Accueil > Archives de la XIe législature > Les comptes rendus > Les comptes rendus analytiques (2000-2001)

Session ordinaire de 2000-2001 - 22ème jour de séance, 48ème séance

2ème SÉANCE DU MERCREDI 8 NOVEMBRE 2000

PRÉSIDENCE de M. Patrick OLLIER

vice-président

Sommaire

LOI DE FINANCES POUR 2001
-deuxième partie- (suite) 2

AGRICULTURE (suite) 2

QUESTIONS 11

ETAT B TITRE III 26

ETAT B TITRE IV 27

ART. 49 28

APRÈS L'ART. 49 29

ART. 50 33

APRÈS L'ART. 50 34

ART. 35 35

ORDRE DU JOUR DU JEUDI 9 NOVEMBRE 2000 37

La séance est ouverte à vingt et une heures trente.

Top Of Page

LOI DE FINANCES POUR 2001 -deuxième partie- (suite)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2001.

Top Of Page

AGRICULTURE (SUITE)

M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche - Je veux avant tout remercier Mme et MM. les rapporteurs pour la qualité de leur travail, si précis et si sérieux que je ne sais si je dois y ajouter quoi que ce soit. En tout cas, ils ont assez éclairé l'Assemblée sur la répartition des crédits pour que je puisse aborder directement certains sujets d'actualité.

Au risque d'étonner, je commencerai par la pêche. Je n'oublie pas en effet que je suis ministre de l'agriculture et de la pêche. Il y a quelques jours, j'ai passé une nuit sur un chalutier au large de Roscoff, peu après la tempête. J'ai voulu ainsi marquer ma proximité et une solidarité avec les gens de mer, qui souffrent depuis longtemps, à la fois de la dureté et des dangers de leur métier, des traumatismes que sont les naufrages de pétroliers ou autres navires aux cargaisons dangereuses, et de chocs économiques comme la hausse des prix du gazole.

Je l'ai fait pour attirer les projecteurs de l'actualité sur cette profession admirable à tant d'égards et qui souffre dans sa chair. Je l'ai fait parce que ces dernières semaines ont aussi été marquées par des drames comme le naufrage d'un chalutier au large de l'Irlande ou celui d'un pêcheur solitaire en baie de Seine... J'ai voulu rendre hommage à ce métier dangereux, marqué par combien de disparitions, et qui de ce fait nous interpelle : faisons-nous assez pour la sécurité des marins et des pêcheurs ? C'est une interrogation permanente, que n'efface pas la modernité des matériels.

J'ai voulu aussi marquer une solidarité envers ces gens de mer, pêcheurs ou conchyliculteurs, aujourd'hui traumatisés par l'Ievoli Sun après l'Erika. J'ai voulu qu'on sache qu'ils sont exposés à ces drames qui frappent régulièrement les côtes de France, parce que nous sommes le long de ce rail maudit où se précipitent tant de flottes marchandes, et sous le vent des tempêtes, ce qui fait de nous le réceptacle de tous les drames de la mer. Sur ce point j'indique, en écho à ce qu'a dit hier M. Gayssot lors des questions, que, quelles que soient les mesures qui seront prises au plan européen -et le Gouvernement, en particulier le ministre des transports, y travaille d'arrache-pied-, nous devons porter le regard plus loin en termes d'exigence. Il faudra, d'une manière ou d'une autre, prendre des mesures qui contrediront peut-être le droit maritime international dans son état actuel, des mesures d'autorité.

Il faut que le littoral français et ses populations puissent dire : parce que nous sommes le long du rail, et sous le vent des tempêtes, nous n'acceptons plus de voir des navires chargés de matières dangereuses naviguer quand le temps est à la tempête. Il faut des actes d'autorité pour mettre fin à cette provocation. Sans quoi nos côtes seront condamnées à voir se multiplier de tels accidents.

J'ai voulu aussi témoigner aux pêcheurs et aux marins de ma solidarité, et de celle du Gouvernement, à l'heure où comme tous les Français, mais plus que d'autres, ils sont frappés par la hausse du prix du carburant. Certains armements ont même été conduits à laisser leurs bateaux au port, le manque à gagner étant ainsi moins grand...

Nous avons certes allégé les charges dans l'urgence, ce qui a permis de faire face à la crise, dont le règlement a été assez apprécié dans la profession. Mais le problème reste entier, et la profession reste fragile face au prix du carburant. Quand je vois des chalutiers qui dépensent 2 000 litres de gazole par jour, je me dis qu'à bien des égards cette dépendance économique est irrationnelle.

Pour toutes ces raisons, je voulais commencer par rendre hommage aux marins pêcheurs de France, en me félicitant que, dans le budget que je vous présente, les crédits de la pêche augmentent de 7,9 %. Car ce secteur d'activité a une importance majeure, en termes d'aménagement du territoire, pour tout le littoral français. Et il est bon que le budget manifeste l'attention de la nation envers cette profession dangereuse et menacée.

J'en viens à l'action de la présidence française de l'Union européenne en matière agricole. Nous nous étions fixés des objectifs ambitieux, ce qui est sans doute nécessaire pour obtenir des résultats. Nous avons traité à la fois des sujets horizontaux et des problèmes sectoriels. Parmi les sujets horizontaux, la préparation des négociations de l'OMC. Pour une part à l'initiative de la présidence française, les conseils européens de l'agriculture ont pris l'habitude de parler de ce sujet avec leurs interlocuteurs de la Commission. Nous avons exprimé notre volonté que les enjeux agricoles dans ce domaine soient traités à part entière par le conseil agriculture, et que la Commission prenne l'habitude d'en référer au Conseil, notamment à l'approche de la fin de l'année -nous devrons sans doute donner alors à la Commission un mandat de négociation plus précis. A l'heure où nous attendons le résultat des élections américaines, auquel la négociation de l'OMC est pour une part suspendue, l'Europe doit savoir que, quel que soit ce résultat, elle a des choses à dire, pour que la négociation s'organise autour de ses priorités et de ses propositions. C'est ce que nous avons réussi au conseil agriculture, et c'est un premier acquis.

Il en va de même pour une autre négociation capitale pour l'agriculture européenne : celle de l'élargissement, et c'est le deuxième sujet horizontal dont nous avons voulu traiter régulièrement durant notre présidence. Ici aussi, le conseil des ministres de l'agriculture, sous l'impulsion de la France, a pris l'habitude d'en discuter régulièrement avec la Commission, et de suivre, pays par pays, OCM par OCM, les négociations sur l'élargissement, lequel constitue un enjeu agricole essentiel. L'ensemble des pays de l'Union est très attaché à ce que l'élargissement ne se fasse pas au prix d'un démantèlement de la PAC et d'une mise en cause de la sécurité alimentaire ; conseil après conseil, la volonté s'est exprimée d'une reprise de l'acquis communautaire.

Enfin, la présidence française a cherché à faire avancer le dossier de la simplification administrative de la PAC, que vous semblez souhaiter sur l'ensemble de ces bancs. Il faut dire qu'année après année, quels que soient les majorités et les gouvernements, les réglementations se sont entassées -parfois d'ailleurs à l'initiative des organisations professionnelles agricoles, je suis content que M. Jacob le reconnaisse.

M. Christian Jacob - Je suis objectif, moi !

M. le Ministre - Je sais bien que vous êtes capable d'être objectif -parfois ! (Sourires sur les bancs du groupe socialiste)

Le commissaire à l'agriculture, M. Fischler, a joué le jeu ; nous avons lancé le mouvement au dernier conseil agriculture, et la France peut en être fière, même si, bien sûr, tout ne se fera pas du jour au lendemain.

S'agissant des organisations communes de marché, notre priorité était le secteur des fruits et légumes, qui est l'un de ceux qui connaissent le plus de difficultés et qui bénéficient le moins de soutiens européens. Les crises conjoncturelles qu'il subit année après année finissent par prendre un caractère structurel, et l'agriculture méditerranéenne réclame un rééquilibrage des aides.

Avec des initiatives prises dans le cadre du projet sur les nouvelles régulations économiques -dont il faudra bien que le Parlement se sorte un jour par le haut- avec les allégements de charges que nous avons décidés cet été pour les travailleurs saisonniers, le contexte paraissait favorable. De fait, la Commission a entendu le message de la présidence française, puisqu'elle a fait des propositions dès le mois de septembre, et le Parlement s'est saisi très vite du dossier. J'ai bon espoir que nous puissions réformer cette OCM, sans pour autant faire déborder le vase budgétaire, au prochain conseil agriculture.

Quelques mots sur l'OCM du sucre, qui a donné lieu à une intervention enflammée de M. François Guillaume. Le commissaire Fischler a fait une proposition, assez conforme à ce que nous souhaitions, pour reconduire cette OCM pour cinq ans. De même qu'on ne change pas une équipe qui gagne, M. Fischler et nous-mêmes étions d'accord pour dire qu'on ne change pas une OCM qui marche, surtout quand elle ne coûte pas grand-chose au budget communautaire, fait l'objet d'un consensus des professionnels et ne contribue pas à une course effrénée à la production. Mais la proposition de M. Fischler a été retoquée par le collège des commissaires, qui a voulu faire souffler un vent de libéralisme et a considéré qu'on pouvait difficilement aller au-delà de deux ans, au motif que les accords de Berlin auraient prévu des clauses de rendez-vous en 2002. C'est là une interprétation erronée et choquante de ces accords : s'il est vrai que des clauses de rendez-vous ont été prévues, en particulier sur les oléo-protéagineux à l'initiative de la France, il n'a jamais été dit qu'on remettrait la PAC sur la table en 2002. Quand le commissaire Fischler est revenu devant le conseil agriculture, nous avons été dix ministres à refuser la proposition de la Commission. Quatre, les libéraux, l'ont acceptée ; un, le ministre italien, a préféré attendre de voir. Les choses ne sont donc pas du tout terminées ; le commissaire Fischler va, j'imagine, exprimer loyalement à la Commission les réactions du conseil.

M. Christian Jacob - Il faut aussi parler au commissaire Lamy...

M. le Ministre - Vous pouvez faire confiance au ministre de l'agriculture français pour cela.

Voilà où nous en sommes ; nous aurons encore deux conseils agriculture, en novembre et décembre. Je serai heureux de revenir devant l'Assemblée nationale pour tirer le bilan de la présidence française.

J'en viens à mon budget.

Les dépenses ont été excellemment décrites par les rapporteurs, mais je voudrais dire un petit mot des recettes.

Le Gouvernement et le Parlement ont décidé d'alléger les charges fiscales et sociales des Français. C'est un choix politique majeur.

M. François Sauvadet - Quel culot !

M. le Ministre - Les agriculteurs bénéficient pleinement de cet allégement. Différentes décisions ont été prises : baisse de l'impôt sur le revenu, baisse de l'impôt sur les sociétés, baisse de la CSG sur les revenus les plus faibles, mesures concernant la TIPP, mesures nouvelles tirées du rapport de Mme Marre et de M. Cahuzac.

M. Christian Jacob - Il n'a pas été distribué...

M. le Ministre - Il est public. Il est de si grande qualité que les éventuels problèmes matériels de distribution doivent être résolus au plus vite.

L'ensemble de ces baisses, donc, va se traduire dans le présent budget par un allégement de charges fiscales et sociales de plus de 2,2 milliards pour la « ferme France » !

M. Thierry Mariani - Et la TGAP ?

M. le Ministre - Je suis toujours étonné que ceux qui naguère matraquaient les Français d'impôts nous reprochent aujourd'hui de ne pas les diminuer assez ! En tout cas, je me réjouis que les agriculteurs français bénéficient pleinement de ces baisses.

J'en viens aux priorités de ce budget. De la première, la sécurité alimentaire, je me réserve de traiter en conclusion car il me semble que le sujet exige un exposé détaillé. La deuxième est l'enseignement agricole : celui-ci fonctionne de façon satisfaisante ; à la différence de l'éducation nationale, il maintient ses effectifs (Exclamations sur les bancs du groupe du RPR) ; il promeut l'alternance et l'apprentissage dans d'excellentes conditions et il affiche un taux d'insertion professionnelle qui atteint même 100 % dans certains établissements. Or, malgré cette réussite, il n'a pas bénéficié autant qu'il aurait fallu de la priorité donnée à l'éducation depuis une dizaine d'années. En particulier, il dispose de moyens insuffisants, en particulier pour ce qui est des personnels, et connaît un taux de précarité beaucoup plus élevé que dans l'éducation nationale. J'ai par conséquent pensé qu'un rattrapage s'imposait, pour lui garantir un développement harmonieux. D'où l'ouverture, dans ce budget, de 600 postes de titulaires : 200 seront créés, 400 résulteront d'opérations de « déprécarisation ». Nous amorçons ainsi un plan de remise à niveau qui répond à une exigence de simple justice.

Notre troisième priorité va à la forêt, dont les crédits croissent de 31 %, soit 563 millions. Nous confirmons ainsi l'effort consenti l'an dernier avec la suppression des taxes et l'intégration au budget du Fonds forestier national, mais nous nous donnons aussi le crédit dont elle a besoin à la loi d'orientation qui va venir en discussion au début de 2001. Nous complétons enfin le dispositif mis en place pour faire face aux conséquences des tempêtes de décembre 1999 : après la circulaire publiée comme annoncé à la fin de l'été et avec les 6 milliards que nous avons décidé d'y consacrer sur dix ans, nous disposerons de l'arsenal nécessaire pour organiser la reforestation et le traitement des forêts dévastées.

Je m'étonne à ce propos de certaines critiques de l'opposition : les crédits ne parviendraient pas à leurs destinataires ! Je puis leur démontrer que ces crédits sont bel et bien consommés -y compris dans les régions qui se plaignent le plus. Et je crois qu'on peut exclure qu'ils s'évaporent ! En revanche, il est vrai que les petits agriculteurs n'ont pu, faute de moyens économiques et parce qu'ils étaient souvent découragés, entrer dans la logique de notre premier plan, qui était un plan de soutien à l'activité économique -exploitation, stockage et transport des chablis, exportation... Eux attendaient avant tout une indemnisation et pendant des mois, nous avons donc entendu des plaintes de leur part. Cette situation est en train de s'estomper, grâce à la circulaire sur la reforestation, qui favorise le nettoyage et la replantation tout en leur donnant les moyens de se reconstruire un avenir.

Je suis donc plutôt optimiste quant au bon achèvement de ce plan imaginé mois après mois.

Dernière priorité de ce budget : les retraites, à propos desquelles M. Peiro a avancé des propositions rigoureuses...

M. Christian Jacob - Son rapport était annoncé pour le début de l'année. Or nous ne l'avons toujours pas !

M. le Ministre - Il l'a remis au Gouvernement et celui-ci, sur cette base, fera à son tour rapport au Parlement dans les semaines qui viennent, comme il s'y était engagé.

En cette quatrième année du plan de revalorisation des retraites agricoles, je constate que nous avons des chances raisonnables d'atteindre à la fin de la législature la priorité que nous nous étions fixée : porter les petites retraites au niveau des minima vieillesse -ceux des agriculteurs exploitants, des couples, des aides familiaux et des conjoints.

M. Thierry Mariani - Ce qui n'est guère glorieux !

M. le Ministre - Que ne l'avez-vous fait vous-même ? Nous, nous l'avons fait et nous ne nous en gargarisons pas outre mesure, il me semble ! Mieux : nous songeons déjà à l'étape suivante, qui consistera à mettre en place un régime complémentaire et obligatoire de retraite par répartition. C'est à notre sens la seule façon de préserver l'avenir. Le principe a été soumis à l'arbitrage du Premier ministre, après de longs travaux à l'échelon interministériel, et nous en sommes maintenant à arrêter un calendrier.

Nous sommes tous désireux de faire un autre pas en substituant dès que possible au versement trimestriel des retraites un versement mensuel. Jusqu'ici, nous avons buté sur le coût, de 6 à 7 milliards pour la première année. Or voici que la MSA nous a fait savoir qu'elle était prête à assurer la trésorerie de cette mesure, par le biais d'un emprunt : le coût tomberait alors à 250 millions, selon ce qu'a calculé M. de Courson, ou à un peu plus, probablement. Quoi qu'il en soit, je suis ouvert à une telle proposition, d'autant que la MSA est un régime fort bien géré grâce à son équipe dirigeante et je souhaite que nous travaillions ensemble au projet, en vue d'aboutir d'ici à 2001 ou au plus tard dans deux ans.

Certains responsables de l'opposition veulent voir la réalisation de leurs prédictions et la preuve de notre échec dans le fait que nous ne parviendrons pas à 50 000 CTE d'ici la fin de l'année...

M. Thierry Mariani - Il vous faudra 140 ans au rythme actuel pour atteindre vos objectifs !

M. le Ministre - En fait, j'avais avancé le chiffre de 100 000 contrats d'ici à la fin de la législature.

M. Christian Jacob - Cela, c'est votre nouvel objectif !

M. le Ministre - Non. J'ai dit que j'essaierais d'arriver à 50 000 d'ici à la fin de 2000 et je vois que c'est maintenant exclu. En effet, la négociation avec la Commission du plan national de développement rural a pris plus de temps que nous ne le souhaitions : elle ne s'est achevée que fin juillet, si bien que nous avons perdu six mois. Non seulement cela a pris du temps, mais cela nous a entraînés dans la spirale, bien française, de la complexité... (Interruptions sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL)

M. Christian Jacob - Forcément ! C'est votre loi et c'est vous qui l'appliquez !

M. le Ministre - C'est dû parfois à l'administration, en effet, et je le lui ai dit, mais c'est encore plus souvent dû aux organisations professionnelles, et elles le reconnaissent d'ailleurs elles-mêmes (Interruptions sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL). Figurez-vous qu'en Italie, en Allemagne, en Espagne, il y a, au plus, une petite dizaine de mesures-types ; en France, il y en a 120 ! Certes, notre pays est celui dont l'agriculture est la plus diversifiée, mais il n'empêche que c'est trop, et c'est pourquoi j'ai pris des mesures de simplification dont j'attends beaucoup.

M. François Sauvadet - Si vous nous aviez écoutés !

M. le Ministre - Je vous écoute, puisque je vous entends... (Sourires) Pour l'heure, 30 000 CTE ont été validés, et plus de 60 000 sont en cours d'élaboration, si bien que l'objectif de 100 000 pourra être atteint d'ici la fin de la législature.

M. Michel Bouvard - Laquelle ?

M. le Ministre - J'en viens à la question des crédits. Il est vrai que ceux-ci sont en baisse de 950 millions, mais j'ai obtenu du Premier ministre que l'ensemble des fonds non consommés cette année soient reportés sur 2001.

M. Christian Jacob - Demandez-vous plutôt pourquoi ils n'ont pas été consommés ! C'est parce que le CTE ne répond pas aux attentes des agriculteurs !

M. le Ministre - Nous disposons donc de 1,35 milliard pour gérer la modulation. Celle-ci, je le rappelle, n'est pas un impôt (« Si ! » sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL).

M. Gilbert Meyer - Et qui donc finance l'Europe ?

M. le Ministre - Ce n'est pas un impôt, puisque pas un franc ne va dans la poche de l'Etat et que tout va à la ferme France. Ce sont des crédits européens, qui proviennent de la PAC, et qui sont redistribués autrement, sur la base des CTE et d'autres dispositifs tels que les mesures agri-environnementales ou l'indemnité compensatoire de handicap naturel. Nous n'avons d'ailleurs pas de mal à les redistribuer.

M. Christian Jacob - En somme, vous avez une cagnotte d'un milliard dont vous ne savez que faire !

M. le Ministre - Il est vrai que ça fait un peu moins d'argent pour ceux qui touchent plus de 200 000 F d'aides par an ! Je rappelle à ce propos qu'il n'a jamais été dit, ni par aucun gouvernement français ni par la Commission, que ces aides seraient versées ad vitam æternam, quel que soit le niveau de vie des intéressés ! (Exclamations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL) Pour ma part, je ne cesse de dire aux agriculteurs que les aides directes sont menacées à terme, tant par les contraintes budgétaires européennes que par l'OMC, et que notre devoir est de commencer -encore timidement, il est vrai- à les réorienter et à les redistribuer. Je suis d'ailleurs persuadé que vous nous remercierez un jour de l'avoir entrepris ! (Exclamations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL)

C'est donc avec beaucoup de sérénité que j'affronte le débat sur l'ICHN. Il ne s'agit pas de mettre à bas vingt ans de politique de la montagne, mais au contraire de la renforcer, car l'agriculture de montagne rend d'immenses services, sur toutes sortes de plans, à l'économie et à la nation, et elle mérite d'être plus encouragée encore.

M. Michel Bouvard - C'est vrai !

M. le Ministre - J'ai même dit que j'étais prêt à mettre plus d'argent sur la table, grâce au surcroît de cofinancement européen, soit 500 millions. Ce n'est tout de même pas rien !

Il s'est trouvé que, dans la négociation des plans de développement rural nationaux, Bruxelles a demandé à la France -comme à nos partenaires qui, contrairement à nous, l'ont accepté- de s'engager, en contrepartie, à suivre de « bonnes pratiques agricoles », ce qui, en soi, ne fait guère problème en montagne, sauf que Bruxelles entend prendre comme indicateur le taux de chargement à l'hectare ! J'ai tout de suite fait montre de circonspection et demandé à regarder les choses de plus près. Calculs faits, il se trouve que les départements les plus pénalisés seraient, après les Hautes-Pyrénées -ce qui n'est pas, je vous l'accorde, une raison suffisante (Sourires)-, le Lot, les Pyrénées-Atlantiques et les Hautes-Alpes. J'ai alors demandé à la Commission de réétudier le dossier, car je ne peux pas accepter que les bénéfices retirés par la grande majorité des agriculteurs de montagne se paient de l'exclusion des autres. Je suis donc fondé à considérer que la poussée de fièvre que chacun a pu constater n'était pas dirigée contre moi, même si certains poussaient en ce sens, mais était au contraire destinée à m'aider dans la négociation... (Interruptions sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL)

Parlons maintenant des installations. Leur nombre baisse depuis plusieurs années, mais il est par trop simpliste de parler d'« échec flagrant » : la réalité est plus complexe. Quel ministre de l'agriculture pourrait se satisfaire de cette baisse, à plus forte raison la souhaiter ? Dépassons, s'il vous plaît, la polémique et recherchons les causes profondes. Sont-elles financières ? Non, puisque les crédits ne sont même pas consommés en totalité. Je rappelle, en outre, que, le CNJA ayant dit l'an dernier que le CTE et la globalisation de certains crédits menaçaient gravement le FIA, j'avais décidé, pour le rassurer, de maintenir celui-ci au sein du FEOGA.

Et j'avais donné pour consigne que l'ensemble des demandes soient honorées. Il y avait 300 millions de crédits, je pense qu'à la fin de l'année nous en aurons à peine consommé 20.

M. Christian Jacob - C'est à cause du manque de confiance dans le Gouvernement !

M. le Ministre - Le problème de l'installation n'est pas un problème de crédits. Alors faut-il incriminer la réglementation ? Je ne crois pas non plus. La preuve : je me suis rendu avec M. Parrenin dans une circonscription du Doubs voisine de la mienne...

M. Christian Jacob - Je vous ai invité aussi mais vous n'avez pas répondu à mon invitation !

M. le Ministre - Chaque chose en son temps, Monsieur Jacob, je viendrai sans doute un jour mais pas forcément au moment choisi par vous. Je précise que la circonscription en question n'était pas socialiste mais RPR, et là le CNJA m'a mis cordialement au défi de reprendre seize mesures nouvelles qu'il énonçait. J'ai dit banco, les seize ont été avalisées. Mais cela ne change pas fondamentalement les choses.

Le faible nombre d'installation tient à des raisons plus subtiles. Les discours catastrophistes qui sont tenus ici et là n'incitent sans doute guère à devenir agriculteur. J'entendais l'autre jour dans la Somme des représentants de la profession dresser un tableau tellement noir de la situation que, considérant le jeune assis à côté de moi et prenant à mon tour la parole, j'ai dit : « mais alors, à vous en croire, celui-ci qui s'installe est fou ? Car vraiment on croirait parfois que c'est « Apocalypse now » ! Il serait bon que de temps en temps, on veuille bien dire que l'agriculture est un beau métier plein d'avenir » (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Philippe Auberger - Ce ne serait que du discours !

M. le Ministre - A force de tenir le discours inverse, on éloigne les candidats.

Et puis il y a aussi les réalités économiques : le chômage baisse partout, en particulier celui des jeunes, et l'on trouve donc plus facilement du travail ailleurs. A quoi s'ajoutent des raisons sociologiques diverses.

J'ai donc proposé aux organisations de jeunes agriculteurs de dépasser ces petites querelles sur les crédits et la réglementation pour travailler ensemble dans un groupe constitué au sein du Conseil supérieur de l'orientation sur les problématiques de l'installation à moyen et à long terme. Je souhaite vivement que les parlementaires participent à cette réflexion.

Je ne saurais conclure sans évoquer la crise de l'ESB, qu'il nous faut considérer à la fois du point de vue de la sécurité alimentaire et du secteur agricole concerné.

J'ai dit tout à l'heure, lors de la séance des questions, combien il me semblait déplacé de faire de la politique politicienne sur un tel sujet (Exclamations sur les bancs du groupe du RPR et du groupe UDF).

MM. François Sauvadet et Jacob - Agissez donc !

M. le Ministre - Si je compare ce que j'ai fait avec ce qu'ont fait les gouvernements que vous avez soutenus, je n'ai pas à rougir. Vous rendez-vous compte qu'à force de réclamer jour après jour -oh, depuis quelques jours seulement et après une interpellation publique au plus haut niveau de l'Etat dont j'ai bien compris le rôle qu'elle jouait auprès de vous- l'interdiction totale des farines animales, vous vous lancez en réalité dans une critique systématique de votre propre action (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste). Car nous payons en 2000 le prix des décisions ou des non-décisions de 1995. De même que les mesures que nous prenons aujourd'hui produiront leur effet dans cinq ans.

Lorsque vous faites le procès des farines animales, vous faites donc le procès de votre action en 1996 ! (Protestations sur les bancs du groupe du RPR et du groupe UDF) Vous pourriez donc faire preuve de plus de retenue et de pudeur ...

M. Christian Jacob - Vous polémiquez !

M. le Ministre - Mais qui polémique, Monsieur Jacob ?

M. Christian Jacob - C'est vous !

M. le Ministre - Vous me faites penser à ces joueurs de rugby qui relèvent les mêlées et qui vont ensuite se plaindre à l'arbitre ! (Rires sur les bancs du groupe socialiste)

Si j'ai un conseil à vous donner, c'est d'interroger M. Vasseur. Il n'est plus dans la politique mais il se souvient de ce qui s'est passé et j'ai plutôt du respect pour ce qu'il a fait. Je l'ai moins critiqué quand j'étais parlementaire de l'opposition que vous ne le faites aujourd'hui sans le dire (Exclamations sur les bancs du groupe du RPR et du groupe UDF).

M. Christian Jacob - Quel baratin !

M. le Ministre - L'opposition ne cesse de nous demander ce que nous faisons. Contrairement à elle, nous n'arrêtons pas de faire. Qui a créé l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments si ce n'est cette majorité ? Si vous l'aviez fait, nous n'aurions pas eu à le faire (Exclamations sur les bancs du groupe du RPR et du groupe UDF).

Qui a mené un dialogue permanent avec elle ? Ce qui nous a amenés à prendre toute une série de mesures : l'interdiction du jonchage -nous sommes le premier pays d'Europe à le faire ; l'interdiction d'un certain nombre de matériaux à risques spécifiés ; le retrait des intestins de bovins ; le retrait des graisses animales pour l'alimentation animale ; l'interdiction de la rate et du thymus ; l'interdiction prochaine des colonnes vertébrales. Aucun autre pays d'Europe n'a pris toutes ces décisions...

M. Christian Jacob - Vous ne répondez pas à nos questions !

M. le Ministre - Je vous dis ce que nous avons fait. Arrêtez donc de prétendre que nous ne prenons pas de décisions, sortez des slogans primaires et prenez le temps de considérer le fond du dossier !

A titre personnel, je me suis exprimé bien avant vous, Monsieur Jacob, pour une interdiction des farines animales (Exclamations sur les bancs du groupe RPR) et je peux vous ressortir mes déclarations...

M. Christian Jacob - Pas de déclarations, des décisions !

M. le Ministre - J'y viens précisément car, contrairement à vous, je ne suis pas dans le gouvernement du « y a qu'à » et du « faut qu'on » !

Certains se contentent aujourd'hui de répéter qu'il faut interdire les farines animales. Mais ceux qui le feront en assumant vraiment la décision, ce sera nous.

M. Christian Jacob - Mais j'espère bien !

M. le Ministre - Si vous l'aviez fait plus tôt, nous n'aurions pas à le faire. Nous, nous le ferons quand nous serons en mesure de le faire, c'est-à-dire quand nous aurons mis en place tous les dispositifs nécessaires.

M. François Sauvadet - Cela fait un mois qu'on attend !

M. le Ministre - Et vous, Monsieur Sauvadet, qu'avez-vous fait ? Vous faites aussi partie du gouvernement du bla-bla ! Nous, nous agissons et nous préparons sérieusement une décision qui sera lourde de conséquences. La prendre du jour au lendemain, ce serait se retrouver avec des millions de tonnes de déchets à gérer. Or, il y a ici un certain nombre d'élus locaux qui savent que la France est encore largement immature en ce qui concerne la gestion de ses déchets (Exclamations sur les bancs du groupe du RPR et du groupe UDF).

Nous parlons ici de montagnes de farines animales et, si vous voulez, je vais vous emmener en voir. Voir par exemple ces stocks anglais qui se trouvent dans des bateaux rouillés au large des côtes anglaises car nos amis anglais ne savent pas quoi en faire.

Moi, je m'honore d'appartenir à un gouvernement qui procède avec méthode et qui fait les choses quand il est capable de les faire (Exclamations sur les bancs du groupe du RPR et du groupe UDF).

Si nous ne gérons pas préventivement ces stocks, nous courons le risque qu'ils soient disséminés par le vent ou par le ruissellement, ou encore qu'ils soient à l'origine d'une pollution de l'air en cas d'incinération excessive. Bref, les conséquences d'une décision à la légère pourraient être pires que celles que nous voulons éviter (Exclamations sur les bancs du groupe du RPR et du groupe UDF).

Vous donnez dans le bla-bla mais nous, nous sommes obligés de procéder sérieusement.

M. François Sauvadet - Scandaleux.

M. Christian Jacob - Lamentable.

M. le Ministre - S'il est scandaleux et lamentable de prendre garde à la santé de ses concitoyens, alors j'assume avec sérénité ces adjectifs (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

Ce sera donc nous qui prendrons la décision, nous qui en assumerons les conséquences et en paierons le prix, et vous, vous assurerez le bla-bla !(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

C'est la même chose pour la généralisation des tests. Là encore, certains se réfugient dans le « y a qu'à ». Mais quels tests veulent-ils que l'on généralise ? Existent-ils seulement ?

Le programme de tests que la France met aujourd'hui en _uvre est le plus important jamais mis en _uvre : 48 000 tests sont en effet prévus. D'ailleurs, le commissaire européen à la santé a reconnu lui-même aujourd'hui que la France avait eu le courage de déclencher avant tout le monde un programme de très grande ampleur, puisque quatre fois plus élevé que ce que demande l'Union européenne. Le programme de tests est un programme de recherche fondamentale.

A partir du moment où nous mettons en _uvre ce programme, nous découvrons forcément plus de cas.

Cela ne signifie pas que l'épizootie se déchaîne, mais que nous l'évaluons mieux. Les chercheurs responsables de ce programme n'en ont pas encore tiré les conclusions. La moitié seulement des tests a été réalisée. Les scientifiques présenteront vraisemblablement une première évaluation à la fin du mois (Exclamations sur les bancs du groupe UDF). Monsieur Sauvadet, si vous vous estimez plus compétent, quittez ces bancs et mettez-vous à la disposition de la science française... On nous demande de généraliser dès à présent des tests dont nous ne savons pas encore ce qu'ils valent. Nous avons choisi d'évaluer d'abord le test suisse, nous évaluerons ensuite le test français. De plus nous allons étendre le programme de dépistage à tout le territoire, de façon aléatoire, à des animaux non suspects.

Dès que nous le pourrons, nous généraliserons les tests. Pour l'instant, c'est impossible. Si le Gouvernement disposait de cette arme absolue qu'est le test de toutes les viandes, il l'utiliserait. Mais en faire le slogan incantatoire d'un discours démagogique, alors qu'on sait que la mise en _uvre est impossible, c'est mentir aux Français, et ce procédé risque de se retourner contre vous.

La proposition avancée par la FNSEA d'abattre tous les bovins nés avant 1996 a des avantages et des inconvénients, ceux-ci l'emportant sans doute sur ceux-là. Commençons par les avantages. Si l'année 1996 est celle d'instauration de la sécurité maximum, on peut en effet tirer un trait sur tout ce qui s'est fait avant. C'est aussi une façon de soutenir la filière que d'en retirer 2 ou 3 millions de bovins, en signalant tout de même qu'à 6 000 F par tête, il en coûterait à l'Etat 18 milliards. Le principal inconvénient serait de rajouter de l'irrationnel à l'irrationnel, de la psychose à la psychose. On le mesure déjà à la réaction des marchés et à celle des acheteurs étrangers qui ont pris pour une décision ce qui n'est qu'une proposition. Déjà le dégât est fait.

M. Christian Jacob - Je suis d'accord !

M. le Ministre - La mesure proposée serait également aveugle. Les bêtes potentiellement contaminées seraient effectivement abattues, mais aussi toutes celles qui n'ont jamais consommé de farines animales.

Autant je suis prêt à étudier des mesures de soutien ; autant nous travaillons pour parvenir à interdire les farines animales, dès que possible, autant je ne veux pas me lancer dans un tel processus inconsidérément. Pourquoi cette psychose ? Il est troublant de constater que la crise a démarré de façon presque artificielle. Aucun fait nouveau, aucune découverte ne l'a provoquée. Une ambiance générale s'est développée, sous l'effet grandissant de la multiplication des tests due aussi à l'incident de Bernay qui a prouvé en fait que notre dispositif de contrôle était efficace, mais qui a conduit à imprimer des sottises, par exemple qu'un animal contaminé était entré dans la chaîne alimentaire, ce qui est faux.

Reste que la psychose existe, que la population est troublée, que les ventes de b_uf ont chuté trois ou quatre fois plus qu'au plus fort de la crise de l'ESB en 1996, que des élus de tous bords, pour répondre peut-être à la pression de l'opinion locale, se sont pressés d'en rajouter en interdisant la consommation de b_uf. S'il existait un danger, on peut croire que le gouvernement français, quel qu'il soit interdirait à toute la population de consommer du b_uf. Mais aucun chercheur n'a jamais trouvé aucun prion dans un muscle bovin. Aussi faut-il retrouver la voix de la raison. L'AFSSA peut nous y aider. En attendant, nous avons ce problème sur les bras. Tous les concours pour faire revenir un peu de raison sont les bienvenus.

Je regrette que certaine déclaration solennelle, à un niveau élevé de l'Etat, ait participé à cette psychose (Murmures sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL).

M. Alain Tourret - L'irresponsabilité de M. Chirac me semble acquise.

M. le Ministre - Une intervention présidentielle, c'est quelque chose de lourd, surtout quand elle prend à la télévision les Français à témoin.

M. Christian Jacob - Et vous, vous n'avez pas l'impression d'être lourd ?

M. le Ministre - Un tel discours télévisé crée une solennité particulière qui participe de la psychose même si, j'en suis sûr, telle n'était pas l'intention du chef de l'Etat. Mais le résultat est là (Protestations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL).

Hélas, nous aurons à reparler de sécurité alimentaire. Aujourd'hui, efforçons de faire prévaloir la sérénité et la raison (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. François Sauvadet - Je ferai un appel au Règlement fondé sur son article 58. L'opposition dans son ensemble ne peut pas accepter que, face à une situation d'une telle gravité qui touche l'ensemble de la population, les propos qu'elle tient et les propositions qu'elle avance soient qualifiés de « bla-bla ».

De plus, il est inacceptable qu'un ministre de la République mette ici publiquement en cause ce qu'a pu déclarer le chef de l'Etat dans un propos responsable et attendu par l'opinion (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste).

Le droit de l'opposition est mis en cause et il ne serait pas plus acceptable qu'un ministre issu de nos rangs, mes chers collègues, s'adresse à vous de cette manière. Notre rôle est de contrôler et de proposer et vous devez, Monsieur le ministre, respecter ce que nous disons. Vous ne représentez pas toute la France à vous tout seul. Durant votre long soliloque, vous n'avez pas répondu à nos questions.

Pour que le débat retrouve sa sérénité, je demande une suspension de séance de dix minutes (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste).

Mme Odette Grzegrzulka - Cinéma !

La séance, suspendue à 23 heures est reprise à 23 heures 10.

M. Christian Jacob - Rappel au Règlement, fondé sur l'article 58. Je voudrais, après les écarts de langage et les dérapages du ministre, qu'il prenne l'engagement d'une plus grande sérénité, de rester dans le cadre du budget de l'agriculture et surtout qu'il ne se permette pas de mettre en cause le Président de la République dans une enceinte où il n'a pas la possibilité de répondre. Je souhaite que M. le ministre prenne cet engagement.

M. le Président - La Présidence prend acte de votre rappel au Règlement.

Top Of Page

QUESTIONS

M. René Dutin - Vous le savez, Monsieur le ministre, nous jugeons insuffisantes vos propositions sur la revalorisation de la retraite forfaitaire agricole. Nous avions demandé que les retraites minimales des agriculteurs non salariés soient portées dès cette année au niveau du minimum vieillesse. Vous avez reporté cette mesure en 2002 et c'est pourquoi, à titre personnel, je ne voterai pas les crédits du BAPSA.

Par ailleurs, vous avez prévu que cette mesure ne touche que les chefs d'exploitation et les veuves, qui percevront alors 3 575 francs par mois, contre 2 840 pour les conjoints et les aides familiaux. Pourtant ces derniers sont des retraités à part entière, qui ont autant travaillé que les chefs d'exploitation. Nous ne comprenons donc pas pourquoi leurs retraites seraient plus faibles. Chaque retraité doit compter pour un.

Les conjoints dont il s'agit sont presque toujours des femmes. A l'heure où chacun _uvre pour une véritable égalité entre hommes et femmes, pourquoi ne serait-ce pas vrai dans le monde agricole ? La retraite d'une conjointe ne doit pas être calculée par rapport à celle de son mari.

En un mot : mêmes annuités cotisées et validées, même retraite !

Quelles mesures comptez-vous prendre pour que les retraites minimales soient portées au niveau du minimum vieillesse pour tous les retraités agricoles non salariés considérés individuellement ?

M. le Ministre - Monsieur le Président, ayant parlé longtemps, je prends l'engagement de répondre brièvement aux questions.

Outre les mesures de revalorisation, le Gouvernement a décidé d'abaisser le nombre d'annuités nécessaires de 32,5 sans à 27,5 ans. On peut toujours dire qu'on ne va pas assez vite, mais les engagements pris sont scrupuleusement tenus. Nous sommes prêts à examiner avec les parlementaires comment nous pouvons aller plus loin.

M. René Dutin - Ma deuxième question concerne le coefficient de minoration prévu par le décret du 28 février 1997. L'an passé, vous m'aviez répondu que les personnes ayant cotisé moins de 32,5 ans avaient pour la plupart, exercé une autre activité et percevaient en conséquence une pension d'un autre régime tout en reconnaissant que ce n'était pas toujours le cas. La seule mesure prise pour corriger la situation a été l'abaissement du seuil de revalorisation à 27,5 ans pour les retraités n'ayant que leur pension agricole. Mais comment serait-il possible qu'une personne ayant cotisé ne serait-ce que vingt ans au régime agricole perçoive une retraite importante par ailleurs ?

Je souhaiterais donc connaître les mesures que vous allez prendre pour que tous les retraités agricoles bénéficient de revalorisations.

M. le Ministre - Sans répéter ce que je viens de vous répondre, je vous confirme que le Gouvernement fait le maximum. Ayant été rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales pour le BAPSA, j'ai moi-même dénoncé pendant des années la faiblesse des revenus et des retraites agricoles. L'effort que nous faisons devra bien sûr être poursuivi.

M. Germain Gengenwin - Mon collègue Jean-Pierre Abelin souhaitait vous interroger, Monsieur le ministre, sur les CTE. Il vous fait observer que pour 100 000 CTE à 150 000 francs, il ne faut pas 950 millions mais 3 milliards par an sur cinq ans. Par ailleurs, il déplore que dans son département la Vienne, la modulation coûte 35 millions à l'ensemble de la profession et il vous demande quelle contrepartie vous pouvez obtenir de Bruxelles.

Pour ma part, je souhaite vous interroger sur le règlement sucrier. En décidant une reconduction pour deux ans seulement, la Commission européenne dévoile sa véritable intention, qui est la renégociation de l'ensemble de la PAC dès 2002. Pourtant les chefs d'Etat et de Gouvernement avaient décidé dans les accords de Berlin que ce règlement irait jusqu'à 2006. Entendez-vous faire preuve de fermeté ?

M. le Président - Je dois vous rappeler que la Conférence des Présidents a interdit de poser des questions au nom de collègues.

M. le Ministre - Sur le sucre, j'ai répondu dans mon intervention générale. La France, qui avait proposé la reconduction de l'OCM pour six ans, a été suivie par neuf de ses partenaires ; il appartient donc maintenant à la Commission de revoir sa copie pour tenir compte de la position du Conseil.

J'ai également déjà répondu sur la modulation. Ce n'est pas un impôt, mais une autre manière de distribuer une petite partie de l'argent public destiné à l'agriculture. Cet argent ira en totalité à l'agriculture, mais sur des bases qualitatives et non plus seulement productives.

M. Dominique Caillaud - Ma question concerne à nouveau les retraites.

Les agriculteurs restent la dernière grande catégorie à ne pas bénéficier de la mensualisation de leurs retraites. Ne pourrait-on corriger cette situation dès 2001 ? De même, j'ai entendu vos promesses concernant la mise en place d'une retraite complémentaire, mais j'aimerais avoir des certitudes. Plus généralement, comment le Gouvernement compte-t-il faire bénéficier les retraités de l'amélioration de la conjoncture ?

M. le Ministre - Un plan pluriannuel de revalorisation des retraites a été établi ; il sera respecté, contrairement à certains engagements passés. Sur la législature, les retraites agricoles bénéficieront ainsi de 25 ou 26 milliards supplémentaires.

J'ai toujours dit que la mensualisation ayant un coût de 6 ou 7 milliards sur un an, il me paraissait difficile d'en faire une priorité. La MSA avance l'idée d'un emprunt à long terme, qui coûterait 250 millions par an ; c'est une idée intéressante, que je prends l'engagement d'étudier.

M. Jean-Marie Morisset - Monsieur le ministre, vous aviez annoncé il y a un mois le retrait des intestins : les professionnels attendent avec impatience la sortie de l'arrêté et aimeraient savoir qui va les indemniser.

Ma question concerne les difficultés de mise en place des CTE. Vous étiez venu dans mon département en avril dernier pour signer les 14 premiers. Depuis, il y en a eu 9... C'est un problème de complexité administrative. Le préfet n'a signé aucun arrêté-type ; or les agriculteurs attendent des règles du jeu. Ils sont également inquiets concernant le financement des CTE.

Aux éleveurs, aux viticulteurs, vous dites de faire des CTE. Est-ce la solution obligée dès que la conjoncture est difficile ?

M. le Ministre - Je ne puis vous laisser dire ce que vous avez dit à propos de l'arrêté « intestins » : les professionnels savent fort bien ce qu'il contient car nous avons pris tout le temps nécessaire pour l'élaborer en étroite concertation avec eux.

S'agissant des CTE, je ne sous-estime pas la complexité de la procédure, mais comment se fait-il que, dans certains départements, on en ait signé des dizaines voire une centaine ? Est-ce que là, on saurait dépasser les obstacles que vous décrivez comme insurmontables ? Et, puisque tous les élus semblent acquis à cette cause, ne faut-il pas incriminer, dans les autres départements, à côté de l'administration, les organisations professionnelles ?

Non, je ne considère pas que la signature d'un CTE soit le point de passage obligé pour bénéficier de mesures conjoncturelles, dans la filière ovine. Simplement, je pense que celle-ci, en raison de sa structure, de sa contribution à l'emploi et à l'aménagement des territoires et des paysages, peut au mieux s'inscrire dans cette logique de projet -et y trouver avantage. Nous travaillons donc avec ses membres en vue de simplifier le CTE-ovins, et j'ai bon espoir qu'elle pourra ainsi en tirer assez vite bon profit.

M. Thierry Mariani - Rappel au Règlement, fondé sur l'article 58 ! Celui-ci a trait au déroulement de la séance mais mon propos a plus particulièrement trait à la retransmission de la séance pour ceux qui ne sont pas présents dans l'hémicycle. Jusqu'ici, la chaîne parlementaire permettait à nos concitoyens de suivre nos débats et, accessoirement, de constater comme ce soir la présence de leurs élus dans l'hémicycle, à raison d'une centaine. En outre, notre discussion sur des problèmes d'actualité méritait d'être entendue, je pense. Or, me trouvant à la buvette pendant la suspension de séance, j'ai constaté que notre chaîne diffusait le propos d'un historien de la mer, appartenant à l'Institut catholique. Je n'ai rien contre cet homme mais, quand tous se plaignent du peu d'écho donné à nos débats, ne peut-on regretter cette prolifération des commentaires et du bla-bla, pour reprendre le terme de M. le ministre ?

M. le Président - La Conférence des présidents sera informée de votre rappel au Règlement.

M. Stéphane Alaize - La réglementation européenne relative aux ICHN est en train de changer et d'importantes modifications sont ainsi apportées au dispositif des indemnités. Le zonage n'est pas remis en cause pour la montagne et pour les territoires défavorisés et le respect des bonnes pratiques est considéré comme acquis dès lors que le taux de chargement est compris entre certaines bornes, correspondant au sous- et au sur-pâturage. Cependant, à cet égard, des problèmes apparaissent, compromettant l'avenir de certaines activités fragiles : ainsi de l'élevage dont le taux de chargement est inférieur à 0,15 en zone sèche ou à 0,35 en piémont. Dans les négociations en cours, la France propose que, dans de telles situations, on puisse déroger au taux minimal de chargement. Où en est la discussion ?

D'autre part, pour les éleveurs dont l'indemnité serait réduite ou qui seraient exclus du nouveau dispositif, vous proposez un régime de transition sur deux ans : celui-ci est-il acquis ?

Enfin se pose le problème du report du versement. Les indemnités compensatoires étaient calculées sur la base des déclarations faites au 31 janvier, ce qui permettait un versement au cours du premier semestre ; désormais, le calcul se fera sur la base de la déclaration de surface déposée le 30 avril, ce qui obligera à reporter ce versement. Est-il exact que le ministère envisagerait d'accorder un acompte avant instruction complète du dossier, pour ne pas trop perturber la trésorerie des exploitations ? Par ailleurs, ne pourriez-vous dire à la Commission que le renforcement des ICHN permettrait à nos vaches et à nos moutons de manger de la bonne herbe ?

M. le Ministre - Je crois vous avoir déjà répondu pour l'essentiel. Il doit être clair que le Gouvernement ne veut pas remettre en cause la politique de la montagne définie voici 25 ans. N'acceptant pas les taux de chargement et les seuils proposés par la Commission, nous avons repris les discussions avec elle en vue de pérenniser, et non de fragiliser les ICHN, d'accroître les indemnités versées aux agriculteurs, de rendre le dispositif plus simple et, enfin, d'obtenir que personne n'en soit exclu.

Ce dispositif nous permettra d'affecter chaque année 500 millions de plus à la politique de la montagne et aux ICHN : vous voyez que le Gouvernement est attaché à préserver l'avenir de cette agriculture !

M. Jacques Bascou - Tous les élus du Midi s'inquiètent avec les professionnels de la situation du marché des vins de table et de pays. Une distillation a été demandée en début de campagne afin d'apurer les stocks et de réguler ce marché. Dans le cadre de la nouvelle OCM, cette distillation ne peut cependant atteindre l'objectif, en raison du faible prix payé. Un complément de prix à la distillation communautaire aurait garanti un niveau plancher plus satisfaisant, mais cela supposerait une modification du volet de gestion du marché. En août, vous avez annoncé que vous feriez une démarche en ce sens. Où en est-on ?

Pour la campagne de 2000, vous avez décidé de mobiliser 75 millions pour la promotion des vins de table et de pays à l'étranger : nous vous en félicitons, mais de quel succès est assurée cette campagne si l'on ne cesse de prendre pour première cible le vin dans l'action qu'on mène contre l'alcoolisme -action dont les viticulteurs ne contestent pas le principe ? La découverte d'un effet bénéfique d'une consommation modérée avait eu un heureux effet sur nos exportations. Aujourd'hui, alors que ces exportations régressent, comment éviter qu'un fâcheux amalgame ne vienne contrecarrer nos efforts ? (« Très bien ! » et applaudissements sur plusieurs bancs)

M. le Ministre - La question qui se pose à vous n'est pas tant de modifier l'OCM que de veiller à ce que les règlements d'application soient conformes à la décision politique prise à Berlin. C'est sur ce point que nous nous opposons à la Commission et tant que nous n'avons pas obtenu d'accord sur les règles de distillation préventive comme sur les problèmes posés par la traçabilité de produits concurrençant nos vins de qualité, nous ne nous tiendrons pas pour satisfaits. Cependant, j'ai pu organiser une rencontre entre le commissaire Fischler et une délégation de viticulteurs français, rencontre qui a permis de débloquer la situation sur certains points. Les discussions se poursuivent donc mais j'ai bon espoir qu'elles aboutissent.

Mme Marie-Françoise Perol-Dumont - Déjà porté de 43,5 à 45 millions l'an passé, le budget de la SAFER atteindra 50 millions en 2001. S'y ajoutera, via le FEOGA, un financement communautaire qui devrait permettre de doubler les interventions actuelles. Nous nous en félicitons, mais pouvez-vous nous assurer que ces crédits seront bien utilisés pour des missions de service public ? Les SAFER ne sauraient être confondues avec de simples agences foncières ! La loi d'orientation de juillet 1999 a affirmé notre volonté de maintenir une agriculture vivante en luttant contre la concentration excessive des exploitations. Elle a aussi confirmé en l'élargissant le champ d'action des SAFER : celles-ci vont-elles accroître leur effort de maîtrise foncière, en vue de favoriser les installations des jeunes agriculteurs, de contribuer à un aménagement équilibré des territoires ruraux et de lutter contre la désertification des campagnes ?

M. le Ministre - Je vous rassure : l'augmentation de ces crédits va de pair avec un recadrage de l'activité des SAFER. Nous réviserons en effet les modes d'affectation des subventions afin de tenir compte des nouvelles règles définies par le plan national de développement rural, mais aussi avec le souci de parvenir à une mutualisation -les subventions bénéficieront en priorité aux SAFER en difficulté.

M. Jean-Paul Nunzi - Un nouveau règlement de l'Union européenne régissant les interventions sur les marchés intra-communautaires va modifier ses modes d'intervention. Les thèmes d'actions de promotion dite générique doivent porter sur les caractéristiques intrinsèques et les avantages des produits en termes de qualité, d'hygiène, etc. Ainsi, de telles campagnes pourront être lancées en faveur des fruits et légumes frais, avec un financement communautaire de 50 %, mais en contrepartie d'un apport de 30 % des organisations professionnelles et de 20 % de l'Etat membre. Les organisations professionnelles souhaitent mettre à profit ce nouveau règlement : l'Etat fournira-t-il la participation exigée de lui ?

M. le Ministre - J'ai dit quels étaient les trois axes de notre politique des fruits et légumes : allégement des charges pesant sur les travailleurs saisonniers, réforme de l'OCM, meilleur équilibre des relations entre producteurs et distributeurs. Sur le cofinancement, je ne puis répondre tant que je ne connais pas l'issue de la réforme de l'OCM. Les propositions de la Commission vont dans le bon sens, mais sont insuffisantes, et j'espère que les choses avanceront au prochain conseil, dans deux semaines. Enfin, nous avons élaboré, ces dernières semaines, un plan de restructuration du verger : arrachages, reconversions, retraites anticipées, il s'agit d'un véritable plan social, doté de 600 millions sur plusieurs années.

M. Jean-Michel Marchand - Une observation, d'abord, sur le fonctionnement de l'ONIFLHOR : un certain nombre d'arboriculteurs souhaiteraient y être associés, mais ne le peuvent, faute d'avoir trouvé une organisation professionnelle pour les accueillir.

Ma question porte sur la reconversion vers l'agriculture biologique. Les aide sont accrues, et l'objectif affiché est d'atteindre 5 % des surfaces d'ici cinq ans. Voilà qui est fort bien, car l'agriculture biologique constitue une bonne réponse aux problèmes de notre époque : crise de la vache folle, craintes suscitées par les OGM, artificialisation grandissante de la nourriture, difficultés croissantes pour maîtriser la production. Cependant, force est de constater que les reconversions marquent le pas : d'un millier l'an dernier, elles sont tombées à 150 cette année. Vous avez annoncé que les crédits non consommés à la fin de l'année seraient reportés, mais comment débloquer les dossiers en suspens ? Comment, d'une façon générale, entendez-vous atteindre l'objectif de 5 % ?

M. le Ministre - Je me suis longuement expliqué sur les CTE, mais je vais revenir d'un mot sur ce qui concerne l'agriculture biologique, dont les responsables ont explicitement accepté qu'elle se voie appliquer les règles de financement des CTE. Son développement est pour moi un objectif majeur, car elle répond à la fois aux attentes de la société et à un besoin économique. Un certain retard a été pris, c'est vrai, mais il est dû, comme je l'ai dit, à l'âpreté de la négociation bruxelloise sur le plan français de développement rural. J'ai rencontré le président de la Fédération de l'agriculture biologique, qui m'a assuré que les contrats allaient redécoller et retrouver le rythme observé ces dernières années.

M. Jacques Rebillard - Certains secteurs de la transformation agro-alimentaire sont particulièrement touchés par la crise de l'ESB et par les mesures de précaution, au demeurant justifiées, qui leur ont été imposées. Je pense notamment aux boyautiers, qui sont privés, du jour au lendemain, d'une matière première qu'ils n'ont pas les moyens d'importer de l'étranger, pas plus qu'ils n'ont les moyens de se reconvertir, alors même qu'ils ont dû beaucoup investir pour mettre leurs installations aux normes. Quelles mesures envisagez-vous de prendre pour les aider à cesser leur activité dans des conditions décentes ?

M. le Ministre - Je suis très heureux que vous me posiez cette question, car elle me permet de revenir sur ce que j'ai dit de l'arrêté. Nous avons pris le temps d'examiner les conditions d'application des décisions de retrait et les conséquences que cela entraînera pour les professions concernées. Le Gouvernement recourra à la solidarité nationale selon des mécanismes assez classiques, c'est-à-dire que les mesures de retrait seraient accompagnées de dispositifs économiques et sociaux tenant compte des difficultés créées aux entreprises. Le détail en sera connu dans les prochains jours.

M. Antoine Carré - Les horticulteurs et producteurs de légumes sous serre, déjà durement pénalisés par les charges de main-d'_uvre, sont mis à rude épreuve par la forte augmentation du coût de l'énergie, dont la répercussion sur le kilo de tomates, par exemple, varie entre 50 centimes et un franc selon les exploitations. Des décisions rapides s'imposent donc en matière de tarification gazière : GDF doit tout d'abord geler ses tarifs, puis établir un barème national spécifique aux serristes. Quant à l'Etat, il doit amplifier les mesures de compensation, exonérer les professionnels de toutes les taxes sur les combustibles, y compris la TVA, et les autoriser à inscrire des provisions exceptionnelles pour risque. Le Gouvernement y est-il prêt ?

M. le Ministre - Les serristes sont lourdement frappés, en effet, par l'augmentation des prix du gazole, car ils chauffent presque toute l'année. Aussi ai-je tenu à ce que le plan arrêté après les mouvements sociaux de septembre comporte une mesure qui leur soit destinée : elle s'élève à 100 millions, et a été négociée avec les représentants de la profession au sein de l'ONIFLHOR. J'insiste cependant sur le fait que nous souhaitons, au-delà de ces mesures conjoncturelles, mener une action plus structurelle en faveur des économies d'énergie et du recours aux énergies renouvelables, action à laquelle l'ADEME a accepté de contribuer.

M. Bernard Perrut - Le Premier ministre a donné son accord de principe, le 24 octobre, à l'instauration d'un régime complémentaire obligatoire de retraite par répartition pour les exploitants agricoles. Des questions se posent néanmoins. Les avantages seront-ils comparables à ceux des autres régimes ? Les agriculteurs déjà retraités y auront-ils accès ? Sera-t-il tenu compte de la durée de carrière effective ? L'Etat versera-t-il son écot ? Les cotisations seront-elles déductibles ? Quel sera le mode de calcul des meilleures années ? Y aura-t-il des bonifications pour enfants ? Vos objectifs manquent d'ambition et les agriculteurs souhaitent des réponses précises à leurs attentes légitimes.

M. le Ministre - Je suis vraiment navré que vous trouviez que mes objectifs manquent d'ambition, car je ne les ai pas encore exposés (Exclamations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL).

M. François Sauvadet - C'est un aveu !

M. le Ministre - Pas du tout : le Premier ministre a donné son feu vert voici quelques jours, et les discussions vont donc s'engager, mais vous conviendrez avec moi qu'il ne revient pas au seul Gouvernement de faire des propositions ! J'attends donc celles des organisations professionnelles...

M. Paul Patriarche - L'été dernier, les feux de forêts ont ravagé la Haute-Corse : 3 210 hectares ont brûlé. Si les incendies sont fréquents durant la saison chaude en Méditerranée, les sinistres qui se sont produits cet été sont d'une ampleur sans précédent.

Nous déplorons la disparition de pins Laricio souvent multiséculaires et reconnus d'intérêt prioritaire au niveau européen, du fait de leur rareté et des espèces animales et végétales qu'ils abritent.

Les conséquences de cette catastrophe exceptionnelle ne sont pas seulement environnementales mais aussi économiques car les communes concernées trouvaient dans l'exploitation de ces forêts domaniales une source de revenus non négligeables. Sans parler des propriétaires privés, lourdement pénalisés.

L'impact sur le tourisme sera également important car un site comme la Restonica fait partie des joyaux de l'Ile de Beauté.

Nous devons penser à la remise en état de ces sites. Il faudra sécuriser les zones, remettre en état les sentiers, replanter les pins. Tout cela réclame des moyens financiers considérables. Les collectivités locales se mobilisent mais cela ne suffira pas.

Lors des tempêtes de l'an dernier, la solidarité nationale s'est généreusement exercée. Nous espérons qu'il en sera de même pour cette catastrophe. Que compte donc faire l'Etat pour nous aider ?

M. le Ministre - Mais l'Etat vous aide. Voyez par exemple les 300 000 F prévus pour l'identification des terrains les plus menacés, les 700 000 F pour la restauration des plus fragiles. Une mission d'expertise s'est rendue dans l'île en septembre et nous avons, je crois, les moyens de faire face aux urgences.

Cela dit, ce n'est pas à vous que j'apprendrai que ce problème n'est pas qu'un problème de réparation. Il faudrait aussi aider l'Etat à faire en sorte que ces ravages ne se reproduisent pas d'année en année. Vous voyez ce que je veux dire. Nous aurons l'occasion d'en reparler.

M. Bernard Perrut - Vous avez évoqué tout à l'heure des allégements pour « la ferme France », mais je crois que le Gouvernement n'a pas pris la juste mesure de la dégradation du revenu agricole et de l'augmentation des charges, de sorte que bien des demandes des agriculteurs restent sans réponse.

Compte tenu de la difficulté de distinguer le patrimoine privé de l'exploitant agricole ou viticole de son patrimoine professionnel, êtes-vous conscient de la nécessité d'asseoir ses cotisations sociales sur une base plus proche du revenu de son travail ? Etes-vous favorable à ce que se substitue à la déduction de revenu cadastral des terres en propriété la possibilité pour le propriétaire-exploitant de déduire de ses revenus professionnels un certain montant, qui pourrait être calculé sur une base liée au fermage ? Envisagez-vous une taxation progressive des plus values d'actifs au-delà du seuil d'exonération afin d'assurer une transmission dans de bonnes conditions ? Une amélioration de la déduction pour investissement ?

Enfin, pourquoi la suppression de la vignette pour les véhicules utilitaires de moins de deux tonnes n'est-elle pas étendue aux personnes morales ? Nous irions ainsi vers une harmonisation que prône d'ailleurs le rapport Marre-Cahuzac.

M. le Ministre - En matière d'allégements de charges sociales et fiscales, votre logique est assez simple : c'est celle du « jamais assez ». J'attends donc de vous voir à l'_uvre, après une alternance que je souhaite longue. Peut-être ferez-vous alors ce que vous n'avez pas fait dans le passé. Mais je veux pas polémiquer.

Interrogeons-nous plutôt sur la structure de la fiscalité agricole. J'ai lu moi aussi le rapport de Mme Marre et il m'a beaucoup intéressé, en particulier quand il souligne à quel point le forfait est défavorable aux petits revenus agricoles. Alors, si vous proposez de remettre en cause le forfait, dites-le clairement ! Mme Marre, elle, l'a dit. Pour ma part, j'y réfléchis et je vous demande d'y réfléchir aussi.

M. Philippe Auberger - La filière avicole connaît actuellement de graves difficultés. La chute de l'entreprise Bourgoin -5 milliards de chiffre d'affaires, 4 000 salariés, quinze sites dans une dizaine de départements- constitue un traumatisme dans beaucoup de nos régions et laisse sans emploi plus de 850 personnes.

Les difficultés de l'aviculture étaient prévisibles depuis plusieurs années. Vous aviez d'ailleurs commandé un rapport à ce sujet à l'un de vos fonctionnaires. Quelles mesures avez-vous prises depuis ? Et que comptez-vous faire pour le reclassement professionnel des 850 salariés désormais privés d'emploi, en particulier pour les 150 qui ont été licenciés la semaine dernière au siège de l'entreprise dans l'Yonne ?

M. le Ministre - Le rapport Perrin a été suivi d'effets puisque nous avons mis en place avec les professionnels un plan structurel qui comportait un certain nombre de mesures techniques dont je vous épargne la liste mais qui correspondait aux besoins. Globalement, le marché s'assainit et redémarre. Il est possible d'ailleurs que la conjoncture malheureuse sur le bovin contribue à ce redémarrage.

Vous m'interrogez en même temps sur la situation d'un groupe particulier : l'ex-groupe Bourgoin. Les services de mon ministère ont été mobilisés du début à la fin de cette affaire, à la fois pour aider à trouver des repreneurs, pour soutenir les solutions arrêtées par l'administrateur judiciaire et maintenant pour accompagner sur le plan social et économique l'ensemble des mesures de reprise -et de non reprise. Bref, tous les instruments classiques sont mobilisés.

Enfin, je me félicite que la justice soit saisie de ce dossier car cela m'évite d'avoir à faire un commentaire.

M. Michel Bouvard - En disposant qu'à l'avenir, les ICHN seraient versés à l'hectare et non plus à l'animal, l'Agenda 2000 a fortement déstabilisé la politique agricole de montagne. Le principe légitime de compensation du handicap est ainsi remis en cause.

Bien que le règlement communautaire dise que les aides agricoles européennes peuvent être modulées au niveau national, les marges de man_uvre laissées par la Commission au Gouvernement ont été trop restrictives et ont conduit à l'adoption d'un plan de développement rural peu satisfaisant en matière d'ICHN. Des pénalités ont été prévues : la prime diminue plus on s'éloigne des plafonds de chargement fixés par les « bonnes pratiques ». Ce mécanisme conduirait à exclure du bénéfice des ICHN ou à les pénaliser très fortement les plus petites exploitations et les plus extensives.

Nous souhaitons que le gouvernement Français plaide pour le rétablissement du principe de compensation du handicap sans contrepartie, que les marges de man_uvre subsistant dans le cadre du plan de développement rural national soient utilisées prioritairement pour garantir le maintien des ICHN à tous les bénéficiaires, et ce à leur niveau actuel, enfin que le mécanisme des pénalités ne s'applique pas pour les exploitants les plus extensifs dont le taux de chargement est inférieur à ceux fixés par les « bonnes pratiques ». Ma question porte surtout sur ce dernier point car vous avez déjà répondu sur les deux premiers et, je dois le dire, dans le bon sens.

M. le Ministre - Ce n'est en aucun cas Agenda 2000 qui a démantelé la politique de montagne. Ce sont les négociations sur le PDRN qui ont eu les effets que vous dîtes.

Si vous me demandez si je peux obtenir que les ICHN soient sans contrepartie, ma réponse est non, car il ne serait pas de bonne politique que d'exiger de la Commission des indemnités compensatoires de handicap sans contrepartie. Par contre, je peux essayer d'obtenir des contreparties intelligentes.

Faut-il supprimer le seuil de ceux qui sont trop extensifs ? Je le pense. Mais je m'interroge aussi sur le seuil de ceux considérés comme trop intensifs, car je connais de jeunes éleveurs ovins, installés dans des fonds de vallée, qui m'ont expliqué que, tout pauvres qu'ils soient, ils se trouvent dans le seuil d'exclusion. Cela m'a fait réfléchir. Je travaille donc sur les deux seuils : celui du dessous et celui du dessus.

Et toutes les propositions seront les bienvenues.

M. le Président - Merci pour la montagne.

M. le Ministre - Il n'y a pas de montagne à Rueil... (Sourires).

M. Serge Poignant - Conscients des enjeux actuels et à venir d'un meilleur respect de l'environnement, les serristes se sont engagés à aller vers une utilisation du réseau gaz naturel et à investir dans la cogénération. Mais comme le prix du gaz est indexé sur un panel établi à partir des prix du fioul lourd et du fioul domestique sur les principales places européennes, les tarifs du gaz vont augmenter en 2001, ce qui n'est pas supportable économiquement pour les maraîchers.

Les producteurs de fruits et légumes voudraient donc obtenir un contrat spécifique aux serristes qui prenne en compte l'utilisation de gaz naturel pour le chauffage des serres, suivant les différentes périodes de l'année et aussi pour le chauffage nocturne.

L'an dernier, je vous ai interrogé sur les conclusions du rapport demandé à Dominique Platin, ingénieur du génie rural. Qu'en est-il aujourd'hui ?

M. le Ministre - J'ai parlé tout à l'heure des 100 millions de crédits pour les serristes, éventuellement abondables par l'ADEME. Je renouvelle mon engagement sur la rencontre demandée. Enfin j'ai saisi Christian Pierret de la question de la tarification du gaz utilisé par les serristes. La discussion est ouverte.

M. Jacques Le Nay - Le budget pour 2001 permet de poursuivre le plan pluriannuel de revalorisation des retraites agricoles. Mais nous jugeons cette revalorisation encore très insuffisante. Seuls les retraités agricoles perçoivent leur pension par trimestre : encore une injustice à laquelle il faut remédier.

Enfin je m'inquiète de l'avenir de la filière bovine, pour les raisons que l'on connaît. Je ne doute pas un instant que des mesures importantes seront prises au plus vite. Mais ces aides ne doivent pas être fiscalisées ; sinon l'Etat reprendrait d'une main ce qu'il a donné de l'autre à des personnes en grandes difficultés.

M. le Ministre - J'ai déjà répondu sur la plupart des points soulevés. Nous indemnisons les éleveurs dont une bête est atteinte d'ESB et qui ont dû faire abattre la totalité du troupeau. Il serait injuste de leur appliquer un traitement fiscal abrupt. Nous faisons savoir aux éleveurs, avec l'accord de Mme Parly, que des arrangements au cas par cas sont possibles.

M. Christian Martin - Les artisans bouchers et charcutiers subissent et vont subir de graves difficultés. Ils doivent s'acquitter de la taxe d'équarrissage et financer la collecte des os et suifs devenus sans valeur. Ils doivent assumer les conséquences de catastrophes industrielles dont ils ne sont en rien responsables.

Il est temps d'envisager la réforme de cette taxe dès lors que ces artisans transforment et vendent exclusivement des produits carnés. L'équarrissage est une mission de service public qui relève de la compétence de l'Etat.

Envisagez-vous de supprimer cette taxe ?

Après le paragraphe III de l'article 302 bis ZD du CGI, après les mots « valeur ajoutée, pouvez-vous faire inscrire « ainsi que les entreprises qui réalisent plus de 70 % de leur chiffre d'affaires dans la vente des produits carnés et leurs dérivés » ?

M. le Ministre - La taxe d'équarrissage, qui rapporte 600 millions, permet à peine de financer le service public d'équarrissage. Or, avec la crise bovine et les mesures destinées à lutter contre l'ESB, cette charge va certainement croître plutôt que décroître. M'engager à supprimer la taxe serait totalement irresponsable. Si nous devions la modifier, ce ne serait sans doute pas dans le sens que vous souhaitez.

M. Roger Lestas - Malgré des efforts importants, les retraites agricoles restent anormalement faibles. Ainsi dans un ménage une conjointe qui a accompli toute sa carrière dans l'agriculture, travaillant 70 heures et plus par semaine, touche moins de 2000 F, alors que l'époux perçoit environ 3 200 F.

Serait-il possible que la subvention d'Etat du BAPSA fixée à 6,7 milliards soit revalorisée proportionnellement à la subvention accordée à la caisse de retraite d'une grande entreprise nationale de transport à hauteur de 14,48 milliards ? Si on compare le nombre de bénéficiaires concernés dans l'un et l'autre régime, on constate une énorme disparité. Pouvez-vous demander à votre collègue des finances que tous les Français soient traités de la même façon ? Dans quel délai un fonds de retraite complémentaire sera-t-il créé pour que les cotisants d'aujourd'hui ne subissent pas le même sort que leurs prédécesseurs ?

M. le Ministre - Si beaucoup de femmes d'exploitants perçoivent de faibles retraites, c'est qu'elles ont peu cotisé.

M. François Rochebloine - Mais beaucoup travaillé !

M. le Ministre - Assurément ! Et c'est pourquoi la gauche a fait adopter le statut du conjoint exploitant. C'est toujours la gauche qui réalise des progrès sociaux en agriculture ! (Interruptions sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL)

Ce statut, que les intéressés ont choisi à environ 80 %, va entraîner un surcroît de cotisations qui permettra de verser de meilleures retraites. Plutôt que faire des comparaisons qui ne sont pas raison, voilà comment traiter un problème à la base.

M. Christian Martin - A ma question s'associent mes collègues de Maine-et-Loire Laffineur et Grimault. Chaque découverte d'un nouveau cas de vache folle entraîne de graves conséquences, surtout quand l'image d'une société y est associée. C'est le cas de la Soviba, dont le siège social et un abattoir se trouvent au Lion d'Angers et un autre abattoir à Chemillé, dont l'ensemble du personnel vient d'être mis au chômage technique.

Cette entreprise traverse une crise grave en raison d'une mise en cause injustifiée. Au troisième rang sur le marché des viandes de grande consommation, la Soviba emploie près de 2 500 personnes sur cinq sites et s'est toujours distinguée par la qualité de ses contrôles internes et de son dispositif de traçabilité. Dans les événements récents où cette entreprise a été médiatiquement stigmatisée, sa responsabilité n'est pas en cause. La viande issue d'un animal malade n'a jamais été mise sur le marché. L'entreprise a immédiatement opéré une procédure de retrait. Pourtant elle a été atteinte de plein fouet dans son image. Elle est confrontée à un retour de marchandises évalué à 20 millions, à une sous-activité qui a entraîné 220 fins de contrat, à un chômage partiel qui touche près de 300 autres salariés. Cette sous-activité coûte au groupe 5 millions par semaine.

Pour absorber ce choc terrible, la Soviba devra dépenser 200 millions.

Acceptez-vous de recevoir à bref délai la direction de l'entreprise, accompagnée des élus du département ? Les responsables de la Soviba seront reçus ce jeudi matin par des membres de votre cabinet. Je souhaite que vous puissiez les rencontrer un moment personnellement.

Songeons aussi à l'angoisse des éleveurs. A Cholet, les ventes sont désormais nulles. Les revenus des éleveurs sont en péril. Obtiendrez-vous de Bercy les moyens financiers de les aider ? Pour eux, c'est toute une vie qui s'écroule !

M. le Ministre - Ni moi ni les services de l'Etat n'avons jamais mis en cause Soviba. J'en appelle à nouveau à la responsabilité pour ne pas lancer des accusations ni avancer des propositions qui ne font qu'accroître les difficultés. Le problème de la Soviba ne se pose pas qu'en Maine-et-Loire. Elle possède de nombreux sites dans d'autres départements, et je ne suis pas sûr de disposer d'une salle suffisamment grande pour recevoir tous les élus. Les responsables de la Soviba participeront ce matin à une réunion de travail au ministère. Hélas, le mal étant encore plus grand, ce sont tous les abattoirs de France qui sont actuellement menacés.

Vous demandez si j'obtiendrai de Bercy les moyens nécessaires. Ce n'est pas ainsi que le problème se pose. Quand un ministre s'exprime ici, c'est au nom de tout le Gouvernement, et sur une position cohérente arbitrée par le Premier ministre.

M. Henri Nayrou - La chaîne parlementaire diffuse une émission maritime le soir où nous discutons de la vache folle : peut-être pourra-t-elle diffuser notre débat en différé le jour où un troisième bateau chargé de saletés sombrera au large de la Bretagne.

Ma question concerne les contrats territoriaux d'exploitation, et je la pose au nom de Michel Grégoire, député de la Drôme. Vous êtes, Monsieur le ministre, un excellent ambassadeur des CTE. Mais bien qu'ils répondent aux aspirations des agriculteurs de montagne, leur application dans ces zones se révèle plus compliquée qu'ailleurs. D'où une difficulté, pour les élus et les relais de votre ministère, de convaincre les montagnards de signer des CTE. Ils voient bien que c'est une chance, et souhaiteraient la saisir, mais souvent ils hésitent. Vous qui avez le don de parler clairement des sujets obscurs, ne pourriez-vous obtenir de vos services qu'ils simplifient une procédure trop compliquée, pour assurer le succès du dispositif ?

Hors question, mais non hors sujet : je déplore les inconséquences des industriels de la filière bovine, qui vont faire payer un prix très lourd aux éleveurs qui ont choisi la qualité. Il faut tirer les leçons de cette crise : notre société ne devra plus jamais regretter d'injecter beaucoup d'argent dans l'agriculture extensive.

MM. Michel Bouvard et Thierry Mariani - Très bien.

M. le Ministre - Vous avez pour votre part le don de poser des questions claires. Le CTE est à l'évidence un outil bien adapté à la politique de la montagne. Nous en sommes aujourd'hui à quelque 3 400 CTE validés en CDOA : plus d'un quart sont situés en montagne. C'est dire qu'il y a un vrai besoin qui s'exprime là. L'agriculture de montagne est faite pour le CTE, et inversement. Je me suis déjà exprimé sur l'adaptabilité nécessaire de cet outil. Il faut le simplifier et nous y avons travaillé cet été. Au vu de ce que je sais des démarches collectives en montagne, je suis certain que le CTE va s'y développer et nous faisons tout pour faciliter ce développement.

M. Daniel Marcovitch - C'est un député parisien qui vous interroge, Monsieur le ministre, mais c'est surtout un administrateur de l'agence de bassin Seine-Normandie. L'agriculture et l'eau sont liées depuis toujours et, comme tous les vieux couples, celui-ci connaît parfois des conflits. Il y en a eu par exemple quand des nappes phréatiques ont été polluées par un certain type d'élevage. Le plan de maîtrise des pollutions d'origine agricole a donc été mis en place. Le rapport dont il a récemment été l'objet n'est pas satisfaisant : s'il nous a éclairé sur certaines dérives ou inadéquations du plan, il a jeté l'anathème sur les agriculteurs, ce qui me semble une erreur. Le plan a toutefois manifesté certaines erreurs de conception et peut-être une insuffisante prévision de son propre succès.

Face à ces effets constatés, le Gouvernement a décidé de modifier les conditions d'attribution des aides dans le cadre du PMPOA. Cette modification inquiète les agriculteurs : quelles seront les nouvelles modalités ? Que deviendront les milliers d'agriculteurs qui ont déposé des dossiers ? Ces inconnues nous inquiètent.

M. François Sauvadet - Très bien.

M. le Ministre - Les rapports qui ont été faits sur le PMPOA, notamment par l'Inspection des finances, ont pointé trois types de dérives. Il y a des dérives budgétaires : d'une certaine façon, elles témoignent du succès du plan. Quant aux dérives de conception, elles consisteraient dans le fait d'avoir réservé les aides aux très gros élevages. Or, je l'ai déjà dit, sur ce point mes prédécesseurs ont eu raison : c'est là qu'étaient les plus grosses pollutions, c'est par là qu'il fallait commencer. Mais il faut maintenant ouvrir le dispositif aux plus petits éleveurs. En troisième lieu, l'Inspection des finances pointe des dérives environnementales, mais dans ce domaine je fais moins de crédit à son jugement.

Cela étant, le Gouvernement a décidé de renouveler le PMPOA en le réformant pour tenir compte de ces critiques, en le ciblant -au nom d'une conception environnementale plus rigoureuse- sur les bassins versants, et en l'ouvrant aux plus petits exploitants. Mais la réforme ne doit pas s'opérer au détriment de ceux qui n'étaient pas encore éligibles et vont le devenir : il ne faut pas qu'ils soient moins aidés que les précédents. La difficulté est la suivante : avons-nous la capacité, face aux listes d'attente qui se sont constituées sur la base des anciennes modalités, de les traiter avec les nouvelles clés de financement ? On ne peut demander à la Commission d'avaliser un financement des anciens dossiers sur la base des nouvelles règles : ils seront financés dans le cadre des nouvelles. Mais celles-ci ne sont en rien défavorables aux agriculteurs, particulièrement aux petits.

M. Yvon Montané - Pas de pays sans paysans, et pas d'économie équilibrée sans activités primaires. L'installation d'agriculteurs est la clé du développement futur du monde rural. Ne doit-elle pas être notre priorité ? Des exploitations qui ferment, ce sont des villages qui meurent, des services publics qui disparaissent, un aménagement du territoire qui périclite, cependant que se développe un monde urbain toujours plus lourd, entouré d'un désert humain...

La question de l'installation est un choix de société. Nous qui voulons des campagnes qui vivent, nous devons arrêter la course à l'hectare, et éviter le modèle américain. Faire de l'installation une priorité, c'est briser le cercle de l'agriculture productiviste que nous subissons depuis des décennies.

La non-installation de jeunes permet à certains de s'agrandir, mais cela dépersonnalise le pays et la profession.

Comment favoriser l'installation ? Ne pourrions-nous faire un effort fiscal accru, comme le suggère le rapport de Mme Marre et M. Cahuzac ? Je pense aussi à l'amendement de Gilbert Mitterrand qui étend l'abattement sur les bénéfices du jeune agriculteur qui a conclu un CTE. D'autres pistes peuvent être explorées, comme l'extension des prêts bonifiés, la séparation entre les revenus du capital et du travail, l'exonération de certaines charges sociales, l'attribution de points de retraite à l'agriculteur qui cède son exploitation à un jeune ... Quels sont les objectifs du Gouvernement en matière d'installation ? Quelles mesures entend-il prendre, et comment s'articulent-elles avec la politique des CTE ?

M. le Ministre - Dans ce vibrant plaidoyer je reconnais bien votre souci d'une agriculture citoyenne, créatrice d'emplois et aménageuse du territoire ... Il est difficile de vous répondre brièvement. J'ai visité cette semaine un GAEC de la Somme. Les huit agriculteurs qui l'ont constitué avaient de toutes petites exploitations, menacées de disparition. Ils se sont associés et ont installé un jeune : ils sont donc maintenant neuf, et font de la qualité, avec notamment des pommes de terre labellisées. Non seulement de tels exploitants créent de l'emploi, mais ils pratiquent le type d'agriculture que nous pouvons souhaiter. C'est ainsi qu'on sauvera l'agriculture citoyenne, bien plutôt que par la concentration.

M. Roland Garrigues - En matière de retraites, les mesures de revalorisation prises depuis trois ans ne concernent qu'un agriculteur sur trois. Ne serait-il pas légitime d'abaisser le seuil applicable pour accéder à la revalorisation, afin de l'ouvrir aux différentes catégories d'agriculteurs, ainsi qu'aux polypensionnés ? On pourrait penser à un seuil de 25 années et demi, par référence à la loi Mendès France de 1955.

M. le Ministre - Si cela ne concerne qu'un tiers des agriculteurs, c'est que nous sommes partis du plus bas niveau, pour procéder à un rattrapage progressif. Notre objectif est de rejoindre, en fin de législature, le niveau des minima de retraite. Nous avons aussi abaissé le seuil de 32 ans et demi à 27 ans et demi, d'où résulte un autre élargissement. Les engagements pris sont donc tenus, et même au-delà. Mais je pense comme vous qu'il faut aller plus loin, et continuer à préparer le plan qui succédera à celui en vigueur.

M. Robert Honde - Depuis la loi d'orientation agricole de 1999, de nombreux CTE ont été signés dans 74 départements, ce qui est encourageant. Lors du conseil informel de l'agriculture, qui s'est tenu en septembre à Biarritz, les ministres des Quinze ont reconnu l'exemplarité du choix français. Les radicaux de gauche, attachés au développement rural, attendent beaucoup des CTE. Dorénavant, les engagements étant clairs, l'agriculture peut expliquer pourquoi elle est aidée. En outre, le caractère pluriannuel des CTE permet un glissement de l'aide à la production vers l'aide à l'exploitation.

Le problème est d'ordre administratif. Le montage des dossiers, la définition de contrats-types par filière, tenant compte des particularismes régionaux, sont des procédures longues et compliquées. Les petits agriculteurs sont ainsi pénalisés ; quelles simplifications peut-on envisager ?

M. le Ministre - J'ai déjà assez largement répondu à votre question. Je fonde beaucoup d'espoirs sur les CTE collectifs, qui correspondent encore mieux à l'esprit de la loi.

M. Guy Lengagne - Monsieur le ministre, beaucoup ont apprécié que vous n'hésitiez pas à sortir par force 8 avec des marins ! Cela dit, je vous interrogerai sur l'agriculture.

Malgré l'augmentation de 19 % des crédits consacrés aux programmes de maîtrise des pollutions d'origine agricole, les petits agriculteurs craignent qu'il n'y en ait pas pour eux, les exploitations les plus importantes ayant eu l'assise financière suffisante pour se lancer tout de suite dans les travaux.

En ce qui concerne les CTA, les petits agriculteurs ont des difficultés à financer leurs dépenses administratives. Ils sont souvent aidés par les collectivités territoriales, mais envisage-t-on une aide complémentaire de l'Etat ?

M. le Ministre - S'agissant des PMPOA, je ne vois pas pourquoi les petits agriculteurs seraient inquiets, puisqu'ils vont devenir éligibles à des programmes dont ils étaient exclus jusqu'à maintenant.

En ce qui concerne l'accompagnement des CTE, des crédits d'animation sont prévus dans le fonds de financement des CTE. Certes, ce sont souvent les structures professionnelles -chambres d'agriculture, ADASEA- qui en profitent, mais ils ne leur sont pas exclusivement réservés.

M. Michel Bouvard - Ma question concerne le service RTM -service de restauration des terrains en montagne-, qui depuis 1880 lutte contre les phénomènes d'érosion dans dix départements français.

Nous avons des inquiétudes au sujet des dotations destinées à subventionner les travaux réalisés par les communes. En effet, le contrat de plan ne prévoit au chapitre 61-45 que 28 millions pour sept ans. Or les crues qui viennent de frapper le massif alpin ont révélé la nécessité de réaliser de nouveaux ouvrages ou de recaractériser certains de ceux qui étaient prévus. Pourrons-nous espérer que les représentants de l'Etat et des collectivités territoriales se remettent autour de la table pour définir un nouveau programme de subvention ?

M. le Ministre - La réponse est oui. L'Etat a consacré 115,8 millions au financement des actions du service RTM en 2000 ; l'effort est accru de 15 millions pour 2001, ce qui nous autorise à bâtir avec les collectivités territoriales le programme que vous appelez de vos v_ux.

M. Serge Poignant - La loi d'orientation agricole avait prévu l'établissement de plusieurs rapports.

Le rapport de Mme Marre et de M. Cahuzac a suscité de fortes attentes en matière de fiscalité agricole et de charges sociales. Quelles sont vos intentions en matière de déduction pour investissement, de dissociation entre revenu du capital et revenu du travail, de dispositifs fiscaux d'encouragement à l'installation ?

Où en est le rapport sur les retraites, qui devait être établi dans les trois mois ? Où en est celui dont la rédaction a été confiée à M. Babusiaux sur les assurances-récoltes ?

M. le Ministre - Du rapport de Mme Marre et de M. Cahuzac, nous avons déjà tiré huit mesures dans ce projet de loi de finances. M. Babusiaux m'a remis son rapport la semaine dernière ; il sera public dans les meilleurs délais et j'ai pris l'engagement d'ouvrir la négociation sur les propositions qu'il contient dans les prochaines semaines.

M. Yves Deniaud - Ma question porte sur la reconstruction du verger cidricole, lourdement touché par la tempête de décembre dernier. Il faudra privilégier les pommiers et les poiriers de haute tige, mais il faudra aussi recourir à des plantations de basse tige. Par ailleurs, des incertitudes demeurent quant à la possibilité pour les producteurs de collecter momentanément à l'extérieur de l'exploitation. Quelles précisions pouvez-vous nous apporter ?

M. le Ministre - Le plan « tempête » arrêté le 12 janvier à la demande du Premier ministre comportait des mesures spécifiques aux arboriculteurs, qui ont été mises en _uvre par l'ONIFLHOR. Pour la Basse-Normandie, ces aides se sont élevées à plus de 7 millions, dont la moitié, il est vrai, est allée au département de la Manche, plus touché que les autres. Faut-il d'autres mesures, pour compenser d'éventuelles pertes d'exploitation ? Vous comprendrez que je ne puisse répondre à cette question tant que la récolte n'est pas faite et que nous n'avons donc pu constater ces pertes.

M. Thierry Mariani - La hausse importante du prix du combustible pénalise nombre de producteurs, notamment les maraîchers et les serristes du Vaucluse, ainsi que ceux du Loiret dont se préoccupe M. Doligé. Le coût de l'énergie utilisée pour le chauffage des serres représente de 25 à 30 % des coûts de production des maraîchers et la survie de ces exploitations est donc compromise, d'autant que le prix de nombreux produits dérivés ont également augmenté. Les surcoûts sont, selon le combustible utilisé, de 15 à 40 % ! A l'approche de l'hiver, ces agriculteurs s'inquiètent. Le blocage des tarifs du gaz, la compensation des hausses déjà intervenues par un allégement des charges sociales et fiscales, l'incitation à l'utilisation de biocarburants, l'exonération de taxes sur les combustibles, l'autorisation d'une provision exceptionnelle défiscalisée et l'extension à la campagne 2000-2001 de la compensation proposée en septembre sont autant de mesures urgentes qu'ils attendent. Quels moyens concrets allez-vous mobiliser en leur faveur ?

Par ailleurs, tous les agriculteurs s'inquiètent de la future loi sur l'eau, qui risque de se traduire pour eux par un nouveau supplément de charges. En avez-vous discuté avec votre collègue de l'environnement et que ferez-vous pour éviter qu'il en soit ainsi ?

M. le Ministre - Les serristes bénéficieront comme tous les autres agriculteurs de la baisse des impôts et des charges, ainsi que de l'exonération rétroactive de TIPP sur le fioul domestique. Et, comme tous les producteurs de fruits et légumes, ils sont exonérés depuis le début de la campagne des charges afférentes à l'emploi de travailleurs saisonniers. Enfin, ils ont reçu un soutien de 100 millions, abondé par l'ADEME.

S'agissant du gaz, j'ai entamé des discussions avec M. Pierret en vue de définir les mesures à prendre.

Comment traiter de la loi sur l'eau en dix secondes ? Je me bornerai à vous répondre qu'aucun projet ne relève de la décision d'un seul ministre : tous sont présentés au nom de tout le Gouvernement, après discussions et arbitrages interministériels. Ce sera bien entendu le cas de celui-ci : lorsque Mme Voynet viendra vous le soumettre, j'aurai dit mon mot. Mais, les arbitrages n'étant pas encore rendus, ce qu'on colporte d'une éventuelle hausse du prix de l'eau pour les agriculteurs n'est que pure spéculation -d'autant qu'élu du Sud-Ouest, je n'ai aucune intention de laisser compromettre l'avenir de l'agriculture irriguée !

M. Yvon Abiven - La Bretagne occupe l'un des tout premiers rangs dans la protection des légumes. Grâce à des conditions naturelles favorables et à un savoir-faire incontestable, les producteurs de cette région ont pu s'adapter aux exigences des marchés français et communautaire en diversifiant leur offre. Cependant, le Nord-Bretagne souffre de crises récurrentes, affectant la production et la commercialisation de légumes frais, en particulier le chou-fleur et la pomme de terre primeur. L'année 1998 a été marquée, on s'en souvient, par la mévente du premier. La récolte de la seconde a été particulièrement médiocre cette année, en raison des conditions climatiques et des déséquilibres du marché : 30 000 hommes, sur 100 000 n'ont pas trouvé preneurs. Comment comptez-vous répondre à ces difficultés et soutenir les efforts des professionnels pour une production de qualité ?

M. le Ministre - Ne multiplions pas les plans destinés à faire face à des conjonctures défavorables sans nous poser au moins une fois la question de savoir s'il ne vaudrait pas mieux définir un plan structurel ? Il y va de la bonne gestion des crédits publics. Il est trop facile de « faire de la production » tout en sachant que celle-ci n'ouvre aucun débouché puis, en fin de campagne, de se retourner vers les pouvoirs publics parce que les cours se sont effondrés. Une responsabilisation s'impose. La surproduction de pommes de terre n'est pas une fatalité : j'ai visité dans la Somme une exploitation qui en produit de qualité, pour un marché précis, et qui en vit très bien ! Notre souci doit donc être d'amener les organisations professionnelles et les agriculteurs à produire des fruits et légumes qui répondent à la demande des consommateurs, de sorte que nous n'ayons plus à prendre des mesures de soutien chaque année. Nous avons entamé ce travail et je pense que les professionnels sont de plus en plus nombreux à admettre le bien-fondé de cette position.

M. Gilbert Le Bris - Interdire les farines animales, certes, mais n'oublions pas que, parmi celles-ci, il y a des farines à base de poissons sauvages, de déchets du mareyage, qui sont exemptes de toute contamination par les prions. Si on les interdit aussi, il faudra payer pour s'en débarrasser, ce qui pèsera sur le revenu de toute la filière pêche. Je soumets donc ce point à votre réflexion.

D'autre part, le revenu des marins pêcheurs ne cesse de diminuer, en raison de la raréfaction de la ressource, de la chute des cours et de l'augmentation des prix du carburant. Ajouté à des conditions de travail contraignantes et difficiles, cela explique la désaffection croissante des jeunes pour ce métier et la pénurie de main-d'_uvre. Pour réagir, une mesure forte s'impose : il faut explicitement inclure les navigants dans le champ d'application de l'article 81-A du code général des impôts, qui prévoit une exonération fiscale pour les professionnels travaillant hors de notre territoire plus de 183 jours par an. J'ai déposé une proposition de loi en ce sens, mais le mieux ne serait-il pas que le Gouvernement reprenne à son compte cette mesure incitative et peu coûteuse ? Que pensez-vous de cette idée de défiscalisation ?

M. le Ministre - Les poissons sont des carnivores et c'est pourquoi, dans les élevages, on les nourrit de farines provenant d'autres poissons. En revanche, il faut démentir une idée trop répandue : l'usage des farines de viande a cessé dans ces élevages depuis un accord interprofessionnel de 1996. Cette précision devrait apaiser certaines inquiétudes...

Je ne puis aujourd'hui donner mon accord à votre proposition, visant à étendre à la marine de pêche le dispositif d'exonération applicable à la marine marchande. Cependant, je la juge intéressante et je suis tout disposé à pousser à la réflexion sur ce projet.

M. Didier Quentin - Le moment semble venu de mettre en _uvre une reforme fiscale et sociale ambitieuse pour favoriser l'installation des jeunes agriculteurs. Je vois personnellement huit mesures qui me paraissent répondre aux attentes d'une majorité de la population. En premier lieu, il s'agit d'une exonération de 25 % des cotisations sociales pour les jeunes agriculteurs installés depuis moins de dix ans -cette exonération, qui prendrait la suite de l'exonération dégressive déjà mise en place les trois premières années, permettrait aux intéressés de faire face aux charges induites par la reprise de l'exploitation. Je songe également à une exonération de plus-values en cas de transmission à un jeune exploitant, à l'octroi de prêts bonifiés à 1 %, à l'harmonisation des aides à l'installation sous forme d'un abattement dégressif sur cinq ans, à l'attribution de points de retraite supplémentaires au cédant, à la recréation d'une ligne d'abondement pour les programmes d'installation et de développement d'initiative locale, à une évolution vers une assiette des cotisations sur le seul revenu du travail. Enfin, une imposition spécifique des revenus exceptionnels. Etes-vous d'accord pour mettre en _uvre tout ou partie de ces mesures ?

M. le Ministre - Tout, non ; partie, oui. J'ai déjà dit que les exonérations de charges sociales des jeunes agriculteurs seraient prorogées de deux ans, le taux étant de 25 % la quatrième année et de 15 % la cinquième, mais que l'exonération des plus-values de cession ne me paraissait pas juste. Quant à l'attribution de points de retraite supplémentaires, ce serait charger trop la barque, compte tenu de ce qui a déjà été annoncé, notamment en matière de préretraites. Enfin, la ligne du PIDIL reste disponible au sein des crédits du CNASEA ; je note qu'elle est peu consommée.

Je conclus en vous posant, à mon tour, une question : êtes-vous prêts à une réforme fiscale allant jusqu'à la remise en cause du forfait ?

M. Bernard Schreiner - En exigeant que les agriculteurs non signataires de CTE aient aussi accès aux mesures agro-environnementales, la Commission européenne a contribué à la défaveur de cette formule et a signifié, au passage, qu'elle n'était pas disposée à l'étendre à l'ensemble des paiements de l'Union européenne. Est-il raisonnable, dans ces conditions, de la maintenir ? La question se pose d'autant plus que les mesures agri-environnementales vont se trouver à cheval sur deux lignes, dont la première, la ligne 44-41-22, risque fort de ne pas suffire. Enfin, la pénalisation de 20 % des mesures hors CTE constitue une ségrégation indéfendable.

M. le Ministre - L'existence des CTE n'est nullement exclusive, je le redis, des mesures agri-environnementales. Il est vrai que nous souhaitons que celles-ci s'inscrivent dans le cadre des CTE, et c'est pourquoi nous avons prévu une incitation financière, mais je puis vous assurer que la distinction des deux lignes ne rendra pas la gestion plus complexe.

M. le Président - Nous en avons terminé avec les questions. J'appelle maintenant les crédits ouverts à la ligne « Agriculture et pêche ».

Top Of Page

ETAT B

Top Of Page

TITRE III

M. le Ministre - L'amendement 148 rectifié permet de créer 30 postes nouveaux d'inspecteurs vétérinaires, en plus des 20 prévus. Nous renforcerons ainsi des services qui travaillent dans des conditions pénibles, y compris sur le plan psychologique. C'est la première des mesures d'urgence destinées à faire face, non pas à la crise de l'ESB, mais à notre ambitieux programme de tests, qui est appelé à connaître un fort développement dans les années à venir.

Mme Béatrice Marre, rapporteure spéciale de la commission des finances pour l'agriculture - La commission des finances ne l'a pas examiné, mais je me félicite d'une réponse si rapide à une situation qui préoccupe l'ensemble des parlementaires. Quel démenti à ceux qui prétendaient, il n'y a pas si longtemps, que le Gouvernement ne faisait rien !

L'amendement 148 rectifié, mis aux voix, est adopté.

Les crédits ouverts au titre III de l'état B, mis aux voix, sont adoptés.

Top Of Page

ETAT B

Top Of Page

TITRE IV

M. Christian Jacob - Les amendements 67 à 70 tendent à réduire les crédits affectés aux CTE, qui sont un échec parce qu'ils ne répondent pas aux attentes des agriculteurs. Le premier amendement les réduit de 400 millions, qui seraient mieux employés à renflouer le Fonds des calamités agricoles, auquel l'Etat ne verse pas la part qui lui incombe ; le deuxième les réduit de 239 millions, qui compenseraient utilement la réduction du même montant, décidée par Bruxelles, de la contribution européenne au plan de développement rural ; le troisième les réduit de 155 millions, que nous souhaiterions voir servir à rétablir la DJA à son niveau antérieur - vous me direz sans doute qu'elle était sous-consommée, mais vous êtes-vous seulement demandé pourquoi, et ce que vous pouviez faire pour y remédier ? Quant au dernier amendement, il réduit les crédits de 40 millions, avec lesquels on pourrait mieux doter les PMPOA (« Très bien ! » sur les bancs du groupe du RPR).

M. François Sauvadet - Le ministre ayant décidé de ne pas répondre à nos questions, je ferai l'économie de longs discours. L'amendement 146 vise à proposer une meilleure utilisation des crédits non consommés destinés aux CTE. On nous dit qu'ils reviendront tout de même à la ferme France, mais des pans entiers de notre agriculture seront affaiblis par la modulation, notamment dans les zones intermédiaires.

D'ailleurs, je m'étonne que vous teniez un tel langage de fermeté alors qu'il y a quelques mois, vous vous interrogiez sur l'opportunité d'appliquer la modulation comme elle l'est aujourd'hui. Mais après tout, la fermeté est parfois proportionnelle à la perplexité.

Notre amendement 146 n'est pas du bla-bla puisqu'il fait servir l'argent non utilisé des CTE pour abonder la part de l'Etat dans le financement du fonds national de garantie des calamités agricoles. Elle ne s'élève plus en 2000 et 2001 qu'à 50 millions.

Et puisque nous parlons des PMPOA, je voudrais dire que vos discours sur la nécessité pour l'agriculture de mieux respecter l'environnement ne sont guère accompagnés de moyens. Ce sont en effet les mêmes sommes qui sont reconduites depuis trois ans, alors que les listes d'attente sont fort longues. Et de grâce, n'opposez pas là encore les gros et les petits ! Il faut simplement des moyens supplémentaires. L'action politique, ce n'est pas le verbiage.

J'en viens à mon amendement 147 qui tend à abonder de 145 millions les crédits du Fonds pour l'installation en agriculture, qui a été créé par votre prédécesseur. Vous nous avez fait tout à l'heure de grands discours sur l'installation mais si les jeunes ne s'installent pas, c'est que votre politique les en dissuade.

Mme la Rapporteure spéciale - La commission n'a été saisie d'aucun de ces six amendements mais à titre personnel, j'y suis défavorable puisqu'ils tendent à réduire les crédits des CTE qui sont le pilier de la réorientation de la politique agricole. J'ajoute que c'est une technique commune que de proposer de supprimer des crédits pour en réalité accroître les dépenses. S'ils étaient adoptés, le résultat ne serait pas celui annoncé par leurs auteurs.

M. le Ministre - Je partage cet avis et je crois même que ces amendements sont irrecevables au titre de l'article 40 de l'ordonnance de 1959. En effet, M. Jacob redistribue plus de crédits qu'il n'en supprime.

Mais je vais répondre plus au fond. Je n'ai aucun mal, Monsieur Jacob, à parler du plan protéines puisque je suis le seul ministre européen à avoir adressé un document à ce sujet à la Commission ainsi qu'aux gouvernements des Quinze lors du Conseil informel de septembre. Je me réjouis donc que vous rejoigniez ma position.

Abonder de 200 millions le fonds de calamité agricole ? Cela ne me paraît pas nécessaire, Monsieur Sauvadet, dans la mesure où sa trésorerie à la fin de l'année 2000 s'élève à un milliard. En l'abondant de 50 millions, nous restons dans le raisonnable. Mais j'ai bien compris que vous vouliez surtout réduire les crédits des CTE.

En ce qui concerne les PMPOA, vous m'accusez d'opposer les gros et les petits, mais c'est vous qui avez fait un programme réservé aux gros. Comme je ne suis pas sectaire, (Murmures sur les bancs du groupe UDF) j'avais dit que ce n'était pas si bête puisque ce sont les gros qui polluent le plus. Ce n'est pas parce que je souhaite que l'on ouvre aussi aux petits ce programme qu'il faut m'accuser d'opposer les uns aux autres ! C'est le monde à l'envers.

Enfin, je répète que nous avons maintenu la ligne du FIA dans le budget du CNASEA et qu'elle était dotée de 300 millions sur lesquels 20 seulement ont été consommés. Ce n'est donc pas là que le bât blesse.

M. Christian Jacob - Une fois de plus, vous ne répondez pas à nos questions précises. Constatez-vous oui ou non un manque de crédits pour les PMPOA ? Etez-vous ou non d'accord pour conforter ce plan de modernisation ?

Et s'agissant du plan sur les protéines, allez-vous voter mon amendement 68 ?

M. le Ministre - Ici, je ne vote pas. Cela m'est arrivé dans le passé, mais je n'ai plus le droit (Rires sur les bancs du groupe socialiste).

M. Christian Jacob - Je veux dire, allez-vous le soutenir ? Sinon, ce que vous nous avez dit n'était que du bla-bla !

Vous n'avez pas répondu non plus sur les installations. Certes, vous créez des groupes de travail mais aucune mesure concrète ne suit. Décidément, le concret vous pose un vrai problème.

L'amendement 67, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'amendement 68, mis aux voix, n'est pas adopté, non plus que les amendements 146, 69, 147 et 70.

Les crédits ouverts à l'Etat B titre IV, mis aux voix, sont adoptés.

Les crédits ouverts à l'Etat C, titre V mis aux voix, sont adoptés.

Les crédits ouverts à l'Etat C, titre VI, mis aux voix, sont adoptés.

M. le Président - J'appelle maintenant les articles 49 et 50 rattachés à ce budget et, en accord avec la commission des finances, les amendements portant articles additionnels après ces articles.

Top Of Page

ART. 49

Mme la Rapporteure spéciale - L'amendement 82 rectifié est rédactionnel.

M. le Ministre - Avis favorable.

L'amendement 82 rectifié, mis aux voix, est adopté.

M. Jacques Le Nay - L'article L. 361-5 du code rural dispose qu'une partie des ressources du fonds national de garantie des calamités agricoles est alimentée par des contributions additionnelles aux primes ou cotisations des conventions d'assurance. Les taux de ces contributions sont au nombre de deux : l'un de 10 %, lié aux contrats contre l'incendie, l'autre de 5 %, lié à tous les autres contrats.

Dans la nouvelle écriture prévue par l'article 49 du présent projet, ces deux taux disparaissent au profit d'un taux unique de 11 % qui concernerait les bâtiments, les machines et les véhicules utilitaires. Les cultures et le bétail seraient exonérés, le but étant de favoriser les contrats de type « assurance récolte ». Mais s'il existe pour un céréalier une différence nette et évidente entre les bâtiments et les cultures, cette différence n'existe pas entre les cultures horticoles et les serres de production. Les dégâts infligés aux plants impliquent forcément qu'il y ait eu au préalable des dégâts sur les serres. Les professionnels de la filière agricole se retrouveraient donc pris au piège de cette nouvelle règle, ne pouvant favoriser aucun type d'assurance. Et comme il est probable que les compagnies d'assurance vont prochainement augmenter leurs tarifs, ils vont se trouver confrontés à une énième augmentation de leurs charges sans pour autant bénéficier des avantages induits par la nouvelle rédaction de l'article. Pour l'agriculture comme pour le maraîchage, cela va se solder par une taxation supplémentaire.

Par l'amendement 145, nous demandons donc que les contrats d'assurance sur les serres soient exonérés de la contribution additionnelle.

Mme la Rapporteure spéciale - La commission n'a pas été saisie de cet amendement mais, à titre personnel, je pense que le problème peut être réglé par l'intégration des serres dans les contrats d'assurance récolte.

M. le Ministre - Même avis, et même suggestion : négocier avec les assureurs pour qu'ils étendent leurs périmètres d'intervention.

L'amendement 145, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme la Rapporteure spéciale - L'amendement 83 est rédactionnel

M. le Ministre - Avis favorable.

M. Thierry Mariani - « Antépénultième » est le mot qui convient puisque, indique le dictionnaire, il désigne « ce qui précède immédiatement l'avant-dernier ». Par exemple, dans « bla-bla-bla », bla est en position antépénultième (Sourires).

Mme la Rapporteure spéciale - Je crois pourtant avoir bien compté...

L'amendement 83, mis aux voix, est adopté.

L'article 49 modifié, mis aux voix, est adopté.

Top Of Page

APRÈS L'ART. 49

M. Charles de Courson, rapporteur spécial de la commission des finances pour le BAPSA - Lors de mes visites dans cinq caisses, j'ai contrôlé les affiliations et j'ai découvert un problème grave. En 1984, nous avions lié entre l'immatriculation à la MSA et l'autorisation d'exploiter. La suppression de ce lien en 1988 a conduit à des situations aberrantes. Ainsi, j'ai découvert un agriculteur de 80 ans qui reprenait l'exploitation de son fils âgé de 60 ans pour lui permettre de bénéficier d'une retraite. La CDOA n'avait naturellement pas donné l'autorisation. Voilà donc un exploitant agricole inscrit à la MSA, car il n'existe pas de définition de l'exploitation agricole, mais qui n'avait pas le droit d'exploiter.

Mon amendement 119 tend donc à revenir au dispositif de 1984.

Mme la Rapporteure spéciale - L'amendement n'a pas été examiné par la commission, qui toutefois en a repoussé un autre, tout à fait similaire, de M. de Courson également. Il s'agit de réintroduire dans le code rural une obligation d'obtenir, pour toutes les personnes qui souhaitent être affiliées à la MSA en tant que chef d'exploitation, une autorisation d'exploiter. Cette obligation a été supprimée en 1988. Je ne suis pas sûre qu'il faille la rétablir, mais j'ai constaté que la définition de l'exploitation faisait problème. Il faut donc traiter la question de façon globale. Je propose de repousser l'amendement.

M. le Ministre - Je partage les raisons de M. de Courson. Mais s'il est souhaitable de faire coïncider les définitions sociale et économique, adopter l'amendement créerait des situations surréalistes. Je suggère à M. de Courson de retirer son amendement, en m'engageant à examiner la question à fond.

M. Charles de Courson, rapporteur spécial - On peut toujours souhaiter définir l'exploitation, mais on n'y parviendra pas. Toute définition exclurait une partie des personnes considérées aujourd'hui comme exploitants. Ce que je propose s'appliquerait uniquement aux nouvelles immatriculations. Je veux bien retirer l'amendement, mais des détournements de la réglementation sociale existent bel et bien.

L'amendement 119 est retiré.

Mme la Rapporteure spéciale - L'amendement 84 tend à centraliser la gestion de la trésorerie des caisses de la MSA à la caisse centrale, afin d'en diminuer les coûts. Je me suis abstenue, car il me paraît nécessaire de négocier avec les caisses plutôt que de leur imposer par la loi une modification de leurs relations avec la caisse nationale. Mais la commission a adopté l'amendement proposé par M. de Courson.

M. le Ministre - La fougue réformatrice de M. de Courson le conduit parfois à des excès. Sa proposition bouleverserait les équilibres d'un régime mutualiste structuré de façon décentralisée.

Cette centralisation brutale supprimerait le système d'avance de trésorerie auprès des caisses, et réduirait l'incitation des caisses à bien recouvrer leurs cotisations. Il n'est pas sûr que les finances publiques y gagneraient. Mieux vaut pratiquer l'expertise et la concertation plutôt que d'agir à la hussarde.

M. Charles de Courson, rapporteur spécial - Il s'agit d'un amendement d'appel. La gestion centralisée de la trésorerie est une manière de l'optimiser. Elle permet de réduire l'endettement et d'augmenter les placements. Les caisses elles-mêmes seraient mieux rémunérées. J'espérais au moins que vous accepteriez de mener une concertation avec la caisse centrale et les caisses pour aller dans ce sens. Si tel était le cas, l'amendement pourrait être retiré.

M. le Ministre - Je ne peux pas faire plus que de saisir la caisse centrale de votre proposition.

Mme la Rapporteure spéciale - La commission, en accord avec M. de Courson, retire l'amendement 84.

M. Charles de Courson, rapporteur spécial - Lors de mes contrôles, nous avons essayé de rapprocher les fichiers de la DDA au regard des aides européennes avec les déclarations des exploitants au forfait. J'ai découvert une surprise, dans un département cher au ministre, que le concept de superficie n'était pas le même pour les aides européennes que pour les déclarations fiscales forfaitaires. Le même exploitant peut déclarer 60 hectares d'un côté et 40 hectares de l'autre. Personne ne rapproche les fichiers DDA des fichiers MSA. Mon amendement 128 tend à le permettre.

Mme la Rapporteure spéciale - La commission l'a rejeté. Le problème du forfait est à nouveau posé, et il faut y réfléchir globalement. Mais en attendant cette réforme globale dont la perspective semble se rapprocher, nous pourrions faire le pas en avant proposé, soit-dit à titre personnel.

M. le Ministre - M. de Courson a raison de chercher à faire correspondre les informations de la MSA et celles des DDA. Je suis favorable à l'amendement.

M. Joseph Parrenin - Je m'interroge. Je veux bien croire qu'il y a des discordances. Dans les régions où existent des terrains communaux, ils sont utilisés par le biais de syndicats pastoraux, mais n'apparaissent pas dans la cote MSA des agriculteurs concernés. Il en va de même des agriculteurs qui mettent des bêtes en pension : ici encore il y a des terrains qui ne seront pas retrouvés. Soyons donc prudents : il ne faudrait pas que les discordances soient systématiquement interprétées comme des tricheries.

M. le Ministre - Je veux vous rassurer sur ce point. La confrontation des fichiers fera apparaître des discordances. Certaines donneront lieu à des rectifications. D'autres seront explicables et tenues pour normales : c'est le cas de celles que vous citez. Il n'est pas question de sanctionner systématiquement.

L'amendement 128, mis aux voix, est adopté à l'unanimité.

M. Charles de Courson, rapporteur spécial - Cela fait des années, depuis la création de la CSG, que je me bats pour qu'on supprime les cotisations minimales. Cette année le Gouvernement a fait un pas en supprimant les majorations de ces cotisations. Je propose par l'amendement 122 de les supprimer non pas l'an prochain, mais en 2002. Il y a en effet inéquité envers ceux qui sont soumis aux cotisations minimales.

Ils n'ont pas droit à la CMU, alors que certains sont en-dessous des seuils de revenus, et qu'en plus ils paient davantage d'impôt en proportion de leur revenu, puisque c'est un forfait. Il me semble donc logique d'achever la réforme en supprimant ces cotisations.

Mme la Rapporteuse spéciale - Cet amendement a été rejeté par la commission des finances. Il avait d'ailleurs été rejeté déjà en première partie de la loi de finances, à ceci près qu'il portait alors sur 2001. M. de Courson propose aujourd'hui une mesure qui relèverait de la loi de finances pour 2002.

M. le Ministre - Le Gouvernement vient de s'engager dans la suppression des majorations, cela représente environ 150 millions. Avec cet amendement ce seraient 200 millions de plus. Nous avons fait un pas : je ne dis pas que nous ne ferons pas le suivant, mais je ne peux pas m'engager pour l'an prochain.

L'amendement 122, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Charles de Courson, rapporteur spécial - Le Gouvernement s'est engagé dans la simplification et l'harmonisation des assiettes. Par l'amendement 140 je propose d'aller plus loin. L'idée de départ est la suivante : si l'on veut harmoniser les assiettes respectives des cotisations sociales, de la CSG et de la CRDS, et l'assiette fiscale, il faut le faire sur la base de cette dernière.

Un problème se pose : c'est que la définition de l'assiette de la CSG est dérogatoire du droit commun. Je propose d'intégrer les abattements dans le calcul de l'assiette sociale, afin de rapprocher les assiettes fiscale et sociale.

Compte tenu du coût qui résulterait de la prise en compte de la totalité des abattements fiscaux, seuls sont retenus les moins coûteux d'entre eux : les reports déficitaires et les amortissements réputés différés. Le coût de la mesure serait de l'ordre de 50 millions.

Mme la Rapporteure spéciale - La commission n'a pas examiné. Personnellement, cet amendement me semble source de complexité, et inutilement : les dispositions actuelles permettent aux exploitants qui le veulent de tenir compte des déficits. Avis défavorable à titre personnel.

M. le Ministre - Défavorable.

L'amendement 140, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Charles de Courson, rapporteur spécial - La loi de modernisation agricole a permis de déduire de l'assiette sociale la rente du sol. Mais celle-ci était alors évaluée sur la base de la valeur locative cadastrale. Or celle-ci fait l'objet d'écarts considérables. L'amendement 127 tend à achever la réforme en disposant que la rente du sol est définie en référence aux arrêtés préfectoraux qui fixent le plafond des loyers. Ainsi la rente du sol sera totalement déduite pour les propriétaires qui exploitent une partie de leur exploitation en toute propriété.

Mme la Rapporteure spéciale - La commission a rejeté cet amendement. Le débat qu'il met en jeu est double, portant sur la révision cadastrale et sur la réforme fiscale : il y faudra une réforme globale et on ne peut le traiter uniquement sous l'angle ici retenu. J'ajoute que l'amendement entraînerait une perte de recettes importante, de l'ordre de 500 millions.

M. le Ministre - Défavorable.

L'amendement 127, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Charles de Courson, rapporteur spécial - L'amendement 121 concerne une affaire grave. Le Gouvernement propose -et tout le monde en est d'accord- une mesure de simplification. Aujourd'hui, au forfait, vous avez le choix entre la moyenne triennale et l'année n-1 ; au réel, entre la moyenne triennale et l'année n. La moyenne triennale a été introduite à la suite de la grande crise viticole de 1991-1992, pour répondre à la protestation de nombreux agriculteurs qui se voyaient demander de payer des cotisations à un moment où ils n'avaient plus de revenu et se trouvaient en déficit.

Le rapport Marre-Cahuzac retrace la discussion sur le point de savoir s'il fallait supprimer l'année n ou l'année n-1. Le choix des rapporteurs, puis du Gouvernement, a été de supprimer n et de mettre tout le monde à n-1. Pourquoi ? Pour une raison pratique : la lourdeur de gestion qu'entraîne l'année n pour les caisses de la MSA. Pourtant les artisans et commerçants ont un semblable système : il est lourd, certes, mais il fonctionne et il permet de répondre aux crises sectorielles. Si l'on retient n-1, que se passera-t-il ? On veut bien payer des cotisations quand on a des rentrées, mais c'est plus difficile quand on est au creux de la vague. Je plaide donc pour qu'on retienne n et qu'on supprime n-1. Sinon nous ne serons pas capables de répondre aux crises sectorielles dont la vie agricole est scandée : l'élevage aujourd'hui, les fruits et légumes il y a deux ans, la crise porcine il y a cinq ans... C'est pourquoi il faut retenir l'année n, même si c'est plus lourd à gérer : tel est l'objet de l'amendement 121.

Quant à l'amendement 139, je l'ai déposé pour le cas où le précédent ne serait pas retenu et si l'Assemblée décidait de garder n-1 : dans ce cas, il ne faudrait pas l'appliquer avec sécheresse. C'est ce qui va malheureusement se passer avec le texte du Gouvernement : si je suis à n, l'an prochain je passerai à n-1, mais ce n et ce n-1 sont la même année !... Aussi je paierai deux fois sur la même assiette, trop haute si cette année-là le revenu était haut, trop basse si par exemple j'étais déficitaire. Quand on a créé l'année n, on n'a pas procédé avec cette brutalité : on avait prévu une année intermédiaire où l'on retenait la moyenne de n et de n-1. L'amendement 139 prévoit un semblable mécanisme de lissage pour le passage de n à n-1, et également de n à la moyenne triennale.

Mme la Rapporteure spéciale - M. de Courson a oublié de dire qu'un des objectifs fixés par le Premier ministre aux rapporteurs qu'il a bien voulu citer était de simplifier... L'amendement 121 a été rejeté par la commission. Si le projet de loi de financement, en son article 5, a supprimé l'option n, c'est pour simplifier les assiettes des cotisations sociales. Mais le même article a introduit la possibilité de changer d'option tous les six ans. C'est donc un article équilibré, sur lequel je propose de ne pas revenir.

Sur l'amendement 139, que la commission n'a pas examiné, il me semble que la même argumentation s'applique : ne compliquons pas, même à titre transitoire. Avis personnel défavorable.

M. le Ministre - Même avis, outre le fait que M. de Courson propose de revenir sur un vote exprimé par l'Assemblée dans le PLFSS, je veux souligner que cette disposition était souhaitée par la MSA et a fait l'objet de discussions avec les organisations professionnelles agricoles avant d'être proposée dans le rapport de Mme Marre et M. Cahuzac. Je souhaite donc vraiment le rejet de ces deux amendements.

M. Charles de Courson, rapporteur spécial - J'ai reçu comme chaque année les organisations professionnelles, et en particulier le vice-président de la FNSEA chargé des problèmes sociaux, qui m'a dit préférer le maintien de l'année n. J'ai donc interrogé M. Cahuzac, qui avait cru comprendre que la profession était plutôt favorable à n-1.

Par ailleurs, Monsieur le ministre, mon deuxième amendement n'a rien de complexe, puisqu'il s'agit d'un dispositif transitoire pour un an.

M. Christian Jacob - Je soutiens M. de Courson. Sans doute est-il plus difficile pour la MSA de calculer sur l'année n que de calculer sur l'année n-1, mais cela ne doit pas être notre critère : notre objectif doit être que les cotisations soient calculées de la manière la plus juste pour les agriculteurs, et donc correspondent à leurs revenus de l'année. C'est particulièrement important pour les secteurs à fortes fluctuations.

L'amendement 121, mis aux voix, n'est pas adopté, non plus que l'amendement 139.

M. Charles de Courson, rapporteur spécial - Il existe trois sortes de cotisations de solidarité. Depuis la création de la CSG, je propose de les supprimer. Le Gouvernement fait un premier effort cette année en supprimant la plus petite d'entre elles. Par mon amendement 126, je propose de supprimer également celle qui concerne les associés de sociétés de personnes non affiliées au régime agricole, ce qui ne coûterait que 11 millions. Outre le fait que la fraude atteint 80 % en raison de l'absence d'un dispositif de sanction, le maintien de cette cotisation décourage l'apport de capitaux dans l'agriculture.

Mme la Rapporteure spéciale - Rejet. Le fait qu'il y ait fraude ne justifie pas la suppression d'une taxe. Par ailleurs, même si son produit n'est pas très élevé, le maintien d'une cotisation fondée sur la solidarité a son importance.

M. le Ministre - Même avis.

L'amendement 126, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Charles de Courson, rapporteur spécial - Mon amendement 129 concerne le prélèvement sur la C3S au profit du BAPSA. Il y a deux ans, je vous avais prédit que l'exceptionnel allait devenir permanent. On passe même cette année de 1 milliard à 1,35 milliard, et l'année prochaine on aura besoin d'encore plus. Je propose de tirer les conclusions de cette situation, en réintégrant le régime agricole dans les bénéficiaires de la C3S.

Mme la Rapporteure spéciale - La commission a rejeté cet amendement pour la simple raison que les modalités de perception de la C3S viennent d'être adoptées dans le PLFSS.

M. le Ministre - Même avis.

L'amendement 129, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Charles de Courson, rapporteur spécial - Mon amendement 118 tend à demander au Gouvernement d'établir un rapport sur la mensualisation. La direction du budget déclare que celle-ci coûterait 9 milliards, mais le coût réel est d'environ 250 millions.

Mme la Rapporteure spéciale - Rejet. L'établissement d'un rapport me semble d'autant plus inutile après ce que j'ai cru comprendre des propos du ministre.

M. le Ministre - J'ai déjà dit que la discussion était ouverte avec la MSA sur ce sujet.

L'amendement 118 est retiré.

Top Of Page

ART. 50

M. Charles de Courson, rapporteur spécial - Avec mon amendement 130, je reviens à la charge pour la troisième année. Comme vous le savez peut-être, la plupart des Français sont des polypensionnés : nos compatriotes perçoivent en moyenne 2,4 pensions ! Et c'est ce qui explique que beaucoup de statistiques soient fausses : elles reposent sur une analyse régime par régime. Pour ma part, j'ai toujours plaidé pour que l'on revalorise les petites pensions en tenant compte de l'ensemble des montages vieillesse en droits propres. Un ami de Dordogne m'a dit un jour : « Vous fichez en l'air l'argent des contribuables ! » Et de me citer l'exemple de cet adjudant chef qui, au bout de quinze ans passés dans l'armée, a repris la petite exploitation familiale pendant une vingtaine d'années et qui jouit aujourd'hui à la fois de sa retraite militaire et d'une retraite agricole. Tous les ans, cette dernière est augmentée de 200 F alors même qu'en tant qu'ancien adjudant chef, il perçoit déjà 8 000 à 9 000 F par mois !

Je ne puis proposer par amendement que cette revalorisation soit réservée aux monopensionnés mais le mécanisme que je suggère permettrait de réaliser des économies qui pourraient être utilisées pour augmenter plus rapidement le montant des retraites. Sans doute va-t-on encore m'objecter qu'il est trop compliqué...

Mme la Rapporteure spéciale - Rejet. Il n'est pas dans l'esprit du programme de revalorisation de poser des conditions de ressources. D'autre part, cette proposition serait en effet un facteur de complication -il faudrait rechercher tous les polypensionnés !- alors même qu'elle ne concernerait que moins de 10 % des retraités.

M. le Ministre - Si ce que M. de Courson dit est vrai, ce serait troublant. En effet, la chose est théoriquement impossible : il faut avoir cotisé 37 ans et demi pour bénéficier de la revalorisation et 25 ans et demi pour obtenir une minoration...

M. Charles de Courson, rapporteur spécial - Il faut distinguer deux cas. J'ai pris l'exemple de quelqu'un qui a eu des carrières successives : engagé à 17 ans, on est pensionné de l'armée au bout de 15 ans et, à 32 ans, on peut très bien reprendre la ferme de ses parents et, 27 ans et demi plus tard, à 60 ans et demi, on est à la fois pensionné de l'armée et retraité agricole. Je ne mentionne même pas l'avantage supplémentaire que peut procurer une campagne double ! Mais on peut aussi être pluriactif -exploitant agricole et salarié de l'industrie par exemple- et mener pendant 37 ou 40 ans, deux carrières parallèles. La retraite agricole étant faible, on bénéficiera alors de la revalorisation parce que celle-ci ne tient pas compte de l'ensemble des droits propres. Or des statistiques que je tiens de votre ministère prouvent que le problème n'est nullement marginal : 35 à 40 % des exploitants agricoles perçoivent d'autres retraites que la retraite agricole ! Vous sous-estimez considérablement le nombre des polypensionnés !

L'amendement 130, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'article 50, mis aux voix, est adopté.

Top Of Page

APRÈS L'ART. 50

M. le Ministre - L'amendement 135 vise à modifier l'assiette des cotisations vieillesse dues par le chef d'exploitation pour les aides familiaux et le conjoint collaborateur. L'article L. 731-42 du code rural modifié par la loi d'orientation agricole a posé le principe de cette cotisation qui, depuis 1994, est calculée, s'agissant de l'aide familial, sur une base forfaitaire de 400 SMIG. Les modalités de calcul étaient fixées chaque année par décret : l'amendement introduit le principe de cette assiette forfaitaire dans le code rural.

Mme la Rapporteure spéciale - La commission n'a pas examiné cet amendement, mais les arguments du ministre me semblent convaincants : il ne s'agit que de légaliser le principe de l'assiette forfaitaire, déjà appliqué dans les faits. Avis favorable à titre personnel, par conséquent.

M. Charles de Courson, rapporteur spécial - Mon sous-amendement 250 vise à éviter d'éventuels contentieux. Le mode de calcul de ces cotisations n'était pas conforme à la loi mais ce système forfaitaire était-il plus avantageux que celle-ci, ou moins ? S'il l'était plus, je maintiendrais mon sous-amendement car l'amendement ne réglant pas le problème du passé, les contentieux seraient inévitables...

Mme la Rapporteure spéciale - La commission n'a pas examiné le sous-amendement non plus mais son utilité me semble très incertaine. Avis défavorable, à titre personnel.

M. le Ministre - Il ne s'agit que d'officialiser une situation, à régime équivalent, et je ne vois pas comment cela pourrait susciter des contentieux !

Le sous-amendement 250 est retiré.

L'amendement 135, mis aux voix, est adopté.

M. le Ministre - L'amendement 136 tend à réintégrer dans le code rural des dispositions qui n'avaient pu y être insérées lors de la codification intervenue aux termes de l'ordonnance du 15 juin dernier. En effet, les dispositions, intéressant le BAPSA, ne pouvaient être codifiées par une loi ordinaire, mais seulement par une loi de finances.

Mme la Rapporteure spéciale - La commission n'a pas examiné l'amendement mais comment ne pas respecter les dispositions de l'ordonnance du 2 janvier 1959 ?

L'amendement 136, mis aux voix, est adopté.

M. le Ministre - L'amendement 138 vise à proroger jusqu'en 2006 le financement du PMPOA par le FNDAE. Ce financement, organisé par la loi de 1997 jusqu'à la fin de 1999, a déjà été prorogé pour cette année par la loi de finances rectificative de l'an dernier. La participation du FNDAE ayant été intégrée aux contrats de plan 2000-2006, nous proposons cette fois une prorogation jusqu'au terme de ces contrats.

Mme la Rapporteure spéciale - Avis favorable, à titre personnel : nous avons suffisamment dit l'intérêt du PMPOA pour que nous approuvions la prorogation de cette enveloppe de 150 millions jusqu'au terme des contrats Etat-régions.

L'amendement 138, mis aux voix, est adopté.

M. Charles de Courson, rapporteur spécial - Mon amendement 144 pose à la fois une question de droit budgétaire et une question de fond, relatives à la modulation. Celle-ci résulte non d'une décision de Bruxelles, mais d'une décision nationale, encadrée par un règlement. Or, depuis le début, je défends la thèse selon laquelle cette modulation serait une imposition de toute nature, selon le droit français, c'est-à-dire un prélèvement effectué par voie d'autorité et sans contrepartie destinée à couvrir l'ensemble des charges publiques.

Or, le calcul même de la modulation, qui s'effectue exploitation par exploitation, en fait un quasi-impôt sur le revenu, c'est-à-dire une « imposition de toute nature », que la loi organique vous interdit d'affecter par voie de fonds de concours aux CTE, puisque cette voie est réservée aux recettes non fiscales. Et si vous considérez qu'il s'agit d'une recette non fiscale, allez-vous attendre le collectif de fin d'année pour la constater et demander au ministre de l'économie d'augmenter d'une somme équivalente la ligne des CTE ? Non, bien sûr !

Mme la Rapporteuse spéciale - La commission des finances n'a pas examiné l'amendement, mais elle avait repoussé le même l'an dernier. La France n'est pas le seul pays à appliquer la modulation : la Grande-Bretagne et le Portugal l'appliqueront aussi à compter du 1er janvier prochain. Quant aux effets, les études d'impact ont montré qu'ils seraient variables selon les régions, mais qu'ils n'aggraveraient ni les inégalités géographiques, ni les inégalités entre filières.

M. François Sauvadet - Si !

M. le Ministre - La théorie de M. de Courson me navre, car elle montre qu'il ne maîtrise pas la notion de cofinancement, à laquelle il est pourtant confronté, sans doute, en tant qu'élu local. Il y a, d'une part, des crédits nationaux, figurant dans le budget national : 400 millions cette année, 950 l'an dernier. Il y a, d'autre part, des crédits européens, qui peuvent être abondés par les crédits de la modulation, mais qui restent européens même lorsqu'ils sont modulés, et que la réglementation européenne nous autorise à affecter à des politiques de développement rural. Ce ne sont pas des recettes de l'Etat, et le raisonnement de M. de Courson n'est donc pas valable.

M. Christian Jacob - M. de Courson n'a jamais dit que la France était le seul pays à appliquer la modulation : il a dit que celle-ci résultait d'une décision nationale. Quant à ses effets, il est patent qu'ils seront catastrophiques pour bon nombre d'exploitations. Enfin, il est dangereux d'utiliser des crédits européens destinés à compenser la baisse des prix pour les réaffecter à des politiques nationales visant un but différent, car cela revient à créer des distorsions de concurrence nationales avec de l'argent communautaire.

M. Charles de Courson, rapporteur spécial - Je n'ai jamais dit, en effet, que la France était le seul pays à appliquer la modulation : elle est, en revanche, la seule à pratiquer des taux progressifs, la Grande-Bretagne et le Portugal ayant opté pour des taux linéaires, modérés de surcroît. Par ailleurs, s'il s'agit de crédits communautaires, où est la contrepartie nationale qui est censée les équilibrer ? Je veux que l'on m'explique comment, avec 400 millions dans le budget, on est à parité avec l'Europe, qui fournit 950 millions. On va y perdre 550 millions !

M. le Ministre - Mais non ! Il faut ajouter à ces 400 millions la part non consommée des crédits de l'année précédente, et si nous n'arrivons pas à 950 millions avec les seuls CTE, nous pouvons financer d'autres actions, comme les mesures agri-environnementales, avec le reste.

L'amendement 144, mis aux voix, n'est pas adopté.

Top Of Page

ART. 35

M. le Président - J'appelle maintenant les crédits du BAPSA. L'amendement 85 de la commission des finances à l'article 35 tombe.

Les crédits ouverts aux articles 35 et 36, successivement mis aux voix, sont adoptés.

M. le Président - Nous en avons terminé avec l'examen des crédits du ministère de l'agriculture et de la pêche, ainsi que des crédits du BAPSA.

La suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2001 est renvoyée à la prochaine séance, qui aura lieu ce jeudi 9 novembre 2000, à 15 heures.

La séance est levée à 2 heures 55.

                      Le Directeur du service
                      des comptes rendus analytiques,

                      Jacques BOUFFIER

Top Of Page

ORDRE DU JOUR
DU JEUDI 9 NOVEMBRE 2000

A QUINZE HEURES : 1ère SÉANCE PUBLIQUE

Suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2001 (n° 2585).

M. Didier Migaud, rapporteur général au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du plan. (Rapport n° 2624.)

Travail et emploi ; articles 57 à 60 .

M. Gérard Bapt, rapporteur spécial au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du plan. (Annexe n° 23 du rapport n° 2624).

M. Jean-Claude Boulard, rapporteur pour avis au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. (Tome XI de l'avis n° 2625).

- Formation professionnelle :

M. Jacques Barrot, rapporteur spécial au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du plan. (Annexe n° 20 du rapport n° 2624).

M. Patrick Malavieille, rapporteur pour avis au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. (Tome IX de l'avis n° 2625).

A VINGT ET UNE HEURES : 2ème SÉANCE PUBLIQUE

Suite de l'ordre du jour de la première séance.

Le Compte rendu analytique
est disponible sur Internet
en moyenne trois heures après la fin de séance.

Préalablement,
est consultable une version incomplète,
actualisée au fur et à mesure du déroulement de la séance.

        www.assemblee-nationale.fr


© Assemblée nationale