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Session ordinaire de 2000-2001 - 34ème jour de séance, 75ème séance

2ème SÉANCE DU MARDI 28 NOVEMBRE 2000

PRÉSIDENCE de M. Raymond FORNI

Sommaire

QUESTIONS AU GOUVERNEMENT 2

TORTURE PENDANT LA GUERRE D'ALGÉRIE 2

FISCALITÉ COMMUNAUTAIRE 3

RECHERCHE SUR LES THÉRAPIES CELLULAIRES 4

BILAN DE LA CONFÉRENCE DE LA HAYE SUR LE RÉCHAUFFEMENT DE L'ATMOSPHÈRE 4

NOUVEAUX MÉDICAMENTS ANTI-CANCÉREUX 5

PRIME DE NOËL POUR LES CHÔMEURS 6

CONFÉRENCE DE LA HAYE 6

SITUATION DE LA JUSTICE 7

DISSENSIONS AU SEIN DU GOUVERNEMENT 7

POLITIQUE ÉNERGÉTIQUE DE LA FRANCE 8

BREVETABILITÉ DU VIVANT 8

CRÉANCE DE L'ETAT SUR LE JOURNAL L'HUMANITÉ 9

FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR 2001 -nouvelle lecture- (suite) 9

EXPLICATIONS DE VOTE 10

CONTRACEPTION D'URGENCE (CMP) 14

SANTÉ DES ANIMAUX -deuxième lecture- 21

ARTICLE PREMIER 25

ART. 10 26

ART. 11 26

APRÈS L'ART. 17 27

APRÈS L'ART. 18 27

La séance est ouverte à quinze heures.

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      QUESTIONS AU GOUVERNEMENT

L'ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.

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TORTURE PENDANT LA GUERRE D'ALGÉRIE

M. Michel Meylan - La question que je pose au Premier ministre pourrait être adressée tout aussi bien à Mme Buffet.

A vingt ans, j'ai répondu à l'appel du Gouvernement en allant combattre en Algérie. Comme tous ceux de ma génération, j'ai donné deux ans de ma vie à une guerre sans nom. Je m'interroge et je vous interroge sur la torture pendant la guerre d'Algérie.

Dans vos déclarations, vous avez suggéré que ce débat était celui du Parlement. Dès lors que vous avez pris publiquement position le 4 novembre au dîner du CRIF sur l'appel d'un groupe d'intellectuels pour condamner la torture durant cette période, dès lors que vous désavouez la démarche du Parti communiste en faveur d'une commission d'enquête parlementaire, dès lors que votre ministre Mme Buffet affiche son désaccord avec votre position, cela devient aussi le débat du Gouvernement. Nous n'avons pas vocation à devenir les porte-valises de l'histoire.

Vous avez évoqué la mémoire de ces centaines de milliers de jeunes du contingent. Personnellement je ne peux citer que la poignée d'entre eux morts sous mes yeux. C'est en leur souvenir que je vous interroge. Pourquoi avez-vous lancé ce débat en soutenant l'appel à la condamnation de la torture, publié par le quotidien communiste L'Humanité, si vous ne souhaitiez pas qu'il fasse l'objet d'une récupération politique ? Croyez-vous que les communistes, qui ont voté les pouvoirs spéciaux au président du Conseil socialiste Guy Mollet soient les mieux placés pour donner des leçons d'histoire et de morale ? (Interruptions sur les bancs du groupe communiste et du groupe socialiste ; applaudissements sur les bancs du groupe DL, du groupe UDF et du groupe du RPR)

Que pensez-vous de la torture pratiquée dans les régimes communistes actuels et anciens ? (Applaudissements sur les bancs du groupe DL, du groupe UDF et du groupe du RPR)

Dans votre souci affiché de vérité historique, pourquoi ne proposez-vous pas de faire la lumière sur les atrocités commises par le FLN contre les soldats français, contre les populations civiles et contre les Harkis ? (Applaudissements sur les bancs du groupe DL, du groupe UDF et du groupe du RPR)

M. Lionel Jospin, Premier ministre - La reconnaissance des crimes commis pendant ce que nous appelons maintenant la guerre d'Algérie et le fait que la torture fut pratiquée, crée un trouble profond dans l'opinion et heurte notre conscience. Pourquoi m'élever contre la torture ? Parce que je suis contre !

Un député RPR - Nous aussi !

M. le Premier ministre - Je n'en doute pas ! Certes ces dévoiements, qui étaient minoritaires, n'étaient pas ignorés. Mais la reconnaissance récente par certains des acteurs alors en charge des opérations de maintien de l'ordre à Alger oblige à regarder en face la vérité, si terrible soit-elle, et à la condamner sans appel.

Pourquoi me suis-je exprimé sur ce sujet, brièvement d'ailleurs, au dîner du CRIF ? Parce que je m'exprimais sur le devoir de vérité, l'obligation de considérer notre histoire dans tous ses aspects, même les plus sombres. J'avais été interpellé, comme le Président de la République, par un appel signé par des intellectuels.

Tout cela s'est produit dans le cadre d'un conflit long et terrible, dans un contexte où des massacres ont été commis contre des Harkis, que je condamne également.

Je n'oublie pas non plus que le contingent, engagé dans une guerre coloniale qu'il n'avait pas souhaitée, s'est mobilisé pour défendre la République lorsque des factieux l'ont menacée (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe RCV). Je n'oublie donc en rien les exactions et les massacres perpétrés de l'autre côté, mais je considère qu'une démocratie est d'abord comptable, par rapport à ses propres valeurs, des actes commis par de hauts responsables.

M. François d'Aubert - Que faisait Mitterrand à l'époque ?

M. le Premier ministre - Quarante ans après les faits, un travail objectif d'explication est nécessaire. Il ne relève pas pour moi d'un acte de repentance. Le Gouvernement, comme il l'a fait pour l'accès aux archives de la seconde guerre mondiale ou aux documents relatifs aux journées d'octobre 1961, est prêt à favoriser un tel travail scientifique et historique (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe RCV).

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FISCALITÉ COMMUNAUTAIRE

M. Jean-Pierre Balligand - Depuis une dizaine d'années que l'Europe a autorisé la libre circulation des capitaux, les Européens ont essayé sans succès de faire converger leurs approches de la taxation de l'épargne. Sous la présidence française, un accord vient enfin d'être trouvé, hier même.

Quand les Etats européens ne coopèrent pas et se livrent à une concurrence fiscale effrénée pour attirer des capitaux, la fiscalité sur les revenus du travail compense les recettes fiscales provenant de la taxation de l'épargne. Avant cet accord, les pays comme le nôtre, qui souhaitent préserver une politique publique de redistribution, sont obligés de maintenir une pression fiscale élevée sur les salaires, sauf à accepter de réduire massivement les dépenses publiques, ce qui n'est heureusement pas l'orientation de ce gouvernement. L'exemple britannique des transports ferroviaires nous montre à quel résultat conduit la concurrence fiscale non maîtrisée.

A quelques jours du Conseil européen de Nice, précisez-nous le contenu de l'accord et les engagements réciproques des Etats membres (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste).

M. Laurent Fabius, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie - Lundi au petit matin, nous sommes parvenus à un accord pour boucler le « paquet fiscal ». Cet accord important avait été évoqué pour la première fois en 1989 et mis en chantier voilà trois ans. Ce paquet contient d'abord un code de bonne conduite. Dans des pays comme les Pays-Bas ou l'Irlande, il existe des régimes exorbitants pour les entreprises et leurs quartiers généraux, aboutissant au dumping fiscal. 66 régimes dits dommageables ont été identifiés. Nous avons décidé qu'ils devraient être totalement démantelés au 1er janvier 2003.

En second lieu, s'agissant de la fiscalité de l'épargne, au Luxembourg, en Autriche, en Belgique, des non-résidents bénéficient pour leurs investissements en capitaux de taux privilégiés dans des conditions peu transparentes. Nous sommes parvenus à fixer un principe général, celui d'échange d'informations, ce qui signifie à terme la fin du secret bancaire pour ces placements. Ce principe s'appliquera au 1er janvier 2002 pour douze pays, avec une situation intermédiaire un peu plus longue pour le Luxembourg, l'Autriche et la Belgique.

Cet accord important porte un coup au dumping fiscal et à l'évasion fiscale, et réduit la distorsion entre la fiscalité du travail et celle du capital, ce qui va dans le sens des idées que vous défendez.

Ce processus n'entrera pas en vigueur du jour au lendemain. Nous rencontrerons encore des obstacles. Mais qu'une discussion qui durait depuis plus de dix ans, et une négociation depuis trois ans, se terminent favorablement sous présidence française, sera accueilli positivement par tous les Européens, et en particulier par tous les Français (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

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RECHERCHE SUR LES THÉRAPIES CELLULAIRES

M. Alain Claeys - Monsieur le ministre de la recherche, le Premier ministre a fait part ce matin de son intention de saisir le comité consultatif national d'éthique sur l'avant-projet de loi de révision des lois de bioéthique de 1994, que nous devions examiner au cours du deuxième trimestre 2001. Les lois de 1994 tendaient à concilier le respect des droits fondamentaux de la personne humaine et une possibilité de développement maîtrisé de la recherche médicale. Cependant, nos concitoyens attendent beaucoup de l'avancée des connaissances intervenue depuis 1994, même s'ils sont conscients que les principes éthiques auxquels se réfèrent nos sociétés doivent être respectés. Nous nous devons de répondre à leur attente, quelles que soient nos approches spirituelles et philosophiques de ces questions.

Depuis l'ouverture de ses travaux, la mission d'information conduite par Bernard Charles (« Très bien ! » sur les bancs du groupe RCV) suit cette démarche citoyenne, en se gardant de toute position dogmatique ou radicale.

Le Gouvernement estime que les promesses thérapeutiques qui s'attachent à l'utilisation des cellules souches humaines justifient la généralisation des recherches afférentes, sous réserve qu'une institution indépendante en assure un suivi attentif.

Pouvez-vous nous préciser en quoi les perspectives de la thérapie cellulaire justifient l'extension des recherches s'y rapportant et nous indiquer les modalités d'encadrement de ces programmes qu'entend retenir le Gouvernement ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur quelques bancs du groupe RCV)

M. Roger-Gérard Schwartzenberg, ministre de la recherche - Les personnes atteintes de maladies graves attendent beaucoup de l'avancée des connaissances et de l'avènement de nouvelles thérapies. Nombre d'affections proviennent d'une dégénérescence des cellules et la thérapie cellulaire ouvre véritablement la voie à une médecine régénératrice, susceptible de soulager les patients atteints d'Alzheimer, de Parkinson ou de certaines formes de maladies cardiaques, d'hépatites ou de diabètes sévères. La recherche médicale souhaite s'orienter sur l'exploitation de cellules souches embryonnaires, à partir de prélèvements sur des embryons surnuméraires congelés.

Mme Christine Boutin - Honteux !

M. le Ministre - Les chercheurs souhaitent pouvoir transférer les cellules somatiques pour constituer des noyaux de cellules souches embryonnaires.

Mme Christine Boutin - Scandaleux !

M. le Ministre - L'utilisation à cette fin d'embryons en surnombre, qui doivent de surcroît ne pas avoir dépassé leur septième semaine d'existence, doit être strictement encadrée : sa finalité thérapeutique doit être établie, aucune méthode alternative ne doit être disponible et un protocole de recherche doit avoir été préalablement validé par un haut conseil indépendant. Le Gouvernement entend respecter strictement les règles éthiques tout en ne privant aucun malade des bienfaits de l'avancée des connaissances.

Mme Christine Boutin - Il n'en est rien !

M. le Ministre - Du reste, le Premier ministre a annoncé ce matin que ce projet de loi serait soumis à une très large concertation, à laquelle le Parlement sera étroitement associé. (Applaudissements sur les bancs du groupe RCV et du groupe socialiste)

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BILAN DE LA CONFÉRENCE DE LA HAYE SUR LE RÉCHAUFFEMENT DE L'ATMOSPHÈRE

Mme Nicole Bricq - Selon vos propres termes, la Conférence de La Haye s'est achevée, Madame la ministre de l'environnement, sur un échec à vertu pédagogique puisqu'elle a permis de préciser les enjeux du débat et d'identifier les responsabilités des différentes parties intéressées.

Cet échec, que nous espérons tout provisoire, n'empêche pas d'agir au niveau national et le Président de la République vous a apporté un soutien remarqué, dans le procès injuste qu'instruisait contre vous le représentant du Royaume-Uni. Je ne doute pas que la représentation parlementaire aura à c_ur de concrétiser cet élan en apportant tout son soutien au volet du collectif budgétaire tendant à mettre en place une fiscalité favorable à la maîtrise de l'énergie.

Pouvez-vous, Madame la ministre, dresser un bilan des travaux de La Haye et nous indiquer quelle sera la prochaine étape ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement - L'absence de résultat satisfaisant à La Haye constitue à l'évidence un échec et une déception.

Même si l'esprit de Kyoto a semblé prévaloir, il n'a pas été possible de surmonter tous les obstacles. Ainsi, fallait-il admettre que les plus gros émetteurs de gaz à effet de serre qui, depuis trois ans, ont souscrit les engagements les moins contraignants, renégocient encore à la baisse leurs obligations ? (« Non ! » sur divers bancs)

Pendant trois jours, nous n'avons pu sortir d'un dialogue de sourds. Puis, les Etats-Unis, l'Australie et le Japon ont manifesté, hélas trop tardivement et trop timidement, une volonté d'aboutir qui nous eut permis de conclure si elle n'avait conduit au risque que ne se constitue un front des pays riches contre les moins favorisés. Nous n'avions plus le temps de finaliser l'accord sans nous exposer aux reproches des pays du sud.

Nous n'avons pas abouti mais plusieurs rencontres sont prévues et, forte du soutien du Président de la République, du Gouvernement et de nombre d'entre vous, je ne doute pas que le plan d'efficacité énergétique qui vous sera soumis dans les prochaines semaines suscitera la même unanimité. Par avance, je vous en remercie (Applaudissements sur les bancs du groupe RCV, du groupe socialiste et du groupe communiste).

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NOUVEAUX MÉDICAMENTS ANTI-CANCÉREUX

M. Jean-Jacques Denis - Madame la secrétaire d'Etat à la santé, l'ensemble des responsables médicaux et administratifs impliqués dans la lutte contre le cancer s'inquiètent de la dérive des coûts des nouveaux médicaments anti-cancéreux. Ces nouvelles molécules, dont l'autorisation de mise sur le marché est imminente, sont particulièrement prometteuses dans le traitement des cancers du poumon et du sein -ce dernier touchant chaque année 35 000 nouveaux malades. Mais leur coût est hors de proportion avec celui des chimiothérapies, utilisées dans les cures classiques : 20 000 F en moyenne par cure et par mois contre 2 000 F pour les médicaments classiques.

Face à cette évolution préoccupante, comment le Gouvernement entend-il rassurer les professionnels de santé ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat à la santé et aux handicapés - Le plan de lutte contre le cancer lancé par le Gouvernement en février dernier tend à traiter le problème dans toutes ses dimensions. S'agissant des anti-cancéreux de nouvelle génération, il est patent que les centres spécialisés doivent faire face à une augmentation des charges qui suscite parfois de sérieuses difficultés de fonctionnement. Pour y remédier, le plan cancer a été doté de 2 milliards et les charges nouvelles induites par l'utilisation des nouvelles molécules ont été prises en compte dans le système de valorisation de l'activité des établissements. Le Gouvernement leur donne ainsi les moyens de répondre aux attentes des malades, sans pour autant négliger les autres aspects de la cure, tels que l'accompagnement psychologique, qui ne saurait être négligé (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

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PRIME DE NOËL POUR LES CHÔMEURS

M. Patrick Leroy - Madame la ministre de l'emploi et de la solidarité, des milliers de chômeurs se sont rassemblés ces jours derniers à Marseille et à Valenciennes pour redire leur opposition à la politique du MEDEF qui, dans le cadre de la renégociation de la convention UNEDIC, s'acharne sur les salariés et sur les chômeurs. A bien des égards, ce mouvement rappelle le puissant élan de contestation de 1998. Comme les années précédentes, les chômeurs demandent en effet une prime de Noël (Murmures sur les bancs du groupe du RPR) afin de bénéficier, dans des proportions bien modestes, de la répartition des fruits de la croissance.

N'oublions pas que les grands groupes industriels et commerciaux ont réalisé autant de profits en six mois que sur l'ensemble de l'année dernière. Vous vous êtes engagée, lors du sommet de la majorité plurielle, à augmenter les minima sociaux dès la fin de l'année. Quelles mesures comptez-vous prendre pour que les chômeurs ne soient pas laissés pour compte ?

Mme Nicole Péry, secrétaire d'Etat aux droits des femmes et à la formation professionnelle - Elisabeth Guigou présidant le conseil emploi affaires sociales, j'apporterai la réponse au nom du Gouvernement, qui a toujours été attentif aux conditions de vie des chômeurs. Il est légitime que ces derniers puissent profiter des fêtes de fin d'année. L'amélioration de la qualité de la vie personnelle, familiale et sociale a en effet toute sa place dans la lutte contre l'exclusion. C'est pourquoi les allocataires du RMI, de l'allocation de solidarité spécifique et de l'allocation d'insertion avaient bénéficié l'an dernier d'une prime de 1 000 F. Le Gouvernement étudie actuellement des mesures pour cette année et vous fera part de leur teneur. Je voudrais toutefois préciser, en matière de lutte contre la pauvreté, que le montant de l'allocation de solidarité spécifique, qui n'avait pas été revalorisé depuis 1994, a progressé de 8 % dès 1997-1998, et de 13 % à ce jour. Le principe d'une indexation sur les prix a également été posé. Surtout, le Gouvernement s'attache avec succès, depuis son arrivée, à permettre le retour à l'emploi des chômeurs. Le taux de chômage est ainsi passé de 12,5 % au mois de juin à 9,5 % aujourd'hui. Ce sont 900 000 chômeurs qui ont retrouvé un emploi. Cette baisse est générale, mais touche en particulier les chômeurs depuis plus de trois ans, dont le nombre a diminué de 20 % cette année. Enfin, on enregistre cette année, pour la première fois depuis sa création, une baisse de l'effectif des allocataires du RMI. Le Gouvernement a la ferme volonté de poursuivre dans cette voie (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur plusieurs bancs du groupe communiste).

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CONFÉRENCE DE LA HAYE

M. Daniel Feurtet - Je veux d'abord rappeler à notre collègue de DL, et non à toute l'opposition, que Gabriel Péri, qui fut torturé par les nazis siégeait sur ce banc.

Ma question s'adresse à Mme la ministre de l'environnement. Vous avez présidé la conférence de La Haye, consacrée à une question d'avenir, celle des effets de serre. Vous avez rencontré des obstacles d'ordre politique, que vous avez affrontés avec courage, et nous vous en remercions. Pouvez-vous nous apporter des précisions sur la nature exacte de ces obstacles et sur les initiatives que vous prendrez dans les prochaines semaines ? (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et du groupe socialiste)

Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement - Je rappelle que 37 Etats développés se sont engagés il y a trois ans, à Kyoto, à réduire collectivement de 5,4 % leurs émissions de carbone. Il s'agissait bien là, en dépit de la déception des ONG, d'un succès et d'une première étape dans la voie de la stabilisation des émissions. En effet, si rien n'avait été fait, celles-ci auraient augmenté spontanément de 20 %. Pour atteindre l'objectif -considérable- d'une réduction de 25 % poursuivi par les pays développés, il faut mobiliser l'ensemble des partenaires sachant qu'il y a 6 milliards d'émetteurs sur la planète. Ceci se révèle plus complexe que les démarches précédentes qui portaient sur plusieurs produits différents. En ce qui concerne la conférence de La Haye, les Etats les plus pollueurs ont sans doute assoupli leurs positions trop tard pour parvenir à un accord global. Néanmoins, nous avons davantage progressé en 48 heures que sur les trois dernières années. Les bases d'un accord sont là, mais nous ne les accepterons que si elles permettent une réduction effective des émissions et si elles répartissent équitablement les efforts à fournir. J'ai déjà repris contact avec les principaux participants afin d'être en mesure de proposer au président de la conférence qu'elle se réunisse de nouveau avant l'été (Applaudissements sur les bancs du groupe RCV, du groupe socialiste et du groupe communiste).

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SITUATION DE LA JUSTICE

M. Michel Hunault - Je pose ma question au nom des trois groupes de l'opposition (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR, du groupe DL et du groupe UDF ; exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste).

La justice est en crise, et l'institution judiciaire menacée de paralysie. Ce n'est pas faute d'avoir alerté le Gouvernement. Les avocats ont d'abord réclamé une augmentation des moyens de l'aide juridictionnelle. Vous avez, pour toute réponse, créé une commission et reporté les solutions à 2003. Lorsque je vous ai interrogée ici même, il y a quinze jours, sur la nécessité de créer des postes, vous avez mis mes chiffres en cause. Mais ce sont ceux des magistrats eux-mêmes ! Et aujourd'hui les greffiers réclament 1 500 créations de postes. Quand donc le Gouvernement répondra-t-il aux attentes du monde judiciaire ?

Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux, ministre de la justice - La justice n'est pas en crise ; mais l'ensemble des magistrats, des greffiers, des fonctionnaires et des avocats est confronté à l'application de la nouvelle loi sur la présomption d'innocence. Dans l'ensemble, à l'exception de dispositions relatives à l'appel des jugements de cours d'assises et au fonctionnement de la justice d'application des peines, issues d'amendements parlementaires, les conséquences de la loi ont été anticipées. Nous proposerons un texte au Parlement au terme des travaux de la commission. En attendant, des moyens seront dégagés pour permettre aux avocats de répondre aux besoins en particulier pour les affaires familiales, les enfants, la reconduite des étrangers à la frontière et les audiences correctionnelles. L'ensemble des postes de magistrats supplémentaires nécessités par la loi a d'autre part été créé. Des difficultés pourront survenir entre janvier et septembre, en attendant la sortie de la promotion que nous attendons. Mais nous travaillons actuellement à flécher les postes prévus pour les tribunaux de commerce, leur réforme n'étant pas encore votée.

Les fonctionnaires de catégorie C demandent une revalorisation. Les greffiers réclament des postes supplémentaires, ils les obtiendront en avril. En attendant, l'ensemble du monde judiciaire saura, je n'en doute pas, être exemplaire dans ce domaine de la justice qui est emblématique (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste).

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DISSENSIONS AU SEIN DU GOUVERNEMENT

M. Thierry Mariani - La loi sur la présomption d'innocence va entrer en vigueur dans 32 jours, et vous reconnaissez aujourd'hui que vous n'avez pas les moyens de la faire appliquer !

Ma question porte sur deux faits. Monsieur le Premier ministre, vous avez refusé une commission d'enquête parlementaire sur la guerre d'Algérie. Madame Marie-George Buffet, l'un de vos ministres, a publiquement fait part de son désaccord.

D'autre part, après bien des hésitations, vous avez décidé d'un plan de suppression des farines animales (Interruptions et rires sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe RCV).

M. le Président - Laissez M. Mariani exposer la logique de sa question...

M. Thierry Mariani - Mais Mme Lebranchu, Ministre de la justice, ne l'approuve pas et l'a fait savoir hier sur une radio nationale. Trouvez-vous donc normal, Monsieur le Premier ministre, que vos ministres n'approuvent pas vos choix et le fassent savoir publiquement ? (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL)

M. le Président - Si vous aviez commencé par là...

M. le Premier ministre - Je pense que tout le monde sera d'accord avec moi pour considérer que cette question mérite une réponse brève. Je renvoie M. Mariani à son propre goût du débat, lui qui, ajoutant foi aux propos d'une personnalité politique étrangère, n'a pas hésité à critiquer la manière dont Mme Voynet a défendu à La Haye les positions françaises, au moment même où le Président de la République française déclarait que l'attitude de notre ministre avait été parfaite. Je ne sais ce qui est le plus grave : ne pas dire exactement comme le Premier ministre, ou contredire le Président de la République ? (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe RCV et du groupe communiste)

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POLITIQUE ÉNERGÉTIQUE DE LA FRANCE

M. André Schneider - Ma question, que je pose au nom des trois groupes de l'opposition (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe RCV), s'adresse au Premier ministre et concerne la politique énergétique de la France. Malgré les questions qui vous ont été posées à ce sujet la semaine dernière, Monsieur le Premier ministre, votre gestion du dossier est toujours aussi floue, voire brouillonne. Vous avez évoqué la réalisation d'une centrale nucléaire de nouvelle génération, type EPR, ce qui a amené les Verts à parler de « provocation » et de « casus belli ». Comme vous nous avez habitués, de négociations en arbitrages entre les diverses composantes de votre majorité, à des tergiversations, nous aimerions savoir à quoi nous attendre : allez-vous lancer l'EPR ou stopper ce projet ? (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL)

M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'industrie - Comme je l'ai redit la semaine dernière ici-même, la politique énergétique du Gouvernement est équilibrée. Elle repose en effet à la fois sur une maîtrise de la consommation, maîtrise à laquelle le Premier ministre entend donner une nouvelle impulsion, sur une promotion des énergies renouvelables, étant entendu que nous voulons faire de la France le fer de lance de la recherche européenne et mondiale dans ce domaine et sur l'énergie électronucléaire, qui représente 75 % de la production globale d'électricité. Cette politique équilibrée a été confirmée ici-même la semaine dernière par le Premier ministre. Nous nous efforçons donc de rester performants dans chacune de ces directions et le moment venu, nous prendrons les décisions que requiert la poursuite de cet équilibre, et en particulier le fait que l'énergie électronucléaire y joue un rôle important (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

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BREVETABILITÉ DU VIVANT

M. André Aschieri - Le 30 juillet dernier, la France devait intégrer dans son droit la directive européenne sur la brevetabilité du vivant.

Je suis convaincu que le génie génétique représente une révolution plus importante que celles qu'ont provoquées en leur temps l'industrie, la chimie et l'informatique. Nous touchons en effet là au vivant et toutes les espèces sont concernées. Mais cette révolution, capitale pour la santé à différents titres, comporte aussi un risque : celui de la marchandisation. Or l'Office européen des brevets tente actuellement de forcer la main des Etats et souhaite modifier la convention européenne des brevets en y intégrant la directive européenne dont j'ai parlé. Quelle est la position de la France sur ce dossier ? Ne pensez-vous pas, Madame la ministre de la justice, que nous devrions profiter de la présidence française pour proclamer solennellement que le vivant constitue pour l'humanité un patrimoine inaliénable ? (Applaudissements sur les bancs du groupe RCV et du groupe socialiste)

Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux, ministre de la justice - Si nous n'avons pas traduit en droit français la directive en question, c'est parce que nous n'acceptons pas l'idée même qu'on puisse déposer un brevet du génome. Nous sommes confortés dans cette position par le Conseil d'Etat, qui a estimé la directive incompatible avec notre droit, et par les avis du Conseil consultatif de bioéthique comme de l'Académie des sciences. Partant, nous avons demandé une première explication à la Commission. Celle qui nous a été donnée ne nous a pas fait changer d'avis sur la directive, qui demeure à nos yeux inacceptable en l'état. Nous allons donc demander que s'ouvre une révision de la directive, afin que celle-ci soit plus conforme à l'idée que nous nous faisons de la dignité humaine et de la notion de patrimoine vivant (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe RCV et du groupe communiste).

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CRÉANCE DE L'ETAT SUR LE JOURNAL L'HUMANITÉ

M. Charles de Courson - A l'article 5 du projet de loi de finances rectificative qui a été adopté mercredi dernier, le Gouvernement propose l'abandon total du capital et des intérêts relatifs aux deux derniers exercices de deux prêts, respectivement de 7 et 6 millions, accordés par l'Etat en 1990 et 1993 -sous deux gouvernements socialistes- à la société nouvelle du journal l'Humanité, dont l'actionnaire quasi-unique est le parti communiste français (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste ; applaudissements sur les bancs du groupe UDF).

Au nom des députés de l'opposition, et devant tous les contribuables, je voudrais savoir, Monsieur le Premier ministre, si vous êtes prêt, par respect du principe d'égalité, à abandonner toutes les créances détenues par l'Etat sur les entreprises de presse (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF, du groupe du RPR et du groupe DL).

M. Laurent Fabius, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie - Il est exact que figure dans le projet de loi de finances rectificatives la disposition dont vous avez parlé. Mais s'agissant de journaux d'opinion, la tradition républicaine veut que, quel que soit le Gouvernement, l'on ne fasse pas de différence entre les uns et les autres. Ceux qui connaissent ces questions savent que des subventions ou d'autres formes d'aides ont ainsi été attribuées, sous le contrôle du Parlement, à des journaux très divers. Vous avez cité l'Humanité, je pourrais citer La Croix ou d'autres encore.

C'est dans le cadre de cette tradition républicaine et du contrôle du Parlement que le Gouvernement vous a fait la proposition que vous savez. Il s'agit en définitive de savoir si vous êtes favorable ou non à la liberté d'opinion (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste ; protestations sur les bancs du groupe UDF et du groupe du RPR).

M. le Président - Nous avons terminé les questions au Gouvernement.

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FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR 2001 -nouvelle lecture- (suite)

L'ordre du jour appelle les explications de vote et le vote sur l'ensemble du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001, en nouvelle lecture.

M. le Président - Je rappelle que la Conférence des présidents a décidé que le vote aurait lieu par scrutin public, en application de l'article 65-1 du Règlement.

Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat à la santé et aux handicapés - Nous avons la semaine dernière une nouvelle fois débattu des orientations proposées par le Gouvernement en matière de financement de la sécurité sociale. Il vous est aujourd'hui proposé de vous prononcer sur un texte dont vous avez largement rétabli la cohérence, après sa dénaturation par la majorité sénatoriale, et qui comporte plusieurs mesures fortes. Je pense tout d'abord à la réforme de fond des cotisations sociales et au choix qui a été fait de diminuer la CSG et la CRDS pour les revenus modestes, et d'exonérer les retraités non-imposables de la CRDS. Ces deux mesures contribueront à relever le pouvoir d'achat des ménages modestes. D'autre part, les dispositions en faveur de l'accueil des jeunes enfants et l'institution d'un congé et d'une allocation permettant aux parents de rester au chevet de leurs enfants malades témoignent de notre volonté, maintes fois rappelée par Mme Royal, de faciliter la conciliation entre vie professionnelle et vie familiale.

La revalorisation des pensions permettra un meilleur partage des fruits de la croissance, au bénéfice des retraités. Nous avons aussi fait jouer la solidarité nationale en faveur des victimes de l'amiante, grâce au fonds de garantie qui assurera leur indemnisation intégrale. Enfin, l'objectif de dépenses que vous avez approuvé ouvre de nouvelles ambitions, tant pour la médecine ambulatoire que pour l'hôpital, et permettra d'améliorer les remboursements. Il s'accompagne, dans l'attente du projet de modernisation que nous vous présenterons dans quelques semaines, de mesures de modernisation également très attendues.

Je n'aurai garde toutefois d'oublier les enrichissements que vous avez apportés à ce projet de loi de financement : je pense notamment au relèvement du seuil de ressources en-deçà duquel on peut bénéficier de la CMU et à la revalorisation du minimum vieillesse et de l'allocation adulte handicapé.

De ce débat, je retiens aussi la volonté que vous avez exprimée de débattre plus globalement de notre politique de santé. Le sujet sera abordé dans le projet de loi de modernisation du système de santé. C'est également très volontiers que le Gouvernement a repris notre amendement appelant à une réflexion de fond sur les relations entre l'Etat, l'assurance maladie et les professionnels de santé. Si attachés que nous soyons à l'équilibre des comptes de la sécurité sociale, nous accordons en effet un grand prix au dialogue avec tous ceux qui font vivre notre protection sociale -l'une des meilleures du monde parce que fondée sur la recherche de la justice sociale et de la solidarité.

Je remercie à nouveau pour leur travail le président de la commission et l'ensemble des rapporteurs. Je sais gré aux présidents de séance d'avoir veillé à ce que nos débats se déroulent dans les meilleures conditions. Je salue enfin la pugnacité de l'opposition et l'intérêt qu'elle a manifesté pour l'avenir de notre sécurité sociale (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

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EXPLICATIONS DE VOTE

M. le Président - Nous en venons aux explications de vote.

M. Philippe Nauche - Après être revenue à l'équilibre cette année, la sécurité sociale connaîtra en 2001 des excédents grâce à la politique économique de ce gouvernement et aux efforts de restructuration et de rénovation entrepris depuis 1997. Aujourd'hui, les projets de privatisation de notre protection sociale ont du plomb dans l'aile ! On s'en réjouira, mais en notant que le redressement n'a pas été aisé. Il fallait en effet sortir de la période des années 1993-1997, années de régulations qui se traduisaient immanquablement par des déremboursements massifs.

Illustrant la santé retrouvée de la sécurité sociale, ce projet contribue aussi à une redistribution des fruits de la croissance. L'ONDAM, en progression de 3,5 %, sera calculé sur la base des dépenses constatées ; les dépenses hospitalières croîtront de 3,3 % et les dotations des ARH de 3 %, ce qui devrait permettre de faire reculer les inégalités entre régions comme au sein de celles-ci. Le Gouvernement sait donc tenir ses engagements en dégageant les moyens nécessaires, sans préjudice pour le dialogue avec les professionnels.

C'est encore de redistribution qu'il s'agit avec les exonérations de CSG et de CRDS en faveur des ménages modestes, avec la suppression de la CRDS pour les retraités et chômeurs non imposables, avec le relèvement de 2,2 % à 2,7 % des pensions servies aux retraités non imposables, avec l'abrogation de la loi Thomas qui menaçait l'avenir du système de retraite par répartition et avec le relèvement à 3 600 F du seuil de la CMU. Quant aux familles, elles bénéficieront des dispositions en faveur de la garde par assistantes maternelles, de la création d'un fonds d'investissement qui permettra d'ouvrir 30 000 places de crèches, de la revalorisation des allocations au logement et de l'allocation enfants malades.

Mentionnons enfin la création d'un fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante, la prise en charge de la lunetterie jusqu'à l'âge de 18 ans et l'alignement du régime des travailleurs indépendants sur le régime général.

Il est certes toujours possible de faire mieux mais les lois de modernisation sociale et de modernisation du système de santé y pourvoiront bientôt. En attendant, grâce à ce projet, 2001 sera assurément une bonne année pour la sécurité sociale. Nous voterons donc ce texte avec fierté (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Bernard Accoyer - Ce cinquième projet de loi de financement n'est pas aussi rassurant pour l'avenir que le prétend M. Nauche. Les exonérations de CSG et de CRDS portent en effet atteinte à l'universalité de ce financement, attaquant le ciment de notre protection sociale. Quant à ce que nos collègues du Sénat ont qualifié de « tuyauterie monstrueuse » -je veux parler du financement du FOREC, c'est-à-dire des 35 heures-, il s'agit de mesures qui n'avaient pas leur place ici : elles auraient dû figurer dans le budget de la nation et faire l'objet de compensations. C'est en vain que vous cherchez à assimiler ces dépenses aux allégements de charges décidés par le gouvernement Juppé pour réduire le coût du travail !

Huit milliards ont été détournés de la branche famille cette année, pour équilibrer les comptes de la branche maladie. L'an prochain, vous poursuivrez en mettant à sa charge le financement de l'allocation de rentrée scolaire. Décidément, plutôt que l'instrument de la politique familiale, vous tenez à en faire la vache à lait de la sécurité sociale.

Madame la secrétaire d'Etat, loin de parler comme vous d'apaisement pour l'assurance maladie, nous constatons une crise sans précédent, notamment dans l'hôpital public. Il aurait pu en être autrement si vous aviez eu le courage de procéder aux réformes indispensables et si vous aviez su mettre d'autres moyens que ceux que prévoit le « protocole 2000 ». Quant à l'hospitalisation privée, elle se meurt sous nos yeux en raison de revalorisations insuffisantes, voire de baisse de tarifs, de l'obligation de passer aux 35 heures, d'un surcroît d'obligations de sécurité, de restrictions budgétaires, de la négligence apportée à la formation des infirmières... Nous dénonçons avec la plus grande vigueur cet assassinat, qui privera les Français de la liberté de choisir leur établissement et annonce une crise de l'ensemble de l'hospitalisation.

Les professionnels de santé se trouvent également en situation critique comme jamais. Pour les rassurer, vous ne leur proposez que des lettres-clés flottantes qui vont encore accélérer l'effet prix-volume et les contraindre à cesser d'exercer. Contrairement à ce que vous dites, l'ONDAM, mécanique purement comptable, ne résoudra rien : il ne tient pas compte des besoins de nos concitoyens. De surcroît, parce que vous avez refusé de présenter au Parlement une loi de financement rectificative, vous avez été contrainte à un « rebasage » qui n'est facteur que d'imprécision budgétaire -comme la Haute juridiction en jugera certainement.

Mais c'est à l'égard de l'assurance vieillesse que vous avez pris la responsabilité la plus lourde de conséquences. A force de rapports, de commissions et de groupes d'études, vous avez conduit notre système de retraite dans l'impasse, cependant que le Premier ministre ne cesse d'asséner un mensonge d'Etat, pour des raisons politiciennes : l'avenir serait garanti, répète-t-il. Il n'en est rien et le présent projet aggrave encore les menaces pesant sur les retraités présents et futurs.

Par ailleurs, envisagez-vous de faire appliquer les 35 heures dans la fonction publique sans que la réforme des régimes de retraite du secteur public ait été engagée ? Nous n'osons croire que vous iriez jusqu'à cette injustice.

Pour toutes ces raisons, le groupe RPR ne votera pas le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL).

Mme Jacqueline Fraysse - Le projet qui est soumis à notre vote rétablit celui que l'Assemblée avait adopté en première lecture : les velléités de la droite sénatoriale de dénaturer tout ce qui concerne la réduction du temps de travail, les gains de pouvoir d'achat pour les salariés ou la consolidation des retraites par répartition ont été écartées ; nos amendements relatifs à l'abrogation de la loi Thomas et à l'activité des centres de santé sont rétablis.

Cependant notre majorité n'a fait qu'une partie du chemin qu'elle aurait dû faire. Les mesures prises demeurent trop modestes au regard des besoins. Faute d'une réforme de l'assiette des cotisations employeurs, qui devrait être plus juste et plus favorable à l'emploi stable et à une politique salariale de progrès, l'enveloppe reste trop restreinte. Vous remettez sans cesse au lendemain, alors que sur d'autres bancs de la majorité on exprime la même demande.

L'amélioration des comptes de la sécurité sociale est liée pour partie à la conjoncture économique, et nous nous en félicitons, mais aussi à une modération sévère des dépenses, notamment dans les hôpitaux. La plupart de nos propositions ont été écartées, qu'il s'agisse de la suppression du forfait hospitalier, de la visite médicale pour tous les jeunes à l'occasion de la journée de préparation à la défense ou du relèvement du plafond d'accès à la CMU pour prendre en charge les titulaires de l'allocation adulte handicapé et ceux du minimum vieillesse. Nous comprenons d'autant moins le refus de notre amendement sur ce dernier point que sur les 7 milliards prévus en 2000 pour la CMU, 1 milliard n'a pas été dépensé, ce qui conduit le Gouvernement à réduire de 400 millions les crédits de la CMU pour 2001. Il n'est pas acceptable de faire ainsi des économies sur les dépenses consacrées aux plus modestes de nos concitoyens, surtout en cette période de reprise économique.

Pour toutes ces raisons, le groupe communiste est conduit à maintenir son abstention (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste).

M. le Président - Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée.

M. Claude Gaillard remplace M. Raymond Forni au fauteuil présidentiel.

PRÉSIDENCE de M. Claude GAILLARD

vice-président

M. Bernard Perrut - Si la sécurité sociale est dopée par la croissance, aucune réforme structurelle n'est engagée pour l'avenir. Nous avons déploré pendant le débat la complexité et l'opacité des circuits financiers ; la multiplication des fonds et l'ampleur des transferts vident cette loi de sa substance et rend le contrôle du Parlement de plus en plus difficile. Sept types de ressources, dont six impôts, participent au financement des 35 heures... Par ailleurs, l'allégement de la CSG et de la CRDS conduit à la création d'une trappe à bas salaires. Si vous voulez faire de ces cotisations le premier étage de l'impôt sur le revenu, il faut introduire un quotient familial.

En ce qui concerne l'assurance maladie, on ne peut que condamner l'irréalisme de l'ONDAM, le rebasage sur les dépenses de fin d'année et notre système de sanctions, qui viole les principes d'égalité et de responsabilité individuelle, comme les professionnels vous l'ont rappelé par une journée « santé morte ». Votre système conventionnel est moribond ; si vous avez acheté la paix sociale avec une enveloppe de 10 milliards d'ici 2002 pour les hôpitaux, l'hospitalisation privée, elle, ne pourra pas supporter les 35 heures et la pénurie d'infirmières. Les infirmières et infirmiers libéraux ne peuvent accepter votre plan réducteur aussi bien pour eux que pour les patients.

La branche famille est la vache à lait du système. 21 milliards par an sont transférés à la branche vieillesse. Malgré quelques mesures intéressantes, notamment l'allocation pour jeune enfant malade, vous oubliez trop les préoccupations des familles, en particulier leur souhait que la durée de versement des allocations familiales soit allongé.

Et les retraites ? Sur ce sujet, rien à signaler, malheureusement... La loi de financement n'y consacre que neuf articles sur près de cinquante. Vous n'apportez aucune précision sur le fonds de réserve, alors qu'il faudrait qu'il atteigne 1 000 milliards d'ici 2020. Les veufs et les veuves sont eux aussi oubliés.

Pour toutes ces raisons et toutes celles qui ont été exprimées dans le débat, le groupe Démocratie libérale ne peut que rejeter ce projet, sur lequel les conseils d'administration des caisses maladie, vieillesse et famille ont eux-mêmes exprimé un avis négatif. Il y a urgence à renouer un vrai dialogue avec les professionnels de santé, à aider les familles et à assurer la pérennité et l'équité du système de retraite (Applaudissements sur les bancs du groupe DL, du groupe UDF et du groupe du RPR).

M. Pierre Carassus - La meilleure défense, c'est l'attaque ! Tout au long de ce débat, certains collègues de l'opposition ont montré une virulence qui n'a pas exclu la contradiction. N'a-t-on pas entendu les libéraux reprocher au Gouvernement une maîtrise comptable des dépenses tout en l'accusant de laisser filer les dépenses d'assurance maladie et en se faisant les chantres de la réduction des déficits ?

Nous, députés du Mouvement des citoyens, refusons l'approche purement comptable car nous considérons que la mission première de la sécurité sociale est de garantir à tous les Français, et particulièrement aux plus défavorisés, une protection digne de ce nom. Le financement doit en être assuré en faisant davantage appel aux revenus financiers. Les protestations de nos collègues au sujet des prélèvements sur les industries pharmaceutiques qui dégagent des profits considérables, sont indécentes.

Nous nous félicitons de l'excédent constaté pour l'an 2000, mais il nous fait d'autant plus regretter l'insuffisance des moyens mobilisés pour répondre aux inquiétudes du milieu hospitalier et notamment du secteur public, au sujet de la fermeture de services d'urgence. Par ailleurs, il convient d'engager un véritable dialogue avec les professions médicales et paramédicales.

Les députés du MDC saluent les efforts du Gouvernement en matière de revalorisation des retraites. Ils prennent acte de sa volonté d'assurer l'avenir de notre système par répartition, fondé sur la solidarité entre générations. Ils considèrent qu'il faut pour cela engager une réforme des cotisations patronales, prenant en compte la totalité des richesses créées et faisant davantage contribuer les revenus financiers.

L'actualité souligne combien les Français sont sensibilisés à la sécurité sanitaire. Il faudrait développer la prévention et la connaissance des risques, au lieu d'en rester trop souvent à une action curative.

Alors que la différence d'espérance de vie entre les catégories sociales ne se réduit pas, la question de la santé au travail demeure trop mésestimée. Or le risque lié à l'exposition aux produits dangereux s'accroît. Il faudrait là aussi multiplier les programmes de dépistage.

Il apparaît de plus en plus nécessaire de définir le rôle de la prévention dans notre système de santé. C'est ce que nous attendons du projet de modernisation.

M. le Président - Merci de conclure !

M. Pierre Carassus - Investir avec audace dans la prévention est le meilleur moyen d'améliorer la santé de nos concitoyens et de réaliser des économies dans les dépenses de protection sociale.

Les députés du MDC, radicaux et Verts, conscients des efforts entrepris et aussi des progrès à accomplir, voteront ce projet (Applaudissements sur les bancs du groupe RCV et du groupe socialiste).

M. Jean-Luc Préel - La sagesse sénatoriale a amélioré le PLFSS en modifiant son financement, en rejetant la manipulation de la CSG, en supprimant l'alimentation du FOREC par les diverses taxes, en annulant les sanctions collectives et les lettres-clés flottantes.

Mais la majorité, ici, a rétabli intégralement le texte adopté en première lecture. Aussi l'UDF ne peut-elle que vous reprocher à nouveau de ne pas préparer l'avenir, et regrette que vous ne l'ayez pas écoutée.

L'équilibre financier n'est réalisé qu'au prix d'une hausse des prélèvements de 30 milliards. Il est d'autant plus fragile que l'OCDE vient de revoir à la baisse les perspectives de croissance de notre pays, dont l'endettement et le déficit s'accroissent.

Vous manipulez la CSG de façon regrettable, pour en faire le premier étage de l'impôt sur le revenu, sans prendre en compte la composition du foyer fiscal ni traiter le problème des pluriactifs. Notre rapporteur Claude Evin a lui-même critiqué la rupture sans concertation du pacte de solidarité noué par la sécurité sociale entre les Français. Nous aussi nous le dénonçons. M. Evin aurait préféré un crédit d'impôt. Nous aussi.

Pour financer les 35 heures, par le biais d'un FOREC virtuel, vous avez inventé une usine à gaz destinée à trouver les 85 milliards nécessaires en 2001. Nous protestons contre le détournement du produit des taxes sur l'alcool, le tabac, les activités polluantes, qui devrait financer la prévention de ces fléaux. Les 50 000 morts dus à l'alcool et les 60 000 au tabac appelaient d'autres décisions.

Non, votre projet ne prépare pas l'avenir. Vous n'avez pas de véritable politique familiale, vous ne décidez rien pour les retraites, qui rencontreront des difficultés majeures à partir de 2005. En 2015, 300 milliards par an seront nécessaires pour préserver notre système par répartition. Nous demandons d'accorder une réelle autonomie au régime général, de créer une caisse de retraite des fonctionnaires gérée paritairement, et d'harmoniser progressivement les divers régimes. Votre immobilisme constitue une faute politique dramatique.

Dans la branche santé, les dépenses ont augmenté de 10 % en deux ans, pour une inflation de 2,7 %. Les professionnels, désabusés, sont dans la rue. Or vous poursuivez l'étatisation déresponsabilisante, avec une gestion essentiellement comptable (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste).

Rien ou presque pour la prévention, rien pour traiter le problème de la démographie médicale, rien pour les urgences, rien pour les 35 heures dans les hôpitaux, rien pour les cliniques aujourd'hui asphyxiées, non, vous ne préparez pas l'avenir. Vous refusez la fongibilité des enveloppes et la tarification à la pathologie (Interruptions).

M. le Président - Veuillez conclure !

M. Jean-Luc Préel - La solution, pour nous, réside dans une réelle régionalisation.

Nous sommes opposés aux sanctions collectives, au profit d'une évaluation individuelle fondée sur les bonnes pratiques médicales.

Le groupe UDF votera contre ce projet (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF, du groupe DL et du groupe du RPR).

A la majorité de 258 voix contre 245 sur 533 votants et 503 suffrages exprimés l'ensemble du projet de loi de financement de la sécurité sociale est adopté.

La séance, suspendue à 16 heures 40 est reprise à 16 heures 55.

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    CONTRACEPTION D'URGENCE (CMP)

M. le Président - J'ai reçu de M. le Premier ministre une lettre soumettant à l'approbation de l'Assemblée le texte de la commission mixte paritaire sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi relative à la contraception d'urgence.

En conséquence, l'ordre du jour appelle la discussion du texte de la commission mixte paritaire.

Mme Hélène Mignon, rapporteure de la commission mixte paritaire - Nous revenons devant vous après un accord trouvé avec nos collègues du Sénat en commission mixte paritaire. Tous les interlocuteurs sont tombés d'accord sur la nécessité de donner accès à la contraception d'urgence aux jeunes filles, qu'elles soient ou non mineures. Lors de la discussion devant notre Assemblée, nous avions relevé l'absence de solution durant les vacances scolaires. Il fut un temps envisagé de recourir aux infirmiers des centres de vacances, mais il est vite apparu que cette solution n'offrait pas toutes les garanties requises, notamment pour le suivi et le contrôle de la prise du moyen de contraception.

Il est vrai que l'amendement du Sénat qui tend à faire entrer les pharmaciens dans le dispositif suscite les mêmes interrogations. A cet égard, nous tenons beaucoup à ce que seul le titulaire du diplôme de pharmacie soit habilité à délivrer la contraception d'urgence. On ne lui demande pas d'être un distributeur de pilules, mais de répondre à la demande que nous formulons à travers les missions qui sont les siennes : le conseil, les explications données sur le recours exceptionnel, sur le mode d'emploi et sur la nécessité d'une contraception bien menée et bien pensée. Il est important de rappeler aux pharmaciens les engagements qu'ils ont pris en embrassant cette profession.

Conformément aux recommandations de la Délégation aux droits des femmes, nous avions demandé, en première lecture, que l'adresse des centres de planification les plus proches soit communiquée aux élèves. Nous leur rendrions également service en l'affichant dans les pharmacies.

Même si la gratuité soulève des difficultés d'application, nous devons aider ces jeunes filles à ne pas grossir la cohorte des 10 000 jeunes filles enceintes sans l'avoir désiré, sachant que la moitié d'entre elles n'auront finalement d'autre recours que l'IVG.

D'autre part, à la suite des débats en première lecture, quelques directeurs et enseignants de centres de formation des apprentis ont estimé que l'on établissait une distinction supplémentaire entre les élèves de l'enseignement général et celles de l'enseignement professionnel qui, bien que ne relevant pas de l'Education nationale, reçoit des jeunes filles qui ont au moins autant de problèmes avec leur entourage.

Nous reconnaissons le rôle primordial que les infirmières scolaires ont joué pendant les quelques mois où elles ont appliqué la circulaire de Ségolène Royal et nous savons combien elles sont déterminées à continuer.

Nous ne pouvons cependant écarter la possibilité de joindre le médecin scolaire, lorsqu'il est présent dans l'établissement. Dans la structure médicale de l'Education nationale, chacun a son rôle à jouer et il ne s'agit pas de remettre en cause celui des infirmières, mais simplement de pouvoir évoquer les problèmes de santé publique avec le médecin, dans l'intérêt de tous les jeunes. De même, la communauté éducative ne peut ignorer combien l'aide des infirmières, des médecins ou des assistantes sociales peut s'avérer précieuse. Nul ne peut mieux que les infirmières, en dépit d'indéniables problèmes d'effectifs, effectuer un suivi psychologique de l'élève, expliquer à une jeune fille qu'un suivi médical est normal tout au long de sa vie, prévenir les conduites à risque. Mais l'accord intervenu sur ce texte ne doit bien sûr pas masquer la nécessité d'une éducation sexuelle, ni le rôle que les infirmières scolaires sont appelées à jouer. La demande d'un rapport au Parlement dans les deux ans qui viennent ne nous a pas semblé excessive. Il est normal que les parlementaires puissent analyser l'application des textes qu'ils votent. Je ne doute pas qu'en ce qui concerne celui-ci, nous n'aurons qu'à nous en féliciter (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Jean Le Garrec, président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales - Très bien !

Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat à la santé et aux handicapés - Vous nous proposez de débattre en deuxième lecture de la proposition de loi relative à la contraception d'urgence, qui a fait l'objet d'une concertation et à laquelle le Gouvernement est pleinement favorable. Par rapport à celui adopté par votre Assemblée en première lecture, le texte sur lequel la commission mixte paritaire est tombée d'accord présente deux nouveautés. Il s'agit en premier lieu d'assurer en pharmacie le même accès, c'est-à-dire un accès gratuit, à la pilule du lendemain, que celui que permet le protocole de l'Education nationale pour les infirmières. Cette disposition sera fort utile en-dehors des périodes scolaires. En second lieu, il est fait référence, dans la loi, à ce protocole de l'Education nationale autorisant les infirmières à délivrer le Norlevo en milieu scolaire. Ces deux dispositions satisfont le Gouvernement et je veillerai à ce que le décret prévu au quatrième alinéa soit publié dans les meilleurs délais. Je vous remercie, au nom du Gouvernement, d'avoir fait diligence pour examiner cette loi. Vous avez ainsi préparé le terrain pour que les débats à venir sur la révision de la loi relative à la contraception et à l'IVG se déroulent dans un climat de dialogue et d'ouverture propice au consensus et au progrès social (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Jean Pontier - Je me souviens des difficultés éducatives que rencontraient, durant les années 70, les éducateurs de l'aide sociale à l'enfance, et surtout ceux de l'Education surveillée, confrontés aux grossesses, aussi précoces qu'accidentelles, de nombre de jeunes filles qui leur étaient confiées. La décision de prise en charge administrative ou judiciaire ne pouvait résoudre ces situations dramatiques, où l'enfant, à peine nubile, portait un autre enfant, et où l'adolescente, enceinte, attendait, seulement dans son imaginaire, l'arrivée d'un beau jouet, sa vraie poupée, avec, dans le paysage, la ronde motocycliste des amants d'un soir, ou des pères putatifs voulant dicter la conduite à adopter.

Je me rappelle aussi, dans les milieux moins défavorisés de mon entourage, les drames vécus par ces filles qui avaient avoué à leur mère qu'elles n'avaient pas eu leurs règles, par ces petites ouvrières de quinze ans exposées à la critique du voisinage ou encore par ces jeunes bourgeoises, qui disparaissaient pour un temps et revenaient, la bague au doigt, poussant un landau, ou expliquant qu'elles avaient dû subir une petite intervention chirurgicale.

Tout ceci n'est pas du « sous Zola » mais du vécu qui colle à la peau, comme la tunique de Nessus !

Et où en sommes-nous, malgré les progrès accomplis en matière d'éducation, de prévention, de recours à une interruption volontaire de grossesse ? Où en sommes-nous malgré l'évolution des m_urs et l'irrépressible développement du sida ?

En dépit d'un arsenal important et coûteux, nous en sommes encore à 10 000 grossesses précoces par an, dont 67 % débouchent sur une interruption volontaire. Or, en ce cas, notamment pour les mineures, si l'aménagement de l'autorisation parentale s'impose, il est bien préférable d'avoir recours à cette pilule du lendemain, qui sera accessible sans prescription aux adolescentes, désireuses de garder le secret, et administrée, à titre exceptionnel, dans leur établissement scolaire par les infirmières si un médecin ou un centre spécialisé ne peuvent être consultés.

La mise sur le marché français, depuis environ dix-huit mois, du Norlevo permet de prévenir une grossesse non désirée dans les heures qui suivent un rapport sexuel potentiellement fécondant. Cette pilule de rattrapage est efficace, et sans contre-indications ou effets secondaires. Elle représente donc un progrès pour les femmes, dont l'autonomie est accrue, a fortiori, lorsqu'elles sont en situation de précarité ou mineures.

Ce recours à la contraception d'urgence pour les élèves de l'enseignement du second degré doit s'accompagner du soutien de l'équipe socio-médicale de l'établissement scolaire, d'un soutien psychologique et d'un suivi médical.

Parce qu'elle s'inscrit dans une politique d'accès à la contraception, qu'elle permettra de réduire le nombre de grossesses précoces, et de surmonter des difficultés intergénérationnelles, parce qu'elle participe à la libération de la femme, parce que son cadrage est précis, cette proposition de loi doit rallier de nombreux suffrages (Applaudissements sur tous les bancs).

Pour ma part, fort d'une expérience professionnelle douloureuse, soucieux d'un présent encore lourd, mais confiant dans les progrès de l'avenir, je vous apporte un vote d'approbation et de pleine confiance (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste).

Mme Marie-Thérèse Boisseau - La commission mixte paritaire a trouvé un accord le 20 novembre.

Au cours de cette dernière lecture, je voudrais insister sur le fait que la contraception d'urgence est et doit rester exceptionnelle, le dernier filet de sécurité avant une grossesse non désirée qui peut se terminer par un avortement.

Parce que c'est une contraception d'exception, il faut l'entourer de sérieuses garanties. La délivrance du Norlevo doit donc s'accompagner de conseils. Les pharmaciens ont à cet égard un rôle essentiel à jouer parce qu'ils constituent un réseau autrement plus dense, et aux horaires d'ouverture beaucoup mieux adaptés, que celui des centres de planification et des infirmiers scolaires.

La distribution du Norlevo par les infirmiers doit se faire en dernier recours. Les sénateurs sont allés dans ce sens puisqu'ils ont inscrit dans la loi la référence au protocole national. L'infirmière ne pourra administrer à une élève mineure ou majeure une contraception d'urgence qu'après s'être efforcée d'orienter l'élève vers un médecin ou un centre de planification, et seulement dans « les cas d'urgence et de détresse caractérisée ». L'infirmière scolaire devra également informer le médecin scolaire, s'assurer de l'accompagnement psychologique de l'élève et enfin veiller à la mise en _uvre d'un suivi médical.

Les sénateurs ont par ailleurs précisé que la dérogation au principe du consentement parental ne peut se justifier que par l'impératif de préserver les mineures d'une grossesse non désirée, donc d'une interruption volontaire de grossesse.

A l'initiative de leur rapporteur, les sénateurs se sont prononcés en faveur de la gratuité du Norlevo pour les mineures, afin de prendre en compte les périodes de vacances scolaires pendant lesquelles les établissements sont fermés ainsi que la situation des collèges et des lycées qui n'ont pas d'infirmière scolaire à plein temps.

Mais qu'il s'agisse de l'administration du Norlevo par les infirmières scolaires ou de sa gratuité, il me paraît important de faire le point sous deux ans. Aussi le Sénat a-t-il bien fait de prévoir un bilan avant le 31 décembre 2002.

Mais le problème fondamental reste celui de l'information, comme le disait déjà Neuwirth en 1967. Trente ans plus tard, nous en sommes toujours au même point ! Il faudrait que l'éducation à la sexualité remette à sa juste place la contraception d'urgence. Or, rien n'est dit à ce sujet dans cette loi ni dans celle que nous examinerons.

Je proposerai pour ma part que l'on instaure une séance d'éducation à la sexualité par trimestre, et ce depuis le primaire jusqu'au lycée en ayant recours à des intervenants extérieurs.

Il n'y a rien non plus dans ce projet sur la formation des médecins, alors qu'ils sont un passage obligé de la contraception.

Rien non plus sur le rôle des centres de planification et d'éducation familiale, qui pourraient être plus efficaces s'ils étaient mieux connus et plus adaptés aux horaires scolaires. Ni sur la nécessité de mieux coordonner les intervenants et les messages.

En conclusion, si la contraception d'urgence doit être replacée dans le cadre plus général de l'éducation à la sexualité, cette dernière n'est qu'un aspect d'une éducation à la vie en société qui manque cruellement dans trop de milieux. Apprendre à se connaître et à se respecter, s'efforcer de connaître et de respecter l'autre, tout commence et tout continue par là.

La pilule du lendemain constituant le dernier recours avant un avortement, je voterai cette proposition de loi, de même que la majorité du groupe UDF (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF et du groupe du RPR).

Mme Muguette Jacquaint - L'aboutissement de la commission mixte paritaire traduit à mes yeux l'appropriation par chacune et chacun d'entre nous, au-delà des divergences politiques, des propos tenus par M. Neuwirth devant la Délégation aux droits des femmes : « la pire chose qui puisse arriver à une jeune fille est de débuter dans la vie avec une interruption volontaire de grossesse. Il faut tout faire pour éviter cela ».

Or, il y a en France chaque année 6 700 interruptions volontaires de grossesse chez les mineures, 10 000 chez les 18-20 ans. La proportion des mineures enceintes recourant à l'IVG est passée de 59,7 % en 1985 à 71,8 % en 1995.

Il ne s'agit évidemment pas de culpabiliser les uns et les autres, mais d'agir sur certains facteurs.

Certes, l'environnement familial est déterminant mais la sexualité demeure un sujet difficile à aborder en famille, en particulier dans certaines familles. Nous avons donc collectivement une responsabilité à assumer.

C'est bien pourquoi les députés communistes et apparentés ont approuvé d'emblée la diffusion d'informations sur la pilule du lendemain et soutenu la proposition courageuse de Mme Ségolène Royal à ce sujet.

Malgré le veto du Conseil d'Etat, nous devons poursuivre nos efforts pour que les jeunes filles qui en ont besoin puissent accéder de manière simple et sûre à la contraception d'urgence. Le présent texte s'inscrit dans cette démarche. Il apporte les réponses requises, qu'il s'agisse de la mise en vente libre du Norlevo, de la levée de l'autorisation parentale pour les mineures qui souhaitent garder le secret ou de la possibilité donnée aux infirmières scolaires de délivrer cette contraception d'urgence aux mineures comme aux majeures. Nous saluons l'initiative du Sénat concernant la gratuité, tant il ressort des études réalisées que les mineures issues des milieux défavorisés sont les plus exposées.

Reste qu'il n'y a pas assez d'infirmières et de médecins scolaires pour constituer le réseau de proximité que rendent nécessaires les mesures prises.

Et je regrette que les débats au Sénat n'aient pas permis l'adoption de l'amendement proposé par le groupe communiste, républicain et citoyen visant à étendre aux infirmières présentes dans les centres de vacances et de loisir la possibilité de délivré le Norlevo. C'était pourtant nécessaire pour assurer une continuité entre la période scolaire et extra-scolaire.

Il y a par ailleurs urgence à développer l'information et la prévention. L'école est le cadre privilégié pour cela, étant entendu que devenir maître de son corps, connaître son fonctionnement en matière de fécondité, parler de sexualité et de contraception ne sont pas qu'une affaire de filles.

M. le Président de la commission des affaires culturelles - Tout à fait d'accord.

Mme Muguette Jacquaint - Le respect de l'autre concerne tout un chacun, quel que soit son sexe.

Enfin, je voudrais que l'on prenne conscience de l'insuffisance des moyens dont disposent les centres de planning familial. Il leur est difficile dans ces conditions d'être présents partout, en particulier en milieu rural, et de se faire connaître des adolescentes.

Pour conclure, je souhaite que cette proposition de loi, que nous approuvons sans réserve, fasse l'objet d'une application rapide. Les aléas de la procédure nous ont fait perdre suffisamment de temps (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste, du groupe socialiste et du groupe RCV).

M. Bernard Perrut - Le texte que nous examinons à l'issue de la CMP témoigne d'une évolution à laquelle les sénateurs ne sont pas étrangers. Mais leur apport, comme le nôtre, est encore peut-être insuffisant, compte tenu du triple échec dont nous avons à parler ici. Echec familial quand une jeune fille ne peut compter sur le soutien de ses parents, quand le lien d'intimité et de confidence n'existe plus entre une mère et sa fille ; échec du système scolaire, aussi, quand l'information et la prévention n'ont pas été au rendez-vous ; échec social, enfin, quand les repères se perdent.

Nous sommes plusieurs ici à insister sur le fait que la dérogation au principe de consentement des parents se fonde sur le souci d'éviter une IVG. Et nous pensons qu'il faut tout mettre en _uvre pour obtenir un soutien familial et pour que la mineure ne se sente pas isolée. Quoi qu'il en soit, il faudra modifier le code civil pour tenir compte de cette dérogation. Et il faudra dire qui assume la responsabilité civile et pénale de la délivrance d'un contraceptif d'urgence, dès lors qu'elle se fait sans prescription médicale et à l'insu des parents.

La CMP a pris en compte nos réflexions en disposant que les mineures pourront avoir accès à la contraception d'urgence en dehors du cadre scolaire et dans les mêmes conditions de gratuité. On peut toutefois se demander pourquoi cette contraception est remboursée alors que les contraceptifs et préservatifs ne le sont pas. Il aurait également fallu préciser les missions d'accueil et de conseil des pharmaciens ; celles-ci resteront forcément limitées tant que les adolescentes seront accueillies au comptoir de l'officine, en présence d'autres clients. D'autre part, quelle sera la responsabilité de ces pharmaciens en cas de problèmes ? Devront-ils avoir avec les jeunes filles un entretien particulier ? Un réel dialogue pourra-t-il s'instaurer ? Autant de questions auxquelles il faudra répondre !

Si la contraception d'urgence est conçue pour des situations de détresse, il fallait en effet souligner dans la loi son caractère exceptionnel, mais n'eut-il pas fallu mieux définir les notions d'urgence et de détresse caractérisée, afin de ne pas banaliser cette forme de contraception, et d'éviter de favoriser des relations sexuelles de plus en plus précoces ou de retarder la prise de responsabilité des jeunes ?

Vous avez modifié le rôle et la responsabilité des infirmières -mais en théorie seulement. En effet, elles n'interviendront que si un médecin ou un centre de planification et d'éducation familiales ne sont pas immédiatement accessibles. Ce sera très souvent le cas ! Et ces infirmières seront toujours en nombre insuffisant pour simplifier leur mission d'accueil... Quant aux médecin scolaires, devront-ils, une fois informés, assurer un accompagnement psychologique et médical, et sous quelles formes ? Enfin, vos bonnes intentions ne seront rien sans les moyens de les réaliser.

On vient d'évoquer la nécessité de rénover, de réorganiser peut-être aussi, nos centres de planning familial. Il s'imposerait à tout le moins de changer leurs horaires d'ouverture, de les rendre plus accessibles aux jeunes.

Pour finir, je veux insister sur le besoin d'une éducation à la sexualité ouverte à tous et intégrée au cursus scolaire. Nous ne pouvons accepter que le nombre des IVG reste important parmi les jeunes alors qu'on consacre beaucoup de moyens à la prévention. L'éducation à la vie, le respect de l'autre, l'amour et la responsabilité sont autant de notions à promouvoir à l'école. Encore faut-il que le message ne soit pas brouillé par l'environnement médiatique, où l'on prône trop souvent l'instinct sexuel et la relation intime entre plaisir et violence. Mme Royal en est venue à proposer que les adultes qui font la télévision se soumettent à la même éthique que les éducateurs et, de fait, nous devons nous soucier de l'image de la vie que nous voulons donner aux jeunes, ainsi que des sanctions à prendre contre tout ce qui avilit. Notre débat dépasse donc largement la question de la pilule du lendemain. Chaque membre du groupe Démocratie libérale votera donc sur ce texte en son âme et conscience.

Mme Christine Boutin et M. Jean-Claude Lemoine - Très bien !

Mme Marie-Françoise Clergeau - C'est avec une certaine fierté que j'aborde ce débat : fierté de constater que l'initiative du groupe socialiste a permis de sortir de l'impasse la tentative lancée par Mme Royal avec sa circulaire, fierté de voir que les deux assemblées se sont saisies de la question en ne pensant qu'à l'intérêt des jeunes filles concernées. Le débat a été riche, constructif, dépourvu d'arrière-pensées. Puissions-nous maintenant nous prononcer à l'unanimité pour donner une base légale à la contraception d'urgence.

Je me sens fière également d'avoir contribué à apporter une réponse à ces 10 000 adolescentes confrontées chaque année à une grossesse non désirée : la pire chose serait pour elle de débuter dans la vie par une interruption volontaire de grossesse. La mobilisation des parlementaires permettra aux personnels compétents de les aider efficacement en leur évitant ce traumatisme.

Notre démarche est saine : refusant de banaliser le recours à la contraception d'urgence, nous avons voulu conforter les acteurs de la santé en milieu scolaire, dans le respect de leurs responsabilités propres. L'éducation à la sexualité et l'information sur la contraception seront ainsi développées.

Fierté encore, pour moi, de constater que nous allons mieux garantir le droit des jeunes à disposer de leur corps et les aider à maîtriser leur fécondité. Notre société a beaucoup changé depuis les lois Neuwirth et Veil : il fallait que le Parlement en prenne acte en permettant à toutes de bénéficier des progrès de la médecine.

Autant de raisons pour lesquelles, vous aussi, pourrez vous enorgueillir de voter ce texte ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

Mme Marie-Jo Zimmermann - Que cette CMP ait pu aboutir prouve que le consensus peut être trouvé entre nous sur des sujets de société et je m'en réjouis. Cependant, le Sénat y a beaucoup contribué, en entourant la délivrance de la contraception d'urgence de toutes les garanties nécessaires et en faisant preuve de pragmatisme afin de réduire effectivement le nombre de grossesses non désirées chez les adolescentes.

Des garanties, il en fallait, pour que la contraception d'urgence ne se banalise pas, devenant un substitut à la contraception régulière. Aussi le texte précise-t-il que sa délivrance par les infirmières scolaires sera limitée aux cas d'urgence et de détresse caractérisée, lorsqu'un médecin, ou un centre de planification ou d'éducation familial n'est pas immédiatement accessible.

Il en fallait aussi pour que la jeune femme mineure bénéficie d'un accompagnement. L'infirmière scolaire agira donc dans le cadre d'un protocole national, elle devra assurer son accompagnement psychologique et veiller à ce qu'il y ait bien suivi médical.

Il en fallait enfin pour préserver le lien familial et la confiance réciproque entre parents et enfants. C'est pourquoi la dérogation au principe de l'autorité parentale pour les mineures ne peut se justifier que par la nécessité de les préserver d'une grossesse non désirée.

Le pragmatisme s'imposait, d'autre part, pour faire baisser le nombre des IVG chez les mineures. L'accès à la contraception d'urgence ne doit pas être barré par le coût ou par l'absence d'accueil adapté durant les vacances scolaires. C'est pourquoi le Sénat a proposé la gratuité en pharmacie, dans des conditions fixées par décret.

Mais ce dispositif doit être complété par une véritable éducation à la sexualité et par une information sur la contraception intégrée dans le cursus scolaire, si l'on ne veut pas que la première relation sexuelle aboutisse à l'échec d'une interruption de grossesse.

Le Sénat a enfin prévu un bilan de l'application de cette loi, dans les deux ans. Cette évaluation bien nécessaire accroît encore nos chances de réussite. Le groupe RPR approuvera donc les conclusions de la commission mixte paritaire (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR).

M. le Président de la commission - Je suis le premier à me féliciter du travail effectué par le Sénat, Madame Zimmermann, mais il n'aurait pu le mener à bien sans la proposition de loi déposée par le groupe socialiste pour donner une base au protocole dont nous sommes redevables à Mme Royal. Cela étant, ce travail fut incontestablement très utile, comme le fut aussi celui effectué de concert par Mme Mignon et M. Neuwirth.

J'insiste, Madame la secrétaire d'Etat, pour que le décret concernant les pharmaciens soit publié au plus vite. A ce propos, Monsieur Perrut, je vous ferai observer que Mme Mignon a par avance répondu à vos interrogations. Elle a en effet demandé que ce soit le titulaire du diplôme de pharmacien qui soit responsable de la délivrance de la contraception d'urgence, et souhaité qu'il ne se contente pas d'être un distributeur de pilules ; il doit en effet conseiller et expliquer, notamment pour favoriser le recours à une contraception bien pensée. Et je ne pense qu'il y ait non plus désaccord avec Mme la secrétaire d'Etat : ce point sera précisé par la convention d'accord avec les professionnels de santé.

Mme Mignon a également raison de souhaiter que notre réflexion se poursuive par l'application de ces dispositions dans l'enseignement professionnel, notamment dans les CFA et plus généralement dans tous les établissements ne relevant pas de l'éducation nationale. Il faudra s'efforcer de résoudre ce problème dans la convention passée avec la profession et je remercie par conséquent Mme Mignon de l'avoir soulevé.

L'information, l'éducation à la sexualité sont évidemment indispensables, non seulement pour les jeunes filles, mais aussi pour les garçons, qu'on a parfois tendance à oublier. Comme Mme Mignon et Mme Boisseau, je pense que sur ce sujet il est souhaitable de faire appel à des intervenants extérieurs à l'école.

L'Assemblée nationale et le Sénat auront sur ce texte fait un excellent travail, qui prépare le débat que nous aurons demain (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

Mme la Secrétaire d'Etat - Je tiens à vous rassurer : nous apporterons les précisions nécessaires dans le décret, qu'il s'agisse des jeunes mineures en formation professionnelle ou de l'accès à la contraception d'urgence en dehors des périodes scolaires. Les pharmaciens -qui, Monsieur Perrut, sont tout à fait aptes et disposés à donner des conseils- auront leur rôle à jouer.

L'ensemble de la proposition de loi, compte tenu du texte de la commission mixte paritaire, mis aux voix, est adopté.

La séance, suspendue à 17 heures 50 est reprise à 17 heures 55.

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    SANTÉ DES ANIMAUX -deuxième lecture-

L'ordre du jour appelle la discussion, en deuxième lecture, du projet de loi portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire en matière de santé des animaux et de qualité sanitaire des denrées d'origine animale et modifiant le code rural.

M. Joseph Parrenin, rapporteur de la commission de la production - Ce projet complète la loi d'orientation agricole en mettant sur plusieurs points le droit national en conformité avec le droit communautaire. Le Sénat y a apporté quelques modifications ; nous avons nous-mêmes examiné des amendements, il y a quelques jours et dans le cadre de l'article 88 aujourd'hui. Nous allons nous en expliquer dans la discussion des articles.

M. Jean Proriol - Il aura fallu, pour que la France se dote d'un dispositif de contrôle de la sécurité alimentaire, trois ans d'inquiétude aux cours desquels la peste porcine, la listériose, le poulet à la dioxine et surtout la vache folle ont fait les gros titres de l'actualité. L'Etat avait bien sûr le devoir de réagir rapidement et efficacement aux craintes de la population, la sécurité faisant partie de ses missions régaliennes.

La mise en place en juin 1999 de l'AFSSA, née d'une proposition parlementaire à l'automne 1997 de deux de nos collègues de la majorité sénatoriale, Charles Descours et Claude Huriet, est un grand pas en avant. Mais il est évident que notre politique de sécurité alimentaire doit faire l'objet d'une coordination avec nos partenaires européens, même si cela nécessite de longues heures de négociations -n'est-ce pas, Monsieur le ministre ! C'est dans cette logique d'harmonisation que nous examinons ce texte.

La transposition des dispositions communautaires ne se fait pas ici par la voie d'ordonnances mais par celle d'un débat parlementaire. L'actualité brûlante du sujet exigeait cette procédure, mais on peut regretter qu'elle n'ait pas été retenue pour d'autres directives tout aussi importantes, par exemple celle du 25 octobre 1995, qui fixe les principes relatifs à l'organisation des contrôles officiels dans le domaine de l'alimentation animale.

Parmi les modifications apportées à ce texte, je retiendrai notamment l'affirmation du principe d'indemnisation du préjudice né de mesures prises sur des produits qui, après vérification, se sont révélés sains, ou encore l'adoption, à l'unanimité et avec un avis très favorable du Gouvernement, d'un nouvel article soumettant à certaines conditions l'utilisation de mentions relatives aux modes d'élevage des volailles.

Vous avez manifesté, avec humour et un peu de nostalgie, du regret de ne plus siéger parmi nous pour pouvoir proposer de tels amendements.

Excepté un retour à la rédaction de l'article 10 dans le texte adopté par l'Assemblée, la commission a adopté à l'unanimité les modifications introduites par le Sénat. Nous voilà donc en présence d'un texte qui suscite le consensus, et je nous en félicite tous.

Vous n'aviez cependant pas répondu à la question de Claude Gatignol, qui constatait que, s'agissant du réseau de surveillance à créer, votre projet ne correspondait pas exactement aux dispositions européennes ni aux avis du Conseil d'Etat. Qu'en est-il exactement ? Nos concitoyens exigent de plus en plus de connaître la qualité sanitaire de ce qu'ils trouvent dans leur assiette.

Le 16 novembre, vous avez reçu une délégation d'inspecteurs vétérinaires, qui assurent 80 % des missions de contrôle de la chaîne alimentaire exercées par l'Etat. Selon leur syndicat, les effectifs sont très insuffisants, puisque 175 équivalents temps plein ont à contrôler 31 747 entreprises agro-alimentaires et qu'ils sont 250 à contrôler 330 656 détaillants. Les 300 postes supplémentaires annoncés par le Premier ministre ne sont pas à la hauteur des besoins. Comment comptez-vous répondre à la surcharge de travail des vétérinaires inspecteurs ?

La sécurité alimentaire est aussi une question de confiance. Le retour à la confiance, qui sera assez lent, appelle un travail d'explication et de communication. N'est-il pas paradoxal que face à un accroissement des mesures destinées à garantir la qualité de la nourriture, la confiance des Français dans ce qu'ils mangent diminue ?

La nécessité d'améliorer l'information du public est bien apparue la semaine dernière au congrès des maires de France, auquel vous avez assisté. Les maires sont en effet harcelés de questions auxquelles ils ne sont pas toujours en mesure de répondre. Ne prenez pas mes propos comme une critique, mais comme une marque d'encouragement.

M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche - C'est bien ce que je fais !

M. Jean Proriol - Le groupe DL, considérant que le texte va dans le bon sens, le soutiendra.

M. Félix Leyzour - Le projet nous revient sous les projecteurs de l'actualité. La sécurité alimentaire est un droit fondamental. Quels que soient les moyens dont disposent nos concitoyens, il est indispensable que les produits qu'ils achètent et consomment soient garantis. S'il est vrai que ce que l'on consomme aujourd'hui est globalement de meilleure qualité sanitaire que dans le passé, la chaîne qui conduit de l'étable à la table ou de la fourche à la fourchette est devenue très longue, et que ses nombreux maillons peuvent receler des dysfonctionnements aux graves conséquences pour les consommateurs. Sans doute, pas plus ici qu'ailleurs n'existe le risque zéro, mais il importe d'y tendre plus ici encore qu'ailleurs. La vigilance des consommateurs, les efforts déployés par nos éleveurs, l'action des salariés de l'agro-alimentaire, la présence sur le terrain de vétérinaires et de services de contrôle, les décisions politiques prises ces dernières années, tout cela a permis que la France dispose d'un système de veille et de contrôle performant. Mais il reste encore à faire pour mieux informer, et mieux responsabiliser les acteurs de la filière. Sur ce point pourquoi ne pas créer, dans les entreprises agro-alimentaires, une sorte de cellule de veille sanitaire, permettant aux salariés d'actionner l'alarme de la sécurité sans encourir le risque de la sanction ?

La création de l'AFSSA a concrétisé la politique de transparence et de sécurité du Gouvernement. Indépendante du pouvoir, l'Agence doit évaluer le risque, qu'il appartient à l'autorité politique de gérer. Voilà la meilleure démarche pour rechercher la vérité. Nos problèmes proviennent aussi de la différence des normes existant en Europe et dans le monde. Attachons-nous à combattre ce qui tendrait à tirer notre système de sécurité vers le bas.

L'action de ces dernières semaines concrétise cette démarche. Le combat continue. Nous sommes prêts à adopter les amendements retenus par la commission et en particulier les articles 17 et 18 nouveaux proposés par le Gouvernement. Ils tendent en effet à habiliter les agents des douanes à accéder aux locaux à usage professionnel, afin de contrôler les marchandises soumises à restriction de circulation, en particulier celles introduites sur le territoire national, avant le déclenchement de l'alerte sanitaire dont elles font l'objet.

Nous ne pouvons mieux conclure le débat de ce matin qu'en adoptant ce projet (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Jean-Claude Lemoine - Ce projet permet au Parlement d'étudier dans le détail et éventuellement d'améliorer les dispositions transposant le droit communautaire en droit interne.

A preuve les amendements très pertinents introduits en première lecture tant par l'Assemblée que par le Sénat. La contribution du Parlement est donc indispensable pour toute transposition des directives européennes, qui méritent mieux qu'un simple blanc-seing habilitant le Gouvernement à transposer en bloc par ordonnances cinquante directives. J'aurais apprécié que nous utilisions la même procédure qu'aujourd'hui pour transposer, par exemple, les directives relatives aux médicaments vétérinaires.

Tous ces textes communautaires sont complémentaires de celui que nous examinons et ils mériteraient la même attention. Du reste, ce projet présente l'intérêt d'être d'une très grande actualité. En renforçant les dispositifs de contrôle en matière d'alimentation et de protection animales, d'identification et de suivi des animaux et de surveillance de leurs maladies, la transposition des textes communautaires doit permettre de restaurer la confiance des consommateurs et de sortir la filière bovine d'un désastre annoncé.

Pour autant, l'inquiétude légitime liée à l'ESB ne doit pas occulter les efforts de la France pour améliorer la santé des animaux et la sécurité sanitaire des denrées d'origine animale. Grâce à un partenariat efficace entre les éleveurs et les vétérinaires, des grandes épizooties de fièvre aphteuse, de brucellose, de tuberculose ou de leucose ont été pratiquement éradiquées.

D'autres dangers nous menacent aujourd'hui : dioxine dans le poulet, listeria dans les fromages, ESB... Dans ce dernier cas, la France a pris -surtout depuis l'intervention du Président de la République- les dispositions indispensables : interdiction totale des farines carnées, dépistage renforcé, élimination des produits à risque. Mais d'autres inquiétudes se font déjà jour avec l'arrivée des OGM...

Ce projet de loi renforce et complète la loi d'orientation agricole du 9 juillet 1999 : il élargit le pouvoir de police administrative des vétérinaires inspecteurs, étend le contrôle des aliments pour animaux et des médicaments vétérinaires, et institue un système de laboratoires agréés chargés d'établir le diagnostic des maladies animales et de mettre en place un réseau de surveillance des risques zoosanitaires. De même, l'obligation de tenir un registre sanitaire est étendue à tous les animaux d'élevage.

Comme je l'ai souligné, ce texte a été enrichi au cours de son examen par plusieurs amendements. Avec mon collègue Jean-Pierre Dupont, j'en présenterai deux nouveaux qui ont trait aux fédérations de défense contre les organismes nuisibles et que la commission a adoptés. Même s'il soulève quelques difficultés dans le processus de codification en CND, ce texte doit être adopté en ce qu'il va permettre de conforter le dispositif de sécurité sanitaire tout en répondant aux exigences d'harmonisation communautaire. Enfin, en confiant aux groupements sanitaires départementaux la surveillance des risques zoosanitaires, il affirme l'implication des éleveurs dans le dispositif de santé animale, ce qui constitue un gage de confiance.

Pour la filière agro-alimentaire comme pour les consommateurs, la qualité sanitaire apparaît aujourd'hui comme un impératif de santé publique. C'est pourquoi le groupe RPR votera ce texte tout en demandant que la procédure législative adoptée pour transposer les directives soit systématiquement suivie pour intégrer les textes communautaires dans notre droit national (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR).

M. Michel Vergnier - Si j'en crois son libellé, ce projet de loi vient à point nommé ! A l'évidence cependant, ce texte d'une vingtaine d'articles ne constitue pas la seule réponse du Gouvernement à la crise de l'ESB. En transposant plusieurs directives communautaires, il complète la loi d'orientation agricole du 9 juillet 1999. Plusieurs dispositions méritent une attention toute particulière : le renforcement des mesures de police administrative, l'allégement des procédures de contrôle des maladies quasiment éradiquées, l'amélioration des méthodes d'identification des animaux et l'adjonction de fonctionnaires des Douanes aux agents habilités à effectuer les contrôles. Le Sénat a apporté d'utiles précisions sur les notions d'élevage à la ferme et en plein air, ainsi que sur les produits issus de la filière biologique.

S'agissant de la méthode retenue, je note qu'il n'a pas fallu moins de sept navettes pour faire aboutir nos travaux et qu'au regard du nombre de directives qui restent à transposer, nous devons privilégier un mode de fonctionnement qui concilie vitesse et efficacité.

En matière de sécurité alimentaire, nous vivons une période dominée par l'irrationnel : le doute, installé, terrible, touche tout le monde. Pourtant, le risque est moindre qu'il y a dix ans et la France, à travers les différentes mesures qu'elle a adoptées, a surtout eu le tort d'avoir raison trop tôt. Quant aux producteurs, ne les a-t-on pas indirectement incités à produire une viande à moindre coût et de moins bonne qualité ? Fort heureusement, la loi d'orientation agricole a permis de rectifier le tir en prônant une agriculture de qualité, fondée sur la traçabilité des produits.

Il nous appartient désormais de rétablir la confiance dans l'hexagone et au sein de l'Union européenne, qui, il y a quelques jours encore, se faisait tirer l'oreille. Souhaitons que la raison finisse par l'emporter et que la crise, pour injuste qu'elle soit, nous incite à des comportements plus responsables.

Dans cet esprit, nous proposons la constitution d'une commission d'enquête parlementaire, chargée de faire le point sur l'ensemble du domaine et de promouvoir une agriculture nouvelle, fondée sur la sécurité des produits, l'occupation des espaces et le respect des consommateurs (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste).

M. Germain Gengenwin - Cette seconde lecture s'inscrit dans un contexte très sensible, lié à l'inquiétude de l'opinion publique sur le risque sanitaire. S'agissant de l'ESB, il serait du reste plus juste de parler d'une psychose, qui doit nous conduire à proposer une véritable politique de gestion des risques sanitaires. Les dispositions de nature essentiellement technique de ce projet concourent à cet objectif en ce qu'elles tendent à prévenir la survenue de maladies dans les élevages. Je note cependant que les directives visées sont déjà anciennes -la plus récente datant de 1995 et la première de 1973- et traitent davantage des grandes maladies en voie d'éradication que des risques nouveaux auxquels nous sommes confrontés.

Or, les pouvoirs publics doivent aujourd'hui s'attacher à la prévention de ces nouveaux risques, l'ESB bien sûr, mais aussi les contaminations alimentaires comme la salmonelle, la listériose et les toxi-infections. J'avais évoqué, en mai dernier le problème de la listeria, qui ne fait l'objet d'aucune obligation de déclaration alors qu'elle provoque de nombreux décès, et auquel ce projet de loi n'apporte pas de réponse. Si la diminution des risques est du ressort du monde agricole, leur gestion relève de l'autorité politique. Elle s'est d'ailleurs infléchie avec la crise de la vache folle, qui a inspiré des mesures radicales, notamment l'interdiction temporaire des farines animales au nom du principe de précaution. La France, qui s'est montrée pionnière en la matière, est désormais suivie par les autres pays européens, ce qui devrait permettre une harmonisation communautaire. Mais une véritable gestion implique de prendre en compte les effets induits, c'est-à-dire de substituer d'autres aliments aux farines animales. Ceci nous renvoie à la nécessité de cultiver des protéines végétales, puisque l'Europe est aujourd'hui tributaire à 95 % de production brésilienne et américaine. Il lui faudrait, pour remplacer les farines animales, planter 700 000 hectares de protéagineux. Or, aucun soutien n'est apporté à ces cultures à ce jour. La France est l'un des pays les mieux placés pour y encourager. Même si cela n'est pas tout à fait l'objet de ce débat, je vous demande donc si des mesures sont envisagées à bref délai pour assurer une autosuffisance européenne, puisqu'il faut aux grands maux, les grands remèdes. Je termine en vous assurant que nous voterons ce projet, comme en première lecture, en souhaitant qu'il soit complété pour s'adapter aux nouveaux risques (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR et du groupe DL).

La discussion générale est close.

M. le Président - En application de l'article 91, alinéa 9 du Règlement, j'appelle maintenant, dans le texte du Sénat, les articles du projet de loi sur lesquels les deux assemblées du Parlement n'ont pu parvenir à un texte identique.

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ARTICLE PREMIER

M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche - L'amendement 5 vise à supprimer une disposition introduite par le Sénat, qui prévoit d'indemniser les détenteurs d'un produit s'avérant en définitive sain. J'avais indiqué au Sénat que si son amendement n'était pas retiré, j'invoquerais l'article 40 de la Constitution, puisqu'il crée une charge nouvelle pour l'Etat sans qu'elle soit financée. La présidence ne l'ayant pas invoqué, je ne peux plus le faire, mais je voulais porter cet élément à votre connaissance. Je ne conteste pas l'intention du Sénat d'indemniser un producteur dont l'élevage a été mis à tort sous séquestre, mais je souhaite attendre les résultats des travaux que j'ai commandés sur le sujet. De plus, il faut éviter que les services de contrôle observent une retenue excessive en raison du risque d'indemnisation. Le problème posé est cependant réel. C'est pourquoi, tout en déposant cet amendement, je m'engage a y répondre dans les meilleurs délais.

M. le Rapporteur - La commission, qui a accepté cet amendement, se range à l'avis du Gouvernement.

M. Jean Proriol - Monsieur le ministre, nous sommes surpris de votre position. Alors que nous avions examiné ensemble, puis adopté, les dispositions du Sénat, cet amendement subrepticement déposé à 14 heures 30 manifeste un manque de bon sens. Lorsqu'une production se trouve stoppée, -et a fortiori lorsque les stocks sont détruits-par erreur, il n'y a aucune raison pour que l'éleveur supporte la perte qui en résulte. Nous nous opposons donc à votre amendement, qui peut déboucher sur des spoliations. En s'abritant derrière l'article 40 -qu'il n'a d'ailleurs pas fait jouer au Sénat- le Gouvernement s'en tire à trop bon compte. Le souci de l'égalité devrait vous conduire à retirer votre amendement.

M. Jean-Claude Lemoine - Je suis d'accord avec mon collègue Proriol. Connaissant le sérieux des contrôleurs, le risque de parcimonie dans le contrôle que vous avez invoqué me paraît bien faible. En outre, vous savez bien que les éleveurs ne peuvent guère attendre que l'on trouve un moyen de les dédommager.

M. le Ministre - Je n'ai pas dit le contraire ! Je dis simplement qu'il ne faut pas créer une obligation dans la précipitation. Vous semblez découvrir un type d'« abus de pouvoir » qui existe pourtant depuis longtemps ! Si je vous rejoins sur le fond, je considère que l'on peut attendre quelques semaines pour régler le problème. La protection du consommateur prime d'ailleurs sur toute autre considération. Enfin, si je m'engage à répondre à cette question, je ne peux le faire sans étudier le financement de la mesure. Sera-t-il fondé sur l'assurance, ou sur des crédits publics ?

M. Jean-Claude Lemoine - Lorsque vous nous dites que nous semblons découvrir un problème qui n'est pas neuf, vous oubliez que nous n'étudions ce texte, qui est l'occasion d'y répondre, qu'aujourd'hui. Je ne doute pas de votre engagement, mais je crains que sa portée soit réduite par Bercy. Combien de temps faudra-t-il alors attendre pour indemniser les agriculteurs ?

Personne ne le sait. C'est pourquoi je voterai contre cet amendement.

M. Alain Calmat - Je voterai pour car je ne suis pas certain que ce soit aux contribuables de financer cette indemnisation.

L'amendement 5, mis aux voix, est adopté.

L'article premier, ainsi modifié, mis aux voix, est adopté.

Les articles 2, 2 bis, 3, 4, 5, 6, 6 bis, 6 ter, 8 et 9 sont successivement adoptés.

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ART. 10

M. le Rapporteur - L'amendement 1, adopté à l'unanimité par la commission, revient au texte adopté par l'Assemblée en première lecture en ce qui concerne le code de déontologie.

M. le Ministre - Favorable.

L'amendement 1, mis aux voix, est adopté.

L'article 10, ainsi modifié, mis aux voix, est adopté.

L'article 10 bis est adopté.

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ART. 11

M. le Rapporteur - L'amendement 2 précise que les groupements régionaux sont constitués des fédérations départementales.

M. Jean-Claude Lemoine - Tout à fait d'accord.

M. le Ministre - Favorable.

L'amendement 2, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 3 de la commission donne à la fédération nationale la possibilité de bénéficier d'une aide publique pour des actions de lutte contre les ennemis des cultures.

M. Jean-Claude Lemoine - Nous sommes pour.

M. le Ministre - Favorable.

L'amendement 3, mis aux voix, est adopté.

L'article 11, modifié, mis aux voix, est adopté.

L'article 13, mis aux voix, est adopté, de même que les articles 14 bis et 17.

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APRÈS L'ART. 17

M. le Ministre - L'amendement 6 du Gouvernement a pour objet de résoudre un problème qui nous est apparu en cours de route...

M. Germain Gengenwin - C'est un cavalier.

M. le Ministre - Les membres assesseurs des tribunaux paritaires des baux ruraux et les représentants à voix délibérative des commissions paritaires départementales des baux ruraux sont élus pour six ans. Les dernières élections ont eu lieu le 31 janvier 1995, les prochaines devraient avoir lieu le 31 janvier 2001, soit en même temps que les élections aux chambres d'agriculture, ce qui poserait beaucoup de problèmes d'organisation aux petites communes rurales. Il est donc proposé de proroger d'un an le mandat des membres assesseurs des tribunaux paritaires des baux ruraux.

M. le Rapporteur - En tant que maire d'une petite commune rurale, je ne puis qu'approuver cet amendement.

L'amendement 6, mis aux voix, est adopté.

L'article 18, mis aux voix, est adopté.

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APRÈS L'ART. 18

M. le Rapporteur - L'amendement 4 comble une lacune du code rural en prévoyant un système de vérification et de contrôle de l'agriculture biologique.

M. le Ministre - Avis favorable.

L'amendement 4, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 7 tend à ce qu'un rapport soit déposé sur les incidences de certains insecticides.

M. Jean-Claude Lemoine - Je serais d'accord, mais à condition de recevoir quelques éclaircissements sur la nature chimique de l'imidaclopride et du fipronil.

M. le Ministre - Le Gouvernement partage le souhait de M. Chazal, qui est à l'origine de cet amendement, mais sa rédaction va trop loin dans le détail, alors que les études en cours n'ont pas formellement mis en cause les produits qu'il cite et qui entrent dans la composition de certains insecticides, en particulier le fameux Gaucho. Faire un article de loi sur deux molécules, c'est un peu prendre un marteau pour écraser une mouche, en l'occurrence plutôt pour épargner une abeille (Sourires). Le sujet relève davantage du domaine réglementaire.

Il y a deux ans, j'avais pris mes responsabilités en interdisant le Gaucho pour le tournesol, mais j'ai découvert ensuite que les abeilles butinent aussi le maïs, pour lequel le Gaucho restait permis. Quoi qu'il en soit, mieux vaut prévoir, comme je le propose dans le sous-amendement 8, un rapport « faisant état des connaissances acquises en matière d'incidence des insecticides systémiques sur les populations d'abeilles ».

M. Germain Gengenwin - Mieux vaut en effet viser les insecticides systémiques en général. Les produits systémiques sont véhiculés par la sève des plantes.

M. le Rapporteur - Je crois en effet qu'il ne faut pas restreindre par avance la portée de l'étude demandée.

Le sous-amendement 8, mis aux voix, est adopté.

L'amendement 7 ainsi sous-amendé, mis aux voix, est adopté.

L'ensemble du projet de loi, mis aux voix, est adopté.

Prochaine séance ce soir, à 21 heures.

La séance est levée à 18 heures 55.

                      Le Directeur du service
                      des comptes rendus analytiques,

                      Jacques BOUFFIER


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