Accueil > Archives de la XIe législature > Les comptes rendus > Les comptes rendus analytiques (1998-1999)

Assemblée nationale

COMPTE RENDU

ANALYTIQUE OFFICIEL

Session ordinaire de 1998-1999 - 18ème jour de séance, 46ème séance

3ème SÉANCE DU MERCREDI 28 OCTOBRE 1998

PRÉSIDENCE DE M. François d'AUBERT

vice-président

          SOMMAIRE :

LOI DE FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR 1999 (suite) 1

    ART. 2 (suite) 1

    APRÈS L'ART. 2 4

    ART. 3 6

    APRÈS L'ART. 3 7

    ART. 4 11

    APRÈS L'ART. 4 14

    ART. 5 15

La séance est ouverte à vingt et une heures.


Top Of Page

LOI DE FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR 1999 (suite)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 1999.

ART. 2 (suite)

M. Bernard Accoyer - Mon amendement 146 est un amendement de repli après le rejet de mon amendement de suppression de cet article. Il propose d'affecter l'excédent de la C3S et du FSV non pas à cette chimère qu'est le F3R, mais à un objet bien plus juste : le remboursement anticipé de la caisse d'amortissement de la dette sociale.

La C3S est destinée à combler le déficit des caisses d'artisans et de commerçants, qui résulte surtout du développement excessif de la grande distribution. Quant au FSV, il a été créé en 1993 par Edouard Balladur, en même temps qu'était opérée la courageuse réforme des retraites des salariés du privé. Ce sont donc les excédents de ces deux organismes qui sont ici détournés.

Mais les 2 milliards ainsi obtenus semblent dérisoires au regard des besoins de financement de la retraite par répartition, qui seront de plusieurs milliers de milliards à partir de 2005, en raison de l'évolution démographique.

Vous avez l'an dernier allongé de 5 ans la durée de vie de la CADES. Avec mon amendement, elle serait réduite de 4 à 6 semaines.

M. Denis Jacquat, rapporteur de la commission des affaires culturelles pour l'assurance vieillesse - La commission a repoussé cet amendement.

M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat à la santé - La CADES gère les dettes accumulées par les gouvernements précédents. Notre fonds de réserve gérera les excédents qui seront dégagés grâce au redressement des comptes. Nous faisons donc le choix de l'avenir et nous rejetons cet amendement.

M. Bernard Accoyer - Certes les dettes sont liées aux déficits antérieurs, mais sous tous les gouvernements.

Il faut être modeste : sans le retour de la croissance, sans la réforme de 1996, où en serait aujourd'hui notre Sécurité sociale ?

M. Gérard Terrier - Six milliards de croissance...

M. Bernard Accoyer - Pour préserver notre système social, objectif auquel nous souscrivons tous, le Gouvernement a tout intérêt à dégonfler la dette, donc à accepter notre amendement.

L'amendement 146, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Bernard Accoyer - Je retire l'amendement 143.

Quant à mon amendement 145, il vise à remédier à un grave défaut de ce projet, la non-compensation par l'Etat de 17 milliards d'exonération de cotisation sociale. C'est d'autant plus inacceptable que la loi du 25 juillet 1994 dispose que toutes les exonérations doivent être compensées. Il est vrai que vous n'en êtes pas à votre coup d'essai puisque la loi de réduction autoritaire du temps de travail, qui devait permettre de créer tant d'emplois, et créer ainsi un complément de recettes qui sauverait la Sécurité sociale, ne prévoyait déjà qu'une compensation incomplète des exonérations de charges.

Je propose donc que les 2 milliards détournés de la C3S pour créer le F3R soient plutôt destinés à la compensation.

M. Denis Jacquat, rapporteur - La commission a repoussé cet amendement.

M. le Secrétaire d'Etat - Rejet.

L'amendement 145, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Germain Gengenwin - Il nous parait anormal d'organiser un détournement systématique des excédents de la C3S pour alimenter un fonds de réserve bien loin de répondre à l'attente de nos concitoyens et de préparer l'avenir des retraites par répartition. Notre amendement 307 tend donc à supprimer cette disposition.

Obligés de cotiser à la C3S, les chefs d'entreprise savent bien qu'une fois le train sur les rails, il suffira pour l'accélérer d'augmenter petit à petit les cotisations.

M. Denis Jacquat, rapporteur - L'affectation au fonds de réserve de l'excédent de la C3S est très insuffisante pour couvrir les besoins. Mais la supprimer risque d'être perçu comme une condamnation du fait de provisionner un système de répartition, ce qui reste une idée intéressante. La commission a rejeté cet amendement.

M. le Secrétaire d'Etat - Le Gouvernement ne peut accepter cet amendement. C'est un signe, et l'existence de la C3S permet de signifier la pérennité des régimes de retraite sans léser personne ni opérer de prélèvement supplémentaire.

L'amendement 307, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Germain Gengenwin - La cotisation à la C3S est de 0,13 %. Il suffit de l'augmenter pour avoir des recettes supplémentaires.

L'amendement 367, 2ème correction, de M. de Courson garantit au BAPSA un financement pérenne par la C3S puisque de nombreux organismes agricoles la payent, notamment les coopératives.

M. Denis Jacquat, rapporteur - A titre personnel, je trouve l'amendement intéressant. Il serait logique que le régime agricole conserve une part du produit de la C3S équivalente à celle qui provient du monde agricole. Mais la commission a rejeté l'amendement.

M. le Secrétaire d'Etat - Et je suis d'accord avec la commission.

L'amendement 367, 2ème correction, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Denis Jacquat, rapporteur - L'amendement 29 précise que la première section du FSV regroupant les opérations de solidarité de ce fonds bénéficiera d'une fraction de l'excédent de C3S constaté après la première répartition du produit de cette contribution entre les régimes de non-salariés non agricoles, et non d'une fraction de son produit total.

L'amendement 29, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. François Goulard - Si nous proposons par l'amendement 223 de supprimer le IV de l'article, c'est qu'il ne nous paraît pas pertinent d'utiliser le FSV pour constituer ce fonds de réserve, dont les missions sont d'ailleurs mal définies et les recettes non garanties.

M. Denis Jacquat, rapporteur - La commission l'a repoussé.

M. le Secrétaire d'Etat - Rejet.

L'amendement 223, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Maxime Gremetz - L'amendement 424 a pour objet, d'une part, de préciser que la compétence du comité de surveillance s'étend aux nouvelles missions du FSV en matière de gestion du fonds de réserve et, d'autre part, d'élargir la composition de ce comité aux partenaires sociaux.

M. le Secrétaire d'Etat - Favorable. Il est légitime que les partenaires sociaux siègent au conseil de surveillance du fond de solidarité.

M. Denis Jacquat, rapporteur - La commission a adopté cet amendement. Je regrette qu'il ne prévoit pas la présence des retraités, dont les associations souhaitent ardemment être représentées. Je propose donc d'ajouter par sous-amendement après "un plan national," "du représentant des retraités désignés par le Comité national des retraités et personnes âgées" -le CNRPA. D'autre part, après a bis il faut remplacer "troisième" par "deuxième" alinéa.

M. le Secrétaire d'Etat - Il me semble qu'il y a déjà trois membres du CNRPA au conseil de surveillance.

M. Denis Jacquat, rapporteur - Le texte de cet amendement ne les mentionne pas.

M. Pascal Terrasse - Soyons prudents. Beaucoup d'associations de retraités veulent siéger dans des structures, comme la CNAV. Pourquoi mentionner la CRNPA ? Ne vaut-il pas mieux parler plus généralement d'associations représentatives ?

M. Maxime Gremetz - Des membres du CNRPA participent-ils effectivement au conseil de surveillance ?

M. le Secrétaire d'Etat - Le texte indique que le comité est composé "notamment" des représentants mentionnés. Et il y en a déjà beaucoup. Sur le sous-amendement, sagesse.

M. Bernard Accoyer - J'apprécie que le conseil de surveillance soit ouvert aux représentants socio-professionnels. Mais le monde agricole n'est pas représenté. La fragilité et le niveau des retraites des agriculteurs justifient qu'on ne les exclue pas du conseil de surveillance. On devrait aussi penser à renforcer la représentation de l'ORGANIC et de la CANCAVA, caisses pour lesquelles la C3S a été créée.

M. le Président - Vous ne pouvez pas sous-amender un sous-amendement.

M. Denis Jacquat, rapporteur - "Familles rurales de France" est représentée dans le CNRPA.

M. Bernard Accoyer - Nous voulons la FNSEA et le CNJA.

Le sous-amendement, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'amendement 424, mis aux voix, est adopté.

M. Denis Jacquat, rapporteur - S'agissant de l'équilibre des recettes et des dépenses de la première section, l'amendement 30 tend à remplacer une formulation qui est assimilable soit à une incantation, soit à une injonction inconstitutionnelle, par une rédaction plus adaptée qui tient compte de l'existence des lois de financement.

M. le Secrétaire d'Etat - Favorable.

L'amendement 30, mis aux voix, est adopté.

M. Germain Gengenwin - L'amendement 308 tend à supprimer les alinéas relatifs au fonds de réserve. En effet, la création de celui-ci ne dispensera pas notre pays de prendre des mesures drastiques pour sauver de la faillite les régimes de base ; de plus, il est regrettable que nous n'en sachions pas davantage sur les ressources qui pourraient lui être affectées. Nous ne saurions admettre que les salariés soient à nouveau mis à contribution par une surcotisation.

L'amendement 308, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Bernard Accoyer - La loi du 25 juillet 1994 impose la compensation intégrale par l'Etat des exonérations de cotisations sociales. Or 17 milliards d'exonérations ne sont pas compensés ; s'agissant des exonérations liées au passage aux 35 heures, une compensation partielle est prévue.

Les 17 milliards non compensés correspondent exactement à l'augmentation de l'ONDAM en 1999. Ils représentent plus de 1 % des recettes de la Sécurité sociale et huit fois et demie les 2 milliards qu'on a décidé d'affecter au fonds de réserve.

Dans ces conditions, mon amendement 144 tend à supprimer le quinzième alinéa (1o) du IV.

M. Denis Jacquat, rapporteur - Rejet.

M. le Secrétaire d'Etat - Rejet. Cet amendement n'est pas très différent dans son esprit de l'amendement 143.

M. Jean-Luc Préel - Cet amendement me paraît essentiel : l'Etat doit 17 milliards et quand on cherche à équilibrer les comptes, vous refusez que, tout simplement, il paie son dû... En ce qui concerne les exonérations liées aux 35 heures, nous souhaiterons savoir quelle part en sera compensée. L'Etat est un mauvais payeur : il paie pour le RMI avec retard, il paie pour l'ARS avec retard, l'ACOSS est obligée d'emprunter... Il est indispensable que l'Etat paie ce qu'il doit.

M. Alfred Recours, rapporteur de la commission des affaires culturelles pour les recettes et l'équilibre général - Une partie de ce qui a été dit n'est pas inexact ; je l'avais moi-même relevé dans mon rapport. Mais il se trouve que l'amendement ne porte que sur le cas particulier des 35 heures. Or M. Accoyer et d'autres nous ont dit que c'était un échec ; dans ce cas, il n'y a rien à compenser ! Et si, comme nous le croyons, ce n'est pas un échec, la dynamique de la croissance permettra de financer les exonérations.

L'amendement 144, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Denis Jacquat, rapporteur - L'amendement 31 est de conséquence. Il vise à préciser que le fonds de réserve bénéficiera d'une fraction de l'excédent de C3S constaté après la première répartition entre les régimes de non-salariés non agricoles, et non d'une fraction du produit total de cette contribution.

L'amendement 31, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Denis Jacquat, rapporteur - L'affectation de ressources supplémentaires au fonds de réserve ne peut résulter que de dispositions législatives ; l'amendement 32 tend donc à supprimer les mots "ou réglementaires".

M. le Secrétaire d'Etat - Favorable.

M. François Goulard - Je me plais à souligner que j'étais intervenu dans ce sens.

L'amendement 32, mis aux voix, est adopté.

L'article 2 modifié, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 2

M. Alfred Recours, rapporteur - Les agents d'organismes internationaux qui ne paient pas la CSG n'ont pas à bénéficier de la baisse des taux de cotisations d'assurance maladie qui a été, l'an dernier, corrélative à l'augmentation de la CSG. L'amendement 394 tend donc à leur appliquer, comme aux travailleurs frontaliers, l'ancien taux de cotisation.

Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité - Favorable.

L'amendement 394, mis aux voix, est adopté.

M. François Goulard - Je ne doute pas que mon amendement 229 va être adopté, après le vote qui est intervenu tout à l'heure... Il tend à instaurer un système du fonds de pension, simple, incitatif, égalitaire, faisant jouer le paritarisme, donnant des garanties à travers des mesures prudentielles. Bref, il s'agit de faire ce que nous appelons de nos voeux, c'est-à-dire de donner à tous les Français la possibilité de prévoir leur avenir par l'épargne, en permettant à leurs employeurs d'abonder largement cette épargne. Des systèmes voisins existent dans la plupart des pays comparables. C'est une sorte d'obstination qui empêche -pour l'instant !- le Gouvernement d'y être favorable.

M. Alfred Recours, rapporteur - La commission a rejeté cet amendement. Il nous ramène au débat de tout à l'heure sur la loi Thomas. Lisons l'amendement : "Les employeurs peuvent abonder les plans d'épargne de leurs salariés dans la limite de 30 % du plafond annuel de la Sécurité sociale. L'abondement est déductible du bénéfice imposable et est exonéré à hauteur de 50 % de cotisations sociales". Vous ne pouvez pas demander à la majorité de créer des exonérations supplémentaires, dont je note au passage qu'elles ne sont pas financées. Il s'agit d'une construction purement idéologique et politicienne. Des fonds de pension pourraient être construits sur de tout autres bases que celles de cet amendement.

Mme la Ministre - Même avis. J'observe que, par cet amendement, M. Goulard nous donne raison sur le caractère inefficace et inutile de la loi Thomas, puisqu'il propose un autre système.

M. Bernard Accoyer - Notre rapporteur, dont le langage est habituellement pondéré et même souvent juste, a eu des mots excessifs : "idéologique", "politicienne"...

En réalité, avant les fonds de pension -dont nous devrons, sur tous les bancs, accepter un jour le principe-, il existe, depuis trente et un ans, une solution intermédiaire : ce sont les fonds de retraite complémentaire par capitalisation qui bénéficient aujourd'hui aux agents des collectivités publiques. Vous qualifiez de "cavalier" l'introduction dans le projet de loi de financement d'une mesure étendant l'accès à ces fonds. Je ne vois pas pourquoi il s'agirait d'un cavalier, alors qu'un article de ce projet modifie le code des assurances, cependant qu'un amendement du Gouvernement propose de modifier le code des impôts à propos des prélèvements sur le tabac. Et comme par hasard, vous refusez cette proposition pourtant consensuelle, puisqu'elle ne propose pas les fonds de pension -pour lesquels nous admettons que vous n'êtes pas encore mûrs.

M. François Goulard - Je ne comprends pas, Madame la ministre, qu'une personnalité de votre niveau utilise des arguments purement polémiques. Je conçois que vous soyez en désaccord avec notre amendement. Mais ne dites pas que mon amendement prouve mon désaccord avec la loi Thomas ! Il prend simplement acte du fait que le Gouvernement n'a pas pris les décrets d'application de cette loi.

Je trouve plus recevable l'argument du rapporteur qui reproche aux exonérations que je prévois de provoquer une perte de recettes pour le régime existant. Mais cette perte serait minime. Et au total ce sont des sommes bien supérieures qui seront consacrées à préparer l'avenir des retraites. Je veux bien qu'un sous-amendement précise qu'une partie de ces sommes abonderont le fonds de réserve. Sur ce sujet, l'imagination peut s'exercer ; mais, de grâce, échangeons des arguments sérieux.

L'amendement 229, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean-Luc Préel - De nombreux rapports permettent déjà de prévoir les difficultés financières que rencontrera le système de retraites, notamment à partir de 2005. Parmi ces difficultés figureront celles des régimes spéciaux. Mon amendement 309 concerne les fonctionnaires. Ceux-ci n'ont pas de caisse de retraite : il faut en créer une, gérée paritairement par l'Etat et les syndicats. C'est une condition de transparence. Il ne s'agit de montrer du doigt les fonctionnaires, mais de les aider à se responsabiliser. Je propose donc qu'avant le 1er juin 1999, le Gouvernement informe le Parlement des modalités de mise en place d'une caisse de retraite des fonctionnaires.

M. Alfred Recours, rapporteur - Décidément les fonctionnaires font l'objet de toutes les attentions de M. Préel et de quelques-uns de ses collègues, puisqu'on revient toujours sur la PREFON. Notez que pour celle-ci il n'y a pas d'abondement par l'employeur, et c'est pour cela qu'il y a défiscalisation, puisque l'employeur est celui qui décide des impôts. On peut aussi rappeler que la loi Madelin a étendu aux professions libérales certaines possibilités existantes ; dans ce cas il n'y a pas d'employeur -à moins de considérer que celui de certaines professions libérales est la Sécurité sociale... Il existe encore d'autres formes de retraite par capitalisation, comme les plans d'épargne en action. Et les stock options ne sont-ils pas pour quelques-uns le moyen de se préparer une retraite royale ? Mais nous ne pouvons traiter aujourd'hui l'ensemble de ces formes de capitalisation. Dans l'immédiat, je souhaite qu'on n'enfonce pas un clou anti-fonctionnaires à l'occasion de ce débat. La remise à plat de tous ces dispositifs n'ayant pas eu lieu, l'amendement 309 apparaît hors de propos, et a été rejeté comme tel par la commission.

Mme la Ministre - Même avis.

M. François Goulard - Je note que notre rapporteur ne rejette pas catégoriquement l'amendement de M. Préel, et qu'il dit des choses qui méritent réflexion, notamment sur la PREFON. Que ce soit clair : personne ici ne souhaite aller contre l'intérêt des fonctionnaires, surtout pas l'ancien fonctionnaire que je suis. Quant à la PREFON, M. Recours indique qu'il n'y a pas d'abondement de l'employeur, mais que l'avantage fiscal en tient lieu. Il est vrai que le payeur est le même. Mais c'est une drôle de méthode, sur le plan social, que d'avoir un abondement qui croît fortement avec le revenu de l'intéressé.

Quant à l'idée de construire une caisse de retraite des fonctionnaires, elle est si naturelle qu'en commission un collègue de la majorité croyait en toute bonne foi qu'elle existait déjà. C'est que c'est la logique même de vouloir que les retraites des fonctionnaires soient comptabilisées, et qu'il y ait une contrepartie de cotisations versées par l'Etat. On a vu lors de privatisations comme celle de France Télécom la difficulté de traiter la question des retraites. Créer une caisse des fonctionnaires relèverait d'une bonne gestion des comptes publics, et cet amendement mérite de la part de l'Assemblée, de la commission, mais aussi du Gouvernement une réflexion sérieuse dans les mois ou les années à venir.

M. Bernard Accoyer - Je veux rassurer M. Recours : nous ne voulons pas prendre à Pierre pour donner à Paul. Nous n'avons nullement l'intention de toucher aux régimes de retraite par répartition, non plus qu'aux systèmes de retraite complémentaire qui existent pour telle ou telle catégorie, en particulier pour les fonctionnaires.

Néanmoins, la capitalisation au titre de ces régimes complémentaires atteint presque 50 milliards pour 400 000 cotisants.

L'amendement 309 tend à préserver l'avenir de ces retraites. Voyez ce qui s'est passé avec la privatisation de France Télécom, qui avait provisionné quelque 37 milliards pour les retraites de ses agents : l'Etat a "phagocyté" cette somme dans son budget. Qu'est-ce qui garantit que ces fonds seront bien restitués à ceux qui les avaient placés dans une sorte de fonds de réserve ? La comptabilité patrimoniale est en passe de s'installer dans les collectivités territoriales et il serait normal qu'il en soit de même au niveau de l'Etat.

J'en appelle à votre responsabilité pour le paiement des retraites des fonctionnaires.

C'est ainsi qu'il faut entendre cet amendement que nous voterons.

M. Charles de Courson - Cet amendement est très important car, depuis quinze ans, l'évolution du mode de financement des retraites des fonctionnaires de l'Etat a été l'inverse de celle du régime général : les taux de retenue pour les pensions n'ont pas augmenté alors que la cotisation patronale fictive a progressé de plus d'un point par an. Cela signifie que ce sont les impôts des Français qui financent de plus en plus les régimes de fonctionnaires.

L'amendement 309 tend à vous faire prendre conscience de ce problème.

M. Serge Janquin - C'est ainsi que vous défendez les fonctionnaires !

M. Charles de Courson - Je ne défends aucune catégorie particulière : je défends l'équité sociale. Si on veut faire mûrir les esprits, il faut créer cette caisse avec un conseil d'administration paritaire.

L'amendement 309, mis aux voix, n'est pas adopté.

ART. 3

M. François Goulard - Mon intervention n'a strictement rien de politicien. Je ne mets en cause aucun gouvernement.

Cet article tend à corriger une aberration statistique qui voulait que, dans la mesure où les chiffres des DOM n'étaient pas intégrés dans les données nationales, le FSV ne remboursait pas à l'UNEDIC les sommes qu'il aurait dû verser au titre des cotisations gratuites pour les chômeurs résidant dans les DOM. Curieuse méthode de gestion que celle qui permet de telles approximations ! Aucune entreprise ne résisterait à de telles carences.

Cela dit, comment avez-vous calculé le montant de 2,9 milliards que vous inscrivez dans la loi ? Nous-mêmes -ni sans doute personne d'autre- n'avons aucun moyen de vérifier ce chiffre.

Je répète que ces observations ne visent pas ce gouvernement en particulier.

M. Pascal Terrasse - On compte 2,3 millions de personnes de plus de 80 ans, dont 1,2 million dépendantes, qui n'ont souvent d'autres recours que de s'adresser à des associations disposant d'un encadrement adapté pour satisfaire la demande sociale de ces personnes.

Mais ces associations sont soumises à des taux de cotisations différents de ceux applicables aux contrats passés de gré à gré. Nous avons déposé des amendements après l'article 3 pour mettre un terme à cette différence de traitement.

Mme Hélène Mignon - Plusieurs de mes collègues dont Mme Guinchard-Kunstler, Madame la ministre, veulent vous faire part de leurs préoccupations relatives aux associations d'aide à domicile.

Celles-ci souffrent de la manière dont les conseils généraux ont mis en place la PSD, de la stagnation des tarifs des heures de ménage et du poids des charges sociales qu'elles acquittent puisqu'elles ne bénéficient que d'une exonération de 30 % contre 100 % pour les contrats de gré à gré.

Mme Guinchard-Kunstler et M. Terrasse ont donc déposé des amendements tendant à faire bénéficier les associations d'aide à domicile d'une exonération de 100 %. En adoptant cet amendement, nous soutiendrons un secteur qui permet aux personnes âgées d'être aidées par de vrais professionnels.

M. François Goulard - Ce débat devient surréaliste puisque nous venons d'entendre deux interventions qui n'avaient rien à avoir avec l'article 3 !

J'en viens à mon amendement 224 dont l'exposé sommaire est un peu sévère, mais qui tend seulement à préciser que la prise en charge des sommes dont je viens de parler à propos des chômeurs résidant dans les DOM incombe bien au FSV en application du premier alinéa.

M. Jean Le Garrec, président de la commission des affaires culturelles - En effet, l'exposé sommaire de l'amendement est un peu provocateur. Je cite : "Cet amendement montre l'incohérence du dispositif du fonds de réserve". Cela dit, la précision semble utile et nous sommes favorables à l'amendement.

Mme la Ministre - Je remercie M. Goulard d'avoir reconnu que le gouvernement actuel n'était pour rien dans le problème posé, puisque c'est pendant les années 1994, 1995 et 1996 que les cotisations de retraite des chômeurs des DOM n'ont pas été versées.

M. François Goulard - Mais les indemnités l'étaient.

Mme la Ministre - Il s'agit, en l'occurrence, des points de retraite.

Pour ce qui est du mode de calcul de la somme inscrite dans la loi, l'UNEDIC est maintenant en mesure de calculer très précisément les indemnités des chômeurs, et les cotisations à verser. Pour valider rétroactivement les points de retraite correspondants, il faut inscrire cette somme dans la loi.

Cela dit, le Gouvernement est favorable à l'amendement 224.

L'amendement 224, mis aux voix, est adopté.

L'article 3 ainsi amendé, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 3

M. Charles de Courson - L'amendement du Gouvernement est une loi dans la loi !

Mme la Ministre - C'est justement du bon travail ! Vous n'avez cessé de poser le problème des associations d'aide à domicile, alors que nous avons essayé, en nous fondant sur le rapport Hespel-Thierry, de travailler à une solution avec ces associations et avec les représentants de personnes âgées. Beaucoup de personnes âgées et handicapées souhaitent, malgré leurs difficultés, vivre à leur domicile. En France, plus que dans d'autres pays, on a tendance à les placer en établissement ; pourtant les gérontologues nous répètent que ce départ est source d'inquiétude et souvent de détérioration rapide de leur état. Il faut donc faciliter autant que possible le maintien à domicile dans de bonnes conditions de sécurité.

Mais les aides à domicile ont donné lieu à une multitude de textes qui rendent le système peu cohérent et parfois injuste. Aussi ai-je souhaité, et c'était la mission confiée à Mme Hespel et à M. Thierry, le revoir en fonction de deux critères : le niveau de dépendance de la personne âgée, déterminé d'après la grille AGIR de la loi sur la PSD, et ses capacités financières. Il faut aider les personnes qui en ont le plus besoin, l'âge seul ne justifie pas une prise en charge totale par l'Etat.

Notre second souci, qui rejoint une préoccupation souvent exprimée notamment par Mme Génisson, Mme Guinchard-Kunstler et M. Terrasse, est de professionnaliser les services aux personnes âgées. Les niveaux de qualification requis sont évidemment différents selon qu'il s'agit de faire le ménage et les courses ou de traiter la dépendance proprement dite, et il faut en tenir compte. Développer la professionnalisation apporte une sécurité à la personne âgée, mais aussi aux employées qui ont ainsi un intermédiaire en cas de conflit.

S'y ajoute le fait que certaines associations ont éprouvé des difficultés financières pour diverses raisons, dont le rééquilibrage des aides effectué l'année dernière -je rappelle que 30 millions de francs ont été inscrits cette année pour des soutiens d'urgence.

Compte tenu de ces éléments, j'ai examiné avec un intérêt tout particulier l'amendement présenté par la commission des affaires sociales et le rapporteur de la commission des finances en vue de porter à 100 % l'exonération des charges patronales des associations prestataires. Mais cette disposition coûte 670 millions de francs, et il fallait en tenir compte.

Par cet amendement complémentaire, tardif certes, mais qui a donné lieu à une consultation avec les milieux concernés, le Gouvernement propose de porter l'exonération de 30 à 100 % et parallèlement de plafonner à 15 heures par semaine et par foyer l'exonération accordée aux particuliers de plus de 70 ans, dès lors que celle-ci est fondée seulement sur l'âge. Bien entendu, les personnes invalides, dépendantes ou handicapées bénéficient d'une exonération à 100 %.

En pratique, 90 % des employeurs se situent en dessous de ce seuil de 15 heures, mais les 10 % restants totalisent 50 % des heures à domicile, ce qui prouve qu'elles ont des ressources. Cette disposition a recueilli un large assentiment de la part des associations d'aide à domicile et des représentants des personnes âgées.

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis - Les explications de Mme la ministre nous paraissent pleinement satisfaisantes. L'amendement opère un rééquilibrage entre les aides de gré à gré et les prestations passant par les associations, au profit de ces dernières : cela nous paraît une bonne chose, car ces associations assurent une médiation, garantissant une certaine qualité de prestation et procurent de véritables emplois. L'amendement 13 de la commission des finances serait ainsi satisfait.

M. Alfred Recours, rapporteur - L'amendement du Gouvernement ferait également tomber les amendements 34, 192 corrigé, 225 et 313 corrigé adoptés par la commission des affaires sociales. Considérer que l'âge n'est pas à lui seul un critère d'exonération suffisant nous paraît légitime. En revanche, il est juste d'exonérer totalement les personnes dépendantes.

Le fait d'accorder également une exonération totale de cotisations patronales aux associations d'aide à domicile pour les services aux personnes handicapées ou dépendantes permet à ces dernières un véritable choix entre l'emploi direct et le recours à des organismes prestataires.

Une question toutefois, Madame la ministre : vous avez parlé d'un plafond de 15 heures, alors que dans l'exposé des motifs de l'amendement figure un seuil de 14 heures.

Autre question, dans un certain nombre de communes, les CCAS proposent des services de même type. Seront-ils également exonérés ?

Sous réserve de ces précisions, j'appelle à voter l'amendement proposé par le Gouvernement.

M. le Président - Madame la ministre, vous confirmez que le plafond d'exonération est bien de 15 heures ?

Mme la Ministre - Oui.

M. le Président - Il serait préférable que l'exposé des motifs corresponde au texte...

M. François Goulard - Ce sujet retient toute notre attention, mais il est un peu dommage qu'une réforme qui n'est pas négligeable intervienne sous la forme d'un amendement présenté en séance ! Je souscris à la plupart des propos de Mme la ministre, mais je redoute cependant que la référence à la grille AGIR introduise une certaine rigidité. Toutes les catégories de cette grille bénéficieront-elles de l'exonération ? L'application des règles administratives ne risque-t-elle pas d'aboutir à des écarts importants dans la prise en charge ?

En outre, le texte vise uniquement les associations employeurs, non les associations intermédiaires. Il y a de multiples formes d'intervention dans un tel domaine. Toutes sont-elles visées ?

Je vous rejoins, Madame la ministre, sur la nécessité de la professionnalisation.

Il y a, enfin, un problème de convention collective, de nombreuses associations ayant recours à celle des employés de maison alors que le travail est plus proche de celui des aides-soignantes.

M. Pascal Terrasse - J'avais déposé en commission un amendement visant à une exonération de 100 % des charges patronales pour les associations intervenant à domicile. La réponse qu'apporte l'amendement du Gouvernement me satisfait pleinement.

On le voit, la grille nationale d'évaluation de la dépendance instituée par la loi sur la prestation dépendance a du bon. Enfin, la formation des personnels gagnerait à la généralisation du CAFAD.

M. Patrick Delnatte - Lorsque j'avais souligné l'an dernier le fait que les emplois directs et les emplois de prestataires ne présentaient pas les mêmes qualités de professionnalisation et de service, vous m'aviez répondu, Madame la ministre, que cela n'avait pas sa place dans la loi de financement.

Et pendant un an, rien. Et voici que, dans la précipitation, pour répondre à la demande émanant de tous les groupes, nous arrive un texte qui bouleverse complètement le système des aides à domicile.

Vous faites état d'une concertation, mais la question de M. Recours montre que le CCAS n'a pas été consulté.

En outre, il y a déjà une exonération de 30 % pour les auxiliaires, comment la concilier avec le statut de la fonction publique ? Le problème retombe sur les titulaires.

Enfin, en plus de l'aide à domicile, les personnes âgées ont beaucoup besoin, surtout en ville, d'un accompagnement social. Je suggère donc que nous retenions la proposition qui est celle de la commission et des groupes, ce qui permettrait au Gouvernement, d'ici la deuxième lecture, de mener une concertation approfondie et de donner à l'Assemblée les informations dont elle a besoin pour se prononcer (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL).

M. Yves Bur - Nous n'avons pas pu étudier à fond cet amendement, qui nous a été transmis tardivement. Nous ne pouvons en mesurer ni la portée, ni les effets.

Nous souhaitons tous une égalité de traitement entre emplois directs et associations d'aide à domicile, mais des éclaircissements sont nécessaires.

Un plafond de rémunération est-il envisagé ? Quelles seront les personnes dépendantes concernées : GIR 1, 2, 3 ou GIR 4, voire 5, bénéficiaires de la PSD ?

Par ailleurs, les caisses de sécurité sociale devront contrôler l'exécution et la qualité de la prestation. Quelle lourdeur ! Mais nos équipes médico-sociales ne se contentent pas de poser un diagnostic, elles contrôlent l'exécution.

Enfin, une embauche pour une durée indéterminée dérangera bien des familles.

M. Bernard Accoyer - Cet amendement dense et complexe peut avoir de lourdes conséquences.

Si un consensus se dégage en faveur d'une exonération de charges pour les associations prestataires, bien des questions se posent. Les associations intermédiaires seront-elles concernées ?

Moins de la moitié des heures à domicile relèvent des avantages fiscaux. Le dispositif proposé aura donc des conséquences sur l'emploi et sur le travail clandestin.

Surtout, on le sait, la dépendance est d'abord un phénomène psychique. Prenez donc garde à ne pas semer le trouble chez les personnes âgées en modifiant un dispositif fiscal dont elles bénéficient.

Je souhaite donc, comme M. Delnatte, que l'on renvoie ce débat à la deuxième lecture.

M. Denis Jacquat, rapporteur - Les associations prestataires employant des aides à domicile voudraient bénéficier de l'exonération dont bénéficient déjà les mandataires.

Cet amendement remplace les mots "associations agréées", ce qui suppose le dépôt d'un dossier en préfecture, par les mots "associations admises". Que faudra-t-il faire pour être admis ?

Mme la Ministre - Vous ne pouvez rappeler, Monsieur Delnatte, que vous aviez déposé un amendement il y a un an et que vous étiez alors en avance, et trouver que le nôtre vient trop tôt... Pendant ce temps, nous avons travaillé et les inspections des finances et des affaires sociales ont remis un rapport. Vous ne pouvez dire que rien n'a été fait. Je tiens les tableaux à votre disposition. Ils permettent notamment de savoir quel type d'associations seront concernées.

Nous avons consulté les associations intéressées.

M. Patrick Delnatte - Et le CCAS ?

Mme la Ministre - Ce travail arrive certes tardivement. Mais ou l'on repousse cet amendement, et le suivant qui lui est lié, ou l'on traite le problème globalement en tenant compte de tous les éléments de la dépendance, financiers, physiques et psychologiques.

J'en viens aux questions que vous avez posées. D'abord, il s'agit de 15 heures et non de 14 heures par semaine. Ensuite, les organismes concernés par l'exonération à 100 % sont visés à l'article L. 241-10 du code, ils comprennent les CCAS, les associations d'aide ménagère, celles gérées par les départements et les associations intermédiaires si elles demandent l'agrément.

Pour qui souhaitons-nous limiter à 15 heures la base d'exonération à 100 % ? Il ne s'agit pas des personnes visées au b) et au c) de l'article L. 241-10, c'est-à-dire par exemple celles qui ont un enfant handicapé, qui recourent à une tierce personne, ou bénéficient de la PSD.

Pour résumer, toutes les personnes qui ont droit au classement 1, 2 ou 3 de la grille GIR ont droit aux 100 % d'exonération.

M. Jacques Barrot - Même si elles n'ont pas la PSD ?

Mme la Ministre - Oui, si elles sont en état de dépendance.

M. Bernard Accoyer - Et ceux qui ne sont pas encore considérés comme dépendants ?

Mme la Ministre - Dans ces cas-là, on peut revoir le niveau de grille AGIR. Aujourd'hui certaines personnes âgées sont poussées à utiliser le gré à gré, car elles ont l'exonération alors que les associations ne l'ont pas. Nous souhaitons que -si elles le veulent- de plus en plus d'entre elles passent par des associations. Car les associations offrent une garantie de professionnalisme et offrent aussi un statut à l'employé à domicile : celui-ci bénéficie alors de la convention collective des aides ménagères, plus intéressante que celle des employés de maison en ce qui concerne la formation, la qualification et la rémunération.

Ce que nous vous proposons résulte d'un travail sur la base du rapport Hespel-Thierry, mené avec les associations. Il y a une cohérence entre cet amendement et ceux que vous proposez qui portent de 30 % à 100 % l'exonération pour l'aide à domicile. Je regrette qu'ils n'aient été examinés que par la commission des finances et non par celle des affaires sociales. Je suis prête à ce qu'en deuxième lecture nous introduisions telle ou telle précision et je tiens à votre disposition l'ensemble des notes techniques. Je viens de voir que l'UNASAD approuve l'ensemble de nos propositions.

M. Charles de Courson - Le deuxième volet de l'amendement porte de 30 % à 100 % l'exonération pour les associations. Mais on ne se rend pas compte qu'à vouloir systématiser le CDI on va contre l'emploi. Ainsi, au décès de la personne dépendante il est arrivé que les héritiers aient à payer une indemnité de licenciement à l'employé d'une association. D'autre part, les petites associations, en milieu rural, ne peuvent assurer un CDI alors que la demande est fluctuante. Le CDI est adapté aux grandes associations. Il faudrait donc être plus souple sur le CDI. Sinon, le deuxième volet représente une amélioration.

En revanche, le premier volet pose problème. Pour certaines catégories, on plafonne l'exonération à 15 heures au SMIC -donc à 10 heures environ si l'on paye plus que le SMIC. Si l'on cherche à développer l'emploi, il ne faut pas plafonner et essayer de gager les 650 millions que coûtera le volet II par 420 millions d'économies par ce plafonnement. On risque d'obliger certaines personnes âgées à diminuer le nombre d'heures qu'elles utilisent. Or 50 % des heures employées le sont par 20 % de gens qui utilisent plus que 14 ou 15 heures. Ne plafonnez pas, quitte à être moins généreux pour l'exonération. On évitera ainsi de revenir au travail au noir. Mon sous-amendement 429 supprime donc le plafonnement.

M. Alfred Recours, rapporteur - Il est difficile d'accepter la suppression du gage. Avis négatif.

Mme la Ministre - Si l'on souhaite plus de professionnalisation, cela passe par les associations. Le contrat à durée indéterminée ne s'applique pas au gré à gré, mais seulement aux associations, comme c'est déjà le cas pour la ristourne dégressive. Les associations rurales peuvent très bien embaucher quelqu'un à durée indéterminée mais à temps partiel.

Par ailleurs, je considère que l'Etat ne doit pas financer l'ensemble des aides à domicile. La vieillesse n'est pas un signe, mais un état ; seuls doivent être aidés ceux qui en ont besoin.

Les chiffres sont éloquents : 10 % des personnes qui sont au-dessus de quinze heures par semaine ont 50 % des heures ; ce sont les personnes qui peuvent payer. Elles continueront à bénéficier des dispositions relatives aux emplois familiaux.

Ce système permet de financer en partie la mesure à 675 millions ; le solde sera apporté par la mesure relative aux collaborateurs occasionnels que je propose dans l'amendement 408 après l'article 11. Avec ce dispositif, nous allons dans le sens de ce qu'attendent les associations d'aide à domicile et les associations représentatives des personnes âgées.

L'amendement du Gouvernement complète les amendements qui vont suivre, sur lesquels, donc, je pourrais donner un avis favorable.

M. Serge Janquin - Je donne acte au Gouvernement de la qualité du dialogue qui a eu lieu avec le milieu associatif. J'avais le souci que soit réaffirmée l'importance, à côté des associations, du service public local : vous m'avez rassuré, Madame la ministre.

M. Patrick Delnatte - Personnellement, je ne suis pas tout à fait rassuré. En effet, actuellement, les auxiliaires employés par les CCAS bénéficient des 30 % ; mais ils souhaitent, bien sûr, être titularisés. Les titulaires bénéficieront-ils des exonérations ?

Le sous-amendement 429, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Alfred Recours, rapporteur - Je ne demande pas de suspension de séance, puisque les amendements adoptés par la commission des finances et par la commission des affaires sociales restent valides.

Mme la Ministre - L'ensemble des salariés sont concernés par l'exonération à 100 %, comme ils l'étaient par l'exonération à 30 %, que la convention soit passée avec un organisme de sécurité sociale de droit privé ou de droit public.

M. François Goulard - L'exonération à 30 % s'appliquait-elle aux fonctionnaires ?

Mme la Ministre - Je vérifierai une dernière fois et je vous apporterai les textes.

L'amendement 425 rectifié, mis aux voix, est adopté.

M. Alfred Recours, rapporteur - L'amendement 34 vise à accorder aux associations prestataires employant des aides à domicile l'exonération totale des cotisations patronales dont les associations mandataires et les particuliers employeurs bénéficient déjà.

Je demande au Gouvernement de lever le gage.

M. Patrick Delnatte - Mon amendement 192 corrigé est identique au précédent.

M. François Goulard - Mon amendement 225, 2ème correction, aussi ; il est défendu.

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis - Je vous prie, mes chers collègues de m'excuser : j'avais cru que l'amendement du Gouvernement ferait tomber notre amendement 13 corrigé. Ma méprise s'explique par l'exposé des motifs de l'amendement gouvernemental.

M. Germain Gengenwin - Mon amendement 313 corrigé a le même objet. Le Gouvernement avait pris des engagements, lors du DDOEF 1998, à l'égard des associations d'aide à domicile, confrontées à des difficultés financières. Nous souhaitons donc qu'une parité d'aide soit assurée entre les emplois directs d'aide à domicile et les prestations de service.

Mme la Ministre - Le Gouvernement est favorable à ces amendements et lève le gage. Nous avons eu le tort de ne pas modifier l'exposé des motifs que nous avions préparé pour un sous-amendement. C'est ce qui explique le malentendu.

Je préfère qu'on parle d'"exonération à 100 %" plutôt que d'"exonération totale".

Les amendements 34, 192 corrigé et 225, 2o corrigé, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

Les amendements 13 corrigé et 313 corrigé mis aux voix, sont adoptés.

ART. 4

M. Jean-Luc Préel - Votre majorité critiquait autrefois les exonérations de charges patronales considérées comme des "cadeaux" aux patrons. Il s'agissait en réalité de réduire le coût du travail pour favoriser l'emploi. Vous en avez découvert progressivement les mérites et y êtes aujourd'hui convertis. L'exonération pour l'embauche du premier salarié a permis de créer 70 000 emplois par an depuis dix ans. Cette mesure a en outre créé des emplois stables, et apparaît plus intéressante que les emplois-jeunes ou les 35 heures, riches d'effets pervers. Au lieu de le reconduire, vous proposez un plafonnement à hauteur du SMIC qui me paraît dangereusement mesquin. Cela ne peut que tirer les salaires vers le bas, pour une économie limitée. En outre, l'Etat entend-il s'engager à compenser totalement les exonérations qu'il décide ? Les exonérations non compensées représentent aujourd'hui 17 milliards. Dans la loi sur les 35 heures, vous avez retenu le principe d'une compensation partielle des exonérations. La loi de financement doit être pour le Gouvernement l'occasion de clarifier sa position. Qu'en est-il des bruits selon lesquels la compensation serait limitée à 60 % ? Pour lever les incertitudes, dites-nous que l'Etat ne se dérobera pas à son devoir de compensation intégrale.

M. Bernard Accoyer - Chacun reconnaît que l'exonération pour première embauche est efficace : 70 000 emplois par an, ce n'est pas rien. D'autant que la plupart de ces salariés restent dans l'entreprise, et le plus souvent sur CDI. Le plafonnement de cette exonération aura plusieurs inconvénients. Tout d'abord, il donnera un signal vers la baisse des salaires. On n'en a vraiment pas besoin aujourd'hui, alors que déjà la loi sur les 35 heures a ralenti l'augmentation de la masse salariale. Mais surtout ce dispositif s'appliquait à des salariés de plus en plus qualifiés : le plafonnement ralentira leur embauche, aggravant le chômage des jeunes qualifiés. Le bénéfice attendu n'est que de quelques centaines de millions.

Enfin, l'Etat s'éloigne de plus en plus de la règle pourtant fixée par le Parlement d'une compensation intégrale des exonérations de charges. Cela ne peut que creuser le déficit des comptes sociaux, déjà assez pénalisés par les 17 milliards d'exonérations non compensées cette année. Il ne faut pas que cette tendance s'aggrave.

M. Yves Bur - L'exonération pour première embauche date de 1989. Il est bon que vous la prolongiez jusqu'au 1er janvier 2001. Mais vous la limitez à hauteur du SMIC, pour économiser 130 millions : cela en vaut-il la peine ? Cette mesure a permis de créer 70 000 emplois par an. En 1997, elle n'a coûté que 2,7 milliards pour 77 000 embauches. Celles-ci ont atteint le nombre de 39 500 pour le premier semestre 1998, selon la commission des comptes de la Sécurité sociale. On sait que 90 % de ces embauches se font sur CDI, et concernent des gens de plus en plus âgés et diplômés. Il aurait fallu laisser en l'état cette mesure qui contribue à favoriser la création d'entreprises, pour laquelle la France est très en retard. Par votre plafonnement, vous donnez un signal négatif à l'heure où vous envisagez de réformer les cotisations patronales. Deuxième inconvénient : vous allez pousser à la baisse des salaires, notamment pour les jeunes, ce qui est particulièrement inopportun.

M. François Goulard - Nous déplorons que vous limitiez au SMIC l'exonération pour première embauche. L'administration qui vous a soufflé cette mesure ne prend sans doute pas la mesure de ce que sont aujourd'hui les créations d'entreprises et les premières embauches. Il peut certes s'agir du schéma classique de l'artisan qui recrute un compagnon. Mais ce peut être une entreprise informatique qui embauche un ingénieur ou un technicien supérieur. La limitation de l'exonération est donc particulièrement inopportune.

Cet article offre, d'autre part, l'occasion d'évoquer la question des charges sociales. Nous aurions dû avoir un vrai débat concernant l'allégement des charges sur les bas salaires, et le rapport Malinvaud aurait dû nous y inciter. Les arbitrages gouvernementaux ont été différents, et nous le déplorons.

Se pose également la question des compensations, pour les régimes de sécurité sociale, des allégements décidés par les lois. Nous sommes attachés à une compensation intégrale. La loi du 13 juin 1998 sur la réduction du temps de travail comporte à cet égard un véritable marché de dupes : la compensation n'est pas intégrale, ce qu'on justifie par l'idée que les emplois prétendument créés grâce à la loi seront source de cotisations nouvelles. C'est postuler que les nouveaux employés étaient précédemment chômeurs et ne cotisaient pas. Or, bien souvent, les embauches ne portent pas sur des chômeurs mais se font par transferts d'emplois. On n'aura donc pas cet effet d'équilibre que postule la compensation partielle, qui semble être devenue la règle pour le Gouvernement : c'est regrettable pour l'équilibre de la Sécurité sociale.

Mme Muguette Jacquaint - En 1997, environ 77 000 salariés ont été recrutés au titre de l'exonération pour première embauche, et cela s'est fait sur de bas salaires. Mais cette mesure a des limites. Elle peut être pénalisante pour les recettes du système de protection sociale, surtout quand les exonérations ne sont pas compensées. Tous dispositifs confondus, les allégements de cotisations concernaient environ 9 millions de salariés en 1997, soit 15 % de plus que l'année précédente. Le montant des exonérations était de 73,2 milliards, en hausse de 20 %. Ce chiffre incluait 44 milliards d'exonérations sur les bas salaires.

Et pourtant, il y a toujours 3 millions de chômeurs et 7 millions d'emplois précaires. Ces exonérations de charges ont incité les employeurs à recruter à de bas niveaux de salaires. Comment soutenir la demande intérieure, comme le souhaite le Gouvernement, si les gens n'ont pas les moyens de consommer ?

Ces mesures tendaient à favoriser l'insertion des personnes non qualifiées, fort bien, mais elles ont aussi entraîné un manque à gagner pour la Sécurité sociale. Voilà pourquoi nous demandons au Gouvernement de subordonner ces exonérations à des créations d'emplois.

M. Germain Gengenwin - Lors d'une réunion qui s'est tenue samedi dernier, les responsables des chambres des métiers ont appelé notre attention sur la charge supplémentaire que la mesure proposée allait représenter pour les entreprises.

Or l'exonération de charges sociales pour l'embauche du premier salarié a concerné plus de 80 000 emplois en 1994 et 77 000 en 1997. Cela prouve son efficacité. En outre, elle est psychologiquement importante pour un artisan qui, désireux d'embaucher un premier salarié, a souvent besoin de quelqu'un de plus qualifié que lui-même.

Dans ces conditions, pourquoi revenir sur une mesure qui donne satisfaction ?

La séance, suspendue à 23 heures 35, est reprise à 23 heures 50.

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis - L'amendement 12 a été proposé par M. Bapt à la commission des finances, qui l'a adopté...

M. François Goulard - Elle a bien fait !

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis - ...moins pour son contenu que pour obtenir un débat sur le sujet. Le débat a eu lieu et, compte tenu des éléments nouveaux apportés, je me sens en droit de retirer l'amendement.

M. Bernard Accoyer - Je le reprends ! En effet, c'est à bon escient que la commission des finances a retenu cet amendement. L'exonération de charges pour la première embauche est un outil puissant pour encourager l'emploi. Il va dans le sens de l'intérêt des jeunes et de la création d'entreprises.

M. Patrick Delnatte - L'amendement 260 a le même objet. Il serait temps d'adopter une position claire concernant l'abaissement du coût du travail, en particulier pour les basses qualifications. Cet amendement a le mérite de la simplicité.

M. François Goulard - L'amendement 405 est identique. Je m'associe complètement à l'exposé des motifs de la commission des finances, qui fait valoir que le plafonnement de l'exonération à la fraction de rémunération correspondant au SMIC serait défavorable aux entreprises innovantes. En effet, certaines PME embauchent à un niveau de salaire élevé et l'article 4 est particulièrement malvenu.

M. le Président de la commission des affaires culturelles - Monsieur Delnatte, je suis d'accord avec vous sur la nécessité de faire la clarté. Alors commençons par éviter de confondre bas salaires et basses qualifications : on voit de plus en plus les entreprises embaucher des jeunes qualifiés à des salaires très bas. Donc parlons de bas salaires et non de basses qualifications.

Monsieur Préel, vous dites que ce dispositif coûte peu : 2,7 milliards, ce n'est pas rien !

Je souhaiterais également qu'on évite de dire qu'il a permis 70 000 embauches : non, il a bénéficié à 70 000 embauches, ce qui n'est pas du tout la même chose...

M. François Goulard - C'est vrai !

M. le Président de la commission des affaires culturelles - En fait, aucun d'entre nous ne peut savoir combien de ces embauches auraient eu lieu de toute manière.

M. Goulard a évoqué l'artisan qui effectue sa première embauche. Effectivement, elle se fait souvent à un bas niveau de salaire. Mais la petite entreprise d'informatique qui embauche à un salaire élevé est un mauvais exemple : dans la situation actuelle, avec la perspective du "bug" de l'an 2000, les entreprises d'informatique ont plutôt de la peine à répondre à la demande et ce dispositif ne les aidera pas à recruter, il crée simplement un effet d'aubaine.

Cela dit, comme nous sommes pragmatiques et prudents, nous ne voulons pas remettre en question un dispositif tant que nous ne pouvons apprécier exactement ses effets sur l'emploi. C'est pourquoi nous proposons de le proroger jusqu'au moment où nous réexaminerons toute l'architecture des cotisations patronales. Mais nous le ciblons sur les petites unités économiques en le limitant au SMIC, en parfaite cohérence avec la réflexion que nous menons depuis plusieurs mois. C'est pourquoi je suis soulagé de voir M. Cahuzac retirer un amendement que nous avions déjà repoussé en commission des affaires sociales. La réflexion de Mme Jacquaint sur ce sujet était pleine de bon sens.

Mme la Ministre - Pour l'opposition, l'Etat devrait toujours aider davantage les entreprises. Telle n'est pas notre conception. Pour nous, un aide doit être assortie d'une contrepartie, notamment en emplois, afin d'éviter l'effet d'aubaine.

Un étude réalisée auprès de chefs d'entreprise sur l'aide à la première embauche montre que 64 embauches sur 100 auraient eu lieu au même moment et avec la même personne. L'effet d'aubaine est donc fort, ce pourcentage tombant à 9 % pour les contrats d'apprentissage, 12 % pour les contrats de qualification, 16 % pour les contrats initiative emploi. On le voit, quand un entreprise a vraiment besoin d'embaucher un premier salarié, elle le fait. Que l'on veuille aider les plus faibles est un bonne chose, mais pas que l'on conforte les autres quand la croissance est là.

Par ailleurs, sur 75 000 embauches en 1997, le salaire moyen a été de 1,15 SMIC. Nous arrivons donc à un taux d'exonération de 88 %, ce qui ne ressemble guère à une remise en cause. Enfin, ce dispositif permet une économie pour l'Etat. Je suis donc opposée aux amendements de suppression de cet article.

M. Patrick Delnatte - Le taux de mortalité des entreprises nouvellement créées est très élevé et vous voulez alourdir les charges qui pèsent sur elles. Il faut être très prudent.

M. le Président de la commission des affaires culturelles - C'est en effet un vrai problème et je compte saisir Mme la ministre quant aux moyens de relancer la création d'entreprises.

Pour cela, nous avons moins besoin de ce type d'exonérations que d'augmenter leurs fonds propres. Il faut aussi leur donner plus de moyens d'expertise et de formation au cours de la période de décollage. Ainsi les boutiques de gestion réduisent le taux de mortalité.

L'amendement 12, mis aux voix, n'est pas adopté.

Les amendements 260 et 405, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. Bernard Accoyer - Vos chiffres, Madame la ministre, montrent quand même que 23 000 embauches ont dépendu de l'exonération en question. C'est déjà considérable.

Vous cherchez systématiquement à tirer les salaires vers le bas, on l'a vu avec votre amendement sur les emplois à domicile pour les personnes âgées, avec la réduction du temps de travail, on le voit encore avec ce plafonnement au SMIC de l'exonération à la première embauche. C'est d'autant plus préoccupant que les jeunes sont souvent sous-rémunérés, notamment pour leurs premier emploi.

On ne peut, au nom d'un éventuel effet d'aubaine, oublier l'importance pour l'avenir de l'entreprise de la décision d'embaucher pour la première fois, de devenir un patron.

Cet article est dangereux et, afin d'en atténuer les effets pervers, je propose, par l'amendement 369, de porter le plafond à deux fois le SMIC.

M. Alfred Recours, rapporteur - On quitte ici le registre des plus bas salaires. Les employeurs hésiteraient vraiment beaucoup à aller au-delà de la rémunération prévue.

Rejet donc, même s'il faudra un vrai débat sur l'alignement des cotisations, afin notamment d'éviter les trappes à bas salaires.

Mme la Ministre - Même avis.

M. Germain Gengenwin - Ne faudrait-il pas s'intéresser plutôt à l'embauche du premier cadre quand l'artisan qui a créé l'entreprise se rend compte qu'il a besoin d'un personne plus qualifiée que lui ?

M. Bernard Accoyer - M. Recours a-t-il vraiment conscience du poids des charges et de ce que représente l'exonération pour un toute petite entreprise ? Cinquante pour cent de plus, c'est considérable, cela représente un coût total de 12 000 F pour un salaire de 8 000 F.

L'amendement 369, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. François Goulard - Je rejoins le président Le Garrec et Mme la ministre : les exonérations de charges trop ciblées sont généralement inefficaces. Les réductions générales, qui s'appliquent à toutes les entreprises, ont des effets bien plus forts sur l'emploi.

Toutefois une dérogation doit être prévue pour les entreprises qui se créent et qui procèdent à une première embauche. Mon amendement 406 vise donc à pérenniser l'exonération.

L'effet d'embauche serait dérisoire au regard de celui que provoquera l'article 3 de la loi du 13 juin 1998, qui incitera les entreprises à signer des conventions anticipées de réduction du temps de travail pour toucher les subventions, alors qu'elles avaient déjà l'intention d'embaucher.

M. Alfred Recours, rapporteur - Proroger la mesure de trois ans permet d'ajuster le dispositif d'ici la fin de 2001. Si la situation de l'emploi ne s'améliorait pas, il serait toujours possible de proroger une nouvelle fois.

Mme Muguette Jacquaint - Eux, ils le veulent à vie.

Mme la Ministre - Avis négatif.

L'amendement 406, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Bernard Accoyer - L'amendement 259 est défendu.

M. François Goulard - Je retire l'amendement 407.

M. Alfred Recours, rapporteur - Le débat a eu lieu. Défavorable.

Mme la Ministre - Même avis.

L'amendement 259, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'article 4, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 4

M. Bernard Accoyer - L'amendement 180 est défendu.

M. Alfred Recours, rapporteur - La question des zones franches n'est pas traitée ici. De toute façon, l'amendement est trop systématique. Toutes les zones franches ne sont pas défavorisées. Rejet.

Mme la Ministre - Défavorable. Une telle disposition ne serait pas acceptée par la Commission européenne. Les associations de zones franches sont nombreuses et peuvent bénéficier des emplois-villes, des CES, des emplois consolidés à la différence des entreprises.

L'amendement 180, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Bernard Accoyer - L'amendement 371 a été déposé par l'Alliance tout entière ("Ah !" sur les bancs du groupe socialiste) afin de mettre l'accent sur la nécessité impérieuse de diminuer les charges sur les bas salaires. C'est aussi la conclusion du rapport Malinvaud. Un niveau de charges trop élevé est facteur de chômage et de délocalisation. Malheureusement la tendance s'accentue.

Il faut débattre de façon audacieuse de la baisse des charges, et nous proposer de les transférer des bas salaires vers les hauts salaires, ce que tirerait les salaires moyens vers le bas, ni vers la valeur ajoutée, ce qui pénaliserait les entreprises innovantes.

Ce qu'il faut, c'est diminuer les charges, avec compensation par le budget de l'Etat. Pour ce faire, il faut réduire les dépenses publiques, ce que la loi de finances ne fait pas.

Les groupes de l'opposition proposent par cet amendement de diminuer les charges de façon sélective sur les salaires jusqu'à un tiers au-dessus du SMIC. Même si vous refusez ce débat qui divise la majorité, ce serait un signe fondamental pour les entreprises et pour les chômeurs.

M. Alfred Recours, rapporteur - L'Alliance accouche enfin de quelque chose...

M. Bernard Accoyer - Toujours votre haine des familles !

M. Alfred Recours, rapporteur - Le Pacs aussi est une forme d'alliance.

M. Bernard Accoyer - Quel aveu !

M. Alfred Recours, rapporteur - Comme l'Alliance est un Pacs mal ficelé.

Elle accouche donc, et c'est d'une usine à gaz (Rires). L'accouchement a dû être douloureux.

Cet amendement, trop long, dénature complètement le projet. La majorité de la commission a estimé qu'il était dommage que l'Alliance ne porte pas de plus beaux bébés. Ce sera pour une prochaine fois.

Mme la Ministre - Nous avons déjà débattu en janvier d'un texte comparable. Nous sommes favorables à tous les moyens de diminuer le chômage. Mais la formule que vous choisissez pose problème. Elle referme plus encore que la réforme Juppé la "trappe à chômage". Dans ce dernier cas, augmenter le SMIC de 100 F coûtait 260 F de cotisation. Avec votre amendement, ce serait 290 F.

D'autre part, votre gage n'est guère crédible pour une mesure qui coûterait 30 milliards. Il repose sur les gains de la Française des jeux et sur une taxe additionnelle sur le tabac. Pour financer la mesure, il faudrait une augmentation de 60 %. Défavorable.

M. François Goulard - Nos trois groupes tenaient à déposer un amendement sur la baisse des charges sociales, même si ce dispositif est sujet à critique. Ceux qui existent présentent effectivement l'inconvénient d'inciter au maintien des bas salaires. Il faut éviter cet écueil. Mais il faut en éviter un autre, celui de transférer les charges sur les salaires élevés comme vous l'avez proposé.

Mme la Ministre - Jamais.

M. François Goulard - Je l'ai lu dans la presse cet été.

Mme la Ministre - Il ne faut pas croire tout ce qu'on lit.

M. François Goulard - Vous n'avez pas apporté de démenti à l'époque. Cela aurait un effet déplorable sur les employeurs.

La mesure la plus efficace serait une baisse des charges forfaitaires.

Mme la Ministre - La réduction du temps de travail.

M. François Goulard - Mais elle doit être gagée par une réduction des dépenses.

L'amendement 371, mis aux voix, n'est pas adopté.

ART. 5

M. François Goulard - M. Aimé Kergueris, président du groupe "mer" de l'Assemblée et moi-même nous faisons les interprètes de l'émotion des marins-pêcheurs.

En effet, les bénéfices industriels et commerciaux des patrons-pêcheurs ne sont pas soumis à la CSG et au CRDS ; or, avec les dispositions que vous proposez, ils le deviendraient. Il ne s'agit pas de plaider pour le non-assujettissement ; mais cette profession, qui est dans une situation particulièrement difficile, ne peut pas supporter une hausse brutale de ses charges.

M. Bernard Accoyer - Cet article démontre en réalité que notre pays est handicapé par le poids des charges, dissuasif pour ceux qui veulent créer des entreprises et embaucher. Certes, les fraudeurs existent ; mais notre législation prévoit déjà des sanctions pénales. Cet article, très excessif pour répondre à quelques situations exceptionnelles, ne fera qu'accroître les tracasseries administratives dont sont l'objet les artisans et les commerçants.

M. Bernard Birsinger - Cet article tend à combler un vide juridique : certains montages, en particulier la location-gérance, permettaient en effet aux travailleurs indépendants d'échapper à toute cotisation. Cependant nous ne sommes qu'en partie satisfaits : pourquoi ,en effet, demander à l'administration fiscale de recouvrer des cotisations de nature sociale au motif que l'URSSAF a des difficultés pour le faire ? Mieux vaudrait donner à celle-ci les moyens dont elle a besoin.

Par ailleurs, combien de revenus ont pu échapper à la contribution en 1998 ? Quel manque à gagner cela représente-t-il pour la Sécurité sociale ?

M. Bernard Accoyer - Mon amendement 150 de suppression est défendu, de même que l'amendement 284 de M. Bourg-Broc.

M. Alfred Recours, rapporteur - Pour faire plaisir à Oskar, je citerai La Fontaine : "Qui vole un oeuf vole un boeuf", Monsieur Accoyer. Le législateur ne saurait accepter que la loi soit contournée. La location-gérance n'est pas mise en cause ; ce qui est visé, c'est la fraude.

Par ailleurs, j'ai déposé un amendement pour signifier qu'il n'y a pas lieu de rémunérer tel ou tel service de l'Etat au pourcentage pour exercer le recouvrement d'un impôt ou d'une taxe. Je défendrai également un amendement de suppression d'une rémunération au pourcentage du service des douanes.

Mme la Ministre - Il ne s'agit pas d'accroître les tracasseries administratives, mais de faire respecter la législation. L'union professionnelle artisanale a eu une inquiétude au moment de la rédaction de ces dispositions ; nous avons rediscuté avec elle et elle nous a fait part de son accord.

Nous visons les travailleurs indépendants qui mettent en location-gérance leur fonds de commerce, confié à une société dont ils sont par ailleurs associés ; ils constituent d'exercer leur activité professionnelle dans la société, mais sans autre rémunération que le loyer qu'ils retirent de la location-gérance. De ce fait, les URSSAF ne les connaissent pas ; d'où la nécessité de passer par le fisc.

En ce qui concerne les marins-pêcheurs, je dois dire très humblement que je ne connais pas la question. On ne peut admettre que des contribuables ne déclarent pas des sommes qu'ils devraient déclarer ; je vais regarder s'il y a des problèmes spécifiques et si c'est nécessaire, nous reverrons cela en deuxième lecture.

M. Bernard Accoyer - Madame la ministre, vous venez de dire que vous avez élaboré cet article en concertation avec l'UPA.

Mme la Ministre - Je n'ai pas dit cela !

M. Bernard Accoyer - En tout cas, cet article répondra peut-être aux souhaits de l'UPA. Pour ma part, j'ai préparé un amendement de repli.

Mme la Ministre - Ne déformez pas mes propos. L'UAP est favorable au principe de la disposition, comme d'ailleurs l'ensemble des caisses de non-salariés ; elle s'était inquiétée de la rédaction, mais elle est rassurée par les explications que nous lui avons données.

Les amendements 150 et 284, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. Bernard Accoyer - Je laisse M. Goulard défendre nos amendements identiques 151 et 230.

M. François Goulard - Ces amendements tendent à préciser l'article 5 pour éviter que son champ soit trop large. J'observe qu'en droit fiscal il existe une théorie de l'abus de droit : d'après la jurisprudence, l'administration peut revenir sur une construction juridique ayant pour unique objet d'échapper à l'impôt, et à imposer le contribuable comme si le montage en question n'existait pas. Dès lors pourquoi l'article 5 est-il nécessaire, et pourquoi la jurisprudence des tribunaux administratifs et de la Cour de cassation ne suffirait-elle pas pour contrecarrer l'évasion fiscale, qu'en outre, selon nous, vous surestimez ? Ce texte très sévère va donner une arme puissante à une administration qui n'est que trop portée à exercer toute sa pression sur les contribuables, en particulier les petits. Je souhaite donc qu'à tout le moins une rédaction plus prudente évite les excès d'une administration trop portée à appliquer les textes au-delà même de leur rigueur propre.

M. Germain Gengenwin - Notre amendement 311 est identique aux précédents. Il importe de limiter la requalification systématique des revenus tirés de la mise en location-gérance en revenus professionnels, assujettis à cotisations sociales dans les conditions de droit commun, aux seuls cas de fraudes délibérées à la loi. Nous proposons de limiter cette requalification à ceux qui, tout en continuant d'exercer leur activité professionnelle, ne perçoivent aucune autre rémunération que celles qu'ils retirent de la mise en location-gérance de leur fond. Si j'ai bien compris, Madame la ministre, cet amendement va dans le sens de votre volonté.

M. Alfred Recours, rapporteur - Défavorable. Je me suis déjà exprimé sur cette série d'amendements.

Mme la Ministre - Je le répète, il n'est pas question de pénaliser les travailleurs indépendants qui mettent en location-gérance un fonds de commerce alors qu'ils n'exercent aucune activité, non plus que ceux qui exercent par ailleurs une activité dans un autre fonds. Ni les uns ni les autres n'entrent dans le champ de l'article, mais seulement celui qui met son fonds en location-gérance à son propre profit tout en travaillant dans ce fonds. Les amendements sont donc inutiles. Mais en outre ils rendraient l'article inapplicable : il suffirait de s'attribuer un revenu de cent francs pour s'exclure de son champ.

Les amendements 151, 230 et 311, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis - La rédaction de cet article, qui tend à combler une lacune, n'y parvient pas complètement et comporte en outre une redondance. L'amendement 14 a pour objet de remédier à cette double imperfection.

L'amendement 14, accepté par le Gouvernement mis aux voix, est adopté.

M. Alfred Recours, rapporteur - Je suis hostile, et la commission m'a suivi en cela, à l'imposition d'une ristourne pour les services fiscaux sur les contributions sociales qu'ils prélèvent. L'amendement 35 tend à en écarter la possibilité. Il y aurait bien des dispositifs analogues dont il faudrait parler, concernant par exemple les frais de recouvrement des impôts locaux, mais nous avons au moins l'occasion d'intervenir sur celui-ci.

Mme la Ministre - La perception de ces frais de gestion a une légitimité, puisqu'elle requiert des services fiscaux un dispositif spécifique. C'est peut-être une règle critiquable, mais c'est une règle générale. Il n'est donc pas souhaitable, à l'occasion d'une mesure particulière, de remettre en cause des textes et des pratiques qui existent depuis des années, sans une étude plus approfondie. Avis défavorable.

M. Bernard Accoyer - Je suis favorable à cet amendement. Il souligne une dérive qui devient inquiétante. Les services de l'Etat sont déjà rétribués par les contribuables pour assumer un ensemble de tâches, incluant la perception des impôts et autres contributions. La dérive consiste à demander à ceux qui les payent de payer en outre la gestion de ces appels de fonds. C'est inacceptable et dangereux. Certains grands services de l'Etat assurent même des prestations qui donnent lieu à honoraires, par exemple des travaux d'étude demandés par les collectivités territoriales. On ne voit pas pourquoi ils en percevraient, étant déjà rétribués par les impôts des Français.

En outre, on peut se demander s'il n'y a pas là une entrave à la libre concurrence, par rapport à des entreprises privées qui seraient susceptibles de rendre le même service. La pertinence de l'amendement du rapporteur mérite que nous nous unissions tous pour le voter.

L'amendement 35, mis aux voix, est adopté.

M. Bernard Accoyer - Mon amendement 152 a une dimension sociale évidente. Le chef d'une petite entreprise artisanale ou commerciale a souvent une vie fatigante. Il n'est pas rare qu'il disparaisse prématurément, laissant dans les difficultés sa veuve et ses ayants droit. Je propose de les exclure du champ de l'article 5.

M. Alfred Recours, rapporteur - On évoque les veuves à propos de tous les sujets... Une veuve en tant que veuve n'est pas toujours dans une situation sociale difficile. C'est le cas de certaines, mais aussi de certains veufs, et d'autres non. Quant à l'article 5, il ne concerne en rien les veuves et ayants droit en tant que tels. Cessons d'exploiter les veuves, et d'autres catégories, simplement pour qu'il soit dit qu'on en a parlé dans le débat ! La commission a rejeté l'amendement.

Mme la Ministre - Même avis.

M. Jean-Luc Préel - Ce que dit notre rapporteur sur les veufs est pertinent. Le groupe d'études parlementaire sur les veuves est d'ailleurs devenu groupe d'études sur les "conjoints survivants", et je pense qu'il serait bon de sous-amender en ce sens l'amendement 152 (Rires).

L'amendement 152, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'article 5 modifié, mis aux voix, est adopté.

La suite du débat est renvoyée à la prochaine séance qui aura lieu ce matin, jeudi 29 octobre, à 9 heures.

La séance est levée à 1 heure.

          Le Directeur du service
          des comptes rendus analytiques,

          Jacques BOUFFIER


© Assemblée nationale


© Assemblée nationale