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Session ordinaire de 1999-2000 - 35ème jour de séance, 85ème séance

3ÈME SÉANCE DU JEUDI 2 DÉCEMBRE 1999

PRÉSIDENCE de M. Pierre-André WILTZER

vice-président

Sommaire

RÉDUCTION NÉGOCIÉE DU TEMPS DE TRAVAIL - nouvelle lecture - (suite) 2

ART. 12 TER 2

ART. 12 QUATER 2

ART. 12 QUINQUIES 2

APRÈS L'ART. 12 QUINQUIES 3

ART. 13 3

ART. 14 3

ART. 15 4

ART. 15 BIS 10

AVANT L'ART. 16 10

ART. 16 10

AVANT L'ART. 17 11

ART. 17 11

AVANT L'ART. 18 12

ART. 18 12

ART. 19 12

APRÈS L'ART. 19 12

AVANT L'ART. 20 12

ART. 20 12

APRÈS L'ART. 20 12

TITRE 13

SECONDE DÉLIBÉRATION 13

ARTICLE PREMIER TER 13

ART. 7 13

FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR 2000 (lecture définitive) 13

La séance est ouverte à vingt et une heures.

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RÉDUCTION NÉGOCIÉE DU TEMPS DE TRAVAIL - nouvelle lecture - (suite)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion, en nouvelle lecture, du projet de loi relatif à la réduction négociée du temps de travail.

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ART. 12 TER

M. Gaëtan Gorce , rapporteur de la commission des affaires sociales - L'amendement 30 vise à revenir au texte adopté par l'Assemblée en première lecture.

Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité - Avis favorable.

L'amendement 30 mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 238 vise à étendre le régime de protection plus favorable applicable aux salariés mandatés au titre de la présente loi à ceux concluant, après l'entrée en vigueur de la loi, des accords sur le fondement de la loi du 13 juin 1998.

Mme la Ministre - Avis favorable.

L'amendement 238, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 31 tend à introduire une disposition selon laquelle l'obligation d'embauche n'est applicable que lorsque la création d'emploi excède un mi-temps.

Mme la Ministre - Avis favorable.

L'amendement 31 mis aux voix, est adopté.

L'article 12 ter modifié, mis aux voix, est adopté.

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ART. 12 QUATER

M. le Rapporteur - L'amendement 32 tend à la suppression de dispositions introduites par le Sénat visant à modifier les formalités administratives d'obtention de l'aide incitative.

L'amendement 32, accepté par le Gouvernent, mis aux voix, est adopté.

L'article 12 quater, ainsi modifié, mis aux voix, est adopté.

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ART. 12 QUINQUIES

M. le Rapporteur - L'amendement 33 tend au rétablissement du texte adopté par l'Assemblée en première lecture.

Mme la Ministre - Le Gouvernement, qui est favorable à l'amendement, présente le sous-amendement 226 de précision.

Les taux des cotisations de sécurité sociale fixés à Saint-Pierre-et-Miquelon par arrêtés ministériels et non par décret étant inférieurs de près d'un tiers aux taux de droit commun, le barème de l'allégement sera établi au prorata des taux des cotisations patronales applicables à Saint-Pierre-et-Miquelon, soit 22 %, au lieu de 30,2 % dans le cas général.

M. le Rapporteur - Avis favorable.

Le sous-amendement 226, mis aux voix, est adopté.

L'amendement 33 ainsi modifié, mis aux voix, est adopté.

L'article 12 quinquies est ainsi rétabli.

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APRÈS L'ART. 12 QUINQUIES

M. Roger Franzoni - L'amendement 138 tend à introduire une disposition relative aux entreprises installées dans la zone franche de Corse qui doivent, comme les autres, pouvoir bénéficier de l'allégement de charges sociales prévu, majoré d'un montant forfaitaire par décret, lorsqu'elles passent aux 35 heures. Cette disposition se substitue aux dispositions en vigueur relatives aux allégements de charges sociales en zone franche de Corse.

M. le Rapporteur - La commission qui ne souhaite naturellement aucun dysfonctionnement en Corse, est favorable à l'amendement, qui doit cependant être rectifié pour tenir compte des dispositions adoptées à l'article12. Il faudra donc lire, à l'avant-dernière ligne du cinquième alinéa «au premier alinéa du IV de l'article 5 de la présente loi» au lieu de «au premier alinéa du IV de l'article 4 de la présente loi».

M. Roger Franzoni - Je n'y vois pas d'inconvénient.

Mme la Ministre - Le Gouvernement est favorable à l'amendement.

Actuellement, les entreprises établies dans la zone franche de Corse bénéficient d'un allégement de charges sociales spécifique quelle que soit la durée du travail. Une aide uniforme atténuerait l'effet recherché. Il faut donc majorer le nouveau barème de cotisations patronales pour favoriser les entreprises qui choisissent de passer aux 35 heures. Le Gouvernement approuve aussi bien le principe que ses modalités d'application.

M. François Goulard - J'approuve l'amendement. Il est logique d'adapter le dispositif prévu à la zone franche de Corse et d'alléger les charges patronales, même si ce n'est que partiellement, comme sur le continent.

M. Hervé Morin - Le président de l'UDF n'est pas corse, et l'UDF est contre l'amendement (Protestations sur les bancs du groupe DL).

Mme la Ministre - Et pourquoi ?

M. Hervé Morin - Parce qu'au bout d'un moment, pour les métropolitains, trop, c'est trop (Mouvements divers).

L'amendement 138 rectifié, mis aux voix, est adopté.

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ART. 13

M. le Rapporteur - L'amendement 34 propose une nouvelle rédaction pour le dispositif adopté par le Sénat qui vise à laisser la possibilité aux personnes morales d'adhérer à plus de deux groupements.

L'amendement 34, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté, de même que l'article 13, ainsi modifié.

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ART. 14

M. le Rapporteur - L'amendement 35 rétablit le texte adopté par l'Assemblée en première lecture.

Mme la Ministre - Avis favorable.

M. Hervé Morin - Le sous-amendement 203 est défendu.

Le sous-amendement 203, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. François Goulard - Le sous-amendement 202 prolonge d'un an la durée prévue par la loi du 13 juillet 1998 pour la conclusion d'accords.

M. le Rapporteur - La commission ne l'a pas examiné, mais j'y suis défavorable à titre personnel.

Le sous-amendement 202, repoussé par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. François Goulard - Le sous-amendement 204 prolonge la durée d'application des accords signés afin qu'un bilan puisse en être fait.

M. le Rapporteur - Même avis que précédemment.

Le sous-amendement 204, repoussé par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'amendement 35, mis aux voix, est adopté, et l'article 14 est ainsi rétabli.

L'article 14 bis, mis aux voix, est adopté.

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ART. 15

M. Jacques Desallangre - Les sous-amendements que j'ai déposés sont nés de la réflexion des salariés de Wolber, après qu'a été prise la scandaleuse décision de les jeter à la rue. Ils visent à donner au juge la possibilité de se prononcer sur les licenciements eux-mêmes et d'ordonner, le cas échéant, la réintégration et l'indemnisation des salariés concernés, et ce avant même que l'irréversible, c'est-à-dire la rupture des contrats de travail, ait été commis.

Aujourd'hui, la procédure de licenciement des 450 salariés de Wolber est engagée. Il est donc indispensable que nous leur permettions de contester le caractère réel et sérieux des causes invoquées. Ils attendent de nous que nous fassions ce geste, car il est inacceptable que les salariés soient sacrifiés tandis que les actionnaires encaissent de juteux bénéfices. L'acceptation tacite de ce scandale nous rendrait complices, qui plus est, du développement de la bulle financière spéculative.

On nous objectera peut-être que ces sous-amendements sont irrecevables ou inconstitutionnels, mais il n'en est rien. Ils répondent à la condition fixée par l'article 98, alinéa 4, du Règlement, car ils ont un lien avec le projet et ne contredisent en rien l'amendement de la commission. Ils ne contreviennent aucunement aux articles 37, 38 et 41 de la Constitution, ni aux principes fondamentaux de la République. Ne nous autocensurons pas en anticipant une très hypothétique censure du Conseil constitutionnel, dont le Gouvernement, au demeurant, ne porterait pas la responsabilité ! Donnons, en adoptant ces sous-amendements, un signal fort de notre volonté de réformer en profondeur le droit du licenciement ! Le groupe RCV demandera, sur le sous-amendement 255, un scrutin public.

M. Maxime Gremetz - On avait beaucoup parlé de l'amendement Michelin, il faut parler aussi des amendements Wolber, car c'est le même groupe et la même situation, hautement symbolique et significative : l'annonce, malgré des profits plus que confortables, de suppressions d'emplois massives, non pas pour des motifs économiques sérieux, mais simplement pour accroître encore les profits et la cotation en Bourse, au mépris de la vie des hommes et de toute une région.

Il ne serait pas acceptable que la représentation nationale dise, comme on l'a dit à une époque : «nous ne pouvons rien». Nous pouvons et nous devons faire quelque chose. La lutte courageuse, digne et unitaire menée par les salariés, aux côtés de toute la population, des retraités, des commerçants qui ont baissé leur rideau le jour de la manifestation à Soissons, a permis que Wolber existe encore et qu'on en parle toujours, mais cela ne saurait durer éternellement. Les Wolber n'ont pas manqué de soutiens, locaux et nationaux ; ils ont émis, avec l'aide de leur avocat dont je salue la présence dans les tribunes, des propositions concrètes, celles qui nous sont soumises aujourd'hui. François Hollande est allé les rencontrer à Soissons, et il a eu raison ; il a discuté avec eux et a reconnu publiquement que ces propositions étaient sérieuses et que le Parlement pouvait en débattre et les adopter. Robert Hue s'est également rendu sur place pour marquer son soutien et sa solidarité, et il a dit, comme François Hollande, que les propositions étaient sérieuses et devaient être soumises au Parlement.

Les Verts, le MDC... tout le monde dans la gauche plurielle dit «oui, les Wolber ont raison de se battre et ils font des propositions sérieuses !». Et à Strasbourg, l'ensemble de la majorité plurielle a soutenu cet amendement. Mais nous n'avons pas le droit de leur tenir ces discours d'encouragement puis de renvoyer à plus tard leurs propositions lorsqu'elles viennent en discussion. Car il y a urgence et plus tard, cela risque d'être jamais car Wolber n'existera plus. Nous devons tenir nos engagements. C'est pour les salariés qui étaient là cet après-midi une question de vie ou de mort.

M. le Président - Veuillez conclure.

M. Maxime Gremetz - On nous oppose aujourd'hui le risque d'inconstitutionnalité mais nous n'avons pas à nous déterminer en fonction des positions du Conseil constitutionnel dont nul ne peut préjuger. Il nous faut faire preuve de volonté politique. Et que l'on ne me dise pas que ces amendements sont des cavaliers...

M. le Président - Je vous demande de conclure, Monsieur Gremetz.

M. Maxime Gremetz - ...car si tel était le cas, il fallait nous le dire plus tôt afin que nous les rédigions autrement ! Il serait grave que la représentation nationale ne tienne pas ses engagements car cela ne ferait que renforcer la crise de confiance des Français à l'égard du pouvoir politique.

M. François Goulard - N'anticipons pas sur la discussion des amendements qui ne sont pas encore venus en examen.

Je veux dire à mes deux collègues qui m'ont apostrophé que je me tiens à une ligne de conduite constante qui consiste à ne porter aucun jugement sur les décisions internes des entreprises car il est impossible d'en juger sans connaître le contexte...

M. Jacques Desallangre - Que ne l'observez-vous à l'égard des syndicats !

M. François Goulard - Vous m'avez prêté à tort des jugements que je n'ai jamais exprimés sur l'entreprise dont vous avez parlé.

M. le Rapporteur - L'amendement 36 est un amendement de précision.

L'amendement 36, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 38 est un amendement de précision sur un autre paragraphe.

L'amendement 38, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Maxime Gremetz - L'amendement 93 vise à soumettre la modification du contrat de travail à un accord conclu par un syndicat majoritaire aux élections professionnelles.

L'amendement 93, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 37 a trait au deuxième paragraphe de l'article 15 sur lequel nous avons eu un long débat en première lecture. Nous avons cherché une solution élégante aux différents problèmes qui ont été soulevés à cette occasion, qu'il s'agisse du caractère individuel du licenciement du salarié qui n'accepte pas la modification de son horaire de travail, de sa nature sui generis car il ne peut s'agir d'un licenciement économique donnant lieu à la présentation d'un plan social ou de la faculté laissée au juge d'apprécier l'existence d'une cause réelle et sérieuse de licenciement.

Mme la Ministre - Favorable, mais il convient alors, après que nous avons adopté l'amendement 38, de supprimer dans le II de l'article la formule «organisé par une convention ou un accord collectif» qui devient redondante.

M. Maxime Gremetz - S'agissant des motivations de l'amendement 93 que l'Assemblée vient de repousser, j'ai omis de dire que la disposition proposée existait dans le texte débattu en première lecture et que notre amendement visait donc simplement à la rétablir.

M. le Président - S'agissant de l'amendement 37, la précision rédactionnelle que vient d'apporter Mme la ministre fait l'objet de l'amendement 259.

M. le Rapporteur - Favorable.

L'amendement 259, mis aux voix, est adopté.

M. le Président - En même temps que les sous-amendements à l'amendement 37, nous discuterons les amendements 94 à 97 de M. Gremetz.

M. Yves Cochet - Nos quatre sous-amendements 246, 247, 248 et 249 visent à éviter que, conformément aux v_ux exprimés par le Premier ministre, ne se produise dans l'entreprise Wolber Michelin de Soissons un scénario connu, c'est-à-dire un plan de licenciement économique collectif de 450 salariés. Malgré les manifestations qui ont réuni six mille personnes le 21 septembre dernier à Soissons et malgré la suspension de la procédure de licenciement, Michelin a réenclenché le même processus.

Or la loi ne permet pas aux salariés de contester ces licenciements tant que la rupture de ces contrats de travail n'est pas consommée.

Le coût pour le contribuable de ces restructurations successives depuis 1982 a pesé entre quatre et cinq milliards de francs. Nous proposons de soumettre les entreprises visées à l'article L.321-2 du code du travail aux dispositions de l'article L.321-4-1. Ainsi, elles devront mettre en _uvre un plan social pour éviter les licenciements ou en limiter le nombre -par des actions de formation ou de reconversion par exemple- et pour faciliter le reclassement des salariés les plus fragiles économiquement. En outre, il est nécessaire qu'un plan de reclassement des salariés soit soumis aux représentants du personnel ou à l'autorité administrative compétente sinon la procédure de licenciement est nulle.

Je ne m'y suis pas rendu moi-même, mais deux députés européens de notre groupe sont allés soutenir les salariés de Wolber.

M. Jacques Desallangre - Mon sous-amendement 256 permet de mieux réparer le préjudice causé au salarié licencié en autorisant le juge à «ordonner» et non «proposer» la réintégration ; le sous-amendement 253 prévoit cette réintégration en cas de licenciement abusif ; le sous-amendement 254 concerne le plan social dans les entreprises de moins de 50 salariés. Enfin, le sous-amendement 255 permet aux salariés de faire vérifier par le juge la validité du besoin de licenciement avant que le contrat de travail ne soit rompu.

M. Maxime Gremetz - Mes amendements 94, 95, 96 et 97 ont le même objet. Ils ont été élaborés par les salariés eux-mêmes. Nous parlons de la lutte des Wolber. Mais des Wolber, il y en a des centaines en France. Par exemple, après des mois de lutte des salariés de Yoplait, dans ma circonscription, le tribunal d'Amiens a décidé que les raisons économiques du licenciement n'étaient pas fondées. Mais entre-temps l'entreprise avait écrit aux salariés de ne plus se présenter, cessé le ramassage du lait, démonté les installations. Il n'y avait plus de réintégration possible. Quelques salariés ont été envoyés à Senlis, et 70, dont les responsables syndicaux, sont au chômage ou en préretraite. De même à la sucrerie La Vermandoise de Beauchamp, filiale du groupe Bégin-Say, le tribunal a décidé que les licenciements économiques n'étaient pas justifiés mais il n'y avait plus de machines, il n'y avait pas eu de campagne betteravière, alors comment réintégrer les ouvriers ? Voilà trois exemples dans une seule région. C'est pourquoi il ne faut pas attendre six mois pour procéder aux réintégrations quand le licenciement économique n'est pas justifié.

M. le Rapporteur - La question des licenciements économiques se pose à nous depuis des années et peut-être aujourd'hui, bien que leur nombre ait actuellement diminué, avec plus d'acuité qu'auparavant car la reprise économique les fait apparaître d'autant plus injustes. Je comprends donc que nous ayons ce débat et j'aimerais que nous le poursuivions par une réflexion sur la prévention des licenciements économiques. Trop souvent, en effet, l'information des salariés est insuffisante et limitée à des aspects comptables. Il faudrait aussi préciser ce qu'on entend par obligation d'adaptation et par obligation de reclassement.

Je constate par ailleurs, et suis bien placé pour ce faire, que certaines régions ou certains départements accumulent les difficultés et sont frappés par des licenciements sans qu'existe aucune possibilité sérieuse de reconversion.

Il est de notre responsabilité de législateur d'apporter une réponse à ces questions et d'ailleurs la majorité a fait la preuve, par tous les textes déjà votés, de sa détermination à _uvrer pour l'emploi. Mais les propositions de nos collègues se heurtent à certaines difficultés. D'abord, il y a une certaine contradiction entre la procédure du référé, qui exige que le juge se prononce en urgence sur une situation manifestement anormale, et l'idée que le juge exerce un contrôle au fond sur la réalité du motif économique. L'obstacle est, ensuite, juridique : en effet, dès lors qu'est introduite en deuxième lecture une disposition qui n'est pas en rapport direct avec ce qui a été examiné et voté en première lecture, le Conseil constitutionnel la considère comme un cavalier et l'annule. Je ne voudrais donc pas que nous entretenions de faux espoirs en votant une disposition qui ne pourrait pas entrer en vigueur.

Personnellement, je préférerais que nous accélérions la réflexion sur la prévention des licenciements afin de proposer, dans les textes qui le permettront, des solutions praticables. Il faudrait en même temps dégager des moyens importants, dans le cadre de l'aménagement du territoire, pour faciliter des reconversions industrielles et permettre aux hommes et aux femmes concernés de retrouver une situation décente.

M. Jean Le Garrec, président de la commission des affaires sociales - Elu d'une région, le Nord-Pas-de-Calais, qui a connu les pires moments et ayant dû maintes fois batailler pour défendre des salariés dans la même situation que ceux de Wolber aujourd'hui, je n'ai pas à faire la preuve de ma détermination politique. Mais rien ne serait pire que de faire croire aux hommes et aux femmes concernées qu'un amendement peut tout régler. Le respect que j'ai pour eux me l'interdit.

Je laisse de côté l'argument constitutionnel. Le rapporteur a fait son devoir de rapporteur en l'avançant, mais l'essentiel n'est pas là. Il a dit aussi qu'il fallait engager une réflexion sur la prévention des licenciements. Je crois en effet qu'il faut développer le droit d'alerte et d'audit du comité d'entreprise, lui permettre d'étudier les aspects économiques et stratégiques du problème, de faire appel à des cabinets indépendants -procédé auquel j'ai souvent recouru. Le Gouvernement mènera cette réflexion, sa majorité l'y aidera.

Mais la vraie question a été bien posée par M. Gremetz à partir de l'exemple de Yoplait : le législateur peut-il empêcher une entreprise de fermer un site ? Dans le cas de Wolber, je sais bien que Michelin a une puissance suffisante pour, à la limite, maintenir une filiale qui travaillerait à perte. Mais voilà, nous ne sommes pas Michelin, nous ne pouvons pas nous substituer aux dirigeants d'une entreprise pour prendre les décisions.

Je ne peux donc pas dire aux salariés de Wolber qu'une fois voté tel amendement, l'affaire sera réglée. Ce ne serait pas vrai. Il est en revanche du devoir des pouvoirs publics et des élus de réfléchir aux moyens à mettre en place pour accompagner, reconstruire, faire en sorte que les intéressés pâtissent le moins possible des décisions prises par l'entreprise.

Assumons donc cette double responsabilité -améliorer la prévention et dégager les moyens d'accompagnement- mais ne laissons pas croire que nous avons en main la solution !

Mme la Ministre - A la suite du rapporteur et du président de la commission, je veux exprimer les sentiments que m'inspire la situation de l'entreprise Wolber.

Après l'émotion soulevée par l'affaire Michelin, on s'étonne qu'une décision ait pu être prise si brutalement pour Wolber, même si le juge a repoussé le plan social. Je sais ce que peuvent ressentir les salariés, leurs familles et la population du bassin de Soissons. Il faut donc tout faire pour éviter des situations du type Michelin ou Wolber.

En même temps, je suis convaincue que le motif économique relève de l'employeur. Lorsque l'autorisation administrative de licenciement existait, 95 % des demandes de licenciements étaient acceptées. Je ne sais pas comment l'administration ou le juge pourrait, au seul vu d'un bilan, apprécier le motif économique. En revanche, comme je l'ai dit au moment de l'affaire Michelin, les entreprises sont responsables de leurs actes. Quand un grand groupe gagne de l'argent, on ne ferme pas Wolber sans proposer des reclassements et des réinstallations. Quand j'étais chez Pechiney, j'ai dû fermer le site de Noguères, mais aucun salarié n'est resté sur le carreau ni n'a retrouvé un emploi inférieur au précédent, parce que Pechiney avait les moyens d'agir ainsi.

Nous devons réfléchir sur la manière de ne pas arriver à une situation de licenciement, en intervenant le plus tôt possible, par un développement de la procédure d'alerte et un renforcement de l'information. La formation professionnelle est aussi un élément déterminant de prévention.

Il faut aussi faire preuve à l'égard du plan social d'une exigence à la hauteur des possibilités de l'entreprise. Lorsque PSA en 1992 affichait des résultats positifs, j'ai dit à M. Calvet, et je l'ai redit en 1997, que l'Etat n'avait plus à aider le groupe. C'est à lui de payer les préretraites et les reclassements. L'entreprise doit payer le prix de ses décisions. Dans un pays comme le nôtre, la responsabilité est la contrepartie de la liberté.

Alertée par les élus, je suis le problème de Wolber depuis le début. J'ai demandé au préfet de l'Aisne la plus grande vigilance sur le plan social, pour éventuellement déclencher le constat de carence si l'effort de Michelin n'est pas à la hauteur des nécessités. C'est dans cette direction qu'il nous faut travailler. Quand le plan social est insuffisant par rapport aux moyens de l'entreprise, le tribunal peut demander l'application du droit à réintégration.

Encore faut-il, comme l'a souligné M. Gremetz, que la décision n'arrive pas trop tard.

Sur la situation de Wolber, je l'ai dit, le ministère se tient informé en permanence, et le Gouvernement étudie des mesures de développement dans le bassin d'emploi de Soissons. Ce dernier demeure éligible à la PAT, ce qui représente 50 000 F par emploi, et à l'objectif 2, qui procurera 120 millions à l'ensemble du bassin, dont le désenclavement se poursuit.

Au-delà des problèmes juridiques, je ne pense pas que les amendements et sous-amendements proposés régleraient les difficultés de Wolber. Restons dans la logique qui est celle de notre pays, faute de quoi nous allons à la catastrophe.

M. le Président - Sur le sous-amendement 255, je suis saisi par le groupe RCV d'une demande de scrutin public.

M. François Goulard - Je rends hommage au sens de la responsabilité du rapporteur, du président de la commission et de la ministre qui, sur un sujet douloureux, n'hésitent pas à énoncer des vérités difficiles à exprimer ce soir.

Sur ce type de question, sachons éviter les polémiques. Chacun sait ici combien un licenciement est un drame, et l'on comprend bien que la première réaction soit de dire : «Empêchons les licenciements».

La ministre a rappelé que la France a connu le régime de l'autorisation administrative de licenciement. Nous y avons mis fin, et la majorité actuelle ne l'a pas rétabli. Oui, la décision économique doit rester au responsable économique.

Que ceux qui sont persuadés qu'une décision de l'autorité publique doit intervenir sachent qu'un juge n'est pas capable de se prononcer dans un délai raisonnable. Même les tribunaux de commerce, composés pourtant de professionnels de la gestion d'entreprise, ont besoin de plusieurs mois et de concours d'experts pour savoir quelle décision convient à l'entreprise dont ils examinent la situation. Encore reconnaissent-ils qu'ils se trompent souvent.

Permettez à un libéral de vous dire que le licenciement économique est un grave inconvénient de l'économie de marché, laquelle est la pire des systèmes à l'exception de tous les autres. Des entreprises se développent, d'autres meurent, des entreprises embauchent, d'autres licencient, telle est la règle de l'économie de marché.

Mais un chef d'entreprise digne de ce nom sait à quel point le licenciement est un traumatisme et s'il est conscient de ses responsabilités, il évitera jusqu'au dernier moment de prendre la décision. J'approuve la ministre lorsqu'elle déclare que le financement des préretraites par l'Etat est une fausse solution. Les finances publiques n'ont pas à payer le prix de décisions qui, de plus, ne sont pour finir pas favorables à l'emploi.

Le rapporteur a eu raison de dire que la seule vraie réponse, c'est le dynamisme de l'emploi. Qui peut nier que dans un pays qui ne connaît pas le chômage, tout licenciement reste un drame, certes, mais d'une ampleur infiniment moindre de ce qu'elle est dans une France où le taux de chômage est celui que l'on sait. Quant à l'objectif du plein emploi, on peut l'atteindre. La meilleure preuve en est que d'autres pays y sont parvenus.

M. Jacques Desallangre - Ce serait indigne de polémiquer, et je ne le ferai donc pas, mais je tiens à dire que je partage l'incompréhension et le sentiment d'injustice que ressentent les salariés de Wolber. Il faut, nous explique-t-on, du temps pour comprendre les raisons qui poussent une entreprise à licencier. Du temps ! En mai, le comité central d'entreprise s'entend dire que tout va bien et, le 1er juin, que l'usine de Soissons va fermer ! Et pourquoi ? Non pas, comme on pourrait le croire, parce que Michelin perd de l'argent, mais parce que Wolber n'en gagne pas suffisamment ! Quant à M. Michelin, il ne donne vraiment pas l'impression d'être chagriné par ce qu'il fait, lui qui affirme haut et fort qu'il aurait dû licencier depuis dix ans et que sa seule faute a été de sous-estimer l'inculture des Français en matière de gestion d'entreprise ! Si on l'en croit, son seul tort a été d'annoncer en même temps bénéfices et licenciements : comment les salariés concernés peuvent-ils admettre pareil raisonnement ?

Quant aux hommes politiques, ils devraient réagir plus vite, j'ai déjà eu l'occasion de le dire lors du débat sur l'aménagement du territoire. Imaginez l'effet qu'a produit, à Laon, M. Guigou, auquel nous venions de dire l'inquiétude que suscitait la réduction prévue des fonds FEDER dans l'Aisne, et qui a eu pour réponse «Vous n'êtes pas les seuls ! Prenez un peu de hauteur !». Le moins que l'on en puisse dire est que cela a été mal pris, et l'envie m'est venue, difficilement contenue, de rétorquer que, la prochaine fois, pour pouvoir présenter un meilleur dossier, nous demanderions à Michelin de licencier un an plus tôt !

Si les salariés, leurs familles et, plus largement, la population concernée par ces licenciements se tournent vers les politiques, ont-ils tort ? Je ne le pense pas. Loin de les décourager, nous devons leur donner des raisons d'espérer et de croire en leurs élus.

M. Maxime Gremetz - Il n'y a pas lieu de généraliser. Nous ne parlons pas de PME ou de PMI banales, mais d'entreprises florissantes qui licencient pour accroître encore leurs bénéfices, surexploiter leurs salariés et voir flamber leur cotation en Bourse. Dois-je rappeler que l'entreprise Michelin a reçu 10 milliards de fonds publics, entre 1983 et 1999, pour supprimer 15 000 emplois ? Dois-je rappeler que ses profits ont augmenté de 20 % en six mois, et le cours de son action de 12,56 % ?

Nous devrons, certes, poursuivre le débat, mais je ne partage pas votre opinion, Madame la ministre, selon laquelle le motif économique n'appartient qu'à l'employeur, ce qui signifierait que les salariés sont incapables de réflexion et de discernement.

M. le Président de la commission - Ce n'est pas ce que nous avons dit !

M. Maxime Gremetz - Je le sais, car je vous ai écouté attentivement : je dis que l'on pourrait être tenté de le faire croire, et donc de considérer comme normal que les salariés n'aient pas de droits, que les rares droits qui leur sont acquis soient bafoués et que, quand la justice leur donne raison, ses décisions ne s'appliquent pas, parce qu'il est trop tard !

Ce sont les salariés qui créent les richesses. Ils ont donc le droit de savoir comment elles sont utilisées, d'intervenir dans la gestion des entreprises, de participer à la réflexion sur les conditions de travail, sur les salaires et sur les investissements.

Alors que Michelin -et Wolber- continuent de percevoir des milliards de fonds publics, nous n'aurions pas le droit de dire : «Ça suffit» ? Nous sommes pourtant engagés, ensemble, dans une lutte constante en faveur du progrès social !

Pour ce qui les concerne, les parlementaires communistes présenteront prochainement une proposition de loi qui portera soit sur l'emploi précaire soit sur le nécessaire encadrement des licenciements économiques. Dans l'intervalle, je suis favorable à ce que nous fassions le geste politique fort d'adopter les «amendements Wolber».

Le sous-amendement 246, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Président - Sur le sous-amendement 255, je suis saisi d'une demande de scrutin public.

A la majorité de 25 voix contre 7 sur 32 votants et 32 suffrages exprimés, le sous-amendement 255 n'est pas adopté.

Le sous-amendement 247, mis aux voix, n'est pas adopté, non plus que les sous-amendements 256, 248, 253, 249 et 254.

L'amendement 37, mis aux voix, est adopté.

M. le Président - Le groupe communiste a demandé un scrutin public sur l'amendement 94.

A la majorité de 23 voix contre 7 sur 30 votants et 30 suffrages exprimés, l'amendement 94 n'est pas adopté.

Les amendements 95, 96 et 97, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. Yves Cochet - L'amendement 137 vise à simplifier le contentieux de l'indemnisation du chômage et à faciliter l'accès des requérants à la justice.

L'amendement 137, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'article 15, modifié, mis aux voix, est adopté.

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ART. 15 BIS

M. le Rapporteur - L'amendement 39 est rédactionnel.

L'amendement 39, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté, de même que l'article 15 bis, ainsi modifié.

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AVANT L'ART. 16

M. le Rapporteur - L'amendement 40 rétablit l'intitulé du chapitre X : « Rémunération ».

L'amendement 40, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

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ART. 16

M. François Goulard - Je lis, page 67 du rapport, sur la lancinante question du SMIC et du complément de rémunération, une tournure que je ne puis approuver : «Seuls les salariés à temps partiel n'ayant pas réduit leur temps de travail ne bénéficieront pas de ce complément». S'ils n'ont pas réduit leur temps de travail, en effet, ce ne sera pas de leur fait, mais il est vrai que vous ne pouviez faire autrement que d'instituer ce double SMIC, sauf à augmenter considérablement l'actuel SMIC unique. Je n'en dirai pas plus, car le dernier mot reviendra au Conseil constitutionnel.

M. le Rapporteur - L'amendement 41 rectifié rétablit l'article dans la rédaction adoptée par l'Assemblée en première lecture.

Mme la Ministre - Avis favorable.

M. François Goulard - Le sous-amendement 208 substitue, pour le calcul de la garantie de rémunération, la date de la signature de l'accord à celle de l'entrée en vigueur de la réduction de la durée du travail.

Le sous-amendement 208, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Maxime Gremetz - Le sous-amendement 98 précise que la rémunération des heures supplémentaires et les primes ne s'imputent pas sur le complément différentiel, afin d'éviter que les salariés ne soient spoliés.

M. le Rapporteur - La commission l'a repoussé.

Mme la Ministre - Le mécanisme de garantie s'entend indépendamment des primes qui ne sont pas intégrées dans le SMIC : la jurisprudence est assez claire pour qu'il ne soit pas besoin de le préciser dans la loi. S'agissant de la rémunération des heures supplémentaires, le dispositif transitoire est conçu pour couvrir équitablement toutes les situations, et les salariés dont l'horaire sera supérieur à la nouvelle durée légale seront payés, au-delà, en heures supplémentaires. En ce qui concerne, enfin, l'assiette des heures supplémentaires, la jurisprudence retient la notion de «salaire versé en contrepartie directe du travail fourni», ce qui exclut évidemment le complément différentiel.

M. Maxime Gremetz - Compte tenu de ces explications, qui figureront au Journal officiel, je retire le sous-amendement 98. Le sous-amendement 99, quant à lui, tend à éviter l'embauche abusive de salariés à 34 heures hebdomadaires, qui seraient payés 5 heures de moins que les salariés à temps plein passés à 35 heures. Je n'ai, à ce jour, reçu aucune réponse sur ce point.

Le sous-amendement 99, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'amendement 41 rectifié, mis aux voix, est adopté, et l'article 16 est ainsi rétabli.

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AVANT L'ART. 17

M. le Rapporteur - L'amendement 42 rétablit l'intitulé du chapitre XI : «Application dans les professions agricoles».

L'amendement 42, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

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ART. 17

M. François Goulard - S'il est un secteur où la rigidité de la loi apparaîtra dans tout son éclat, c'est bien l'agriculture. Le contraste sera saisissant, en effet, entre les 35 heures, durée légale de travail des salariés agricoles, et les horaires, plus longs, des exploitants.

Il sera aussi très difficile de faire respecter le texte que vous allez voter par des chefs d'exploitation qui ne pourront prendre connaissance de toutes ses subtilités. Je tiens donc à réaffirmer l'opposition farouche de tous les groupes de l'opposition à cet article.

M. le Rapporteur - L'amendement 43 rectifié tend à rétablir l'article dans une rédaction qui permette aux salariés agricoles -soumis aux dispositions du code rural- de bénéficier du même régime que celui défini pour les salariés relevant du code du travail.

Mme la Ministre - Favorable.

M. François Goulard - Le sous-amendement 218 est défendu.

Le sous-amendement 218, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. François Goulard - Le sous-amendement 222 corrigé est défendu.

M. le Rapporteur - Avis défavorable, mais je souhaite attirer l'attention du Gouvernement sur les difficultés qui s'attachent au travail saisonnier, s'agissant surtout de la cueillette des fruits.

Le sous-amendement 222 corrigé, repoussé par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'amendement 43 rectifié, mis aux voix, est adopté et l'article 17 est ainsi rétabli.

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AVANT L'ART. 18

M. le Rapporteur - L'amendement 44 vise à créer une nouvelle division «dispositions diverses» dans le cadre d'un chapitre XI bis.

L'amendement 44, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

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ART. 18

M. le Rapporteur - L'amendement 45 est de rétablissement.

L'amendement 45, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté et l'article 18 est ainsi rétabli.

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ART. 19

M. le Rapporteur - L'amendement 46 est de rétablissement.

L'amendement 46, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté et l'article 19 est ainsi rétabli.

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APRÈS L'ART. 19

M. François Goulard - L'amendement 58 est défendu.

L'amendement 58, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

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AVANT L'ART. 20

M. le Rapporteur - L'amendement 47 est de conséquence.

L'amendement 47, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

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ART. 20

M. le Rapporteur - L'amendement 48 est de rétablissement.

M. Maxime Gremetz - Le sous-amendement 100 tend à ne pas exclure les fonctionnaires et les agents publics de la réduction du temps de travail : à cet effet le Gouvernement présentera chaque année au Parlement le bilan de l'application de la réduction du temps de travail dans la fonction publique.

M. le Rapporteur - Avis favorable.

Mme la Ministre - Même avis.

M. François Goulard - Je soutiens le sous-amendement de M. Gremetz.

Le sous-amendement 100, mis aux voix, est adopté.

M. le Président - A l'unanimité

L'amendement 48 ainsi sous-amendé, mis aux voix, est adopté et l'article 20 est ainsi rétabli.

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APRÈS L'ART. 20

Mme la Ministre - L'amendement 228 a pour objet de lever toute ambiguïté quant à l'entrée en vigueur de la loi en précisant qu'elle est applicable au 1er janvier 2000 ou au premier jour du mois suivant sa publication si celle-ci est postérieure au 1er janvier 2000.

M. le Rapporteur - Favorable.

L'amendement 228, mis aux voix, est adopté.

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TITRE

M. Jean-Luc Préel - L'amendement 139 vise à modifier le titre du projet de loi en retirant le mot «négociée» car si réduction du temps de travail il y a, la négociation ne nous semble pas très présente.

M. le Rapporteur - Défavorable. L'ensemble de notre débat a montré qu'il s'agissait bien d'une loi de négociation.

Mme la Ministre - Même avis.

L'amendement 139, mis aux voix, n'est pas adopté.

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SECONDE DÉLIBÉRATION

M. le Président - En application de l'article 101 du Règlement, la commission demande qu'il soit procédé à une seconde délibération des articles premier ter et 7. La seconde délibération est de droit.

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ARTICLE PREMIER TER

M. le Rapporteur - L'amendement 1 vise à aboutir à une rédaction plus élégante de l'amendement relatif aux temps d'habillage et de déshabillage.

Mme la Ministre - Avis favorable à cet excellent amendement.

L'amendement 1, mis aux voix, est adopté.

L'article premier ter, ainsi modifié, mis aux voix, est adopté.

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ART. 7

M. le Rapporteur - L'amendement 2 tend à clarifier les dispositions de l'amendement de MM. Cochet et Gremetz relatif aux possibilités d'autorisations d'absences accordées aux personnes atteintes de maladies graves avec une modification : au lieu de lire après l'article L.122-28-9, il faut lire après l'article L.122-24-24 et dans le deuxième alinéa, au lieu de lire article L.122-28-9-1, il convient de lire article L.122-24-5.

L'amendement 2, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

L'article 7 ainsi amendé, mis aux voix, est adopté.

M. le Président - Nous en avons terminé avec l'examen des amendements. La Conférence des présidents a décidé que les explications de vote et le vote par scrutin public sur l'ensemble du projet de loi auront lieu le mardi 7 décembre, à l'issue des questions au Gouvernement.

Mme la Ministre - Je demande une suspension de séance afin de convier l'ensemble de l'Assemblée à fêter à la buvette l'anniversaire de M. le rapporteur (Sourires et applaudissements sur plusieurs bancs).

La séance, suspendue à 23 heures 10 est reprise à 23 heures 30.

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FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR 2000 (lecture définitive)

M. le Président - J'ai reçu de M. le Premier ministre une lettre invitant l'Assemblée, conformément aux dispositions de l'article 45, alinéa 4, de la Constitution, à statuer définitivement sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2000.

En conséquence, l'ordre du jour appelle la discussion de ce projet en lecture définitive.

Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteur de la commission des affaires sociales pour la famille - Cette année encore, le projet de loi de financement est particulièrement ambitieux.

Comme promis, le Gouvernement a entamé la réforme des cotisations patronales. Les aspects fiscaux ont quelque peu occulté la régulation des dépenses d'assurance maladie par la CNAM, la réforme en profondeur du financement des cliniques privées, les mesures en faveur des familles, l'abondement du fonds de réserve pour les retraites ou l'indemnisation des accidents du travail successifs. C'est regrettable.

Néanmoins, il s'agit ici du budget social de la nation qui organise des flux financiers autrement plus complexes et importants en volume que le budget de l'Etat.

Contribution sociale généralisée, contribution sociale sur les bénéfices, taxe générale sur les activités polluantes, droits de consommation sur le tabac et les alcools, des impositions de toutes natures alimentent ce budget. Il a vocation à les recevoir pour financer les besoins et favoriser l'emploi. Il faut que ces recettes soient dynamiques, garantissant à long terme un haut niveau de protection sociale pour tous.

Avec la réforme du financement des cotisations patronales de sécurité sociale ce projet s'inscrit totalement dans la démarche engagée en 1998 avec le basculement intégral des cotisations maladie vers la CSG.

La commission a contribué à enrichir le texte. Elle a ainsi garanti l'équilibre financier du fonds d'allégements. Elle a souhaité que les indemnités de licenciement soient assujetties aux cotisations sociales, augmenté le seuil de recouvrement de la CSG sur les revenus du patrimoine et prévu une possibilité de remise amiable des majorations de retard de contribution sociale de solidarité sur les sociétés.

Pour contenir l'évolution des honoraires, le projet donne à la CNAM une pleine responsabilité de régulation de la médecine de ville. Clarifier les rôles respectifs c'est atténuer un facteur essentiel d'inefficacité de notre système de soins.

M. Jean Le Garrec, président de la commission des affaires sociales - Très bien !

Mme la Rapporteur - Sur proposition de la commission, l'Assemblée a associé les caisses nationales d'assurance maladie autres que la CNAM à la rédaction des rapports d'équilibre transmis au Gouvernement, contenant l'évolution des dépenses, les annexes aux conventions applicables aux professionnels de santé et leur compatibilité avec le respect de l'objectif de dépenses déléguées ; elle a prévu que ces rapports soient également transmis au Parlement qui vote l'ONDAM dont est issu l'«objectif de dépenses déléguées» des soins de ville.

L'Assemblée nationale a par ailleurs permis à l'assurance maladie de conclure des accords partiels avec des représentants de telle ou telle spécialité ou groupe de spécialités médicales.

D'autre part, le texte a confié aux agences régionales de l'hospitalisation la gestion des dépenses de l'hospitalisation privée et la tarification qui doit progressivement devenir une tarification à la pathologie.

En première lecture, l'Assemblée sur proposition de M. Evin a confié à la commission exécutive et non au directeur de l'ARH, le soin de conclure le contrat régional avec les cliniques privées. Elle a par ailleurs exclu de l'objectif quantifié national la dialyse et l'hospitalisation à domicile. Enfin, elle a donné la possibilité aux établissements privés concessionnaires de service public de bénéficier des subventions du nouveau fonds pour la modernisation des cliniques privées.

Enfin, nous sommes très satisfaits de ce que le système d'évaluation médicale et de régulation économique applicable au médicament soit transposé aux dispositifs médicaux.

Ce projet a également permis l'adoption, en concertation avec le mouvement familial, de mesures importantes pour les familles : garantie d'évolution des prestations familiales, prolongation du versement de certaines d'entre elles, garantie des ressources de la branche. L'an prochain l'aide à la garde des enfants sera adaptée en fonction des ressources des parents.

Pour ce qui concerne la branche vieillesse ce projet prépare l'avenir tout en garantissant la stabilité des régimes.

Des moyens supplémentaires sont accordés au fonds de réserve pour les retraites. Les pensions sont revalorisées de façon significative. Les mesures d'encadrement du cumul emploi-retraite sont reconduites.

Le Sénat a rejeté le projet. La commission mixte paritaire réunie le 29 novembre n'étant pas parvenue à l'adoption d'un texte commun, l'Assemblée nationale ne peut qu'adopter définitivement le texte voté par elle, en nouvelle lecture, le mardi 30 novembre 1999. La commission des affaires culturelles vous y invite (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale - Le PLFSS 2000 s'inscrit dans le cadre de la politique conduite depuis deux ans et demi.

Nous avons rénové profondément le financement de notre protection sociale, avec pour préoccupation majeure de favoriser l'emploi.

Dès 1997, le Gouvernement a transféré une partie des cotisations salariales d'assurance maladie vers la CSG.

Nous prolongeons en 2000 cette réforme par celle des cotisations patronales.

Nous mettons en place un nouveau mécanisme d'allégement sur les bas et moyens salaires, qui apporte 25 milliards de plus que la ristourne Juppé sans alourdir les prélèvements sur les ménages -cette réforme étant indispensable pour enrichir la croissance en emplois.

En matière d'assurance maladie, nous voulons permettre à tous d'accéder aux soins et conforter notre système d'assurance maladie. Grâce à la couverture maladie universelle, à partir du 1er janvier 2000, six millions de nos concitoyens accéderont aux soins. D'autre part, nous confortons le système d'assurance maladie en optimisant les dépenses, qui, sur deux ans, ne progressent pas plus vite que la richesse nationale.

Une clause de sauvegarde créée l'an dernier prévoit une contribution de l'industrie pharmaceutique en cas d'évolution excessive des dépenses. Le droit de substitution permet un développement réel des génériques. Les taux de remboursement et les prix des médicaments auront désormais pour critère le service médical rendu. La réévaluation de l'ensemble des spécialités thérapeutiques a été entreprise.

Après cette réforme ambitieuse de la politique du médicament, cette année nous rénovons en profondeur les mécanismes de régulation de la médecine de ville, désormais placés sous l'entière responsabilité des caisses et des professionnels de santé. Nous privilégions les mécanismes incitatifs qui associent les professionnels de santé à une maîtrise médicalisée des prescriptions.

Ces deux dernières années, nous avons aussi engagé une action en profondeur pour adapter notre système hospitalier aux besoins. La révision des SROS de deuxième génération permet de le faire sur la base d'une concertation approfondie : nous avons ainsi repéré les insuffisances, prévu des coopérations entre établissements, planifié des reconversions. Le travail effectué depuis deux ans démontre la capacité d'évolution de notre système hospitalier.

Nous avons également conduit une politique déterminée pour réduire les inégalités entre régions et établissements. Nous la prolongeons en ouvrant le chantier de la tarification à la pathologie. Mais je sais bien qu'une loi de financement ne permet pas d'aborder le fond des problèmes sanitaires. Ce débat, nous devons l'organiser. Déjà, le Gouvernement s'est engagé à présenter au printemps prochain une loi sur la modernisation de notre système de santé et sur les droits des malades.

Depuis deux ans, nous avons aussi profondément rénové la politique familiale, de façon à la rendre plus juste, plus solidaire et plus attentive aux besoins. Mme Clergeau ayant déjà rappelé les progrès accomplis, je n'y reviens pas. Je dirai seulement que nous avons ouvert deux chantiers majeurs pour l'an 2000 : celui des aides à la petite enfance afin de faciliter la conciliation de la vie familiale et de la vie professionnelle, celui de la simplification et de l'harmonisation des aides au logement.

La pérennité de cette politique est assurée puisque nous garantissons l'évolution des ressources de la branche famille.

Nous avons également entrepris de conforter notre système de retraite par répartition . Un fonds de réserve a été créé. Doté de 2 milliards en 1999, il atteindra 22 milliards en l'an 2000 et je remercie M. Le Garrec d'avoir, par un amendement, contribué à l'alimenter en prévoyant que la Caisse des dépôts verse 3 milliards. Nous avons posé un diagnostic, les concertations se poursuivent avec les partenaires sociaux et le Premier ministre définira au début de l'an 2000 les principes directeurs qui nous guideront pour adapter notre système de retraite au nouveau contexte démographique. Nous resterons fidèles à notre méthode et à notre calendrier, quelles que soient les remarques de ceux qui nous pressent d'aller plus vite. Ceux-là même qui, pour avoir oublié de prendre le temps de dialoguer, ont paralysé toute évolution sur le sujet.

Le rapide bilan que je viens de dresser permet de mesurer le chemin parcouru. Pour relever les défis suivants, nous disposons d'un atout : le retour à l'équilibre. En 2000, nous ne devrions plus entendre parler du «trou de la sécu».

Pour conduire ces réformes, le Gouvernement a pu compter depuis deux ans et demi sur le soutien de l'Assemblée et je ne doute pas de votre engagement sur les échéances à venir. Qu'il me soit pas permis en conclusion de remercier à nouveau le président Le Garrec et les rapporteurs, Mme Clergeau, MM. Recours, Evin, Jacquat, Cahuzac, pour la qualité de leur travail (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe RCV).

M. Yves Cochet - Le texte adopté mardi consacre les avancées sociales réalisées depuis deux ans et demi, je m'en réjouis, mais je voudrais revenir sur trois points.

La TGAP, tout d'abord. Notre but était au départ de taxer les préparations les plus riches en phosphates afin d'adresser un signal aux fabricants. Mais un amendement est venu «aplatir» tout cela, de sorte que la charge des pollueurs s'en est trouvée allégée tandis que celle des entreprises qui font des efforts a été alourdie. Dans ces conditions, je m'interroge sur l'efficacité écologique de la TGAP qui n'apparaît plus que comme une taxe.

La sécurité sanitaire ensuite. Nous avons alerté à plusieurs reprises le Gouvernement sur les difficultés que rencontrent les victimes de maladies professionnelles et d'accidents du travail. Elles doivent parfois se battre pendant des années pour percevoir l'indemnité ou la pension à laquelle elles ont droit. Manifestement, notre système de soins ne donne pas une place suffisante aux maladies, ce qui est quelque peu paradoxal. Je me félicite donc qu'un projet sur les droits des malades soit en préparation.

A cet égard, la création par la loi du 1er juillet 1998 d'une unité santé-travail au sein de l'institut de veille sanitaire a constitué une innovation importante. Mais le projet de loi de financement ne donne pas à l'UST les moyens de sa politique. Pourquoi l'avoir créée si on ne lui donne pas les moyens de travailler ?

Enfin, la sécurité sanitaire et l'environnement. Le vote de la loi du 1er juillet 1998 ayant engagé un processus que nous avons le devoir de mener à son terme, nous nous battons -nous les Verts, et aussi Mme Grzegrzulka- pour la création d'une agence santé-environnement.

Mme la Secrétaire d'Etat - J'y travaille.

M. Yves Cochet - Je me félicite donc que celle-ci ait été annoncée par le 1er ministre, le 30 juin dernier. Il faut maintenant passer aux actes, étant entendu que ce premier pas devra être suivi par d'autres réformes qui associeront médecine préventive et curative, avec par exemple la définition d'une spécialité de médecine environnementale au sein des études de médecine. La prise en compte des résultats des médecines alternatives permettrait aussi d'avancer vers une vision plus globale de la santé publique.

Et surtout, il ne faut pas oublier l'élément central du système : le patient. Avec la CMU, nous nous orientons vers une protection sociale plus complète et plus proche des citoyens. Je m'en réjouis, tout en souhaitant que ce soit le point de départ d'une grande transformation de notre système de santé.

Le groupe RCV votera le projet (Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste).

M. François Goulard - Au cours des deux lectures précédentes, nous avons critiqué ce projet de loi de financement sous plusieurs angles. Et d'abord sur son volet financier. Il est en effet inédit que le financement de la politique de l'emploi se trouve dans un PLFSS. Innovation regrettable ! Et les recettes disparates que le Gouvernement affecte au financement des 35 heures ne justifient pas que l'on parle, comme le fait la ministre, de réforme d'ensemble de l'assiette des cotisations sociales. Non, Mme Aubry a simplement pris les recettes qui restaient disponibles pour couvrir le financement de sa politique, sans d'ailleurs que nous sachions ce qu'il en sera l'année suivante.

Nous déplorons ensuite l'absence de réponse concernant les retraites. Nous savons bien pourtant que, même s'ils étaient créés dès aujourd'hui, les fonds de pension arriveraient trop tard pour aider les régimes par répartition à surmonter les premières difficultés prévisibles. Leur création ayant été repoussée pour des raisons purement idéologiques, des sacrifices seront à l'évidence nécessaires pour l'ensemble des Français. Il faudrait déjà introduire plus d'équité dans le système, car la disparité entre le public et le privé ne sera pas longtemps supportable. Il y a aussi un effort à faire en faveur des femmes, car, les choses étant ce qu'elles sont, elles cotisent moins longtemps que les hommes, elles sont amenées souvent à interrompre leur activité professionnelle pour élever leurs enfants ou font d'emblée le choix de ne pas travailler. Et pour peu que survienne un décès ou un divorce, elles se retrouvent plus démunies. Il y aurait donc une grande réforme à opérer pour reconnaître le rôle des femmes dans la société et valoriser le travail qu'elles accomplissent.

Autre sujet de critique : la régulation des dépenses de santé. Nous pensons qu'elle doit revenir aux assureurs maladies -il en existe plusieurs sortes- mais sûrement pas selon les modalités que prévoit le Gouvernement.

Vous imposez la centralisation et l'uniformisation, et, à ce sujet, nous sommes opposés à la mise de l'hospitalisation privée sous la tutelle des ARH.

Je ne dis rien de la politique familiale, car elle est presque totalement absente (Mme le rapporteur rit). C'est un fait ! Or nous aurions besoin d'une politique familiale de grande ampleur, lorsqu'on sait les défis démographiques qui nous attendent. Ce projet de loi de financement est cette année un texte de commodité, qui ne règle rien, alors que l'avenir est inquiétant.

M. Jean-Luc Préel - Très bien !

Mme Jacqueline Fraysse - Le Sénat nous a renvoyé le projet d'un revers de main, parce que le plan Johannet n'a pas été repris, que les dépenses sociales n'ont pas été assez réduites, parce que les sénateurs souhaitaient une mise en concurrence entre les assurances privées et l'assurance maladie. A l'inverse, la majorité sénatoriale ne s'est pas émue de la non-indexation des retraites et des prestations familiales sur l'évolution prévisionnelle des prix. La droite aura beau déclarer qu'elle se préoccupe des retraités et des familles, les faits parleront d'eux-mêmes.

Si nous souhaitons réaliser l'équilibre financier de notre sécurité sociale, nous ne pouvons pas nous féliciter de la voie empruntée pour y parvenir. Rien ne peut nous faire oublier les besoins non couverts, les restrictions drastiques portant atteinte au fonctionnement hospitalier, le niveau de remboursement pénalisant les plus modestes. C'est dire combien la question du financement nous inquiète. La réforme des cotisations proposée conduit à accroître les exonérations de cotisation employeur, qui atteindront 65 milliards en 2000 et 100 à 110 milliards à terme. Voilà qui ne permettra pas de parvenir au rééquilibrage annoncé entre le revenu du capital et celui du travail.

Ni la réaffectation des taxes sur les tabacs et alcools, ni la TGAP, encore moins la taxe sur les heures supplémentaires ne laissent augurer un financement suffisant et durable de la sécurité sociale.

Il est indispensable de toucher aux profits des entreprises. La contribution sur les bénéfices des sociétés est un premier pas, mais beaucoup trop modeste. Le MEDEF n'en aura jamais assez et ne se privera pas de recourir toujours plus au chantage. La meilleure réponse consiste à rendre la parole aux assurés sociaux, par exemple en organisant des élections à la sécurité sociale.

Faute de ressources supplémentaires, le pouvoir d'achat des retraités et des familles diminuera l'an prochain, ce qui est inacceptable, et les hôpitaux ne disposeront pas des moyens nécessaires à leurs nouvelles missions. Le passage aux 35 heures me semble fortement compromis sans moyens nouveaux. Pour la même raison, les personnels des CAF et des CPAM ne parviennent plus à faire face. Enfin, dans un tel contexte, nous nous inquiétons de l'entrée en vigueur de la CMU dans un mois.

Si les objectifs du Gouvernement exprimés dans l'annexe nous conviennent, les moyens ne sont pas à la hauteur. Faute de progrès sérieux, les assurances s'engouffrent sur ce marché, renforçant l'inégalité d'accès aux soins. Déjà elles proposent de rembourser dès le premier franc certains vaccins et médicaments innovants.

Même si nous apprécions quelques points positifs, comme la reconnaissance des centres de santé, la revalorisation du minimum vieillesse et des pensions de réversion, la prolongation à 21 ans des droits au complément familial et aides au logement ou le nouveau mode de calcul de l'évolution de l'ONDAM pour 2000, nos préoccupations restent fortes. C'est pourquoi nous nous abstiendrons.

M. Jean-Luc Préel - Vous semblez très satisfaite, car le texte qui nous est soumis ressemble comme un frère jumeau à celui que vous aviez proposé.

M. Gérard Terrier - Très bien !

M. Jean-Luc Préel - Contrairement à vous, je ne m'en réjouis pas.

M. François Goulard - Très bien !

M. Jean-Luc Préel - Jusqu'en 1996, la Constitution ne permettait pas que le Parlement se prononce sur la protection sociale du pays.

Les gouvernements successifs s'en accommodaient très bien, s'en réjouissaient peut-être.

Le gouvernement d'Alain Juppé a eu le grand mérite d'entreprendre la réforme fondamentale qui fait que le Parlement peut débattre et voter sur la protection sociale.

A l'Assemblée, 4 jours et 4 nuits pour la première lecture, 2 jours et une nuit pour la deuxième lecture ont été nécessaires.

M. François Goulard - Et quelques quarts d'heure pour la 3ème !

M. Jean-Luc Préel - Mais à quoi ont servi ces débats ? Qu'avez-vous retenu des nombreuses propositions faites par les sénateurs ou par l'opposition à l'Assemblée ? Rien ou si peu... Cette année, j'ai pu faire adopter dans le rapport deux amendements mineurs dont l'un malgré votre opposition.

Vous avez refusé des amendements demandant que les comptes soient présentés en droits constatés ; que l'on conforte notre système de protection sociale, basé sur la gestion paritaire ; que l'on prenne en compte les besoins de la population estimés au niveau régional ; que l'on développe la prévention et l'éducation à la santé ; que l'on prenne en compte l'augmentation des démences séniles ; que la future loi de modernisation de la santé traite le problème de l'aléa thérapeutique ; que l'on veille à former suffisamment d'anesthésistes, de gynécologues, de pédiatres ; que le statut des praticiens soit revu et prenne en compte la pénibilité et la responsabilité ; que le Gouvernement prenne les dispositions nécessaires pour que la population bénéficie des molécules innovantes ; que le médicament princeps dispose des mêmes avantages que le générique.

Chacun de ces amendements correspondait à un réel problème, et pourtant vous les avez avec obstination tous refusés.

Lorsque le rapporteur a eu la bonté de reconnaître qu'un amendement correspond effectivement à un problème, mais que ce n'est ni le lieu ni le moment de proposer une solution, de qui se moque-t-on ?

Lorsque votre cabinet explique aux représentants professionnels que s'ils ont des amendements à proposer, mieux vaut les présenter au ministère plutôt qu'à des députés de l'opposition, est-ce normal ?

M. François Goulard - Non, mais c'est réaliste ! (Rires)

M. Jean-Luc Préel - Officiellement, c'est le Parlement qui vote les recettes et les objectifs de dépenses. Dans la réalité, il s'agit tout simplement d'avaliser le texte préparé par le Gouvernement.

De ce fait, avant d'appeler à un vote négatif, nous ne pouvons que réitérer nos critiques.

Ainsi le financement des 35 heures occupe, comme a paru le reconnaître Mme le rapporteur, une place très importante dans ce projet, qui devrait être consacré aux problèmes de la santé, de la famille et de la retraite.

Pour financer les 35 heures, vous proposez la création d'un fonds. Il aurait été beaucoup plus simple d'appliquer le principe de la loi de 1994 qui prévoit que l'Etat compense intégralement les exonérations qu'il décide et les verse à l'ACOSS !

M. François Goulard - Très juste !

M. Jean-Luc Préel - Et ce fonds, vous l'alimentez avec des recettes qui, toutes, devraient avoir une autre destination.

Je ne reviens pas sur l'improvisation de votre premier mode de financement, ni sur votre reculade à la veille du débat face au front uni des partenaires sociaux, qui vous fait aboutir à un bricolage étonnant, puisque, pour financer les 35 heures, vous faites appel à la taxe sur les tabacs, pour 39,5 milliards, à la taxe sur les alcools pour 5,6 milliards, à la taxe sur les activités polluantes pour 3,2 milliards. De surcroît, vous créez un nouvel impôt sur les bénéfices des entreprises et vous prenez 7 milliards dans la poche des salariés qui ne seront plus rémunérés pour les heures supplémentaires.

Et en dépit de ce bricolage, il manquera 20 milliards en 2001 ! C'est dire que les 35 heures ne sont pas financées, pas plus d'ailleurs que la CMU.

Mais, critique majeure, ce projet ne prépare pas l'avenir du pays, car vous ne profitez pas de la croissance pour entreprendre les réformes indispensables. Ainsi, contrairement à d'autres pays, vous n'avez pas de politique familiale. Bien plus, comme l'a fait observer M. Goulard, vous abrogez la loi de 1994 qui prévoyait l'extension des prestations au-delà de 20 ans.

Vous n'engagez pas davantage la simplification des 25 prestations et des 15 000 références, pourtant ingérables et inexplicables.

Pour ce qui est des prestations familiales, vous accordez une augmentation limitée à 0,5 % alors que l'inflation prévue est de 0,9 %. Bien loin d'un coup de pouce, il s'agit donc d'une perte de pouvoir d'achat programmée pour les familles.

En ce qui concerne les retraites, alors que les données démographiques sont connues de tous et qu'il y a urgence, vous ne décidez rien et le fonds de réserve est demeuré virtuel pendant un an.

L'augmentation des retraites de 0,5 % avec une inflation de 0,9 % sera, à juste titre, perçue comme une baisse du pouvoir d'achat, et vous proposez pour la CNRACL une augmentation des cotisations que les collectivités apprécieront certainement.

L'UDF, qui souhaite conforter la retraite par répartition en accroissant l'autonomie de la CNAV, demande la création d'une caisse de retraite des fonctionnaires gérée paritairement et l'harmonisation progressive des règles appliquées aux divers régimes ainsi que la mise en place effective de l'épargne retraite.

Pour la santé, votre gestion est essentiellement comptable, puisque vous ne prenez pas comme base les besoins de la population mais les dépenses de l'année précédente.

Vous n'améliorez en rien la prévention et l'éducation à la santé alors que notre pays connaît un retard dramatique en ce domaine, et vous réalisez le tour de force de ne pas consacrer un seul article aux hôpitaux alors que beaucoup connaissent de grandes difficultés malgré la compétence et le dévouement de leur personnel.

M. le Président de la commission - Le problème ne se pose pas en ces termes !

M. Jean-Luc Préel - Mais les deux reproches majeurs que nous vous adressons concernent l'évolution programmée vers l'étatisation et l'instauration de sanctions collectives par les lettres-clés flottantes.

Certes, vous confiez apparemment la gestion de la médecine ambulatoire à la CNAM mais vous l'encadrez strictement et vous gardez la main en dernier ressort. Dans le même temps, vous conservez, bien sûr, les hôpitaux sous votre coupe et vous récupérez les cliniques. Vous renforcez donc l'étatisation du système mais pire encore à une époque où chacun réclame la fongibilité des enveloppes, vous renforcez les barrières et les rigidités : ce n'est pas un progrès.

De plus, en instituant les lettres-clés flottantes et bien qu'ayant été sanctionnée l'année dernière par le Conseil constitutionnel, vous nous proposez la plus perverse des sanctions collectives. Nous allons donc à nouveau déférer cette loi au Conseil constitutionnel et nous espérons que, cette année encore, il nous suivra.

L'UDF réclame un «Grenelle de la santé» afin que chacun puisse participer à la sauvegarde et à l'amélioration de notre système de sécurité sociale. Tout passe par la responsabilisation et par la régionalisation qui seules permettent une politique de santé de proximité, l'adéquation de l'offre aux besoins et le développement de la prévention .

Comme vous pouvez le constater, l'UDF rejette, à grand regret, ce projet à la fois parce qu'elle désapprouve le financement ubuesque des 35 heures et parce que vous ne préparez pas l'avenir du pays de par l'absence de politique familiale, l'absence de l'indispensable réforme des retraites du fait d'une évolution prévisible de la branche santé vers une étatisation que nous réfutons (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF et du groupe du DL).

M. Gérard Terrier - Je ne parviens pas à comprendre que ceux de mes collègues qui se sont succédé à la tribune ne puissent trouver des motifs de satisfaction dans ce projet. Ainsi, Madame Fraysse, peut-être n'avons-nous pas suffisamment souligné un point qui pour être «comptable» n'en est pas moins essentiel, et qui est le retour à l'équilibre financier qui garantit la pérennité de notre système de sécurité sociale. Vous savez, Monsieur Préel dans quel état nous l'avons trouvé, et combien il était menacé ! Et si le RDS n'avait pas été institué, nous traiterions avec de graves difficultés de notre système de protection sociale. Si l'on constate, en outre, que le sauvetage a pu se faire sans réduction des prestations ni augmentation des cotisations, il y a là, personne n'en disconviendra, un motif de satisfaction supplémentaire.

Et puis, Monsieur Préel, vous vous êtes gardé de souligner que l'enveloppe de l'ONDAM augmentait, qui plus est sur des bases constatées. C'était pourtant, si mes souvenirs sont exacts, ce que vous souhaitiez !

Un autre motif de satisfaction devrait être, pour tous, l'évolution du mode de financement de la sécurité sociale, qui s'adapte à son temps. Pour maintenir cet outil merveilleux, nous avons entrepris, l'année dernière déjà, de basculer les cotisations sociales sur la CSG. Vous nous dites aujourd'hui qu'il s'agit d'un cadeau fait aux patrons. Non : il est fait aux entreprises, et ce n'est pas la même chose, et avec une contrepartie manifeste : le passage aux 35 heures, qui trouble tant l'opposition qu'elle confond causes et effets. De la réduction du temps de travail, nous attendons bien sûr une amélioration de l'emploi, qui entraînera l'augmentation des cotisations, ce qui confortera le système de protection sociale.

Quant aux retraites, vous les examinez par le petit bout de la lorgnette ! Certes, le fonds que nous créons est insuffisamment alimenté pour répondre à l'ampleur des besoins, mais il a le double mérite d'être créé et d'être alimenté - et à hauteur de 2 milliards à la fin de 2000, ce qui n'est pas rien. Monsieur Préel, n'est-ce pas mieux que ce que vous avez fait -à savoir rien ?

Quant à notre politique familiale, selon vous, elle n'existerait pas. Mais une politique familiale ne se construit pas par coups d'éclat avant les échéances électorales : elle se façonne année après année, et c'est bien ce que nous faisons : l'ARS est aujourd'hui pérennisée...

M. Jean-Luc Préel - De quand date-t-elle ?

M. Gérard Terrier - Je n'aurai pas la cruauté de vous rappeler de combien elle a été augmentée depuis notre arrivée ! Cette année, nous avons insisté sur l'aide à la petite enfance et sur l'aide au logement. Nous sommes là pour longtemps...

M. Jean-Luc Préel - Laissez le peuple en juger !

M. Gérard Terrier - Et chaque année, nous apporterons une nouvelle contribution à la politique familiale. Enfin, épargnez-nous vos diatribes sur l'étatisation et les lettres-clés flottantes -qui les a instituées, sinon M. Barrot ?

Ce projet contient un grand nombre de mesures positives, dont le groupe socialiste est fier. Il le votera donc (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. le Président - La discussion générale est close.

M. le Président de la commission - Je tiens à remercier les rapporteurs -Mme Clergeau, M. Recours, M. Jacquat, M. Evin et M. Cahuzac-, ainsi que les administrateurs de la commission, soumis à dure épreuve, de même que les fonctionnaires que nous obligeons à travailler très tard en dépit de la réforme voulue par M. Séguin, dont nous ne voyons guère les effets sur le rythme des séances de nuit. Mais cela est une autre histoire.

Je n'essaierai pas de convaincre, à une heure aussi tardive, mais je constate que nous arrivons au terme de l'examen du quatrième projet de loi de financement de la sécurité sociale. Nous devons, chaque année, tirer les enseignements de ce qui a été fait. Cette fois, des mesures importantes ont été prises : modification de l'assiette du financement, politique familiale, amorce d'un fonds de réserve pour les retraites, accent mis sur la prévention -et les dispositions prises en faveur des travailleurs victimes de l'amiante me tiennent particulièrement à c_ur-, poursuite d'une grande politique du médicament avec une courageuse exigence de qualité et mise en place d'une véritable politique de l'hôpital public qui témoigne d'une volonté manifeste de corriger les inégalités.

Tous ces éléments montrent que le Parlement tient le plus grand compte de la grande réforme qu'a constituée la présentation, devant lui, du projet de loi de financement de la sécurité sociale.

Mais il faut aller plus loin. En poursuivant, d'abord, le travail que nous avons commencé avec la Cour des comptes, et j'ai déjà fait connaître à son Premier président et au président de sa chambre sociale les points sur lesquels nous souhaitions réfléchir dans les mois à venir. En créant, par ailleurs, un groupe de travail, qui sera présidé par M. Evin, sur la régionalisation des politiques de santé. Si nous ne parvenons pas à clarifier les responsabilités, nous risquons de laisser s'opérer des dérives dangereuses. Enfin, nous devrons apprendre à gérer la TGAP : il n'est pas pensable de continuer à lui consacrer une journée entière de débats, sur les trois que prend l'examen de la loi de financement ; j'ai pris contact, à ce sujet, avec le président de la commission de la production, et je me propose d'écrire au Premier ministre.

Nous sommes en train d'engager des réformes de fond, dont les effets ne se mesureront qu'au fil des ans. Une fois la quatrième loi de financement définitivement adoptée, il nous reviendra de préparer le débat sur la cinquième, en nous y prenant le plus tôt possible, c'est-à-dire dès janvier, afin de nous donner le temps de la réflexion. C'est ainsi que nous _uvrerons à la pérennisation de notre système de protection sociale (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. le Président - La commission mixte paritaire n'étant pas parvenue à l'adoption d'un texte commun, l'Assemblée est appelée à se prononcer sur le dernier texte voté par elle.

L'ensemble du projet de loi, tel qu'il résulte du texte voté par l'Assemblée en nouvelle lecture, mis aux voix, est adopté.

Prochaine séance, mardi 7 décembre à 9 heures.

La séance est levée le vendredi 3 décembre, à 0 heure 35.

                      Le Directeur du service
                      des comptes rendus analytiques,

                      Jacques BOUFFIER


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