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Session ordinaire de 2001-2002 - 24ème jour de séance, 59ème séance

3ème SÉANCE DU LUNDI 12 NOVEMBRE 2001

PRÉSIDENCE de Mme Marie-Hélène AUBERT

vice-présidente

Sommaire

        LOI DE FINANCES POUR 2002 -deuxième partie- (suite) 2

        SOLIDARITÉ, SANTÉ, ÉCONOMIE SOLIDAIRE (suite) 2

        QUESTIONS 26

        TITRE IV 40

        TITRE VI 41

        APRÈS L'ART. 71 42

        ORDRE DU JOUR DU MARDI 13 NOVEMBRE 2001 43

La séance est ouverte à vingt et une heures.

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LOI DE FINANCES POUR 2002 -deuxième partie- (suite)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2002.

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SOLIDARITÉ, SANTÉ, ÉCONOMIE SOLIDAIRE (suite)

M. Marc Laffineur, rapporteur spécial de la commission des finances pour les rapatriés - L'ensemble des crédits relatifs aux rapatriés représente 176,25 millions d'euros. Ces crédits sont une nouvelle fois en baisse, cette année de 9,6 %. Pour une large part, cette évolution est liée à des raisons techniques : les procédures d'indemnisation sont maintenant achevées, et il ne reste plus que quelques dossiers à régler. Par ailleurs, les crédits relatifs aux contributions de l'Etat aux régimes de retraite, qui représentent 81 % du total, diminuent, puisque les dotations sont ajustées aux besoins, sans que cela compromette les droits des rapatriés.

La politique en faveur des rapatriés n'en appelle pas pour autant un satisfecit, bien au contraire. Ma première critique porte sur l'évolution des crédits d'intervention en faveur des rapatriés, l'augmentation de 1,02 % des dotations du chapitre ne résultant que d'un effet d'optique. Elle est le résultat de la rebdugétisation des sommes destinées au règlement de la rente viagère destinée aux harkis, rebudgétisation qui s'impose puisque le financement extrabudgétaire géré par Groupama sera épuisé au cours des tout premiers mois de 2002, seuls les crédits destinés à la réversion de cette rente aux veuves de harkis ayant été budgétés l'an dernier. Si l'on ne tient pas compte des effets de cette rebudgétisation, on constate une diminution de 32,9 % alors des crédits d'intervention.

Le Gouvernement ne pourra ainsi financer ni le plan harkis, qui a été prolongé jusqu'au 31 décembre 2002, ni l'accélération de la procédure d'examen des dossiers par la commission nationale de désendettement des rapatriés réinstallés dans une profession non salariée. A cet égard, l'objectif d'un règlement de 200 dossiers par an n'est pas réaliste, puisqu'il n'est pas financé.

Cette insuffisance des crédits n'est pas nouvelle, puisque, cette année déjà, les dépenses d'intervention de la délégation aux rapatriés dépassent les dotations initiales et ne sont financées que grâce à l'importante réserve de 100 millions de francs prévue par la loi de finances rectificative pour 1998 pour les aides au désendettement. Mais ces réserves seront insuffisantes en 2002, sauf à procéder à des coupes claires dans les actions.

Sur le fond aussi la politique en faveur des rapatriés est loin d'être exemplaire.

Certes, le Gouvernement a prolongé le plan harkis jusqu'au 31 décembre 2002, mais il a réduit la portée des mesures les plus favorables à l'insertion, celles relatives à l'emploi et à la formation des harkis de la deuxième génération. Même le nouveau terme prévu pour le plan apparaît en outre prématuré.

Certes, tout le monde souscrit à l'objectif de voir cette communauté entrer dans le droit commun, mais on ne peut ainsi décréter que tous les problèmes qui persistent et que j'ai pu mesurer en écoutant les associations et en me rendant en mission dans le Lot-et-Garonne et dans les Bouches-du-Rhône, seront pour autant réglés. Et on ne peut croire qu'il sera suffisant de tenir compte de ces difficultés dans le cadre des procédures de droit commun, notamment des aides à l'emploi et des contrats de plan Etat-régions. Le premier bilan des contrats de plan est en effet bien maigre !

Le Gouvernement a fait l'impasse sur le renforcement des moyens de l'ONAC, plus précisément des ODAC auxquels incombera, dès le 1er janvier prochain, l'accueil des harkis. Or ils ne sont prêts à reprendre que les compétences en matières de secours exceptionnels, de rente viagère et d'aide au conjoint survivant. Si la situation des harkis exige des mesures plus techniques, il faudra renforcer les moyens des ODAC des départements où les harkis sont les plus nombreux.

Le Gouvernement a également fait l'impasse sur les bourses d'études ou de formation. La circulaire du 15 mai 2001 prévoit ainsi qu'il n'y aura pas de bourses pour 2002-2003. C'est incompréhensible !

J'ai pu constater lors de ma visite sur le site de Bias que les opérations d'amélioration du logement n'étaient pas effectuées de manière satisfaisante. Si dans le cadre de la mise en _uvre du plan global de règlement des problèmes du camp de Bias, l'administration a ainsi fait procéder à une mise aux normes des habitations, elle n'a pas prévu le revêtement des garages. Voilà qui nuit profondément à la crédibilité de l'action de l'Etat.

Par ailleurs, il semble que la seule mesure favorable prévue cette année, la suppression de la condition de ressources pour la rente viagère, ne soit plus d'actualité. C'est regrettable car le projet de loi de finances rectificative aurait permis de prendre une décision de simple réparation des préjudices subis. Il est évident qu'il faut satisfaire cette demande, comme celle de revalorisation de la rente, qui est actuellement de 9 000 F par an, de pérennisation de la journée du 25 septembre, de décristallisation des sommes perçues en qualité d'anciens combattants par les quelques harkis qui n'auraient pas opté pour la nationalité française ou qui ne l'auraient pas fait assez tôt.

J'en viens au désendettement des rapatriés réinstallés dans des professions non salariées. Le bilan n'est vraiment pas brillant au vu des graves lenteurs de la commission nationale de désendettement. Ainsi, 764 dossiers seulement, sur les 2049 déposés, ont fait l'objet d'une décision. En deux ans, 56 plans d'apurement ont pu être examinés, dont 33 ont été mis en règlement. A ce rythme, il faudra dix ans pour que la commission vienne à bout de sa mission !

Certes un effort semble avoir été engagé, puisque les effectifs du secrétariat de la commission en cadre A ont été doublés et qu'il est envisagé de nommer un deuxième président pour que la commission puisse siéger plus d'une fois par mois, Mais cela vient bien tard et on peut être sceptique quant à la capacité de la commission d'atteindre en 2002 l'objectif de 200 plans d'apurement dans l'année. Il faut aussi tenir compte de la levée de forclusion prévue par le projet de loi de modernisation sociale. Enfin, cette lenteur est d'autant plus dommageable que les intérêts continuent à courir.

Un grand nombre de problèmes restent en suspens. En premier lieu, rien n'est ainsi prévu pour le règlement des questions d'indemnisation, en particulier au titre de l'article 46 de la loi de 1970. Rien n'est prévu non plus pour l'accès des médecins rapatriés d'Algérie à l'allocation supplémentaire vieillesse. Pourtant, la situation actuelle résulte d'une interprétation erronée du droit par les services de l'Etat et, il y a trois ans, le secrétaire d'Etat à la santé, Bernard Kouchner, laissait entrevoir un espoir qu'il serait dommage de décevoir....

Mme la Présidente - Veuillez conclure !

M. Marc Laffineur, rapporteur spécial pour les rapatriés - Pour une fois que l'on parle des rapatriés...

M. Gérard Bapt - Parlez pour vous !

M. Marc Laffineur, rapporteur spécial pour les rapatriés - ...on peut quand même y consacrer quelques minutes de plus !

Rien n'est prévu non plus pour la levée de la forclusion de l'accès aux prestations complémentaires de vieillesse servies par Groupama.

En ce qui concerne la réinstallation, il conviendrait de régler enfin les dossiers gérés par la trésorerie générale des créances spéciales du Trésor, au titre de la mise en jeu de la garantie de l'Etat.

Enfin la question du mémorial, devenu « l'Institut de la France d'outre-mer et de la francophonie », n'a pas avancé. Les modalités de l'insertion de ce projet dans le cadre d'Euroméditerranée semblent floues, et le glissement conceptuel ne répond pas aux attentes de la communauté rapatriée.

La ville de Marseille a ainsi prévu son propre mémorial - peut-on lui donner tort, vu la carence de l'Etat ?

En conclusion, le Gouvernement demande des crédits insuffisants, pour mener une politique également insuffisante.

Dans la logique du système parlementaire, cette situation appelle une sanction politique, car elle confirme que l'impulsion donnée aux administrations en charge des questions relatives aux rapatriés est insuffisante et qu'on n'a pas profité des années de croissance économique pour régler certaines questions en souffrance.

Lorsque l'on fait un bilan de la législature, seules la prolongation du plan en faveur des harkis, la création de la rente viagère et la mise en place de la commission nationale de désendettement sont à mettre à l'actif du Gouvernement, et encore avec les insuffisances que l'on sait.

Les autres mesures ont été obtenues, à force d'insistance, grâce à l'initiative de parlementaires dont quelques-uns de la majorité, auxquels je rends hommage.

La sanction politique adaptée à cette situation serait, naturellement, le rejet de ces crédits.

Néanmoins, dans un esprit de conciliation, afin de ne pas créer de situation de blocage, la commission des finances les a adoptés (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF, du groupe du RPR et du groupe DL).

M. Pierre Carassus - Nous ne pouvons que nous féliciter de l'attention portée à l'économie sociale et solidaire, qui bénéficie cette année d'un renforcement de ses moyens de 38 %.

Toutefois avec 110 millions de francs, dont 40 consacrés à l'appel à projets « dynamiques solidaires » et 28 au développement territorial, ce budget reste modeste pour un secteur en pleine expansion qui suscite de multiples attentes.

Au-delà du vote des crédits, une grande question se pose : comment cet espace économique, qui repose sur des initiatives locales, peut-il perdurer sans perdre son âme face au poids de l'économie marchande et des logiques capitalistiques qui l'animent, y compris dans les services de proximité ?

Le risque majeur, celui d'une dénaturation de l'économie sociale, ne doit pas être sous-estimé.

Il ne faudrait pas qu'au motif louable d'aider les personnes en difficulté se créent, dans le monde associatif, des poches d'emplois précaires et sous-payés, aux marges du droit social.

De même certaines associations intervenant dans le domaine de l'insertion par l'économique peuvent, si l'on n'y prend pas garde, devenir des agences d'emplois temporaires fournissant une main-d'_uvre bon marché, y compris aux entreprises, s'écartant ainsi de leurs missions originelles.

Un manque de transparence, des fautes de gestion, voire des mouvements financiers quasi spéculatifs ont conduit à la faillite et au rachat de certaines sociétés coopératives. Du fait des restructurations, de nombreuses petites coopératives agricoles ont été absorbées par de grosses structures dont le fonctionnement n'a rien à envier aux grands groupes industriels. Les sociétaires ne se reconnaissent plus dans ces stratégies financières contraires aux valeurs de solidarité du monde mutualiste. Il est donc indispensable que le secteur de l'économie sociale et solidaire soit doté de véritables statuts et soumis régulièrement à un contrôle et à une évaluation de ses pratiques.

Par ailleurs, il faut se féliciter que des initiatives locales se mettent en place en partenariat avec les communes, dans le domaine de la culture, de l'environnement, de la réinsertion, de la création de crèches et restaurants associatifs ou d'aide à domicile... Mais il n'est toujours pas facile, pour les communes les plus modestes, de soutenir financièrement ces initiatives. Il serait souhaitable que l'Etat, le département et la région interviennent davantage, notamment dans les zones rurales les plus dépeuplées.

A titre d'exemple, le système d'aide à domicile aux personnes âgées, qui existe depuis quarante-cinq ans avec le soutien des régimes de retraite et d'aide sociale, connaît des difficultés qui menacent son existence. Les moyens accordés aux associations se situent autour de 32 F l'heure et les employés doivent attendre parfois onze ans pour se voir proposer un plein temps avec un salaire équivalent au SMIC !

En outre, un certain nombre d'acteurs de l'économie sociale et solidaire souffrent de la complexité et du manque de cohérence des dispositifs de soutien. Qu'il s'agisse des mutuelles, des coopératives, des associations, un geste fort est attendu du Gouvernement pour simplifier et rationaliser ces dispositifs.

Par ailleurs, les députés du Mouvement des citoyens souhaitent des mesures d'exonération de charges sociales et fiscales en faveur de l'économie solidaire (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Pierre Cardo - J'ai eu du mal à trouver les crédits de l'économie solidaire dans ce budget et les rapports afférents - deux pages seulement dans le rapport de la commission des finances ! On peut s'interroger sur la place de l'économie solidaire dans les priorités du Gouvernement...

Certes, les crédits augmentent, mais ils étaient si faibles en 2001 qu'il a fallu les rallonger en cours d'exercice. A tel point que les acteurs de terrain, qui attendaient une floraison d'initiatives, ont eu parfois l'impression que votre engagement personnel était plus marqué en tant que parlementaire qu'en tant que ministre.

Qu'en est-il des projets innovants contre l'exclusion, comme l'entreprise à but social ? N'est-ce pas une réponse intéressante pour offrir un emploi aux chômeurs de longue durée ? Un rapport avait été confié à M. Lipietz : a-t-il été mis sur la touche ? (Sourires)

Quelle action avez-vous menée contre la concurrence déloyale exercée par l'administration pénitentiaire vis-à-vis des entreprises d'insertion, notamment dans le domaine du façonnage ? Est-il normal de confier ces travaux à des groupes privés, sans profit réel pour les détenteurs eux-mêmes ?

Envisagez-vous de revoir la limitation du nombre d'heures accordé aux associations intermédiaires, dont plusieurs ont dû cesser leur activité ?

En ce qui concerne les régies de quartier, allez-vous revoir le système des appels d'offres auxquels elles sont soumises ?

Envisagez-vous la création d'un fonds national permettant aux structures financées par le FSE de disposer d'une avance de trésorerie ? L'Etat devrait d'ailleurs cesser de considérer les fonds européens comme ses propres financements, aux seuls dépens des acteurs d'insertion, qui subissent des retards de paiement et voient leurs ressources se réduire.

Où en est-on en ce qui concerne le label d'utilité sociale que réclame le conseil national de lutte contre l'exclusion ?

Vous envisagez de présenter un ambitieux projet de loi-cadre sur l'économie sociale dans quelques semaines et je m'en réjouis. Mais que de temps perdu !

En conclusion, Monsieur le Ministre, je vous adresserai la même remarque que vous m'avez faite il y a deux ou trois ans quand je proposais de réformer l'ordonnance de 1945 : en dépit de vos qualités personnelles, je ne pourrai voter votre projet de budget (Applaudissements sur les bancs du groupe DL, du groupe du RPR et du groupe UDF).

Mme Catherine Génisson - Avant d'en venir au budget de la santé, j'aurais aimé remercier Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité pour avoir abrogé le décret inique en vertu duquel les bénéficiaires du RMI voyaient leur revenu diminué du montant des bourses d'enseignement supérieur, lorsqu'ils avaient des adolescents qui en bénéficiaient.

Le débat sur la qualité de notre système de santé, comme chaque année, s'est largement développé à l'occasion de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale. Mais, à s'en tenir au budget de la santé lui-même, je me réjouis de voir augmenter ses crédits de 40 %, soit 9,5 millions d'euros, pour les programmes régionaux d'accès à la prévention et aux soins dans le cadre de la lutte contre les exclusions.

Le budget de la santé se compose de deux agrégats, l'un pour les politiques de santé publique, l'autre pour l'offre de soins. A structure constante, il augmente de 6,52 %, ce qui est significatif de la détermination du Gouvernement autour de trois axes prioritaires : la modernisation de l'offre de soins, le renforcement des programmes de santé publique, l'amélioration de la gestion des politiques de santé.

Les crédits consacrés à l'amélioration de l'offre de soins progressent de 3,62 %, notamment pour les formations médicales et paramédicales : leurs crédits augmentent en raison de la hausse du nombre d'étudiants. Ainsi, à la suite du protocole signé le 14 mars 2000 par les professionnels de la santé et le ministère, le nombre d'entrées dans les instituts de soins infirmiers a été accru de 8 000 places à compter de la rentrée 2000, soit 24 000 étudiants sur trois ans. Les subventions de l'Etat aux écoles d'infirmiers, de sages-femmes et de professionnels paramédicaux ont été augmentées de 3,8 millions d'euros, et les bourses de 12,2 millions d'euros. J'insiste sur la nécessité de mettre en place des dispositifs favorisant l'accès aux études infirmières des aides-soignantes qui ont été reçues aux concours d'entrée de ces écoles. Il importe aussi que, dès le vote de la loi de modernisation sociale, son volet relatif à la validation des acquis soit appliqué à tous les personnels de santé. Je me félicite d'autre part de la revalorisation du statut des médecins hospitaliers, avec l'intégration des temps de garde dans le temps de travail, et le versement d'une prime de 2 500 F par mois dans le cadre d'un engagement exclusif dans le service public. Je me félicite également de l'arrêté du 23 octobre 2001 qui permet de verser une allocation spécifique de 10 000 euros sur des postes prioritaires si le praticien s'engage à les tenir pour cinq ans. Je souhaite toutefois en savoir plus sur les modalités de définition de ces postes : s'agit-il de zones géographiques prioritaires, ou de spécialités médicales désaffectées en raison de leur pénibilité ?

Un accompagnement important de l'investissement hospitalier est mis en place. La loi de finances pour 1998 avait créé le FIMHO, ou fonds d'investissement pour la modernisation des hôpitaux. Mais la complexité du dispositif en réduit l'efficience, alors que le FIMHO est un fonds tout à fait intéressant : il concerne les opérations de modernisation d'établissements qui s'inscrivent dans une évolution structurelle, avec une priorité donnée à la restructuration des services d'urgences, de la psychiatrie et des soins de longue durée. Ce fonds permet également d'aider au rapprochement de deux ou plusieurs établissements, publics ou privés, pour une meilleure adaptation de l'offre de soins sur un territoire. Dans le Pas-de-Calais, nous avons largement développé cette logique, qui montre combien il est stérile d'entretenir le conflit entre public et privé. Il faut cependant que les missions de l'un et de l'autre soient bien définies. Si certains établissements privés ont une concession de service public, s'ils accueillent pour des stages des étudiants en formation paramédicale et si certains de leurs praticiens élaborent des brevets, c'est essentiellement à l'hôpital public qu'incombe la prise en charge des urgences, et de l'urgence sociale, la formation des personnels, notamment paramédicaux, et la recherche médicale appliquée.

L'agrégat relatif au renforcement des politiques de santé publique regroupe tous les crédits consacrés aux programmes de santé publique : lutte contre les pratiques addictives, contre le sida, amélioration de la sécurité sanitaire. Ces crédits augmentent de 7,4 % pour répondre aux enjeux de santé publique que vous avez définis, Monsieur le ministre, lors de la conférence nationale de la santé.

Pour améliorer l'accès aux soins, les crédits consacrés aux grands programmes de santé augmentent fortement : 17,1 millions d'euros sont débloqués pour des programmes concernant le cancer, la nutrition, la santé mentale, la contraception et le suicide. Un plan d'amélioration de la prise en charge des maladies orphelines concernera environ cent mille personnes ; il comporte le développement de centres experts, l'information des médecins et du public, le soutien à la recherche. J'insisterai, Monsieur le ministre, sur le plan que vous avez consacré à la lutte contre le diabète, doté de plus de 18 millions d'euros en mesures nouvelles pour 2002. Il a pour objectifs la prévention de cette maladie par la promotion d'une alimentation équilibrée, le développement du dépistage, l'amélioration de la qualité et de l'organisation des soins, l'éducation thérapeutique des patients. Ce plan a pour cible la forme la plus répandue de cette maladie, le diabète dit « gras », dont la fréquence ne cesse d'augmenter avec le manque d'exercice et l'excès de poids. Sur trois millions de diabétiques en France, quelque huit cent mille ignoreraient leur état. En 2002, 2,13 millions d'euros seront consacrés au développement de l'éducation thérapeutique des patients, 300 000 euros à la prévention dans l'environnement familial et professionnel, 3,05 millions au développement des réseaux de prises en charge, enfin 4 millions d'euros pour organiser le suivi épidémiologique. Des dispositions prévoient, pour 8 millions d'euros en 2002, de faciliter la surveillance des diabétiques par les infirmières en permettant une visite hebdomadaire pour les diabétiques de plus de 75 ans et la revalorisation de l'acte d'injection d'insuline. L'ensemble des actions pour le diabète dépasse largement les 61 millions d'euros, si l'on tient compte des actions déjà en cours, comme le remboursement des pompes portables à insuline. Je crois cependant savoir que la tuyauterie, sans laquelle elles sont inopérantes, n'est pas remboursée ; or elle est onéreuse - plus de 150 euros par mois. Il y a là un problème qu'il faudrait traiter.

L'effort pour le sida et les maladies transmissibles représente 20 % des crédits de la santé publique, afin notamment de soutenir les centres nationaux de référence et d'améliorer le dépistage, le traitement et la prévention de l'hépatite C.

Concernant la santé des femmes, je souhaite savoir par quelles dispositions vous envisagez, toute l'année et sur tout le territoire, de faire que le service public prenne en charge les femmes qui recourent à une IVG jusqu'à douze semaines.

En matière de lutte contre la toxicomanie, des moyens complémentaires viennent financer les structures de soins et les traitements de substitution, à hauteur de 3,89 millions d'euros.

Le maintien des financements pour la sécurité sanitaire est assuré, puisque les crédits des différentes agences de sécurité sanitaire restent stables. Je souligne la qualité du travail de l'ANAES, qui continue toutefois à prendre du retard pour l'accréditation des hôpitaux.

Le budget 2002 accentue l'effort en faveur de l'administration sanitaire et sociale, dont les moyens progressent de 6 ,7 %. Les personnels sont plus nombreux et mieux reconnus. Les effectifs sont en hausse continue depuis 1997. Pour 2002, 294 emplois sont créés : 52 dans l'administration centrale, et 242 dans les services décentralisés.

La participation de l'Etat au programme de solidarité internationale, qui est doublée pour atteindre 3,05 millions d'euros, permet de mobiliser des équipes hospitalières et de développer des partenariats Nord-Sud. La France joue ici un rôle moteur, et porte concrètement les valeurs d'une Europe solidaire.

Votre budget permet le débat politique. Le groupe socialiste le soutiendra (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Jean Bardet - Avant d'aborder le budget de la solidarité et de la santé, je souhaite évoquer quelques faits marquants intervenus déroulés depuis septembre, et qui montrent à quel point, en matière de santé, le Gouvernement navigue à vue.

Il y a un mois, nous examinions le projet de loi relatif aux droits des malades et à l'amélioration de la qualité des soins. De nombreux députés dénonçaient alors les insuffisances de notre système de santé. Mais à cette époque, Monsieur le ministre, vous nous disiez que tout allait bien.

Il y a un peu plus de quinze jours, nous débattions du projet de loi de financement de la sécurité sociale. Là encore, de nombreux députés de l'opposition dénonçaient l'opacité, le détournement des comptes sociaux, le manque de moyens de votre texte. Votre réponse, derechef, était de nous dire que tout allait bien, jusqu'à ce que sous la pression parlementaire vous débloquiez 4 milliards de francs pour les hôpitaux, en nous disant toutefois que tout allait bien pour les cliniques. Aujourd'hui, nous étudions le budget de la santé qui s'élève à 3,54 milliards de francs correspondant en cela à l'effort que vous consentez à accorder aux cliniques. Certes, je m'en réjouis, mais je m'interroge sur l'origine de cette enveloppe, qui pour une part n'est pas inscrite dans le projet de loi de financement, et sur l'utilité de nos débats. Ou le Parlement est une chambre de contrôle, ou il n'est qu'une chambre d'enregistrement.

Mais j'en viens au budget. Les crédits alloués à la santé et à la solidarité augmentent de 2,58 % en 2002 pour atteindre un total de 14,8 milliards d'euros. Nous ne pourrions qu'applaudir à cette hausse si elle correspondait aux besoins réels, si elle s'accompagnait de réformes de structures et s'attachait au développement d'une véritable politique d'insertion, si depuis le début de la législature votre ministère avait rendu plus lisible sa politique de santé publique, si aux effets d'annonce vous aviez préféré l'action et l'efficacité.

Au lieu de cela, depuis cinq ans, malgré l'augmentation affichée, des incertitudes pèsent sur des mesures phares, l'insuffisance des moyens et des effectifs, ainsi que de graves dysfonctionnements, sont dénoncés, et ici comme ailleurs les modalités d'application des 35 heures inquiètent, et font peser le doute sur l'amélioration de la prise en charge des personnes fragilisées.

Solidarité, santé, économie solidaire : tous ces budgets augmentent en raison des prochaines échéances électorales. Va-t-on pour autant vers plus d'égalité, plus de transparence, un meilleur accès aux soins, un solidarité mieux distribuée, une réelle politique de prévention ? Je ne le crois pas.

L'un des rapporteurs du Sénat a bien mis en lumière un paradoxe : alors que nous connaissions une période de forte croissance, les dépenses liées aux minima sociaux n'ont cessé de progresser. Les priorités de santé publique n'ont bénéficié que résiduellement des hausses du budget du ministère.

Cette politique dispendieuse a-t-elle permis de réduire les inégalités, de faire reculer la pauvreté et l'exclusion ? Non : 17 % des jeunes de 20 à 30 ans vivent en dessous du seuil de pauvreté. Tant qu'un véritable plan de lutte contre l'illettrisme ne sera pas mis en _uvre, l'insertion de ces jeunes sera très difficile. Il faut intervenir en amont : ce n'est que par un dépistage précoce des différents troubles des apprentissages que nous éviterons la spirale de l'exclusion.

Quelques chiffres sont éloquents. Le numéro d'appel d'urgence mis en place pour les plus démunis, le 115, a reçu 500 000 appels en novembre 1999, 2 millions en mai 2001. Donc, malgré votre plan, de plus en plus de personnes se trouvent dans des situations de précarité (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste). Quant à la tuberculose, elle touche en premier lieu les personnes les plus marginalisées sans domicile fixe ; de 10 cas pour 10 000 déclarés en France, on passe au double pour la région Ile-de-France et au quadruple pour Paris.

En ce qui concerne la CMU, je voudrais souligner une nouvelle fois l'effet de seuil, qui exclut du dispositif les personnes touchant l'allocation pour adulte handicapé ou le minimum vieillesse au motif qu'ils dépassent de 52 F ce seuil, et qui crée une distorsion inacceptable avec des Français peu aisés qui obtiennent des remboursements inférieurs à ceux de la CMU.

Nous sommes dans une logique de pure assistance, puisque le passage d'un minimum social à un travail au SMIC peut être défavorable en termes de revenus du fait de la perte de nombreuses exonérations. J'ajoute que la Cour des comptes, s'inquiétant du nombre de 70 000 nouveaux assurés sur critère de résidence, au lieu des 150 000 prévus, a souhaité la vérification que l'objectif premier de fournir une couverture sociale de base à tous les résidents français était bien rempli.

Enfin, la consommation médicale moyenne par bénéficiaire a été sous-estimée : tous les gestionnaires de la prestation notent que le forfait de base de 1 500 F est insuffisant.

Si les crédits du RMI et de la CMU diminuent, d'autres sont stables. C'est le cas pour les crédits de la tutelle et la curatelle, qui ne permettront pas de faire face à l'augmentation du nombre de dossiers traités par les juges ; pour les crédits alloués à la mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie, alors que les adolescents sont concernés de plus en plus tôt ; pour les crédits de prise en charge de l'IVG, qui ne correspondent en rien aux besoins réels au regard de la dette du ministère envers de nombreux établissements hospitaliers et du rallongement du délai légal.

Les agences de sécurité sanitaire voient leurs subventions diminuées en raison, nous dit-on, de l'existence de fonds de roulement importants et du développement de leurs ressources propres. Le même argument est avancé pour justifier les crédits quasiment inchangés des agences régionales d'hospitalisation. Au moment où vous semblez enfin prendre conscience de la situation dramatique des hôpitaux et des cliniques privées, où vous augmentez les missions des ARH, ces crédits me paraissent particulièrement déconnectés des besoins.

Les ordonnances de 1996 avaient posé les bases d'une refonte de l'offre de soins. Depuis, l'inertie de votre gouvernement a conduit les établissements hospitaliers au bord de l'étranglement. Exemple de cet immobilisme : le fonds d'aide à l'adaptation des établissements hospitaliers, qui voit disparaître ses crédits de paiement et baisser ses autorisations de programme et qui souffre d'une sous-activité étonnante.

Faute d'avoir _uvré à l'harmonisation des secteurs public et privé, vous êtes confrontés à la multiplication des conflits et octroyez au coup par coup des enveloppes supplémentaires. La complémentarité des deux secteurs n'est pourtant plus à démontrer et les Français sont attachés à leur liberté de choix.

Les réformes de structures font tout autant défaut en ce qui concerne la politique envers les handicapés.

La suppression de l'évaluation forfaitaire des ressources pour l'attribution de l'AAH, la création de 1 500 places de CAT et de 1 058 postes d'auxiliaires de vie sont bien évidemment des mesures positives. Mais les conclusions du rapport sur les COTOREP ne sont toujours pas mises en _uvre, le projet de réforme de la législation du 30 juin 1975 en est à peine à ses prémices, la redéfinition des missions et des moyens de l'atelier protégé traîne en longueur. Votre attentisme est fortement dénoncé par les associations, qui s'inquiètent aussi fortement des conséquences des 35 heures sur la prise en charge des personnes handicapées.

Mme la Présidente - Je vous prie de conclure.

M. Jean Bardet - Une mise à plat du système est indispensable.

En ce qui concerne la politique en faveur des personnes âgées, l'allocation personnalisée à l'autonomie n'a fait l'objet d'aucune étude prévisionnelle sérieuse permettant de savoir combien de personnes seront éligibles.

En conclusion, ce budget cache mal son objectif électoraliste. Absence totale d'évaluation des politiques sociales, dysfonctionnements qui perdurent, effets d'annonce préférés aux réformes concrètes, promesses qui ne trompent personne : autant de raisons pour le groupe RPR de ne pas voter ce budget (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR).

Mme Jacqueline Fraysse - Doté de près de 98 milliards de francs, le budget de la santé et de la solidarité est en augmentation, mais demeure très modeste au regard du champ qu'il doit couvrir.

Les crédits de la solidarité, soit environ 87 milliards de francs, sont en augmentation de 2,6 %, mais en leur sein les moyens consacrés aux minima sociaux n'augmentent pas. Les crédits du revenu minimum d'insertion sont en baisse de 1,7 %, du fait de la sortie du dispositif des plus anciens bénéficiaires et de l'amélioration de la situation de l'emploi. Le RMI va être revalorisé, de même que l'allocation parent isolé, mais ces revalorisations auraient pu être plus sensibles avec le maintien des crédits. La remontée du chômage rend d'autant plus inopportune la diminution de ces crédits.

En ce qui concerne la CMU, pour la deuxième année consécutive les crédits ont été revus à la baisse, au motif que les bénéficiaires sont beaucoup moins nombreux qu'annoncé - à peine plus de 5 millions cette année, au lieu de 6. En vérité, les critères sont trop restrictifs, comme nous l'avions d'emblée souligné. Depuis le début, nous demandons que les bénéficiaires du minimum vieillesse et de l'allocation adulte handicapé y aient accès. Notre commission demande qu'au moins les bénéficiaires de l'AAH soient dispensés du forfait hospitalier, ce qui serait un minimum.

Selon nous, il serait trop coûteux pour le budget d'accorder la CMU aux bénéficiaires de l'AAH et du minimum vieillesse. Pourtant, depuis la mise en place de la CMU, vous n'avez cessé d'annuler des crédits non dépensés et de réduire les financements d'année en année...

La poursuite des créations de places en centre d'hébergement et de réinsertion sociale et en hébergements d'urgence répond à une nécessité. Il est indispensable d'augmenter globalement les capacités d'accueil, en créant de petites structures permettant de rapprocher les personnes accueillies de leur famille. La solidarité doit être partagée.

Nous apprécions l'effort de lutte contre les exclusions. Il ne faut pas le relâcher !

Les crédits de la santé et des services communs de l'administration sanitaire et sociale représentent 10 milliards. Les créations de postes, dans ces services, sont opportunes. Cependant, elles sont à évaluer au regard du retard pris, qui a conduit à la grève des personnels de la direction générale de la santé l'an dernier, et de la prochaine application de la réduction du temps de travail.

De plus, pour recruter les personnels compétents nécessaires, il faut les former et revaloriser les cadres d'emplois, faute de quoi beaucoup de postes resteront vacants ; ou bien nous retomberons dans la précarisation par le recours de plus en plus fréquent à des emplois hors statuts, que le Gouvernement souhaitait pourtant réduire puisqu'il a fait adopter un texte en ce sens. C'est du reste une question qui touche toute la fonction publique.

Les crédits de la santé représentent 3 milliards et demi de francs, soit le tiers de ce que l'Etat prélève sur les hôpitaux au titre de la taxe sur les salaires.

Ces faibles moyens ne permettent ni une action ambitieuse de prévention, ni un effort suffisant de l'Etat pour la formation des personnels hospitaliers. C'est pourquoi, si nous approuvons les actions en faveur de la contraception, de la prévention de certains cancers, de la lutte contre le sida, les toxicomanies et le suicide, nous en mesurons les limites.

Ainsi, la situation de la médecine scolaire est alarmante, comme vient le rappeler le mouvement des personnels de santé scolaire. Pourtant, la prévention, le dépistage précoce et le suivi, à l'école, des difficultés des enfants, permettraient de surmonter des problèmes de santé, d'échec et d'exclusion, voire de violence, aux conséquences catastrophiques.

De même, la protection de la santé au travail mérite une attention accrue, à commencer par la formation de médecins du travail en nombre suffisant. Vous avez heureusement augmenté les crédits de stages. Mais beaucoup reste à faire. Vous voulez former davantage d'infirmières, et c'est tant mieux. Mais l'ampleur des retards accumulés appelle un effort particulièrement important pour faire face non seulement à la réduction du temps de travail, mais aussi aux départs en retraite.

Vous augmentez les crédits pour les bourses. Faites en sorte que les aides-soignants qui peuvent accéder aux formations d'infirmière ne s'en trouvent pas écartés pour des motifs financiers.

Pour le fonds d'investissement pour la modernisation des hôpitaux, le budget initial est de 300 millions de francs, en baisse de 40 % comme le souligne M. Mitterrand.

Le motif invoqué, une fois de plus, est la non-consommation des crédits. Cette explication est surprenante, au moment où les hôpitaux publics se débattent dans des difficultés financières dramatiques. Comment peut-on justifier ces excédents au nom d'une bonne gestion ? Cette non-consommation pose une fois de plus la question de leur répartition. Si leur gestion était plus transparente, plus démocratique, si les principaux intéressés y étaient associés, ces fonds auraient été utilisés. Nous connaissons tous des hôpitaux dont les projets sont prêts et qui attendent les crédits. C'est le cas de l'hôpital Avicenne. Au cours de l'examen du PLFSS, vous avez annoncé, Madame la ministre, 3 milliards pour les hôpitaux publics, dont un milliard versé au budget de la santé, pour abonder le FIMHO. Or la réduction initiale de 200 millions des crédits du FIMHO vient « amortir », pour le moins, l'ampleur de cette mesure ! En effet, soit des dispositions sont prises pour garantir la consommation effective des crédits du FIMHO et il n'y a pas lieu de les diminuer au nom de la bonne gestion. Soit on ne change pas les règles, mais dans ce cas nous pouvons nous interroger sur l'efficacité du milliard annoncé.

Enfin, si nous attendons des précisions quant à l'utilisation de ce milliard, nous en attendons également sur la manière dont vous financez 2 milliards de mesures nouvelles pour les hôpitaux publics, et les 3,1 milliards accordés aux patrons des cliniques privées, au terme d'une journée de grève. Il y a là de quoi s'interroger sur les méthodes et les choix de ce gouvernement...

Si nous soutenons les infirmières du secteur privé qui veulent être payées au même niveau que dans le public, comment pouvez-vous être sûre que ces moyens nouveaux iront bien aux salaires du personnel ? En effet les politiques salariales de beaucoup de ces établissements ont fait la part belle aux médecins et aux actionnaires, au point que certains groupes de santé sont déjà cotés en Bourse, réalisant leur rêve de spéculer avec l'argent de la sécurité sociale, auquel s'ajoutent désormais les subventions accordées par l'Etat. Pendant ce temps de nombreuses cliniques de proximité, notamment des maternités, ferment.

2 milliards pour l'hôpital public, et 3 pour les cliniques seront donc financés par la sécurité sociale sans que vous ayez accepté une seule de nos propositions de recettes nouvelles. Comment allez-vous faire ? Monsieur Kouchner, vous déclariez, récemment qu'il n'était pas bon de prendre des décisions sous la pression. Je partage cette appréciation. Mais cette situation est le résultat de refus successifs d'élaborer une vraie politique de santé, et aussi de la pénurie organisée pour réduire à tout prix les dépenses, faute d'avoir eu le courage de modifier l'assiette de cotisation, ce qui aurait permis de tenir un engagement pris, et surtout de dégager des recettes nouvelles pour répondre aux attentes, dans un domaine aussi sensible (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste).

M. Jean-Luc Préel - Dans le cadre de la discussion du PLFSS, nous venons de voter pour les branches gérant la santé, la famille et les retraites près de 2 000 milliards.

Nos dépenses de santé sont estimées à 900 milliards. En regard, le budget du ministère de la santé ne dépasse pas 3,5 milliards alors que l'étatisation de la santé en France est quasi achevée. La place du ministère dans la politique de santé du pays est à la fois majeure et imprécise, alors que les moyens financiers et humains sont fort limités.

Quels sont les rôles du Parlement, des caisses, des professionnels ? Le ministère semble vouloir décider de tout sans disposer des moyens de ses ambitions : reportons-nous au rapport excellent de M. Foucher sur la DGS.

Le ministère est responsable directement des hôpitaux et des cliniques. Ainsi, Madame la ministre, vous n'avez pas répondu sur les questions que nous vous posions à temps sur les difficultés des cliniques, laissant la grève s'installer, puis accorder vous-même en 48 heures 1,7 milliard.

Le ministère est également responsable de la politique du médicament, d'une grande partie de la médecine libérale et des orientations de santé publique.

Les caisses ont-elles encore un pouvoir ? Le Parlement est-il autre chose qu'une chambre d'enregistrement des décisions prises en dehors de lui, à commencer par le montant de l'ONDAM ?

L'UDF est attachée à deux réformes majeures : un vrai ministère de la santé, ce qui fera plaisir à M. Kouchner et une régionalisation de la santé. Ce vrai ministère de la santé, ministre responsable devant le Parlement, aurait les moyens financiers de ses actions. Lorsque le ministère prend une mesure de reclassement indiciaire, de précaution sanitaire, de dépistage, les moyens correspondants devraient être affectés pour leur coût réel, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui. Ce ministère devrait également avoir la compétence de la formation. En effet, alors que la démographie médicale est déséquilibrée, que des spécialités sont sinistrées, qu'il faut 10 à 15 ans pour former un spécialiste, la réforme des études et de l'internat tarde à devenir effective.

Ces réformes seraient plus faciles à conduire si elles dépendaient du seul ministère de la santé. La régionalisation est nécessaire pour développer une politique de santé de proximité, veiller à l'adéquation de l'offre et des besoins, contrôler l'exécutif régional ARS et responsabiliser chacun de ses acteurs.

Si nous sommes bons pour le curatif, nous sommes médiocres pour la prévention et l'éducation de la santé, parce que nous n'avons pas de politique pluriannuelle, chacun des multiples acteurs y consacrant un tout petit budget.

Il paraît nécessaire de créer une agence nationale de prévention et d'éducation à la santé, dotée d'une enveloppe spécifique votée par le Parlement parallèlement à l'ONDAM.

Les mesures contenues dans la loi « droits des malades » constituent des progrès. Mais vous restez au milieu du gué. L'institut n'aura pas davantage de moyens. La prévention, financée par le risque sera certainement la dernière roue du carrosse. Il y aura certainement toujours des besoins plus urgents à satisfaire. Je salue néanmoins la hausse des moyens alloués aux observatoires régionaux de la santé et aux programmes de prévention de santé publique. Il est indispensable d'aller beaucoup plus loin, et de se préoccuper notamment des mortalités prématurées évitables.

Des campagnes sont engagées contre la mortalité routière qui touche 8 000 personnes et l'ESB humaine, 4 cas recensés à ce jour. Mais que fait-on pour lutter efficacement contre les 60 000 morts dues au tabac, et aux 50 000 morts liées à l'alcool ?

Voilà quatre ans que vous avez annoncé la généralisation du dépistage du cancer du sein, première cause de mortalité évitable chez la femme. Mais celui-ci n'est toujours pas effectif.

On dénombre par ailleurs 30 000 nouveaux cas de cancer du colon et 15 000 décès. Le dépistage devrait être généralisé et puisque l'hémocult est efficace, pourquoi ne pas demander aux médecins de le proposer systématiquement ?

Enfin, je voudrais rappeler la nécessité d'un grand débat annuel sur la politique de santé pour définir les priorités à partir des besoins exprimés au niveau des régions. Mais je doute que ce projet permette un vrai débat sur un texte amendable et un vote final. Il aurait déjà pu avoir lieu lors de l'examen de la loi de financement de la sécurité sociale. Mais vu le sort que vous réservez à la discussion du rapport annexé et votre absence de réponses à nos questions maintes fois répétées sur l'avenir de l'hôpital, des cliniques, des conventions, de la revalorisation des actes médicaux, des infirmières, je doute de votre volonté d'instaurer un vrai débat démocratique sur la politique de santé de notre pays. Je crois que vous n'avez pas de réelle politique de santé et que vous naviguez à vue. C'est pourquoi l'UDF votera contre ce budget (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF).

M. Bernard Perrut - Il est des situations que révèlent les contradictions et l'insuffisance des politiques menées. Que penser ainsi de ce rapport de l'INSERM dans lequel la France est l'un des pays européens où les disparités entre catégories socioprofessionnelles face à la mort, la maladie et le handicap, sont les plus fortes ? Ou de ce rapport du secours catholique qui fait état d'une aggravation des difficultés des exclus ? Vous connaissez par ailleurs les effets pervers de la CMU, Madame la ministre, avec ce seuil de ressources qui fonctionne comme un couperet alors qu'il faudrait des paliers pour tenir compte de la diversité des situations. Et comment ne pas s'interroger sur le bilan mitigé du RMI ? Peu de sorties vers l'emploi, un suivi insuffisant des allocataires... Il faudrait pourtant éviter que l'on s'installe dans ce dispositif.

Ce budget s'attaque-t-il à tous ces problèmes ? Dans le domaine de la santé, l'opacité des financements empêche toute vision globale et ne permet pas de bien distinguer les actions de l'Etat de celles menées dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale. A la veille d'échéances électorales, vous n'hésitez pas à distribuer les milliards pour stopper la grogne des hôpitaux et des cliniques. Mais ces sommes ne permettront pas aux hôpitaux de surmonter leurs déficits structurels, alors que ceux-ci réclament depuis longtemps un rebasage budgétaire. Quant au fonds de modernisation, encore faudrait-il que ses crédits soient utilisés et bien répartis sur le territoire.

Il est par ailleurs regrettable que des aides-soignantes reçues au concours ne puissent devenir infirmières du fait que leur hôpital n'a pas de moyens suffisants en formation. La validation des acquis devrait constituer une voie nouvelle pour devenir infirmière, en cette période de pénurie.

L'examen des crédits de ce budget coïncide avec la semaine pour l'emploi des personnes handicapées. Une récente enquête auprès des familles concernées montre que 77 % d'entre elles estiment que les handicapés sont peu ou mal intégrés, et 89 % que les pouvoirs publics n'agissent pas suffisamment en faveur de l'intégration. Jugement sans doute trop sévère, mais il faut reconnaître que le parcours est difficile, que ce soit pour scolariser son enfant, pour trouver une place en CAT, pour obtenir une réponse de la COTOREP - dont la réforme n'a toujours pas été engagée (Protestations sur certains bancs du Gouvernement), pour vivre de l'AAH, pour faire appel à une tierce personne, pour trouver un emploi... Face à toutes ces réalités, nous avons besoin non seulement de moyens mais aussi d'une volonté et d'une éthique, en particulier après l'arrêt dit Perruche qui a suscité une vive émotion. Qu'attendons-nous pour légiférer ? Pouvons-nous accepter « l'idée que certaines vies ne mériteraient pas d'être vécues ? Non, il faut que l'Assemblée fasse prévaloir la dignité du vivant et le refus de toute discrimination liée au handicap.

En ce qui concerne les personnes âgées, l'APA ne réglera pas tout. Il est indispensable de diversifier les modes d'accueil et de mieux aider le maintien à domicile.

Ce budget n'est certes pas sans contenu, mais il n'est ni novateur ni ambitieux. Il ne donne pas un sens assez fort à l'action que nous pourrions mener tous ensemble au service de la vie et de la solidarité. C'est pourquoi le groupe DL ne pourra voter ce budget (Applaudissements sur les bancs du groupe DL et du groupe UDF).

M. Gérard Bapt - Contrairement à ce qu'a dit M. Laffineur tout à l'heure, les problèmes des rapatriés ne nous occupent pas seulement cinq minutes par an. Car nous sommes nombreux à évoquer régulièrement les problèmes en suspens devant les ministres concernés.

Etant donné la façon neutre dont M. Laffineur avait rapporté devant la commission, j'ai trouvé très sévère son rapport final, sorte de tract préfectoral, et sa conclusion selon laquelle cette législature aurait été perdue pour les rapatriés. Le caractère excessif de cette appréciation vise sans doute à faire oublier les responsabilités de sa famille politique en ce qui concerne les rapatriés et les harkis.

Les moyens mis à la disposition de la commission nationale de désendettement, qui examine les dossiers des rapatriés réinstallés et surendettés, ont été doublés, je vous en remercie, Madame le ministre. A ce jour, 33 dossiers d'apurement ont pu être liquidés, ainsi que 87 en provenance des Coder, pour 20 millions de francs dans les deux cas. On peut trouver que c'est peu mais je rappelle à M. Laffineur que l'application de l'article 44 de la loi de 1986 avait réclamé trois ans alors que le mécanisme était plus simple. Reste qu'il faut maintenir un bon rythme pour atteindre l'objectif qui était de liquider en quatre ans l'ensemble des dossiers déposés devant la commission nationale. Cela implique d'améliorer le décret du 4 juin 1999, qui régit la façon dont les pouvoirs publics peuvent intervenir dans l'effacement des prêts complémentaires. Il faudra notamment corriger la mention « à titre exceptionnel », qui est inadaptée, dans la mesure où les dossiers en suspens sont souvent les plus gros et les plus difficiles.

En ce qui concerne les harkis, je ne ferai certes pas un bilan aussi catastrophiste que celui dressé par M. Laffineur. Nous avons en effet beaucoup avancé, qu'il s'agisse d'accès à la propriété, de rénovation de l'habitat principal ou de désendettement immobilier, et les crédits engagés au cours de cette législature dépassent ceux de la précédente.

Les insertions dans le marché du travail ont atteint une moyenne annuelle de 4 200 de 1998 à 2000, ce qui marque bien le succès du plan « harkis ».

Des réparations matérielles se sont aussi accélérées avec l'instauration de la rente viagère, qui a été mise en place sous condition de ressources puis élargie aux veuves. Je pense que la loi de finances rectificative offrirait une bonne occasion de l'élargir à l'ensemble des harkis non imposables sur le revenu, ce qui conduirait également à la politique de relance de la consommation au profit des plus modestes.

Sur le mémorial pour la France d'outre-mer et la francophonie, M. Laffineur a proféré quelques contrevérités. Ce mémorial est tout à fait souhaitable, non pour se replier sur un passé douloureux mais pour s'ouvrir sur le monde méditerranéen, sur la francophonie, sur l'outre-mer, là où la France a laissé des racines. Il est faux de dire que les rapatriés seraient opposés à ce projet.

Il est tout aussi faux d'écrire, comme M. Laffineur à la page 40 de son rapport, que le Gouvernement a témoigné du mépris à l'égard de la communauté harkie en gardant le silence le 25 septembre. Vous-même, Madame la ministre, avez participé à la manifestation du souvenir à Paris et le Président de la République a été la voix de la France à l'occasion de la manifestation proposée par le Gouvernement au conseil de la mémoire combattante.

Soyez assurée que vous trouverez de nombreux députés de la majorité à vos côtés à chaque fois que l'occasion se présentera de faire progresser la cause des rapatriés (Applaudissements et « Très bien ! » sur les bancs du groupe socialiste).

M. Jean-François Chossy - Le budget est un rendez-vous très attendu par tous ceux qui sont concernés par le handicap, mais cette année encore, ce rendez-vous est manqué.

Je me réjouis que le Gouvernement ait présenté, le 18 juillet dernier, un plan d'action destiné « à changer le regard de la société » sur les quelque 3,5 millions de personnes handicapées. Mais ne faut-il pas avant tout donner à la personne handicapée les véritables moyens de son intégration ?

Insérer la personne fragilisée par le handicap dans la communauté humaine, c'est notre obligation et notre devoir.

L'intégration passe, d'abord, par l'accueil temporaire, qui a été reconnu in extremis dans le projet de loi rénovant l'action sociale et médico-sociale, mais qui manque encore de moyens. Il faut dégager des crédits pour financer ces structures d'accueil séquentiel qui permettent aux familles et aux accompagnants d'obtenir un peu de répit.

Au-delà, pour répondre à l'attente de plus en plus impatiente des personnes douloureusement concernées, il faut trouver les moyens de créer des structures d'accueil spécialisées adaptées, répondant aux besoins et géographiquement mieux réparties. Je reçois régulièrement des familles désemparées qui doivent déménager pour suivre leur enfant, ou l'exiler dans des structures lointaines, par exemple en Belgique - pour les jeunes autistes.

La réponse à certains handicaps, le développement de formules souples et innovantes, doivent trouver une application concrète dans les années à venir. Or je cherche en vain dans ce budget les moyens alloués à ces actions.

Les parents sont souvent démunis faute de solutions pour que leur enfant accède à l'éducation. Certes, le plan Handiscol est une avancée, mais il faut aller plus loin et encourager la création de CLIS, car les places manquent cruellement. Plus généralement, il faut se donner les moyens de favoriser l'intégration en milieu ordinaire, notamment scolaire.

N'oublions pas le droit à l'insertion par l'économique. L'obligation d'emploi des travailleurs handicapés doit être respectée non seulement par les employeurs du secteur public, mais également par l'Etat. Je salue donc le protocole signé le 9 octobre dernier, qui prévoit d'atteindre 6 % de travailleurs handicapés dans la fonction publique d'ici trois ans. Je regrette toutefois que cette disposition ne s'applique pas aussi à la fonction publique territoriale.

En milieu protégé, l'Etat doit procéder à un toilettage de la législation pour répondre aux grandes difficultés que rencontrent les entreprises adaptées pour rester compétitives dans un monde sans pitié pour la fragilité.

Que serait également une intégration sans une réelle politique d'accessibilité aux transports, aux lieux de loisirs, de sport et de culture. Là aussi, que ce soit dans les espaces de vie privés ou publics, des efforts financiers considérables doivent être faits.

Vivre en milieu ordinaire et favoriser le maintien à domicile, c'est possible et tel est le souhait des handicapés vieillissant.

Le maintien à domicile nécessite un accompagnement par un personnel qualifié et formé au handicap, ainsi que par une aide financière. Là encore, la solidarité nationale doit s'exercer, ce que ne permet pas ce budget.

Puisqu'il s'agit de garantir les droits essentiels auxquels peuvent prétendre tous les citoyens, pourquoi ne pas créer un médiateur national des enfants, adolescents et adultes handicapés, chargé de garantir le respect de leurs intérêts et la qualité de leur éducation ?

Il y a urgence à modifier les comportements et les modes de fonctionnement des COTOREP en des CDES ; à envisager un guichet unique ; à recadrer la formation des personnels ; à assurer à la personne handicapée placée en établissement une vie quotidienne de qualité, avec une prise en charge personnalisée, spécialisée, digne et respectueuse de la personne humaine ; à instituer un contrôle du fonctionnement de ces établissements pour prévenir tout risque de maltraitance.

L'intégration, c'est aussi l'instauration d'un véritable droit à compensation, afin de rechercher l'égalité des chances. C'est une revendication de longue date des associations.

Ce budget veut rendre l'AAH plus accessible. Le moment est peut-être venu d'en revoir le montant : peut-on vivre décemment avec 560 euros par mois, soit 52 % du SMIC ? Il est donc indispensable de porter le montant de l'AAH au niveau du SMIC net, quel que soit le revenu du ménage.

Face à la fragilité de ces personnes, ne soyons pas des handicapés du c_ur et de l'intelligence ; ne nous laissons pas non plus guider par l'émotion, soyons simplement lucides et efficace. Et comme l'a dit Samuel Leroux-Lillois : « Pour que demain soit possible, je commence tout de suite : c'est ça l'espérance ! » Mais de l'espérance, il y en a bien peu dans ce budget (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF, du groupe du RPR et du groupe DL).

M. André Aschieri - L'économie solidaire n'est pas une forme nouvelle d'économie mais la continuité de l'économie sociale et du tiers secteur. Depuis les années 1980, on note un regain d'intérêt pour les organisations qui ne sont ni publiques, ni privées. Et l'économie sociale et solidaire représente aujourd'hui 1,7 million de salariés, 30 000 coopératives et mutuelles, 700 000 associations, 8,7 % du PIB. C'est loin d'être anecdotique !

La nomination d'un ministre à l'économie solidaire a répondu à une préoccupation des Verts.

En ce début de XXIe siècle, l'économie solidaire implique forcément de se situer dans une perspective planétaire, du local au global - la mondialisation est passée par là. Mais au-delà de cette vision idéaliste, on peut craindre un détournement de l'éthique fondatrice et une certaine instrumentalisation.

L'économie solidaire est aussi devenue un argument de vente... La notion de commerce éthique commence à se répandre dans la grande distribution et chez les voyagistes branchés, même si la demande reste faible.

En dix ans, environnement et développement durable sont sortis des dossiers poussiéreux des économistes et des tracts des écologistes pour devenir des arguments de vente, des marchands. Ainsi, Total ou Escota proclament « l'environnement a toujours été notre priorité ». On est loin du compte !

En amont des besoins émergents, l'économie solidaire exprime la solidarité internationale : partenariat avec les associations, volontariat, éducation à la citoyenneté, défense des droits, pratiques solidaires, échanges interculturels. Loin d'être un gadget, elle s'inscrit dans une économie d'échanges, en tout ou en partie marchande, même si elle peut aussi participer au service public. Elle crée aussi une nouvelle relation entre consommateurs et producteurs.

Ni économie marchande, ni économie non marchande, ni économie non monétaire, elle naît de la relation entre lien social et finalité économique. Elle ne vise pas à corriger le déséquilibre social provoqué par l'économie libérale, comme le ferait l'Etat-providence, mais à réinscrire la solidarité au c_ur même de l'économie.

Elle préfère une société avec marchés à une « société de marché » qui précipite l'ensemble des activités humaines dans une manchandisation qui va jusqu'au vivant.

Elle n'exclut pas la rentabilité, ne serait-ce que pour assurer sa pérennité, mais elle n'en fait pas sa finalité. Sa priorité est l'accompagnement durable des activités humaines. Pour de nombreux territoires de notre pays, l'entreprise de tiers secteur apparaît comme l'unique outil de développement économique et humain. Ainsi, l'économie solidaire peut apporter des réponses aux espaces ruraux menacés de désertification, aux banlieues paupérisées. Montagne Habits dans le haut pays grassois a été distinguée par la fondation des caisses d'épargne. Elle est devenue, avec 30 emplois créés, la première entreprise d'un canton de montagne. Renouer, association intermédiaire affiliée au réseau Corace, mène des actions remarquables pour réintégrer par le travail des personnes en grande difficulté.

Symbole d'une démocratie qui s'instaure en Europe, l'économie solidaire est née des grands mouvements ouvriers du XIXe siècle. Elle s'est développée, car elle intéresse nombre de citoyens qui veulent agir sur l'organisation sociale et économique de la cité. Le souci permanent de s'assurer de son bien-être en même temps que celui de son prochain, a permis sa propagation.

Le système économique à la française reste rigide et archaïque. La classe politique reste dominée par les idéologies de l'après-guerre, dans la Constitution et dans les lois. C'est pourquoi nous avons tant de retard. C'est pourquoi nous avons besoin d'un nouveau souffle, celui que donnera le ministère de l'économie solidaire.

Les Verts revendiquent de nouvelles formes d'action pour l'économie. L'économie sociale et solidaire met le citoyen au c_ur du système. Elle l'implique dans l'économie par la décentralisation de la prise de décision dans plusieurs milliers d'unités. Il s'agit de créer des conditions de politique socialement justes, et économiquement compatibles, le simple critère de rentabilité financière apparaissant trop réducteur pour les impératifs de l'économie sociale et solidaire et ses nouvelles plus-values humaines.

L'économie sociale et solidaire est fondée sur des principes éthiques de solidarité, de responsabilité, d'autonomie, d'utilité collective et d'initiative citoyenne. Elle vise à renforcer les quatre solidarités : la solidarité entre les générations, la solidarité dans la production et la redistribution, la solidarité entre les territoires et les continents, enfin la solidarité avec les générations futures, avec la préservation des ressources. L'enjeu auquel nous sommes confrontés, aujourd'hui, c'est de mettre en place des dispositifs juridiques et financiers permettant de pérenniser ce champ social.

Aujourd'hui, une nouvelle économie est en émergence, pour un nouveau monde, pour une modernité placée sous le signe de l'innovation sociale.

Depuis Smith, il est évident que le consommateur agit pour la satisfaction de ses propres intérêts personnels. Cependant, la théorie néoclassique a été invalidée depuis longtemps par de multiples variables. Comment expliquer autrement l'existence de multinationales qui contrôlent la majeure partie des producteurs et les intermédiaires entre producteurs et consommateurs ?

Notre difficulté à mettre en place l'économie solidaire est un problème de culture, comme le montrent les réactions négatives de certains face aux SEL, par exemple. Ayant le statut d'associations, les SEL sont exonérées d'impôts pour un volume d'activité inférieur à 250 000 francs par an, ce qui est loin de plaire à tout le monde. En 1998, des membres d'un SEL ariégeois ont été condamnés pour travail illégal, avant d'obtenir gain de cause en appel. Ils avaient réparé le toit de la demeure d'une adhérente en échange de fruits et légumes...

Faut-il encore insister sur le fait que les SEL ne font pas du travail au noir ?

Ces réticences montrent le retard culturel de la France dans ce domaine.

Pourtant, sur le terrain, des militants associatifs, des entreprises travaillent pour développer l'économie solidaire. Ainsi, je tiens à souligner l'enthousiasme des bénévoles d'Artisans du Monde ou le sérieux du travail d'entreprises comme Andines, qui a su montrer que le projet de commerce équitable était viable.

Nos voisins européens ont bien compris l'intérêt qu'il y avait à favoriser ce type d'économie. Ainsi des pays comme l'Italie ou la Belgique, ont développé le concept de l'« entreprise sociale ».

Nous souhaitons une meilleure prise en compte de l'économie solidaire dans les politiques publiques. Elle est encore trop souvent un nain politique, considérée comme une activité marginale, voire caritative.

Le changement de culture exige plusieurs conditions.

La première est le vote d'une grande loi de l'économie sociale et solidaire qui fournisse un cadre à toutes les formes d'organisation qu'elle emprunte.

Seconde condition, le poids réel de l'économie sociale et solidaire doit être mieux connu. Je ne comprends pas que l'on puisse encore penser que l'économie solidaire est génératrice d'emplois précaires et sous-qualifiés, alors qu'elle vise à sortir de la logique caritative pour créer de véritables emplois.

Troisième condition, il faut mettre en place des institutions représentatives de l'économie sociale et solidaire, au niveau national et régional, ainsi qu'une banque nationale solidaire. A l'image de la caisse solidaire du Nord-Pas-de-Calais, ou des expériences réussies en Belgique ou en Suisse, elle mettra concrètement en oeuvre le principe de solidarité et prouvera que l'économie solidaire peut être génératrice de bénéfices.

Enfin, l'économie sociale et solidaire doit être mieux représentée dans les instances publiques. Je salue, à cet égard, le soutien prévu par ce budget à des têtes de réseaux nationales de l'économie solidaire. La contractualisation, par des conventions pluriannuelles, permet de sécuriser le financement des associations, qui le demandaient depuis longtemps.

La création du secrétariat à l'économie solidaire a été une étape majeure vers la reconnaissance de ce secteur. Nous demandons d'ores et déjà qu'il soit pérennisé. C'est la première fois qu'il existe un interlocuteur officiel affichant les mêmes objectifs que les associations. C'est aussi la première institution qui ne s'adresse pas à des publics trop spécifiques comme les jeunes, les Rmistes ou les femmes... Le ministère offre un cadre idéal pour la mise en place des actions transversales. Sa création a aussi contribué à faire émerger le débat et à rendre l'économie solidaire plus visible.

Aujourd'hui l'économie solidaire doit sortir de son ghetto culturel. Pour ce faire, il faut agir à tous les niveaux et dans tous les ministères. Le ministère de l'environnement a su sensibiliser toutes les administrations aux problèmes de l'environnement. De même, le secrétariat à l'économie solidaire doit étendre les principes qu'il applique dans sa gestion aux autres administrations et aux collectivités locales. Le nouveau code des marchés publics permet la prise en compte de nouveaux critères.

La négociation des contrats de plan Etat-région et de l'ensemble des contrats découlant de la loi LOADT doit être l'occasion de prendre des dispositions pour développer l'économie solidaire, en associant ses acteurs à toutes les étapes, des études à la mise en _uvre des contrats. C'était le sens de l'appel à projets « Dynamiques solidaires » qui a permis de créer et de consolider des partenariats.

Ainsi, il faut inscrire systématiquement des crédits pour l'économie solidaire dans les contrats de plan. A cet égard je m'interroge sur le refus de certains élus du conseil régional d'Ile-de-France de voter les projets d'économie solidaire. Je me félicite que ce budget prévoit 28 millions de francs pour favoriser de nouvelles contractualisations - conventions pluriannuelles d'objectifs, contrats d'agglomération, ou chartes locales de l'économie sociale et solidaire.

En conclusion, il est temps d'installer l'économie solidaire dans les territoires et les esprits, de la faire sortir de la marginalité dans laquelle on tente souvent de l'enfermer. Le budget de l'économie solidaire est en progression, relative, certes, mais significative. Il favorise l'innovation et inscrit la défense de valeurs éthiques dans un budget de l'Etat.

Les députés verts se félicitent des projets mis en place par le secrétariat d'Etat à l'économie solidaire et approuvent ses orientations budgétaires. C'est pourquoi, Monsieur le ministre, ils voteront ces crédits (Applaudissements sur les bancs du groupe RCV et du groupe socialiste).

M. Armand Jung - L'examen de ce budget se déroule au moment même où débute la 5ème édition de la semaine nationale pour l'emploi des handicapés, que Mme Ségolène Royal vient d'inaugurer.

Plus de 200 000 jeunes handicapés recherchent aujourd'hui un emploi. Leur insertion connaîtra un temps fort cette semaine, grâce à des initiatives dans tout le pays. Ce budget s'inscrit également dans la perspective de l'année européenne du handicap décidée récemment par le Parlement européen pour 2003.

Ces périodes privilégiées de sensibilisation doivent nous interpeller sur les conséquences concrètes du handicap pour les femmes et les hommes concernés, mais également sur les responsabilités de notre société et, en premier lieu, de l'Etat.

La loi assigne à l'Etat, comme aux autres employeurs publics et privés, un objectif d'embauche de 6 % de personnes handicapées. Mais l'Etat ne donne pas l'exemple puisque sa fonction publique ne compte que 4 % de travailleurs handicapés.

C'est pourquoi je me félicite du protocole sur l'emploi des travailleurs handicapés dans la fonction publique de l'Etat signé récemment par le ministre de la fonction publique avec plusieurs organisations syndicales. Espérons que son application ne décevra pas les très nombreuses personnes handicapées à qui il apporte un regain d'espoir, comme j'ai pu le constater sur le terrain.

Dans le même esprit, je me félicite de la poursuite du plan « Handiscol » qui a pour ambition de doubler le nombre d'enfants et adolescents handicapés en établissement scolaire. La réussite de l'intégration scolaire et les mesures d'accompagnement prévues pour leurs familles sont assurément deux pièces maîtresses de votre politique en ce domaine. Le temps est révolu où l'on considérait que l'éducation des jeunes handicapés relevait exclusivement des établissements spécialisés. Il faut que les jeunes handicapés puissent vivre en milieu scolaire ordinaire ; leur différence représente d'ailleurs une source d'enrichissement pour tout le système scolaire et pour les autres élèves.

En ce qui concerne l'insertion professionnelle des personnes handicapées, les mentalités ont beaucoup de peine à évoluer et les préjugés ont toujours la peau dure. Beaucoup d'employeurs ont encore du mal à considérer qu'une personne handicapée pourvue d'une qualification professionnelle peut être un salarié comme un autre. Il ressort d'une étude réalisée en 1999 en Alsace qu'un tiers des employeurs de cette région préfèrent payer des pénalités au Trésor public plutôt que d'embaucher une personne handicapée. Un autre tiers sous-traite des activités à des ateliers protégés ou des centres d'aide par le travail. Seul un tiers des quelque 3 000 entreprises assujetties dans ma région serait en conformité avec la loi. Très rares sont celles qui vont au-delà des exigences de la loi. Je voudrais en citer deux : Peugeot-Mulhouse, qui compte 10 % de travailleurs handicapés, et l'Union régionale du transport d'Alsace, qui a réussi, en deux ans, à placer une vingtaine de travailleurs handicapés dans des entreprises de ce secteur.

Malgré des chiffres peu satisfaisants, en Alsace, le taux de chômage des travailleurs handicapés est en baisse de près de 7 % depuis les années 1999-2000. Mais ne nous leurrons pas. Une situation économique porteuse d'emploi ne profite pas toujours aux publics en difficulté. Tous les professionnels de l'insertion que j'ai pu rencontrer me l'ont confirmé : les incitations au recrutement et au maintien dans l'emploi des personnes handicapées sont évidemment nécessaires, mais toutes les réponses ne sauraient venir de l'Etat ou des institutions. La priorité, estiment-ils, est de modifier le regard sur le handicap. En effet, une personne handicapée est d'abord un salarié porteur de compétences, et qui fait souvent preuve d'une implication supérieure à la moyenne. Aujourd'hui, les personnes handicapées veulent travailler comme les autres salariés ; elles refusent le confinement ou la discrimination ; elles veulent mettre leurs compétences au service de la collectivité. C'est donc tout légitimement qu'elles revendiquent de plus en plus fortement le droit à l'autonomie.

Dans ce contexte, je voudrais saluer votre action, Mesdames et Messieurs les ministres, action que je soutiens et que je relaie sur le terrain. Je voudrais que vous le sachiez : vos efforts sont appréciés et les associations, les acteurs de terrain vous soutiennent, car vous poursuivez l'effort de développement des équipements d'accueil ainsi que des services d'auxiliaires de vie et d'intégration scolaire.

Toutefois certaines modifications de la réglementation ont du mal à se concrétiser. Pour ne citer qu'un exemple, j'ai saisi le ministre de l'intérieur en 1999 du fréquent non-respect des emplacements de stationnement réservés aux personnes handicapées. On m'a répondu qu'il n'était pas envisagé de renforcer les sanctions prévues. On persiste donc à ne réprimer ces occupations irrégulières que par une contravention de deuxième classe et, éventuellement, par la mise en fourrière du véhicule. J'ai eu l'occasion, aux côtés des adhérents de l'association des paralysés de France, d'agir pour le respect de ces emplacements de stationnement réservés, sur le thème : «Si vous prenez leur place, prenez aussi leur handicap ». J'ai pu constater que, sauf à faire campagne de façon permanente, ces actes d'incivilité perdurent, et ne facilitent pas la mobilité des personnes handicapées. Chez nos voisins allemands, les emplacements réservés aux handicapés, qui sont d'ailleurs gratuits, font l'objet, en cas de non-respect, d'une amende particulièrement dissuasive. Voilà un exemple concret que nous pourrions suivre pour donner du baume au c_ur aux personnes handicapées mais aussi un signal intelligible à nos concitoyens.

Nous sommes tous des handicapés potentiels, par le risque d'accident ou de maladie. Chacun d'entre nous a été, est ou sera confronté à ce problème. Malgré des progrès réels et significatifs ces dernières décennies, nombre d'évolutions sont encore nécessaires pour répondre positivement à la demande très forte d'intégration sociale et professionnelle des personnes handicapées. Ce n'est pas aux handicapés de s'adapter à la société : c'est à la société de s'adapter au handicap (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

Mme Elisabeth Guigou, ministre de l'emploi et de la solidarité - Je répondrai brièvement sur l'hôpital public et les cliniques, laissant Bernard Kouchner répondre sur les questions de santé et sur Biotox, et Ségolène Royal sur les handicapés.

Notre système de soins est un système mixte, où l'hôpital public et les cliniques fonctionnent en complémentarité. L'hôpital public assure 90 % des urgences, 80 % de la psychiatrie, 70 % de la médecine, 50 % de la chirurgie, 35 % des maternités. On peut avoir sur ce système le jugement que l'on veut, mais, dès lors que nous y sommes, notre devoir est de faire qu'il fonctionne dans la meilleure complémentarité possible. Nous devons reconnaître le rôle spécifique de l'hôpital public : il accueille tout le monde, 24 heures sur 24 et 365 jours par an, ce qui n'est pas le cas de toutes les cliniques. Il assume particulièrement les activités d'enseignement et de recherche. Et, contrairement à beaucoup de cliniques, il ne sélectionne pas les pathologies. Par conséquent, dans l'aide publique qu'il est légitime d'apporter à l'hôpital, mais aussi aux cliniques puisque leurs tarifs sont fixés par les pouvoirs publics, il importe de tenir compte à la fois de leur complémentarité et de leurs spécificités respectives.

C'est pourquoi nous avons tenu à faire des efforts financiers proportionnés. Je rappelle les mesures prises pour l'hôpital dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale. Nous avons décidé 3,9 milliards de francs de crédits supplémentaires. Neuf cents millions consistaient en accélération de l'utilisation de crédits déjà inscrits au fonds de modernisation, et un milliard de plus a été inscrit sur la dotation globale pour 2001. C'est donc 1,9 milliard qui doit être engagé d'ici la fin de l'année, à quoi s'ajoute 1 milliard supplémentaire sur le fonds de modernisation pour 2002. Tout ceci consiste en crédits de la sécurité sociale ; pour ce qui est du budget de l'Etat, nous inscrivons 1 milliard supplémentaire sur le FIMHO.

Il faut comparer ce qui est comparable, Madame Fraysse. A ces 3,9 milliards de crédits supplémentaires pour l'hôpital - comportant une part d'accélération - correspond 1,7 milliard de crédits supplémentaires pour les cliniques ; la proportionnalité est respectée. Par ailleurs, dans ce 1,7 milliard, il y a aussi des accélérations de décisions relatives aux tarifs, à hauteur de 500 millions pour 2002. Si l'on veut poursuivre la comparaison, les 3,1 milliards qu'ont obtenus les cliniques privées comportent, au-delà de ce 1,7 milliard , ce qui figurait déjà dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale. La somme équivalente attribuée à l'hôpital est donc de 11,7 milliards. C'est la somme de 1,7 milliard qui serait l'équivalent des 3,9 milliards de l'hôpital. Je crois donc que nous avons respecté les proportions.

Je veux répondre, notamment à M. Forgues et à M. Mitterrand, sur la gestion du FIMHO. Il est vrai que ses procédures sont d'une certaine lourdeur. En ce qui concerne notamment les opérations de construction, il y a d'importants décalages entre l'approbation des projets et leur réalisation. En 2000, dans le cadre du protocole du 14 mars, nous avons réexaminé les critères d'attribution, de sorte que les notifications de crédits n'ont pu intervenir qu'en fin d'année. Mais je vous rassure : les hôpitaux de Lannemezan, seuls ou en partenariat, ont obtenu 5,9 millions de francs d'AP, qui ont donné lieu au versement de 3,575 millions de francs de CP. Et ceux de Toulouse, Monsieur Bapt, ont reçu en 2000 et en 2001 19,2 millions de francs au titre du FIMHO. Ainsi, malgré ses lourdeurs, le fonds fonctionne ; il a permis de financer, pour 11 milliards de francs, de nombreux projets sur tout le territoire, et je pourrais citer Cherbourg ou Dijon. Nous avons pu constater que les demandes étaient très supérieures aux possibilités de financement, ce qui justifiait d'augmenter ces crédits. C'est pourquoi je proposerai par amendement d'augmenter les autorisations de programme.

Un mot sur le fonds des cliniques. Dans ce montant de 1,7 milliard de francs, 500 millions en 2002 sont consacrés aux tarifs, et notamment aux augmentations de salaires ; 1,2 milliard de francs est voué au fonds de modernisation des cliniques. Lors de la discussion de l'accord, avant même de parler chiffres, j'ai d'abord voulu qu'on s'accorde sur les conditions d'utilisation de ces crédits. Ils sont affectés à l'augmentation des salaires des personnels des cliniques - et non du revenu des médecins, qui relève d'une autre enveloppe. L'objectif est d'assurer des déroulements de carrières comparables à ceux de l'hôpital public, afin d'éviter une hémorragie de personnel.

Nous avons veillé à ce que les aides publiques soient ciblées d'abord sur les salaires, ensuite sur les établissements dont la situation économique le justifiait, enfin sur ceux qui jouent dans l'organisation sanitaire un rôle véritablement complémentaire de l'hôpital public. Et nous veillerons au respect de ce triple critère. C'est d'ailleurs un accord conditionné par la transparence, et par le suivi que nous organiserons avec les syndicats, puisque nous créons un observatoire tripartite. En liaison avec celui-ci, qui sera installé d'ici la fin du mois, les ARH assureront également ce suivi.

Il ne s'agit donc pas, vous le voyez, d'opposer les uns aux autres, mais de veiller à la bonne utilisation des crédits publics. Dès lors que nous faisions un effort pour les hôpitaux, la décision de principe était prise d'en faire un pour les cliniques. Sur les chiffres proprement dits, les choses se sont dénouées ces derniers jours seulement ; mais c'est parce qu'avant de parler chiffres nous avons voulu obtenir des assurances sur le contrôle et le ciblage. Par ailleurs il n'était pas opportun de laisser pourrir ce conflit, car pendant que les cliniques étaient en grève, c'étaient les hôpitaux publics qui récupéraient leurs malades.

M. Pierre Carassus - Ce qui est scandaleux !

Mme la Ministre - Je veux saluer la capacité des hôpitaux publics à faire face, mais il n'aurait pas fallu que la situation dure trop longtemps (Interruptions sur les bancs du groupe communiste). Les chiffres sont clairs : 1,7 milliard pour les cliniques se compare à 3,9 milliards pour les hôpitaux, 3 milliards pour les cliniques se comparent à 11,7 milliards pour les hôpitaux. Vous pouvez également vous reporter à mes réponses aux questions d'actualité.

En ce qui concerne la CMU, le nombre de bénéficiaires de la CMU de résidence est nettement inférieur aux prévisions initiales. Tant mieux : cela veut dire que la CMU a atteint son objectif. Fin juin 2001, 1,2 million de personnes étaient couvertes par la CMU de résidence, soit 170 000 personnes de plus que le nombre de celles qui étaient couvertes antérieurement par l'assurance personnelle. Cela correspond à l'évaluation du nombre de personnes qui ne disposaient d'aucune couverture maladie. Nous pouvons donc nous réjouir du caractère effectivement universel de l'assurance maladie dans notre pays.

Nous sommes déterminés à atténuer l'effet de seuil. J'ai présenté lors de la première lecture du PLFSS le schéma général ; nous aiderons les personnes qui sont juste au-dessus du seuil à financer l'achat d'une couverture complémentaire.

En ce qui concerne les rapatriés, M. Laffineur m'a semblé avoir un jugement quelque peu expéditif.

Il est surprenant de sa part de critiquer la fin prématurée des mesures en faveur des harkis et de leur famille, les dispositifs ayant été prorogés jusqu'au 31 décembre 2002 à l'initiative de l'actuel gouvernement, qui a porté à huit ans la durée du plan harkis, initialement fixé à quatre ans.

Au cours de cette législature, l'effort quantitatif et qualitatif ne s'est pas relâché. Les crédits consacrés aux harkis incluent le financement d'une rente viagère, qui bénéficie également aux conjoints. Ils se sont élevés en moyenne à 137 675 000 F par an entre 1995 et 1997, et à 173 076 000 F par an entre 1998 et 2001.

Les insertions sur le marché du travail étaient en moyenne au nombre de 2 418 par an entre 1995 et 1997, elles ont été portées à 4 200 entre 1998 et 2000, soit une progression de 75 %.

L'aide de l'Etat au désendettement immobilier a été multipliée par neuf entre la période 1995-1997 et la période 1998-2000.

S'agissant du surendettement des réinstallés et de l'indemnisation, personne ne nie les difficultés. Cependant, en deux ans de fonctionnement, la commission a statué sur l'éligibilité de 39 % des dossiers déposés ; si ce rythme se poursuit, il faudra trois ans et non pas sept pour achever leur examen. Je rappelle qu'en quatre ans, les CODER avaient statué sur 73 % des demandes.

56 plans d'apurement ont été examinés par la commission nationale, auxquels on doit ajouter 87 aides relevant de la procédure CODER. Il reste qu'il faut absolument accélérer le processus d'instruction des dossiers de désendettement.

J'ai donc augmenté les effectifs de la délégation aux rapatriés. Par ailleurs, Daniel Vaillant a adressé une circulaire aux préfets pour accélérer la préinstruction de dossiers. Enfin, nous allons modifier le décret du 4 juin 1999 pour qu'il soit plus souple ; j'attends avant la fin du mois de novembre les conclusions d'un audit, qui devraient me permettre de définir avant la fin de cette année les aménagements nécessaires.

Les rapatriés sont protégés des poursuites de leurs créanciers et bénéficient d'un gel de leurs dettes fiscales, à la suite de décisions prises par le Parlement au cours de cette législature.

M. Gérard Bapt - Ce n'était pas le cas sous l'ancienne !

Mme la Ministre - S'agissant des médecins rapatriés, les négociations en cours doivent nous permettre de confirmer dans les textes l'ouverture du droit au rachat.

Je terminerai par la mémoire et l'institut de la France d'outre-mer et de la francophonie.

Monsieur le rapporteur, vous estimez que les atermoiements de l'Etat sont à l'origine de la décision de la ville de Marseille d'implanter son propre mémorial. C'est inexact ; l'Etat souhaite inscrire l'IFOMF dans le cadre de l'opération d'intérêt national d'aménagement urbain et de développement économique et socio-culturel menée à Marseille par l'établissement public Euro-Méditerranée, qui bénéficie de crédits d'Etat considérables.

S'agissant de la reconnaissance due aux harkis, je rappellerai que le principe de la journée - la première a eu lieu le 25 septembre dernier - a été retenu en février 2001 par le Haut Conseil de la mémoire combattante sur proposition du Gouvernement. Le Président de la République et le Premier ministre ont salué son importance, le second a déclaré le 26 avril 2001 : « Nous ne pouvons ignorer les massacres dont les harkis ont été victimes ». J'ai moi-même participé à cette journée et ranimé la flamme du soldat inconnu en présence des associations de harkis. On ne saurait donc dire que le Gouvernement se désintéresse de cette importante question (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Bernard Kouchner, ministre délégué à la santé - Les questions sur la santé ont été nombreuses, j'y répondrai de manière un peu globale.

M. Mitterrand a souligné le quadruplement des crédits pour les programmes de santé publique définis comme prioritaires, en particulier la lutte contre le cancer, qui concerne aujourd'hui 700 000 personnes et provoque 145 000 décès par an. En 2002, l'accent sera mis sur le dépistage du cancer du sein et le développement du dépistage du cancer du colon et de l'utérus. Monsieur Préel, concernant le cancer du sein, la principale difficulté était d'informer les femmes : nous allons les convoquer individuellement ; si certaines femmes ne se présentent pas, il faudra peut-être aller les chercher avec des « mammamobiles ». Pour le cancer du colon, l'hémocult permettra un dépistage d'abord dans dix départements, puis dans tous. Le dépistage du cancer de l'utérus suivra. Nous nous pencherons ensuite sur le cancer de la prostate.

S'agissant des IVG - on en pratique 214 000 chaque année -, une information est indispensable.

L'action contre le diabète passe par le changement des comportements alimentaires. Si le slogan « mangez cinq légumes et fruits par jour » pouvait marcher, le diabète ferait moins de ravages...

Tout cela n'exclut pas de nous intéresser à d'autres programmes : insuffisances rénales chroniques, maladie d'Alzheimer, schéma des IRM. Voilà d'autres programmes, car la santé publique est un tout.

Le plan Biotox comporte un chapitre information et prévention, et un chapitre alerte, avec un dispositif qui a terriblement fonctionné puisque, avec 4 000 fausses alertes, la France détient le record du monde. Cette semaine, nous en étions encore à 80 alertes quotidiennes.

M. Jean-Luc Warsmann - Cela mérite des sanctions.

M. le Ministre délégué - La justice a puni de 18 mois de prison ferme un récidiviste, et 40 condamnations ont déjà été prononcées.

M. Jean-Luc Warsmann - L'Assemblée est unanime sur ce sujet.

M. le Ministre délégué - Tant mieux, mais cela n'empêche pas les enveloppes de partir. Nous avons calculé ce matin que les seules interventions des pompiers ont coûté 100 millions. Je ne dis rien du SAMU, des prises en charge hospitalières, des 1 350 antibiothérapies. Nous avons commandé des antibiotiques, et un fonds de concours financera ces achats. Nous avons commandé 3 millions de doses de vaccin antivariolique ; nous en avions déjà 5 millions.

Pour que le plan Biotox soit poursuivi, nous sommes autorisés à créer 130 emplois.

M. Mitterrand demande des précisions sur l'installation de l'agence technique d'information sur l'hospitalisation, créée par un décret du 26 décembre 2000. Le CIAT du 9 juillet 2001 a décidé de l'implanter à Lyon. Elle devrait être opérationnelle, avec un directeur nommé, à la fin de cette année.

Monsieur Foucher, la DGS emploie 320 personnes. Quand j'ai connu la DGS à mon premier triste séjour dans ce noble ministère, en 1991, elle était à Vanves.

M. Jean-Pierre Foucher, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles pour la santé - Il y a le métro direct !

M. le Ministre délégué - Il n'existait pas à cette époque. C'était la vraie désespérance. Des améliorations colossales ont eu lieu depuis. Les agences ont été créées, ce qui a d'abord suscité un certain flottement, puis la DGS a été renforcée dans ses missions. Ce ne sont pas les agences, c'est elle qui est responsable de la santé publique. 346 postes devaient figurer au budget, et il n'y en a que 307. Cela devrait s'arranger très vite. Les problèmes qui subsistent seront réglés, mais le système est plus clair, les agences fournissant des informations et offrant des coopérations à la DGS.

Pour les médecins rapatriés, il existe, je l'ai dit, des difficultés de prise en charge de certaines cotisations depuis 1962. Mme Gillot, dans la dernière discussion budgétaire, a indiqué que le droit au rachat de ces cotisations n'était plus contesté aux médecins rapatriés, mais que l'hypothèse d'un rachat par l'Etat posait un problème d'égalité par rapport aux autres cotisants. Nous ferons en sorte que les médecins rapatriés ne soient pas lésés.

Madame Génisson, l'aide à l'installation de médecins hospitaliers s'élève à 10 000 euros, contre un engagement de cinq ans de leur part. C'est en fonction de la pénurie de certaines spécialités dans les régions que nous allons demander à ces volontaires de s'installer. S'il n'y a pas des cardiologue mettons à Charleville...

M. Jean-Luc Warsmann - Les Ardennes sont un beau département !

M. le Ministre délégué - Il existe des départements agréables qui sont en effet méconnus ! ce dispositif pour le moment concerne le service public. Madame Génisson, ce ne sont pas 24 000 infirmières, mais 26 346 qui sont entrées en formation. Il y en avait 18 346 en 1999.

Je le sais, certaines aides-soignantes ont passé le concours sans obtenir immédiatement une bourse. Au total, la moitié d'entre elles accédera à l'institut de formation aux soins infirmiers. Les autres conserveront pour l'année suivante le bénéfice de leur succès au concours.

S'agissant de Sida international, deux projets coexistent : FSTI-Solidarité internationale, destiné à couper la transmission de la femme enceinte séropositive à l'enfant, et le jumelage de solidarité hospitalière. Le budget additionnel de 50 millions est destiné à aider les 50 hôpitaux retenus en France. M. Bardet a dressé de l'opération un tableau très excessif. Si l'opération ne marchait pas, comment 250 à 300 établissements se seraient portés volontaires pour aller travailler avec leurs équipes dans le tiers-monde ? Ces 50 millions peuvent paraître bien modestes, mais n'oubliez pas l'engagement pris pour le Premier ministre en faveur du fonds international de Kofi Annan (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

Mme Ségolène Royal, ministre déléguée à la famille, à l'enfance et aux personnes handicapées - Les rapporteurs Forgues et Hammel, certains députés ont évoqué notre politique en faveur des handicapés. S'agissant de stationnement, Monsieur Jung, je veux bien étudier un renforcement des amendes, mais le mieux est de susciter l'adhésion.

M. Jean-Luc Warsmann - Parfaitement !

Mme la Ministre déléguée - Le nombre des places réservées aux handicapés est insuffisant. Nous songeons à leur réserver deux ou trois places en queue des stations de taxis, donc à un endroit stratégique.

La politique du Gouvernement consiste à favoriser l'autonomie des handicapés, à mieux les accompagner, à adapter les capacités d'accueil des établissements aux handicapés les plus lourds, à modifier le regard porté sur ces personnes. Cette politique est développée aussi dans le cadre du CNCPH que préside Francis Hammel et que nous réunissons prochainement pour le saisir de nouvelles mesures.

L'intégration scolaire a été injustement critiquée par M. Perrut. En réalité, les 20 mesures du plan Handiscol s'appliquent et nous avons créé 1 000 places d'auxiliaires d'intégration. Nous réunissons prochainement les inspecteurs d'académie et les directeurs des DDASS pour un premier bilan. La règle est désormais l'intégration et les établissements doivent donc justifier leur refus d'accueillir un enfant handicapé.

S'agissant de l'aide aux familles, le Premier ministre a annoncé, lors de la dernière conférence de la famille, la mise en oeuvre d'une réforme de l'allocation d'éducation spéciale, cette prestation familiale servie par les CAF. Le décret d'application correspondant sera publié avant la fin de cette année, conformément à l'engagement pris lors de la conférence de la famille. Cette réforme permettra, en créant trois nouveaux compléments, d'attribuer des montants d'aide mieux en rapport avec la réalité des situations. En outre, la création d'un outil d'aide à la décision commun à l'ensemble des commissions départementales d'éducation spéciale permettra d'harmoniser les pratiques.

En ce qui concerne l'accompagnement des personnes handicapées dans leur vie quotidienne, en milieu ordinaire, nous allons très prochainement élargir aux personnes handicapées de moins de 60 ans le champ de compétence des services de soins infirmiers et d'aide à domicile.

Par ailleurs, la loi de rénovation sociale et médico-sociale, qui sera votée avant la fin de l'année, donne une base juridique claire à l'accueil de jour, à l'accueil temporaire et « séquentiel ». Ces formes innovantes d'accueil et de services permettent de soulager l'entourage de la personne handicapée, et d'apporter des réponses adaptées au rythme de vie et aux besoins de la personne handicapée.

Les sites pour la vie autonome sont en train de trouver leur rythme de développement, sur la base de l'expérience acquise par les sites pilotes et grâce bien entendu aux crédits mis en place dans les budgets 2001 et 2002.

Les conseils départementaux consultatifs des personnes handicapées se mettent progressivement en place, avant même le vote définitif de la loi de modernisation sociale. Le développement des capacités d'accueil s'inscrit dans le cadre du plan quinquennal pour les MAS, les foyers à double tarification et les CAT, et du plan triennal pour les autres structures.

Tous les engagements pris par le Gouvernement sont tenus. Au total, le Gouvernement aura mobilisé plus de 2,5 milliards de francs à ces plans de grande envergure.

Et pour les personnes souffrant d'autisme, Mme Guigou a annoncé une enveloppe supplémentaire permettant de doubler l'effort annuel affecté initialement à ce titre dans le plan triennal.

L'orientation, la formation et l'accompagnement des travailleurs handicapés ont été évoqués par Mme Guigou lors de la discussion du budget de l'emploi et j'ai moi-même eu l'occasion, lors de la journée des personnes handicapées, de rappeler l'action qui va être menée pour le maintien dans l'emploi des personnes qui deviennent handicapées. Il n'y a pas de raison que l'entreprise ne fasse pas un effort en adaptant le poste de travail. J'ai rappelé aussi notre action pour inciter les entreprises qui n'embauchent aucun travailleur handicapé à franchir cette première barrière.

Plusieurs orateurs ont évoqué la nécessaire réforme des COTOREP. Le Gouvernement a entrepris ce processus important de rénovation. La circulaire sur leur fonction médicale sera publiée très prochainement. C'est une réforme très délicate à piloter et nous sommes donc prudents quoique fortement motivés. Nous souhaitons l'expérimenter dans des départements volontaires pour cela. Elle prévoit la fusion des deux sections.

L'ensemble du dispositif vise aussi à changer le regard sur les handicapés, raison pour laquelle nous organisons le 26 janvier les journées « réussite et handicap », qui permettront de montrer au pays tout entier non seulement ce que les handicapés apportent à notre société, mais aussi ce que des citoyens réalisent pour construire cette France vraiment plurielle que nous appelons de nos v_ux (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Guy Hascoët, secrétaire d'Etat à l'économie solidaire - Le budget que le Gouvernement entend consacrer en 2002 à l'économie sociale et solidaire poursuit les objectifs suivants : continuer à étendre le champ de celle-ci ; développer les outils qui la soutiennent ; structurer le secteur au niveau international.

Nous continuerons en 2002 notre soutien direct à tous ceux qui innovent en ce domaine. Sur 1 766 projets présentés, nous avons déjà retenu 500 actions et nous avons bon espoir de présenter le même chiffre d'ici un peu plus de six mois.

Nous continuerons aussi à soutenir la démarche des collectivités territoriales intéressées et les réseaux spécialisés qui apportent leur savoir-faire à tous ceux qui, ici, cherchent à monter une crèche, là un service aux personnes âgées, ailleurs une régie d'entretien de l'environnement. Plusieurs collectivités locales ont désormais des délégations à l'économie solidaire et le dialogue avec elles est fructueux, quelle que soit leur couleur politique. Nous avons là une perspective de convergence de moyens et de synergie, je m'en félicite.

Lorsque j'ai été nommé à ce poste, je me suis inquiété des moyens mis à ma disposition. A l'époque 13 millions, devenus trois mois plus tard 53, devenus encore trois mois plus tard 80. En janvier, je disposais déjà de plus de 90 millions. Au total, pour 2001, nous aurons eu 108 millions et nous en aurons affecté 98,8 %. Je sais bien qu'il faut relativiser cette progression puisque nous sommes partis de bas, mais nous consommons et nous nous félicitons de voir émerger d'autres partenaires tels que la Caisse des dépôts ou les caisses d'épargne.

Deuxième objectif : développer et moderniser nos outils. Je rappellerai simplement que nous avons achevé en 2001 la refonte du régime juridique des mutuelles ; que la loi sur l'épargne salariale a ouvert la voie à la création de fonds communs de placement solidaire ; que le DDOS de juin 2001 a créé un nouveau type de coopérative : la société de coopérative d'intérêt collectif.

Dans toute cette démarche, nous avons essayé d'éviter les écueils évoqués par M. Carassus, en particulier qui consisterait à laisser se développer un secteur qui se situerait en deçà du code du travail. Nous sommes très vigilants sur ce point.

Des travaux ont été engagés. Un rapport a été demandé à M. Chassin sur les plates-formes de service ; un autre à M. Tytgat sur les caisses solidaires ; un autre à M. Viveret sur les indicateurs de richesse. Tout cela a servi pour l'élaboration du projet de loi-cadre, qui pourrait être prêt d'ici quelques semaines.

Certains ont critiqué le manque de transparence des associations intermédiaires et des régies de quartier. Mme Guigou a annoncé le 5 novembre dernier, devant le conseil national de l'insertion par l'activité économique, la révision des textes les concernant.

Troisième objectif : structurer le secteur au niveau international.

Le statut de la coopérative européenne est en train d'être bouclé et j'espère bien voir s'ouvrir le chantier du statut associatif européen. Le colloque de Tours en novembre 2000, la réunion de Gävle en juin 2001 et demain la conférence de Gand font que la thématique de l'économie solidaire s'installe dans le débat européen et au-delà. Elle conquiert progressivement ses lettres de noblesse (Applaudissements sur les bancs du groupe RCV et du groupe socialiste).

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QUESTIONS

M. Emile Vernaudon - L'ensemble du corps médical polynésien a voté le principe d'une grève générale si une réflexion profonde n'était pas engagée par le Gouvernement sur le rééquilibrage des moyens et des investissements entre l'île de Tahiti et les archipels éloignés. Je propose que cela se fasse par la création d'un fonds de péréquation sanitaire qui mobiliserait 30 % des dépenses de santé engagées à Tahiti et qui serait entièrement affecté aux investissements à réaliser dans les postes de soins installés dans les archipels de la périphérie ou dans les communes les plus démunies, situées à des milliers de kilomètres de Papeete.

Bien que la santé soit de compétence territoriale, l'Etat doit intervenir dans un secteur qui concerne tous les citoyens et qui met en _uvre le principe de solidarité.

Les dépenses de l'Etat en Polynésie en matière de santé se sont élevées à plus de 225 millions de francs, ce n'est pas rien ! Cela donne naturellement à l'Etat un droit de regard et d'intervention dans le secteur de la santé en Polynésie. L'ancien Premier ministre, Michel Rocard, ne déclarait-il pas à Tahiti : « Qui paye contrôle ! » ?

Je souhaite donc savoir si l'Etat peut participer à une politique de santé plus proche et plus solidaire des citoyens qui place au même niveau l'hôpital du dernier recours et le plus petit poste de soins des Marquises.

Je souhaite également appeler l'attention des pouvoirs publics nationaux sur l'état sanitaire et sur la santé publique en Polynésie française. En effet, si la construction d'un grand hôpital à Tahiti peut améliorer l'offre de soins, il est également indispensable d'engager une politique de prévention contre certaines maladies en pleine recrudescence.

La Polynésie détient en effet le triste record mondial du taux d'obésité et de diabète, avec un taux de 30 % de la population. C'est une conséquence négative de l'époque du CEP et de « l'après CEP ». Il est donc normal que l'Etat participe, aux côtés du territoire, à la lutte contre cette terrible maladie.

La tuberculose a repris. Un cas de lèpre a même été signalé. La dingue continue ses ravages mortels et la filariose revient en force.

Je demande donc qu'une mission de votre ministère se rende en Polynésie afin d'en évaluer l'état sanitaire et de mettre au point, avec les autorités territoriales, une véritable politique de prévention ainsi que de réelles mesures sanitaires.

Enfin la Polynésie n'est pas à l'abri des risques de contamination bactériologique résultant de la situation internationale. Malgré son éloignement, elle peut être atteinte par la maladie du charbon par des lettres piégées mais aussi par un touriste ou par un résident qui aurait contracté la maladie à l'extérieur, la période d'incubation étant de deux mois.

Mme la Présidente - Veuillez conclure !

M. Emile Vernaudon - Dans le cadre du plan Biotox, la Polynésie est-elle assurée, comme toutes les autres collectivités de la République, de disposer rapidement et en quantité suffisante des antibiotiques adaptés ?

Mme la Présidente - Je vous prie de conclure !

M. Emile Vernaudon - Qu'en est-il pour la variole, pour laquelle la France ne dispose que d'une réserve de six millions de vaccins ?

C'est incroyable ! Je suis arrivé hier, après 22 heures d'avion, spécialement pour cette séance. Vous n'avez pas à m'interrompre sur des sujets aussi importants, d'autant que j'ai regroupé mes deux questions !

Mme la Présidente - Je ne fais que m'en tenir aux règles édictées par la Conférence des présidents.

M. Emile Vernaudon - Vous pinaillez pour quatre minutes !

Mme la Présidente - Je vous en prie.

M. le Ministre délégué - La politique de santé est de compétence territoriale, mais il va de soi que nous n'allons pas refuser de vous porter assistance dans la lutte contre les maladies dont vous venez de parler et que je connais bien. L'incidence de la tuberculose est en forte régression, puisqu'elle est passée de 48 cas pour 100 000 habitants en 1999 à 27 cas en 2000, soit moins que dans certains départements d'Ile-de-France

Le plan de santé défini par le gouvernement de Polynésie pour 2001-2005 place la lutte contre ces maladies parmi les priorités. J'ai reçu le ministre de la santé du territoire, qui m'a invité à me rendre sur place.

M. Emile Vernaudon - Il a été évincé depuis !

M. le Ministre délégué - Mais peut-être l'invitation tient-elle toujours... Je me réjouirais de pouvoir ainsi contribuer, avec les services de mon ministère, à faire reculer ces endémies.

En ce qui concerne l'offre de soins, le nouveau centre hospitalier territorial Jacques-Chirac s'installerait sur le site de l'ancien hôpital des armées Jean-Prince, qui sera fort de deux grands pôles - médecine-chirurgie et mère-enfant.

Le territoire a demandé le financement de la construction par le fonds pour la reconversion économique de la Polynésie française. Le coût du premier projet était de 673 millions, celui du second est de 1,5 milliard. Le groupe d'experts a validé ce dernier, sous réserve de disposer d'un schéma territorial d'organisation sanitaire. L'Etat s'est montré favorable à ce projet et à une subvention de 1 milliard du fonds de reconversion, le gouvernement du territoire s'étant engagé à supporter seul les frais de fonctionnement. Nous sommes donc presque totalement d'accord et à votre disposition.

M. Georges Colombier - Au moment où Mme Guigou organise une campagne de communication autour du lancement de l'APA, plusieurs points restent à éclaircir.

Le Gouvernement doit d'abord préciser le sort qu'il réserve aux personnels de l'aide à domicile, qui travaillent dans des conditions difficiles pour des salaires souvent inférieurs au SMIC. Nous nous interrogeons sur le plan de formation prévu, ainsi que sur les améliorations sociales attendues. Il aurait d'ailleurs été judicieux d'associer les régions, dont c'est une des compétences, à la formation des personnels.

Il est par ailleurs surprenant que la qualification et les compétences exigées, dont le non-respect entraîne une pénalité de 10 % du ticket modérateur des personnes âgées, soient sans rapport avec le recrutement et avec la rémunération.

En ce qui concerne les prestataires, il aurait été par ailleurs souhaitable de ne pas fixer de limite d'âge intangible pour les futurs allocataires, certaines affections, comme les maladies d'Alzheimer ou de Parkinson, n'attendant hélas pas l'âge de 60 ans pour se déclarer.

Je déplore enfin la faiblesse de l'aide financière pour le traitement en établissement, difficilement explicable puisque c'est souvent le signe d'une plus grande dépendance et d'un plus grand nombre d'interventions à effectuer. A cela s'ajoute l'inégalité fiscale qui pénalise les personnes dépendantes traitées en établissement, puisque la réduction d'impôt n'est que de 25 % alors que les personnes traitées à domicile bénéficient de 50 % d'exonération d'impôts sur les dépenses liées à l'emploi à domicile.

Comment entendez-vous remédier à ces incohérences, à ces difficultés, à ces inégalités ?

M. le Ministre délégué - Le Gouvernement est conscient de la nécessité d'améliorer le sort des personnels de l'aide à domicile, dont le nombre doit être accru. Cela suppose de revaloriser les salaires et des négociations sont menées actuellement avec la CNAVTS afin qu'elle tienne compte de la RTT.

Cela suppose aussi d'améliorer les horaires de travail ; de parvenir à une convention collective unique, vers laquelle toutes les organisations professionnelles viennent de s'engager ; de recruter et de former des responsables de secteur pour accompagner les professionnels de terrain. Cela relève des employeurs, mais le fonds de modernisation créé par la loi du 20 juillet peut les y aider. Ce fonds, doté de 300 millions, permettra de mener des actions destinées à structurer l'offre de services, à professionnaliser les intervenants non qualifiés, à développer la qualité des services.

Rien n'empêche la contractualisation que vous suggérez entre les différents financeurs. Quant à la priorité du recours à des services prestataires, clairement inscrite dans la loi, elle vise à ce que les personnels les plus qualifiés interviennent auprès des plus fragiles. C'est pourquoi la loi fait explicitement référence aux personnes les plus dépendantes et à celles qui nécessitent une surveillance régulière. Un grand nombre de dispositions précises visent à garantir cette grande qualité.

Le plan de formation auquel vous avez fait allusion concerne l'ensemble des formations qui nous font terriblement défaut.

Vous relevez les inconvénients liés à l'application de deux législations différentes selon l'âge des personnes, mais il faut bien commencer par apporter des améliorations pour certaines d'entre elles.

La loi sur l'allocation personnalisée d'autonomie améliorera considérablement le sort des personnes âgées. Dans un second temps, nous nous efforcerons de mettre en cohérence les deux dispositifs.

M. Pierre Cardo - Les entreprises situées en zone de redynamisation urbaine sont exonérées des cotisations patronales de sécurité sociale pendant la première année des contrats. La circulaire du 16 mai 1997 subordonne cet avantage à l'absence de licenciement dans les douze mois précédant l'embauche. Si cette règle peut paraître de bon sens, elle a néanmoins un caractère trop absolu et peut poser des problèmes aux entreprises d'insertion employant des personnes particulièrement déstructurées. En effet, si l'employeur veut garder le bénéfice des exonérations, il ne peut licencier même en cas de faute lourde ou d'inaptitude médicalement constatée, alors que ces deux exceptions sont prévues pour les entreprises installées en zone franche urbaine.

Serait-il possible de compléter la circulaire par une clause de ce genre ?

M. le Secrétaire d'Etat - Les personnes en statut d'insertion bénéficient de certaines garanties en cas de licenciement, mais l'employeur garde son pouvoir de décision en cas de carence manifeste.

Je vais vérifier ce qu'il en est dans les ZRU et répercuter votre préoccupation. S'il s'avère que la circulaire ne prend pas en compte les situations d'exception, nous corrigerons le dispositif.

M. Franck Dhersin - Après dix mois d'interminables négociations, le décret créant le fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante, le FIVA, est enfin paru le 24 octobre dernier. Mais de nombreuses questions restent en suspens. Que recouvre la notion de réparation intégrale ? Sur quelle base sera évalué le préjudice subi ? Y aura-t-il un barème unique d'indemnisation ? Les disparités énormes constatées dans les indemnisations accordées jusqu'à présent par les commissions spécialisées des tribunaux seront-elles atténuées ?

D'autre part, le dispositif relatif à la cessation anticipée d'activité des victimes de l'amiante est inéquitable : il devrait s'appliquer aussi dans des secteurs comme la sidérurgie ou la pétrochimie.

M. le Ministre délégué - Le décret sur le FIVA a fait l'objet d'une concertation certes longue, mais absolument nécessaire car les enjeux sont considérables. Le FIVA se substitue à une procédure d'indemnisation juridictionnelle qui a fait l'objet de critiques. Les modalités de reconnaissance du préjudice, la politique d'indemnisation et les règles de gestion du fonds étaient des questions sensibles qui méritaient un examen très attentif.

Les critères d'indemnisation seront décidés par le conseil d'administration du FIVA, avec contestation possible devant les cours d'appel. Le fonds est doté de 3,2 milliards de francs pour les années 2001-2002 et devrait bénéficier à quelque 7 000 salariés.

M. Philippe Nauche - Au-delà de l'allocation personnalisée d'autonomie, vous avez annoncé, le 11 octobre dernier, un dispositif spécifique pour la prise en charge des personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer. Elle touche aujourd'hui de 350 000 à 400 000 personnes et pourrait en concerner un million en 2020. Quel sera le contenu de ce dispositif ? Comment comptez-vous développer les places d'accueil de jour et d'accueil temporaire, élément essentiel pour assurer un soutien aux familles ? Quelles sont les intentions du Gouvernement en ce qui concerne le répartition géographique des structures d'accueil en hébergement complet, le dépistage précoce de la maladie et la prévention des facteurs favorisant la survenue des démences évitables ?

M. le Ministre délégué - Vous avez raison de parler de démences évitables car si la maladie d'Alzheimer est diagnostiquée assez tôt, elle peut être, sinon guérie, du moins largement traitée.

Actuellement 500 à 600 000 personnes seraient atteintes en France de démence sénile, dont 350 000 de la maladie d'Alzheimer, mais la moitié ne sont pas diagnostiquées. Il faut procéder à des explorations dès que des troubles de la mémoire apparaissent.

Notre plan comporte, en premier lieu, la formation de médecins qui seront eux-mêmes des formateurs au niveau local ; 2 millions de francs sont prévus pour cette action.

En second lieu, 35 millions de francs sont consacrés au recrutement de neuropsychologues et d'autres personnels pour les « consultations mémoire » où les diagnostics pourront être effectués. S'y ajoute une enveloppe de 5 millions de francs pour renforcer les moyens des centres de ressource et de recherche.

Le troisième objectif, préserver la dignité des personnes, fera l'objet de cinq tables rondes avec les experts et les associations et leurs conclusions seront largement diffusées.

Quatrième aspect, la prise en charge de la personne malade et le soutien à sa famille seront renforcés par l'APA, par l'augmentation des capacités d'accueil de jour - 1 750 places seront créées en 2002, pour un coût de 78 millions de francs - et par la création de CLIC pour 150 millions de francs.

Cinquièmement, la qualité des structures d'hébergement sera améliorée par la réforme tarifaire des établissements, qui facilitera aussi un accueil limité dans le temps pour donner un répit aux familles - 750 places supplémentaires sont prévues.

Enfin, le dernier volet concerne la recherche clinique : identification des facteurs de risques, recommandations pour les projets de soins et de soutien - 3,327 milliards en tout avec les soins.

M. Alain Calmat - La loi du 1er juillet 1998 sur le renforcement de la veille sanitaire a créé un comité national de sécurité sanitaire, qui est une instance de coordination entre les agences de sécurité sanitaire des aliments, des produits de santé, et l'institut de veille sanitaire, placé sous la triple tutelle de la Santé, de l'Agriculture et de la Consommation. Destiné à traiter des problèmes de fond, ce comité devait aussi, en cas de crise, fournir au Gouvernement des informations et des éléments de réponse. La crise de la vache folle a montré que cette mission n'avait pas été remplie de façon satisfaisante. Lors de la discussion de la loi créant l'agence française de sécurité sanitaire environnementale, des missions plus précises lui ont été confiées en cas de crise sanitaire. Comme nous n'entendons pas beaucoup parler du comité national de sécurité sanitaire, je souhaite savoir s'il fonctionne et quel est son bilan. Je souhaite aussi savoir si c'est dans le cadre de ce comité que s'est élaboré le plan Biotox, puisqu'on parle à son sujet d'un travail interministériel.

M. le ministre délégué - Non, Biotox a été créé autour du Premier Ministre, dans un comité interministériel différent. Oui, le comité national de sécurité sanitaire a été utile. Il se réunit chaque mois sous ma présidence, en présence des ministres de l'agriculture et de l'environnement et du secrétaire d'Etat à la consommation. Il s'est réuni huit fois depuis le 2 juin 1999, travaillant sur la listériose, la contamination des aliments par la dioxine, les conséquences de la marée noire de l'Erika, l'analyse et la gestion des risques liés à la vache folle, la légionellose, et enfin, il y a trois semaines, les pesticides et la santé. Chaque réunion donne lieu à une publication, et des éléments d'information sont donnés à la presse. Pour franchir une nouvelle étape dans cette politique, nous avons voulu créer un observatoire des résidus de pesticides, car une séance n'était pas suffisante : c'est un exemple du suivi auquel peuvent donner lieu ces réunions.

Biotox s'est créé hors de cette institution, dans un cadre plus directement politique, impliquant les ministères de l'intérieur, des affaires étrangères et de la défense.

M. Henri Nayrou - Monsieur le secrétaire d'Etat à l'économie solidaire, votre budget pour 2002 affiche une belle progression de plus de 50 %, et apporte un effort important pour soutenir les projets des entrepreneurs solidaires. Mais ceux-ci ont surtout besoin de fonds propres et de prêts bancaires garantis, qu'ils obtiennent difficilement. Des réflexions sur ces problèmes ont donc été conduites lors de la consultation sur le projet de loi relatif à l'économie solidaire. Par ailleurs, le rapport Tytgat a débouché sur certaines préconisations, notamment l'institution d'une banque solidaire et d'un fonds de garantie national. De telles banques existent d'ailleurs en Belgique, en Italie ou en Suède. Des épargnants solidaires existent en France, et de nombreux projets économiques solidaires attendent des financements spécifiques. Les acteurs de terrain sont donc de plus en plus demandeurs, au point que ces propositions sont relayées par les médias. Ainsi Le Monde du 22 octobre écrit que ces secteurs pourraient se développer plus largement, pour répondre à des aspirations sociales et créer de l'emploi, s'ils trouvaient des possibilités nouvelles de financement. Qu'en est-il du projet de banque solidaire, et dans quel délai pourrait-elle voir le jour ?

M. le Secrétaire d'Etat - J'ai en effet confié à M. Tytgat la mission de rechercher, sur les territoires français, dans quelles conditions ces entrepreneurs associatifs ou coopératifs pourraient trouver les financements qui leur font défaut. Je pensais que le territoire pertinent serait la région. Mais le retour a été surprenant : il apparaît que la meilleure manière de couvrir la France serait de faire essaimer une cinquantaine de caisses locales à partir d'une caisse centrale, dotée, qui essaimerait à mesure que les gens s'organiseraient localement. Il s'agirait donc, non pas d'une banque au sens strict, mais d'un établissement financier - c'est-à-dire la même chose qu'une banque moins les comptes-chèques courants - pour le crédit solidaire et l'apport de fonds propres. Pour s'assurer que ces deux métiers restent les seuls qu'accomplira cet établissement, il faut que ceux qui pourraient autrement en craindre la concurrence y détiennent la majorité du capital : je propose donc que les banques coopératives et mutualistes prennent la tête du cortège ; après quoi bien sûr les partenaires publics devront entrer, dans une proportion à débattre avec l'ensemble des partenaires. Nous travaillons à ce montage, à partir de cette idée de faire essaimer une cinquantaine de caisses locales sur les territoires de la République. Nous avons beaucoup d'espoir, car les partenaires du secteur sont partants, et j'espère pouvoir bientôt vous faire part d'un engagement clair de l'Etat.

M. François Guillaume - Le milieu médical est en effervescence. Il conteste votre politique et surtout votre imprévoyance : pénurie de médecins hospitaliers, insuffisance des rémunérations. Chargés d'astreintes et de gardes, harcelés par une administration tatillonne, voire hostile, nos meilleurs chirurgiens s'expatrient. L'hôpital public recourt donc de plus en plus à des praticiens étrangers - ce qui est d'ailleurs curieusement interdit aux établissements privés. Ceux-ci acceptent des rémunérations inférieures à celles de leurs confrères français ou européens, ce qui, à compétence égale, est d'ailleurs une injustice. Mais il y a danger quand leurs qualifications sont inférieures à celles qui sont normalement requises, ou quand, en cas d'urgence, la survie d'un malade peut dépendre de sa capacité à se faire comprendre d'un médecin qui ne maîtrise pas notre langue. Devant cette situation critique, pourquoi ne pas relever le numerus clausus des médecins issus de nos universités ?

M. Gérard Bapt - Vous l'avez baissé !

M. François Guillaume - Même chose pour les infirmières. Pour assurer les 35 heures, injustement différées de deux ans dans le secteur public, vous allez recruter 45 000 infirmières sur trois ans, quand il en faudrait 80 000 tout de suite ! Pourquoi avoir attendu si longtemps pour ces décisions minimales, alors que le principe des 35 heures est retenu depuis plus de trois ans ? Et ne me répondez pas en parlant d'un effort sans précédent comparé à la gestion de la droite : sur les deux dernières décennies, vous avez gouverné sans partage pendant quatorze ans.

M. le Ministre délégué - Votre dernière phrase est juste : nous avons enfin gouverné, et il était temps ! Puisque vous cherchez, par votre ton polémique, à provoquer le mien, je vous rappelle que vous avez fermé les écoles d'infirmières, et réduit de deux mille le nombre de celles-ci. Quant au numerus clausus...

M. François Guillaume - Ne répondez pas à côté de la question.

M. le Ministre délégué - Je n'ai pas compris votre question. C'était un réquisitoire. Il n'y a aucune « effervescence » des médecins : j'ai eu l'unanimité des intersyndicales, quand vous les aviez mis dans la rue.

M. Jean-Luc Warsmann - Je souhaite appeler l'attention de M. le ministre sur deux problèmes que nous rencontrons. Le premier concerne les services de soins infirmiers à domicile. Dans l'arrondissement de Sedan, il n'en existe qu'un, celui de la Croix-Rouge. Il doit répondre à deux objectifs : le maintien à domicile des personnes qui ont une santé difficile, mais aussi l'accompagnement de celles qui sortent de l'hôpital. Or, aujourd'hui, cinquante personnes - pour la plupart âgées - sont sur la liste d'attente de ce service : c'est-à-dire que quatorze lits de soins à domicile ne sont pas financés. Et cette situation s'aggrave, d'autant que le seul autre service de soins infirmiers de l'arrondissement vient de fermer. Quelle attention pouvez-vous accorder à une telle situation ?

Ma seconde question - et je sais que vous y êtres sensible - porte sur l'insuffisance du nombre de médecins dans nos départements. Le nombre de médecins généralistes libéraux pour cent mille habitants y est de 97, quand la moyenne nationale est de 115. Et quand, en zone rurale, un généraliste libéral cesse son activité, il ne trouve personne pour reprendre sa clientèle, même gratuitement. Et quand un habitant a besoin d'un rendez-vous chez un ophtalmologiste, il lui faut six mois pour l'obtenir. Notre département, qui n'a pas de faculté de médecine et qui passe pour peu favorisé par le soleil, souffre ainsi d'une véritable inégalité.

M. le Ministre délégué - Il est vrai que, l'installation étant libre, certaines régions sont moins favorisées que d'autres. Nous avons fait voter un amendement en première lecture du projet de loi de financement de la sécurité sociale qui nous permettra - à l'instar de ce que nous faisons pour les praticiens hospitaliers - d'offrir une prime à l'installation pour les médecins libéraux.

Je sais bien que dans l'éducation nationale, les affectations sont imposées aux enseignants. Je ne pense pas que nous devions en arriver là dans le système de santé, mais une discrimination positive est nécessaire en faveur de régions comme la nôtre.

S'agissant de votre question sur la Croix-Rouge, je vous promets de vous répondre après avoir examiné le dossier.

M. François Guillaume - Ma question concerne les économies d'investissement réalisables grâce à la coopération hospitalière entre secteurs public et privé.

A Lunéville, peu après mon élection en 1993, j'avais engagé une action de rapprochement entre les deux établissements existants, jusque là concurrents. Plus que les réticences des responsables de l'hôpital et de la clinique, ce sont les atermoiements de votre administration, ARH comprise, qui ont freiné ce rapprochement. Je vous ai d'ailleurs écrit deux fois à ce sujet, sans obtenir aucune réponse.

Le rapprochement est en cours, me dit-on... Il est malheureusement bien trop tardif. Un exemple : l'hôpital et la clinique ont chacun investi dans un bloc opératoire, dont l'un sera désaffecté, en contrepartie de quoi l'Etat prendra en charge l'amortissement restant. Autrement dit, le contribuable paiera deux fois un investissement inutile...

Où en est ce dossier ? Êtes-vous décidé à financer le scanner dont l'obtention était conditionnée au rapprochement des deux établissements ? Quelles conclusions générales tirez-vous ?

M. le Ministre délégué - Sur 120 mouvements de rapprochement-harmonisation entre les établissements, la moitié joignent le privé et le public.

A Lunéville, la clinique Jeanne-d'Arc, déficitaire depuis trois ans, a déposé son bilan en juin 2001, une décision du tribunal de commerce étant attendue pour le 5 décembre 2001.

Une coopération avec le centre hospitalier est envisagée depuis près de deux ans. Un premier protocole d'accord avait été signé le 3 juillet 2000 pour coordonner l'offre de soins chirurgicaux.

Compte tenu de l'engagement prochain du centre hospitalier dans la procédure de contractualisation et de l'évolution financière de la clinique, le processus de coopération a été accéléré au printemps 2001 et doit aboutir dans les prochains jours à la signature d'un nouvel accord-cadre. Celui-ci portera sur la mise en place : d'astreintes médicales par spécialités, dès janvier 2002 ; d'un site unique de chirurgie à échéance de cinq ans ; d'une organisation concertée de l'imagerie, des laboratoires, de la pharmacie et de la stérilisation ; de filières de prises en charge concernant la cancérologie, les pathologies respiratoires et cardiaques, la rééducation et les soins palliatifs.

Compte tenu de la volonté des deux partenaires d'aboutir, l'ARH est prête à soutenir la restructuration du centre hospitalier et cette coopération avec la clinique.

Concernant la demande de scanner, le Gouvernement ayant décidé d'ouvrir la fourchette indiciaire, à 1 pour 90 000 habitants, la région aura droit à un scanner supplémentaire. Rien ne paraît devoir contrarier l'accord d'une autorisation au centre hospitalier de Lunéville, l'ARH étant favorable au projet.

Mme Muguette Jacquaint - L'allongement du délai légal de l'IVG devrait logiquement avoir des répercussions budgétaires, l'Etat remboursant à la sécurité sociale les dépenses afférentes. Or les crédits inscrits dans ce projet de budget sont identiques à ceux de l'année passée.

Pourtant, nous savons qu'avant le vote de la loi, environ 6 000 femmes effectuaient à l'étranger une IVG entre 10 et 12 semaines. Au demeurant, diverses associations nous ont fait part des difficultés rencontrées par les femmes pour obtenir un rendez-vous dans les centres IVG au-delà de 10 semaines.

Quelles dispositions le Gouvernement entend-il prendre pour faire appliquer la loi ?

M. le Ministre délégué - J'ai remarqué comme vous que la loi sur l'IVG était mal appliquée. Certains professionnels font valoir la clause de conscience, d'autres un manque de connaissance des conditions d'application de la loi, d'autres encore le manque de moyens ou le manque de formation. La formation, en réalité, s'est faite sur le tas avec des volontaires qui étaient des militants ; il s'agit plutôt d'une question de volonté.

Certaines dispositions de la loi sont d'application immédiate, comme l'allongement du délai légal. D'autres sont subordonnées à la parution d'un décret. Pour l'IVG médicamenteuse en ville, un décret en Conseil d'Etat, qui nécessite encore des discussions avec les laboratoires ; pour les installations autorisées dans les établissements de santé privés pratiquant les IVG, un décret simple ; pour les interruptions médicales de grossesse pour anomalies f_tales ou liées à un problème de santé de la femme, deux décrets en Conseil d'Etat ; pour la prise en charge anonyme et gratuite des IVG pratiquées sur des mineurs sans consentement parental, un décret simple ; pour la composition et le fonctionnement du comité d'experts intervenant pour les demandes de stérilisation des personnes majeures handicapées mentales faisant l'objet d'une protection judiciaire, un décret en Conseil d'Etat. Ces six projets de décret ont été présentés le 17 octobre à la délégation aux droits des femmes de l'Assemblée nationale, le 31 octobre aux associations et aux professionnels, qui ont jusqu'au 30 novembre pour faire valoir leurs observations. Ils ont fait l'objet d'une réunion interministérielle le 17 octobre.

Les ARH vont dresser un premier bilan de l'application de la loi, afin de recenser les difficultés. Le livret guide à destination des femmes a été totalement refondu et devrait pouvoir sortir à la fin de l'année ou au tout début de l'année prochaine.

Un groupe national d'appui va être constitué cette semaine pour faciliter le rattachement des centres IVG autonomes aux établissements de santé et pour réaliser des missions ponctuelles dans tous le établissements où l'on signale des difficultés.

Enfin, lors d'une réunion le 31 octobre, les associations et les professionnels se sont fait l'écho des inquiétudes des anesthésistes amenés à intervenir dans les IVG des mineures sans autorisation parentale. Leurs représentants seront reçus au ministère très prochainement.

Un travail a été entrepris pour revaloriser les actes remboursés par l'Etat à l'assurance maladie. A régime constant, le coût de la revalorisation est estimé à 35 millions de francs ; à acte réel, à plus de 100 millions de francs. 12 millions de moyens nouveaux en 2000, 15 millions en 2001 ont été affectés à l'amélioration de la situation des médecins pratiquant l'IVG. Cet effort sera poursuivi, l'IVG étant l'une des cinq priorités de santé publique figurant dans le budget.

Se pose surtout une question de culture médicale, et tout ce que je viens de vous dire y est un peu étranger.

M. Jean Dufour - Depuis deux ans, l'hôpital a bénéficié d'avancées significatives. Mais sur le protocole de l'an 2000, nous partageons l'inquiétude des syndicats, qui constatent que les 2 milliards de crédits destinés aux emplois de remplacement en 2001 ne figurent pas dans le budget.

Les trouverons-nous dans le collectif ? L'hôpital public doit recevoir 2 milliards prélevés sur le budget de la sécurité sociale, et l'hôpital privé 1,7 milliard. Comment ce prélèvement sera-t-il opéré ? Enfin, on a relevé combien les crédits du FIMHO étaient lents à mobiliser. Comment et quand ces financements pourront-ils être mis à la disposition des hôpitaux ? Mme Guigou a répondu avec précision sur les cliniques privées. Nous attendons que vous fassiez de même sur l'hôpital public.

M. le Ministre délégué - Je vais m'y efforcer. Les crédits de remplacement, hors 35 heures et hors 45 000 nouveaux emplois, figurent dans le PLFSS. Les protocoles représentent 1 633 millions de francs, la RTT est financée à hauteur de 2 600 millions de francs, et le FIMHO dispose d'un milliard en 2002.

Les 2 milliards de la sécurité sociale seront pris sur l'assurance maladie.

M. Jean Dufour - Sans recettes nouvelles ?

M. le Ministre délégué - Tout à fait. En 2001, sont inscrits 900 millions en 2002, 1 milliard.

Le FIMHO, enfin, sera opérationnel au tout début de 2002, pour que les opérations décidées par les ARH soient aussitôt prises en charge.

M. Maxime Gremetz - Le 10 juillet dernier, je vous ai écrit. Si nous recevions des réponses, nous gagnerions beaucoup de temps ici. Mais vous ne m'avez pas répondu, et je viens donc ce soir chercher une réponse.

M. le Ministre délégué - Cela me vaut le bonheur de vous voir !

M. Maxime Gremetz - Bien sûr ! Mais on pourrait se voir autrement !

Je vous écrivais sur un sujet sérieux. Nous avons appris, à la veille des élections municipales, l'existence d'un projet de transfert de l'hôpital Nord d'Amiens vers le sud, pour réaliser le pôle mère-enfant. Les conséquences seraient graves sur l'offre de services, sur la situation des personnels soignants, puisqu'il manque 900 personnes à l'hôpital Nord, sur l'avenir du CHR de Picardie, sur celui des quartiers nord de la ville, qui comptent 40 000 habitants, sur les transports urbains nord-sud.

Surtout, le projet a été élaboré entre M. de Robien et l'ARH, les autres élus, les salariés, les syndicats étant exclus de la concertation.

Alors que l'hôpital public a besoin de beaucoup d'argent, l'opération envisagée coûterait 1,2 milliard. Le FIMHO, qui devrait en financer une partie, n'y suffirait pas. L'ARH justifie l'opération par l'exigence de restructuration hospitalière encouragée par le Gouvernement. En même temps, il existe un projet de transfert, pour un montant comparable, de l'université, qui est bien où elle est, à la place de l'hôpital Nord, que l'on veut faire partir.

Qui va payer ? Cette dépense n'est pas une priorité par les temps qui courent !

M. le Ministre délégué - Pardon de ne pas vous avoir répondu, d'autant que j'ai la réponse sous les yeux. Mais ç'aurait été trop simple, ce ne serait pas un fonctionnement administratif, ce ne serait pas un ministère !

Le CHU d'Amiens dispose d'une capacité de 1 718 lits, répartis sur quatre sites, dont deux sont distants de l'hôpital Nord de 5 km, et l'un de 10 km.

Le CHU s'est engagé dans une restructuration interne en 16 pôles, conduisant à réfléchir à un regroupement des activités de soins. Sont directement concernés 498 lits actifs de l'hôpital Nord et de Saint-Victor, qui doivent rejoindre l'hôpital Sud. Mieux vaut un regroupement que plusieurs pôles dispersés, dans l'intérêt des malades.

Ce projet ne doit pas aboutir à une désertification sanitaire du quartier nord d'Amiens. L'implantation d'une maison de santé au nord d'Amiens est en effet à l'étude.

Au total, l'opération est lourde, puisqu'elle porte sur près de 800 lits. La concertation commence. Vous serez reçu par la directrice de l'ARH à la fin de ce mois.

M. Maxime Gremetz - Il a fallu que je m'agite !

M. le Ministre délégué - Non, il a fallu que je demande ! (Sourires) A ma connaissance, ce projet de regroupement sur l'hôpital Sud recueille un consensus local. La direction du CHU et la communauté médicale auraient exprimé leur adhésion. Les autorités locales seraient même prêtes à porter le projet. Le premier semestre 2002 servira à approfondir différents aspects du dossier, y compris le maintien d'une permanence médicale dans les quartiers nord. Le montant total des investissements que devrait engager le CHU entre 2002 et 2008 s'élève à 3,5 milliards, dont près de 2 milliards pour la construction du nouvel hôpital d'Amiens-sud (M. Gremetz s'exclame).

Ce chiffre vous effraie ? Moi aussi ! Mais c'est le prix, et par la suite on ne le regrette pas.

M. Gérard Grignon - La loi du 17 juillet 1987 a institué à Saint-Pierre-et-Miquelon un régime d'assurance vieillesse, mais du fait de dispositions antérieures archaïques, la plupart des retraités de l'archipel ne perçoivent que le minimum vieillesse alors que le coût de la vie est très élevé, notamment à cause de l'isolement de l'archipel et des conditions climatiques, qui enchérissent le poste « chauffage ». De juin 1997 à 2001, il a été augmenté de 20,6 % à Saint-Pierre-et-Miquelon, contre 6,4 % seulement en France métropolitaine.

Or la loi de 1987 dispose très clairement, dans ses articles 13 et 35, que les retraites du secteur privé peuvent faire l'objet d'une revalorisation supplémentaire en cas d'évolution du coût de la vie plus forte dans l'archipel qu'en métropole. Mais cela ne s'est jamais traduit dans les faits, sauf en 2001 où 2,2 % supplémentaires furent accordés après trois ans de revendication. Seriez-vous favorable à une modification des articles 13 et 35 qui donne un caractère automatique au rattrapage du pouvoir d'achat ? Sinon, comment comptez-vous mettre fin à cette injustice ?

Je voudrais aussi parler de ces personnes âgées, le plus souvent des veuves sans défense, qui, suite à un fonctionnement erratique du régime local de retraite complémentaire, sont harcelées et traînées en justice pour de prétendus trop-perçus, au demeurant dérisoires et largement engloutis depuis dans les frais d'avocat. Leur caisse de retraite les convoque même le 11 décembre devant le tribunal d'instance du Ier arrondissement de Paris. Les procédés sont indignes et je souhaiterais, Monsieur le ministre, que vous diligentiez une mission de contrôle sur cette affaire.

M. le Ministre délégué - La loi de 1987 fixe un double système de revalorisation. En application de l'article 13, la première se fait par arrêté des ministres chargés de la sécurité sociale et du budget, après consultation du conseil d'administration de la caisse de prévoyance sociale, lorsque l'évolution des salaires diffère, dans une proportion déterminée, de celle constatée en métropole. Suite à une demande du conseil d'administration, le Gouvernement a décidé, au vu d'un différentiel de deux points pour la période 1990-1996, de revaloriser de 3 % les pensions du régime de base de l'archipel. Cette mesure a pris effet au 1er mars 2001.

L'article 35, relatif aux allocations non contributives composant le minimum vieillesse applicable dans l'archipel, prévoit quant à lui, outre une revalorisation identique à celle applicable en métropole, une revalorisation spécifique en cas d'évolution des prix différente de celle constatée en métropole.

Dès la mise en place de ce régime, en 1981, le Gouvernement a tenu compte du fait que le coût de la vie est plus élevé dans l'archipel qu'en métropole, notamment en fixant un montant de l'allocation supplémentaire supérieur à celui de la métropole - 29 541 contre 25 833, au 1er janvier 2001.

Pour apprécier l'opportunité d'une nouvelle revalorisation exceptionnelle, nous ferons procéder à une analyse de l'évolution des salaires depuis 1996.

Concernant enfin les difficultés rencontrées par les titulaires d'une pension de réversion servie par l'ARRCO, je ferai le nécessaire et nous verrons ensemble si une mission est nécessaire.

M. Jacques Le Nay - Dans certaines zones rurales, nous sommes confrontés à cette situation paradoxale : de plus en plus de travail mais de moins en moins de médecins généralistes.

Certains travaillent très dur, plus de 70 heures par semaine, et beaucoup ne trouvent pas de successeur lorsqu'ils partent en retraite, ce qui ajoute encore à la surcharge de leurs collègues, déjà surmenés. Cette désertification médicale devient alarmante et prendra des proportions catastrophiques si les pouvoirs publics ne réagissent pas. Les causes en sont connues : le numerus clausus, qui est passé d'environ 10 000 dans les années soixante à 3 500 dans les années quatre-vingt-dix ; et les modifications sociologiques qui font qu'à l'ère des 35 heures, les candidats à une journée de travail de quatorze heures se font rares. Comment dans ces conditions garantir aux populations rurales un accès correct aux soins ? Et quelles mesures incitatives comptez-vous prendre pour assurer le remplacement de ceux qui partent à la retraite ?

M. le Ministre délégué - Ce n'est pas tant la démographie médicale en général qui est préoccupante que la faiblesse des installations en milieu rural. Pour l'heure, nous avons 331 médecins pour 100 000 habitants, soit trois fois plus qu'en 1970, et des situations très variables. Le numerus clausus était de 3 700 en 1999, de 3 850 en 2000, de 4 100 en 2001, de 4 700 en 2002 - et j'espère que nous dépasserons 5 000 l'an prochain. Je crois donc que nous avons fait ce qu'il fallait.

Mais il est vrai que l'installation en milieu rural reste problématique. Nous allons donc l'encourager par une aide dont je ne puis encore vous préciser le montant et qui dépendra sans doute d'un engagement du professionnel sur la durée.

Nous avons retenu huit régions - la Basse-Normandie, la Picardie, la Lorraine, les Pays-de-Loire, le Languedoc-Roussillon, le Limousin, le Nord-Pas-de-Calais - pour y mener des études et expériences et faire remonter l'information sur l'offre et la demande de soins. Une mission nationale d'appui sera constituée afin d'améliorer l'efficacité de la démarche. En tout état de cause, elle nous permettra d'adopter la mesure la plus appropriée pour remédier au problème dont vous parlez.

M. Gérard Grignon - Dans un archipel aussi isolé que Saint-Pierre-et-Miquelon, l'hôpital prend une place particulière. L'établissement actuel, le centre hospitalier François-Dunan est extrêmement vétuste. En janvier 1995, j'avais demandé à la commission de sécurité d'évaluer sa protection contre les risques d'incendie et de panique. Les conclusions furent terribles. La commission émit en effet un avis défavorable à la poursuite de l'exploitation, suggérant même au préfet de prononcer sa fermeture immédiate. Suite à cela, j'avais proposé au conseil d'administration et au conseil général la construction d'un nouvel établissement. En novembre 1997, le conseil d'administration a pris la décision de reconstruire le centre sur son emplacement actuel. Mais la nouvelle majorité élue au conseil général en mars 2000 est revenue sur cette décision et a programmé la construction d'un établissement sur un nouveau site. L'opération est inscrite au quatrième contrat de plan signé entre l'Etat et la collectivité territoriale, pour un coût prévisionnel de 113 millions, le centre François-Dunan en ayant la maîtrise d'ouvrage et devant y engager 51,5 millions de francs.

Il y a urgence mais je ne vois pas comment ce centre, qui affichait un déficit de 7 millions l'an passé et dont la situation ne s'est pas améliorée pourrait faire face à ses obligations de maître d'ouvrage. Votre ministère considère-t-il toujours cette opération comme prioritaire ? Reverra-t-il à la hausse sa participation financière ? Et surtout quel échéancier peut-on raisonnablement prévoir ?

M. le Ministre délégué - La situation de l'hôpital de Saint-Pierre a suscité bien des réflexions. En février 2001, une mission de l'IGASS a relevé la vétusté des locaux et confirmé la nécessité d'une reconstruction.

En novembre 1997, le conseil d'administration s'était prononcé en faveur d'une reconstruction complète en centre-ville. Le plan de financement approuvé par la lettre ministérielle du 10 novembre 1998 garantissait une participation de l'Etat de 25 millions.

En juillet 2000, à la suite du changement de président, le conseil d'administration a abandonné ce projet et engagé l'étude d'une reconstruction sur un nouveau site, à proximité de l'ancien aéroport, ce qui a amené à revoir le plan de financement. Dès que le projet médical aura été défini, l'étude technique reprendra, au cours du premier semestre 2002 pour une ouverture en 2005.

M. Gérard Bapt - Ma commune participe à une action de solidarité en faveur d'une association qui _uvre dans le domaine d'une maladie rare, la leucodystrophie. J'ai ainsi pu mesurer la détresse des familles dont les enfants n'ont qu'une faible espérance de vie et qui se sentent abandonnées par la société et par la médecine.

Les quelques 6 000 maladies rares et orphelines recensées touchent chacune peu de personnes, mais concernent au total 100 000 personnes. Je me réjouis donc que vous ayez annoncé, le mois dernier, un plan d'action en la matière. Pouvez-vous nous indiquer quels en sont les grands axes, quels financements sont prévus et quel espoir peuvent raisonnablement entretenir ces familles ?

M. le Ministre délégué - C'est un sujet important. Occupé par la mise en place du plan Biotox, je n'ai pu me rendre à la manifestation organisée à Toulouse, le 19 octobre dernier, mais j'ai parlé avec le dirigeant de cette association, homme d'une grande conviction et d'une grande obstination - et il en faut !

La France a fait en la matière depuis 1991 un effort considérable afin d'intéresser l'Europe aux maladies orphelines, qui touchent le plus souvent moins de 3 000 personnes, qui subissent un véritable parcours du combattant avant même le diagnostic, en raison de la faiblesse de la formation des médecins.

Le dépistage et le traitement sont aussi rendus difficiles par le peu d'intérêt que ces maladies suscitent chez les groupes pharmaceutiques, qui voient de trop faibles débouchés.

Après avoir inauguré récemment la plate-forme des maladies rares, qui regroupe associations, serveur d'informations, service téléphonique et réseau européen, le Gouvernement s'attache à promouvoir une organisation qui prenne en compte la qualité et la proximité des soins et qui s'appuie sur la définition des centres de ressource et de compétence et sur la constitution de réseaux.

Une circulaire relative à l'organisation des soins pour la prise en charge des patients atteint de mucoviscidose a été signée le 22 octobre 2001 : 30 millions de francs sont affectés à la création de centres de ressource et de compétence et 8 millions de francs au renforcement des laboratoires de biologie moléculaire. Par ailleurs, 10 millions de francs sont destinés à renforcer les centres spécialisés dans la prise en charge des malades atteints de maladies neuromusculaires. S'agissant de leucodystrophies, l'association européenne de lutte contre les leucodystrophies est soutenue pour ses actions d'accompagnement, d'information et de soutien aux familles.

La direction générale de la santé travaille sur : la structuration coordonnée du suivi sanitaire et de l'accompagnement médical, technique et social de proximité, sur la sensibilisation des professionnels de santé à l'approche des maladies rares, sur l'accès au diagnostic et aux soins.

Autre objectif du Gouvernement : la constitution d'une filière santé de l'ADN destinée à favoriser les acquis de la recherche de l'activité clinique et biologique. Le thème des maladies rares sera à nouveau prioritaire dans le programme hospitalier de recherche clinique 2002. La nécessaire modernisation de l'encadrement de la recherche en génétique sera prise en compte dans la révision de la loi bioéthique et puis de la loi Huriet.

Enfin, le règlement européen relatif aux médicaments orphelins a permis de désigner 52 médicaments, 130 demandes étant enregistrées par la Commission européenne.

M. Thierry Lazaro - En matière de santé bucco-dentaire, un amendement au PLFSS a heureusement étendu la prévention, en prévoyant deux examens gratuits à 6 et à 12 ans. C'était une des propositions du rapport Yahiel.

Mais ce rapport allait bien plus loin dans les propositions de réforme dentaire. Tous les acteurs sont prêts à une réforme de soins et à une amélioration des prises en charge, pourtant ces propositions sont restées lettre morte.

Vous avez pourtant vous-même reconnu que les soins dentaires devaient être une priorité de santé publique. Pour que cette réforme prenne corps, des crédits suffisants doivent lui être affectés, sur plusieurs années.

Pouvez-vous confirmer votre intention de donner suite à ce rapport ? Allez-vous laisser aux partenaires conventionnels le soin de préciser le contenu et les étapes de cette réforme ? Allez-vous inscrire, dès 2001, les crédits nécessaires ?

M. le Ministre délégué - Nous nous efforçons depuis longtemps d'améliorer la prévention et de réviser la nomenclature ainsi que l'équilibre entre soins et prothèses. Nous avons failli aboutir, mais nous avons finalement échoué.

C'est à partir de l'analyse qualitative du rapport Yahiel que nous avons décidé les deux examens préventifs à 6 et à 12 ans. Nous souhaitons aussi réformer l'entente préalable et réviser la nomenclature. Mais l'ensemble des mesures envisagées coûterait 10 milliards, sur plusieurs années. Deux mesures tarifaires ont par ailleurs été prises pour le scellement des sillons et pour l'inlay-core, qui s'ajoutent à l'amendement au PLFSS pour les examens préventifs pour les enfants.

Autre mesure positive : le déplafonnement en deux ans du coût des prothèses pour les bénéficiaires de la CMU. J'ai toutefois le sentiment que cela ne suffit pas, qu'il faudrait parvenir, comme certains pays du Nord, à des visites gratuites dans le cadre de la surveillance régulière des enfants.

M. Jean Dufour - Dans le dispositif de santé publique, la psychiatrie joue un rôle essentiel en matière non seulement de soin, mais aussi de prévention. Elle a besoin d'un personnel qualifié, disponible, qui s'inscrive dans une logique soignante et refuse le gardiennage.

Des expériences tout à fait intéressantes, comme celle conduite par le professeur Ruffo en psychiatrie infantile, montrent que l'on peut obtenir des résultats pour peu que les équipes soignantes travaillent dans de bonnes conditions.

Malheureusement, nous sommes, à Marseille, dans une crise profonde, la réduction de 342 lits - soit l'équivalent d'un hôpital comme Edouard -Toulouse - conduit à une gestion en flux tendu des entrées et sorties, en même temps qu'à une augmentation des hospitalisations sous contrainte. Ainsi, les refus d'accueil sont nombreux dans le privé et ils aboutissent à de véritables drames personnels familiaux, tel ce scandale de l'hospitalisation d'un enfant de 9 ans chez les adultes.

Cette situation dramatique est aggravée par l'insuffisance manifeste du nombre d'internes, qui ne sont que 18 à Marseille, deux services se trouvant ainsi sans interne et deux autres avec deux postes occupés sur cinq.

Pour rétablir la situation, il suffirait de créer huit postes. Est-ce possible ?

M. le Ministre délégué - Je présenterai au prochain conseil des ministres, mercredi, une grande réforme concernant la santé mentale. C'est un sujet majeur, car 25 à 30 % de nos concitoyens souffrent ou souffriront d'un trouble psychiatrique, allant de l'insomnie à des maladies graves.

A Marseille, la prise en charge de la maladie mentale est assurée par l'Assistance publique et par le CHS Edouard-Toulouse, qui gèrent chacun six secteurs de psychiatrie générale et deux secteurs de psychiatrie infanto-juvénile, et par le CHS Valvert, qui gère deux secteurs de psychiatrie générale et deux secteurs de psychiatrie infanto-juvénile. Cet établissement dispose de 766 lits et de 506 places alternatives à l'hospitalisation.

En ce qui concerne l'hospitalisation privée, six cliniques totalisent 914 lits et quatre établissements de post-cure 292 lits.

La psychiatrie infanto-juvénile compte 16 lits et 94 places alternatives dans le secteur public, 40 places d'hôpital de jour et 5 lits d'hospitalisation dans le secteur privé.

La ville de Marseille a l'offre la plus forte de la région pour la population adulte, mais il convient de renforcer la psychiatrie infantile. Le CHS Edouard-Toulouse développe des consultations d'adolescents. L'Assistance publique a ouvert l'espace Arthur à la Timone en mai 1999 et projette la création d'une unité de 8 lits d'hospitalisation.

Le SROSS de juin 1999 préconise le développement des alternatives à l'hospitalisation et donne la priorité à la psychiatrie infanto-juvénile. Un effort financier important a été fait. En psychiatrie générale, les effectifs médicaux du CHS Valvert ont été augmentés par la création de deux postes de praticiens à plein temps. En psychiatrie infanto-juvénile 6,794 millions de francs ont été consacrés, de 1998 à 2001, à l'espace Arthur, au développement des consultations pour adolescent, à l'hôpital Le Relais, aux équipes médicales mobiles.

Par ailleurs, le CHS Edouard-Toulouse a signé le 27 juin avec l'ARH un contrat pluriannuel pour la reconstruction des pavillons actuels, très dégradés, à raison de 1,5 million de francs par an sur cinq ans.

Vous avez évoqué le manque d'internes. La réforme de l'internat donnera la priorité aux structures de gynécologie-obstétrique, pédiatrie, anesthésie et psychiatrie - c'est le seul moyen que nous avons d'inciter les étudiants à se diriger vers ces secteurs. Pour les infirmiers psychiatriques, il est prévu de compléter le diplôme d'Etat par une formation spécialisée.

M. Claude Birraux - Avant le 8 novembre, ma question aurait été simple : vos services ne sont-ils pas atteints de surdité ? Depuis il y a eu un accord avec les établissements privés, mais dans mon département de Haute-Savoie les problèmes demeurent et je ne voudrais pas que vos services soient atteints de cécité... Depuis un certain temps déjà, nous vous alertons sur la pénurie d'infirmières, attirées par les rémunérations plus élevées de la Suisse. Selon les enquêtes faites, il manque 480 infirmières et 364 aides-soignantes dans les seuls établissements pour personnes âgées. Certains sont menacés de fermeture de ce fait et les services d'aide à domicile ne peuvent plus remplir leurs missions.

La solution est entre vos mains : elle doit être trouvée en France, et non en Espagne, où vous avez lancé une opération de recrutement d'infirmières.

La population des plus de 75 ans devrait augmenter, dans les 20 prochaines années, de 53 % dans la région Rhône-Alpes et de 86 % en Haute-savoie ! Pendant les congés d'été de cette année, les 5 principaux hôpitaux publics de ce département hautement touristique ont fermé 314 lits et une centaine de lits sont restés fermés après le 1er septembre. C'est dire la gravité de la situation et la nécessité de prévoir une enveloppe spécifique pour les cliniques privées, ainsi qu'une augmentation des capacités de formation dans ce département sinistré. La Haute-Savoie a besoin de crédits à hauteur de sa situation spécifique. La réponse de vos services à une question orale sur ces points, il y a quelques mois, ne m'avait pas rassuré. J'espère que vous répondrez mieux aujourd'hui aux inquiétudes des Savoyards.

M. Bernard Kouchner, ministre délégué à la santé - Si nos infirmières partent en Suisse, c'est qu'elles y sont mieux payées. Et si elles quittent le secteur privé, c'est pour la même raison ! Je ne suis pas mécontent que le secteur public soit redevenu attractif, même si je n'ai rien contre les cliniques privées.

Il faut former plus d'infirmières et nous le faisons, ce que vous n'avez pas fait. Il y avait 18 000 places dans les écoles en 1997, nous les avons augmentées chaque année et nous en sommes à 26 346 places. Début 2004, 28 000 infirmières devraient sortir des écoles.

C'est un effort considérable et sans précédent. Mais la formation prend trois ans et les effets ne sont pas immédiats. Nous avons également augmenté les capacités de formation pour les infirmières de bloc opératoire, pour les infirmières-anesthésistes, pour les infirmières puéricultrices, pour les sages-femmes et les kinésithérapeutes, pour les médecins.

Le quota d'étudiants admis à une formation d'infirmier dans la région Rhône-Alpes a été porté de 1 810 en 1999 à 2 590 en 2001, soit une augmentation de 43 % en deux ans. Pour le seul département de la Haute-Savoie, le quota est passé de 176 à 270, soit une progression de 54 % ! Et la DRASS réfléchit à une nouvelle augmentation des capacités d'accueil.

Par ailleurs les conditions de vie des étudiants ont été améliorées, avec plus de bourses et des indemnités de stage.

Je ne dis pas que c'est assez, mais c'est un effort considérable.

Mme la Présidente - Nous en avons terminé avec les questions. J'appelle maintenant les crédits inscrits à la ligne Emploi et solidarité : Santé et solidarité.

Les crédits de l'état B, titre III, mis aux voix, sont adoptés.

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TITRE IV

M. le Ministre délégué - L'amendement 141 du Gouvernement a pour objet de réduire les crédits de 15 245 000 euros. Cette minoration est destinée à financer l'effort en faveur du fonds d'aide à l'adaptation des établissements hospitaliers. Elle s'impute sur le chapitre 46-83, article 20. En effet, les dernières prévisions de dépenses pour 2001 sur le RMI laissent supposer une surestimation des crédits par rapport aux besoins en 2002.

M. Pierre Forgues, rapporteur spécial de la commission des finances pour la solidarité - Il est vrai que retirer quelque cent millions de francs à une masse de 29 milliards ,c'est peu : environ 0,74 %. Il y a un facteur qui plaide pour cette réduction : c'est la baisse du nombre d'allocataires du RMI pour 2000. Mais l'an 2002, ce n'est pas l'an 2000 : les conditions économiques ont changé. En outre, comme je l'ai dit ce matin, d'autres facteurs laissent prévoir des dépenses supplémentaires : par exemple le cumul emploi-RMI pendant deux trimestres, ainsi que l'alignement du RMI des DOM sur celui de la métropole, sans oublier l'augmentation de l'allocation elle-même, qui a progressé de 2,1 % en janvier. Nous avons donc trois facteurs d'accroissement de la dépense, contre un seul facteur de baisse, qui au demeurant me paraît fragile. C'est pourquoi je contesterai le terme de « surestimation » qu'a employé M. le ministre : je ne suis pas sûr qu'on ait surestimé la dépense pour 2002.

Cela dit, j'aurais mauvaise grâce à ne pas être d'accord avec cet amendement. Car, quand M. Mitterrand a présenté les crédits de la santé en commission des finances, nous avons tous remarqué la baisse très importante des autorisations de programme et des crédits de paiement du FIMHO. Or j'avais un dossier tout à fait complet sur l'hôpital de Lannemezan (Sourires ), pour lequel il ne manquait que trois millions et des poussières, mais on m'objectait qu'il n'y avait plus de sous... J'espère que sur ces cent millions il y aura quelques sous pour l'hôpital de Lannemezan. Cet amendement n'a pas été examiné par la commission, mais je suis sûr que, s'il l'avait été, elle l'aurait adopté.

M. Maxime Gremetz - Et moi je suis sûr qu'elle l'aurait refusé. Comme notre rapporteur lui-même l'a si bien expliqué, la situation a bien changé depuis l'an dernier, et tout donne à penser que les crédits prévus pour le RMI seront effectivement nécessaires. En outre, il y a quelque chose d'indigne à s'attaquer aux crédits du RMI pour récupérer 100 millions de francs, sur une masse totale de 11 milliards.

Je saisis cette occasion pour revenir sur certains chiffres. Je ne les invente pas : je les ai trouvés dans le « bleu », dans vos propres textes. Il y a 11 milliards qui sont apparus et ont disparu, et je ne comprends toujours pas. Récapitulons. Il y a 3,3 milliards pour l'hôpital public en 2001 et 2002 dans le cadre de l'évolution normale du budget. Il y a ensuite 3,9 milliards dont 600 millions qui proviennent d'un reliquat voté en 2001, et dont on va accélérer l'utilisation, 300 millions inscrits au projet de loi de financement de la sécurité sociale ; enfin 2 milliards sur la dotation globale, un pour le FMES et un pour le FIMHO. Chacun voit qu'au total cela ne fait pas 11 milliards. Il faut donc m'expliquer d'où l'on sort ce chiffre. Quant aux cliniques, elles reçoivent 3,1 milliards , dont 1,7 milliard de mesures nouvelles. Sur ce 1,7 milliard, 500 millions sont prévus pour les salaires. Mais il faut y ajouter les exonérations de charges patronales auxquelles les cliniques ont droit pour les 35 heures - alors que les hôpitaux n'y ont pas droit - ainsi que les primes incitatives pour les créations d'emplois dans le même cadre, et enfin la part salaires de la taxe professionnelle, dont elles sont exonérées - ce qui n'est pas vrai des hôpitaux. Voilà les chiffres que j'ai ; s'ils sont faux, qu'on me le démontre.

Nous voterons contre cet amendement.

M. Pierre Cardo - Si l'on fait le calcul à partir des éléments fournis par la commission, le nombre des allocataires diminuant de 0,75 %, mais l'allocation étant revalorisée de 2,5 %, il risque de manquer environ 3 % sur la masse. Je ne fais que reprendre les arguments du rapporteur. Il est assez dangereux de réduire ainsi une dépense dont on ne sait pas ce qu'elle sera. C'est de la cavalerie. Nous voterons contre.

L'amendement 141, mis aux voix, est adopté.

Les crédits du titre IV de l'état B, ainsi modifiés, mis aux voix, sont adoptés.

Les crédits du titre V de l'état C, mis aux voix, sont adoptés.

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TITRE VI

M. le Ministre délégué - Créé par la loi de finances pour 1998, le FIMHO a pour objet d'attribuer des subventions d'investissement aux établissements financés par dotation globale. Depuis sa création, il a contribué au financement de 277 opérations pour un montant de subventions de près de 304,898 millions d'euros, et constitué pour le Gouvernement un outil privilégié de contribution à la recomposition de l'offre de soins. Lors de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2002, le Gouvernement a annoncé des mesures exceptionnelles en faveur de la modernisation des hôpitaux. Aussi propose-t-il, par l'amendement 140, de majorer le montant des autorisations de programme du FIMHO pour 2002 en le portant de 45,734 à 198,183 millions d'euros, et d'inscrire 15,245 millions d'euros de crédits de paiement.

M. Gilbert Mitterrand, rapporteur spécial de la commission des finances pour la santé - La commission n'ayant pas examiné cet amendement, je ne peux me prononcer en son nom. Mais à la lumière de nos débats, des demandes formulées en commission comme en séance publique, et non seulement dans ce débat budgétaire mais dès la discussion de la loi de financement, je devine, je suppose que la commission aurait pu donner un avis favorable, et que même ceux qui ont voté contre l'amendement précédent pourraient peut-être se laisser tenter par celui-ci, puisqu'il s'agit d'attribuer des recettes au FIMHO. Quant aux 100 millions de francs de crédits de paiement qui nous sont proposés, ils ne sont pas à comparer à une masse de 11 milliards, mais... au rien du tout qui était initialement prévu. Ainsi pourra-t-on servir Lannemezan sur un plateau...(Sourires )

M. Maxime Gremetz - Par rapport à l'an dernier, cela fait moins 200 millions en autorisations de programme. Les 100 millions supplémentaires en crédits de paiement sont récupérés sur le RMI... Au total, il y a bien le milliard annoncé - nous y sommes pour quelques chose -, amoindri par la baisse de 40 % du FIMHO l'an dernier.

Nous nous abstiendrons sur cet amendement, car nous ne pouvons pas accepter qu'on prenne au RMI et à la sécurité sociale pour donner au FIMHO, au lieu de faire contribuer les revenus financiers.

L'amendement 140, mis aux voix, est adopté.

Les crédits inscrits au titre VI de l'état C, ainsi modifiés, mis aux voix, sont adoptés.

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APRÈS L'ART. 71

M. le Ministre délégué - L'amendement 139 vise à assujettir les médicaments bénéficiant d'une autorisation d'importation parallèle à des taxes analogues à celles actuellement applicables aux médicaments bénéficiant d'une AMM. Il prévoit que toute demande d'autorisation d'importation parallèle sera accompagnée du versement d'une taxe dont le barème sera fixé par décret dans la limite de 9 150 euros, et que les médicaments bénéficiant d'une telle autorisation, feront l'objet d'une taxe annuelle sur le chiffre d'affaires. Le produit de ces taxes ira à l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé.

M. Gilbert Mitterrand, rapporteur spécial pour la santé - La commission des finances n'a pas examiné cet amendement, qui mériterait réflexion même si j'en comprends la logique. Je m'en remets à la sagesse de l'Assemblée.

M. Jean-Pierre Foucher, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales pour la santé - Je comprenais les deux amendements précédents, annoncés dans le cadre du plan de modernisation des hôpitaux du 29 octobre. En revanche, je ne comprends pas très bien l'intérêt de celui-ci. S'agit-il d'une arme protectionniste ? Quel est le montant attendu de ces taxes ?

M. le Ministre délégué - L'intérêt est de financer une agence qui a besoin de financement... Et cela, en rétablissant l'égalité entre les opérateurs.

L'amendement 139, mis aux voix, est adopté.

Mme la Présidente - Nous avons terminé l'examen des crédits du ministère de l'emploi et de la solidarité, concernant la solidarité, la santé et l'économie solidaire.

La suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2002 est renvoyée à la prochaine séance, qui aura lieu ce mardi 13 novembre, à 15 heures.

La séance est levée à 2 heures 30.

                      Le Directeur du service
                      des comptes rendus analytiques,

                      Jacques BOUFFIER

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ORDRE DU JOUR

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DU MARDI 13 NOVEMBRE 2001

A QUINZE HEURES : 1ère SÉANCE PUBLIQUE

1. Questions au Gouvernement.

2. Fixation de l'ordre du jour.

3. Suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2002 (n° 3262)

      M. Didier MIGAUD, rapporteur général au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du plan.

      (Rapport n° 3320)

Equipement et transports ; budget annexe de l'aviation civile ; article 73

    · Mer :

      M. Guy LENGAGNE, rapporteur spécial au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du plan.

      (Annexe n° 26 du rapport n° 3320)

    · Transports aériens et météorologie :

      M. Gilbert GANTIER, rapporteur spécial au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du plan.

      (Annexe n° 28 du rapport n° 3320)

    · Transport aérien :

      M. François ASENSI, rapporteur pour avis au nom de la commission de la production et des échanges.

      (Tome XIII de l'avis n° 3325)

    · Transports terrestres :

      M. Augustin BONREPAUX, rapporteur spécial au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du plan.

      (Annexe n° 29 du rapport n° 3320)

    · Equipement, transports terrestres, maritimes et fluviaux :

      M. Jean-Jacques FILLEUL, rapporteur pour avis au nom de la commission de la production et des échanges.

      (Tome XIV de l'avis n° 3325)

A VINGT ET UNE HEURES : 2ème SÉANCE PUBLIQUE

Suite de l'ordre du jour de la première séance.

Le Compte rendu analytique
est disponible sur Internet
en moyenne trois heures après la fin de séance.

Préalablement,
est consultable une version incomplète,
actualisée au fur et à mesure du déroulement de la séance.

    www.assemblee-nationale.fr


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