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Session ordinaire de 2001-2002 - 26ème jour de séance, 62ème séance

1ère SÉANCE DU MERCREDI 14 NOVEMBRE 2001

PRÉSIDENCE de Mme Nicole CATALA

vice-présidente

Sommaire

      LOI DE FINANCES POUR 2002 -deuxième partie- (suite) 2

      AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE 2

La séance est ouverte à neuf heures quinze.

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LOI DE FINANCES POUR 2002 -deuxième partie- (suite)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2002.

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AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE

Mme la Présidente - Nous abordons l'examen des crédits du ministère de l'aménagement du territoire et de l'environnement consacrés à l'aménagement du territoire.

M. Yves Cochet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement - J'ai le plaisir de vous présenter aujourd'hui le budget de l'aménagement du territoire, qui fait partie pour la quatrième année consécutive, des priorités du Gouvernement.

Avec 285,38 millions d'euros en dépenses ordinaires et crédits de paiement, ce budget se trouve en hausse de 6,8 %.

Les crédits du FNADT sont de 210,30 millions d'euros, contre 202 en 2001, mais ils sont en fait stables compte tenu du transfert de 7 millions pour la création de l'Agence française pour les investissements internationaux.

Les crédits du titre IV diminuent du fait du démarrage tardif des contrats de plan en 2000, mais les reports ainsi générés permettront d'honorer les contrats en cours. Les crédits du titre VI, eux, augmentent, du fait d'un ajustement mécanique.

S'agissant du soutien aux entreprises, la prime d'aménagement du territoire a été profondément modifiée. Elle est un outil majeur pour la création d'emplois durables et le développement des activités économiques sur les zones prioritaires du territoire. Ses modalités d'attribution ont été fixées par un décret du 11 avril 2001. Depuis le 6 juin, le Gouvernement dispose de la base juridique nécessaire pour accorder la prime. La réforme de la PAT a abaissé les seuils d'éligibilité de 3 à 2,28 millions d'euros d'investissement et de 20 à 15 emplois. Elle a aussi étendu son bénéfice à des services jusqu'à présent internalisés des entreprises, comme les centres d'appel, la logistique ou l'informatique. Ainsi la PAT pourra accompagner la tertiarisation de l'économie et sera un instrument plus efficace de développement local. Les crédits qui lui sont affectés ont été portés à 66,32 millions en autorisations de programme et à 60,98 millions en crédits de paiement contre 45,73 en 2001.

Le budget de fonctionnement de la DATAR s'élèvera à 14,10 millions d'euros, soit une augmentation, à structure comparable, de 13,4 % par rapport à 2001. Il prévoit la création de 7 emplois affectés aux commissariats de massifs, pour mettre en _uvre la politique de modernisation et de développement économique des zones rurales de montagne. La DATAR se dotera également d'un nouveau système d'information.

Les crédits ne représentent toutefois que la partie émergée de l'iceberg. La politique d'aménagement du territoire s'exerce en effet également par le biais d'autres ministères ainsi que des contrats de plan Etat-régions.

Le fonds de péréquation des transports aériens favorise le développement des liaisons aériennes d'aménagement du territoire. Il prend également en charge certains équipements, en matière de sécurité notamment, qui s'avéraient auparavant particulièrement lourds pour les petits aéroports. Ses crédits augmentent de 40 % entre 2001 et 2002.

Le fonds national de développement des entreprises, lui, poursuit des actions de soutien aux plates-formes d'initiative locale ou aux sociétés de capital-risque régionales.

Différents ministères concourent à hauteur de 8,2 milliards d'euros au total à la politique d'aménagement du territoire. La moitié de ces crédits sont consacrés au secteur des transports, notamment pour financer des infrastructures du transport ferré et du réseau routier national.

Le ministère de l'agriculture finance des actions spécifiques aux zones défavorisées, notamment des indemnités de compensation aux handicaps naturels, et contribue à l'entretien de l'espace rural et forestier. Sa contribution peut être estimée à 1,4 milliard d'euros.

Le ministère de l'industrie, quant à lui, finance des actions en faveur des petites et moyennes entreprises : soutien à la diffusion des technologies, aide à l'investissement immatériel, aide aux investissements de modernisation et encouragement des actions collectives. Il y consacre 546 millions d'euros.

Enfin, l'enseignement supérieur concourt à l'aménagement du territoire, notamment en attribuant des subventions d'équipement, à hauteur de 445 millions d'euros.

Participent également de cette politique les exonérations de charges sociales et fiscales qui incitent les investisseurs à s'implanter dans les zones en difficulté. Les exonérations de taxe professionnelle ou d'impôt sur les sociétés, l'exonération de charges patronales pour l'embauche des premiers salariés, l'amortissement exceptionnel, l'exonération de taxe foncière, la majoration du crédit d'impôt-recherche, la réduction de la taxe départementale de publicité foncière et l'exonération des droits de mutation sur les commerces sont autant de dispositifs, qui s'appliquent suivant des zonages géographiques et sous certaines conditions. Ces mesures se monteront à 336 millions d'euros en 2002.

Nous bénéficions également de crédits européens. Les fonds structurels au titre de l'objectif 1, permettront d'allouer entre 2000 et 2006 3,25 milliards d'euros aux régions en retard de développement, auxquels s'ajoutent 572 millions d'euros pour des mesures de soutien transitoire pour les régions en reconversion industrielle. 4,5 milliards seront affectés aux actions en faveur de l'emploi local ; 225 millions à des actions spécifiques en faveur de la pêche ; 698 millions à la coopération transfrontalière, transnationale et inter-régionale ;102 millions au soutien des zones urbaines ; 268 millions au développement rural. Cela représente au total plus de 15 milliards d'euros auxquels il faudrait ajouter une bonne partie des crédits communautaires destinés au soutien de l'agriculture. En effet, les fonds européens représenteront en 2002 3,35 milliards d'euros.

L'effort financier national en faveur de l'aménagement du territoire s'élèvera donc en 2002 à près de 12 milliards d'euros, en progression de 3,5 % par rapport à 2001.

L'enveloppe globale des contrats de plan, lesquels concourent aussi à la politique d'aménagement du territoire, s'élève à plus de 35 milliards d'euros sur la période 2000-2006. Le volet territorial représente près du quart de ce total. Enfin, les avenants à ces contrats adoptés pour faire face aux conséquences des intempéries et de la marée noire s'élèvent à 1,05 milliard d'euros, dont 579 millions à la charge de l'Etat.

Le CIADT qui s'est tenu à Limoges le 9 juillet dernier a défini trois priorités : assurer un meilleur équilibre territorial ; favoriser le développement durable du territoire ; mieux gérer les espaces sensibles. Les schémas de services collectifs seront le nouvel outil de cette planification territoriale rénovée et assise sur le long terme que le Gouvernement entend mettre en _uvre. Les décrets, en cours d'examen par le Conseil d'Etat, seront publiés avant la fin de l'année.

Ces schémas de services collectifs, qui visent à la satisfaction des besoins actuels au plus près de la population mais aussi des besoins futurs et des attentes de nos concitoyens, toucheront de multiples domaines. Les transports, où l'objectif sera de faciliter la mobilité tout en respectant le développement durable ; l'enseignement supérieur et la recherche où il conviendra de mieux anticiper l'évolution de la population étudiante et, partant, des besoins de formation ; le domaine sanitaire où il faudra assurer une meilleure répartition de l'offre de soins sur l'ensemble du territoire et développer la prévention ; le domaine culturel où l'objectif sera de favoriser le maintien de la diversité -pour être originaire de Bretagne, je sais combien l'action culturelle, au-delà de son champ propre, a d'effet sur le développement général d'un territoire ; le domaine énergétique où il conviendra de développer l'approche territoriale ; le domaine de l'information et de la communication ; le domaine sportif où l'objectif sera de permettre l'accès du sport à tous en tous lieux du territoire ; enfin, les espaces naturels qu'il conviendra de préserver et de développer.

Je reviens un instant sur les mesures en faveur de la communication et de l'information. Il n'est pas normal que l'ensemble du territoire national ne soit pas couvert de la même façon par les réseaux de téléphonie mobile.

M. François Sauvadet - Ah, enfin !

M. le Ministre - C'est pourquoi le Gouvernement a adopté un programme d'action en faveur de la société de l'information. Le CIADT de Limoges a ainsi mandaté la Caisse des dépôts et consignations pour créer un fonds consacré à la diffusion des réseaux à haut débit sur tout le territoire et à leur développement. La création de quatre cents espaces numériques de proximité a par ailleurs été décidée en plus de celle des 2 500 prévus en 2000. A cela s'ajoute le programme Campus numérique, les écoles de l'Internet à Marseille, Bourges, Roubaix-Tourcoing, Gardanne, le développement de la Web-TV pour les sourds et malentendants, la création de portails culturels territoriaux... D'ici à trois ans, l'intégralité du territoire sera couverte par un réseau de téléphonie mobile. Actuellement, seuls 92 % le sont, ce qui signifie que 46 000 km² ne le sont pas, ce qui n'est pas acceptable. Le Gouvernement a pour cela mis en place un dispositif de soutien à l'investissement des collectivités locales et des opérateurs afin qu'ils construisent et équipent des stations de base. L'objectif est de couvrir l'ensemble des lieux habités mais aussi tous les grands axes de transport. L'opération coûtera 213 millions d'euros et sera cofinancée par l'Etat, les collectivités et les opérateurs. Quinze millions d'euros sont déjà inscrits au FNADT à ce titre en 2002. Le libre accès de tous à l'information et à la communication, dans leurs formes les plus modernes, est en effet un élément essentiel de l'égalité et de nos principes démocratiques mêmes.

L'aménagement du territoire passe aussi par une implantation volontariste des emplois publics, déjà relancée à deux reprises, en 1991 et en 2000. Le CIADT du 9 juillet dernier a décidé la création ou le transfert de 4850 emplois dans les zones prioritaires en région. Citons l'Agence technique de l'information sur l'hospitalisation et l'Agence nationale de lutte contre l'illettrisme à Lyon, l'Observatoire français des drogues et des toxicomanies à Saint-Denis, l'Agence française de sécurité sanitaire environnementale à Saint-Maurice, le Centre des archives diplomatiques à la Courneuve, les quatre écoles de police d'Oissel, Nîmes-Courbessac, Montbéliard, Périgueux...

Parallèlement à ces implantations d'emplois, il convient bien sûr de tout faire pour maintenir des services publics en milieu rural. La création de maisons de services publics, la promotion de services publics polyvalents sont autant d'expériences intéressantes qu'il conviendra de mieux coordonner. C'est pourquoi nous avons créé un comité de suivi des maisons de services publics et lancé des appels à projets auprès des préfets de région pour la création de nouvelles maisons.

L'aménagement du territoire consiste aussi à anticiper les mutations économiques. Plus d'un million d'euros seront consacrés à des études permettant d'apprécier les enjeux régionaux et les besoins locaux en matière de technologies dites clé parce qu'elles représentent les outils de développement jugés les plus pertinents pour un territoire. Quatre expériences pilotes seront menées en Aquitaine, Franche-Comté, Lorraine et Haute-Normandie. 0,76 million d'euros en provenance du FNADT seront consacrés à la mise en place de plates-formes technologiques. Six millions d'euros, prélevés sur les crédits du ministère de l'industrie, du ministère de l'emploi, de la DATAR et du fonds social européen, serviront à financer des actions de coopération interentreprises dans le domaine de la formation. Dans le même esprit, le FNADT affectera trois millions d'euros en 2002 au programme Alizé, lequel tend à mieux mobiliser les capacités humaines et financières de tous les partenaires sur un territoire. Trente-sept millions d'euros, prélevés sur les crédits du secrétariat d'Etat au tourisme et du FNADT, seront affectés aux zones rurales et de moyenne montagne sur la période 2001-2006 pour y consolider les équipements du tourisme social.

L'aménagement du territoire consiste aussi à mieux accompagner les restructurations. La mise en place de dispositifs de veille sur le plan national et sur le plan régional et la mobilisation d'experts y concourront. Des moyens supplémentaires seront mis à la disposition des préfets à cet effet.

Ce qui s'est passé avec Moulinex est significatif. Le premier souci du Gouvernement a été que chaque salarié de l'entreprise se voie proposer une solution. Mon ministère participe à des travaux interministériels engagés, sous l'égide du cabinet du Premier ministre, pour élaborer un programme de revitalisation économique de la région, lequel pourrait s'étaler sur trois ans et atténuerait les incidences sociales et économiques de la fermeture de Moulinex. L'objectif est de créer, à terme, dans chaque bassin d'activité, autant d'emplois que ceux qui ont été supprimés chez Moulinex. Une aide spécifique sera apportée aux sous-traitants. Le FNADT financera pour une large part ces mesures.

L'aménagement du territoire, c'est aussi mieux gérer les espaces sensibles en permettant à l'agriculture de jouer tout son rôle économique et social - c'est l'objectif de l'agriculture polyvalente, dont je doute que le concept soit accepté à Doha -, mais aussi en préservant les ressources naturelles, en protégeant l'agriculture périurbaine, en réorientant la politique du littoral, qui pourra être mise en _uvre au moyen des contrats de pays. La loi d'orientation et d'aménagement du territoire de 1999 permet en effet aux pays de s'inscrire dans les contrats de plan. Le volet territorial des contrats de plan Etat-régions doit donc jouer un rôle majeur.

Le FNADT soutiendra ces politiques territoriales, qu'il s'agisse des pays, des agglomérations ou des villes. Ainsi, 655 millions d'euros seront réservés aux démarches territoriales de pays et d'agglomérations ainsi qu'aux parcs naturels régionaux, qui ont été en quelque sorte la préfiguration des pays.

Mme Sylvia Bassot - Non.

M. le Ministre - Ils ont été utiles.

Intervenant de manière subsidiaire par rapport aux ministères sectoriels, le FNADT soutiendra en priorité l'ingénierie de projet, sous la forme d'études de préfiguration, de conventions d'objectif, de soutiens aux structures d'ingénierie et d'animation prévus dans les contrats et d'appui aux réseaux techniques qui se mettront en place dans chaque région.

L'aménagement du territoire occupe une place considérable dans l'action du Gouvernement.

Je suis maintenant à votre disposition pour répondre à vos questions (Applaudissements sur les bancs du groupe RCV, du groupe socialiste et du groupe communiste).

M. Alain Rodet, rapporteur spécial de la commission des finances - Les crédits du ministère ne représentent qu'une faible partie des enveloppes destinées à l'aménagement du territoire. D'autres départements ministériels contribuent au financement de cette politique, que ce soit au travers de fonds spécifiques, par des exonérations fiscales ou par des crédits en provenance des fonds structurels européens. Il faut encore mentionner le moyens financiers de la contractualisation, notamment ceux des contrats de plan Etat-régions, qui intègrent les financements des collectivités locales.

Pour l'année 2002, l'ensemble de ces concours s'établira à 77,4 milliards de francs, dont seulement 1,87 milliard sont inscrits au budget du ministère. Modeste, cette somme n'en joue pas moins un rôle d'entraînement. Elle est comme le levain dans la pâte.

La somme des dépenses ordinaires et des crédits de paiement pour les dépenses en capital dans le budget de l'aménagement du territoire représente 1,872 milliard de francs, soit une augmentation de 6,8 % par rapport à l'an dernier.

Les crédits de paiement de la DATAR s'élèvent à 92,49 millions de francs ; leur baisse est sensible, de l'ordre de 25 %, mais elle est directement liée à la création de l'Agence française pour les investissements internationaux, que nous avions annoncée en présentant le budget pour 2001 et dont la création était vivement souhaitée. Cet organisme, qui procède d'un regroupement des moyens d'intervention à l'étranger de la DATAR et du ministère des finances, a pour mission d'accroître le volume des investissements internationaux en France. Ainsi, les crédits du réseau de la DATAR à l'étranger passent du titre III au titre IV, où ils sont transformés en subvention. La diminution des crédits de la DATAR tient à ce seul jeu d'écriture. Par ailleurs, le projet de budget de la DATAR prévoit 123 emplois budgétaires contre 144 l'an dernier. L'effectif des titulaires passe de 61 à 68 postes : sept postes sont créés pour les commissariats de massifs. Le nombre de contractuels est maintenu à 55 et les 28 emplois dans les bureaux de la DATAR à l'étranger disparaissent. Seule est conservée une représentation de la DATAR à Bruxelles.

S'agissant de la prime d'aménagement du territoire, les autorisations de programme passent de 60,98 millions d'euros en 2001 à 66,32 millions d'euros en 2002. Cette hausse de 8,7 % s'accompagne d'une forte augmentation des crédits de paiement, de l'ordre de 33 %. Pour 2002, l'augmentation des autorisations de programme traduit la volonté de l'Etat de soutenir le développement des entreprises et permet de financer les décisions prises en 2001 au titre de la nouvelle PAT. Je rappelle qu'en 2000, faute de bases juridiques approuvées par l'Union européenne, le Gouvernement ne pouvait statuer sur les dossiers de prime dans les délais voulus. Le décret du 13 avril 2001 réformant la prime et les arrêtés complémentaires permettent désormais de consommer les crédits à un rythme beaucoup plus satisfaisant. Il faut se féliciter de cette évolution, car les années précédentes, nous nous étions vivement inquiétés des retards constatés dans l'exécution de ces programmes.

Ces subventions de fonctionnement versées au fonds national d'aménagement du territoire marquent le pas. Ces dotations avaient fortement progressé en 2000 et en 2001 : 54 % d'augmentation en 2000 et 19,23 % en 2001. Pour 2002, elles baissent de 8,23 %, car l'effort porte maintenant sur les crédits d'investissement.

S'agissant des subventions d'investissement, le taux de consommation des crédits disponibles s'améliore et s'établit aux alentours de 80 %. En 2002, il était à peine de 70 %. Les autorisations de programme s'établissent à 1,331 milliard de francs et les crédits de paiement à 874 millions de francs, soit une progression de 12,3 % par rapport à l'an dernier. Il est procédé cette année à un sérieux toilettage dans la présentation du budget avec la suppression des autorisations de programme dormantes et l'augmentation des crédits destinés aux contrats de plan, dont le montant va doubler.

Le fonds d'investissement des transports terrestres et des voies navigables et le fonds de gestion de l'espace rural sont maintenant intégrés dans les crédits des ministères compétents, l'équipement d'une part et l'agriculture d'autre part. Le fonds de gestion des espaces naturels est inscrit au budget du ministère de l'environnement. Il reste à examiner le fonds d'intervention pour les aéroports et les transports aériens, compte spécial du Trésor, doté pour 2002 de 422,96 millions de francs en crédits de paiement. Les sommes inscrites sont largement suffisantes pour subventionner les entreprises de transport aérien du titre de l'aménagement du territoire. L'an dernier, aucun crédit n'avait été inscrit, compte tenu de l'importance des reports.

Le Fonds national pour le développement des entreprises, quant à lui, dispose de ressources variées provenant de la Caisse des dépôts, du ministère de l'industrie et du recours à l'emprunt. Il est doté de 200 millions de francs, ce qui devrait lui permettre d'instruire tous les dossiers.

Les fonds européens représenteront 21,807 milliards de francs pour la France en 2002, c'est-à-dire une somme analogue à celle de l'année précédente. Il s'agit essentiellement des fonds européens de développement régional, du fonds social européen, du fonds européen d'orientation et de développement agricole et des instruments financiers de la section pêche.

La consommation de ces crédits suit maintenant un rythme plus conforme aux souhaits maintes fois émis par la commission des finances. Celle-ci, en examinant ce budget, a entendu plusieurs observations, dont une a été adoptée à l'unanimité. En effet, les commissaires ont estimé que la DATAR, qui est sans doute dans son rôle en accomplissant des travaux de prospective territoriale, devait faire plus d'efforts en faveur des bassins d'emploi touchés par de brutales restructurations liées à des opérations de fusion-absorption ou à d'autres opérations découlant de la financiarisation croissante de l'économie internationale. La DATAR pourrait ainsi coordonner les interventions publiques. Par ailleurs, un certain nombre de membres de la commission se sont montrés, cette année encore, réservés sur les crédits affectés à l'Institut des hautes études de l'aménagement du territoire. La cause est estimable, mais il est plus urgent de donner des moyens d'action aux commissariats à l'industrialisation.

Je vous propose d'adopter les crédits inscrits au projet de budget pour 2002 et de voter l'observation suivante : « La commission des finances considère indispensable la mise en place d'un plan d'action adapté au traitement des restructurations du tissu industriel national. Au sein de celui-ci, la DATAR doit pouvoir assurer l'indispensable coordination des différents services ministériels intéressés, en liaison avec les acteurs locaux » (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe RCV).

M. Félix Leyzour, rapporteur pour avis de la commission de la production - L'année 2001 met un terme à la période de transition ouverte le 25 juin 1999 par la loi Voynet, qui modifiait profondément la loi Pasqua du 4 février 1995. En effet, les schémas de services collectifs qui remplacent le schéma national prévu dans la loi de 1995 ont été définitivement arrêtés le 9 juillet, et tous les décrets d'application de cette loi auront été publiés avant la fin de l'année. Cet effort donnera enfin une assise juridique solide à la politique d'aménagement du territoire.

Le Gouvernement n'a pas renoncé à l'approche volontariste, qui donne son sens à une institution comme la DATAR. Les nouveaux schémas de services collectifs, en définissant une stratégie d'aménagement sur vingt ans, visent à garantir la cohérence de cette politique dans la durée. D'une certaine manière, toutes les politiques publiques contribuent à l'aménagement du territoire.

Les crédits de la DATAR augmentent, atteignant 270 millions d'euros, soit 1,77 milliard de francs. Les autorisations de programme progressent de 2 %. Après une baisse de 10 % l'an dernier, les crédits de paiement augmentent de près de 7 %, et même de 18,2 % pour les subventions d'investissement accordées par l'Etat.

Avec un taux d'engagement de 24 % en moyenne pour les crédits des contrats de plan Etat-régions 2000-2006, l'Etat rattrape l'essentiel de son retard, sauf pour les transports ferroviaires, où ce taux n'est que de 15 %. Ces retards s'expliquent par le fait que les études engagées n'ont pas été à la hauteur des ambitions et par les résistances, nationales et européennes, à ce que les objectifs se traduisent effectivement en actes. Ces contrats de plan mettent en jeu des financements considérables : 43,38 milliards d'euros au total, dont 17,5 milliards d'euros pour l'Etat.

En outre, les territoires les plus fragiles percevront 14,8 milliards d'euros grâce aux programmes régionaux européens. Le Gouvernement a par ailleurs obtenu que la réduction d'un quart du nombre des communes éligibles s'accompagne de soutiens transitoires pour les zones qui perdent l'éligibilité.

La rénovation, par une circulaire du 9 novembre 2000, des conditions de gestion du fonds national d'aménagement et de développement du territoire institué par la loi du 4 février 1995 et doté cette année de 210,3 millions d'euros, devrait réduire les risques de saupoudrage des crédits.

Je veux aussi souligner l'augmentation de presque 9 %, à 66,3 millions d'euros, des fonds par le biais de la prime à l'aménagement du territoire. La PAT a aidé l'an dernier à créer 22 500 emplois dans les zones prioritaires. Le décret du 21 avril 2001 vient d'en élargir le versement à de plus petites entreprises, tout en mettant les zonages en conformité avec les exigences de la Commission européenne.

En revanche, les contrats de pays et d'agglomération peinent à se mettre en place. La très grande lenteur constatée vient probablement d'une complexité excessive.

Mme Sylvia Bassot et M. François Sauvadet - C'est vrai !

M. le Rapporteur pour avis - Pourtant 37,85 millions d'euros ont été consacrés l'an dernier à l'émergence de ces nouveaux territoires. En outre, des disparités géographiques très importantes, essentiellement entre le Nord et le Sud de la France, apparaissent dans les périmètres d'étude des pays. Il serait intéressant d'avoir des explications à ce propos.

A cette exception près, la politique d'aménagement du territoire reste cohérente et se trouve renforcée dans ses moyens grâce à des crédits globalement plus importants et mieux gérés.

M. François Sauvadet - C'est excessif !

M. le Rapporteur pour avis - En conséquence, comme votre rapporteur l'y avait invité, la commission de la production a rendu un avis favorable à l'adoption de ces crédits.

Je terminerai par quelques observations en forme d'interpellations.

Les services publics sont une condition non suffisante mais nécessaire d'un développement équilibré du territoire. Or, en dépit des engagements de maintenir des services de qualité sur l'ensemble du territoire, on constate une vraie tendance à la concentration,...

Mme Sylvia Bassot - C'est vrai !

M. le Rapporteur pour avis - ...qui laisse de côté de vastes zones où se trouvent un grand nombre de communes petites et moyennes.

M. François Sauvadet - C'est vrai ! Voilà un bon rapporteur !

M. le Rapporteur pour avis - Pourtant, les nouvelles technologies devraient permettre de ne pas les délaisser.

Mais il apparaît aussi que ces zones sont laissées à l'écart des autoroutes de l'information comme elles l'avaient été pour les infrastructures routières et ferroviaires. Il est vrai que l'accès à ces technologies est coûteux et que les opérateurs ne voient pas là une rentabilité suffisante. Or, cela accroît les disparités et renforce la centralisation, alors qu'Internet est censé être un instrument égalitaire d'ouverture sur le vie économique, sociale et culturelle. Il est donc nécessaire de dégager d'urgence les crédits pour une couverture totale du pays, à commencer par les réseaux de téléphonie mobile.

Par ailleurs, l'aménagement du territoire doit être vu à travers l'ensemble des politiques de l'Etat, y compris le budget de l'industrie. Le secrétaire d'Etat à l'industrie a dit que l'accompagnement des restructurations industrielles était une priorité du Gouvernement. L'actualité appelle, en effet, une meilleure coordination de l'action de ses services et de celle de la DATAR. L'attente est grande !

Enfin, l'agriculture joue un rôle essentiel dans l'aménagement du territoire et, de ce point de vue, la situation de l'élevage bovin est préoccupante,...

M. François Sauvadet - Très bien !

M. le Rapporteur pour avis - ...d'autant que dans certaines zones, les troupeaux allaitants occupent entièrement l'espace.

Mme Sylvia Bassot - Tout à fait !

M. le Rapporteur pour avis - Je rappelle que la commission a donné un avis favorable à l'adoption de ces crédits (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste, du groupe socialiste, du groupe RCV, du groupe DL et du groupe UDF).

Mme Marie-Françoise Perol-Dumont - Je veux insister sur ces temps fort des choix gouvernementaux que constituent les CIADT, car l'approche transversale de la politique d'aménagement du territoire, le nombre des ministères impliqués prouvent que l'engagement de l'Etat en ce domaine ne peut se résumer au strict budget dont nous débattons

Ainsi le sixième CIADT, qui s'est tenu le 9 juillet dernier à Limoges, a défini un certain nombre de priorités fortes. Outre la validation des schémas de services collectifs, qui serviront de cadre de référence majeur pour les grandes politiques publiques territoriales, ce comité a adopté des mesures relatives au soutien aux services publics de proximité innovants, à l'aide au tourisme social et associatif dans les zones à faible attractivité, à l'aide aux régions touchées par les conversions économiques, à l'accompagnement de l'entrée des territoires dans la société de l'information.

Ces deux derniers points ont particulièrement retenu mon attention. En ce qui concerne les mesures d'aides aux régions touchées par les conversions économiques, je souhaite que les services de la DATAR puissent s'impliquer très concrètement dans les stratégies d'anticipation, mais aussi d'accompagnement et de soutien aux bassins sinistrés.

Le Gouvernement a affiché clairement la volonté d'accélérer la lutte contre la fracture numérique. La couverture très inégale de notre territoire en téléphonie mobile est un facteur fortement discriminant et la logique purement concurrentielle dans laquelle s'inscrivent les opérateurs, ne laisse guère présager d'évolution positive. Aussi le dispositif de soutien public à l'investissement des collectivités locales et des opérateurs ouvre-t-il des perspectives plus optimistes puisqu'une couverture totale est envisagée d'ici à trois ans.

Parallèlement, l'objectif d'un accès généralisé aux réseaux de haut débit à l'horizon 2005 et la volonté de démocratiser l'usage des nouvelles techniques d'information devraient contribuer de façon significative à réduire les inégalités d'accès qu'elles soient sociales, générationnelles ou géographiques.

Dans ce cadre, le Massif central a été reconnu comme zone prioritaire et je ne peux que m'en réjouir et saluer les engagements budgétaires forts consentis par l'Etat.

Pour autant, ce désenclavement numérique bienvenu ne peut nous faire oublier les besoins persistants et urgents, pour certaines régions, d'un désenclavement routier, ferroviaire et même aérien, plus classique, mais d'autant plus urgent que l'élargissement de l'Europe vers l'Est se précise. J'ai bien conscience de me montrer exigeante, mais les besoins sont forts ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe RCV)

M. Yves Deniaud - Le ministre a changé, mais la politique d'aménagement du territoire du Gouvernement ne varie ni dans sa conception, ni dans son volume financier. Surtout, elle reste marquée par le peu d'intérêt qu'elle suscite par rapport à toutes les autres.

Certes, on me répondra que les crédits augmentent cette année de 6,8 %. L'argument serait admissible si nous n'avions pas connu une baisse de 9 % en 2000 et une de 10 % en 2001 ! Ainsi, ce budget stagne désespérément aux alentours d'un millième du budget de l'État, ce qui montre bien la considération que l'on porte à ces actions, à un moment où l'on accorde autant, voire plus à toute catégorie protestataire un peu virulente...

Les taux d'exécution des dépenses augmentent. C'est la moindre des choses à partir de crédits en diminution ! Mais nous assistons bien, depuis cinq ans, à une stagnation des crédits à leur plus bas niveau. Dans ces conditions on peut, comme notre rapporteur spécial, s'interroger sur l'opportunité de distraire de ces maigres ressources le financement d'un Institut des hautes études du développement et de l'aménagement du territoire. Et, sur tous les bancs, des voix se sont élevées pour réclamer moins de prospective territoriale et plus de soutien aux investissements de terrain.

J'ajouterai que notre administration n'a fait aucun progrès en rapidité, souplesse ou en imagination pour aider ou même susciter des projets locaux, au lieu d'imposer à leurs auteurs un parcours du combattant souvent dissuasif, qu'il s'agisse des crédits nationaux ou des crédits européens.

Les autres pays, eux, s'ingénient à dépenser tout ce à quoi ils ont droit : nous sommes les seuls à pratiquer une gestion tatillonne et avaricieuse. Or c'est la dernière période où nous pouvons bénéficier de ces crédits car l'élargissement de l'Europe nous contraindra, sans doute, après 2006, à vivre sans fonds structurels. Je trouve très regrettable que le Gouvernement ne sache pas insuffler à son administration de nouveaux comportements. Les crédits européens sont considérables. Leur manque sera cruel. Si une chance existait de conserver, après 2006, au moins un soutien transitoire, ce ne serait qu'au prix d'une utilisation impeccable de l'aide accordée. Qu'on ne se soit pas préoccupé de cette question révèle le peu d'intérêt porté à l'aménagement du territoire. Des dizaines de projets intéressants auraient pourtant pu ainsi aboutir.

M. le Rapporteur spécial - En 1996, ce n'était pas brillant non plus !

M. Yves Deniaud - J'ai dit la même chose au gouvernement précédent !

Ce dernier budget de la législature est l'occasion de faire le bilan de l'action menée. Les instruments financiers créés par la loi Pasqua disparaissent, dilués dans le budget général, marqué lui-même par l'effondrement des dépenses d'investissement. Une tendance se fait jour insidieusement pour mettre fin aux zonages de cette même loi.

Normalement de nouveaux contrats devraient voir le jour, les contrats de pays et contrats d'agglomération. Des crédits sont affectés pour leur préparation mais, si j'ai bien compris, le contenu de ces contrats ne consistera que dans l'utilisation de crédits habituels de l'Etat présentés dans un habillage spécifique, alors que les collectivités locales y consacreront, elles, de moyens supplémentaires. J'aimerais des précisions à ce sujet.

La grande _uvre revendiquée pour cette législature, ce sont les schémas de services collectifs, censés remplacer le schéma national d'aménagement du territoire prévu par la loi Pasqua, mais le décret qui les fixe n'est pas encore sorti ; ils auront donc pratiquement deux ans de retard sur les contrats de plan Etat-régions, dont ils devaient pourtant tracer le cadre général. L'_uf aura précédé la poule !

Malgré cette longue gestation, on y trouve beaucoup d'analyses et peu d'engagements. Il y manque, comme l'a noté le rapporteur spécial, des objectifs précis et quantifiés, et du coup la programmation financière est quasiment absente.

Si les résultats des élections étaient ce que nous souhaitons, une révision immédiate s'imposerait et une nouvelle programmation devrait immédiatement être mise en _uvre pour orienter la révision à mi-parcours des contrats de plan Etat-régions, prévue pour 2003, ainsi que celle des contrats de pays et d'agglomération.

Pour en finir avec ce très médiocre bilan, comment les 285,37 millions d'euros de ce budget pourront-ils répondre aux besoins des secteurs touchés par des catastrophes ou des désastres industriels. Aux besoins de la Somme, pas encore sortie d'affaires, de Toulouse, de la Basse-Normandie, qui perd Moulinex ?

Faute de réponse crédible à cette interrogation et parce que votre budget, certes moins désastreux que le précédent, stagne à un niveau bien faible, le groupe RPR votera contre (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL).

Mme Janine Jambu - Ce projet se caractérise par une évolution positive des crédits.

Les autorisations de programme, avec 1 766 millions de francs progressent de 1,8 %, mais surtout les crédits de paiement enregistrent une hausse de 6,8 % s'établissant à 1 872 millions de francs. Le fait mérite d'être souligné, car l'an dernier les CP étaient en baisse, en décalage avec des AP en hausse. Cette année la cohérence est rétablie avec la mise en place des crédits d'investissement de l'Etat dans le cadre des contrats de plan couvrant la période 2000-2006.

La progression des crédits gérés par la DATAR masque cependant une réalité plus contrastée.

Si les subventions d'investissement accordées par l'Etat progressent de 1,8 % en AP et de 18,2 % en CP, les crédits consacrés aux interventions publiques diminuent de 8,2 % et les sommes allouées aux moyens des services de 25,1 %. Mais cette réduction s'explique par le transfert de nombreux agents contractuels de la DATAR à la nouvelle Agence française pour les investissements internationaux (AFII).

Dans le budget de la DATAR, on note une forte progression des crédits de la prime d'aménagement du territoire - 8,8 % pour les AP et 33 % pour les CP. C'est un rattrapage après la forte baisse de l'an dernier.

Toujours dans le cadre du budget de la DATAR, on constate une évolution satisfaisante des dotations du FNADT, qui finance des actions très diverses, comme la délocalisation d'entreprises, l'aménagement rural, le développement de la montagne ou la restructuration des zones minières. Les secteurs les plus aidés en 2000 ont été les infrastructures d'équipement, suivies du tourisme, puis de l'industrie. 53,7 % des crédits de la section générale du FNADT ont été consacrés au développement économique et à l'emploi, 7,1 % à l'aménagement de l'espace, 18,4 % au développement rural, littoral et des massifs, 20,8 % à l'éducation, la recherche ou la culture.

Il serait intéressant d'évaluer le nombre d'emplois ainsi créés.

En 2002 la part des crédits de ce fonds consacrés à la mise en _uvre des contrats de plan Etat-régions augmente, ce qui devrait accélérer leur rythme de réalisation.

En revanche les crédits d'investissement non contractualisés diminuent de 44 %, ce qui est plutôt inquiétant quand on sait qu'ils sont généralement consacrés aux services publics et à l'intercommunalité.

La création, en septembre 2001, d'un comité national pour l'année internationale des montagnes témoigne de l'intérêt porté à la promotion des massifs montagneux, qui bénéficient à la fois de crédits non contractualisés et de crédits contractualisés.

Les autres crédits consacrés à l'aménagement du territoire devraient faire l'objet d'un suivi précis. L'AFII, qui a pour objectif de faciliter les investissements étrangers en France en choisissant les localisations les plus favorables à l'emploi, disposera en 2002 d'un budget d'environ 100 millions de francs.

Je ne m'attarderai pas sur les instruments financiers issus de la loi du 4 février 1995, le FITTVN, le FIATA, le FGER et le FNDE. J'aimerais cependant savoir combien de lignes aériennes soutient actuellement le FIATA. J'observe en effet que, malgré cette intervention, de nombreuses liaisons entre des villes moyennes et Paris disparaissent ou connaissent des difficultés croissantes.

Les fonds structurels européens ont été profondément réformés au sommet de Berlin de mars 1999. L'évaluation de la programmation à mi-parcours, en 2003, constituera une étape essentielle. Je rappelle que nous avons tendance, en France, à prendre du retard dans la mise en _uvre de ces crédits, qui appellent un engagement national équivalent.

Quelques mots sur les actions de restructuration et de reconversion industrielle du ministère de l'industrie, qui est l'un des acteurs majeurs de la politique d'aménagement du territoire.

Ce chapitre budgétaire comporte les crédits pour la reconversion des zones minières, pour le fonds d'industrialisation de la Lorraine et pour les actions de restructuration, qu'elles défendent au nom du CIRI. Il passe, en AP, de 38,87 millions de francs à 40,4 millions de francs.

En revanche, les crédits de paiement passent de 21,04 millions à 18 millions, ce qui nous préoccupe. Des activités industrielles ayant été abandonnées par les actionnaires, pourriez-vous nous dire comment la DATAR et le ministère de l'industrie conjuguent leur action pour sauver les industries menacées, répondre à la détresse de milliers de salariés et réindustrialiser les sites touchés ?

Le budget que nous examinons participe à l'aménagement du territoire, qui relève aussi des autres politiques gouvernementales. Il doit avoir un caractère incitatif, un effet correcteur, un rôle d'entraînement, en vue d'un développement durable. Celui-ci se caractérise par le respect de l'environnement, la sécurité, l'utilisation rationnelle de nos ressources, la place accordée aux hommes et aux femmes ; c'est dire qu'il est intimement lié au progrès social. Nous voterons donc ce budget (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste, du groupe socialiste et du groupe RCV).

M. Maurice Ligot - En progression de 6,8 %, ce budget, avec 285 millions d'euros, reste modeste et ne représente que 3,2 % des moyens consacrés à l'aménagement du territoire, qui sont dispersés entre différents départements ministériels ou proviennent des fonds structurels européens. Cette dispersion ne facilite pas l'appréciation de la politique menée et la marge de man_uvre du ministère, dans ces conditions, est extrêmement faible.

Les dépenses de fonctionnement de la DATAR augmentent, mais en réalité ses moyens sont en baisse puisqu'elle transfère 50 millions de francs vers la nouvelle Agence française pour les investissements internationaux. Cette division de la DATAR est-elle justifiée ? L'Assemblée nationale aimerait connaître les motivations du Gouvernement et souhaiterait que soit retracée l'évolution des investissements étrangers en France au cours des dernières années.

M. François Sauvadet - Très bien !

M. Maurice Ligot - Si les crédits consacrés à la PAT augmentent de 25 %, ce qui est bien, ceux destinés au FNADT ne progressent que de 3,8 %. A l'intérieur de ce fonds, les crédits affectés aux contrats de plan Etat-régions baissent d'environ 8 %. Pourquoi ?

Les choix faits par le Gouvernement posent des problèmes nombreux.

S'agissant tout d'abord des fonds structurels européens, qui contribuent largement à la politique nationale d'aménagement du territoire - au point que sans eux elle n'existerait peut-être pas -, il faut déplorer le retard considérable qui a été pris. La révision de la carte des zones aidées a fait l'objet de polémiques, la population éligible ayant été réduite de 24 %. Le Gouvernement ne pourrait-il envisager de prolonger la durée des mesures transitoires d'adaptation qui ont été prises pour réduire le choc ?

En second lieu, la révision de la PAT fragilise les territoires ruraux, du fait de l'abaissement de 40 à 34 % du taux de population éligible. Les conditions relatives au montant de l'investissement et au nombre d'emplois créés, même si l'un et l'autre sont abaissés, sont encore trop contraignantes. En outre, on a attendu quinze mois le décret d'application, qui n'est sorti qu'en avril 2001.

Dans les zones où la PAT disparaît, ne pourrait-on maintenir l'exonération de la taxe professionnelle, afin de soutenir la création d'entreprises ?

Troisième problème : certes l'Etat prend des engagements pour les régions défavorisées, mais ils sont incertains.

Dans un tiers des régions, les contrats de plan sont peu généreux au regard du faible potentiel fiscal par habitant. D'autre part, l'Etat utilise la négociation des contrats comme un moyen de faire contribuer financièrement les collectivités territoriales à se propres politiques, ce qui aboutit à des transferts de charges sans transferts de ressources. N'est-ce pas le contraire d'une vraie politique de décentralisation ?

Pour l'achèvement de la couverture du territoire par la téléphonie mobile, les engagements des collectivités locales sont suspendus aux contributions de l'Etat, mais celles-ci ne sont toujours pas définies... L'incertitude est la même pour le haut débit.

En matière de transports, le désenclavement des régions les plus défavorisées - notamment les transversales est-ouest - ne semblent pas faire partie des priorités de l'Etat, et la suppression du FITTVN est de mauvais augure. Je déplore en particulier que l'Etat ne remplisse pas sa mission concernant la réalisation de la route Centre-Europe-Atlantique, qui est essentielle.

Le futur schéma des services collectifs des transports est particulièrement décevant en matière de financement. On compte trop sur les collectivités territoriales : que peuvent faire celles qui ont le moins de moyens ? L'Etat semble abandonner son rôle de péréquation et de redistribution.

En quatrième lieu, l'Etat apporte un soutien tout à fait insuffisant à l'implantation et à la création d'entreprises dans les territoires en difficulté.

Le fonds national de développement des entreprises, créé par la loi de 1995, n'est pas identifié comme tel dans le budget. Alors qu'il devrait soutenir le développement local, n'est-il pas dans une impasse ?

Se posent, enfin, des problèmes de nature administrative : superposition des lois contradictoires ou difficiles à comprendre, retard dans la sortie des décrets précisément parce qu'il y a trop de textes nouveaux : il a fallu attendre dix-huit mois celui qui concerne les pays, et celui qui porte sur les schémas des services collectifs n'est toujours pas sorti.

S'agissant des financements, l'Etat démontre son incapacité à investir et la priorité qu'il donne, quelques mois avant les élections, à des dépenses démagogiques.

Quelques observations, pour conclure, sur les concepts qui fondent la politique d'aménagement du territoire.

La ruralité est largement oubliée, et l'agriculture n'est pas considérée comme un atout français alors qu'elle en est un.

L'idée de maillage des territoires peut être séduite, mais elle semble marginaliser l'Ouest français et ignore la nécessité des grandes transversales, en particulier routières.

Peut-on planifier raisonnablement le territoire à l'horizon de 20 ans ? Va-t-on bloquer tout projet non inscrit dans les schémas ? N'est-ce pas le contraire d'une invitation à l'initiative ? Cette attitude rigide serait suicidaire pour le développement local.

Ce budget ne prévoit pas de moyens forts pour aider les territoires frappés par de graves problèmes de reconversion industrielle. Enfin, je déplore l'absence de liens entre l'aménagement du territoire national et l'aménagement du territoire européen. L'Etat sait prendre les crédits européens, mais ignore les nouvelles donnes de la vie européenne, par exemple les grandes transversales et les grandes régions transfrontalières.

Nous sommes donc loin des besoins réels des territoires. La politique d'aménagement du territoire est à repenser (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF, du groupe DL et du groupe du RPR).

M. Jean-Michel Marchand - Je voudrais souligner en commençant combien nous avons travaillé à la structuration et à l'aménagement de notre territoire, avec la loi Voynet, la loi Chevènement, la loi d'orientation agricole - même si les éleveurs durement touchés par la crise ne se sentent pas en état de participer au mouvement -, la loi d'orientation sur la forêt, la loi SRU. Je n'oublie pas la signature des contrats de plan, la réforme de la PAT et l'adoption d'un nouveau cadre d'action pour le FNADT.

La progression de 6,8 % de votre budget, Monsieur le ministre, après le fléchissement de l'an passé, répond aux priorités du Gouvernement et aux objectifs de votre ministère - meilleur équilibre territorial, développement durable, gestion optimisée des espaces sensibles.

Avec la DATAR et l'Agence française pour les investissements internationaux, nous disposons des outils d'accompagnement et de développement dont nous avons besoin. Avec les neuf schémas de services collectifs, nous avons des outils de planification à 20 ans, mais aussi des outils de proximité, puisqu'ils se déclinent au niveau des régions. La nouvelle PAT et le FNADT nous donnent des moyens au service de l'emploi et de l'attractivité des territoires qui accompagne les mutations économiques, nécessité douloureuse dans certains secteurs industriels - comme c'est le cas actuellement pour les salariés de Moulinex.

Aménager le territoire, c'est le développer de façon harmonieuse, mettre les services publics à la disposition des citoyens et leur donner accès aux nouveaux moyens d'information et de communication. Pour cela, il faut user de moyens diversifiés. Les maisons des services publics et « points publics » sont des réponses efficaces tant en milieu rural que dans les quartiers. Il faut veiller à garantir proximité et universalité : chaque point du territoire doit, notamment, être couvert par la téléphonie mobile et le haut débit.

Les projets d'aménagement du territoire inscrits dans les contrats de plan Etat-régions souffrent de certaines difficultés. Ainsi, si le transport de voyageurs par les TER va être amélioré, il n'en est pas de même pour le prêt ferroviaire. Alors que le trafic de marchandises va doubler en dix ans, la SNCF baisse les crédits afférents de 8 %. Or les décisions doivent être arrêtées maintenant pour que les aménagements soient prêts à temps. Il est impératif de favoriser des alternatives à la route, et cela peut se faire en améliorant les réseaux existants. C'est d'autant plus urgent que nous devons réduire nos émissions de gaz à effet de serre, pour respecter le protocole de Kyoto, et que la route est la cause d'un trop grand nombre de morts et de blessures. Les transports multimodaux de voyageurs et de marchandises doivent être développés, et le fer tenir une place importante. Cela n'exclut pas de réaliser les maillons manquants de l'infrastructure routière, comme le passage de Langeais qui doit être aménagé en deux fois deux voies. En revanche, un troisième aéroport est-il bien utile ? La population y est opposée et les raisons économiques et techniques ne sont pas probantes. Là encore, favorisons l'existant et proposons des alternatives.

En ce qui concerne les schémas de services collectifs, je n'évoquerai que deux points. Dans le domaine de l'énergie d'abord, le cadre est fixé : économies d'énergie, développement de l'énergie renouvelable et exploitation des ressources locales. Mais les politiques régionales ne sont pas à la hauteur des enjeux. Il faut mieux mobiliser les collectivités locales et bien sûr leur proposer des moyens. En matière d'espaces naturels et ruraux ensuite, il est indispensable de maîtriser la périurbanistion. La catastrophe de Toulouse l'illustre bien.

Je voudrais aussi aborder les difficultés spécifiques du coteau et de ses cavités souterraines. Des moyens logistiques et financiers doivent être dégagés pour assurer leur sécurité. Les éboulements de ces dernières années n'ont pas causé que des dégâts matériels et environnementaux, ils ont provoqué mort d'homme. Les catastrophes causées par les inondations et les tempêtes sont liées à une urbanisation insensée, l'exemple d'Alger en est une preuve. Faisons en sorte qu'il ne se renouvelle pas sur le coteau.

Les communautés de communes, d'agglomérations urbaines se sont constituées rapidement, certes grâce aux incitations financières, mais surtout du fait de la volonté des élus de fédérer leurs efforts pour être efficaces. Il n'en est pas de même pour les pays, sans doute à cause d'une procédure très lourde (M. François Sauvadet approuve). Si le pays est un territoire de projet, il ne peut ignorer les politiques contractuelles menées par les départements et les régions. Et puisqu'il a vocation à contractualiser avec l'Etat et la région et à faire des propositions, il faut définir des politiques globales, ne serait-ce que pour optimiser l'utilisation des fonds structurels européens. Reste à régler l'articulation entre communauté d'agglomérations et pays. Les seules obligations sont de respecter la volonté des élus de travailler ensemble et de se référer aux espaces pertinents que sont les besoins de vie et d'emploi.

L'aménagement du territoire est une priorité, mais constitue aussi un challenge que votre budget permet de relever. Aussi les députés verts le voteront-ils (Applaudissements sur les bancs du groupe RCV et du groupe socialiste).

Mme Sylvia Bassot - Cette année encore, le budget de l'aménagement du territoire me laisse sur ma faim. Il n'est pas à la hauteur de la tâche à remplir, et c'est d'autant plus dommage que des outils performants existent. Tout le monde s'accorde en effet à reconnaître que la DATAR travaille avec efficacité au rééquilibrage des territoires. Par ailleurs, la loi Voynet a esquissé une approche novatrice de l'aménagement du territoire...

M. le Ministre - Merci.

Mme Sylvia Bassot - ...sur la lancée de la loi Pasqua.

Malheureusement, le budget pour 2002 est, une fois de plus, le parent pauvre de votre ministère au regard de l'environnement.

Il ne peut suffire à vos objectifs ni en matière de politique des pays, ni de soutien aux territoires en difficulté, ni de rééquilibrage par rapport aux nouvelles technologies.

La notion de pays, héritée des lois de 1995 et de 1999, et à laquelle j'adhère pleinement, risque de se dénaturer parce que trop d'interrogations ne sont pas levées.

Ainsi, au niveau juridique, la loi devrait encadrer de façon très précise la politique que l'Etat doit mettre en place, ou alors laisser une certaine latitude aux acteurs locaux en leur faisant confiance. Or nous restons dans la politique du ni-ni, dans le mi-chèvre mi-chou.

D'un côté, la loi nous met sous la tutelle de l'Etat pour délimiter le périmètre - et chaque préfet de région a sa religion en la matière - et nous impose un parcours du combattant en douze étapes pour créer un pays. D'un autre côté, nous manquons de précisions sur les possibilités de contractualisation des pays dans le cadre des contrats de plan Etat-régions. Je suis pour ma part favorable à une grande souplesse, dans tous les domaines, afin de ne pas décourager les initiatives locales, fondées sur le consensus et le dialogue.

Concernant l'aspect financier, il est vrai que la territorialisation des aides évitera le saupoudrage et permettra une utilisation intelligente des deniers publics. Mais à vouloir l'appliquer de façon trop dogmatique, on finit par empiler des structures qui déroutent les élus locaux. Régions, départements, communautés urbaines, communautés d'agglomérations et de communes, parcs régionaux, SCOT, pays... Nos concitoyens y perdent leur latin ! Sans compter les GIP, les syndicats, mixtes ou non, qui gèrent les ordures ménagères, l'eau, l'assainissement, l'électricité, les écoles... Le millefeuilles est indigeste, et la facture des frais de fonctionnement encore plus !

Je préside le pays du Bocage. Si les communautés de communes s'inquiètent, à juste titre, de voir la DGF s'amenuiser, je voudrais pour ma part pouvoir compter sur la pérennisation du versement du FNADT pour le fonctionnement des pays. Vous avez justifié la baisse de 7,7 % des crédits du titre 4 du FNADT, par le faible nombre de contrats de pays - 50 seulement - qui devraient être signés d'ici à septembre 2002. Or, la DATAR estime que ce chiffre pourrait doubler. Les crédits nécessaires seront-ils débloqués ?

Votre budget n'a pas non plus les moyens de soutenir les territoires en difficulté.

La réforme de la PAT a conduit à exclure du bénéfice de cette aide nombre de régions, dont certaines sont pourtant gravement touchées par les restructurations. C'est le cas de l'Orne qui subit de plein fouet le plan social de Moulinex, lequel entraînera de surcroît de très graves difficultés pour les sous-traitants dans l'ensemble du département. Six entreprises du pays du Bocage -lequel n'est plus en zone éligible à la PAT-, représentant 350 emplois, sont ainsi touchées. Il est certes prévu d'apporter un soutien à ces zones pour la formation des salariés ou la recherche-développement et de leur accorder des aides du fonds de développement des petites et moyennes industries. Mais ce n'est pas suffisant. Il était question d'instituer un dispositif dérogatoire dans les zones n'étant plus éligibles à la PAT industrie, avec notamment des aides à l'investissement supérieures, le supplément de La lettre de la DATAR de juillet dernier s'en est fait l'écho. Malheureusement, rien n'a encore été mis en place et les moyens alloués ne sont toujours pas connus.

Les moyens sont également insuffisants pour les nouvelles technologies. L'achèvement de la couverture de l'ensemble du territoire par les réseaux de téléphonie mobile doit être une priorité.

M. le Ministre - C'en est une.

Mme Sylvia Bassot - Mille quatre cents communes situées en zone rurale ne sont toujours pas couvertes. Or, ce sont ces communes, au mieux dotées d'une seule cabine téléphonique sur la place de la mairie ou de l'église, qui en ont le plus besoin. Nos lignes SNCF régionales, comme celle de Paris à Granville, connue pour ses horaires des plus élastiques et les séances de patinage artistique des trains sur les feuilles mortes, devraient également être équipées en priorité sur tout leur parcours comme le sont les autoroutes.

Les nouvelles technologies de l'information et de la communication, comme l'ont été en leur temps le chemin de fer, les autoroutes et le transport aérien, constituent une révolution mais si l'on n'y prend garde, elles peuvent accentuer les écarts entre zones du territoire au lieu de les réduire comme on pourrait l'espérer. En effet, les opérateurs privés concentrent leurs investissements sur les zones les plus denses et donc les plus rentables, au risque de créer un véritable « vide numérique » dans les zones rurales, ainsi de plus en plus isolées. L'Etat doit donc apporter un soutien financier plus direct et plus important aux territoires les plus défavorisés. Son objectif de permettre à tous les particuliers d'accéder à un prix abordable à ces réseaux à l'horizon 2005 est louable. Malheureusement, l'enveloppe de 228,6 millions d'euros à cet effet, même complétée par l'octroi de prêts à taux préférentiels par la Caisse des dépôts aux collectivités, n'est pas suffisante. Une fois de plus, les collectivités vont être obligées de « cracher au bassinet ».

Il y a deux façons d'aborder l'avenir. L'une est de s'en remettre au destin ou de laisser le soin à d'autres de s'en occuper. L'autre consiste à le dessiner soi-même en l'organisant, dans la mesure de ses possibilités, en fonction de l'idée que l'on s'en fait. Les territoires souhaitent se prendre en mains et dessiner leur avenir. Ce budget laisse entrevoir l'intention louable du Gouvernement de les accompagner dans cette démarche. Malheureusement, les moyens ne sont pas à la hauteur des ambitions. En bref, il y a dans ce budget du pour et du contre. « Pt'êt ben que qu'oui, pt'êt ben que non », comme on dit chez nous ! (Sourires) A titre personnel, je m'abstiendrai. Le groupe Démocratie libérale, lui, votera contre (Applaudissements sur les bancs du groupe DL, du groupe UDF et du groupe du RPR).

Mme Geneviève Perrin-Gaillard - Ce budget de l'aménagement du territoire reprend les trois priorités définies lors du CIADT du 9 juillet dernier : assurer un meilleur équilibre territorial en s'appuyant sur les contrats de plan Etat-régions, favoriser le développement des territoires, mieux gérer les espaces sensibles ou remarquables. Nous nous félicitons de ces orientations.

Deux outils principaux permettront de les mettre en _uvre : la FNADT et la PAT, laquelle permet d'octroyer des aides publiques aux entreprises qui créent des emplois dans les régions prioritaires, ces aides étant très encadrées à la fois sur le plan national et européen.

J'ai eu l'occasion avec mon collègue Philippe Duron, de montrer les limites de cette politique d'aide aux entreprises dans le rapport que nous avons remis il y a quelques mois au Premier ministre sur la pertinence des zonages en matière d'aménagement du territoire et d'environnement. Si ces aides, qu'il s'agisse des prêts bonifiés, des subventions, des exonérations fiscales et sociales ou des remises de dettes, sont toujours, et pour cause, très appréciées des chefs d'entreprise, elles peuvent susciter des effets d'aubaine non négligeables. Au demeurant, elles ne sont pas toujours versées aux entreprises qui en ont le plus besoin, elles favorisent souvent l'investissement productif des grandes entreprises même si en France elles concernent aussi les PME. Nous avons proposé avec Philippe Duron plusieurs modifications. Pourriez-vous, Monsieur le ministre, nous donner votre sentiment à ce sujet ?

Dans notre économie de marché devenue ultra-libérale et pour ainsi dire monothéiste, il existe pourtant des entreprises particulières : associations, mutuelles, coopératives. Elles sont au nombre de 760 000 en France et regroupent deux millions de salariés dans le secteur non seulement des services, mais aussi de la production. Créatrices d'emplois, elles sont de formidables leviers pour assurer le développement durable du territoire. Capables d'innovation, de réactivité et de solidarité, elles peuvent apporter des réponses adaptées aux évolutions de notre société et promouvoir une économie qui valorise l'homme et les services. Reposant sur un fonctionnement démocratique, elles sont une alternative au primat du capital. Malheureusement, les politiques se contentent bien souvent de leur témoigner leur sympathie et peu d'élus locaux reconnaissent leur travail à sa juste valeur. Les armes dont elles disposent n'ont elles non plus rien à voir avec celles des grandes entreprises, qu'il s'agisse des moyens financiers ou du régime fiscal. Un seul exemple : l'inauguration en grande pompe de l'usine Toyota à Valenciennes et 400 millions d'aides publiques pour cette entreprise quand dans le même temps les entreprises de l'économie sociale de la région, employant pourtant plus de deux mille personnes, n'ont reçu que sept millions.

Depuis la création d'un secrétariat d'Etat à l'économie solidaire, ces entreprises sont certes mieux prises en compte et c'est tout à l'honneur de ce Gouvernement. La création récente d'un Conseil des entreprises et groupements de l'économie sociale marque parallèlement leur volonté d'être reconnues par les pouvoirs publics et la société civile comme un interlocuteur à part entière.

L'aménagement du territoire ne se borne pas au choix d'un site pour un nouvel aéroport dont personnellement je ne suis pas convaincue de la pertinence...

M. le Ministre - Moi non plus !

Mme Geneviève Perrin-Gaillard - ...ni à la construction de routes et d'autoroutes, ni à la couverture des territoires les plus enclavés par les réseaux GSM, même si tout cela est nécessaire. L'aménagement du territoire, c'est aussi anticiper les évolutions de notre économie, désormais mondialisée, prévoir comment les hommes et les femmes pourront apporter leur pierre au développement local et pallier les méfaits des logiques financières. C'est aussi mieux maîtriser l'urbanisation afin que, loin de créer davantage d'inégalités sociales, elle contribue à réduire les fractures sociales et civiques. C'est aussi promouvoir une politique ambitieuse d'écologie urbaine, notamment en s'attaquant à l'épineux problème de la densité urbaine. Autant de défis qui exigent de mobiliser des crédits mais aussi de soutenir les entreprises de l'économie sociale à la hauteur de leur travail. La fermeture des usines de Moulinex, après celles de Danone, de Michelin, de Renault à Vilvorde, des magasins de Marks and Spencer nous montre combien l'économie capitalistique est dangereuse pour nos territoires si elle demeure la seule digne d'intérêt pour les décideurs que nous sommes.

Je souhaiterais donc que votre ministère aide plus substantiellement les entreprises de l'économie sociale et que dès la réactualisation des contrats de plan en 2003, ce secteur soit reconnu à la hauteur de ce qu'il représente (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. François Sauvadet - Monsieur le ministre, y a-t-il une politique d'aménagement équilibré du territoire dans notre pays ?

M. le Ministre - Oui.

M. François Sauvadet - Certes, les crédits augmentent. Mais peut-être faudrait-il créer, comme il y a un ministère de la ville, un ministère des campagnes !

Permettez- moi de vous apporter mon témoignage d'élu d'un territoire rural qui regroupe 344 communes et 17 cantons et où les difficultés au quotidien ne font que s'accroître... en dépit des déclarations d'intention et du vote de la loi d'orientation dont l'application est au demeurant fort complexe. Que vois-je en effet ? Des services publics, ou plutôt des services au public qui se désengagent de plus en plus. La DDE ne peut pas pourvoir les postes ouverts.

Mme Sylvia Bassot - C'est la même chose dans l'Orne.

M. François Sauvadet - Faute de remplaçants, le courrier, pourtant service universel, n'a pas été distribué pendant plusieurs jours. De même, certains services hospitaliers ont dû fermer faute de remplaçants là encore ou, pis, faute des compétences nécessaires pour pourvoir les postes ouverts. On place les territoires ruraux dans une situation telle que plus personne ne veut y faire carrière. Ainsi à l'Education nationale, commence-t-on souvent sa carrière dans une petite école de campagne...que l'on quitte bien vite pour rejoindre la ville. Monsieur le ministre, il faut garantir la présence de tous ces services au public en zone rurale et leur donner un avenir.

Je souhaite que l'expérimentation se développe dans le service public, ce qui suppose une certaine volonté politique. Il faut que les préfets et les responsables administratifs s'engagent dans cette démarche. Il est très difficile de changer les habitudes dans ce pays, d'autant que l'aménagement du territoire continue d'obéir à une logique très technocratique.

Si les fonds structurels européens sont utiles, il faudrait cependant revoir le dispositif de sortie.

S'agissant de la PAT, le seuil d'éligibilité est trop élevé pour les investissements en zone rurale, qui sont généralement modestes. Il est en outre paradoxal que les territoires ruraux aient été exclus du bénéfice de la nouvelle PAT.

A propos des contrats de plan, je trouve anormal que des milliers de communes restent en dehors du réseau de téléphonie mobile. Le Premier ministre avait promis la couverture totale du territoire en trois ans.

Le paysage institutionnel, par ailleurs, est d'une trop grande complexité. La LOADT, la loi sur l'intercommunalité et la loi sur la solidarité et le renouvellement urbain ont créé des procédures lourdes, qui d'ailleurs se croisent. Les élus locaux et la population préféreraient des dispositifs plus lisibles. Il n'y aura pas d'aménagement du territoire sans l'adhésion des intéressés. Je suis certes d'une intelligence moyenne (M. le ministre proteste), mais comprenez que je m'interroge quand je lis que la DATAR définit « un projet de polycentrisme maillé pour 2020 »... Il s'agirait de « ne pas renvoyer les territoires à leur propre réalité ». Que dites-vous de cela, Monsieur Balligand ?

M. Jean-Pierre Balligand - Un centriste devrait se méfier du polycentrisme... (Sourires)

M. François Sauvadet - A la différence de la majorité, le centrisme en effet n'est pas pluriel, et il se situe franchement dans l'opposition nationale.

Monsieur le ministre, il y a certes, dans nos villes, des quartiers fragiles, mais certaines zones rurales le sont tout autant. Il ne faudrait pas en faire des territoires préservés de toute activité économique, au bénéfice des zones urbaines. La reconquête passe par l'équipement et l'emploi. Aujourd'hui, beaucoup de zones rurales se sentent abandonnées. La politique d'aménagement du territoire devrait contribuer à leur rendre espoir. Ce n'est pourtant pas le cas et c'est pourquoi le groupe UDF ne votera pas ce budget (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF, du groupe du RPR et du groupe DL) .

M. Jean Rigal - Les crédits du ministère de l'aménagement du territoire pour 2002 s'élèvent à 285,37 millions d'euros, soit une hausse de 7 % par rapport à 2001.

Mais ils ne représentent qu'une faible partie des moyens consacrés à l'aménagement du territoire. Si on prend en compte les contributions des autres ministères, les exonérations fiscales et sociales et les fonds structurels européens, l'effort financier total est estimé à 11,8 milliards d'euros, soit 77,4 milliards de francs.

Ce dernier budget de la législature s'inscrit dans le droit fil de la politique définie en 1997, en faveur d'un développement durable et solidaire des territoires, dont la traduction la plus marquante a été la loi dite « Voynet » du 25 juin 1999.

Cette loi a tiré de l'oubli la loi Pasqua du 4 février 1995 en précisant la notion de pays, guère utilisée par ceux-là mêmes qui avaient voté la loi Pasqua. Le concept de pays est très intéressant, parce qu'il favorise l'émergence de projets dans des territoires constitués de villes et d'espaces ruraux dont les élus peuvent travailler dans un cadre souple et participatif, même s'il est trop complexe. Ce dispositif permet aussi de mobiliser les acteurs socio-économiques et l'ensemble de la société civile. Des moyens substantiels sont réservés aux contrats de pays dans le volet territorial des contrats de plan pour la période 2002-2006. Dès la reconnaissance des périmètres d'études, les pays peuvent recevoir des crédits. Mais les initiatives des communes sont parfois victimes de véritables tentatives de sabotage. Ainsi, dans l'Aveyron, le conseil général s'efforce par tous les moyens - avouables et inavouables - de s'opposer aux initiatives locales qu'il ne contrôle pas.

Comme l'indique notre collègue Jean-Claude Daniel dans son rapport d'information intitulé Volet territorial et contrats de plan Etat-régions : le pari des territoires, « de même que l'émergence des territoires remet en cause certaines habitudes de l'Etat, cette dynamique bouleverse celles des départements : dès lors que le pays se construit, cela réduit la possibilité pour un conseil général d'entretenir le clientélisme »...

Le jacobinisme de l'Etat est très critiqué par certains départements qui, pour leur part, préfèrent le féodalisme. C'est le XIIIe siècle contre le XVIIIe (Sourires).

Monsieur le ministre, quel bilan faites-vous de la mise en place des pays ? Quelles mesures envisagez-vous pour simplifier les procédures et faire échec aux naufrageurs ?

M. Leyzour a indiqué que le Sud de la France était en retard par rapport au Nord. Sudiste, je le regrette : c'est sans doute que nous sommes restés « bavards et querelleurs », comme Jules César le disait des Gaulois.

Le maintien des services publics en milieu rural, et si possible leur développement, est une condition essentielle à l'équilibre socio-économique de territoires caractérisés par leur faible densité démographique.

C'est aussi une exigence d'égalité, tous nos concitoyens devant avoir accès à des services publics de qualité.

Le moratoire de 1993 ne concernait que les communes de moins de 2 000 habitants. De nouvelles dispositions ont été prises. Ainsi, la réorganisation de tout service public doit maintenant suivre une procédure d'évaluation comprenant une étude d'impact. Il n'en faut pas moins rester vigilant. La mise en place des maisons des services publics suscite des interrogations. Pouvez-vous nous apporter des précisions à ce sujet ?

Je finirai sur la politique de reconversion des zones minières. Comme l'a écrit Alain Rodet dans son rapport, il faudra beaucoup de temps pour réparer les conséquences de la fin de l'exploitation minière. La nation tout entière a cependant une dette à l'égard des bassins miniers, qui ont grandement contribué à la richesse nationale. La réhabilitation et la réindustrialisation des sites constitue donc un objectif majeur. Les Charbonnages de France doivent y contribuer et leur engagement ne saurait se limiter à la sécurisation des sites.

Elu de la deuxième circonscription de l'Aveyron, je vous demande, Monsieur le ministre, de veiller à ce que les mesures décidées par le CIADT du 18 mai 2000, qui se traduisent par l'engagement de 28 millions d'euros sur trois ans, soient mises en _uvre dans les meilleures conditions et dans la concertation.

L'aménagement du territoire est un sujet vaste et complexe, qui touche à quantité de domaines. Beaucoup reste à faire. Il faut, bien sûr, que les crédits continuent à augmenter, mais il faut aussi que tous les acteurs - institutionnels, socio-professionnels, associatifs, mais aussi simples citoyens - se mobilisent pour disposer avec ordre le territoire et assurer ainsi la cohésion nationale.

Avec mes collègues radicaux de gauche, je voterai ce budget (Applaudissements sur les bancs du groupe RCV, du groupe socialiste et du groupe communiste).

M. Michel Vergnier - Je suis, comme de nombreux intervenants, élu d'une zone rurale mais, pour ma part, je me félicite de ce budget. On peut, bien sûr, revenir sur les trois années antérieures, mais nul ne peut nier que ces crédits sont en augmentation.

Après de difficiles discussions sur le zonage, la priorité donnée à l'emploi et à la création d'activité à travers la PAT, dont les crédits augmentent nettement, est le signe que notre politique d'aménagement du territoire est passée d'une logique de guichet à une logique de projet.

L'amélioration qualitative est essentielle afin de créer des emplois dans des régions qui ont vu leur population décroître. La politique d'aide à l'installation des entreprises est déterminante pour donner à ces territoires les moyens, l'énergie et même l'envie de poursuivre les objectifs de développement économique qui leur permettront, grâce à la création de véritables pôles d'excellence, d'enrayer le déclin démographique qui les fragilise.

Autre outil particulièrement important pour le développement de l'activité, le FNADT, dont la place majeure est réaffirmée dans ce budget. Il a en effet un rôle d'accompagnement essentiel et, depuis qu'il a été réformé, son action est plus lisible et plus ciblée. Le renforcement de la section locale permet notamment, dans sa partie contractualisée, un meilleur accompagnement des projets de territoire, et un meilleur financement de politiques de développement spécifiques et même de conventions inter-régionales de massif.

Le soutien du FNADT aux efforts engagés par les collectivités pour garantir à tous les citoyens un accès aux services publics montre une évolution, depuis deux ans, de la politique relative aux services publics en milieu rural : cette politique vise surtout à limiter les fermetures. Mais la prise de conscience de la nécessité de trouver des solutions alternatives à des fermetures brutales, définitives, qui privent une partie des citoyens de services auxquels ils devraient avoir accès, me paraît bien plus lente.

Certes, depuis 1999 l'évolution territoriale des services de l'Etat et des organismes assurant une mission de service public est positive et je m'en réjouis. On a aussi favorisé l'accès à des services de proximité fondés sur la polyvalence, comme les maisons de services publics. Mais nous n'en sommes encore qu'aux balbutiements. A l'instar de notre rapporteur spécial, je regrette que la création de ces maisons de services publics se fasse un peu dans l'anarchie. Le dernier CIADT de Limoges a toutefois proposé des solutions intéressantes.

Ce CIADT a aussi marqué une étape importante en matière de nouvelles technologies de l'information et de la communication, en particulier pour le Massif central et la région Limousin. Téléphonie mobile, haut débit, sont à n'en pas douter des atouts essentiels du développement du territoire. La mission de les développer au plus vite doit être confiée à la DATAR.

Une forte volonté gouvernementale, le rassemblement des énergies par la coopération intercommunale et par les pays, des outils qui permettent enfin de préparer un développement durable, tout cela doit se conjuguer pour faire aboutir des projets qui conduisent, dans un cadre préservé, à une vraie politique d'aménagement du territoire. C'est pourquoi je voterai ce budget (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste).

M. Léonce Deprez - Les interventions que nous avons entendues montrent que la politique d'aménagement du territoire pourrait être largement consensuelle, ce qui serait sympathique pour le nouveau ministre... Si tel n'est pas le cas, c'est, d'abord, parce que l'action que vous conduisez, dans la continuité de celle de Mme Voynet, n'est pas assez déterminée. La responsabilité du législateur, qui a voté successivement les lois Pasqua, Voynet, Chevènement, ainsi que la loi SRU, n'est pas engagée. Mais l'engagement budgétaire de l'Etat se caractérise surtout par un manque de cohérence. Ainsi, est-on obligé de rechercher dans plusieurs budgets les crédits effectivement affectés à l'aménagement du territoire. Il conviendrait donc de donner un rôle plus important à la DATAR et, peut-être de lier l'aménagement du territoire au Premier ministre et au Plan.

Autre obstacle au consensus : cette politique n'est pas assez lisible et entraînante pour les élus et elle est inadaptée aux nouvelles structures territoriales. Bien sûr, les contrats de plan Etat-régions marquent un progrès que nous saluons, d'autant que leurs crédits sont en augmentation, mais vous avez pris les choses à l'envers, faisant précéder le schéma national que nous réclamions par l'adoption de ces contrats, ainsi que des schémas de services collectifs. Comment expliquer en outre aux élus que, comme vous l'avez dit en commission, ces schémas aient une valeur prospective et non normative ? Pour que votre politique entraîne véritablement les élus, il faudrait que vous signifiiez clairement aux préfets de région qu'elle se déclinera non seulement à leur niveau mais aussi à celui des agglomérations et des pays. Les pays ne deviendront réalité que si une dynamique nationale stimule les élus locaux. Or cette dynamique n'existe pas aujourd'hui.

M. le Ministre - Si !

M. Léonce Deprez - En tout cas, on ne la ressent pas.

Vous aviez pourtant les moyens de faire mieux, grâce aux schémas de cohérence territoriale prévus par la loi SRU. Je propose, sur la base de l'expérience menée dans ma région, le Nord-Pas-de-Calais, que les schémas de cohérence territoriale soient le cadre de l'aménagement du territoire, tant pour la traduction des schémas de services collectifs que pour les contrats régionaux.

Il faut absolument dynamiser la politique d'aménagement du territoire, en utilisant les instruments que sont le FNADT et les contrats de plan. Si les élus de toutes tendances sentaient, de la part du Gouvernement, cette volonté d'affecter les crédits en respectant le cadre territorial, leurs initiatives en seraient encouragées.

Il n'est pas trop tard pour le faire. Il n'y a pas de divergence sur les bancs de cette assemblée en ce domaine. Mettez à profit cet accord général sur les nouvelles structures territoriales, pays et agglomérations, que le législateur a créées (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF  et sur bancs du groupe socialiste).

M. Gérard Bapt - Je voudrais centrer mon intervention sur l'emploi. Dans le nouvel environnement économique, nous sommes à la recherche de régulations pour prévenir ou réparer les déstructurations résultant de décisions stratégiques de groupes dominés par les intérêts de leurs actionnaires.

M. Duron dans le Calvados, M. Idiart et moi-même, en Haute-Garonne, connaissons les effets dévastateurs que peut avoir la fermeture d'un site industriel. La vague de plans sociaux a réactivé le débat en termes de droit du travail et de mode de gestion de l'entreprise, mais il faut aussi renforcer la capacité d'adaptation des territoires pour accompagner les efforts nationaux. C'était l'objectif du gouvernement Mauroy quand il a créé, en 1982, les comités locaux pour l'emploi associant les élus, les partenaires sociaux et les administrations pour débattre sur le terrain des grandes restructurations industrielles. Un véritable engouement a abouti à la création de 300 CLE. Leur nombre a diminué par la suite, mais quelque 120 comités de bassin d'emploi, les CBE, existent aujourd'hui, inégalement répartis sur le territoire. Ils tirent leur légitimité de leur force de proposition, de leur fonction de centre de ressources pour les programmes nationaux et européens et de leur capacité d'innovation.

L'actualité des CBE se renforce avec la reconnaissance explicite, au niveau européen, du rôle des acteurs locaux, et avec les lois Voynet et Chevènement concernant l'administration territoriale. L'article 25 de la loi Voynet prévoit l'installation de « conseils de développement associant les acteurs locaux autour d'un projet territorial partagé ». Depuis vingt ans, le réseau des CBE a accumulé expérience, savoir-faire, capacité de dialogue. Nous nous trouvons donc dans une période charnière. Au nom des comités locaux, j'ai déjà exprimé le v_u que le décret fondateur de ces instances soit modifié pour qu'ils puissent être les interlocuteurs d'autres administrations, en particulier du secrétariat à l'économie sociale et solidaire, particulièrement bien placé pour soutenir des projets locaux.

Je réitère ce v_u, en vous assurant que les acteurs locaux sont bien décidés à conjuguer leurs efforts pour mieux s'adapter à la mondialisation (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Jean-Pierre Balligand - Ayant rapporté pendant plus de dix ans le budget de l'aménagement du territoire, je me félicite de sa constante augmentation ces dernières années. Cette constance est particulièrement importante, car les crédits ne doivent pas jouer au yo-yo dans un domaine où les opérations s'étalent sur de longues périodes : c'est vrai pour les contrats de plan, c'est vrai aussi pour les projets bénéficiant de la prime d'aménagement du territoire.

Je me souviens des grandes incantations sur le « nouvel » aménagement du territoire initié par la loi Pasqua - j'étais également rapporteur à l'époque - et de l'écroulement des crédits qui a suivi...

Ma première réflexion concernera la prime d'aménagement du territoire. La réforme de la PAT est une bonne chose dans son principe. En abaissant les seuils d'éligibilité, en particulier le nombre d'emplois créés et le montant des investissements nécessaires pour bénéficier de cette prime, on augmente les possibilités d'aider les petites entreprises, actuellement plus créatrices d'emplois que les grandes. Cette réforme moralise aussi l'attribution de la prime aux grands groupes.

Mais j'attire votre attention sur un point. En milieu rural - je suis le maire d'une commune de 3 000 habitants -, ce n'est pas pour les dossiers de développement endogène que nous avons besoin d'aide - cela, nous savons le faire !

M. Léonce Deprez - Très bien !

M. Jean-Pierre Balligand - C'est pour favoriser l'implantation de filiales de grands groupes. Il faut donc que ceux-ci aient encore quelque intérêt à s'installer en milieu rural.

M. François Sauvadet - Très bien !

M. Jean-Pierre Balligand - Je vous demande donc d'être vigilant et de suivre les dossiers pour qu'on mesure les effets réels de la réforme.

Ma deuxième réflexion découle de la première : il faut éviter la ghettoïsation des activités. Il est clair que les services de recherche-développement n'iront jamais s'installer dans les petites villes, mais dans les pôles les plus développés. Cependant, lorsque nous menons des expériences - je suis en train de monter un centre d'appels dans une commune de 3 000 habitants, qui pourrait créer jusqu'à 200 emplois -, il faut nous accompagner.

Enfin, je voudrais lancer un appel à l'Etat et aux élus régionaux et intercommunaux au sujet du volet territorial des contrats de plan, soit 9 milliards d'euros sur 35. Le problème est l'ingénierie. Pour les communautés d'agglomérations, je ne suis pas inquiet : les personnels qualifiés sont suffisamment nombreux pour préparer les dossiers. Ce n'est pas le cas pour les pays : là, il ne s'agit plus de faire, mais de faire faire.

M. François Sauvadet - Très bien ! Voilà un socialiste pragmatique !

M. Jean-Pierre Balligand - Il faut que les dossiers soient déposés fin 2002. Il ne reste donc plus qu'un an !

M. Léonce Deprez - Eh oui !

M. Jean-Pierre Balligand - En ce moment, tout le monde s'occupe des périmètres, des chartes, mais il faut aussi penser au contenu. Travaillons-y dès maintenant, faute de quoi nous ne serons pas prêts.

Ce budget est un bon budget. Il n'en reste pas moins que nous avons encore devant nous quelques rendez-vous pour dynamiser notre territoire (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe RCV et du groupe UDF).

M. Philippe Duron - Je souscris très largement aux appréciations positives portées sur ce budget par nos rapporteurs. Cependant, je ne partage pas le point de vue critique de notre rapporteur spécial sur l'Institut des hautes études de l'aménagement du territoire : pour avoir eu la chance de participer à la première session, je considère qu'il dispense un enseignement de très haute qualité, contribue très efficacement à diffuser une culture territoriale prospective et créative, enfin crée des réseaux entre les entreprises, l'administration et les élus.

Monsieur le ministre, la LOADT, que votre prédécesseur Mme Voynet a fait voter par le Parlement en juin 1999, a créé une dynamique territoriale forte. La recomposition des territoires est largement engagée ; les premières assises des pays, qui se sont tenues sous votre patronage à Saint-Brieuc, en ont été la démonstration éclatante. La démarche est longue et complexe, mais elle est féconde.

La publication du décret sur les schémas de services collectifs est imminente. Ces exercices de planification territoriale à 20 ans permettent de tenir compte des spécificités territoriales et des projets régionaux et répondent aux nécessités du développement durable.

La recomposition territoriale, l'affirmation des logiques de projets conduisent à s'interroger sur la pertinence des outils d'aménagement du territoire mis en place dans la décennie passée, et notamment sur les zonages. Avec mon excellente collègue Mme Geneviève Perrin-Gaillard, nous en avons mesuré les limites dans un rapport réalisé à la demande de M. le Premier ministre. Complexité, absence de lisibilité, faible efficacité des mesures sont les expressions qui revenaient le plus souvent dans les propos de ceux que nous avons auditionnés.

Autre problème : l'absence de transversalité entre les politiques de développement du territoire et les politiques de protection de l'environnement.

M. Henri Nayrou - Oh oui !

M. Philippe Duron - Les secondes sont trop souvent perçues comme des entraves à l'activité, alors que l'augmentation de la population des PNR est la preuve que la valorisation des qualités d'un espace remarquable en augmente l'attractivité. La double vocation de votre ministère est une chance pour mieux associer aménagement du territoire et protection de l'environnement dans une politique de développement durable.

Aux politiques d'exception et d'exemption fondées sur les zonages, nous préférerions des politiques publiques inscrites dans les nouveaux contrats de pays et d'agglomération qui complètent les contrats de plan Etat-régions. Il est ainsi possible - et nécessaire - d'intégrer tous les dispositifs de la politique de la ville dans les contrats d'agglomération ; je crois savoir que M. Bartolone a engagé cette démarche. L'évaluation des politiques structurelles en 2003, puis leur négociation à l'horizon 2006 peuvent constituer les étapes de cette transformation.

Le développement économique des territoires passe aussi, comme l'ont rappelé Mme Perrin-Gaillard et M. Balligand, par des mesures de discrimination positive en faveur des entreprises qui prennent le risque de s'installer dans les territoires les plus fragiles. Pour compenser la frilosité du système bancaire, il faut repenser l'aide des collectivités territoriales aux entreprises, en veillant à sa compatibilité avec les règles communautaires. En particulier, il serait opportun d'ajouter ou même de préférer aux aides non remboursables que sont les subventions des aides remboursables, qui pourraient prendre la forme de participation directe au capital des entreprises.

Ce sont là, Monsieur le ministre, quelques-unes des trente-cinq propositions contenues dans le rapport que nous avons remis à M. le Premier ministre ainsi qu'à votre prédécesseur, Mme Voynet. Pourriez-vous nous dire quel avenir vous réservez aux actuels zonages, prorogés jusqu'en 2004 par la loi de finances 2000, et dans quelles directions vous envisagez de les réformer ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste).

M. Henri Nayrou - M'abstenant des rengaines habituelles, je me livrerai seulement cette année à quelques observations.

Ayant eu la curiosité de rechercher dans les archives de l'Assemblée nationale le rapport de la mission d'information sur l'avenir du monde rural, conduite en 1992 par Pierre Estève et Augustin Bonrepaux, je constate que rien n'a changé depuis... Les attentes et les propositions sont les mêmes, les outils d'aménagement du territoire aussi. Comme disait Pierre Dac, « l'avenir n'est jamais que du passé en préparation »...

La catastrophe de Toulouse témoigne mieux que de longs discours de ce qu'il ne faut pas faire en matière d'aménagement du territoire. On connaissait le syndrome de Decazeville, cher à notre collègue Rigal et caractérisé par le départ simultané de services publics et d'activités ; désormais, hélas, on parlera du syndrome de Toulouse : urbanisation autour d'un pôle chimique, métropole englobant un hôpital psychiatrique qui avait été construit il y a 143 ans loin de tout, concentration non maîtrisée.

Sur 10 000 personnes qui arrivent à Toulouse chaque année, une sur trois seulement a du travail. Toulouse asséchait déjà la région Midi-Pyrénées, maintenant elle organise sa propre asphyxie. L'avenir ne passe pas par une hyperconcentration urbaine accompagnée de désertification rurale. Ce n'est pas nouveau, mais la catastrophe de Toulouse vient de montrer qu'il est urgent de repenser l'architecture du territoire (M. Léonce Deprez approuve). Les textes, les outils sont en place. Il n'y a plus grand-chose à inventer. La volonté politique existe aussi. Le Gouvernement en a fait la preuve, ne serait-ce qu'en repoussant les assauts d'un lobby libéral en matière de téléphonie mobile. Reste à établir un grand dessein de la vie en France, qui englobe l'activité, l'emploi, la sécurité, les angoisses et les embouteillages mais aussi le temps choisi et les loisirs. Un groupe de députés ruraux, que j'anime avec Jean-Yves Caullet, estime que l'opposition ville-campagne est stérile.

M. le Ministre - Remarquable !

M. Henri Nayrou - C'est un véritable partenariat qui doit se mettre en place, sous l'égide des pays, ces territoires vrais.

M. Michel Vergnier - Très bien !

M. Henri Nayrou - Ce n'est certes pas le marché qui va y contribuer. C'est donc l'Etat qui doit le mettre en _uvre, y compris en faisant dans un premier temps le bonheur des gens malgré eux. Depuis le drame de Toulouse, il sera difficile de démontrer que j'ai tort (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste).

M. le Ministre - Beaucoup d'entre vous m'ont interrogé sur le maintien des services publics en milieu rural. Nous y tenons beaucoup, et les maisons des services publics le permettent. Elles assurent des prestations multiples et leurs agents sont donc polyvalents. Ils doivent assurer l'accueil des usagers quelles que soient leurs sollicitations. Le CIADT du 9 juillet a pris plusieurs mesures en faveur de ces maisons, visant à renforcer les échanges de bonne pratique, à accentuer la mutualisation des expérimentations et à lancer des appels à projets pour subventionner les maisons les plus innovantes.

En ce qui concerne les schémas de services collectifs, il aurait certes été préférable qu'ils coïncident dans le temps avec les contrats de plan Etat-régions, mais cela n'a pas été possible. La signature des contrats de plan a dû être accélérée pour correspondre au calendrier de la programmation européenne. Au contraire, les schémas de services institués par la loi Voynet de 1999 exigeaient une procédure d'étude et de concertation longue et sérieuse. Ils seront signés avant la fin de l'année. L'évaluation intermédiaire des contrats de plan, vers 2003, sera l'occasion de prendre en compte les orientations des schémas collectifs.

La création de l'agence française pour les investissements internationaux aura certes retiré à la DATAR les moyens et le personnel correspondants, mais pour reprendre cette tâche à son compte. Les crédits consacrés à sa mission ont été augmentés afin de lui permettre d'attirer les investissements étrangers, dans de bonnes conditions bien sûr pour les territoires concernés, et d'étendre ses capacités de prospection à l'extérieur.

La plupart d'entre vous ont évoqué les pays, et nous serons notamment heureux de prendre connaissance de la réflexion menée par M. Nayrou lorsqu'elle sera achevée. Les pays ont été créés par la loi de 1995 et confortés par celle de 1999. Ils s'articulent avec les contrats de plan Etat-régions par le fait qu'ils doivent adopter une charte décrivant un projet. Beaucoup ont demandé ce que l'Etat faisait pour les aider, mais il faut d'abord qu'ils se constituent ! Cela ne peut se faire qu'en transcendant les clivages politiques - j'ai vu proposer des périmètres de pays calqués sur des circonscriptions !

M. Michel Vergnier - Incroyable ! (Sourires)

M. le Ministre - Chaque pays doit créer un conseil de développement composé de représentants des milieux économiques, sociaux, culturels et associatifs, organisant ainsi une gouvernance locale qui survive aux alternances politiques. 280 pays sont en cours de constitution et 104 périmètres ont reçu un avis conforme des conférences régionales d'aménagement et de développement du territoire. 80 à 100 périmètres supplémentaires existeront d'ici la fin de l'année, mais je ne pense pas qu'il y ait plus de cinquante contrats effectifs au 1er septembre 2002. Certains ont exprimé des inquiétudes quant à une disparité entre les régions du Nord et du Sud. La carte de la DATAR fait en effet apparaître ces disparités, mais elle ne prend en compte que les pays ou projets de pays qui ont fait l'objet d'un arrêté préfectoral. De nombreuses démarches ont été engagées mais sans que la conférence régionale ne soit encore réunie. Les assises nationales de Saint-Brieuc ont certes montré que si la région Bretagne était couverte de projets, d'autres étaient plus en retard, mais je vous confirme qu'il existe des projets sur tout le territoire, de l'Aquitaine à la Provence en passant par le Languedoc-Roussillon.

Les contrats d'agglomération devraient être une cinquantaine également dans un an. Ce sont les déclinaisons opérationnelles et financières des projets d'agglomération. Cette nouvelle structure intercommunale est appuyée sur le mécanisme de la taxe professionnelle unique, qui est très incitative. A titre transitoire, jusqu'en 2003, les communes qui ne remplissent pas les conditions pour se constituer en agglomération peuvent signer des contrats si elles s'engagent à se regrouper en établissement public à taxe professionnelle unique.

En ce qui concerne les transports, et en particulier les liaisons transversales prévues dans les contrats de plan Etat-régions, la convention pour la liaison Paris-Orléans-Limoges-Toulouse est déjà signée et la transversale Lyon-Bordeaux fait l'objet d'un groupe de travail spécifique. L'exécution des contrats de plan devrait atteindre 24 % à la fin de cette année. La moyenne annuelle des deux dernières années est de 28 %. Nous sommes encore en phase de montée en puissance. Certains contrats n'ont en effet été adoptés qu'il y a un an.

Beaucoup m'ont interrogé sur la téléphonie mobile et sur la mise en place du haut débit.

Sans intervention particulière des pouvoirs publics, 20 % à 25 % de la population n'aurait toujours pas accès au haut débit en 2005, ou seulement à un coût prohibitif. Le Gouvernement s'est donc fixé l'objectif ambitieux de permettre à tous d'accéder à cette technologie sur l'ensemble du territoire à l'horizon 2005. Dans cette perspective, il a mis en place un dispositif de soutien aux projets des collectivités et invité la Caisse des dépôts à créer un fonds spécifique pour l'accès au haut débit. Celle-ci dégagera 230 millions d'euros sur cinq ans. Le Gouvernement l'a par ailleurs autorisée à mobiliser ses fonds d'épargne pour octroyer aux collectivités des prêts à taux préférentiel sur trente ans, en cofinancement avec les établissements de crédit. Une enveloppe de 1,5 milliard d'euros a été prévue.

Beaucoup d'entre vous ont évoqué la couverture de l'ensemble du territoire par les réseaux de téléphonie mobile. La moitié de nos concitoyens utilise d'ores et déjà un téléphone portable, et cette proportion va croissant. Il est donc primordial que l'on puisse utiliser un mobile partout sur le territoire, en particulier dans les couloirs de transport. Bien que les opérateurs aient déjà consenti un effort, notamment pour des raisons de concurrence, 8 % du territoire ne sont toujours pas couverts. Comme le marché, à l'évidence, n'assurera pas à lui seul les régulations nécessaires, une volonté politique forte est nécessaire. Il a donc été décidé, en accord avec les opérateurs, d'assurer d'ici à trois ans la couverture de l'intégralité du territoire par les réseaux GSM, le Massif central ayant été considéré comme zone prioritaire. L'effort nécessaire de 213 millions d'euros sera supporté à la même hauteur de 76 millions par l'Etat et les collectivités, et de 61 millions par les opérateurs.

Le Gouvernement a pris connaissance avec grand intérêt des 35 propositions formulées par M. Duron et Mme Perrin-Gaillard dans leur récent rapport sur le zonage. Celles-ci s'articulent autour de quatre grandes idées : simplifier les mesures en matière d'aménagement du territoire et d'environnement ; substituer peu à peu la contractualisation  au zonage ; développer la formation et l'information pour favoriser le passage à cette nouvelle logique ; prévoir un dispositif d'évaluation et créer un Observatoire du développement durable. Toutes ces propositions, actuellement à l'étude au ministère, devraient déboucher sur des mesures organisationnelles, législatives ou réglementaires.

MM. Leyzour et Balligand se sont interrogés sur la mise en place des pays et regretté les retards pris. Une réunion est prévue le 26 novembre avec les préfets de région, en présence du ministre de l'intérieur, afin de sensibiliser les préfets aux blocages qui subsistent dans la mise en _uvre du volet territorial des contrats de plan Etat-régions. J'ai par ailleurs demandé à la DATAR de faire des propositions précises concernant l'ingénierie de projet, laquelle est indispensable. Je proposerai enfin au ministre de l'intérieur de publier rapidement une circulaire.

Beaucoup d'entre vous, notamment ceux dont la région est plus particulièrement concernée par des fermetures d'usines et des plans sociaux, ont évoqué les aspects économiques de la politique d'aménagement du territoire. Les crédits du FNADT ont été mobilisés pour soutenir les bassins d'emploi fragilisés. Comme l'a souligné Mme Perrin-Gaillard, l'Etat est le dernier rempart pour les salariés contre le triomphe d'une logique purement libérale. Mon ministère prépare, en étroite collaboration avec le ministère de l'emploi et de la solidarité, les secrétariats d'Etat à l'industrie et à l'économie solidaire, toute une série de mesures visant à la réindustrialisation des sites et au soutien des pôles d'activités existants. Des mesures spécifiques sont prévues pour les zones directement touchées par la fermeture de Moulinex : accélération des actions prévues dans le contrat de plan en matière de formation, de recherche, d'infrastructures de transport, réalisation d'opérations sur des crédits de droit commun comme ceux des agences d'urbanisme, adaptation de certains dispositifs fiscaux et financiers, notamment dans la zone de revitalisation d'Alençon. Toute sa place sera donnée dans ces mesures d'accompagnement à l'économie solidaire dont je crois comme vous, Madame Perrin-Gaillard, que, fondée sur des critères non pas de profit mais d'utilité sociale, elle doit faire partie intégrante de notre économie.

Plusieurs d'entre vous ont évoqué la PAT. Plus de 400 programmes, représentant plus de 35 000 emplois, ont bénéficié de cette prime ces deux dernières années. Depuis la réforme de cette prime, intervenue en 2001 à la demande de la Commission européenne, le CIADT du 9 juillet a pu se prononcer sur 223 dossiers pour un montant d'aide de 85 millions d'euros. 25 000 emplois prévisionnels et 2,5 milliards d'euros d'investissement sont concernés.

M. Rigal et Mme Jambu m'ont plus particulièrement interrogé sur la reconversion des bassins miniers. Les deux CIADT de décembre 1998 et décembre 1999 ont pris des mesures en faveur des bassins de Lorraine et du Nord-Pas-de-Calais. Un programme expérimental de gestion de « l'après-mine » a été engagé en Lorraine et une enveloppe de 4,5 millions d'euros a été affectée à la réhabilitation de 70 000 logements miniers et de leur voirie de desserte dans le Pas-de-Calais.

Plusieurs d'entre vous se sont inquiétés du nouveau zonage. Je puis les rassurer en leur indiquant que le Gouvernement a décidé d'abaisser les seuils et d'élargir le type de services éligibles. Des call-centers devraient ainsi pouvoir ouvrir en zone rurale également.

Mme Sylvia Bassot - Qu'en est-il du dispositif de sortie de PAT ?

M. le Ministre - Je vais vous répondre, mais je souhaite dire un mot auparavant du FNADT.

D'ici à 2003, l'Etat devrait apporter 1,5 milliard d'euros par an pour la création de quarante plates-formes d'initiative locale. La programmation 2000-2006 porte plus particulièrement sur l'ingénierie financière des projets, les prêts d'honneur aux personnes physiques, les fonds de capital-risque et les fonds de garantie.

Pour ce qui est du dispositif de sortie de PAT, Madame Bassot, nous avons négocié auprès de la Commission européenne et obtenu que les zones n'étant plus éligibles à l'objectif 2 ou 5b puissent continuer à bénéficier d'un soutien financier.

Ces zones continueront de bénéficier d'exonérations fiscales et sociales. Les collectivités locales pourront soutenir les PME et accorder des aides à l'immobilier d'entreprise dans la limite de 25 % du projet et de 25 000 francs. Un nouveau dispositif prévoyant un conventionnement avec l'Etat devrait porter cette seconde limite à 50 000 francs.

Les zones en question bénéficient encore de la prime régionale à l'emploi, récemment révisée, qui permet de verser jusqu'à 70 000 francs par emploi, tout comme la PAT tertiaire. Il est aussi prévu un dispositif d'aide à l'ingénierie financière qu'il s'agisse du capital-risque, des fonds de garantie ou des prêts d'honneur. Enfin, les zones qui sortent du dispositif PAT peuvent prétendre à un soutien public en matière de formation, de recherche et développement ou de préservation de l'environnement.

Comme M. Marchand, je suis très attaché au ferroutage. Actuellement, le fret ferroviaire ne représente que 18 % du tonnage transporté et sa part est en déclin depuis un quart de siècle. Dans le schéma de service, le Gouvernement a fixé un objectif ambitieux : le doublement du fret ferroviaire en 2006. Les crédits des contrats de plan en faveur du rail ont été décuplés. La SNCF va acquérir quatre cents locomotives pour le fret. Elle demeure très endettée, mais je souhaite qu'elle fasse autant d'efforts pour le fret qu'elle en a fait pour le TGV.

M. Jean-Michel Marchand - C'est un point important, en effet.

M. le Ministre - Pour le franchissement des Alpes et des Pyrénées, une solution doit être trouvée au plan européen.

Mme Jambu et M. Marchand ont aussi évoqué le transport aérien. La sous-consommation du FIATA est due à la transformation de ce fonds, qui a provoqué un retard pour ainsi dire inévitable. Il a fallu attendre la conclusion des appels d'offres. Mais nous avons assoupli les procédures. Grâce à l'entrée en vigueur de nouvelles conventions, les dépenses pourront s'élever à 113 millions de francs en 2002, au lieu de 72 millions en 2001. Au demeurant, le transport aérien traverse une période difficile.

M. Marchand m'a interrogé sur la stratégie aéroportuaire du Gouvernement. Il faut avoir une vision globale des transports. Lors d'un conseil qui s'est tenu à Louvain-la-Neuve, M. Gayssot a défendu l'idée d'une taxe sur le kérosène. Nous souhaitons aussi favoriser le TGV pour les déplacements de courte et moyenne distance et maîtriser, voire réduire, les nuisances sonores aéroportuaires. Je suis pour ma part favorable à un couvre-feu à Roissy et au déplacement vers Vatry du fret aérien nocturne.

Il y a un an, le Gouvernement avait imaginé la construction d'une nouvelle plate-forme internationale. Mais le monde a un peu changé depuis. Il y a eu un débat public, animé par Pierre Zémar.

Depuis les attentats du 11 septembre, on peut supposer que l'adoption de nouvelles normes de sécurité et la hausse des assurances risquent de relever le coût du transport aérien, sans parler de la taxation du kérosène. Nous ignorons en tout cas quelles sont les perspectives de croissance du trafic aérien en Ile-de-France. Pour ma part, je m'interroge. On ne peut se contenter d'une seule source, en l'occurrence la direction générale de l'aviation civile. Vous connaîtrez demain la décision du Gouvernement (Applaudissements sur les bancs du groupe RCV, du groupe socialiste et du groupe communiste).

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance qui aura lieu cet après-midi, à 15 heures.

La séance est levée à 12 h 55.

            Le Directeur du service
            des comptes rendus analytiques,

            Jacques BOUFFIER


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