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Session ordinaire de 2001-2002 - 24ème jour de séance, 58ème séance

2ème SÉANCE DU LUNDI 12 NOVEMBRE 2001

PRÉSIDENCE de Mme Nicole CATALA

vice-présidente

Sommaire

      LOI DE FINANCES POUR 2002 -deuxième partie- (suite) 2

      INTÉRIEUR (suite) 2

      QUESTIONS 11

      ÉTAT B 19

      Titre IV 19

      ÉTAT C - Titres V et VI 20

      APRÈS L'ART. 73 20

      SOLIDARITÉ, SANTÉ, ÉCONOMIE SOLIDAIRE 21

      PRISE D'ACTE DE LA VACANCE DES SIÈGES
      DE SEPT DÉPUTÉS ÉLUS SÉNATEURS 30

La séance est ouverte à quinze heures.

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LOI DE FINANCES POUR 2002 -deuxième partie- (suite)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2002.

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INTÉRIEUR (suite)

Mme la Présidente - Nous reprenons l'examen des crédits du ministère de l'intérieur.

M. Daniel Vaillant, ministre de l'intérieur - Depuis le début de l'année, la police nationale a été frappée à plusieurs reprises par des événements tragiques qui ont plongé des familles dans le deuil et bouleversé les policiers. Je partage les sentiments de révolte et d'incompréhension qu'ils ont suscités. Vous savez que je suis aux côtés des policiers, et l'ensemble du Gouvernement avec moi. Tous ces crimes odieux ont été élucidés et leurs auteurs déférés devant la justice. J'espère que leurs sanctions seront à la hauteur de ces actes inqualifiables. Il ne faut pas céder à la fatalité et considérer que de tels assassinats ne sont que les risques du métier. Il est beaucoup demandé à la police, que ce soit au quotidien ou dans les circonstances exceptionnelles que nous vivons en ce moment. Sa mission est grande et noble. Sans elle, démocratie et liberté ne seraient pas. La police a profondément modifié son mode de travail et son organisation pour être plus proche des besoins de nos concitoyens. Elle s'est aussi ouverte à des partenariats, car aujourd'hui, les questions de sécurité ne relèvent plus seulement d'elle. A chacune de mes visites dans des commissariats, et vendredi encore, j'ai pu prendre la mesure de son engagement. Mais les policiers attendent en retour soutien et reconnaissance. La confiance du pays est la condition de leur efficacité. Leur action doit être relayée et confortée, par les institutions judiciaires, bien sûr, qui la prolongent, mais aussi par l'ensemble du corps social. En assurant la sécurité, le policier garantit aussi la liberté. A ceux qui en doutent encore, il faut redire qu'un citoyen qui a peur n'est pas un citoyen libre.

Mais pour que le corps social les soutienne, il faut que tous ceux qui ont une part de responsabilité _uvrent dans le même sens.

La police nationale peut-elle vraiment se sentir soutenue quand d'aucuns passent leur temps à réclamer son démembrement, ici pour la municipaliser, là pour créer une police territoriale de proximité ? (« Très bien ! » sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste)

M. Michel Hunault - Caricature !

M. le Ministre - Peut-elle vraiment se sentir soutenue quand on fait voter des lois d'orientation qu'on oublie au premier budget ou quand on abreuve ses fonctionnaires de bonnes paroles, mais en encadrant toujours davantage son action ?

La police peut-elle vraiment se sentir soutenue quand son action est systématiquement contestée et ses résultats dénigrés ?

Les vrais-faux défenseurs de la police nationale doivent savoir que le soutien se mesure par des actes concrets, et non par des paroles sans lendemain.

Le Gouvernement et son ministre de l'intérieur font confiance aux policiers.

M. Franck Dhersin - L'inverse n'est pas vrai.

M. le Ministre - Ils le leur prouvent en apportant des réponses concrètes à leurs préoccupations.

La première est une réponse législative. Vous savez, pour l'avoir adoptée il y a quelques jours, toute la portée pratique de la loi sur la sécurité quotidienne. Sa mise en _uvre sera rapide et résolue et elle permettra de faciliter l'exercice du métier de policier.

La deuxième réponse est politique. En juin, le Premier ministre m'a donné son accord sur le projet de démarche stratégique pour la police nationale, qui tracera des perspectives sur cinq ans.

M. Michel Hunault - Il fallait le faire avant !

M. le Ministre - Vous avez mis votre propre loi d'orientation au placard !

M. Francis Delattre - C'est vous qui l'y avez mise !

M. le Ministre - Ces travaux seront essentiels pour dire à la police nationale ce que l'autorité politique attend d'elle et les moyens dont elle disposera pour y répondre.

Sans attendre leur achèvement, à la fin de l'année, et sur la base des réflexions déjà engagées, j'ai proposé au Premier ministre un plan d'action renforcée contre la violence, susceptible de répondre aux préoccupations de nos concitoyens et aux attentes des policiers. Une concertation s'engagera à ce sujet dès cette semaine entre le directeur général de la police nationale et les organisations syndicales de la police. Je recevrai moi-même quelques jours plus tard les responsables syndicaux pour leur faire part des décisions arrêtées par le Premier ministre.

Ce plan d'action répondra à plusieurs objectifs. Premièrement, le renforcement de la présence policière sur le terrain. Deuxièmement, le renforcement de la protection des personnels de police par des moyens matériels, notamment par l'équipement de tous les policiers affectés sur la voie publique d'un gilet pare-balles individuel,...

M. Michel Hunault - Enfin !

M. le Ministre - ...mais aussi par des moyens juridiques.

Troisièmement, la compensation des charges de travail et des risques encourus par les personnels de police. Il s'agit de mieux tenir compte dans leur rémunération de l'accroissement de leurs charges notamment avec la mise en place de l'euro et le déclenchement du plan Vigipirate renforcé, mais aussi des conditions souvent difficiles dans lesquelles ils interviennent et des violences dont ils peuvent faire l'objet.

Quatrièmement, le renforcement des mesures de lutte contre la délinquance. Cette question ne concerne pas le seul ministre de l'intérieur, mais l'expérience de la police nationale légitime pleinement les propositions que je peux être conduit à faire en ce domaine.

Une réponse budgétaire, enfin, doit être apportée. Le projet de loi de finances pour 2002 y contribue avec force.

M. Francis Delattre - C'est virtuel !

M. le Ministre - D'autres dispositions en équipement et en fonctionnement seront inscrites dans la loi de finances rectificative pour 2001, tant pour les moyens de protection des personnels que pour le parc automobile, l'immobilier ou les moyens de lutte contre le terrorisme.

M. Michel Hunault - Il est temps !

M. le Ministre - Les modalités de financement du plan d'action renforcée contre la violence seront précisées à l'issue des discussions qui vont s'engager.

Par votre vote aujourd'hui, que j'espère consensuel, vous adresserez une réponse concrète et forte aux policiers. Tout le reste ne sera que bonnes paroles et démagogie.

M. Francis Delattre - Vous êtes expert !

M. le Ministre - Je voudrais rappeler les principaux éléments de ce projet de budget et répondre aux préoccupations exprimées par vos rapporteurs et par les orateurs.

Permettez-moi d'abord de souligner la valeur de ce budget, si on le compare à ceux des années antérieures, sans même évoquer ceux de la précédente législature (Interruptions sur les bancs du groupe DL et du groupe du RPR).

Si l'on raisonne sur les grandes masses, comme l'ont fait tout à l'heure Jean-Pierre Blazy et Tony Dreyfus, la partie strictement régalienne du budget de l'intérieur, c'est-à-dire l'ensemble des crédits hormis les dotations aux collectivités locales et les crédits pour les élections, atteint pour la première fois 60 milliards de francs - 9,16 milliards d'euros -, soit une hausse de 3,5 %, contre 2,4 % l'année dernière. Si l'on ajoute les crédits nécessaires pour les élections, la hausse est de 4,4 %. Le ministère bénéficiera donc de plus de 472 millions d'euros, soit plus de 3 milliards de francs, de capacités nouvelles.

Ce qui est vrai pour les crédits l'est également pour les emplois, puisqu'un recrutement massif de policiers va être engagé et que le long mouvement de baisse des emplois de l'administration centrale et des préfectures va être stoppé. L'année prochaine, le ministère comptera au total près de 190 000 emplois.

Ce budget conforte chacun des domaines dont j'ai la charge : c'est un bon budget pour la police nationale, mais aussi pour l'administration territoriale, pour la sécurité civile et pour les services centraux du ministère (Exclamations sur les bancs du groupe DL, du groupe UDF et du groupe du RPR).

Priorité est d'abord accordée à la police nationale et à la sécurité de proximité. Les crédits accordés à la police nationale dépasseront pour la première fois 33 milliards de francs - 5 milliards d'euros -, soit une capacité d'engagement financier en hausse de 4,5 % par rapport à cette année.

3 000 nouveaux emplois seront créés, dont 2 700 de personnels actifs et 300 de personnels administratifs et techniques, au-delà, bien entendu, du remplacement des départs en retraite, qui est assuré.

M. Rudy Salles - Et les 35 heures ?

M. le Ministre - Avec ces créations d'emplois, sans équivalent depuis le budget 1983, la police dépassera pour la première fois, en prenant en compte les surnombres résiduels, les 150 000 agents.

Ces 3 000 nouveaux emplois doivent nous permettre de réussir à la fois la généralisation de la police de proximité et la réduction du temps de travail.

M. Rudy Salles - Et voilà !

M. le Ministre - Il y aura l'année prochaine près de 6 500 élèves gardiens de la paix dans les écoles de police. Depuis 1997, 5 200 emplois supplémentaires de gardiens de la paix auront été créés, auxquels il faut ajouter 20 000 postes d'adjoints de sécurité, pérennisés cette année, et 1 100 emplois administratifs. Au total, les effectifs de la police auront augmenté de 11 % entre 1997 et 2002.

M. Michel Hunault - Et la délinquance ?

M. Christian Estrosi - De 30 %.

M. le Ministre - 361 millions de francs seront destinés à des mesures catégorielles. Ces crédits sans précédent permettront de poursuivre la réforme du régime indemnitaire des gardiens de la paix, portant le coût total de cette réforme à 180 millions de francs sur deux ans. Le rôle des officiers de police sera valorisé. Le déroulement de carrière des commissaires de police sera facilité. Les personnels administratifs et techniques de police ne seront pas oubliés. L'enveloppe permettra également de mettre en _uvre la réduction du temps de travail.

Les crédits de fonctionnement de la police nationale seront eux aussi à nouveau augmentés, avec une mesure nouvelle de 150 millions de francs. Ils serviront à la protection des personnels, ainsi qu'à l'acquisition de véhicules et de matériels informatiques. Les crédits obtenus en 2000 et 2001 pour les deux premières vagues de la police de proximité seront également consolidés. Plus de 6 000 véhicules seront achetés en 2002, Monsieur Dreyfus. Les moyens de fonctionnement de la police nationale ont progressé depuis 1997 de plus de 15 % et dépassent depuis l'année dernière les 4 milliards de francs.

Enfin, les capacités d'investissement pour l'informatique et les transmissions comme pour l'immobilier de la police seront maintenues, avec plus de 1,4 milliard de francs supplémentaires. Nous continuerons le déploiement d'ACROPOL selon le calendrier prévu. Je précise, en réponse à M. Dreyfus, que les terminaux de première génération seront remplacés par des appareils plus légers. 15 000 nouveaux postes sont déjà en cours de livraison.

L'effort de rénovation du parc immobilier s'amplifie également, tout comme le développement des antennes de proximité - plus de 600 à ce jour. J'appelle en particulier votre attention sur la livraison, début 2002, du nouvel hôtel de police de Strasbourg, bâtiment de 15 000 m2 pouvant accueillir plus de 1 000 fonctionnaires.

Enfin, les crédits pour le logement social des policiers augmenteront de 60 %, atteignant 80 millions de francs. C'est un élément très positif, en région parisienne en particulier.

Au total, nous nous situerons en 2002 dans de très hautes eaux pour le budget de la police nationale, comparables uniquement au « plan Joxe » lancé en 1985 et exécuté les années suivantes. Je le rappelle pour M. Delattre, qui prend effectivement la bonne référence !

M. Francis Delattre - Nous sommes objectifs, nous !

M. le Ministre - Je le suis aussi en vous répondant. Année après année depuis 1997, le Premier ministre a adressé un signe très clair de confiance et d'encouragement à la police nationale, qui prend un sens tout particulier dans le contexte très difficile auquel elle doit aujourd'hui faire face. Il faut assurément aller plus loin encore aujourd'hui, compte tenu de l'évolution rapide et préoccupante des menaces et des formes de violence. Au-delà de la police, vos rapporteurs ont confirmé la qualité du budget 2002 pour l'ensemble des services du ministère de l'intérieur. C'est le cas en particulier pour les préfectures et l'administration centrale, qui bénéficient elles aussi de mesures nouvelles très significatives, comme l'a montré René Dosière.

Le Gouvernement a en particulier décidé de stabiliser les emplois des préfectures comme de l'administration centrale. C'est la fin d'un long mouvement de suppression d'emplois dans ces services. Cette stabilité permettra d'engager une gestion plus active du personnel des préfectures, avec en particulier des renforts ciblés dans les services qui en ont le plus besoin, notamment ceux responsables de l'accueil des publics défavorisés, du contrôle de légalité, de l'asile territorial et du contrôle de gestion.

Par ailleurs, le projet prévoit près de 125 millions de francs de mesures catégorielles pour les personnels placés sous l'autorité du directeur général de l'administration. Les personnels des préfectures bénéficieront à eux seuls de plus de 100 millions, soit trois fois plus qu'en 2001 et presque sept fois plus qu'en 2000.

C'est une étape très importante vers la parité avec les régimes indemnitaires des services déconcentrés de l'Etat.

Ce projet permet également de poursuivre l'expérience de globalisation des crédits des préfectures, lancée pour trois ans en 2000 et dont l'évaluation sera conduite au cours de l'année 2002. Les préfectures sont les seuls services de l'Etat à expérimenter ce nouveau mode de gestion qui anticipe la mise en _uvre de la nouvelle loi organique relative aux lois de finances, adoptée en juillet dernier. En 2002, le champ de cette expérimentation s'étendra à quatre nouvelles préfectures : le Calvados, l'Oise, la Haute-Vienne et l'Yonne.

M. René Dosière, rapporteur pour avis de la commission des lois pour l'administration générale et les collectivités locales - Hélas pour l'Aisne !

M. le Ministre - Je tiens à saluer le travail très approfondi effectué par votre rapporteur sur la mise en _uvre de la globalisation. Les personnels des préfectures concernées ont beaucoup apprécié l'intérêt qu'il y porte et les remarques qu'il a formulées dans son rapport me sont très précieuses pour préparer la suite de cette réforme.

M. René Dosière, rapporteur pour avis pour l'administration générale et les collectivités locales - Merci.

M. le Ministre - Le 23 novembre dernier, à Lyon, je m'étais engagé devant les représentants de toutes les préfectures à lancer à plan d'action pluriannuel pour les préfectures. La loi de finances pour 2002 crédibilise l'ensemble de cette démarche.

De plus, un relevé de conclusions définissant les principes d'une politique de gestion prévisionnelle de l'emploi au sein de la direction générale de l'administration a été élaboré, pour améliorer le service rendu aux usagers. Ce document, qui sera prochainement signé par plusieurs organisations syndicales, permettra d'accompagner au mieux l'aménagement et la réduction du temps de travail dans les services.

La sécurité civile sortira également renforcée de ce projet de budget, n'en déplaise à M. Leonetti.

M. Franck Dhersin - Le rapporteur Leonetti !

M. le Ministre - Rapporteur pour avis, cela ne m'a pas échappé !

Les crédits de fonctionnement de la direction de la défense et de la sécurité civile augmenteront pour atteindre 3,2 millions d'euros, soit 209 millions de francs. Cette hausse permettra de poursuivre la modernisation du service de déminage et de mettre en _uvre le plan de traitement des munitions anciennes. Certains ce matin ont affirmé que rien n'était prévu pour Vigipirate. C'est que nous sommes en loi de finances initiale.

Sachez qu'en 2001, 77 millions ont été dépensés pour les opérations de Vimy, Woippy et Montberrault.

Les régimes indemnitaires des métiers les plus difficiles seront améliorées avec, en particulier, la création d'une prime pour les démineurs.

Surtout, ce budget permettra de lancer un vaste plan de modernisation de la brigade des sapeurs-pompiers de Paris, avec sur six ans, environ 500 millions supplémentaires pour le renouvellement des matériels de la brigade et 750 nouveaux emplois de militaires.

La formation des officiers sera également renforcée avec la transformation de l'école nationale supérieure en véritable école d'application installée en province, comme l'a annoncé le Premier ministre. M. Derosier a déjà son idée sur le choix du lieu d'implantation. J'en suis, moi, à étudier les options qui me sont présentées.

Enfin, le renouvellement de la flotte d'hélicoptères sera poursuivi. Les crédits d'investissement pour la flotte aérienne s'élèveront à plus de 350 millions en 2002.

J'ajoute, pour répondre à M. Estrosi, qu'au-delà de la loi de finances pour 2002, la direction de la défense et de la sécurité civiles occupe une place essentielle dans le dispositif du Gouvernement à la suite des attentats du 11 septembre. Ce sujet sera, bien entendu, traité dans la loi de finances rectificative. Vous pouvez donc rassurer M. Estrosi.

Au total, si l'on prend en compte les mesures décidées en faveur des sapeurs-pompiers des SDIS, ce gouvernement aura engagé en peu de temps une politique globale de renforcement de la sécurité civile.

Le projet de loi que je déposerai dans quelques semaines, conformément à un engagement de l'an dernier, renouvelé devant le congrès des sapeurs-pompiers, permettra de poursuivre cette évolution.

Enfin, je tiens à confirmer l'engagement du Gouvernement d'établir entre l'Etat et les collectivité locales des relations financières permettant à ces dernières de bénéficier des fruits de la croissance et de la garantie d'une évolution régulière de leurs ressources.

Le Premier ministre m'a chargé, en premier lieu, d'élaborer avec Laurent Fabius un rapport sur les voies et moyens d'une réforme des ressources des collectivités locales, afin de remédier aux défauts d'une fiscalité locale trop souvent injuste et obsolète.

M. Maxime Gremetz - Bien !

M. le Ministre - Les réactions qui me parviennent me permettront d'élaborer définitivement ce rapport qui vous sera remis d'ici la fin de l'année.

J'examinerai avec une attention toute particulière les contributions de Gérard Saumade et René Dosière. Il en va de même de l'avis du comité des finances locales, Monsieur Derosier.

Le projet de loi de finances, qui s'inscrit dans la nouvelle étape de la décentralisation engagée par le Premier ministre il y a un an, confirme l'engagement pris par ce dernier de prolonger en 2002 le contrat de croissance et de solidarité.

Pour la dernière année d'application de ce contrat, en 2001, le PIB avait été pris en compte dans l'indice d'évolution à hauteur de 33 %. Il en sera de même en 2002.

Les concours financiers actifs de l'Etat aux collectivités locales connaîtront une augmentation réelle de 2,9 %. Le montant total de cette enveloppe s'établira ainsi à 188,3 milliards, c'est-à-dire 5,3 de plus qu'en 2001.

Ainsi, les collectivités locales auront disposé de plus de 6,7 milliards supplémentaires grâce au passage d'un pacte de stabilité, de 1996, bien dénommé comme le rappelait avec force Alain Clary, à un contrat de croissance et de solidarité (Interruptions sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL).

Au sein de ce contrat, la DGF augmentera de 4,07 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2001.

Ce taux de progression, le plus important depuis 1993, sera également appliqué à la dotation spéciale instituteurs, à la dotation élu local et à la dotation générale de décentralisation. Toutes les communes percevront ainsi une dotation forfaitaire en progression d'au moins 2 %.

Le Gouvernement a aussi pour objectif de pérenniser le financement de l'intercommunalité.

Du fait de l'extinction du dispositif d'alimentation légale de la dotation des communautés d'agglomération, et dans le souci de répondre aux demandes des élus locaux qui regrettaient la baisse de la DCTP qui a pu en résulter, le Gouvernement a souhaité pérenniser et simplifier ce financement en intégrant la dotation des communautés d'agglomération au sein de la DGF. Dans le même temps, la dotation d'aménagement s'élèvera à un peu plus de 309 millions d'euros.

Enfin, nous souhaitons accroître la péréquation.

Les dotations de solidarité rurale et de solidarité urbaine seront exceptionnellement majorées, l'une de 150 millions, l'autre de 800 millions.

La DSR comme la DSU progresseront ainsi de l'ordre de 5 %, sous réserve des choix du comité des finances locales de janvier prochain, soit respectivement de plus de 60 % et de plus de 80 % depuis 1997.

Le dotation de compensation de taxe professionnelle, elle, n'évoluera en 2002 qu'en fonction de son rôle de variable d'ajustement du contrat de croissance et de solidarité, et diminuera pour finir de 2,43 %.

Les DGE croîtront de 1,7 %, de même que la dotation régionale d'équipement scolaire et la dotation départementale d'équipement des collèges.

J'en viens à des points précis que vous avez soulevés.

Je confirme à MM. Blazy et Dreyfus que la fidélisation des personnels et le renforcement des moyens de la police en Ile-de-France sont pour moi une question prioritaire.

Ainsi une indemnité clairement identifiée a été créée pour les SGAP de Paris et de Versailles, à laquelle s'ajoute l'indemnité de fidélisation pour les fonctionnaires bénéficiant d'une ancienneté suffisante.

Cet avantage indemnitaire figure désormais sur les bulletins de salaire des policiers lorsqu'ils exercent leur métier en région parisienne, même s'il est sans doute encore trop faible.

L'effort porte également sur le logement social des policiers.

Toutes ces mesures en faveur de l'Ile-de-France sont en cours d'élaboration dans le cadre de la démarche stratégique lancée en juin dernier par le Premier ministre. La suggestion de Tony Dreyfus de lier un avantage indemnitaire à l'achat d'un logement en Ile-de-France pourra être examinée dans ce cadre.

La question de l'immobilier à Paris, évoquée par M. Blazy, y sera également traitée. Enfin, les personnels administratifs supplémentaires attendus en région parisienne arriveront dans les tout prochains mois.

M. Rudy Salles - Et en province ?

M. le Ministre - Je réponds aux questions qui m'ont été posées... (Exclamations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL)

S'agissant de la sécurité dans les transports en région parisienne, je rappelle à M. Dray que c'est le préfet de police qui coordonne l'intervention de tous les services, et précise que la compétence des unités mobiles et du service de protection du métro est désormais étendue jusqu'au terminus des lignes de banlieue.

M. Julien Dray - Très bien !

M. le Ministre - Plusieurs d'entre vous, parmi lesquels MM. Blazy et Delattre, ont posé la question de la réduction du temps de travail dans la police nationale. Des discussions sont en cours avec les représentants du personnel, en vue d'aboutir à une solution mixte combinant temps libéré, créations d'emplois et crédits indemnitaires, dans des proportions non encore arrêtées définitivement, de façon à préserver le potentiel opérationnel de la police et de poursuivre les réformes engagées, telle la mise en place de la police de proximité (Interruptions bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL). Certains voudraient bien que nous ne soyons pas capables de répondre aux attentes de nos concitoyens et des policiers, mais qu'ils ne comptent pas sur nous pour être défaillants dans ce domaine ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste ; exclamations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL)

A M. Salles, qui a souligné la progression de la délinquance à Nice, je tiens à indiquer qu'un commissariat sera ouvert dans cette ville l'an prochain, avec l'aide de la mairie, ainsi qu'un casernement de CRS.

M. Rudy Salles - Voulu par Pasqua !

M. le Ministre - Peut-être l'a-t-il voulu, mais c'est moi qui le fais ! (Exclamations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL) Le coût total de ces opérations est de 93 millions, ce qui n'est pas négligeable.

M. Rudy Salles - Vos amis voulaient, eux, qu'on abandonne le projet !

M. le Ministre - Mais moi qui vous parle, je l'ai réalisé. M. Le Roux, qui est de ceux qui ont beaucoup travaillé sur la police de proximité, a raison de souhaiter que sa généralisation soit aussi rapide que possible ; lorsque la troisième et dernière phase sera achevée et qu'elle sera en place sur l'ensemble du territoire, les effectifs seront partout supérieurs de 7 à 8 % à ce qu'ils étaient avant. Il a également raison de dire que cela ne doit pas se faire au détriment de la police d'investigation : c'est bien pourquoi la loi sur la sécurité quotidienne prévoit que la police de proximité apportera son concours à cette dernière, et c'est aussi pourquoi je veillerai moi-même à ce que la répartition des crédits préserve un bon équilibre entre les deux.

Je partage aussi l'appréciation de M. Le Roux sur la question des armes. Il ne s'agit évidemment pas de s'en prendre aux chasseurs ni aux sportifs, mais à ceux qui détiennent illégalement des stocks d'armes, tels ceux qui ont été récemment découverts dans des coffres de véhicules.

Un mot enfin, toujours en réponse à M. Le Roux, sur les « zones de non-droit ». Je n'ai pas attendu d'être ministre de l'intérieur pour trouver inacceptable qu'il y ait, sur le territoire, des endroits où les policiers ne pourraient aller qu'en courant de graves risques pour leur propre sécurité. C'est pourquoi j'ai fait procéder à un petit nombre d'opérations répressives ciblées, pour que la peur change de camp (Interruptions sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL).

M. Francis Delattre - « Terroriser les terroristes » ?

M. le Ministre - Je n'aime guère ce genre de formules qui ne débouchent sur rien : il s'agit d'opérations coordonnées et ciblées, qui ont permis de déférer des personnes à la justice, et qui ont évidemment suscité certaines réactions, sur le terrain, de la part de ceux qui se croyaient intouchables, mais je vois justement dans ces réactions le signe d'un changement de rapport de forces, et cela m'encourage à persister (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Dhersin m'a interrogé sur le recrutement. Je lui confirme que 1 000 agents des corps de maîtrise et d'application sortiront des écoles prochainement et seront opérationnels dès le début de l'année. De plus, 1 100 postes administratifs auront été créés en 2001 et 2002, permettant de redéployer des policiers sur le terrain. Je rappelle, en outre, qu'il n'y a plus de gels d'emplois dans la police, ce qui rompt avec certaines pratiques antérieures. Quant aux écoles de police, elles tournent à plein régime, puisqu'il faut un an, et non deux, pour former un policier, contrairement à ce qui a été dit ce matin.

M. Estrosi a évoqué, entre autres sujets, un incident qui s'est produit dans le XVIIIème arrondissement de Paris. Dès que j'en ai eu connaissance, j'ai téléphoné au préfet de police pour qu'il assure les policiers de mon soutien, et j'ai désavoué l'élue qui était intervenue de façon intempestive et sans aucun titre.

M. Christian Estrosi - Très bien !

M. le Ministre - S'agissant de l'administration centrale et des préfectures, j'ai lu avec un grand intérêt les développements du rapport de M. Dosière sur le budget des cultes, sujet rarement évoqué lors des discussions budgétaires. Son travail montre notamment à quel point le régime particulier d'Alsace et Moselle est apprécié sur le terrain, signe que la République supporte assez bien la diversité... Le rapport signale quelques incongruités, tels certains régimes indemnitaires laissés en jachère par l'administration comme par leurs bénéficiaires ; il convient qu'un travail soit accompli en toute sérénité sur ce sujet l'an prochain, en concertation avec les représentants des cultes et le ministère du budget. Le document révèle également un phénomène de société plus large : la crise des vocations, qui conduit à une lente érosion des emplois budgétaires. Votre rapporteur envisage un plan pluriannuel de recrutement, mais il appartient naturellement aux différentes confessions de poursuivre leurs efforts en ce sens, à charge pour l'Etat d'accompagner le mouvement en Alsace et Moselle.

Sur les préfectures, le rapport aborde la délicate question de la répartition des effectifs entre les préfectures et sous-préfectures d'Ile-de-France. Le problème est moins, à mon sens, celui des emplois budgétaires proprement dit que celui des vacances d'emplois, du fait des difficultés persistantes de recrutement dans cette région, difficultés qui ne sont d'ailleurs pas propres à mon ministère. J'ai demandé une étude comparative approfondie sur le sujet. Dans ces départements comme dans de nombreux autres, comme le Nord, il existe un fort besoin d'effectifs dans les services d'accueil, de demandeurs d'asile en particulier. C'est pourquoi j'ai décidé d'y affecter un nombre important d'agents dès la fin de l'année.

M. Dhersin m'a également interpellé sur la consultation des musulmans de France. Je serai bref, car je me suis déjà exprimé sur ce sujet ; d'autres l'ont fait aussi, mais sans toujours connaître le sujet, comme M. Madelin. Cette consultation fait suite a des tentatives qui n'avaient jamais abouti, et que mon prédécesseur a relancées. J'ai repris le dossier dans les mêmes termes que lui, c'est-à-dire avec la volonté de tenir compte de la diversité de la communauté musulmane de France.

Je suis d'ailleurs surpris de vos objections...

M. Franck Dhersin - Je n'ai pas émis d'objections. Je ne parle pas au nom de Madelin.

M. le Ministre - ...ou, disons, de vos craintes. Nous allons quant à nous poursuivre cette démarche utile qui vise à offrir comme interlocuteurs aux pouvoirs publics un organe représentatif. Il y va de l'organisation de l'islam en France et je crois que c'est la bonne méthode. L'audience du Président de la République m'a d'ailleurs conforté dans cette démarche. Il est des sujets sur lesquels il faut veiller à rassembler, à trouver un équilibre, sans montrer du doigt...

M. Franck Dhersin - Je n'ai montré personne du doigt.

M. le Ministre - Je vous dis simplement quelle est notre démarche. Et je puis vous dire qu'elle intéresse mes homologues étrangers, confrontés eux aussi à la même difficulté. J'en appelle donc à la responsabilité des uns et des autres.

S'agissant de la sécurité civile, permettez-moi d'abord de rendre hommage à l'ensemble de ses acteurs sapeurs-pompiers, militaires, démineurs, pilotes, secouristes, bref à tous ceux qui, par leur dévouement, assurent la protection de nos concitoyens et leur portent secours au quotidien ou lors de catastrophes comme celle de Toulouse.

A M. Leonetti, qui a fait une intervention un peu chagrine, je voudrais rappeler tout ce que ce gouvernement a fait pour améliorer l'efficacité de notre système de sécurité civile : l'achèvement de la départementalisation décidée en 1996 ; la création d'une DGE d'un milliard au profit des services départementaux d'incendie et de secours ; la réforme, attendue depuis dix ans, du statut des sapeurs-pompiers professionnels...

M. Jean-Antoine Leonetti - Ce sont les départements qui paient !

M. le Ministre - N'oubliez pas non plus la refonte de l'alerte météorologique, la modernisation du service du déminage, le début du renouvellement complet de la flotte d'hélicoptères, enfin le renforcement des moyens et des compétences des préfets de zone de défense.

Tous les engagements que j'ai pris depuis un an ont été tenus et mis en _uvre rapidement.

M. Jean-Antoine Leonetti - Vous n'en aviez pas pris beaucoup !

M. le Ministre - J'ai été aidé en cela par le remarquable travail de Jacques Fleury, dont les propositions ont fortement inspiré le projet de loi relatif à la démocratie de proximité, qui constituera une étape supplémentaire de la modernisation de la sécurité civile et qui vous sera soumis en début d'année prochaine. Il répondra, j'en suis persuadé, aux observations de M. Clary.

S'agissant des collectivités locales, je veux d'abord remercier MM. Dosière et Saumade pour leur travail remarquable. Je sais que l'année 2002, qualifiée par M. Dosière d' « excellente » pour les collectivités locales, du point de vue de leurs ressources, permettra à celles-ci de faire face dans de bonnes conditions à leurs charges, ce qui devrait aussi, après l'avis favorable du CFL, répondre aux remarques de M. Salles.

J'ai pris note de la remarque de M. Saumade sur la DGF des communautés de communes, notamment en milieu rural, et je puis lui dire qu'en 2002, nous ne devrions pas, compte tenu des mesures prises, rencontrer les mêmes difficultés de répartition que cette année.

Pour ce qui est du financement, en 2003 et les années suivantes, du fonds national de péréquation de taxe professionnelle, il nous faudra anticiper. Nous pourrons en reparler lors de la discussion de la loi de finances rectificative pour 2001 et de la loi de finances pour 2003.

Je veux dire à M. Derosier, comme je l'ai fait à Rodez, lors du congrès de l'assemblée des départements de France, que je serai attentif à l'évolution des charges des collectivités locales, en particulier des départements, même si je me réjouis de l'évolution très favorable de leurs ressources au sein de la DGF.

Enfin, que M. Nayrou sache que, si la répartition 2001 de la DGF s'est soldée pour la plupart des communautés de communes à fiscalité additionnelle par une baisse de leur attribution, cela ne correspond pas à une baisse globale des ressources mises en répartition qui résulterait d'un choix du Gouvernement ou du comité des finances locales. C'est lié au fait que cette catégorie d'EPCI, groupement peu intégré, percevrait une très faible DGF par habitant. J'ai pris note du fait que M. Bonrepaux propose des mesures dans la loi de finances rectificative pour 2001.

J'espère avoir répondu à l'essentiel de vos interrogations et vous avoir démontré la qualité de ce projet de budget, qui mérite, je crois, votre approbation (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste).

M. Jean-Antoine Leonetti, rapporteur pour avis pour la sécurité civile - Je vois que les bancs de la majorité et de l'opposition sont perturbés par une dépêche AFP annonçant la chute d'un avion sur New-York et je vous demande donc, Madame la présidente, une suspension de séance afin que nous puissions ensuite reprendre nos travaux dans la sérénité.

M. Alain Clary - Très pertinent.

Mme la Présidente - Je comprends votre émotion et je la partage. Pour l'heure, nous ne savons pas s'il s'agit d'un accident ou d'un acte terroriste. Je suspends la séance pour dix minutes.

La séance, suspendue à 16 heures 10 est reprise à 16 heures 25.

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QUESTIONS

M. Jean-Antoine Leonetti, rapporteur pour avis pour la sécurité civile - Ma question concerne l'installation de la police de proximité dans la circonscription d'Antibes-Vallauris. La vérité n'est pas l'apanage d'un seul camp : j'ai bien écouté M. Dray, M. Le Roux et votre intervention. M. Le Roux a reconnu que l'installation de la police de proximité devrait dans certains cas marquer le pas. M. Dray a estimé que les diagnostics établis dans le cadre des contrats locaux de sécurité étaient très sérieux et, avec votre approbation, que la police de proximité ne devrait pas empiéter sur la police judiciaire, seule à même de faire tomber les délinquants les plus durs. Pour la circonscription d'Antibes-Vallauris, concernée par la deuxième vague de généralisation du dispositif, le diagnostic du contrat local de sécurité réclamait vingt policiers supplémentaires. En dépit de vos assertions et de celles de votre prédécesseur, les arrivées ne compensent cependant que les départs à la retraite et les mutations, et l'effectif demeure quasi constant. Sans verser dans la polémique, je vous demande donc d'y suspendre la mise en place de la police de proximité qui, à moyens constants, désorganise la police d'investigation sans améliorer la sécurité de nos concitoyens.

Le commissariat de police d'Antibes a reçu des cailloux la semaine dernière, et des policiers procédant à une interpellation dans un quartier de Vallauris ont été contraints de se replier. L'introduction de la police de proximité doit s'accompagner d'augmentations d'effectifs.

Si ma circonscription ne dispose pas des vingt policiers supplémentaires nécessaires à la police de proximité, je vous demande de surseoir à son application. Tout le reste, ainsi que vous l'avez dit, ne serait que bonnes paroles et démagogie.

M. le Ministre - Cette circonscription de 99 314 habitants a été choisie pour faire partie de la deuxième phase de généralisation de la police de proximité, et, je répète que celle-ci entraîne systématiquement une augmentation du nombre des policiers. En l'occurrence, les effectifs du corps de maîtrise et d'application ont augmenté de 12 personnes. Au total, les effectifs sont passés de 170 au 1er janvier 2001 à 181 au 31 octobre, soit une augmentation de 7 %. Malgré les difficultés liées aux mutations ou aux départs anticipés à la retraite, il faut veiller à ce que l'augmentation liée à la police de proximité soit de 7 à 8 %. Par ailleurs, deux véhicules à quatre roues et 16 scooters ont été mis en dotation. Un contrat local de sécurité intercommunal est en cours d'élaboration. Dans cette circonscription, le taux de criminalité est supérieur à la moyenne nationale, mais la délinquance générale et de voie publique a régressé de 10 % par rapport à 1999.

M. Jean-Antoine Leonetti - Je poserai cette deuxième question au nom d'Alain Ferry, député du Bas-Rhin. Plus de 75 % de nos concitoyens sont préoccupés par la sécurité et, au premier semestre, la criminalité et la délinquance ont progressé de 10 %. Dans les zones rurales, les infractions ont même augmenté de 18 %. Les victimes des délits les moins graves hésitent souvent à porter plainte, ce qui donne à leurs auteurs, souvent mineurs, un sentiment d'impunité. Les policiers et gendarmes se sentent peu soutenus. L'heure est venue d'une politique volontaire, dotée de moyens importants. La répression doit être constructive, avec une généralisation du travail d'intérêt général, et réparatrice. Les multirécidivistes doivent être placés dans des centres éducatifs renforcés et éloignés de leur milieu de vie. Les jeunes n'ont plus de repères et la prison n'est pas le seul remède. Comment le Gouvernement entend-il lutter contre cette montée de la délinquance ? Faute de mesures concrètes, nos concitoyens risqueraient de se livrer à des actes d'autodéfense.

Mme la Présidente - Le Règlement ne prévoit pas qu'on se substitue à un député absent pour poser sa question.

M. le Ministre - Au cours du premier semestre, 92 000 mineurs ont été mis en cause par la police et la gendarmerie, soit une augmentation de 2,4 % par rapport au premier semestre 2000. La proportion des mineurs dans les mises en cause est stable, à 22 %, mais reste trop élevée. L'augmentation de la délinquance est plus forte en zone de gendarmerie que de police, mais il faut noter que les chiffres du troisième trimestre sont un peu meilleurs que ceux du début de l'année. La lutte est permanente. Elle implique vigilance, objectivité et diversité des moyens.

Les mineurs représentent 36 % de la délinquance de voie publique : vols et dégradations de biens. Il apparaît essentiel de casser les noyaux durs des bandes organisées, qui opèrent parfois sous la houlette d'adultes. Les opérations ciblées contre le caïdat sont à cet égard très importantes et ont également un impact psychologique sur la population. Elles associent police, gendarmerie et justice - les procureurs sont associés aux décisions prises - ce qui confère une nouvelle efficacité à la chaîne pénale.

Il faut par ailleurs faire preuve d'imagination dans les sanctions, en direction de très jeunes mineurs notamment, et tous les partenariats peuvent être envisagés dans ce domaine.

M. Franck Dhersin - Les dernières statistiques font apparaître une hausse importante de la délinquance, notamment une recrudescence des vols à main armée, menés par des bandes organisées. Les malfaiteurs sont armés de pistolets de gros calibre et de fusils à pompe et se déplacent dans de puissantes voitures volées, n'hésitant pas à ouvrir le feu sur les forces de l'ordre. Où qu'ils habitent, les Français savent qu'ils ne sont plus à l'abri de la violence. Qu'entend faire l'Etat contre ces bandes organisées ? Le plan quinquennal comporte-t-il des mesures nouvelles et originales ?

M. le Ministre - La délinquance n'a pas brutalement augmenté : au premier semestre, elle a progressé de 9,5 %. Ce qui est préoccupant, c'est l'augmentation de 25 % des vols avec violence, en particulier des téléphones mobiles. D'une façon générale, le développement des nouvelles technologies de communication offre de nouvelles cibles aux délinquants, qu'il s'agisse de vols, d'escroqueries ou d'abus de confiance. Les statistiques s'en ressentent. Toutefois, c'est en 1994 qu'elles ont atteint leur point culminant. Les chiffres de 2000 sont équivalents, en nombre, à ceux de 1991.

En ce qui concerne les statistiques, je crois qu'il faut absolument cesser de polémiquer. C'est pourquoi, sur ma demande, le Premier ministre a chargé MM. Pandraud et Caresche de réfléchir à l'amélioration des outils de connaissance et d'analyse de la délinquance. Ce travail sera bien utile, après 2002, à ceux qui auront la responsabilité du maintien de l'ordre.

En ce qui concerne les bandes organisées, les actions ciblées que nous avons menées cette année seront renforcées, avec l'aide de la loi sur la sécurité quotidienne qui renforce les outils juridiques des policiers. Les réactions que nous observons chez les délinquants montrent que ce dispositif commence à payer. Il faut parvenir à inverser le rapport de force au profit des forces du droit.

M. Henri Nayrou - La sécurité des biens et des personnes n'est hélas pas qu'une préoccupation électorale. Même dans des circonscriptions comme la mienne où les citoyens ne savent pas ce que c'est que l'Etat de non-droit, les images de télévision font de la violence une préoccupation. Les actions menées contre la police et la gendarmerie rendent l'ambiance de plus en plus lourde. L'heure n'est plus à chercher qui de la poule ou de l'_uf a commencé, mais à trouver des solutions immédiatement applicables. La police de proximité, les contrats locaux de sécurité, l'augmentation du budget pour 2002 en font partie. Mais il faut aller plus loin, notamment en matière d'investissements pour la sécurité individuelle des policiers. L'agression de la semaine dernière a montré l'absolue nécessité de disposer de matériel de protection. Ce n'est plus une affaire d'argent.

Vous avez partiellement répondu dans votre intervention générale, mais pouvez-vous me préciser d'une part la nature de ces équipements et leur coût que d'aucuns fixent au-delà de 200 millions -, d'autre part la manière dont, sur le plan financier, vous tiendrez compte du surcroît de travail induit par le plan Vigipirate et par le passage à l'euro ?

S'agissant des collectivités territoriales, je réitère la proposition que je vous ai faite ce matin d'aider les 20 000 communes de moins de 500 habitants à passer le cap de la réduction du temps de travail au 1er janvier 2002. Née d'une idée de mon collègue Jean-Yves Caullet, elle est soutenue par des députés des zones rurales qui souhaitent voir se réduire la « fracture territoriale ». Êtes-vous prêt à la faire étudier sérieusement ?

M. le Ministre - J'ai déjà longuement évoqué ces sujets, en précisant ce qui est prévu dans le projet de loi de finances pour 2002, à quoi s'ajouteront les mesures qui seront prises dans la loi de finances rectificative pour 2001, sur laquelle le Premier ministre n'a pas encore rendu ses arbitrages. Outre l'équipement des policiers, notamment d'un gilet pare-balles sur la voie publique, des mesures sont prises en matière de sécurité juridique. J'ai parlé également du plan d'action renforcée contre la violence, qui va faire l'objet d'une concertation cette semaine.

Sur le plan financier, nous avons prévu de compenser les charges de travail supplémentaires des policiers, en faisant un très gros effort sur leur régime indemnitaire.

La RTT dans les collectivités territoriales se fait dans le cadre de la loi du 3 janvier 2001 relative à la résorption de l'emploi précaire et au temps de travail dans la fonction publique territoriale, ainsi que du décret du 12 juillet 2001 pris pour son application. Il apparaît que depuis plusieurs années, de nombreuses collectivités ont développé des dispositifs de RTT : de l'enquête menée auprès des préfectures, il ressort qu'environ 500 000 agents territoriaux, soit près de 40 %, bénéficiaient de la RTT dès la fin 2000, en application de protocoles locaux s'accompagnant d'engagements sur l'organisation ou la rationalisation des services, l'évolution des emplois et la prise en compte des nouvelles technologies. Les petites communes peuvent bénéficier des mécanismes de mise à disposition de personnels en temps partagé. Le Gouvernement n'a pas envisagé de mesures financières d'accompagnement spécifiques pour les collectivités locales, mais il faut rappeler que celles-ci bénéficient d'une évolution très favorable de la DGF, de la DSU et de la DSR.

M. Jean-Pierre Balduyck - La police de proximité, concept neuf, fait indiscutablement reculer le sentiment d'insécurité. L'application des 35 heures ne doit pas l'affaiblir ; pouvez-vous, Monsieur le ministre, nous informer sur les négociations en cours avec les organisations syndicales ?

M. le Ministre - J'ai déjà évoqué ce sujet dans mon intervention. Les négociations relatives à la mise en _uvre de la RTT dans la police nationale sont engagées avec les organisations représentatives depuis le 22 octobre 2001. Les bases de discussion sont les suivantes : la RTT doit bénéficier à tous les corps et s'appliquer à tous les régimes de travail ; comme dans le reste de la fonction publique, les jours RTT seront octroyés en complément des acquis ; toutefois, pour préserver le potentiel opérationnel de la police, une partie de ces jours sera indemnisée ; les grands régimes cycliques existants seront préservés, avec quelques aménagements. Des moyens budgétaires ont été prévus dans le PLF 2002 à hauteur de 265 millions de francs. La discussion sur les 35 heures sera également poursuivie dans le cadre de la concertation sur le plan d'action renforcée contre la violence.

M. René Rouquet - La lutte contre le terrorisme nécessite une organisation, comme la lutte contre le grand banditisme. Le renseignement y joue un rôle majeur.

Quel est l'effort budgétaire consenti en faveur de la police scientifique et technique, des services télématiques et de transmission ainsi que de la DST ? Comment envisagez-vous d'indemniser les personnels engagés dans le plan Vigipirate renforcé ?

M. le Ministre - De nombreux services de police participent à la lutte contre le terrorisme et la grande délinquance. Les crédits de fonctionnement de la DST ont augmenté de 16 % entre 1999 et 2001 ; j'ai demandé un financement complémentaire dans la loi de finances rectificative. Les crédits consacrés à l'informatique et à la transmission sont passés de 56 à 156 millions de francs entre 1999 et 2001. Enfin, la police judiciaire, dont les effectifs n'ont pas baissé a vu ses crédits augmenter de 27 % depuis 1999, ce qui a permis une modernisation qui concerne principalement la police scientifique et technique.

M. Philippe Martin - Ma question concerne le corps des officiers de la police nationale, créé par la loi d'orientation et de programmation de janvier 1995 et issu de la fusion d'anciens corps.

Je me félicite que pour la première fois 33 milliards de francs soient affectés à la police nationale, surtout en cette période d'augmentation de la délinquance. Cependant je constate que les crédits supplémentaires de ce budget sont principalement destinés à l'embauche de fonctionnaires. Certes les besoins en personnels sont évidents, mais je déplore que les officiers de police en exercice ne se voient pas attribuer de crédits supplémentaires, alors que la dangerosité de leurs fonctions ne cesse de croître. La semaine dernière encore, deux policiers ont été victimes de tirs à bout portant lors d'un contrôle routier.

Les promesses de revalorisation indiciaire sont demeurées lettre morte. En février 1999, une demande des officiers de police tendant à l'obtention d'un indice terminal de 856 brut avait été déposée auprès de vos services. En réponse, vous avez proposé 801 bruts. Depuis, la situation n'a pas évolué et s'est même dégradée. 60 millions seulement ont été dégagés, au lieu des 91 millions qui auraient dû l'être.

Il faut noter que techniquement ces 60 millions suffiraient à revaloriser l'indice à hauteur de 821, et non pas simplement 801 comme vous tentez de le faire croire.

Quels moyens budgétaires comptez-vous utiliser pour répondre aux attentes des officiers de police ?

M. le Ministre - C'est vrai, le métier d'officier de police a évolué. Ces fonctionnaires sont au c_ur de la réforme de la police de proximité, ils assument des responsabilités croissants dans le domaine de la police judiciaire, ils sont en majorité recrutés à Bac + 3. Alors qu'ils subissent des contraintes de plus en plus fortes, l'écart indiciaire avec les catégories B de la fonction publique s'est réduit. Une revalorisation indiciaire est donc indispensable, y compris pour développer l'attractivité de corps. Les problèmes rencontrés par ces officiers de police procèdent, vous l'avez reconnu, de la loi de 1995. A l'époque dans l'opposition, je tenais à peu près le même langage que le vôtre aujourd'hui.

Le Gouvernement a pris en compte cette préoccupation. Une provision de 60 millions figure dans le projet de budget pour financer cette revalorisation indiciaire. Le dossier est en cours d'arbitrage. Je suis très attentif à ces questions, et j'ai bon espoir de trouver des solutions.

M. Bernard Schreiner - J'évoque à nouveau la situation extrêmement critique des effectifs du commissariat de police de Haguenau où la violence urbaine et le nombre de voitures incendiées augmentent.

Haguenau, quatrième ville d'Alsace avec un peu plus de 32 000 habitants, se trouve placée sur 42 circonscriptions de police du Grand Est, en trente-neuvième position pour le taux de criminalité, et en dernière position pour le ratio policiers/population.

En effet, on y compte 1 policier pour 809 habitants, contre 1 pour 454 à Strasbourg et 1 pour 460 à Sélestat.

Cette situation désastreuse va s'aggraver avec la mise en place des 35 heures, sans parler de la récupération de centaines d'heures supplémentaires.

Le commissariat de Haguenau est dans une situation de rupture intolérable. Le personnel est physiquement usé et moralement atteint.

La commissaire de police fait, avec son équipe, un travail remarquable. Dans l'état actuel de ses effectifs, il lui est impossible d'aller plus loin.

Comment pourra-t-elle mettre en place la police de proximité ? Un renfort de 3 ou 4 policiers au plus est annoncé alors qu'il en faudrait au moins 16. C'est le moment de nous prouver que l'idée de police de proximité ira au-delà de l'effet d'annonce.

Quand prendrez-vous conscience que Haguenau n'est plus cette petite ville de province tranquille, et qu'il ne faut pas la considérer comme « un faubourg de Strasbourg » pour l'évaluation du nombre de policiers nécessaires ? De grâce, ne me parlez pas des effectifs de la police au niveau national ! Ce qui m'intéresse, c'est Haguenau !

M. René Dosière, rapporteur pour avis de la commission des lois - Cette description va faire fuir les touristes !

M. le Ministre - La circonscription de Haguenau, qui compte 33 943 habitants, figure dans la troisième vague de généralisation de la police de proximité. C'est pour faire face à ce nouveau mouvement que j'ai obtenu du Premier ministre le recrutement anticipé de mille gardiens de la paix, actuellement en formation.

36 gardiens de la paix seront affectés à Haguenau, contre 34 en 1997. Un poste de lieutenant de police supplémentaire sera créé à la fin de cette année, et pourvu début 2002. Le personnel de police, y compris les adjoints de sécurité, s'élèvera au total à 57 personnes, contre 52, soit une augmentation de 9 %.

La RTT ne doit pas porter atteinte aux capacités opérationnelles de la police. Nous avons pris des mesures pour cela.

M. Christian Estrosi - Vous aviez annoncé en juin les mesures qui figureraient dans votre projet de budget. Rien n'est venu les modifier depuis, et vous saviez que vous n'auriez rien de nouveau à proposer aujourd'hui.

Il s'agit de 3 000 postes, qui ne suffiront pas à compenser les départs en retraite et l'application des 35 heures, et qui ne nous rassurent pas sur l'efficacité du plan Vigipirate, dont vous ne paraissez d'ailleurs pas tenir compte dans votre présentation budgétaire. Alors que les agressions contre les policiers augmentent, dues à des truands plutôt mal organisés, qu'en serait-il s'il s'agissait de terroristes bien organisés ?

Face à la terrible pression exercée par les policiers et aussi par nos concitoyens, il vous fallait, ce 12 novembre, tenter de calmer le jeu en présentant des propositions supplémentaires. Le mystère a été soigneusement entretenu ce matin. A 15 heures, nous avons donc pris connaissance des dispositions qui devraient révolutionner la situation (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste).

Je n'ai guère réussi à les identifier. Vous annoncez, si j'ai bien compris, un grand plan d'action sur cinq ans avec quatre objectifs : une concertation (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) ; un renforcement de la présence policière sur le terrain, mais avec quels moyens ? La protection du personnel à l'aide de moyens matériels tels que les gilets pare-balles ; des moyens de fonctionnement et d'équipement accrus.

Vous avez ainsi jeté dans le débat... (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste)

Mme la Présidente - Veuillez conclure !

M. Christian Estrosi - Il s'agit de la sécurité des policiers et des Français ! Ni les uns ni les autres ne seront rassurés par vos propositions, dont vous dites qu'elles pourraient être détaillées dans le collectif...

Mme Nicole Bricq - Il est fait pour cela !

M. Christian Estrosi - La représentation nationale a le droit d'en savoir un peu plus !

M. le Ministre - Que dois-je faire pour que vous me compreniez ? Je doute en tout cas que vos questions convainquent les policiers et les citoyens de votre bonne foi !

Les 3 000 postes créés sont, je le répète, le solde net, car les départs à la retraite sont désormais remplacés automatiquement, ce qui n'était pas le cas de votre temps. La meilleure preuve en est que les écoles de police, qui tournaient naguère à mi-capacité, sont pleines aujourd'hui ! Quant au ministre de l'intérieur lui-même, vous n'avez pas lieu de vous apitoyer sur son sort, car celui-ci est plus enviable quand les budgets et les arbitrages sont bons que quand ils sont tels qu'on les connaissait sous nos prédécesseurs... Fin juin, le Premier ministre a décidé à ma demande le principe d'une démarche stratégique sur cinq ans, dont une première étape sera lancée dès 2002, compte tenu de la situation, dans le cadre du plan d'action renforcée contre la violence.

M. Christian Estrosi - Mais quel sera son contenu ?

M. le Ministre - Vous devez le connaître, puisque vous en avez vous-même cité les quatre objectifs... Je n'entrerai pas plus dans les détails, car c'est par le dialogue et la concertation, et non par les effets d'annonce, que nous répondrons aux attentes et aux inquiétudes des policiers et de leurs organisations syndicales. Le directeur général de la police nationale recevra ces dernières dès cette semaine, et je les recevrai moi-même ensuite pour arrêter le contenu précis du plan d'action renforcée contre la violence. Voilà qui a, je le crois, le mérite de la clarté : nous sommes bien, je le répète, dans une logique d'accroissement des moyens et des effectifs, et les policiers savent que je ne me paie pas de mots, et que je ne prends pas de décisions qui ne soient pas applicables (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Maxime Gremetz - Les collectivités éligibles à la dotation de solidarité urbaine doivent intégrer dès 2002 dans leurs budgets les conséquences de deux réformes majeures de cette législature : le passage aux 35 heures et les emplois-jeunes. Seule une commune de plus de 10 000 habitants sur cinq est déjà aux 35 heures ; le problème demeure donc entier pour les autres, d'autant que, contrairement aux entreprises qui bénéficieront de plusieurs milliards d'exonérations de charges, aucune mesure structurelle d'accompagnement n'est prévue en leur faveur. Quant à la prorogation pour trois ans de l'aide aux collectivités à faibles ressources pour la pérennisation des emplois-jeunes, elle n'intègre pas le coût structurel de celle-ci. Or, ce sont justement les communes les plus défavorisées qui ont le moins profité des effets de la croissance et qui ont le plus besoin de la présence et de l'action des services publics.

Quelles mesures nouvelles, de portée immédiate, le Gouvernement envisage-t-il pour accompagner ces deux réformes et éviter que ne s'aggravent encore les inégalités de moyens entre collectivités ? N'est-il pas temps, par exemple, d'écouter les associations d'élus qui demandent que l'assiette de la taxe professionnelle soit élargie aux actifs financiers des entreprises et que la DSU reçoive 700 millions supplémentaires ?

M. le Ministre - Votre question appelle une réponse similaire à celle que j'ai faite à M. Nayrou tout à l'heure, je serai donc bref et vous prie de m'en excuser. Je mesure l'ampleur des difficultés dont vous faites état, mais vous rappelle que le volume de la DSU s'est accru de 80 % depuis 1997. Le Gouvernement entend renforcer encore la péréquation au profit des collectivités les plus défavorisées, et le Parlement aura à se prononcer dans quelques mois sur ses propositions en la matière, lorsque le ministre des finances et moi-même lui remettrons notre rapport sur la réforme des finances locales, qui tendra notamment à mettre fin à certaines situations injustes ou obsolètes. Les évolutions liées aux emplois-jeunes, en particulier, seront bien prises en compte dans ce cadre.

M. Jean Dufour - Les missions de sécurité civile sont assurées, pour l'essentiel, par les sapeurs-pompiers et les marins-pompiers. Or, la question de leur financement n'a jamais été réglée de façon satisfaisante, sauf à Paris, car la départementalisation a eu pour effet d'accroître fortement les charges supportées par les départements et les communes. Le plafonnement de la participation de ces dernières constitue une reconnaissance de cet état de fait, mais non une solution générale. Nous avons proposé à plusieurs reprises de mettre à contribution, entre autres, les compagnies d'assurances, et d'obliger les entreprises, celles classées « Seveso » en particulier, à développer leur services de sécurité-incendie.

Le bataillon de marins-pompiers de Marseille, qui assure des missions dépassant largement les limites de la commune, a un coût de fonctionnement de 370 millions, entièrement supporté par la ville, et les 500 postes d'appelés ont disparu. Quelles mesures spécifiques envisagez-vous pour aider les SDIS, soulager les communes et les départements et faire contribuer l'Etat au fonctionnement et à l'équipement du bataillon de marins-pompiers de Marseille ? Quelle est votre position, dans la perspective de la réorganisation de la sécurité civile, sur l'existence même de ce bataillon ? Les personnels ont besoin d'être rassurés.

M. le Ministre - Les SDIS reçoivent de l'Etat une dotation qui avait été oubliée en 1996 et que ce gouvernement a rétablie à hauteur d'un milliard de francs. Comme l'a déclaré le Premier ministre devant le congrès de la fédération nationale des sapeurs-pompiers à Saint-Brieuc, le financement de la sécurité civile est indissociable de sa modernisation ; nous en parlerons à propos du projet de loi qui en traite, ainsi que de la loi de finances pour 2003. Quant au bataillon de marins-pompiers de Marseille, son mode de financement découle de l'organisation spécifique de la lutte contre l'incendie dans cette ville, organisation à laquelle les Marseillais et leurs élus sont particulièrement attachés, et je ne sache pas que quiconque ait demandé le transfert de cette compétence.

Mme Nicole Bricq - Les crédits d'équipement immobilier sont très faiblement consommés, et votre ministère n'est pas seul dans ce cas. Le rapport de la commission des finances indique que la banlieue parisienne ne bénéficiait d'aucun lancement cette année, et seulement d'un petit quelque chose l'an prochain : Savigny-le-Temple aura enfin son commissariat.

S'agissant des crédits de fonctionnement de la police de proximité, la Seine-et-Marne n'a pas à se plaindre, mais deux questions, sur lesquelles je vous interpelle depuis quatre ans, ne sont toujours pas réglées : l'utilisation du terrain acquis en 1996 à Meaux par le ministère de l'intérieur et la rénovation du commissariat de Mitry-Mory, particulièrement peu adapté à la police de proximité.

Pourriez-vous préciser la nature des projets et le rythme prévu pour réaliser ces investissements ô combien nécessaires en Seine-et-Marne, département qui compte 1,2 million d'habitants et qui est en augmentation démographique, si l'on veut que le concept de police de proximité y soit opérationnel ?

M. le Ministre - La police nationale bénéficie depuis 1997, et plus particulièrement depuis deux ans, d'un effort immobilier sans précédent. Les autorisations de programme ont presque doublé en quatre ans et atteindront avec la loi de finances rectificative, près d'un milliard de francs. 385 projets sont actuellement en cours pour un montant global de 5 milliards de francs.

75 000 m2 ont été mis en chantier en 2001 et 50 000 ont été livrés, ce qui représente douze projets. Sur huit grands projets immobiliers - c'est-à-dire de plus de 200 millions de francs -, quatre seront livrés au 1er trimestre 2003 : Strasbourg, Bobigny, Montpellier, Bordeaux. Mais le problème est que 25 % des appels d'offres restent infructueux, avec souvent des offres supérieures de 20 % aux enveloppes prévues.

En Seine-et-Marne, nous avons prévu de créer une annexe de l'hôtel de police de Meaux afin d'y reloger le service d'ordre public nord du département, le service médico-social et un centre auxiliaire de formation. Ce projet porte sur 1 500 m2 de surface utile alors que le terrain fait plus de 13 000 m2. Il laissera donc subsister une importante emprise libre d'emploi. Les procédures immobilières correspondant à cette opération se poursuivent.

Le commissariat de police de Mitry-Mory va quant à lui faire l'objet de travaux afin d'améliorer l'accueil du public et les conditions de travail des fonctionnaires. Une solution transitoire sera trouvée pour satisfaire un besoin urgent et avéré de surface supplémentaire. L'extension de ce commissariat fait partie des priorités de la direction centrale de la sécurité publique. Les études relatives à un projet définitif de relogement ou d'extension seront proposées dans le cadre de la programmation budgétaire 2002.

M. Jean-Pierre Balduyck - La police de proximité s'appuie sur la définition d'un territoire précis tandis que la délinquance est de plus en plus mobile. Une amélioration dans un quartier peut ainsi se révéler source de tensions dans un autre. Les réseaux et trafics s'organisent en intercommunalité. Comment relever ce défi ?

M. le Ministre - En 1997, nous avons commencé par définir 26 départements prioritaires. Le zonage a été utilisé pour la répartition initiale des adjoints de sécurité puis a servi de référence pour les mouvements de personnels et les attributions budgétaires. En mars 2000, allons-nous toutefois infléchir ce dispositif en décidant de généraliser la police de proximité à l'ensemble des circonscriptions de police. La délinquance mouvante est ainsi mieux prise en considération

Elle peut en outre faire l'objet d'actions ciblées, coordonnées par les préfets et les procureurs. La sécurité publique, la police judiciaire, les renseignements généraux et la gendarmerie unissent alors leurs forces. Combinées avec le travail que les élus accomplissent dans le cadre de la politique de la ville ou des contrats locaux de sécurité, ces opérations sont, je crois, très utiles pour aujourd'hui comme pour demain.

M. Jean-Luc Warsmann - J'attire votre attention, Monsieur le ministre, sur la nécessité de renforcer les moyens du commissariat de police de Sedan. Les habitants de cette commune comme de celles alentour sont en effet confrontés à une augmentation sans précédent d'actes de violence envers les personnes et les biens. Or, le commissariat souffre d'un sous-effectif chronique. Depuis juin 2000, la présence quotidienne de policiers sur les trois secteurs de la ville n'est donc plus assurée. L'unité d'investigation et de recherche a été affaiblie par deux départs. Le remplacement des fonctionnaires partis à la retraite ne se fait pas le jour même du départ : il faut dire que, compte tenu du nombre d'heures supplémentaires qu'ils ont effectuées dans leur carrière, les fonctionnaires ont beaucoup de jours à récupérer. C'est ainsi qu'un fonctionnaire censé partir le 2 mars 2002 ne vient plus depuis le 1er septembre dernier !

Enfin, les fonctionnaires de police qui travaillent dans les quartiers difficiles attendent une amélioration de leur traitement. Des négociations sont en cours sur une nouvelle bonification indiciaire. Les fonctionnaires attendent donc pour décembre une revalorisation, dont ils espèrent qu'elle aura effet rétroactif depuis octobre 2000.

M. le Ministre - La circonscription de police de Sedan compte 25 800 habitants et fait partie de la deuxième vague de généralisation de la police de proximité, qui s'achève actuellement. Il est prévu d'y affecter 41 gardiens de la paix, contre 35 en 1997, soit une augmentation de 17 %. Cet objectif doit être atteint avec l'arrivée début novembre de deux gardiens stagiaires. Par ailleurs, un poste de lieutenant de police supplémentaire sera créé en décembre 2001, pour une prise de poste début 2002. Un véhicule à quatre roues et six scooters ont été mis en dotation.

Je me félicite d'autre part qu'un CLS ait été signé dès le 30 mars 1998 et je crois que vous n'avez pas à le regretter.

Enfin, j'indique que le taux de criminalité de cette circonscription reste inférieur à la moyenne nationale pour les circonscriptions de même taille. Je note en outre que le nombre de faits élucidés a progressé de 38 % et celui des personnes mises en cause de 21 %, ce qui confirme la forte activité des services de police.

Enfin, 32,5 % des points de NBI iront à la police nationale, soit 64 millions en année pleine. L'usage précis de ces crédits est encore à l'étude, en raison notamment des réactions défavorables des personnels de police. Mais je puis vous préciser qu'ils ne seront pas perdus pour la police nationale. J'y veille particulièrement.

M. Christian Estrosi - Près d'une centaine de communautés d'agglomération ont été créées depuis la loi du 12 juillet 1999 et une trentaine d'autres devraient être constituées au 1er janvier 2002. Pour celle de Nice, le préfet devrait prendre un arrêté de création autour du 10 décembre, après avoir constaté qu'une majorité de communes représentant deux tiers de la population se sera prononcée favorablement. Les conseils municipaux disposent alors d'un mois pour désigner leurs représentants, ce qui fait que l'assemblée constitutive de la communauté d'agglomération ne pourra se réunir qu'après le 10 janvier. Or, pour bénéficier de la DGF majorée, il est nécessaire que la communauté d'agglomération soit créée au 1er janvier. Mais qu'entend-on par créer ? L'arrêté préfectoral suffit-il ou faut-il que l'assemblée communautaire se soit déjà réunie ?

Pourriez-vous par ailleurs me préciser quelle est la date limite autorisée, dans cette hypothèse, pour l'élaboration et le vote du budget ?

M. le Ministre - Le code général des collectivités territoriales précise que les communautés d'agglomération bénéficient de la DGF dès la première année où elles perçoivent une fiscalité propre. Il faut donc que l'arrêté préfectoral de création soit antérieur au 1er janvier 2002. Cette décision vaudra institution de la taxe professionnelle unique. Il appartiendra ensuite au conseil communautaire de prendre, entre le 1er janvier et le 31 mars 2002, l'ensemble des décisions pour la mettre effectivement en _uvre - vote des taux et autres.

M. Christian Estrosi - Merci.

Mme la Présidente - J'appelle les crédits inscrits à la ligne « intérieur et décentralisation ».

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ÉTAT B

Les crédits de l'état B, titre III, mis aux voix, sont adoptés.

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Titre IV

M. le Ministre - Dans le prolongement de l'exonération de vignette consentie en 2001 aux personnes physiques et aux associations, fondations et syndicats, la première partie du projet de loi de finances a étendu l'exonération de taxe différentielle sur les véhicules à moteur, sur proposition de votre commission des finances, aux véhicules de moins de 3,5 tonnes et aux personnes morales, dans la limite de trois véhicules par période d'imposition. L'amendement 71 vise à compenser la perte de recettes des départements sur la base du produit qu'ils auraient dû percevoir au titre de la vignette, indexé dès 2002 sur l'évolution de la DGF - + 4,7 % - une provision de 159 millions d'euros est inscrite au budget. Elle sera régularisée en loi de finances rectificative pour 2002.

M. Gérard Saumade, rapporteur spécial de la commission des finances pour les collectivités locales - La commission n'a pas examiné cet amendement, mais nul doute qu'elle aurait émis un avis très favorable puisqu'il tire les conséquences de notre vote sur la première partie du projet de loi de finances.

M. Christian Estrosi - Le groupe RPR votera cet amendement.

J'observe cependant qu'après la suppression de la part régionale de la taxe d'habitation, puis de la vignette, cette mesure réduit encore l'autonomie fiscale des collectivités locales. Les conseils généraux auront du mal à financer l'APA au 1er janvier...

M. Bernard Derosier et Mme Nicole Bricq - Ce n'est pas vrai !

M. Christian Estrosi - Le Gouvernement fait financer les mesures qu'il prend par les collectivités locales, tout en rognant leur autonomie fiscale. Il faut donc ouvrir un grand débat sur la décentralisation elle-même.

L'amendement 71, mis aux voix, est adopté.

Les crédits de l'état B, titre IV, ainsi modifiés, mis aux voix, sont adoptés.

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ÉTAT C - Titres V et VI

Les crédits des titres V et VI de l'état C sont successivement adoptés.

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APRÈS L'ART. 73

Mme la Présidente - En accord avec la commission des finances, j'appelle maintenant un amendement tendant à insérer un article additionnel après l'article 73.

M. René Dosière, rapporteur pour avis pour l'administration générale et les collectivités locales - En l'absence de Bruno Le Roux, je présenterai l'amendement 45 rectifié, que la commission des lois a accepté pour lancer le débat sur la dotation de fonctionnement minimale attribuée aux département sur des critères de ruralité. Nous proposons d'en faire bénéficier les départements urbains en difficulté en introduisant les critères de la proportion de logements sociaux et de l'effort fiscal. Si cet amendement ouvre la boîte de Pandore, il nous permet de vous interroger sur vos projets en faveur des départements en difficulté. Le Pas-de-Calais, le Territoire-de-Belfort, la Seine-Maritime, la Seine-Saint-Denis ou l'Aube seraient concernés.

M. Raymond Forni - La réforme récente de l'ordonnance de 1959 vise principalement à permettre au Parlement de mesurer l'efficacité des lois qu'il vote. Or, la loi Galland de 1988 n'a pas atteint ses objectifs. La DFM est accordée sur la base de critères non pertinents : un potentiel fiscal par habitant inférieur d'au moins 40 % à celui de l'ensemble des départements - cas très rare - et un potentiel fiscal superficiaire moyen inférieur d'au moins 60 % à la moyenne nationale - peu adapté puisque certains départements éligibles ont un potentiel fiscal par habitant supérieur à celui de certains départements non éligibles. Les départements supportant des charges sociales élevées et consentant un effort fiscal soutenu devraient pouvoir bénéficier de cette dotation. Puisque vous avez engagé une réflexion sur la solidarité, je souhaitais attirer votre attention sur la situation de ces quelques dizaines de départements. J'attends que vous nous fassiez part de l'état de votre réflexion et des délais dans lesquels cette réforme nous sera présentée. Je me garde de me fonder sur l'exemple du département du Territoire-de-Belfort que je représente ici : de nombreux autres attendent votre réponse avec intérêt. Le travail budgétaire de l'Assemblée consiste aussi à évaluer l'utilité des sommes affectées à un domaine particulier, celui de l'aide aux départements.

M. Gérard Saumade, rapporteur spécial pour les collectivités locales - En faisant passer le nombre de départements bénéficiaires de 24 à 29 pour une enveloppe inchangée, cet amendement met en cause la péréquation. Il est avant tout un amendement d'appel en faveur d'une dotation spécifique aux départements urbains.

La commission des finances a rejeté cet amendement en l'état.

M. le Ministre - La DGF inclut un concours particulier pour les départements défavorisés, alimenté par les plus riches : la dotation de fonctionnement minimale. Cet amendement très pertinent soulève la question de la réforme de cette DFM, qui ne prend pas suffisamment en compte les charges sociales des départements urbains. Il s'agit de mieux tenir compte de ces charges, mais sans bouleverser la répartition au détriment des départements ruraux. Je ne pense pas que cela puisse être traité au détour de la discussion du budget, d'autant que le Gouvernement a engagé une concertation avec les élus sur une réforme d'ensemble des ressources financières locales. La note d'orientation que j'ai présentée avec Mme Parly au comité des finances locales abordait ce thème et le rapport qui sera soumis au Parlement avant la fin de l'année proposera des solutions. Par ailleurs, l'amendement pose quelques problèmes, notamment en ce qui concerne la définition des critères. Je vous demande donc de le retirer, en m'engageant à vous faire des propositions pour régler le problème.

M. Maxime Gremetz - Cet amendement est très intéressant. En effet, à chaque disposition sociale que nous avons à examiner, l'APA en est le dernier exemple, nous devons nous battre pour que ceux qui font le plus en matière sociale ne soient pas pénalisés - et cela peut atteindre des sommes astronomiques pour certains départements. Je ne suis pas de ceux qui considèrent que le département a fait son temps ; aussi est-il indispensable de résoudre ce problème de péréquation. Toutefois, outre que la rédaction de l'amendement n'est pas sans reproche, replacer cette question dans une vue d'ensemble, ainsi que le ministre l'a proposé, paraît opportun.

Monsieur le ministre, je n'aurais pas voté le budget de l'intérieur tel qu'il était ce matin. La gravité de la situation imposait des efforts supplémentaires dans plusieurs domaines. Les engagements précis que vous avez pris dans ces matières m'ont toutefois amené à voter votre budget plutôt qu'à m'abstenir.

M. René Dosière, rapporteur pour avis pour l'administration générale et les collectivités locales - Je considère, compte tenu de la réponse du ministre, que notre objectif est atteint. Je retire donc cet amendement et nous reprendrons le débat sur les propositions qui nous seront faites.

Mme la Présidente - Nous avons donc terminé l'examen des crédits du ministère de l'intérieur.

La séance, suspendue à 18 heures 5, est reprise à 18 heures 15.

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SOLIDARITÉ, SANTÉ, ÉCONOMIE SOLIDAIRE

Mme la Présidente - Nous abordons l'examen des crédits du ministère de l'emploi et de la solidarité, concernant la solidarité, la santé et l'économie solidaire.

Mme Elisabeth Guigou, ministre de l'emploi et de la solidarité - Dès son arrivée voici presque cinq ans, le Gouvernement s'était fixé des objectifs précis et ambitieux dans les domaines de la santé et de la solidarité. Trois grandes avancées auront marqué son action : la loi du 29 juillet 1998 relative à la prévention et à la lutte contre les exclusions, la loi du 27 juillet 1999 portant création de la couverture maladie universelle et la loi du 20 juillet 2001 instaurant l'allocation personnalisée d'autonomie. Depuis la loi de finances initiale pour 1997, l'augmentation des moyens de la section santé-solidarité aura été de plus de 20 % à structure constante base 2002.

Ce projet de budget vient parachever cet effort sans précédent, 14,8 milliards d'euros - 97,4 milliards de francs - et un taux de progression à structure constante de près de 3 %. Le montant de mesures nouvelles hors minima sociaux, soit 230 millions d'euros, est le double de celui atteint les années précédentes. Conjugué au budget de la sécurité sociale, ce budget participe à l'effort social de la Nation, qui représente 28,8 % du PIB.

La politique du Gouvernement comporte six lignes de force.

D'abord, le programme de prévention et de lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale.

Après les 230 millions d'euros de mesures nouvelles que je vous ai présentés mardi dernier dans le budget de l'emploi, plus 110 millions d'euros de mesures nouvelles sont destinés au PNLE dans ce budget. Il ne serait pas possible de mettre en place ce programme transversal sans la réunion en un seul ministère des politiques de l'emploi, de la santé et de la solidarité.

Ce deuxième programme complète celui mis en place par la loi du 29 juillet 1998. Les crédits mobilisés depuis plusieurs années, soit une trentaine de milliards de francs au total, sont consolidés. Ce deuxième volet est apparu nécessaire, la politique de lutte contre les exclusions et la réduction massive du chômage ayant fortement amélioré la situation sociale sans résorber suffisamment la précarité et la pauvreté.

Ce projet de budget développe le dispositif dans quatre directions.

D'abord, en finançant trois mesures relatives aux minima sociaux : le passage d'un à deux trimestres du cumul intégral entre un minimum social et un revenu d'activité, afin d'encourager le retour à l'activité et à l'autonomie ; la suppression de l'évaluation forfaitaire des ressources lors de l'attribution de l'allocation aux adultes handicapés ; la non-prise en compte des bourses allouées aux étudiants pour l'attribution du RMI aux parents, sujet suivi de très près par Catherine Génisson et par d'autres parlementaires, en particulier du Nord-Pas-de-Calais.

Ensuite, en permettant une amélioration de la qualité des soins médicaux pour les plus défavorisés : grâce à une progression de 40 % des crédits, des actions seront menées notamment par le biais des programmes régionaux d'accès à la prévention et aux soins - PRAPS ; 3 millions d'euros de mesures nouvelles seront consacrés aux plus démunis, s'ajoutant aux mesures prises dans le cadre du PLFSS pour le PAS dans les hôpitaux.

En troisième lieu, en fournissant les moyens en personnel nécessaires. En matière de formation au travail social, ce projet de budget est marqué par la création de 3 000 places supplémentaires en contrats de formation, par une augmentation corrélative du nombre de bourses allouées aux étudiants et par une réforme attractive du système de bourses, qui sera calqué sur celui en vigueur à l'Education nationale.

Enfin, en répondant à l'urgence sociale. S'agissant de l'accompagnement social, 50 maisons de la solidarité seront mises en place. Concernant l'hébergement d'urgence, 500 nouvelles places seront créées dans les centres d'hébergement et de réinsertion sociale. Par ailleurs, les efforts concernant l'accueil des demandeurs d'asile devraient rendre à nouveau disponibles les places qu'ils occupent dans les centres d'accueil d'urgence et les CHRS.

L'effort d'intégration des étrangers et principalement des demandeurs d'asile est en effet le deuxième grand axe de ce budget. Afin de prendre en charge dans la dignité ces personnes qui ont dû fuir leur pays d'origine, 1 500 nouvelles places en centres d'accueil pour demandeurs d'asile, 2 400 places en centres d'hébergement d'urgence et un centre de premier accueil en région parisienne seront créés.

Troisième axe : la politique en faveur des handicaps.

Plus de trois millions de personnes en France sont affectées d'un handicap plus ou moins grave. Notre objectif est double : garantir la solidarité en faveur des personnes les plus touchées, favoriser l'autonomie de toutes celles qui peuvent s'intégrer dans le milieu de vie ordinaire.

Le budget 2002 mettra en _uvre le plan pluriannuel en faveur des personnes handicapées annoncé par le Premier ministre le 25 janvier 2000. Ainsi, 1 500 places en centres d'aide par le travail et 1 058 postes d'auxiliaires de vie seront créés. Plusieurs des recommandations contenues dans le rapport de la mission d'évaluation et de contrôle de l'Assemblée nationale ont été prises en compte, notamment le principe de la fusion des deux sections des COTOREP.

Quatrième axe : les personnes âgées.

La loi du 20 juillet dernier créant l'APA met en synergie l'ensemble des acteurs publics - Etat, caisses de sécurité sociale et collectivités territoriales. Le dispositif financier a pour finalité la solvabilisation des personnes âgées en perte d'autonomie et le renforcement des services qui leur sont rendus. Dans le cadre du PLFSS, 6 milliards de francs sur 5 ans ont ainsi été attribués aux établissements hébergeant des personnes âgées dépendantes en vue de leur médicalisation ; nous avons également décidé de consacrer des crédits à la lutte contre la maladie d'Alzheimer et les autres démences. Par ailleurs, dans le cadre de ce budget, des crédits d'Etat sont destinés à la création de 160 nouveaux centres locaux d'information et de coordination - notre objectif étant d'atteindre 1 000 CLIC d'ici à 2005 -, ainsi qu'au renforcement des moyens de lutte contre la maltraitance des personnes âgées.

Cinquième axe : l'amélioration des politiques d'Etat en matière de santé.

Bien sûr, l'aide de l'Etat est confortée concernant la lutte contre les pratiques addictives, contre le sida et contre les maladies sexuellement transmissibles.

Surtout, nous changeons d'échelle pour les programmes de santé publique. En consacrant 15,2 millions d'euros de mesures nouvelles aux programmes prioritaires, qui se trouvent ainsi quadruplés, le gouvernement entend affirmer le rôle indispensable de pilotage de l'Etat dans la lutte contre le cancer, le plan national nutrition santé, la prévention du suicide, le programme d'actions en santé mentale et le renforcement de la contraception.

L'offre de soins est soutenue, d'une part, par une progression de 27 % des crédits consacrés aux bourses pour les étudiants en formation paramédicale, ce qui devrait contribuer au recrutement des infirmières, et d'autre part, par une inscription de presque 200 millions d'euros, dont 132 par voie d'amendement, pour le fonds d'investissement et de modernisation des hôpitaux conformément aux engagements que j'ai pris en faveur des hôpitaux publics la semaine dernière lors du débat sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale.

Sixième axe : les moyens du ministère.

Il s'agit de répondre à des attentes fortes de nos concitoyens en matière d'amélioration de la sécurité sanitaire, de développement de la qualité des soins et de la lutte contre les exclusions.

Notre ministère a innové ces dernières années, avec la réforme de l'administration centrale, la mise en place d'agences nationales sanitaires qui accroissent les capacités d'expertise des pouvoirs publics, et en matière de santé publique, les agences régionales de l'hospitalisation.

Le PLF 2002 confirme la priorité accordée à la capacité d'action du ministère. Il faut ajouter aux créations nettes - 250 emplois, niveau jamais atteint ces dix dernières années -, 50 emplois pour la résorption de l'emploi précaire.

Cet accroissement, associé à une diminution des emplois vacants, permet de renforcer les effectifs qualifiés. 212 emplois sur les 250 sont destinés au renforcement des services déconcentrés, notamment pour accompagner la mise en _uvre du PNLE et celle de l'APA au 1er janvier 2002, pour laquelle 80 emplois ont été mis en place dès juillet 2001, ainsi que le renforcement de l'expertise et de la surveillance au service de la sécurité sanitaire.

L'amélioration des carrières se poursuivra à peu près comme en 2001 soit 5,34 millions d'euros, en particulier pour le corps des inspecteurs des affaires sanitaires et sociales. Il en ira de même de la revalorisation indemnitaire avec 5,35 millions d'euros.

Enfin les crédits de fonctionnement des services progressent de 8 %.

Ce budget amplifie également les efforts en faveur des rapatriés, notamment par la prorogation du « plan Harkis » jusqu'au 31 décembre 2002, pour que la nation continue à aider ces 40 000 personnes, de l'égalité entre les femmes et les hommes afin de développer la lutte contre la violence faite aux femmes ou d'améliorer l'égalité professionnelle, ou de l'économie sociale et solidaire avec le renforcement de ses moyens de près de 38 %.

Ce projet de budget, s'il reste fidèle par son taux de progression aux efforts de solidarité que consent chaque année la nation, tranche, par l'importance des mesures nouvelles, presque 230 millions d'euros, avec les années antérieures qui n'en avaient que la moitié.

Cet effort exceptionnel a en particulier permis de financer le deuxième plan nationale de lutte contre l'exclusion et la naissance d'une véritable politique de santé publique financée par l'Etat (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Pierre Forgues, rapporteur spécial pour la solidarité - Avec 87 milliards, les crédits de la solidarité augmentent de 2,58 %. Ils permettront d'améliorer le bilan déjà très positif de la législation, en particulier pour la lutte contre les exclusions.

Ce budget comporte quelques mesures utiles, comme le cumul durant deux trimestres des revenus d'un minimum social et d'une activité. De même les bourses d'études ne seront plus prises en compte pour l'attribution du RMI, et l'évaluation forfaitaire des ressources pour obtenir l'AAH est supprimée.

Vous pouvez aussi conforter les politiques sociales en direction des personnes handicapées, de l'insertion à travers le RMI, de la famille et de l'enfance, des personnes âgées et des droits des femmes.

Les crédits pour l'AAH, avec 28 milliards, augmentent de 5,7 %. Le nombre des allocataires progresse, passant de 539 000 en 1990 à 712 000 en 2000. Ainsi s'explique la hausse des crédits, renforcée par la suppression de l'évaluation forfaitaire des ressources, qui représente environ 100 millions en 2002.

L'an dernier, rapporteur de la mission d'évaluation et de contrôle, j'avais présenté dans la perspective de l'indispensable réforme des COTOREP, certaines recommandations. « Que sont-elles devenues ? » vous ai-je ensuite demandé. Votre réponse est malheureusement arrivée trop tard pour figurer dans mon rapport écrit d'aujourd'hui.

Le principe de la fusion des deux sections a été retenu, et sera à la base de la rénovation prochainement soumise à la concertation, et pour laquelle vous vous engagez à modifier les textes réglementaires d'ici la fin de la législature, il reste donc peu de temps.

D'ici là vous adresserez aux préfets une note pour qu'ils adoptent des mesures pratiques en vue de la fusion. Vous allez mettre en place les contrats d'objectif concernant les COTOREP, créer 43 postes de médecins coordonnateurs, revaloriser leur traitement, et développer leur travail en réseau.

Ainsi, même si rien n'est définitif, vous avez tenu compte des recommandations de la MEC, ce qui est très encourageant.

Les dépenses au titre du RMI s'élèvent à un peu plus de 29 milliards, soit une réduction de 0,74 % par rapport aux crédits de 2001. Ces dépenses baissent donc, pour la première fois mais très légèrement sous l'effet de mouvements contrastés. Le nombre d'allocataires est passé en métropole à 965 000 en décembre 2000, soit 52 000 de moins.

L'allocation, en revanche, a augmenté de 2,2 % le 1er janvier 2001, et son alignement dans les DOM sur celle de la métropole coûtera 667 millions en 2002. J'y ajoute le prolongement à deux trimestres du cumul intégral du RMI et du revenu d'un emploi, ce qui prolongera la présence des allocataires concernés dans le dispositif.

La subvention de fonctionnement des CHRS augmente de 3,6 % représentant 2,74 milliards et la création de 5 600 places en application du plan quinquennal. Restent de trop nombreux cas où le nombre de personnes accueillies dépasse la capacité budgétaire des CHRS ; ainsi l'un d'entre eux, à Dijon, reçoit 220 personnes pour un maximum théorique de 144 places.

Les actions en faveur de la famille et de l'enfance comportent une hausse de 3,7 % des crédits de l'allocation de parent isolé, qui atteignent 4,85 milliards. Dans l'action sociale en faveur des personnes âgées figure une mesure nouvelle de 80 millions qui permettra de financer 160 nouveaux CLIC, les crédits consacrés à ces centres s'élevant ainsi à 150 millions. L'APA, qui remplace la PSD le 1er janvier prochain, consacre pour les personnes âgées le droit à l'autonomie, à la fois universel et personnalisé. L'allocation n'est pas soumise à un plafond de ressources, mais elle ne peut pas faire l'objet d'un recours en récupération, ce qui est très important. Le nombre de bénéficiaires de l'APA est estimé à 800 000 et son coût devrait atteindre de 15 à 17 milliards par an en 2002 et 2003. Le financement est assuré par une contribution de 11 milliards des départements, par reconduction des moyens existants, et par un effort supplémentaire de leur part d'environ 2,5 milliards, ce qui est une bonne façon d'approfondir la décentralisation. En régime de croisière, l'APA devrait coûter à peu près 23 milliards par an.

La solidarité s'exprime aussi en faveur des femmes. Les crédits, dans ce domaine, ont augmenté de 24 % en 2000, de 10,2 % en 2001 et augmenteront de 6,7 % l'an prochain, atteignant 115 millions. Au début de la législature, ils ne dépassaient pas 80 millions. Ces sommes peuvent paraître modestes, mais les crédits en faveur des droits des femmes dépassent largement le cadre du ministère de la solidarité, comme au reste toutes les actions de solidarité.

Malgré le caractère prioritaire de ce budget depuis 5 ans, qui s'est traduit par la création de places et d'emplois dans le secteur sanitaire et social, par un plan de lutte contre l'exclusion, par un effort pour l'insertion, par la mise en place de l'APA, par la prochaine réforme des COTOREP, votre rapporteur spécial, conscient de l'immensité des besoins et de l'ampleur des défis, mais confiant dans la justesse des choix du Gouvernement, dans la vigueur des efforts déployés et dans la qualité des personnels de l'Etat comme des départements, vous recommande, au nom de la commission des finances, d'adopter les crédits de la solidarité (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Francis Hammel, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles pour l'action sociale - Avec 13,26 milliards d'euros, les crédits de la solidarité progressent de 2,58 %. S'agissant du dernier budget de la législature, je souhaite le replacer dans le cadre global de l'action menée par le Gouvernement et sa majorité depuis 1997. L'augmentation constante des crédits aura permis, conformément à nos engagements, de mettre en _uvre une véritable politique de réduction des inégalités, notamment devant l'emploi, la santé et la protection sociale, grâce aux emplois-jeunes, à la loi de lutte contre les exclusions, aux 35 heures, à la CMU, à l'allocation personnalisée d'autonomie, ainsi qu'aux lois de modernisation sociale et de rénovation sociale et médico-sociale, qui seront définitivement adoptées avant la fin de cette année.

Le budget 2002 permet de prolonger et d'approfondir l'effort en faveur des personnes en difficulté, ainsi que des personnes handicapées, conformément aux engagements pris par le Premier ministre devant le comité national consultatif des personnes handicapées le 25 janvier 2000.

La mise en _uvre du programme de prévention et de lutte contre la pauvreté et l'exclusion est financée par 96,9 millions d'euros de mesures nouvelles. L'accès effectif aux droits sociaux suppose que soit réduit le décalage entre les mesures que nous votons et levés les obstacles rencontrés par les personnes en difficulté : ignorance des dispositifs et des lieux où s'adresser, complexité des démarches, attitude peu compréhensive, voire humiliante, de certains services, longueur et imprévisibilité des délais de versement. 3 000 places sont donc créées dans les centres de formation des travailleurs sociaux.

La dotation des centres d'hébergement et de réinsertion sociale est portée à 417,5 millions d'euros, soit une augmentation de 3,57 %. Afin de faire face aux difficultés rencontrées par ces structures, notamment dans les régions où existe un fort besoin d'hébergement de populations d'origine étrangère, 1 500 places seront créées dans les centres d'accueil pour demandeurs d'asile, ainsi que 2 400 places d'hébergement d'urgence, et un centre de premier accueil de 500 places sera ouvert en région parisienne.

Le programme TRACE a permis à près de 100 000 jeunes de bénéficier d'un suivi personnalisé et, pour plus de la moitié d'entre eux, d'une insertion professionnelle. Il a été amplifié et complété en juillet dernier par la création de bourses d'accès à l'emploi, et le nombre de jeunes inscrits passera de 60 000 cette année à 120 000 l'année prochaine.

S'agissant des personnes handicapées, je m'étendrai particulièrement sur la mise en _uvre du plan Handiscol, car la scolarisation des enfants handicapés en milieu ordinaire reste un problème lancinant, surtout dans le second degré. Durant l'année scolaire 1999-2000, près de 20 000 enfants handicapés ont été scolarisés à temps plein et 7 000 à temps partiel dans le premier degré, sans compter les 44 600 accueillis dans les CLIS ; dans le second degré, 12 600 enfants ont été scolarisés à temps plein, 900 à temps partiel, et 1 300 dans des unités pédagogiques d'intégration. Au total, donc, plus de 86 000 enfants ont été scolarisés en dehors des structures de l'éducation spécialisée. Compte tenu des difficultés d'accueil dans lesdites structures et des problèmes rencontrés par les parents, ces chiffres traduisent une lente, trop lente évolution. Une mobilisation particulière est nécessaire pour la prochaine rentrée ; un bilan de la dernière sera effectué à cet effet d'ici la fin du mois.

Six mesures concrètes ont été prises dans le cadre d'un plan triennal, et sont donc poursuivies cette année, pour favoriser cette intégration. En premier lieu, 8,6 millions d'euros seront distribués aux établissements pour qu'ils acquièrent des matériels spécifiques permettant d'adapter l'équipement, notamment informatique, des élèves handicapés moteurs, ou déficients visuels ou auditifs ; ces matériels, tout en restant propriété de l'Etat, sont mis à disposition des élèves, qui peuvent en conserver l'usage tout au long de leur scolarité, même s'ils changent d'établissement, mais l'acquisition ou la location de matériels à usage collectif est également possible.

Deuxièmement, et comme l'an dernier, 500 postes d'auxiliaires d'intégration scolaire supplémentaires seront créés, auxquels il faut ajouter les postes d'aides-éducateurs intervenant dans les CLIS ou les UPI. Troisièmement, les SESSAD, dont la capacité d'accueil est passée de 5 000 places en 1985 à 18 000 places en 1998, verront réduite l'inégalité de leur répartition sur le territoire, ainsi que par type de déficience, grâce à un effort financier porté à 12,2 millions d'euros. Quatrièmement, les UPI seront ouvertes à l'ensemble des déficiences, et non plus seulement aux déficiences intellectuelles. Cinquièmement, le cursus des IUFM comportera désormais des actions de formation et de sensibilisation aux modalités particulières de scolarisation des enfants handicapés, et des stages seront organisés, en outre, à l'intention des enseignants du second degré. Enfin, des groupes de coordination seront constitués dans tous les départements, afin notamment de faire chaque année le bilan de la rentrée scolaire.

Cet ensemble de mesures constitue une action volontariste sans précédent, et assortie des moyens budgétaires nécessaires. Reste à vaincre les résistances, à faire évoluer les mentalités et à mieux coordonner les dispositifs.

Sur un plan plus général, le plan triennal a marqué une réorientation de la politique du handicap vers le soutien à domicile, conformément aux souhaits des handicapés eux-mêmes. La généralisation des sites pour la vie autonome se poursuit : 8,3 millions d'euros sont affectés en 2002 à la création de 27 nouveaux sites, les 30 derniers devant voir le jour en 2003. En outre, 12,5 millions d'euros sont consacrés au développement des services de soins infirmiers à domicile et à la création d'emplois d'auxiliaires de vie.

Cet effort n'exclut pas la création de places en établissement, toujours nécessaires pour les personnes lourdement handicapées.

Pour 2002, le plan pluriannuel prévoit une enveloppe de 230 millions de francs, financée sur des crédits d'assurance maladie.

Il a été décidé, lors de l'examen du projet de loi de finances de la sécurité sociale, de majorer de 10 millions d'euros l'enveloppe prévue pour l'accueil des artistes. Pour 2002, l'effort initial est ainsi multiplié par deux, ce qui permettra de créer 600 places.

Enfin, 14,9 millions d'euros sont affectés à la création de 1 500 places nouvelles en CAT et 6 millions à la rénovation des ateliers protégés.

Je voudrais pour conclure appeler l'attention sur quelques points particuliers. D'abord, sur la nécessité de réformer les COTOREP : des moyens supplémentaires leur sont alloués, cette année comme l'année précédente, mais la réorganisation ne s'opère que lentement. Ensuite, sur la nécessité de sortir rapidement les décrets relatifs à l'AES et aux comités départementaux consultatifs des personnes handicapées. Autre réforme indispensable : celle du système des tutelles, car le nombre des mesures de tutelle ou de curatelle ne cesse de croître. Enfin, il faut améliorer la protection sociale des bénéficiaires de l'AAH : je comprends qu'une extension massive de la CMU soit difficile, mais on pourrait au moins les exonérer du forfait hospitalier et maintenir intégralement leur allocation durant un séjour à l'hôpital.

Je sais, Madame la ministre, que vous prendrez en compte nos préoccupations et que beaucoup de chantiers sont ouverts. A nous tous d'y participer activement pour faciliter l'intégration et l'autonomie de nos concitoyens en difficulté.

La commission des affaires culturelles a émis un avis favorable sur ces crédits (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Gilbert Mitterrand, rapporteur spécial de la commission des finances pour la santé - Pour la cinquième année consécutive, j'ai l'honneur et l'avantage de présenter des crédits en hausse. Elle atteint pour 2002, à périmètre constant, 6,52 %, soit un taux très supérieur à la hausse moyenne du budget général, ce qui confirme bien la priorité donnée à la santé et à la sécurité sanitaire. Ce budget témoigne aussi d'une volonté de justice sociale, qui se traduit ici par une amélioration de l'accès aux soins des plus démunis.

L'agrégat « politiques de santé publique » augmente de 7,4 %, l'agrégat « offre de soins » de 3,62 % et l'agrégat « gestion des politiques de santé et de solidarité » de 6,7 %. Encore ce fascicule budgétaire est-il loin de recenser à lui seul tous les crédits publics consacrés à la santé publique. De sorte que l'effort réel consenti par les pouvoirs publics n'est pas toujours apprécié à sa juste mesure.

Je me félicite à cet égard de la rupture que marque le projet de loi relatif aux droits des malades et à la qualité du système de soins. Est ainsi affinée la primauté d'une politique de santé, dont la loi de financement de la sécurité sociale deviendra un outil de mise en _uvre, alors que les ordonnances de 1996 nous contraignent à l'inverse. Le Parlement débattra de la santé publique avant de discuter du PLFSS, dont les crédits seront votés en conséquence. Cela devrait à l'avenir nous éviter, je l'espère, les analyses alarmistes, réductrices ou démagogiques qui nous affligent régulièrement lors de l'examen du fascicule santé.

Le projet sur les droits des malades confirme par ailleurs bien des orientations que nous avions approuvées ou préconisées, année après année, lors de l'examen des crédits de la santé : accent mis sur la prévention et sur la dimension régionale de celle-ci, émergence d'une véritable démocratie sanitaire, formation continue, développement des réseaux de santé... On les retrouve dans ce budget pour 2002.

Loi contre les exclusions, loi sur la veille sanitaire, sur la CMU... Tous ces textes dessinent une remarquable évolution de notre système de santé publique, qu'accompagnent les budgets santé successifs.

Le présent budget s'articule autour des axes prioritaires définis en février dernier à Strasbourg, lors de la conférence nationale de santé, et conforte ceux qui font déjà l'objet de programmations pluriannuelles.

Je pense notamment au plan quinquennal de lutte contre le cancer, commencé en 2000 et dont les crédits doublent en 2002 ; du plan triennal de lutte contre les toxicomanies, adopté en 1999 et qui bénéficie cette année de 25 millions de francs de moyens complémentaires ; au programme de lutte contre le sida et l'hépatite C qui, en 2002, représente 20 % des crédits consacrés à la santé publique et qui se voit renforcé par une mesure nouvelle de 7,15 millions de francs. Je pense aussi à la prévention du suicide, pour laquelle une stratégie a été arrêtée, pour la période 2000-2005, dans le cadre de la présidence française de l'Union européenne.

Il faudrait citer aussi le plan de lutte contre les maladies cardio-vasculaires ; contre le diabète, l'asthme, l'insuffisance rénale chronique ; le renforcement des actions de recherche et de formation en matière de santé mentale ; le programme national de nutrition-santé, lancé le 31 janvier 2001 pour cinq ans et doté de 5 millions de francs cette année ; le plan greffe, le plan de lutte contre la douleur... Des actions spécifiques en direction des jeunes, des femmes - avec le nouveau plan contraception -, des personnes âgées - en particulier celles souffrant de la maladie d'Alzheimer - et des personnes en situation précaire. La liste est longue, même si toutes les pathologies n'y figurent pas, car il faut bien définir des priorités.

En ce qui concerne la modernisation des soins, il faut noter l'augmentation des crédits de formation médicale et paramédicale. Elle prend en compte l'augmentation du nombre d'étudiants, notamment les 8 000 étudiants infirmiers supplémentaires que prévoit le protocole hospitalier du 14 mars 2000. Pour 2002, il s'agit de 140 millions de francs supplémentaires au titre de la majoration des subventions aux écoles de formation, de l'augmentation des bourses et des stages des internes en médecine du travail, santé publique et pharmacie.

Je relève cependant que l'agence technique de l'information sur l'hospitalisation n'a toujours pas de directeur. D'où viennent les difficultés ?

La baisse des crédits du fonds d'investissement pour la modernisation des hôpitaux, qui passent de 500 à 250 millions de francs, nous préoccupe davantage et surprend un peu en une période où l'attention quant aux besoins des hôpitaux ne peut pas avoir été distraite... Même en nous expliquant qu'il s'agit là d'une saine gestion des AP et des CP, même en stigmatisant les procédures, les délais et les retards accumulés, même en nous rassurant sur la disponibilité des crédits - ce qui ne rassure pas tout le monde, en particulier pas ceux qui ont un dossier prêt mais pas financé, je pense à Lannemezan, n'est-ce pas, Monsieur Forgues ? -, il est un peu difficile de justifier cet affichage, en particulier après les annonces faites ces dernières semaines. On aimerait donc y voir plus clair et comprendre l'effort réellement consenti, toutes sources de financement confondues, en faveur de la modernisation des hôpitaux. Au titre de cet effort, je dois citer les 500 millions accordés en toute urgence à l'hôpital de Toulouse, après le drame que l'on sait.

Je salue le nécessaire effort consenti en faveur de l'administration sanitaire et sociale. Si les recrutements sont à la hausse depuis quatre ans, une loi de finances rectificative avait dû être votée dans l'urgence l'année dernière. Cette année, 294 emplois sont budgétés, dont 242 pour les services déconcentrés. Ils sont les bienvenus pour mettre en _uvre la veille sanitaire, la loi contre l'exclusion, la CMU ou l'APA. Encore faut-il que les postes budgétés soient effectivement pourvus, ce qui requiert toute votre vigilance.

Je souhaiterais connaître l'état de votre réflexion sur le plan Biotox, initiative très positive parmi bien d'autres que ce projet de budget traduit. Je vous invite à l'adopter (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Jean-Pierre Foucher, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles pour la santé - Je parlerai d'une part des crédits de la santé, et d'autre part de la mission sur le fonctionnement de la direction générale de la santé que m'a confiée la commission des affaires culturelles.

Les crédits de la santé - politique de santé publique et offre de soins - augmentent de 6,52 %. Ceux qui sont dédiés à la politique de santé publique progressent de 7,4 % et privilégient la lutte contre le cancer, la malnutrition, la contraception ou le suicide. Nous souhaiterions être informés des résultats de l'évaluation de ces programmes. Les crédits dédiés à l'offre de soins progressent de 3,62 % et recouvrent les subventions aux écoles de santé et les bourses, en augmentation.

La dotation aux agences régionales de l'hospitalisation avait fait l'objet d'un effort significatif en 2001. Elle est reconduite. Nous nous interrogeons cependant sur le financement des hôpitaux via le fonds d'investissement pour la modernisation des hôpitaux, qui finance les opérations contribuant de façon déterminante à l'adaptation de l'offre de soins, dans les établissements publics et privés financés à la dotation globale. La procédure complexe et longue conduit à une sous-consommation des crédits que déplore notre commission.

Les crédits d'un milliard accordés à l'hôpital public dans le cadre de ce budget devraient transiter par le FIMHO en autorisations de programme. Vous nous l'avez confirmé et déposerez un amendement. La lenteur des procédures leur permettra-t-elle d'être utilisés en 2002 ?

La DGS avait fait l'objet l'an dernier d'une proposition de résolution de Bernard Accoyer tendant à créer une commission d'enquête. Ses dysfonctionnements devaient être mis au jour par la grève de décembre 2000. Notre commission avait rejeté cette proposition au profit d'une mission d'information confiée au rapporteur pour avis des crédits de santé. Dans ce cadre, j'ai effectué des auditions et des visites qui m'ont convaincu que l'administration centrale traverse une crise conjoncturelle et structurelle.

Durant les dix dernières années, elle a connu une véritable révolution.

Plusieurs nouveaux organismes ou agences se sont vu confier des missions qui relevaient d'elle. La réorganisation du ministère a également redéfini son rôle. Enfin, ses effectifs sont passés de 160 en 1988 à 320 fin 2001.

La crise est aujourd'hui passée, le problème des effectifs étant résolu.

La réorganisation des trois grandes directions du ministère de la santé - DGS, direction de l'hospitalisation et direction de la sécurité sociale - a confiné la première dans l'élaboration de la politique de santé publique et sanitaire, fondée sur une analyse des besoins, la hiérarchisation des priorités et l'évaluation des risques sanitaires et professionnels, ses capacités d'expertise scientifique devant être renforcées.

De nombreux personnels, notamment d'encadrement, ont été renouvelés, et un effort de gestion est consenti. Les effectifs sont notoirement insuffisants. En témoigne le taux de vacance, supérieur à 20 % en 2000 mais descendu à 11 % en 2001. Ce sont les catégories B et C qui font le plus défaut.

Ce taux est particulièrement élevé dans les sous-directions sensibles : près du quart des effectifs de la sous-direction « pathologies et santé » n'est pas pourvu.

Il faut régler les problèmes de l'insuffisance quantitative des corps techniques du ministère, de la nécessité de compétences nouvelles, de l'adaptation des supports budgétaires pour les personnels techniques et du manque de personnel administratif et de juristes.

Enfin, les locaux de la DGS étaient jusqu'à cette année dispersés sur plusieurs étages du gigantesque bâtiment du ministère, et en nombre insuffisant.

Les causes structurelles tiennent d'abord au recrutement : le vivier de professionnels de santé publique est étroit et nous ne disposons pas de réelle formation supérieure de santé publique. La direction est mal positionnée vis-à-vis des organismes ou institutions extérieurs.

Pour certains, les agences doivent inciter la DGS à se recentrer sur sa mission stratégique, pour d'autres elles ne sont que des sous-traitants de la DGS, qui doit les contrôler.

Enfin, il est difficile de gérer les crises sanitaires, hélas nombreuses ces dernières années. Les procédures judiciaires peuvent contribuer à ce climat de doute. Les crises sanitaires étant itératives, la DGS doit engager une réflexion afin de mieux les anticiper.

Résoudre la crise, c'est préparer l'administration de la santé à définir et à animer une véritable politique de santé publique. Il faut restaurer la crédibilité de l'administration centrale, qui a longtemps souffert d'une absence de doctrine. Notre pays n'a développé que tardivement une culture de santé publique, et ce retard se fait encore sentir.

Il faut mieux définir la place de l'administration centrale vis-à-vis du cabinet dont le rôle est de commander des expertises et de décider, sous l'autorité du ministre, l'administration centrale mettant en musique les décisions.

Il convient également de distinguer les tutelles administrative et stratégique, en préservant l'indépendance des agences. Le fait que le ministère de la santé ne soit pas un ministère de plein exercice ne facilite pas sa reconnaissance.

Cette administration doit enfin devenir plus efficace. Il faut donc continuer à renforcer ses effectifs. Si les objectifs cibles sont atteints, il semble que les missions de la DGS seront menées à bien. Se posera cependant le problème de l'application de la réduction du temps de travail.

J'insiste aussi sur la nécessité de recrutements extérieurs - par mise à disposition, contractualisation - et sur la constitution d'un nouveau corps de praticiens de santé publique à la création duquel réfléchit le directeur général de la santé.

M. Bernard Kouchner, ministre délégué à la santé - Excusez-moi, mais c'est moi qui le lui ai demandé !

M. Jean-Pierre Foucher, rapporteur pour avis - Ce corps ne serait pas créé ex nihilo mais procéderait d'une réorganisation à partir de ceux qui existent déjà.

Il faut enfin reconnaître le rôle de la DGS et les tensions qu'elle subit et revaloriser les primes. L'inégalité des primes entre ministères et leur exclusion de l'assiette du calcul des pensions est regrettable.

Enfin, j'insiste sur la nécessité de créer une véritable administration sanitaire déconcentrée. Les effectifs des directions régionales et départementales sont en effet dérisoires au regard de leurs missions complexes et qu'on ne cesse d'étendre. Ils n'ont pas été renforcés de toute la dernière décennie. Au contraire, la direction générale les ampute parfois à son profit. Il est indispensable que l'administration déconcentrée puisse, à côté de ses compétences sociales, poursuivre ses missions sanitaires.

La commission des affaires culturelles a donné un avis favorable à ces crédits, son rapporteur pour avis s'en étant remis à la sagesse de la commission (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF, du groupe du RPR, du groupe DL et sur les bancs de la commission).

La suite de la discussion du projet de loi de finances est renvoyée à la prochaine séance.

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PRISE D'ACTE DE LA VACANCE DES SIÈGES DE SEPT DÉPUTÉS ÉLUS SÉNATEURS

Mme la Présidente - Le président du Conseil constitutionnel informe l'Assemblée que les requêtes dirigées contre l'élection au Sénat de sept de nos collègues ont été rejetées par des décisions du 8 novembre 2001.

En conséquence, en application de l'article L.O. 137 du code électoral, il est pris acte de la vacance de leurs sièges de député.

Prochaine séance ce soir, à 21 heures.

La séance est levée à 19 heures 35.

              Le Directeur du service
              des comptes rendus analytiques,

              Jacques BOUFFIER


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