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Session ordinaire de 1999-2000 - 52ème jour de séance, 123ème séance

1ère SÉANCE DU MARDI 8 FÉVRIER 2000

PRÉSIDENCE de M. Pierre-André WILTZER

vice-président

Sommaire

          PROCLAMATION D'UN DÉPUTÉ 2

          FIN DE LA MISSION D'UN DÉPUTÉ 2

          PARTICIPATION 2

          EXPLICATIONS DE VOTE 22

          FIXATION DE L'ORDRE DU JOUR 24

          ANNEXE ORDRE DU JOUR 25

La séance est ouverte à neuf heures.

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PROCLAMATION D'UN DÉPUTÉ

M. le Président - M. le Président de l'Assemblée nationale a reçu, en application de l'article L.O. 179 du code électoral, une communication de M. le ministre de l'intérieur, en date du 7 février 2000, l'informant que M. Henri Emmanuelli a été élu, le 6 février 2000, député de la 3ème circonscription des Landes (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

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FIN DE LA MISSION D'UN DÉPUTÉ

M. le Président - Par lettre du 5 février 2000, M. le Premier ministre a informé M. le Président de l'Assemblée nationale que la mission temporaire précédemment confiée à M. Jean-Pierre Balligand, député de l'Aisne, avait pris fin le 28 janvier 2000.

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        PARTICIPATION

L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi de M. Philippe Douste-Blazy et plusieurs de ses collègues relative à la participation et à la croissance pour tous.

M. Jacques Barrot, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales - Le titre de cette proposition de loi traduit bien ses objectifs : participation et croissance pour tous. Le général de Gaulle l'a dit : dès lors que les gens se mettent ensemble pour une _uvre économique commune, en apportant capitaux, capacité de direction ou travail, il faut que tous forment une société et que tous aient un intérêt direct au bon fonctionnement de l'entreprise.

Le recours à l'actionnariat salarié est plus opportun que jamais. Avec l'épargne salariale, c'est le plus sûr moyen de partager équitablement les fruits de la croissance. Actuellement, la richesse créée par l'entreprise profite moins au salarié qu'à l'actionnaire. En outre, le recul de l'inflation a limité les marges de man_uvre des politiques salariales. Les accords conclus en vue d'appliquer la loi sur les 35 heures se traduisent aussi par une certaine modération des revenus salariaux, tandis que les revenus du capital continuent d'augmenter. L'épargne salariale et l'actionnariat salarié permettent d'échapper à cet effet de ciseaux.

En créant une communauté objective d'intérêts, la participation substitue à une situation hiérarchique une situation de partenariat, ce qui permet d'engager un dialogue social ambitieux.

Devenu actionnaire, le salarié pourra en effet s'exprimer sur le fonctionnement et la stratégie même de l'entreprise.

L'actionnariat salarié va aussi stabiliser l'entreprise, car la participation des salariés au capital permet de constituer un noyau stable d'actionnaires. L'actionnaire salarié est plus sensible à l'évolution à long terme de son entreprise qu'à sa rentabilité immédiate. On a vu récemment comment un tel noyau d'actionnaires a pu constituer une garantie sociale contre des offres publiques d'achat ou d'échange jugées préjudiciables par les salariés.

On trouvera dans le rapport que M. Balligand vient de signer d'autres arguments en faveur de l'actionnariat salarié.

D'ailleurs, le mouvement est bien amorcé. En 1998, plus de 35 milliards ont été distribués à 4,4 millions de salariés au titre de l'intéressement et de la participation, et 10 000 entreprises ont mis en place des plans d'épargne. Les fonds communs de placement comportaient en 1988 environ 15 % de leur actif en actions ; celles-ci représentaient 38 % de leur actif net en 1998.

Il ne s'agit donc pas de bouleverser les mécanismes existants, mais de les activer.

Sans reprendre le débat sur la « cagnotte », j'estime que la croissance actuelle nous donne une occasion inespérée de développer l'épargne salariale par des incitations fiscales. En renonçant à certaines recettes aujourd'hui, nous pouvons garantir les succès économiques de demain : les moins-values fiscales que nous pourrions consentir se traduiront à moyen terme par des recettes, puisque notre économie en sortira plus dynamique.

Développer la participation, c'est aussi empêcher que les investisseurs étrangers, les fonds de pension en particulier, détiennent une part excessive dans la capitalisation de nos entreprises. Ils en contrôlent déjà 36 % contre seulement 15 % en Allemagne et 10 % aux Etats-Unis.

Notre proposition vise d'abord à encourager les PME à développer la participation. Elles pourraient en effet constituer une provision pour investissement en franchise d'impôts à hauteur de 25 % des sommes versées dans l'année au titre de la participation et de l'intéressement.

Dès lors qu'il existe en leur sein un délégué du personnel, elles devront engager une négociation sur la mise en place d'un mécanisme d'épargne salariale. Nous proposons aussi, comme M. Balligand, de créer des plans d'épargne interentreprises et de donner au salarié le droit de transférer son épargne salariale : c'est le seul moyen de concilier épargne salariale et mobilité professionnelle.

Il faut aussi profiter des augmentations de capital pour généraliser l'actionnariat salarié : nous souhaitons que 5 % des actions nouvellement émises soient offertes aux salariés, à un prix de 50 % inférieur au prix d'émission. Ce dispositif, inspiré de la proposition Balladur, serait obligatoire pour les sociétés cotées en bourse, mais l'offre pourra être faite aussi aux salariés des sociétés non cotées si l'assemblée générale le décide ainsi. Les acquéreurs bénéficieront d'un régime fiscal favorable, mais les actions doivent être achetées dans le délai d'un mois. Nominatives, elles seront incessibles pendant trois ans.

Pour ces acquisitions, l'épargne salariale pourrait en outre être débloquée, de sorte que l'épargne salariale contribue au développement de l'actionnariat salarié.

Nous voulons encore démocratiser les plans d'options : un avoir fiscal serait accordé si des droits d'options sont effectivement distribués à plus de 50 % des salariés. Dans un souci de transparence, nous voulons créer une obligation d'information nominative et chiffrée au bénéfice des mandataires sociaux et de l'ensemble des salariés.

Il faut enfin associer davantage le salarié actionnaire à la définition de la stratégie de son entreprise. La proposition renforce l'obligation de convoquer une assemblée générale extraordinaire lorsqu'une certaine part du capital social est détenu par les salariés, afin d'obtenir une représentation plus forte des salariés actionnaires au conseil d'administration.

Elle rétablit par ailleurs le dispositif de reprise de l'entreprise par les salariés qui a momentanément disparu.

L'ensemble de ces dispositions favorisera la diffusion de la participation, un usage plus démocratique des plans d'option, une association plus étroite des salariés actionnaires à la vie de l'entreprise. Cette démarche s'inscrit dans la logique de propositions faites au Sénat, de la proposition de M. Balladur et du rapport Balligand. Elle traduit un état d'esprit : inciter sans obliger, encourager plus encore la détention prolongée des actions qui permet d'associer réellement le salarié à la démarche de l'entreprise. Il conviendra aussi d'éviter toute cacophonie entre les représentants des salariés qui disposeront d'une voix consultative au comité d'entreprise, et ceux des salariés actionnaires, qui auront voix délibérative. Sans doute faudra-t-il progresser vers une situation où les salariés seront tous actionnaires de leurs entreprises.

J'en viens au volet relatif à l'épargne retraite, différent car il vise à offrir un complément à la retraite par capitalisation ce qui impose deux exigences : l'interdiction du rachat avant terme et l'obligation de sortie en rente. Afin d'assurer aux futurs retraités la garantie absolue d'un revenu complémentaire, les placements ne sauraient être limités à l'entreprise où travaille le salarié.

Les fonds de prévoyance retraite seront des personnes morales et des structures dédiées exclusivement à la couverture des engagements pris dans le cadre des fonds de prévoyance. Leur constitution sera soumise à l'agrément de la commission de contrôle des assurances et de la commission prévue par le code de la sécurité sociale. Les plans seront souscrits par l'employeur, au profit des salariés, à la suite d'un accord de branche ou d'entreprise. Les versements annuels du salarié seront plafonnés et ceux de l'employeur devront être identiques. Les plans déboucheront impérativement sur le versement d'une rente viagère. Les dispositifs de gestion et de contrôle permettront la plus grande sécurité ainsi qu'une association réelle des salariés, le comité de surveillance étant composé pour moitié des représentants élus des adhérents, pour un quart des représentants des employeurs et pour un quart des représentants des syndicats représentatifs. On retrouve là le souci de renforcer la communauté des épargnants.

Cette proposition permet à la fois de s'engager dans l'aggiornamento de l'épargne salariale et de mettre en _uvre un dispositif d'épargne retraite. Elle offre matière à un débat très ouvert. Le temps presse car un partage plus équitable de la croissance exige l'accès du plus grand nombre à l'épargne salariale et une réorientation de l'épargne importante des Français, aujourd'hui trop largement dirigée vers les obligations, vers des formes plus dynamiques, favorisant le progrès de notre économie.

La prévoyance retraite viendra consolider le régime par répartition,...

M. Yves Cochet - Non, l'affaiblir !

M. le Rapporteur - ...au moment où le Gouvernement s'apprête à présenter ses propositions de réforme et alors qu'il convient d'éviter qu'un effort trop important soit demandé, dans un pays vieillissant, aux actifs de 2020.

On ne peut se dérober à ces deux grands rendez-vous. Les deux volets de cette proposition répondent à des objectifs sociaux. Cette fenêtre parlementaire nous permet ainsi de faire progresser un dossier majeur pour notre économie et pour la cohésion sociale de nos entreprises (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF, du groupe du RPR et du groupe DL).

M. Henri Plagnol - Il aura fallu cinquante ans, après les premières déclarations du Général de Gaulle sur la participation, pour que celle-ci s'impose comme une clé de la modernisation de notre économie et de notre société.

Si la participation suscite aujourd'hui tant de rapports et d'attentes, c'est d'abord en raison de la mondialisation et de la concurrence accrue qui imposent, pour donner plus de chances à nos entreprises, un meilleur partage des responsabilités, une plus grande association de salariés à la réussite de l'entreprise. C'est ensuite parce que le retour de la croissance ne doit pas profiter uniquement à quelques-uns et que l'on doit aller vers un partage plus équitable du formidable enrichissement collectif que permet l'économie capitaliste. Ainsi réconciliera-t-on les Français avec l'économie de marché.

Le constat sur lequel s'appuie cette proposition est aussi largement celui du rapport Balligand-Foucauld et l'on comprendrait donc mal que l'on s'oppose à sa discussion. Au sein des entreprises cotées en bourse, les stock-options sont encore réservées -à quelques exceptions près comme Auchan- à une minorité des dirigeants. C'est le problème de la diffusion de l'actionnariat salarié. Autres inégalités, très fortes, celles entre les grandes et les petites entreprises : très peu de salariés des entreprises de moins de 50 salariés bénéficient de la participation ou de l'intéressement : moins de 4,4 % des salariés des PME bénéficient de la première et à peine 2,7 % du second. Enfin, pourquoi seuls les agents de l'Etat bénéficient-ils de la retraite par capitalisation, avec le système Prefon ? C'est injuste !

Face à ce constat, la démarche que nous proposons est originale d'abord parce qu'elle ne se fonde pas sur la contrainte -à la différence des 35 heures qui posent aujourd'hui tant de problèmes et aboutissent au blocage des salaires, rendant encore plus nécessaire la réflexion sur l'épargne et l'intéressement- mais sur l'incitation et le dialogue. On ouvrirait ainsi un nouvel espace de dialogue social au sein de l'entreprise entre les salariés, les syndicats, les dirigeants. A l'évidence, un meilleur partage des responsabilités ne pourra venir que d'une démarche volontaire : on ne peut imposer la participation des hommes à la marche de l'entreprise.

La deuxième originalité de notre démarche tient à notre refus de créer un impôt supplémentaire. Loin d'alourdir les charges qui pèsent sur les entreprises, notre proposition est de nature à libérer les énergies des salariés et des entreprises en se fondant sur une incitation fiscale.

Actuellement, l'actionnariat salarié ne bénéficie qu'à un peu plus d'un million de salariés. Nous suggérons d'accorder une prime aux entreprises qui permettraient à la majorité de leurs salariés de bénéficier de stock-options, selon la formule appliquée par une entreprise telle qu'Auchan.

M. Christian Cuvilliez - Bel exemple !

M. Henri Plagnol - Il faut aller vers un partage maximal des bénéfices de l'expansion.

D'autre part, nous inspirant des propositions de M. Balladur, nous voulons obliger les entreprises qui augmentent leurs capitaux propres et leur capital par une cotation en bourse, à ouvrir ce capital aux salariés.

Autre disposition originale : pour élargir l'intéressement aux entreprises de moins de 50 salariés, nous suggérons de leur accorder une franchise d'impôt sur une partie des sommes qu'elles consacreraient à l'intéressement. Ce dispositif simple et efficace pourrait être immédiatement applicable.

En outre, la possibilité de créer des plans d'épargne interentreprises permettrait de surmonter les difficultés que pose la mise en place d'un tel système par une seule entreprise. Un immense champ s'ouvrirait ainsi aux partenaires sociaux. On comprendrait mal que vous refusiez de passer au vote sur cette question alors que c'est l'une des suggestions du rapport Balligand-Foucauld !

Pour ce qui est de la retraite par capitalisation, nous pensons, contrairement au Gouvernement et à la majorité, que ce sujet ne peut être dissocié de l'épargne salariale.

Nous proposons la création de fonds de prévoyance retraite fondés sur le volontariat en généralisant la possibilité que le système PREFON réserve actuellement aux agents de l'Etat. Tous les salariés pourraient ainsi cotiser à des fonds de retraite complémentaire en franchise d'impôt, les abondements éventuels des employeurs à ces fonds donnant en revanche lieu au versement des cotisations sociales, pour ne pas appauvrir les retraites par répartition.

Pourquoi réserver plus longtemps le bénéfice de l'expansion économique aux fonds de pension essentiellement détenus par des intérêts étrangers, notamment anglo-saxons ? C'est une profonde injustice. Il est temps de lever ce blocage qui obéit à des considérations purement idéologiques.

Pourquoi la majorité refuserait-elle de débattre de nos propositions pragmatiques, nullement révolutionnaires et propres à recueillir l'approbation de l'essentiel des forces politiques qui composent notre assemblée ? Serait-ce, Monsieur le ministre, que vous avez quelques difficultés à obtenir un consensus au sein de votre majorité plurielle ? En effet, les observateurs n'ont pas manqué de noter des différences sensibles entre le rapport Sapin et le rapport Balligand-Foucauld. Mais, au fond, voulez-vous vraiment encourager l'évolution actuelle de l'économie française ? Votre attitude est-elle cohérente avec la volonté affichée par le Premier ministre de moderniser nos institutions et de revaloriser le Parlement ? Saisissez donc l'occasion qui vous est offerte et permettez qu'on débatte d'une proposition de l'opposition.

Le présent texte serait un premier pas vers la répartition des fruits de la croissance entre une majorité de salariés, vers un exemple français qui pourrait servir de modèle à l'Europe sociale à laquelle le Premier ministre et le Gouvernement ne cessent de rappeler leur attachement. Vous manquez là une belle occasion. Notre proposition est la clef pour réussir la croissance pour tous et pour permettre une mondialisation à visage humain (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF, du groupe du RPR et du groupe DL).

M. Yves Cochet - En octobre dernier, M. Dominique Strauss-Kahn annonçait une réforme de l'épargne salariale (« Eh ! oui » sur plusieurs bancs du groupe UDF). Aujourd'hui, M.Douste-Blazy est ses collègues ont pris l'initiative d'anticiper sur cette loi en déposant une proposition relative à « la participation et à la croissance pour tous ».

Autant vous dire que nous sommes opposés à votre proposition dangereuse. Loin d'ouvrir l'ère nouvelle de l'économie de responsabilité, comme vous le prétendez, elle mettrait les salariés à la merci d'une logique purement financière.

M. Christian Cuvilliez - Parfaitement !

M. Yves Cochet - L'idée d'intéresser les salariés aux résultats de l'entreprise est récurrente dans l'histoire du capitalisme. L'objectif affiché est ambitieux : partager plus équitablement les richesses et donner plus de pouvoir aux salariés. Si tel était le cas, nous ne pourrions qu'applaudir. Mais il n'en est rien.

D'abord, en ce qui concerne l'épargne salariale, votre proposition ne dit rien des exigences auxquelles devrait être soumis tout système d'épargne de ce type. Premièrement, une exigence financière garantissant un rendement à long terme et des faibles coûts de gestion. Deuxièmement, une exigence « écologique ». Il doit s'agir d'une épargne utile et non nuisible à l'environnement. Troisièmement, une exigence sociale : par exemple, on ne pourrait investir dans des entreprises qui ne respecteraient pas les conventions de l'OIT. Quatrièmement, une exigence en terme d'emplois : les syndicats et mutuelles devraient s'impliquer dans la gestion de ces fonds d'épargne. Or, votre proposition ne prévoit rien de tout cela.

Ensuite, ouvrir les stock-options à tous est une fausse bonne idée. En effet, l'attribution sera inégalitaire : les cadres dirigeants en recevront davantage que les salariés et les ouvriers, qui n'ont pas les moyens d'en acquérir beaucoup (Protestations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL). La représentation des salariés en tant qu'actionnaires reflétera cette inégalité. J'ajoute que ce mode de rémunération qui s'apparente à un salaire différé échappe à ceux qui ne peuvent attendre pour toucher le fruit de leur travail, soit la plupart des salariés.

Quant à l'actionnariat salarié, c'est le cheval de Troie de l'introduction des fonds de pension, lesquels contredisent votre prétendu souci de reprendre le contrôle des entreprises françaises. En effet, si ces fonds devaient exister, ils devraient se diversifier le plus possible et en aucun cas ne se composer que d'actions d'entreprises françaises.

Enfin, la retraite par capitalisation est, à terme, incompatible avec celle par répartition. On ne doit pas jouer les retraites en bourse.

Dans la mesure où l'actionnariat se substituerait à des augmentations de salaires, le risque encouru par les salariés est grand. Mieux vaut partager plus équitablement les richesses en augmentant les salaires ou même les primes.

Quant au pouvoir qu'une telle mesure donnerait aux salariés, elle risque surtout de les rendre schizophrènes ou de les diviser ! Voyez l'affaire Michelin : un salarié actionnaire peut escompter un revenu complémentaire si les actions grimpent, comme c'est le cas après l'annonce de licenciements, tout en espérant que ceux-ci frapperont ses collègues et l'épargneront ! Et que dire de ces hôtesses et stewards d'United Air Lines qui ont décidé leur propre éviction au nom de la survie de leur entreprise ? Ou encore de ces salariés d'Elf qui, bien qu'actionnaires, ont été virés en 1999 ! L'actionnariat salarié est un système pervers destiné à éviter les augmentations de salaire.

M. François Loos - Ça ira mieux quand tout le monde sera fonctionnaire !

M. Yves Cochet - Bref, votre proposition est injuste. Il est inacceptable de chercher à enrichir les salariés les mieux lotis alors que la France compte 3 millions de chômeurs, sans parler des millions de personnes en situation précaire.

Enfin, ce serait leurrer les salariés que leur faire croire que, parce qu'ils possèdent des actions de l'entreprise, ils pourront peser sur les choix stratégiques de l'entreprise.

D'ailleurs certains de vos collègues du groupe DL, notamment M. Goulard, critiquent ce texte, qu'ils jugent mal préparé et difficilement applicable.

Mais je crois comprendre les raisons de votre précipitation : à la suite du rapport Balligand-Foucauld, le Gouvernement réfléchit à un projet de loi sur l'épargne salariale. Evidemment, vous voulez le précéder, faire assaut de propositions...

M. le Rapporteur - Il n'y a pas de monopole de la réflexion !

M. Yves Cochet - Certes. Mais nous avions déjà entendu M. Balladur sur la question, aujourd'hui nous entendons les avis de M. Douste-Blazy : ni l'un ni les autres ne nous ont convaincus.

Votre proposition de loi nous entraînerait dans une économie de rentiers (Rires sur les bancs du groupe du RPR), vers le stade gâteux du capitalisme (Exclamations sur les bancs du groupe du RPR).

M. Dominique Dord - Vous n'avez rien compris !

M. Yves Cochet - C'est ce que nous refusons et nous ne la voterons donc pas (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste).

M. Nicolas Forissier - Ce texte est le fruit du travail engagé ces derniers mois par une dizaine de députés des trois groupes de l'opposition. Je voudrais saluer nos collègues du groupe UDF et leur président, M. Douste-Blazy, qui ont accepté d'inscrire sa discussion dans le temps qui leur était imparti au titre de l'initiative parlementaire. Je saluerai aussi l'esprit dans lequel il a été préparé. Il s'agit en effet d'un travail constructif, raisonnable, ouvert, qui nous a permis de définir ensemble un certain nombre de réponses concrètes aux évolutions de l'économie mondiale, aux besoins de nos entreprises, aux aspirations des salariés.

Le sujet est essentiel. Depuis deux ans, la croissance de l'économie mondiale est de retour, entraînant celle de l'économie française. Ce contexte favorable offre l'occasion d'engager les réformes qui rendront les entreprises françaises plus dynamiques, plus compétitives, mais aussi plus solidaires dans leur organisation.

Les salariés attendent leur part des fruits de la croissance, à laquelle ils participent, tout comme ils aspirent à être mieux associés à la marche de leur entreprise, d'autant que la société de l'information leur permet aujourd'hui, et c'est une bonne chose, de tout savoir sur les réalités de l'économie et de la concurrence.

Beaucoup a déjà été fait pour mieux associer les salariés au devenir de leur entreprise par le dialogue paritaire et sans qu'il soit besoin de légiférer. Nombre de responsables de PME, en particulier, prennent quotidiennement des initiatives en ce sens, parce qu'ils savent que le dialogue, l'information, l'intéressement, voire la participation des salariés aux résultats, sont des conditions essentielles du succès (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR et du groupe DL). En revanche, concevoir la participation comme un instrument du pouvoir des salariés dans l'entreprise, comme le dit le parti socialiste, tient d'une vision archaïque et dangereuse qui ne correspond pas aux v_ux des salariés eux-mêmes (Applaudissements sur les bancs du groupe DL et du groupe du RPR) : ils veulent être associés, mais ils ne cherchent pas à prendre le pouvoir.

Si notre pays est plutôt en avance en matière d'intéressement et de participation, le dispositif législatif et réglementaire doit cependant être élargi pour que tous les salariés aient les mêmes chances et pour que les fruits de la croissance soient partagés de façon utile au développement de notre économie. Cela suppose d'encourager plus largement une épargne salariale, afin que se développe réellement l'actionnariat salarié, gage de stabilité et donc de réussite, afin que la transparence et l'équité soient assurées dans les nouvelles formes de rémunération que constituent les plans d'option sur actions -beaucoup ici ont été choqués par les excès révélés à l'automne dernier- et afin qu'une solution soit enfin trouvée à l'inquiétante question de l'avenir de nos retraites. Là encore, la meilleure réponse est l'instauration de fonds d'épargne-retraite, qui donneront la propriété de nos entreprises aux Français plutôt qu'à d'autres, sans déséquilibrer les régimes existants.

C'est pour toutes ces raisons essentielles que nous avons souhaité ouvrir le débat en espérant, Monsieur le ministre, qu'il puisse être suivi d'effet.

L'idée de la participation, lancée par le général de Gaulle, est une idée moderne et non « ringarde », comme on a pu l'entendre dire. Elle répond aux évolutions de la société et de nos entreprises depuis vingt ans, et aussi aux aspirations des salariés de l'an 2000.

Ce texte propose une méthode souple, qui privilégie l'incitation, car les entreprises subissent déjà trop de contraintes. L'incitation, notamment fiscale, favorise le dialogue interne et répond à la diversité infinie des situations.

Il s'agit d'une base de travail qui peut être enrichie par le débat. Je voudrais faire quelques propositions au nom du groupe DL qui a étudié attentivement ce texte, Monsieur Cochet, notamment au regard de la proposition de loi présentée en novembre dernier sous l'égide de François Goulard et François d'Aubert.

Le titre premier vise à favoriser le développement de l'intéressement et de l'épargne salariale dans les PME en permettant aux entreprises de moins de 50 salariés qui adoptent un régime d'intéressement de constituer, en franchise d'impôt, une provision pour investissements égale à 25 % du montant des sommes versées.

C'est une mesure importante. Mais l'expérience du terrain me conduit à penser que cette provision devrait atteindre 50 % des sommes versées, et non 25 %. En cas de non-utilisation dans un délai de trois ans, elle serait réintégrée en totalité ou partiellement dans le bénéfice imposable.

En effet, pour être réellement efficace, l'incitation fiscale doit permettre de dégager des moyens importants. L'extension à trois ans du délai d'utilisation laisserait le temps de planifier des investissements qui peuvent être très lourds.

Le titre II comporte des mesures constructives qui permettent de sécuriser l'épargne du salarié en cas de liquidation judiciaire. Il reste néanmoins à préciser la mise en _uvre des fonds d'épargne interentreprise, en respectant la nécessaire proximité, sur le plan pratique, entre ces fonds et les entreprises qui leur seraient rattachées.

Sur le titre III, qui vise à accroître la transparence et à démocratiser les plans d'options sur actions, le groupe DL propose deux modifications principales.

L'article 6 prévoit que les noms des dix plus gros détenteurs d'options sur actions d'une entreprise seront rendus publics, ainsi que leur nombre d'actions et le prix consenti. Il paraît souhaitable que l'obligation porte sur l'ensemble des rémunérations -stock-options, mais aussi salaires, primes, jetons de présence, avantages, épargne salariale. Cela correspond d'ailleurs aux engagements que vient de prendre le MEDEF. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste). Je m'attendais à votre réactions ! C'est un réflexe pavlovien, chers collègues ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste)

En matière fiscale, le groupe DL souhaite un allégement plus important -il paraît que vous en avez les moyens, Monsieur le ministre ! Tous les plans d'options, en effet, ne comportent pas obligatoirement une décote. La taxation à 40 % de la plus-value d'acquisition si les options sont levées après cinq ans est excessive, notamment au regard de ce qui se pratique ailleurs dans le monde.

La diffusion de l'outil des stock-options doit permettre un véritable partage des fruits de la croissance et fidéliser les salariés les plus compétents, notamment dans les entreprises innovantes. Mais il ne faut pas que cet avantage donne lieu à des prélèvements fiscaux excessifs, sous peine d'inciter les meilleurs au départ vers l'étranger.

Le régime de droit commun des plus-values de cession -16 % plus 10 % de prélèvements sociaux- paraît amplement suffisant ; le délai d'indisponibilité pourrait être ramené de cinq à trois ans.

Enfin, il paraît nécessaire de prendre en compte la question des bons de souscription de parts de créateur d'entreprise. Leur régime dérogatoire a été prorogé jusqu'au 31 décembre 2001 mais la majorité socialiste a rejeté la proposition de votre prédécesseur M. Strauss-Kahn, de le rendre définitive, alors qu'il joue un rôle très important pour soutenir les entreprises de croissance. Il faut reprendre cette idée, Monsieur le ministre.

L'institution, dans les articles 10 et 11, d'une obligation légale pour toute société cotée de réserver aux salariés 5 % des actions nouvellement émises, à un prix inférieur de moitié au prix d'émission élargit le processus institué par Edouard Balladur lors des premières privatisations. C'est une mesure favorable au renforcement de l'actionnariat salarié.

Certains craignent toutefois que les groupes internationaux cherchent à éluder cette obligation en procédant à leurs augmentations de capital sur d'autres places financières que la bourse de Paris. Ce risque doit être pris en compte, même si certains groupes, comme Bouygues, Alcatel ou Vivendi, ont déjà pris l'initiative de réserver des actions à leurs salariés. La réponse à ce risque peut passer par l'incitation plus que par l'obligation.

L'enjeu de ce texte est essentiel et il serait regrettable que le débat soit refusé par une majorité qui resterait aveugle, même si je reconnais le travail mené par certains de ses membres. Le texte proposé est réaliste et juste.

Les salariés attendent ces mesures, les entreprises aussi.

Travaillons donc à les rendre possibles, dans l'intérêt du pays (Applaudissements sur les bancs du groupe DL, du groupe du RPR et du groupe UDF).

M. Alfred Recours - On ne peut, évidemment, être contre le développement de l'actionnariat dans une économie de marché (Applaudissements sur les bancs du groupe DL, du groupe du RPR et du groupe UDF). Nous l'avons d'ailleurs démontré au fil des ans : non seulement le PEA a été créé par Pierre Bérégovoy mais encore les privatisations partielles ont été, depuis 1997, beaucoup plus importantes que jamais auparavant (Applaudissements sur les mêmes bancs). Faut-il, pour autant, passer au « tout action », ainsi qu'y invitent les propositions qui nous sont soumises aujourd'hui et qui concernent aussi bien la participation que l'épargne salariale, le rachat des entreprises par les salariés, les plans d'options ou les fonds de pension ? Les sujets soumis à notre réflexion sont intéressants et méritent d'être débattus (Applaudissements sur les mêmes bancs). Seulement, comme je l'ai dit, ce que l'on nous propose aujourd'hui, dans un ensemble qui a au moins le mérite de la cohérence, c'est de développer l'actionnariat à tout prix, comme s'il n'existait pas d'autres solutions.

Je le sais : j'ai lu attentivement le texte qui nous est soumis et j'en ai discuté longuement avec le rapporteur en commission (M. Jacques Barrot approuve). Car, contrairement à certains intermittents du spectacle parlementaire présents aujourd'hui, j'étais en commission !

Un député du groupe DL - C'est un bon mot, mais du mauvais esprit !

M. Alfred Recours - D'autres solutions, il en existe pourtant, comme le montre l'excellent rapport de notre collègue Balligand, dont les propositions devraient se traduire dans un projet de loi, qui traitera de l'importante question de l'épargne salariale.

Importante, cette question l'est en premier lieu par son flux, que le rapport de MM. Balligand et de Foucauld évalue à 45 milliards. Importante, elle l'est aussi parce que l'épargne salariale bénéficie actuellement de 20 milliards d'exonérations de charges sociales et de 5 milliards d'exonérations fiscales. On ne nous dit pas à combien on compte porter la masse de l'épargne salariale. Mais qui ne comprend que de l'augmentation de ce flux résultera, en raison des exonérations proportionnelles, un grave problème de financement de la protection sociale ? Pourtant, le rapport ne dit mot sur la manière dont sera financée la sécurité sociale avec un budget amputé de 20, 40 ou 60 milliards.

La proposition qui nous est faite permet aussi d'ouvrir un débat, déjà engagé dans la presse, et nécessaire, sur la meilleure façon d'utiliser ce que certains ont voulu appeler « la cagnotte ». Personne n'ayant jugé utile de le faire parmi les orateurs de l'opposition qui m'ont précédé, je l'ouvre donc, non sans préciser ce qui doit l'être. Car si Michelin et Elf ont déjà été mentionnés, rien n'a été dit de Valeo qui n'a pas craint d'annoncer, le même jour, 3,7 milliards de bénéfices, 6 000 licenciements et l'attribution d'options sur actions à ses dirigeants !

La question se pose donc de définir comment ventiler les disponibilités, tout en replaçant le problème dans sa juste perspective. Ainsi, la proposition prend pour référence récurrente le système de la PREFON -retraite des fonctionnaires- sans rappeler que si l'Etat a accordé un avantage fiscal aux versements à la PREFON, il ne l'abonde pas en tant qu'employeur. Aligner secteur privé et secteur public impliquerait cette dépense supplémentaire pour l'Etat (Protestations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL) et l'on ne peut utiliser de bonne foi cet argument pour justifier ce qui ne peut l'être.

Le débat sur la répartition des fruits de la croissance, croissance liée pour partie à la politique économique du Gouvernement, implique des choix fiscaux. A cet égard, Monsieur le ministre, peut-être existe-t-il d'autres moyens que la création d'avantages fiscaux supplémentaires pour l'épargne. On pourrait ainsi leur préférer la suppression de la taxe d'habitation, reconnue comme particulièrement injuste et qui constitue, de surcroît, une autre forme d'impôt sur le revenu. Le même sort pourrait être réservé à la redevance audiovisuelle (« Très bien ! » sur les bancs de l'opposition).

Il s'agit, si l'on reprend la terminologie chère au groupe DL, de « rendre l'argent aux Français ». Pour ce faire, des propositions seront formulées, au cours des mois à venir, qui porteront sur les retraites, l'épargne salariale ou encore la fiscalité. Le Gouvernement s'attachera, de la sorte, à résoudre les problèmes en suspens, dont l'ensemble dépasse largement le cadre de l'épargne salariale, envisagé dans la seule perspective du « tout action ».

Il faut donc éviter de passer à la discussion des articles (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe RCV).

M. Jacques Godfrain - Quoi de plus agréable, pour un parlementaire gaulliste que de venir appuyer une proposition du groupe UDF relative à la participation ? (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL)

Longtemps décriée et parfois méprisée, l'idée même de participation a été jugée désuète, d'aucuns estimant qu'elle avait germé dans l'esprit de doux rêveurs qui prouvaient ainsi leur ignorance complète de la situation sociale de notre pays.

M. Jean-Pierre Balligand - On l'a dit en leur temps de Vallon et Capitant.

M. Jacques Godfrain - Aujourd'hui, M. Cochet nous a régalé d'une leçon d'économie sociale totalement déconnectée de la réalité, oubliant que selon Chamfort, « donner est un plaisir plus durable que recevoir » et refusant, de fait, l'ouverture aux salariés du droit à la constitution d'un patrimoine. Dans ces conditions, suivez Jules Renard, Monsieur le ministre ! « Si l'argent ne fait pas le bonheur, rendez-le ! ». Quant à M. Recours, qui se félicite que des excédents de ressources apparaissent, qu'il veuille bien se rappeler le mot de Talleyrand, selon lequel « les financiers ne font bien leurs affaires que lorsque l'Etat le fait mal ».

M. Jean-Pierre Balligand - Talleyrand comme professeur de morale !

M. Jacques Godfrain - L'histoire montre pourtant que la participation trouve ses origines dans une tradition très ancienne. Déjà, dans les manufactures créées par Colbert, les meilleurs ouvriers percevaient une participation et aussi bien Saint Dominique que Charles Fourier et Louis Blanc traitent du partage des bénéfices.

En 1850, Jean-Baptiste Godin crée le Familistère de Guise. D'autres expériences voient ensuite le jour mais elles restent au bon vouloir du chef d'entreprise. Les premiers régimes de retraite facultative apparaissent à la fin du XIXème siècle, principalement dans les mines. En Allemagne, Bismarck crée un système de protection sociale, cependant qu'en France, le mouvement mutualiste naît le 1er avril 1898 et que la loi du 9 avril de la même année institue un régime de prévoyance obligatoire dans l'industrie. 1910 voit la création d'un système de retraites ouvrières et paysannes qui se soldera par un échec en l'absence de cotisations patronales. Les assurances sociales sont créées par la loi du 30 avril 1930, mais il faudra attendre le milieu du vingtième siècle pour voir apparaître la notion de partage des bénéfices. En 1942, le Général de Gaulle déclare : « Nous gagnerons la guerre et après, il nous faudra transformer la situation sociale ». Ainsi, dès 1945, paraissent les ordonnances instituant les comités d'entreprise et la sécurité sociale. En 1949, il incite les partenaires sociaux à suivre la voie qui tend à associer le capital et le travail. En 1959, le gouvernement Debré, auquel participe Antoine Pinay, voit dans la participation aux bénéfices un moyen d'accroître la productivité du travail et les performances des entreprises. L'ordonnance du 29 janvier 1959 consacre cette orientation, malgré l'indifférence des partenaires sociaux.

Tout au long des années 1960, la participation fait l'objet de discussions intenses, le général de Gaulle la considérant comme la grande réforme du XXème siècle.

Le 12 juillet 1965, l'amendement Vallon conduit à la publication le 17 août 1967 d'une nouvelle ordonnance portant création d'un régime obligatoire de participation financière dans les entreprises de plus de cent salariés. Parallèlement, une ordonnance crée les plans d'épargne d'entreprise. La loi du 31 décembre 1970 instaure les premiers systèmes d'options sur actions réservées aux salariés, connues sous le nom de « stock options ». Le 27 décembre 1973, une nouvelle loi permet aux salariés de souscrire ou d'acheter en bourse des actions de leur entreprise.

Au cours des années 1980, malgré la vive opposition de la gauche, de nombreuses avancées sont réalisées : la loi du 24 octobre 1980 permet aux entreprises qui le souhaitent de distribuer du capital à leurs salariés à concurrence de 3 % ; l'ordonnance du 21 octobre 1986 fait la synthèse des différentes initiatives prises depuis l'ordonnance de 1959. Elle introduit notamment une défiscalisation de l'intéressement et des PEE qui entraîne une multiplication des accords d'intéressement au sein de nos entreprises.

En 1993, le Premier ministre commande au député de la 3ème circonscription de l'Aveyron un rapport sur l'état de la participation dans la société française, qui débouche sur la loi du 25 juillet 1994. Cette loi importante marque ainsi l'aboutissement d'un processus vieux de plus d'un siècle. Elle est aussi à l'origine de nombreux accords. De nouvelles conditions d'accès des salariés au conseil d'administration de leur entreprise voient le jour et l'intéressement est à nouveau aménagé. Elle consacre également l'existence des actionnaires salariés. Parallèlement à l'essor de l'épargne salariale, l'opinion publique est enfin alertée sur la dégradation de l'équilibre de notre système de retraite par répartition. Il convient notamment de saluer le Livre blanc sur les retraites, publié à l'initiative de M. Michel Rocard alors Premier ministre, contre l'avis de sa propre majorité.

Répartition ou capitalisation ? La vérité est sans doute entre les deux. Il semble en effet tout aussi raisonnable de préserver la répartition, qui traduit un esprit de solidarité, que de promouvoir la capitalisation, qui apparaît de plus en plus comme une exigence civique. Pour le salarié, l'enjeu est simple : quel est le rendement d'un franc placé dans l'un ou l'autre des deux systèmes ?

Ce panorama historique était indispensable pour montrer que les avancées sociales du vingtième siècle procèdent pour l'ensemble de l'action de gouvernements qui couvrent tout l'éventail de la vie politique française. Longtemps combattue par les communistes et par les socialistes, la participation heurtait l'idée reçue selon laquelle l'entreprise doit être le champ clos de la lutte des classes, qui seule amène le progrès social.

Cependant, les esprits évoluent. Fruit d'un travail conjoint de parlementaires issus de toute l'opposition, ce texte tend à rendre capitalistes des millions de Français et à les engager dans la voie d'une pleine responsabilité. Il est ainsi en décalage avec le climat social qu'entretient le ministère de l'emploi et de la solidarité, en ce qu'il favorise le dialogue plutôt que l'affrontement, la participation des salariés plutôt que leur soumission. La participation, ce ne sont pas des mesures concédées à l'un des partenaires au détriment de l'autre mais un outil privilégié du dialogue social. Si elle apparaissait comme un leurre, le dialogue entre les partenaires serait rompu.

Ce texte, et celui présenté par M. Balladur, constituent une étape significative dans la construction d'un marché du travail réellement participatif. Ils tournent le dos à l'étatisme et jettent les bases d'une refondation du paritarisme dont le gouvernement actuel est exclu. Décentralisation, concertation, dialogue permanent, partage des pouvoirs, participation : tels sont les mots clés de l'entreprise du futur. Le travail accompli par les auteurs de ce texte, comme celui de M. Balladur, placent la participation au c_ur des enjeux pour réussir la société du XXIème siècle.

Le soutien des députés gaullistes montre, s'il en était besoin, que la modernité se situe désormais dans l'opposition (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL).

Dès lors, l'avenir lui appartient car le dialogue social ne peut être relancé par des formules vides de sens, inlassablement répétées.

Le grand chantier, relancé par le Président de la République au début de l'année, ne se refermera pas de sitôt. Ce texte est la première pierre de la refondation sociale dont notre pays a tant besoin (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL).

M. Christian Cuvilliez - Ce texte va au-delà de la déclinaison de mesures techniques tendant à réformer l'épargne salariale. Il affirme en effet un projet politique qui entend redonner toute sa légitimité à la perspective libérale, dont les dégâts sont pourtant durement ressentis partout dans le monde.

L'exposé des motifs présente ainsi un objectif presqu'aussi ancien que le capitalisme lui-même : associer le capital au travail, en faisant des salariés des actionnaires à la recherche du profit financier maximal, quel que soit le prix de cette exigence. Si elle affirme la nécessité d'associer les salariés, la proposition ne sort pas d'un cadre qui la limite très strictement. Il est ainsi expressément exclu qu'ils disposent de réels pouvoirs au sein du conseil d'administration, leur permettant de s'associer à la définition des choix stratégiques fondamentaux de l'entreprise.

De même, l'exposé des motifs relève avec pertinence l'accroissement de la part des revenus du capital dans la formation du PIB comme il souligne le creusement des inégalités. Mais il n'en analyse pas les causes profondes, non plus que les effets néfastes de ce mouvement de « financiarisation » de l'économie.

Lorsque la Bourse progresse de 50 %, comme en 1999, alors que la croissance réelle ne dépasse pas 3 %, il s'agit d'un véritable transfert de richesses qui porte sur des centaines de milliards. L'inflation de la valeur des titres sur le marché boursier implique le versement de dividendes élevés et des exigences de retours sur investissements qui pèsent sur le niveau des salaires et sur l'emploi, comme l'attestent les exemples de Michelin ou de Valéo.

Le « remède » prescrit par cette proposition tend à diffuser plus largement la propriété du capital, sans remettre en cause ni sa structure, ni la hiérarchisation des actionnaires.

Par delà sa connotation idéologique, la solution proposée n'est pas exempte d'effets pervers car elle risque d'inciter à la déflation sociale et salariale, et de creuser ainsi la fracture sociale, qui reste une réalité malgré les efforts accomplis depuis 1997.

S'il est exact que les fonds de pension anglo-saxons détiennent aujourd'hui une part trop importante de nos groupes industriels et financiers -près de 36 %-, et qu'il sont le plus souvent insensibles à nos intérêts, nous restons très perplexes sur les vertus supposées de fonds de pension à la française comme sur les vertus stimulatives des stock-options.

Pour autant, nous ne fermons pas la porte à une réforme de l'épargne salariale... (« Ah ! « sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF, et du groupe DL)...si elle tend à permettre le financement de l'investissement des PME et si elle s'inscrit dans une perspective de justice sociale.

Nous aurons l'occasion dans les prochaines semaines de présenter nos propositions, puisqu'un projet de loi fondé sur le rapport que viennent de remettre au Premier ministre MM. Balligand et Foucauld doit être adopté par le Conseil des ministres au début du mois de mars.

Nous tenons à affirmer que le dispositif de l'épargne salariale ne peut être étendu et démocratisé qu'à l'issue d'une discussion avec les partenaires sociaux. Une telle réforme, qui doit rester conforme à la politique de lutte contre le chômage du Gouvernement, ne peut être engagée sans évoquer les questions de la rémunération directe du travail, de la protection sociale et de l'évolution de l'économie. Cette réforme n'est envisageable qu'à la condition d'accorder de nouveaux droits aux salariés, qu'ils soient ou non actionnaires. Elle a partie liée avec les mesures que nous venons de voter en vue de renforcer le contrôle de l'efficacité des aides versées aux entreprises. Il faut aussi revoir notre droit du licenciement économique et réformer la fiscalité.

Nous partageons le point de vue des organisations syndicales, pour lesquelles le développement de l'épargne salariale ne doit pas compromettre le financement de la protection sociale.

Nous contestons au marché le droit de régenter toutes les activités humaines (Interruptions sur les bancs du groupe UDF).

La réforme de l'épargne salariale doit donc s'inscrire dans une perspective globale, en dehors de toute préoccupation idéologique (Mêmes mouvements). Nous souhaitons donc que le Gouvernement choisisse d'intégrer cette réforme dans un projet plus vaste, tendant à instituer une nouvelle régulation économique et sociale.

Un dernier mot : nous estimons que les textes d'initiative parlementaire doivent pouvoir venir effectivement en discussion, de manière que l'Assemblée puisse se prononcer sur leur contenu par un vote. Le nôtre, aujourd'hui, serait sans ambiguïté négatif, mais nous n'approuvons pas plus qu'en d'autres occasions le recours à l'article 94.

Cela dit, en réaffirmant notre opposition la plus totale à cette proposition, nous nous réservons le droit d'apporter demain notre contribution au projet du Gouvernement, afin d'aboutir à une réforme de l'épargne salariale compatible avec l'intérêt général (Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste).

M. Germain Gengenwin - En ce début de troisième millénaire, il est temps de trouver de nouvelles méthodes pour permettre aux salariés et aux entreprises de faire face à l'évolution des rapports de force entre les différents acteurs du marché mondial.

J'ai acquis la conviction, à l'occasion de notre débat sur l'innovation et la recherche de juin dernier, qu'un des moyens de garantir simultanément le développement économique et le progrès social réside dans le développement de la participation salariale.

Il est devenu indispensable de repenser le rôle des quatre acteurs qui permettent à une entreprise d'être performante et créatrice de richesses : le rôle des salariés, qui apportent leur force travail, et leur compétence, celui des entrepreneurs, qui prennent les risques et définissent la stratégie de l'entreprise, celui des actionnaires, qui apportent le capital, et enfin celui de l'Etat, dont dépend la compétitivité internationale des entreprises.

Avec le vote, l'année dernière, de la loi sur l'innovation, chacun a pris conscience de la nécessité de faire évoluer le rôle de chacun de ces acteurs, même si le Gouvernement s'est montré frileux à l'égard des propositions avancées par mon groupe.

Nous voulions améliorer l'environnement juridique et fiscal des jeunes PME-PMI, confrontées à une concurrence internationale très vive, par une série de mesures ciblées.

Il s'agissait d'abord d'encourager les particuliers à investir une partie de leur épargne sous forme d'apport en capital, ce qui nécessite d'augmenter la déduction fiscale pour les ménages prévue dans la loi.

Nous proposions aussi d'élargir le dispositif des bons de souscription de part de créateurs d'entreprises afin d'en faire bénéficier de jeunes talents souvent tentés par l'aventure étrangère. Des diplômés d'une école supérieure de commerce m'ont indiqué récemment que la moitié de leur promotion travaillait à l'étranger

Après avoir écarté notre proposition, le Gouvernement l'a reprise à son compte dans son projet de loi de finances, avec le succès que l'on sait. La majorité plurielle, à l'évidence n'a pas compris l'intérêt de cette mesure pour nos jeunes entreprises. C'est sans doute que, chez les socialistes aussi nul n'est prophète dans son pays.

Neuf mois plus tard, après les rendez-vous manqués de la loi de finances et du collectif budgétaire et malgré les déclarations du ministre des finances de l'époque, qui disait ne voir « que des avantages à ce que l'économie soit possédée par des actionnaires proches des réalités », rien n'a été fait pour réformer la fiscalité des valeurs mobilières et les mécanismes de l'épargne salariale.

Ces mesures médiatiques préconisées par M. Balligand ne nous laissent guère espérer qu'on procède aux changements structurels nécessaires. Le problème du financement des retraites n'est même pas abordé. Pourtant, c'est parce qu'elle doit s'ajouter à l'épargne retraite que l'épargne salariée constitue un enjeu d'avenir.

La proposition déposée par le groupe UDF résulte d'une longue réflexion. Elle vise à remédier au manque de volonté politique du Gouvernement, au moment où la pression fiscale s'accroît et que vous imposez le passage aux 35 heures. M. Zuccarelli, d'ailleurs, doit en rêver la nuit...

Le Gouvernement a choisi d'imposer la redistribution de l'augmentation de la productivité en réduisant le temps de travail. Comment ne pas y voir une manière de priver les Français des fruits de la croissance ? Le problème est que ce choix induit une forte modération salariale, qui n'est d'ailleurs pas étrangère aux grèves actuelles. La participation telle que nous la concevons serait incitative. Nous voulons permettre aux salariés d'accéder aux marchés financiers et aux PME de bénéficier d'une source de financement à laquelle elles n'ont pas accès aujourd'hui.

Si M. Cochet était encore présent, je lui dirais que nous voulons donner aux salariés ce qu'ils attendent : une plus grande considération.

L'épargne salariale, sous la forme de l'intéressement et de la participation, a progressé, mais elle reste absente des PME, ce qui renforce les inégalités entre salariés. Cette injustice, en effet, s'ajoute aux écarts grandissants de salaires entre les PME et les autres entreprises, selon une étude récente du DARES.

Inciter les PME à développer l'intéressement et généraliser l'épargne salariale dans les plus petites structures au travers des plans d'épargne interentreprises, c'est donc réduire les inégalités entre les salariés, mais aussi entre les entreprises.

N'oublions pas que nos PME, grâce à leur extraordinaire dynamisme, représentent le plus fort potentiel de créations d'emplois.

Monsieur le ministre, nous sommes pour ainsi dire obligés de développer l'actionnariat salarié (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF, du groupe du RPR et du groupe DL).

M. Jean-Pierre Balligand - je veux d'abord remercier M. Godfrain d'avoir salué la mémoire de mon prédécesseur Jean-Baptiste André Godin, député de l'Aisne, qui fut un seulement le précurseur de la participation, le père du Familistère de Guise et le génial inventeur des poêles qui portent son nom, mais qui écrivit aussi, à la fin du XIXème siècle, un texte qui deviendra le règlement de la Société des Nations.

Alors que notre économie est en phase d'expansion, c'est légitimement qu'on s'interroge sur le partage du supplément de richesse créé. De ce point de vue, la réponse qu'apporte cette proposition n'est pas à la hauteur des enjeux (Rires sur les bancs du groupe UDF, du groupe du RPR et du groupe DL).

Je n'évoquerai pas les critiques dans vos propres rangs mais plutôt les divergences de fond entre nos démarches.

Pour mettre en place une économie de partage, la proposition mise sur quatre moteurs : la généralisation de la distribution d'options sur actions, une conception de la gouvernance d'entreprise inspirée de la référence à l'association capital-travail, une approche mécaniste de l'actionnariat salarié, l'épargne retraite comme mode de développement de l'épargne longue. Votre conception de l'épargne salariale peut-elle contribuer à entretenir la croissance, à étendre ses mécanismes à l'ensemble des salariés, à donner aux salariés de nouveaux leviers pour intervenir dans la gestion des entreprises ? A l'évidence, votre texte apporte des réponses partielles, trop axées sur les stock-options et trop peu ambitieuse.

La généralisation des stock-options comme levier de la participation des salariés à la croissance est la principale ligne de fracture entre notre approche de l'épargne salariale et la vôtre, et même entre deux modèles de société. Les stock-options ne constituent pas l'outil d'un partage de la valeur-ajoutée entre salaires et capital. Lorsqu'elles sont généralisées à tous les salariés elles viennent souvent en substitution du salaire. Nous préférons donc faire porter l'effort sur l'épargne salariale négociée pour tous les salariés. Par ailleurs, lorsqu'elles sont accordées à l'ensemble des salariés, elles n'offrent aucun droit ni contrepartie pour l'accès des salariés à la gouvernance de l'entreprise : les salariés qui en sont titulaires n'ont aucun moyen de faire valoir leur droit en nom collectif dans l'entreprise par la voie, par exemple, d'un fonds commun de placement.

Pour nous, l'implication patrimoniale et le partage des risques n'ont de sens qu'à condition que les salariés puissent exercer en nom collectif leurs droits de propriété dans les lieux du pouvoir de l'entreprise, tel n'est évidemment pas le cas avec les stock-options, instruments purement individuels.

M. François d'Aubert - Arrêtez de diaboliser les stock-options.

M. Jean-Pierre Balligand - Aussi, nous ne pouvons adhérer à cette conception du rapport du salarié à l'entreprise. Les stock-options doivent rester un instrument de rémunération dans les start-up et d'incitation pour les dirigeants des entreprises. Leur moralisation ne passe pas par leur généralisation, mais par l'octroi de mesures compensatrices d'intéressement et de participation, couplées avec une complète transparence sur leur attribution au dix plus gros bénéficiaires ainsi qu'aux membres des comités exécutifs,...

M. Yves Nicolin - Vous ne vivez pas dans la réalité !

M. Jean-Pierre Balligand - comme nous le proposons, M. de Foucauld et moi-même, dans notre rapport. On aurait pu s'attendre à ce que, en liaison avec votre proposition de généraliser les stock-options, votre proposition accorde plus de place aux actionnaires-salariés dans la gouvernance de l'entreprise. Or le texte ne répond pas aux attentes des salariés sur ce point.

M. Yves Nicolin - Qu'en savez-vous ?

M. Jean-Pierre Balligand - J'en ai rencontré beaucoup...

Votre dispositif ne les associe pas assez aux délibérations sur les choix stratégiques de l'entreprise. Ainsi, vous retenez comme seuil de représentation des salariés-actionnaires au conseil d'administration le chiffre de 7,5 % du capital. Mais en dehors de la Société Générale et de Bouygues, aucune entreprise cotée au CAC-40 ne pourrait respecter ce seuil ! (Interruptions sur les bancs du groupe UDF, du groupe du RPR et du groupe DL)

M. Dominique Dord - Il n'y a pas que le CAC-40.

M. Yves Nicolin - Quarante entreprises sur des milliers... Sortez de la Bourse !

M. Jean-Pierre Balligand - Un pareil seuil ne garantit plus aux salariés une juste contrepartie de gouvernance à l'effort d'épargne qui leur est demandé.

En ce qui concerne la diffusion automatique de l'actionnariat-salarié, si nous ne pouvons que partager le souci de reconquérir une partie du capital de nos entreprises cotées, les méthodes que vous retenez diffèrent de notre conception de l'implication patrimoniale du salarié. En effet, vous proposez qu'à chaque augmentation de capital, une entreprise cotée offre systématiquement 5 % des actions émises à ses salariés. Cette démarche est conforme à une vision décrétée et non négociée de la participation... (Exclamations sur les bancs du groupe UDF, du groupe du RPR et du groupe DL) Si nous avons trouvé 354 millions en déshérence, c'est bien parce que la participation n'était pas vécue mais subie par les salariés (Mêmes mouvements).

S'il faut faire de l'augmentation de capital un rendez-vous privilégié de l'actionnariat des salariés, en revanche, nous ne croyons pas en en son automaticité. Il n'est pas juste de demander aux salariés de verser leur épargne dans leur entreprise avec un seuil de représentativité de 7,5 % dont on peut difficilement affirmer qu'il sera atteint à coup sûr.

Si la participation financière a échoué alors qu'elle était obligatoire, l'actionnariat-salarié ne réussira pas par l'obligation, mais par l'adhésion des salariés et leur implication dans la gouvernance de l'entreprise. Il ne peut y avoir d'économie de partage sans implication des salariés à la gestion de l'entreprise.

En ce qui concerne enfin l'épargne longue, il est réducteur de lier l'épargne longue avec un produit d'épargne-retraite. Le besoin d'épargne longue s'exprime du côté des salariés sous de multiples formes. Il manque un produit de long terme en entreprise, qui ne vienne pas en substitution de la retraite par répartition et des régimes complémentaires et sur-complémentaires. Un produit d'épargne salariale de long terme de 12 à 15 ans avec sortie en capital, pourrait apporter une réponse aux salariés.

Pour ma part, il me semble que cinq objectifs devraient guider nos réflexions sur l'épargne salariale.

Tout d'abord, il faut favoriser l'auto-entretien de la croissance en améliorant la redistribution du revenu et de la valeur ajoutée, sans fragiliser les entreprises. Une diffusion plus large et plus ample de l'épargne salariale peut avoir un effet accélérateur sur la croissance et préserver son contenu en emplois.

M. Marc-Philippe Daubresse - D'accord.

M. Jean-Pierre Balligand - Il faut ensuite chercher à améliorer la performance globale des entreprises. Les différents dispositifs d'épargne salariale -intéressement, participation, actionnariat des salariés- sont de bons systèmes de motivation des salariés, comme des facteurs de compétitivité.

Cela dit, au service de quelle performance l'épargne salariale doit-elle être mise ? Boursière, financière, salariale, relationnelle ou participative ?

Nous avons intérêt à développer une conception qualitative de l'épargne salariale, axée non sur la seule performance financière, mais sur la performance globale, à la fois économique et sociale, sur le long terme et sur l'emploi. Les accords de participation ou d'intéressement, la gestion des fonds communs de placements qui recueillent l'épargne salariale devraient promouvoir de tels comportements.

Il convient également de faciliter une gestion souple et sûre du temps par les salariés. Face à des carrières plus heurtées et plus difficiles, une liaison simple et directe peut être établie entre épargne salariale et épargne-temps, par exemple par le versement de l'épargne salariale sur des comptes épargne-temps. Elle peut ainsi être le produit financier soutenant la transformation de l'épargne en temps, du temps en argent.

Pour parvenir à une implication patrimoniale équilibrée des salariés, il faut lier le développement de l'actionnariat salarié à une nouvelle gouvernance de l'entreprise ; lier la distribution de stock-options à des accords d'intéressement ou de participation dérogatoire ; inciter à ce qu'une partie de l'épargne salariale participe à la création d'emplois dans les PME et à la lutte contre l'exclusion.

Enfin, les partenaires sociaux doivent se saisir de ce nouveau terrain de dialogue. C'est un but en soi, c'est aussi le meilleur moyen de progresser. Quel niveau d'obligation minimum fixer en matière de participation ? Faut-il fusionner les dispositifs ? Vers quelle gouvernance d'entreprise à la française faut-il s'orienter ? Comment développer l'épargne salariale dans les PME mais aussi dans le monde associatif et dans la fonction publique ?

M. Henri Plagnol - Bonne question.

M. Jean-Pierre Balligand - Sur tous ces sujets, la réflexion doit se poursuivre, des expériences doivent être menées.

Cette proposition ne répond à aucun de ses objectifs. Ni la démarche choisie ni le fond ne pourront donc recueillir notre adhésion (Rires et exclamations sur les bancs du groupe UDF, du groupe du RPR et du groupe DL ; applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

Mme Nicole Bricq - En déposant ce texte sur la participation, l'opposition manifeste le souci tactique (Protestations sur les bancs du groupe UDF, du groupe du RPR et du groupe DL) de devancer le Premier ministre qui annonçait, dès le 27 septembre, à Strasbourg, plusieurs projets sur les nouvelles régulations économiques, sans parler de l'important travail de concertation qui a abouti à la rédaction du rapport Balligand-Foucauld.

Reconnaissons toutefois que, le 20 mai, M. Balladur et l'opposition avaient présenté une proposition sur l'actionnariat salarié, laquelle avait donné lieu à un débat approfondi. De même, l'examen de la loi de finances a donné lieu à une discussion très sérieuse, à laquelle l'opposition a pris une part active, sur les stock-options. C'est dire que le sujet est important.

Mais, m'interrogeant plus profondément sur votre démarche, j'ai trouvé ce qui vous chagrine : vous consentez à la gauche une certaine légitimité à occuper un terrain qui ne lui est pas habituel, celui du capital (Approbations sur les bancs du groupe socialiste). Vous l'accusez souvent de vider les caisses et, bien entendu, vous vous étonnez qu'elle les remplisse ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe RCV)

M. Marc-Philippe Daubresse - Ce sont les Français qui les remplissent !

Mme Nicole Bricq - Il va pourtant falloir vous habituer à ce que la gauche s'occupe de la constitution du revenu primaire. Elle n'a cessé de le faire depuis 1997, en réorientant l'épargne et le capital vers le risque et vers le secteur productif plutôt que vers la rente. Les chiffres du rapport Balligand l'attestent : 4 000 milliards pour l'assurance-vie, 350 milliards pour l'épargne salariale. C'est dire que nous avons quelques heures de vol (Rires et exclamations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL) en ce domaine. De même, dans la loi sur l'innovation et la recherche, nous avons favorisé le développement des jeunes entreprises à forte croissance ou encore l'orientation vers le capital productif dans le projet portant DDOEF de 1998.

Il faudra aussi vous habituer à ce que la gauche se préoccupe de rééquilibrer le partage de la valeur ajoutée entre les salaires et les profits, dans la mesure où, jusqu'à la fin des années 90, les entreprises ont rétabli leurs marges d'autofinancement et augmenté leurs profits au détriment des salaires.

M. Marc-Philippe Daubresse - Mitterrand !

Mme Nicole Bricq - Il est temps d'introduire une nouvelle régulation dans le partage de la valeur ajoutée.

Contrairement à ce que j'ai lu dans le rapport de M. Barrot, votre vision des rapports entre le capital et le travail est tout sauf harmonieuse. Il y a sur ce point, entre vous et nous une différence fondamentale qui explique notre refus d'examiner votre proposition. C'est précisément parce que la croissance est devenue patrimoniale que les salariés doivent investir le terrain du patrimoine s'ils veulent conserver leur rôle de régulation. Vos propositions ne correspondent pas à cet objectif.

Nous traiterons de cette question sérieusement et globalement lorsque nous examinerons le projet du Gouvernement sur la régulation économique (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe RCV).

La discussion générale est close.

M. le Président - La parole est à M. Le Garrec, président de la commission des affaires culturelles.

M. Dominique Dord - L'ancien ministre des nationalisations !

M. Jean Le Garrec, président de la commission des affaires culturelles - Je peux vous en parler, si vous le souhaitez.

Cela dit, après ce débat sur un sujet important et par courtoisie envers M. Barrot, il me paraît normal de m'exprimer en ma qualité de président de la commission.

L'initiative de l'opposition est habile.

M. Alain Néri - C'est rare !

M. le Président de la commission - Sachant que le Gouvernement allait déposer un projet sur les nouvelles régulations économiques, elle a cherché à le devancer. Elle a utilisé son droit de tirage à cet effet alors qu'à l'évidence, un problème aussi complexe -intéressement, participation, actionnariat salarié, option d'achat d'actions, épargne salariale de retraite n'empiétant pas sur la retraite par répartition- ne saurait être traité par un texte de 28 articles examiné dans une « fenêtre » de quelques heures...

M. Pierre Albertini - Il n'y a qu'à « bunkeriser » le Parlement et il n'y aura plus de fenêtres !

M. le Président de la commission - ...Bien entendu, vous protesterez lorsque votre proposition sera repoussée et chacun sera dans son rôle.

Le rapport Balligand et le débat qui vient d'avoir lieu, montrent que nous avons la préoccupation commune de rendre le système moins inégalitaire.

Je limiterai mon propos au problème de l'association à la vie des entreprises, ce que certains ont appelé les communautés d'intérêts.

J'ai beaucoup de respect pour M. Vallon et pour M. Capitant et pour la conviction qu'ils mettaient à défendre les idées que, par ailleurs, je récusais. Je laisse de côté la référence aux utopistes et je veux mettre l'accent sur les antagonismes. Contrairement à ce qu'a dit le poète, je soutiens le mouvement qui fait bouger les ligues. Pourquoi aurait-on peur d'affirmer la nécessité du mouvement et de la dynamique du groupe social ?

Si, pendant un siècle, l'action sociale a été consacrée au partage de la valeur ajoutée entre profit et salaire, elle devra de plus en plus intégrer une troisième dimension : le temps.

Je parle d'antagonisme car le conflit d'intérêt naît de l'externalisation des risques. C'est notamment le cas lorsqu'une grande entreprise sidérurgique recourt à la sous-traitance sur ses propres machines, ce qui élimine les risques tels que les accidents du travail. Il est alors très difficile, en cas de conflit, de mobiliser les organisations syndicales sur des sujets à propos desquels tous les salariés n'ont pas le même point de vue. De même, on peut parler de conflit d'intérêt quand on connaît l'utilité de la sous-traitance pour conforter la situation du donneur d'ordres, qui fait payer au client comptant ou à trente jours mais règle son fournisseur à quatre-vingt dix jours. Bien entendu, le sous-traitant est, le plus souvent, une entreprise petite ou moyenne.

Ne pas poser ces problèmes en termes de conflit, d'antagonisme et de nécessité de mouvement, revient à s'abriter derrière une prétendue communauté d'intérêts, qui n'existe pas.

J'ajoute que l'histoire nous a instruits. Quand le comité d'entreprise a été créé en février 1945 dans le droit fil du programme du Conseil de la Résistance, il avait un objectif économique. Relisez le texte de l'ordonnance : il parle de l'organisation de l'entreprise, du partage des bénéfices, du rôle des salariés -tout y est ! Mais il n'a jamais été appliqué. Il a été progressivement vidé de son contenu par un patronat à qui cette ordonnance avait été imposée en raison de son rôle pendant la période 1940-45. Le comité d'entreprise a perdu toute initiative...

M. Henri Plagnol - C'est la gauche qui était au pouvoir !

M. le Président de la commission - L'évolution s'est faite sur une quinzaine d'années, elle est devenue nette à partir des années soixante.

Toute la partie novatrice concernant le rôle des salariés est passée à la trappe et le comité d'entreprise a été réduit au rôle d'organisateur des arbres de Noël, des loisirs, etc.

Deuxième exemple : le rôle des administrateurs élus par les salariés dans les entreprises nationalisées. C'était une grande innovation, à laquelle j'ai participé et j'y croyais ! Ils ont été conservés après les privatisations. Mais que sont-ils devenus ? Quel rôle réel jouent-ils ? Où est le lieu de pouvoir dans l'entreprise ? Quelle est la transparence des informations et des décisions ? On ne peut plus raisonner comme à l'époque où le lieu de pouvoir était identique au lieu de propriété. Le rôle des actionnaires dans les conseils d'administration n'a pas du tout été ce qu'on attendait.

On a beaucoup parlé des licenciements. C'est une réalité très pénible pour tous. Or il existe un droit d'alerte : mais il n'est pratiquement jamais utilisé. Lorsque nous abordons le problème en tant qu'élus ou que maires, il est trop tard, la maison brûle et nous nous contentons de réparer les dégâts au mieux. Pourquoi en est-on arrivé là ? Parce qu'à aucun moment le salarié n'a été associé aux décisions !

M. Marc-Philippe Daubresse - La réponse est dans la loi !

M. le Président de la commission - Mais non ! Il m'arrive de penser que derrière cette idée de communauté d'intérêts, il y a une grande méfiance par rapport aux organisations syndicales. La démarche naturelle devrait être de renforcer leur rôle : mais c'est tellement plus facile de parler de quelque chose qui n'existe pas que de renforcer un mouvement social qui existe et qui est trop faible ! Cela, c'est un vrai débat et je vous donne rendez-vous pour ce débat. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe RCV)

M. Christian Sautter, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie - Je remercie le rapporteur Barrot d'avoir ouvert dans un esprit constructif le débat sur ce grand sujet de société qu'est la participation à la croissance.

J'entends bien résister à trois tentations : la première serait de regarder d'un air un peu moqueur la succession des textes de l'opposition sur ce sujet, à l'Assemblée nationale comme au Sénat : la loi Thomas en mars 1997, les propositions de loi de M. Douste-Blazy sur l'épargne retraite, d'Édouard Balladur sur l'actionnariat salarié, de Charles Descours ou de Jean Chérioux : tout cela a été examiné, l'an dernier. Mais comme disait Boileau, vingt fois sur le métier, l'opposition peut remettre son ouvrage... (Interruptions sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL)

La deuxième tentation serait de relever les différences entre ces textes successifs, qui montrent qu'ils n'étaient peut-être pas aussi parfaits que vous le prétendiez à l'époque (Mêmes mouvements).

La troisième tentation -mais je vous promets de ne pas y céder- serait d'insister sur les divisions qui sont apparues au sein même de l'opposition, au moment notamment de l'examen en commission... (Vives protestations sur les bancs du groupe du RPR et du groupe UDF)

J'écarte ces tentations et j'en viens au fond.

Le Gouvernement est favorable à une réforme de l'épargne salarial, mais il est défavorable à votre proposition de loi, car ce n'est pas une réponse à la hauteur des enjeux.

Nous sommes favorables à une réforme de l'épargne salariale parce que, pour reprendre une formule de Dominique Strauss-Khan, nous préférons « le risque à la rente ».

Nous pensons que c'est un moyen pour les salariés d'acquérir une partie de la valeur qu'ils créent, et aussi d'ancrer en France les entreprises françaises. Les entreprises peuvent ainsi se constituer un pôle d'actionnaires stables et se préserver, dans une certaine mesure, d'actions boursières hostiles.

Enfin, c'est un levier pour permettre aux salariés d'être mieux informés des décisions majeures qui les concernent et de peser davantage sur celles-ci.

La participation à la croissance ne doit pas se résumer à des considérations financières : elle doit donner aux salariés de nouveaux pouvoirs.

C'est dans cet esprit que le Premier ministre a confié à MM. Balligand et de Foucault un rapport sur l'épargne salariale qui a été publié le 28 janvier et qui met en lumière ce que nous attendons, nous, d'une telle réforme. Rédigé à l'issue d'une très large concertation, ce rapport a montré que les salariés aspirent à un partage différent des fruits de la croissance. Beaucoup d'entre vous, notamment M. Godfrain, ont qualifié la participation de grande réforme du XXème siècle. Mais que représsante la participation aujourd'hui ? 21 milliards par an, alors que les profits des entreprises dépassent 500 milliards ! Vous parlez beaucoup de participation, mais durant les 23 années où vous étiez au pouvoir, vous ne l'avez pas développée !

Un député RPR - Et qu'a fait Mitterrand ?

M. le Ministre - Il y a certes eu des hommes généreux, comme le général de Gaulle ou MM. Capitant et Vallon, mais j'ai l'impression qu'ils étaient relativement isolés. (Protestations sur les bancs du groupe du RPR et du groupe UDF, applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

Les salariés aspirent aussi, à un moment où la mondialisation provoque de fortes concentrations, à être mieux informés et à peser davantage sur les décisions. Nous voulons instaurer une réelle justice sociale, tout en favorisant le financement des PME. Votre proposition ne répond pas à ce double objectif, alors que nous, nous le mettons en pratique et je vous en donnerai trois preuves.

La première concerne les jeunes entreprises. MM. Forissier et Gengenwin ont dit qu'il fallait encourager les jeunes talents. Mais qui a créé les bons de souscription de parts de créateurs d'entreprises ?

Deuxième exemple, chaque fois que le Gouvernement a ouvert le capital d'entreprises publiques, il a tenu à associer les salariés à l'opération, avec succès : à France Télécom, 75 % des salariés sont devenus actionnaires de l'entreprise et détiennent 3,5 % de son capital ; à Air France, 72 % des salariés, sont devenus actionnaires et posséderont, à terme, 10 % du capital. Enfin les opérations concernant le CIC et le GAN, qui avaient échoué avant 1997, ont réussi en partie en raison de la participation des salariés !

Pourquoi le Gouvernement est-il défavorable à la proposition de la loi soumise aujourd'hui ? La première raison, c'est que nous avons en la matière des différences de conception sur trois points. Premièrement, votre projet est d'inspiration individuelle alors que celui que nous voulons développer est d'inspiration collective.

Ainsi, vous généralisez l'épargne salariale, mais vous n'en tirez jamais de conséquences en termes de droits ou de pouvoirs des salariés dans l'entreprise. Ainsi de la représentation des actionnaires salariés au sein des conseils d'administration : vous instituez un « rendez-vous obligatoire » lorsque l'actionnariat salarié dépasse le seuil de 7,5 %, alors qu'un « rendez-vous » de ce type est déjà prévu dès qu'il représente plus de 5 % du capital (Protestations sur les bancs du groupe UDF, du groupe du RPR et du groupe DL). Le rapport de MM. Balligand et de Foucauld prévoit, au contraire, de baisser ce seuil. On le voit, vos propositions sont en recul par rapport aux pratiques en vigueur.

Vous optez, d'autre part, pour un dispositif octroyé. Le Gouvernement souhaite, quant à lui, un mécanisme négocié, considérant que la création des fonds de prévoyance retraite et les plans d'épargne interentreprises ne doit pas dépendre de la seule liberté de choix des chefs d'entreprises.

Enfin, votre dispositif est inégalitaire et nous lui préférons un système juste et ouvert à tous. Je prendrai pour seul exemple celui -emblématique- des options sur actions, que M. Plagnol souhaite distribuer à tous les salariés mais dans des conditions telles que les inégalités en seront accrues. Comment pourrait-il en aller autrement, si chaque caissière en reçoit une ou deux, et les dirigeants plusieurs centaines ?

En cette matière, il faut davantage de transparence, afin que ces pratiques soient moralisées. M. Forissier a eu l'honnêteté de reconnaître que des excès avaient été commis -malheureusement, rien, dans la proposition, ne permet d'empêcher qu'ils se reproduisent. Je constate en outre que vous demandez à ce que les dix plus gros bénéficiaires d'options soient identifiés... ce qui est moins que ce que le MEDEF a proposé récemment ! Le Gouvernement entend, quant à lui, aller plus loin dans la voie de la moralisation et de la transparence et empêcher, en particulier, que des options sur actions ne puissent être distribuées juste avant l'annonce de résultats favorables. Enfin, votre projet est particulièrement coûteux, puisqu'il prévoit que la plus-value d'acquisition, assortie d'un rabais, serait exonérée d'impôt sur le revenu et de cotisations sociales. Nous ne le voulons pas.

Mais nos divergences les plus grandes ont trait à l'épargne-retraite. Cela n'a rien d'étonnant puisque, suivant le scénario des films Un jour sans fin ou, plus exactement, L'éternel retour, nous assistons à la réapparition de la loi Thomas, votre proposition visant à instituer des fonds de prévoyance retraite et, donc, à développer l'épargne par capitalisation au détriment de l'épargne par répartition.

Vous ne l'ignorez pas, notre démarche est exactement inverse. Après que le Premier ministre aura fait connaître les intentions du Gouvernement en matière de retraite, après que les retraites par répartition auront été consolidées, alors seulement le temps viendra de se pencher sur la retraite, par capitalisation. De fait, votre proposition entretient une confusion qui n'a pas lieu d'être, M. Balligand l'a fort bien démontré, entre épargne longue et constitution d'un capital retraite, et cette confusion est dommageable.

M. Recours a insisté, à juste titre, sur le coût fiscal et social du système de participation en vigueur, coût qu'il convient d'évaluer avec précision avant d'étendre ce dispositif.

M. Barrot a évoqué la reprise des entreprises par les salariés, s'inquiétant que le Gouvernement ne prévoit pas de mesure en ce sens, il sait, pourtant, que cette pratique est tombée en désuétude.

M. Cochet a dit son souhait que l'épargne salariale puisse servir à financer des projets d'ordre éthique. Cette proposition, excellente, figure dans le rapport Balligand-de Foucauld.

M. Forissier a affirmé que la croissance mondiale avait tiré la croissance française. Tel n'est pas le cas : la reprise date de l'été 1997, et l'économie française a surmonté victorieusement la crise asiatique de 1998-1999 parce que le Gouvernement avait fondé la croissance sur la consommation, l'investissement des entreprises et le logement, c'est-à-dire sur la demande intérieure.

Le Gouvernement entend réserver l'épargne salariale en la démocratisant, et avec l'objectif de favoriser la croissance, l'emploi et la solidarité. Le rapport de MM. Balligand et de Foucauld sera une source d'inspiration privilégiée, car il est fondé sur la concertation et sur les valeurs partagées à la gauche de l'hémicycle. Je vous invite donc à repousser la proposition qui vous est faite (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe RCV).

M. le Président - La commission des affaires culturelles n'ayant pas présenté de conclusions, l'Assemblée, conformément à l'article 94, alinéa 3, du Règlement, est appelée à statuer sur le passage à la discussion des articles du texte initial de la proposition de loi. Si l'Assemblée vote contre le passage à la discussion des articles, la proposition de loi ne sera pas adoptée.

M. le Rapporteur - Mon propos sera bref, puisque je serai frustré du plus important de mon travail : la discussion des articles. Monsieur le ministre, permettez-moi de m'étonner que, dans un débat de cette nature, le manichéisme prime, avec son cortège de crispations. Je reconnais volontiers la qualité du rapport de M. Balligand, mais il n'a pas le monopole de la réflexion, sur un sujet qui touche toutes les entreprises et qui a une forte incidence sur le progrès économique et social. Ce que nous voulons c'est, comme vous le souhaitez vous-mêmes, diffuser plus largement l'actionnariat salarié. Ce serait donc déformer ce texte que d'y voir uniquement un dispositif d'options sur actions, que nous souhaitons voir évoluer vers davantage de transparence sans les généraliser, pour éviter certains inconvénients. Je souligne cependant que possibilité est donnée aux salariés de se constituer en association ou en société pour pouvoir procéder à des acquisitions. Quant aux reproches qui nous ont été faits à propos de la gouvernance, ils ne sont pas fondés puisque nous prévoyons la réunion automatique d'une assemblée générale extraordinaire pour examiner la question de la nomination d'administrateurs parmi les salariés actionnaires dès que la part du capital social qu'ils détiennent a augmenté de 2,5 % (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF, du groupe du RPR et du groupe DL).

Mais, au-delà de ces questions techniques, une divergence nous sépare. Pourtant, certaines voix se sont élevées, au sein du groupe socialiste, dont celle de M. Boulard, pour dire le danger que, dans une Europe vieillissante, des porteurs d'actions d'un autre continent fondent leur retraite sur le travail des salariés des entreprises françaises, sans contrepartie pour ceux-là ! La nécessité d'une épargne à long terme, servie en rente, et fruit d'une négociation d'entreprise, finira par s'imposer.

Mme Bricq n'a pas tort de mettre en garde contre une vision idyllique de l'entreprise. Mais la force des entreprises françaises, soumises à une forte concurrence, tiendra à leur cohésion, qui suppose la négociation et non l'affrontement. C'est dire que les propositions contenues dans le rapport Balligand ne seront applicables que si la confiance existe.

C'est pourquoi cette proposition aurait pu donner lieu à une excellente discussion. Mais le sort en est jeté et je me tais (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF, du groupe du RPR et du groupe DL).

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EXPLICATIONS DE VOTE

M. Gilles Carrez - Une fois de plus, la majorité fait étalage de son esprit de système. Rien de ce qui vient de l'opposition ne trouve grâce à ses yeux. Sur cette proposition, l'opposition, ne vous en déplaise, était pourtant unie... (Sourires sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste) ...pour défendre la belle idée de la participation. Mais vous refusez tout en bloc, comme vous avez repoussé avec mépris l'année dernière la remarquable proposition de M. Balladur. Vous privez ainsi les salariés français des fruits de la croissance. Vous détournez leur argent au bénéfice de la veuve écossaise ou du retraité californien (Exclamations).

Vous reprenez l'argumentation archaïque aux termes de laquelle l'actionnariat salarié serait un instrument de la lutte des classes. Dans ces conditions, pourquoi avoir, à votre tour, commandé un rapport ? Il s'agissait en fait de masquer votre conservatisme, au moment même où vous videz le paritarisme de sa substance. Telle est, Monsieur Le Garrec, la réalité et je la décris plus fidèlement que ne l'ont fait vos aimables propos !

J'ai été surpris, Monsieur Balligand, que vous travestissiez à ce point notre proposition qui ne se borne pas aux stock-options et qui concerne aussi l'intéressement, les plans d'épargne interentreprises et l'actionnariat salarié. Sur ces points, nous sommes prêts à discuter mais encore faut-il que vous acceptiez de traiter l'opposition autrement que par le mépris. Vous êtes insensibles aux mouvements de fond de la société moderne, au danger que représentent les fossés qui se creusent entre nos concitoyens. Cette proposition met en évidence de nombreuses injustices : l'injustice du système « PREFON » qui réserve l'épargne retraite défiscalisée aux seuls fonctionnaires... (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL)

...l'injustice d'un dispositif plus favorable aux salariés des grandes entreprises qu'à ceux des PME, l'injustice du régime des stock-options, opaque et réservé à une élite. Pour y remédier, notre proposition s'inscrit dans un double objectif de modernisation et de justice sociale. Il puise son inspiration dans la participation au sens gaullien. A ce titre, le groupe RPR votera pour la poursuite de la discussion d'un texte qui est au c_ur des évolutions de notre société (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL).

M. Renaud Dutreil - Il est dommage que le travail fourni par les auteurs de cette proposition comme par M. Balligand ne débouche pas sur la discussion que ce sujet méritait et sur lequel un accord était, j'en suis convaincu, possible.

Pourquoi adopter une telle attitude alors que vous nous demanderez ce que vous nous refusez aujourd'hui lorsque votre propre texte viendra en discussion ?

La raison profonde de votre refus tient sans doute aux divisions qui traversent la majorité. Il y a, d'un côté, les nostalgiques de la lutte des classes ; de l'autre, les pragmatiques, qui, les yeux fixés sur les échéances électorales, vont là où la mode les entraîne.

Mais ce malaise, les entreprises n'ont pas à en faire les frais ! La participation est un sujet rassembleur dans les entreprises entre les salariés et les détenteurs du capital. Il est donc regrettable de n'y avoir pas consacré le débat nécessaire, d'autant que vos arguments ne nous ont pas convaincus. La majorité démontre ainsi qu'elle ne sait pas conduire une politique adaptée au contexte actuel de croissance retrouvée. Nous avions, pour la première fois, l'occasion de débattre sur les outils modernes de partage de la croissance et vous ne la relevez pas (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF).

Cette proposition visait aussi à corriger le injustices qui procèdent à la fois de l'étatisme et des excès du marché, en traçant une voie médiane entre les deux. Les exemples de ces injustices ne manquent pas, qu'il s'agisse du système PREFON, de l'avantage injustifié donné aux grandes entreprises au détriment des PME ou du manque de transparence des stock-options que le MEDEF est le premier à dénoncer.

Notre proposition se distinguait aussi par son caractère incitatif, qui montre que nous avons compris, à la différence du Gouvernement, que le monde de l'entreprise ne se mène pas à la baguette.

Je lance donc un ultime appel, votez pour cette proposition ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF, du groupe du RPR et du groupe DL)

M. Dominique Dord - Je suis très heureux d'avoir été coauteur de cette proposition et d'avoir participé à ce débat, hélas tronqué, qui a donné lieu à des prises de position hautes en couleurs.

Il y eut d'abord l'intervention outrancière de M. Cochet, qui nous a rappelé que le monde vert se situait au-delà du réel et qu'il pourrait même être sympathique s'il n'offrait un refuge à tant d'égarements.

Puis ce fut le propos paléontologique de M. Cuvilliez, qui tout en fustigeant l'économie de marché ne propose pour toute alternative que le vide sidéral laissé par le naufrage du communisme.

J'en viens aux interventions socialistes, comme de juste plus compliquées...

Mme Nicole Bricq - Vous n'avez pas à distribuer les bons ou les mauvais points ! Tenez-vous en à votre explication de vote !

M. Dominique Dord - Vous êtes crispés sur ce sujet car vous êtes animés de la foi hésitante des justes convertis. M. Sautter s'oppose... parce que la proposition vient de l'opposition. Devant l'autel de la participation, le ministre esquisse une génuflexion oblique, le visage caché dans la pèlerine pour que la foule des incrédules ne le voie pas (Applaudissements et rires sur les bancs du groupe DL, du groupe UDF et du groupe du RPR).

Le président Le Garrec s'est livré à des contorsions habiles, mais il faisait les mêmes, à une autre époque, pour défendre les nationalisations. Il y eut encore le discours, peu convaincu, de M. Recours, qui était d'ailleurs en contradiction avec celui de M. Balligand. Puis nous entendîmes le couplet tactique de Mme Bricq, pour qui la participation est une idée socialiste.

Le clou, ce fut l'intervention de M. Balligand. Mon chère collègue, vous avez la foi, mais pas la pratique. Vous affirmez que cette proposition « n'est pas à la hauteur », alors que M. Recours estime que nous en faisons trop. Vous nous avez décrit l'enfer -les stock-options- et le paradis- ce que vous appelez la « gouvernance d'entreprise ».

Aujourd'hui, nous sommes très à notre aise, tandis que vous paraissez crispés. Votre expérience d'élus de terrain vous indique que, sans doute, il faudrait voter pour, mais il vous reste un vieux fond idéologique qui vous incline à voter contre. Vous voulez le conflit dans l'entreprise ; nous voulons l'harmonie. Vous voulez diviser ; nous voulons rassembler. Pour nous, l'entreprise n'est pas le lien d'un antagonisme, mais une _uvre commune.

M. le Président - Veuillez conclure.

M. Dominique Dord - Nous aussi, sans doute, nous avons nos idéologies. Mais comme nos valeurs triomphent partout, comprenez notre euphorie ou, du moins, notre décontraction.

La lutte n'oppose pas les salariés et les employeurs, mais les entreprises entre elles et les pays entre eux. C'est pourquoi le groupe DL souhaite que se poursuive la discussion de cette proposition, par ailleurs perfectible. Il faut précisément que le débat continue. (Applaudissements sur les bancs du groupe DL, du groupe UDF et du groupe du RPR)

M. Alfred Recours - Épargne salariale, stock-options, fonds de retraite par capitalisation : chacun de ces sujets justifierait le dépôt d'une proposition. L'opposition « mal étreint ».... Elle laisse de côté des questions aussi importantes que la pérennisation des retraites par répartition et la répartition des fruits de la croissance.

Sur tous ces thèmes, nous obéissons à des logiques opposées. Je souhaite donc, Monsieur Dord, que la messe soit dite et que nous appliquions l'article 94.

Monsieur Barrot, vous avez réalisé un travail consciencieux et intéressant. C'est pour vous aider à mieux étreindre que je demande à mes collègues de ne pas passer à la discussion des articles. (Rires et applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste)

M. le Président - La commission des affaires culturelles, n'ayant pas présenté de conclusions, l'Assemblée, conformément à l'article 94, alinéa 3, du Règlement, est appelée à statuer sur le passage à la discussion des articles du texte initial de la proposition de loi.

Je vous précise que, conformément aux dispositions du même article du Règlement, si l'Assemblée vote contre le passage à la discussion des articles, la proposition de loi ne sera pas adoptée.

Le passage à la discussion des articles, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Président - L'Assemblée ayant décidé de ne pas passer à la discussion des articles, la proposition de loi n'est pas adoptée.

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FIXATION DE L'ORDRE DU JOUR

M. le Président - L'ordre du jour des séances que l'Assemblée tiendra jusqu'au jeudi 2 mars 2000 inclus a été fixé ce matin en Conférence des présidents.

Cet ordre du jour sera annexé au compte rendu de la présente séance.

Par ailleurs, la procédure d'examen simplifiée a été engagée pour la discussion de 4 projets, adoptés par le Sénat, portant ratification de conventions inscrits à l'ordre du jour du mardi 29 février, ainsi que pour la discussion du projet sur la lutte contre la corruption, en deuxième lecture, et de la proposition tendant à la validation d'un examen professionnel dans l'administration pénitentiaire, inscrits à l'ordre du jour du mercredi 1er mars.

Prochaine séance cet après-midi à 15 heures.

La séance est levée à 12 heures 10.

                      Le Directeur du service
                      des comptes rendus analytiques,

                      Jacques BOUFFIER

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ANNEXE
ORDRE DU JOUR

L'ordre du jour des séances que l'Assemblée tiendra jusqu'au jeudi 2 mars inclus a été ainsi fixé ce matin en Conférence des présidents :

CET APRÈS-MIDI, à 15 heures, après les questions au Gouvernement, et à 21 heures :

      _ troisième lecture du projet de loi organique relatif aux incompatibilités entre mandats électoraux ;

      _ nouvelle lecture du projet relatif aux incompatibilités entre mandats électoraux et fonctions électives ;

ces deux textes donnant lieu à une discussion générale commune.

MERCREDI 9 FÉVRIER, à 15 heures, après les questions au Gouvernement, et à 21 heures,

et JEUDI 10 FÉVRIER, à 9 heures, à 15 heures et à 21 heures :

      _ deuxième lecture du projet renforçant la présomption d'innocence et les droits des victimes.

MARDI 22 FÉVRIER, à 9 heures :

      _ proposition, adoptée par le Sénat, portant diverses mesures d'urgence relatives à la chasse. (ordre du jour complémentaire) ;

à 15 heures, après les questions du Gouvernement :

      _ projet autorisant la ratification de la Convention portant Statut de la Cour pénale internationale ;

      _ projet, adopté par le Sénat, autorisant l'approbation de la convention d'assistance administrative mutuelle en matière douanière entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République hongroise ;

      _ projet, adopté par le Sénat, autorisant l'approbation de la convention d'assistance administrative mutuelle entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la Fédération de Russie pour la prévention, la recherche et la poursuite des fraudes douanières ;

      _ projet, adopté par le Sénat, autorisant l'approbation de la convention d'entraide d'assistance administrative mutuelle entre le Gouvernement français et le Gouvernement macédonien pour la prévention, la recherche, la constatation et la sanction des infractions douanières ;

      _ projet, adopté par le Sénat, autorisant l'approbation de la convention d'assistance administrative mutuelle entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République slovaque pour la prévention, la recherche et la poursuite des fraudes douanières ;

      _ projet, adopté par le Sénat, autorisant la ratification de la convention sur la sécurité du personnel des Nations unies et du personnel associé ;

      _ projet, adopté par le Sénat, autorisant l'approbation de la convention d'assistance administrative mutuelle entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République d'Afrique du Sud pour la prévention, la recherche, la constatation et la répression des infractions douanières ;

      _ projet, adopté par le Sénat, autorisant l'approbation de la convention commune sur la sûreté de la gestion du combustible usé et sur la sûreté de la gestion des déchets radioactifs ;

      _ projet, adopté par le Sénat, autorisant l'approbation de la convention d'entraide judiciaire en matière pénale entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume de Thaïlande,

chacun de ces huit derniers textes faisant l'objet d'une procédure d'examen simplifiée ;

à 21 heures :

      _ projet relatif à l'archéologie préventive.

MERCREDI 23 FÉVRIER, à 15 heures, après les questions au Gouvernement :

      _ deuxième lecture de la proposition portant abrogation de l'article 78 de la loi n° 93-1313 du 20 décembre 1993 quinquennale relative au travail, à l'emploi et à la formation professionnelle,

ce texte faisant l'objet d'une procédure d'examen simplifiée ;

      _ éventuellement, suite du projet relatif à l'archéologie préventive ;

      _ proposition, adoptée par le Sénat, relative à la protection des trésors nationaux et modifiant la loi n° 92-1477 du 31 décembre 1992 relative aux produits soumis à certaines restrictions de circulation et à la complémentarité entre les services de police, de gendarmerie et de douane ;

à 21 heures :

      _ proposition, adoptée par le Sénat, relative à la prestation compensatoire en matière de divorce.

JEUDI 24 FÉVRIER, à 9 heures, à 15 heures et, éventuellement, à 21 heures :

      _ deuxième lecture du projet portant création d'une Commission nationale de déontologie de la sécurité ;

      _ deuxième lecture du projet relatif à l'accueil et à l'habitat des gens du voyage.

MARDI 29 FÉVRIER, à 9 heures :

      _ Proposition de M. Jean Le Garrec et plusieurs de ses collègues instaurant une Journée nationale à la mémoire des victimes des crimes racistes et antisémites de l'Etat français et d'hommage aux Justes de France,

        (séance mensuelle réservée à un ordre du jour fixé par l'Assemblée en application de l'article 48, alinéa 3, de la Constitution) ;

à 15 heures, après les questions au Gouvernement, et à 21 heures :

      _ deuxième lecture du projet relatif aux volontariats civils institués par l'article L. 111-2 du code du service national ;

      _ projet, adopté par le Sénat, autorisant l'approbation de l'avenant à la convention du 10 mars 1964 entre la France et la Belgique tendant à éviter les doubles impositions et à établir des règles d'assistance administrative et juridique réciproque en matière d'impôts sur les revenus ;

      _ projet, adopté par le Sénat, autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et la Ligue des Etats arabes relatif à l'établissement, à Paris, d'un Bureau de la Ligue des Etats arabes et à ses privilèges et immunités sur le territoire français (ensemble une annexe) ;

      _ projet, adopté par le Sénat, autorisant la ratification du protocole, établi sur la base de l'article K3 du traité sur l'Union européenne, relatif à l'interprétation, par la Cour de justice des Communautés européennes, de la convention concernant la compétence, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière matrimoniale ;

      _ projet, adopté par le Sénat, autorisant la ratification de la convention établie sur la base de l'article K3 du traité sur l'Union européenne, concernant la compétence, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière matrimoniale ;

chacun de ces quatre derniers textes faisant l'objet d'une procédure d'examen simplifiée ;

      _ proposition, adoptée par le Sénat, tendant à préciser la définition des délits non intentionnels.

MERCREDI 1er MARS, à 15 heures, après les questions au Gouvernement, et à 21 heures :

      _ éventuellement, suite de la proposition, adoptée par le Sénat, tendant à préciser la définition des délits non intentionnels ;

      _ deuxième lecture du projet modifiant le code pénal et le code de procédure pénale et relatif à la lutte contre la corruption ;

      _ proposition de M. André Gerin relative à la validation législative d'un examen professionnel d'accès au grade de premier surveillant des services extérieurs de l'administration pénitentiaire ;

chacun de ces deux derniers textes faisant l'objet d'une procédure d'examen simplifiée ;

      _ projet déposé au Sénat portant adaptation du droit de la preuve aux technologies de l'information et relatif à la signature électronique.

JEUDI 2 MARS, à 15 heures et, éventuellement, à 21 heures :

      _ éventuellement, suite de l'ordre du jour de la veille ;

      _ nouvelle lecture du projet relatif aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations ;

      _ projet relatif à l'élargissement du conseil d'administration de la société Air France et aux relations de cette société avec l'Etat, et portant modification du code de l'aviation civile.


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