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Assemblée nationale

COMPTE RENDU

ANALYTIQUE OFFICIEL

Session ordinaire de 1998-1999 - 13ème jour de séance, 32ème séance

2ème SÉANCE DU MARDI 20 OCTOBRE 1998

PRÉSIDENCE DE M. Arthur PAECHT

vice-président

          SOMMAIRE :

LOI DE FINANCES POUR 1999 - deuxième partie - (suite) 1

ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR, RECHERCHE ET TECHNOLOGIE (suite) 1

La séance est ouverte à vingt et une heures quinze.


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LOI DE FINANCES POUR 1999 - deuxième partie - (suite)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 1999.


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ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR, RECHERCHE ET TECHNOLOGIE (suite)

M. Pierre Cohen - La recherche est-elle encore une priorité pour la gauche ? Dans ce budget, elle n'a pas été affichée comme telle. Mais la question essentielle est de savoir le type de recherche que nous devons soutenir pour demain.

La recherche repose sur la progression du savoir, le développement de filières de connaissances et la découverte de nouvelles technologies. En ce domaine, la France est une puissance mondiale reconnue et respectée, en grande partie grâce à l'originalité d'un système basé sur le service public, ce qui permet de financer les recherches fondamentales dans la durée. Ainsi avons-nous pu investir dans des domaines stratégiques comme l'énergie, le transport, la santé, le spatial, les télécommunications.

Au début de ce troisième millénaire, nous sommes interpellés par de nouveaux enjeux. Face à la mondialisation, à la révolution de l'information, nous nous devons de réfléchir à la place de la recherche et à son développement, avec quels acteurs, quel type de commande. Ce vaste chantier de réflexion est-il ouvert ? Des réformes profondes ne peuvent être engagées sans débat démocratique. Tous les acteurs devront être associés.

Dans un environnement en pleine mutation, la proposition de loi sur l'innovation est peu diffusée, les réformes structurelles des organismes de recherche largement remis en cause ; mon sentiment sur ce budget reste mitigé et en cela je partage les analyses du rapporteur Daniel Chevallier.

Une croissance limitée à 1,6 % ne fait pas de la recherche un secteur prioritaire.

On constate un infléchissement des orientations de l'année dernière en faveur des emplois scientifiques et du développement de moyens pour les organismes.

La création d'un fonds national de la science doté de 500 millions et le soutien au fonds de la recherche technologique font l'originalité de ce budget. Nous n'émettons aucune réserve sur le fonds de la recherche technologique. Mais nous sollicitons des garanties sur la méthode de définition des orientations, et la transparence dans les procédures d'attribution.

Un comité d'experts, fût-il constitué des chercheurs les plus brillants, n'est pas une garantie de choix démocratique.

Si la recherche doit accroître ses capacités à trouver des développements dans le privé, en particulier dans les PME PMI, -c'est l'objet de la loi sur l'innovation-, nous devons définir très vite un équilibre entre les différentes logiques.

D'abord, il faut préserver les moyens de fonctionner des organismes de recherche et surtout leur capacité à développer des équipes et des thèmes de recherche dans la durée.

Il faut ensuite donner au politique les moyens d'infléchir ou de faire naître des thématiques par appel à projet.

Enfin, il faut faire évoluer les liens entre le public et le privé afin d'améliorer le transfert et le développement des produits.

Toutes ces questions ont-elles été bien posées ? De sérieux arguments ont été déterminants dans vos choix. Mais n'est-il pas temps de les confronter avec tous les partenaires ?

Le budget 99, que je qualifierai de transitoire, suscite certaines interrogations.

Avec une progression de 2,2 % les EPST conservent leurs possibilités d'action.

En revanche, les créations d'emploi de chercheurs et d'ITA diminuent alors qu'il faut programmer des départs massifs d'ici 7 à 8 ans.

Le crédit de 50 millions afin de financer l'insertion des postdoctorants dans les entreprises innovantes et particulièrement les PME PMI est maintenu, ce qui est important, mais peut-on connaître les affectations des crédits 98 afin d'orienter au mieux ceux de 99 ?

Le crédit impôt recherche doit être encore plus orienté vers les PME PMI et la création d'emplois scientifiques.

J'insiste sur un secteur largement laissé pour compte après le départ d'Hubert Curien : l'information scientifique et technique et la culture scientifique et technique. De prestigieux centres et musées jouent un rôle fondamental mais ne répondent pas à la diffusion de proximité et n'établissent pas de relations continues avec les équipes de recherche. La culture scientifique et technique doit figurer parmi les priorités.

Le secteur spatial absorbe le sixième du BCRD. Il a été amputé en 1998 de 200 millions, et quelques orientations ont été abandonnées comme les vols habités. De nouvelles se précisent comme l'observation de la terre avec le développement de Spot 5, la télécommunication et la navigation, l'exploration planétaire mais surtout la stratégie des lanceurs -nous souhaitons vivement le succès d'Ariane 5 demain-, et l'avenir des petits lanceurs.

Pour mener ce programme à bien, vous avez augmenté de 70 millions le budget du CNES. C'est encore insuffisant pour soutenir ce secteur porteur d'avenir qui concerne la téléphonie ou le multimédia, l'environnement et l'écologie, mais aussi notre indépendance avec la localisation et la navigation.

1999 sera aussi une année de décisions importantes sur le lien entre le civil et le militaire, les politiques européennes, le développement industriel, les restructurations.

Malgré quelques interrogations, je suis convaincu que cette année doit être l'année de la Recherche. Je souhaite que vous répondiez à toutes les attentes du groupe socialiste qui votera ce budget (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Alain Clary - Mais où est donc la droite ?

Mme Odette Grzegrzulka - Ils n'aiment pas entendre complimenter le ministre.

M. le Président - Rien dans le Règlement n'oblige l'opposition a être présente.

Mme Odette Grzegrzulka - Sauf le respect de la démocratie.

M. Jean-Yves Le Déaut - La recherche aurait sans doute mérité un effort plus soutenu pour rattraper les retards accumulés par les gouvernements Balladur et Juppé, dont les représentants sont absents. Mais nous apprécions l'augmentation des autorisations de programme, qui se fera sentir l'an prochain.

Vos priorités vont dans le bon sens, puisque ce budget restaure les moyens de la recherche fondamentale, renforce le soutien à l'innovation technologique, et crée un fonds national pour la science et un autre pour la recherche technologique doté de 670 millions.

Je m'inquiète toutefois des projets de décret concernant la réforme du CNRS et de la tendance à concentrer de nouveaux certains organismes. Pouvez-vous expliquer votre vision globale de la recherche avant de modifier les structures du CNRS, de l'INSERM et d'autres EPST ! Les chercheurs sont prêts à discuter. Mais il n'est pas nécessaire de donner des coups de pied dans des fourmilières virtuelles.

Nous nous félicitons aussi de votre projet de loi pour la valorisation de la recherche publique. Aujourd'hui les sociétés qui transfèrent des technologies connaissent parfois l'échec en raison d'une mauvaise approche du marché et d'une sous-capitalisation. Vous devez renforcer les liens entre la recherche et l'entreprise et mettre en place une fiscalité au service de l'innovation. Nous vous soutenons totalement pour le faire.

Essaimage rime souvent chez nous avec bricolage. Il y a pourtant de bons outils, pas seulement aux Etats-Unis mais aussi aux Pays-Bas où une université a créé 1 200 emplois. Comment dans votre projet, allez-vous améliorer l'expertise et le soutien juridique et financier ? Comment pouvez-vous soutenir les incubateurs d'entreprises ?

Je souhaiterais aussi des liens plus étroits entre les départements ministériels et le Parlement. Pour être efficaces, les débats budgétaires devraient se tenir au quotidien.

L'an dernier, pour les post-doctorants qui ne trouvaient pas d'emplois, a été créé un fond de 50 millions, reconduit cette année. Il aurait été souhaitable de faire le bilan de ce dispositif, comme du crédit impôt-recherche. Il faudra l'utiliser pour aider plus encore les PME et les grandes entreprises qui favorisent l'emploi ainsi que la politique d'essaimage des PME.

D'après les calculs de nos rapporteurs, plus d'un milliard de crédits part aujourd'hui en "effet d'aubaine" pour les très grandes entreprises. Le Parlement souhaite un débat sur nos grandes orientations scientifiques et technologiques, les acteurs de la recherche veulent plus de dialogue et d'explications et nos concitoyens veulent comprendre les progrès des sciences et techniques, on l'a vu lors de la conférence de citoyens sur les organismes génétiquement modifiés.

Le groupe socialiste votera ce budget des deux mains ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

Mme Cécile Helle - Après mes collègues, je tiens à souligner l'important effort budgétaire consenti par le Gouvernement pour l'enseignement supérieur en 1999.

Pour la première fois, le cap symbolique des 50 milliards de francs est franchi. Cette progression de 5,4 % est d'autant plus remarquable que les effectifs étudiants n'augmentent plus ; elle témoigne donc bien de votre volonté commune de construire un enseignement supérieur moderne et de qualité assurant de bonnes conditions de formation et de vie à nos étudiants.

Les 2,6 milliards supplémentaires serviront principalement à financer trois grandes priorités : la préparation du plan U3M, l'amélioration des moyens des universités et le plan social étudiant sur lequel je souhaiterais m'attarder.

Certains, aujourd'hui, font la fine bouche, au motif qu'il ne s'agirait pas d'un réel statut social de l'étudiant. Ils tentent sans doute de faire aussi oublier une promesse électorale, qu'ils n'ont guère réalisée une fois arrivés aux responsabilités : de 1995 à 1997, aucune mesure significative en matière d'aide sociale et de vie étudiante n'a été prise.

Pourtant les étudiants souhaitent une meilleure reconnaissance de leur place dans la société, une plus grande indépendance matérielle et morale, enfin, une réelle participation à la conduite des affaires universitaires.

Les 808 millions de francs débloqués dans ce budget apparaissent comme les premiers jalons d'une politique globale en faveur des étudiants.

Dès la rentrée 1998, 25 000 étudiants supplémentaires ont bénéficié d'une bourse grâce au relèvement de 6 % des plafonds du premier échelon, grâce aussi aux bourses de mention accordées aux meilleurs bacheliers se destinant aux concours de l'ENA ou de l'Ecole de la magistrature.

Il s'agit bien là de mesures qui visent à rendre effective l'égalité des chances pour tous dans l'enseignement supérieur car elles profitent aux jeunes dont les familles n'ont pas les moyens de financer des études supérieures. Comment admettre, en effet, que seulement 7 % des étudiants des classes préparatoires et du troisième cycle soient des enfants d'ouvriers, alors que ceux-ci représentent 37 % de leurs classes d'âge ?

Ces dispositions, comme les investissements de U3M en faveur du logement étudiant ou l'aide aux transports pour les jeunes Franciliens ne constituent, certes, que des étapes vers la construction d'une véritable autonomie des étudiants. D'autres devront suivre, vous les avez d'ailleurs évoquées en juillet dernier.

En attendant, ce budget marque un effort quantitatif considérable. Surtout, il s'inscrit dans un dispositif d'ensemble qui va au-delà de l'assistance et doit permettre aux jeunes d'avoir un réel projet d'étude et de vie sans être freinés par des obstacles matériels. Ce temps de formation doit enrichir la personnalité et préparer au rôle de citoyen -on sait l'importance que les jeunes aujourd'hui accordent à cette dimension.

Ce projet est novateur et porteur de sens. Nous le voterons sans états d'âme (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Alain Gouriou - "Le secteur des télécommunications connaît une évolution technologique et juridique très rapide, capitale pour le développement économique de notre pays", écrivait le Premier ministre en juin 1997 dans sa lettre de mission à Michel Delebarre.

Jusqu'en 1996, ce secteur était caractérisé, en France, par le rôle prépondérant joué par France Télécom, qui assumait non seulement les fonctions de prestataire de services, mais également les fonctions relevant de l'Etat, notamment la recherche.

En 1996, le Parlement a décidé de dissocier les fonctions d'opérateur, désormais confiées à France Télécom et à d'autres opérateurs privés, des missions de l'Etat, confiées à des directions de votre ministère et du secrétariat à l'industrie, ainsi qu'à des services administratifs créés à cette occasion.

Je voudrais appeler votre attention sur les risques que comporte cette situation pour la recherche publique en télécommunications. Tout se passe en effet comme si France Télécom avait été remplacée, en matière de recherche, par deux autorités distinctes : d'une part, le Conseil général des technologies de l'information du ministère de l'industrie, explicitement chargé par un décret de décembre 1996 de définir et mettre en oeuvre les politiques de recherche publique dans le domaine des technologies de l'information, mais dont l'action jusqu'à aujourd'hui a été peu cohérente, voire inexistante ; d'autre part, la direction de la technologie, créée dans votre ministère par un décret de décembre 1997, dans laquelle nous mettons beaucoup d'espoir, mais dont le champ d'action ne se limite pas au secteur des télécommunications.

Cette dualité, de nature à provoquer une certaine dilution des responsabilités, n'a pas été atténuée par la création du Réseau national pour la recherche en télécommunications, placé dans une situation fausse entre les deux ministères. Le RNRT a d'ailleurs choisi de limiter son rôle en adoptant une méthode de travail adaptée à une partie seulement des activités que l'on regroupe habituellement sous le vocable de "recherche publique". Le budget que vous avez prévu -260 millions- correspond d'ailleurs à cette limitation.

Cette situation inquiète les chercheurs et les personnels du CNET, les organisations syndicales, qui posent la question : "La France a-t-elle encore des projets pour les décennies à venir en matière de technologies de l'information et de la communication ?".

Si France Télécom ne peut supporter seule un effort de recherche dont les fruits doivent profiter à tous les partenaires dans ce domaine, il est important d'éviter qu'une vision réduite à ses seuls intérêts immédiats ne conduise à l'affaiblissement, voire à un éclatement, de l'outil remarquable qu'est le CNET.

D'autant que le contexte international est inquiétant. Les chercheurs français soulignent le caractère hégémonique de certaines entreprises américaines dans le domaine des logiciels et les risques, pour les nôtres, d'une dépendance excessive. La firme Ericsson a, à elle seule, engagé dans la course une armada de 18 000 chercheurs, soit 18 % de ses effectifs, et un budget de 20 milliards de francs, soit 16 % de son chiffre d'affaires.

Il importe donc que le Gouvernement définisse et mette en oeuvre rapidement une stratégie, tenant compte des vrais besoins des entreprises et de la population.

"L'accès à la compétitivité internationale serait le plus souvent interdit aux entreprises sans la promotion des technologies avancées que l'on doit à l'Etat". Cette phrase de François Mitterrand reste plus que jamais vraie. Si certains choix ont pu être critiquables, les aides du passé ont été à la base de la bonne tenue relative de notre pays jusqu'à aujourd'hui. Il ne faudrait pas que le secteur des télécommunications se retrouve "à la traîne", après avoir été à l'avant-garde !

Il me reste à évoquer un aspect essentiel, la répartition géographique des équipes de recherche. Il faut éviter un saupoudrage qui ne serait que gaspillage. Mais la proximité géographique favorise la complémentarité entre équipes de statuts différents, public ou privé. Ainsi le regroupement de l'aéronautique à Toulouse ou de la micro-électronique à Grenoble sont des bons exemples.

Au cours des dernières années 60 et 70, la France a entrepris de regrouper en Bretagne ses moyens de recherche et développement en télécommunications. Pour respecter les engagements pris envers la Bretagne et renforcer ce secteur essentiel, ne pensez-vous pas, Monsieur le ministre, qu'il est temps de parachever ce regroupement ?

Certain que vous saurez assurer une coordination efficace de la recherche, le groupe socialiste votera ce budget (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Claude Allègre, ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie - Nous avons dû cette année préparer ce budget avec une célérité exceptionnelle, ce qui m'a empêché de m'exprimer devant vos commissions. Ce déficit de communication explique sans doute que j'ai constaté aujourd'hui un certain nombre de faux-sens, de contresens, voire d'absences... (Sourires)

Or, sur un sujet comme l'enseignement supérieur et la recherche, nous devions éviter anathèmes et surenchères. Chacun, dans le passé, a mené une politique en fonction de ses moyens et de ses convictions. Si j'en crois la droite, elle regrette aujourd'hui celle qu'elle a menée. Quelques chiffres sur le recrutement des jeunes docteurs : 1995 : 2 740, 1996 : 2 850, 1997 : 3 020, 1998 : 5 000, 1999 : encore 5 000. Et quand on considère le nombre d'emplois créés, il faut tenir compte des emplois nouveaux et des retraites car le vivier est quand même limité et il ne servirait à rien, comme l'a fait jadis la droite faute d'un recrutement correct, d'afficher des postes qui ne seraient pas pourvus.

Par ailleurs, je le dis à l'opposition mais aussi à certains dans la majorité, demander toujours plus, c'est trop facile, ce n'est pas responsable. Il faut dire que l'on veut augmenter les impôts, ou sur quoi il faut prélever. Faut-il moins d'infirmières, moins de juges, moins de policiers ? Pour sa part, le Gouvernement doit réduire les impôts, donc il fait des choix. Et on ne peut à la fois voter son budget global et refuser ces choix...

M. Patrick Leroy - Et si ces choix sont mauvais ?

M. le Ministre - Je ne vous ai pas interrompu ! Mais je vous répondrai car vous avez dit un certain nombre de contrevérités qui resteront imprimées.

Ces choix, on peut les contester, on peut en débattre, et j'y suis prêt, c'est cela la démocratie.

J'en viens à l'enseignement supérieur. Pour la première fois cette année vous est présenté un budget coordonné avec un montant global -65,1 milliards- de la dépense française pour l'enseignement supérieur, c'est-à-dire celle de mon ministère et de tous les autres. L'an prochain, la procédure sera analogue à celle du BCRD.

A M. Goasguen, qui connaît bien le sujet, je répondrai qu'en effet ce budget n'est pas très original. La politique de M. Bayrou, même si elle était velléitaire sur le plan social étudiant, s'inscrivait de celle de Lionel Jospin. Si l'on a progressé dans l'enseignement supérieur, c'est bien parce que l'effort a été poursuivi. De même, M. Bayrou a lancé une réforme des collèges, et nous avons préféré continuer dans cette voie.

Le budget de cette année est en énorme croissance, 5,4 %, alors que le nombre d'étudiants diminue. S'agissant du plan social étudiant, M. Bayrou avait beaucoup parlé, mais les chiffres sont là : au début de la période Jospin, le nombre de boursiers était de 15 %, Lionel Jospin l'a fait passer à 20 %, en quatre ans, M. Bayrou l'a fait passer à 21 %, nous nous proposons de le faire passer à 30 % et nous y parviendrons grâce à 800 millions de mesures nouvelles. Au total, 25 000 étudiants de plus seront aidés. Le montant moyen des bourses sera revalorisé de 4 %. La carte orange étudiante, revendication qui date d'au moins dix ans, verra enfin le jour en région parisienne et une mesure analogue sera prise pour la province. Nous mettons aussi en place des bourses pour que les enfants de familles modestes soient intégralement pris en charge par l'Etat pendant leurs études. Certes, ne sont concernées cette année que l'ENA et la magistrature, mais l'an prochain ce seront les écoles d'ingénieurs et médecine et je ne suis pas fermé à d'autres orientations. Une provision de 226 millions garantit la continuité pour l'année prochaine.

M. Goasguen a souhaité que je prenne position sur la MNEF. Mais la MNEF ne dépend pas de moi, je n'ai même pas un représentant à son conseil d'administration. Si certains ont commis des actes répréhensibles, la justice passera, mais il ne faudrait pas que cela conduise à remettre en cause le fonctionnement mutualiste et la gestion par les étudiants de ce qui les concerne, bref, à abandonner le système de santé étudiant aux assurances privées (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste).

L'Université du troisième millénaire marque le passage à une nouvelle génération par rapport à Université 2000, qui a été porté par la droite comme par la gauche et qui a permis de remettre à niveau l'Université française.

Les techniques modernes de communication remettent en question les méthodes traditionnelles. Faudra-t-il de grands amphithéâtres ou de petites salles de travail reliées par un réseau informatique ? Faudra-t-il de grosses universités centralisées ou des réseaux au sein desquels les universités des villes moyennes seront reliées aussi ? ("Très bien !" sur plusieurs bancs du groupe socialiste) C'est cela le grand défi d'U3M, qui intégrera une nouvelle façon d'enseigner et de chercher. Déjà, le réseau de nanotechnologie permet à un chercheur de Poitiers de manipuler à Grenoble sans se déplacer. Oui, c'est une autre vision de l'architecture et de l'enseignement qui apparaît.

Je n'appliquerai pas pour cela une méthode identique à celle d'Université 2000. Les débats doivent avoir lieu dans les régions, pour que les idées remontent. Ce n'est pas à moi de tout décider d'en haut.

M. Gilbert Meyer - Vous avez raison.

M. le Ministre - Mais l'Etat arbitrera au bout du compte, au nom de l'égalité des chances. Il devra compenser, en donnant plus aux régions les plus pauvres et moins aux plus riches. C'est cela, l'équilibre républicain.

Quant aux universités nouvelles, nous continuerons à nous en occuper, et -je l'indique à M. Crépeau- les laboratoires de recherche qui n'ont pas été mis en place dans ces universités devront l'être.

M. Goasguen a dit que les locaux universitaires n'étaient pas utilisés à plein temps : il a raison. C'est bien pourquoi nous avons lancé cet appel d'offres pour des opérations de formation continue pendant toute l'année. Treize universités ont ainsi été ouvertes, et je souhaite qu'il en soit de même l'an prochain. Petit à petit, toutes les universités feront de même, et s'ouvriront sur les activités des villes, avec des conférences pour tous, des activités de week-end, etc L'idée essentielle d'U3M, c'est l'ouverture. Les crédits de paiement augmentent de 500 millions, c'est-à-dire de 15 %.

On a évoqué Jussieu. C'est un problème difficile. Nous allons le traiter, en veillant à deux choses. La première, c'est que les étudiants ne subissent aucun retard dans leurs études : tout en procédant au désamiantage, nous construirons les locaux nécessaires pour éviter toute interruption des études. La seconde, ce sont les problèmes de sécurité au feu, d'autant que le désamiantage accroît les risques d'incendie. C'est donc une vraie question, et je ne peux pas faire n'importe quoi. Nous prendrons les décisions dans la clarté et j'en informerai l'Assemblée.

M. Christian Cabal - Sur Jussieu, vous aviez raison, même avant d'être ministre.

M. le Ministre - Quant aux postes, il y en aura le même nombre que l'an dernier. On a soulevé le problème des ATER. Il y a plusieurs années que le ministère des finances a donné l'autorisation de prendre les ATER sur des postes budgétaires ce qui a été...

M. Gilbert Meyer - Une bêtise.

M. le Ministre - Non, pas de son point de vue ! C'était très malin de sa part : il pouvait gagner les deux tiers du salaire. Mais cela a permis aux universitaires de ne pas recruter de jeunes. L'an dernier 2 500 postes sont restés dans la poche des universités : au lieu de les mettre au concours, on choisit qui on veut comme ATER. Nous avons donc décidé d'interdire petit à petit d'utiliser les postes budgétaires pour y mettre des ATER, et de mettre ceux-ci sur des crédits. Grâce à cette libération, nous créons de vrais postes. Et petit à petit, il deviendra impossible pour les universités de ne pas créer de postes. Ce système est donc, non seulement sain, mais créateur d'emplois. Cela dit, je vais créer 5 000 postes : je ne peux pas faire plus.

Nous créons 800 personnels non enseignants, avec une augmentation des moyens des établissements. On a soulevé le problème réel que pose le nombre trop élevé d'étudiants en éducation physique et en psychologie. Pour l'EPS, nous avons fait une table ronde avec Mme Buffet et je pense que nous allons avancer. La psychologie pose un vrai problème. Nous n'avons aucun moyen légal de freiner la croissance de ses effectifs. Et en même temps je vois avec inquiétude le nombre des étudiants en sciences diminuer de 12 %, après 12 % déjà l'an dernier. Peut-être peut-on imaginer, dans quelques années, une société où nous serons tous occupés à nous psychanalyser réciproquement (Sourires), mais je ne suis pas sûr que ce soit ce que nous voulons...

Les orateurs ont parfois oublié de mentionner certaines choses. Ainsi il y a 1 250 postes supplémentaires de recherche et d'enseignement doctoral. Quant aux assistants, corps en voie d'extinction, nul ne s'en occupait depuis des années : nous les avons revalorisés. Pour les personnels IATOS, nous avons pris des mesures de repyramidage. Je suis scandalisé par le peu d'intérêt que suscitent les mesures en faveur des personnels non enseignants. Malgré deux conférences de presse sur la revalorisation des IATOS, je n'ai pas obtenu deux lignes dans la presse.

On a dit que nous étions dans la continuité des politiques précédentes. Mais je dis clairement ce qui marche et ce qui ne marche pas dans les réformes de M. Bayrou, même si elles étaient dans la continuité des nôtres. Ce qui ne marche pas, par exemple, c'est la réorientation au bout de six mois ; nous allons encore essayer, mais c'est un vrai problème. Il y a en revanche des choses qui marchent. Un orateur a dit que nous abandonnions le tutorat. C'est totalement faux. C'est un aspect très important. Nous l'abandonnons d'autant moins que c'est moi qui l'ai introduit en son temps (Rires sur les bancs du groupe socialiste).

Nous avons, en revanche, trois priorités nouvelles. La mondialisation : nous avons créé une agence pour la vente de la formation française à l'étranger. Je serai dans quelques semaines au Mexique avec le Président de la République pour le premier forum de vente de la formation française, tandis que Mme Royal sera en Inde dans le même but. Nous avons fixé pour règle aux grandes écoles d'accueillir un tiers d'étudiants étrangers dans les deux ans, et elles le font.

Deuxième objectif : l'harmonisation européenne. Elle suit son cours, et permettra que les choses se fassent dans des conditions consensuelles.

Mais ma grande priorité, c'est la formation continue. Nous avons conduit un projet qui a bien marché, et nous a permis en été de former des informaticiens, dont nous manquions. Nous allons continuer. Mais la formation continue n'est pas une petite affaire ! S'il s'agit de faire des colloques à son sujet, tout le monde est là. S'il s'agit même de légiférer, les parlements votent comme un seul homme. Mais s'il s'agit de faire entrer ces lois dans la vie, c'est une autre paire de manches... Un exemple : la loi sur la validation diplômante des acquis professionnels. L'université de Lille I a opéré autant de validations que tout le reste de la France ! On a du mal à admettre que quelqu'un qui n'a pas usé ses fonds de culotte sur les bancs de l'université soit capable, par une activité professionnelle, d'obtenir l'équivalence d'un diplôme. Je dois le dire, mes collègues professeurs n'aiment pas donner des diplômes à des gens qui n'ont pas suivi leurs cours. Et pourtant cette démarche est à la base d'une rénovation de la formation continue. Si celle-ci consiste à prélever un pourcentage du temps de travail pour aller s'asseoir sur des bancs, tout le monde est d'accord. Mais s'il s'agit de décerner, en formation continue, des diplômes qui permettent de changer de position dans l'échelle des salaires, les gens ne sont plus d'accord... Et pourtant c'est cela que nous devons faire. Et nous le ferons (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe socialiste). J'aurai l'occasion de m'expliquer à ce sujet devant le Parlement. Il faut constituer une grille de validation qui permettre aux gens d'entrer dans ce système. Peut-être devrons-nous faire comme les Danois, qui ont contourné la difficulté en créant des diplômes de nom différent, mais ayant l'équivalence légale avec les diplômes habituels. En tout cas c'est un point très important.

Ainsi, pour l'enseignement supérieur, l'ambition est intacte. Elle ne demande pas de grandes accélérations, sauf sur l'internationalisation et la formation continue : voilà deux priorités, deux originalités de la politique qui sera conduite cette année.

J'en viens au budget civil de la recherche-développement. Une petite remarque d'ordre arithmétique. L'an dernier tout le monde, droite et gauche, jugeait ce budget vraiment bon. Or il augmentait de 1,4 %. Il est vrai que sous la droite il diminuait. Mais cette année j'entends des orateurs faire la petite bouche alors que le BCRD augmente de 1,6%. Pourtant, 1,6, c'est plus grand que 1,4 ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. Christian Cabal - Il faut comparer avec l'évolution du budget de l'Etat.

M. Gilbert Meyer - Avec 2,7 % de croissance, on pouvait faire mieux.

M. le Ministre - J'en viens à une interpellation, faite par la gauche, qui mérite une explication. Depuis le général de Gaulle, personne n'a fait de la recherche une priorité.

M. Gilbert Meyer - Excellente référence !

M. Christian Cabal - La politique de la recherche ne se réduit pas à des crédits.

M. le Ministre - Pourquoi la recherche n'est-elle pas une priorité nationale ? Grâce aux efforts faits par les gouvernements de gauche, notamment par M. Chevènement, la France dépense à peu près autant que les autres grands pays industrialisés pour la recherche, soit environ 2,3 % PNB. On pourrait donc attendre des résultats équivalents. Certes, la recherche française est de bonne qualité, mais je voudrais qu'elle soit de qualité exceptionnelle. Et tant que nous n'aurons pas remis un peu d'ordre, je ne demanderai pas au Gouvernement de faire de la recherche une priorité budgétaire. Je le lui demanderai dès que ce sera chose faite, c'est-à-dire, je l'espère, dès l'an prochain.

Notre recherche a vieilli. L'âge moyen est de 47 ans et demi au CNRS. Les jeunes n'accèdent pas aux responsabilités dans les équipes scientifiques. Ils doivent attendre d'être blanchis sous le harnais. Pour ce qui est de la mobilité, 7 chercheurs sur 11 000 sont passés dans le privé ! Les créations d'entreprises sont nulles.

Dois-je rester inactif face à cette situation ?

M. Christian Cabal - Sur ce point, nous vous approuvons.

M. le Ministre - En conséquence, nous maintenons à 3 % le renouvellement des chercheurs, comme nous nous étions engagés durant la campagne électorale. Les chercheurs français peuvent être aussi bons que leurs homologues étrangers, mais il faut modifier les conditions dans lesquelles ils travaillent depuis un certain nombre d'années.

Nous avons créé un conseil national de la science qui fera des recommandations, nous avons décidé de donner une priorité aux jeunes équipes et, nouveauté de ce budget, nous avons abondé un fonds d'intervention.

Mais je n'ai nullement l'intention d'intervenir dans les orientations des organismes. Du reste, le CNRS va être doté d'un conseil scientifique indépendant de la direction, qui choisira lui-même son président. Je souhaite qu'il débatte et propose des orientations sur la base d'un contrat pluriannuel.

Et puis il y a un fonds dans lequel le Gouvernement exprime sa politique. Nous voulons donner la priorité à la recherche fondamentale et à la recherche technologique. Un concours national portant sur la création d'entreprises sera organisé dans quelques semaines, les jeunes chercheurs en particulier pourront y participer. Nous voulons poursuivre cette action volontariste sur la base de concours de compétence avec des jurys, qui attribueront de l'argent pour monter des projets en tenant compte non seulement des idées de recherche mais aussi du "business plan" et des débouchés sur les marchés. Il ne s'agit pas de créer des "RANA" -recherches appliquées non applicables- (Sourires).

S'agissant des organismes, j'admets la critique selon laquelle nous n'avons pas suffisamment informé la représentation nationale. En ce qui concerne le budget, j'ai été pris au piège.

Cela dit, vous n'avez pas lieu de vous inquiéter pour le Commissariat à l'énergie atomique qui ne s'occupe pas que de la filière nucléaire. Il fait aussi de la biologie, de la géologie, de l'astronomie. Plus on recentrera ses activités, mieux il remplira ses missions. La filière nucléaire n'est pas en péril en France. Quant au financement du CEA, il était complété, depuis un certain nombre d'années, par des crédits militaires et par des ventes d'actions. Nous voulons, pour notre part, que le CEA devienne plus officiellement ce qu'il est : un laboratoire de recherches avancées de l'EDF.

M. Gérard Saumade - Très bien !

M. le Ministre - Sa structure budgétaire est conçue pour cela. Nous voulons un rapprochement CEA-EDF.

J'en viens au Centre national d'études spatiales. Ainsi que je l'ai montré par des actes à propos des vols habités, je ne veux pas que la France, leader de l'Europe spatiale, laisse aux Américains le monopole de la conquête spatiale. Voilà pourquoi nous avons réorienté les activités du CNES. Cette année, l'Agence spatiale européenne n'a pas dépensé tous ses crédits : c'est donc un problème, non de budget, mais d'orientations. Nous voulons que l'espace soit au service des hommes. La terre est notre priorité numéro un : observation télécommunications, téléenseignement. Deux satellites seront mis en place par le CNES pour diffuser la banque française en Afrique.

Quant au CNRS, nous sommes en train de réformer ses statuts. La plus grande innovation consiste à introduire des chercheurs du monde industriel et des chercheurs européens dans son conseil scientifique. Il est temps d'européaniser nos organismes de recherche.

En ce qui concerne nos grands équipements, ils sont chers. Il faut donc qu'ils profitent à beaucoup de monde. Première règle fixée : un équipement européen doit être européen. Si tel est le cas, il est utilisé constamment, y compris les dimanches et jours fériés. Si tel n'est pas le cas, il faut qu'il soit au moins national, c'est-à-dire qu'il n'appartienne pas à un seul organisme mais soit ouvert à tous.

Vous avez tous en tête l'affaire SOLEIL. Je gère l'argent de la République. Je constate que, dans deux ans, il y aura sept synchrotrons de troisième génération en Europe. Il y en a deux aux Etats-Unis. Pensez-vous vraiment qu'il faille en construire un huitième sans enquête préalable ? Connaissez-vous un domaine où l'Europe a besoin de quatre fois plus d'appareillage que les Etats-Unis ? J'ai donc demandé une enquête avant de prendre une décision. Toutes les régions protestent, dites-vous, mais toutes moins une -celle qui accueillera éventuellement SOLEIL- auraient été mécontentes ! (Sourires) De plus, SOLEIL ne fera travailler que quarante personnes. Sans doute avons-nous d'autres besoins.

J'ajoute que le synchrotron de Grenoble sera beaucoup plus libre à partir du moment où les synchrotrons allemand et italien fonctionneront. De plus, comme toujours, il y a ceux qui paient ces installations et ceux qui les utilisent. Les Anglais les utilisent mais ne paient pas. Sans doute est-ce mon côté paysan, mais je n'aime pas payer pour les autres.

L'INSERM bénéficie de la plus grosse augmentation de ce budget, conformément à notre volonté de donner la priorité aux sciences du vivant.

Une question m'a été posée sur le CNET et sur le crédit impôt-recherche. Le CNET ne dépend pas de moi, mais le Premier ministre m'a demandé de m'en préoccuper. J'ai donc confié le soin à Michel Petit, directeur de la recherche à l'école polytechnique, de me faire un rapport.

Je pense pouvoir vous indiquer dans quelques semaines les décisions du Gouvernement qui donneront à cet organisme une véritable mission d'intérêt général en le mettant au service de l'ensemble des opérateurs des télécommunications et non plus seulement de France Télécom.

En ce qui concerne le crédit impôt-recherche, je souhaite, tout comme vous, qu'il conduise à de véritables embauches de chercheurs dans les entreprises. Toutefois, nous ne sommes pas encore parvenus à concevoir un mécanisme de contrôle qui ne soit pas policier, mais nous continuons d'y travailler afin de favoriser le développement de la recherche dans les PME.

C'est là une priorité puisque le rapport Guillaume, que certains ici ont fustigé, nous apprend que 82 % de nos subventions à la recherche privée étaient versées à six grands groupes. Le Gouvernement a donc décidé lors du comité interministériel sur la recherche de réserver les subventions aux PME et PMI car ce sont elles qui créent des emplois. En outre, l'argent donné aux grands groupes risque d'être orienté de manière technocratique et non pas, comme dans les petites entreprises, en fonction du marché, alors que telle doit être la règle pour la recherche privée. Je fais bien entendu une exception pour le secteur de l'aéronautique où il ne peut y avoir de progrès sans financements publics. Les grands groupes ont d'ailleurs réagi positivement à cette réorientation et ils participent aux dispositifs de capital-risque que nous mettons en place pour les jeunes chercheurs.

Quant à mes modèles supposés, laissez-moi vous dire que je n'entends imiter ni le modèle américain ni celui de l'Académie des sciences de l'URSS. Je reste attaché à l'emploi par des organismes spécifiques de chercheurs à plein temps pendant la période où ceux-ci sont créatifs. Je me demande, en revanche, si l'on doit rester chercheur à plein temps à vie ou s'il ne serait pas préférable après un temps de rejoindre l'enseignement supérieur ou les entreprises. Il nous faudra voir un vrai débat sur la mobilité des chercheurs qui peut exiger l'élaboration d'un statut unique permettant de passer d'un organisme à l'autre, voire d'un statut commun d'enseignant-chercheur. Il nous sera difficile d'en trouver le temps en séance publique, mais je suis prêt à venir discuter avec vous en commission afin de trouver un accord sur certains objectifs communs. Nous pourrons ainsi bénéficier en matière de politique de la recherche de la même continuité que nous avons eue en matière d'enseignement supérieur sous deux ministres successifs, l'un de droite et l'autre de gauche.

Le budget de la recherche augmente davantage cette année qu'il n'augmentait l'année dernière et il pourra, demain, augmenter plus encore si, ensemble, nous permettons à des jeunes d'animer des équipes et de créer des entreprises et des richesses.

Notre pays a une longue tradition intellectuelle, son dynamisme économique peut donc être porté par la recherche comme il 'est dans d'autres pays et, avec Dominique Strauss-Kahn, nous y sommes attachés (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

QUESTIONS

Mme Paulette Guinchard-Kunstler - Alors que la répartition de l'effort de recherche pourrait être un instrument de l'aménagement du territoire, les activités de recherche restent trop concentrées. Pourtant la bataille de l'intelligence se dispute à toutes les échelles et la recherche doit se nourrir au contact des réalités locales.

Les contrats de plan Etat-régions ont témoigné de l'intérêt croissant des acteurs locaux pour la recherche régionale. L'année 1999, durant laquelle doivent être établis les nouveaux contrats de plan, sera décisive. Quelle part le Gouvernement souhaite-t-il donner à la recherche dans les établissements des nouveaux contrats de plan et comment entendez-vous assurer le rééquilibrage qui s'impose ?

M. Claude Allègre, ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie - La recherche est l'une des priorités du projet U3M, mais je ne veux ni saupoudrage, ni affectation de moyens sans évaluation. Tout dépend des hommes : l'affectation de tel ou tel équipement ne permet un développement scientifique que s'il existe des chercheurs. Le Gouvernement est très attentif à aider ce qui se fait en province. Si l'on excepte le secteur de la physique, qui reste concentré en région parisienne, la délocalisation des équipes scientifiques a d'ailleurs énormément progressé.

Le Gouvernement accompagnera ce mouvement qui doit reposer sur le volontariat et non sur des décisions brutales de déménagement prises en CIAT, lesquelles n'aboutissent à rien. Ainsi le déménagement annoncé de l'ENS de Saint-Cloud vers Lyon ne s'est en réalité traduit que par le déplacement d'une personne. En revanche, l'ENS de Fontenay a décidé elle-même d'aller à Lyon ce qui montre bien que des organismes sont prêts à s'installer en province si l'on sait les attirer. D'ailleurs, avec les nouvelles technologies, il n'est plus systématiquement nécessaire que les équipes de recherche soient affectées dans les grandes villes.

Le nouveau paysage de la recherche française va se dessiner progressivement mais il faut laisser la fermentation se faire. Le Gouvernement n'est pas décidé à imposer d'en haut sa politique, car la bonne ne peut que reposer sur les initiatives prises dans les régions.

Mme Martine Lignières-Cassou - Les effectifs étudiants diminuent tandis que les moyens, notamment en personnel, augmentent.

Ainsi pour le personnel enseignant un crédit de 75 millions a été ouvert permettant le recrutement de 1 500 ATER et donc de libérer 1 500 emplois d'enseignant-chercheur. Pour le personnel non enseignant, la création de 800 postes d'IATOS prolonge un effort qui, en deux ans, aura permis le recrutement de 2 000 IATOS.

Des difficultés demeurent néanmoins pour des personnels enseignants non titulaires de l'enseignement supérieur. Les chargés d'enseignement vacataires n'ont pu être intégrés malgré la volonté affirmée en 1983 de résorption de la précarité dans l'enseignement supérieur. En effet, leur âge trop élevé, leur discipline -cela vaut pour les lettres ou les sciences humaines- ou encore leur ancienneté insuffisante les a exclus du bénéfice des mesures de titularisation.

Pourtant, le budget améliore la situation de certains personnels et prévoit 2,9 milliards pour la revalorisation des assistants. Ne serait-il pas logique d'envisager l'intégration directe des vacataires dans le corps des assistants pour que la revalorisation de 1999 bénéficie aussi à ceux qui ont été lésés sans raison par des mesures réglementaires successives ?

M. le Ministre - Sur le plan administratif il n'y a pas de précarité au sens légal, dans l'enseignement supérieur. Il y est interdit par la loi de 1984 de faire appel à des auxiliaires, et les vacataires à titre principal, essentiellement des coopérants, ont été titularisés par la loi Le Pors ; les derniers ont été intégrés en 1989. Les universités ne peuvent recruter comme vacataires que des personnes ayant une activité extérieure ou des étudiants de moins de 28 ans.

Reste que, dans certains cas, essentiellement en lettres et sciences humaines, on fait appel à des enseignants en dehors de la réglementation. J'en fais actuellement l'inventaire. Mais on ne réglera pas ces situations par la voie réglementaire car elles sont justement extra-réglementaires. Ainsi, en lettres, on a pris l'habitude de répartir sur trois étudiants l'allocation de thèse. Il convient de faire la chasse à ces méthodes d'un autre âge. Le rapport de l'inspection générale sur les heures complémentaires de Paris IV est éclairant sur ces pratiques...

M. Jean-Yves Le Déaut - Les bâtiments universitaires des années 1960 vieillissent. Des crédits pour la rénovation sont prévus dans le cadre du plan U3M. Mais des questions subsistent.

Vos services réfléchissent à une autre répartition de la subvention de maintenance pour réduire les disparités entre établissements. Il y avait une part commune, en fonction de la superficie, et une autre part en fonction de l'état du patrimoine. Où en est la réflexion ?

Pour Jussieu, le niveau des crédits prévus nous rassure. Le maître d'oeuvre étudie des solutions techniques. Mais le chantier devant durer six ans, pour 2,8 milliards, ne peut-on s'interroger sur un déménagement vers Tolbiac ?

M. le Ministre - Les crédits consacrés à la sécurité des bâtiments dans l'enseignement supérieur sont de 400 millions en 1997, 585 millions en 1998 et 760 millions en 1999. C'est un poste essentiel.

En ce qui concerne Jussieu, toutes les solutions seront examinées pour tenir compte de la sécurité des étudiants, du coût et des possibilités diverses. Nous continuons le désamiantage pour obtenir une estimation exacte des coûts et des résultats. Vers la fin de l'année, après concertation interministérielle, nous proposerons au Premier ministre des orientations qui seront indiquées à l'Assemblée.

M. Christian Cabal - Le chercheur blanchi sous le harnais que je suis apprécie votre franc-parler et vos propos parfois iconoclastes. L'effort pour la recherche n'est pas de gauche ni de droite et peut faire l'objet d'un large consensus. Vous avez indiqué que nos commissions peuvent en débattre. Chiche !

Dans la franchise de vos propos il y a aussi une part d'autocritique. Si la recherche française est parfois engluée, "mammouthesque", c'est peut-être en raison de la pesanteur administrative et de la syndicalisation des grands organismes qui -je le dis sans polémiquer- bloque toute ouverture, de modalités de recrutement sans souplesse qui font que certains s'encroûtent. Il faut revoir le statut de la recherche et le RPR qui, dans la tradition gaulliste, associe recherche et indépendance nationale, vous suivra.

Le CNES est un des plus beaux fleurons de notre richesse nationale. Les programmes de satellites et de lancement font de la France et de l'Europe de grandes puissances spatiales. Pour qu'elles le demeurent, il faut d'autre financements à côté des crédits budgétaires.

Or j'ai eu l'impression que vous aviez quelque réticence à l'encontre du CNES. L'an dernier, vous avez eu des propos critiques sur son endettement. Mais tout le personnel, toutes les structures du CNES ont fait les efforts nécessaires. Nous serions heureux que le CNES soit le socle d'une grande politique spatiale européenne.

Il y a quelque temps, on a parlé de la privatisation ou du changement de structure de Arianespace. Qu'en est-il ? Le CNES doit-il s'en retirer partiellement, sous quelle forme et dans quelles conditions, afin bien sûr qu'Arianespace soit l'une des premières sociétés de développement spatial dans le monde ?

M. le Ministre - Le Gouvernement et moi-même sommes très attachés au rôle de la France dans le domaine spatial. C'est d'ailleurs pour cela que j'ai pris l'attitude que vous savez en ce qui concerne les vols habités, car amarrer la France aux Etats-Unis menaçait notre indépendance nationale. La suite a montré que nous ne nous étions pas trompés.

Pour continuer à être une grande puissance spatiale, il ne faut pas que le CNES et l'ESA n'obéissent qu'à des objectifs technologiques et industriels. Il faudrait même que l'Europe suive la même politique que la NASA après la réduction massive de son budget. Dans ce cas, le slogan "cheaper, faster, better" est vrai. La mission sur Mars a été faite avec dix fois moins de crédits que pour Viking. La technologie spatiale évolue et est beaucoup moins chère. Aux gros satellites on préfère les grappes de satellites spécialisés.

La première chose qui importe est d'être maîtres de notre politique de lanceurs. Ariane 5 a tout notre soutien, mais ne peut suffire : il nous faut un petit lanceur pour mettre des satellites en orbite basse. Il faut savoir que la catastrophe de Global Star nous a fait perdre 13 satellites ! Plusieurs projets de petits lanceurs sont donc à l'étude en Europe.

L'observation de la terre doit devenir une priorité : il ne suffit pas de faire des images, encore faut-il savoir les traiter et les interpréter. La politique suivie jusqu'à présent en ce domaine me paraît insuffisante.

Enfin, la grande aventure va être l'exploration de Mars et nous discutons pour qu'Ariane 5 y soit associée, ainsi que nos partenaires européens.

L'ESA est financée actuellement à 75 % par la France, l'Allemagne et l'Italie. Compte tenu de leur forte participation, les trois pays ont demandé une réforme de la gestion de l'ESA, de façon à y avoir une voix prépondérante. La France paie 3 milliards à l'ESA. Cela justifie d'y regarder de plus près ! Mais réformer les organismes européens, c'est encore plus difficile que réformer l'éducation nationale ! (Sourires) La résistance est molle mais très réelle, cela ressemble à un match de boxe contre une méduse ! (Rires sur tous les bancs)

Je ne m'étendrai pas sur le cas d'Arianespace car les problèmes industriels ne se traitent pas sur la place publique. Je tiens seulement à vous assurer que la France, qui est l'actionnaire de référence, le restera (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

Mme Nicole Catala - L'an dernier je vous avais déjà interrogé sur le contenu du plan que vous appelez un peu pompeusement "Universités du 3ème millénaire". Je n'avais trouvé dans votre budget que des crédits de rénovation et de mise aux normes des bâtiments, ce qui est certes nécessaire, mais je justifie pas une appellation aussi étincelante.

Cette année, j'ai refait l'exercice et je n'ai trouvé à nouveau, dans les documents de votre ministère comme dans les rapports parlementaires, que des projets de construction ou de rénovation de bâtiments universitaires. Que recouvre donc exactement le signe U3M ?

Vous avez annoncé que la recherche y occuperait une place centrale. Or si on y regarde de près, on constate d'abord que les moyens alloués pour la recherche non universitaire ont inspiré à nos deux rapporteurs les plus vives réserves : l'un s'est abstenu, l'autre a voté contre !

Quant à la recherche universitaire, si elle bénéficie d'une légère augmentation -70 millions- des crédits de paiement, en revanche les autorisations de programme diminuent. Plus grave encore, les crédits d'investissement pour les bibliothèques universitaires baissent, alors qu'il s'agit d'instruments indispensables, tant pour la formation que pour la recherche. Je vous invite d'ailleurs à lire à ce sujet le rapport de M. Claeys, qui, page 57, qualifie de "peu acceptable" la situation actuelle des bibliothèques et juge que leur modernisation doit constituer une des priorités du plan U3M. Or cette priorité, je ne la discerne franchement pas dans ce budget.

Alors je réitère ma question : que recouvre le sigle d'U3M ? S'il ne devait s'agir que des idées développées par M. Attali, je serais un peu inquiète.

M. Alain Claeys, rapporteur spécial de la commission des finances pour l'enseignement supérieur - J'ai écrit mes remarques sur la situation des bibliothèques universitaires parisiennes pour justifier la priorité donnée par U3M à ce secteur à Paris. Il faut bien reconnaître que dans le cadre du plan Universités 2000, ni la région ni la ville ne s'étaient engagés en ce domaine... (Interruptions sur les bancs du groupe du RPR)

Mme Nicole Catala - Ce n'est pas une compétence municipale ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste)

M. Alain Claeys, rapporteur spécial - Je me félicite qu'aujourd'hui, dans le cadre de la préparation d'U3M, l'ensemble des collectivités locales, ville et région, s'engagent et le problème des bibliothèques devra donc être traité de façon prioritaire dans ce cadre.

M. le Ministre - Madame Catala, je suis surpris que vous évoquiez le rapport Attali à propos d'U3M : autant parler de dinosaure quand il s'agit de mammouths ! Le rapport Attali n'a rien à voir avec U3M.

Je vous fais observer que les crédits de la recherche universitaire augmentent de 2,8 %, plus que l'ensemble du budget ! Les crédits U3M visent à poursuivre le travail commencé avec le plan Universités 2000, c'est-à-dire refaire les universités françaises. Quant à son contenu, je vous ferai remettre le document de cadrage donné au groupe de travail présidé par le directeur général du CNRS. Ce groupe de travail U3M, qui comprend des personnalités de divers milieux me remettra son rapport après avoir reçu les propositions venant des régions. Ce n'est qu'après ce débat que je pourrais vous dire le contenu d'U3M.

M. François Rochebloine - Votre décret du 30 juillet a entraîné une baisse de 17 % de la rémunération des heures supplémentaires pour les enseignants des classes préparatoires. Il faut savoir que ces enseignants ont un horaire déterminé par le ministère, dont une fraction est payée normalement et l'autre sous forme d'heures supplémentaires : or ces deux heures supplémentaires sont moins payées que les autres et ne sont pas soumises à cotisations sociales, ce qui représente une économie sérieuse pour l'Etat. Les intéressés souhaiteraient que ces deux heures, obligatoires en fait, soient rémunérées normalement.

Le dossier semble bloqué, mais les organisations d'enseignants des classes préparatoires sont très déterminées. Il me semble nécessaire de prendre enfin en compte leur situation spécifique.

M. le Ministre - Cette question va me permettre de mettre les choses au point.

Les professeurs des classes préparatoires des grandes écoles travaillent beaucoup mais ils bénéficient de la meilleure rémunération du corps enseignant, meilleure que celle des recteurs ou des professeurs au Collège de France.

M. François Rochebloine - Ils apprécieront...

M. le Ministre - C'est un fait.

Ils seront payés désormais en heures supplémentaires effectives et non selon le système des heures annuelles. Le taux d'une heure supplémentaire annuelle est de 175 F, celui d'une heure réelle de 201 F. Mais naturellement, ils ne seront pas payés pour les heures qu'ils ne font pas.

J'insiste sur le fait que le système des heures annuelles a représenté pour les enseignants un sacrifice de 130 F par mois, consenti pour créer 40 000 emplois-jeunes. Je suis fier de ce geste de solidarité qu'aucun autre corps de fonctionnaires n'a fait, et qui a été massivement approuvé par les enseignants comme le montre le "flop" de la grève que l'on a tenté d'organiser à ce propos.

Mme Cécile Helle - Il y a un an, nous adoptions le texte sur les emplois-jeunes destiné à aider des jeunes en difficulté, à répondre à des besoins non satisfaits, à soutenir l'initiative locale. Depuis lors, 140 000 emplois ont ainsi été créés.

Très tôt, le ministère de l'éducation nationale s'est mobilisé et 40 000 aides éducateurs ont été recrutés en 1997-1998 afin de renforcer l'encadrement scolaire et d'offrir un avenir professionnel à de jeunes diplômés. Toutefois, l'enseignement supérieur est resté en marge de ce mouvement, en raison de la différence de ses besoins, de son public et de ses contraintes. Il fallait aussi éviter que ces emplois ne se substituent aux multiples petits boulots exercés par les étudiants.

Cette année, 2 400 emplois seront néanmoins créés dans les établissements publics du supérieur et dans les IUFM. Quelles seront leurs fonctions et leurs modalités de recrutement ?

M. le Ministre - C'est surtout pour éviter un conflit avec l'aide aux étudiants que nous n'avons pas placé des emplois jeunes -niveau bac ou bac + 2- dans le supérieur.

Cette année, à la demande des présidents d'universités qui, comme les collectivités locales, prendront en charge 20 % du coût de ces emplois, nous avons décidé d'affecter, à titre expérimental, des non bacheliers à des tâches d'accompagnement.

Par ailleurs, je m'étais engagé à ce que nous réglions en deux ans le problème des 10 000 docteurs sans emploi qualifié, nous y sommes presque parvenus. J'ai décidé, afin de donner une impulsion aux nouvelles technologies de placer certains d'entre eux sur des postes ATER dans les IUFM pour initier les enseignants à ces matières. C'est une situation que je conçois comme transitoire vers des emplois normaux.

De façon plus générale, je me bats pour la pérennisation des emplois-jeunes, car on comprendrait mal aujourd'hui leur disparition. Le turn over de 20 % que l'on constate montre que les jeunes ne cherchent pas à rester quand ils peuvent trouver un emploi stable.

J'espère que la tentative dans l'enseignement supérieur, destinée, je le répète, à aider les jeunes docteurs dont l'avenir me préoccupe beaucoup, sera couronnée de succès, même s'ils n'ont pas vocation à rester sur des postes ATER.

M. Jean-Louis Fousseret - Les 15 et 16 juin derniers, vous avez organisé à Paris deux rencontres en vue d'associer directement les utilisateurs de technologies spatiales à la définition de la politique spatiale civile, dans le cadre du projet Espace et société.

La représentation nationale et les membres du groupe parlementaire d'études sur l'espace ont été attentifs à ces consultations, délibérément axées sur la demande des utilisateurs plutôt que sur l'offre des industriels.

La France dispose d'un potentiel exceptionnel qui doit profiter aux citoyens et à la société. C'est un souci permanent des parlementaires au regard de l'exigence démocratique qui veut que le citoyen soit mieux informé pour mieux comprendre, pour mieux participer.

Depuis un an, le groupe sur l'Espace s'est engagé dans une démarche similaire. Le comité collectivités locales et espace a ainsi pour objectif de renforcer le rôle des collectivités locales dans le développement du secteur spatial. Il s'agit non seulement de faire en sorte que le secteur public soit un meilleur utilisateur de l'offre spatiale et qu'il puisse l'orienter vers des besoins nouveaux, mais aussi d'assurer une meilleure communication vers le grand public par l'intermédiaire des élus.

Je souhaite donc savoir quelles peuvent être les synergies entre ces deux initiatives. Par ailleurs, sera-t-il possible d'associer une représentation parlementaire aux travaux du comité d'orientation qui a été créé ? Enfin, ces rencontres marquent-elles une volonté de renforcer la communication en direction du grand public sur les activités spatiales ?

M. le Ministre - J'entends faire en sorte que les Français se rendent compte que disposer du CNES est un avantage. Pour cela, j'ai pris l'initiative concrète de faire transmettre internet dans les campagnes à haut débit et en numérique, grâce à un satellite. Les essais permettront même à un opérateur français de proposer ces services en Allemagne, en Grande-Bretagne, en Chine et en Inde. Je souhaite un grand nombre de satellite pour couvrir les campagnes, afin que les jeunes Français mesurent leur chance.

Toute initiative visant à populariser l'espace et à montrer la part qu'y prend la France, grâce à l'argent de ses contribuables, aura le soutien du Gouvernement (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Gilbert Meyer - La reprise de la hausse du chômage des jeunes préoccupe les familles et les emplois-jeunes ne suffisent guère à les rassurer. Un dispositif a pourtant fait ses preuves : l'apprentissage. Depuis qu'il a été étendu à l'enseignement supérieur, en 1987, il a progressé de façon spectaculaire -de 35 % entre 1993 et 1996, grâce à de fortes incitations.

A côté des écoles d'ingénieurs et de commerce, près de cinquante universités proposent ainsi des formations de bac + 2 à bac + 5 dont bénéficient près de 10 000 étudiants et de 14 000 élèves en BTS.

L'apprentissage facilite l'insertion professionnelle, il est aussi une réponse possible à ceux qui échouent dans le système traditionnel dont ils risquent de sortir sans diplôme. Son financement est assuré pour l'essentiel par les entreprises et les collectivités locales.

Quelles sont en la matières vos objectifs et vos intentions ? Entendez-vous accroître la participation de l'Etat au développement de ce type de formation ? Votre budget ne semble guère aller dans ce sens...

M. Christian Cabal - Très bien !

M. le Ministre - Sur deux millions d'étudiants, 20 000 environ sont en apprentissage, soit 1 %. C'est donc un dispositif intéressant, utile, mais limité. Ce vers quoi nous voulons aller, dans le cadre de ce budget et, demain, du budget scolaire, c'est un enseignement professionnel en alternance, sous statuts multiples, parmi lesquels le statut de l'apprentissage. Les IUP, certains IUT et BTS s'inscrivent dans cette perspective. Dans cette coopération, l'Etat va naturellement mettre de l'argent, mais les entreprises sont ouvertes à cette démarche.

Permettez-moi d'exprimer mon désaccord quand vous dites que l'alternance permettrait aux élèves en situation d'échec de trouver une voie vers l'emploi. Je ne crois pas que l'enseignement professionnel doive être réservé aux élèves en échec. Mon projet est que les élèves aillent vers l'enseignement professionnel pour des raisons positives, et comprennent que cette voie exige des qualités que n'a pas quelqu'un dont l'esprit est purement abstrait. Mais là où nous sommes d'accord, c'est pour dire qu'il faut aller, dans l'enseignement professionnel et même général, vers plus de professionnalisation et d'alternance.

M. le Président - Nous en avons terminé avec les questions. J'appelle les crédits inscrits à la ligne "Education nationale, enseignement supérieur et recherche" : "Enseignement supérieur".

Les crédits de l'état B, titre III, mis aux voix, sont adoptés.

Les crédits de l'état B, titre IV, et ceux des titres V et VI de l'état C, sont successivement adoptés.

M. le Président - J'appelle maintenant les crédits inscrits à la ligne "Education nationale, recherche et technologie" : "Recherche et technologie".

Les crédits de l'état B, titre III, sont adoptés, ainsi que ceux du titre IV.

Les crédits des titres V et VI de l'état C sont successivement adoptés.

Prochaine séance demain, mercredi 21 octobre, à 9 heures.

La séance est levée à 23 heures 35.

          Le Directeur du service
          des comptes rendus analytiques,

          Jacques BOUFFIER


© Assemblée nationale


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