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Session ordinaire de 1999-2000 - 17ème jour de séance, 43ème séance

1ÈRE SÉANCE DU MARDI 2 NOVEMBRE 1999

PRÉSIDENCE DE M. Philippe HOUILLON

vice-président

Sommaire

          LOI DE FINANCES POUR 2000 -deuxième partie- 2

          SERVICES DU PREMIER MINISTRE : SERVICES GÉNÉRAUX,
          SGDN, CONSEIL ÉCONOMIQUE ET SOCIAL, PLAN,
          JOURNAUX OFFICIELS 2

          SECRÉTARIAT GÉNÉRAL DE LA DÉFENSE NATIONALE 13

          CONSEIL ÉCONOMIQUE ET SOCIAL 13

          PLAN 13

          BUDGET ANNEXE DES JOURNAUX OFFICIELS 13

          ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR, RECHERCHE ET TECHNOLOGIE 13

La séance est ouverte à dix heures.

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LOI DE FINANCES POUR 2000 -deuxième partie-

L'ordre du jour appelle la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2000.

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SERVICES DU PREMIER MINISTRE : SERVICES GÉNÉRAUX, SGDN, CONSEIL ÉCONOMIQUE ET SOCIAL, PLAN, JOURNAUX OFFICIELS

M. Gilles Carrez, suppléant M. Georges Tron, rapporteur spécial de la commission des finances pour les Services généraux, le Conseil économique et social, le Plan et le budget annexe des Journaux officiels - Je vous prie tout d'abord d'excuser l'absence de M. Georges Tron, rapporteur spécial, empêché. Je traiterai brièvement de l'analyse des crédits du Conseil économique et social, des Journaux officiels et des Services généraux du Premier ministre comme de ceux du Plan, l'essentiel étant consigné dans le rapport. J'évoquerai en revanche plus longuement l'intéressante question de l'avenir de la planification.

Le budget du Conseil économique et social augmente de 3,3 % pour atteindre 189 millions. L'essentiel de cette augmentation financera l'évolution des indemnités des membres, les pensions des anciens membres et l'indemnité de secrétariat des présidents de groupe. Je me limiterai à ces quelques constatations, en regrettant peut-être que les travaux du Conseil économique et social ne soient pas toujours utilisés autant qu'ils pourraient l'être.

S'agissant du budget annexe des Journaux officiels, les recettes prévues pour 2000, qui augmentent de 13,1 %, devraient permettre de reverser au budget général 247 millions. Les effectifs de quelque mille personnes resteront inchangés.

Mais, dans un budget qui s'élève à 1,2 milliard, les quatre cinquièmes des recettes proviennent des annonces légales et moins de 10 % des ventes au numéro ou des abonnements. De plus, même si les services télématiques et la diffusion sur cédérom prennent progressivement le relais de la diffusion sur papier, les abonnements et les ventes régressent de façon régulière. Enfin, les Journaux officiels -mais la responsabilité de cette situation ne leur incombe que partiellement- n'ont pas encore généralisé la transmission informatisée des données qui permettrait d'éviter une ressaisie très coûteuse.

Le Gouvernement serait donc bien inspiré d'appliquer rapidement les nouvelles orientations qu'il a retenues, afin de poursuivre la réduction des coûts de fonctionnement en développant la saisie à la source ; d'adapter la politique éditoriale pour promouvoir l'utilisation des supports électroniques ; d'engager une baisse des tarifs des annonces légales, lesquelles ne doivent pas constituer une rente pour l'Etat mais un service rémunéré à sa juste valeur.

Pour le budget des Services généraux du Premier ministre, l'essentiel de l'importante augmentation des crédits -près de 20 %- porte sur les crédits des fonds à la communication et à la fonction publique, qui seront évoqués séparément, et la progression des moyens destinés à l'administration générale ne résulte que de changements apportés au périmètre budgétaire des Services généraux.

Le nombre d'organismes rattachés au Premier ministre est très élevé, puisque trente-deux émargent au budget du Premier ministre. Réexaminer le bien-fondé de ces multiples organismes à vocation interministérielle et de leur rattachement administratif serait opportun.

Je crains en effet que, bien souvent, ils ne fassent double emploi avec des services ministériels compétents au fond, ou, pire qu'ils ne mènent à une action contradictoire, et je ne suis pas certain qu'il faille maintenir des organismes interministériels spécialisés, qui concurrencent les services ministériels normalement compétents, alors même qu'existent des organes de coordination interministérielle comme le Secrétariat général du Gouvernement, le SGDN ou le commissariat du Plan.

En tout état de cause, la répartition des crédits alloués aux différentes instances rattachées au Premier ministre mériterait certainement d'être réexaminée. A cet égard, la commission a souhaité appeler l'attention du Gouvernement sur la faiblesse des moyens dont dispose la mission interministérielle de lutte contre les sectes. Inquiète du développement des sectes et du poids économique qu'elles ont acquis, comme la dernière commission d'enquête parlementaire l'a démontré, la commission a adopté une observation demandant que des crédits soient ouverts afin d'accroître l'efficacité de l'action de la mission.

Enfin, les Fonds spéciaux, après avoir baissé de 1994 à 1997, ne diminuent pratiquement plus depuis la loi de finances pour 1998.

Je ne ferai aucun commentaire sur l'évolution des crédits du Plan, vous renvoyant pour cela au rapport. La question n'est pas, me semble-t-il, celle du niveau des crédits, mais de savoir à quoi servent ces crédits et les quelque 360 personnes qui travaillent dans l'orbite du Plan.

Le Premier ministre a confié au commissariat général du Plan d'importantes missions dont le détail est précisé dans le rapport. En tant que gaullistes, nous ne pouvons que nous réjouir de cette volonté de réhabiliter le rôle du Plan, qui exige que les missions des organismes qui gravitent autour du commissariat général soient clarifiées. Le cadre réglementaire organisant l'évaluation des politiques publiques a également été modernisé par la création d'un conseil national d'évaluation. Nous ne pouvons, une fois encore, que nous en réjouir. Mais il faut que la réforme lancée par le Gouvernement soit suivie d'effets, car le Plan, dans l'esprit des Français, n'est pas la traduction bureaucratique d'une économie entièrement administrée, mais il manifeste plutôt la volonté d'éclairer l'avenir et d'assurer la cohérence des choix, en concertation avec les partenaires sociaux.

J'en suis convaincu, le Plan peut jouer un rôle extrêmement utile. Pour mieux tenir compte de la mondialisation, il convient tout d'abord de développer et de rationaliser la prospective économique, sociologique et technologique.

En second lieu, l'Etat doit pouvoir, en permanence, apprécier le résultat des politiques qu'il a conduites ou qu'il souhaite engager.

Enfin, le commissariat du Plan pourrait jouer le rôle d'un organe de coordination interministérielle pour assurer la cohérence des interventions publiques.

En d'autres termes, le Plan a un avenir. Il reste à prendre les mesures concrètes qui en feront l'outil capable d'éclairer le débat économique, de préparer les décisions et d'évaluer les résultats des politiques menées.

Enfin, la commission des finances évoque avec une certaine constance l'évaluation financière des contrats de plan. Le commissariat du Plan constate chaque année, en les déplorant, de sérieuses carences dans le suivi et la consolidation des engagements de crédits. La Cour des comptes elle-même observe dans son rapport de 1998 qu'il est «difficile, voire impossible, d'obtenir au sujet des contrats en cours des chiffres à la fois complets, précis et incontestables».

Des sommes considérables sont donc engagées par l'Etat et par les collectivités locales sans que l'on soit en mesure d'en connaître l'emploi effectif. En fait d'évaluation, nous n'en sommes qu'à une étape préalable, celle de la simple quantification des crédits.

Je me garderai de polémiquer à ce sujet car cette carence n'est malheureusement pas nouvelle. Mais il n'est pas admissible que nous ne puissions connaître la consommation effective des crédits publics.

Depuis plusieurs années, la commission des finances déplore l'absence de quantification financière et de suivi des contrats de plan. Or les choses n'ont guère évolué. Pourtant, au moment où l'Etat s'apprête à lancer une nouvelle génération de contrats de plan, il est indispensable que leur exécution fasse enfin l'objet d'un suivi financier fiable.

Sous le bénéfice de l'observation qu'elle a adoptée à propos de la mission interministérielle de lutte contre les sectes, la commission des finances vous demande d'adopter les crédits du Conseil économique et social, des Journaux officiels, des Services généraux du Premier ministre et ceux du Plan (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR).

M. Patrick Ollier, rapporteur pour avis de la commission de la production, pour le Plan - Je ne traiterai que des crédits du Plan pour constater que, malheureusement, l'effort des gouvernements successifs en faveur de la politique menée par le commissariat général ne cesse de s'affaiblir. L'Etat est pourtant garant de la compétitivité économique et de la cohésion de la nation ! Il doit donc, impérativement, se donner les moyens d'une réflexion prospective sur des objectifs communs clairement définis au terme de la concertation la plus large. Notre pays avait la chance de disposer d'un outil qui le permettait.

Je suis donc déçu et inquiet de constater que le Gouvernement a renoncé à l'utiliser. La mission de l'institution profondément originale qu'est le commissariat général du Plan se trouve réduite à la réalisation d'études, certes intéressantes, mais peu susceptibles de redonner espoir à un corps social inquiet, qui attend que s'affirme une véritable ambition collective. Nous ne nous sommes pas concertés avec Gilles Carrez, et j'observe avec intérêt que notre avis est le même.

Issu de la formation gaulliste, je trouve particulièrement dommage au moment où la France s'ouvre vers l'Europe -je suis de ceux qui ont voté le traité de Maastricht- et vers le monde, notamment au travers de l'OMC, que le Gouvernement ne s'appuie pas davantage sur le commissariat général du Plan. Lorsque la France discute avec ses partenaires européens d'aménagement du territoire, elle a du mal à défendre une position cohérente faute d'indications prospectives claires, faute de cette «colonne vertébrale» que pourrait précisément lui procurer le Plan.

Le budget pour 2000 confirme malheureusement ces renoncements, et ce malgré les efforts des responsables du commissariat général du Plan. Je tiens à cet égard à rendre hommage à M. Charpin, avec qui nous avons pu nous entretenir de façon tout à fait constructive. Je note d'ailleurs qu'il existe un consensus entre les fonctionnaires de cette administration et tous les parlementaires, quelle que soit leur appartenance politique, sur la nécessité de redonner toute sa signification au Plan.

Faute de planification, les crédits soumis à notre avis ne sont plus que des crédits d'études. C'est pourquoi je suggère dans la conclusion de mon rapport de rejeter ces crédits. Alors même que des repères seraient de plus en plus nécessaires dans notre société, non seulement le Gouvernement ne s'appuie pas sur le commissariat général du Plan, mais il a même renoncé à utiliser, la commission le regrette, des instruments comme le schéma national d'aménagement du territoire, qui permettait notamment d'associer plus étroitement le Parlement aux décisions.

Le commissariat général du Plan n'a certes pas l'exclusivité de la réflexion prospective mais la création de cellules de prospective par la DATAR et de très nombreux ministères ne sert ni l'efficacité de l'action ni la bonne gestion des fonds publics. Quant au conseil d'analyse économique, j'avais déjà demandé l'an passé, sans obtenir de réponse, pourquoi on avait mis en place auprès du Premier ministre cette cellule, désormais dotée de locaux, d'un secrétariat et de crédits substantiels, pour accomplir des tâches dont le commissariat général du Plan pourrait parfaitement être chargé. La concurrence entre les deux institutions est d'ailleurs source d'ambiguïté. Ainsi les conclusions des deux rapports sur les retraites demandés par le Premier ministre à ces deux administrations divergent du tout au tout. Est-il sérieux de procéder de la sorte, d'autant que cela n'est pas neutre pour les dépenses publiques ?

Les crédits du commissariat général du Plan pour 2000 progressent de 4,8 % pour atteindre 159,8 millions mais cette augmentation résulte essentiellement de l'abondement des crédits d'études. La commission aurait bien sûr préféré qu'ils augmentent de façon à permettre au commissariat général du Plan de remplir toutes ses missions.

Enfin, dernière incohérence, comment peut-on sérieusement négocier les contrats de Plan Etat-régions alors que n'existe pas cette «colonne vertébrale» dont j'ai parlé tout à l'heure, cette vision à long terme de l'avenir des territoires qui composent notre pays ?

M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat au budget - Mais si, elle existe.

M. le Rapporteur pour avis - Comment laisser les régions s'engager seules dans ces négociations alors qu'a été supprimé le schéma national d'aménagement du territoire, seul garant de la cohérence de l'ensemble des contrats de plan mais aussi de la péréquation, et donc d'une juste répartition des moyens entre les régions ? Les schémas de services collectifs prévus dans la loi de Mme Voynet étaient censés pallier cette absence de schéma national. Mais ils ne sont pas bouclés -certains n'ont même pas encore vu le jour- alors que les contrats de plan Etat-régions vont être conclus. Cela aussi m'a conduit à proposer le rejet des crédits du commissariat général du Plan.

Celui-ci, sous l'énergique direction de M. Charpin, a entrepris une réflexion pour améliorer l'évaluation des contrats de plan. La circulaire du 9 décembre 1993 notamment devrait être adaptée et je reconnais, à cet égard, que le souhait exprimé par le Premier ministre de généraliser l'évaluation va dans le bon sens. Les nouvelles procédures doivent permettre d'avoir une vue d'ensemble de la politique d'aménagement du territoire et des effets de la contractualisation. Une évaluation globale de l'ensemble des contrats de plan est indispensable.

Le Plan a un avenir : encore faut-il que nos dirigeants aient la volonté de lui en donner un. Retrouvons ici sur tous les bancs cette volonté : il y va de l'intérêt de notre pays. Tous les gouvernements à venir de quelque couleur qu'ils soient, ont à y gagner. «L'ardente obligation» dont parlait le général de Gaulle ne relève pas seulement d'une vision sentimentale de la planification. Cette vision prospective de l'avenir est bien une impérieuse nécessité.

Bien qu'ayant proposé, à titre personnel, de rejeter ces crédits, je vous demande, en tant que rapporteur, de les voter, la commission ayant estimé qu'il devait en être ainsi (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR).

M. Pierre Hériaud, rapporteur spécial de la commission des finances pour le secrétariat général de la défense nationale - La nomination d'un nouveau secrétaire général de la défense nationale à l'été 1998 s'est accompagnée d'une approche plus dynamique de la place et du rôle de cette institution.

Depuis un an, le SGDN a conforté sa mission première de coordination interministérielle dans le domaine de la défense et a assuré la préparation et le suivi des décisions des comités et conseils de défense. Il a aussi développé sa capacité de veille et d'expertise.

La multiplication des cellules de réflexion et d'action démontre que le SGDN est redevenu un organisme vivant. Le Gouvernement a clairement souhaité accompagner cette évolution puisque le projet de budget du SGDN pour 2000, d'un montant de 156 millions, augmente de 19 % par rapport à celui de 1999, après intégration, il est vrai, du service central de sécurité des systèmes informatiques.

L'organisation du SGDN a été quelque peu modifiée du fait de l'inflexion de ses missions traditionnelles et de la reconnaissance de nouveaux domaines de son action. Il n'est plus question de «pôles» au SGDN mais désormais de «directions». L'ancien pôle «défense et nation» a été restructuré en une direction «protection et sécurité de l'Etat».

Cette réorganisation tend à moderniser l'action du SGDN dans les domaines du développement et de la protection des réseaux gouvernementaux de communication, de la protection du secret défense et de la planification de la sécurité. La nouvelle direction a lancé une réflexion interministérielle sur la vulnérabilité des infrastructures et fera des propositions tirant les leçons du passage à l'an 2000. Elle contribue aussi aux travaux sur la lutte contre le terrorisme nucléaire, chimique et biologique. Chargée de la conception des plans de défense et de sécurité, elle a organisé en février 1999 un exercice national sur la sécurité des installations nucléaires militaires.

Ses missions dans le domaine de la protection du secret défense ont pris un tour européen et international.

Cette direction bénéfice du concours du centre de transmissions gouvernemental, le CTG, dont le budget est défini par le SGDN. Le CTG est chargé des transmissions du Président de la République et du Premier ministre pendant leurs déplacements et du traitement des messages au profit de tous les ministères, soit près de 4 500 messages par jour. Le CTG gère aussi le réseau interministériel chiffré Rimbaud, qui compte 4 000 abonnés.

Les activités de la direction «Affaires internationales et stratégiques» ont été liées aux crises internationales, notamment au Kosovo et en Russie.

L'action de la direction «Technologies et transferts sensibles» a porté principalement sur les exportations de matériel de guerre et sur la lutte contre la prolifération des armes nucléaires. Le contrôle des exportations d'armement est une priorité assignée par le Premier ministre. La direction concernée assure le secrétariat de la commission interministérielle d'études d'exportation des matériels de guerre et prépare les directives en ce domaine. Un renforcement de ses moyens semble nécessaire.

Le service central de la sécurité des systèmes d'information, le SCSSI, a été totalement intégré au SGDN, désormais appelé à prendre en compte cette nouvelle dimension de la sécurité du pays.

Le comité interministériel pour la société de l'information a décidé la création d'une cellule de veille et d'alerte pour lutter contre les tentatives d'intrusion sur les réseaux informatiques. Il a également infléchi la politique en matière de cryptologie.

En vertu du décret du 20 avril 1989, le SGDN assure le secrétariat du comité interministériel du renseignement, qui a en charge la coordination des différents services de renseignements et élabore un plan national de renseignement. Des crédits ont été affectés à cette fin. Si votre rapporteur ne conteste pas la légitimité de l'inscription de ces fonds sur le fascicule du SGDN, il regrette que la lecture de ces crédits ne soit guère aisée. Il faudrait un peu plus de transparence pour ces crédits, qui représentent 18 % du budget total du SGDN.

Quels sont les moyens du SGDN ? Ils sont passés de 130 à 156 millions. Après la réforme initiée par M. Picq, les effectifs ont fortement décru, passant de 518 personnes en 1995 à 218 en 1998, mais ils ont remonté en 1999 et la création de 7 postes supplémentaires les portera à 241 personnes en l'an 2000, auxquelles s'ajoutent 32 mises à disposition.

Les crédits de fonctionnement passent de 53 à 58 millions, et les crédits d'équipement de 19,4 à 33 millions.

Les crédits du CTG s'élèveront à 8 millions, permettant la modernisation de la cryptophonie.

Le programme civil de défense disposera de 17 millions. Ce chiffre est proche, après la chute enregistrée en 1999, de ceux de 1997 et 1998, mais il est vrai que celui de 60 millions avait précédemment été atteint.

En conclusion,  l'évolution du budget du SGDN est positive et la commission des finances vous propose de l'adopter.

Un mot sur l'Institut des hautes études de la défense nationale, théoriquement doté de 8 millions, mais dont le budget réel atteint 41 millions. Je voudrais insister sur l'importance de bien assurer le lien armée-nation. Le total des journées de formation a été de 17 505 au cours de l'année scolaire 1998-99. Il existe maintenant, au niveau des régions, un tripôle composé du recteur d'académie, du général commandant la place et du président des anciens élèves de l'IHEDN. Les échos que j'ai obtenus au sujet des journées de préparation à la défense montrent que si le bilan est positif dans ma région, les pays de Loire, il est variable ailleurs. Je souhaite que la coordination soit bien assurée, de manière à ce que les expériences positives soient étendues à l'ensemble du territoire (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF).

M. Jean-Michel Boucheron - Très bien !

M. le Secrétaire d'Etat - Je demande une suspension de séance de cinq minutes.

La séance, suspendue à 10 heures 40, est reprise à 10 heures 50.

M. le Président - Deux orateurs sont inscrits pour intervenir sur les services du Premier ministre.

M. Jacky Darne - Ces budgets sont hétérogènes mais leur examen nous permet de mieux comprendre les outils dont dispose le Gouvernement en ce qui concerne le dialogue social, avec le Conseil économique et social, les décisions stratégiques avec le Plan, l'information et la communication, ainsi que l'administration générale.

Cette dernière représente l'essentiel du budget des services du Premier ministre, avec 3,088 milliards. Mais la maîtrise des dépenses permet une réduction de 0,2 % de ce poste. Les crédits des fonds spéciaux restent identiques, à 393,7 millions.

Des efforts significatifs sont faits pour la rénovation des cités administratives et des hôtels ministériels.

Ces crédits financent également des politiques nationales importantes. 4,7 millions vont au conseil de prévention contre le dopage, par transfert du ministère de la jeunesse et des sports. 11 millions sont affectés à la mission interministérielle de développement des nouvelles technologies de l'information et de la communication ; 0,7 million aux missions interministérielles de lutte contre la toxicomanie.

A l'avenir, il conviendra d'augmenter les moyens de la mission interministérielle contre les sectes, ainsi que ceux du médiateur. Les 81 personnes de ses services ont traité 45 000 affaires en 1998, soit 600 par personne, et pour le premier semestre 1999 le nombre de saisines a déjà augmenté de 40 %.

Les dépenses liées à l'information et la communication augmentent de façon significative, essentiellement pour appliquer les lois votées. 650 millions supplémentaires sont affectés à la réforme de l'audiovisuel public pour financer la compensation par l'Etat de l'exonération de la redevance T.V.

Les crédits de la Documentation française progressent beaucoup, de 67 à 97 millions...

Pour les Journaux officiels, l'excédent d'exploitation s'élève à 247 millions contre 139 en 1999 et 45 en 1998. Les produits augmentent de 13 %, les charges de 3,7 %. Mais l'excellent chiffre d'affaires est dû surtout à une augmentation de 18,5 % sur les annonces légales tandis que les abonnements régressent de 10 %, les travaux de 28 % et les autres activités -bases de données, copies...- de 54 %. Ce service pratique des tarifs trop élevés. Est-il normal qu'il en coûte 9,21 F la minute pour consulter les conventions collectives sur le Minitel 36-29 ?

Le prix des CD n'est pas celui du marché. Il faudrait revoir cette politique des prix. De même, la Documentation française n'offre plus de rapport public à moins de cent francs. A l'occasion de la loi de finances, il paraît un livre de poche bleu à 30 ou 40 F sur la situation de la France. Pourquoi n'en fait-on pas autant à la Documentation française ?

M. Louis Mexandeau - Tout à fait !

M. Jacky Darne - Cela étant, tous les services d'information du Premier ministre, le site internet et la lettre du Gouvernement sont de grande qualité ; les CIRA sont très efficaces, mais trop peu connus.

Les crédits du Plan augmentent de 4,1 %, ce qui est significatif. Mais si deux rapporteurs d'inspiration gaulliste ont cité le Plan, c'est que le budget importe moins que les missions. Or la lettre de mission que le Premier ministre a adressée au commissaire général, le 24 novembre 1998, définit ainsi le rapport qui lui est commandé : «Conçu en amont des décision publiques, mais visant à déboucher sur l'action, ce rapport aura un quadruple objectif : éclairer les perspectives à moyen et long terme pour l'ensemble des citoyens, décrire les possibilités de développement et de mise en _uvre pour les projets des acteurs économiques, sociaux, territoriaux, explorer, dans le nouvel environnement international créé par l'euro, les stratégies économiques et sociales possibles et souhaitables, clarifier les choix à moyen terme des autorités publiques».

Un tel rapport pourrait être commandé tous les 3 ans puisqu'il a vocation à éclairer les politiques structurelles. Les critiques faites au Plan n'ont donc pas de fondement. Simplement, il faudrait améliorer l'évaluation qui n'est pas satisfaisante, par exemple pour les contrats de plan Etat-régions. Certes, depuis 1998, on évoque la création d'un fonds national d'évaluation et depuis 1993, le contrat de plan Etat-régions doit inclure des procédures d'évaluation. Mais il faut étudier les difficultés de façon qualitative.

S'agissant des organismes rattachés au Plan, j'estime que l'on fait trop peu de publicité aux excellents travaux de comparaison internationale de l'IRES. De même, le Conseil économique et social qui représente les forces vives de la nation est trop peu consulté et ses avis sont trop peu diffusés.

Globalement, ces budgets sont excellents et je vous invite à les voter (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Jean-Pierre Giran - Je partage la volonté qui a été exprimée de renforcer l'évaluation des contrats de plan, mais je me félicite de l'augmentation des moyens affectés à l'évaluation des politiques publiques. Il conviendra, en particulier, de mesurer les effets directs, pervers et d'aubaine des contrats emplois-jeunes.

J'en viens au Plan ou plutôt à ce qu'il en reste. Le temps est de plus en plus lointain où Pierre Massé disait que la planification française devait concilier l'attachement à la liberté et à l'initiative individuelle avec une orientation commune du développement et où il décrivait le Plan comme «le concert de toutes les forces économiques et sociales de la nation». Malgré les lettres du Premier ministre, il n'est guère facile, naturellement, de trouver la partition et même parfois le chef d'orchestre !

Tout d'abord, le Plan n'est plus qu'un simple bureau d'études parmi d'autres. A côté du Conseil économique et social, du conseil d'analyse économique, des structures associées ou des centres de recherches universitaires, le commissariat du Plan publie des études ponctuelles sur l'énergie, les retraites ou la mondialisation. Mais rien ne caractérise son rôle de coordination et de synthèse. Et le conseil national d'évaluation aurait beaucoup à faire s'il examinait les activités voisines de structures de plus en plus concurrentes et de moins en moins complémentaires.

Ma deuxième observation a trait au coût social de la mise en veilleuse du Plan. Jadis, la France organisait une vaste concertation pour mettre en cohérence les projets de ses différents acteurs économiques et sociaux. L'Etat lui-même engageait sa parole à moyen terme afin que la stratégie des autres agents tienne compte de sa manifestation de volonté. Du reste, le Premier ministre semblait se rallier à cette démarche quand il indiquait, en mars 1998, que «les travaux du commissariat avaient vocation à converger vers un grand moment de mobilisation nationale autour d'une stratégie nationale de développement économique et social».

Malheureusement, la politique contractuelle est désormais une curiosité historique quand on voit la façon dont des lois et directives comme celles sur les 35 heures substituent la contrainte au contrat. Finalement, c'est, non pas le marché, mais le dirigisme qui a tué le Plan, en privant les agents économiques de liberté. A tel point qu'il n'y a pas si longtemps, dans l'affaire Michelin, le Premier ministre appelait les partenaires sociaux à des manifestations de rue plutôt qu'au dialogue ! On peut le regretter, mais n'est-ce pas ainsi que Mme Aubry a finalement renoncé à porter un coup fatal au paritarisme social ?

Enfin, au moment où la préparation du contrat de plan Etat-régions entre dans sa phase terminale, comment ne pas poser le problème des relations entre le Plan et la DATAR ?

Peut-on encore penser le long terme sans redessiner le territoire ? Que valent, dans une France mobile, où doivent émerger «pays» et «agglomérations», se renforcer les régions, se resituer les départements, des prospectives temporelles qui raisonneraient à structures territoriales données ?

Du reste, le volet territorial des contrats de plan, n'est-il pas inspiré par la DATAR ?

N'est-il pas temps de dépasser la dualité Plan-DATAR et de créer une structure investie de la double mission de définir la vision des pouvoirs publics dans le temps mais en tenant compte des évolutions dans l'espace ?

Bref, nous reprochons à ce budget de ne pas mobiliser les forces vives de notre pays autour d'un grand projet national.

Voilà pourquoi le groupe RPR ne votera pas les budgets des services du Premier ministre.

M. Gilles Carrez et M. Pierre Hériaud - Très bien !

M. le Secrétaire d'Etat - Je remercie les rapporteurs de la qualité de leurs rapports sur ces budgets, certes peu importants en masse mais essentiels au fonctionnement de la République. Je remercie M. Darne d'avoir souligné l'importance de certaines entités rattachées au Premier ministre, en particulier le médiateur. Il a, par ailleurs, fait un large tour d'horizon dont l'action du Gouvernement tiendra compte. D'autre part, j'essaierai de répondre aussi précisément que possible à M. Giran, dont les critiques ont été courtoises.

Je commencerai par le budget des Services généraux du Premier ministre, qui regroupe les crédits afférents à trois grandes catégories de services, en premier lieu ceux destinés à l'activité et au fonctionnement des services du Premier ministre et des organismes qui lui sont rattachés. M. Carrez s'est plaint de la multitude de ces organismes. Outre que la qualité de leur action importe plus que leur nombre, je lui fais observer que, depuis quatre ans, quatorze de ces organismes ont été supprimés, trois ont été rattachés à d'autres budgets, cependant que dix autres étaient créés et deux rattachés aux Services généraux du Premier ministre. Mais, je le répète, l'essentiel tient à l'action de ces organismes et M. Darne a souligné, à juste titre, la qualité des travaux de la mission interministérielle de lutte contre la toxicomanie.

En deuxième lieu, ce budget retrace les crédits alloués à cinq autorités administratives indépendantes : le médiateur de la République, le conseil supérieur de l'audiovisuel, la commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité, la commission consultative du secret de la défense nationale, et le conseil de prévention et de lutte contre le dopage. Les crédits correspondant à la mission interministérielle de lutte contre les sectes figurent également dans le budget des Services généraux du Premier ministre, mais ses personnels sont le plus souvent mis à disposition par d'autres administrations. Ses moyens financiers augmenteront à mesure qu'elle étendra ses activités. Je rends hommage au travail effectué par la commission d'enquête sur les sectes sous l'autorité de M. Alain Vivien. Je rassure M. Carrez et M. Darne : la mission interministérielle disposera des moyens nécessaires pour agir efficacement.

En troisième lieu, ce budget comporte les dotations de trois cabinets ministériels -Premier ministre, ministre des relations avec le Parlement et ministre de la fonction publique- ainsi que les fonds spéciaux.

Il s'élèvera, au total, à 4 856 millions en 2000, soit une progression de 861 millions due pour l'essentiel à l'augmentation de 777 millions des crédits ouverts au titre de la compensation des exonérations de redevances de télévision.

Nous parlons aujourd'hui du seul agrégat «administration générale», les autres devant faire l'objet de débats ultérieurs en présence des ministres concernés.

Les crédits consacrés à l'administration générale s'établissent à 1 565 millions. A structure constante, ils augmentent de 3,2 %.

La création de la messagerie interministérielle ADER -administrations en réseau- bénéficie de 11 millions. Ce réseau, destiné à être le support d'un véritable intranet des services de l'Etat et qui permettra progressivement à tous les services, centraux ou déconcentrés, de communiquer entre eux, constitue un élément important du programme d'action gouvernemental pour l'entrée de la France dans la société de l'information. Les services du Premier ministre joueront un rôle important dans l'application de ce programme, notamment en faisant évoluer le portail «Admifrance» des sites publics de l'Internet, créé et exploité par le Secrétariat général du Gouvernement.

Un effort est, par ailleurs, accompli pour l'entretien des cités administratives. Les crédits progressent de 21 millions, c'est-à-dire de 17 % , pour faire face à des nécessités impérieuses en matière de sécurité et d'entretien du patrimoine public.

Quant à la suppression du service national, elle oblige à trouver des solutions de substitution à la présence d'appelés du contingent. La création de vingt emplois et l'inscription de crédits permettant de recruter dix agents contractuels ne visent à assurer le remplacement que d'une partie des postes d'appelés qui ont déjà été supprimés ou qui le seront l'année prochaine.

Enfin, le projet de budget prévoit la mise en place de l'intégralité des crédits de fonctionnement de la commission du secret de la défense nationale, autorité administrative indépendante créée par une loi du 8 juillet 1998, et pour laquelle un crédit supplémentaire de 945 000 F est prévu en 2000.

J'en viens au budget du Secrétariat général de la défense nationale, bien que M. Hériaud, avec la clarté qui lui est coutumière, ait déjà presque tout dit.

Le Secrétariat général concentre son action sur l'animation du processus de décision interministérielle dans le domaine de la sécurité, et sur la prise en compte, au niveau du Premier ministre, d'un certain nombre de fonctions, telles que le contrôle des exportations ou la protection et la modernisation des transmissions gouvernementales.

Son action doit tenir compte des évolutions les plus récentes de l'environnement stratégique, diplomatique et technologique et des risques nouveaux qui apparaissent.

Le Gouvernement ayant souhaité donner un nouveau départ à l'institution, le budget pour 2000 inverse la tendance constatée ces dernières années. Entre 1995 et 1999, les effectifs budgétaires sont passés de 518 à 234 agents et le budget de 228 millions à 131 millions, alors même que le service central de la sécurité des systèmes d'informations lui était rattaché au 1er janvier 1999. Le budget pour 2000 augmente de près de 20 %, pour s'établir à 156 millions.

Les moyens nouveaux sont pour l'essentiel concentrés sur trois priorités.

Tout d'abord, la sécurité des systèmes d'information, qui représente à elle seule plus des deux tiers de cet accroissement. Comme l'a annoncé le Premier ministre lors de la dernière université d'été de la communication, le Secrétariat général doit assumer une mission d'impulsion, de coordination et d'expertise dans les domaines de la sécurité informatique, de la cryptologie, de la lutte contre les intrusions et les malveillances informatiques et de la protection des réseaux de l'administration et du service public.

Ensuite, le contrôle des transferts de technologies sensibles et des exportations de matériels de guerre.

Enfin, la relance du programme civil de défense, qui fait l'objet d'un effort pour répondre au risque que représente le terrorisme nucléaire, bactériologique et chimique. Je retiens les propos élogieux et les suggestions de M.Hériaud sur l'Institut des hautes études de défense nationale, auquel le Gouvernement est naturellement très attaché.

J'en viens au budget du Conseil économique et social, qui est prévu pour 2000 à hauteur de 189 millions, soit une augmentation de 3,3 %. Les deux tiers des dépenses sont consacrés aux indemnités allouées aux 231 conseillers et 72 membres de sections qui composent l'assemblée. Ces crédits couvrent également la subvention à la caisse de retraite des anciens membres du Conseil économique et social. La rémunération des 146 fonctionnaires et 20 agents contractuels qui concourent au fonctionnement de l'assemblée représente un quart des dépenses.

Les frais de fonctionnement matériel, soit 6 % du budget, couvrent tant la confection des avis, rapports et études que le fonctionnement courant de l'assemblée.

Le Conseil, qui vient de procéder à son renouvellement quinquennal, a engagé depuis plusieurs années une modernisation, qui lui a permis d'accélérer la mise à la disposition du public de ses avis et rapports, disponibles désormais sur Internet. Cette évolution répond au v_u de M. Carrez, qui souhaite que les compétences du Conseil soient utilisées au mieux. La diffusion plus large de ses travaux et l'attention que leur porte le Gouvernement me semblent de nature à le rassurer sur ce point.

Dans le budget pour 2000, l'accroissement des moyens de fonctionnement porte pour l'essentiel sur la dotation à la caisse de retraites dont, à chaque renouvellement, les effectifs augmentent de manière sensible -79 pensionnés supplémentaires en 2000.

Je précise, enfin, que depuis 1997, le Conseil économique et social a déjà réalisé d'importants travaux de sécurité. Aussi les crédits du titre V enregistrent-ils une légère diminution par rapport à l'année dernière.

J'en arrive au budget du commissariat général du Plan.

Les crédits inscrits au projet de budget du Plan pour 2000 s'élèvent à 159,8 millions, soit une hausse de 4,4 % par rapport à l'exercice précédent, due à une augmentation d'un million des crédits de fonctionnement liée à la relance de l'activité du commissariat et à une dotation supplémentaire de 5,5 millions pour l'évaluation des politiques publiques.

M. Carrez, dans une formule heureuse, a dit que le Plan avait un avenir ; je me permettrai d'ajouter qu'il a un bel avenir. En effet, depuis son installation, le Gouvernement estime nécessaire de pouvoir disposer d'une vision à long terme du développement économique et social, qui permette d'améliorer la cohérence, dans le temps et dans l'espace des actions des collectivités publiques et des acteurs économiques. En janvier 1998, le Premier ministre rappelait dans une lettre adressée au Commissaire général au Plan «la fonction particulière», dans le dispositif français de préparation des décisions gouvernementales, du commissariat général du Plan «animateur de l'analyse prospective et stratégique, lieu privilégié de la concertation socioprofessionnelle et de la réflexion interministérielle, programmateur et évaluateur des politiques publiques».

Dans la perspective de relance de l'action du commissariat, plusieurs chantiers ont été ouverts selon trois axes majeurs : développer l'économie française dans le cadre de la mondialisation et de l'intégration européenne, renforcer la cohésion sociale, moderniser les instruments de l'action publique.

Ces travaux ont tous été engagés et ont permis de «défricher» des pistes essentielles. Tel est le cas du rapport sur «L'Union européenne en quête d'institutions légitimes et efficaces» issu du groupe présidé par le professeur Jean-Louis Quermonne, qui analyse les améliorations institutionnelles concevables dans la perspective d'une communauté élargie. C'est également le cas du rapport sur l'avenir de nos retraites, remis au printemps, qui a livré un diagnostic concerté avec les partenaires sociaux et les différents régimes sur cette question. Plus qu'une simple étude, ce rapport constitue un document fondamental sur l'avenir de la retraite par répartition. Il insiste notamment sur la sensibilité du système au rythme de la croissance, selon que celle-ci est «molle», comme dans la période 1991-1997 ou, comme aujourd'hui, plus dynamique. Le champ très général de ce rapport interdit de le comparer à l'étude très ciblée menée par M. Taddei, dans le cadre du conseil d'analyse économique, sur les retraites progressives choisies.

Pour conclure sur le commissariat général du Plan, rassurer MM. Ollier et Giran et conforter les propos de M. Darne, je dirai que ces travaux sectoriels ne seraient pas suffisants s'ils ne convergeaient pas sur la recherche d'une «stratégie nationale de développement économique et social».

C'est dans ce cadre que s'inscrit la demande faite par le Premier ministre au commissaire au Plan d'établir un rapport sur les perspectives de la France, qui devrait satisfaire les aspirations des différents orateurs qui se sont exprimés. Il privilégiera quatre orientations essentielles : la lutte contre le chômage, le renforcement de la cohésion sociale, le développement de l'économie française dans le cadre européen, la modernisation des instruments de l'action publique.

J'ajoute, pour rassurer M. Ollier, que le Premier ministre a annoncé qu'il transmettrait ce rapport au Conseil économique et social, puis aux assemblées parlementaires, en l'accompagnant d'une lettre indiquant les principaux enseignements que le Gouvernement entend en tirer.

Le débat est engagé avec les acteurs économiques et sociaux dans le cadre d'une commission de concertation qui a commencé ses travaux le 21 octobre dernier. Ceux-ci se dérouleront sur une période de six mois, dans la perspective d'une remise du rapport au Premier ministre en avril 2000. Sans préjuger de son contenu, je gage que vous y trouverez la stratégie économique et sociale à moyen terme du Gouvernement, dont vous avez souhaité pouvoir disposer.

Enfin, le commissariat général du Plan est au c_ur du dispositif interministériel de l'évaluation des politiques publiques créé par le décret du 18 novembre 1998 et la circulaire du Premier ministre du 28 décembre. Il assure en effet le secrétariat du conseil national de l'évaluation et, à ce titre, il intervient dans l'ensemble du processus. Cette réforme a pour objectif de relancer l'évaluation, domaine dans lequel la France, c'est vrai, accusait du retard. Un premier programme national comportant cinq évaluations a été arrêté en juillet dernier par le Premier ministre.

D'autre part, un important programme régional est en cours. Plusieurs orateurs ont souhaité que le débat budgétaire sur le commissariat général du Plan devienne le cadre du débat sur l'aménagement du territoire. Mais le cartésianisme qui nous est cher ne demande-t-il pas que l'on laisse au Plan ce qui est au Plan, et à la DATAR ce qui est de son ressort ? Cette distinction de forme n'empêche pas que plus de 150 évaluations régionales ont déjà été lancées. Il est intéressant de constater qu'elles sont d'initiative régionale : ce sont les régions qui ont demandé l'appui de l'Etat pour examiner l'impact de telle ou telle politique suivie, qu'il s'agisse, par exemple, de la politique de la ville ou des aides aux entreprises.

Nous progressons donc rapidement dans la voie qu'ont déjà empruntée de nombreux pays étrangers. Il est évident, par ailleurs, que les contrats de plan seront d'autant plus faciles à suivre qu'ils auront été adoptés dans une transparence comptable et financière parfaite. Ils devront donc porter non seulement sur des moyens mais aussi sur des engagements de résultats. Ainsi, et ainsi seulement, les comparaisons deviendront possibles qui permettront un suivi efficace des décisions prises. Comme vous le constaterez, sur ce point, nous nous rejoignons.

Une allusion a, d'autre part, été faite au conseil d'analyse économique, dont je tiens à souligner qu'il n'est pas de la même nature que le commissariat général du Plan puisque, placé, comme on le sait, auprès du Premier ministre, il est composé d'économistes, et d'économistes seulement. Il est important que le Gouvernement dispose ainsi d'une somme d'expertises. Les publications de cette jeune institution sont accessibles à tous et, en tout premier lieu, aux parlementaires qui souhaitent en prendre connaissance. Elles montrent que le conseil d'analyse économique a apporté un concours précieux à la définition de la politique économique, pour un coût particulièrement modeste.

Je conclurai avec le projet de budget annexe de la direction des Journaux officiels, qui propose une augmentation de 3,6 % des dépenses de fonctionnement et de 13,1 % des recettes par rapport à 1999. Il en résultera un excédent d'exploitation d'environ 247 millions, à comparer avec l'excédent de 140 millions attendu pour l'exercice en cours.

Cette institution, que certains ont jugé vieillotte, a fait un très important effort de modernisation, en recherchant des débouchés supplémentaires, comme le montre, en particulier, la croissance des recettes d'annonces de marchés publics mais aussi en s'engageant dans une maîtrise résolue de ses dépenses de fonctionnement, entreprise en concertation avec le personnel. Et si, comme l'a souligné le rapporteur, les abonnements stagnent, c'est que la diffusion, gratuite, sur Internet, progresse constamment. La direction des Journaux officiels est donc une administration particulièrement dynamique, comme en témoignent les différents projets, exemplaires, déjà lancés ou près de l'être.

Ainsi, non seulement la collection «50 ans de J.O.» sur cédérom connaît un grand succès, mais la direction engage avec le Parlement un nouveau projet de cédérom regroupant, pour une année, toutes les lois promulguées, les documents préparatoires et les débats s'y rapportant. Le site Internet de la direction des Journaux officiels, ouvert en juillet 1997, s'est enrichi en juillet dernier avec la mise en ligne gratuite des annonces de marchés publics. Ce service enregistre une fréquentation déjà extrêmement importante et rapidement croissante. En 2000, ce seront les annonces du Bulletin des associations et du Bulletin des annonces légales obligatoires qui seront ouvertes à la consultation gratuite sur Internet, ce qui devrait satisfaire M. Darne.

De plus, dès le début de 2000, les collectivités publiques auront la possibilité de saisir grâce à Internet leurs annonces de marchés, et de les transférer par voie électronique à la direction des Journaux officiels.

Si l'on ajoute que les efforts conjoints de la direction des Journaux officiels et des assemblées parlementaires ont déjà permis d'améliorer la fréquence de la saisie à la source, on admettra que cette administration s'est engagée dans la voie d'une réelle modernisation. Je suis certain que le débat budgétaire de l'année prochaine permettra de constater l'ampleur des progrès encore accomplis.

J'en ai fini avec les réponses aux très remarquables rapports qui ont été présentés, et je ne peux qu'inviter votre assemblée à voter les budgets des services du Premier ministre.

M. le Président - Les crédits des services généraux du Premier ministre seront appelés à la suite de l'examen des crédits de la communication.

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SECRÉTARIAT GÉNÉRAL DE LA DÉFENSE NATIONALE

Les crédits du titre III de l'état B, puis du titre V de l'état C, successivement mis aux voix, sont adoptés.

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CONSEIL ÉCONOMIQUE ET SOCIAL

Les crédits du titre III de l'état B, puis du titre V de l'état C, successivement mis aux voix, sont adoptés.

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PLAN

Les crédits du titre III de l'état B, du titre IV de l'état B, du titre VI de l'état C, successivement mis aux voix, sont adoptés.

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BUDGET ANNEXE DES JOURNAUX OFFICIELS

Les crédits ouverts aux articles 42 et 43, successivement mis aux voix, sont adoptés.

La séance, suspendue à 11 heures 40, est reprise à 11 heures 50.

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ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR, RECHERCHE ET TECHNOLOGIE

M. le Président - Nous abordons l'examen des crédits du ministère de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie concernant l'enseignement supérieur, la recherche et la technologie.

M. Alain Claeys, rapporteur spécial de la commission des finances pour l'enseignement supérieur - Présenter le budget de l'enseignement supérieur pour 2000 est un exercice gratifiant pour le rapporteur spécial, ses crédits augmentant, comme l'an passé, de façon substantielle. En progression de 2,6 %, ils augmentent certes moins que l'an passé où ils avaient crû de 5,5 % mais bien plus que l'ensemble des budgets civils de l'Etat, dont la progression est contenue en 2000 à 0,9 %. En outre, le nombre des étudiants allant diminuer de 11,6 % dans les universités, l'exécution de ce budget contribuera à l'amélioration des conditions de vie des étudiants.

Avant d'aborder plus précisément l'évolution des crédits, j'évoquerai le budget coordonné de l'enseignement supérieur (BCES), le nouvel outil permettant d'apprécier l'effort global de la nation en faveur de l'enseignement supérieur. En effet, de nombreuses formations postbaccalauréat ne relèvent pas du ministère de l'éducation nationale mais d'autres ministères. C'est le cas de l'Ecole Polytechnique, des Ecoles des Mines, de l'ENA. Le BCES, institué par la loi de finances pour 1998, permet désormais d'avoir une vision d'ensemble en présentant les crédits consacrés par les différents ministères aux formations supérieures dans les établissements placés sous leur tutelle, ainsi que les effectifs d'étudiants et les emplois dans cet établissement.

Cette approche rend le système d'enseignement supérieur français plus lisible à l'étranger ; elle favorise aussi la collaboration entre les ministères comme en atteste le développement des procédures de conomination des responsables d'établissements, dans le secteur de l'enseignement supérieur agricole par exemple.

Il est donc regrettable que certains ministères ne jouent pas totalement le jeu. Ainsi le ministère de la fonction publique n'intègre ni les Instituts régionaux d'administration ni l'Ecole nationale d'administration dans le BCES. Certes, 90 % des crédits affectés aux formations postbaccalauréat sont inscrits au budget du ministère de l'éducation nationale. Mais la cohérence exigerait que les crédits de ces établissements soient intégrés au BCES.

Monsieur le ministre, pourriez-vous nous apporter votre éclairage sur les conditions d'élaboration du BCES pour 2000 et ses perspectives d'évolution ? Pourrions-nous également obtenir l'année prochaine ce nouveau «jaune» dans de meilleurs délais ?

J'en viens au budget de l'enseignement supérieur proprement dit. Ses orientations s'inscrivent dans la continuité des quatre priorités définies en 1997 : élargissement des conditions d'accès à l'enseignement supérieur grâce au plan social étudiant ; amélioration de la situation des personnels enseignants et non enseignants ; effort en faveur des établissements ; rénovation des bâtiments universitaires dans le cadre du plan «Université du troisième millénaire».

Le budget pour 2000 permet la poursuite du plan social étudiant, dont l'objectif est de porter, en quatre ans, la proportion d'étudiants aidés à 30 % sur les 1,7 million dépendant du ministère chargé de l'enseignement supérieur. A cette fin, les crédits d'action sociale augmenteront de 9,5 % pour atteindre 7,8 milliards. Cet effort considérable permettra de relever les plafonds de ressources ouvrant droit à une aide, de créer une bourse à taux zéro consistant en une exonération des droits d'inscription et de sécurité sociale et des bourses de premier cycle, enfin de mettre en place des commissions académiques d'allocations d'études qui pourront attribuer des aides d'urgence aux étudiants rencontrant des difficultés en cours d'année. Avec 235 millions, il sera possible d'aider 36 000 boursiers supplémentaires. La subvention de fonctionnement des _uvres universitaires sera, pour sa part, majorée de 35,6 millions.

En ce qui concerne les personnels, le budget pour 2000 prévoit 400 possibilités de recrutement d'enseignants-chercheurs ainsi que la création de 796 emplois budgétaires de personnels enseignants, pour l'essentiel maîtres de conférence et professeurs. Le taux d'encadrement des étudiants passera ainsi de 19,27 étudiants par enseignant en 1999 à 18,89 en 2000. Ce budget prévoit par ailleurs la création de 392 emplois budgétaires de personnels non-enseignants, dont 115 personnels administratifs, 257 personnels de formation et de recherche et 20 personnels infirmiers. 80 emplois seront également créés dans les bibliothèques, ce qui prolonge l'effort engagé dans le budget précédent.

Enfin, le budget pour 2000 comporte d'importantes mesures visant à améliorer la situation des personnels qui accompagnent les évolutions des métiers.

L'ensemble de ces mesures en faveur des personnels mérite d'être salué, d'autant qu'elles s'inscrivent dans un contexte de stabilisation des effectifs étudiants.

En ce qui concerne les crédits de fonctionnement des établissements d'enseignement supérieur, ce budget les augmente de 120 millions Une attention particulière est apportée au développement des nouvelles technologies, à la formation continue et à l'ouverture sur l'extérieur. Ouverture internationale, grâce à une augmentation de 5 millions des moyens de l'agence Edufrance, ouverture sur le monde professionnel, également. Cette adaptation des établissements doit être encouragée et poursuivie.

Les crédits de fonctionnement des bibliothèques augmentent de 10 millions et intègrent désormais les services documentaires des IUFM.

Je termine par les crédits de rénovation et de mise en sécurité des bâtiments universitaires. Les crédits d'investissements s'élèvent à près de 4 milliards en autorisations de programme, soit une progression de 28 %.

Cette enveloppe englobe les crédits de maintenance des bâtiments, qui augmentent de 20 %, pour atteindre 600 millions en autorisations de programme.

Ils ont malheureusement trop souvent été utilisés, dans le passé, pour des travaux de mise en sécurité. Avec le plan U3M, ils devraient retrouver leur vocation première, ce qui est une très bonne chose.

La progression des crédits d'investissement permettra de préparer le démarrage du plan U3M, qui fait l'objet d'un volet préliminaire depuis la loi de finances de 1998. Cette enveloppe spécifique a permis de traiter les problèmes de mise en sécurité et de réhabilitation des locaux universitaires, en particulier, 600 millions sont affectés au désamiantage du campus de Jussieu ; la subvention allouée à l'établissement public chargé de la réalisation des travaux a été augmentée de 4 millions pour permettre le recrutement de personnels supplémentaires.

Je rappelle que ce chantier est subordonné aux transferts des unités de formation dans des locaux dits «tiroirs» qu'il convient d'aménager au fur et à mesure de l'avancement des travaux. Une étape importante a été franchie car les principaux arbitrages dans ce domaine ont été pris, notamment en ce qui concerne l'aménagement de la zone Tolbiac.

Les crédits d'investissement permettront également de mener, à hauteur de 1,98 milliard, des opérations de construction et de réhabilitation dan le cadre des futurs contrats de plan Etat-régions.

Enfin, ils financeront de nouveaux projets, comme la rénovation du Muséum national d'histoire naturelle et l'ouverture, en 2004, du Musée du quai Branly.

Je me félicite que l'affectation de ces crédits soit clairement définie. Les opérations prises en charge par l'Etat seul, comme le désamiantage de Jussieu, sont nettement distinguées de celles qui figureront dans les contrats de plan. Cette clarification devrait faciliter l'implication des collectivités locales, comme cela a été le cas pour le plan U2000. Tous les éléments sont donc en place pour le démarrage du plan U3M et une rénovation de qualité des locaux universitaires.

En conclusion, je tiens à souligner la cohérence des actions engagées grâce à ce budget en vue de l'adaptation et de la modernisation de l'enseignement supérieur français (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

Mme Geneviève Perrin-Gaillard, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles, pour l'enseignement supérieur - Si le changement de millénaire est le prétexte à de nombreuses annonces, le budget de l'enseignement supérieur l'avait anticipé dès 1997 : celui de l'an 2000 est donc dans la continuité des deux précédents, marquant l'attachement du Gouvernement à la construction d'un système d'enseignement supérieur moderne et de qualité.

La progression de 2,63 % des crédits, qui s'élèveront à 52,463 milliards, est d'autant plus remarquable que le nombre d'étudiants est stable. Elle permettra de prolonger les efforts concernant les personnels, la construction et la mise en conformité des locaux et le plan social étudiant.

En ce qui concerne les personnels, le budget prévoit la création de 765 emplois d'enseignants, ce qui fera passer le taux d'encadrement de 19,27 à 18,97. Si cette diminution est louable, il semble cependant que l'université reste le parent pauvre de cette évolution -or c'est précisément elle qui accueille les jeunes ayant le plus besoin d'être encadrés. L'effort d'encadrement devra donc être intensifié si on veut diminuer le taux d'échec en début de cycle.

La création de 500 postes de non-enseignants est un effort substantiel, mais il ne suffira pas à combler le retard accumulé avant 1997. La fin de la mise en place de la réforme Bayrou, l'introduction des nouvelles technologies de communication et la volonté affichée de doter les bibliothèques de moyens adéquats nécessiteront de nouvelles créations de postes IATOS. Enfin, nos universités souffrent d'un manque cruel d'assistants sociaux et un effort supplémentaire en ce domaine serait indispensable.

Les crédits d'investissement atteindront 3,9 milliards en AP, soit une augmentation de 28 %, mais les crédits de paiement diminueront en raison d'une consommation incomplète l'an dernier. L'an 2000 marquera la première année des contrats de plan Etat-régions, qui détermineront l'essentiel des investissements dans le cadre du plan U3M. Il est prévu de rattraper les déficits accumulés dans certaines disciplines, de restructurer les universités de la région parisienne, de poursuivre la mise en sécurité des bâtiments, de créer des universités de technologie, de déconcentrer plusieurs grands établissements et d'améliorer les logements étudiants, les restaurants et les bibliothèques.

Ce projet de budget permet de poursuivre le plan social étudiant, qui vise à donner aux étudiants une plus grande indépendance matérielle et morale. Le pourcentage d'étudiants aidés va passer ainsi de 24 à 26 %. Le système des aides reste toutefois trop complexe et nous accueillons dans nos permanences des étudiants en difficulté qui ignorent leurs droits. Il existe sans doute un lien entre cette situation et le manque de personnel d'accueil que j'ai évoqué.

Enfin, si le budget de fonctionnement augmente de 135 millions, je regrette que la plupart des universités exigent des étudiants le paiement de «frais annexes» de montants très variables, ce qui oblige certains d'entre eux à trouver des petits boulots pour les financer.

Je souhaiterais, Monsieur le ministre, que vous en envisagiez la suppression pure et simple.

Après cette analyse globale du budget, je voudrais m'attarder sur la question de l'harmonisation européenne des cursus. C'est un sujet important en raison des progrès de la construction européenne, des annonces faites à la conférence de Bologne le 19 juin 1999 et du nombre croissant d'étudiants souhaitant poursuivre une formation à l'étranger.

La coopération européenne revêt déjà différentes formes : échanges déconcentrés entre universités, accords bilatéraux entre Etats, reconnaissance des qualifications etc.

Actuellement deux programmes communautaires concernent l'enseignement : Leonardo et Socrates, dont le premier chapitre, Erasmus, connaît un succès croissant. Ainsi les unités de valeur d'enseignement sont désormais compatibles entre établissements partenaires.

Cependant il reste difficile de faire un bilan de ces échanges et d'en juger la qualité, ainsi que de définir les obstacles à cette mobilité. Les projets de réforme, à partir du rapport Attali, doivent donc viser à une meilleure utilisation des programmes européens. L'harmonisation passe d'abord par celle des diplômes -licence à Bac+3, mastère à Bac+5, puis doctorat. On ne peut que s'en féliciter.

Pour poursuivre dans cette voie, il faut aider les établissements à simplifier l'information et à aider les étudiants à constituer leur dossier, les procédures étant complexes. Il faut bien sûr développer l'enseignement des langues. Enfin, les aides publiques ne sont pas toujours suffisantes et des étudiants cherchent parfois un financement privé.

Vous souhaitez agir fermement pour l'harmonisation, cela nous réjouit. Je suis sûre qu'avec nos partenaires nous réussirons à surmonter les obstacles.

La commission des affaires culturelles a émis un avis favorable à l'adoption de ces crédits (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Jean Vila suppléant M. Christian Cuvilliez, rapporteur spécial de la commission des finances, pour la recherche - Les crédits de votre ministère diminuent de 0,4 %, passant de 40,001 à 39,860 milliards ; les autorisations de programme sont réduites de 14,033 à 13,645 milliards.

Ils ne concourent que pour une partie au budget civil de la recherche et développement, la BCRD, dont les dotations sont inscrites dans 17 fascicules budgétaires différents.

Ce budget de la «recherche et du développement», atteint 54,646 milliards, en progression d'à peine 1,3 % par rapport à 1999 contre 1,6 % l'an dernier, les dépenses en capital s'élevant en autorisations de programme à 22,844 milliards.

Ce budget est caractérisé par le renforcement de la capacité d'intervention du ministère ; la restauration des moyens des laboratoires des organismes de recherche ; la stimulation de la recherche universitaire ; la réaffirmation du soutien à l'innovation technologique.

Il suscite un certain nombre d'interrogations dans la communauté scientifique, et d'abord concernant la capacité d'intervention directe du ministère.

Les crédits du fonds de la recherche technologique (FRT) et de la diffusion des technologies du secteur spatial progressent de 35 % en autorisations de programme et atteignent 905 millions. Les autorisations de programme du fonds national de la science passent de 500 millions en 1999 à 700 millions, soit une augmentation de 40 % ; ses crédits de paiement augmentent de 77 % et passent de 318 à 565 millions.

Mais selon les scientifiques, leur attribution se fait sans transparence, les budgets de ces fonds étant définis par des groupes d'experts désignés par le ministre sans débat et sans consultation de la communauté scientifique.

Qu'en est-il d'autre part des moyens des laboratoires des organismes de recherche ? Les dotations des établissements publics à caractère scientifique et technologique (EPST) n'augmentent que de 1,4 % en dotations ordinaires et en crédits de paiement et de 3 % en autorisations de programme.

Si les crédits de l'INRIA augmentent de 4 % et ceux du CEMAGREF de 2,5 %, ceux de l'INSERM et de l'INRA augmentent respectivement de 1,8 % et 1,7 % et surtout ceux du CNRS de 1,1 % seulement. Les moyens des laboratoires s'accroissent globalement de 3,5 %, ceux de la recherche universitaire de 3,1 %.

L'an dernier, les responsables du CNRS jugeaient les moyens insuffisants pour répondre aux priorités. Cette année, le constat est aggravé par les insuffisances en matière de politique d'emploi scientifique et par la décision d'abandon du projet Soleil.

La dotation du CNES hors crédits de la défense, en dépenses ordinaires et crédits de paiement, s'élève à 7,475 milliards, soit une baisse de 9 %. Sa dotation de fonctionnement relative aux dépenses ordinaires est reconduite à 915 millions. Elle est notoirement insuffisante et le CNES est contraint d'opérer des transferts du budget d'investissement vers celui de fonctionnement.

Pour les dépenses ordinaires du CEA sont inscrits au budget 6,161 milliards, dont 3,03 milliards au titre du ministère chargé de la recherche, soit une progression de 4,1 %. Mais la stabilité des crédits d'investissement à 750 millions ne permettra pas de rattraper une réduction des dépenses de 100 millions en 1999 par rapport au budget voté.

L'an dernier, M. Cuvilliez soulignait que le renouvellement des centrales du parc nucléaire français, qui arrivent à obsolescence, risquait d'être compromis à l'horizon 2010. Désormais, la question de l'avenir de la filière nucléaire française sera posée, faute de décisions rapides et énergiques.

Pour quatre autres EPIC, l'IFREMER, le CIRAD, le BRGN et l'ADEME, les dépenses ordinaires augmentent de 1,3 % et les autorisations de programme de 1,6 %.

La troisième inquiétude porte sur l'emploi scientifique. Pour compenser le vieillissement, vous proposez un taux annuel de recrutement de 3 % sans création d'emplois. Selon l'intersyndicale de la recherche, il faudrait un flux de 5 % annuel pour compenser les départs à la retraite.

Par ailleurs, outre la transformation d'emplois d'ingénieurs techniciens et administratifs (ITA) en 30 emplois de chercheurs à l'INRA, il n'est prévu aucune création d'emplois de chercheurs et seulement 18 créations d'emplois d'ITA à l'INRETS -Institut national de recherche en informatique et en automatique- et à l'IRD -Institut de recherche pour le développement.

Le nombre d'allocations de recherche reste limité à 3 800, contre 4 200 il y a 5 ans. On soutiendra donc moins de thèses et nombre de jeunes chercheurs restent dans des emplois précaires. 18 % du personnel du CNRS -soit 4 500 personnes- est dans ce cas.

A terme, notre capacité de recherche est menacée. M. Cuvilliez souhaite, comme MM. Le Déaut et Cohen, chargés d'une mission parlementaire, qu'on adopte une loi de programmation de la recherche sur l'emploi scientifique et en faveur du recrutement précoce de jeunes docteurs.

Quatrièmement, nous nous interrogeons sur le devenir des très grands équipements. Nous souhaitons le rétablissement du conseil des grands établissements et nous déplorons l'amputation de 160 millions sur le budget du CNES.

Nous avons exprimé à plusieurs reprises notre opposition au gel -et ce, sans débat avec la représentation nationale et les chercheurs concernés- du projet Soleil destiné à remplacer le synchrotron actuel.

Approuvé en 1995 par le Conseil des grands équipements, en 1997 par le Conseil supérieur de la recherche et de la technologie, et en 1999 par un audit international, le projet Soleil élaboré depuis 10 ans par le CEA et le CNRS vise à doter la France d'une machine de troisième génération dont les performances sans commune mesure avec les sources de rayonnement antérieures permettent de satisfaire les besoins scientifiques et industriels en forte croissance.

Vous avez décidé, le 2 août dernier, de coopérer avec le gouvernement britannique et le Wellcome Trust pour la réalisation du projet de machine de la troisième génération Diamond, en Grande-Bretagne. Si cette décision devait se concrétiser, elle ne permettrait pas de répondre aux besoins, notamment en France, puisque l'équipement devrait être partagé également entre la recherche publique britannique, la recherche publique française et la fondation privée Wellcome Trust. La recherche française serait affaiblie dans un secteur où elle joue un rôle de premier plan dans le monde, le projet Soleil ayant trois ans d'avance sur le projet britannique.

De même, pourquoi abandonner le satellite astrophysique Corot ou participer à la mission américaine Mars Sample Return, alors que l'agence spatiale européenne conduit un projet correspondant aux priorités que vous avez définies ?

Nous nous inquiétons aussi du renouvellement de la flotte de l'IFREMER, qui souhaite le remplacement du Nadir par un nouveau navire adapté afin de mettre en _uvre les engins submersibles français, le Nautile et le Rov Victor 6000.

Votre politique en matière de très grands équipements soulève une réprobation croissante au sein de la communauté scientifique en raison du manque de transparence et de concertation préalable mais aussi parce qu'elle semble traduire un manque d'ambition pour la France.

L'an dernier, M. Cuvilliez soulignait que le budget 1999 se caractérisait par «une progression des crédits in fine peu significative» et que «l'insuffisance des moyens au regard des besoins constatés et des enjeux sur le plan national et international» plaçaient les grands organismes de recherche, les laboratoires et les chercheurs dans une situation «d'autodéfense». Ce constat l'avait conduit à proposer l'abstention.

Le présent budget ne permet pas d'infléchir cette analyse.

Il se caractérise, en effet, par une stagnation des moyens, peu conforme aux orientations définies lors des comités interministériels de la recherche scientifique et technologique du 15 juillet 1998 et du 1er juin 1999 : la restauration des moyens des laboratoires, le renforcement de la recherche fondamentale, la montée en puissance des actions concertées incitatives et le développement du soutien à l'innovation technologique.

Ce budget ne permettra ni de combler les retards accumulés entre 1993 et 1997, ni de satisfaire les besoins en matière d'enseignement et de recherche.

Alors que la concurrence s'accroît entre les Etats-Unis, l'Union européenne et le Japon et que des puissances nouvelles comme la Chine, la Corée, Taiwan ou Singapour représentent déjà 3 % des brevets déposés aux Etats-Unis, la France n'a consacré à sa recherche intérieure que 2,23 % de son produit intérieur brut en 1997 contre 2,32 % en 1996. Notre pays est ainsi redescendu à la cinquième place des pays de l'OCDE derrière la Suède, le Japon, les Etats-Unis et l'Allemagne. En 1996, il occupait le quatrième rang pour le nombre de chercheurs par rapport à la population active derrière le Japon, la Suède et les Etats-Unis.

Si les travaux français représentent 5 % des publications dans les revues scientifiques internationales, la France ne produit que 7 % des brevets européens et 3 % des brevets américains, l'Allemagne en déposant 2,5 fois plus !

En outre, la part du produit intérieur brut investi dans la recherche-dévelopement n'a cessé de diminuer après avoir atteint 2,45 % en 1995 et se révèle notoirement insuffisante, compte tenu des enjeux internationaux, d'autant plus que le désengagement de l'Etat n'est pas compensé par les dépenses de recherche-développement des entreprises.

Comme l'indique le rapport, «un nouvel élan doit être donné afin de garantir un effort national suffisant en faveur de la recherche», qui rend nécessaire un double plan de rattrapage. Tout d'abord, s'agissant des emplois scientifiques, n'oublions pas que les succès du modèle américain reposent avant tout sur une communauté d'un million de chercheurs et d'ingénieurs, soit 25 % de plus que dans toute l'Union européenne.

Ensuite, l'effort doit porter sur les moyens et la cohérence des choix.

Lors de l'examen du projet de loi sur l'innovation et la recherche, nous avions approuvé la consultation des conseils d'administration et, par leur intermédiaire, de la communauté scientifique sur l'innovation et le transfert de chercheurs vers les entreprises. Nous espérions que cette démarche provoquerait l'ouverture d'un dialogue avec la communauté scientifique et les grands organismes de recherche, dans le respect de leur nécessaire autonomie.

Le rapport exprime cependant les réserves persistantes d'une grande majorité des membres de la communauté scientifique.

Un article récent, paru dans Libération cosigné par le biophysicien Pierre Joliot et le physicien Philippe Nozières résumait ces réserves en soulignant qu'«il appartient à l'autorité politique, en l'occurrence notre ministre, de mettre en place les grands équilibres. Il doit décider de l'opportunité de tel ou tel investissement lourd, fixer la pondération des grands branches d'activité, indiquer des lignes directrices. Mais doit-il pour autant intervenir dans les choix scientifiques individuels ? Cela supposerait de sa part une compétence universelle, irréaliste à notre époque. Et de toute manière, l'époque où une autorité centrale imposait ses vues à la piétaille des exécutants n'est plus de mise».

Selon nous, les décisions doivent être le produit d'un processus public et transparent reposant sur des évaluations et une instruction des dossiers par des experts scientifiques. Et c'est au Parlement qu'il appartient de se prononcer sur les grands orientations de la politique que vous menez.

M. Cuvilliez craint d'avoir trouvé l'empreinte de ces réserves dans le BCRD et dans le budget «recherche et technologie» de votre ministère. Dans ces conditions, il n'a pu appeler à adopter les crédits de ce chapitre ni à souscrire aux décisions qu'il recouvre (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste).

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles, pour la recherche - De l'avis général, ce budget n'est pas bon. Il a d'ailleurs suscité, au sein de la commission, des critiques convergentes émanant de la plupart des groupes politiques. Vous-même, Monsieur le ministre, semblez le défendre sans grande conviction, en préférant insister sur la nécessité de restructurer le secteur de la recherche.

A structures constantes, les crédits de votre ministère ne progressent que de 1,1 % en dépenses ordinaires et crédits de paiement et de 3,6 % en autorisations de programme.

Le BCRD s'élève à 54,646 milliards en dépenses obligatoires et crédits de paiement, soit une progression de 1,7 %. Quant aux autorisations de programme, elles augmentent, à structures constantes, de 2,2 %.

Ces faibles évolutions ne font pas illusion. La progression du budget de la recherche en crédits de paiement est à peine supérieure à l'augmentation moyenne des dépenses du budget général -+0,9 %- alors même que le niveau de 1999 était déjà très bas. De même, le BCRD n'a progressé que de 4,4 % depuis 1995. La dépense nationale de recherche et développement est stable à 2,2 % du PIB depuis plusieurs années, soit un pourcentage inférieur à celui de nos principaux concurrents, notamment les Etats-Unis, le Japon et l'Allemagne.

Le décalage entre cette réalité et les ambitions affichées est flagrant. La faible progression des crédits sera particulièrement préjudiciable à l'emploi. Il n'est pas certain que les priorités de ce budget garantissent effectivement les moyens des organismes de recherche.

Ainsi, dans le domaine des sciences du vivant, le budget de l'INSERM n'augmente que de 1,8 %, contre respectivement 15 % et 8 % pour ses homologues américain et britannique.

Les mesures en faveur des personnels sont aussi très insuffisantes. Le projet de budget ne permettra pas de créer plus de 18 emplois d'ITA et aucune création d'emplois de chercheurs dans les établissements publics scientifiques et techniques n'est prévue.

Les dotations de l'ADEME et du BRGM sont reconduites à leur niveau de 1999. Quant à l'IFREMER, la pause enregistrée dans ses crédits de paiement ne lui permettra ni de maintenir le niveau de sa flotte, ni de remplacer le Nadir.

Quant à la progression de 4,1 % de la subvention en dépenses ordinaires du CEA, elle tient pour une grande part à la compensation des surcoûts liés à l'évolution prochaine du statut de l'IPSN. En revanche, la subvention d'investissement demeure stable, ce qui risque de nuire à la coopération de cet organisme avec l'université et l'industrie.

Enfin, l'enveloppe du CNES consacrée aux programmes nationaux progresse de 2,7 %, mais sa subvention de fonctionnement est seulement reconduite au niveau de 1999.

Bref, un saupoudrage d'augmentations ne tient pas lieu de stratégie budgétaire. Ce budget n'est pas satisfaisant, eu égard à l'obligation pour la France de développer sa recherche. Toutefois, il ne suffit pas de renforcer les moyens. Encore faut-il mieux les utiliser, ce qui suppose une réorganisation du système français de recherche, que vous appelez d'ailleurs de vos v_ux, Monsieur le ministre.

La situation de la recherche en France est, en effet, paradoxale. Alors que vous portez un indéniable intérêt personnel à ces questions et que des mesures positives ont été prises, telles que la loi sur l'innovation et la recherche, même si le report de son volet financier en atténue la portée, le débat sur les structures est très peu développé. Or, à l'évidence, l'efficacité de la recherche française dépend de celle de ses structures.

J'ai souhaité, en commission, ouvrir la réflexion et faire des propositions sur trois questions : quelle structure gouvernementale pour traiter des problèmes de recherche et d'innovation ? Faut-il remodeler les organismes de recherche et quelles doivent être les relations Recherche-Université ? Quelle articulation entre l'appareil de recherche, les collectivités décentralisées, les institutions européennes, la coopération internationale ?

En ce qui concerne l'organisation ministérielle, le choix opéré en 1997 est une innovation. Le ministère couvre à la fois l'éducation nationale, la recherche et la technologie et, à l'intérieur de ce vaste ensemble, vous avez réformé les structures compétentes en matière de recherche, en scindant en deux l'ancienne direction de la recherche et de la technologie. Or sur aucun de ces aspects les solutions retenues ne sont optimales. La place du secteur de la recherche dans la répartition des compétences ministérielles pose un problème pratiquement depuis les débuts de la Vème République. La solution d'un ministère autonome de la recherche a rarement été reprise et le secteur de la recherche et de la technologie a été rattaché le plus souvent soit au ministère de l'industrie, soit à celui de l'éducation nationale.

En tout cas, le système actuel est le moins satisfaisant de tous. La politique de recherche, noyée dans un immense ensemble, ne fait l'objet d'aucune action dans la durée.

Selon moi, l'importance du secteur de la recherche et de la technologie justifie qu'il relève d'un ministre ou d'un ministre délégué siégeant au conseil des ministres.

A moyen terme, la meilleure solution est celle d'un ministère indépendant, rattaché le cas échéant au Premier ministre. Le ministre disposerait ainsi d'une véritable capacité de coordination et d'arbitrage. Ce ministère, qui devrait être en réalité le «ministère de l'avenir», devrait s'appeler ministère de la recherche, de la technologie, mais aussi de la prospective.

Toutefois, un tel ministère aurait du mal à trouver sa place dans l'appareil de l'Etat. La meilleure formule de transition consiste donc sans doute à regrouper enseignement supérieur et recherche, dans une structure autonome ou, le cas échéant, dans un ministère délégué, au sein duquel serait clairement identifiée une direction unique chargée de la recherche et de la technologie.

L'organisation actuelle en deux directions crée inévitablement des doubles emplois et laisse subsister des vides. Par exemple, est-il souhaitable de séparer la recherche en matière de médecine et de santé de la politique du médicament ?

A l'inverse, certains besoins ne sont pas pris en considération. D'une part, la dimension internationale et européenne relève de structures éclatées. D'autre part, la mission de prospective, d'expertise et de veille n'est pas assez développée.

Je propose donc, à défaut de reconstituer une direction unique, de renforcer la coordination entre les deux directions, et de créer deux cellules communes, une pour les affaires européennes et internationales, l'autre chargée de la prospective et de la veille scientifique et technique.

En ce qui concerne les organismes de recherche, il existe, à première vue, un déséquilibre entre un «éléphant», le CNRS, couvrant presque entièrement le champ de la connaissance scientifique, et une myriade d'établissements spécialisés.

L'idée de restructurer cet ensemble est récurrente. Certains ont proposé d'éclater le CNRS, soit en en le remplaçant par autant d'organismes qu'il y a de spécialités, soit en le transformant en une agence de moyens, qui fédérerait un ensemble d'organismes autonomes.

Cependant, l'éclatement du CNRS n'est pas une fin en soi. Toute tentative de remodelage ou de modification des périmètres des organismes pourrait en effet nuire à leur efficacité. Au demeurant, la plupart ont une identité forte, à laquelle ils sont légitimement attachés et certains, comme l'INRIA ou l'institut Pasteur, ont une dimension qu'ils jugent eux-mêmes optimale. L'objectif n'est pas de casser des outils existants mais d'adapter la structure de chacun des organismes et de développer entre eux les coopérations nécessaires. Cela suppose de mieux distinguer, dans l'activité de certains d'entre eux, comme le CEA ou l'IFREMER, la part qui revient effectivement à la recherche et celle de l'activité économique et industrielle.

Il convient, enfin, de redéfinir les relations entre université et recherche. La volonté du Gouvernement de donner davantage d'importance aux universités dans la recherche va dans le bon sens. L'université fournit le «vivier» de jeunes chercheurs qui feront la recherche de demain. Elle participe à la recherche fondamentale. Or le rapprochement entre université et recherche ne passe pas seulement par le développement de laboratoires communs. Il suppose aussi une réflexion sur les statuts et les carrières des personnels, qui pourrait aboutir, à terme, à la création d'un corps unique d'enseignants-chercheurs. La réalisation de cet objectif peut se concevoir de différentes manières. La formule la plus radicale est celle de la fusion des deux corps, mais elle semble à court terme peu réaliste. Sans doute est-il plus opportun de procéder par étapes. Deux propositions peuvent être, à cet égard, envisagées : la première, figurant dans le rapport de MM. Cohen et Le Déaut, consiste à prendre en compte dans le déroulement des carrières la totalité des missions liées à la recherche en créant des postes d'accueil, où les enseignants puissent devenir chercheurs, et en instaurant des mesures incitatives à la mobilité pour les promotions. Cette «modulation» irait dans le sens d'un rapprochement des statuts. L'autre idée serait de n'appliquer le nouveau statut d'enseignant-chercheur qu'à partir d'un certain niveau, directeur de recherche et professeur d'université. Pour les maîtres de conférences et les chargés de recherche, les échanges permettant de passer facilement de l'une à l'autre fonction seraient développés.

Enfin, l'organisation de la recherche française ne peut plus être aujourd'hui examinée seulement au niveau de l'Etat.

Si le tableau des instances de recherche est complexe à l'échelon national, il l'est plus encore dans les collectivités décentralisées. Les intervenants sont en effet multiples, puisqu'interviennent les délégations régionales à la recherche et à la technologie (DRRT), les directions régionales de l'industrie, de la recherche et de l'environnement (DRIRE), les représentations régionales du CNRS et souvent d'autres organismes de recherche, les délégations régionales de l'ANVAR et, enfin, les universités elles-mêmes.

La nécessité d'une plus grande coordination au sein d'un espace péri-universitaire est souvent exprimée. De nombreuses fonctions pourraient être mises en commun : qu'il s'agisse des marchés publics, des systèmes informatiques et comptables ou de l'hygiène et de la sécurité. Le préfet de région, un universitaire ou un chercheur, pourrait assurer cette fonction de coordinateur.

J'en viens, enfin, à la dimension européenne et internationale. Seul le développement des coopérations entre les centres européens de recherche peut renforcer leur compétitivité et battre en brèche la toute-puissance américaine ou japonaise.

L'Europe et la recherche existe déjà. Elle est née en dehors de tout cadre institutionnel, avec le CERN, puis elle s'est développée avec les programmes-cadres de recherche-développement et avec le programme Eurêka. Actuellement, la représentation des intérêts scientifiques français auprès de l'Union européenne est assurée à travers le club des organismes de recherche associés, qui comprend un délégué par organisme de recherche. Cependant, une telle formule laisse subsister un trop fort cloisonnement entre les organismes. J'ai déjà proposé l'instauration, au sein du ministère en charge de la recherche et de la technologie, d'une mission chargée des affaires internationales et européennes. A l'intérieur de cette mission, une fonction «européenne» tendrait à assurer la représentation à Bruxelles de la communauté scientifique française et la liaison entre les institutions européennes, le ministère et les organismes de recherche.

D'autre part, la coopération internationale doit se développer et se tourner en priorité vers les pays du Sud. La coopération en matière de santé doit concerner en particulier les domaines tels que la santé de la famille en Afrique de l'Ouest, insuffisamment prise en compte par le ministère de la coopération.

La commission des affaires culturelles a accueilli ces propositions avec intérêt. Je me félicite de la proposition du président Le Garrec d'organiser prochainement, au sein de la commission, un grand débat sur l'organisation de la recherche, en présence du ministre.

Pour l'heure, nous devons nous prononcer sur un projet de budget qui ne fait que confirmer la contradiction entre le volontarisme politique affiché et l'indigence des moyens. Quels que soient les gouvernements, quelles que soient les majorités, les crédits dégagés en faveur de ce secteur depuis six ans sont tantôt en stagnation, tantôt en recul, alors même que l'importance de la recherche pour l'avenir du pays est unanimement admise.

Afin de vous aider, Monsieur le ministre, à obtenir davantage de Bercy, j'avais proposé à la commission de donner un avis défavorable au projet de budget pour 2000. Obéissant sans doute à un réflexe de solidarité politique, celle-ci ne m'a pas suivi. Je le regrette, mais je me félicite qu'elle ait pu, à l'occasion de l'examen de ce budget, marquer unanimement sa volonté d'approfondir le débat sur la recherche.

M. Daniel Chevallier, rapporteur pour avis de la commission de la production, pour la recherche et la technologie - A 54,6 milliards, le budget civil de la recherche et du développement progresse de 1,3 % en dépenses ordinaires et crédits de paiement et de 2,2 % en autorisations de programme. Il augmente donc plus vite que le budget de l'Etat. Il est bon de rappeler que le BCRD a connu depuis 1997 une progression de plus de 4,5 %. S'il est certes toujours possible de faire mieux, je suis tout de même tenté de dire aux pleureuses qui viennent de s'exprimer (M. Jean-Michel Dubernard proteste) «Rentrez vos mouchoirs !», surtout si l'on se rappelle la baisse continue de ce budget entre 1993 et 1997. J'observe d'ailleurs que le conseil supérieur de la recherche et de la technologie a adopté votre projet de budget à une écrasante majorité et que l'OCDE classe la France première ex aequo avec la Suède en matière de «dépenses pour l'intelligence».

Je voudrais, pour ma part, souligner, Monsieur le ministre, la cohérence de votre budget. Vos propositions en 1998 reposaient sur quatre priorités : soutenir la recherche technologique, favoriser les relations entre recherche et société, mieux coordonner la recherche fondamentale et améliorer les moyens de base des laboratoires. Sur ce dernier point, les laboratoires de recherche universitaire ont bénéficié d'une augmentation de crédits de 3,5 %. De même, vous avez confirmé votre soutien aux jeunes scientifiques à travers diverses dispositions. La coordination des recherches fondamentales se traduit par la mise en place du fonds national de la science et du fonds national de la recherche technologique. Le FNS bénéficie d'une augmentation de ses moyens à hauteur de 77 % pour ses crédits de paiement, qui atteignent 565 millions. Quant au FNRT, la progression de 35 % de ses autorisations de programme, qui atteignent 905 millions, traduit une forte volonté de relance de son activité. Ces différents moyens sont mis au service de secteurs reconnus prioritaires par le conseil interministériel de la recherche scientifique et technique du 1er juin dernier. Il s'agit notamment des sciences du vivant, des transports et du cadre de vie, ou encore des sciences humaines et sociales, qui ne sont pas oubliées. Ces priorités sont cohérentes avec les orientations du Vème programme-cadre de l'Union européenne et avec le programme Eurêka, qui repose pour l'essentiel sur les financements et la détermination français. Comme j'ai eu l'occasion de l'indiquer en commission, je souhaiterais cependant que les deux fonds fassent l'objet d'une évaluation plus régulière et plus complète.

Au sein de la commission de la production, nous nous félicitons de l'effort réalisé en direction de la recherche technologique, comme des moyens mobilisés en faveur de l'innovation et des transferts de technologie. Et l'on retrouve à ce sujet la cohérence qui anime votre projet puisque notre assemblée a adopté la loi du 12 juillet 1999 sur l'innovation technologique et la recherche, qui permet de progresser sensiblement sur ces différents points, qu'il s'agisse des réseaux de recherche en innovation technologique, des incubateurs d'entreprise, des fonds d'amorçage ou des concours d'aide à la création d'entreprises de technologies innovantes.

J'aborde, enfin, Monsieur le ministre, deux points qui me tiennent particulièrement à c_ur. S'il nous appartient de tout mettre en _uvre pour favoriser la recherche technologique, il est tout aussi indispensable de faire en sorte que la technologie -la «techno»- ne soit plus le parent pauvre de l'enseignement, depuis le primaire jusqu'à l'enseignement supérieur.

Cela est d'autant plus nécessaire qu'apparaissent, notamment en Provence-Alpes-Côte d'Azur, des projets de «plateforme technologique» qui visent à associer formation, développement local et emploi. Nous espérons que le Gouvernement les soutiendra activement.

Il est tout aussi indispensable de développer la culture scientifique et, donc, le dialogue entre les scientifiques et les citoyens afin que ceux-ci puissent participer, de manière éclairée, aux choix qui façonneront la société future. Il faut, à cet effet, fournir un appui financier aux structures qui, sur le terrain, s'attachent à diffuser la connaissance scientifique.

Sur proposition de son rapporteur, la commission a émis un vote favorable aux crédits de la recherche et de la technologie. Il vous propose d'émettre aujourd'hui un vote identique.

La suite de la discussion de la loi de finances est renvoyée à la prochaine séance, qui aura lieu cet après-midi, à 15 heures.

La séance est levée à 13 heures 5.

                      Le Directeur du service
                      des comptes rendus analytiques,

                      Jacques BOUFFIER


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