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Session ordinaire de 1999-2000 - 70ème jour de séance, 167ème séance

3ème SÉANCE DU MARDI 28 MARS 2000

PRÉSIDENCE de M. Patrick OLLIER

vice-président

Sommaire

          CHASSE (suite) 2

          AVANT L'ARTICLE PREMIER 15

          ARTICLE PREMIER 16

          APRÈS L'ARTICLE PREMIER 24

La séance est ouverte à vingt et une heures.

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          CHASSE (suite)

L'ordre du jour appelle la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi relatif à la chasse.

M. Marc Dolez - Notre discussion de cet après-midi l'a montré, nous sommes nombreux sur tous les bancs à souhaiter une chasse responsable et à souhaiter l'apaisement du débat sur le sujet. Pour atteindre cet objectif, nous aurons besoin d'une grande loi, d'une loi globale, assurée de la durée et propre à lever tous les contentieux : en bref, selon votre expression, Madame la ministre, d'une loi équilibrée. La suite de notre discussion nous permettra, je l'espère, d'y parvenir mais, à ce stade, cet équilibre n'est pas encore acquis...

M. Michel Hunault - Quel aveu !

M. Marc Dolez - Le projet du Gouvernement gagnerait beaucoup, selon nous, à s'inspirer davantage du rapport Patriat et je souhaite donc que vous reteniez certains de nos amendements, notamment ceux qu'a adoptés la commission, de sorte que nous puissions tous voter ce texte. En cherchant à améliorer celui-ci, nous ne faisons que notre travail de parlementaires et le Gouvernement serait donc bien avisé d'écouter la représentation nationale.

D'autre part, convaincu du rôle éminent que le Parlement a à jouer dans cette affaire comme dans tant d'autres, je souhaite aussi qu'on inscrive le maximum de dispositions dans la loi, sans renvoyer aux décrets : c'est la condition pour que cette loi soit durable.

S'agissant de la chasse de nuit, je suis en total désaccord avec la proposition du Gouvernement, qui se résume à une dépénalisation expérimentale et limitée. Comme le groupe socialiste, je me prononce en faveur de la légalisation et je souhaite que la liste des départements où cette pratique traditionnelle sera autorisée figure dans la loi. Lorsqu'une majorité d'entre nous ont, le 22 février, renvoyé en commission la proposition de loi qui nous était soumise, nous l'avons fait parce que nous étions persuadés que, quelques semaines plus tard, un texte global nous serait proposé, qui légaliserait cette chasse.

Pour ce qui est de l'ouverture et de la fermeture de la chasse, autre problème crucial, je rappelle que la directive européenne ne fixe pas de dates, mais énonce seulement des critères. Il conviendrait donc que, lors de la discussion des amendements, nous déterminions des dates échelonnées en fonction des espèces, comme l'avis motivé de la Commission européenne nous le permet (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste).

M. Jean Proriol - Depuis la loi du 3 juillet 1998, modifiant l'article L. 224-2 du code rural, et surtout depuis l'arrêt du Conseil d'Etat du 7 avril, notre Assemblée a beaucoup travaillé sur la chasse. Le sujet est explosif, soutient-on : je dirai plutôt que le climat est conflictuel...

Pendant de longs mois de 1999, un parlementaire en mission s'est employé à déminer le terrain : il en est sorti le rapport Patriat I. A la fin de l'année et au début de la suivante, le groupe chasse de l'Assemblée a multiplié les réunions et les auditions, entendant aussi bien le président de l'Union des fédérations M. Daillant, que M. Bougrain-Dubourg président de la LPO. Ce travail s'est terminé en apothéose avec le colloque du 31 janvier... dont plus personne ne parle. Et le silence, volontaire ou non, du président Sicre, dont je salue la très grande bonne volonté, en dit long sur les tiraillements internes à la majorité.

Le 22 février, la proposition de loi de M. de Courson, sur la chasse de nuit, a failli être adoptée -il s'en est fallu d'une poignée de voix !

M. Jean-Pierre Brard - Louis XVI a perdu sa tête pour une voix !

M. Jean Proriol - Enfin est venu ce projet, que M. Patriat a tenté de sauver en le récrivant : c'est le rapport Patriat II. Quel bon samaritain que notre rapporteur, dévoué, sympathique, jouant tour à tour le rôle du terre-neuve, du Saint-Bernard, du braque, de l'épagneul... et même du fox-terrier ! (Sourires)

Tout est parti de la directive Oiseaux de 1979, interprété strictement par nos tribunaux. Pourtant, son article 9 laissait aux Etats membres une certaine marge de man_uvre, confirmée par le traité de Maastricht qui a réaffirmé le principe de subsidiarité. Je ferai mienne ici la position de M. Giscard d'Estaing pour les oiseaux migrateurs, il faut respecter le texte de l'Union européenne, en prévoyant les restrictions et les dérogations auxquelles nous avons droit, et, pour les autres oiseaux et pour les mammifères, la question relève de la compétence nationale.

Il conviendrait, d'autre part, de donner une définition plus positive de la chasse et donc de réécrire l'article. N'assimilons pas cette pratique à un exercice militaire, à un sport dangereux. Ne suivons pas l'exemple de M. Hascouët, en particulier, qui, avant de devenir ministre, a rédigé un amendement, assorti d'un exposé des motifs où il écrit : « La chasse compte de nombreux dangers du fait du maniement des armes à feu ; sa pratique est souvent source de conflits avec les autres utilisateurs de la nature. Pour garantir une totale tranquillité et une plus grande sécurité à ceux-ci, le choix du dimanche apparaît plus judicieux que celui du mercredi... » Comme l'a dit le président Saint-Josse, les chasseurs ne sont pas des tueurs d'enfants !

J'en viens à nos points de désaccord, voire de rupture. Comme M. Dolez, nous considérons que les dates d'ouverture et de fermeture de la chasse doivent figurer dans la loi. Et, pour ce qui est de la chasse de nuit, votre proposition de ne la tolérer que dans vingt départements côtiers apparaît beaucoup trop restrictive. Nous tenions pour 42, nous sommes descendus à 31 et je crois la position très raisonnable.

Le débat reste également ouvert sur la latitude donnée aux fédérations pour fixer le jour de fermeture. Quant au lieu de délivrance des permis, nous pensons que ce pourrait être la mairie.

Je conclurai en rendant hommage aux personnels techniques et administratifs des fédérations départementales, dont on a peu parlé, et qui s'inquiètent légitimement de la recentralisation que constituerait une diminution de leur rôle au profit de l'ONC.

En l'état, ce projet n'envoie pas au monde de la chasse, aux amoureux de la nature et aux promeneurs les signaux d'apaisement et de réconciliation qu'ils attendent (Applaudissements sur les bancs du groupe DL, du groupe du RPR et du groupe UDF).

M. Pierre Ducout - Le texte que nous examinons traduit l'ambition de promouvoir une pratique responsable et apaisée de la chasse. Les contentieux engendrés par la directive d'avril 1979 ont conduit le Parlement à légiférer en 1994, puis en 1998, mais la dernière loi adoptée ne pouvait que présenter un caractère provisoire.

Lors de la discussion, en 1996, de la proposition de loi relative au droit particulier d'Alsace et Moselle, j'avais souligné, au nom du groupe socialiste, le fait qu'elle constituait une adaptation nécessaire, respectant un bon équilibre entre les différents usages des espaces naturels, et que la gestion responsable du patrimoine cynégétique que l'on peut observer dans ces trois départements pouvait aussi l'être dans les autres régions françaises.

Si l'on peut regretter que nos régions n'aient pas les mêmes compétences que leurs homologues européennes en matière d'environnement, je relève, Madame la Ministre, que vous aviez reconnu, dans un grand journal du soir, la diversité de l'activité cynégétique et plaidé pour la recherche d'une solution « dans le dialogue et le respect mutuel de tous les interlocuteurs ». Vous aviez souligné que vous ne souhaitiez ni l'interdiction de la chasse, ni la disparition des chasseurs, et annoncé la nomination de M. Patriat comme parlementaire en mission. Que notre collègue soit félicité pour le sérieux de son travail et pour son sens du dialogue, tant à ce titre que comme rapporteur du présent projet !

La commission a adopté plusieurs amendements du groupe socialiste, qui enrichissent le texte dans l'esprit du rapport Patriat et confortent ainsi l'équilibre recherché. Ainsi, nous montrerons à nos partenaires européens notre sens des responsabilités, adresserons des signes forts aux non-chasseurs et créerons les conditions d'une coexistence paisible entre les différents usagers des espaces naturels. Je m'en réjouis, en tant qu'élu d'une circonscription qui englobe à la fois des zones périurbaines et une partie de la forêt landaise, aux traditions chantées, jadis déjà, par le poète aquitano-romain Ausone.

Le partage de l'espace repose, dans nos communes périurbaines, sur un dialogue permanent avec les cavaliers, les sportifs, les promeneurs et les chasseurs, sans oublier les propriétaires, car la forêt est privée à 90 %, et il faut passer avec eux des conventions pour garantir le droit de chasse et le droit de promenade, en évitant que des enclos réduisent celui-ci à néant.

M. René André - C'est très important !

M. Pierre Ducout - La sécurité est d'abord de la responsabilité des chasseurs eux-mêmes, qui ne doivent pas tirer en direction des maisons, mais il faut mieux assurer la sécurité des battues, car les accidents, s'ils sont en baisse, n'en sont pas moins inadmissibles. C'est le sens de notre amendement après l'article 9.

Nous proposons également d'assimiler à un enclos les postes fixes, pendant les 45 jours de chasse à la palombe. Celle-ci est un art, qui requiert une grande connaissance de la nature et une véritable communion avec elle, ainsi que l'avait reconnu, sur place, Mme Bouchardeau. Vous seriez la bienvenue, Madame la ministre, dans notre région...

La chasse de nuit au gibier d'eau, limitée aux 20 départements où sa pratique est ancienne et importante, et cantonnée aux installations existantes au 1er janvier 2000, est acceptable dans la mesure où elle ne comporte pas de risque réel de confusion des espèces et où elle est assortie d'une activité d'entretien et de mise en valeur des zones humides. Il convient donc de voter l'amendement qui tend à la légaliser.

Enfin, la pérennité de la chasse et des chasseurs, qui sont peut-être l'espèce la plus menacée de disparition, ce qui serait une grande perte pour la diversité des cultures et des modes de loisirs, suppose que l'information donnée à nos concitoyens n'oppose pas les urbains aux ruraux, et que la formation dispensée aux chasseurs soit améliorée - d'où l'intérêt de permettre la « chasse accompagnée » dès 14 ans.

Nous souhaitons que l'opposition vote avec nous ce texte amendé, équilibré et responsable, comme nous l'avions fait en 1996 pour la loi concernant l'Alsace et la Moselle. Nous vous faisons confiance, Madame la ministre, pour tenir compte des propositions constructives de notre groupe (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste) .

M. René André - Tout au long de votre intervention, Madame la ministre, vous avez exprimé la volonté de parvenir à un texte équilibré et à des relations apaisées entre chasseurs et non-chasseurs. Or, votre propos n'a comporté aucune ouverture, et vous n'avez pas même laissé entendre une seule fois que vous pourriez accepter certains amendements de la commission.

Si vous recherchez réellement l'équilibre et l'apaisement, vous aurez tout loisir, à la fin de la discussion générale, de répondre aux questions que je me permets de vous poser. Êtes-vous prête à accepter la légalisation de la chasse de nuit telle qu'elle est pratiquée aujourd'hui - la précision est utile, car je me méfie des décrets que vous prendrez ? Êtes-vous prête à autoriser la chasse à la passée deux heures avant le lever du soleil et deux heures après son coucher ? A accepter l'échelonnement des dates d'ouverture de juillet à fin février ? A respecter scrupuleusement le droit du fermier à chasser sur la terre qu'il exploite ou à être indemnisé par son propriétaire s'il y renonce ? A renoncer à la fixation autoritaire d'un jour de non-chasse ? A prendre l'engagement que les décrets n'organiseront pas le noyautage des structures de la chasse par les adversaires des chasseurs ? A cesser, enfin, d'alimenter la guérilla entre Bruxelles et Paris et à tout mettre en _uvre pour expliquer à l'Europe la position de la France, telle qu'adoptée par son Parlement ?

Si vous ne pouvez répondre positivement à chacune de ces questions, cela signifie que vous ne respecterez pas la volonté de notre Assemblée et, surtout, que vous ne dites pas la vérité quand vous prétendez à l'équilibre et à l'apaisement ! (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL)

M. Stéphane Alaize - Ce projet vient de loin : il y a plus d'une décennie, en effet, que les conflits se durcissent, et il est devenu difficile de solder les excès du passé. S'il est nécessaire de trouver un équilibre global entre les différents usages de la nature, c'est la question de la chasse aux oiseaux migrateurs qui constitue, à vrai dire, la seule pomme de discorde, les autres dispositions du texte étant plus consensuelles, à quelques exceptions près.

Trop d'ambiguïtés et d'approximations ont contrarié, jusqu'à présent, la solution d'un problème pourtant simple, et favorisé, de ce fait, la régression du droit de chasse, régression qui frappe avant tout les plus modestes. La directive 409, en même temps qu'elle pose le principe d'une utilisation raisonnée de la nature et d'une protection des espèces migratrices pendant leur période de nidification, admet explicitement des dérogations, auxquelles les autres Etats membres ne se font pas faute de recourir. Il est donc temps de lever ces ambiguïtés et ces approximations, afin de doter notre droit de la stabilité nécessaire.

Ni la directive ni l'écologie ne font obstacle à la stabilisation que je propose, et qui satisferait la proposition 50 du rapport Patriat. Surtout, là est la clé de l'apaisement que vous appelez de vos v_ux. En transposant dans notre droit les dispositions communautaires raisonnables, vous répondrez aux attentes de notre pays et vous vous donnerez les moyens de négocier en position de force à Bruxelles. Comment en effet la Commission européenne pourrait-elle refuser des dérogations à la chasse de certaines espèces comme le pigeon-ramier, quand elle les accorde à d'autres ? L'Espagne chasse le pigeon-ramier jusqu'en avril, et l'espèce poursuit sa prolifération.

Comment, dès lors, le Conseil d'Etat pourrait-il y trouver à redire, le droit communautaire s'imposant au droit national ? Ainsi serait réglé le problème de l'inscription des dates dans la loi. Vous réconcilieriez ainsi le monde cynégétique avec l'Europe, et éviteriez une division inutile entre chasseurs aux oiseaux migrateurs aquatiques et ceux aux oiseaux migrateurs terrestres -votre décret introduit, en distinguant entre les deux, une sélection maladroite, sinon un peu intentionnelle.

Enfin, vous permettriez aux parlementaires d'avoir encore foi dans le bon sens législatif, car l'objection selon laquelle l'article L. 224-4 du code rural réalise la transcription de la directive n'est pas recevable.

Au total, rien ne s'oppose à la transposition pleine et entière de la directive, sinon des motifs accessoires et étrangers à l'apaisement voulu par la grande majorité des députés, par vous-même et par les chasseurs.

Je tiens à vous dire, au-delà de ce qui nous différencie, combien je respecte les gens courageux dont vous êtes. Je condamne fermement les propos désobligeants, voire blessants, de certains, emportés par la passion aveugle de leurs convictions profondes quand il s'agit de la chasse (Murmures sur les bancs du groupe du RPR). Puisse ce projet permettre aussi la mesure verbale et conduire chacun à plus de respect et de compréhension mutuels (Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste).

M. Jean Auclair - On sait comment il va voter, lui !

M. Patrice Martin-Lalande - On peut aisément réaliser ici la quasi-unanimité sur l'idée que la chasse doit être pratiquée de façon à assurer la pérennité des espèces. C'est la conviction que j'ai retirée des réunions que j'ai eues dans ma circonscription de Sologne, y compris avec M. Patriat, dont je salue le travail. Les enjeux économiques, soit un millier d'emplois et 500 millions en Sologne, et les forts attraits de ce sport, ne l'emportent jamais sur le raisonnement de bon sens que la chasse ne peut consommer que les intérêts du capital naturel d'espèces et d'espaces, sans lequel elle n'a pas d'avenir.

Si votre texte apporte des avancées comme la reconnaissance de la mission d'intérêt général des fédérations, le permis accompagné ou la réforme des ACCA, il demeure très éloigné des solutions réalistes et durables (Exclamations sur les bancs du groupe du RPR et du groupe UDF) propres à assurer l'avenir de la chasse. Je pense à la chasse à la passée, que nous voulons autoriser deux heures après le coucher et deux heures avant le lever du soleil, à la chasse de nuit que nous souhaitons légaliser, à l'accueil des chasseurs étrangers, qu'il faut simplifier, à la tutelle de la chasse, qui doit être partagée entre votre ministère et celui de l'agriculture, à la départementalisation des dégâts de gibier que j'ai proposée avec Didier Quentin.

Vous voulez imposer un jour sans chasse uniforme sur toute la France. Si l'idée est de favoriser l'accès de tous à la nature, comment la concilier avec le respect du droit de propriété ? Comment invoquer celui-ci pour refuser la chasse sur certains territoires dans les ACCA et en même temps laisser entendre que les utilisateurs de la nature auraient en tant que tels des droits d'accès aux propriétés privées ?

Les dates d'ouverture et de fermeture de la chasse au gibier d'eau sont le problème principal de la chasse en France. Au colloque organisé fin janvier par le groupe d'études sur la chasse, le représentant de la Commission européenne a indiqué que l'interprétation restrictive de la directive de 1979 par la Cour européenne de justice et par certains tribunaux français n'est pas conforme à l'esprit de cette directive. Ainsi il n'est pas évident que la protection de certaines espèces passe par des exigences de calendrier. Mieux vaut raisonner, pour les oiseaux migrateurs, en termes de prélèvements sur une zone dépassant largement l'Europe. Nous avons besoin pour cela d'un juge arbitre qui possède une connaissance scientifique incontestable des espèces. Comme je le propose par un amendement, l'Europe pourrait créer une telle structure devant laquelle tout le monde devrait s'incliner. Le Gouvernement saisira-t-il l'occasion de la présidence française pour mettre en place un outil européen de suivi scientifique des oiseaux migrateurs ? En attendant, il faut maintenir l'essentiel du dispositif contenu dans la loi de 1998.

Le dialogue et la négociation demeureront impossibles avec ceux qui, derrière telle ou telle critique, veulent en définitive la disparition de la chasse. L'élaboration de ce projet aurait pu permettre de sortir de l'impasse, comme dans d'autres pays où la chasse a fait l'objet d'un accord entre chasseurs et écologistes. Votre texte ne va pas dans ce sens. Il constitue une occasion manquée, et c'est pourquoi je ne le voterai pas (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL).

M. Jean-Pierre Dufau - L'occasion est bonne de relire la fable de La Fontaine, « Le rat des villes et le rat des champs ». En effet, opposer chasseurs et non-chasseurs, se focaliser sur la question des dates, invoquer des contraintes juridiques, ne doit pas être l'occasion de régler des comptes. Aussi, gardons-nous de traiter de la chasse seulement en juristes, et mesurons-en les enjeux politiques et sociaux.

Il est dommage que la directive soit transcrite aussi tardivement. Mais sachons gré au Gouvernement d'avoir eu le courage de s'attaquer au problème. Grâce au travail de notre collègue Patriat, nous pouvons débattre de la pratique d'une chasse moderne, responsable et apaisée.

Aujourd'hui, 80 % de nos concitoyens vivent sur 20 % du territoire national. Les représentations sociales de la nature, de la faune et de la chasse ont donc changé.

Dans les zones péri-urbaines, des conflits d'usage apparaissent pour l'utilisation des espaces. Ce texte saura, aussi, répondre aux attentes des urbains, par exemple avec le jour de non-chasse.

Il convient pour autant de ne pas mépriser les zones rurales où les rapports à la nature, à l'espace et au temps ne sont pas les mêmes. Evitons d'approfondir le fossé entre ville et campagne.

La ruralité est en crise. Or, la chasse maintient un lien social dans le monde rural. Elle contribue à l'aménagement et à la gestion durable. Faut-il mentionner le rôle des chasseurs, mais aussi des agriculteurs à l'occasion de la tempête ? Un aménagement équilibré du territoire passe par une présence active au c_ur des espaces ruraux.

La chasse a été victime de certains excès de la modernisation de l'agriculture. La raréfaction des zones humides en est la preuve la plus manifeste.

Les chasseurs n'ont-ils pas été aussi victimes de la fermeture de certains espaces, voire de leur « privatisation » ? Là encore, veillons à ne pas faire naître une fracture sociale entre chasse mondaine et chasse populaire. Pour beaucoup de nos concitoyens la chasse n'est pas seulement un droit, c'est un espace de liberté issu de la Révolution.

Le texte permettra aux chasseurs de ne pas apparaître comme de simples consommateurs, mais d'être de véritables gestionnaires. Des avancées significatives vont dans ce sens. Au-delà de ce texte, les chasseurs eux-mêmes sont déjà à l'origine d'initiatives en matière de sécurité, d'aménagement de réserves... Le monde de la chasse sait évoluer.

Dès lors, les propositions relatives aux dates et la légalisation maîtrisée de la chasse de nuit par exemple seront le résultat d'un nécessaire compromis. Mais notre vote sera aussi le mandat explicite donné au Gouvernement pour négocier auprès des autorités européennes, afin d'obtenir des dérogations qui correspondent à des réalités locales. D'autres pays de l'Union ont su en bénéficier, sans doute parce qu'ils avaient transcrit la directive avant nous.

Que le Gouvernement veille à ne pas renforcer l'incompréhension entre zones rurales et urbaines et donc à faire preuve d'ouverture envers les amendements responsables. Paraphrasant Alphonse Allais, je dirais qu'il ne faut pas céder à la tentation de mettre les fantasmes des villes à la campagne.

Puisse cette loi sur la chasse rétablir entre toutes les parties un peu d'urbanité (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste).

M. Jean Auclair - Diviser pour régner, telle semble être votre devise, Madame la ministre. Vous allez réaliser l'exploit de légaliser la chasse aux gibiers d'eau tout en réduisant l'amplitude du temps de chasse ! En effet, vous allez retarder la fermeture et avancer l'ouverture ; de surcroît, vous instaurez un jour de non-chasse et vous abolissez la loi Verdeille. Donc, vous prenez d'une main et reprenez de l'autre.

Une loi chasse aurait dû être faite pour les chasseurs. Eh bien, non, elle est faite contre eux et même plutôt faite pour les anti-chasse. Il n'y a qu'à lire ce projet pour voir qu'il a été rédigé avec la volonté de limiter peu à peu le droit de chasse.

La chasse aux gibiers d'eau en est un parfait exemple. Autoritairement, vous avez retardé l'ouverture et avancé la fermeture. De même pour le pigeon et la bécasse. Après avoir écouté attentivement votre intervention, je ne peux que dénoncer votre langue de bois, à moins que votre discours n'ait été que l'expression de votre inconscience, sinon de votre perversité (Protestations sur les bancs du groupe RCV et du groupe socialiste). Mais les chasseurs ne sont pas des demeurés. Ils ne demandaient rien d'autre que le statu quo. Mais au nom d'une idéologie sectaire, vous avez engagé un processus vicieux qui ne tend qu'à la disparition progressive de la chasse.

M. François Patriat, rapporteur de la commission de la production - Tout en nuance !

M. Jean Auclair - Et ce ne sont pas vos références à une directive européenne, qui ne fait d'ailleurs que des recommandations, qui pourront légitimer les mesures que vous préconisez.

Ce projet ne répond qu'à des intérêts politiques, au mépris de ceux d'un million et demi de chasseurs. Vous ne cherchez qu'à faire plaisir à vos amis intégristes Verts. Quant aux socialistes, ils manquent totalement de considération pour leurs alliés communistes.

Je note que ce texte concerne essentiellement les départements maritimes, où l'on chasse le gibier d'eau, alors que ceux de l'intérieur ne sont évoqués que pour être pénalisés. Vous voulez fermer la chasse au 31 janvier alors que la directive européenne n'aborde même pas le sujet. En 1998, déjà, vos amis anti-chasse avaient fait avancer la date de fermeture au dernier jour de février. Demain, qu'en sera-t-il ?

Cette date a été autoritairement arrêtée par des technocrates inspirés par la haine des chasseurs et qui n'ont jamais vu un canard, un pigeon ou une bécasse (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste). Ils ne connaissent pas les habitudes des migrateurs qui remontent des pays chauds, gavés de nourriture et nullement épuisés par un voyage qu'ils font par étapes. Ce sont des oiseaux sauvages, pas des canaris ou des perroquets d'agrément arrivant sous les lambris dorés de la République comme vos amis intégristes et sectaires ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste)

Savez-vous que les pigeons sont chassés jusqu'au dernier jour de février au Portugal, en Espagne, en Belgique, au Luxembourg et en Grèce ? Jusqu'au 15 avril en Suède, jusqu'au 30 avril en Allemagne et en Autriche, toute l'année au Royaume-Uni ? Nous demandons que la date de fermeture soit fixée par la loi au dernier jour de février pour les pigeons et les bécasses.

Si vous voulez donner un signe d'apaisement, Madame la ministre, faites valoir le principe de subsidiarité comme l'a fait M. Glavany quand il a décrété l'embargo sur le b_uf britannique.

Les oiseaux migrateurs ne peuvent être chassés que quand ils sont là. Dans le Limousin, ils passent en février et ils ne vont pas changer leurs habitudes en fonction de votre loi.

Je suis respectueux du droit de propriété, mais dans un département comme la Creuse, l'abolition de la loi Verdeille va susciter bien des conflits, par exemple quand des chasseurs en chien courant seront amenés à passer sur des propriétés interdites à la chasse. Nous assisterons impuissants à des affrontements et nous verrons d'un côté des propriétaires continuer à chasser librement, de l'autre des ACCA qui s'attacheront à faire respecter le plan de chasse. Et le chasseur devra être plus attentif au terrain où il met les pieds qu'à son chien ou au gibier.

M. Jean-Pierre Brard - Eh oui !

M. Jean Auclair - Sur les propriétés de non-chasse, il faudra procéder à des battues administratives pour éliminer des animaux en trop grand nombre. C'est une aberration.

En Limousin, la chasse est un sport populaire et démocratique. C'est tout de même un paradoxe que des gens de gauche, prétendus champions de l'égalité, veuillent faire de la chasse un loisir réservé aux riches. Vous avez d'ailleurs commencé puisque l'an dernier, le permis a augmenté de 14,5 % et qu'il augmentera cette année de 8,5 %.

Cette loi va sonner le glas des ACCA mais aussi celui du partage de la nature car les « vététistes », les ramasseurs de champignons et les randonneurs se trouvent en général toujours chez quelqu'un quand ils sont dans la nature. Elle met aussi à mal les fédérations, qui vont devenir un syndicat de porteurs de fusils.

Cette loi transpire l'idéologie socialiste : tout réglementer alors que la nature est un espace de liberté. Mais nous sommes à l'affût, Mesdames et Messieurs de la majorité (Exclamations et rires sur les bancs du groupe socialiste) et nous verrons si vous allez faire comme en commission en rejetant tous nos amendements. Allez-vous vous ressaisir ou bien vous mettre au « down » devant votre ministre anti-chasse comme des toutous bien dressés ? (Quelques applaudissements sur les bancs du groupe du RPR)

Mme Monique Denise - Ce projet, je l'espère, va favoriser un compromis aussi large que possible entre chasseurs et non-chasseurs, grâce à un texte qui rassure les uns tout en garantissant aux autres l'exercice d'un loisir auquel ils sont attachés depuis très longtemps -tradition conviviale d'un côté, respect de la qualité de vie, de l'autre. Le rapport de François Patriat est à cet égard exemplaire.

La chasse a le droit d'être relégitimée dans le cadre de ce que notre rapporteur a qualifié de chasse « responsable et apaisée ». Mais permettez-moi d'évoquer à nouveau les sujets qui fâchent.

S'agissant des dates d'ouverture et de fermeture pour la chasse au gibier d'eau, Mme la ministre vient de nous assurer que les décrets d'application sont prêts et qu'ils assurent cinq mois de chasse, six par dérogation. Dont acte.

Le jour de non-chasse symbolique ? Il est déjà effectif dans soixante-dix départements et, que ce soit le mercredi ou un autre jour, il permettra -peut-être- d'éviter à un gentil joggeur de se retrouver en pleine battue où l'on tire à balles. La chasse à la passée ? Elle sera possible deux heures avant et deux heures après le coucher du soleil (Exclamations sur les bancs du groupe du RPR et du groupe UDF). C'est ce que nous proposons de voter par amendements. La chasse de nuit ? Elle sera légalisée dans vingt départements où la hutte est une pratique traditionnelle reconnue.

M. de Courson a parlé d'amour tout à l'heure. Je parlerai peut-être de plaisir. (« Ah ! » sur de nombreux bancs).

M. le rapporteur - Cela peut aller ensemble.

Mme Monique Denise - Plaisir de voir un huttier atteler ses appelants. Moment magique où il met en batterie ses canettes les plus bavardes en fonction du vent, du plan d'eau et aussi parfois de l'habileté présumée des chasseurs derrière les créneaux de la hutte.

Et il n'y a pas que la hutte. La chasse en plaine, au cul levé derrière le chien que vous avez dressé pendant des mois, est également un grand moment. Regardons-le quêter en lacets, marquer un bel arrêt et si le maître a manqué la perdrix ou le lièvre, signifier sa désapprobation ; et si le gibier est touché dans un grand champ de betteraves, suivons encore le retriever qui rapportera le gibier à son maître. Plaisirs simples que d'observer le travail du chien de l'efficacité du tireur, qui sera brocardé pendant des mois par ses copains pour un tir malheureux.

La chasse n'est pas que prélèvements, dates d'ouverture et de fermeture, heures de nuit... Elle est surtout ce plaisir convivial, ce sport traditionnel que nous nous devons de préserver (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur plusieurs bancs du groupe UDF, du groupe du RPR et du groupe DL).

M. François Baroin - Ainsi donc, Madame Voynet, vous n'aimez pas la chasse. C'est votre droit et je le respecte. Mais vous êtes ministre de l'environnement et, à ce titre, garante de la poursuite des efforts produits par le monde de la chasse. Votre souhait serait qu'on en termine avec une pratique que vous ne comprenez pas. Le grand mérite du rapport Patriat est de ne pas aller dans votre sens mais les compromis qu'il propose ne sont pas pour autant acceptables.

Vos amis du parti vert se drapent dans la vertu environnementale et voudraient percevoir des droits d'auteur chaque fois qu'il est question d'environnement (Exclamations sur les bancs du groupe RCV). Mais croyez-vous qu'il ait fallu attendre la constitution d'un parti vert pour que les chasseurs se préoccupent de l'environnement et de la protection de la faune sauvage ?

Du fond des âges, la chasse est un art qui s'ancre au plus profond de la collectivité nationale, de la vie de la République, et qui bat au rythme du c_ur de la France rurale. En vous en prenant à elle, c'est bien un acquis républicain, d'autres diraient social, que vous menacez.

Alors que nous allons bientôt célébrer le centenaire de la loi de 1901, pilier de la démocratie participative, il serait tout de même paradoxal de s'attaquer à une organisation populaire constituée au moins pour moitié d'ouvriers, d'employés, d'agriculteurs et de professions intermédiaires qui contribue à l'abolition des barrières sociales. La chasse est aussi un loisir qui s'autofinance et qui participe grandement à l'entretien des campagnes. Une étude de la Cofremca le montre : les Français reconnaissent à la chasse une utilité sociale. Elle assure la régulation des espèces, contribue à la protection des espaces naturels, joue un rôle économique et anime les communes rurales.

On aurait pu se fixer pour objectifs de conforter les fédérations de chasseurs, d'officialiser le Conseil national de la chasse et d'édicter des règles claires pour mettre fin au contentieux. Une charte de la chasse aurait été utile. Ce sont là des propositions raisonnables, nullement partisanes, et de nombreux collègues du groupe RPR ont déposé des amendements dans cet esprit, à l'article 10 tout particulièrement.

J'aurais pu parler longuement des incohérences entre ce projet et l'aménagement du territoire, dont vous avez pourtant la responsabilité, Madame la ministre. J'aurais pu parler du jour sans chasse que vous voulez imposer pour permettre aux enfants de voir des animaux, alors que, paradoxalement, c'est grâce aux chasseurs et à leurs plans de chasse rigoureux que le grand gibier prospère. J'aurais pu évoquer l'administration bureaucratique de la chasse, la question des dates d'ouverture et de fermeture ou votre volonté d'en finir avec la chasse au gibier d'eau.

Mais je voulais simplement vous parler de la République et de ses acquis. Les chasseurs tolèrent ceux qui ne les comprennent pas. Ils auraient pu accepter une loi d'équilibre ; ils ne veulent pas d'un texte idéologique (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL).

M. Jean Espilondo - M. Baroin vient de nous donner une leçon de maturité républicaine...

Plusieurs députés RPR - Oui !

M. Jean Espilondo - Je demande à M. Baroin s'il considère comme républicains les propos outranciers et la conclusion indigne de son collègue Auclair ? (Interruptions sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL)

Ce projet vise à l'équilibre : entre chasseurs et non chasseurs, entre la passion de la chasse et la préservation de l'environnement, entre la France et les institutions européennes. Nulle outrance ou invective ne me convaincra que ces équilibres ne peuvent être atteints, par le dialogue et la détermination.

L'équilibre, des événements récents nous l'ont rappelé, est une condition de l'action politique.

Ce projet, par sa densité, témoigne de l'effort accompli pour parvenir au meilleur compromis.

A mes yeux de chasseur et de citoyen, la chasse et l'écologie se retrouvent dans un amour commun de la nature. C'est ensemble qu'elles affrontent les effets des pollutions industrielles. Plutôt que de les opposer dans un face à face fantasmatique, recherchons l'interface constructive (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, rires sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL). C'est tout de même mieux que ce que disait M. Auclair !

M. le Président - Poursuivez sans provoquer vos collègues, Monsieur Espilondo.

M. Jean Espilondo - Les chasseurs comme les pêcheurs ont conscience qu'ils ne peuvent se permettre de laisser la ressource naturelle se tarir. Cessons donc de dépeindre les chasseurs comme des irresponsables assoiffés de sang... (Interruptions sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL)...même si, à entendre M. Auclair, on finirait par prendre cette caricature pour une réalité (Sourires sur divers bancs du groupe socialiste)

Cessons de considérer la chasse comme une survivance barbare héritée des âges obscurs. La chasse, dans mon département des Pyrénées-Atlantiques, est ce qu'on appelle une culture. La chasse va bien au-delà des chasseurs. Elle transmet des valeurs, elle entretient des liens sociaux, elle fait vivre des activités économiques.

Au Pays basque, la chasse à la palombe est une véritable fête populaire. Elle repose sur un mythe ancestral : le jour du grand passage.

Priver les amateurs de chasser ce jour-là, ce ne serait pas tuer une pratique, ce serait tuer un rêve ! Je vous le dis solennellement mes chers collègues, je ne m'en rendrai pas responsable (Interruptions sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL).

La chasse à la palombe est, depuis des générations, un plaisir partagé entre voisins, parents et amis. Je refuse qu'elle disparaisse. C'est pourquoi, tout en reconnaissant la nécessité d'instituer un jour de non-chasse, j'ai déposé un amendement visant à prévoir une exception pour la chasse à la palombe. Celle-ci se concentre en effet sur deux ou trois jours. Lui appliquer la règle générale serait la réduire à néant. Je vous demande, Madame la ministre, d'entendre cette demande que je vous adresse au nom de milliers de passionnés.

Ce n'est pas en abolissant les cultures locales qu'on fera progresser la nation. A l'heure de l'intégration européenne et de la mondialisation des échanges, ce sont ces cultures locales qui permettront à la France de garder sa singularité (Interruptions sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL).

Pourquoi le Gouvernement, qui défend le cinéma français au nom de l'exception culturelle, renoncerait-il à la richesse de ses terroirs ? La réalité est-elle moins intéressante que la fiction ? Je ne le crois pas.

C'est pourquoi j'ai milité et je continuerai à militer pour que soient reconnues dans la loi les cultures locales qui font l'identité de notre pays. C'est en consacrant les différences que ce texte trouvera son unité.

M. le Président - Je vous demande de conclure.

M. Jean Espilondo - Rien ne serait pire que d'adopter des positions extrêmes. Pour autant, son souci d'équilibre ne doit pas conduire cette Assemblée à un exercice d'équilibrisme : plus dure serait la chute. Arbitrer entre les surenchères, c'est interdire de rechercher l'intérêt général.

Je souhaite que nous parvenions à jeter les bases d'une chasse libre et responsable (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe socialiste et du groupe communiste).

M. le Président - Monsieur Espilondo, vous avez doublé votre temps de parole. Ce débat, difficile, ne se déroulera dans de bonnes conditions que si chaque orateur y met du sien.

M. Yvon Montané - Je ne suis pas chasseur. Je représente pourtant un département rural où on affectionne ces loisirs grégaires que sont la chasse, la pêche, les quilles, un département dont beaucoup d'habitants sont atteints d'une maladie incurable qu'on appelle joliment, chez nous, le mal bleu. Non seulement je les comprends, mais je les soutiens, car une journée de chasse, même si on n'est pas chasseur, est toujours une tranche de vie. Certains orateurs ont eu raison de voir en la chasse une vraie culture.

Je veux saluer le travail accompli par le Gouvernement et surtout par François Patriat (Sourire). Notre collègue en effet a pris le temps de rencontrer les responsables des fédérations de chasse. Ce Gouvernement a eu le courage d'ouvrir le débat, de s'attaquer au problème dans sa globalité et dans sa diversité.

Que les choses soient claires : il n'est pas question d'interdire la chasse qui fait partie de notre patrimoine mais de tendre à une chasse moderne, apaisée et respectueuse de tous les usagers de la nature, qui soit aussi respectueuse de la réglementation européenne. Amoureux de la nature et défenseurs de la chasse devront se retrouver dans la méthode comme dans le texte qui nous sont présentés. Pas d'angélisme, cependant. Il reste encore des améliorations à apporter et j'ose espérer que notre débat sera constructif en se détournant des empoignades et des surenchères où la chasse serait la grande perdante.

S'agissant des dates d'ouverture et de fermeture des chasses, il est essentiel de reconnaître qu'il existe dans notre pays différentes formes de chasse et que chacune a ses propres traditions.

Un compromis semble possible avec une ouverture de la mi-août à la mi-février. Sans changer la durée totale d'ouverture -qui est de six mois- il semble souhaitable de laisser la possibilité aux préfets d'avancer ou de reculer les dates d'ouverture et de fermeture afin de respecter les différentes traditions cynégétiques. Il est en effet indispensable de prendre en compte les coutumes locales qui sont le plus souvent le fruit d'un compromis et qui respectent la spécificité des espèces chassées. Il en va de même du jour de non-chasse, qu'il convient d'appliquer département par département, après avoir consulté les conseils départementaux de la chasse. Plusieurs départements ont déjà institué des jours de non-chasse conformes aux réalités locales et fixer le mercredi comme jour de non-chasse sans en tenir compte serait malvenu.

Enfin, il y a lieu de se réjouir que le texte conforte les missions des fédérations de chasse et réaffirme que le pouvoir cynégétique leur appartient. Une fois amendé, il constituera une loi importante pour une chasse moderne, équilibrée et durable. Nous serons aussi attentifs à ses décrets d'application, afin qu'ils prennent en compte la diversité de la chasse telle qu'elle se pratique dans notre pays. Veillons à éviter que ce qui est permis outre Pyrénées soit interdit ici ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste)

Mme Geneviève Perrin-Gaillard - Avant de vous dire que je fonde quelques espoirs dans ce texte, je souhaite rappeler que je n'ai pas voté la loi sur les oiseaux migrateurs : mes convictions en ce domaine n'ont pas changé et je défie quiconque de les ébranler.

Si au cours de la discussion le texte ne s'éloigne pas de l'esprit du texte de notre rapporteur, nous préserverons son enjeu essentiel qui est d'instaurer une gestion rigoureuse des espaces et des espèces. Encore faut-il que nous parvenions à nous détourner des propositions excessives qui sont à l'origine de tous les conflits et dont plusieurs orateurs n'ont pas été avares depuis le début de la soirée.

Je suis de ceux qui considèrent que la chasse doit jouir d'une liberté relative et d'une reconnaissance culturelle tout en s'intégrant dans un contexte d'ensemble qui ne se résume pas à la compatibilité de sa réglementation avec le droit communautaire. Il y va aussi du respect de la nature, de la reconnaissance du droit de non-chasse et de la liberté d'accès au patrimoine naturel de l'ensemble de ses usagers.

Dans l'esprit du rapport Patriat, ce texte peut consacrer la chasse-gestion, gestion des espaces et des effectifs. Au-delà, si les chasseurs revendiquent une légitimité sociale en tant que groupe constitué, il faut qu'ils assument leurs responsabilités de gestionnaires devant l'ensemble de la société. S'agissant des plans de chasse et de gestion, la gestion des effectifs cynégétiques doit se définir par une approche dynamique, qui ne se borne pas à fixer un niveau de prélèvement en fonction du renouvellement souhaité. Il convient aussi d'intégrer des interactions qui lient les espèces gibiers aux habitats naturels qui hébergent aussi des espèces non chassables. En conséquence le taux de prélèvement du plan de chasse ne peut méconnaître un prélèvement concurrentiel des prédateurs naturels et résulter exclusivement du seuil financier de supportabilité de la pression exercée par le gibier sur l'agro-sylvosystème.

De même, la valeur intrinsèque de la faune sauvage ne devant pas s'apprécier à l'aune de sa valeur cynégétique, la gestion des ressources en gibier ne doit pas s'exercer au détriment des espèces non chassables. J'aurais à cet égard souhaité que l'on dépoussière le concept si peu scientifique de « nuisible et malfaisant », en fondant les destructions sur une approche quantitative.

Il convient également de se demander si l'indemnisation des dégâts du gibier doit continuer de reposer exclusivement sur les chasseurs.

En matière de gestion des espaces, nous pouvons nous féliciter de la reconnaissance du droit de non-chasse mais il est indispensable de pousser la réflexion sur le droit de suite, afin d'éviter tout conflit d'interprétation. Il nous faut ainsi considérer les difficultés de qualification d'un acte, qui pourrait n'être qu'un simple exercice d'un droit de suite, mais qui aurait toute l'apparence d'une action de chasse là où elles sont interdites. Je suis donc favorable à une application souple, permettant au propriétaire d'autoriser, pour une période déterminée, des prélèvements correctifs d'une prolifération d'espèces, par chasse ou par piégeage.

Tout en remerciant Mme la ministre et M. le rapporteur pour le temps qu'ils ont consacré à ce dossier, je souhaite que nous parvenions, dans un domaine aussi passionnel, à un texte sage et équilibré. Notre capacité à transmettre aux générations futures une faune riche et variée en dépend (Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste et du groupe RCV).

La discussion générale est close.

Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement - Personne ici n'a pris position en faveur de l'interdiction de la chasse et il convient donc de chasser ce fantasme qui conduit certains à instruire de faux procès. Parlons plutôt du véritable enjeu de ce texte, qui est de définir les conditions d'une coexistence harmonieuse entre les défenseurs de la chasse et ceux qui souhaiteraient en limiter la pratique. Il s'agit aussi d'adapter notre législation, pour la mettre en conformité avec le droit européen. Notre ambition est de réconcilier chasseurs et non chasseurs autour d'un texte équilibré, qui organise une chasse moderne et apaisée.

M. Bataille a démontré avec élégance qu'il était possible, sans préjudice des droits des chasseurs, de trouver des compromis susceptibles d'apaiser les consciences. Tel est le sens notamment de l'article 10, qui tend à trancher de manière définitive le conflit ancien sur les dates d'ouverture et de fermeture de la chasse. M. Patriat a rappelé l'issue positive qui avait été trouvée pour le résoudre. Tout en soulignant la nécessité d'amender le texte, les députés de la majorité plurielle ont appuyé la volonté du Gouvernement de moderniser le droit de la chasse (Exclamations sur les bancs du groupe UDF, du groupe du RPR et du groupe DL, « Maxime ! »). Puis j'ai entendu des parlementaires de l'opposition proclamer que le dialogue était nécessaire, qu'il fallait travailler à une réconciliation dans le respect mutuel, qu'il était hors de question d'en rester au statu quo... mais qu'il ne fallait surtout rien changer ! Est-ce bien sérieux ? Et peut-on raisonnablement présenter la loi de 1998 comme la solution à tous les problèmes ?

S'agissant de l'arrêt du 3 décembre dernier, pour soutenir que j'aurais dû fixer des décisions de fermeture plus précoces que ce que prévoit la loi du 3 juillet 1998, je relève que le Conseil d'Etat n'a pas invoqué l'absence de décrets d'application comme certains l'ont dit, mais a considéré qu'en l'état des connaissances scientifiques, les dispositions introduites par cette loi dans l'article L. 224-2, alinéa 2, du code rural sont dans leur quasi-totalité incompatibles avec l'objectif de préservation des espèces posé par l'article 7, paragraphe IV, de la directive du 2 avril 1979, telle que celle-ci a été interprétée par l'arrêt de la Cour de justice des Communautés en date du 19 janvier 1994. Vous en trouverez confirmation dans le rapport, pages 301 à 306 ! Et c'est pourquoi ceux qui proposent aujourd'hui de reconduire ce dispositif ou d'inscrire dans la loi des dates échelonnées nous conduisent dans une impasse ! Le Gouvernement préfère donc, Monsieur de Courson, explorer une autre voie, certes étroite, entre le déni des problèmes et la fuite en avant. Nous avons ainsi préféré rappeler dans la loi les principes de la directive -laquelle, en effet, ne fixe pas de dates- et de fixer les dates par décret. Quant à ceux qui nous invitent à réviser la directive, ils auraient été bien inspirés de le faire lorsqu'ils étaient au gouvernement ! (Exclamations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL) C'est parce qu'ils n'y parvenaient pas que le gouvernement de l'époque a fait adopter la loi de 1994, qui n'a rien réglé. De fait, pour réviser une directive, il faut être quinze. Or quatorze pays européens ont transposé celle de 1979, quitte à demander des dérogations.

A ce propos, Monsieur Alaize, je n'exclus pas de demander moi aussi des dérogations pour les espèces en bon état de conservation mais cela suppose une pacification des relations entre chasseurs et non chasseurs, la Commission n'accordant en général ces dérogations qu'avec l'accord des deux parties.

Le Parlement européen, quant à lui, est devenu un partenaire dont on ne peut faire abstraction depuis que la co-décision a été étendue au domaine de l'environnement. Or il a durci sa position, confirmant son choix d'une date de fermeture unique, fixée au 31 janvier -ce qui ne répond pas au souhait de la majorité d'entre vous, ai-je cru comprendre.

S'agissant de la chasse de nuit, je ne répéterai pas la réponse que j'ai faite il y a un mois à M. de Courson, mais je dirai quelques mots du débat entre dépénalisation et légalisation. Je vous invite à vous reporter à ce propos au volume de légistique de M. Rémy pour les précédents mais le Conseil d'Etat comme le secrétariat général du Gouvernement, que j'ai consultés, m'ont tous deux mise en garde contre le risque de contentieux communautaire, qu'ils estiment plus élevé en cas de légalisation pure et simple. Je ne cherche pas à polémiquer, mais à régler les problèmes. La chasse de nuit était interdite depuis plusieurs siècles (Exclamations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL) : je propose, dans un esprit pragmatique, une dépénalisation, suivie au bout de cinq ans d'une évaluation, ce qui devrait permettre de convaincre la Commission. Comment peut-on voir là une mesure restrictive ?

En ce qui concerne le jour sans chasse, j'ai entendu plaider pour une certaine souplesse. Or, Monsieur André, l'article 10 permet à l'autorité administrative de fixer ce jour un autre jour que le mercredi, en fonction des circonstances locales (Exclamations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL). N'auriez-vous pas lu le projet ? (Mêmes mouvements)

D'autre part, la proposition de M. Desallangre visant à faire courir ce jour de 6 heures du matin au lendemain, même heure, me paraît adéquate.

M. Le Nay a souhaité qu'on distingue clairement entre fonds publics, réservés aux établissements publics, et fonds privés, qui peuvent financer les associations. C'est aussi ma position et le rapport Cailleteau va dans ce sens également.

MM. Lenoir et Baroin, reprenant le travail de COFREMCA-Sociovision, ont été très discrets sur la première partie de ce rapport, où il est fait état des interrogations des chasseurs eux-mêmes sur les circuits de financement de la chasse. Quand on cite, il faut citer complètement !

S'agissant de la « nomination » des présidents des fédérations de chasse par le Gouvernement, je rappelle que le ministre de l'environnement ne faisait, jusqu'à une date récente, que valider les propositions des fédérations. Depuis la déconcentration cependant, c'est aux préfets qu'appartient cette décision, qui permet d'apprécier la régularité des procédures et la rigueur des candidats. En ce qui me concerne, la validation n'a d'ailleurs fait question que dans deux cas : une fois, un président pressenti avait refusé d'organiser le permis de chasse ; dans l'autre, le candidat avait été condamné pour un fait de droit commun...

M. Martin-Lalande, enfin, a fait deux propositions que, nonobstant son intention de voter contre le projet, je jugerai tout-à-fait intéressantes : elles ont trait à l'organisation d'un suivi scientifique des migrateurs et à l'aménagement d'un permis provisoire pour les étrangers.

Bien entendu, je répondrai plus en détail sur certains points au cours de la discussion des articles (Applaudissements sur les bancs du groupe RCV et sur plusieurs bancs du groupe socialiste).

M. François Patriat, rapporteur de la commission de la production - Je suis quelque peu choqué qu'on ait insisté sur de prétendues différences entre mon rapport et le texte du projet. Je renvoie tous ceux qui se sont essayés à cette démonstration aux pages 10 à 16 de mon rapport : ils verront qu'entre le texte amendé et le rapport Patriat, la concordance est bien plus grande qu'ils ne le disent ! (Exclamations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL)

N'inversons pas non plus la charge de la preuve ! M. Ferrand, par exemple, s'est exclamé à plusieurs reprises : ne changeons rien, comme si nous n'étions pas devant des difficultés juridiques insurmontables en l'état actuel de la loi. Cette attitude revient à conduire la chasse dans le mur (Protestations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL ; applaudissements sur les bancs du groupe socialiste) : condamnée par une majorité de Français, elle le sera ensuite par la justice européenne ! (Mêmes mouvements) Ceux qui se prétendent les défenseurs de la chasse pourraient bien en être les fossoyeurs, à force de conservatisme outré... (Mêmes mouvements)

Je ne voudrais pas d'autre part qu'après avoir refusé de voter cette loi, Messieurs, vous ne vous appropriez demain le bénéfice des amendements déposés par la majorité ! Les seuls, en fait, qui auront défendu une chasse responsable et apaisée, seront ceux qui auront approuvé ce projet après l'avoir amélioré (Mêmes mouvements).

Les rappels révolutionnaires de M. de Courson m'ont amusé : comme si la Révolution s'était faite de son côté de l'Assemblée ! (Mêmes mouvements) Je préfère à tout prendre la logique de M. Martin-Lalande, dont trois questions sur cinq ont reçu une réponse positive du Gouvernement, mais qui annonce qu'il ne votera pas le projet !

D'autre part, Monsieur de Courson, la nuit du 4 août, le droit de chasse n'a pas été accordé à tous, mais seulement aux propriétaires !

A ceux enfin qui, comme M. Baroin, décrient l'attitude de la ministre comme une attitude idéologique, j'opposerai le télex de l'AFP annonçant que quatre écologistes dénoncent son projet ! Vous voyez bien qu'elle a le souci de faire des concessions et qu'elle entend favoriser un large accord ! (Exclamations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL ; applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. le Président - J'appelle maintenant, dans les conditions fixées à l'article 91, alinéa 9, du Règlement, les articles du projet de loi dans le texte du Gouvernement.

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AVANT L'ARTICLE PREMIER

M. le Rapporteur - L'amendement 53 est purement rédactionnel.

L'amendement 53, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Charles de Courson - L'amendement 319 a été déposé par le président Giscard d'Estaing (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste) avec le soutien de l'ensemble du groupe UDF. Si nous avons ici, depuis tant d'années, de si nombreux débats sur l'ouverture et la fermeture de la chasse, c'est parce qu'il existe un problème de délimitation du droit national et du droit européen : ce ne serait pas le cas si, en vertu du principe de subsidiarité, le droit communautaire fixait les principes applicables à la seule chasse aux oiseaux migratoires, la compétence restant nationale pour le reste.

Nous demandons par conséquent au Gouvernement d'adresser au Parlement, avant la fin de l'année, un rapport sur les initiatives qu'il aura prises, notamment à la faveur de la présidence française de l'Union européenne, pour obtenir de la Commission européenne une telle distinction. Si nous y réussissons, nous aurons fait grandement progresser l'articulation entre droit national et droit communautaire, ainsi que la solution durable du problème qui nous occupe. Sinon, nous resterons, quelle que soit la position que nous aurons adoptée à l'issue de cette discussion, à la merci de tous les recours possibles devant la Cour de justice. Je dis cela au nom du groupe UDF, dont les membres ont toujours été de fervents partisans de la construction européenne (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF et sur plusieurs bancs du groupe du RPR)

M. le Rapporteur - La commission n'a pas examiné l'amendement, mais, pour montrer son ouverture d'esprit, qui fait contraste avec la fermeture d'esprit de certains d'entre vous (Protestations sur plusieurs bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL), j'accepte à titre personnel cet amendement signé d'une personnalité éminente qui a souhaité inscrire son nom avant l'article premier... (« Très bien ! » sur les bancs du groupe UDF)

Mme la Ministre - Il ressort clairement de la lecture de la directive du 2 avril 1979 qu'elle ne concerne pas seulement les oiseaux migrateurs, et nous savons, je crois, ce qu'il en est des perspectives de renégociation de cette directive. Cela dit, je ne suis pas contre l'idée d'en faire la demande à la Commission, ni contre celle de consigner dans un rapport les initiatives prises en ce sens.

L'amendement 319, mis aux voix, est adopté.

M. François Baroin - Nous avons, nous aussi, un esprit d'ouverture et de sérieux, et je ne considère pas que le mot « idéologue » soit insultant. Les Verts ont le droit d'avoir des idées anti-chasse ; ils ont une ministre pour les défendre, et nous sommes là pour en discuter.

L'amendement 320, directement inspiré par l'article 174 du traité de l'Union européenne, par une communication de la Commission européenne, par un rapport de l'OCDE et par les conclusions d'un commissaire du gouvernement devant le Conseil d'Etat, vise à reconnaître, à l'article L. 200-1 du code rural, que chasseurs et pêcheurs contribuent, par des prélèvements raisonnés sur les espèces sauvages, à la gestion équilibrée des écosystèmes.

M. le Rapporteur - J'avais moi-même déposé, en commission, un amendement semblable, que j'ai retiré car les fédérations de pêche m'ont fait observer qu'une telle disposition avait davantage sa place à l'article L.220-1.

Mme la Ministre - En effet, c'est à cet article qu'est recherché le parallèle entre chasse et pêche. J'en profite pour dire à M. Baroin que je suis assez grande pour défendre, à l'occasion, mes convictions personnelles : ici, je représente le Gouvernement, et celles-ci ne sont pas en cause (Exclamations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL).

M. Noël Mamère - Je soutiens la position du rapporteur et réponds à mon tour à M. Baroin que le brouhaha a dû l'empêcher d'entendre mon intervention dans la discussion générale : j'ai dit que les Verts, contrairement à certaines caricatures douteuses qui en sont faites, n'ont jamais été « anti-chasse » (Exclamations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL), mais partisans d'une chasse équilibrée et raisonnée, et favorables à l'adoption d'une grande loi garantissant l'exercice du droit de chasse.

L'amendement 320, mis aux voix, n'est pas adopté.

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ARTICLE PREMIER

M. Michel Vauzelle - Avant de parler de la philosophie de cet article, je tiens à souligner quatre exigences dont la satisfaction sera sans doute déterminante pour le vote de la plupart d'entre nous : la protection de la chasse de nuit dans vingt départements, dont les Bouches-du-Rhône ; l'autorisation de la chasse à la passée deux heures avant le lever du soleil et deux heures après son coucher ; l'assurance que le jour de non-chasse ne sera pas obligatoirement le mercredi ; celle, enfin, que les dates d'ouverture et de fermeture seront fixées par une décision engageant l'Etat (« Très bien ! » sur de nombreux bancs).

Le point central de notre discussion est, au-delà de la chasse et ainsi que l'a souligné M. Giscard d'Estaing à travers son porte-parole, la prise de décision au sein des institutions européennes. Je suis, comme la plupart d'entre vous, partisan de la construction européenne, mais autant je crois à l'Europe lorsqu'elle rassemble et renforce nos démocraties, nos monnaies, nos économies, nos lois sociales, autant je crois qu'elle risque de dresser contre elles nos peuples chaque fois qu'elle entend régenter nos arts de vivre, dont la diversité fonde non seulement nos identités nationales, mais aussi, face au modèle américain, notre identité européenne. Nous avons le devoir sacré, en tant que représentants de la nation, de protéger tout autant notre patrimoine culturel que notre patrimoine naturel, et par culture je n'entends pas seulement le latin de l'élite, mais aussi nos traditions populaires, qui ne se limitent évidemment pas à la chasse : elles n'expriment pas je ne sais quel nationalisme fermé, replié sur le passé, mais la promesse d'un avenir équilibré et bien vivant.

Il faut qu'à l'avenir l'Union européenne et le Conseil d'Etat n'empiètent plus sur ce qui doit continuer de relever de la souveraineté nationale (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste, du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL).

C'est au nom du droit à la différence nationale et aux différences régionales qu'il faut accepter les dispositions que je viens de rappeler. Non, les chasseurs ne ressemblent pas à la caricature que certains en donnent par démagogie. En Camargue par exemple, ce sont les militants d'un art de vivre, de la sauvegarde de tradition comme les chasses à la passée ou de nuit.

Efforçons-nous de garder, chaque fois que cela est possible, notre identité nationale et nos identités régionales. A l'heure de la mondialisation, gardons l'Europe de directives attentatoires au droit de l'homme de vivre selon le modèle culturel de son choix ! (Applaudissements sur de nombreux bancs).

M. Jean-Pierre Brard - Depuis de nombreuses années, la question des modalités de la chasse dans notre pays soulève un vif débat qui suscite l'étonnement chez nos voisins. D'où vient cette spécificité française dont beaucoup de nos concitoyens se passeraient volontiers ? Certes la France compte un nombre important de chasseurs attachés à un droit qui n'est d'ailleurs pas contesté.

Mais au-delà du million et demi de chasseurs réellement préoccupés de protéger les ressources naturelles, il existe un lobby peu nombreux, mais puissant, et peu regardant sur les moyens, notamment sur l'utilisation juridiquement discutable de moyens financiers provenant des poches de tous les chasseurs (Applaudissements sur les bancs du groupe RCV ; exclamations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL).

Certains prétendus défenseurs de la chasse ont développé leur fonds de commerce politique sur la surenchère et la démagogie. Aussi est-il important que l'article premier introduise la notion de gestion durable du patrimoine.

La surenchère populiste de chasseurs extrémistes constitue un bon filon politique et financier, avec l'exploitation du malaise de certaines zones rurales. Je pense ici au lobby Saint-Josse, que certains députés se sont laissé aller à soutenir. Cette façon d'utiliser ce filon politicien abaisse la politique à un niveau indigne. La justice nous éclairera sur le point financier déjà soulevé par les magistrats de la Cour des comptes. Il n'y a pas grand-chose à espérer pour le débat démocratique de ceux qui ne cessent de manier l'invective, de préférence à connotation sexiste. Certains à droite, et parfois à gauche, se sont faits les relais zélés du lobby de la chasse et nous gratifient périodiquement de textes déséquilibrés et largement illégaux.

Le rapport Patriat a ouvert la voie à un projet équilibré dans sa version initiale. Il serait dangereux que ce travail de plusieurs mois soit dénaturé pour satisfaire les intérêts à courte vue d'une petite minorité, au risque d'encourir la censure des juridictions compétentes. L'apaisement que nombre de collègues affirment souhaiter nécessite d'admettre que notre patrimoine naturel appartient autant aux millions de citadins qui n'ont jamais utilisé un fusil de chasse de leur vie qu'aux adeptes de la chasse. Il serait lamentable que certains collègues munis de leur gibecière cherchent à y cacher les voix d'électeurs, qui du reste ne confondent pas les rodomontades avec la réalité de convictions qui le plus souvent n'existent pas (Applaudissements sur les bancs du groupe RCV).

M. Christian Estrosi - Je veux que figurent dans la loi l'autorisation de la chasse de nuit et les dispositions de 1998 relatives aux dates de chasse des oiseaux migrateurs. Je veux aussi que le Conseil d'Etat cesse d'interpréter des décisions adoptées par les représentants du peuple, et que l'Union européenne ne se mêle pas de nos traditions et de notre mode de vie personnel.

Je suis également partisan de la chasse à la passée et du refus du mercredi de non-chasse.

L'article premier devrait affirmer avec force la reconnaissance de la chasse comme activité d'intérêt général. Or votre texte semble hésitant. La chasse relève pour vous d'une définition technocratique.

M. Jean-Pierre Brard - C'est trop difficile à comprendre pour vous.

M. Christian Estrosi - Oui, comme pour tous les Français de bon sens. Le caractère complexe de cette définition révèle votre malaise à reconnaître à part entière la liberté de chasse dans notre pays. Ces réserves, ces fausses pudeurs me choquent. La chasse ne peut pas être acceptée par la loi subrepticement, un peu honteusement. Nous devons manifester clairement notre volonté de reconnaître la chasse comme une activité à caractère social et économique. La chasse s'inscrit au c_ur de notre histoire et de notre culture. Le droit de chasse est l'un des acquis essentiels de la Révolution. La chasse réunit dans une même passion des personnes d'origines sociales très diverses. Elle est souvent la dernière activité associative dans de nombreuses communes rurales. J'en ai 72 dans ma circonscription. Elle participe au maintien d'activités dans des zones gravement menacées par une désertification largement amplifiée par les lois que vous avez fait voter. La chasse concerne des dizaines de milliers d'emplois.

La chasse possède enfin une fonction écologique. Les chasseurs sont les premiers écologistes de France. Leur relation à la nature se fonde sur une passion authentique, bien éloignée de l'approche bucolique de certains écologistes de salon qui ne voient la nature que depuis leur poste de télévision.

L'article premier est l'occasion de saluer le formidable travail accompli par des générations de chasseurs. Ceux des Alpes-Maritimes ont été dans les années 1950 à l'origine de la création de la réserve du Mercantour, devenu vingt ans plus tard le parc national du Mercantour. Des espaces quasiment désertifiés ont été repeuplés de chamois, de mouflons, de bouquetins, de chevreuils. Ce ne sont pas les écologistes de salon qui ont repeuplé le parc du Mercantour, ce sont les chasseurs des Alpes-Maritimes et leur fédération. Ce capital naturel doit être préservé (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL).

M. André Vauchez - Depuis l'adoption de la loi Verdeille en 1964, le Parlement n'a jamais été saisi d'un projet aussi global sur la chasse. Pendant longtemps, la pratique de la chasse ne posa pas de problèmes particuliers. Mais l'environnement est devenu de plus en plus hostile à la chasse, avec la modification du biotope et des espèces chassées et la transformation de la composition sociologique des ruraux et des habitudes des citadins, enfin avec l'émergence de la réglementation européenne.

Au fil des années, les chasseurs se sont sentis assiégés, les non-chasseurs agressés, et les populations rurales incomprises.

Apaiser, moderniser, gérer de façon durable la chasse démocratique, c'est à quoi tend votre projet.

L'article premier reconnaît le triple volet de la chasse, environnemental, social et économique. Voilà de quoi apaiser ceux qui craignaient que le droit de chasse était menacé.

Votre projet, inspiré du rapport Patriat, réécrit le droit nouveau sur les décombres de l'ancienne législation.

Je suis originaire du Jura, situé dans la Franche-Comté, seule région où les ACCA soient plus nombreuses que les communes, 1826 contre 1785. Les chasseurs de ma région redoutaient que, sur un territoire naturel encore très morcelé, il ne soit plus possible de recréer des ACCA. Votre texte prévoit au contraire cette possibilité, avec des précautions de nature à éviter une nouvelle censure de la Cour européenne des droits de l'homme.

La réaffirmation du droit de chasse se décline dans la pratique des diverses chasses, chacune ayant ses problèmes spécifiques.

L'ambition de ce texte est de faire cohabiter harmonieusement chasseurs et non-chasseurs, les uns et les autres ayant des droits mais aussi des devoirs. Il ouvre ainsi des perspectives durables pour la chasse et devrait apaiser les tensions. Ne laissons pas passer cette occasion que nous offre le Gouvernement.

M. Thierry Mariani - C'est avec mesure et pragmatisme que je souhaiterais aborder ce débat. Le rapport Patriat a montré la nécessité d'adopter une grande loi sur la chasse. L'heure n'est plus, en effet, à l'affrontement idéologique entre les « pro » et « anti » chasse, mais à la réconciliation devant un projet qui respecterait les convictions et les libertés de chacun. Malheureusement, force est de constater, Madame la ministre, que votre projet manque sérieusement d'ambition et souffre de nombreuses lacunes.

Qualifié par les chasseurs comme par les non-chasseurs de « projet bureaucratique », il ne propose qu'une vision à court terme de la chasse. Premier exemple de ce manque d'ambition : le projet ne traite pas de la question épineuse de la chasse de nuit mais botte en touche en renvoyant à plus tard le règlement du problème. Que proposez-vous en effet ? Une dépénalisation de la chasse de nuit pendant cinq ans dans les départements dont la liste sera fixée par la voie réglementaire. Le Parlement ne s'honorerait pas en fuyant ainsi ses responsabilités et en ne prenant qu'une demi-mesure dont il ne pourrait même pas contrôler les modalités d'applications.

Manque d'ambition encore quand vous vous contentez pour la loi Verdeille d'un simple toilettage alors que la modification de cette loi de 1964 aurait dû être entreprise dans une perspective générale, englobant l'amélioration du système d'organisation de la chasse et une réforme des associations communales de chasse agréées. Quant aux lacunes, elles sont nombreuses mais je n'en citerai que deux : l'absence de définition de la chasse, l'absence de création de fédérations régionales des chasseurs. Aucune loi n'ayant jamais défini l'acte de chasse, il aurait été fort opportun de combler ce vide juridique afin de prévenir toute interprétation hasardeuse et d'éviter des contentieux inutiles.

Je regrette aussi votre refus de créer des fédérations régionales des chasseurs alors que l'échelon régional est à l'évidence celui où sont possibles la coordination des fédérations départementales, l'élaboration de programmes d'action, la liaison avec les conseils régionaux, la collaboration avec les directions régionales de l'environnement et avec les instances européennes.

En l'état, ce projet n'est donc pas satisfaisant. Certes, quelques avancées ont été opérées en commission, mais je considère qu'elles sont insuffisantes et ne constituent qu'une première étape.

M. Jean-Claude Viollet - L'article premier affirme d'une part que la gestion durable du patrimoine cynégétique et de ses habitats est d'intérêt général, ce qui engage tous les intervenants sur le milieu naturel, d'autre part que la pratique de la chasse participe à la protection de ce patrimoine. Et il va plus loin encore, en reconnaissant le caractère social et économique de la chasse. Mais j'aurais souhaité que l'on évoque aussi le fait que la chasse est partie intégrante du patrimoine de l'humanité. Elle participe en effet du rapport originel entre l'homme et la nature et demeure culturellement la marque symbolique du lien qu'entretient l'homme avec les autres espèces et leur environnement.

Ce faisant, la chasse relève pour partie de l'ordre symbolique et ne peut, de ce fait même, être appréhendée d'une manière purement rationnelle. Il faut voir là sans doute la source des tensions passionnées qui sont apparues entre une culture urbaine qui voit trop souvent dans la nature un ordre immuable et une culture rurale qui entretient un rapport sensible, j'allais dire sensuel, avec la nature et l'animal.

Ce n'est qu'en appréhendant cette réalité complexe que nous pourrons trouver ensemble les termes d'un équilibre permettant de pérenniser une chasse démocratique et populaire, respectueuse du patrimoine cynégétique et de ses habitats, respectable par l'éthique de l'acte de chasse vis-à-vis des espèces comme des autres usagers du territoire, respectée par tous ceux qui ont une autre pratique de la nature. La recherche de cet équilibre nous conduira à légaliser la chasse de nuit ou à la passée dans les départements où elle est ancienne et importante, à statuer sur le jour de non-chasse en respectant les contraintes des chasses traditionnelles. Cela nous conduira aussi à vous demander, Madame la ministre, de vous engager sans ambiguïté sur les termes du projet de décret qui fixera les dates butoirs d'ouverture et de clôture de la chasse aux oiseaux migrateurs, au gibier d'eau et autres oiseaux de passage.

Le rapport de M. Patriat contient sur tous ces points des propositions de nature à garantir une chasse responsable et apaisée, dans le cadre d'un consensus durable entre l'immense majorité des chasseurs et des autres utilisateurs de la nature. C'est dans cet esprit que je voterai l'article premier et que je soutiendrai les amendements du groupe socialiste (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. François Baroin - L'amendement 321 définit l'acte de chasse comme « un acte volontaire lié à la recherche, à la poursuite ou à l'attente du gibier ayant pour but ou pour résultat la capture des espèces de la faune sauvage dont la chasse est autorisée ».

Nous comblons ainsi une lacune du texte. L'amendement donne aussi un cadre juridique aux activités canines en rapport avec la chasse -entraînements, concours et autres épreuves.

M. le Rapporteur - La commission n'a pas examiné cet amendement mais en avait déjà adopté deux similaires qui répondent aux souhaits de M. Baroin -sauf pour ce qui est de « l'acte préparatoire ». Je suis donc d'accord sur le principe mais pas sur la réécriture proposée par M. Baroin.

Mme la Ministre - Même avis. L'amendement 58 de la commission va dans le sens voulu par M. Baroin.

M. François Baroin - Le refus du rapporteur de définir l'acte préparatoire va poser des problèmes à ceux qui organisent l'entrée sur les parcelles, aux rabatteurs, aux porte-carniers et autres.

L'amendement 321, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Geneviève Perrin-Gaillard - La valeur intrinsèque de la faune sauvage ne devant pas s'apprécier à l'aune de sa valeur cynégétique, on doit veiller à ce que la gestion des ressources cynégétiques ne se fasse pas, fût-ce involontairement, au détriment des espèces non chassables. C'est pourquoi je propose, dans mon amendement 23 rectifié de remplacer le mot « cynégétique » par le mot « faunique ».

L'amendement 23, accepté par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 55 de la commission est rédactionnel.

L'amendement 55, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Didier Quentin - L'amendement 238 est défendu.

M. le Rapporteur - Cet amendement vise à préciser que la chasse est une activité « traditionnelle ». Avis défavorable, car la chasse est aussi moderne et durable.

Plusieurs députés RPR, UDF et DL - Et citoyenne !

Mme la Ministre - Avis défavorable.

M. Charles de Courson - Les propos du rapporteur m'étonnent, d'autant que c'est bien sur la tradition que nous nous sommes fondés pour autoriser certains types de chasse. Qu'entend-il par une chasse moderne ? Est-ce à dire qu'on va chasser en 4x4 ?

M. le Rapporteur - C'est M. Dassault qui chasse ainsi !

M. Antoine Carré - On ne peut nier le caractère traditionnel de la chasse.

M. le Rapporteur - Traditionnelle, ancestrale, historique, voire préhistorique : on peut appliquer tous ces adjectifs à la chasse. Cependant, comme l'a dit un humaniste avant moi, parlons plutôt de l'avenir, puisque c'est là où nous passerons le plus clair de notre temps (Sourires).

L'amendement 238, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 56 de la commission vise à insérer l'adjectif « culturel », qui présente l'avantage de recouvrir aussi bien le passé que l'avenir.

L'amendement 56, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Thierry Mariani - Mon amendement 281 vise à préciser que la chasse « s'inscrit dans le patrimoine culturel en tant qu'activité humaine légitime de prélèvement de la faune sauvage ».

Pour faire plaisir à la gauche plurielle, je veux bien ajouter « dans un comportement citoyen et durable » (Rires sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL).

L'amendement 281, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Thierry Mariani - Mon amendement 282 est défendu.

L'amendement 282, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 57 de la commission vise à préciser que la chasse a des fonctions écologiques, sociales et économiques.

Mme la Ministre - Avis favorable.

M. François Brottes - Les jeunes pousses étant menacées par la dent du gibier, la prolifération des grands animaux compromet les efforts entrepris pour régénérer la forêt.

M. Michel Bouvard - Très bien !

M. François Brottes - Je rappelle que ce sont 500 000 hectares de forêt qui ont été dévastés par l'ouragan. C'est dans le souci de reconstituer notre forêt que j'ai déposé mon sous-amendement 123 rectifié, qui vise à préciser que la chasse assure « un véritable équilibre agro-sylvo-cynégétique ».

M. le Rapporteur - Avis favorable.

Mme la Ministre - Cette notion figure déjà à l'article L. 225-2 du code rural. Faut-il la reprendre dans la loi ? En outre, est-il judicieux de la qualifier par l'adjectif « véritable », qui n'a guère de sens juridique ? Je m'en remets à la sagesse de cette Assemblée.

M. Charles de Courson - Le vrai problème, s'agissant des forêts, est celui de l'indemnisation des dégâts qui seront causés quand il y aura un excès de gibier. Allez-vous jusqu'à admettre le principe d'une telle indemnisation ?

M. François Brottes - La recherche de l'équilibre est une question de volonté davantage qu'une question d'argent (Protestations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL).

Le sous-amendement 123 rectifié, mis aux voix, est adopté.

L'amendement 57, ainsi sous-amendé, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 54 de la commission va donner satisfaction à M. Baroin, puisqu'il légitime la chasse dans ses deux premières phrases et prévoit le partage des espaces dans sa dernière phrase.

Mme la Ministre - Avis favorable si l'amendement est adopté dans sa rédaction actuelle. Le Gouvernement s'oppose en revanche à son adoption si le sous-amendement 180 était voté.

M. Charles de Courson - Mon sous-amendement 180 vise à supprimer la dernière phrase de l'amendement, ainsi rédigée : « la chasse et les usages non appropriatifs de la nature doivent s'exercer dans des conditions compatibles ».

La chasse s'exerce dans un cadre légal. La rédaction proposée par le rapporteur pourrait laisser penser que les autres usages de la nature peuvent s'exercer librement. Ce serait entrer dans une dangereuse logique de socialisation de la nature.

Depuis la nuit du 4 août en effet, le droit de chasse est lié au droit de propriété : pour chasser sur un terrain, il faut un bail, un droit ou du moins l'autorisation du propriétaire. Même dans le dispositif des ACCA, il était prévu d'indemniser les propriétaires, sans quoi la loi Verdeille n'aurait pas été constitutionnelle.

Que veut donc dire le rapporteur ? Qu'on peut se promener, faire du VTT ou de la moto n'importe où ? Ce n'est pas acceptable.

Quant aux deux premières phrases de son amendement, elles auraient pu être moins absconses. Il s'agit simplement de préciser que le prélèvement ne doit pas compromettre le renouvellement du cheptel.

Par ailleurs, Madame la ministre, la notion d'écosystème devrait figurer dans ce texte.

M. le Rapporteur - M. de Courson et Mme Boutin n'aiment pas l'usage non appropriatif mais cela ne signifie pas que tout le monde puisse aller partout tous les jours. L'ONF et certains propriétaires forestiers ouvrent leurs forêts en fixant des jours de chasse de manière limitative. L'usage de la forêt à des fins cynégétiques est donc compatible avec d'autres activités.

M. Christian Jacob - La précision de M. le rapporteur n'apporte rien puisqu'elle décrit des relations contractuelles qui n'ont rien à voir avec la loi. En proposant une rédaction aussi imprécise, vous ouvrez la boîte de Pandore en laissant croire que d'autres activités -telles que la promenade ou la pratique du 4X4- sont compatibles avec la chasse.

M. François Sauvadet - La loi, Monsieur le rapporteur, doit être compréhensible. En l'espèce, je ne comprends rien au verbiage dépourvu de tout caractère nominatif qui nous est proposé. Il appartiendra aux députés de la majorité qui sourient à mes propos d'aller faire sur le terrain de l'explication de texte !

Le sous-amendement 180, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'amendement 54, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 58 rectifié vise à définir l'acte de chasse, en retenant les termes qui répondent aux souhaits des chasseurs eux-mêmes.

Mme la Ministre - Sagesse.

M. Jacques Le Nay - Le sous-amendement 370 tend à apporter des précisions en permettant aux auxiliaires de chasse non armés, faisant fuir le gibier pour que d'autres le capturent, de n'être pas porteurs de permis de chasser. Il s'agit en effet souvent de jeunes ou de personnes âgées qui n'ont pas vocation à détenir un permis de chasser.

M. Thierry Mariani - Le sous-amendement 343 vise à préciser que les actes préparatoires et les aides des auxiliaires de chasse ne constituent pas des actes de chasse.

M. Jacques Le Nay - En vue de prévenir les contentieux, le sous-amendement 181 tend à préciser que les auxiliaires de chasse ne réalisent pas d'acte de chasse et que l'acte de chasse ne comprend pas l'acte préparatoire à la chasse.

M. le Rapporteur - Défavorable aux trois sous-amendements. L' « acte préparatoire » est un concept qui ne vise pas tel ou tel acte particulier mais toutes les actions antérieures à la recherche effective du gibier. S'agissant des auxiliaires, il est déjà prévu dans la loi que les rabatteurs et les déterreurs n'ont pas besoin d'un permis de chasser. En revanche, ceux qui courent après le gibier ont besoin d'un permis.

Mme la Ministre - Même position sur les sous-amendements. Le premier alinéa de l'amendement 58 rectifié définit l'acte de chasse comme un acte volontaire ayant pour but la capture ou la mise à mort d'un animal appartenant à une espèce dont la chasse est autorisée. Je propose de substituer à ce dernier corps de phrase les termes : « la capture ou la mise à mort d'un animal sauvage ».

M. Charles de Courson - Les trois groupes de l'opposition défendent l'amendement 146 qui tend à mettre fin à une situation juridique insatisfaisante. Il vise en effet à définir précisément l'acte de chasse et d'en exclure expressément l'acte préparatoire, afin que l'on cesse de verbaliser des personnes qui n'étaient pas -ou pas encore- en acte de chasse. Comme l'a justement rappelé M. Le Nay, les rabatteurs désarmés ne peuvent pas être considérés comme effectuant un acte de chasse. Je propose donc à notre assemblée de voter les sous-amendements 370 et 181 qui nous permettront d'adopter l'amendement 58 rectifié.

M. Jean-Claude Lemoine - Notre amendement 284 va dans le même sens que celui que vient de défendre M. de Courson.

M. le Rapporteur - Je répète que le terme « acte préparatoire » n'est pas satisfaisant. Si M. de Courson et ses amis proposaient de retenir la notion d' « actes antérieurs à la recherche du gibier », leurs amendements seraient plus pertinents. Mais que peut recouvrir la notion d'acte préparatoire ? Un chasseur qui place une carabine chargée dans le coffre de sa voiture commet-il un acte préparatoire ? La commission est donc défavorable à l'ensemble des sous-amendements et des amendements qui viennent d'être présentés par nos collègues de l'opposition, après l'amendement 58 rectifié.

Mme la Ministre - Même avis.

M. Christian Jacob - Je ne suis nullement convaincu par les exemples quelque peu démagogiques du rapporteur : chacun sait bien qu'on ne peut déposer dans le coffre d'une voiture une arme chargée. Il faut la casser, la mettre dans un étui... (Exclamations sur les bancs du groupe RCV) Monsieur Mamère, si vous chassiez ou que vous accompagniez des chasseurs, vous ne diriez pas ce que vous avez dit tout à l'heure !

Un acte préparatoire, Monsieur le rapporteur, cela consiste à faire le pied, à aller identifier le gibier ou à se rendre à son poste, par exemple !

M. le Rapporteur - Mais rien ne l'interdit ici !

M. le Président - Acceptez-vous d'ajouter « sauvage » après le mot « animal », Monsieur le rapporteur ?

Mme la Ministre - Ce que je propose en fait, c'est de l'ajouter à la fin du membre de phrase : « ou la mise à mort d'un animal appartenant à une espèce ».

M. le Rapporteur - Avis favorable à ce sous-amendement oral.

M. Christian Jacob - Je ne suis pas d'accord, moi : les chasseurs ne pourront plus réintroduire dans la nature du gibier d'élevage ! Il ne s'agira pas d'animaux sauvages, et ce sera donc interdit.

M. le Rapporteur - Vous êtes amateur de sémantique mais, cette fois, vous n'avez pas compris. Les faisans réintroduits appartiennent à une espèce sauvage, et il n'y aura donc aucun problème.

Tout à l'heure, de même vous avez pris de mauvais exemples : loin de moi l'idée d'interdire de faire le pied ou de se rendre à son poste ! Ce ne sont pas des actes préparatoires...

Le sous-amendement du Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

Les sous-amendements 370, 343 et 181, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.

Mme la Ministre - Il doit bien être entendu que, si nous ajoutons « sauvage » après « espèce », la suite de la phase tombe... (Exclamations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL)

M. Christian Jacob - Cela n'a jamais été précisé !

Mme la Ministre - Cela paraît évident : si l'on chasse une espèce bien que ce ne soit pas autorisé, cela n'en reste pas moins un acte de chasse -en l'occurrence, de braconnage (Mêmes mouvements).

M. le Rapporteur - Il faut donc supprimer : « dont la chasse est autorisée ».

Plusieurs députés RPR et UDF - Ce n'est pas ce qui a été voté.

M. le Président - En effet, et il revient donc à la commission ou au Gouvernement de déposer un nouveau sous-amendement pour faire disparaître cette fin de phrase.

Mme la Ministre - Je pensais pourtant avoir été claire puisque j'ai même rappelé la définition que donne le code pénal du braconnage ! Mais je présenterai donc un nouveau sous-amendement, visant à supprimer les mots : « dont la chasse est autorisée » (Exclamations sur les bancs du groupe UDF).

Mme Christine Boutin - Nous ne savons plus où l'on en est !

M. le Président - Il y a en effet un malentendu et, dorénavant, je n'accepterai plus d'amendements verbaux. Cela étant, je vous invite à vous prononcer sur ce nouveau sous-amendement de séance.

Le deuxième sous-amendement du Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Charles de Courson - Aux termes de l'article 100, alinéa 2, du Règlement, « le Président ne met en discussion que les amendements déposés sur le bureau de l'Assemblée ». Nous venons de violer cette disposition à deux reprises ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste)

Dans toutes les assemblées, chaque fois qu'on accepte des amendements non écrits, le résultat est toujours le même : on croit avoir voté un texte et on en a voté un autre. Cette pratique est inacceptable !

M. le Président - Vous avez raison, dans votre lecture du Règlement, pour ce qui est des amendements mais vous devez savoir aussi que le président de séance a toute liberté d'appréciation pour accepter ou non les sous-amendements oraux, ainsi que les rectifications verbales. Or c'est de cela qu'il s'agit ici.

Cela étant, pour la clarté de nos débats, je n'accepterai plus de sous-amendements qui ne soient écrits.

M. Jean-Claude Lemoine - Le sous-amendement qui vient d'être voté me paraît aller contre la préservation des espèces, que nous souhaitons pourtant tous. Imaginez que, dans votre département, Madame la ministre, la fédération des chasseurs demande au préfet d'interdire pendant un an la chasse du lièvre ou de la perdrix au motif que ces espèces seraient une voie d'extinction : l'arrêté serait frappé de nullité car il s'agit d'espèces sauvages !

M. le Président - Avant de soumettre l'amendement au vote, je rappellerai à M. de Courson qu'aux termes de l'article 98, alinéa 3, « le défaut d'impression et de distribution d'un amendement ne peut faire obstacle à sa discussion en séance publique ». Tout dépend du libre arbitre du président de séance. Pour ma part, j'essaie de faire en sorte que le débat ne soit pas trop compliqué et que chacun puisse s'exprimer...

M. Christian Jacob - Le Gouvernement ne vous aide pas !

L'amendement 58 rectifié sous-amendé, mis aux voix, est adopté.

L'article premier modifié, mis aux voix, est adopté.

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APRÈS L'ARTICLE PREMIER

M. le Rapporteur - L'amendement 60 n'est pas anodin, puisqu'il tend à supprimer le Conseil national de la chasse et de la faune sauvage, dont les avis, j'ai pu le constater, sont généralement suivis de peu d'effet. Sans doute faudra-t-il créer à sa place, par voie réglementaire, un Haut Conseil qui comprendrait des représentants des ministères de l'environnement, de l'agriculture, de l'équipement et du tourisme, ainsi que du monde de la chasse et de celui de la protection de la nature.

Mme la Ministre - Cet organisme consultatif, chargé de donner un avis sur les mesures législatives et réglementaires touchant à la préservation de la faune sauvage, au développement du capital cynégétique et au respect des équilibres biologiques, est un lieu de concertation utile, et a d'ailleurs son équivalent dans chaque département. Peut-être pourrait-il jouer son rôle de façon plus efficace, mais cela justifie sa réforme, non sa suppression.

M. Noël Mamère - Je dirais même plus : il serait inacceptable que la loi supprime, sans la remplacer par quoi que ce soit, la seule instance où existent, fût-ce de façon imparfaite, le dialogue et la concertation dont nous ne cessons, depuis plus de six heures, de déplorer l'insuffisance.

M. Charles de Courson - Le rapporteur nous propose de supprimer le Conseil supérieur au motif qu'il ne sert à rien...

M. Michel Bouvard - S'il fallait supprimer tout ce qui ne sert à rien... (Sourires)

M. Charles de Courson - ...et préconise de créer, à sa place, un Haut Conseil, dont la composition relèverait du règlement. Pour ma part, je considère que le Conseil supérieur sert à quelque chose, et d'abord à nous éclairer, lorsque nous légiférons, sur les projets de loi qui sont de sa compétence. En outre, et peut-être surtout, il voit passer tous les projets de textes réglementaires, dont nous n'avons nous-mêmes connaissance, bien souvent, que parce qu'il en a été saisi, ce qui nous permet, le cas échéant, de nous élever contre une disposition jugée inacceptable. Il serait donc très dangereux de le remplacer par un nouvel organisme sur la composition duquel nous n'avons aucune garantie.

M. François Liberti - Je souhaite que le rapporteur précise sa position sur les deux points qui ont fait l'objet de débats en commission : les moyens de garantir l'efficacité du nouvel organe consultatif envisagé ; l'élargissement de sa composition à l'ensemble des utilisateurs de l'espace naturel.

M. Christian Bataille - Sans revenir sur les arguments du rapporteur, qui me paraissent tous valables, je souligne que l'amendement a été adopté par la commission. Le groupe socialiste le votera donc.

M. Noël Mamère - Ça, c'est un argument !

M. Jean-Claude Lemoine - Je demande une brève suspension de séance pour mieux mesurer les avantages et les inconvénients de la suppression proposée par le rapporteur.

La séance, suspendue le mercredi 29 mars à 0 heure 20, est reprise à 0 heure 30.

M. François Baroin - Le rapporteur veut supprimer le conseil national de la chasse et de la faune sauvage. Pourquoi ? Le Gouvernement, lui, souhaite le maintenir, mais pour une mauvaise raison, qui est de pouvoir le consulter à sa guise tout en imposant la décision de son choix.

Nous estimons, nous, que ce conseil, par sa représentativité, est un organisme consultatif utile, qui a aussi la capacité de provoquer une annulation par le Conseil d'Etat si ses recommandations ne sont pas suivies.

De ce haut conseil national de la chasse qui serait créé après l'adoption de l'amendement du rapporteur, nous ignorons la composition. Dans le doute, nous préférons en rester là.

M. le Rapporteur - Depuis le début de la discussion, vous adoptez régulièrement, Messieurs Baroin et de Courson, les positions du monde de la chasse. Or celui-ci est de notre avis sur le point en discussion (Protestations sur les bancs du groupe du RPR et du groupe UDF). Je siège au CNCFS. J'ai participé aux deux séances au cours desquelles il a été consulté sur ce projet. Il a émis un avis et formulé des propositions. Or ces deux jours ont été du temps perdu car cette structure est inadaptée. Mieux vaut consulter l'ONC et le monde de la chasse sans passer par elle. Vous qui vous présentez, Monsieur de Courson, comme économe des deniers publics, vous vous opposez aujourd'hui à la réalisation d'une économie pour des raisons politiques. Dans un rapport préliminaire, la Cour des comptes a émis d'extrêmes réserves sur la structure et le fonctionnement du conseil. Je suis l'avis de la Cour des comptes, celui du monde de la chasse et mon expérience personnelle.

Le haut conseil que je propose est tout différent. Il sera composé de représentants de l'Etat, des chasseurs et des non-chasseurs (Exclamations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL). Qu'y a-t-il là de surprenant ? Les non-chasseurs sont déjà représentés au CNCFS ! Vous comprendrez que je m'oppose à vos amendements tendant à améliorer ce dernier.

M. Charles de Courson - D'abord, un certain nombre d'éléments figurent dans la partie législative du code rural et pas seulement dans sa partie réglementaire, en particulier à l'article L. 224-11. Ensuite, il n'est pas exact que l'union des fédérations de chasseurs soit favorable à la suppression du Conseil national. Je viens de le vérifier auprès des intéressés. Même si ce n'est pas une raison suffisante pour repousser votre amendement, votre affirmation n'est pas exacte.

Le rapporteur veut créer un haut conseil, composé de représentants de l'Etat, des chasseurs et d'autres catégories. Soit, mais tout est dans le dosage. Nous connaissons la composition du conseil national, que la jurisprudence du Conseil d'Etat fait obligation de consulter.

Cette consultation peut éviter des faux-pas dans les textes d'application. Je suis, dites-vous, économe des deniers de l'Etat. Je m'en honore en effet. Vous êtes membre du conseil national de la chasse. Êtes-vous indemnisé ?

M. le Rapporteur - Non !

M. Charles de Courson - Alors ne dites pas que le conseil coûte cher. Vous voulez créer un haut conseil. Où est l'économie ? Je préfère garder ce qui fonctionne plutôt que de m'en remettre à un haut conseil dont je ne sais rien.

Mme la Ministre - Le rapporteur est hostile à un organisme consultatif placé auprès du ministre chargé de la chasse, en contestant la qualité de son travail. J'éprouve pour ma part le besoin de le consulter. Je propose de laisser le texte en l'état et de formuler avant la deuxième lecture des propositions pour améliorer le décret et répondre ainsi à l'attente des parlementaires, tout en conservant un lieu propre à éclairer les décisions des pouvoirs publics.

M. le Rapporteur - Monsieur de Courson, le Conseil national coûte l % du prélèvement opéré sur les chasseurs. Le haut conseil permettrait de coordonner la politique de la chasse de façon horizontale, entre les différents ministères. Après avoir entendu la ministre, je m'en remets à la sagesse de l'Assemblée.

L'amendement 60, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. François Baroin - J'ai écouté la ministre avec bonheur. Notre amendement 322 peut lui offrir une solution. Il tend en effet à légaliser le CNCFS, qui serait composé à parité de représentants de l'Etat et de membres appartenant aux milieux cynégétiques proposés par la fédération nationale de la chasse, ainsi que des représentants des organisations professionnelles de l'agriculture, de la forêt, de l'élevage et d'organismes scientifiques.

Cette proposition pourrait, et nous en serions heureux, rassembler le rapporteur et la ministre. Elle permettrait d'organiser un dialogue plus transparent, dont les conclusions s'imposeraient davantage au Gouvernement.

M. le Rapporteur - La commission n'a pas examiné cet amendement, qui a été déposé lui aussi après sa réunion, ce qui m'oblige, Monsieur Baroin, à réagir chaque fois de façon un peu improvisée.

Je regrette de n'avoir pas été suivi sur l'amendement précédent. Vous avez voulu maintenir le Conseil national de la chasse et de la faune sauvage, soit. Tant pis pour les chasseurs qui paieront !

Voilà maintenant que vous voulez aller plus loin en excluant dudit conseil les non-chasseurs et les personnalités qualifiées. N'y siégeraient plus que les agriculteurs et les chasseurs ! A titre personnel, je suis tout à fait opposé à cet amendement.

Mme la Ministre - La définition de la composition d'un organisme consultatif ne relève pas de la loi. J'ajoute que la chasse n'est pas une compétence partagée mais relève exclusivement du ministère de l'environnement, et ce depuis 1972 et M. Robert Poujade. Je ne voudrais pas que la méfiance ou l'ire que vous inspire la personnalité de la ministre vous incitent à des décisions, messieurs, qui pourraient ensuite s'appliquer à d'autres. J'invite donc l'Assemblée à rejeter cet amendement.

M. Christian Jacob - Si M. le rapporteur avait pris le temps de lire l'amendement de M. Baroin, il aurait vu que celui-ci propose en réalité que le Conseil comprenne en nombre égal des représentants de l'Etat et des membres appartenant aux milieux cynégétiques.

M. Noël Mamère - Et les associations de protection de la nature ?

M. Christian Jacob - Que viendraient-elles faire dans ce conseil ? (Exclamations sur les bancs du groupe RCV et du groupe socialiste)

Sont aussi prévus des représentants des organisations professionnelles de l'agriculture, de la forêt, de l'élevage et d'organismes scientifiques. Vous ne leur faites pas confiance ?

M. Noël Mamère - Ce n'est pas le problème.

M. Christian Jacob - Nous parlons ici du Conseil national de la chasse et de la faune sauvage. Seuls ceux qui ont vocation à intervenir sur ces sujets doivent y siéger...

M. Noël Mamère - Vous pensez que les associations de protection de la nature n'ont pas vocation à intervenir sur ces sujets ?

M. Christian Jacob - Non. D'ailleurs, dans l'actuel CNCFS, dont vous avez voté le maintien, il n'y a aucun représentant de ces associations.

M. Noël Mamère - Mais si, il y a des personnalités qualifiées et des représentants d'associations agréées.

M. Christian Jacob - Je vais lire l'article, cela éclairera M. Mamère. Le Conseil comprend deux représentants du ministre chargé de la chasse, dont le directeur de la protection de la nature ; un représentant du Garde des Sceaux ; le directeur général des collectivités locales ; le directeur du budget ; le directeur chargé des forêts ; le directeur général de l'ONF ; sept représentants élus des régions cynégétiques ; quatre membres d'associations ou de groupements représentant les différents types de chasse... (Exclamations sur les bancs du groupe RCV, du groupe socialiste et du groupe communiste) deux représentants des collectivités locales ; quatre représentants des organisations professionnelles de l'agriculture enfin le directeur des pêches maritimes. Il n'y a donc pas de représentants des associations de défense de la nature.

M. Noël Mamère - Mais si !

M. Christian Bataille - Au sujet du précédent amendement, nous avons pris note de la volonté du Gouvernement de redéfinir les choses d'ici la prochaine lecture. Cet engagement, dont nous nous félicitons, nous amène à partager pleinement l'avis négatif du rapporteur sur l'amendement de MM. Baroin et Lemoine.

Mme la Ministre - Si M. Jacob veut nous lire le code rural, qu'il ne saute pas de lignes ! L'alinéa 4 prévoit deux représentants d'associations agréées au titre de l'article L. 252-1, lequel concerne les associations qui ont pour objet la protection de la nature et de l'environnement (Exclamations sur les bancs du groupe communiste).

M. Noël Mamère - Les députés Verts suivront l'avis du Gouvernement et je voudrais dire à M. Jacob, qui nous accuse souvent de caricaturer ses positions, qu'il pourrait avoir au moins l'honnêteté, quand il nous lit le code rural, de ne pas sauter les lignes qui le gênent. La faune sauvage, Monsieur Jacob, n'appartient pas aux seuls porteurs de fusils.

M. François Baroin - Je voudrais dire à Mme la ministre que je ne porte pas d'attaque personnelle contre elle. Simplement, elle incarne un mouvement politique qui ne se caractérise pas par une pratique quotidienne de la chasse.

Pour en revenir à l'amendement, je constate qu'un certain flou règne. M. Patriat voudrait créer un haut conseil mais Mme la ministre nous dit que rien n'est prêt pour ce faire. Je propose donc de simplement conforter ce qui existe. Si déjà Mme la ministre nous assurait que les avis du conseil seront suivis, nous pourrions nous entendre.

L'amendement 322, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Augustin Bonrepaux - Mon amendement 25 prêtera peut-être à sourire mais je puis vous assurer que ce que nous subissons dans les Pyrénées depuis quatre ans avec les ours ne fait pas rire les éleveurs et les bergers.

Les éleveurs des Pyrénées centrales, qui font de l'élevage extensif, ont certainement le revenu le moins élevé de tout le secteur -70 à 80 000 F par an. Quant aux bergers, ils ont un salaire de 5 ou 6 000 F par mois. Une expérience malencontreuse de l'Etat -le lâcher de trois ours slovènes- a encore aggravé leurs conditions de travail.

Permettez-moi un bref historique. En 1993, M. Barnier a passé convention avec quatre communes de Haute-Garonne qui voulaient réaliser un parc de vision. Quatre ans après, ce parc n'existe toujours pas. Malheureusement, les ours ne sont plus chez elles mais chez nous ! M. Barnier s'était engagé à reprendre ces animaux sur simple délibération du conseil municipal. Mais on nous dit aujourd'hui que ce n'est pas possible. De qui se moque-t-on ?

En 1996, Mme Lepage a procédé au lâcher très médiatisé des ours slovènes. Un bilan avait été promis au bout de trois ans ; il n'a pas été fait. Or malgré la mobilisation de l'équivalent de deux compagnies de gendarmerie, de 12 agents de l'ONC et de l'ONF, nous avons eu 200 moutons tués ainsi que 2 poulains. C'est-à-dire qu'en une saison, les deux ours slovènes ont fait plus de dégâts que les six ours des Pyrénées pendant six ans. Et j'ai découvert que l'opération n'avait été précédée d'aucune des études d'impact requises par la convention de Berne et que le suivi génétique promis n'avait donné aucun résultat.

Nous avons interrogé les plus éminents scientifiques, qui se sont montrés réservés sur la façon dont avait été faite l'expérience. Ce sont leurs préconisations que j'ai reprises dans mon amendement.

Cette plaisanterie nous coûte 5 millions par an !

Parce que nous sommes responsables, nous avons voulu savoir ce que coûterait une limitation de la prédation en Ariège : il faudrait 40 millions d'investissement et 9 millions par an de fonctionnement pour le gardiennage des troupeaux, soit 100 millions sur sept ans !

L'Etat s'engage-t-il à consacrer 100 millions à l'élevage ariégeois ? J'ai adressé notre rapport au Gouvernement, mais on ne m'a pas répondu.

Mon amendement 25 vise à empêcher que la comédie se reproduise. L'Etat doit honorer ses engagements. Qu'il reprenne ses ours ! (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe socialiste, du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL)

M. Michel Bouvard - Les élus de montagne, toutes tendances confondues, sont solidaires sur ce point. Que leur retour soit organisé ou non, les prédateurs constituent une menace pour l'économie pastorale et coûtent très cher au contribuable.

Dans le massif alpin, le loup est revenu dans des conditions que nous connaissons mal, malgré les travaux de nos collègues Honde et Chevallier, car on nous a refusé la création d'une commission d'enquête parlementaire. Le retour du loup va nous coûter 500 millions, puisque le coût a été évalué à 61 millions pour le seul département de la Savoie et que huit départements vont être touchés. Les loups sont déjà passés dans la vallée de la Maurienne et ils remontent vers la Suisse.

Il est évident que l'équilibre coût-avantage est rompu. Il faut mettre fin aux expériences de réintroduction artificielle des prédateurs et nous devrons à terme nous interroger sur le cas des prédateurs qui menacent l'économie pastorale.

M. le Rapporteur - Ce n'est pas le sujet.

M. Michel Bouvard - Si ! Ce texte porte bien sur la chasse et la faune sauvage. Le code rural autorise les battues et considère toujours l'ours et le loup comme des nuisibles. Mon amendement 22 vise à permettre aux habitants du massif alpin de rester dans leurs vallées ; ils ont le droit d'y vivre. Comme l'a dit un ministre de l'agriculture sous la IIIème République, « il s'agit de l'intérêt de notre agriculture et de l'intérêt de notre trésor ». (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL)

M. Paul Patriarche - Il n'y a pas d'ours dans ma circonscription, mais j'ai déposé un amendement 221 par solidarité avec mes collèges élus de montagne.

M. le Rapporteur - La commission, qui a adopté l'amendement 1 de M. Bonrepaux, a repoussé son amendement 25.

Mme la Ministre - Je comprends les intentions de M. Bonrepaux, qui a raison d'estimer qu'on s'est montré un peu léger, dans le passé, quand on a décidé de réintroduire certains prédateurs.

S'il est indispensable que l'Etat respecte ses engagements quand des animaux posent des problèmes, on ne peut poser pour principe général la capture des animaux introduits, avec effet rétroactif de surcroît.

Nous devons surtout rassurer les éleveurs, dont les troupeaux sont détruits par deux animaux qui n'ont pas un comportement normal (Interruptions et rires sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL). Ces ours n'ont pas peur des humains, ce qui est en effet anormal.

M. Augustin Bonrepaux - Je souhaite que le rapporteur relise mon amendement 1 : il porte sur les « espèces », pas sur les prédateurs. Je sais que vous voulez le sous-amender pour écrire « les espèces prédatrices ». Je ne suis pas d'accord et, s'il le faut, je retirerai mon amendement 1.

Mon amendement 25 est cosigné par l'ensemble du groupe socialiste.

L'introduction des ours s'est faite en violation des règles fixées par la convention de Berne. Chaque fois qu'il est procédé à des travaux sans étude d'impact préalable, on doit cesser les travaux et, généralement, détruire les constructions. Puisque l'opération en cause est illégale, je demande qu'on nous rende les terrains dans l'état où ils se trouvaient à l'origine, c'est-à-dire sans les ours !

Madame la ministre comprendra que je ne retire pas mon amendement (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL).

M. Noël Mamère - Je comprends que M. Bonrepaux souhaite résoudre les problèmes locaux qu'on rencontre dans l'Ariège.

Nous pouvons adopter l'amendement 1 et le sous-amendement qui s'y rattache, mais par les amendements 25 et 22, qui restreindraient à l'excès la réintroduction des espèces sauvages. Nous nous disons tous attachés à la biodiversité : il faut en tirer les conséquences.

Je veux bien que la situation soit grave, mais on ne compte que 32 loups en France, contre 900 en Espagne et 600 en Italie. Or ces pays n'ont pas pris les mesures drastiques que vous nous proposez.

On ne peut même pas dire que le loup a été réintroduit : en réalité, il n'a jamais quitté notre territoire.

Vous prétendez que la présence de ces prédateurs trouble l'équilibre écologique. Or il y a d'autre causes à ce trouble, et en particulier un type d'agriculture plutôt intensive qui a contribué à « artificialiser » la nature... (Exclamations sur les bancs du groupe UDF, du groupe du RPR et du groupe DL)

M. Michel Bouvard - L'agriculture intensive dans les Alpes ! J'ai rarement entendu de telles imbécillités !

M. Noël Mamère - ...et s'il y a tant de dégâts aujourd'hui, c'est que les troupeaux ont atteint des effectifs considérables qui ne permettent plus un véritable pastoralisme (Vives protestations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL).

Vous pouvez faire comme si l'agriculture n'avait pas changé depuis le XIXème siècle ou comme si notre pays était toujours peuplé de 90 % d'agriculteurs mais vous ne faites preuve ainsi que de votre tempérament réactionnaire !

M. le Président - Sans sortir de la neutralité à laquelle je suis tenu, je me permets de conseiller à M. Mamère d'interroger sur ces questions les bergers haut-alpins !

M. Christian Estrosi - J'ai déposé trois sous-amendements qui tendent à préciser que la réintroduction peut être naturelle ou artificielle et à ajouter le mot « élimination » après le mot « capture ». Je partage la colère de M. Bonrepaux comme celle de M. Bouvard, car contrairement aux affirmations de M. Mamère ou de Mme la ministre, le loup n'a pas réapparu de manière naturelle. On a essayé de nous faire croire qu'en 1992, deux loups sont apparus pour la première fois dans le massif des Alpes, au c_ur du parc national du Mercantour, et qu'ils arrivaient du parc des Abruzzes par une voie naturelle, après avoir parcouru plus de cinq cents kilomètres, sans laisser aucune trace !

Depuis lors, le loup a proliféré dans les différents départements alpins et plus de cinq mille brebis ont été égorgées. A M. le rapporteur qui prétend que nous sortons du débat, je rappelle qu'en matière de faune sauvage, les fédérations de chasse ont su recréer les équilibres cynégétiques en réintroduisant diverses espèces de manière raisonnée. Lorsque nous voyons la disparition des mouflons, les atteintes portées aux chamois, aux bouquetins et aux chevreuils, nous mesurons les prédations du loup et ce débat a donc toute sa place dans le cadre de notre discussion. Si les gouvernements qui se sont succédé depuis 1992 et les technocrates qui se sont servis de nos parcs nationaux comme de laboratoire d'expérimentation ont tenté de nous faire croire au retour naturel du loup, c'est pour s'appuyer sur la convention de Berne qui vise à protéger ceux-ci.

Mais l'article 9 de cette convention autorise des dérogations au principe de la protection, dès lors qu'elles visent à protéger la faune et la flore et à préserver la santé et la sécurité publiques. Les autorités françaises ont donc toute latitude pour procéder à l'élimination du loup ou de l'ours, même si l'on considère -à tort- leur retour comme naturel. J'invite donc notre assemblée à adopter ces amendements.

Mme la Ministre - Nous nous égarons sur des terrains qui ont peu à voir avec le présent projet mais je veux bien répondre à M. Estrosi puisqu'il nous invite à divaguer, et attirer son attention sur le fait qu'une réintroduction ne peut être qu'artificielle : lorsqu'une espèce réapparaît de façon naturelle, il convient de parler de retour. M. Bonrepaux a cité l'article 11 de la convention de Berne dans son intégralité et je lui donne acte des problèmes que pose la présence de l'ours dans sa région. Tout doit être fait pour y répondre. Je m'étonne simplement de la formulation très générale du troisième alinéa de son amendement. En effet, certaines espèces sauvages -telles que le gypaète barbu- ont été réintroduites sans que cela pose de problèmes à quiconque.

Or, si l'amendement de M. Bonrepaux était retenu, ces animaux qui ne causent aucun dommage particulier devraient être éliminés. Ne peut-on imaginer une rédaction qui traite le problème spécifique de l'ours ?

M. Estrosi a mis en doute le caractère naturel du loup dans les Alpes. Il est pourtant confirmé par toutes les études scientifiques.

M. Christian Estrosi - Alors, pourquoi avoir refusé une commission d'enquête parlementaire ? Vous avez peur de la vérité !

Mme la Ministre - Pour gérer les problèmes liés à ce retour, une concertation est actuellement en cours, sur le programme proposé par le ministère de l'agriculture et par le mien, pour concilier le pastoralisme et la présence de cette espèce sauvage.

M. le Président - M. Bataille a demandé une suspension de séance, qui est de droit.

La séance, suspendue à 1 heures 25, est reprise à 1 heure 35.

M. le Président - M. Bataille m'a fait parvenir un sous-amendement...

M. Christian Estrosi - Je souhaite également en proposer un.

M. le Président - Faites-le moi tenir.

Le sous-amendement de M. Bataille tend à rédiger ainsi le dernier alinéa : « Il sera procédé, compte tenu des perturbations qu'ils génèrent, à la capture des ours de Slovénie réintroduits en 1996 sans avoir tenu compte de ces règles ». Ne pourrait-on en améliorer la rédaction ?

M. Christian Bataille - Je suggérerai donc : « Compte tenu de la perturbation, que génèrent les ours de Slovénie réintroduits en 1996, il sera procédé à leur capture ».

M. Michel Bouvard - Il faut préciser : dans les Pyrénées !

M. Christian Bataille - Écrivons donc : « réintroduits en 1996 dans les Pyrénées ».

M. Jean Auclair - N'importe quoi ! Les ours n'ont pas de nationalité !

M. le Président - Le sous-amendement de M. Estrosi vise, lui, à ajouter, dans la première phrase du premier alinéa, après le mot « réintroduction », les mots : « naturelle ou artificielle ».

M. le Rapporteur - Avis favorable au sous-amendement de M. Bataille, et défavorable à celui de M. Estrosi (Exclamations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL).

Mme la Ministre - Même position (Mêmes mouvements).

M. Eric Doligé - Je veux bien qu'on nomme les ours de Slovénie -cela signifie, je suppose, qu'on les a identifiés- mais supposons qu'on réintroduise un jour d'autres ours d'une autre origine, qui provoqueraient les mêmes dégâts, que se passera-t-il ? Ce n'est pas sérieux que de vouloir régler par la loi le problème posé par deux ou trois ours, cela uniquement pour essayer de sauver la mise au rapporteur et à la ministre ! On n'a jamais vu cela ! Je comprends d'autant moins que l'amendement 25 était d'excellente facture et que M. Bonrepaux a été applaudi sur tous les bancs. Il a retiré ensuite sa proposition après avoir obtenu une satisfaction des plus minimes. Tout cela est lamentable et pitoyable ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste)

M. Augustin Bonrepaux - L'essentiel est tout de même sauf, à savoir l'obligation de prendre à l'avenir, avant toute réintroduction, les mesures nécessaires à la sécurité des populations et de leur activités. Quant au passé, il n'y a eu, que je sache, qu'un seul problème : celui posé par les ours de Slovénie. Il faut bien réparer les erreurs commises par les services de l'Etat !

Mme Christine Boutin - Franchement, les conditions dans lesquelles nous légiférons ce soir ne sont pas dignes du Parlement. L'amendement de M. Bonrepaux et du groupe socialiste nous paraissait intéressant, mais à l'issue d'une suspension de séance demandée pour des raisons qui m'échappent, on y a introduit une sorte d'inégalité entre les races d'ours...

M. le Président - J'admets volontiers que le travail que nous sommes en train de faire aurait dû l'être en commission, mais le président de séance est tenu de mettre en discussion les amendements et sous-amendements dont il est saisi. J'espère, par conséquent, que vous ne me mettez pas en cause...

Mme Christine Boutin - Nullement !

M. Christian Estrosi - Nous étions en parfait accord avec l'amendement de M. Bonrepaux, qui couvrait tous les phénomènes qui ont affecté, dans les Alpes comme dans les Pyrénées, le pastoralisme, l'équilibre cynégétique et celui de la faune, et voici qu'on nous présente un sous-amendement spécifique, dont M. Bonrepaux nous dit se satisfaire au motif qu'il règle son problème à lui - passant par profits et pertes les dommages subis par les populations des autres massifs. Sont repoussés sans un mot d'explication, en revanche, mes sous-amendements 396 à 398, qui permettraient de régler le problème dans son entier. Les montagnards apprécieront !

Le sous-amendement 397, mis aux voix, n'est pas adopté.

Le sous-amendement de M. Bataille, mis aux voix, est adopté.

En conséquence, les sous-amendements 396 et 398 tombent.

L'amendement 25, ainsi modifié, mis aux voix, est adopté.

En conséquence, les amendements 19, 22 et 221 tombent.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance, qui aura lieu cet après-midi, mercredi 29 mars, à 15 heures.

La séance est levée à 1 heure 50.

                      Le Directeur du service
                      des comptes rendus analytiques,

                      Jacques BOUFFIER


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