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Session ordinaire de 2001-2002 - 28ème jour de séance, 67ème séance

1ère SÉANCE DU VENDREDI 16 NOVEMBRE 2001

PRÉSIDENCE de Mme Nicole CATALA

vice-présidente

Sommaire

      FIN DE LA MISSION TEMPORAIRE D'UNE DÉPUTÉE 2

      LOI DE FINANCES POUR 2002 -deuxième partie- (suite) 2

      JEUNESSE ET SPORTS (Nouvelle procédure) 2

      RECHERCHE (Nouvelle procédure) 14

      ÉTAT B 28

      ÉTAT C 28

La séance est ouverte à neuf heures.

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FIN DE LA MISSION TEMPORAIRE D'UNE DÉPUTÉE

Mme la Présidente - Par lettre du 6 novembre 2001, M. le Premier ministre m'informe que la mission temporaire précédemment confiée à Mme Marie-Françoise Perol-Dumont, députée de la Haute-Vienne, a pris fin le 15 novembre.

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LOI DE FINANCES POUR 2002 -deuxième partie- (suite)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2002.

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JEUNESSE ET SPORTS (Nouvelle procédure)

M. André Vauchez, suppléant M. Alain Barrau, rapporteur spécial de la commission des finances - Je vous prie d'excuser l'absence d'Alain Barrau ; je serai strictement fidèle à son propos.

L'importance réelle de votre budget, Madame la ministre, dépasse sa modeste place au sein du budget de l'Etat, car il couvre nombre d'activités pratiquées par nos concitoyens et regroupe des interventions qui influent sur notre vie quotidienne. Pour la cinquième fois, vous proposez une progression largement supérieure à l'augmentation moyenne du budget de l'Etat. En tenant compte des dotations gérées par vos services, vos crédits s'établiront à plus de 754,7 millions d'euros, en hausse de 6,1 %. Ce sont donc plus de 4,9 milliards de francs que vous proposez d'ouvrir en faveur des jeunes et du sport. Je rappellerai que le budget 1997, le dernier voté par la précédente majorité, n'avait ouvert que 3,9 milliards de francs. La Xlème législature a donc revalorisé de plus de 2 % les moyens budgétaires que l'Etat consacre aux jeunes et aux sports.

Je veux dénoncer à nouveau le fait que le contrat de concession du stade de France mette chaque année à la charge de l'Etat plusieurs dizaines de millions de francs. Depuis 1998, 36 millions d'euros ont déjà été versés au concessionnaire pour absence de club résident. Les conditions dans lesquelles le contrat de concession a été négocié en 1995 continuent donc de peser d'une façon non négligeable sur le budget de l'Etat. Des sommes aussi importantes gagneraient à être utilisées à d'autres fins, et notamment à des actions en faveur des jeunes. Il est donc urgent d'aboutir à un réexamen de ce contrat, dont la Cour des comptes a relevé le caractère exorbitant.

S'agissant des subventions inscrites au titre VI, vous avez indéniablement consenti un effort en faveur des installations sportives et socio-éducatives, mais les crédits sont néanmoins insuffisants eu égard à l'état de détérioration des installations, tout particulièrement dans les centres de vacances.

Au-delà de la progression de vos crédits, Madame la ministre, vous avez depuis le début de la législature profondément réorienté les priorités de votre ministère.

Tout d'abord, vous avez mobilisé d'importants moyens budgétaires pour favoriser la participation des jeunes à la vie sociale. Des instances de dialogue et d'échanges ont été installées et dotées de moyens de fonctionnement propres. L'accès aux formations a été facilité, notamment par un abaissement sensible de leur coût.

En deuxième lieu, des mesures importantes ont été prises en faveur des associations. L'aide de l'Etat au FONJEP passe de 45 000 francs par poste en 2000 à 48 000 en 2002, et 682 postes supplémentaires auront été créés depuis 1997. Pour les petites associations, qui fonctionnent essentiellement avec des bénévoles, la commission des finances s'est inquiétée des conséquences des instructions fiscales. Il est essentiel pour l'avenir du secteur associatif que celles-ci soient améliorées.

En troisième lieu, vous avez su prendre des mesures pour favoriser la pratique sportive, qui constitue indéniablement un outil d'insertion sociale. Le dispositif « coupon sport » mobilisera en 2002 8,38 millions d'euros et sera ainsi accessible à 25 000 jeunes. Les mesures en faveur de la pratique sportive des handicapés, le plan de développement du sport féminin et le programme de promotion du sport en entreprise bénéficieront de moyens renforcés. Des moyens nouveaux sont également prévus pour soutenir des projets visant à renforcer l'intégration sociale par le sport et à lutter contre la violence lors des manifestations sportives.

Enfin, je voudrais souligner le rôle joué par votre ministère dans la protection de la santé des sportifs. Le coût des actions menacées en ce domaine devrait atteindre 23 millions d'euros en 2002, contre 8 en 1999.C'est la composante de votre politique qui a suivi l'évolution la plus rapide.

En matière de lutte contre le dopage, deux mesures importantes sont prévues : extension de la surveillance médicale à l'ensemble des sportifs de haut niveau, qui fait l'objet d'une mesure nouvelle de 3,05 millions d'euros ; transformation du laboratoire national de dépistage du dopage en établissement public à caractère administratif doté de moyens renforcés, afin de conforter sa mission de service public et de pérenniser la situation statutaire de ses personnels. Une inquiétude cependant : les contrôles réalisés lors de compétitions ou de manifestations sportives organisées par des fédérations scolaires ont révélé l'usage de substances dopantes. Une intervention de l'Etat serait nécessaire.

Madame la ministre, votre budget est un bon budget, qui met à la disposition de vos services plus de 4,9 milliards de francs et comporte des mesures importantes pour l'avenir. C'est pourquoi j'invite mes collègues à le voter, comme l'a fait la commission des finances.

M. Alain Néri, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales - Sur l'ensemble de la législature, ce budget aura progressé de 25 %. L'augmentation de ses crédits est encore substantielle pour 2002. Le FNDS progresse pour sa part de 12,5 %, et le fonds national de développement de la vie associative est également en augmentation. Au total, 754 millions d'euros sont destinés au sport. Néanmoins, force est de constater que nous n'avons pas atteint le seuil de 1 %, qui demeure notre objectif. Heureusement, le sport bénéficie d'une action complémentaire des collectivités locales.

Au vu du montant des transferts, des primes de match, des dotations de certains tournois de tennis, l'opinion publique pense qu'il y a de l'argent ; le message à faire passer est qu'il y a peut-être trop d'argent dans le sport, mais pas assez pour le sport.

Madame la ministre, vous avez mené une politique courageuse en faveur de la démocratisation du sport, en direction des jeunes mais aussi des moins jeunes, du sport féminin, du sport dans l'entreprise, du sport dans les milieux les plus défavorisés. Le sport doit en effet jouer tout son rôle dans le maintien du lien social et la lutte contre les exclusions.

Vous avez également engagé une action très énergique pour lutter contre le dopage. La France a été pionnière en ce domaine. Alors que sa position pouvait passer pour utopique, nous constatons que le message gagne du terrain, même si nous avons encore quelques difficultés avec certains pays. Il faut tenir bon !

Je suis un très chaud partisan des contrôles inopinés. Mais il faut aussi renforcer les moyens du laboratoire de Châtenay-Malabry, afin que les échantillons puissent être analysés dans des délais raisonnables. Enfin, je souhaite que les contrôles soient effectués avec la même rigueur dans toutes les disciplines : actuellement, 22,2 % des contrôles concernent les cyclistes ; les inégalités entre disciplines créent un sentiment d'injustice. La lutte contre le dopage est une véritable mission de service public et de santé publique.

Madame la ministre, même si le sport ne dispose toujours pas de crédits suffisants, les progressions budgétaires dont vous avez bénéficié depuis cinq ans ont été bien utilisées. La commission des affaires sociales, approuvant les orientations de votre budget 2002, invite l'Assemblée à le voter.

M. Jean-Claude Beauchaud - Le budget de la jeunesse et des sports est peut-être un petit budget par les chiffres, mais il est grand par ses implications. Pour la cinquième année consécutive, il est en progression, alors que les majorités qui nous avaient précédés l'avaient tant affaibli que l'on pouvait craindre pour la survie du ministère de la jeunesse et des sports en tant que ministère de plein exercice.

Sans revenir sur les éléments chiffrés présentés par les rapporteurs, je voudrais mettre en avant le rôle joué par des milliers de bénévoles, auxquels je tire un grand coup de chapeau, qui sont les véritables gardiens du temple associatif. Nous avons voulu - et je salue à cet égard le travail effectué par notre collègue Henri Nayrou - ajouter au respect de tous une reconnaissance plus concrète du bénévolat.

Dans ce projet de budget, le FNDS enregistre une hausse sensible, qui donnera des moyens supplémentaires aux fédérations, mais aussi aux petits clubs, via la part régionale. Ce fonds est et doit rester un élément moteur essentiel de la politique du sport pour tous et il me paraît indispensable de le pérenniser.

Or, la réforme des procédures de discussion des lois de finances, qui sera applicable en 2005, rend incertain l'avenir des comptes spéciaux du Trésor qui avaient été institués par l'ordonnance du 2 janvier 1959. Au nom des députés du groupe socialiste et en accord avec le rapporteur général du budget, je me prononce d'ores et déjà en faveur du maintien de crédits pérennisés dont l'attribution se ferait de façon collégiale entre les représentants de l'Etat et ceux du mouvement sportif. Il me paraît en effet indispensable de maintenir un système reprenant les trois grandes caractéristiques du FNDS : un financement pérenne, une instance de gestion comprenant des représentants du mouvement sportif et le maintien d'une part régionale pour les associations. Les dirigeants bénévoles voient dans le FNDS la reconnaissance de leur engagement au service de la société.

Sous une forme ou une autre, le FNDS vivra.

Je me félicite également de la hausse des crédits, même si le niveau des crédits reste trop faible par rapport aux besoins.

Votre ministère est celui de la vie associative et de l'éducation populaire autant que celui du sport et il doit le rester. Il a besoin pour cela d'un FNDVA d'une toute autre dimension.

L'emploi, au sein du ministère, reste une priorité, comme dans les budgets des dernières années.

Les gouvernements précédents avaient procédé à des coupes claires dans les budgets et les effectifs, pour des raisons paraît-il budgétaires. C'est sans doute un hasard, mais celles-ci avaient touché presque exclusivement l'éducation populaire. En réalité, il y avait là un parti pris idéologique.

Nous avons mis fin à cette politique de destruction d'emplois. Ce sont les crédits de fonctionnement, l'investissement humain qui a été privilégié, il faut s'en réjouir.

Le dispositif des emplois-jeunes a permis de créer 55 000 emplois dans le champ du sport et de l'éducation populaire. Une nouvelle mesure est prise en faveur de l'emploi dans les clubs.

Vous augmentez de 10 % les crédits destinés à financer le coupon sport. Dans certaines communes, dont la mienne, ces crédits sont abondés par les centres communaux d'action sociale, afin de donner accès au sport aux plus défavorisés. Ce dispositif est donc à l'origine de synergies nouvelles.

En outre, 2 500 bourses individuelles supplémentaires d'accès aux formations d'animateur et de directeur de centres de loisirs et de vacances seront décernées pour démocratiser ces fonctions.

Le renforcement des crédits destinés aux instances de jeunes, dont le conseil national de la jeunesse, est également une bonne nouvelle. Trop souvent, nous avons affaire à des spécialistes de la jeunesse, qui sont eux-mêmes d'âge mûr. Vous avez choisi de laisser parler les jeunes et je vous en remercie.

Je salue la réussite de contrats éducatifs locaux qui concernent 3 millions de jeunes de 6 à 16 ans. Cette démarche originale, qui associe différents services de l'Etat et les collectivités locales, bénéficiera de 320 millions de crédits.

Un des principaux soutiens aux associations d'éducation populaire réside dans les postes FONJEP, subventionnés par l'Etat. Les 3 365 FONJEP existants ont été revalorisés en 2001. Vous faites de même pour 2002 et prévoyez même la création de cinquante nouveaux postes.

Toutefois, bien que je connaisse les contraintes budgétaires, il me semble que l'effort en faveur du Titre V aurait dû être plus soutenu. C'est pourquoi je souhaite que les prochaines lois de finances donnent aux collectivités locales des aides suffisantes pour rénover leurs infrastructures. Même s'il leur est maintenant possible de mieux s'organiser grâce à la création des communautés d'agglomération, elles ont encore besoin du soutien de l'Etat, qui ne peut décemment promouvoir les pratiques sportives tout en se désintéressant du sort des installations vétustes. Un plan de programmation pluriannuel est indispensable.

En cette dernière année de notre législature, je souhaite enfin revenir sur les modifications législatives auxquelles nous avons procédé depuis 1997 dans le domaine du sport. Nous avons en effet légiféré sur la sécurité des pratiques sportives, la sécurité dans les stades, la protection de la santé des sportifs et la lutte contre le dopage, et l'organisation des activités sportives, sans oublier votre grande loi sur le sport qui visait à éviter toute rupture entre les différentes conceptions du sport : sport pour tous, sport amateur et sport professionnel.

Je suis fier d'avoir contribué à doter notre pays de moyens juridiques pour lutter contre le dopage. Mais la protection de la santé des sportifs est un combat permanent. Nous devons exporter notre savoir-faire et notre intransigeance en la matière car, jugées utopiques hier, la loi sur la santé des sportifs comme celle qui protège les droits des jeunes professionnels ont montré qu'il était possible de fixer des règles dans un monde où le sportif est trop souvent considéré comme un bien marchand ou un objet de spéculation financière.

Nous pouvons donc être fiers de la politique menée ensemble depuis 1997, même si de nouveaux engagements resteront nécessaires pour que le sport, dont on connaît les vertus de socialisation et d'intégration, reçoive une plus grande reconnaissance.

Alors que s'achève cette législature, il me plaît de souligner la bonne entente avec laquelle les députés du groupe socialiste ont pu travailler avec vous, Madame la ministre, et avec vos collaborateurs.

Notre préoccupation commune est d'améliorer le place de la vie associative et du sport dans notre société.

Vous avez su faire évoluer votre budget et le groupe socialiste le votera.

M. Renaud Muselier - La progression totale de votre budget n'est que de 3,1 % soit une augmentation moins importante que les années précédentes. Il demeure le plus petit budget ministériel de l'Etat et représente le chiffre ridicule de 0,2 % du budget global. Surtout, cette progression cache en réalité un tour de passe-passe : on déshabille le sport pour mal habiller la jeunesse.

En effet, les crédits d'intervention dans le domaine du sport diminuent d'un million d'euros, passant de 45 % des crédits d'intervention à 43,9 %. Les crédits de la jeunesse progressent, eux de 5,3 millions d'euros, mais ils sont saupoudrés pour faire du clientélisme électoral.

Les chapitres 43-90-41 et 42, qui concernent la promotion du sport et le développement de la pratique sportive pour le plus grand nombre, ont perdu près de 6,4 millions d'euros. Pour les seuls crédits déconcentrés, la diminution est de 20 %.

Même vos prétendues priorités sont dotées de manière insignifiante. Que pensez-vous faire de sérieux et d'efficace en n'accordant qu'un million d'euros supplémentaire pour soutenir à la fois la féminisation du sport, le sport en entreprise et la lutte contre la violence ?

L'évolution des dépenses en capital est également très instructive. Ces crédits passent de 9,3 millions d'euros en 2001, à 7,7 millions d'euros en 2002, soit une baisse de 16,5 %, qui suit celle de 44 % l'an dernier. Les crédits de paiement sont en baisse de 17 %, de telle sorte que l'Etat ne va pas pouvoir faire face à ses engagements dans les années futures. D'ailleurs, selon une technique qui vous est habituelle, vous avez diminué les tranches de crédits de paiement des investissements en 2002 et chargé celles des années suivante. Après moi le déluge !

Un déluge qui risque d'ailleurs de tout emporter compte tenu des prévisions économiques fantaisistes sur lesquelles sont construites ce budget, et qui sont contredites par tous les organismes internationaux de conjoncture. Vous allez léguer à votre successeur une régulation budgétaire sévère qui réduira encore les marges de man_uvre du ministère.

En outre, les investissements que vous envisagez sont révélateurs de vos carences. L'exemple de l'INSEP est marquant. Vous êtes obligés de réhabiliter complètement cette infrastructure essentielle pour le sport...

M. le Rapporteur pour avis - Le problème n'est pas nouveau !

M. Guy Drut - N'oubliez pas que vous êtes arrivés au pouvoir en 1981.

M. Renaud Muselier - Mais qu'avez-vous fait depuis quatre ans pour l'entretenir ? Rien ! C'est le même phénomène pour les centres de vacances : vous intervenez quand il est trop tard.

Ce sont les collectivités locales qui entretiennent les structures sportives dans notre pays. Elles font un travail remarquable, qui tranche avec celui de l'Etat. S'agissant des emplois, vous supprimez trente postes d'encadrement d'activités physiques et sportives, pour créer des postes administratifs. Ce n'est pas ainsi que vous allez améliorer la situation. Votre cabinet compterait vingt-quatre collaborateurs, Madame la ministre : c'est davantage que celui du ministre de l'intérieur ! Peut-être pourriez-vous lui en prêter.

Le FNDS n'est plus conçu par vous comme une ressource supplémentaire pour le monde sportif : il sert plutôt à compenser la baisse de crédits. Nous veillerons à ce qu'il demeure un outil paritaire au service du mouvement sportif. Le sport de haut niveau devrait être entièrement pris en charge par votre budget, afin que le FNDS agisse davantage en faveur des fédérations et des clubs.

Le mouvement sportif est aussi inquiet de l'application de l'article 21 de la loi organique, qui pourrait le priver de ressources dont il disposait jusqu'alors. Votre budget témoigne d'un manque de vision. Vous ne proposez pas un vrai projet pour nos jeunes. Alors que vos prédécesseurs avaient lancé une dynamique en réformant les rythmes scolaires, vous vous contentez d'aménagements limités, comme les contrats éducatifs locaux.

Le seul point positif est votre action en faveur de l'Office franco-québéquois pour la jeunesse. A la demande de mon groupe, vous avez bien voulu annoncer que vous imputeriez à son budget la participation française au financement de l'opération « Jeunes découvreurs ».

Le mouvement sportif est en crise. Il faut non seulement reconnaître les bénévoles qui le font vivre, mais aussi les aider, les informer et leur faciliter le travail en simplifiant les dispositifs. Les clubs manquent cruellement de moyens. Le poids des formalités est aussi une entrave. Il faut simplifier les procédures et redonner aux dirigeants les moyens d'agir.

Il n'existe pas de plan de carrière pour les cadres techniques, qui sont parfois mal utilisés par le ministère et par les fédérations. Il faut se mettre à leur écoute.

Vous n'apportez pas de réponse non plus au clivage de plus en plus fort qui sépare le sport professionnel et le sport amateur. Le statut des fédérations ne correspond plus aux besoins actuels. Votre position sur les droits de télévision est plus idéologique qu'adaptée aux réalités. Votre attitude est plus une incitation à la création de ligues professionnelles autonomes qu'un atout pour le monde fédéral. Nous voulons que le sport conserve son unité. Mais nous voulons aussi que nos clubs soient compétitifs. Dans le football, la complexité des procédures, le poids de la fiscalité et l'archaïsme des règles de financement conduisent à un essoufflement de nos clubs et à un appauvrissement de notre niveau international. Vous avez en commission renvoyé la balle aux fédérations et aux ligues. Mais c'est bien à l'Etat de faciliter une évolution de ces règles.

M. le Rapporteur pour avis - Ce ne sont pas les plus gros budgets qui font les meilleurs clubs.

M. Renaud Muselier - Un véritable accompagnement médical des sportifs doit être mis en _uvre, avec priorité donnée à la prévention des pratiques à risque et, dans la lutte contre le dopage, à l'harmonisation des règles au niveau international. Dans ce domaine l'action ne doit pas se limiter à la multiplication des contrôles et des sanctions, surtout si, par manque de moyens, les échantillons prélevés demeurent inexploités au laboratoire de Châtenay-Malabry. Tous les acteurs doivent se sentir concernés par ce combat. Le dopage, c'est tricher pour gagner, c'est exactement à l'opposé de nos valeurs.

Pour nous, le sport signifie dépassement de soi, recherche de l'excellence, respect des autres et application des règles. Toutes ces valeurs, depuis quatre ans, nous les retrouvons souvent dans vos discours, beaucoup plus rarement dans vos actes. Aussi le groupe RPR votera-t-il contre ce budget.

M. Patrick Leroy - Déjà l'an dernier, nous étions satisfaits de votre politique en faveur de la jeunesse et des sports. Toutefois, nous affirmions notre détermination à la voir pourvue d'une dotation plus significative, demandant que ce secteur devienne une réelle priorité nationale et reçoive 1 % du budget général. Notre position n'a pas changé.

Nous apprécions le changement de fond opéré depuis votre arrivée, avec la refondation d'une véritable politique de service public et non plus de soumission aux lois du marché.

Pour la quatrième année consécutive, votre budget augmente de 3,08 % exactement, donc davantage que la moyenne du budget de l'Etat.

Cependant un effort reste à accomplir pour que les crédits alloués soient en adéquation avec les besoins, encore que, si l'on ajoute à vos crédits propres le FNDS et le FNDVA, la hausse de ce total consolidé s'élève à 6 %.

Ces crédits en augmentation sont destinés à conforter un meilleur accès à l'éducation populaire et aux activités sportives, tout comme aux activités destinées à la jeunesse, et un meilleur encadrement de ces activités.

Ces choix confirment votre volonté politique dans le domaine social et particulièrement votre souci de lutter contre l'exclusion, ainsi que de combattre le dopage et la violence dans le sport.

Sur le premier point, des efforts ont été réalisés pour résorber l'emploi précaire, et surtout pour favoriser la présence sur le terrain des services déconcentrés de votre ministère.

Facteur de lutte contre l'exclusion, l'augmentation de 10 % des coupons sport permettra à 275 000 jeunes de bénéficier d'une aide à l'inscription dans un club sportif, même si cela reste insuffisant.

La hausse de 17,9 % des bourses BAFA et BAFD réduira les coûts de ces formations et permettra d'aider individuellement les jeunes stagiaires. Nous approuvons également votre souci de démocratiser la formation initiale des animateurs par un coup de pouce de 23,6 %.

Vous poursuivez le programme de réhabilitation des centres de vacances et de loisirs associatifs. Ce patrimoine bénéficiera ainsi de subventions d'équipement du FNDS portées à 32 millions d'euros, soit une hausse de 6,1 %.

Nous soutenons votre politique de renforcement des contrôles pour la protection et l'encadrement éducatif des mineurs accueillis dans ces centres.

Les subventions aux associations de jeunesse et d'éducation populaire progresseront de 6 % afin de favoriser l'accès de tous aux activités artistiques, scientifiques et culturelles.

Afin de poursuivre le dialogue avec les jeunes, vous renforcez les moyens consacrés au réseau d'information de la jeunesse, en particulier avec l'implantation de 200 nouveaux « points-cyb-espaces jeunes numériques ». Nous saluons ces efforts de soutien à la jeunesse, qui est l'avenir entier de notre pays.

La promotion du sport, et notamment du sport au féminin, et la lutte contre le dopage et la violence sont une autre de vos priorités. Outre le soutien à la pratique sportive en entreprise, vous disposez de 300 000 euros de crédits supplémentaires pour financer des actions de formation et de communication destinés à tous ceux qui sont concernés par la violence dans le sport.

Forcément conjoncturelle, mais signe de rayonnement international, nous nous félicitons de la hausse de 50,5 % des crédits attribués à l'organisation des grandes manifestations sportives. Soyons fiers que la France soit chargée d'organiser en 2002 les championnats du monde d'athlétisme handisport à Villeneuve d'Ascq, les championnats du monde de voile à Marseille, la coupe d'Europe des nations d'athlétisme à Annecy, et en 2003 les championnats du monde d'athlétisme.

Nous saluons également l'effort budgétaire important destiné à la préparation et à la participation des équipes de France aux Jeux olympiques et à la participation des équipes de France aux Jeux olympiques et paralympiques et à celles des équipes de France de haut niveau.

C'est avec raison que vous veillez de près aux conditions d'accueil de sportifs mineurs dans les filières de haut niveau.

La transformation du laboratoire national de dépistage du dopage en établissement public administratif avec 38 emplois d'agents publics permettra de renforcer la lutte contre le dopage. S'y ajoutent le renforcement du suivi médical des sportifs et l'extension des contrôles, pour un coût supplémentaire de 3,6 millions d'euros. L'essentiel n'est pas de multiplier les contrôles, mais de privilégier les contrôles inopinés.

Toute l'éthique sportive est en cause dans ces affaires de dopage. L'utilisation de ces produits, souvent dans un souci purement financier, dévalorise l'image du sport. Lutter contre le dopage, c'est aussi veiller sur notre jeunesse.

Vous souhaitez développer les politiques éducatives territoriales par une généralisation des contrats éducatifs locaux. Là encore, soyez assurée de tout notre soutien.

J'insiste à nouveau sur l'attention à porter aux conditions d'exercice des éducateurs et animateurs sportifs des collectivités territoriales.

Le groupe communiste vote sans hésitation ce budget, tout en réaffirmant sa détermination à le voir continuer sa progression afin de répondre réellement aux besoins.

Le montant de ce budget équivaut à la prime versée aux cliniques privées. Le Gouvernement paraît donc toujours ne pas faire grand cas de sa jeunesse et de ses sportifs.

Nous saluons votre ténacité, et la politique qu'avec le plus petit budget de l'Etat, vous avez su mener au service de nos sportifs et de nos jeunes (Exclamations sur les bancs du groupe communiste et du groupe socialiste).

M. Edouard Landrain - On dit volontiers, surtout après avoir entendu Alain Néri et Patrick Leroy, que vous avez été un ministre de la jeunesse et des sports acceptable. Vous avez géré la disette en bonne ménagère (Exclamations sur les bancs du groupe communiste et du groupe socialiste). D'autres prétendent au contraire que vous avez mis vos cinq budgets successifs davantage au service de la propagande que de l'action sur le terrain. De fait la portion congrue dévolue au sport ne s'est guère accrue dans le budget de l'Etat.

En 1997, les crédits de votre ministère s'élevaient à 2,964 milliards. En 2002, ils atteignent 3,535 milliards, soit une hausse de 9,26 % en cinq ans, inflation comprise ! Voilà la réalité.

M. le Rapporteur pour avis - Citez les valeurs absolues !

M. Edouard Landrain - Vous espériez à l'origine doubler votre budget. Pourtant, il ne représente aujourd'hui comme en 1997 que 0,2 % du budget général. Nous espérions un rattrapage analogue à celui du budget de la Culture, qui atteint désormais 1 %. Le nôtre est désormais cinq fois moindre.

On peut s'inquiéter de l'avenir, et en particulier de celui du FNDS. Depuis longtemps, Bercy lorgne sur ses crédits et voudrait les dissoudre dans le budget général. La loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances est inquiétante à cet égard. Elle prévoit que seules pourront être affectées les recettes qui « sont par nature en relation directe avec les dépenses concernées ». Cette règle devant entrer en vigueur le 1er janvier 2006, le sort du FNDS dépendra du jugement qui sera porté sur l'existence ou non d'un tel bien.

Doit-on entendre que seules les recettes provenant du sport pourront être destinées au sport ?

La cogestion du monde sportif, réalisée par le FNDS actuel, perdurera-t-elle ?

Avez-vous des garanties sur la pérennité des crédits ?

Ne pensez-vous pas qu'un amendement spécifique au sport puisse s'avérer utile ?

Sans le FNDS, il n'y aura plus du tout de politique sportive en France. On peut même s'interroger sur l'utilité du ministère. Ce budget semble tracer la chronique d'une mort annoncée.

M. le Rapporteur pour avis - Par vous !

M. Edouard Landrain - Resteront les collectivités territoriales, mais elles ne pourront pas indéfiniment assumer toutes les charges de l'Etat !

Pourtant, le sport, c'était en 1999 25 millions de pratiquants, 13 millions de licenciés, 1,7 % du PIB et 22 milliards d'euros. Mais sur ce dernier chiffre, équivalent à 147 milliards de francs, de 16 à 19 milliards de francs proviennent du travail des bénévoles, 74 de contributions des ménages et 43 des communes ! Sans eux, nous serions dans le noir absolu.

Dans votre budget, le titre III, celui qui sert à faire bouillir la marmite, concentre deux tiers des crédits. Pour tenter, pour oser faire de la politique sportive, il ne nous reste qu'une misère de 211 millions d'euros ! La baisse de 56 % des crédits de paiement vous empêchera à court terme de tenir vos engagements. Mais vous avez reporté les charges sur les prochaines années : douze, onze puis vingt-deux milliards d'euros de 2003 à 2005 ! Vous vivez à crédit.

Le FNDS n'a donc jamais été aussi indispensable, même si le boni de la coupe du monde a bien aidé et si les 5 % sur les droits télé sont prometteurs.

La loi Evin est toujours applicable, même si les clubs l'ignorent superbement : les buvettes fonctionnent, elles font vivre les clubs et la santé publique n'en est pas plus menacée. Cette loi était d'ailleurs si mal fagotée que Bruxelles s'y attaque en dénonçant une violation du droit européen ! A force de vouloir donner des leçons, on doit faire marche arrière. En matière de publicité télévisée, M. Frits Bolkenstein, le commissaire européen, n'accorde qu'un délai de grâce !

Reste le bénévolat.

En ce centième anniversaire de la loi sur les associations, nous entrons dans une nouvelle approche du bénévolat, plus humaine, plus généreuse, liée sans doute au temps libéré et au rajeunissement des retraités. Le futur bénévole recherche une relation humaine. Il ne s'agit plus de mener une activité pour les jeunes, mais avec les jeunes, de les rendre acteurs et non simplement consommateurs.

Le sommet de Nice où, pour la première fois, ces sujets ont été abordés, fut révélateur à cet égard. Pour la première fois, on a reconnu et encouragé le bénévolat dans son rôle économique et social.

Or vous avez eu bien du mal à obtenir que le Premier ministre honore sa parole. Une indemnité d'1,71 franc sera déductible par kilomètre. Mais cela ne sera profitable qu'à la moitié des Français qui payent des impôts ! Comment comptez-vous encourager l'autre moitié ? Et que dire de l'article 80 terdecies de la loi de finances, qui soumet à l'impôt su le revenu les indemnités, remboursements et allocations forfaitaires ? Non seulement le Premier ministre ne tient pas, en vérité, ses engagements vis-à-vis des bénévoles, mais ceux qui perçoivent quelque dédommagement vont devoir le déclarer - et peut-être, par là -même, devenir imposables !

Pour s'investir, le nouveau bénévole cherche un environnement favorable. Dans nos quartiers, dans nos zones rurales, il serait profitable de faire revivre ce que l'on appelait les patronages, qui apporteraient sans doute des réponses à nombre de problèmes sociaux et culturels.

Quelques questions pour terminer. Qu'en est-il des sports de pleine nature, que nous avons eu tant de mal à faire figurer dans la loi ? Où en sont les décrets ? La réflexion interministérielle est-elle engagée ? Votre action contre le dopage, dont nous vous donnons acte, a-t-elle débouché au plan international ?

Le sport français triomphe dans de nombreuses disciplines, mais les moyens de votre ministère restent malingres, même si vous affichez une satisfaction inquiétante. Bercy veille ! Que peut-on alors espérer pour les clubs professionnels français, dont le régime est bien différent de celui de leurs concurrents ? Que peut-on attendre à propos de l'impôt des sportifs et des bénévoles et d'un taux privilégié de TVA sur le sport, qui s'applique déjà dans d'autres pays ? Ne soyez pas étonnée que le monde sportif, exaspéré, descende, comme presque tout le monde, dans la rue pour obtenir une juste reconnaissance.

L'image d'une grève du sport sur les terrains le week-end plane dans l'air.

Le groupe UDF votera contre ce budget anémique et indigne.

M. Renaud Muselier - Très bien !

M. Charles Ehrmann - C'est la vingtième fois que je participe à la discussion du budget de la jeunesse et des sports, et pour moi, la dernière. Voici donc une sorte de testament sportif, le bilan du doyen de l'Assemblée nationale, qui a assisté aux J.O. de Colombes en 1924, où il a vu Paavo Nurmi le Finlandais.

Ma passion pour le sport, je la dois à un homme exceptionnel, M. Fischer, qui a été mon professeur de gymnastique pendant neuf ans. Le stade de Melun porte d'ailleurs son nom. Il doublait le temps qu'il nous devait, nous faisait participer à tous les championnats. Ainsi il m'emmena à Orléans, en 1929, au championnat de France scolaire et universitaire de gymnastique, après m'avoir offert à moi, orphelin de guerre et boursier de la Nation, un costume neuf. Car il remplissait aussi les fonctions d'économe.

Grâce à lui, je fus troisième au championnat de France à Alger en 1930.

Il est l'exemple du bénévole parfait. Il m'a donné le goût de l'effort et m'a permis de réussir des études supérieures.

J'ai rêvé, en pensant à lui, de couvrir la France de stades, de piscines et de gymnases.

Hélas, devenu professeur dans un lycée de qualité où l'on avait installé le gymnase dans un sous-sol, j'ai compris que le sport n'était pas une priorité pour la République, même si elle en parlait beaucoup.

Restant dans l'optique d'une France rurale, où la marche et les travaux des champs suffisaient, elle n'a jamais voulu l'imposer comme élément fondamental de l'éducation.

Aujourd'hui, dans une France urbanisée à plus de 80 %, où le sport est une nécessité physique et morale, l'école maintient un complexe de supériorité de la tête sur les jambes. Nous n'avons malheureusement pas la même culture que les anglo-saxons ou les germaniques. Nous sommes latins, plutôt supporteurs qu'acteurs.

Seulement 20 % des étudiants de Nice sont licenciés. Et notre pays n'a obtenu aucune médaille en athlétisme à Sydney, ce qui n'était jamais arrivé à un grand pays.

Avec la reconstruction et les trente glorieuses, la France a essayé de changer. Je ne cite aucun parti, parce que le sport est au-dessus des partis.

L'Etat a réalisé un plan de 1 000 piscines et 1 000 gymnases. Il a triplé le nombre des professeurs d'éducation physique et des stades, multiplié par 20 celui des piscines. Le FNDS a été voulu par Pierre Mazeaud en 1975 et créé en 1979 pour aider le sport de masse, mais ce sont les collectivités locales qui ont fait le plus gros effort.

La ville de Nice avait pris du retard en raison du coût du terrain. On vendait parfois des installations - des vélodromes - pour construire des immeubles !

Lorsque je devins adjoint aux sports en 1965, elle ne comptait aucune piscine. Sur une classe de 35 élèves, seuls 5 savaient nager. Chaque année, plusieurs enfants se noyaient durant l'été.

J'ai la fierté de dire que nous avons construit 10 piscines, 20 terrains de football, 26 installations polyvalentes, sans compter les terrains de tennis, gymnases et cabanons de boulistes, plus un stade d'athlétisme inauguré en 1973 comme « le plus beau de France depuis Colombes », selon le secrétaire l'Etat de l'époque, Pierre Mazeaud.

M. le Rapporteur pour avis - Et qui porte votre nom !

M. Charles Ehrmann - Et pourquoi pas ?

Il y avait une piste de 40 mètres, une autre de 150 et, de retour de Montréal, Guy Drut a réalisé là son meilleur temps de l'année, en 1976,... après avoir critiqué le sens du vent ! (Sourires)

M. Alain Calmat - Il soufflait de droite !

M. Charles Ehrmann - Tout cela, nous l'avons fait avec une subvention de l'Etat de seulement 12 % et sans aide pour l'achat des terrains. Cela nous a coûté 30 fois plus cher que le stade Gagarine à la ville du Havre... mais ce stade s'appelait « parc Charles-Ehrmann » !

M. le Rapporteur pour avis - Tu as toujours été un piéton de l'espace !

M. Charles Ehrmann - Et, en plus, nous avons payé la TVA !

Mais la récompense est venue : nos équipes de football, de rugby, de basket sont arrivées en première division ; nos tennismen ont été quatre fois champions de France - il faut dire que, comme le Racing, je payais les études de ceux qui étaient une seconde série, de sorte qu'ils restaient à Nice. C'était la belle époque : puisse-t-elle revenir ! Mais j'en doute.

Aux jeux olympiques de Moscou, en 1980, l'équipe de France féminine d'escrime a obtenu quatre médailles d'or : trois étaient Niçoises. L'Etat n'avait donné que 24 000 F mais l'adjoint au sport avait fait venir un professeur de qualité exceptionnelle et fourni la salle. Et Ferrari, à qui vous avez serré la main à Sydney, Madame la ministre, savez-vous qu'il est encore dans l'équipe championne du monde ? Mais il est, hélas, parti à Paris, comme tous -sauf moi qui ai fait le parcours inverse !

Avec la crise du pétrole, les collectivités ont beaucoup relâché leur effort : pas une piscine n'a été construite à Nice depuis mon départ, en 1984, alors que le nombre de licenciés augmentait. Beaucoup de sportifs attendaient donc beaucoup de la promesse faite en 1981, de porter le budget à 1 % du budget de l'Etat. Mais celui-ci, s'il a trouvé 15 milliards pour l'opéra de la Bastille, La Villette et le Louvre et 8 milliards pour la grande bibliothèque, et porté de 0,34 % à 2 % le budget de la culture, n'a rien fait pour la jeunesse et les sports. Quant au FNDS, il a été utilisé pour Albertville, pour le stade de France et pour les Jeux méditerranéens, mais non pour le sport de masse.

J'aurais à tout le moins aimé que vous bénéficiiez d'un peu des 500 milliards de rentrées fiscales supplémentaires : pensez à ce tout ce que vous auriez pu faire avec 5 ou 10 milliards. Car vous avez toutes les qualités : il ne vous manque que l'oseille, le fric !

Quand on construit, il faut entretenir. Pour une piscine de 135 millions, il faut prévoir 1 750 millions pour les garder en état. Dans ces conditions, avec la crise, les collectivités ont cessé d'entretenir. Il faudra donc que restiez ministre longtemps si l'on ne peut réaliser que 20 ou 30 bassins par an !

M. le Rapporteur pour avis - Nous nous en occupons !

M. Charles Ehrmann - Tous, nous vous en supplions : obtenez que ce budget soit porté à 1 %, c'est-à-dire à 17 milliards. Faites aussi que le FNDS reste hors d'atteinte de Bercy, continuez à lutter contre le dopage et à améliorer le statut des 1 200 000 bénévoles. Développez surtout le sport à l'école ! Dans les collèges, l'anarchie et la rébellion se développent. Les contrats éducatifs locaux ne suffisent pas à les enrayer : l'école ne peut se rénover que de l'intérieur. Reprenez donc l'idée de Guy Drut, celle des temps aménagés ! J'y ai cru pour ma part, votant alors pour la seule fois le budget, mais l'Etat n'a pas mis assez de fric et les villes n'ont pas voulu compléter sa participation. La présence de professeurs d'éducation physique deux ou trois après-midi par semaine permettrait de canaliser l'énergie dévastatrice des élèves : fiers d'avoir représenté la France, ces anciens champions apprendraient aux élèves français et étrangers à chanter la Marseillaise, et à couvrir de leurs chants les sifflets de certains sauvageons !

Pour avoir le c_ur de vous battre, songez à ce que disait Paul Valéry : « Le sport est l'intelligence en action ». Votre doyen, quant à lui, ajoute : après le pain et l'éducation, c'est le premier besoin du peuple.

En attendant que vous obteniez le 1 %, nous ne voterons pas de budget, à notre grand regret ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF, du groupe DL et du groupe du RPR).

Mme Marie-George Buffet, ministre de la jeunesse et des sports - Merci, Monsieur le doyen, pour cette intervention qui reflétait votre passion pour le sport, merci d'avoir dit votre rêve de couvrir la France de piscines et de stades : vous nous avez donné envie de continuer le combat pour un sport accessible à tous, pour un sport porteur de valeurs et de plaisir ! Je vous sais particulièrement gré d'avoir insisté sur le sport à l'école, car c'est là que les jeunes garçons et filles peuvent prendre goût à sa pratique.

Ce projet de budget est en augmentation comme les quatre précédents, le FNDS et le FNDVA continuent également de croître -- de 50 % pour la part régionale du premier, grâce au prélèvement de 5 % sur les bénéfices de la Coupe du monde : nous avons pu ainsi soutenir plus de 1 700 projets !

Au total, le mouvement sportif, les jeunes et les associations bénéficieront de 754 millions d'euros. Vous êtes amenés à juger que c'est trop peu mais la progression des crédits, qui porte reconnaissance de la valeur du sport, devrait tout de même amplement justifier un vote positif !

Si le sport a besoin d'un budget public important, c'est pour défendre ses valeurs propres. L'argent privé, nécessaire, ne saurait seul maintenir celles-ci. Cela étant, il faut reconnaître que de gros problèmes se posent pour l'entretien et la réhabilitation des équipements.

Ce budget tend d'abord à faciliter l'accès de tous à la pratique sportive et à développer l'emploi et la formation de jeunes : ce sont enfin, 275 000 jeunes qui bénéficieront du coupon sport. Vous avez cependant raison, Monsieur Leroy, de souhaiter améliorer la situation des familles à cet égard, certains enfants n'étant pas aidés en raison de leur âge.

Les bourses BAFA et BAFD, dont les crédits augmentent de près de 24 %...permettront à davantage de jeunes de recevoir une formation professionnelle Jeunesse et sports.

Monsieur Leroy, vous demandez que les 55 000 jeunes qui ont bénéficié d'emplois-jeunes dans le mouvement sportif et associatif reçoivent une formation : nous nous y employons. Beaucoup obtiendront un brevet professionnel.

Notre effort de formation s'appuie également sur les offices franco-allemand et franco-québécois de la jeunesse.

Notre deuxième priorité va à la poursuite du dialogue avec les jeunes et au développement de l'éducation populaire. A ce propos, Monsieur Muselier, j'observe que l'agrégat sport continue à augmenter : nous n'opérons qu'un tout petit rattrapage en faveur de l'agrégat éducation populaire et formation.

Le Conseil national de la jeunesse, créé en 1998 et reconnu maintenant par la loi, est devenu un espace de réflexion, d'expression et de proposition. Les jeunes apprennent à exercer leur citoyenneté, à travailler avec les institutions, à définir les moyens qui leur permettront d'atteindre leurs objectifs. Et cela nous aide à décider. J'espère donc que ce Conseil va s'enraciner dans les départements et communes.

Le réseau information-jeunesse est conforté, grâce à une progression de 9 % de ses crédits ; 1 600 structures reçoivent plus de 5 millions de jeunes ! Nous avons également veillé à doter les 500 « points cyb » d'animateurs qualifiés, pour éviter l'opposition d'une société de l'information à deux vitesses.

Il faut certes soutenir encore davantage les bénévoles, mais nous avons été les premiers à prendre en leur faveur des mesures importantes. Je note que nous entendons progresser encore, notamment en matière de congés.

Pour les associations nationales de jeunesse et d'éducation populaire, la barre des 10 millions d'euros va être franchie et nous poursuivons l'effort en faveur des postes FONDEP.

Troisième objectif : soutenir le sport dans sa diversité. Favoriser l'accès de tous à une politique reste pour moi la priorité des priorités. D'où le coupon sport, le renforcement de l'aide aux clubs amateurs, l'aide au sport féminin et au sport en entreprise.

Pour lutter contre la violence, nous avons mis en place dans 26 départements le système des officiers de police référents ; nous avons lancé avec l'appui de champions une campagne « Hors-jeu la violence ! », mais les événements montrent qu'il faut accentuer l'effort. Les moyens qui y sont consacrés croissent donc.

Les grandes manifestations sportives recevront un soutien renforcé. La principale d'entre elles, les Jeux olympiques et paralympiques d'hiver de Salt Lake City, bénéficiera de 3,35 millions d'euros pour 158 sportifs engagés, dont 35 au titre des paralympiques. Nous avons fait en sorte de pouvoir veiller à la sécurité de nos sportifs, en liaison avec le CIO et le comité des jeux olympiques d'hiver, et je me rendrai sur place dès le début des jeux. Nous accueillerons par ailleurs de nombreux championnats en France, et nous avons commencé dès ce budget à provisionner les championnats du monde d'athlétisme qui auront lieu en 2003 au stade de France. J'entends également veiller à la préparation des équipes de France de haut niveau. En même temps, nous accompagnerons les conditions d'accueil et d'encadrement des sportifs mineurs dans les filières de haut niveau et les centres de formation, conformément à la loi que vous avez votée. L'aide technique aux fédérations sportives est consolidée : nous avons 403 agents contractuels et 1 200 fonctionnaires placés auprès des fédérations et de leurs organismes déconcentrés. La question de leur statut et de leur carrière a été posée, et nous avons constitué un nouveau corps qui répondra à certaines attentes des cadres techniques.

Quant à l'INSEP, après un effort de revalorisation constant depuis 1998, il verra s'effectuer tous les travaux nécessaires à sa modernisation. Enfin, en 2002, chaque région disposera d'un CREPS.

M. le rapporteur a soulevé la question du stade de France. Nous avons demandé à un haut fonctionnaire une étude sur la convention. Elle nous ouvre malheureusement peu de pistes pour une renégociation ; nous continuerons à travailler sur ce problème.

Mon quatrième objectif est l'intensification de l'action pour la santé des sportifs et contre le dopage. Je ne reviens pas sur nos efforts de mise en _uvre de la loi, qui est aujourd'hui entièrement opérationnelle. Toutes les antennes régionales seront en place avant la fin du premier semestre 2002. Vous avez posé le problème du laboratoire ; il est exact qu'il a pris du retard. Nos efforts de modernisation ont cependant permis de rattraper ce retard pour moitié. Oui, il faut plus de contrôles inopinés, et des contrôles plus équilibrés entre les différentes fédérations ; mais bien sûr nous avons voulu répondre à la demande de la Fédération française de cyclisme. Les moyens consacrés à cet objectif progressent de 18 %. Se pose par ailleurs le problème de la coordination au sein de l'Union européenne et de l'Agence mondiale antidopage. Lundi prochain les ministres des sports de l'UE se réuniront à Bruxelles. Nous avons franchi une nouvelle étape quant au financement de l'agence. Le 11 décembre 2001, une réunion des ministres des sports de la planète, avec l'UNESCO, devrait permettre de poser le problème d'un support international pour l'Agence. Mon objectif est de tendre vers une harmonisation des procédures et des législations.

M. Ehrmann a posé le problème de l'école et des rythmes scolaires. Les contrats éducatifs locaux participent à cette démarche et sont un véritable outil de développement local. Ils bénéficient aujourd'hui à 25 % de la population scolaire. Ils reposent surtout sur la contribution de la Jeunesse et des sports, mais aussi d'autres ministères, dont il faudra élargir la contribution financière pour développer ces contrats sur tout le territoire.

Un mot sur le Musée national du sport : dès 2002 nous procéderons au transfert des réserves, et en 2003 un nouveau musée verra le jour à Saint-Denis, à proximité du stade de France. Ce sera l'occasion, Monsieur Ehrmann, de rappeler ce qu'a été l'histoire du sport dans notre pays.

Ce projet de budget s'inscrit dans la continuité des orientations que j'ai souhaité donner à mon ministère. Je suis en effet convaincue que les réussites ne sont possibles que si elles s'inscrivent dans le long terme.

Je n'ai pas répondu à M. Landrain, préférant utiliser ce temps précieux pour aller faire mon ménage... Je crois que nous avons accompli un bon travail législatif, que ce soit pour l'accès de tous au sport, pour le mouvement sportif et le sport professionnel, ou pour la santé des sportifs, et je vous en remercie (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et du groupe socialiste).

Les crédits des titres III et IV de l'état B, puis ceux des titres V et VI de l'état C, successivement mis aux voix, sont adoptés.

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RECHERCHE (Nouvelle procédure)

M. Christian Cuvilliez, rapporteur spécial de la commission des finances - Un budget s'apprécie par ce qu'il contient... et par ce que l'on souhaiterait qu'il contienne. Et même si le mieux, dit-on, est l'ennemi du bien, il faut bien reconnaître que la trajectoire budgétaire pour 2002, qui certes confirme le redémarrage en 2001 d'une politique nationale de développement de la recherche scientifique, ne suffit pas encore à combler les retards accumulés, singulièrement entre 1994 et 1998. Elle ne répond pas aux attentes de la communauté scientifique, elle-même hétérogène et qui parfois redoute de se voir ignorée dans certaines filières dont les résultats nous avaient placés au premier rang des pays développés.

Vous avez participé à la rencontre d'Édimbourg, Monsieur le Ministre, et vous allez participer avec le Président de la République et le Premier Ministre au colloque de la Sorbonne à l'occasion du quarantième anniversaire du CNES. Et pourtant les crédits de cet établissement n'augmentent pas au même rythme que ceux des autres établissements publics ; ils ont cessé d'augmenter depuis plusieurs années. Nous savons, certes, que l'Agence spatiale européenne, au financement de laquelle la France, via le CNES, participe à 50 %, devrait être le relais de notre politique spatiale et obtenir dans la coopération et la compétition internationales un effort mieux partagé des partenaires de l'Union européenne. Mais nous savons aussi que les programmes en cours ou en préparation, comme Galileo, sont des facteurs de dynamisation considérables de nos industries spatiales, de notre technologie et de la recherche proprement dite, en amont des applications. N'y-a-t-il pas un risque à laisser prévaloir sur une stratégie nationale fiabilisée par les fonds publics de l'Etat et qui a fait ses preuves, une coopération européenne encore très velléitaire ou une orientation finalisée par des critères purement économiques et financiers ?

De même le CEA constitue l'un des fleurons de la recherche, avec sa structure intégrée sur la base de l'intérêt général et d'une conception de la recherche fondamentale et appliquée dégagée des contingences de la profitabilité. N'y-a-t-il pas un risque à fragiliser la filière nucléaire, alors que les recherches sur l'aval de la filière sont urgentes pour la crédibiliser encore plus, et que - quelles que soient les opportunités qu'offre la diversification des sources d'énergie - la filière nucléaire, quoique très éloignée des spéculations comptables sur les temps de retour d'investissement, représente pour une humanité de dix milliards de personnes dans le siècle qui vient, une réponse incontournable ? Aux Etats-Unis, ce modèle antinomique, un changement de cap s'amorce. Allons-nous nous laisser distancer dans un domaine où nous avions pris de l'avance ?

Loin de moi l'idée de contester les cinq champs prioritaires de la recherche que vous avez retenus. Ils correspondent à des besoins actuels indiscutables pour ce qui touche au vivant, à la santé, aux maladies orphelines, ou bien aux STIC, à cette sidérante propagation des moyens d'échange de la connaissance, qui représente un formidable outil de libération - et bien sûr aussi un risque d'aliénation - ou encore aux sciences sociales ou à l'environnement. Mais ces champs prioritaires absorbent l'essentiel de la valeur ajoutée du budget 2002. Et le plan pluriannuel de recrutement que vous lancez - et que nous approuvons d'autant plus qu'avec les intéressés nous le réclamions depuis longtemps - privilégie lui aussi ces champs prioritaires.

Je sais que gouverner c'est choisir, arbitrer entre le souhaitable et le possible. Et je vous rends cette justice de vous être assuré les concours précieux des experts, scientifiques ou politiques, pour que vos choix soient aussi adéquats que possible avec les besoins et les moyens. Nous vous soutiendrons donc dans votre démarche, qui devra être poursuivie et portée au niveau d'une priorité nationale.

Rien ne servirait mieux cette ambition légitime que l'organisation d'une vaste consultation de tous les publics - y compris les plus jeunes, dont on dit qu'ils hésitent à entrer dans la voie des études scientifiques parce qu'elles sont difficiles et ne comportent plus assez de garanties d'emploi et de reconnaissance des compétences - sous forme d'assises pour la recherche au XXIème siècle. Dans le débat citoyen qui s'organiserait autour des enjeux du progrès humain, à contre-courant des obsessions libérales de l'OMC comme des offensives obscurantistes qui sévissent ici ou là, l'adhésion d'un grand nombre de femmes et d'hommes à un projet responsable du développement de la recherche, ce serait sans doute bien ...pour aller vers le mieux (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste).

M. François Brottes, suppléant M. Pierre Cohen, rapporteur pour avis de la commission de la production pour la recherche et la technologie - Impérativement retenu parmi les siens pour gérer les suites de la catastrophe de Toulouse, mon collègue et ami Pierre Cohen m'a demandé de vous transmettre ses excuses et de présenter son rapport en son nom.

En progression de 2,2 %, le projet de budget civil pour la recherche et le développement reflète la préoccupation de renouveau et de rattrapage qui s'est manifestée depuis 1997. La France reste ainsi le pays de l'OCDE où la part des financements publics, civils et militaires rassemblés, dans la recherche est la plus importante. Soyez félicité, Monsieur le ministre, de l'effort que vous avez engagé depuis deux ans.

Ce projet de budget a été construit autour de cinq priorités.

L'emploi, d'abord.

Avec la création de 463 emplois dont 100 chercheurs et 363 ITA, ce budget confirme la progression engagée depuis 1999. En prenant en compte les recrutements prévus dans l'enseignement supérieur, plus 1 900 postes seront créés cette année, soit 4 361 postes en deux ans.

Par ailleurs, le départ à la retraite de nombreux chercheurs et ingénieurs nécessiterait une planification stricte des recrutements et une anticipation pour ne pas fragiliser le potentiel de la France. Le plan décennal de gestion prévisionnelle et pluriannuelle de l'emploi scientifique que vous avez mis en place prévoit ainsi la création de 1 000 postes dont 200 seront rétribués à la fin de l'exercice. Il correspond tout à fait aux attentes exprimées dans le rapport Cohen-Le Déaut et par l'ensemble de la communauté scientifique.

Deuxième priorité : les jeunes scientifiques.

Par le plan de gestion pluriannuel, de nouvelles perspectives professionnelles s'ouvrent à eux. Souvent maintenus trop longtemps dans des situations de « post-doc » en France ou à l'étranger, ils pourront ainsi élaborer un projet professionnel sur le territoire national.

Les allocations de recherche sont enfin revalorisées, tandis que le nombre des allocataires est passé de 3 600 en 1996 à 4 000 à la rentrée 2001, soit une hausse de 16 %.

D'autres actions visent à aider les jeunes chercheurs à trouver toute leur place dans le dispositif de la recherche. Pour les responsabiliser, faciliter leur autonomie, un concept de « jeune équipe » a été créé dans le champ universitaire mais aussi au sein des organismes, et le ministère vient de lancer des actions concertées incitatives dites ACI jeunes chercheurs.

Troisième priorité : les moyens des laboratoires.

Les autorisations de programme des établissements publics de recherche sont en hausse de 6,3 %. Les laboratoires publics peuvent aussi bénéficier de soutien du fonds national de la science et du fonds de recherche technologique. La recherche universitaire bénéficie pour sa part d'une hausse de 19,3 %. Ces dotations participent à la modernisation de l'appareil de recherche, d'autant que cette année, Monsieur le ministre, vous avez su mettre en rapport les CP avec les AP précédentes.

Quatrième priorité : le soutien à des disciplines prioritaires.

En 1999, le comité interministériel de la recherche scientifique et technique a retenu trois secteurs stratégiques : les sciences de la vie, les sciences et technologies de l'information et de la communication, l'environnement.

Les fonds d'intervention sont des outils souples et transversaux qui permettent de soutenir ces secteurs porteurs. Le fonds national de la science voit ses AP passer de 76,2 millions d'euros en 1999 à 152 en 2002. Destiné à des organismes publics et privés sans but lucratif, il finance des travaux de recherche fondamentale dans des domaines susceptibles de connaître de nombreuses applications. Le fonds de recherche technologique, instrument d'incitation au partenariat entre recherche publique et recherche privée, est conforté à son niveau de 2001. Nous avons fait évoluer ce fonds vers les PME-PMI, ainsi que l'avait souhaité votre prédécesseur.

Les contrats de plan Etat-régions 2000-2006 affichent également un soutien sans précédent en faveur de la recherche et de la technologie, tant dans les laboratoires que dans les industries.

Dernière priorité : le soutien à l'innovation et à la recherche industrielles, en particulier dans les secteurs de l'aéronautique et de l'espace. Comme vous pouvez vous en douter, Pierre Cohen est satisfait que le budget du CNES soit maintenu. La France pourra ainsi continuer à jouer un rôle moteur en Europe dans ce domaine.

La commission de la production invite donc l'Assemblée à voter ce budget de la recherche (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Pierre Lasbordes, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales pour la recherche - N'ayant pas le temps de développer les propositions que j'ai faites, je me contenterai d'analyser les chiffres.

Les crédits de la recherche pour 2002 ont été rejetés par la commission des affaires culturelles. En effet, la « petite » augmentation de 0,9 % par rapport à 2001 correspond en réalité à une « petite » diminution de 0,7 % si l'on tient compte de la hausse des prix de 1,6 %.

La présentation que vous faites de la croissance du BCRD n'est pas très objective : en fait, le BCRD rapporté au PIB est en diminution constante depuis 1991.

La recherche ne constitue manifestement pas une priorité nationale. Nos concurrents font beaucoup mieux depuis 1995, l'effort recherche-développement n'a augmenté que de 0,6 % en France, mais de 3 % dans l'ensemble de l'Union européenne. La France est également en queue pour le taux de croissance de la population de chercheurs : la création de postes que vous nous annoncez ne représente qu'une croissance de 0,6 % des effectifs de chercheurs des EPST et de 1,3 % de ceux des personnels ITA. En outre, ces créations d'emplois ne sont budgétées qu'à compter du 1er septembre 2002.

Elles sont « gagées » par une diminution équivalente des moyens budgétaires alloués aux EPST, dont les subventions de fonctionnement sont réduites de 15 millions d'euros dès le 1er janvier 2002. En outre, des annulations de crédits 2001 ont déjà été réalisées à hauteur de 18,2 millions d'euros. Ces recrutement annoncés comme la première étape d'un plan décennal ne sont pas à la hauteur des besoins. Ce n'est pas un plan qu'il nous faut, mais une loi de programmation pluriannuelle pour l'emploi scientifique, que nous sommes nombreux à réclamer et qui intégrerait créations, redéploiements et mobilité.

Vous souhaitez attirer les jeunes vers la recherche. C'est très bien. Je me félicite que le montant de l'allocation de recherche soit augmenté de 5,5 %, mais une indexation sur le point de la fonction publique, serait préférable.

Pour attirer les jeunes, il faut aussi leur donner des responsabilités, aider les doctorants à mieux préparer leur insertion dans la recherche publique ou dans le monde des entreprises. Il faut développer des incitations financières, revaloriser les salaires pour faire revenir les jeunes étudiants français qui sont partis faire un stage à l'étranger. On pourrait aussi créer des postes d'« attachés temporaires de recherche ».

Quant aux moyens des laboratoires publics, ils sont bien insuffisants. Pour les EPIC, depuis 1998, les dotations versées ont diminué de 6 %.

Par ailleurs, les modes de passation des marchés publics constituent pour nos organismes de recherche un gros handicap. Je propose de mettre en place un régime dérogatoire, applicable au moins aux EPST pour les achats de petites fournitures et matériels scientifiques d'un montant inférieur à 10 000 euros. Bien entendu, un contrôle a posteriori serait réalisé. Développons une culture de confiance plutôt que de défiance...

Vous nous annoncez une progression de crédits particulièrement importante pour les thématiques prioritaires. En réalité, par rapport à 2001, la part du BCRD consacrée à l'environnement et à l'énergie n'a pas bougé, celle des sciences de la vie n'a augmenté que de 0,1 %, celle des STIC de 0,3 % et celle de l'espace a diminué de 0,5 %. Les moyens affichés procèdent pour l'essentiel de redéploiements. Les emplois ne sont pas remplacés dans les disciplines plus traditionnelles comme les mathématiques ou la physique, alors que leur recherche fondamentale est essentielle.

Enfin, vous souhaitez poursuivre les actions en faveur de la recherche industrielle et de l'innovation. Nous vous soutenons dans cette démarche. La loi du 12 juillet 1999 est un des leviers de cette politique, mais qu'attendez-vous pour mettre en place les SAIC ? J'ajoute que pour le secteur des biotechnologies, il est nécessaire pour rattraper notre retard d'accroître les incitations fiscales à destination des acteurs concernés.

Avant de conclure, Monsieur le ministre, je voudrais vous dire ma satisfaction de voir démarrer le projet SOLEIL. On vous le doit.

L'ensemble de ces analyses et propositions souligne la nécessité d'un débat approfondi avec la communauté scientifique et au Parlement. Je regrette que vous n'ayez pas profité de ces deux années pour le lancer, d'autant plus que vous avez exprimé à plusieurs reprises dans la presse le souhait de voir les personnalités politiques s'intéresser à la recherche. C'est sans doute pour réclamer un tel débat que la commission des affaires culturelles a exprimé un avis défavorable sur vos crédits, insuffisants même s'il y a une inflexion depuis votre arrivée.

M. Renaud Muselier - En 1970, 75 % des enfants leucémiques mouraient faute de traitement efficace. Aujourd'hui, 75 % des enfants leucémiques guérissent.

Plus que jamais, nos concitoyens sont sensibles aux avancées de la recherche. Ils espèrent des progrès notables en matière de maladies génétiques ou de recherche sur le cancer. Ils manifestent des inquiétudes au sujet de l'expansion des OGM, de la pollution, du bioterrorisme. La recherche française constitue donc un enjeu majeur.

Alors que nous étions en droit d'attendre un budget fondateur, vous nous présentez un budget de gestion.

La gauche, malgré ses discours en faveur de la recherche, a fait diminuer le pourcentage du PIB qui y est consacré, en dépit d'un effort de plus en plus important des entreprises privées.

La recherche en matière de santé est particulièrement défavorisée : de tous les pays de l'OCDE, la France est celui qui investit le moins dans ce domaine.

Dans son discours de l'Union, le Président des Etats-Unis insiste chaque année sur la recherche médicale. Le Président Clinton a annoncé et réalisé le doublement tous les quatre ans de son financement. Le Président Bush a repris cet objectif.

La France ne peut être compétitive sans une augmentation massive du financement de la recherche.

En outre, la France n'attire plus les jeunes chercheurs. Nous constatons une baisse importante du nombre des inscrits et des diplômés en DEA. L'importance des inscriptions en sciences humaines et sociales donne une image trompeuse de la réalité. La situation est dramatique dans les sciences dures.

Selon des chiffres de votre ministère, le nombre global des inscrits en DEA a diminué de 13 % et celui des étudiants en sciences de la terre de 8 % par rapport à 1993.

En 1999, on dénombrait 11,6 % de diplômés de DEA de moins. Entre 1994 et 1999, le nombre de thèses soutenues a diminué de 26 % en mathématiques, de 20 % en chimie, et de 16 % en physique. En 2000, le nombre des thèses en cours a diminué de 3,1 %.

En 2004, il n'y aura que 9 500 docteurs, soit une baisse de 7,1 % de leurs effectifs. Les étudiants étrangers sont de moins en moins tentés de venir poursuivre leurs études en France.

M. Philippe Séguin - C'est vrai.

M. Renaud Muselier - Actuellement de 24,9 %, la proportion des étudiants étrangers inscrits en thèse en France continue de baisser depuis 1993. Ceux qui proviennent de pays non membres de l'Union européenne ne représentent plus que 19,5 % des doctorants, contre 25,6 % en 1993. Quant au nombre des étudiants de l'Union européenne, après avoir légèrement progressé entre 1993 et 1997, il tend aujourd'hui à baisser.

Entre 1995 et 1999, le nombre des docteurs étrangers a chuté de 8,9 %. En 1992, un docteur sur trois était un étranger ; en 1999, cette proportion n'était plus que d'un sur cinq !

Le financement des thèses n'a bénéficié qu'à 62,7 % des docteurs en 1999, soit une proportion identique depuis 1994 !

S'agissant des thèses en cours, 48,9 % des doctorants bénéficient d'un financement, mais le nombre global des inscrits a baissé de 3,7 %.

Le devenir des chercheurs demeure préoccupant. Les structures sont trop rigides dans le cursus actuel. On recrute trop de chercheurs avant l'âge de 30 ans.

Notre cadre juridique ne permet pas d'offrir des postes contractuels dans l'intervalle entre la thèse et le recrutement.

La qualité de la recherche repose sur le dynamisme des plus jeunes, les doctorants et les jeunes en situation post-doctorales. La réussite des Etats-Unis est liée à leur capacité d'attraction. La rigidité du code du travail nous empêche de trouver des solutions contractuelles. Il faut que la France redevienne un pays attrayant.

Nous devons ainsi prévoir des postes intermédiaires pour les chercheurs français exilés à l'étranger, qui pourraient ainsi reprendre contact avec des équipes travaillant en France.

Nous exportons massivement nos thésards aux Etats-Unis, où les financements existent et où tous les docteurs peuvent trouver une place. La perte des contacts en France interdit alors le retour de ces chercheurs expatriés, alors qu'ils ont souvent la volonté de revenir. La rigidité des statuts empêche aussi les transferts vers l'enseignement supérieur ou l'industrie.

Enfin, l'absence de gestion programmée des emplois provoquera une explosion du nombre de postes à pourvoir durant les dix années à venir. La qualité du recrutement s'en ressentira, d'autant que rien n'est fait dans ce budget pour anticiper les départs massifs à la retraite qui s'annoncent. Il faudrait par ailleurs encourager la mobilité.

Il est essentiel que les organismes de recherche s'ouvrent sur l'extérieur. « Je ne conçois pas l'activité de recherche sans enseignement » proclamait, à juste titre, M. Claude Allègre. Or vous n'avez pas de politique dans ce domaine. Il faudrait créer un statut unique d'enseignant-chercheur.

C'est dans les laboratoires que se préparent les richesses de demain. Or les chercheurs confirmés, qui devraient consacrer l'essentiel de leur temps à leurs recherches, à l'encadrement des plus jeunes et aux contacts avec leurs homologues étrangers, doivent faire tout autre chose.

Pour le passage aux 35 heures, vous proposez au personnel des unités mixtes de recherche des modalités compatibles avec celles de l'Éducation nationale. La direction du CNRS a donc choisi d'attendre l'application de la réduction du temps de travail dans les universités. Votre circulaire n'est sortie que le 13 novembre pour une loi applicable au 1er janvier.

En outre, cette réduction du temps de travail, en créant de nouveaux facteurs de rigidité, va diminuer de 10 % le potentiel de la recherche française.

Votre budget ne permettra pas de résorber l'emploi précaire, d'anticiper les départs en retraite ni de développer la recherche.

Une bonne partie des créations de postes servira en réalité à la résorption des emplois « précaires ». Il ne s'agit donc pas de créations d'emplois, mais de transformations.

Avec 6 chercheurs pour 1 000 actifs, la situation de l'emploi scientifique est notoirement insuffisante par rapport aux Etats-Unis et au Japon. Nos concurrents ont compris que la matière grise constituait un facteur essentiel du développement économique. Nous laissons le fossé se creuser.

Il serait nécessaire d'ouvrir enfin un débat national sur la recherche publique. Je regrette que notre assemblée ne s'engage pas dans cette réflexion.

Votre budget ne répond ni aux attentes des Français ni à celles des chercheurs et le groupe RPR votera contre comme l'a fait la commission.

M. Patrick Leroy - Les atteintes à la sécurité alimentaire et à l'environnement, la libéralisation du commerce et son élargissement à des secteurs comme l'éducation ou la culture, les interrogations de nos concitoyens sur les OGM, les manipulations génétiques, le débat sur le principe de précaution, tout cela place la recherche dans un contexte nouveau. Elle a aujourd'hui un rôle crucial à jouer. Il en va de l'avenir de l'humanité. ce qui s'est passé à Doha montre à quel point est dangereux la libéralisation de ce secteur. L'Etat doit assumer ses responsabilités en termes d'investissements et d'orientations.

Or le ratio des dépenses intérieures de recherche et développement par rapport au PIB qui avait augmenté entre 1960 et 1980, décroît depuis vingt ans pour ne plus représenter que 2,17 % en 2000. La part de l'Etat dans ces dépenses, a été ramenée de plus de 70 % dans les années 70, à moins de 50 %. Depuis 1995, la contribution des entreprises à l'effort national de recherche est devenue supérieure à celle de l'Etat. Cependant, depuis 1992, le volume de recherche et développement des entreprises n'augmente plus et il reste de surcroît très concentré sur quelques applications industrielles, ce qui est dangereux. Il est grave que l'Etat se désengage ainsi.

Les 14 et 15 novembre, les pays membres de l'Agence spatiale européenne ont décidé d'engager plus de 10 milliards d'euros dans différents projets, dont deux dans le transport spatial. Le PDG d'Arianespace demande que les Etats accroissent leurs contributions.

L'avenir du CEA et du CNES nous préoccupe. Ces deux établissements concourent de manière efficace au développement scientifique et économique de la France.

En matière spatiale, aucune pause n'est possible. Nous souhaitons donc que leurs dotations budgétaires augmentent.

Je déplore par ailleurs la faible évolution des subventions de fonctionnement et d'investissement dans les établissements publics entre 1997 et 2000. Aucun effort de rattrapage n'a été fait.

Ce budget pour 2002 confirme toutefois l'inflexion constatée en 2001, puisqu'il progresse de 2,2 %. Des priorités sont de nouveau affichées, comme les sciences du vivant, l'énergie et l'environnement, les technologies de l'information, les sciences humaines et sociales.

La relance d'une politique de l'emploi, grâce à un plan pluriannuel, est le signe d'un nouvel engagement de l'Etat.

Veillez à créer des emplois en nombre suffisant pour assurer la relève des générations, et à préparer l'insertion des jeunes, sachant que près de dix ans sont nécessaires pour former un chercheur.

Nous souhaitons que les élèves de l'enseignement secondaire soient sensibilisés davantage aux métiers de la recherche, et que les filières scientifiques leur paraissent plus attrayantes.

Nous soutenons votre projet de budget parce qu'il confirme les perspectives de développement amorcées en 2001. Notre vote est un acte de confiance dans votre volonté de replacer la recherche scientifique au rang de priorité nationale (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et du groupe socialiste).

M. Edouard Landrain - En commission élargie, vous vous êtes félicité de l'évolution de vos crédits. Je ne partage pas votre optimisme. Ces crédits ne permettront pas de relancer l'effort national de recherche, pourtant indispensable. Ils s'élèvent à 6 213 millions d'euros en dépenses ordinaires et crédits de paiement, soit en réalité une diminution compte tenu de l'inflation, de 0,7 %. Certes, le budget civil de recherche et de technologie augmente de 2,2 %, mais les autorisations de programme ne représentent en volume que 82 % de celles du budget 1993. Ainsi la part consacrée aux dépenses de recherche et de développement dans le PIB n'a cessé de baisser depuis 1991. La recherche ne constitue pas une priorité nationale, les moyens publics qui lui sont alloués ne répondent pas aux besoins et aux enjeux, alors même que les autres grands pays ont redoublé d'effort. La position de notre pays n'est certes pas la plus mauvaise en valeur absolue, mais elle se détériore dangereusement. La dépense nationale de recherche et développement, entre 1995 et 1999, n'a augmenté que de 0,6 % contre 3 % pour l'ensemble de l'Union européenne, 4,1 % pour le Japon et 5,5 % pour les Etats-Unis. L'an dernier, le Gouvernement a paru infléchir ses priorités. Faut-il conclure à une rupture avec la politique de votre prédécesseur, qui avait dit que la recherche ne serait pas sa priorité tant qu'elle ne serait pas réformée ? Vous avez présenté récemment votre plan décennal de gestion prévisionnelle de recrutement pour la période 2001-2010, destiné à anticiper les nombreux départs à la retraite. Une gestion pluriannuelle apparaît effectivement nécessaire. Malheureusement, les incertitudes entourant le budget général sont telles que nous doutons que les engagements puissent être tenus.

Vous annoncez cette année la création de 463 postes, dont 100 de chercheurs. Mais il s'agit pour l'essentiel de redéploiements, certains emplois n'étant pas remplacés dans des disciplines plus traditionnelles. S'il est bon de concentrer les efforts sur certains secteurs prioritaires, il serait fâcheux de démanteler d'autres disciplines notamment les sciences fondamentales.

Que peut signifier la réduction du temps de travail en matière de recherche ? Quand une équipe est sur le point de publier un article, les samedis et les dimanches se passent au laboratoire.

Revaloriser de 5,5 % l'allocation de recherche, afin d'attirer davantage de jeunes, ne peut être qu'un premier pas. Sera-t-il suffisant pour inverser la tendance, alors que le nombre de doctorants diminuent chaque année d'environ 7 % ? J'en doute.

D'autant qu'une partie de nos jeunes chercheurs s'en va. Reviendront-ils chez nous ? On compte 4 000 postdoctorants à l'étranger. Tout semble fait pour décourager cette population : peu de bourses postdoctorales sont disponibles, et les règles légales dressent au recrutement des obstacles souvent insurmontables.

Il est vrai que les moyens de l'Etat ne sauraient suffire. Notre faiblesse réside plutôt dans l'insuffisance du financement privé de la recherche, qui n'augmente annuellement en France que de 3,48 %, contre près de 8,2 % aux Etats-Unis. La reconduction du crédit impôt-recherche est donc opportune, de même que la loi Allègre qui permet aux chercheurs de valoriser leurs résultats. Le ministère de l'économie envisagerait une méthode de financement particulière pour les laboratoires de biotechnologie. Qu'en est-il ? Ne pourrait-on pas créer des fondations à l'américaine, financées par des fonds de pension ?

M. le Rapporteur spécial - Ah, là, là !

M. Edouard Landrain - De même, la coopération européenne doit être renforcée. Elle a donné lieu à de grands succès, comme le CERN à Genève. Un projet d'espace européen de recherche a été lancé en janvier 2000 ; son principal outil de financement est le programme cadre de recherche et de développement dont le prochain budget représentera 17 milliards d'euros sur cinq ans. Ce PCRD, qui a le mérite d'exister, doit être développé. Là aussi, volonté et courage politiques sont requis pour fournir à la science européenne les finances, la réactivité et l'autonomie nécessaires.

Les régions participent de leur côté à hauteur de 2 milliards de francs aux investissements. Il faut encourager leur implication, en créant par exemple une offre technologique à destination des PME.

Il est d'autant plus indispensable de diversifier nos moyens que l'action de l'Etat ne peut se limiter à abonder les crédits. Il doit également veiller à leur bonne utilisation, contrariée par les pesanteurs administratives. Ainsi le CNRS n'a consommé en 2000 que la moitié de ses crédits de soutien aux unités de recherche.

Notre système de recherche souffre de trop nombreuses rigidités, découlant en particulier du code des marchés publics. Les personnels de laboratoires se plaignent d'un surcroît de tâches administratives. Passer une commande relève du parcours du combattant.

M. le Rapporteur spécial - C'est vrai !

M. Edouard Landrain - Ces personnels réclament un régime dérogatoire pour leurs achats de petite fourniture et matériels. En commission élargie, vous n'avez pas répondu sur ce point.

Nous souhaitons tous ici que la recherche soit une priorité, car la capacité de créer, diffuser et exploiter le savoir est devenue une clé simultanée de la culture et de la création de richesse.

Malheureusement, en dépit de votre bonne volonté, vous n'avez pas les moyens de mener la politique dont notre pays a besoin. Aussi le groupe UDF votera-t-il contre votre budget.

M. le Rapporteur spécial - La mort dans l'âme...

M. Claude Gatignol - Les enjeux de la recherche sont considérables. Dans ce domaine, les choix politiques d'aujourd'hui déterminent notre position économique de demain.

La France, tout comme l'Europe accuse un retard énorme par rapport aux Etats-Unis et au Japon. Notre pays n'est classé qu'au cinquième rang mondial, et la progression annuelle de son effort de recherche le place au dernier rang des nations européennes.

Votre budget, même s'il comporte des avancées intéressantes, et malgré les 6,213 milliards d'euros annoncés tous secteurs confondus, ne permettra pas de combler le retard.

La priorité qu'il donne à l'emploi scientifique, avec un plan décennal de gestion prévisionnelle, répond à une réelle nécessité, compte tenu des départs en retraite massifs attendus pour 2004-2010.

La création de 500 emplois, dont 100 de chercheurs, est bienvenue, encore qu'elle servira, pour partie, à résorber l'emploi précaire. Il s'agit donc plutôt de transformations d'emplois.

De plus, les créations de postes de chercheurs sont essentiellement orientées vers les disciplines que vous considérez comme prioritaires : les sciences du vivant, les sciences et technologies de l'information et de la communication et la protection de l'environnement. Il ne faudrait pas que les disciplines classiques en souffrent.

Dans le secteur nucléaire, nous avons aussi besoin d'un renouvellement de chercheurs afin d'accentuer la recherche sur la sûreté du parc existant et sur la conception des systèmes de 2ème et 3 ème génération. Je ne suis pas convaincu par votre réponse à ma question écrite sur votre budget. Compte tenu des multiples champs de compétence du CEA, de l'IRSN, et de l'IN2P3, des choix vont s'imposer. Or le nucléaire n'est pas pour vous un domaine prioritaire, et la politique de recrutement va s'en ressentir.

L'augmentation de 5,5 % de l'allocation de recherche pour les jeunes doctorants est appréciable, mais ne suffira pas à enrayer la désaffection des jeunes pour les filières scientifiques et la fuite de nos cerveaux à l'étranger.

Le nombre des monitorats aurait dû être augmenté et des actions pour inciter les jeunes à entreprendre des études scientifiques auraient dû être menées. De telles actions doivent commencer dès le secondaire et j'espère que vous pourrez convaincre M. Lang de s'y associer.

M. Renaud Muselier - Il y a du travail !

M. Claude Gatignol - Il faut aussi réfléchir à la pertinence de nos choix stratégiques et à l'émergence de nouveaux champs disciplinaires. Il convient notamment d'encourager dès à présent le développement des énergies du futur, notamment la recherche consacrée à l'hydrogène, qui pourrait être l'énergie du XXIe siècle. Les multiples applications des piles à combustible, que Robert Galley et moi avons mises en avant dans notre rapport de l'office parlementaire des choix scientifiques et technologiques, peuvent être un formidable atout pour notre économie. Utile pour la conquête spatiale comme pour les sous-marins, pour la voiture comme pour un téléphone ou ordinateur portable, cette pile peut fournir une puissance qui se chiffre en watts ou en mégawatts. Les espoirs immenses qu'elle soulève sont partagés tant en Europe qu'en Amérique du Nord ou au Japon.

Il reste toutefois à maîtriser tous les paramètres de sécurité et à passer des prototypes à la série industrielle. Or, nous constatons dans ce domaine un retard certain. Le CEA doit accroître les moyens qu'il consacre à la pile à combustible (PAC) et il est absolument nécessaire de réformer le réseau PAC.

Le contrat d'objectif que le CEA vient de signer avec l'Etat et qui triple le budget consacré à la PAC entre 2001 et 2004, pourra-t-il être respecté alors que le CEA, à budget constat, supporte des charges fiscales croissantes.

Parallèlement à la recherche publique, l'innovation technologique, dans le secteur privé, est un facteur déterminant pour le développement de nos entreprises.

Il faut encourager les PME et PMI dans leurs démarches innovantes et, à ce titre, je me réjouis que votre gouvernement ait repris le texte préparé par François d'Aubert lorsqu'il était ministre de la recherche. La loi sur l'innovation et la recherche du 12 juillet 1999 répond à des besoins, mais nos entreprises restent soumises à de multiples contraintes, fiscales, sociales ou réglementaires. Je pense en particulier au coût de la RTT qui se révèle être un dangereux outil de désorganisation en tous domaines, publics et privés, alors que les analystes pronostiquent une récession en 2002. Vos efforts en faveur des entreprises innovantes restent donc insuffisants.

Vous devez également encourager le partenariat entre la recherche publique et les entreprises et favoriser les dépôts de brevets, pour que notre pays puisse conforter ses positions sur les marchés à l'exportation.

D'ici à 2009, l'activité spatiale va se multiplier par cinq. L'industrie française, particulièrement performante dans ce secteur, doit préserver son savoir-faire, mais elle ne pourra conserver sa place qu'en renforçant son partenariat avec les Etats européens.

Sur aucun de ces points, votre budget ne permet de considérer que la recherche est une priorité du Gouvernement - même si vos propres efforts, Monsieur le ministre, de recherche de financements, sont certains ! Compte tenu des enjeux et de votre volonté de sensibiliser nos concitoyens aux questions scientifiques, la procédure d'examen simplifié de ce budget me paraît totalement inappropriée.

La question de l'apport de la science à des questions aussi brûlantes que le génie génétique, la bioéthique ou la génomique, mérite en effet un débat approfondi et ne doit pas être confisquée par les médias. Tocqueville écrivait déjà « Je ne peux m'empêcher de craindre que les hommes n'arrivent à ce point de regarder toute théorie nouvelle comme un péril, toute innovation comme un trouble fâcheux. ».

Les chercheurs et les scientifiques doivent donc être en mesure de nous apporter les éclairages nécessaires aux prises de décisions politiques. A nous ensuite de faire partager au plus grand nombre le résultat de ces recherches, pour jeter enfin les bases d'une véritable culture scientifique.

Pour toutes ces raisons, le groupe Démocratie libérale et indépendants ne pourra pas voter votre budget et je le regrette (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF et du groupe du RPR).

M. Daniel Chevallier - Nous avons disséqué ce budget en commission élargie, les précisions que le ministre nous a apportées à cette occasion nous ont permis de l'apprécier à sa juste valeur.

Certes, nous aurions souhaité que ce budget apparaissent comme prioritaire dans les choix du Gouvernement, mais je crois que cet objectif est à portée de mains. Si nous n'en sommes pas encore tout à fait là, c'est qu'il nous a fallu d'abord combler le retard pris entre 1993 et 1997. Si, durant cette période, les crédits avaient progressé au même rythme que de 1997 à 2002, ce budget excéderait aujourd'hui les 60 milliards de francs. Voilà qui relativise les choses ! C'est sur la recherche que nous devons nous appuyer pour bâtir la société de demain.

Vos orientations vont dans le bon sens. En ce qui concerne l'emploi scientifique, les 500 créations de postes sont à rapprocher des 790 emplois supprimés entre 1993 et 1997. Le plan décennal de recrutement répond aux demandes des chercheurs. S'agissant des mesures en faveur des jeunes, l'allocation de recherche est enfin revalorisée et un effort est fait pour intégrer les doctorants en attente de poste.

Les moyens de la recherche publique sont en augmentation substantielle : 28 % en cinq ans. Des crédits supplémentaires sont dégagés pour les thématiques prioritaires - sciences du vivant, de l'information et de l'environnement - et les actions en faveur de l'innovation industrielle sont poursuivies.

Par ailleurs, Monsieur le ministre, vous souhaitez sortir la recherche de son splendide isolement et l'ouvrir au dialogue avec nos concitoyens. Ceux-ci demandent en effet de plus en plus à participer aux choix et à être informés pour agir en toute connaissance de cause. La recherche est au carrefour de nombreuses préoccupations : biotechnologies, techniques de l'information, bio-éthique, développement durable. Il nous faut donc lui donner les moyens de répondre, mais aussi organiser un débat pour remettre l'homme au centre de la réflexion. Je me réjouis donc, Monsieur le ministre, que vous ayez décidé d'être partie prenante du débat sur les OGM et les essais en plein-champ, avec quatre autres ministères. Cela garantit que le débat sera ouvert et transparent. J'espère que le Parlement y sera intimement associé, comme il le fut au débat sur la sécurité alimentaire où il vous a d'ailleurs convaincu de relancer la recherche sur le prion. A cette occasion, le principe de précaution a été pleinement appliqué : il implique en effet d'allier la prudence dans la décision à l'augmentation des moyens de la recherche pour en savoir plus.

Votre budget nous satisfait et il traduit des orientations qui vont dans le bon sens. Le groupe socialiste le votera sans aucun état d'âme (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Roger-Gérard Schwartzenberg, ministre de la recherche - Je remercie les rapporteurs pour la qualité de leurs travaux, ainsi que tous les orateurs qui ont bien voulu participer à ce débat, poursuivant une ambition qui nous rassemble. Les grandes lignes du budget ont été examinées en commission. Je m'attacherai donc aujourd'hui à répondre à chacun.

Je connais l'attachement de M. Cuvilliez et de M. Cohen aux activités spatiales. Qu'ils sachent donc que, lors du conseil des ministres de l'Agence spatiale européenne, qui s'est tenu avant-hier et hier à Edimbourg, la France a obtenu, grâce à son insistance, que l'Agence consacre 2,1 milliards d'euros à la filière Ariane ! Quatre programmes en bénéficieront : d'abord, le programme Ariane 5 Plus, qui vise à améliorer les performances technologiques du lanceur ; ensuite, les programmes ARTA, d'accompagnement technologique, et INFRA, portant sur les infrastructures et visant à réduire l'écart concurrentiel entre les lanceurs américains, qui bénéficient presque gratuitement des bases de l'armée des Etats-Unis, et les lanceurs européens, qui doivent financer à 50 % le centre spatial guyanais ; enfin, un programme de financement de ce centre.

De plus, l'Allemagne a accepté de consacrer aux trois premiers programmes un milliard de francs de plus qu'elle n'avait prévu initialement...

M. Renaud Muselier - Bravo !

M. le Ministre - Le CNES n'a pas vocation, en effet, à financer la totalité de l'effort. Si nous pouvons à la fois stabiliser son budget et obtenir par ailleurs des crédits supplémentaires, ce n'est que tout bénéfice pour l'Europe et pour la France ! Je rappelle d'ailleurs que l'Allemagne est le deuxième contributeur à l'ESA.

D'autre part, le conseil européen a décidé de lancer la phase de développement du programme Galileo. Le milliard d'euros nécessaire doit être fourni à égalité par l'ESA et par l'Union européenne, via le conseil transports : l'Agence a voté un crédit de 547 millions d'euros, ce qui constitue une première d'autant plus appréciable que nombre de pays membres n'étaient pas convaincus autant que nous de l'intérêt qu'il y a à doter l'Europe d'un système équivalent au GPS américain, et indépendant de celui-ci. J'espère que le conseil transports sera ainsi incité à faire sa part !

Je rassure tous ceux qui sont intervenus en sa faveur : le CEA dispose d'un budget important - ce qui lui permet de disposer de crédits non négligeables pour ses relations publiques ! Dotations ordinaires et crédits de paiement atteignent au total 6 072 millions de francs et, s'il doit y avoir stabilisation en 2002, celle-ci fera suite à une progression de 700 millions entre 1998 et 2001. Le CEA n'est donc pas Cosette !

Messieurs Cuvilliez et Chevallier, je souhaite comme vous que la science soit au c_ur du débat public. Les assises de la culture scientifique et technique, qui se sont ouvertes au début de cette semaine, constituent à cet égard une initiative très utile : elles contribueront à repolitiser la science, au sens noble du terme, à lui rendre sa place dans la cité. Jaurès, de Gaulle et Mendès-France s'en préoccupaient plus que notre génération - j'excepte bien entendu les parlementaires présents - et cette situation est regrettable.

Je sais gré à M. Brottes de l'appréciation positive qu'il a portée sur ce budget. Nous n'avons pas négligé les allocataires de recherche : entre la rentrée de 1996 et celle de 2001, nous avons porté le « flux » de 3 600 à 4 000, de sorte que le « stock » atteint aujourd'hui 11 900. En 2002, l'effort portera sur le montant de l'allocation, qui sera augmenté de 5 %, pour un coût de 95 millions - en attendant d'autres étapes. Précisons aussi que 67 % de ces allocataires sont en même temps moniteurs de l'enseignement supérieur et perçoivent à ce titre 2 200 F par mois, ce qui porte leur rémunération à 10 000 F.

M. Lasbordes a dit que la commission des affaires culturelles avait rejeté ce projet de budget : certes, mais par quatre voix contre trois et en raison d'une configuration purement conjoncturelle ! Au reste, ce qui importe, c'est le vote souverain de l'Assemblée réunie en séance plénière.

Il me pardonnera de ne pas faire miennes ses assertions, à l'exception toutefois de celles qui concernaient le synchrotron : je le remercie d'avoir pris acte que sa construction a commencé. Mieux : elle a commencé dans sa circonscription (Sourires), notamment grâce aux crédits importants qu'a votés le conseil général de l'Essonne, présidé par Michel Berson !

Disraeli, je crois, disait : « Lorsque je me regarde, je me désole ; lorsque je me compare, je me rassure ». Appliquons cela aux emplois : entre 1993 et 1997, non seulement on n'en a pas créé assez, mais on en a supprimé 928 ! Nul n'est parfait, mais l'imperfection n'est pas l'apanage de cette majorité...

En commission, j'ai oublié de répondre à de nombreuses interventions relatives au code des marchés publics, mais je sais que bien des directeurs d'organismes ou d'unités de recherche se plaignent des contraintes que celui-ci leur impose. Nous avons donc assoupli les procédures, par le décret du 29 avril 1999 sur les marchés fractionnés, puis par celui du 9 novembre 2000, pris à la suite du rapport Rouvillois. Nous continuerons en favorisant une déconcentration des décisions, sur le modèle de ce qui se fait au CEA.

M. Muselier déplore une diminution du nombre de DEA et de soutenances de thèse et ce constat-là, au moins, était exact. La baisse s'explique largement par la reprise économique, qui a accru les possibilités d'accéder à des emplois dans le secteur privé, mais le plan décennal de gestion prévisionnelle de l'emploi public devrait permettre de redresser la situation.

Quant à l'effort en faveur de la recherche biomédicale, nous l'avons fait ! Les sciences de la vie bénéficieront en 2002 du quart des crédits ouverts au BCRD et d'une progression de 3,4 % ; 80 emplois nouveaux iront à l'INSERM, après une centaine en 2001, et les moyens de fonctionnement et d'investissement de cet institut auront crû de 28 % en deux ans.

Si le nombre de chercheurs étrangers s'est réduit au cours des dernières années, cela résulte avant tout des décisions de certains ministres de l'intérieur, restrictives au point que Mme Alliot-Marie elle-même s'en est inquiétée dans un rapport à la commission des affaires étrangères. Les deux derniers ministres ont corrigé cela.

S'agissant des chercheurs français expatriés, le plan décennal 2001-2010 vise à faciliter l'intégration des jeunes docteurs de qualité, actuellement cantonnés dans des emplois contractuels ou obligés de travailler à l'étranger. Cependant, si leur situation est préoccupante, le CEREQ n'évalue qu'à 7 % le nombre des stagiaires postdoctorat qui ne rentrent pas en France. Mais je reconnais que c'est encore trop : notre pays n'a pas vocation à former des docteurs pour le compte d'autres Etats, surtout si ceux-ci ne consacrent que peu d'argent public à leur enseignement supérieur.

Malgré toute l'amitié que nous leur portons, surtout dans les circonstances présentes, nous n'avons pas vocation à exercer un mécénat envers les Etats-Unis en fournissant de jeunes docteurs, dont la France finance la formation, et qui sont ensuite recrutés par des entreprises américaines - ou japonaises, ou d'autres pays européens.

Sur l'évolution du BCRD, M. Lasbordes a été implacable, et je ne sais comment je survis à son propos (Sourires). Toutefois, entre 1993 et 1997 - deux dates prises au hasard (Sourires) - la progression du BCRD a été de 3,4 %, alors qu'elle est de 9,4 % depuis 1997, ce qui est plutôt mieux. Les moyens des laboratoires ont diminué de 12 % entre 1993 et 1997 : ils ont progressé de 28 % entre 1997 et 2002. Enfin, entre 1993 et 1997, 929 emplois ont été supprimés, alors qu'entre 1997 et 2002 quelque 700 ont été créés, et nous avons établi un plan de gestion prévisionnelle qui permettra de créer mille emplois.

M. Edouard Landrain - Par redéploiement.

M. le Ministre - Pas du tout ! Il s'agit de créations nettes, compte non tenu des remplacements de départs en retraite. Le plan prévoit mille créations entre 2001 et 2002 - ce qui veut dire qu'avec le présent budget nous serons à mi-parcours. Sur ces emplois, huit cents seront conservés à titre définitif, et deux cents rendus à Bercy - qui aurait préféré que nous en rendions mille... C'est par ailleurs, et en plus, que des redéploiements de postes, à l'occasion de 20 % des départs à la retraite, seront utilisés pour réorienter des emplois vers les champs de recherche prioritaires. Et nous avons l'assurance - car notre plan est établi en complémentarité avec celui de l'Éducation nationale - qu'au total, dans l'enseignement supérieur comme dans la recherche, aucune discipline ne verra ses effectifs baisser d'ici à 2010 ; certaines les verront s'accroître même hors des champs prioritaires.

Je remercie M. Leroy pour son appréciation sur l'inflexion positive de ce budget en 2001 et 2002, et pour son expression « vote de confiance », à laquelle je suis sensible. Je veux le rassurer en lui redisant, comme à M. Cuvilliez, que le CNES est l'objet de toute notre attention. J'ai de très fréquents contacts avec son président et son directeur, avec qui j'étais il y a deux jours à Édimbourg, et nous travaillons en étroite liaison.

M. Landrain a considéré la loi Allègre comme positive, avec raison. Selon M. Gatignol, elle était déjà pratiquement contenue dans la loi qu'avait préparée M. François d'Aubert. Je précise tout de même, sans méconnaître le réel intérêt que M. d'Aubert porte à la recherche, qu'il n'a eu le temps de préparer qu'un article, quand la loi Allègre en comporte dix. C'était un effet starter, sans plus - ce qui n'est d'ailleurs pas négligeable.

Sur les biotechnologies, Monsieur Landrain, les ministères des finances et de la recherche ont souhaité un effort particulier grâce à des incitations fiscales, afin qu'elles se développent autant chez nous qu'en Angleterre et en Allemagne. Nous sommes d'ailleurs à un bon niveau, et il sera meilleur quand nous aurons révisé les lois bioéthiques : les chercheurs français cesseront alors d'être écartés de recherches qui sont pratiquées au Royaume-Uni, en Australie, et aux Etats-Unis - même sous l'administration Bush, et avec financement public. Cela permettra à nos chercheurs, qui ont émis une pétition signée notamment par quatre prix Nobel, d'utiliser ces « cellules de l'espoir » qui feront reculer de nombreuses maladies graves.

M. Gatignol, comme M. Lasbordes, a comparé différents pays du point de vue de la part des dépenses de recherche dans le PNB. Si le rang de la France à cet égard n'est pas celui que nous souhaiterions, il est cependant appréciable. L'effort total de recherche, public et privé, en proportion du PNB représente 3 % au Japon, 2,6 % aux Etats-Unis, 2,4 % en Allemagne, enfin 2,19 % dans notre pays, qui se situe au quatrième rang de l'OCDE. Souhaitons que notre classement s'améliore. Je le crois, du reste, parce que les crédits publics recommencent à croître, mais aussi parce que depuis quelques années les entreprises privées consacrent à la recherche plus de moyens que par le passé. Car si l'on considère la part des dépenses publiques de recherche dans le PNB, on voit que cette fois la France est au premier rang de l'OCDE, avec 0,96 % contre 0,84 % aux Etats-Unis, 0,82 % en Allemagne, 0,69 % au Royaume-Uni et 0,64 % au Japon. Ce qui faisait jusqu'à présent la différence, c'était la faiblesse des crédits de recherche de nos entreprises.

Je suis favorable, M. Gatignol, aux recherches sur la pile à combustible, qu'avait lancées M. Allègre avec un réseau national. J'ai poursuivi cet effort en créant un centre national de recherche technologique sur ce thème à Belfort - Montbéliard ; chacun connaît la sensibilité des élus belfortains aux énergies nouvelles. Le CEA a d'autre part beaucoup diversifié ses activités, même si son sigle ne signifie pas encore tout à fait « commissariat aux énergies alternatives » (Sourires).

M. Claude Gatignol - Il faudra dresser le bilan du réseau.

M. le Ministre - Il sera fait, et je pense qu'il sera bon. A la recherche fondamentale s'ajoute d'ailleurs déjà la recherche appliquée : PSA a signé en juin avec le CEA une convention pour réaliser et mettre sur le marché rapidement des véhicules fonctionnant avec des piles à combustible ; cette énergie propre, résultant de la conversion de l'hydrogène en électricité, contribuera en effet à réduire la pollution. On devrait voir ces véhicules circuler vers 2004 ou 2005.

Je remercie vivement M. Daniel Chevallier pour ses propos. Je souhaite comme lui qu'enfin le budget de la recherche soit étiqueté comme budget prioritaire. Quatre budgets seulement ont à ce jour reçu cette qualification, mais j'espère que ce sera le cas du présent budget dès 2003. M. Chevallier a observé que, si l'effort était important, c'est aussi parce qu'un certain retard avait été pris au cours des années précédentes. Ce budget, sans abuser de la référence proustienne, est un peu celui de la recherche... du temps perdu (Sourires).

Sur le dialogue avec les citoyens, je partage l'opinion de M. Chevallier. Il faut mettre la science dans le débat citoyen. Cinq ministères ont décidé d'ouvrir le débat sur les OGM, et nous avons demandé à une commission de sages de veiller à son organisation. Ce débat devra être transparent, mais aussi complet : il devra prendre en compte certes les risques éventuels des OGM pour l'environnement, les problèmes d'hybridation, etc. Mais il devra aussi considérer les perspectives nouvelles qu'ouvrent les OGM pour des applications thérapeutiques, des cultures plus nutritives, plus résistantes à la sécheresse, requérant un moindre usage des pesticides qui polluent les nappes phréatiques. Bref, il faut un bilan scientifique des risques et des bienfaits. Je crois comme M. Chevallier au principe de précaution, et je l'interprète comme lui : ce principe crée une obligation de recherche pour sortir de l'incertitude. Ce n'est pas un sabot de Denver destiné à clouer sur place la recherche ! Il peut conduire parfois - et c'est le cas pour les OGM - à s'abstenir de toute mise en culture et sur le marché ; mais pour prendre rationnellement les décisions définitives, il faut une information scientifique claire. La recherche publique sur les OGM ne doit jouer ni le rôle de l'avocat, ni celui du procureur, mais celui d'un juge d'instruction, dont la mission est d'instruire à charge et à décharge.

Enfin le débat sur cette question sera ouvert au Parlement ; il appartient au ministre des relations avec le Parlement d'en définir les conditions en liaison avec la Conférence des présidents. Nous sommes par ailleurs nombreux à souhaiter que l'Assemblée soit rapidement saisie du projet de révision des lois bioéthiques ; elle devrait l'être aux environs du 15 janvier. Ce sera un débat difficile, qui devra tenir compte des perspectives d'avancées scientifiques et médicales, ainsi que des enjeux éthiques - ces derniers incluant aussi le droit des malades à être soignés et à voir progresser la recherche médicale.

En terminant, je remercie tous ceux qui sont intervenus dans ce débat, plus particulièrement bien sûr ceux qui ont porté des appréciations positives sur ce projet de budget, mais aussi les autres, qui ont manifesté par leur présence l'intérêt qu'ils portent à la recherche publique (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste).

Mme la Présidente - J'appelle maintenant les crédits inscrits à la ligne « recherche ».

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ÉTAT B

Les crédits inscrits aux titres III et IV, successivement mis aux voix, sont adoptés.

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ÉTAT C

Les crédits inscrits aux titres V et VI sont successivement adoptés.

Mme la Présidente - Nous avons terminé l'examen des crédits du ministère de la recherche.

La suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2002 est renvoyée à la prochaine séance, qui aura lieu cet après-midi, à 15 heures.

La séance est levée à 12 heures 15.

            Le Directeur-adjoint du service
            des comptes rendus analytiques,

            Louis REVAH


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