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Assemblée nationale

COMPTE RENDU

ANALYTIQUE OFFICIEL

Session ordinaire de 1998-1999 - 88ème jour de séance, 222ème séance

2ème SÉANCE DU MERCREDI 28 AVRIL 1999

PRÉSIDENCE DE M. Patrick OLLIER

vice-président

          SOMMAIRE :

COUVERTURE MALADIE UNIVERSELLE (suite) 1

La séance est ouverte à vingt et une heures.


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COUVERTURE MALADIE UNIVERSELLE (suite)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi portant création d'une couverture maladie universelle.

M. Philippe Vuilque - Cette réforme va permettre à 150 000 personnes d'accéder aux soins et à 6 millions d'autres d'avoir une couverture maladie complémentaire. Cela seul suffit à la justifier. Mais ce n'est pas sa seule dimension. Cette réforme est aussi un véritable défi : en tentant d'atteindre l'universalité, elle propose une réponse à une question qui se pose dans la plupart des pays de l'Union européenne, dans lesquels une part de la population continue à passer au travers des mailles du filet de la protection sociale.

La CMU est la solution simple et de droit commun que nous nous devions de trouver. Il existe deux grands modèles de protection sociale. La France a opté pour le système bismarkien fondé sur l'affiliation obligatoire et la technique de l'assurance. Après la protection des seuls salariés à revenus modestes, les pays pratiquant ce système ont étendu la couverture santé à d'autres populations pour atteindre une universalité désormais acquise.

La Grande-Bretagne, elle, fondera en 1942 sous l'impulsion de lord Beveridge un modèle fondé par principe sur l'universalité de la protection sociale, par la couverture de toute la population financée par l'impôt.

Les deux modèles veulent tendre à l'universalité, mais il continue d'exister une frange de personnes exclues du droit commun de la protection sociale. La France se place aujourd'hui à la tête de la lutte contre l'inégalité d'accès aux soins.

Outre un défi, la CMU est aussi un aboutissement, par l'approfondissement de nos valeurs républicaines. Face à l'augmentation de la demande de soins, de leur technicité et du besoin de qualité, la réforme était nécessaire pour éviter une protection sociale à deux vitesses. La marche vers l'universalité est aussi celle de la démocratie sociale. Il aura fallu plus de 50 ans pour donner une réalité au préambule de la Constitution de 1946 : "La nation garantit à tous, notamment à l'enfant, à la mère et aux vieux travailleurs la protection de la santé". 50 ans, c'est peu au regard de notre histoire, mais trop au regard des besoins et des souffrances. La CMU est donc une grande réforme qui conforte la République. En matière de droits de l'homme et de progrès social, la France a une place à tenir. Nous devons continuer à progresser et transformer l'égalité en droit en égalité en fait (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

Mme Yvette Benayoun-Nakache - Je voudrais d'abord vous dire, Monsieur le Président, et avec tout le respect que je vous dois, que j'eusse préféré que la discussion générale soit terminée cet après-midi.

M. le Président - Le rôle de la présidence, Madame, est de faire respecter le Règlement.

Mme Yvette Benayoun-Nakache - Ce projet tend à réduire les inégalités devant la prévention et les soins, intolérables dans une société civilisée. Il représente un progrès tant au regard de la population concernée que des praticiens de la médecine, puisqu'il propose que les titulaires d'un diplôme étranger puissent exercer la médecine en France.

L'affiliation obligatoire à un régime de base et le droit à une protection complémentaire et à la dispense d'avance des frais pour les plus démunis améliorent l'accès aux soins.

Le système de l'assurance personnelle, proposant un régime payant aux personnes ne pouvant prétendre à un régime obligatoire, pénalisait les personnes sans statut, sans travail, sans ressources. L'affiliation obligatoire au régime général est donc une grande avancée, de même que l'immédiateté de l'ouverture des droits, la continuité des droits ou la délivrance d'une carte d'assuré social autonome pour tout ayant droit.

Par ailleurs, le projet met en place un seul droit pour tout le territoire. En recentralisant l'aide médicale, il simplifie la procédure d'accès aux soins et supprime les barèmes d'accès différenciés selon les départements.

Cependant, il ne faut pas faire l'impasse sur certains problèmes, comme celui de l'effet de seuil qui pénalise les populations moins pauvres, situées aux marges du système des complémentaires. Pourquoi la CMU ne serait-elle pas l'occasion de généraliser le tiers payant ? Il y a aussi le débat autour de la participation des mutuelles et des assurances. L'aide médicale était une prestation de solidarité nationale. Il doit en être de même pour la couverture complémentaire. La participation des organismes privés ne doit pas introduire de logique de marché dans le système.

Ce texte comble un grave déficit. Il nous fait avancer vers plus de solidarité, d'égalité et d'humanité. Il permet aux individus de devenir de véritables citoyens. La santé d'une démocratie se mesure aussi à la santé de ses citoyens (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. le Président - La présidence a pour rôle de faire respecter le Règlement de l'Assemblée, pas de faire plaisir aux députés. L'article 50, 3ème alinéa, du Règlement précise que la séance est levée à 19 heures 30.

M. Jean-Marie Le Guen - Depuis bientôt 18 mois, j'ai l'honneur de présider le conseil de surveillance de la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés. Cette instance, créée par les ordonnances de 1996, réunit les représentants des deux assemblées, des collectivités territoriales, des professionnels de la santé, des institutions de prévoyance complémentaire et des associations spécialisées. Il me semblait donc particulièrement opportun de vous faire connaître ses réflexions sur la lutte contre l'exclusion sanitaire en France. Bien entendu, la nature même de l'institution limite ses remarques à la seule assurance obligatoire.

Le conseil de surveillance souscrit pleinement à l'instauration d'un régime d'affiliation universelle à la Sécurité sociale.

L'assurance personnelle instituée en 1978 a en effet depuis longtemps montré ses limites : 150 à 200 000 de nos concitoyens ne disposent encore d'aucune couverture. En outre ce système, particulièrement complexe, multiplie les lenteurs et les risques de rupture des droits.

Le projet du Gouvernement est simple et souple. L'affiliation au régime général sera obligatoire, individuelle et immédiate et la continuité des droits sera assurée. Il répond très concrètement aux situations d'exclusion. Il va permettre de simplifier les démarches des personnes précarisées et de solvabiliser leur demande. C'est en définitive la réalisation du droit à la santé pour tous, l'aboutissement avec 55 ans de retard des ordonnances de 1945.

Quant à l'assurance maladie, il faudra tirer toutes les conséquences de cette priorité absolue donnée à la lutte contre l'exclusion sanitaire. Les prochaines lois de financement, la convention d'objectifs et de gestion entre l'Etat et la CNAM devront déjà traduire cette volonté. Mais ceci implique également que l'assurance maladie développe une vraie politique dans ce domaine, une stratégie nationale, qui n'existe pas aujourd'hui. Elle doit se donner tous les instruments nécessaires, notamment un observatoire national de l'exclusion sanitaire, une direction spécifique pour orienter l'action, des méthodes de contrôle et d'évaluation. Il faudra par ailleurs renforcer l'action sanitaire et sociale des caisses, l'éducation et la prévention. Le fonds national d'action sanitaire et sociale doit être rénové et la pluriannualité adoptée pour ne pas perdre les crédits non consommés. Il faudra enfin aller plus directement vers les assurés eux-mêmes.

Quelques remarques personnelles sur la couverture complémentaire. Elle est l'accompagnement nécessaire de l'affiliation universelle. Qu'elle soit étendue à tous ceux dont le revenu mensuel n'excède pas 3 500 F est une avancée sociale majeure. Définir un droit, c'est bien : permettre à tous de l'exercer, c'est mieux. Depuis vingt-cinq ans, la part des dépenses de santé à la charge des ménages n'a fait que croître. Aujourd'hui, sur 100 F d'honoraires médicaux ou de médicaments, 58 F seulement sont remboursés. Certes beaucoup de Français ont une couverture complémentaire ; mais les plus modestes, ceux qui en auraient le plus besoin, sont ceux qui en sont le plus dépourvus. Si 84 % des Français ont une mutuelle, ce taux tombe à 60 % chez les chômeurs et à moins de 50 % chez ceux dont le revenu est inférieur à 2 000 F. Pour ces personnes, l'avance de frais et le ticket modérateur sont des obstacles rédhibitoires, qui les conduisent à renoncer aux soins.

En arrêtant la dispense d'avance de frais et la prise en charge intégrale du ticket modérateur et du forfait hospitalier, le projet met fin à la plus terrible des discriminations. En outre la réforme permettra une meilleure gestion des risques et de notre système sanitaire. En effet, parmi les plus gros consommateurs de soins, on trouve une proportion importante de chômeurs, d'ouvriers non qualifiés et en général de personnes ne disposant pas de couverture complémentaire. Ces usagers recourent moins que d'autres à la médecine de ville, qui est chère, mais plus fréquemment aux soins hospitaliers. Il y a là une dramatique aberration de notre système qui décourage les soins préventifs et initiaux au détriment de nos concitoyens les plus défavorisés, alourdissant ainsi le coût pour la collectivité.

Je conclurai sur l'importante question de l'effet de seuil. Que faire pour ceux qui perçoivent un peu plus de 3 500 F ? Il y a là toute une population de jeunes, de petits employés, de précaires, de salariés à temps partiel qui ne sont pas des nantis, mais qui gagneront trop pour profiter de la CMU et trop peu pour souscrire une protection complémentaire. Il serait paradoxal que ces personnes se retrouvent moins protégées à la fois que les plus démunis et que les mieux insérés. La nouvelle législation prévoit déjà des dispositions pour atténuer cet effet de seuil, mais je crois que le projet serait utilement complété par l'amendement à l'article 25 que propose notre collègue Boulard. Il prévoit la création d'un fonds d'accompagnement à la protection complémentaire pour les personnes dont les ressources dépassent le plafond.

Dans ce domaine les organismes complémentaires ont un rôle particulier à jouer ; c'est leur mission, et je dirai même leur devoir. Oserais-je dire également que c'est leur intérêt ? Au moment où l'Europe nous impose des évolutions au nom du droit à la concurrence, la France sera d'autant plus forte pour défendre la spécificité de son système que celui-ci comportera des contraintes claires, connues et acceptées de tous.

La solidarité ne se proclame pas, elle se démontre. Ce projet va faire cesser la plus honteuse, la plus injustifiable des inégalités. Je ne doute pas que la représentation nationale dans son ensemble aura à coeur de le soutenir (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

La discussion générale est close.

MOTION DE RENVOI EN COMMISSION

M. le Président - J'ai reçu de M. Douste-Blazy et des membres du groupe UDF une motion de renvoi en commission déposée en application de l'article 91, alinéa 6, du Règlement.

M. Jacques Barrot - Qui ne souscrirait à l'objectif visé à travers ce projet ? L'accès de tous aux soins : cette finalité reçoit notre pleine adhésion. Elle inspirait déjà deux de nos démarches. Le projet de loi sur la cohésion sociale, prédécesseur de votre loi sur l'exclusion, reconnaissait qu'une lutte efficace contre toutes les formes d'exclusion impliquait un effort significatif sur le plan sanitaire. Cette finalité se traduisait aussi dans les ordonnances réformant l'assurance maladie. Le Gouvernement d'alors avait affirmé sa volonté de préserver l'assurance maladie à la française, symbole de l'unité et de la solidarité de notre pays, moyen privilégié de cohésion sociale. Même si notre système n'est pas à tous égards exemplaire, beaucoup nous envient cette prise en charge collective qui entend placer tous les Français en situation d'égalité, au moins face aux grands risques.

Précisément parce que ces objectifs sont essentiels, il faut pour les atteindre une démarche solide, sérieuse et approfondie. Rien ne serait pire que de tromper les Français en affichant des ambitions généreuses, qui se révéleraient décevantes à l'usage. C'est cette mise en garde que je veux vous adresser, au nom de nombreux parlementaires qui, au-delà de tout esprit partisan, s'interrogent en leur âme et conscience sur les voies et moyens retenus par ce projet, que je crois insuffisamment préparé. Je rappellerai donc d'abord les éléments de la problématique, avant de dire pourquoi, même dans la logique de ce projet, des questions sérieuses demeurent ; je suggérerai enfin l'architecture d'une réforme telle que nous pourrions l'approuver.

Reprenons donc les éléments de la problématique. La recherche d'une universalité de la prise en charge de la maladie requiert une bonne appréhension de deux problèmes : celui de l'accès de tous à une assurance maladie obligatoire, et celui d'une amélioration de la prise en charge des Français les moins favorisés. Sur ces deux questions les réponses du projet apparaissent incomplètes ou inadéquates, et dans certains cas dangereux.

Le premier problème porte sur le rattachement de tous les résidents stables et réguliers à une assurance maladie obligatoire de base. Nous avions avancé le concept d'assurance maladie universelle, pour souligner que cette assurance maladie à la française était la propriété de tous. Les ordonnances du 15 novembre 1995 et d'avril 1996 prévoyaient la mise en place de l'AMU. Vous avez, c'est vrai, repris cet objectif, en introduisant l'affiliation automatique et immédiate pour tous les résidents stables et réguliers qui n'auraient pas de droits ouverts auprès d'un régime de sécurité sociale. L'affiliation auprès de la caisse primaire de proximité est une bonne mesure, qui devrait permettre une continuité de la prise en charge. Mais que n'avez-vous saisi cette occasion pour redéfinir la mission de l'assurance maladie obligatoire de base ? Celle-ci, dans l'esprit de ses fondateurs, devait répondre à la demande de soins essentiels. Au fil des ans, on ne s'est pas toujours demandé si son champ restait en phase avec les pathologies et les thérapies d'aujourd'hui. Ainsi certaines prothèses, qui sont aujourd'hui indispensables compte tenu de l'allongement de la durée de la vie, restent l'objet d'une prise en charge obsolète par le régime de base. Cette dégradation des conditions de remboursement place la France à un assez mauvais rang en Europe.

C'est la raison pour laquelle les ordonnances avaient exclu toute forme de déremboursement supplémentaire. La véritable "donne" des ordonnances était la suivante : d'un côté, on demande aux Français un effort supplémentaire -mais en contrepartie, à mesure du redressement escompté, on actualisera le "panier" des biens et services pris en charge par l'assurance maladie obligatoire. Tel était le défi des ordonnances. Une fois acquise cette définition d'une assurance maladie obligatoire de base, prenant en charge un panier de soins essentiels incontestable, il était alors possible de s'interroger sur le sort des Français les moins favorisés dans des conditions de plus grande clarté.

Tel est en effet le second problème : améliorer la situation de ceux qui sont aujourd'hui pris en charge par l'aide médicale gratuite, et de ceux qui n'ont pas de couverture complémentaire. Ici encore le projet pèche par une insuffisante mise à plat de la situation actuelle. Pour les plus défavorisés, il existe une aide médicale gratuite, régie par les départements ; il serait d'ailleurs intéressant de scruter les disparités entre ces AMG départementales, et de s'interroger sur la nécessité d'une harmonisation. Il est vrai que vous essayez de résoudre ce problème, mais d'une façon trop complexe, en substituant à l'AMG départementale une assurance complémentaire automatique, appelée CMU, servie tantôt par la Sécurité sociale, tantôt par les assureurs complémentaires. La complexité du dispositif, et celle de son financement, peut faire craindre qu'on s'achemine au fil des ans vers une sorte de complémentaire au rabais ; j'y reviendrai.

Je voudrais m'expliquer sur la question du plafond. Vous nous dites que celui-ci existe déjà, et c'est vrai, mais tant que l'architecture générale restera la même, il sera difficile de corriger les effets de seuil, qui revêtiraient une moindre importance dans un contexte différent. Je crains que vous ne vous heurtiez à un problème que les sociologues américains connaissent bien : le sentiment d'abandon qu'éprouvent les ménages modestes qui ne bénéficient pas des mesures réservées aux plus défavorisés (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF, du groupe RPR et du groupe DL).

S'agissant de ces derniers, le souci légitime de revoir le système de l'aide médicale gratuite ne doit pas occulter certaines questions, à commencer par celle-ci : la confusion des rôles entre assurance obligatoire et assureurs complémentaires ne comporte-t-elle pas le double risque d'instaurer une sélection inavouée, nonobstant les garde-fous théoriquement posés par la loi, et d'ouvrir la voie aux assureurs privés pour la couverture de base ?

M. Jean-Luc Préel - Très bien !

M. Jacques Barrot - Plus grave encore est le flou qui entoure le financement. De l'avis général, 1500 F par dossier, c'est bien moins que le coût réel, et encore ne peut-on mesurer le coût induit par l'arrivée en masse de nouveaux ressortissants qui seraient enclins à se laisser entraîner à des consommations abusives (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste). Ceux des ressortissants actuels du régime des non-salariés, par exemple, dont la contribution est modeste mais les revenus aussi, pourraient être tentés de demander le bénéfice de la CMU, quitte à dissimuler une partie de leur activité pour y avoir droit (Mêmes mouvements).

Par ailleurs, l'appel aux mutuelles ne risque-t-il pas de conduire celles-ci à relever leurs cotisations, ou encore à renoncer à accorder à certaines familles en grande difficulté des conditions de prise en charge plus favorables ? Quant au transfert des sommes consacrées à l'aide médicale gratuite, ses modalités pourraient être plus incitatives pour les départements qui - comme le mien, ainsi que certains ont bien voulu le reconnaître - en ont été les précurseurs ?

Cela étant, force est de constater que la CMU voit le jour dans un contexte difficile pour l'assurance maladie : je ne vois pas, au tiers de l'année 1999, comment la dérive de 9 milliards constatée en 1998 pourrait ne pas se reproduire, voire s'aggraver, compte tenu du fait que les recettes seront très probablement inférieures aux prévisions. On peut craindre, dès lors, que la tentation ne soit forte de concevoir un "panier de soins" au rabais, surtout s'il y a des pressions tout aussi fortes en faveur du relèvement du plafond. La question du périmètre des besoins est particulièrement délicate dans le domaine des prothèses, dans celui des dépassements de tarifs en médecine de ville et dans celui des soins dentaires, où je me demande bien comment l'on arrivera à établir des tarifs opposables.

Prenez garde que la CMU ne devienne pas la complémentaire des pauvres ! ("Très bien !" sur les bancs du groupe UDF, du groupe RPR et du groupe DL) Vous me répondrez, certes, que cela vaut mieux que pas de complémentaire du tout et qu'il pourra y avoir des aides ponctuelles, des prorogations d'un an, des tiers payants pour ceux qui se confieront à un médecin référent, mais s'il n'y a pas de système intermédiaire entre la CMU et, pour ceux qui en ont les moyens, la libre assurance, l'effet de seuil sera extrêmement gênant, avec des écarts parfois très importants : la preuve n'en est-elle pas que le simple relèvement du seuil de 3500 à 3800 F coûterait, selon vos propres dires, 3 milliards de francs ?

Toute réforme a naturellement des avantages et des inconvénients, mais je tiens à souligner que, si certains y gagneront beaucoup - je pense notamment à ceux qui, bien que gagnant moins de 3500 F, ont souscrit une assurance complémentaire -, d'autres y perdront - je pense aux bénéficiaires de l'AMG dans les départements les plus généreux. Notre position est guidée par le souci de ne pas laisser passer une telle occasion de reprofiler l'ensemble du système, de façon à le rendre plus équitable. L'accès des plus défavorisés aux soins n'est pas seulement, tant s'en faut, un problème financier, mais aussi un problème d'accompagnement : l'expérience de la "carte Santé" a donné ses meilleurs résultats, M. Kouchner ne l'ignore pas, là où le tissu associatif et le réseau d'assistantes sociales a su apprendre aux gens à se soigner et à prendre en charge leur santé. La gratuité est nécessaire, mais elle n'est pas suffisante.

J'en viens, brièvement car tel n'est pas le propos d'une motion de procédure, à la façon dont ce chantier aurait pu être conduit. Il s'agit pour nous de prendre date, dans la mesure où cette couverture n'est pas si universelle qu'on veut bien le prétendre. Un autre projet était possible, qui eût évité les écueils de celui-ci et renforcé l'attachement de tous les Français à l'assurance maladie.

Il faudrait mieux définir le panier de soins dont la République garantit l'accès à tous ceux qui résident régulièrement sur son sol -et qu'il faudra actualiser d'année en année. Une meilleure définition du champ de la couverture permettrait une mise en place plus efficace des deux autres piliers du système, la rénovation de l'AMG et l'incitation à généraliser l'assurance complémentaire.

L'aide médicale gratuite est gérée jusqu'ici par les départements, dans des conditions disparates. Pourquoi ne pas proposer simplement une "carte santé", délivrée par les caisses primaires d'assurance maladie, et assurant une couverture adaptée aux besoins réels des populations les moins favorisées ? Les caisses primaires d'assurance maladie devraient, pour s'assurer de l'effectivité de ses prises en charge, établir des relations partenariales avec le monde associatif et les départements.

Ensuite, la généralisation progressive de l'assurance complémentaire devrait permettre de boucler le dispositif pour assurer une meilleure égalité de tous les Français dans l'accès aux soins. Il est tout à fait concevable d'accorder une aide proportionnelle au revenu pour les Français modestes, aujourd'hui enclins à renoncer à une assurance complémentaire en raison de trop faibles revenus. L'exemple de la ville de Béziers est édifiant : le fonds de mutualisation assure une prise en charge de la cotisation mensuelle des assurés dont les revenus sont au delà du plafond de l'aide médicale départementale. Cela permet, comme pour l'APL, un accompagnement personnalisé des ménages.

Une telle architecture permettrait à tous les Français de se sentir concernés par une rénovation de notre assurance maladie. Elle doterait tous les acteurs d'un cadre de référence plus clair. Une meilleure définition du panier "des soins essentiels" permettrait de mieux cerner ce qui incombe aux assurances complémentaires et d'améliorer la transparence. Il est logique, s'agissant de l'assurance complémentaire, qu'il y ait une pluralité d'assureurs et une pluralité de contrats. Mais des conflits ont souvent surgi du fait de l'instabilité des frontières entre les champs respectifs de l'assurance maladie obligatoire et des assurances complémentaires. La transparence est nécessaire pour introduire une réelle émulation.

Enfin, une vision globale permettrait sans doute de mieux cerner les coûts et de mettre au point des calendriers réalistes étalant dans le temps les progrès concernant l'ensemble des Français, mais assurant de manière prioritaire les besoins les plus défavorisés.

En proposant ce renvoi en commission, nous voulons laisser sa chance à une démarche plus globale, pour répondre à un impératif social. Et nous souhaitons, avant d'adopter un tel texte, mesurer les risques qu'il comporte pour notre système d'assurance maladie. Ce texte porte en effet en germe un changement de cap : d'un côté, l'arrivée des assureurs privés dans la gestion du risque principal ne renforcera-t-elle pas la tentation de la privatisation ? De l'autre, la CMU ne va-t-elle pas dériver progressivement vers un "Medicaid", consacrant une partition entre deux secteurs ?

Plus grave, n'est-on pas en train d'affaiblir encore notre assurance maladie en recourant à une logique d'assistance plus qu'à une logique d'assurance et en reléguant au second plan l'appel à la responsabilité ?

Enfin, peut-on abandonner à leur sort des Français aux revenus modestes, condamnés à rester demain exclus à la fois de la CMU et de toute couverture complémentaire ?

Comme il n'est jamais trop tard pour remettre l'ouvrage sur le métier, je sollicite le renvoi du projet en commission (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF, du groupe DL et du groupe du RPR).

Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité - On me permettra de dire d'abord, comme plusieurs intervenants, et notamment Mme Grzegrzulka, Mme Fraysse, M. Rogemont, M. Sarre, qu'il ne faut pas oublier l'essentiel : demain, six millions de personnes qui se trouvaient jusqu'ici dans une situation dramatique pourront être soignées gratuitement, sans avoir à faire d'avance. Certains ont commencé à dire qu'ils étaient d'accord -mais alors il faut le faire ! Le constat, nous le faisons tous : il y a des inégalités, des gens renonçant à se faire soigner faute de moyens -25 %, selon certaines enquêtes, un peu moins en réalité.

Mais alors que tout le monde est d'accord sur le constat, l'opposition a déposé des motions de procédure, dont l'objet était de reporter ou refuser le débat sur la CMU. Pourtant, lors du vote de la loi sur l'exclusion, les mêmes nous reprochaient de ne pas y avoir intégré la CMU !

70 % des Français sont favorables à la CMU -et même 78 % de sympathisants UDF et 68 % de sympathisants RPR (Exclamations sur les bancs du groupe UDF et du groupe du RPR). Les Français ne considèrent pas que ce projet soit cynique, absurde ou aberrant, ils sont favorables à la CMU, c'est tout (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste). M. Accoyer nous dit que la loi suscite une large opposition des milieux médico-sociaux : mais la CFDT, FO, la CGT, la CFTC, la Fédération de la Mutualité sont pour -seuls le MEDEF et la CGC ont voté contre. Et elle a été saluée par toutes les associations.

Cela ne veut pas dire que, sur un tel sujet, il n'y ait pas matière à débat. Mais les critiques de l'opposition étaient souvent contradictoires : comment pouvez-vous dénoncer l'étatisation tout en regrettant les différences entre départements et alors que ce sont les départements qui ont souhaité une remontée au niveau national ?

M. Charles de Courson - Pas tous !

Mme la Ministre - Si M. Puech, président de l'association des présidents de conseils généraux n'est pas représentatif, il faut en élire un autre ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. Accoyer et M. Bur assurent que mon voeu intime est que la CNAM devienne omnipotente, mais M. Goulard assure le contraire. Je veux surtout une CNAM qui fonctionne ! Il n'est pas question de supprimer les instances de proximité, il faut travailler, là aussi, en réseau.

Par ailleurs, comment pouvez-vous nous reprocher de faire trop d'assistance, tout en réclamant qu'on relève le seuil, comme l'a fait M. Bur ? Alors, allons-nous trop loin, ou pas assez loin ? Sommes-nous trop généreux ou pas assez ? Essayez de vous mettre d'accord.

Comment par ailleurs dénoncer la couverture maladie universelle tout en en revendiquant la paternité, comme l'ont fait certains d'entre vous ? J'ai clairement reconnu que le projet d'assurance universelle du Gouvernement précédent était un bon projet. Je me suis d'ailleurs appuyée sur le travail réalisé par deux fonctionnaires qui avaient travaillé sous votre autorité, Monsieur Barrot. Ce texte n'a donc pas été bâclé comme vous l'avez prétendu...

M. Jacques Barrot - J'ai dit insuffisamment préparé.

Mme la Ministre - Soit. Je souhaitais seulement défendre les fonctionnaires en question, comme Mme Bachelot l'a elle-même fait.

Quoi qu'il en soit, je n'ai aucune difficulté à reconnaître que le Gouvernement précédent avait eu l'idée d'une assurance maladie universelle. Je suis ravie que nous puissions reprendre aujourd'hui le projet qu'il n'a pu mener à bien.

Monsieur Jacquat, comment pouvez-vous souhaiter partager la paternité de ce texte quand l'ensemble de vos collègues de l'opposition expliquent qu'il est injuste, inefficace, à tout le moins mal ficelé ? Comment pouvez-vous vous indigner aujourd'hui d'un seuil qui existe depuis toujours alors que vous ne l'avez jamais dénoncé auparavant ?

Madame Bachelot, comment pouvez-vous demander que la Sécurité sociale paie davantage quand M. Accoyer s'alarme de sa faillite et M. Barrot parle de ses importantes difficultés ? Sur ce point, permettez-moi de rappeler que de 55 milliards en 1996, le déficit aura été ramené à 15 milliards en 1998 et que l'on peut espérer ne pas être loin de l'équilibre en 1999 (Murmures sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL). Nous y serons parvenus sans augmenter les cotisations ni diminuer les remboursements. Voilà pourquoi je pense que la Sécurité sociale va mieux aujourd'hui qu'il y a trois ans et qu'elle ira encore mieux demain (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste ; protestations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL).

J'ai été étonnée que M. Accoyer déplore l'arrêt de l'informatisation des cabinets médicaux quand le nombre de cabinets informatisés est passé de 20 % à 70 %. Nous aurons réussi à mettre en place le réseau de santé sociale, annoncé par M. Juppé pour 2002 seulement, la carte Vitale I et bientôt la carte Vitale II -alors que le carnet de santé, pour lequel on a beaucoup dépensé, n'aura jamais servi.

Notre système de soins évolue, en concertation avec les professionnels. Ce n'est pas toujours sans difficultés, je le reconnais. Mais je me réjouis qu'après les difficultés rencontrées avec les radiologues l'été dernier, nous ayons réussi à signer un accord avec cette profession qui non seulement contribuera à la maîtrise des dépenses mais permettra d'améliorer la prévention, du cancer du sein notamment, et de renforcer l'innocuité des radiations. Je me félicite de même de l'accord signé avec les pharmaciens. La profession a accepté notamment de modifier son mode de rémunération et de pratiquer la substitution. Nous avons également avancé pour l'hôpital dont l'évolution est engagée sans dérapage financier. Les SROS dits de deuxième génération seront en place avant l'été.

Nous avançons pas à pas, en concertation avec l'ensemble des professionnels, dans le seul souci d'améliorer la qualité de notre système de soins. Voilà notre méthode. Et nous avons d'ores et déjà obtenu des résultats. Oui, Monsieur Barrot, la Sécurité sociale comme notre système de soins se portent mieux aujourd'hui qu'hier et se porteront encore mieux demain.

Peut-être faut-il aller plus loin en remboursant beaucoup mieux les soins, comme vous l'avez suggéré. Mais comment pouviez-vous l'envisager avec un déficit de 55 milliards ? Comment le pourrais-je, pour ma part, tant que les comptes ne seront pas à l'équilibre ? Mais en effet, une fois cet objectif atteint, nous devrons nous attacher à mieux rembourser les soins dentaires et la lunetterie, domaines dans lesquels nous sommes très en retard (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste).

Après avoir rappelé toutes ces contradictions, j'en viens aux vraies questions qui sont venues de tous les bancs. Elles concernent notamment le seuil, la contribution, l'organisation du système. De faux débats sur la crainte d'une privatisation comme d'une étatisation, sur le panier de soins ou encore sur le coût du dispositif me paraissent en revanche devoir être clos.

Mme Bachelot craint que le seuil "n'enferme la misère". M. Accoyer considère que c'est l'élément le plus injuste du projet. Pourquoi ne vous être pas élevés par le passé contre le seuil fixé pour le RMI ? Pourquoi un seuil de 3 500 F vous fait-il hurler à l'injustice quand un seuil de 2 480 F vous laissait indifférents ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste) Pourquoi, devant une telle "injustice" n'avoir pas proposé, vous, un projet de couverture maladie universelle ? (Mêmes mouvements) Pourquoi n'avoir pas retenu un seuil plus haut dans les départements que vous dirigez ? Aujourd'hui, seuls 19 départements ont fixé un seuil supérieur.

M. Pierre Méhaignerie - Ce sont des départements de droite comme de gauche.

Mme la Ministre - Certes. Seulement, je n'ai pas entendu les mêmes critiques que les vôtres à gauche. Personne n'y a dit que le seuil était injuste. Certains simplement souhaiteraient qu'il soit relevé.

Monsieur Barrot, lorsque je vous ai répondu par voie de presse en indiquant que dans votre département le seuil était fixé à 3 380 F, je ne cherchais pas à vous attaquer. Je répondais simplement à votre propre objection sur le seuil que nous avons retenu.

Il n'est pas de seuil absolu de pauvreté. L'INSEE le fait varier entre 3 200 F et 3 800 F, notamment selon l'objectif considéré. Un seuil de 3 500 F nous paraît juste et réaliste mais il peut bien entendu être contesté.

M. Accoyer a prétendu que 29 départements retenaient un seuil supérieur. Ce n'est malheureusement pas vrai : c'est le cas de quatre seulement quand trente retiennent en effet un seuil supérieur à 2 400 F.

M. Charles de Courson - Dites-nous quels sont ces quatre.

Mme la Ministre - Je les rappellerais volontiers. J'ai souvent cité l'exemple de l'Ile-et-Vilaine qui, bien que n'étant pas particulièrement riche, a réalisé d'importantes avancées. C'est d'ailleurs pourquoi je compte sur M. Méhaignerie pour soutenir un projet qui va dans le même sens que ce qu'il a fait dans son département (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste).

Faut-il relever le seuil à 3 800 F ? Nous toucherions deux millions de personnes de plus. Seraient notamment concernés tous les bénéficiaires du minimum vieillesse qui est aujourd'hui de 6 970 F pour un couple. Certes, ce n'est pas le Pérou mais j'estime qu'un couple, qui est propriétaire de sa maison et vit à la campagne, peut avec ses ressources payer une assurance complémentaire. Je préfère que nous puissions aider, y compris des personnes dont les ressources sont supérieures à 3 800 F, qui rencontrent de graves difficultés momentanées.

Cela dit, pour limiter l'effet de seuil, resteront toujours les fonds d'action sociale des caisses primaires ou les aides accordées par les communes ou par les départements, au cas par cas, en fonction des situations particulières. Ces aides complémentaires me paraissent préférables à la généralisation d'une prise en charge à 100 %. Certaines communes, dont Béziers, ont mis au point une formule intéressante de chèque mutuelle, mais son coût serait considérable au niveau national.

M. Barrot propose que la Sécurité sociale rembourse à 100 % les soins des plus pauvres. Je n'y suis pas favorable. Tout d'abord, nous ne souhaitons pas que ces personnes soient traitées différemment du reste de la population et munies d'une carte spéciale.

Deuxième raison, que vous comprendrez très bien, Monsieur Barrot, car vous avez soulevé cet argument lors du débat sur la Sécurité sociale : si nous commençons à rembourser différemment selon le niveau de rémunération, c'est la fin du système mis en place en 1945. Le risque de privatisation, alors, serait bien réel : comment les cadres accepteraient-ils de continuer à cotiser à la Sécurité sociale s'ils sont moins bien remboursés que les autres catégories ? Cela remettrait en cause le principe de base de la Sécurité sociale, qui veut que chacun contribue, selon ses revenus, mais ait droit aux mêmes prestations.

Faut-il demander une contribution modique aux bénéficiaires de la CMU ? Je me suis posé la question. Comme un certain nombre d'entre vous, j'ai conclu par la négative, non par principe, mais pour des raisons pratiques : il sera impossible d'aller récupérer ces 30 ou 40 F si certains ne les paient pas.

J'en arrive aux craintes injustifiées. Certains, à droite et à gauche, redoutent une privatisation, d'autres, à droite, la réclament. Je tiens à rassurer les premiers. Aucune disposition de ce projet ne modifie les frontières actuelles entre la Sécurité sociale de base et la couverture complémentaire. J'ai été très étonnée, Monsieur Barrot, que vous ayez pu affirmer le contraire, alors que la CMU donnera à ses bénéficiaires la même couverture complémentaire qu'aux 85 % de Français qui en disposent déjà. Les pauvres et les moins pauvres seront couverts de la même manière, mutuelles et assurance privée ne rentreront en aucun cas dans le champ de la Sécurité sociale de base.

Y aura-t-il sélection ? Nous avons veillé à ce que la CMU reste un système simple. Il suffira, pour en bénéficier, de prouver que ses revenus ont été inférieurs au seuil pendant les trois derniers mois. Nous avons souhaité qu'il n'y ait pas de contact direct entre le bénéficiaire et l'institution assurant la protection complémentaire, ceci pour éviter qu'on essaie de décourager les personnes visiblement en mauvais état de santé : tout se fera par courrier, les mutuelles et compagnies d'assurance ne pourront pas, sous peine de sanctions, refuser des personnes, dès lors qu'elles auront accepté de rentrer dans ce système.

Sur "le panier de soins", je crois qu'il y a une confusion. Le chiffre de 1 500 F correspond au coût annuel moyen de la protection complémentaire des Français ; il ne s'agit en aucun cas de fixer un plafond individuel à ne pas dépasser, ni d'imposer de se soigner à tel ou tel endroit ou de se limiter à telles ou telles prestations.

Nous comptons, au contraire, aller dans le sens souhaité par M. Barrot en fixant des forfaits pour des produits actuellement mal remboursés par la Sécurité sociale -je pense par exemple aux prothèses dentaires et auditives, à la lunetterie.

M. Bernard Accoyer - C'est bien ce qu'on appelle un panier spécifique !

Mme la Ministre - Pas du tout. Combien coûtera la protection complémentaire de la CMU ? Comme l'a dit Jean-Claude Boulard, qui a travaillé des mois sur ce sujet et discuté avec les mutuelles et les assurances, le chiffre retenu, 1 500 F par an, a été proposé par la FNMS et confirmé par la fédération française des assurances. Cette somme correspond à la part remboursée par les régimes complémentaires, soit 25 % des dépenses de santé : sur cette somme, le ticket modérateur pour la médecine ambulatoire représente 970 F, le forfait hospitalier 100 F et les autres prestations -soins dentaires, optique, etc- environ 430 F. Nous avons d'ailleurs vérifié la validité de ces chiffres avec les conseils généraux qui ont mis en place une carte de santé : il apparaît qu'après une période de rattrapage de trois à six mois, les dépenses complémentaires se situent plutôt en dessous de cette moyenne car, même quand ils sont mieux protégés, les plus pauvres se soignent moins que les autres.

Un mot sur le titre IV, dont Bernard Kouchner vous reparlera sur le fond. J'ai entendu des propos contradictoires. Beaucoup d'entre vous ont demandé un DMOS plus large : croyez bien que c'est aussi mon souhait (Applaudissements sur divers bancs) mais le calendrier parlementaire ne le permettant pas, nous avons voulu vous présenter déjà les dispositions les plus urgentes. M. Dubernard, qui critique ce titre IV, a, par ailleurs, demandé de le compléter ; on a aussi parlé des médecins étrangers qu'on devrait faire rentrer chez eux -sur un tel sujet j'attendais des propos plus ouverts ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

J'ai relu le compte rendu des débats de 1988 sur le RMI et j'y ai retrouvé les mêmes arguments que ceux avancés aujourd'hui : M. Zeller, Mme Bachelot critiquaient "la logique d'assistance" et avec d'autres, ils redoutaient "l'étatisation" ; en même temps, l'opposition faisait de la surenchère dans la générosité -et Madame Bachelot, cela ne m'étonne pas de vous car vous êtes généreuse ! (Rires sur divers bancs)

Comme vous avez voté le RMI à la quasi-unanimité, je ne doute pas que vous suivrez le même chemin pour la CMU.

Pourquoi, au fond, êtes-vous gênés par ce projet ? Vous dénoncez tous l'inégalité de la situation actuelle, alors pourquoi ne voulez-vous pas que les plus pauvres aient la même couverture sociale, les mêmes soins, les mêmes hôpitaux que les autres ?

Bien sûr, ce texte ne résoudra pas tous les problèmes. On a demandé plus d'actions de prévention et il est certain qu'il y a un important travail à faire dans ce domaine en direction des plus démunis.

Nous sommes en train de mettre sur pied une couverture universelle. Mais cela n'exclut pas l'action de terrain, tant une action complémentaire sur le plan financier que la mobilisation des collectivités locales et des associations pour faire connaître aux intéressés les droits que leur donne la CMU.

Il nous faudra aller plus loin, sur les remboursements, l'optique et la dentisterie, dès que nous pourrons le faire pour tous les Français, et sur le tiers payant, et même si le corps médical n'est pas tout à fait d'accord.

Le problème dans cette loi n'est pas de faire la charité mais de reconnaître à chacun l'accès à ses droits. C'est un devoir de solidarité envers les plus faibles. Rendre la santé c'est rendre la dignité et quelles que soient les critiques techniques, nous n'avons pas le droit de laisser passer ce projet (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe RCV).

M. Jean-Claude Boulard, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales pour les titres préliminaire premier, II, III et IV - Deux mots sur cette motion de renvoi. M. Barrot nous décrit toujours la loi qu'il aurait voulu faire voter s'il en avait eu le temps. Il est vrai que les lois qu'il présente lorsqu'il est dans l'opposition sont meilleures que celles qu'il fait voter quand il est au pouvoir. Je lui propose donc de voter pour une fois une bonne loi (Exclamations sur les bancs du groupe UDF et du groupe du RPR).

M. Jacques Barrot - Il fallait voter les ordonnances !

M. Jean-Claude Boulard, rapporteur - Si vous réagissez, c'est que je touche un point sensible ! Je pense que M. Barrot, comme tous ici, partage les objectifs de cette loi (Plusieurs voix à droite : "Bien sûr !"). Il faut donc être cohérent, repousser la motion et passer au débat sur les amendements (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Jean Le Garrec, président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales - Je pense qu'il est de mon rôle de répondre à M. Barrot, étant donné le rôle qu'il a été amené à jouer, et sans souci de polémique.

Je ne doute pas de ses intentions dans plusieurs domaines. Mais nous avons, nous, la responsabilité de mettre en oeuvre des réformes et nous le faisons de manière maîtrisée. M. Méhaignerie attribue la diminution du déficit de la Sécurité sociale à la croissance. C'est vrai, mais il faut aider la chance, et c'est plus facile quand on a un projet politique cohérent.

Je vous l'accorde, Monsieur Barrot, et je l'ai déjà dit à maintes reprises, il est hors de question d'augmenter les prélèvements ou de diminuer les remboursements, et le ticket modérateur est facteur d'exclusion. Il faut donc avoir la volonté d'une maîtrise d'ensemble et aborder dès que possible le réajustement des tarifs de base. C'était notre projet et nous le mettons en oeuvre : développement des génériques, informatisation, formation médicale, tout cela y concourt. Depuis trois mois déjà nous préparons le prochain débat sur la loi de financement de la Sécurité sociale. Nous fournissons un travail de fond, de détail, dans l'objectif d'améliorer le niveau des remboursements. Bref, nous mettons en oeuvre une politique à laquelle peut-être vous avez rêvé.

Par ailleurs, j'ai avec vous des désaccords de fond. D'abord, vous évoquez le risque d'une consommation supplémentaire. C'est une analyse erronée et dangereuse. Au nom de quoi dire que ceux qui étaient en deçà des droits fondamentaux vont être saisis d'une frénésie de consommation ? Il faut simplement faire appel au sens de la responsabilité des médecins.

La couverture maladie universelle permettra de développer trois choses : la politique de prévention, et on sait que c'est la base de la lutte contre les inégalités, une politique médicale en réseau, s'appuyant à la fois sur l'hôpital et sur les généralistes, et l'éducation sanitaire qui est fondamentale. Je suis déjà en train de négocier avec la région du Nord, avec l'appui de Mme la ministre, une politique de prévention et d'éducation sanitaire, et c'est avec la mise en oeuvre de la couverture médicale que nous pourrons développer ces trois points fondamentaux.

Je suis aussi en total désaccord avec l'idée d'un quelconque ajustement de la CMU en fonction des revenus. C'est extrêmement dangereux, voire mortel. Je n'accepte pas qu'on cantonne une partie de la population dans une situation d'accompagnement qui durerait indéfiniment. Notre projet est très clair : améliorer le système universel de base, et faire en sorte que tous les citoyens puissent accéder à des droits normaux.

Je ne comprends pas le débat qui oppose CNAM et complémentaires, privatisation et étatisation... C'est absurde ! Il faut mobiliser les complémentaires, et d'abord le mouvement mutualiste, dont c'est la vocation, pour que les citoyens puissent exercer librement leurs droits, et donc choisir. C'est notre bataille, et vous ne pouvez pas être en désaccord.

Nous ne construisons pas de jardin à la française. Nous n'avons pas de projet clefs en main. Nous connaissons les difficultés et nous bâtissons notre politique pierre à pierre. C'est comme cela que nous ferons évoluer la société (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe RCV).

M. le Président - Nous en venons aux explications de vote sur la motion de renvoi.

M. Pierre Méhaignerie - Vous ne serez pas surpris que le groupe UDF vote la motion de Jacques Barrot. Mon expérience et celle de beaucoup de collègues rejoignent la sienne. On peut partager vos ambitions, Madame la ministre, et c'est notre cas ; mais nous avons le droit de dire que vos méthodes ne sont pas les meilleures. Si nous ne sommes pas dans le même camp, c'est qu'il y a quelques années nous n'étions pas favorables aux nationalisations : l'histoire nous a donné raison. Nous n'étions pas favorables à l'accroissement de la dépense publique : là encore l'histoire nous a donné raison. Je lisais récemment un texte de M. Rocard où il regrettait d'avoir généralisé la retraite à 60 ans, quelles que soient la dureté du travail et la diversité des situations. Aujourd'hui nous n'approuvons pas les 35 heures pour tous, quelle que soit la diversité des aspirations. C'est ce qui nous différencie.

Quant à ce projet, il existe trois points de désaccord ; nous verrons la conclusion à tirer du débat, et des rapprochements qui auront pu intervenir ou non. Premier point : si je regrette que certains départements n'aient pas saisi à bras le corps le problème de la carte de santé, je crois que l'action décentralisée, sur le terrain, par des politiques de proximité, est à la fois la plus efficace et la plus juste (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF). Alors que dans le monde entier tous les systèmes très centralisés rendent l'âme, nous allons de plus en plus vers la centralisation... En matière de lutte contre l'exclusion, nous partageons vos ambitions ; mais nous aurions préféré une loi-cadre, qui mobilise les acteurs. Au lieu de quoi nous avons une trentaine de décrets, d'arrêtés et de circulaires, qui créent une complexité plutôt démobilisatrice.

Deuxième divergence : la question de l'assistance. La proposition de M. Boulard, qui prévoyait une cotisation, même faible, nous semblait meilleure, car plus conforme à la responsabilité et à la dignité des bénéficiaires, et plus susceptible de les ramener vers l'emploi. Enfin l'effet de seuil nous apparait porteur de conséquences négatives. Il y a des départements où le seuil est de 3 500, de 3 800 F, et qui au-dessous de ce seuil, par des politiques de proximité, aident des gens qui peuvent gagner 4 000 ou 4 200 F mais qui sont dans des situations spécifiques. Je crois comme Jacques Barrot qu'une participation progressive de l'usager, en fonction de ses ressources, irait dans le bon sens. Telles sont les trois raisons qui nous conduisent à refuser le texte en l'état, et à reprendre les propositions de Jacques Barrot.

Une réflexion pour finir. Le récent recensement a été cause de déception pour beaucoup de communes, parce que leur population croît beaucoup moins qu'elles ne l'espéraient. Mais nous savons que, dans un recensement, il y a 1, 2, voire 3 % de population insaisissable, en raison de systèmes de participation sociale, de familles monoparentales vraies ou fausses, qui font que certains ne souhaitent pas être recensés, de peur de conséquences sur les prestations.

Il manque dans ce débat une référence à l'expérience de nos voisins européens. Quand je considère la politique sociale du Danemark, de la Suède, de la Grande-Bretagne, et tout le débat sur le workfare et le welfare, je me dis que nous devrions en tirer des leçons. Je crains les effets psychologiques et politiques de notre situation sur des personnes qui travaillent dur pour un petit salaire, et qui ont le sentiment d'être exclues, par rapport à d'autres catégories, d'un système de prestations. Je crois que nous devrions y réfléchir. (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF, du groupe DL et du groupe du RPR)

Mme Odette Grzegrzulka - Au nom des députés socialistes, je répondrai à M. Barrot avec respect, et surtout avec indulgence. Je comprends votre dépit et votre amertume (Murmures sur les bancs du groupe UDF) devant tout ce que vous auriez voulu faire si vous étiez resté ministre, ou si M. Juppé vous en avait laissé les moyens quand vous le fûtes... Mais nous, socialistes, ne sommes pas animés par la nostalgie d'une symphonie inachevée, mais par l'ardent désir de travailler, de construire une société plus juste, et d'améliorer l'accès aux soins. Certes quelques-unes de vos questions participaient d'un vrai débat. Mais je m'étonne de certaines de vos critiques ou de vos craintes infondées, qui montrent bien que vous n'avez pas suivi assidûment les travaux de la commission.

Depuis deux mois en effet, la commission a multiplié les auditions et les réunions de travail avec les associations et les organismes complémentaires. Vingt heures de débat en commission, vingt-quatre auditions : nous avons beaucoup travaillé, mais nous vous avons peu vu. Peut-être avez-vous participé aux débats par procuration, mais cela ne nous a pas frappés. Alors il vous faut du toupet (Murmures sur les bancs du groupe UDF) pour oser dire que le texte est insuffisamment préparé, et vouloir le renvoyer en commission !

Face à l'architecture de rêve que vous nous avez proposée, je souhaite seulement combler quelques défaillances de votre mémoire. Si l'on avait suivi votre rythme quand vous étiez ministre, il aurait fallu quatre ans pour aboutir à la couverture universelle.

J'ai bien lu votre discours d'il y a deux ans sur la loi de cohésion sociale, et vos déclarations aux Echos du 15 avril 1997. En 1995, c'était le début de la concertation ; en 1997, première présentation du projet de loi en conseil des ministres ; et la concrétisation de l'AMU pour chaque affilié n'interviendrait qu'en 2000... Et tout cela pour un projet virtuel, qui s'est dissous dans la dissolution ! Alors que nous, après avoir débattu dix mois, sommes en mesure de voter des dispositions contre l'exclusion (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste). Ah, nostalgie, quand tu nous tiens ! Regrets, sur quoi l'enfer se fonde... (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste ; sourires)

Mais trêve de poésie. Les Français nous attendent. Vite au travail : nous avons hâte de débattre. Les socialistes voteront contre le renvoi en commission (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe RCV)

Mme Muguette Jacquaint - A entendre les orateurs de l'opposition, sur tous les bancs, nous partagerions la même logique...

Un député UDF - Les mêmes objectifs, pas la même logique.

Mme Muguette Jacquaint - Chacun reconnaît que les gens sont de plus en plus en difficulté, et ne peuvent plus faire face à leurs besoins sanitaires. Mais, au travers des trois motions de procédures qu'a défendues l'opposition, qu'entendons-nous ? Pour l'un, il y a trop d'assistance. Pour l'autre, c'est trop onéreux. Pour le troisième, le projet n'est pas prêt, il faut encore attendre... Je me souviens d'un candidat -que je ne nommerai pas- à l'élection présidentielle qui insistait sur la nécessité de réduire la fracture sociale. Puis on a attendu qu'elle se réduise toute seule, ce qui n'a pas eu lieu. Et un jour il y a eu une autre fracture... Car ce que veulent les gens aujourd'hui, ce ne sont pas des déclarations de principe, mais des actes !

M. Charles de Courson - Très bien !

Mme Muguette Jacquaint - Un an après, nous avons voté la loi contre l'exclusion. Aujourd'hui la CMU fait l'objet d'une attente. Les gens ne peuvent plus attendre pour se soigner. C'est pourquoi, avant qu'il y ait encore une autre fracture, nous voulons que cela réussisse, et que les gens puissent se soigner. Le débat a commencé depuis un mois et demi ; il se poursuivra sur les amendements. Mais il est temps de réduire la fracture sociale : n'attendons plus ! (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste, du groupe socialiste et du groupe RCV)

Mme Roselyne Bachelot-Narquin - Vous avez sous-entendu, Madame la ministre, que nous voterions la motion de Jacques Barrot uniquement par souci politicien et par désir d'opposition systématique. Et vous avez évoqué le débat sur le RMI. Mais ce dernier a été voté à l'unanimité, ou quasiment, sur les bancs de l'opposition. Un député qui m'a précédé sur ces bancs avait avancé dès 1982 l'idée du RMI. Face à ce député, Jean Narquin, se trouvaient au banc du Gouvernement Nicole Questiaux et Jack Ralite. Ils ont écarté l'idée comme inutile, parce que grâce au socialisme il n'y aurait plus de chômage...

La discussion générale a montré que de nombreux points n'avaient pas été examinés en profondeur, ou n'avaient pas reçu de solution satisfaisante. Des membres de l'opposition l'ont dit, mais aussi de la majorité, et même du groupe socialiste. M. Barrot, enfin, vient de pointer magistralement les insuffisances, les ambiguïtés, les opacités du texte, ainsi que les risques de dérive qu'il comporte, et a proposé, qui plus est, un véritable contre-projet. Le renvoi en commission s'impose donc (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL).

M. Denis Jacquat - Le renvoi n'est pas un rejet, mais un report temporaire, destiné à enrichir le texte. Deux points sont à améliorer en priorité. Le premier a trait au seuil, que nous tenons beaucoup à porter à 3 800 F, soit le niveau du seuil de pauvreté selon l'INSEE. Les associations partagent toutes ce point de vue, qui est aussi celui de la majorité de la commission, et il a fallu, fait rarissime, une seconde délibération en commission pour qu'un amendement en ce sens, d'abord adopté, soit finalement repoussé.

Le second problème est celui de l'effet de seuil lui-même, qu'il convient d'atténuer, de lisser au moyen d'une aide dégressive selon le revenu. On nous objecte qu'on pourra corriger les choses en faisant appel à des fonds sociaux, mais que de paperasse, d'attente, de déceptions supplémentaires en perspective ! Nous voulons tous instaurer cette CMU, et nous la voulons aussi parfaite que possible. Vous vous êtes dits ouverts à nos suggestions ; retenez celle de renvoyer le texte en commission !

La motion de renvoi en commission, mise aux voix, n'est pas adoptée.

M. le Président - J'appelle maintenant, conformément à l'article 91, alinéa 9 du Règlement, les articles du projet de loi dans le texte du Gouvernement.

ARTICLE PREMIER

M. Jean-Luc Préel - Cet article est celui qui crée la CMU, avec ses deux volets : la couverture de base et la couverture complémentaire. Nous approuvons naturellement le principe, mais certaines questions restent sans réponse. Les personnes qui, actuellement, refusent de faire les démarches donnant droit à l'AMG les feront-elles, demain, pour obtenir la CMU ? Pourquoi, d'autre part, n'avoir pas saisi l'occasion d'harmoniser les 19 régimes existants ? Quant à la gratuité de la complémentaire, l'effet de seuil sera pervers, car ceux qui sont au-dessus devront, eux, payer. La question du champ de compétences reste ouverte : validerez-vous l'accord conclu entre la CNAM et les complémentaires ? Notre idée est d'accorder une aide, dégressive suivant le revenu, pour l'accès à la couverture complémentaire : cela permettrait à la fois de responsabiliser les personnes, de supprimer l'effet de seuil et de respecter les compétences respectives des deux secteurs.

Enfin, je regrette que si peu soit fait pour la prévention, pour laquelle notre pays est très mal placé en Europe : nous dépensons pour elle 200 F seulement par personne et par an, contre 12 500 F pour les soins, et les actions des différentes caisses, administrations et associations sont mal coordonnées. J'ai proposé à plusieurs reprises la création d'une agence nationale régionalisée et d'une enveloppe spécifique à la prévention, mais l'article 40 m'interdit de le faire sous forme d'amendement.

M. Yves Bur - Cet article réaffirme le droit à la santé, consacré par le préambule de la Constitution, et s'efforce de le rendre effectif. Nul ne saurait évidemment s'y opposer, mais nous divergeons non moins évidemment quant aux moyens d'y parvenir, et je doute que la seule affirmation d'un droit suffise à garantir concrètement son exercice. Il est indécent que notre pays continue d'avoir l'un des systèmes de soins les plus performants et les plus coûteux du monde, mais aussi l'un des moins aptes à soulager la détresse sociale. En dépit du travail de proximité accompli par les collectivités locales et les associations, 150 000 personnes demeurent exclues ou éloignées de l'accès aux soins, tandis que 9 millions de nos concitoyens n'ont pas de couverture complémentaire. Or, le ciblage du dispositif sur les 6 millions de personnes les plus défavorisées ne permet pas de remédier aux inégalités dans leur ensemble, l'effet de seuil excluant 3 millions de personnes aux revenus plus que modestes, et en particulier les personnes âgées bénéficiant du Fonds de solidarité vieillesse et les personnes handicapées.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin - Je l'ai dit lors de la discussion générale, nous trouvons deux éléments positifs dans ce projet : l'ouverture de l'assurance maladie à tous, avec une simple condition de résidence -où nous retrouvons notre projet d'AMU ; le droit ouvert à chacun de bénéficier d'une assurance complémentaire. Nous reviendrons au cours du débat sur les risques de dérives, sur le fait que la CMU n'est pas universelle et qu'on ne s'attaque pas aux vraies causes de la non-prise en charge de beaucoup de nos concitoyens. Mais pour exprimer notre accord de principe avec les objectifs du projet, nous voterons l'article premier (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR).

M. Jean Bardet - Cet article résume toute la philosophie du projet. On ne peut assurément que souscrire à ses intentions, mais l'enfer est pavé de bonnes intentions. L'article ne fait d'ailleurs que reprendre le préambule de la Constitution, qui est entré peu à peu dans les faits, avec la Sécurité sociale des salariés, puis les caisses agricoles et toutes celles qui ont suivi. En 1978, ce fut la création de l'assurance volontaire. Il n'y a donc là rien de nouveau.

D'autre part, l'article ne considère que le côté financier, il n'aborde pas la dimension proprement sociale de certaines difficultés à accéder aux soins. Il faut incriminer l'extrême marginalisation, qui fait que certains hospitalisés -en général en urgence- sortent prématurément sur leur demande et n'appliquent pas le traitement qu'on leur prescrit. Je souhaiterais que chaque département ait un SAMU social, comme Paris.

M. Germain Gengenwin - La mise en oeuvre de la CMU répond à un objectif louable, mais son dispositif appelle plusieurs critiques. D'abord, la recentralisation de ce que les départements maîtrisent fort bien. Ensuite, l'effet de seuil qui aboutira à une protection sociale à plusieurs vitesses, rien n'étant prévu pour les personnes qui ont plus de 3 500 F de revenu, alors que ce sont elles qu'il faudrait aider, car elles n'ont pas les moyens de souscrire une protection sociale complémentaire, bien que ce soit souvent elles qui acceptent des emplois peu rémunérés. Nous proposerons un crédit d'impôt plutôt qu'un relèvement du seuil.

M. Jean Vila - Elles ne paient pas d'impôt !

M. Germain Gengenwin - Ensuite, il faut éviter de mettre en concurrence les différentes instances si l'on veut éviter la confusion : chacun doit conserver son domaine de compétence.

Mme Muguette Jacquaint - L'article premier pose le principe de l'accès aux soins pour tous, avec cette "couverture maladie universelle", un peu technocratique dans son appellation. En affirmant que la protection de la santé et l'égal accès à la prévention et aux soins constituent un impératif national et une priorité des politiques sociales, on intègre dans la loi l'esprit du préambule de la Constitution, qui proclame que "la nation assure à l'individu et à la famille les conditions nécessaires à leur développement et garantit à tous, notamment à l'enfant, à la mère et aux vieux travailleurs, la protection à la santé."

Toutefois, cet article démontre aussi l'échec de la politique passée de santé. En cinquante ans, notre système de protection sociale a fortement évolué mais depuis vingt ans, il subit les effets du chômage et de ses corollaires, pauvreté et exclusion. On parle de 150 000 personnes exclues totalement de la protection sociale et de six millions de personnes qui ne bénéficient pas de couverture complémentaire.

Beaucoup de personnes à faible revenu ne peuvent, de fait, accéder aux soins, à cause du coût de la santé. C'est pourquoi la protection complémentaire et la dispense d'avance de frais sont une garantie indispensable pour permettre un réel accès aux soins de qualité pour tous. Cet article permettra d'améliorer l'état sanitaire de nombreuses personnes.

Vous l'avez dit, Madame la ministre, en citant le président d'ATD quart monde : "Le droit à la santé est, des six droits fondamentaux, l'un des plus évidents, il ne souffre pas de contradictions théoriques". Il est donc primordial que cette notion inscrite à l'article premier soit maintenue. L'amendement de M. Boulard, tendant à supprimer l'énoncé du principe fondamental, ne saurait être approuvé. Je regrette, d'autre part, que l'article 40 ait fait écarter nos amendements. Le groupe communiste souhaite du moins voter cet article en l'état.

M. Marcel Rogemont - L'article premier crée la CMU, et il en définit les principes. Il m'a été agréable d'entendre nos collègues de droite annoncer qu'ils le voteraient, même si ce plaisir doit être bref. Approuvant l'objectif, ils ne peuvent s'empêcher de crier "Prem !", comme dans la cour de récréation, pour dire qu'ils y avaient pensé avant nous. Puis ils commenceront à tirer à vue sur toutes les dispositions du projet (Protestations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL). Il faut pourtant faire entrer celui-ci au plus vite dans le droit positif. La CMU, ce n'est d'ailleurs pas seulement l'AMU à laquelle la droite avait songé, c'est aussi l'accès à un régime complémentaire, c'est aussi le tiers payant, c'est un droit à la santé complet, et facile d'accès.

Ensuite, il faut que l'esprit partenarial puisse vivre, avec les caisses, les organismes complémentaires, les associations. En tout cas, cet article premier sera une étape de l'histoire sociale : à côté du RMI, il y aura la CMU.

M. Denis Jacquat - Une véritable politique de santé doit impérativement inclure un volet prévention. Celle-ci est malheureusement le parent pauvre du système français, même si des progrès ont pu être enregistrés ces dernières années, avec notamment les conférences régionales de la santé qui ont précédé la conférence nationale, et les états généraux de la santé.

La prévention relève aujourd'hui d'une multitude d'acteurs alors même que l'on ne dispose que de peu de moyens. Une certaine rationalisation s'impose sans doute. Par ailleurs, la prévention ne peut atteindre ses objectifs sans éducation sanitaire. Celle-ci doit se faire à l'école.

M. Gérard Grignon- Si l'amendement 48 rectifié à l'article 1 précisant le champ territorial d'application de la CMU est adopté, la CMU ne s'appliquera pas à Saint-Pierre-et-Miquelon, et ce à la demande même des élus du territoire sur l'avis des responsables des organismes sociaux. Pourquoi ? La réglementation locale prévoit la couverture sociale de l'ensemble de la population, à l'exception des personnes couvertes par l'établissement national des invalides de la marine. Un système de tiers payant généralisé a été institué à l'hôpital comme à la pharmacie hospitalière et à la pharmacie libérale. Le conseil général prend en charge sur son budget social les cotisations au régime de base et au régime complémentaire des bénéficiaires du RMI et de l'aide médicale. 27 personnes seulement sont concernées au titre du RMI pour un montant de cotisations de base de 25 448 F. Quatre personnes seulement ont souscrit une assurance personnelle. La petitesse du territoire, qui facilite le suivi, y rend inutile l'application de la CMU.

En outre, celle-ci entraînerait des complications juridiques. En effet, le projet de loi fait référence à certaines dispositions du code de la sécurité sociale, du code rural ou du code des collectivités territoriales qui ne sont pas applicables dans l'archipel.

Pour toutes ces raisons, il n'est pas souhaitable que ce texte s'applique à Saint-Pierre-et- Miquelon.

M. Denis Jacquat - L'amendement 233 tend à supprimer l'article 1, superfétatoire, le droit à la protection de la santé figurant déjà dans le préambule de la Constitution de 1946.

Cet article souligne de surcroît l'une des failles du projet qui crée une inégalité en raison d'un important effet de seuil. Les personnes dont les revenus dépassent tout juste le seuil devront soit payer elles-mêmes leur couverture complémentaire soit renoncer à certains soins, ce que l'on cherche précisément à éviter.

M. Jean-Claude Boulard, rapporteur - Cet article, qui crée un droit à la couverture maladie universelle, représente une avancée par rapport aux textes actuels. La commission demande donc le rejet de l'amendement.

Mme la Ministre - Avis défavorable.

L'amendement 233, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean-Claude Boulard, rapporteur - L'amendement 48 rectifié a pour objet de supprimer la première phrase qui relève davantage de l'exposé des motifs ou du préambule de la Constitution, de définir le champ territorial d'application du texte et de remplacer l'expression "personnes les plus défavorisées" par celle de "personnes dont les revenus sont les plus faibles".

Mme la Ministre - Avis favorable.

M. Yves Bur - Je défendrai simultanément les deux sous-amendements 289 et 292. Nous pensons que le droit à une couverture maladie de base relève de la solidarité nationale, non la couverture complémentaire. Nous préférerions qu'une participation, naturellement soumise à condition de ressources, soit demandée. S'il n'est pas question de demander une contribution aux personnes dont les revenus ne dépassent pas le RMI, celles dont les revenus sont compris entre le RMI et 3 500 F pourraient contribuer, de façon symbolique. Une aide financière aux modalités restant à définir pourrait également être versée à certaines personnes ayant des difficultés à assumer le coût d'une couverture complémentaire.

M. Jean-Claude Boulard, rapporteur - La commission est défavorable à ces sous-amendements. L'article premier crée un droit, il ne se contente pas de faciliter l'accès à une couverture maladie. Par ailleurs, la question de la contribution sera examinée plus loin dans le texte.

Les sous-amendements 289 et 292 repoussés par le Gouvernement, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.

L'amendement 48 rectifié, mis aux voix, est adopté.

L'article premier est ainsi rédigé.

ART. 2

M. Jean-Luc Préel - L'article 2 supprime l'assurance personnelle. En tant que président du groupe d'études sur les conjoints survivants, je souhaite appeler votre attention sur les veuves. Celles-ci bénéficient aujourd'hui d'une couverture maladie comme ayant droit d'un assuré jusqu'à un an après son décès ou jusqu'à ce que leur dernier enfant ait atteint l'âge de trois ans. Par ailleurs, les veuves bénéficient au titre de l'assurance personnelle des prestations en nature de l'assurance maternité sans limitation de durée, les cotisations étant prises en charge par la CAF. Ces droits seront-ils maintenus ?

M. Denis Jacquat - Membre du groupe d'études présidé par M. Préel, je souhaite, comme ce dernier, que nous n'oublions pas les veuves.

Mme la Ministre - Les droits des conjoints survivants sont liés aussi à un article spécifique du code de la Sécurité sociale qui perdure. Tous ces droits, y compris les prestations en nature, seront donc maintenus.

L'article 2, mis aux voix, est adopté.

ART. 3

M. Yves Bur - L'article 3 précise les critères d'affiliation pour bénéficier de la CMU. Le critère de résidence simplifiera les démarches. En revanche, le critère de ressources fige l'architecture du projet, le condamnant à ne s'adresser qu'aux plus démunis. Or, même avec des ressources supérieures à 3 500 F, certaines personnes peuvent rencontrer des problèmes. En réalité, en choisissant l'assistance totale pour les personnes en-dessous de ce seuil, vous ne pourrez pas relever ce seuil car le coût serait alors considérable.

Les bénéficiaires de l'allocation adulte handicapé ont beaucoup de difficultés à souscrire une assurance complémentaire en raison même de leur handicap.

Il me paraît indécent de ne pas les inclure, non plus d'ailleurs que les bénéficiaires du minimum vieillesse.

Enfin, il est inséré un article L. 380-2 qui instaure une cotisation proportionnelle aux revenus au-delà d'un certain plafond. Il serait souhaitable que ce principe de proportionnalité s'applique à tous les régimes de Sécurité sociale, notamment à ceux des indépendants et des agriculteurs, au lieu des cotisations forfaitaires appliquées actuellement en-dessous d'un certain seuil.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin - M. Rogemont va continuer à se réjouir car nous allons voter cet article 3, qui reprend le critère d'affiliation retenu dans notre propre projet d'AMU.

M. André Aschieri - J'avais déposé un amendement à cet article 3 tendant à faire passer le seuil de 3 500 à 3 800 F et à prévoir un "lissage" des cotisations. Après avoir été adopté en commission le 21 avril, cet amendement a été repoussé le 22, mais devait être représenté en séance plénière. Or ce soir il a été retiré en application de l'article 40. Nous avions pourtant prévu une recette correspondante, sous la forme d'une augmentation des droits sur les tabacs.

On sait que plus tôt on soigne les gens, moins cela coûte cher à la collectivité, en définitive.

Je ressens donc une certaine amertume devant la façon dont on traite le Parlement et notamment les partenaires de la majorité plurielle. J'ai le sentiment que la démocratie est plus forte dans le moindre petit village que dans cet hémicycle ! (Exclamations sur les bancs du groupe du RPR et du groupe UDF)

La CMU représente pour moi une avancée historique. Mais on aurait pu discuter démocratiquement mon amendement en séance, quitte à le repousser.

M. Denis Jacquat - Comme M. André Aschieri, je trouve dommage que le plafond de revenus n'ait pas été fixé à 3 800 F, seuil de pauvreté retenu par l'INSEE. Madame la ministre, à défaut de monter jusqu'à 3 800 F, accepterez-vous au moins de porter ce plafond à 3 540,42 F, afin d'inclure les titulaires du minimum vieillesse ?

Mme Muguette Jacquaint - L'article 3 pose comme critère d'affiliation à la CMU la résidence stable et régulière en France. Si ce critère permet à la quasi-totalité des femmes actuellement exclues de la Sécurité sociale d'en bénéficier, il laisse cependant à l'écart les étrangers en situation irrégulière, les "sans-papiers", alors qu'aujourd'hui ils bénéficient de l'aide médicale gratuite au bout de trois ans de résidence prouvée en France.

Le principe de l'universalité de la CMU ne peut être ainsi battu en brèche dès l'article 3. C'est pourquoi le groupe communiste avait déposé en commission un amendement substituant la notion de "résidence durable" à celle de "résidence stable et régulière", mais il est tombé sous le couperet de l'article 40, ce qui est très regrettable. Pourtant, de nombreuses associations caritatives et de défense des étrangers soulignent que cette population est souvent victime de pathologies aggravées par son non-accès aux soins et soutiennent notre position.

M. le Président de la commission - Monsieur Aschieri, la commission avait effectivement adopté votre amendement en première délibération. Il était clair qu'il tombait sous le coup de l'article 40, mais plutôt que de laisser jouer cet article, j'ai préféré demander une deuxième délibération, afin que nous ayons un débat politique de fond. Celui-ci a bien montré comment nous entendions résoudre ce problème de seuil.

Je souligne donc que la commission a eu une position de respect par rapport à la question que vous posiez et je m'en suis expliqué avec vous en tête-à-tête.

Mme la Ministre - Je voudrais rassurer M. Bur en lui rappelant qu'en vertu du code du travail les bénéficiaires de l'allocation aux adultes handicapés ont droit aux prestations maladie et maternité sans payer de cotisation s'ils ne sont pas affiliés par ailleurs. D'autre part, un certain nombre de bénéficiaires du minimum vieillesse ont droit au remboursement à 100 % des soins au titre de maladies de longue durée.

M. Bernard Accoyer - Les amendements 36 à 40 inclus de M. Mariani sont défendus.

M. Jean-Claude Boulard, rapporteur - Rejet total. Notre Sécurité sociale, depuis sa création en 1945...

M. Alfred Recours, rapporteur - Sous le général de Gaulle !

M. Jean-Claude Boulard, rapporteur - ...n'a jamais été fondée sur un critère de nationalité, mais sur celui de la résidence. C'est un principe fondamental. J'espère que la majorité de l'Assemblée ne sera pas seule à rejeter cet amendement.

Mme la Ministre - Avis très négatif. Le Gouvernement est très choqué par cet amendement.

L'amendement 36, mis aux voix, n'est pas adopté, non plus que les amendements 37, 38, 39 et 40.

M. Bernard Accoyer - L'amendement 138 vise à renforcer l'exigence de régularité de séjour pour bénéficier de la CMU. Jusque-là, en l'absence d'affiliation liée à une activité professionnelle, les étrangers ressortissaient soit de l'aide médicale gratuite, soit de l'assurance personnelle, qui est supprimée par ce texte.

L'aide médicale gratuite ou l'assurance personnelle impliqueraient une cotisation, ou au moins un financement fiscal. En posant le principe de l'affiliation automatique et sans cotisation de ces résidents, le Gouvernement change de logique. Il crée une ambiguïté entre le financement fiscal de la solidarité et contributif de l'assurance. Ce flou est inquiétant pour l'avenir de la protection sociale. La loi de juillet 1994 visait à séparer les branches pour mieux apprécier les efforts contributifs, il est préoccupant de sortir de cette logique.

M. Jean-Claude Boulard, rapporteur - Avis défavorable. Vous oubliez que les prestations en nature du régime général ne sont plus financées par une contribution mais par la CSG. On n'est donc déjà plus dans une logique de cotisation. L'amendement a simplement pour objet de rappeler à l'administration de faire son travail. C'est inutile.

Mme la Ministre - Avis négatif.

L'amendement 138, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Yves Bur - L'assurance personnelle est financée par le régime général, mais les autres régimes de base peuvent participer à sa gestion.

Ainsi, 10 000 assurés personnels sont gérés par la MSA. L'amendement 326 a pour objet de maintenir cette délégation de gestion dans le nouveau dispositif de l'assurance sur critère de résidence.

M. Jean-Claude Boulard, rapporteur - Avis négatif. Cet amendement est satisfait à l'article 19, qui maintient à la MSA les personnes affiliées par le biais de l'assurance personnelle.

Mme la Ministre - Même avis.

L'amendement 326, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Bernard Accoyer - L'amendement 121 soulève la question des abus dans l'affiliation gratuite de certains ressortissants. L'affiliation au régime général par assurance personnelle s'élève à 11 000 F par an. Ceux qui détourneraient le dispositif léseraient les autres assurés et l'amendement propose des sanctions pour ceux qui se rendraient complices de ces abus.

M. Jean-Claude Boulard, rapporteur - Nous pourrons, à l'occasion de l'examen de l'amendement 52 à l'article 6 qui traite de la mauvaise foi, renforcer le dispositif répressif et reprendre cet amendement. Donc, pour l'instant, avis défavorable.

Mme la Ministre - Même avis. Nous aurons l'occasion d'en reparler sur le fond.

L'amendement 121, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Bernard Accoyer - L'amendement 41 est défendu.

L'amendement 41, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Bernard Accoyer - L'amendement 122 précise que le plafond qui sera retenu doit être fixé par la loi de financement de la Sécurité sociale, pour que les nouvelles dispositions sur l'affiliation gratuite soient bien prises en compte dans l'équilibre budgétaire général.

M. Yves Bur - L'amendement 293 va dans le même sens. Il est d'usage que ce type de plafond soit défini par décret, mais, pour une question de cette importance, il conviendrait que le Parlement puisse le modifier en tenant compte à la fois des paramètres budgétaires et de l'évolution du dispositif.

Mme la Ministre - L'amendement 444 indexe le plafond sur les prix pour tenir compte de l'inflation. Avis négatif sur le 122 et sur le 293.

M. Jean-Claude Boulard, rapporteur - Avis favorable sur l'amendement du Gouvernement. Avis négatif sur les deux autres. On oublie un peu trop l'article 37 de la Constitution qui confie au pouvoir réglementaire la fixation des seuils en matière de droits sociaux.

L'amendement 122, mis aux voix, n'est pas adopté, non plus que le 293.

L'amendement 444, mis aux voix, est adopté.

L'article 3 ainsi modifié, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 3

M. Yves Bur - Ce projet met en place une couverture maladie de base gratuite pour les personnes à très faible revenu vivant de transferts sociaux.

Cependant, de nombreux travailleurs indépendants ou exploitants agricoles ont également des revenus très modestes. Or ces personnes resteront affiliées à leurs régimes respectifs, dans le cadre desquels elles acquittent de lourdes cotisations maladie forfaitaires minimales : 340 F par mois pour les indépendants et 290 F par mois pour les agriculteurs. Cela peut représenter un prélèvement supérieur à 20 % pour des personnes à très faible revenu. Il y a là un problème d'équité que l'amendement 328 vise à résoudre.

M. Jean-Claude Boulard, rapporteur - Avis défavorable. Cet amendement est étranger au champ de la CMU. Il réforme un régime particulier. On pourrait aborder ce sujet dans un débat sur l'harmonisation des régimes maladie.

Mme la Ministre - Cet article concerne les personnes qui ne sont couvertes par aucun régime. Là, il s'agit d'adhérents. Certes, le problème de leur contribution existe et je rappelle d'ailleurs qu'elle a été diminuée par le transfert sur la CSG, mais nous sommes en dehors de ce projet.

L'amendement 328, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Président - L'amendement 327 tombe. A la demande de la commission, l'amendement 294 est réservé jusqu'avant l'article 38.

ART. 4

M. Jean-Luc Préel - Je regrette que vous n'ayez pas voulu harmoniser les dix-neuf régimes existants. Nous allons au-devant de difficultés notamment pour les ressortissants de la MSA et de la CANAM. D'autre part, vous allez proposer dans un article ultérieur que la CMU soit accessible dès 16 ans. Dans ces conditions, un étudiant non encore inscrit pourra venir en septembre déclarer à la CPAM qu'il dispose d'une résidence stable et de moins de 3 500 F par mois et bénéficiera de ce fait de la CMU !

Sera-t-il tenu ensuite, lors de son inscription à l'université, de s'affilier au régime étudiant, dont l'article 16 du projet prévoit le maintien ? S'il dispose de ressources inférieures à 3 500 F, pourquoi perdrait-il, en devenant étudiant, son droit à être affilié à la CMU ? Ou bien vous acceptez cette idée, et il n'y a plus de régime étudiant ; ou bien vous la refusez, mais alors il y a rupture du principe d'égalité dans l'accès au droit pour les jeunes de plus de seize ans.

Mme Jacqueline Fraysse - Cet article affirme l'immédiateté de l'ouverture des droits : ainsi toute personne justifiant de sa résidence sera prise en charge par le régime général. On sait qu'aujourd'hui 150 000 personnes ne sont couvertes par aucun régime. Nous apprécions donc l'approche positive et simplificatrice dont elles vont bénéficier. Mais, en raison même de leur situation, il ne suffit pas d'ouvrir un guichet à la caisse primaire pour qu'elles soient en mesure de faire la démarche. Ce qui nous conduit à souhaiter quelques précisions. Ainsi pour les personnes sans domicile ou dépourvues de papiers d'identité : quelles mesures seront-elles prises pour leur assurer le bénéfice effectif de l'immédiateté affirmée par le texte ?

Par ailleurs les professions médico-sociales et les associations font sur le terrain un travail difficile. Elles continueront d'autant plus à le faire si elles y sont encouragées et trouvent des réponses adaptées aux problèmes qu'elles rencontrent. Mais elles ne pourront le faire que si elles ont les moyens, y compris en personnel, nécessaires pour aller à la rencontre des personnes qui ne sont pas en mesure de faire elles-mêmes la démarche, et risquent ainsi de rester encore sur le bord du chemin. Dans mon département des Hauts-de-Seine, certaines caisses de Sécurité sociale ferment déjà des guichets faute de personnel. Ces mesures sont positives, mais nous sommes préoccupés des moyens de leur application.

Mme la Ministre - Je veux répondre au problème soulevé par M. Préel. Les règles qui font qu'un jeune, jusqu'à vingt ans, est pris en charge par la Sécurité sociale de ses parents restent les mêmes. Après vingt ans, quand il est étudiant, il doit s'affilier à la Sécurité sociale étudiante : sur ce point non plus rien n'est changé. En revanche, un jeune en rupture de famille pourra désormais demander sa propre carte de Sécurité sociale. Mais, qu'il ait une carte personnelle ou non, après vingt ans, il devra comme aujourd'hui s'affilier au régime étudiant.

M. Yves Bur - L'amendement 295 a pour but de prendre en compte les difficultés de certaines personnes très marginalisées, qui ne peuvent même plus justifier de leur identité ou de leur résidence. Il est donc proposé, dans le premier alinéa de cet article, de substituer aux mots : "sur justification de son identité et de sa résidence stable et régulière", les mots : "sous réserve qu'elle s'engage à justifier de son identité et de sa résidence stable et régulière dans un délai fixé par décret". Il s'agit de laisser à ces personnes le temps nécessaire pour refaire leurs papiers.

M. Jean-Claude Boulard, rapporteur - Défavorable. Les justifications demandées sont minimales. Et il y a d'autres moyens d'établir son identité que la carte d'identité. Par ailleurs les personnes sans domicile peuvent se domicilier auprès d'une association.

Mme la Ministre - Même avis. En outre, dans la loi contre l'exclusion, nous avons voté la carte d'identité gratuite pour les personnes sans domicile.

L'amendement 295, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Muguette Jacquaint - Le texte conditionne l'ouverture des droits à la justification d'une résidence "stable et régulière". Cela réduit la portée universelle du texte. Nous sommes en outre un peu étonnés, car, dans un avis de 1981, le Conseil d'Etat avait souligné l'ambiguité des termes "stable et régulière", et retenu comme critère subsidiaire pour l'affiliation au régime de base la seule notion de résidence "durable". Notre amendement 153 tend donc à substituer "durable" à "stable et régulière". De nombreuses associations soutiennent cette démarche. C'est également une question de santé publique. Cette position est d'ailleurs soutenue par M. Boulard dans son rapport, lorsqu'il se demande si le moment n'est pas venu de mettre fin à deux distinctions : celle entre accès à l'hôpital et accès à la médecine de ville d'une part, celle entre résidence régulière et résidence sans titre de séjour d'autre part. Nous pensons qu'il faut retenir le seul critère de résidence durable pour ouvrir le droit à l'affiliation. Le rejet de cet amendement créerait une discrimination envers ceux qui bénéficient aujourd'hui de l'aide médicale gratuite, et par exemple les étrangers en situation irrégulière, ce qui serait contraire à l'esprit de la loi.

M. André Aschieri - L'amendement 422 repose sur la même argumentation. Dans son avis de 1981, le Conseil d'Etat opposait aux termes "stable et régulière" les deux adjectifs "durable" et "habituelle", entre lesquels il ne choisissait pas. Mme Jacquaint propose le premier, moi le second, mais je m'en remettrai à l'avis de la majorité.

M. Jean-Claude Boulard, rapporteur - Ces préoccupations ont leur légitimité, et je confesse que j'ai moi-même soulevé cette question dans le rapport. Il n'apparait cependant pas souhaitable de rouvrir, à l'occasion de la CMU, le débat sur les étrangers en situation irrégulière. Le critère de régularité de la résidence est aujourd'hui applicable pour l'affiliation au régime de base, et il n'a donc pas paru opportun de le modifier. Quant à l'aide médicale aux étrangers en situation irrégulière, le projet la maintient intégralement. Avis défavorable sur les deux amendements.

Mme la Ministre - Même avis.

L'amendement 153, mis aux voix, n'est pas adopté, non plus que l'amendement 422.

M. Jean-Claude Boulard, rapporteur - L'amendement 50 de la commission tend à permettre aux services sociaux et aux associations et organismes à but non lucratif d'accompagner dans leurs démarches les personnes en recherche de leur affiliation.

Mme la Ministre - Favorable.

M. Bernard Accoyer - Si cet amendement ne pose pas de problème quant aux services sociaux, le terme "associations" est trop large. N'importe quelle association loi de 1901 pourrait jouer ce rôle, et il pourrait en résulter des abus ou des détournements de la démarche.

Je propose donc, par le sous-amendement 140, d'insérer, après "associations", les mots : "reconnus d'utilité publique".

M. Jean-Claude Boulard, rapporteur - La commission l'a jugé trop restrictif.

M. Bernard Accoyer - Une association sportive, par exemple, pourra-t-elle faire de l'accompagnement ?

M. Jean-Claude Boulard, rapporteur - Non, encore que sa vocation intégratrice puisse être réelle... (Sourires) L'amendement pose déjà le principe de l'agrément.

Le sous-amendement 140, repoussé par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Bernard Accoyer - Le sous-amendement 141 étend l'habilitation aux sociétés d'assurances et aux institutions de prévoyance, dans la mesure où les mutuelles n'en sont pas exclues a priori.

M. Jean-Claude Boulard, rapporteur - Avis défavorable, car il s'agit, rappelons-le, du régime de base. Y faire intervenir les assureurs et les institutions de prévoyance serait un début de privatisation, perspective contre laquelle vous vous êtes vous-même élevé à la tribune.

M. Bernard Accoyer - Vous dirigez de force les populations précaires vers les CPAM. L'adoption du sous-amendement vous ferait échapper à ce reproche, que vous adressent les associations humanitaires.

Le sous-amendement 141, repoussé par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'amendement 50, mis aux voix, est adopté.

M. Jean-Luc Préel - Le projet du Gouvernement prévoit que l'assurance maladie pourra proposer des complémentaires aux bénéficiaires de la CMU. L'amendement 190 s'inspire de la même logique, en assurant la réciprocité (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste). Le système français est fondé sur une séparation claire entre les deux domaines. De deux choses l'une, donc : ou bien vous validez la convention passée entre la CNAM et le complémentaires, et la question de la frontière ne se pose plus ; ou bien vous permettez à la CNAM de faire de la complémentaire, et il faut permettre aussi aux complémentaires de faire de la couverture de base, sans quoi elles feront constater à Bruxelles qu'il y a rupture d'égalité. Mon amendement est, en quelque sorte, un amendement de provocation (Sourires), destiné à montrer que vous risquez de faire sauter un système auquel nous sommes tous attachés.

M. Jean-Claude Boulard, rapporteur - La commission n'a pas l'habitude de répondre à la provocation, et a donc repoussé l'amendement. Nous aurons l'occasion de revenir ultérieurement sur la question soulevée.

Mme la Ministre - Même avis. Cet amendement rend floues des frontières parfaitement nettes, que le projet ne modifie aucunement.

M. Jean-Luc Préel - Je comprends mal pourquoi, après avoir jugé que l'accord entre la CNAM et les complémentaires n'était pas recevable, vous proposez que la CNAM puisse proposer des couvertures complémentaires.

Mme la Ministre - Ce n'est pas cela : elle jouera seulement le rôle de liquidateur pour le compte de l'Etat, comme elle le fait actuellement pour les deux millions d'allocataires du RMI.

L'amendement 190, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'article 4 ainsi modifié, mis aux voix, est adopté.

ART. 5

M. Yves Bur - L'amendement 297 est défendu.

M. Jean-Claude Boulard, rapporteur - Est-il bien nécessaire de rappeler aux organismes qu'ils doivent faire leur travail ?

L'amendement 297, repoussé par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'article 5, mis aux voix, est adopté.

ART. 6

M. Yves Bur - L'amendement 331 supprime la déconnexion entre le paiement des cotisations et l'ouverture du droit à prestations, qui déresponsabilise les assurés, voire les incite à ne pas payer, et laisse craindre un surcoût pour le régime des professions indépendantes.

M. Jean-Claude Boulard, rapporteur - Paradoxalement, la connexion actuelle ne responsabilise pas ipso facto les assurés, dans la mesure où les régimes sont tentés de les désaffilier ou de suspendre leurs droits lorsqu'ils sont défaillants. La question des mauvais payeurs de mauvaise foi est réglée par un amendement de la commission au présent article.

L'amendement 331, repoussé par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean-Claude Boulard, rapporteur - L'amendement 51 précise que les personnes cessant de remplir les conditions requises restent affiliées pour un an.

Mme la Ministre - Un décret prévoit déjà le maintien entier du droit à prestations pendant trois ans.

M. Jean-Claude Boulard - Compte tenu de cette explication, je retire l'amendement.

M. Yves Bur - L'amendement 332 est défendu.

L'amendement 332, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean-Claude Boulard, rapporteur - L'amendement 52 prévoit des sanctions en cas de non-paiement délibéré des cotisations, non motivé par une incapacité financière. Elles s'appliquent, naturellement, à l'assuré et non à ses ayants droit.

Mme la Ministre - Je comprends le souci du rapporteur, mais l'amendement ne produit pas l'effet annoncé, car il ne concerne ni la CANAM ni la MSA. Je m'en remets à la sagesse de l'Assemblée.

M. Jean-Claude Boulard, rapporteur - Mieux vaut le voter pour l'instant.

L'amendement 52, mis aux voix, est adopté.

M. Yves Bur - L'amendement 333 substitue une cotisation proportionnelle à la cotisation minimale forfaitaire. Actuellement, les personnes qui relèvent du régime d'assurance maladie des professions indépendantes doivent acquitter une cotisation minimale dont le montant est de 4 445 F pour les artisans et de 4 058 F pour les commerçants et les membres des professions libérales. Dans le cadre de la couverture maladie universelle, les personnes qui relèveront de l'article L. 380-1 du code de la Sécurité sociale n'acquitteront pas de cotisation minimale, mais une cotisation proportionnelle à leurs revenus. En outre, elles ne seront soumises à une cotisation que si leurs ressources dépassent un plafond fixé par décret.

La cotisation proportionnelle éviterait que les personnes exerçant une activité professionnelle indépendante ne soient pénalisées par rapport aux inactifs et préviendrait le travail au noir.

M. Jean-Claude Boulard, rapporteur - Défavorable. On sort du cadre de la CMU.

Mme la Ministre - Défavorable.

L'amendement 333, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'article 6 ainsi modifié, mis aux voix, est adopté.

L'article 7, mis aux voix, est adopté.

ART. 8

M. Bernard Accoyer - L'amendement 261 prend en compte la situation de tous les travailleurs frontaliers, car il n'existe pas de régime d'assurance obligatoire dans tous les Etats, en particulier en Suisse, et en Allemagne où le seuil d'affiliation obligatoire s'élève à 3 400 marks par mois. Cela corrigera une injustice.

M. François Loos - L'amendement 274 est identique. Le Gouvernement a exclu les frontaliers du projet. Comme il n'y a pas un seul régime dans les pays voisins, je propose de remplacer "au" par "à un".

M. Jean-Claude Boulard, rapporteur - Favorable.

Mme la Ministre - Le Gouvernement n'a pas oublié les frontaliers. Ils sont exclus du régime de résidence, comme ils le souhaitaient. Ce que vous proposez est déjà prévu dans le projet, mais je ne refuse pas les amendements s'ils vous paraissent utiles.

M. Bernard Accoyer - Merci.

Les amendements 261 et 274, mis aux voix, sont adoptés.

M. François Loos - L'amendement 273 précise : "dans le respect des dispositions de la loi Evin du 31.12.89 renforçant les garanties offertes aux personnes assurées contre certains risques".

M. Jean-Claude Boulard, rapporteur - Défavorable. On n'est pas là dans le cadre de la CMU.

Mme la Ministre - L'amendement n'aurait aucun effet, l'article 8 concernant les régimes de base, et la loi Evin les seuls régimes complémentaires.

L'amendement 273 est retiré.

M. François Loos - L'amendement 272 remplace "agents retraités d'une organisation internationale" par "retraités" -pourquoi faire une différence entre des personnes qui sont dans la même situation ?

M. Jean-Claude Boulard, rapporteur - Défavorable. Pourquoi interdire ?

Mme la Ministre - L'amendement serait en effet restrictif, je crois que l'article a été mal lu.

L'amendement 272, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'article 8, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 8

M. le Président - L'amendement 410 est réservé jusqu'avant l'article 38.

ART. 9

L'article 9, mis aux voix, est adopté.

ART. 10

M. Bernard Accoyer - Cet article soulève plusieurs problèmes -il s'agit de l'incidence sur la CNAF de la mise en place de la CMU.

Le I organise un transfert de certaines actions en faveur d'un parent isolé par exemple, vers l'impôt, ce qui fait perdre un symbole. D'autre part, le II modifie la clé de répartitions du produit des prélèvements sur les revenus du patrimoine, de telle sorte que la CNAF perd 2,5 milliards, alors qu'elle n'est déchargée que de 2,2 ou 2,3 milliards- soit 200 millions de francs au moins de manque à gagner, parce qu'en pratique, nous dit-on les départements assumeraient certaines des charges visées. Mais on ne nous donne aucun élément précis à ce sujet. Une fois de plus, on gaspille quelques centaines de millions !

M. Jean-Luc Préel - Je suis prêt à retirer les amendements 191 et 298 si on me confirme ce que j'ai cru comprendre tout à l'heure.

M. Jean-Claude Boulard, rapporteur - On supprime la prise en charge, comme l'a dit Mme la ministre, parce que la cotisation est supprimée : les conjoints survivants seront affiliés au régime général sans avoir à payer de cotisation.

M. Bernard Accoyer - L'amendement 123 tend à supprimer l'article dont je viens d'expliquer combien les dispositions étaient préoccupantes.

Mme la Ministre - Je redis que les cotisations sont supprimées mais que les conjoints survivants qui bénéficient aujourd'hui de la couverture du régime général à titre gratuit continueront d'en bénéficier, qu'il s'agisse des veuves et divorcées ayant élevé trois enfants ou des bénéficiaires de l'allocation parent isolé. Le montant du transfert induit n'a suscité aucune contestation de la part de la CNAF.

Les amendements 191, 298 et 123 sont retirés.

L'article 10, mis aux voix, est adopté.

ART. 11

M. Jean-Claude Boulard, rapporteur - L'amendement 53 est de précision.

L'amendement 53, mis aux voix, est adopté.

L'article 11 ainsi modifié, mis aux voix, est adopté.

La suite du débat est renvoyée à une séance ultérieure.

Prochaine séance ce matin, jeudi 29 avril, à neuf heures.

La séance est levée à une heure.

          Le Directeur du service
          des comptes rendus analytiques,

          Jacques BOUFFIER


© Assemblée nationale


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