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Session ordinaire de 2001-2002 - 21ème jour de séance, 49ème séance

1ère SÉANCE DU MERCREDI 7 NOVEMBRE 2001

PRÉSIDENCE de M. Pierre LEQUILLER

vice-président

Sommaire

      LOI DE FINANCES POUR 2002 -deuxième partie- (suite) 2

      TOURISME 2

      QUESTIONS 21

La séance est ouverte à neuf heures quarante-cinq.

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LOI DE FINANCES POUR 2002 -deuxième partie- (suite)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2002.

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TOURISME

M. Michel Bouvard, rapporteur spécial de la commission des finances - En saluant notre nouveau ministre, je voudrais rendre hommage au travail accompli par Mme Demessine et la remercier des rapports confiants qu'elle a entretenus avec le Parlement au-delà de nos différences de sensibilité.

Cette discussion s'ouvre sous le signe de l'inquiétude, tant à propos du sort immédiat des entreprises touchées par les terribles événements du 11 septembre que de l'évolution de la situation internationale. L'organisation mondiale du tourisme et de l'OCDE se refusent à établir des projections à long terme. En effet, l'incertitude règne quant à l'évolution des événements et il ne s'est jamais trouvé de situation analogue, même pendant la guerre du Golfe. Néanmoins, des répercussions sont déjà observées. 91 % des touristes américains, 85 % des canadiens et 80 % des japonais ont annulé leurs séjours. Venant d'une clientèle au pouvoir d'achat élevé, ces annulations ont des conséquences importantes sur le transport aérien, l'hôtellerie haut de gamme et le commerce de luxe. Les compagnies aériennes européennes ont enregistré une diminution de 9,6 % du trafic entre le 10 septembre et le 14 octobre, la baisse atteignant 36,2 % pour les lignes atlantiques.

Les recettes du mois d'octobre de la compagnie nationale ont baissé de 14 % par rapport à l'année dernière. Par ailleurs, les grands groupes du secteur laissent présager une réduction des investissements.

En revanche, on constate déjà un certain redéploiement des projets de voyages, notamment sur les Antilles françaises. Pour les encourager, il faut veiller à ce que l'offre soit maintenue à un niveau suffisamment attractif, tant du point de vue du nombre de sièges que de celui des prix.

Les réactions des pouvoirs publics ont été, dans tous les pays, extrêmement rapides, démontrant que le tourisme constitue bien un enjeu économique.

Mme Demessine a immédiatement mis en place, avec les professionnels, une cellule de suivi qui devrait faire connaître son premier bilan cette semaine.

Des mesures de soutien aux compagnies aériennes et des reports d'échéances fiscales et sociales ont été annoncés, ainsi qu'un assouplissement du chômage partiel et la réduction du temps de travail.

Parallèlement, le Premier ministre a décidé de consacrer 4,57 millions d'euros à une campagne mondiale de promotion de la destination France. Les moyens ne sont heureusement pas obtenus par redéploiement, mais s'ajoutent à ceux qui sont déjà prévus dans le projet de loi de finances.

Il est en effet primordial de sauvegarder les capacités de notre secteur touristique et d'en assurer résolument la promotion. Avec 177 192 entreprises, qui emploient plus de 900 000 personnes, il dégage un chiffre d'affaires de près de 49 millions d'euros. L'ensemble des emplois directs et induits est estimé à 2 millions et le montant global des recettes touristiques à 95,8 milliards d'euros.

Les dépenses des touristes étrangers en France représentent près du double de ce que les Français dépensent à l'étranger. Le solde s'est ainsi élevé en 2000 à 15,2 milliards d'euros. Cette même année, la France a enregistré 10,8 % des arrivées mondiales, ce qui la place au premier rang des destinations dans le monde.

Toutefois, elle fait moins bien en termes de recettes. Nous avons des marges de progression dans ce domaine.

Sur le plan intérieur, malgré les efforts du secrétariat d'Etat, la part des Français qui ne partent jamais en vacances s'est encore accrue en 2000. Les jeunes y sont extrêmement nombreux. L'impact des dispositifs spécifiques mis en place en faveur des plus défavorisés reste limité.

Les actions destinées à faciliter le départ des familles aux revenus moyens manquent également d'efficacité.

Les aides à la pierre ont permis de maintenir une offre attractive à des tarifs raisonnables, mais la loi de 1999 sur les chèques vacances n'a pas eu le développement attendu.

Il est vrai que les crédits du tourisme ne représentent que 0,03 % du budget de l'Etat. Ils connaissent cette année une hausse de 2,3 % qui bénéficie essentiellement aux dépenses de fonctionnement.

Celles-ci, après plusieurs années de stabilité, connaissent une progression de 5,95 %, imputable en premier lieu aux dépenses de personnel qui augmentent de 7 %. A l'exception de ce poste, seul progresse le budget de fonctionnement de l'administration centrale. Si les crédits d'étude connaissent une légère réduction, les crédits destinés à l'informatique et aux locaux progressent. Des travaux d'aménagement sont prévus dans un immeuble de l'avenue de l'Opéra occupé par la DRT d'Ile-de-France. Nous espérons qu'ils laissent présager le relogement de la direction du tourisme, qui est actuellement bien mal lotie.

Les crédits d'interventions enregistrent une progression de 0,7 % due exclusivement à la progression des crédits destinés au soutien du secteur associatif.

Le secteur du tourisme bénéficie, pour la génération 2000-2006 des contrats de plan, d'une enveloppe globale de 203,82 millions d'euros.

Pour 2002, le projet de loi de finances propose de consacrer 9,15 millions d'euros au financement de contrats conclus par vingt-deux régions métropolitaines et six régions et collectivités d'outre-mer. Ces contrats de plan doivent correspondre à vos priorités. La première est la réhabilitation de l'immobilier de loisir, notamment par le dispositif des Villages résidentiels de tourisme. Il est dommage qu'il ait fallu attendre toute une législature pour que les textes réglementaires soient publiés. Les autres sont l'organisation d'un dispositif de mesures stratégiques de l'économie touristique, l'adaptation des entreprises de tourisme aux évolutions du marché, la concrétisation du droit aux vacances pour tous et le renforcement de l'attractivité des territoires.

La dotation consacrée à la promotion du tourisme se répartit entre la subvention au fonctionnement de Maison de la France, la participation de l'Etat aux actions menées en partenariat et le financement des missions de promotion en France confiées à Maison de la France. Il s'agit, notamment, de la campagne « Bonjour » et de la campagne de restauration de l'image des régions touchées par la marée noire et les intempéries. Il faut rendre hommage à ce propos à l'excellent travail accompli par Maison de la France, qui a su se moderniser pour être encore plus efficace.

Les autres crédits d'intervention se répartissent entre l'Observatoire national du tourisme et les interventions stratégiques.

Au premier rang de celles-ci, les crédits des actions à caractère économique sont généralement abondés par des amendements parlementaires.

Quant à la participation de l'Etat au budget de l'Agence française de l'ingénierie touristique, elle a progressé de 81,4 % depuis 1998. Groupement d'intérêt public, l'AFIT est un centre de ressource technique national, qui apporte au secrétariat d'Etat et aux collectivités locales son expertise et son savoir faire et soutient la promotion de la France à l'étranger.

Les crédits destinés au soutien du secteur associatif connaissent une progression assez modérée par rapport à l'an dernier. Ils permettront de doubler la contribution d'Etat au groupement d'intérêt public « Bourse Solidarité Vacances ». Le solde servira à financer les conventions d'objectifs entre l'Etat et les associations de tourisme dans le domaine du développement local et de l'action sociale, de poursuivre les actions entreprises en faveur des personnes handicapées et de réaliser le deuxième volet de la campagne institutionnelle destinée à valoriser le tourisme social.

Après deux années de forte progression, les crédits d'investissement enregistrent une évolution modérée. En crédits de paiement, elle bénéficie aux deux principaux postes d'investissement. En autorisations de programme, elle se limite au programme de rénovation des hébergements des associations de tourisme.

La dotation consacrée aux contrats de plan Etat-régions progresse de 7,37 % ce qui, venant en complément des reports prévisibles, devrait permettre de remplir les engagements pris par l'Etat envers les régions. Des autorisations de programme de 4,12 millions d'euros et des crédits de paiement de 2,15 millions sont consacrés au lancement d'un nouveau programme de consolidation de l'hébergement de tourisme social. 350 établissements devraient être rénovés d'ici 2006. Le premier programme de rénovation, dit « Plan patrimoine » avait bénéficié à plus de 60 % de la capacité d'accueil.

Ce budget marque donc une stabilisation des crédits du tourisme, dont le redressement a été engagé à partir de 1999, sans cependant atteindre, au terme de la législature, l'objectif ambitieux des 700 millions que s'était fixé votre prédécesseur. Il ne reflète qu'imparfaitement l'ampleur des efforts accomplis pour améliorer l'offre touristique de notre pays et moderniser les outils d'intervention de l'Etat et des collectivités locales.

Faut-il rappeler que la contribution des conseils régionaux aux budgets des comités régionaux du tourisme représente plus de 80 % de leur budget total, et que la dotation aux communes touristiques s'est élevée, en 2000, à 172,84 millions d'euros ?

Enfin, le produit de la taxe de séjour contribue, dans les 2 000 communes qui la perçoivent, au développement local du tourisme. Pourtant, cette ressource souffre d'un taux de recouvrement très faible, parce que les dispositions législatives et réglementaires qui la régissent sont inadaptées.

A ces ressources complémentaires s'ajoutent les crédits des objectifs I et II de l'Union européenne, dont la mobilisation renforcerait les retombées positives des mesures de défiscalisation prises en faveur de zones de revitalisation rurales. Je déplore donc que les décrets d'application ne soient toujours pas parus ; la conséquence de ce retard est que nous avons perdu un an.

Et puis, des sujets importants demeurent, qui n'ont pas trouvé de solution satisfaisante au cours de la législature qui s'achève.

Tout d'abord, il est dommage que n'ait toujours pas été réduit le taux de la TVA sur la restauration traditionnelle, ce qui aurait permis de remédier aux distorsions de concurrence subies sur le plan intérieur à l'égard de la restauration rapide et sur le plan international à l'égard de nos partenaires européens.

D'autre part, l'élargissement aux salariés des petites et moyennes entreprises du bénéfice des chèques vacances n'a pas produit les effets attendus, notamment parce que certaines dispositions de la loi sont difficilement applicables. J'avais appelé l'attention du Gouvernement et de l'Assemblée sur l'inadaptation du niveau du revenu fiscal de référence pour l'accès aux chèques vacances. Elle est à présent manifeste et appelle d'urgence une modification de la loi. Vous avez annoncé à la commission de la production le dépôt par le Gouvernement d'un amendement visant à relever le revenu fiscal de référence. Je m'en réjouis, mais nous serons attentifs au nouveau seuil proposé.

Par ailleurs, il est extrêmement regrettable qu'en dépit des engagements pris, les relations du Service d'aménagement touristique de la montagne avec le bailleur des locaux qu'il occupe n'aient pu être régularisées, ce qui contraint le personnel à travailler dans des conditions d'autant plus difficiles que nombre des postes n'ont pas été pourvus au sein du SEATM. Qu'en est-il donc des engagements pris par le Premier ministre lors du Conseil national de la montagne de Clermont-Ferrand en faveur de la moyenne montagne ?

S'agissant toujours de la montagne, je rappelle que nous attendons toujours le nouveau décret UTN.

Enfin, la situation de l'hôtellerie familiale demeure fragile, en dépit d'améliorations fiscales et sociales ponctuelles, et le problème des transmissions d'entreprises reste entier, si bien que nombre de successions se soldent par la disparition des établissements, particulièrement en milieu rural, là, précisément, où leur rôle d'appui au tourisme est si précieux.

Cet exposé ne visait pas à critiquer l'action menée, mais à dresser le bilan au terme de la législature, pour indiquer quelles devront être les priorités futures. Et, en dépit de ma demande d'abstention, qui visait à souligner nos attentes, la commission a adopté le budget du tourisme. En son nom, j'invite donc l'Assemblée à faire de même.

M. Jean-Pierre Defontaine, rapporteur pour avis de la commission de la production - Depuis plusieurs années, la commission de la production souhaite, au regard des apports multiples du tourisme à la France, que les crédits du secrétariat d'Etat augmentent et occupent une part plus importante du budget global. Cette remarque vaut pour le projet de budget 2002, mais elle demande à être nuancée, parce que nous avons confiance en la politique menée avec une grande conviction par Mme Demessine, dont je salue l'action, et que vous poursuivrez, Monsieur le ministre. Malgré des crédits encore insuffisants, cette politique contribue de manière décisive au succès de notre pays, qui demeure la première destination touristique mondiale. Et le budget du secrétariat d'Etat est tout de même passé de 358 millions en 1997 à 485 millions en 2002.

Pourtant, les professionnels du secteur sont inquiets. Les attentats commis le 11 septembre aux Etats-Unis ont mis fin à plusieurs années de croissance soutenue, et la situation de certains opérateurs est préoccupante.

Le Gouvernement n'est pas resté sans réagir. Il a ainsi décidé que les entreprises les plus touchées pourront obtenir le report de certaines échéances fiscales et sociales, et les directions départementales du travail et de l'emploi ont été invitées à examiner, au cas par cas, la situation des entreprises du tourisme pour ce qui concerne le chômage partiel et la réduction du temps de travail.

Mais le tourisme repose sur la confiance, et il appartient donc aux pouvoirs publics de savoir trouver les mots et les moyens de nature à dissiper les inquiétudes sur la sécurité.

Le tourisme, secteur économique essentiel, contribue au rayonnement de la France dans le monde. Représentant 7 % du PIB, contribuant pour 14,1 milliards d'euros à l'excédent de la balance des paiements, il regroupe au moins 650 000 emplois salariés, presque 2 millions d'emplois induits et près de 210 000 entreprises ; c'est le seul secteur où la modernisation s'accompagne de créations d'emplois.

Il faut néanmoins poursuivre l'effort de qualification, et particulièrement des plus vulnérables, les travailleurs saisonniers.

J'en viens à la mise en _uvre du droit aux vacances pour tous. Malgré les efforts constants du Gouvernement, près de 40 % des Français ne partent pas en vacances, le plus souvent, pour des raisons financières.

Je me félicite donc que le budget de la Bourse solidarité-vacances pour 2002 atteigne 1,4 million d'euros, la contribution du secrétariat d'Etat doublant. Cet effort devrait permettre à 30 000 personnes défavorisées de partir en vacances l'année prochaine.

S'agissant du tourisme social, je rappelle l'extension du « chèque-vacances » aux employés des entreprises de moins de cinquante salariés, permise par la loi du 12 juillet 1999, et j'approuve le souhait du Gouvernement d'augmenter le nombre des bénéficiaires de cette mesure.

En effet, ces actions sont utiles ; en permettant l'accès aux vacances à des familles particulièrement démunies, elles renforcent la cohésion sociale et elles sont donc véritablement démocratiques. Mais peut-être faut-il prêter attention aux inquiétudes de certains employeurs pourtant favorables à cette mesure, qui regrettent une loi trop limitative et trop complexe et qui, pour éviter de diviser leurs salariés, préfèrent ne pas s'engager dans la mise en _uvre de ce dispositif.

M. le Rapporteur spécial - Très bien !

M. le Rapporteur pour avis - Je rappelle que, pour la quatrième année consécutive, une campagne nationale de sensibilisation à l'accueil des personnes handicapées sur les lieux de vacances a été conduite en 2001 ; elle a contribué à réduire le retard de notre pays sur ce point. C'est une affaire de volonté partagée mais c'est aussi une affaire de c_ur.

La dernière campagne de communication a pris une nouvelle dimension par la mise en place du label national « Tourisme et handicap », qui garantit l'accessibilité et l'accueil selon le type de handicap.

Mais l'offre touristique n'existerait pas sans les professionnels qui l'animent. Or, chacun le sait, le secteur du tourisme a longtemps été le terrain d'élection d'emplois atypiques, modestement rémunérés. Il ne faudrait pas que la mise en _uvre des 35 heures, notamment dans les PME/PMI, amplifie ce phénomène.

Les crédits assurent la conception, le suivi et l'évaluation des politiques nationales d'aménagement touristique, de manière que le tourisme se réalise dans le respect des hommes, de la culture et de la nature. Le tourisme rural, en particulier, bénéficie toujours d'un engouement important, notamment auprès des étrangers. Pourtant un léger tassement se fait sentir depuis quelques années.

Les crédits de l'Agence française de l'ingénierie touristique atteignent 2 millions d'euros. Certains l'estiment insuffisamment dotée en personnels, ce qui est préoccupant, car elle a un rôle stratégique.

S'agissant de Maison de la France, qui joue un rôle très important de promotion de la France à l'étranger, le projet prévoit de reconduire à l'identique les moyens qui lui ont été alloués en 2001, soit 27,4 millions d'euros. Le rapport d'information du Sénat, publié il y a quelques jours, fait état des difficultés budgétaires rencontrées par cet organisme, et qui ont conduit à l'annulation.

J'aimerais que vous confirmiez à la représentation nationale votre attachement à cet outil fondamental.

Le débat en commission a conduit aussi à soulever d'autres problèmes, comme l'application au secteur du tourisme de la loi sur les 35 heures, et, surtout, la disparité des taux de TVA pesant sur les différentes formes de restauration. Nous avons été nombreux à proposer une baisse du taux applicable à l'ensemble du secteur car la restauration traditionnelle souffre du différentiel entre le taux normal qui lui est appliqué et celui de la restauration d'entreprise, de la restauration rapide ou collective et de l'hébergement individuel, qui bénéficient d'un taux réduit de 5,5 %.

Je souhaite connaître la position du Gouvernement sur ce dossier. A défaut d'une baisse dont certains soulignent les obstacles juridiques, d'autres réponses sont-elles possibles ?

Ce budget va dans le bon sens ; il permet de soutenir efficacement l'offre touristique nationale ce qui est de bon augure, au moment où la situation internationale pèse sur le marché du tourisme.

Nous avons confiance dans votre action, notamment dans la dimension sociale que vous avez su donner à notre politique touristique. La commission de la production a donné un avis favorable à l'adoption des ces crédits et je souhaite que nous soyons nombreux à les voter (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Jean-Michel Couve - Monsieur le ministre, votre récente prise de fonction, que je salue, vous amène à nous présenter aujourd'hui ce dernier budget du tourisme de votre Gouvernement. Nous pourrons ainsi tirer les premiers enseignements de cinq ans de politique touristique.

Mais ce débat survient surtout à la suite des tragiques événements qui ont endeuillé les Etats-Unis le 11 septembre dernier avec leurs conséquences sur l'évolution des voyages dans le monde.

Nous déplorons déjà d'importantes baisses d'activités chez les transporteurs aériens, les voyagistes, les hôteliers et le risque est réel pour un grand nombre de petites et moyennes entreprises.

Cette situation est préoccupante, et l'incertitude qui pèse pour 2002 nous fait craindre que les seules propositions de report de charges présentées par le Premier ministre ne puissent nous mettre à l'abris de nombreux dépôts de bilans.

Ce budget est en augmentation de 2,3 %. Au titre III, l'augmentation des dépenses de personnel tient essentiellement à des mesures d'ajustement, qui sont les bienvenues. La moitié des 2 millions d'augmentation des crédits des matériels et des moyens de fonctionnement sera consacrée à l'équipement informatique du ministère, qui n'a pas eu jusqu'alors les moyens de participer au foisonnement des nouvelles technologies chez la plupart des acteurs du tourisme...

Au titre IV, l'observation économique ne bénéficie pas de dotations supplémentaires. Au vu de l'excellent travail réalisé par notre Observatoire national du tourisme, on ne peut que regretter l'insuffisance de ses moyens. Vous saviez depuis longtemps que l'euro serait mis en circulation au 1er janvier 2002. Or, les comptes du tourisme n'ont pas été adaptés en conséquence. Ils n'en seront que plus imprécis et nous continuerons à confondre estimations aléatoires et évaluations fiables, indispensables pour mieux cerner les retombées des actions et des efforts de chacun.

Les crédits de l'AFIT restant identiques à l'année précédente, ses besoins ne pourront être satisfaits, dites-vous, qu'en 2003. C'est bien dommage car les élus et les acteurs de terrain ont bien besoin de ses conseils toujours éclairés et de son assistance.

Le secteur associatif bénéficie en revanche d'une attention particulière avec des crédits en hausse de 12,3 %, qui bénéficient également à l'aide aux personnes par le biais des Bourses-Solidarité-Vacances et des mesures de soutien aux handicapés.

Les crédits des contrats de plan Etat-régions demeurent inchangés. Quant à Maison de la France, dont les crédits devaient rester identiques malgré l'érosion de ses moyens due à la faiblesse de l'euro, elle bénéficiera, finalement, du fait des conséquences des événements de septembre dernier, d'une dotation complémentaire de 30 millions, destinée à renforcer notre promotion à l'étranger.

En investissement, les crédits des contrats de plan progressent de 7,3 %. Certes, des crédits restent à consommer des années précédentes, mais les sommes affectées en 2002 paraissent modestes au regard de l'enveloppe totale de 1,337 milliards prévue pour la période 2000-2006.

Vous nous annoncez aussi le lancement d'un nouveau programme de consolidation des hébergements de tourisme social qui devrait permettre, d'ici 2006, la rénovation de 350 établissements moyennant une participation de 180 millions de votre ministère. Or 14 millions seulement sont inscrits cette année. De lourds investissements devront donc être faits dans les années à venir, pour respecter ces intéressants programmes.

Au total, ce budget consolide les actions engagées par votre prédécesseur, dont les résultats sont, pour le moins, contrastés.

Il faut tout d'abord relativiser les augmentations de crédits dont vous vous êtes félicités année après année. En effet, dans la période de croissance euphorique que nous avons connue depuis 1997, votre Gouvernement aura encaissé 450 milliards de recettes supplémentaires, dont 250 milliards auront été affectés à des dépenses nouvelles. L'augmentation de 150 millions de votre budget n'en représente même pas un millième du montant et, cette année encore, il ne représentera jamais que 0,03 % du budget de l'Etat.

On se prévaudra une fois encore que la France demeure la première destination touristique au monde, que nous recevons de plus en plus d'étrangers, que le solde positif du poste voyages de la balance des paiements ne cesse de progresser. Mais il conviendrait de se montrer plus nuancé. Ainsi, la progression du nombre d'étrangers qui avait été estimée à 4,3 % en 1999 a chuté à 3,5 % en 2000. En outre, l'augmentation des recettes n'est pas proportionnelle à la croissance des fréquentations, les recettes étant même en baisse au premier semestre 2001, et les choses ne vont pas s'arranger...

Savez-vous, Monsieur le ministre, que des campagnes d'information très pernicieuses ont été déclenchées au Japon, aux Etats-Unis, en Allemagne, en Grande-Bretagne, en Italie et dans bien d'autres pays concurrents, où l'on met en garde les voyageurs contre l'insécurité sur notre territoire ? Quelle mauvaise publicité ! Nous aurions bien besoin que la sécurité soit restaurée pour promouvoir une nouvelle image à l'étranger.

Alors que 66,7 % des Français étaient partis en vacances en 1997, ils n'étaient plus que 65,1 % en 2000, alors que votre Gouvernement les a gratifiés de la réduction du temps de travail et qu'il a étendu les chèque-vacances aux salariés des petites entreprises. Quelle ingratitude de leur part...

En ce qui concerne les chèque-vacances, vous n'avez pas voulu que soit débattue la proposition de loi du groupe RPR, destinée à les généraliser. Aussi, comme nous l'avions prédit, votre texte destiné à « étendre » ce dispositif l'a en fait limité. Un an plus tard, le conseil d'administration de l'Agence nationale du chèque-vacances est contraint d'en souligner les impacts négatifs - je cite : « Vis-à-vis de la clientèle ciblée, la loi a paru trop limitative et complexe. Pour les entreprises de moins de 50 salariés, ce sont plus de 50 % d'entre eux qui n'ont pu bénéficier du chèque-vacances. L'effet d'éviction est important : dans les entreprises de plus de 50 salariés, 20 % de ceux qui en bénéficiaient en ont été exclus, en particulier les foyers avec enfants et les foyers monoparentaux ».

M. le Rapporteur spécial - Eh oui !

M. Jean-Michel Couve - Tout cela n'a certainement pas amélioré le climat social dans les entreprises. Pourtant, vous n'êtes toujours pas revenu sur ce texte alors que l'échec des chèques-vacances est patent.

Néanmoins, la priorité que vous avez accordée à la politique sociale a ouvert des pistes intéressantes. Les premières dispositions en faveur des 400 000 travailleurs saisonniers sont porteuses d'espoir. J'espère qu'elles seront rapidement appliquées.

Quant aux emplois-jeunes, dont l'effet d'aubaine est évident, leur coût exorbitant, les grandes incertitudes sur leur financement dans les années à venir, le caractère trop peu formateur et trop peu qualifiant des contrats les rendent bien précaires. Dans ce domaine si particulier du tourisme qui créée jusqu'à 30 000 emplois nouveaux par an, n'aurait-il pas été plus adapté d'utiliser ces moyens pour soutenir les professionnels, mieux à même que les collectivités et que les associations de créer de vrais emplois pérennes ? Qui plus est, ces professionnels éprouvent maintenant les plus grandes difficultés à trouver les personnels dont ils ont besoin.

En ce qui concerne la restauration classique, je regrette votre refus réitéré de réduire la TVA. Vos arguties juridiques ne nous convainquent pas. Nous avons perdu une bonne occasion de susciter un véritable appel à la création d'emplois, tout en compensant une bonne partie des surcoûts par l'augmentation des recettes d'Etat tirées de celles des entreprises.

Sur bien d'autres plans, ces cinq années n'auront pas permis d'avancées significatives. Ainsi, la réorganisation territoriale du tourisme n'aura pas eu lieu, les délégations régionales n'auront pas été confortées alors qu'une déconcentration des services de l'Etat paraît indispensable. Sans doute verrait-on ainsi plus clair quant à l'implication du tourisme dans l'intercommunalité, dans l'aménagement et le développement durable du territoire et dans la loi SRU. Une telle réforme aurait aussi permis d'optimiser l'utilisation des crédits d'Etat tout en rendant la destination France plus lisible pour les clients et les prescripteurs étrangers.

En ce qui concerne la promotion de notre pays, le GIE Maison de la France subit la relative faiblesse de ses crédits mais aussi l'hétérogénéité de ses structures. Il aurait été souhaitable qu'il puisse s'appuyer sur des programmes pluriannuels, avec des garanties de financement de l'Etat en contrepartie de contrats d'objectif.

Nous attendons toujours la réforme des statuts des communes touristiques et des stations classées. Ces collectivités sont de véritables moteurs du développement ; il faut impérativement les soutenir. Or, leurs dotations touristiques sont toujours intégrées dans leurs dotations globales de fonctionnement, qui ne prennent pas réellement en compte leurs efforts.

Quant au classement lui-même, il ne repose toujours pas sur des critères et des objectifs d'excellence et, pour les stations qui demandent à y accéder, le chemin demeure un long et pénible parcours du combattant.

M. Alain Bocquet - C'est vrai !

M. le Rapporteur spécial - En effet...

M. Jean-Michel Couve - A quand les réformes tant attendues ?

Dernier sujet d'insatisfaction, les formations aux métiers du tourisme. En 1997, Mme Demessine s'était aventurée à nous annoncer une refonte globale des formations. Nous n'aurons obtenu que la création de deux BTS tourisme. Le BTS hôtellerie-restauration et les formations universitaires n'auront pas été revisités. Or, ces formations demeurent dispersées et elles débouchent sur des diplômes de niveaux très inégaux, souvent mal adaptés aux besoins.

Il n'est pas très rassurant d'apprendre que le ministère de l'éducation nationale, dont dépendent ces formations, n'est même pas en mesure, aujourd'hui, de déterminer les moyens budgétaires qu'il y consacre.

M. le Rapporteur spécial - Il ne connaît même pas ses effectifs...

M. Jean-Michel Couve - Dans l'ensemble, hormis les actions à caractère social, nous n'aurons pas beaucoup avancé depuis 1997. On peut craindre que le ralentissement de la croissance mondiale et le développement du terrorisme ne préparent des situations bien difficiles. En fait, nous n'aurons pas profité de ces années d'embellie pour mieux structurer notre économie touristique, mieux organiser notre territoire et pour libérer nos entreprises.

M. Jean-Louis Debré - Quel temps perdu !

M. Jean-Michel Couve - Aussi ce projet, qui ponctue une politique imprévoyante, ne peut recueillir notre assentiment. Les députés RPR voteront donc contre ce budget (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR).

M. Patrick Malavieille - M. Brunhes, dont je salue la prise de fonctions, nous présente un budget raisonné, mesuré, loin de la caricature que vient d'en faire le précédent orateur (« Très bien ! » sur les bancs du groupe socialiste). Il intervient dans des circonstances particulières, car les terribles attentats du 11 septembre dernier aux Etats Unis ont eu des conséquences sur les économies nationales et notamment sur le secteur du tourisme.

Il faut saluer la décision du ministère d'avoir mis en place une cellule de veille avec les professionnels, afin d'évaluer les répercussions sur leur activité. Face aux difficultés que rencontre la filière touristique, le Gouvernement a tout de suite réagi et a pris les mesures d'urgence nécessaires : reports d'échéances fiscales et sociales, indemnisation du chômage partiel, mise en _uvre de la réduction du temps de travail.

Le tourisme, cela suppose l'accueil et la confiance. Le plan Vigipirate renforcé permet d'assurer une meilleure sécurité des Français et des touristes.

Nous sommes la première destination mondiale. Riche d'un patrimoine exceptionnel, notre pays dispose d'atouts considérables. Le tourisme est un secteur majeur de l'économie nationale et le Gouvernement, depuis 1997, l'a bien compris, doublant le budget du tourisme.

Dans les contrats de plan Etat-régions 2000-2006, les crédits du tourisme ont quadruplé.

Le chemin parcouru depuis quatre ans et demi est donc appréciable et permet d'explorer de nouvelles pistes pour une politique encore plus ambitieuse.

Mme Demessine aura beaucoup contribué à la valorisation de ce secteur et à la mise en place des outils nécessaires.

J'ai pu voir, dans mon département, combien sa démarche faite de respect, d'écoute, d'échange, et de ténacité, a contribué à développer cette activité.

L'importance du tourisme est donc reconnue et il est à présent possible d'apporter des réponses neuves aux enjeux du XXIe siècle.

Le secrétariat d'Etat et les professionnels partagent la même volonté d'améliorer la répartition, la diversité et la qualité de l'offre touristique.

Tout le monde, aujourd'hui, comprend l'importance de la professionnalisation des métiers, et cette démarche concerne la formation, les emplois-jeunes, les statuts, les mesures spécifiques pour les salariés saisonniers, la mise en _uvre de la réduction du temps de travail.

Le ministère a su mener une politique sociale du tourisme en l'insérant dans la loi de lutte contre les exclusions, en créant la bourse solidarité vacances, en attribuant le chèque vacances, en revalorisant le tourisme social, associatif et familial.

Dans ce budget, les crédits du tourisme sont en augmentation de 2,3 % ; depuis cinq ans, ils sont constamment à la hausse.

L'industrie touristique représente 7 % du PIB, plus de 2 millions d'emplois et 215 000 entreprises, dont 94 % ont moins de 10 salariés.

La France accueille plus de 75 millions de touristes étrangers, c'est le premier poste d'excédents de la balance commerciale.

Ces crédits marquent la volonté de consolider les orientations et dispositifs des années précédentes. Les moyens de fonctionnement des services sont en hausse de 5,95 %, les crédits consacrés au développement de l'économie touristique, au secteur associatif, aux contrats de plan Etat-régions, aux investissements, aux bourses solidarité vacances et à l'accueil des handicapés progressent également.

Ce budget en croissance, doit contribuer au rééquilibrage territorial du tourisme. Actuellement 80 % des touristes se concentrent sur 20 % du territoire.

Les Pays sont un bon échelon pour la mise en _uvre des contrats de plan Etat-régions - je pense, dans ma région, à l'arrière-pays cévenol et à la protection du littoral.

Le droit aux vacances pour tous doit être renforcé dans les dispositifs à venir : 40 % de la population ne part pas en vacances, principalement pour des raisons financières.

C'est une conception neuve du tourisme que de chercher à contribuer à l'épanouissement des individus et au resserrement des liens familiaux et sociaux. Les mesures engagées pour les plus défavorisés vont dans le bon sens.

Il me semble aussi très important d'améliorer les emplois touristiques dans plusieurs domaines : logement, droits sociaux, pérennisation des contrats de travail, accès à la médecine du travail.

L'amélioration de la qualité de l'emploi est déterminante pour l'image du tourisme et son efficacité.

Nous souhaiterions connaître vos orientations sur la dotation de la Maison de la France, ainsi que sur la demande de réduction du taux de TVA de la restauration traditionnelle, qui permettrait plus d'équité commerciale.

Le 17 octobre, le Premier ministre a dit, lors des assises nationales du tourisme, sa volonté d'augmenter le nombre des bénéficiaires des chèques vacances. Les plafonds de ressources appliqués actuellement privent, en effet, trop de salariés et d'agents de la fonction du bénéfice de ces chèques.

Monsieur le ministre, il n'y a pas de tourisme sans temps libre et sans moyens appropriés pour organiser ce temps libéré. Les engagements de l'Etat s'inscrivent dans cette tradition d'accès plus large aux congés payés et de réduction du temps de travail.

Nous sommes dans une période de réinvention des vacances, accessibles à tous pour un tourisme durable, respectueux des hommes, des cultures, des sites et de l'environnement.

La France a un grand rôle à jouer dans cette approche exigeante du tourisme, au service de la paix et de l'amitié entre les peuples.

Le groupe communiste votera ce budget (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et du groupe socialiste).

M. Forni succède à M. Lequiller au fauteuil de la présidence.

PRÉSIDENCE de M. Raymond FORNI

M. Léonce Deprez - Dans la période difficile que nous vivons, l'économie touristique apparaît comme une source d'espérance. Elle se fonde sur ces deux matières précieuses que sont le territoire et le temps - le temps libre des uns devant devenir le temps de travail des autres. La vie touristique permet de faire de ce temps libre un temps vivant et enrichissant.

En tant que député du Pas-de-Calais, département dont la vie a dépendu pendant un siècle de son bassin minier, je souligne depuis quinze ans que l'économie touristique est un formidable et inépuisable gisement d'activités et d'emplois. Mais face à ces perspectives, la politique touristique de la France manque d'ambition et de cohérence. Pourtant, élus et gouvernants ne peuvent qu'être stimulés par les résultats de ce secteur. 7 % du PIB, 75 millions de touristes étrangers en 2000, 180 000 entreprises, 2 millions d'emplois, 215 milliards de recettes en devises, soit un excédent de 99 milliards, le double de l'excédent agro-alimentaire.

De tels résultats imposent une politique ambitieuse d'organisation territoriale et pluri-saisonnière de l'économie touristique. J'en avais proposé les bases dans un rapport remis à M. Balladur, suite à une mission que m'avait confiée M. Bosson en 1994 et j'avais aussi déposé une proposition de loi, qui avait été soutenue par de nombreux députés.

Nous voici en 2001 et il n'est pas mauvais qu'un nouveau ministre prenne le relais de l'excellent ministre qu'a été Mme Demessine. J'avais engagé avec elle un dialogue constructif et, dans un premier temps, elle avait jugé nécessaire cette réorganisation, annonçant même un projet de loi en ce sens.

Elle a finalement préféré codifier les textes existants C'est un travail nécessaire, auquel je suis heureux de participer et qui permettra des adaptations utiles. Mais notre économie touristique a besoin d'un nouveau cadre législatif afin de traduire plus clairement un volonté politique, que vous venez d'ailleurs d'exprimer. Ce que nous voulons en effet, ce n'est pas seulement augmenter un budget encore modeste malgré des hausses de crédits appréciables dans les contrats de plan Etat-région ; c'est développer l'économie touristique sur les autres saisons de l'année à partir des communes et des pays, qui sont le cadre naturel d'une politique partenariale associant le dynamisme public et celui des professionnels.

J'illustrerai cette politique en insistant sur cinq points.

D'abord il faut rétablir la qualification de commune touristique. On l'a effacée des textes officiels, on a eu tort ; on a rendu clandestine la dotation touristique dont elles bénéficiaient, on a eu tort. Il faut donner à ces pôles de base le label « communes touristiques ». Villes de montagne, villes littorales, villes d'art offrent ces attraits diversifiés qui ont fait de la France le premier pays d'accueil. Que veut la clientèle ? Un lieu de séjour agréable grâce à son environnement, ses équipements, les événements qu'on y crée, les hommes qui l'animent. Le dynamisme des élus et des professionnels sera encouragé par la labellisation de ces 2 000 stations touristiques et grâce à une dotation propre, indépendante de la DGF, au même titre que la dotation de solidarité urbaine ou de développement rural. Ces crédits devraient même être officiellement réservés aux dépenses engagées pour faire vivre les offices du tourisme et investir dans les équipements d'intérêt touristique des communes dotées du label.

Ensuite, il faut moderniser des dispositions trop anciennes, comme Mme Demessine l'avait reconnu, et classer en stations touristiques celles qui le méritent en fonction de critères objectifs définis par décret en Conseil d'Etat. Une étude à ce propos a été présentée le mois dernier au conseil national du tourisme.

Je suggère également de proposer aux élus et professionnels des stations classées de plus hautes ambitions pour l'environnement, l'équipement, l'animation, l'encadrement. Pour cela accordons le label « stations classées quatre saisons » à celles qui ont fait l'effort d'assurer accueil et animation toute l'année. Cette ambition est aussi sociale, vous le concevez : on pourra ainsi mettre fin à l'emploi précaire et aux investissements non rentables, et réduire progressivement l'emploi dit saisonnier.

Pour rendre plus cohérente notre vie touristique, il faut l'inscrire dans les pays, auxquels la loi Pasqua et la loi Voynet ont donné vie. Ils doivent devenir des associations de communautés de communes avec office touristique intercommunal. Je propose comme label « pays d'attrait rural intercommunal ». Ces pays encourageraient le développement des gîtes ruraux, chambres d'hôte, sentiers de randonnée, et l'Etat devrait accorder une dotation supplémentaire aux pays ayant obtenu ce label.

Enfin, n'oublions pas l'apport considérable des villes de congrès et de tourisme d'affaires, qui apportent du travail et créent des revenus pendant le reste de l'année plus que pendant la saison estivale.

Cette organisation territoriale de notre économie touristique, soutenue par les efforts de promotion d'une hôtellerie remarquable, des comités départementaux et régionaux du tourisme, favorisée par un meilleur aménagement des temps de vie devrait développer l'attrait touristique de toutes nos régions, au profit de tous les Français. Cette politique s'inscrit parfaitement dans la politique européenne de développement durable que nous souhaitons tous (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL).

M. Michel Meylan - La France demeure la première destination touristique au monde, et nous nous en réjouissons. Pour autant, les attentats, les perspectives de récession, le passage à l'euro, l'application des 35 heures, l'augmentation des charges préoccupent fortement les professionnels. Face au net recul de la fréquentation des touristes étrangers depuis septembre, le Gouvernement vient d'annoncer des mesures urgentes de report de charges, fiscales et sociales, en faveur des entreprises du tourisme particulièrement touchées par la crise liée aux attentats. Sont-elles aujourd'hui effectives ?

Une mission d'évaluation des pertes de ce secteur a été confiée à l'inspection générale du tourisme. Elle complète l'étude, menée actuellement, par la Commission européenne. Quel est le degré d'avancement de ces travaux et vers quelles conclusions s'oriente-t-on ? Enfin, le Gouvernement a décidé de lancer une campagne de promotion internationale du « produit France » pour de 30 millions de francs. Sur quelle ligne budgétaire sera inscrite cette opération ? Il ne faudrait pas redéployer les crédits de « Maison de France » au détriment d'actions de promotion déjà programmées, comme celles prévues en faveur de la montagne.

Dans ce contexte difficile, votre budget du tourisme pour 2002 augmente si légèrement qu'il s'agit en fait d'une reconduction de crédits qui ne permettra pas de pérenniser les actions de développement touristique. Aucun moyen supplémentaire n'est envisagé pour financer les mesures qui seront nécessaires suite aux conclusions de la Commission européenne - attendues le 26 novembre prochain - et de la mission d'évaluation que vous venez de mettre en place.

Dans ce contexte morose, l'élu d'un département montagnard que je suis a un motif de satisfaction : la décision de l'ONU, de faire de 2002 l'année internationale des montagnes. Il faut saisir cette formidable chance pour améliorer notre offre touristique. Le tourisme en montagne représente 60 milliards francs de chiffre d'affaires, dont 30,5 milliards pour la seule région Rhône-Alpes. Il fait vivre près de 180 000 salariés dont 80 000 saisonniers. La Haute-Savoie, enregistre plus du quart de la fréquentation touristique régionale. Aussi les élus et les professionnels du tourisme haut-savoyard attendent, en 2002, des initiatives concrètes. Ainsi, il faut agir face aux conséquences désastreuses du manque d'enneigement dans les stations de moyenne montagne, dont beaucoup ont dû fermer leur domaine skiable en pleine saison - le 15 février par exemple pour la station de Cordon ! Le récent rapport sur le développement durable de la moyenne montagne préconise l'élaboration d'un plan sur trois ans et la création d'une mission nationale chargée de piloter ce plan d'actions, ainsi que la réhabilitation de l'hébergement touristique de montagne. La multiplication des normes d'hygiène et de sécurité impose dans ce domaine des investissements lourds. Or, les moyens accordés par l'Etat dans les contrats de plan Etat-région 2000-2006 demeurent encore insuffisants pour consolider une offre touristique de qualité. Ils devraient être renforcés par l'instauration de prêts à taux zéro pour l'hébergement en tourisme rural et de prêts bonifiés en faveur des PME du tourisme. Le plan patrimoine, qui accorde des aides à l'investissement pour la rénovation des hébergements touristiques à caractère social et familial, devrait être accompagné d'une politique volontariste en faveur du développement des classes de découvertes et des centres de vacances. En Haute-Savoie, la fréquentation des groupes d'enfants est, en 2000, inférieure de 5 % à 1999. Le dispositif « villages résidences de tourisme », très attendu, vient d'être mis en application. Quel est le nombre d'opérations en cours , quelles sont les perspectives de développement ?

Enfin, la question de l'emploi touristique n'est pas résolue. L'offre de logements pour les saisonniers reste insuffisante malgré les efforts de votre ministère. Les « doubles actifs » n'ont toujours pas de statut, les entreprises ont du mal à trouver du personnel qualifié et le Gouvernement refuse toujours la baisse de la TVA pour l'hôtellerie-restauration. Bien que votre arrivée soit récente, j'espère, Monsieur le ministre, que vous pourrez me répondre sur ces différentes questions.

En l'état, ce budget pour 2002 ne rassure pas les professionnels d'un secteur pourtant dynamique. Le groupe DL ne le votera pas (Applaudissements sur les bancs du groupe DL, du groupe du RPR et du groupe UDF).

M. Jean-Pierre Dufau - Monsieur le ministre, au nom du groupe socialiste et en mon nom, je vous félicite pour votre entrée au Gouvernement. Je suis persuadé que vous saurez prolonger l'action efficace de Michelle Demessine dont le travail a été unanimement apprécié. De fait, ce projet de budget que vous présentez marque la volonté de structurer une politique touristique ambitieuse pour la France.

Le tourisme représente 7 % du PIB, 2 millions d'emplois directs et indirects répartis sur 215 000 entreprises dont 94 % ont moins de 10 salariés. Nous accueillons 75 millions de touristes étrangers contre 52 millions il y a dix ans pour une consommation qui avoisine les 800 milliards de francs. Le tourisme est le premier poste d'excédent de notre balance commerciale. Pourtant la concurrence s'organise et il faut être vigilant.

Je ne parlerai que du tourisme pour tous et de la promotion du potentiel touristique français ; mes collègues Marie-Françoise Perol-Dumont et Jean Launay interviendront en complément au cours du débat.

Donner à tous l'accès aux vacances constitue une priorité sociale du Gouvernement qui se situe dans la ligne des congés payés de 1936. Il s'agit d'une conquête sociale concrétisée par la loi du 12 juillet 1999 sur l'extension des chèques vacances et par la loi contre les exclusions du 29 juillet 1998. Le budget du GIP « Bourse solidarité-vacances » est passé de 2,8 millions de francs en 2000 à 4,2 millions en 2001 et 20 000 personnes en grande difficulté ont bénéficié de ce dispositif.

Mais votre secrétariat d'Etat a aussi consacré 200 millions à la revalorisation du tourisme social et associatif. Le plan patrimoine 2001-2006, pour lequel vous avez prévu un financement de 240 millions, va être engagé. Enfin, la mise en place d'une coordination nationale est une mesure utile, demandée lors des états généraux du tourisme social et associatif de mai 1999.

Les campagnes de mobilisation et la création du label national « tourisme et handicap » témoignent de votre volonté de refuser l'exclusion et de faire du tourisme un facteur d'intégration sociale.

Avec le passage aux 35 heures et l'allongement de la durée de la vie, notre volonté d'offrir à l'ensemble de nos concitoyens le droit aux vacances et aux loisirs commence à porter ses fruits. Chacun a droit aux vacances, c'est une question de dignité.

Cette priorité est tout à fait compatible avec le développement de l'économie touristique, dont personne ne conteste l'importance.

Pour la promotion du potentiel touristique français ont été dépensés 180 millions en 2001, un poste en hausse de 45,2 % par rapport à 1998. Vous avez donné au GIE « Maison de la France » les moyens d'une politique efficace à l'étranger.

Sur le modèle de la campagne « Bonjour », il faut restaurer l'image touristique des régions touchées par la marée noire et les intempéries. Le contexte international rend ces actions plus nécessaires que jamais.

Mais il faut aussi continuer à connaître la réalité touristique pour mieux affronter la concurrence. Le rôle de l'AFIT est essentiel. Les crédits consacrés à cet organisme, qui ont augmenté de plus de 80 % en 5 ans, sont bien utilisés. Conforter un tourisme moderne par l'analyse, l'évaluation et l'adaptation est un gage de compétitivité.

La diversité de notre territoire reste notre meilleur atout : le thermalisme, la valorisation du littoral et de la montagne, le tourisme vert, le tourisme d'affaires et le tourisme urbain ne sont pas antinomiques mais complémentaires.

A ce titre, la politique de coopération intercommunale, la création des pays doivent, à travers les contrats de plan, donner au tourisme sa juste place.

Le tourisme est avant tout une activité de rencontre et d'échange. Il renforce nos relations multilatérales avec les pays du Maghreb, les Caraïbes, l'Océan Indien et l'Asie Pacifique. En ces temps troublés, il peut être un facteur de paix, de respect, de fraternité entre les peuples. Ce n'est pas son moindre intérêt.

Votre budget augmente de 2,51 % et vos priorités sont aussi les nôtres. C'est pourquoi le groupe socialiste votera ce budget (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste).

M. le Président - Je donne maintenant la parole à M. le Doyen Charles Ehrmann... (Applaudissements sur les bancs du groupe DL et sur divers bancs)

M. Charles Ehrmann - Il est difficile de parler du tourisme, tant les contours de cette activité sont mal définis. L'Etat ne lui consacre que 500 millions. Vous dites que vous avez doublé le budget du tourisme, mais le montant initial était si faible que cela ne change pas grand-chose. J'aurai la même attitude qu'hier sur le sport, je ne le voterai pas.

Heureusement, les régions interviennent aussi, dans le cadre des contrats de plans Etat-région il est vrai. Les départements s'efforcent de mettre en valeur leur arrière-pays. Les villes font le plus gros effort, en construisant des palais des congrès ou en soutenant l'hôtellerie. Enfin, les particuliers jouent un rôle important, y compris les étrangers qui achètent en France.

L'activité touristique constitue un ensemble disparate et les chiffres varient considérablement selon les sources. On parle de 697 millions de voyageurs dans le monde, dont 402 en Europe. Dans vingt ans, leur nombre dans le monde devrait tripler et, en Europe, doubler. Le tourisme en France représenterait 2 millions d'emplois directs et indirects et 7 % du PIB. J'aimerais bien savoir sur quoi se fondent ces chiffres.

Accueillant 75 millions de touristes étrangers, soit 10,8 % des voyageurs, la France demeure la première destination mondiale, mais elle ne recueille que 6,35 % des recettes.

Il n'est pas possible d'étudier le tourisme globalement, car 20 % du territoire accueillent 80 % des touristes. Je me contenterai d'évoquer la Côte d'Azur, où je vis depuis 1937. Il s'agit du deuxième centre touristique français après Paris. Cette zone de 100 kilomètres qui va d'Hyères à Menton bénéficie de conditions naturelles particulièrement favorables, mais elle souffre de son éloignement, d'autant que le TGV a écourté les distances entre Paris et d'autres régions. La Côte d'Azur est en outre peu accessible depuis la zone économique rhénane. Elle manque enfin de terrains plats, ce qui renchérit l'immobilier.

Depuis 1945, la population est passée de 500 000 à un million, avec l'arrivée des pieds noirs et d'un nombre croissant de rentiers. La population française, dans la même période, n'a augmenté que de 60 %. Le tourisme est la première ressource des Alpes-Maritimes. Grâce à l'aéroport, nous accueillons maintenant 10 millions de personnes. Nous manquons cruellement d'infrastructures. Il faut créer des routes et creuser des tunnels. Le passage aux 35 heures pose de gros problèmes aux PME. La baisse des impôts est une obligation. Les impôts locaux sont très élevés, si bien que certains fonctionnaires ne veulent pas venir chez nous.

Enfin, la bonne santé du tourisme sur la Côte d'Azur tient aussi au degré de sécurité et au maintien de la paix.

Depuis le 11 septembre, la fréquentation a diminué de 30 à 40 %. Je souhaite que la guerre en Afghanistan ne dure pas longtemps et n'ait pas de suites biologiques. Ce v_u de votre doyen est aussi celui des Français (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF, du groupe du RPR et du groupe DL).

Mme Nicole Ameline - Avec 75 millions de touristes, la France reste la première destination mondiale. C'est le résultat des efforts réalisés par les professionnels du tourisme, les collectivités locales et les associations. Le chiffre d'affaires s'élève à 318 milliards de francs et la venue des touristes étrangers apporte un excédent de 100 milliards.

Mais ce constat encourageant ne doit pas faire oublier une réalité très contrastée. Les professionnels, confrontés à une concurrence de plus en plus intense, doivent en outre supporter de nouvelles charges et de nouvelles contraintes.

Malgré son attractivité, la France ne retire pas du tourisme autant de recettes, proportionnellement, que certains de ses concurrents, comme l'Espagne. En outre, le nombre des départs en vacances baisse chez les Français, pour la troisième année consécutive.

A l'inverse, un nombre croissant de nos compatriotes choisissent de passer leurs vacances à l'étranger. C'est d'autant plus préoccupant que l'arrivée sur le marché intérieur de grands voyagistes d'Europe du Nord risque de détourner de la Méditerranée une grande partie de la clientèle à petit budget.

Enfin, les événements survenus depuis le 11 septembre ont réduit de 25 % les intentions de séjour des étrangers. Or votre budget est trop modeste pour vous permettre de réagir.

Des mesures d'urgences ont été prises et elles sont utiles, mais les professionnels du tourisme souhaitent d'autres avancées, comme la réduction du taux de TVA sur la restauration traditionnelle. Les dérogations se multiplient en Europe, mais le ministre des finances s'oppose à cette mesure. Trop d'impôt tue l'impôt. L'inéquité de taxation entre la restauration traditionnelle et les fast-food pénalise un secteur potentiellement créateur d'emplois.

La modification de la loi Godart va changer considérablement les modalités de rétribution de milliers de salariés.

Les 35 heures obligeront certains établissements à fermer certains jours dans la semaine ou du moins les empêcheront de fonctionner de manière optimale.

Enfin, comptez-vous intervenir dans la difficile négociation qui a lieu entre les casinos de France et le ministère des finances ? Formation qualifiante, 35 heures, statut des double-actifs, remise à niveau du parc immobilier sont autant de préoccupations pour ce secteur. Le problème est d'ordre réglementaire plus que financier. La solution relève de la volonté politique de soutenir un secteur qui fait vivre des centaines de milliers de salariés et des régions entières.

Le secteur du tourisme a besoin d'un autre regard. Il faut libérer les initiatives, conforter les chefs d'entreprise pour développer ses potentialités multiples. Puisqu'il souffre d'un problème aigu de recrutement, il faut y attirer les jeunes en développant des carrières plus ouvertes et mieux rémunérées. Il faut aussi mettre l'accent sur la décentralisation et sur le rôle, aux côtés de l'Etat, des régions et des départements, des Pays. Si ce Gouvernement a poursuivi des buts louables, il n'a pas su engager une politique d'ensemble propre à conforter notre position de première destination mondiale. Là encore, on peut regretter que les années de croissance n'aient pas été mises à profit. C'est pour cette raison que nous ne nous associerons pas au vote de ce budget.

M. Ollier prend place au fauteuil présidentiel.

PRÉSIDENCE de M. Patrick OLLIER

vice-président

M. Jacques Brunhes, secrétaire d'Etat au tourisme - Je voudrais d'abord dire combien j'ai été sensible à l'hommage que vous avez rendu à Mme Demessine, tant à sa personne qu'à ses résultats. Permettez-moi aussi de saluer nos rapporteurs, dont la somme des travaux depuis cinq ans constitue une _uvre remarquable. Elle retrace par ailleurs les effets considérables que le Gouvernement a entrepris depuis 1997. J'ai bien entendu qu'il n'aurait pas su profiter des années d'embellie, mais c'est oublier que l'action en faveur du tourisme ne se retrouve pas seulement dans le budget du secrétariat d'Etat. Il n'est que de mentionner les contrats de plan Etat-région. N'étant au Gouvernement que depuis quelques jours, je suis frappé de voir que tous les secteurs du tourisme remarquent cet effort. La meilleure preuve en est l'accueil réservé récemment à Mme Demessine et au Premier ministre par le Conseil national du tourisme.

Le budget que nous examinons aujourd'hui est en augmentation de 2,5 %. Surtout, il aura été multiplié par deux depuis le début de la législature. Sans être malicieux, je ne peux que remarquer que le précédent gouvernement n'a connu que le passage éclair d'un ministre du tourisme et s'est contenté ensuite d'un conseiller technique au ministère de l'équipement ! Que le Premier ministre, après la brillante élection de Mme Demessine au Sénat, ait nommé un nouveau secrétaire d'Etat au tourisme marque bien sa volonté d'agir dans ce secteur.

M. Jean-Pierre Dufau - Très bien !

M. le Secrétaire d'Etat - Si le budget tient peu de place dans le budget d'ensemble de l'Etat, l'activité est importante : 75 millions de touristes, qui consomment pour 120 milliards d'euros, soit le premier poste d'excédent de la balance des paiements, 7 % du PIB, deux millions d'emplois directs et induits. Depuis 1999, 30 000 emplois ont été créés par an dans l'hôtellerie et la restauration. Outre son importance économique, le rôle du secteur est désormais reconnu au regard de l'aménagement du territoire et de la cohésion sociale. Pourtant, il traverse aujourd'hui une période difficile. Les tragiques événements du 11 septembre ont créé une situation préoccupante. Tout n'est pas mauvais. La saison de Noël par exemple s'annonce bonne, voire excellente.

M. le Rapporteur spécial - Nous le souhaitons !

M. le Secrétaire d'Etat - Les vacances de la Toussaint ont montré un fort développement du tourisme rural. En revanche, les agences de voyage, le tourisme d'affaires, les tours-opérateurs, le tourisme de luxe sont directement affectés et avec eux bien d'autres secteurs.

Le Gouvernement s'est donc immédiatement mobilisé. Des mesures ont été annoncées le 17 octobre par le Premier ministre. Sur le plan fiscal, des délais de paiement des cotisations et des remises gracieuses des pénalités de recouvrement sont prévues. Les services fiscaux examineront avec une particulière bienveillance les demandes de remises gracieuses d'impôts directs lorsque les requérants se trouveront dans l'incapacité avérée de faire face à leurs échéances.

En ce qui concerne les charges sociales, leur paiement sera reporté, après examen au cas par cas. Le remboursement des allégements de charges sociales est suspendu pour les entreprises ayant différé la réduction du temps de travail à cause des difficultés actuelles.

Les entreprises peuvent également bénéficier de mesures de chômage partiel afin d'éviter de recourir au licenciement économique.

Ces mesures sont particulièrement importante et les circulaires d'application sont parues seulement 12 jours après qu'elles ont été annoncées. Nous approchons du record ! Si des difficultés d'application devaient survenir, j'ai prévenu tous les intéressés qu'ils pouvaient s'adresser directement à mes services, qui interviendront auprès des directions départementales du travail, de l'emploi et des services fiscaux. Quant à savoir si elles seront suffisantes, il est encore trop tôt pour le dire. La visibilité est particulièrement mauvaise. Des moyens d'évaluation ont donc été mis en place. Une cellule de veille a été constituée dès le 13 septembre par Mme Demessine, que j'ai réunie dès ma prise de fonctions. L'inspection générale du tourisme a été chargée d'une mission d'évaluation. Ses premières conclusions seront connues cette semaine et son rapport à la fin du mois. L'Union européenne a elle aussi mandaté une mission, qui rendra ses conclusions fin novembre. Ce n'est qu'après que nous pourrons prendre des mesures correctrices.

Le tourisme est en grande partie fondé sur la confiance, et nous devons nous donner les moyens de la restaurer rapidement. C'est la raison pour laquelle le Premier ministre a également annoncé une campagne de promotion de la destination France, menée sous l'égide de Maison de la France.

Je tiens à vous rassurer tous : cette action exceptionnelle, sera financée par des moyens exceptionnels, et non par un redéploiement de crédits.

J'ai été frappé par la rapidité avec laquelle les offices de tourisme et les comités départementaux et régionaux ont réagi à la crise. C'est ainsi que le Périgord et la région Provence-Alpes-Côte-d'Azur ont dépêché des représentants à New York, et que l'office de tourisme de Paris a pris des initiatives immédiates. Je me félicite de cette efficacité.

J'ajoute que la crise doit nous pousser à engager une réflexion nouvelle. Certes, nous ferons tout pour ramener vers nous ces touristes à haute contribution que sont les Américains et les Japonais, et la reprise des vols du Concorde, ce matin, contribuera à ce mouvement, j'en suis certain. Mais cela ne doit pas nous empêcher de constater que le tourisme en France intéresse davantage nos voisins européens : Anglo-saxons, Scandinaves et Russes viennent désormais davantage, et pour des séjours plus longs. La situation est donc contrastée, et le paysage touristique se modifie. Pour avoir présidé la réunion de la cellule de veille, je peux témoigner du dynamisme des propositions qui y ont été formulées. C'est un gage de réussite, car tout « fixisme » dans les idées stériliserait la réflexion et donc l'action. Sachons, donc, faire du neuf, tout en poursuivant les actions, engagées par Mme Demessine.

Le projet de budget pour 2002, illustre cette volonté, avec une augmentation de 52 % pour les moyens d'engagement, et de 43 % pour les moyens de paiement par rapport au budget 1998.

Si l'on ajoute les sommes correspondant aux avenants « tempêtes » et « marée noire », qui seront discutés lors de l'examen de la loi de finances rectificative, le budget global est de 641 millions de francs, soit une progression de 84 % sur la même période.

Cette augmentation confirme les orientations stratégiques retenues depuis cinq ans, et permet en premier lieu de développer encore l'accès aux vacances pour tous, qui est l'une de nos priorités.

Votre rapporteur spécial a indiqué que le nombre des départs en vacances déclinait. Il est exact qu'ils étaient légèrement plus élevés en 1999 qu'en 2000 ; cette baisse tient principalement aux difficultés que rencontrent les jeunes chômeurs. Il s'agit donc d'un problème de fond, qu'aucune politique de tourisme ne réglera à elle seule. Pour autant, le Gouvernement s'attache à favoriser l'accès de tous aux vacances.

Cette priorité se voit confirmée, en 2002, par le montant des crédits accordés au secteur social et associatif, qui s'élèvent à 18,5 millions de francs, en progression de 12,1 % par rapport à 2001 et de 164 % par rapport à 1998.

Ces crédits seront destinés, en premier lieu, à renforcer le dispositif « Bourse solidarité vacances » pour permettre, en 2002, le départ en vacances de 30 000 personnes défavorisées, contre 20 000 cette année.

La dotation 2002 sera également affectée aux conventions d'objectifs que l'Etat signera avec les associations du tourisme social et aux actions en faveur des personnes handicapées.

De plus, l'année 2002 verra le lancement d'un nouveau programme de consolidation de l'hébergement de tourisme social qui donnera un nouvel essor au plan Patrimoine. La dotation budgétaire, qui s'élève à 27 millions de francs, est à la mesure de l'enjeu.

Le droit aux vacances pour tous se traduit également par l'accès aux chèques-vacances des salariés aux revenus modestes travaillant dans les PME de moins de 50 salariés. Cette nouvelle disposition fait du chèques-vacances un véritable instrument de politique sociale.

Afin de permettre à un plus grand nombre de salariés de bénéficier du droit aux vacances, le Gouvernement, comme vous le souhaitez, Monsieur Bouvard, propose l'augmentation du revenu fiscal de référence. Pour être efficace, l'augmentation devra être significative.

Se trouvera ainsi confirmée l'efficacité économique et sociale d'un dispositif qui a permis le départ en vacances de plus de 4 millions de personnes.

Enfin, pour favoriser l'intégration des personnes handicapées sur les lieux de vacances, un label « tourisme et handicap » a été mis au point.

M. le Rapporteur spécial - Très bien !

M. le Secrétaire d'Etat - Le second axe de notre action concerne la participation à l'amélioration des conditions de travail des salariés du secteur hôtellerie-cafés-restaurants.

Déjà des progrès ont été accomplis avec la réduction du temps de travail et la reconnaissance des travailleurs saisonniers.

A ce jour, 200 000 salariés du tourisme, sur le million d'emplois directs recensés, bénéficient de la réduction du temps de travail.

Dans le secteur des hôtels-cafés-restaurants, un accord a été conclu le 15 juin 2001 par les principales organisations syndicales et par deux organisations patronales.

Pour rapprocher rapidement les points de vue des signataires et des non-signataires de l'accord, un médiateur a été nommé. L'Etat souhaite accompagner ce processus, notamment en matière de formation et d'aides au recrutement.

Vous connaissez également l'engagement du secrétariat d'Etat en faveur des saisonniers du tourisme. Mme Demessine a fait beaucoup en ce domaine.

C'est ainsi qu'un plan d'action en quinze mesures a été présenté le 9 février 2000 au conseil des ministres. Plusieurs maisons des saisonniers existent déjà. L'objectif pour 2002 est d'en doubler le nombre.

Un plan d'action en faveur du logement des saisonniers sera lancé dans les dix départements les plus concernés, après concertation entre les préfets et l'ensemble des partenaires. Des propositions seront faites dans les tout prochains jours.

Par ailleurs, le secrétariat d'Etat a diffusé à plus de 100 000 exemplaires un document d'information destiné aux saisonniers.

J'ai enfin demandé à l'Inspection générale du tourisme un rapport d'étape sur la mise en _uvre des mesures de février 2000. Il me sera remis dans quelques semaines et permettra d'envisager d'éventuelles mesures nouvelles.

Vous nous avez dit, Monsieur Meylan, votre attachement à la pluriactivité. Elle suppose des formations, que la validation des acquis facilitera, tout comme l'article 21 de la loi d'orientation sur la forêt, et la faculté de constituer des groupements d'employeurs, comme il en existe déjà en Bretagne et en Savoie. Croyez bien qu'originaire du Cantal, ces questions m'intéressent tout particulièrement.

Près de 8 000 embauches d'emplois-jeunes sont intervenues d'octobre 1997 à mars 2001 au titre du programme « nouveaux services - nouveaux emplois ». Le secrétariat d'Etat a souhaité donné la priorité aux actions garantissant la pérennisation des emplois ainsi créés. A cet effet, un dispositif particulier a été mis en place.

Plus généralement, l'industrie touristique doit disposer de personnel qualifié, et le secrétariat d'Etat a souhaité accompagner les professionnels dans cette démarche.

C'est ainsi que, comme vous le savez, Monsieur Couve, la rentrée 2001 a vu la création de deux BTS tourisme, qui permettront de mieux préparer l'évolution du tourisme. C'est un premier pas satisfaisant.

Par ailleurs, les branches professionnelles du secteur ont fait l'objet de contrats d'études prospectives qui leur permettront de déterminer l'évolution des emplois et des qualifications.

Le secteur du tourisme permet l'insertion de nombreux jeunes mais il souffre également d'un fort taux de départs. C'est pour tenter d'y remédier que nous recherchons une meilleure adéquation entre formation et emploi. Mais je suis convaincu qu'une des clefs de la fidélisation des salariés se trouve dans l'amélioration des conditions de travail et de rémunération.

J'en viens à la participation active du tourisme à l'aménagement du territoire et à sa contribution au développement économique local, dont vous êtes nombreux à vous préoccuper, d'autant que 80 % de la fréquentation touristique se concentrent sur 20 % du territoire.

Les contrats de plan Etat-régions jouent un rôle essentiel dans la diversification et l'adaptation de l'offre touristique. C'est pourquoi les crédits consacrés au tourisme dans ces contrats ont été multipliés par quatre.

Pour mieux répartir les flux touristiques sur le territoire, le secrétariat d'État au tourisme a pris deux mesures importantes.

La première porte sur la création des Villages résidentiels de tourisme, le secrétariat d'État au tourisme, la DATAR et la Caisse des dépôts ayant passé une convention en vue de mener des opérations pilotes.

Par ailleurs, un dispositif d'aide à l'immobilier spécifique à l'investissement locatif dans les résidences de tourisme, communément appelé amortissement Demessine, a été institué par la loi de finances rectificative pour 1998.

Le Parlement l'a étendu géographiquement aux zones rurales de l'Objectif 2. Le décret est prêt, Monsieur Bouvard, il devrait sortir dans les prochains jours. Ceci montre bien l'intérêt du dispositif...

M. le Rapporteur spécial - Il faut le prolonger !

M. le Secrétaire d'Etat - En effet, le Premier ministre a annoncé le 17 octobre dernier sa prolongation pour deux ans, jusqu'à fin 2004.

    Je connais, Monsieur Deprez, votre attachement à un tourisme des quatre saisons. Je partage votre préoccupation et je suis persuadé que la réduction de la durée du travail et le développement des courts séjours jouent dans ce sens. Nous travaillons beaucoup, avec la DATAR, sur les liens entre pays et tourisme. L'ensemble des mesures que je viens d'énumérer, ainsi que notre engagement en faveur des salariés saisonniers témoignent de notre volonté de développer une activité touristique tout au long de l'année et sur l'ensemble du territoire et de soutenir la pluri-saisonnalité.

La consolidation de la capacité d'intervention de l'État porte essentiellement sur la prospective et sur l'ingénierie du tourisme. Dépassant de 80,5 % celle de 1998, la dotation 2002 pour les études permettra de réaliser l'enquête aux frontières, de créer un dispositif permanent d'observation des flux des touristes non-résidents, de prolonger les enquêtes sur le suivi des déplacements des Français et la fréquentation de l'hôtellerie et du camping.

De son côté, l'Agence française de l'ingénierie touristique se voit aussi accorder des moyens financiers importants, en progression de 81,4 % en cinq ans. Ainsi pourra-t-elle approfondir les études de projets et l'ingénierie financière au service des collectivités territoriales.

L'effort de promotion de la France à l'étranger et en France est essentiellement porté par le GIE Maison de la France, qui bénéficiera bien d'une dotation exceptionnelle de 30 millions. Malgré quelques difficultés, je confirme que notre volonté est de créer de nouveaux sites, et non d'en fermer.

J'ai été très attentif à ce qu'a dit M. Bouvard et je confirme la volonté du secrétariat d'Etat au tourisme de rendre l'intervention publique plus efficace hors de nos frontières.

Afin de répondre à la diversité de l'offre touristique, le serveur Résinfrance facilitera la réservation en temps réel pour les professionnels.

Mais je ne souhaite laisser aucun sujet dans l'ombre et je répondrai donc à tous ceux qui m'ont interrogé sur la TVA. Cette question récurrente est, à l'évidence, de la compétence de plusieurs ministères, en particulier celui des finances.

M. Michel Meylan - Ce sont des mauvais !

M. le Secrétaire d'Etat - Elle doit aussi être traitée au niveau européen car les effets d'une non-harmonisation des taux pourraient être terribles.

Le coût de cette mesure - de 15 à 30 milliards -...

M. le Rapporteur spécial et M. Jean-Michel Couve - C'est faux !

M. le Secrétaire d'Etat - ...ne peut non plus être ignoré, pas plus que le fait que Bercy étudie d'autres mesures favorables à ce secteur, comme la réduction des charges, qui encouragerait l'embauche.

Pour autant, je me refuse à considérer que le débat est clos. D'autres analyses, d'autres chiffrages doivent nous permettre de décider vraiment en toute connaissance de cause. Disant cela, je n'ai pas l'impression de rompre la solidarité gouvernementale, je constate simplement que la Commission européenne elle-même doit rendre une nouvelle étude avant 2002.

M. Forni prend place au fauteuil présidentiel.

PRÉSIDENCE de M. Raymond FORNI

    M. le Secrétaire d'Etat - Depuis cinq ans, la politique du tourisme bénéficie d'une attention particulière et nouvelle de la part du Gouvernement. Ce budget s'inscrit dans cette logique que la crise actuelle nous invite à suivre davantage encore. Avec ces nouveaux moyens, j'entends poursuivre les efforts engagés pour la surmonter, avec vigilance et avec une confiance raisonnée.

    J'entends également continuer à conforter l'activité touristique de notre pays, fondée sur sa diversité culturelle et la richesse de ses relations humaines. Car le tourisme n'est pas seulement une activité économique, il est porteur des valeurs universelles de rencontres, d'échanges et de paix (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et du groupe socialiste).

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QUESTIONS

    M. Patrick Ollier - Comme le souhaitaient les élus de la montagne, le Gouvernement a engagé le 9 février 2000, à l'initiative de Mme Demessine, un programme d'actions en faveur des travailleurs saisonniers, qui prévoyait notamment le développement de maisons des saisonniers.

    Dans ce cadre, Serre-Chevalier a été retenu comme site pilote pour une expérience en partie financée par votre ministère et la démarche a été engagée à la Salle-les-Alpes-Serre-Chevalier, commune dont j'étais alors le maire.

Nous avons voulu faire de cette « maison des saisonniers » un lieu ouvert à l'accueil, au conseil et à l'information des saisonniers sur les problèmes qu'ils rencontrent dans leur vie quotidienne, notamment tous les aspects liés à la pluriactivité. Nous l'avons aussi conçue comme un lieu de réflexion et de concertation destiné à favoriser la pluriactivité.

Cette expérience a été très efficace. La Maison des Saisonniers a ainsi accueilli la saison passée plus de 2000 personnes, auxquels elle a apporté des réponses concrètes en termes de logement, d'emploi et de formation. Devant ce succès, nous avons décidé de poursuivre l'expérience, en y intégrant la création d'un guichet unique et d'une antenne délocalisée de l'ANPE, le recensement de tous les logements disponibles en saison, ainsi qu'un programme pluriannuel de formation. Il faut maintenant que la Maison des saisonniers occupe ses locaux définitifs à Serre-Chevalier et que son fonctionnement soit pérennisé.

Mme Demessine m'a indiqué cet été que les crédits en faveur de la Maison des saisonniers de Serre-Chevalier seront reconduits pour 2001-2002 et que 3,5 millions de francs seraient consacrés à la construction du bâtiment définitif à la Salle-les-Alpes.

Pouvez-vous me confirmer ces engagements ?

D'ailleurs je serais heureux, avec mon successeur, le maire de La Salle-les-Alpes-Serre-Chevalier, de vous recevoir bientôt dans notre station pour visiter cette maison des saisonniers de France.

Au niveau national, quel dispositif à long terme entendez-vous prendre en faveur des travailleurs saisonniers ?

Enfin, quels moyens sont prévus pour la généralisation à d'autres régions de l'expérience fructueuse menée à Serre-Chevalier ?

M. le Président - Monsieur le ministre, dites-nous si vous savez slalomer, afin de ne pas prendre de risques en allant à Serre-Chevalier ! (Sourires)

M. le Secrétaire d'Etat - Non seulement j'ai déjà fait du ski, mais je connais tous les sentiers de certaines régions des Hautes-Alpes, où j'ai quelques attaches familiales !

Le Premier ministre a annoncé, lors des assises nationales du tourisme, que le nombre de maisons des saisonniers allait doubler d'ici fin 2002. Le mouvement initié il y a un an, notamment à votre initiative, Monsieur le député, prend beaucoup d'ampleur. J'ai donc pris connaissance avec beaucoup d'intérêt des résultats exceptionnels et des enseignements à tirer de l'expérience de la maison de Serre-Chevalier. Je vous confirme mon entier soutien à la pérennisation de ce projet et le respect des engagements financiers pris.

Plus généralement je ne manquerai pas de relayer vos réflexions auprès de mes collègues du Gouvernement. J'ai d'ailleurs confié à l'inspection générale du tourisme une mission sur les saisonniers en vue d'évaluer les dispositifs mis en place suite aux recommandations de M. Anicet Le Pors. Les résultats en seront connus dans les prochaines semaines.

M. le Président Ollier, j'accepte très volontiers votre invitation !

M. Patrick Ollier - Merci, Monsieur le ministre !

M. François Liberti - Monsieur le Secrétaire d'Etat, je salue votre nomination, ainsi que le travail accompli par votre prédécesseur, Mme Demessine. L'Etat avait été absent pendant des années de ce secteur, considérant que c'était au marché de réguler son activité. Le tourisme social et associatif était exsangue.

Depuis cinq ans, la politique du tourisme figure parmi les priorités du Gouvernement, comme en témoigne la progression des crédits de 1998 à 2002 : + 52,18 % pour les moyens d'engagement, + 43,41 % pour les moyens de paiement.

La France est la première destination du monde. Les flux touristiques vont tripler dans le monde et doubler en Europe. Le tourisme ne peut se développer que dans le cadre d'une éthique respectueuse des hommes, de l'environnement et des cultures.

Dans cet esprit, le Comité interministériel sur le tourisme avait défini des objectifs que nous partageons, notamment la réhabilitation des stations touristiques vieillissantes, la protection du littoral avec la reconquête du cordon dunaire, facteur important pour s'opposer à l'érosion en Languedoc-Roussillon, enfin la réduction de la précarité de l'emploi.

Quelles sont vos intentions sur ces points ?

M. Ollier succède à M. Forni au fauteuil de la présidence.

PRÉSIDENCE de M. Patrick OLLIER

vice-président

M. François Liberti - D'autre part, j'ai pris acte de vos propos concernant la TVA sur la restauration. Comme vous, je pense que ce n'est pas la seule mesure de soutien possible, même si la réduction des charges n'est pas toujours synonyme de création d'emplois. J'ai apprécié que vous déclariez que le sujet n'était pas clos, mais cela fait plusieurs années qu'il en est ainsi : quand ce dossier sera-t-il clos ?

Tout le monde s'accorde à reconnaître l'urgence d'une réduction de la TVA sur la restauration traditionnelle, non seulement par mesure d'équité, mais aussi comme incitation à l'embauche. Les professionnels avaient d'ailleurs fait l'an dernier des propositions concrètes pour lier la baisse de la TVA à des engagements de création d'emplois.

Certains pays européens ont déjà pris cette mesure. Il est donc temps d'avancer, sinon les professionnels du tourisme vous reprocheront notre inaction sur un point essentiel.

M. le Secrétaire d'Etat - Je vous remercie, ainsi que M. Patrick Malavieille, d'avoir souligné l'action positive du Gouvernement depuis cinq ans.

Le CIAT de Limoges du 9 juillet dernier a décidé de mettre en place trois missions d'aménagement du littoral associant développement et préservation. La mission Languedoc-Roussillon a été installée, avec l'appui du ministère de l'équipement, de la délégation à l'aménagement du territoire et du secrétariat d'Etat au tourisme. Elle abordera les points que vous avez évoqués, notamment la réhabilitation des stations vieillissantes à travers la convention Tourisme-DATAR-CDC.

En ce qui concerne la qualité de l'emploi touristique, nous travaillons depuis plusieurs années à l'amélioration de la situation sociale des salariés saisonniers.

Sur la TVA, je me suis déjà exprimé. Je prends note de votre intervention.

M. Félix Leyzour - J'avais prévu de vous poser une question sur l'extension du chèque vacances, notamment aux salariés des petites entreprises. J'ai enregistré avec satisfaction les propos que vous avez tenus à ce sujet dans votre intervention générale et il me paraît inutile d'y revenir (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Loïc Bouvard - Monsieur le ministre, je vous félicite de votre accession au Gouvernement. J'ai été heureux de vous entendre parler de tourisme avec autant de chaleur et d'assurance !

On l'ignore trop souvent, la Bretagne compte autant de kilomètres de rives fluviales que de côtes maritimes. Le canal de Nantes à Brest est comparable au canal du Midi et présente un grand potentiel de développement touristique. Le tourisme fluvial est de plus en plus apprécié de nos concitoyens et l'aménagement des rives contribue à faire de ces cours d'eau un lieu de détente privilégié. La Bretagne s'en préoccupe d'ailleurs.

Toutefois, un décret de 1932 limite la circulation le long des canaux aux chevaux de halage... Cette restriction n'a plus lieu d'être, il faut ouvrir la possibilité d'aménager des chemins piétonniers et des pistes cyclables le long des cours d'eau.

Envisagez-vous l'abrogation de ce décret de 1932 et la subdélégation de la police de l'eau aux régions ? Quels crédits entendez-vous dégager pour favoriser le développement du tourisme fluvial ?

M. le Secrétaire d'Etat - Je suis d'autant plus sensible à vos propos que jusqu'il y a 13 jours j'étais président du groupe d'études de l'Assemblée sur les voies d'eau ! Gennevilliers, vous le savez, est en effet un grand port fluvio-maritime.

Le tourisme fluvial est un facteur important d'aménagement du territoire. Il se développe rapidement en Bretagne, mais aussi sur le Lot, le Gers, la Garonne, le Cher et dans le Nord.

En ce qui concerne l'abrogation du décret de 1932, je ne puis vous répondre aujourd'hui, mais j'étudierai la question. Je ne suis pas sûr que ce texte soit vraiment un obstacle car des kilomètres de pistes cyclables ont déjà été aménagés sur les chemins de halage, notamment en région parisienne, le long du canal de l'Ourcq, par exemple.

Reste, il est vrai, à aménager les berges. Voies navigables de France est en charge de cette question, et y est très attentive. Je ne voudrais pas, bien sûr, que ce soit au détriment du développement économique de la voie d'eau, que nous utilisons bien peu par rapport à nos voisins. Mais le tourisme fluvial a de l'avenir dans presque toutes les régions.

M. Paul Patriarche - A la veille de quitter ses fonctions, Mme Demessine est venue au festival du vent à Calvi, qui connaît un succès croissant. Elle a cependant reconnu qu'il restait difficile de développer conjointement produits touristiques et lieux à vocation culturelle. Pourtant, de plus en plus de touristes ne veulent plus « bronzer idiots » mais diversifier leurs activités. L'offre culturelle aujourd'hui indispensable doit être diversifiée. Les communes la développent au mieux, mais l'aide des régions et des départements reste insuffisante en raison du coût élevé de ces manifestations. L'an dernier, Mme Demessine indiquait que ce développement passait par une synergie entre collectivités locales, ministère du tourisme et ministère de la culture. Nous en sommes d'accord, mais il semble que c'est surtout entre les ministères qu'elle n'existe pas. Comment allez-vous favoriser le développement de ce tourisme culturel, essentiel pour échapper à une activité seulement saisonnière ?

M. Léonce Deprez - Très bien.

M. le Secrétaire d'Etat - Mme Demessine a effectivement beaucoup apprécié ce festival. A l'évidence, la culture est un élément primordial de l'attrait touristique de la France, comme à l'inverse les touristes forment la masse des visiteurs de nos monuments et musées. On le constate bien à Paris.

La convention entre les ministères du tourisme et de la culture signée en 1998 a permis d'améliorer leur collaboration. Les synergies sont-elle suffisantes ? DRAC et DRT travaillent ensemble pour mieux prendre en compte les contraintes réciproques : de nombreux projets sont aujourd'hui instruits conjointement pour améliorer l'offre. Des initiatives locales nombreuses concourent à la mise en réseaux et au développement d'une stratégie de territoire autour par exemple des pays d'art et d'histoire ou de pôles d'économie du patrimoine.

Certes les mentalités et les pratiques progressent lentement. En 2001, des inspecteurs des deux ministères ont remis un rapport « tourisme et culture » à partir duquel on pourra mieux développer le tourisme culturel. Il existe des innovations, des projets ambitieux progressent grâce à l'action conjointe des deux ministères, comme le pôle international préhistoire en Dordogne et l'exposition internationale sur l'image de 2004 en Seine-Saint-Denis. On comprend mieux désormais que la valorisation du patrimoine et l'organisation de manifestations culturelles renforcent l'attrait touristique, et qu'en même temps prendre en compte la dimension touristique dès la conception d'un projet culturel est une condition de sa réussite.

Mme Marie-Françoise Perol-Dumont - Je salue d'abord le travail d'envergure réalisé depuis quatre ans avec le doublement du budget du tourisme, l'engagement de l'Etat dans les contrats de plan, l'action déterminante de votre prédécesseur : l'importance du tourisme a enfin été reconnue. Même si beaucoup reste à faire, nous nous félicitons de la mise en place d'une vraie politique touristique stimulant la complémentarité de l'action publique et de celle des professionnels autour des priorités que sont l'accès aux vacances pour tous, la promotion de notre image touristique, le soutien à l'industrie et à l'emploi, le développement et l'aménagement touristique durable du territoire.

Sur ce dernier point, si je me réjouis de l'installation d'une conférence permanente du tourisme en espace rural, il est urgent de mieux répartir les flux, donc l'offre : nos campagnes, qui ont tant d'atouts par leurs paysages ou leurs traditions, accueillent sur 70 % du territoire moins de 30 % des séjours, pour 20 % du chiffre d'affaires du secteur. Pourtant, le public cherche de plus en plus l'authenticité ; le Gouvernement souhaite concilier développement touristique et protection de l'environnement. Dès lors peut-on se satisfaire de la concentration des touristes dans des lieux déjà fragiles ? Ce serait la négation de l'idée même de développement touristique durable.

J'insiste donc pour que la dynamique engagée par Mme Demessine en faveur du tourisme rural soit amplifiée, même si cela ne dépend pas de votre seul ministère. Il faut encore désenclaver certaines régions en ce qui concerne les transports mais aussi le numérique - sur ce point le CIAT de Limoges a ouvert des perspectives bénéfiques.

De nombreux acteurs locaux s'interrogent pourtant sur la diversité des échelons territoriaux, de la région à la commune en passant par le département, la communauté, le pays. Il faudrait clarifier les responsabilités de chacun pour que cette pluralité soit une richesse et non un facteur de dispersion des interventions.

M. le Secrétaire d'Etat - Je vous remercie d'avoir souligné les résultats de l'action gouvernementale depuis cinq ans.

Vous avez raison, 80 % du territoire accueillent 29 % des séjours pour un peu moins de 20 % du chiffre d'affaires du secteur. Le tourisme rural reste faible alors que la France est belle, riche de ses paysages, de sa gastronomie, de sa culture. On peut vraiment le développer. Il se trouve qu'une crise comme celle que nous vivons y contribue certainement. Aux assises du conseil national du tourisme, des participants indiquaient un mouvement en ce sens, qu'on ne peut encore chiffrer . En tout cas l'attrait du tourisme vert s'est renforcé.

Mais il faut poursuivre la réflexion. Une des principales difficultés est l'atomisation des hébergements. Ces dernières années, a été mise en place la conférence permanente du tourisme rural, présidée par Jean-Louis Bianco. Elle a engagé des actions associant les ministères de l'environnement, de l'agriculture, la DATAR, des pays d'accueil, des parcs naturels régionaux et des stations vertes. Les cinq commissions dont s'est dotée la conférence permanente rendront des conclusions qu'il nous faudra mettre en _uvre.

Vous évoquez le problème que pose la multiplication des niveaux de responsabilité. Avant, c'était simple : il y avait la commune, le département, la région. De nouvelles strates apparaissent maintenant. Doit-il y avoir concurrence ? Nous souhaitons au contraire que les différentes actions soient complémentaires. L'intercommunalité permettra sans doute de résoudre les problèmes résultant de l'atomisation des lieux d'hébergement, qui seront traités à l'échelle adéquate.

M. Jean Launay - Je veux d'abord rendre hommage à l'action menée par Mme Demessine : la politique du tourisme est depuis cinq ans une priorité du Gouvernement ; la progression constante de ce budget en témoigne.

Monsieur le secrétaire d'Etat, il faut consolider les capacités d'intervention de la puissance publique. Au sein du Conseil national du tourisme, je m'efforce d'évaluer les efforts respectifs de l'Etat, des comités départementaux, des comités régionaux et des 215 000 PME du secteur.

De quels moyens disposez-vous pour améliorer l'information statistique et économique ? Nous ne pouvons nous borner à constater que nous sommes la première destination mondiale. De quels moyens allez-vous doter l'Agence française d'ingénierie du tourisme et lui donnerez-vous pour mission d'aider les territoires ruraux à développer leur offre ?

J'ai la conviction que, pour maintenir la fréquentation des vacanciers étrangers et français, il faut améliorer le savoir-faire.

Enfin, avez-vous une estimation des moyens alloués au tourisme par les autres ministères ? Il faudrait présenter l'ensemble des moyens de manière consolidée, ce qui nous permettrait d'identifier une véritable administration de mission.

M. le Secrétaire d'Etat - En présentant ce budget, j'ai déjà indiqué ma volonté de consolider les capacités d'intervention de l'Etat et évoqué les moyens de l'AFIT. Je n'y reviens pas. Toutefois, vous avez raison de vous interroger sur l'intervention d'ensemble de l'Etat qui s'exerce non seulement à travers la direction du tourisme et ses délégations régionales, mais aussi dans le cadre des contrats de plan. Il faut citer encore l'expertise à la demande des préfets de région ou l'action interministérielle sur certains projets.

Le rôle joué par les délégués régionaux est particulièrement important, mais cette profession n'est pas suffisamment reconnue. J'ai donc décidé de la doter d'un statut unifié. Cette question est étudiée au niveau interministériel et la réforme devrait aboutir avant la fin de la législature.

Enfin, vous avez évoqué la question de l'annexe budgétaire que nous appelons « le jaune ». Mme Demessine avait souhaité qu'un jaune donne une vision d'ensemble des actions relatives au tourisme. Un retard dans la procédure nous a empêché de disposer de ce document et je le regrette. Mes services ont déjà engagé les procédures administratives qui permettront, l'année prochaine, l'édition de ce jaune, dont je m'engage à adresser une préfiguration aux présidents de commission avant la fin de la législature.

M. le Président - Nous avons terminé les questions.

Les crédits du tourisme seront appelés à la suite de l'examen des crédits des transports.

La suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2002 est renvoyée à la prochaine séance, qui aura lieu cet après-midi, à 15 heures.

La séance est levée à 12 heures 40.

            Le Directeur du service
            des comptes rendus analytiques,

            Jacques BOUFFIER


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