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Assemblée nationale

COMPTE RENDU

ANALYTIQUE OFFICIEL

Session ordinaire de 1998-1999 - 60ème jour de séance, 152ème séance

2ème SÉANCE DU JEUDI 4 FÉVRIER 1999

PRÉSIDENCE DE M. Yves COCHET

vice-président

          SOMMAIRE :

COOPÉRATION INTERCOMMUNALE (suite) 1

COOPÉRATION INTERCOMMUNALE (suite) 18

    MOTION DE RENVOI EN COMMISSION 18

La séance est ouverte à quinze heures.


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COOPÉRATION INTERCOMMUNALE (suite)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi relatif à l'organisation urbaine et à la simplification de la coopération intercommunale.

M. Jean Vila - Le texte qui nous est soumis aujourd'hui vise à tirer les leçons de l'échec de la loi de 1992 en proposant un cadre plus incitatif mais aussi beaucoup plus directif. Mais il n'est pas que de simplification : il constitue une nouvelle étape de la décentralisation, et il dote la France d'un nouvel échelon administratif. Il s'agit donc d'un véritable bouleversement ; cela ne mériterait-il pas que, dans un souci de démocratie, les Français soient consultés ?

Nous sommes sensibles à l'ambition affichée, qui est de promouvoir une véritable coopération de projet, mais nous nous interrogeons sur la méthode proposée.

La réussite de cette coopération sera jugée à sa capacité à répondre aux besoins de la population et à favoriser un aménagement harmonieux et équilibré de l'espace.

On ne saurait donc faire abstraction des difficultés financières des collectivités locales dues à la distorsion persistante entre les compétences que leur ont données les lois de décentralisation et les recettes dont elles disposent. Cette distorsion s'est encore aggravée avec le pacte de stabilité, qui s'est traduit par un manque à gagner de quelque 14 milliards sur trois ans, et même de 19 milliards, si les collectivités avaient, durant cette période, bénéficié, à égalité avec l'Etat, des fruits de la croissance.

Face à ces difficultés, les élus locaux, à la ville comme à la campagne, ont déployé des efforts importants pour équilibrer leur budget. Et si, dans le monde rural, la coopération a pris des formes institutionnelles plus manifestes, n'est-ce pas pour partie parce qu'une marge de manoeuvre réduite ne leur laissait d'autre choix qu'une coopération intercommunale approfondie ?

Certaines formes exemplaires de coopération méritent d'être citées en exemple, mais nombre de structures intercommunales sont demeurées des coquilles vides. On ne saurait donc conclure que le regroupement intercommunal permettrait par nature de régler la crise des finances locales ou la crise sociale.

L'état des finances locales a contraint nombre d'élus locaux à limiter leur action au service du développement économique et à augmenter les impôts au-delà des possibilités contributives des ménages.

Les inégalités de ressources entre les communes, devenues insupportables, ne sauraient servir de prétexte à une coopération intercommunale qui, si elle était imposée, risquerait de démobiliser les élus locaux. Elle se développera d'autant plus librement et efficacement que les communes disposeront des moyens nécessaires.

La loi de finances pour 1999 a engagé une timide sortie du pacte de stabilité, mais un long chemin reste à parcourir pour construire un véritable pacte de croissance et de solidarité entre l'Etat et des collectivités qui devraient dès aujourd'hui bénéficier au moins pour moitié des fruits de la croissance. Il faut revoir les mécanismes de surcompensation de la CNRACL et compenser intégralement les charges induites par les nouvelles normes imposées.

Il faut aussi en revenir, comme nous l'avons proposé lors du débat budgétaire, au régime du droit commun pour le versement de la taxe professionnelle de France Télécom. Il faut encore réduire les inégalités de ressources entre les communes en révisant les modalités de la péréquation : en 1995, 2,5 milliards ont été redistribués pour la péréquation départementale et 3,3 milliards pour la péréquation nationale, soit moins de 4 % du produit de cette taxe ! Il serait possible, dans un souci d'égalité, de taxer les entreprises dans les villes qui pratiquent un taux inférieur à la moyenne nationale, ou de prélever le produit des accroissements de taxes professionnelles au-delà d'un certain montant.

Inclure, comme nous le proposons, les actifs financiers dans l'assiette de la taxe professionnelle, pourrait créer un surplus de recettes de plusieurs dizaines de milliards qui pourrait être affecté au fonds national et réparti sur la base d'un indice semblable à celui qui a été retenu pour la répartition de la dotation de solidarité urbaine.

L'ensemble de la redistribution au titre de la péréquation de la taxe professionnelle mériterait d'être revu dans le même esprit car si l'institution librement consentie d'une taxe professionnelle unique peut contribuer à réduire les inégalités de base sur les territoires d'une même agglomération, les inégalités entre agglomérations demeurent et pourraient même devenir caricaturales. Ne risque-t-on pas de voir se constituer, à côté des communautés d'agglomération partageant une même misère, des regroupements de communes ayant les mêmes intérêts fiscaux, voire sociaux ?

Dans le département des Hauts-de-Seine par exemple où l'assiette totale de la taxe professionnelle s'élève à 37,7 milliards de francs, quatre communes représenteraient à elles seules, en cas de regroupement géographique, 13,3 milliards, soit plus du tiers de l'assiette du département.

Cet exemple démontre l'inadaptation du texte aux spécificités de l'agglomération parisienne et souligne les limites d'une démarche dogmatique qui conditionnerait le règlement de toutes les difficultés de la ville à l'impératif du regroupement intercommunal et à l'institution d'une taxe professionnelle unique. Ne conviendrait-il pas plutôt d'améliorer la péréquation sur des territoires pertinents, prenant en compte notamment les besoins sociaux de la population ?

Il faut rétablir le droit, pour toutes les communes et leurs groupements, de fixer les taux de la taxe professionnelle dans la seule limite du taux moyen national d'augmentation. La nécessité est d'autant plus grande que le projet de loi propose de mettre à contribution le fonds de péréquation de la taxe professionnelle pour honorer l'engagement pris d'accorder 250 F par habitant aux communes qui choisiront d'ici 2005 de participer à une communauté d'agglomération. Il serait inacceptable que d'autres collectivités en soient pénalisées.

La dotation aux communautés d'agglomération mériterait par ailleurs d'être pérennisée au-delà de 2005 car un tel projet suppose des moyens supplémentaires permanents.

La levée d'une fiscalité additionnelle à la taxe professionnelle unique peut être admise, mais elle risque, en alourdissant la charge pesant sur les ménages, d'entraîner des effets pervers.

Développer harmonieusement le territoire et répondre aux besoins sociaux, cela implique plus que jamais la participation citoyenne. C'est pourquoi nous demeurons si attachés aux communes et au principe de la libre administration des collectivités locales. Pour coopérer librement, ces collectivités doivent disposer des ressources correspondant aux compétences que leur ont données les lois de décentralisation.

Si des progrès ont été accomplis depuis juin 1997, la crise des finances locales demeure un handicap sérieux à une vraie coopération de projet. Obtenir sous la contrainte économique, voire juridique, que des collectivités délèguent leur compétence, et mutualiser leurs moyens dans le cadre de communautés d'agglomération est une chose, permettre une mobilisation efficace des acteurs sociaux et économiques dans une vraie coopération de projet intercommunal pour combattre la crise urbaine et agir contre le chômage et la précarité est une tout autre ambition.

Vous aurez compris que nous sommes plus que réservés sur la capacité du texte, en l'état, à mener à son terme cette ambition pourtant nécessaire (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et sur quelques bancs du groupe socialiste).

M. Pierre Méhaignerie - Ce texte suscite quelques satisfactions, sur lesquelles je ne reviendrai pas : elles se sont suffisamment exprimées ce matin. Il provoque aussi des déceptions. Peuvent-elles être surmontées ? Je l'espère.

Ces déceptions tiennent en premier lieu au sentiment de complexité croissante qui se dégage à l'examen des trois textes soumis successivement au Parlement, et dont la lisibilité d'ensemble est insuffisante. Il y a, chez les élus, une formidable aspiration à la simplification et à la souplesse ; ce texte ne répond pas à leur attente. Prenons l'exemple des pays : beaucoup y croient, mais cette nouvelle organisation sera très vite rejetée si elle apparaît comme un nouvel échelon administratif. J'aurais préféré que le pays demeure un espace de projet, constitué sous forme associative, car le syndicat mixte conduit fatalement à une nouvelle administration.

La déception tient aussi au sentiment que le projet de loi est resté au milieu du gué pour tout ce qui touche à la fiscalité, à la démocratie et à la répartition de la dotation globale de fonctionnement. Le pouvoir immense qui est conféré de fixer le principal impôt ne peut pas ne pas aboutir, un jour, à l'élection au suffrage universel et donc à la transformation des départements et du mode d'élection des conseillers généraux.

Certes l'exercice est difficile et on ne peut tout faire en une fois. Mais il existe la possibilité d'expérimenter dans des départements des formes nouvelles d'organisation sur une base volontaire.

Cela nécessiterait un article additionnel de la Constitution.

M. Bernard Roman - Le Sénat ne voudra pas.

M. Pierre Méhaignerie - Entre l'application uniforme d'une loi nationale et vingt parlements régionaux, il y a des possibilités intermédiaires. Selon un grand homme d'Etat européen, dans les vingt années à venir, les Etats qui réussiront sont ceux qui accepteront des transferts vers l'Union européenne -cela vous fera plaisir, il ajoutait "dans des limites strictes"- et surtout vers les structures de base pour libérer la créativité.

M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur - Cela me fait plaisir aussi.

M. Pierre Méhaignerie - Je vous suggère donc de soutenir la proposition de loi organique que nous présenterons en juin.

Enfin, je m'inquiète un peu devant des propositions de mettre fin totalement à la liaison entre les taux. Entreprises et contribuables s'inquiètent des risques de pression fiscale accrue et beaucoup commencent à comprendre que leur consommation individuelle doit avoir la priorité tandis que les consommations collectives ont peut-être atteint une limite, y compris dans les collectivités locales.

Enfin, l'article 56 remet en cause l'aménagement équilibré du territoire et donne le sentiment de privilégier le monde urbain. Par exemple, suite à un accord entre les responsables politiques d'Ille-et-Vilaine, le produit de l'écrêtement de la taxe professionnelle de l'usine Citroën de Rennes, soit 140 millions, va pour 44 % au district où habitent 36 % des salariés et pour 55 % aux autres communes où habitent 64 % des salariés. C'est un accord juste. L'article 56 le remet en cause. Le Gouvernement et les rapporteurs semblent convaincus que le fonds départemental ne peut être rétroactivement diminué. C'est un premier progrès. Mais il serait figé à son niveau actuel. Les communes hors district ne bénéficieraient donc plus de la croissance des bases. C'est là une injustice. Le conseil général à l'unanimité a donc voté lundi une résolution demandant que l'équilibre existant soit maintenu compte tenu de la spécificité du fonds Citroën (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF, du groupe DL et du groupe du RPR).

M. Gérard Saumade - Je rassure M. Méhaignerie. Nous sommes tous des expérimentateurs sociaux en ce qui concerne l'intercommunalité. Ce projet nous permettra d'évoluer, sans figer les choses. Il suscite un espoir de modernisation mais aussi des craintes de remise en cause des fondements de la République.

A l'évidence il faut favoriser le passage d'une société rurale longtemps dominante à une société urbaine en ce sens que partout désormais les besoins sont "urbains". C'est pour satisfaire ces besoins que l'intercommunalité a commencé il y a un siècle. Il s'agissait alors d'électrification et d'adduction d'eau. Après la deuxième guerre, les SIVOM furent dotés de compétences variées. Ces syndicats se sont développés dans le monde rural, par la libre volonté des élus communaux qui ont pratiqué des expérimentations tout en préservant l'autonomie politique des communes.

Le développement des districts à fiscalité propre est un nouveau pas. La majorité des communes ont créé des structures intercommunales. Le projet a le mérite de les simplifier. Mais je souhaiterais qu'on évite de jeter l'enfant avec l'eau du bain. Le dispositif vise à relancer l'intercommunalité. On supprime les communautés de villes et on relève le seuil de population des communautés urbaines dans l'espoir d'équilibrer le territoire grâce à quelques grands pôles ; on crée les communautés d'agglomération à partir de 50 000 habitants. On unifie le régime juridique en toilettant le code des collectivités locales. On introduit enfin plus de démocratie et de transparence dans le fonctionnement des structures intercommunales. Il serait d'ailleurs judicieux qu'aux prochaines municipales on annonce les noms des futurs candidats aux communautés d'agglomération, comme l'a demandé M. Darne, ou aux communautés de communes. Le texte veut, enfin, renforcer les solidarités pour lutter contre l'apartheid social.

Toutes ces réformes vont dans le bon sens. Cependant des risques existent, contre lesquels il faut se prémunir.

D'abord, dans ce projet comme dans celui relatif à l'aménagement, l'analyse du territoire est lacunaire. On y met l'accent sur la dichotomie entre ville et campagne. C'est ignorer la forte croissance de ce territoire qu'on dit périurbain ou "rurbain". La population y a un fort sentiment identitaire et la vie associative y fleurit. Il conviendrait d'y favoriser le développement de communautés de communes, avec la TPU, afin d'y affirmer une citoyenneté -car l'homme compte plus que le territoire. Désormais "rural" ou "urbain" sont des termes périmés tant l'interpénétration est forte. La TPU peut être un lieu pour réaliser un véritable aménagement du territoire dans une petite région.

La TP de zone a constitué, dans certains districts, un premier pas. Mais en secteur périurbain l'inefficacité relative des POS communaux pousse à l'émergence d'un schéma de petite région apte à concilier l'activité agricole, le respect de l'espace naturel et le processus d'urbanisation. Dans cette perspective, il convient que la TP ne soit pas amputée d'une part de son produit, comme le dispose la loi de finances. Il nous appartient sur ce point de convaincre nos amis de Bercy de ne pas faire passer la charrue avant les boeufs, et de ne pas affaiblir ce levier de la coopération intercommunale.

Je rejoins M. Balligand pour souhaiter que les communautés de communes qui choisiraient la TP unique reçoivent une part plus importante de la DGF. En effet, il n'existe pas de différence de nature entre la communauté de communes et la communauté d'agglomération.

Aussi pensons-nous nécessaire d'assouplir la loi afin de mieux gérer la transition sociale qui caractérise notre temps. Il faut aussi éclairer l'horizon lointain, et c'est la responsabilité du politique : quelle France voulons-nous, et dans quelle Europe ? Si nous faisons le choix d'une république unitaire décentralisée au sein d'une Europe de nations rassemblées, les réformes d'aujourd'hui et de demain doivent respecter les institutions de cette république-là, parmi lesquelles le préfet comme seul représentant de l'Etat dans le département, et organisant autour de lui la déconcentration, afin d'éviter la féodalisation. Dans l'une des dernières conversations que j'ai eues avec lui, Gaston Defferre m'a dit : "J'ai réussi la décentralisation, mais j'ai raté la déconcentration autour du préfet".

Les nouveaux organismes intercommunaux ne doivent pas annuler les collectivités de base, même si ces dernières sont compliquées, car la France, c'est aussi cela. Dans Le Diable et le bon Dieu, Sartre fait dire à Dieu : "Si j'avais su, j'aurais fait l'homme moins compliqué". La France aussi est compliquée. Les nouvelles structures devront donc dialoguer avec les départements, base solide de la République depuis 1789, et avec les communes, où gît la démocratie quotidienne. Imagine-t-on de remplacer les conseillers municipaux par des animateurs culturels ? Sur tous ces points, Monsieur le ministre, nous vous faisons confiance (Applaudissements sur les bancs du groupe RCV et du groupe socialiste).

M. Gérard Voisin - La loi Voynet n'est pas encore votée que voici la loi Chevènement, assortie de la TP unique, qui, on le sait bien, demeurera toujours impossible à appliquer.

Les 250 F par habitant pour les communautés d'agglomération pouvaient être données autrement. Voilà donc deux lois pour rien, puisque nous disposons déjà de tous les outils nécessaires. Quand j'étais garagiste, je n'achetais jamais d'outils neufs sans besoin, je nettoyais et je rangeais les miens pour pouvoir en faire bon usage.

Mais vous voulez avoir vos lois à vous, par exemple en créant les pays. Piètre satisfaction que de dire "bonjour Voynet, adieu Pasqua" ! Nos concitoyens méritent autre chose.

Cependant les élus du mouvement intercommunal, qui regroupe 1 600 structures et la moitié de la population attendent beaucoup de la réforme de l'intercommunalité, déjà engagée par M. Perben. Ils attendent une vraie reconnaissance de l'intercommunalité, qu'il faut simplifier, en commençant par le jargon intercommunal, tant il est vrai que les élus eux-mêmes se perdent dans ce mille-feuilles de plus en plus indigeste. Les périmètres de tous ces établissements qui prolifèrent, se chevauchent et s'entremêlent inextricablement... Le projet, prétendez-vous, simplifie l'intercommunalité en supprimant districts et communautés de villes, mais il crée en même temps les communautés d'agglomération, si bien que cette "simplification" restera un vain mot.

L'intercommunalité a besoin de souplesse. Chacun, dans cette voie, doit pouvoir progresser à son rythme. Or le projet, en mettant en jeu des seuils de population, aboutit à opposer le rural et l'urbain. Il y aura d'un côté les communautés urbaines aidées par l'Etat à hauteur de 500 F par habitant et les communautés d'agglomération à hauteur de 250 F, et de l'autre le reste du monde, c'est-à-dire un bon millier de communautés, une sorte de tiers état, dont la DGF diminuera et qui ne touchera que 100 F.

M. Gérard Gouzes, rapporteur de la commission des lois - C'est faux !

M. Gérard Voisin - M. Crépeau a bien indiqué ce qu'il en adviendra. Vous mettez en avant l'outil de la TP unique. Dans l'absolu, on peut vous approuver. Mais sur le terrain, la mise en oeuvre se heurtera à de nombreux obstacles, si bien que rendre la TP unique obligatoire dans les agglomérations compromettra le développement de l'intercommunalité. Le risque existe d'aboutir à un échec comme pour les communautés de villes créées en 1992. Pourquoi encourager la TP unique, alors que la suppression progressive de la part salariale annonce la mort lente de la TP ?

Le redoutable privilège de lever l'impôt fait apparaître le mode actuel de désignation des délégués intercommunaux comme peu satisfaisant. Je suis cependant hostile à une élection qui leur soit propre, car elle ouvrirait la voie à la reconnaissance d'un échelon administratif supplémentaire.

Le Gouvernement a eu la sagesse de n'inclure dans le projet aucune disposition en ce sens, mais il nous faudra bientôt trouver un moyen d'impliquer davantage les citoyens : pourquoi pas au moyen de listes associées, comme dans la loi PLM ?

Puisse ce projet permettre aux communes d'accéder aux formes de coopération les plus adaptées, aux structures intercommunales de voir leur légitimité renforcée, ainsi que la solidarité entre territoires !

M. Robert Poujade - Très bien !

Mme Annette Peulvast-Bergeal - Les élus attendaient depuis de nombreuses années qu'une loi leur permette de renforcer leurs dispositifs de coopération. Représentante d'un des plus anciens districts de France, je voudrais insister sur deux aspects de ce projet bienvenu : la représentation des communes au sein des structures intercommunales et la solidarité financière et fiscale au sein des agglomérations.

Sur le premier point, il importe d'introduire dans la loi la souplesse nécessaire, afin que la transition entre anciennes et nouvelles structures se fasse dans de bonnes conditions. Si je suis réservée, pour le moment, quant à une élection des assemblées intercommunales au suffrage direct, ce n'est pas par refus de la démocratie, mais parce que nos concitoyens n'ont pas encore une vision claire du rôle joué par ces structures, et aussi parce que cette procédure risquerait d'aboutir à l'élection de délégués déconnectés des assemblées communales, voire en conflit avec elles. C'est un objectif vers lequel il faut tendre à terme, mais en veillant à ne pas laminer les petites communes périphériques, qui sont appelées à jouer un rôle économique croissant, et dont l'apport fiscal sera donc de plus en plus nécessaire.

J'en viens naturellement, en disant cela, à la question de la TPU, dont nous pouvons attendre un effet de levier supplémentaire dans la lutte contre l'exclusion et pour le développement économique des périmètres concernés par les futurs contrats de ville. Je plaiderai donc pour une certaine modulation des mécanismes d'intégration, d'incitation et de compensation, de façon à favoriser les communautés qui choisiraient d'accélérer le rythme de leur intégration financière et fiscale. La TPU reste sous-utilisée en de nombreux endroits, d'où l'urgence à aller plus vite et plus loin, dans le contexte actuel de croissance et de créations d'emplois.

Ce projet va dans le bon sens, et nous sommes prêts à apporter notre pierre à la nouvelle architecture qu'il s'agit de construire (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe RCV).

M. Robert Poujade - Si le terme d'"organisation urbaine" est de nature à heurter certaines susceptibilités, l'exposé des motifs du projet pose bien le problème, et témoigne de la prise de conscience, de tous côtés du spectre politique, du rôle structurant des agglomérations et de la nécessité de les renforcer. Il souligne que la civilisation de la ville -sans doute vaudrait-il mieux préciser "moderne" - reste largement à construire, mais peut-on l'inventer, ou du moins la retrouver, sans donner à la ville les moyens qui correspondent à sa place dans notre vie et dans nos relations avec le monde ?

Existe-t-il une politique de la ville ? Il est permis de s'interroger. Les dispositifs que ce vocable recouvre sont plus palliatifs qu'inventifs et plus parcellaires que substantiels ; ils sont certes utiles, voire indispensables, mais marginaux en regard de ce que devrait être une politique audacieuse et dynamique de la ville. La civilisation de la ville, vieille de plusieurs millénaires, a été accoucheuse de modernité, pour le meilleur et pour le pire. Il faut qu'elle le redevienne pour le meilleur, car c'est en ville et par la ville que nous surmonterons la crise de notre société.

Or nos villes sont faibles, démographiquement, économiquement, financièrement. Elles n'ont ni la dimension ni les moyens d'action qui leur permettraient d'affronter la compétition européenne. Elles souffrent de la complexité et de l'obsolescence de nos grandes structures territoriales, ainsi que de la concurrence que se livrent les régions comme les départements. Elles sont souvent stigmatisées comme privilégiées, au mépris de toute réalité car elles "donnent" souvent, fiscalement parlant, quatre ou cinq fois plus que ce qu'elles reçoivent, et parfois davantage. Elles connaissent les surcoûts de la centralité et concentrent la précarité et la marginalité sociale.

Elles auraient à gagner à une réforme profonde et hardie de notre organisation territoriale, mais celle-ci continue de nous être présentée comme trop précoce, trop risquée, trop traumatisante. A défaut d'une démarche plus audacieuse, la formule des communautés d'agglomération, et la TPU qui en est le corollaire, sont de nature à donner à l'intercommunalité, notamment urbaine, une efficacité et un dynamisme nouveaux. Les critères de population, pour contestés qu'ils soient, correspondent à une approche réaliste et exigeante.

La TPU est la clé du dispositif. Fallait-il en faire une obligation, comme le souhaite l'association des maires des grandes villes de France ? Sans doute vaut-il mieux ne pas dissuader de futurs partenaires si l'on veut vraiment promouvoir cette formule. La loi de 1992, par sa complexité, a rejeté nos communes vers des formules plus simples, plus éprouvées et plus prudentes. Le projet qui nous est soumis reprend des dispositions que Dominique Perben avait envisagées et tient compte de l'expérience des sept dernières années. Cette démarche pragmatique constitue une bonne base de discussion, pour peu que le texte soit émondé de certains éléments qui, selon certains de nos collègues, le "polluent" et affaiblissent, en tout cas, sa valeur consensuelle.

On n'imagine pas, en tout cas, qu'une loi aussi ambitieuse et importante pour les communes ne procède pas d'un vrai dialogue, transcendant les clivages politiques : en dépendent son accueil et son succès dans le pays (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL).

M. Michel Crépeau - Très bien !

Mme Muguette Jacquaint - Les élus communistes n'ayant jamais mesuré leurs efforts pour favoriser une coopération intercommunale librement consentie, l'annonce de ce projet ne pouvait que susciter leur intérêt. Or nous avons découvert en le lisant que, plus que l'intercommunalité, il organisait la supracommunalité.

Par ailleurs, puisque l'exposé des motifs évoque la "pertinence" du territoire où s'exerce cette intercommunalité, est-il sûr que le choix de l'agglomération soit le meilleur pour l'Ile-de-France, région à forte densité d'habitat et de population où s'enchevêtrent les bassins d'emploi et de vie et où les schémas d'aménagement successifs n'ont eu que peu d'influence ?

En matière d'intercommunalité, il n'y a pas de lois spécifiques à la région parisienne, et c'est bien ainsi. Cependant, il faut bien constater que cette forme de coopération ne fait pas recette en Ile-de-France : on n'y recense que 36 EPCI, dont 23 en Seine-et-Marne, le département le plus étendu et le plus rural. Ce peu d'intérêt n'a-t-il pas son origine dans l'absence de pertinence du territoire régional ?

Nous refusons de contraindre les collectivités à s'enfermer dans des structures qu'elles n'auront pas choisies, dans le cadre de territoires dont la pertinence reste à démontrer. Que nous allions avec cette loi vers une multitude de communautés d'agglomérations, et donc vers un morcellement aggravé, ou vers une grande communauté urbaine rassemblant Paris et la petite couronne, sinon plus, le risque serait grand pour la démocratie.

En revanche, nous ne pouvons que nous réjouir des dispositions relatives au fonds de solidarité des communes de l'Ile-de-France. De 716 millions en 1998, ce fonds sera porté à un milliard l'an prochain et, comme nous le réclamons depuis des années, les articles 57 et 59 permettront de s'attaquer aux disparités. Cependant, il conviendrait d'aller plus loin dans la redistribution et de modifier l'indice synthétique pour mieux prendre en compte la politique sociale de certaines municipalités.

S'agissant des institutions, notre réflexion et nos interventions seront guidées par le seul souci de répondre au mieux aux besoins de nos concitoyens.

Certains voient dans les départements un obstacle à la compétitivité des entreprises, une entrave à l'intercommunalité. Aucune structure n'est intangible mais, avant de nier l'utilité de celle-ci, il convient d'y regarder de plus près car c'est une composante de l'originalité française, propice à un maillage serré des services. Par l'étendue de leurs compétences sociales, par leur contribution à la péréquation, par l'aide qu'ils apportent aux communes, les départements jouent un rôle essentiel dans la cohésion sociale et territoriale, pour un aménagement équilibré du territoire, et sont donc un garde-fou contre la mise en concurrence systématique que favorise une construction européenne marquée par la logique libérale. Ils constituent aussi un cadre idéal pour les coopérations. C'est tout cela que le projet menace.

Les besoins de nos concitoyens changent. Il faut donc se montrer audacieux pour proposer les meilleures réponses. Cela aussi motive notre scepticisme face à un projet qui porte en lui l'effacement du département et des communes, institutions au plus près des besoins. La loi ne doit pas éloigner les citoyens des lieux où se prennent les décisions. Ne revenons pas à l'étatisme, ne faisons pas reculer la libre administration des collectivités. Le législateur doit toujours prendre le parti de la démocratie, qui implique de donner des droits nouveaux. Tel est le point de vue que nous défendrons dans cette discussion, pour modifier en profondeur ce projet (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et sur plusieurs bancs du groupe socialiste).

Mme Christine Boutin - Les 17 000 structures intercommunales que compte notre pays correspondent à un besoin. Grâce à elles, nos communes peuvent offrir des services qu'elles ne pourraient à elles seules mettre en place. C'est sans doute pourquoi l'intercommunalité ne compte pas d'adversaires farouches : tout le monde y reste favorable -dès lors que cela ne coûte pas trop cher à sa commune !

Cependant, depuis plusieurs années, le débat sur le sujet tend à se focaliser sur le trop grand nombre de nos communes. On raille la profusion de nos structures administratives, on critique leur empilement et on envisage parfois d'en sacrifier quelques-unes. Mais on oublie que nos 36 000 communes sont le résultat d'une longue histoire et une expression du génie français. Il ne s'agit donc pas d'en réduire le nombre. Pour autant, nous ne devons pas négliger de poser un problème : celui de l'intercommunalité ville-campagne, dans des domaines tels que l'éducation et l'insertion sociale. Si elle apparaît difficile à réaliser dans les agglomérations, les élus ruraux pourraient avantageusement y être associés.

Par ailleurs, à l'échelle des collectivités, l'intercommunalité est l'expression de la solidarité entre les hommes, noyau de la cohésion sociale. Elle doit donc être encouragée mais elle demande des efforts de négociation et, parfois même, certains abandons de pouvoir. Nous devons donc écarter toute mesure qui serait facteur de confusion. Il revient aux élus du suffrage universel, représentants et défenseurs des communes d'être les décideurs et les animateurs des structures intercommunales. Faire élire les responsables de celles-ci au suffrage universel reviendrait à organiser la mort des communes, sans le dire. Il n'est pas souhaitable en effet de créer deux niveaux de compétences partagées dont les élus seraient issus du même mode de scrutin. Les maires et les conseillers municipaux sont représentatifs. La disparition de ces élus locaux aurait des répercussions graves sur notre tissu social ; elle obligerait l'Etat à prendre à sa charge le dialogue avec les citoyens, parmi les difficultés qu'on imagine.

L'intercommunalité, qu'elle soit tournée vers la fourniture de services ou vers l'aménagement du territoire, prend souvent la forme d'une négociation préalable et de la recherche d'une adhésion des délégués des communes. Il y aurait un grand risque à vouloir agir par la contrainte. Les communes doivent conserver l'initiative. En définitive en effet, l'alternative n'est qu'entre un échange ou une mise en commun de moyens librement consentis, et la création d'une structure supplémentaire. C'est pourquoi les dispositions de ce projet allant dans le sens d'une gestion plus transparente doivent être soutenues. Il faut résolument opter pour l'incitation et ne pas mettre en péril l'équilibre social en modifiant le mode de désignation des délégués. Certains, il est vrai, ne remplissent pas tous leurs devoirs à l'égard de leur conseil municipal mais votre loi vous donne les moyens de les obliger à rapporter devant ce conseil. Mieux vaut donc développer leur sens de la responsabilité (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF).

M. Jean-Michel Marchand - Au risque de vous surprendre, je vais vous faire un aveu : les Verts sont favorables à la loi Chevènement ! (Sourires)

Pourquoi ? Parce qu'il est nécessaire de corriger les déséquilibres entre communautés de communes, de créer une nouvelle architecture de communautés de communes adaptée aux zones urbaines et de regrouper les élus locaux autour du projet ambitieux qu'est le partage de la taxe professionnelle.

Nous nous félicitons que, sur notre proposition, la commission ait cru bon de "verdir" cette loi : ainsi sont élargies les compétences optionnelles des communauté d'agglomération et des communautés urbaines en matière de développement durable, conformément aux objectifs définis lors de la conférence des Nations Unies sur l'environnement à Rio, en 1992.

Notre deuxième proposition vise à compléter le cahier des charges du développement durable en confiant la recherche de l'efficacité énergétique et la maîtrise des consommations d'énergie aux communautés urbaines, ceci pour lutter contre l'effet de serre et faire apparaître la nécessaire corrélation entre action locale et responsabilité planétaire.

Dernier point, la coopération intercommunale ne trouvera sa légitimité aux yeux des citoyens que si elle est incarnée dans des institutions réellement démocratiques. C'est pourquoi les assemblées intercommunales doivent être élues au suffrage universel direct. Seule l'élection au suffrage universel direct permet aux citoyens de s'approprier les enjeux intercommunaux et d'instaurer un véritable débat public et démocratique. Le mode de scrutin adopté récemment pour les élections régionales permet de concilier représentation proportionnelle et efficacité. Il ne faut donc pas craindre les transferts de souveraineté vers les établissements publics de coopération intercommunale, dès lors que le principe de subsidiarité est respecté. En reportant trop longtemps cette exigence de démocratie, les EPCI risqueraient d'être en butte aux mêmes critiques que les institutions européennes actuelles : trop éloignées des citoyens, trop technocratiques. Cet argument, j'en suis sûr Monsieur le ministre, ne saurait vous laisser insensible (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur les bancs du groupe RCV).

M. Alain Cacheux - Ce projet que vous avez parfois présenté comme modeste, Monsieur le ministre, a de bonnes chances d'apparaître, avec le recul, comme une étape majeure dans la structuration administrative de notre pays.

La loi d'orientation et d'aménagement du territoire est venue reconnaître le fait urbain et corriger les aspects trop ruralistes de la loi de 1995. Elle affirme que l'agglomération est devenue le point d'appui de la politique d'aménagement du territoire.

Votre projet, en proposant une nouvelle architecture de l'intercommunalité en milieu urbain, en unifiant les règles et en renforçant la démocratie et la transparence dans les établissements de coopération, en accordant à l'agglomération une triple reconnaissance institutionnelle, fiscale et financière, met de la cohérence dans notre paysage urbain et permet de traduire la nécessaire cohésion sociale. Le chômage, l'insécurité et les déséquilibres économiques et sociaux se concentrent dans les agglomérations : mais cette "crise urbaine" n'est-elle pas en réalité une crise sociale qui, n'arrivant plus à s'exprimer dans les entreprises, se développe désormais dans les banlieues ? Une civilisation de la ville se cherche.

Les problèmes de développement économique, de mixité de l'habitat, de transports ne peuvent être résolus qu'au niveau de l'agglomération. Les disparités actuelles des taux de taxe professionnelle sont un obstacle majeur à l'organisation harmonieuse de nos agglomérations.

En proposant des mesures fiscales très incitatives pour développer une taxe professionnelle unique par agglomération et en en faisant la condition nécessaire pour la création de nouvelles communautés urbaines, vous donnez aux ensembles urbains l'instrument nécessaire pour faire vivre la solidarité territoriale. Avec la fin de la surenchère entre communes, que d'énergie économisée, de rancoeurs évitées et d'implantations plus cohérentes !

Cela vaut encore plus pour les grandes agglomérations, les communautés urbaines. En relevant le seuil de création de ces communautés, vous avez voulu en faire le mode d'organisation des très grandes agglomérations, qu'on appelait hier "les métropoles d'équilibre". Au moment où la construction européenne s'accélère, il importe de renforcer l'armature urbaine française pour affronter la concurrence des métropoles étrangères.

S'il convient de créer les quelques communautés urbaines qui manquent, il convient surtout de renforcer le degré d'intégration de celles qui existent déjà : cela passe par l'instauration de la taxe professionnelle unique. Or si votre projet l'autorise, il n'y incite pas aussi fortement que pour les nouvelles communautés urbaines. Les communautés anciennes auraient déjà pu le faire en vertu de la loi de 1992 ; or aucune ne s'y est décidé. C'est pourquoi j'ai déposé des amendements plus incitatifs.

Il serait dommage que ce projet de loi, qui opère une ample réforme de l'intercommunalité, n'atteigne pas aussi l'objectif de construire de grandes métropoles d'équilibre (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Jacques Pélissard - Avant le dernier élargissement de l'Union européenne, la France comptait à elle seule plus de communes que les onze autres Etats. Est-ce un héritage lourd à gérer, comme l'écrit notre rapporteur, ou n'est-ce pas plutôt une richesse, une exception française exemplaire ? Cela signifie 36 000 maires qui assument une gestion de proximité et recousent le tissu social. En revanche, la dispersion communale ne permet pas la réalisation de projets et infrastructures importantes pour le développement économique. Il nous faut donc concilier la liberté communale et la solidarité territoriale.

Votre texte reprend plusieurs idées pertinentes du projet rédigé par M. Perben en 1997 et présente des aspects intéressants. Il clarifie les procédures et les niveaux de regroupement. Espérons que cette clarification ne sera pas battue en brèche par la création des "pays" prévue par la loi de Mme Voynet, qui impose leur constitution en syndicats ou en établissements publics, alors même que vous nous disiez, Monsieur le ministre, que les pays n'avaient pas vocation à constituer un échelon administratif supplémentaire. En outre votre projet incite financièrement à une démarche intercommunale constructive.

Bref, votre texte comporte de nombreux aspects positifs et le groupe RPR va s'efforcer de l'améliorer sur les points qui posent problème.

Premier problème, la distorsion de la DGF aux dépens des zones rurales. Il nous faut échapper au débat stérile ville-campagne. Chacune a des contraintes propres, mais ces différences justifient-elles à elles seules une telle distorsion dans l'attribution de la DGF ? Je ne le pense pas, et la commission pas davantage, qui a formulé diverses propositions visant à améliorer votre texte, afin que l'intercommunalité puisse aider les Français des villes comme les Français des champs.

Un autre risque de distorsion entre les agglomérations naît de la fixation d'un seuil démographique, soit 50 000 habitants. Si ce seuil n'était pas assoupli, des pans entiers du territoire, des départements dans leur entier, seraient victimes d'une certaine forme de discrimination, puisqu'interdits d'intercommunalité. Il faut certes préserver la vitalité des zones rurales, mais cela ne doit pas empêcher de garantir la place, le rôle, donc le financement des agglomérations-centres. Evitons l'opposition caricaturale entre capitale de région et désert régional ! Nul n'ignore le rôle essentiel des agglomérations moyennes et certainement pas le maire que fut le ministre !

Le Gouvernement ne pourrait-il, alors, répondre au voeu unanime du bureau -pluraliste- de l'Association des maires de France, et considérer que pourraient devenir des communautés d'agglomération les structures intercommunales à fiscalité propre incluant les villes chefs-lieux de département ?

Reste encore en suspens l'épineuse question des pouvoirs octroyés aux communautés d'agglomération pour les choix optionnels. Jusqu'à présent, l'intérêt communautaire d'une opération donnée était déterminé par les conseils municipaux, à la majorité qualifiée. Dans votre projet, les conseils municipaux ne participent plus à la reconnaissance de l'intérêt communautaire : le rôle des communes serait subsidiaire, et la communauté d'agglomération est, de fait, érigée en niveau autonome d'administration. Il convient de revenir sur cette disposition et d'associer les communes à ces décisions par un vote à la majorité simple des conseils municipaux puisqu'il n'est pas question, pour l'instant, d'envisager l'élection au suffrage universel des délégués aux communautés d'agglomération. Les communes demeurent délégantes et doivent donc pouvoir exercer pleinement leur pouvoir de délégation lorsqu'il s'agit de choisir les compétences optionnelles exercées par les communautés d'agglomération.

Il faudra enfin revenir sur les conditions dans lesquelles sera fixé le périmètre d'un EPCI : on ne peut se satisfaire, en effet, que "le silence gardé" vaille réponse favorable, car le risque est patent qu'une collectivité puisse être entraînée dans l'intercommunalité sans en avoir débattu, alors que cet engagement, grave, doit être pris en toute clarté. Le dispositif prévu me semble dangereux et doit être médité. On pourrait, par exemple, prévoir l'obligation d'inscrire la question à l'ordre du jour de la séance du conseil municipal qui suit la notification de l'arrêté "de périmètre".

Je souhaite, en conclusion, que sans parti pris politique, nous améliorions ensemble votre texte afin de mettre au point une intercommunalité durablement efficace, garante de la pérennité de ces communes qui, issues de la Révolution, constituent le socle de la République. Quant aux élus, auxquels nous devons faire confiance, ils ne sont pas tant les hussards que les fantassins de la démocratie.

M. Jean Codognès - Depuis l'adoption de la loi du 6 février 1992, l'intercommunalité est devenue une pratique fréquente dans la gestion des collectivités locales. Transversal ou thématique, le mariage des clochers se décline aujourd'hui sous les formes les plus diverses, mais toutes ne sont plus d'actualité.

Le projet qui nous est soumis devrait contribuer à instaurer un nouvel équilibre et moderniser le cadre de la décentralisation. Il tire les enseignements des évolutions constatées. Ainsi, la réforme est fondée sur le bilan réaliste de la loi ATR du 6 février 1992, bilan quantitatif incontestablement positif puisque les structures intercommunales se sont multipliées.

Mais le bilan qualitatif appelle un jugement plus nuancé. On peut, en effet, s'interroger sur la portée et sur l'efficacité de certaines structures intercommunales, en particulier les communautés de villes. Le doute porte aussi sur l'efficacité sociale de ces structures : ont-elles permis d'améliorer la vie quotidienne des citoyens, contribué au développement local et à la création d'emplois ? Ces interrogations suscitent la perplexité et font craindre à certains élus que les coûts ne l'emportent sur les éventuelles économies d'échelle.

Le projet de loi est, quant à lui, empreint de pragmatisme. Il permettra aux communes d'évoluer à leur rythme dans l'intercommunalité, ce qui signifie coopération librement consentie, simplification, assouplissement de l'organisation et du fonctionnement des régimes existants. En outre, le Gouvernement entreprend de réformer intelligemment la législation en vigueur pour remédier aux trois handicaps majeurs de la loi de 1992 : déficit de démocratie, manque de lisibilité fiscale, échec des communautés de villes. Le projet apporte des solutions souples et efficaces à chacun de ces problèmes.

Pour remédier au déficit démocratique, le Gouvernement instaure une meilleure information des conseils municipaux des communes membres de la communauté et une plus grande association des citoyens aux décisions communautaires au travers des comités consultatifs.

Au manque de lisibilité fiscale, le projet remédie notamment par la création de la taxe unique d'agglomération.

Enfin, l'échec des communautés de villes a incité le Gouvernement à créer des communautés d'agglomération, dont la constitution sera appuyée par de nombreuses mesures volontaristes.

Sur tous ces points, les choix du Gouvernement sont des plus pertinents. C'est donc avec confiance que les élus attendent ce texte (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Léonce Deprez - J'aurais aimé que soient mariées dans un même débat -à défaut de les voir s'épouser dans un même texte de loi- politique d'aménagement du territoire et politique d'organisation territoriale. Il s'agit en effet de définir une seule politique cohérente, celle qu'attendent tous les députés, comme en ont témoigné les travaux en commission. Les idées et les aspirations sont manifestement communes, l'occasion est donc excellente de rassembler les Français autour d'un projet commun.

Par un premier projet, nous avons affirmé notre volonté de dynamiser et d'équilibrer le territoire. Vous nous dites qui va le faire. La loi Chevènement nous donne donc la possibilité d'atteindre les objectifs de la loi Voynet.

L'essentiel, on l'a compris, est l'intercommunalité. Aujourd'hui deux France coexistent. Celle des 17 000 communes avec leur 31 millions d'habitants regroupés dans un cadre intercommunal ; les autres qui piétinent. Nous voulons mettre fin à cette inégalité qui entraîne des retards.

La communauté de communes permettra d'aménager le pays ; la communauté d'agglomération améliorera les chances des aires urbaines. M. Balligand a bien oeuvré. Il n'y aura pas inégalité de traitement. Mais si pour les communautés d'agglomération, la dotation incitative est de 250 F par habitant, on ne parle que de 150 F pour les communautés de communes. Certes les charges sont moindres. Mais aller jusqu'à 200 F serait très incitatif -plus efficace même qu'une loi- pour bien des SIVOM qui hésitent à franchir le pas.

En second lieu, l'organisation territoriale favorisera le développement local si l'on s'appuie sur la vocation touristique de la France. Les pouvoirs publics peuvent jouer un grand rôle car l'économie touristique est partenariale, associant dynamisme public et privé. Afin d'actualiser des textes souvent vieux de 50 ans, j'ai proposé une organisation territoriale de l'économie touristique autour de 1 500 à 2 000 pôles d'économie touristique qui existent déjà. Je remettrai ce travail à vos collaborateurs.

Donnez-nous des raisons d'espérer et de nous regrouper afin que ce ne soit plus deux France mais une seule France qui aborde le prochain siècle.

M. Daniel Vachez - Les inégalités sociales, économiques, culturelles s'inscrivent très profondément dans les territoires.

En retour, ces déséquilibres graves contribuent à aggraver ces inégalités, renforçant les ségrégations, voire l'exclusion de certains habitants. Aussi faut-il mieux organiser la ville pour maîtriser son devenir sans céder à la force injuste du marché.

Dans une France marquée par le morcellement communal, l'intercommunalité permet une conduite plus rationnelle des politiques locales et donc plus soucieuse des deniers publics. On sait le gâchis que constituent certains aménagements dictés par une vision étriquée des compétences communales, alors que les besoins réels dépassent les frontières des communes.

Mais l'intercommunalité est aussi gage de solidarité urbaine car une plus grande justice sociale nécessite une lutte renforcée contre les inégalités spatiales.

Le chemin parcouru n'est pas négligeable. Près de la moitié des communes sont aujourd'hui associées dans des structures de coopération intercommunale à fiscalité propre. Il fallait aller plus loin pour promouvoir une véritable intercommunalité de projet, notamment dans les zones fortement urbanisées qui concentrent la plupart des déséquilibres. Ce texte donne un second souffle à l'intercommunalité.

Les structures existantes sont simplifiées, les règles de fonctionnement unifiées. C'était indispensable.

Le versement d'une dotation d'un montant significatif incitera fortement à une intercommunalité intégrée et la taxe professionnelle d'agglomération sera l'instrument privilégié d'une véritable solidarité intercommunale. La redéfinition du mode de calcul du coefficient d'intégration fiscale permettra de mieux moduler l'aide de l'Etat en fonction des compétences réellement exercées.

Mais je regrette que les villes nouvelles soient les grandes oubliées de ce projet. Avec les communautés urbaines, les agglomérations nouvelles qui regroupent un million d'habitants constituent la forme la plus avancée de coopération intercommunale ; elles sont dotées depuis longtemps d'une taxe professionnelle unique et d'une très large délégation de compétences.

Or on évoque la fin des villes nouvelles ; Evry et Saint-Quentin-en-Yvelines sont appelées à sortir à brève échéance du dispositif. Il faut envisager leur avenir juridique et financier.

Les élus des syndicats d'agglomération nouvelle, les SAN, ne revendiquent pas le maintien d'un statut exorbitant du droit commun. Mais ils tiennent à préserver les acquis de vingt-cinq ans de coopération et il serait paradoxal qu'un projet dont la vocation première est de renforcer cette coopération affaiblisse ceux qui la pratiquent déjà.

L'assemblée des élus des villes nouvelles s'était prononcée en faveur du statut des communautés urbaines. La fixation à 500 000 habitants du seuil requis pour la création de nouvelles communautés urbaines semble, a priori, exclure cette possibilité.

Il importe que le statut retenu tienne compte de l'histoire et de l'identité des villes nouvelles. Mon groupe a déposé des amendements pour combler le vide juridique actuel. Je souhaite qu'ils soient pris en considération. Mais ils ne règlent pas l'ensemble des problèmes auxquels sont confrontés les SAN et, avant tout, la question du financement.

Les dotations affectées aux futures communautés d'agglomération qui, en l'état actuel de la réflexion, succéderaient aux SAN se situent bien en deçà des besoins.

La situation des villes nouvelles est constrastée. Certaines sont achevées, d'autres sont encore en plein essor. Il leur faut investir, s'équiper, au prix d'un gros effort financier et de l'endettement. Depuis leur origine, l'Etat les a beaucoup soutenues. Mais ce soutien s'amenuise régulièrement. J'avais interrogé au printemps dernier le ministre de l'équipement sur la disparition de la dotation globale d'équipement des agglomérations nouvelles. Il avait reconnu la nécessité de poursuivre l'aide aux villes nouvelles n'ayant pas encore atteint l'équilibre et s'était engagé à rechercher une solution. Depuis, la suppression de la part salariale de la taxe professionnelle a renforcé l'inquiétude des élus. Il convient donc d'être particulièrement attentif au maintien du niveau des dotations dont bénéficient les villes nouvelles.

Ces villes ont été les pionnières de l'intercommunalité. Elles ont très largement atteint les objectifs qui leur étaient assignés : elles ont répondu à la forte demande de logements, ont accueilli une population très diversifiée et souvent modeste, ont su concilier développement et solidarité économique tout en offrant un cadre de vie agréable et des services publics multiples.

Le Gouvernement doit leur fournir les assurances juridiques et financières qu'elles pourront achever leur développement dans la fidélité à l'esprit qui a présidé à leur création : la recherche d'un meilleur équilibre social, économique, urbain et environnemental. Ce même esprit peut contribuer à bâtir cette intercommunalité d'agglomération que souhaite le Gouvernement (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Dominique Paillé - Le projet a fait naître une grande attente chez les élus locaux. Sa lecture risque de susciter beaucoup de regrets et de frustrations.

En premier lieu, il manque de souffle : il ne tente pas de rationaliser la cartographie communale qui, avec plus de 36 000 communes, est à mes yeux surchargée ; il ne rationalise pas davantage les structures intercommunales auxquelles, en réalité, il ne change rien. En second lieu, il ne fait pas réellement progresser la démocratie : il creuse un peu plus le déséquilibre entre ville et campagne, il ne procure pas aux organismes intercommunaux la légitimité du suffrage universel, si bien que les maires, dont les prérogatives diminuent, deviennent les seuls dépositaires de l'autorité issue de l'élection directe, alors que les présidents de structures intercommunales, dont les pouvoirs vont croissant, ne sont pas dans la même situation.

Enfin, votre texte recèle une lacune très dommageable pour les 8 000 communes concernées par l'application de la loi Marcellin de 1971, créant des communes fusionnées-associées. Beaucoup de dissociations ont été demandées, et le plus souvent accordées, par les préfets. Mais le traitement de ces dossiers n'est pas égal sur l'ensemble du territoire, et vous n'apportez aucune solution à cette difficulté. Voilà un oubli très regrettable, et j'ai déposé un amendement pour le réparer. Il s'agit de permettre aux communes qui veulent défusionner de le faire avant l'échéance de 2007. Elles seraient alors automatiquement intégrées dans des communautés de communes à TPU, afin de rendre la transition moins brutale. Je vous demande d'étudier de près cette proposition. En zone rurale, le rapporteur le sait bien, cette difficulté se rencontre souvent et crée des situations ingérables (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF, du groupe DL et du groupe du RPR).

M. Roland Garrigues - Je traiterai du volet fiscal et financier du projet. Celui-ci tend à corriger le coefficient d'intégration fiscale des dépenses de transfert, afin qu'il reflète véritablement le degré d'intégration communale et permette de partager équitablement la DGF.

La communauté d'agglomération exercera de plein droit quatre compétences dévolues aux communes membres : développement économique, aménagement de l'espace, logement et habitat, politique de la ville. Elle doit également choisir deux compétences complémentaires, par exemple la collecte et le traitement des déchets. Le choix de cette compétence ne devrait pas entraîner une réduction du coefficient d'intégration fiscale des éventuelles dépenses de transfert correspondant à des degrés plus importants d'intercommunalité. En effet, si la communauté d'agglomération peut être le niveau le mieux adapté pour réaliser la collecte des ordures ménagères, il faut, pour la compétence élimination des déchets, ménager la possibilité d'une coopération entre les EPCI à l'échelon départemental ou interdépartemental. Il paraît donc opportun que les participations des EPCI à des activités de ce genre soient prises en considération dans le calcul de la DGF.

En effet, me semble-t-il, les compétences liées à l'environnement, prioritaires pour le pays, ne doivent pas être considérées comme des compétences de transfert, et doivent donc être incluses dans le calcul du coefficient d'intégration fiscale.

Les petites communes rurales rencontrent des difficultés quand elles adhèrent à un EPCI qui opte pour une fiscalité additionnelle et dont la ville-centre possède une structure fiscale très différente de la leur. C'est le cas à Montauban, où les communes rurales ont des taux de TP plus faibles que ceux de la ville-centre. Une solution pourrait consister à s'affranchir de la contrainte du lien des taux, le législateur autorisant une commune à procéder à des variations différenciées de ses taux dans la limite des taux votés l'année précédente (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Rudy Salles - Le principe de l'intercommunalité ne peut pas être combattu. En effet, les problèmes complexes auxquels sont de plus en plus confrontés les élus locaux imposent de trouver des solutions qui ne se situent parfois qu'à un échelon intercommunal. Déjà 17 760 communes sur 36 763 sont associées dans des structures de coopération intercommunale à fiscalité propre, soit 31,7 millions de citoyens.

Les mesures proposées correspondent-elles aux attentes des collectivités locales ?

Un point capital, sur lequel l'Association des maires de France a émis un avis, est la procédure d'acceptation pour adhérer à un EPCI. En effet, après l'initiative prise par une ou plusieurs communes ou par le préfet, les conseils municipaux auront trois mois pour se prononcer sur l'arrêté. A défaut, le silence vaudra acceptation. L'intercommunalité suppose un engagement clair et non par défaut. Aussi le silence devrait-il signifier une décision favorable.

L'innovation de ce projet réside dans la création des "communautés d'agglomération" avec un seuil de population de 50 000 habitants et une ville-centre de 15 000. Vous y ajoutez une incitation financière de 250 F de DGF par habitant.

Cependant des communes qui se sont déjà regroupées en communautés de communes ne pourront pas bénéficier de ces avantages financiers, par exemple des communes de banlieue placées en lisière d'une grande ville. Dans ce cas, l'intercommunalité plus large ne pourra se réaliser qu'à partir du moment où la pratique de l'intercommunalité aura démontré que les intérêts de chacun seront sauvegardés. Il faut pouvoir encourager la création de structures intercommunales même si les périmètres semblent au départ moins ambitieux.

Aussi conviendrait-il d'abaisser le seuil de la communauté d'agglomération à 20 000 habitants et de supprimer la notion de ville-centre.

En effet, le moteur de la communauté d'agglomération doit être davantage la notion de projet commun que celle de population et de commune centre.

Les élus locaux sont dubitatifs quant à la pérennité des 250 F de DGF par habitant : il ne serait pas inutile d'inscrire dans la loi une garantie décennale. D'une façon générale, ils se demandent, toutes tendances confondues, pourquoi l'Etat continue de prélever 80 % des recettes fiscales, alors que les collectivités locales assurent 80 % des investissements publics. Par ailleurs, le projet ne comporte aucune disposition de nature à réduire la complexité administrative qui leur rend la vie si difficile.

J'espère que notre discussion ne sera pas seulement théorique, mais répondra aux attentes des élus et des électeurs (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF, du groupe RPR et du groupe DL).

Mme Nicole Bricq - Ce projet constitue, après les lois de 1982 et de 1992, une nouvelle étape, plus modeste en apparence, mais qui préfigure, je le crois, le paysage administratif des quinze années à venir. Il favorise, grâce à la TPU, la péréquation à une échelle permettant de concilier équité et efficacité et de mettre fin à la concurrence stupide et improductive entre communes.

Les mécanismes d'incitation sont toutefois insuffisants dans le cas de l'Ile-de-France, où l'intercommunalité est très peu répandue, bien que les problèmes s'y posent dans un cadre qui dépasse largement celui de la commune, et même celui du groupement de communes. Je crains que l'article 57 ne suffise pas à inverser la tendance actuelle au creusement des inégalités territoriales, pis : au marquage social d'aires urbaines entières. Le risque est grand que les villes riches s'allient entre elles, laissant les villes pauvres à l'écart, dans une région qui s'enrichit globalement, mais où la pauvreté s'étend.

La politique de la ville ne sera que curative si la péréquation ne s'exerce pas au niveau pertinent. La voie choisie est celle de la communauté d'agglomération, dont les orateurs franciliens, quelle que soit leur appartenance politique, ont dit qu'elle se heurterait, dans leur région, à des difficultés d'application. Si nous devions considérer, après réflexion, que le niveau pertinent, en Ile-de-France, c'est la région elle-même, il nous faudrait instituer une TPU régionale, sans exclure, le cas échéant, de lever le tabou de l'obligation.

Le projet du Gouvernement ouvre la voie. Nous le soutenons, mais nous lui demandons de poursuivre la réflexion sur le cas particulier de l'Ile-de-France (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Alain Barrau - Plus d'un Français sur deux vit dans une commune qui fait partie d'une structure intercommunale, et c'est instruire un mauvais procès au projet que de lui reprocher d'intéresser davantage les villes que les campagnes : si les communautés de communes, créées par la loi de 1992, sont déjà au nombre de 1241, les communautés de villes ne sont que cinq ! Il fallait donc proposer une nouvelle formule, et confirmer le caractère volontaire de la coopération intercommunale, car rien ne se fera contre les communes.

C'est la première fois depuis longtemps, soulignons-le, qu'un projet de loi comporte une mesure de financement des collectivités par l'Etat - et 500 millions de francs par an jusqu'en 2005, ce n'est pas rien ! C'est un signal important, et un démenti apporté à ceux qui parlent de désengagement.

La démocratie a tout à gagner à la transparence, et le groupe socialiste soutiendra donc l'amendement de M. Darne sur la désignation des représentants des communes dans les structures intercommunales. Pour autant, il ne serait pas bon d'adopter un mode d'élection qui assure une trop forte prééminence de la commune-centre.

Une question, pour finir : comment la dimension intercommunale des contrats locaux de sécurité sera-t-elle prise en compte, étant donné les importants pouvoirs de police des maires ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. Jean Espilondo - J'introduirai mon propos par un exemple emprunté à ce que les économistes appellent la "théorie des jeux", et qui devrait intéresser, à plus d'un titre, le ministre de l'intérieur. Imaginons deux meurtriers arrêtés, interrogés séparément et placés l'un comme l'autre devant l'alternative suivante : si tous deux nient, ils seront libérés ; si tous deux avouent, ils seront condamnés à une peine de prison ; mais si l'un nie tandis que l'autre avoue, ce dernier sera gracié et l'autre exécuté. Leur intérêt collectif est donc de nier, mais leur intérêt individuel leur commande, en l'absence de communication possible, d'avouer pour échapper à l'exécution. Le résultat est que tous deux resteront en prison : la morale y trouve peut-être son compte, mais non leur intérêt commun (Sourires).

Les communes sont placées dans une situation peu différente. Faute de coopération, elles se privent des ressources que leur apporterait le développement stimulé par l'intercommunalité, et tout l'enjeu du projet est de favoriser le dialogue, la coopération et la solidarité entre elles. La nécessité est particulièrement criante en zone urbaine, où le rendez-vous de l'intercommunalité a été manqué, de sorte que les communes sont aujourd'hui bien incapables de régler leurs problèmes fonciers et de partager équitablement entre elles charges et ressources. C'est ce retard que vise à combler la loi. Encore faut-il s'y prendre intelligemment. Combien de fois n'a-t-on pas reproché au législateur de brouiller le droit au lieu de le clarifier, et de polluer les codes par des déclarations d'intention ? Or ce projet a le mérite de la simplicité -si l'on fait abstraction du caractère technique de beaucoup de dispositions. Il définit un cadre clair, grâce auquel les élus locaux pourront assurer pleinement leurs responsabilités.

Il est cependant deux problèmes sur lesquels nous aurions tout intérêt à tirer les leçons de l'expérience. Le premier est celui du territoire où s'exerce l'intercommunalité : rien n'oblige actuellement les maires à définir un territoire pertinent. Doit-on confier ce soin à la DATAR ou s'en remettre aux aires urbaines telles que les définit l'INSEE ? Certainement pas, mais les négociations entre les communes doivent sur ce point faire place à l'intérêt général et au bon sens et j'approuve donc l'article 21 qui confie au préfet d'importantes responsabilités dans la définition des périmètres, tout en respectant les prérogatives des communes. J'attends simplement des préfets qu'ils usent de ce pouvoir et qu'ils mettent les élus face à leurs propres responsabilités.

La démocratie dans les EPCI doit également retenir toute notre attention. Rien dans le projet actuel ne garantit que les oppositions municipales seront représentées dans les organes de débat, sauf dans le cas des communautés urbaines. Or l'expérience montre que nous ne pourrons pas sur ce point nous en remettre au bon vouloir des maires et des majorités. A cet égard, le développement de l'intercommunalité risque de se traduire par un recul de la démocratie. Il nous faut par conséquent organiser une responsabilité effective des délégués devant leur conseil municipal.

Faut-il pour autant prévoir pour eux une élection directe ? Cette révolution se fera sans doute un jour mais elle serait prématurée aujourd'hui, hormis peut-être pour des communautés urbaines. En revanche, il est urgent d'assurer la pluralité politique des délégués désignés par une commune, comme la commission l'a décidé en retenant le principe d'un scrutin de liste lorsque la commune a plus de 3 500 habitants. En 1982, la gauche a introduit le débat démocratique au sein des conseils municipaux : le moment est venu de faire de même dans les conseils intercommunaux.

M. Bernard Roman - Très bien !

M. Jean Espilondo - Nous ne devons pas avoir peur du débat : l'intercommunalité ne peut qu'y gagner. L'absence de communication menait les deux prisonniers à leur perte ; l'absence de dialogue entre les communes peut avoir le même effet. Quand sont en jeu l'urbanisme, le développement économique, les équipements et les services, la perte risque d'être lourde ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. Bernard Roman - Je ne crois pas que ce projet soit un texte important, mais il pourrait bien devenir un texte fondateur ! Il ouvre en effet des perspectives pour une rénovation de notre République. Cependant, il suscite aussi quelques interrogations et, chez moi à tout le moins, une insatisfaction.

Les perspectives d'abord : un espoir s'ouvre de sortir de l'émiettement communal, si 2 000 à 3 000 structures intercommunales parviennent à se substituer aux 36 000 lieux de décision actuels. Ce projet peut aussi redonner une chance de développement cohérent aux 361 aires urbaines définies par l'INSEE, en leur procurant un outil de décision.

En outre -bravo, Monsieur le ministre !-, toutes les communes qui souhaiteront se rapprocher disposeront de 500 millions supplémentaires à consacrer à leur développement. Beaucoup de vos prédécesseurs auraient souhaité disposer de cette manne à l'appui de leurs efforts pour structurer le territoire !

M. Gérard, Gouzes, rapporteur de la commission des lois - Y compris votre prédécesseur immédiat !

M. Bernard Roman - Et quand M. Perben parle d'un impôt qui ne serait pas honnête et qu'il nous reproche de taxer à un niveau de collectivité pour redistribuer à un autre, il devrait bien se souvenir que les communes paient un contingent d'aide sociale pour financer l'action des conseils généraux !

Enfin, dernière perspective ouverte, le développement économique de demain pourra se structurer autour d'une douzaine de ce qu'on aurait appelé naguère des grandes métropoles régionales d'équilibre.

Mais ce projet suscite aussi des interrogations, sinon des inquiétudes. A ces interrogations, nous sentons bien qu'il faudra essayer de répondre à terme.

Ainsi, me risquerai-je à avancer que 36 000 communes, cinq niveaux d'administration et 22 régions, c'est trop ? Lorsqu'on pose la question devant des responsables politiques, de droite ou de gauche, on ne recueille souvent que des acquiescements polis. Il est en effet bien difficile d'avancer des solutions. Mais on se fait encore plus souvent traiter de communicide, on est accusé de vouloir faire disparaître ce que même la Révolution avait laissé subsister... Or ce n'est pas de cela qu'il s'agit. Le creuset républicain que sont les communes, leur identité et leur culture doivent être préservés mais cela ne doit pas empêcher de repenser demain l'organisation de l'administration territoriale et de nous interroger sur le nombre de niveaux.

J'ai bien conscience que ce débat, qui n'est pas d'actualité, est des plus difficiles : aucun gouvernement ne s'est risqué à supprimer d'office une de ces communes qui, ne disposant pas même de neuf habitants, doivent tous les six ans désigner neuf conseillers municipaux. C'est dire que nous sommes attachés à cette identité communale puisque nous la laissons subsister même quand elle ne concerne plus les citoyens ! Pour autant, sachons qu'un jour il faudra nous attaquer à la question.

J'en viens au motif d'insatisfaction. Vous ne serez pas étonné, Monsieur le ministre, car M. Darne l'a déjà évoqué. Par ce projet, nous allons organiser de nouveaux lieux de pouvoir, des assemblées qui agiront sur des territoires étendus et peuplés, qui lèveront l'impôt, mais qui ne détiendront qu'une légitimité au deuxième degré. Nous devons nous en préoccuper aujourd'hui si nous voulons éviter de créer une organisation capable d'animer le développement territorial mais totalement privée de légitimité démocratique. Dans notre démocratie représentative où le peuple mandate, contrôle et sanctionne, comment justifier qu'une assemblée échappe à la règle ? Il suffit de se reporter au dictionnaire : l'Assemblée y est définie comme "l'organe délibérant élu par le peuple pour le représenter".

Je sais que les choses ne sont pas si simples. D'un côté, on fait appel au volontarisme des élus locaux et de l'autre on remettrait en cause leur légitimité ; d'un côté, on les incite à une démarche fédérative et de l'autre on diluerait l'identité communale dans une entité supracommunale ; d'un côté on se plaint du nombre trop élevé de niveaux d'administration, de l'autre on en rajouterait un nouveau !

Vous avez dit ce matin, Monsieur le ministre, qu'il fallait laisser le temps à l'intercommunalité d'affirmer son existence et sa compétence avant de proposer des élections au premier degré. Je comprends ces arguments. Mais justement, il faut avancer vers plus de légitimité démocratique pour les communautés urbaines existantes, qui ont déjà fait leurs preuves : elles ont trente ans, elles disposent de budgets importants, parfois supérieurs à celui du département ou de la région ; il faut donc y impliquer davantage les citoyens.

J'ai proposé des amendements en ce sens, d'autres collègues également. Je souhaite que le Gouvernement fasse dès aujourd'hui un pas dans ce sens. L'élection proposée tend à la fois à afficher l'existence de ces nouvelles entités et à donner leur place aux citoyens.

Entre la proposition d'élire partout les conseils communautaires selon le mode de scrutin des municipales, ce qui constituerait une révolution, et le maintien en l'état du texte, il y a des solutions intermédiaires, des avancées possibles.

Ce texte est un très bon texte. Pour en faire un grand texte, il n'y manque que cette dimension citoyenne. Nous connaissons tous votre attachement, Monsieur le ministre, à cette dimension citoyenne. Nous avons donc confiance : ce texte sera un grand texte (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Jean-Pierre Balligand - Ce texte va constituer une vraie avancée dans l'histoire de la décentralisation.

L'intercommunalité a débuté par les SIVU, les SIVOM, qui ont permis de doter les communes de moyens d'aménagement.

Cela a été important. Mais quand M. Marcellin a essayé de modifier la carte administrative et d'aller vers la fusion des communes, les Français n'en ont pas voulu. S'est alors construite une autre forme d'intercommunalité, plus large, englobant des compétences économiques : c'est la grande avancée de la loi du 6 février 1992.

Surprise, ce texte élaboré dans une grande entente -M. Poujade s'en souvient sûrement- n'a été voté qu'à deux voix de majorité ; il est vrai qu'on était à la veille d'élections législatives !

Son application a été un grand succès. L'intercommunalité à fiscalité propre s'est beaucoup développée -mais principalement dans le milieu rural et les petites villes : il y a actuellement plus de 1 660 structures à fiscalité propre dans notre pays.

Soyons honnêtes : pour faire passer ce texte, nous en avons un peu affaibli la volonté initiale et du coup les périmètres d'intercommunalité n'ont pas toujours été d'une pertinence totale.

Néanmoins le bilan des six années d'application de la loi est globalement positif. Mais c'est surtout la France des clochers qui s'est mobilisée, alors que la France des villes s'est complètement bloquée. Et quand elle ne s'est pas bloquée, le résultat frôle le scandale : je pense à deux communautés de communes dans les Hauts-de-Seine, celle de notre collègue Santini et celle de Boulogne-Billancourt, qui ont surtout cherché à profiter des avantages de la loi et qui, à elles seules, captent 73 % de la taxe professionnelle du département.

Il faut corriger tout cela. En effet, le rural que je suis est très inquiet de l'évolution du monde urbain. Il faut agir, mais pour cela, il ne suffit pas d'appeler toujours l'Etat au secours. Quand, dans des secteurs où se côtoient l'excessive richesse et l'excessive pauvreté, les communes refusent de mutualiser leurs moyens, il n'est pas étonnant que des ghettos sociaux se forment.

Il faut aller vers une meilleure cohésion territoriale et l'agglomération doit en être l'outil, grâce à une structuration juridique et à une taxe professionnelle unique. Cette démarche excellente devrait être approuvée sur tous les bancs.

Si les secteurs ruraux se sont mobilisés, ce n'est pas parce qu'ils sont plus évolués, mais parce qu'ils sont les plus pauvres. Il leur fallait réunir leurs forces et c'est ainsi qu'en certains endroits défavorisés des hommes ont réussi à inverser la tendance à la dégradation.

Faisons la même chose pour le monde urbain !

Monsieur le ministre, à partir de cette appréciation positive de votre démarche, je voudrais vous poser trois questions.

Votre dispositif est fondé sur le volontariat, assorti d'une carotte financière, la DGF à 250 F. Mais cela suffira-t-il à accélérer la constitution de communautés d'agglomération ? Il faudra tirer le bilan dans quatre ou cinq ans et j'espère que le monde urbain, devant la gravité de la situation, acceptera de réunir ses forces, notamment financières.

Procéder sur la base du volontariat a du bon, mais il doit être dit que si les résultats obtenus de la sorte ne sont pas suffisamment convaincants, le législateur devra, un jour, faire son travail.

J'en viens, maintenant, à l'avenir de la décentralisation. Le Gouvernement nous propose aujourd'hui un dispositif composé de communauté de communes, de communauté d'agglomération et de communautés urbaines. Fort bien. Toutefois, le processus de décentralisation reste inachevé, et il le demeurera aussi longtemps que la vraie question n'aura pas été abordée de front. Or la vraie question n'est pas tant celle de la simplification administrative que nous sommes si nombreux -moi compris ! - à appeler de nos voeux, que celle de la spécialisation des compétences. Les élus de tous bords partagent la même conviction : il est impossible que l'on continue plus longtemps à traiter des mêmes problèmes à tous les niveaux. Prenons l'exemple de l'action économique, devenue impossible à gérer tant les compétences se chevauchent ! Il est donc impératif d'identifier des niveaux de compétence par collectivité ou, à la rigueur, par couple de collectivités.

Il reste, aussi, à garantir la citoyenneté dans les territoires nouvellement définis. M. Roman le romantique a raison, forcément raison : nous nous dirigeons vers une élection au suffrage universel, mais les esprit ne sont pas mûrs, et en décider maintenant risquerait de gripper le mécanisme de l'intercommunalité que l'on s'attache justement à promouvoir. Il convient donc, entre-temps, de désigner clairement qui siège à la communauté de communes. Cela ne peut se faire dans les communes dont la population est inférieure à 3 500 habitants, puisqu'il n'y a pas de scrutin de liste mais, pour les villes plus importantes, pourquoi pas ?

La République tire sa force d'être fondée sur les communes, lieux d'identification pour tous les citoyens. Pour la moderniser, il faut créer un aussi fort sentiment d'appartenance au niveau intercommunal et permettre que la sanction des électeurs s'exerce, au travers d'un nouveau rendez-vous citoyen, pour les délégués intercommunaux, en indiquant ceux qui, des futurs élus municipaux, seront appelés à siéger au sein des communautés nouvelles (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe RCV).

M. Léonce Deprez - Très bien !

La discussion générale est close.

Suspendue à 18 heures 10, la séance est reprise à 18 heures 15.


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CONSTITUTION DE DEUX CMP

M. le Président - M. le Premier ministre m'informe que conformément à l'article 45, alinéa 2, de la Constitution, il a décidé de provoquer la réunion de deux commissions mixtes paritaires chargées de proposer, l'une un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi organique relatif à la Nouvelle-Calédonie, l'autre un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif à la Nouvelle-Calédonie.


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DÉCLARATION D'URGENCE

M. le Président - M. le Premier ministre m'informe que le Gouvernement déclare l'urgence du projet de loi relatif à la modernisation et au développement du service public de l'électricité.

Acte est donné de cette communication.


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COOPÉRATION INTERCOMMUNALE (suite)

MOTION DE RENVOI EN COMMISSION

M. le Président - J'ai reçu de M. Douste-Blazy et des membres du groupe UDF une motion de renvoi en commission déposée en application de l'article 91, alinéa 6, du Règlement.

M. Jean-Jacques Weber - Cette loi que le ministre, son remplaçant, leurs missi dominici ont abondamment exposée serait donc ce que la France attendait, l'avancée significative vers une organisation territoriale plus cohérente, plus juste fiscalement, vers une décentralisation plus aboutie, une meilleure intégration européenne.

Pierre Méhaignerie l'a dit, il y a dans ce projet des motifs de satisfaction, mais aussi de déception. Le pays attendait une simplification et une meilleure répartition des compétences. Malgré son application, la commission qui a déposé plus de cent amendements, n'a pu convaincre ceux qui, comme moi, attendaient autre chose qu'une réforme inachevée opposant France urbaine et France rurale.

Cette motion se justifierait amplement par toute absence de simplification dans votre texte. Bien plus, cette nuit, votre majorité a donné un statut de syndicat mixte aux pays. N'était-ce pas déjà assez compliqué ?

D'ailleurs, est-il acceptable qu'après avoir discuté au milieu de la nuit dernière le texte, mal préparé et discutable, de Mme Voynet sur l'aménagement du territoire, que nous abordions aujourd'hui le vôtre sans le moindre temps de réflexion ? Pourquoi pas le projet Zuccarelli, dans la foulée ! Nous protestons contre cette précipitation. Cherche-t-on à émousser notre vigilance ? L'Association des maires de France souhaitait qu'on simplifie l'intercommunalité mais aussi qu'on l'articule bien avec la politique d'aménagement du territoire. Pour ce faire, n'eût-il pas été plus sage de prendre le recul nécessaire entre le texte de Mme Voynet et celui de M. Chevènement ? Le renvoi en commission nous le permettra. Notre Assemblée ne doit pas se laisser imposer un calendrier aussi contraignant. Il y va de l'avenir de nos 36 000 communes.

Plus grave, on semble vouloir délibérément sous-informer le Parlement sur les implications d'une telle réforme. Où sont les simulations, les statistiques ? Peut-on se contenter de la liste des 141 communes éligibles à la communauté d'agglomération, qui dessine visiblement de nouveaux fiefs électoraux pour la majorité ?

De façon moins polémique, nous n'appréhendons pas clairement ce que sera l'évolution de la taxe professionnelle. La loi de finances pour 1999 a supprimé la part salariale de l'assiette. Vous voulez réduire l'effort demandé aux entreprises sans compensation intégrale pour les communes. La suppression de la TP en 2010 ne semble même plus une simple hypothèse d'école ! Quelle est votre position ?

A l'impôt sera substituée une subvention dont l'Etat décidera chaque année le montant en fonction de ses difficultés. A terme, les élus n'auront plus leur mot à dire sur plus de la moitié des ressources locales. A tout le moins, la politique de Bercy contredit celle du ministre de l'intérieur. Comment dès lors appréhender sérieusement les vrais enjeux de la politique intercommunale ?

Il aurait fallu mener un débat de fond sur le financement des EPCI et constituer une commission ad hoc pour aller au fond des choses. Les 500 millions prévus suffiront-ils pour verser les 250 F par habitant dans les communautés d'agglomération et les 150 F dans les communautés de communes ? L'Etat va-t-il une nouvelle fois amputer la DCTP ? Le renvoi en commission permettrait d'y voir clair.

Et quel sera l'impact de cette réforme sur les autres collectivités ? Si l'on veut faire disparaître le département, qu'on le dise clairement. Mais le problème serait de nature constitutionnelle.

Marc Daubresse a posé le problème, ainsi que celui de la clarification des compétences. Francis Delattre a aussi souligné que le rôle excessif des préfets dans la délimitation des nouveaux ensembles contrevient au principe de libre administration des collectivités. Marc Censi, le président de l'assemblée des districts, qui n'est pas opposé à ce projet, a rappelé également que l'intercommunalité devait rester un libre choix, une démarche exemplaire de démocratie de proximité et de solidarité.

Conseiller municipal depuis 1971, maire depuis 16 ans, j'ai connu bien des projets, à commencer par celui d'Olivier Guichard, pour lutter contre "l'éparpillement communal".

L'expérience enseigne qu'on ne fait rien de bon de façon autoritaire. Les exemples étrangers ne sont qu'indicatifs. Les Français sont attachés à leur commune, communauté de vie et de destin, espace de liberté et de démocratie. La plus petite commune est un bien précieux et la loi doit la préserver.

Je n'ai pas trouvé dans votre texte l'exigence du libre choix pour les communes. Ainsi le silence des conseils municipaux vaudrait acceptation, à l'opposé de toutes nos traditions, et rien n'est organisé pour permettre aux communes de mesurer concrètement, et dans le temps, les conséquences de leur refus ou de leur acceptation. Voilà encore un motif de renvoi en commission.

Portent également atteinte à la liberté des communes l'exigence de la continuité territoriale, qui va soumettre les élus à des pressions énormes, ou encore le droit d'initiative des préfets, qui montre le caractère républicain, sans doute, mais très musclé de votre texte.

Il ne fera pas bon être opposant minoritaire à un projet de communauté d'agglomération, mettant aux prises une ville de 100 000 habitants, comme Mulhouse, et quelques communes réticentes, comme la mienne, avec ses 5 000 habitants. Surtout après que la commission a adopté hier un amendement introduit subrepticement par Jean-Marie Bockel, et portant atteinte aux principes de la libre détermination et de l'égalité devant la loi.

Vous avez parlé de cohérence. On voit ce qu'il en est. Vous invoquez la simplification : il n'est pas sûr que les Français comprennent bien de quoi il s'agit, avec le nouvel organisme d'intercommunalité qui s'ajoute à tant d'autres, même si le modèle unique d'administration que vous préconisez est un progrès.

Quant à la justice fiscale, une expérimentation serait bien nécessaire pour mesurer la réalité du progrès annoncé.

En fait, l'objectif essentiel de votre projet est d'ordre financier, comme vous l'écrivez vous-même : "Alors que les charges financières des agglomérations s'accroissent, celles-ci éprouvent les plus grandes difficultés à développer leurs ressources." Et votre projet en tire les conséquences. Vous répondez ainsi au souci des maires des grandes villes de se procurer de nouveaux revenus, alors que leur gestion a pu être déficiente et conduire à un endettement massif qu'il s'agira de faire en partie supporter aux communes périphériques.

Présenter la TPU comme un pilier du développement intercommunal est une affirmation contestable, qui peut réserver de très grosses surprises dans son application. Comment le taux de TP évoluera-t-il ? Quelle compensation la commune intégrée recevra-t-elle ? Comment remboursera-t-elle demain ses emprunts ? Qu'adviendra-t-il des entreprises attirées par la perspective de taux fiscaux intéressants ?

Voilà encore de graves questions qui motivent ma demande de renvoi en commission. En la votant, nous aiderons le ministre à perfectionner son projet, et nous apaiserons bien des inquiétudes.

M. le Rapporteur - Cette demande de renvoi en commission m'affecte personnellement. Je regrette que M. Weber ne nous ait pas présenté tous ses arguments en commission. Nous lui aurions répondu.

Il a néanmoins relevé que la commission avait bien travaillé, en adoptant 200 amendements sur 600 déposés. Nous avons tenu quatre séances fournies et fructueuses sur un texte étrangement consensuel, puisqu'il a suscité de part et d'autre des avis contradictoires et convergents, chacun s'exprimant en fonction de son expérience.

Vous considérez que le texte alimente l'opposition entre France rurale et France urbaine. Pourtant, moi qui suis un rural profond (Sourires), ce texte me satisfait très largement. Soyons clairs, les communautés de communes, quelles qu'elles soient, vont bénéficier de la manne de l'Etat. Ceux qui opposent les rats des villes aux rats des champs obéissent à d'autres préoccupations.

Vous déplorez l'absence de simplification. C'est que le sujet n'est pas simple, mais tout élu, au bout de quelques mois, me paraît capable d'intégrer les notions dont nous débattons. Si nous, élus modestes de la France profonde, parvenons à comprendre, que dire de grands élus comme vous l'êtes à Mulhouse !

M. Jean-Jacques Weber - Merci !

M. le Rapporteur - J'ai retrouvé un texte rattaché à la séance du 22 avril 1997, ce même jour où le Président de la République a eu la bonne idée de dissoudre l'Assemblée. La lecture de ce projet déposé par M. Perben, relatif au développement de la coopération intercommunale, montre que la simplification d'hier valait bien celle d'aujourd'hui. Si le texte de M. Perben était si complexe, c'est bien que la matière l'exige.

Vous n'êtes pas habilité, cher collègue, à vous exprimer seul au nom de l'AMF. Je fais moi aussi partie de cette association, ô combien précieuse pour nos communes.

Vous estimez que le projet Chevènement arrive brutalement après le projet Voynet. Il a pourtant été déposé en octobre dernier, et vous avez eu le temps de l'examiner, comme tant d'autres l'ont fait. Dans la réforme d'ensemble, le texte de Mme Voynet représente la préface, celui de M. Zuccarelli la conclusion, le corps principal étant constitué par celui d'aujourd'hui. Il n'existe aucune volonté de priver le Parlement d'information. Quant à votre proposition de créer une commission ad hoc, je vous réponds avec Clemenceau : la meilleure façon d'enterrer un problème, c'est de nommer une commission...

Ce projet est attendu. Il faut maintenant aller de l'avant. Qui parle de supprimer les conseils généraux ? En quoi le texte va-t-il contre l'autonomie des communes ? Nous sommes tous très attachés, vous le savez, à leur libre administration.

Alors, pourquoi avoir déposé cette motion ? Est-ce par esprit d'opposition systématique ? Sans doute est-ce dur d'être opposant ; je n'ai jamais eu cette chance.

Vous n'avez pas siégé en commission des lois, dont vous ne faites pas partie. L'article 38 du règlement dispose néanmoins que tout député peut assister aux réunions des commission dont il n'est pas membre. Nombre de vos collègues l'ont fait, et ont enrichi notre discussion, y compris par des amendements, dont nous avons accepté certains émanant de votre groupe.

M. Jean-Jacques Weber - Et de moi-même !

M. le Rapporteur - Enfin, le fait que vous ayez évoqué le cas de Mulhouse me donne l'occasion de redire mon hostilité à ce que le ministre nomme "campanilisme" : qui n'entend qu'une cloche n'entend qu'un son... Mais à voir les rangs clairsemés de l'opposition, je vois que vous n'avez guère convaincu vos amis de venir voter votre motion ! (Applaudissements et rires sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe RCV)

M. Léonce Deprez - Ce n'est pas gentil !

M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur - Le rapporteur vient de dire toutes les raisons pour lesquelles il ne convient pas de suivre M. Weber, que la nature même de l'exercice qu'il s'est imposé a conduit à tenir des propos excessifs. Ses collègues de l'opposition ont fait preuve d'une plus grande ouverture à l'égard d'un texte qu'ils semblent juger intéressant.

Comment ne pas voir, en effet, que ce que nous proposons va simplifier l'intercommunalité, en instituant un tronc commun de règles applicables aux EPCI ? MM. Pélissard, Saumade et Balligand ont souligné le grand nombre de niveaux d'administration et plaidé pour une clarification des compétences ; j'y serais favorable, si la logique du partenariat n'avait eu justement pour effet de les enchevêtrer. Reste qu'il y aura désormais trois formes principales de coopération : les communautés urbaines, les communautés d'agglomération et les communautés de communes.

Il n'y a pas lieu d'opposer l'urbain et le rural, et tel n'est évidemment pas l'état d'esprit du Gouvernement, qui veut au contraire aider les espaces ruraux à s'organiser mieux.

M. Balligand s'est demandé si le volontariat serait suffisant. C'est une vraie question, à laquelle j'ai répondu par prétérition en disant que le projet constituait un acte de confiance dans la capacité des élus à se hisser au niveau des enjeux. Nous reverrons la question dans cinq ans, mais pour l'heure, je m'en tiens à un pragmatisme girondin que certains me reprochent (Sourires), mais qui traduit l'attachement, communément partagé sur tous ces bancs, à la liberté d'administration des communes, si profondément enracinée dans notre histoire. La vie communale est en effet la première des écoles de démocratie.

La question de l'élection directe mérite également une réflexion approfondie. Si le Gouvernement n'a pas souhaité l'instaurer, c'est, comme l'a excellemment expliqué votre Rapporteur, pour ne pas créer un conflit de légitimité, qui serait source de blocages. Nous allons poursuivre néanmoins la réflexion, en gardant à l'esprit la souplesse à laquelle nous invite M. Perben : sans doute pourrons-nous avancer plus vite dans le cadre des communautés urbaines, formule déjà bien rodée, que dans celui des formules plus récemment créées, et dont nous risquerions de briser l'élan. Nous devrons veiller, de même, à ce que chaque commune reste maîtresse de ses choix : si elle devait désigner des délégués qui ne reflètent pas l'orientation de son conseil municipal, nul doute qu'elle ne coopérerait qu'à reculons...

D'aucuns se sont émus des prérogatives accordées au préfet en matière de périmètre. Un arrêt du Conseil d'Etat leur a pourtant reconnu, en 1996, un important pouvoir d'initiative et d'appréciation.

M. Vachez a posé la question de la transformation des syndicats d'agglomération nouvelle en communautés d'agglomération. Cette formule leur offre en effet un cadre juridique permettant d'évoluer vers le droit commun de l'intercommunalité, tout en préservant les acquis communautaires. La commission des lois a fait des propositions qui tiennent compte des différentes situations. Je crois que nous pourrons aller dans ce sens.

Autre grande question : celle du financement de la réforme. M. Carrez propose de renvoyer au Comité des finances locales la répartition des dotations. L'originalité du projet est précisément de distinguer le financement des communautés urbaines, afin qu'il ne ponctionne plus celui des communautés de communes. La pression sur la DGF s'en trouvera allégée d'un demi-milliard.

On m'a reproché aussi d'être trop contraignant vis-à-vis des collectivités d'Ile-de-France, mais c'est oublier que la situation de cette région est très particulière. Si les modalités de la péréquation peuvent faire débat, le principe, lui, n'est pas discutable. Je rappelle tout de même que le Gouvernement a accepté d'en lisser les effets sur trois ans et de les plafonner à 10 % des recettes de fonctionnement.

La TPU n'est en rien incompatible, je tiens à rassurer MM. Carrez et Voisin, avec la réforme de la taxe professionnelle, puisque l'allégement des bases est entièrement compensé. La rendre obligatoire aurait, par contre, un effet dissuasif. Quant à la déliaison des taux, il ne faudrait pas qu'après avoir bénéficié de ce système, les groupements soient amenés, du fait de la remontée des taux communaux, à relever leur taux de TPU au-delà du niveau précédent, car cela aboutirait à contourner la règle de la liaison entre les taux.

S'agissant de la fiscalité mixte, l'objectif est bien évidemment de garantir aux groupements les moyens de faire face à leurs charges inéluctables, tout en conjurant le risque d'un alourdissement global de la fiscalité et en respectant le principe de la spécialisation fiscale. Mais nous en rediscuterons.

Pour ce qui est des fonds départementaux de péréquation de la taxe professionnelle, le Gouvernement ne propose en fait qu'une mesure conservatoire. La situation est en quelque sorte figée : on ne reviendra pas sur les redistributions déjà effectuées et le produit affecté à ces fonds sera préservé. Fallait-il aller plus loin ? Le débat qui va suivre tranchera.

Pour ce qui est du coefficient d'intégration fiscale, certaines contributions à des syndicats chargés de services collectifs doivent certainement venir en déduction des transferts. Je suis disposé à rechercher une disposition mieux ajustée mais, pour atténuer l'impact qu'aura la correction que je propose sur les dotations, le projet prévoit la prise en compte progressive de cette déduction, sur dix ans.

Je crois avoir répondu à la plupart de vos questions. S'il en était autrement, nous aurons tout loisir d'y revenir. Je vous remercie pour vos interventions et pour vos suggestions, qui témoignent de l'intérêt de la représentation nationale pour ces enjeux de long terme (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. le Président - Nous en venons aux explications de vote.

M. Francis Delattre - Le groupe Démocratie Libérale ne s'associera pas à la motion de renvoi en commission. En effet, si ce texte n'est guère qu'un texte d'ajustement, le diagnostic posé est bon : il fallait combler un manque, qui est celui de la loi de 1992, en imaginant une structure qui vienne compléter les communautés urbaines et les différentes formes de l'intercommunalité rurale. Nous préférons donc essayer d'améliorer le projet plutôt que de voter une motion vouée à l'échec. Au surplus, nous n'avions pas vu depuis longtemps un projet qui comporte des crédits supplémentaires pour les communes : la démarche est à encourager ! ("Très bien !" et applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. Léonce Deprez - Le sens de cette motion de renvoi en commission doit être précisé (Rires sur les bancs du groupe socialiste). La force du groupe UDF est la diversité de la pensée dans l'unité (Mêmes mouvements) et cette pensée plurielle se manifeste aussi bien sur le problème de l'aménagement du territoire que sur celui de l'organisation territoriale !

Mais ce qui motive cette motion, ce qui lui donne un sens constructif, M. Gouzes l'a approché lorsqu'avec un humour d'ailleurs un peu sévère, il a dit : "La loi Voynet était la préface ; la loi Chevènement est le corps du livre et la loi Zuccarelli la conclusion". Comme nous avons le souci de la cohérence, nous souhaitons un tout susceptible de rassembler et de mobiliser les Français. Pourquoi, nous sommes-nous dit, ne pas faire une grande loi, qui traiterait à la fois de l'aménagement du territoire, de l'organisation territoriale et de l'intervention économique des pouvoirs publics, et qui serait signée des trois ministres ? Il y aurait alors de quoi susciter une majorité bien plus large que la majorité plurielle. D'où cette motion. Mais si vous ne l'acceptez pas, nous sommes prêts au débat...

M. Michel Vaxès - Aucun des arguments présentés par M. Weber ne nous a convaincus et nous sommes encore plus réticents quant aux motivations. La droite, en effet, sait ce qu'elle veut mais ce qu'elle veut, nous n'en voulons pas !

Ce projet nous a été transmis en juin. Nous en connaissons donc tous les enjeux. Notre seul regret, c'et que cette loi dont l'importance n'échappe à personne, puisqu'elle redéfinit le rôle et les compétences des communes -ces lieux où se concilient mieux que partout ailleurs démocratie directe et démocratie représentative- n'ait pas été soumise à l'appréciation des Français, pourquoi pas par référendum ? Mais le renvoi n'a pas été demandé à l'appui de cette proposition et le groupe communiste ne le votera donc pas (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et du groupe socialiste).

M. Jacky Darne - Le groupe socialiste ne le votera pas davantage ! Le débat qui se déroule depuis ce matin a permis de mesurer l'importance de ce texte. Tous les orateurs, dont certains avaient eux-mêmes préparé à d'autres époques des textes similaires, ont souligné l'intérêt qu'il y a à créer les communautés d'agglomération. Ce projet simplifie en ne fixant que deux seuils ; il renforce les compétences des communautés urbaines ; il nous permet de débattre des conditions de désignation des délégués des groupements ; il institue une taxe professionnelle unique. Nous avons donc là un texte essentiel, et sur lequel nous sommes d'ailleurs parfaitement informés. Passons donc à la discussion des amendements et confrontons nos vues pour améliorer ce projet ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

La motion de renvoi en commission, mise aux voix, n'est pas adoptée.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance, qui aura lieu ce soir, à 21 heures.

La séance est levée à 19 heures 10.

          Le Directeur du service
          des comptes rendus analytiques,

          Jacques BOUFFIER


© Assemblée nationale


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