin à la spoliation d'un conjoint qui a travaillé des années sur l'exploitation et qui, dans 99,9 % des cas, est une femme.

M. le Rapporteur - Je suis plus à l'aise pour donner un avis favorable, compte tenu de l'engagement pris par le ministre.

M. le Ministre - C'est un problème connexe au précédent, et je demande donc, pour les mêmes raisons, la réserve du vote.

Le vote sur l'amendement 623 est réservé.

ART. 26

M. Christian Jacob - Je retire l'amendement 342, compte tenu de la recherche d'une solution à l'article 25.

L'article 26, mis aux voix, est adopté.

ART. 27

M. Félix Leyzour - Le "titre emploi salarié agricole", dit TESA, constitue un progrès pour l'emploi saisonnier et pour la lutte contre le travail clandestin, mais il ne faudrait pas qu'il tire vers le bas, vers la précarité, l'ensemble du travail salarié agricole, et c'est pourquoi notre amendement 882 pose un certain nombre de garde-fous.

M. le Rapporteur - Votre souci est tout à fait justifié : le TESA doit être une préparation à un emploi stable, et non pas un ersatz ou un recul social. La commission a néanmoins repoussé l'amendement, car il risquerait, tel qu'il est rédigé, de faire perdre à la formule toute son efficacité.

M. le Ministre - Le TESA, expérimenté depuis deux ans dans plusieurs départements, simplifie les formalités liées à l'embauche d'un salarié sous contrat à durée déterminée : il suffit d'un seul document quand, auparavant, il en fallait dix. Les aménagements proposés ne sont guère pertinents : la limitation du dispositif aux surcroîts momentanés d'embauches de 20 salariés au moins n'est pas nécessaire, car la référence au code du travail constitue une précaution suffisante ; l'inscription sur le registre du personnel et la tenue du livre de paie ne sont plus obligatoires depuis l'entrée en vigueur du récent DDOEF ; la durée maximale, qui relève du règlement, sera fixée en concertation avec les partenaires sociaux ; enfin, l'exclusion des groupements d'employeurs, services de remplacements et associations de mise à disposition de salariés est redondante, dans la mesure où le champ d'application est précisément délimité.

M. François Guillaume - Cet article, qui entérine un système expérimenté avec succès, nous convient, en ce qu'il simplifie certaines formalités qui rebutent les employeurs et tend donc à limiter le recours au travail illégal. L'amendement, en revanche, ne fait que rétablir plus de complexité.

M. François Sauvadet - Je partage l'analyse du ministre, qui omet cependant de mentionner que le TESA a été lancé par son prédécesseur... On pourrait discuter du délai, mais l'important est de lutter contre le travail illégal et de répondre au besoin de main-d'oeuvre.

M. Félix Leyzour - Je ne nie pas que le TESA constitue, à bien des égards, une amélioration, mais il ne faudrait pas que simplification rime avec précarisation. Je mets mon espoir dans les navettes pour que nous prenions plus de précautions, encore qu'il ne faille pas trop attendre du Sénat... ((Exclamations sur les bancs du groupe du RPR et du groupe UDF) Je n'ai rien, détrompez-vous, contre cette institution, à laquelle j'ai appartenu ! (Sourires)

L'amendement 882, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Charles de Courson - Le projet confie à la MSA la distribution des titres. L'amendement 872 permet à celle-ci d'être également assurée par les syndicats patronaux agricoles représentatifs au plan national, dans le cadre d'un accord avec la MSA. Le Gouvernement me dira que cette possibilité n'est pas exclue, mais il ne serait pas mauvais de la prévoir expressément.

M. le Rapporteur - Défavorable.

M. le Ministre - Il ne me paraît pas souhaitable de confier la mission exercée par la MSA à des organismes non publics.

M. Charles de Courson - Mais enfin, Monsieur le ministre, une mission de service public peut bien être exercée par délégation. Sinon, il faudrait nationaliser la CGE, la Lyonnaise des Eaux...

M. le Rapporteur - Bonne idée !

M. Charles de Courson - Les réseaux d'assainissement ou le ramassage des ordures ne sont pas forcément le fait d'organismes publics. Alors, un peu d'ouverture, Monsieur le ministre !

M. le Ministre - Puisque l'argument juridique ne vous convainc pas, je vous en livre un autre, qui est de bon sens. Je connais un organisme qui a en charge la gestion des agriculteurs, qui le fait très bien et qui s'appelle la MSA. Alors pourquoi faire compliqué ?

L'amendement 872, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean-Michel Marchand - L'amendement 18 est défendu.

M. Jean Proriol - Notre amendement 674 a pour objet d'étendre aux coopératives agricoles employant moins de onze salariés le bénéfice du TESA. Que l'emploi soit saisonnier ou non, il s'agit ainsi de favoriser l'embauche et de ne pas pénaliser les agriculteurs qui ont fait le choix d'investissements collectifs.

M. Christian Jacob - L'amendement 343 a le même objet. Si, comme le souhaite le Gouvernement, on limite l'extension du TESA aux coopératives agricoles employant moins de cinq salariés, cela risque de s'appliquer aussi aux CUMA. Sachant qu'il y a très peu de CUMA employant plus de onze salariés mais beaucoup en employant plus de cinq, mieux vaut retenir le seuil de onze.

M. le Rapporteur - Je crains que l'inquiétude exprimée par M. Leyzour ne soit fondée... A l'origine, le TESA était un titre d'emploi saisonnier ; si les coopératives veulent s'en servir pour des emplois permanents, on peut parler de précarisation.

La commission de la production veut bien ouvrir aux petites coopératives la possibilité de recourir aux TESA, mais en fixant un seuil de cinq salariés. Tel est l'objet de son amendement 128.

M. Germain Gengenwin - Le sous-amendement 525 substitue "onze" à "cinq". Notre but doit être de faciliter les choses à ceux qui désirent embaucher mais qui ont peur de la paperasserie.

M. Joseph Parrenin - Notre amendement 569 offre aux petites coopératives la possibilité d'utiliser le TESA mais place la barre à cinq salariés permanents, car il faut être raisonnable.

M. le Rapporteur - La commission a repoussé tous les amendements se référant à onze salariés et accepté ceux visant cinq salariés.

M. le Ministre - L'amendement 128 réalise le compromis le plus équilibré. Je demande donc le rejet des autres.

M. Félix Leyzour - Je constate que mes craintes de tout à l'heure étaient fondées. Je voterai donc contre les amendements de l'opposition, qui veut précariser via le TESA le maximum d'emplois agricoles. (Protestations sur les bancs du groupe du RPR et du groupe UDF)

M. Christian Jacob - Vous ne m'avez pas répondu à propos des CUMA, Monsieur le ministre.

Monsieur Leyzour, notre souci à tous est de créer des emplois. Tout ce qui le permet est bon à prendre, en particulier la simplification des procédures. Les déclarations et formulaires en tous genres découragent l'embauche. Placer la barre à 11 salariés servirait l'emploi.

M. le Ministre - Les CUMA sont des coopératives d'un type particulier. Aucune ne compte plus de cinq salariés.

M. François Sauvadet - Sur tous les bancs, note objectif est de soutenir l'emploi. Or davantage de contraintes signifie moins d'emplois. Je me méfie toujours des effets de seuil. Pourquoi s'arrêter à 5 salariés ?

M. le Rapporteur - Et pourquoi à 11 ?

M. François Sauvadet - Tous les entrepreneurs vous diront que quand ils rencontrent un seuil, ils hésitent à embaucher au-delà.

M. Félix Leyzour - Nous savons tous dans quelles conditions travaillent les salariés agricoles. Le TESA est une formule intéressante, mais il ne faut pas passer de la souplesse à la précarisation.

M. Charles de Courson - Monsieur le ministre, qui vous a dit qu'il n'existait pas de CUMA comptant plus de 5 salariés ? Aucune disposition juridique ne limite leur effectif salarié. A Mardeuil, il y a une CUMA viticole de plus de 10 salariés. Je suis député de la côte des blancs. Venez à Mardeuil, nous visiterons la CUMA, et nous boirons le champagne, qui est excellent.

M. le Président - Monsieur le rapporteur, vous avez déclaré que vous étiez favorable à tous les amendements à cinq salariés. Or l'amendement 18 est dans ce cas, et s'il est adopté, l'amendement 128 de la commission tombera.

M. le Rapporteur - Mais je ne retiens que le 128.

Les amendements 18, 674 et 343, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. le Président - Le sous-amendement 525 tombe.

Les amendements identiques 128 et 569, mis aux voix, sont adoptés.

L'article 27 modifié, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 27

M. le Rapporteur - L'amendement 129 tend à préciser que les groupements d'employeurs ne peuvent pas imposer aux salariés des déplacements géographiques importants.

M. le Ministre - Avis favorable.

M. François Guillaume - Vraiment, il faudrait cesser de tout régenter et de tout réglementer. Par exemple, mettre à la disposition des producteurs de lait des services de remplacement implique de parcourir un certain nombre de kilomètres. A combien sera-t-il fixé ? Il en va de même en cas de remplacement des agricultrices en congé de maternité. Regardez la réalité du terrain, et n'allez pas trop loin !

L'amendement 129, mis aux voix, est adopté.

ART. 28

M. François Guillaume - Notre amendement 344 tend à supprimer l'article 28.

Là où les effectifs salariés agricoles ne permettent pas de créer un comité d'entreprise, vous avez, avec une grande habilité, trouvé le moyen d'en créer un au niveau départemental. Il s'ensuivra des cotisations supplémentaires pour les agriculteurs, et une nouvelle ligne sur la feuille de paie. Les délégués des salariés devront disposer de crédits d'heures, et toute une technostructure se mettra en place pour gérer ce pseudo-comité, tant et si bien que vous allez réduire l'emploi, car les agriculteurs, face à ces charges supplémentaires seront tentés de limiter leur personnel. Enfin, vous créez une nouvelle exception, car ni les commerçants ni les artisans et autres professions comparables à l'agriculture ne connaissent ce type de comité.

M. le Rapporteur - Rejet, pour une fois que l'on parle de ces oubliés de l'agriculture que sont les employés.

M. le Ministre - Ce n'est pas une habileté, c'est une avancée. Avis défavorable à l'amendement.

M. Christian Jacob - S'il existe un secteur socio-professionnel où les relations entre employeurs et employés sont bonnes, c'est bien celui de l'agriculture.

Les commissions paritaires fonctionnent bien. Alors, pourquoi créer un tel organisme qui n'apportera rien aux employeurs ni aux salariés ? Bref, votre proposition n'est qu'idéologique à moins que vous n'ayez passé un accord avec la CGT pour lui offrir un nouveau bastion.

M. Joseph Parrenin - Si l'on fait un parallèle avec l'acharnement justifié avec lequel l'opposition a soutenu tout à l'heure l'amélioration des retraites agricoles, on constate qu'elle n'est motivée que par son intérêt électoral. (Protestations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL) Pourquoi ne pas s'assurer que les conditions d'hygiène et de sécurité sont satisfaisantes pour les salariés agricoles comme c'est le cas pour tous les autres corps de métier ?

M. Christian Jacob - Vous savez bien que cela n'a rien à voir avec l'hygiène et la sécurité.

L'amendement 344, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Félix Leyzour - Notre amendement 884 tend à remplacer "peut prévoir" par "prévoit".

Les propos de M. Jacob, non dénués de mépris à l'égard des organisations syndicales, ne m'ont pas surpris. Il n'a cité qu'une seule organisation syndicale, mais le pluralisme existe chez les agriculteurs comme ailleurs. Bref, il a bien révélé son caractère anti-social. (Protestations sur les bancs du groupe du RPR)

M. le Ministre - La constitution d'un comité départemental des oeuvres sociales a été réclamée par toutes les organisations professionnelles agricoles d'employeurs et de salariés. Vivez donc avec votre temps, Messieurs de l'opposition ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. le Rapporteur - La commission a accepté l'amendement 884 tout en émettant des réserves car comment faire respecter l'obligation qu'il impose ?

M. le Ministre - Avis favorable.

M. Christian Jacob - Contre cet amendement qui aggrave encore une disposition que j'ai combattue.

Cela dit, Monsieur Leyzour, j'ai consacré dix-sept ans de ma vie à l'engagement syndical. J'ai donc une petite expérience -comme vous, sans doute- des corps intermédiaires dont je ne méconnais nullement l'utilité. Mais nous savons trop d'où vient cet article 28 et quels sont les gens qui ont poussé à sa rédaction.

Quant à vos réponses, Monsieur le ministre, qu'il s'agisse de défendre un article de votre projet ou de repousser un amendement, elles font toutes références à un accord des organisations professionnelles. J'attends avec impatience de connaître leurs réactions à vos interventions. Nous aurons quelques séances amusantes durant les prochains jours !

M. Félix Leyzour - Nous sommes tous ici des élus de la République, Monsieur Jacob, et non les représentants de telle ou telle corporation. Mais il est normal, pour préparer un texte comme celui-ci, de rencontrer les représentants des différentes organisations professionnelles. Un élu ne doit pas être considéré comme le porte-parole d'une catégorie quelle qu'elle soit.

M. Christian Jacob - C'est précisément ce que j'ai dit.

L'amendement 884, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 130 corrigé est de cohérence.

L'amendement 130 corrigé, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 131 est rédactionnel.

M. le Ministre - Avis favorable.

L'amendement 131, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - Je laisse à M. Leyzour le soin de défendre l'amendement 132 -2ème rectification sur lequel il a déposé un sous-amendement que la commission a accepté.

M. Félix Leyzour - L'amendement et mon sous-amendement 893 sont de précision.

M. le Ministre - Avis défavorable.

Le sous-amendement 893, mis aux voix est adopté.

L'amendement 132 -2ème rectification ainsi sous-amendé, mis aux voix, est adopté.

M. Félix Leyzour - Notre amendement 885 est de cohérence avec la modification que nous avons apportée au premier alinéa de l'article.

M. le Rapporteur - Avis défavorable.

M. le Ministre - Avis défavorable.

M. Christian Jacob - M. Leyzour pourrait-il préciser ce que sont ces accords étendus, conclus au plan départemental, régional ou national ?

M. Félix Leyzour - Vous êtes suffisamment averti pour comprendre ce que cela veut dire. (Exclamations sur les bancs du groupe du RPR)

L'amendement 885, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'article 28 amendé, mis aux voix, est adopté.

La suite du débat est renvoyée à la prochaine séance.

Prochaine séance ce matin, vendredi 9 octobre, à 9 heures.

La séance est levée à 1 heure.

          Le Directeur du service
          des comptes rendus analytiques,

          Jacques BOUFFIER


© Assemblée nationale


© Assemblée nationale