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Session ordinaire de 2001-2002 - 35ème jour de séance, 83ème séance

2ème SÉANCE DU JEUDI 29 NOVEMBRE 2001

PRÉSIDENCE de M. Patrick OLLIER

vice-président

Sommaire

NOMINATION D'UN DÉPUTÉ
EN MISSION TEMPORAIRE 2

DÉSIGNATION DE CANDIDATS À UN ORGANISME EXTRAPARLEMENTAIRE 2

MUSÉES DE FRANCE (CMP) 2

ÉTABLISSEMENTS PUBLICS DE COOPÉRATION CULTURELLE
(deuxième lecture) 14

ARTICLE PREMIER 19

ART. 4 20

SÉCURITÉ DES TRANSPORTS (CMP) 21

STATUT DES SOCIÉTÉS D'ÉCONOMIE MIXTE LOCALES (deuxième lecture) 31

ARTICLE PREMIER A 36

ART. 3 36

ART. 6 37

ART. 15 37

APRÈS L'ART. 15 37

ART. 16 37

APRÈS L'ART. 16 38

SAISINE POUR AVIS D'UNE COMMISSION 39

ERRATUM 39

ORDRE DU JOUR DU MARDI 4 DECEMBRE 40

La séance est ouverte à quinze heures.

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NOMINATION D'UN DÉPUTÉ EN MISSION TEMPORAIRE

M. le Président - J'ai reçu de M. le Premier ministre une lettre m'informant de sa décision de charger M. Julien Dray, député de l'Essonne, d'une mission temporaire auprès de lui, dans le cadre des dispositions de l'article L.O. 144 du code électoral.

Cette décision a fait l'objet d'un décret publié au Journal officiel du mercredi 28 novembre 2001.

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DÉSIGNATION DE CANDIDATS À UN ORGANISME EXTRAPARLEMENTAIRE

M. le Président - J'ai également reçu de M. le Premier ministre une demande de désignation des deux membres de l'Assemblée nationale au sein du conseil de surveillance du Fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale.

Conformément à l'alinéa 2 de l'article 26 du Règlement, M. le Président a confié à la commission des affaires culturelles et à la commission des finances le soin de présenter chacune un candidat.

Les candidatures devront être remises à la Présidence avant le mercredi 12 décembre 2001, à 18 heures.

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        MUSÉES DE FRANCE (CMP)

M. le Président - J'ai enfin reçu de M. le Premier ministre une lettre soumettant à l'approbation de l'Assemblée le texte de la commission mixte paritaire sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif aux musées de France.

En conséquence, l'ordre du jour appelle la discussion du texte élaboré par la commission mixte paritaire sur les dispositions restant en discussion de ce projet.

M. Alfred Recours, rapporteur de la commission mixte paritaire - Je tiens à remercier tout d'abord M. Jean Le Garrec, grâce à qui le projet de loi « Musées » n'est plus un serpent de mer. Sans la création d'une mission d'information sur les musées, nous n'aurions pas réussi à aboutir.

Je veux aussi vous remercier, Madame la ministre, pour avoir accepté de travailler à partir de notre texte.

Je vous remercie enfin, chers collègues, non seulement pour le travail effectué, mais pour avoir voté l'amendement « Casino » que je vous avais proposé. Cette adoption a permis la nomination d'une mission de l'inspection générale des finances et elle a abouti à des conclusions très positives en ce qui concerne le mécénat et donc l'enrichissement des collections publiques.

Je voudrais attirer votre attention sur les articles 15 quinquies et 15 nonies qui permettront de doper les crédits consacrés aux acquisitions. Le premier permet aux entreprises contribuant à l'achat par l'Etat d'un trésor national menacé d'exportation de déduire 90 % de cette contribution de l'impôt sur les sociétés dans la limite de 50 % de l'impôt dû ; le second accorde aux entreprises acquérant elles-mêmes un trésor national menacé d'exportation une réduction de leur impôt sur les sociétés égale à 40 % du montant de leur achat.

En contrepartie, le bien devra être classé : il ne pourra plus jamais quitter le territoire français ; pendant dix ans, il sera mis en dépôt dans un musée de France et ne pourra être vendu.

Ces deux points sont le complément de notre travail en CMP avec le Sénat, notamment à l'article 8.

Aujourd'hui, rien n'est inaliénable dans notre « absence de législation » sur la question, même pas les joyaux de la couronne.

M. Jean Le Garrec, président de la commission des affaires culturelles - Très bien !

M. le Rapporteur - J'aurais préféré que nous en restions à la rédaction de l'Assemblée nationale qui stipulait que les collections des musées de France appartenant à une collectivité publique sont inaliénables.

Il fallait cependant, en CMP, arriver à un compromis acceptable avec le Sénat.

Or le Sénat, avant tout par purisme juridique, avait produit un texte qui n'était pas acceptable en l'état.

A l'issue du travail de la CMP, lequel a été adopté à l'unanimité avec une abstention sur la question de l'inaliénabilité, les biens constituant les collections des musées de France appartenant à l'Etat ou aux collectivités locales font partie du domaine public et donc, à ce titre, sont inaliénables. Ils ne peuvent faire l'objet d'une décision de déclassement, peu vraisemblable, qu'après autorisation préalable d'une commission scientifique. S'agissant de collectivités territoriales, notification devra être faite à l'Etat de l'intention de vendre et du prix demandé, l'Etat pouvant acquérir l'_uvre dans le cadre des réseaux des musées de France que nous mettons en place.

Pour les collectivités territoriales, les biens incorporés dans les collections publiques par dons et legs ne pourront être déclassés car inaliénables par nature. Des règles seront également établies pour les musées associatifs de droit privé : tout ce qu'ils auront acquis ne pourra être cédé qu'à un musée de France.

Ainsi, non seulement nous aurons déclaré inaliénable la plus grande partie des _uvres, mais pour toutes les autres, la procédure sera telle que nous aurons abouti à une quasi-inaliénabilité. Au demeurant, l'arrêt Mariole du Conseil d'Etat du 19 mars 1928 précisant que le pouvoir de déclasser ne peut s'exercer que dans un but d'intérêt général, quiconque voudrait déclasser devra démontrer qu'il le fait dans un tel but.

Dans le cas contraire, tout citoyen pourrait contester le déclassement devant la juridiction administrative.

Nous établissons donc le cadre juridique qui permet pour la première fois de disposer d'une législation anti-aliénabilité de collections publiques, et même de certaines collections privées.

Je conclus par une remarque, Madame la ministre : au-delà des mesures fiscales adoptées par la CMP, la mission de l'Inspection des finances fait deux recommandations.

Dans les cinq années qui viennent, le ministère s'engage à consacrer chaque année 10 millions de francs en plus pour les acquisitions ; constatant que la Réunion des Musées nationaux, constituée à la fin du XIXe siècle, n'a pas complètement rempli sa mission en laissant stagner les crédits d'acquisition, qu'elle en fasse autant dans les années à venir !

Ainsi, avec les dispositions fiscales que nous aurons adoptées et les dispositions budgétaires qui paraissent nécessaires, nous obtiendrons plus qu'un doublement des crédits consacrés actuellement aux acquisitions.

Je souhaite enfin, Madame la ministre, attirer votre attention sur trois sujets dont nous avons déjà débattu. Il est urgent, en premier lieu, de créer un grade de conservateur général des musées territoriaux...

M. le Président de la commission - Excellent !

M. le Rapporteur - La mission d'information a ensuite émis le v_u que plusieurs établissements accèdent enfin au statut d'établissement public et, en particulier, Orsay, dont rien ne justifie qu'il n'en bénéficie pas au même titre que le Louvre ou Versailles. Enfin, l'idée de créer une loterie pour la défense du patrimoine ne doit pas être abandonnée, un sondage d'opinion ayant démontré que nos concitoyens y étaient favorables.

Qu'il me soit permis, pour conclure, de saluer l'excellence de nos travaux, qui débouchent, à partir d'une initiative parlementaire, sur un texte dont l'économie générale peut être largement approuvée (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

Mme Catherine Tasca, ministre de la culture et de la communication - Au moment où nous examinons à nouveau le projet de loi relatif aux musées de France, je tiens à saluer d'emblée la qualité du débat qui s'est tenu dans le cadre de la commission mixte paritaire. Animés par un désir sincère de faire aboutir le projet, les commissaires ont construit un texte équilibré qui recueille pour l'essentiel l'agrément du Gouvernement.

Les principaux points qui restaient en débat après le vote du Sénat se rattachaient d'une part au statut des collections, d'autre part aux mesures fiscales d'incitation à l'achat de trésors nationaux.

Sur le premier point, la CMP a rétabli un texte qui affirme explicitement le principe d'inaliénabilité des collections, auquel je suis, comme vous, très attachée. La procédure d'examen - non seulement sur les éventuels déclassements mais aussi sur des hypothèses de cession - est également opportunément renforcée.

Je me réjouis que l'inaliénabilité présente un caractère irrévocable dans le cas des dons et legs ou pour les biens acquis avec l'aide financière ou juridique de l'Etat.

Pour ce qui concerne le déclassement, de même que la loi de 1913 sur les monuments historiques mentionne la possibilité d'un déclassement par décret en Conseil d'Etat, la CMP a confirmé la nécessité d'un avis conforme d'une commission scientifique. Je veillerai à ce que le décret arrêtant la composition de cette instance soit publié dans les meilleurs délais. De même, je m'attacherai à ce que le haut degré de qualification de ses membres garantisse son autorité.

A l'évidence, ce texte renforce la protection juridique des collections et il est de nature à les enrichir sensiblement. Leur pérennité, assurée de fait jusqu'à ce jour, sera désormais garantie par un cadre juridique explicite. Ainsi, et à l'inverse de ce que l'on peut entendre ici ou là, ce texte est bien plus protecteur des collections que l'état de droit actuel.

Le Haut conseil des Musées de France, - dont la présidence sera assurée par le ministre de la culture -, devra rendre un avis conforme préalablement au retrait de l'appellation « Musées de France » et émettre des recommandations d'ensemble sur la politique des musées. Il assurera la protection des collections et veillera, en cas de transfert de propriété, à ce que les _uvres demeurent dans la famille des musées de France.

Pour ce qui est du sort des collections en cas de retrait de l'appellation, prévu au quatrième alinéa de l'article 3, les mesures de protection envisagées me semblent fort bienvenues.

S'agissant des collections privées, la CMP a souhaité limiter le principe d'affectation irrévocable des _uvres à un musée de France au seul cas des dons, des legs ou des biens acquis avec le concours de l'Etat ou des collectivités territoriales. Cette rédaction permettra aux personnes morales de droit privé de continuer à inscrire dans leurs statuts des clauses d'inaliénabilité allant au-delà des obligations légales.

M. le Rapporteur - Tout à fait !

Mme la Ministre - S'agissant des instances scientifiques compétentes, j'approuve le texte de la CMP, sous réserve qu'il soit bien clair - comme le rapporteur l'avait du reste indiqué en première lecture au Sénat - qu'elles siégeront dans des formations distinctes en matière d'acquisition et de restauration.

Le Gouvernement approuve également la rédaction des articles 5 et 6 relatifs aux qualifications des professionnels des musées, dès lors qu'il est bien entendu que les activités scientifiques mentionnées à l'article 5 englobent les activités culturelles et que les qualifications exigées des personnels mentionnés à l'article 6 seront précisées par voie réglementaire.

Quant au dispositif fiscal prévu à l'article 15 quinquies, je me réjouis du souci de défense du patrimoine national qui a animé les travaux de la commission. Je vous proposerai cependant un amendement tendant à rendre le volet fiscal plus lisible et, partant, plus incitatif. Ainsi amendé, le dispositif fiscal doit permettre d'enrichir le patrimoine national et je remercie le Parlement d'avoir inscrit cette question au premier rang de ses préoccupations avec l'efficacité que l'on constate aujourd'hui. J'ai en outre bien entendu les préoccupations de votre rapporteur sur la nécessaire appréciation des crédits d'acquisition dévolus à la RMN.

Je suis convaincue que ces nouvelles dispositions fiscales seront bien reçues par les entreprises, qui pourront ainsi participer aux côtés de l'Etat à la protection des trésors nationaux. Nous instaurons donc des modes de collaboration inédits qui ne pourront avoir qu'un effet très positif sur le marché de l'art.

Face aux faux procès qui nous sont faits quant à notre détermination à sauvegarder le patrimoine national, ce texte apporte une réponse forte et adaptée, à mettre à l'actif du bilan du Gouvernement et de la législature.

Avant de conclure, je tiens à souligner la qualité du travail accompli. J'espère que ce texte sera très prochainement adopté car il permettra de répondre à la curiosité croissante de nos concitoyens, à leur soif de découvrir l'exceptionnel patrimoine muséal de la France. Il offre en outre à nos musées un cadre juridique solide, clair et novateur (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste).

M. Georges Sarre - Les musées nationaux occupent une place de choix dans le c_ur de nos concitoyens et ils contribuent de manière éclatante au rayonnement de la France. Dès lors, tout en reconnaissant bien volontiers que l'ordonnance de 1945 devait être adaptée, je m'inquiète de certaines dispositions du présent projet qui me semblent de nature à dessaisir l'Etat de certaines de ses responsabilités essentielles.

S'agissant du label « Musées de France », je déplore la confusion entretenue entre les musées nationaux, territoriaux et privés. Le label sera attribué par un « conseil des musées de France » compétent pour l'ensemble des établissements, quel que soit leur statut. Est-ce réaliste ? De même, aux termes de l'article 4, les musées de France bénéficieront du conseil et de l'expertise des services de l'Etat. Sachant qu'à l'heure actuelle, seulement dix inspecteurs des musées nationaux sont en fonction, cette proposition est-elle crédible ? Je rappelle que près de deux mille établissements sont en effet susceptibles d'être labellisés. Entendez-vous, Madame la ministre, vous doter des moyens nécessaires pour que l'Etat assure sur les musées labellisés un contrôle de plein exercice ?

Mme la Ministre - Assurément.

M. Georges Sarre - C'est une bonne nouvelle !

Les possibilités de déclassement introduites par le texte me semblent également dangereuses. N'y a-t-il pas là un biais par lequel l'Etat serait autorisé à se transformer en marchand d'art ? Notre rapporteur a bien tenté de nous convaincre du contraire mais il m'a semblé pour le moins embarrassé (Dénégations sur les bancs de la commission) sur ce sujet !

Puisque l'occasion m'en est donnée, je tiens à exprimer publiquement mon soutien au personnel du Musée de l'Homme qui combat avec courage le déménagement programmé de trois cent mille pièces des collections d'ethnologie, qu'on entend répartir sur deux sites : le musée des arts premiers, cher au chef de l'Etat, et le musée de l'Europe et de la Méditerranée à Marseille. A nouveau, je demande aux ministres de l'éducation nationale et de la recherche de renoncer au démantèlement scientifique et culturel du principal centre anthropologique de France.

J'en appelle au Gouvernement - même si vous n'êtes pas directement concernée, Madame la ministre, à la représentation nationale, à la conscience de chacun : ce qui se prépare est une hérésie, une violence faite à la science, à la connaissance, à la culture. Je souhaite donc que vous disiez à vos collègues, Madame la ministre, que tous les scientifiques que j'ai rencontrés et tous les personnels sont farouchement hostiles à ce projet. Nous avons là un laboratoire magnifique, un musée de grande qualité, qui depuis sa création a donné toute satisfaction. Quelle idée saugrenue, folle, a bien pu conduire les pouvoirs publics à s'engager dans cette direction néfaste ?

M. Michel Herbillon - Enfin nous y sommes ! Après plus de dix ans d'attente et de discussions interministérielles, après un an et demi de travaux de la mission d'information sur les musées et plusieurs mois d'examen au Parlement, la refonte du droit des musées est sur le point d'aboutir. Il était temps car le cadre juridique actuel, qui se résume à une ordonnance de 1945, est incomplet et inadapté. Le droit n'a pas, à ce jour, tiré les conséquences de l'hétérogénéité croissante des statuts et des modes de gestion des musées, ni de l'implication grandissante des collectivités locales ou du formidable développement de l'activité muséale depuis vingt ans. Aujourd'hui, en remédiant au décalage entre le droit et la réalité, notre Assemblée fera _uvre utile.

Mais, avant tout, je voudrais m'arrêter sur la méthode qui a guidé l'examen du texte et que je crois exemplaire. Le Parlement peut en effet se féliciter que le projet du Gouvernement ait été précédé du travail accompli par la mission d'information sur les musées, créée sous l'impulsion décisive du président Le Garrec, présidée par Alfred Recours, et à laquelle j'ai eu l'honneur de participer activement. En un an et demi, grâce à de nombreuses auditions, rencontres et visites, la mission d'information a pu mieux appréhender les besoins réels des musées, et émettre des propositions de réforme très précises. C'est cette démarche de bon sens, hélas, trop peu fréquente, qui nous a permis de remplir pleinement notre rôle de législateur.

Cela s'est d'ailleurs vérifié en première lecture, lorsque notre Assemblée a jugé le projet du Gouvernement beaucoup trop modeste, au regard des propositions de la mission et l'a largement amendé. A n'en pas douter, c'est cette détermination de l'Assemblée, toutes tendances politiques confondues, relayée ensuite par nos collègues du Sénat qui a permis qu'un dispositif fiscal soit enfin instauré pour pallier l'insuffisance notoire des crédits d'acquisition. Le travail effectué en amont par la mission d'information et ses propositions ont été déterminants pour donner plus d'efficacité au projet.

Au final, si ce texte ne va pas aussi loin que certains d'entre nous l'espéraient, il présente cependant un certain nombre d'avancées. La création du label des Musées de France, et de son corollaire le Haut Conseil des Musées de France, offrira un cadre juridique plus lisible et plus adapté. Elle permettra de fédérer les différentes familles de musées, ce qui favorisera le développement de la coopération entre eux et la constitution de réseaux, facilitant la circulation des _uvres. Le projet s'inscrit aussi, conformément au v_u de la mission d'information, dans une logique de démocratisation et de médiation culturelle. La place du public et son accueil seront désormais des priorités d'action des musées. La gratuité pour les moins de dix-huit ans répond parfaitement à cet objectif et je la soutiens pleinement, même si j'avais souhaité qu'on aille plus loin, comme en Grande-Bretagne ou dans certains musées américains. Je me félicite aussi qu'un accord ait été trouvé avec nos collègues sénateurs pour maintenir les dispositions prévoyant la création dans les musées d'un service chargé de l'accueil des publics, de la diffusion, de l'animation et de la médiation culturelle. Cet outil doit permettre aux musées de se lancer dans la conquête de nouveaux publics, objectif prioritaire quand on sait qu'un quart des Français ne sont jamais entrés dans un musée et qu'un autre quart ne s'y rend que de façon exceptionnelle.

Ce projet prend aussi en compte le rôle croissant des collectivités locales dans le domaine du patrimoine et des musées. En attribuant à l'Etat un rôle de conseil, d'expertise et de soutien à l'ensemble des musées de France, le texte contribue au nécessaire rééquilibrage des rapports entre l'Etat et les collectivités locales. Le transfert de propriété au profit de ces dernières des _uvres mises en dépôt par l'Etat dans les musées territoriaux avant 1910, soit quinze mille _uvres environ, constitue quant à lui une mesure assez innovante de décentralisation.

Le projet renforce enfin, et c'est une bonne chose, le régime de protection des collections des musées publics. L'Assemblée unanime, conformément aux orientations du rapport d'information, avait adopté en première lecture le principe d'un délai de latence de trente ans avant que les _uvres d'un artiste vivant deviennent inaliénables. Cette exception au principe d'inaliénabilité visait à permettre une gestion plus dynamique des réserves, à favoriser l'acquisition d'_uvres contemporaines et à encourager ainsi la création. Cette disposition votée par l'Assemblée, toutes tendances politiques confondues, devait à nos yeux être précisée et encadrée à l'occasion des discussions ultérieures sur le projet. Il est dommage qu'elle ait parfois été mal comprise, voire caricaturée, par ceux-là même qui, bien qu'ils en comprennent l'esprit, sont surtout attachés à ce que rien ne change alors que tout bouge, selon la formule de Lampedusa. Mais qu'importe : notre proposition a atteint son objectif, qui est d'ouvrir le débat sur un sujet jusque-là tabou. En effet, si nous sommes tous favorables au principe d'inaliénabilité, qui a contribué à enrichir nos collections publiques, son application stricte, sans « respiration » possible, aboutit aujourd'hui à l'entassement des _uvres dans les réserves des musées, auxquelles le public n'a jamais accès. C'est là un vrai problème sur lequel il faut continuer à réfléchir et à débattre si l'on veut aboutir à une gestion plus responsable et plus dynamique de nos collections publiques. Pour l'heure, je me satisfais de la disposition retenue par la CMP, qui autorise dans des conditions extrêmement encadrées le déclassement puis la cession d'un bien appartenant aux collections des musées de France.

Mais le projet, malgré toutes ces avancées, serait resté par trop modeste si nous n'y avions ajouté aucune mesure visant à pallier la notable insuffisance du budget d'achat des musées de France. Chacun a conscience de la gravité de ce problème, qui se traduit par l'exode, pour un montant de près de 2 milliards de francs, de nos trésors nationaux vers l'étranger. Les crédits d'acquisition sont ridiculement insuffisants, face aux prix pratiqués sur le marché de l'art. Depuis plusieurs années, l'opposition n'a cessé de proposer pour abonder ces crédits, des solutions auxquelles le Gouvernement s'était jusqu'alors systématiquement opposé. J'ai moi-même proposé, lors de la discussion du texte sur la protection des trésors nationaux, un prélèvement sur les mises à la loterie nationale, ainsi que des dispositions fiscales favorables au mécénat. Je me réjouis que la discussion sur les musées, et l'adoption par notre Assemblée d'un amendement, cosigné par des membres de l'opposition et de la majorité, qui crée un prélèvement de 1 % sur les recettes des casinos, ait finalement contraint le Gouvernement à agir : il a chargé l'Inspection générale des finances d'une mission d'étude, qui a permis de faire évoluer la situation dans la bonne direction.

Aujourd'hui, après la discussion au Sénat et les travaux de la CMP, deux amendements fiscaux, de nature différente, visent à favoriser le mécénat des entreprises. L'un offre aux entreprises, qui contribuent à l'achat par l'Etat d'un trésor national, une réduction d'impôt sur les sociétés égale à 90 % des versements effectués, en plafonnant cette baisse à 50 % du total de l'impôt à acquitter. L'autre accorde aux entreprises qui acquièrent elles-mêmes un trésor national menacé d'exportation une réduction de leur impôt sur les sociétés égale à 40 % du montant de l'achat. Devant ces deux dispositifs, je souhaite, Madame la ministre, non seulement que le Gouvernement respecte pleinement la volonté exprimée par le Parlement, mais qu'en outre, vous vous assuriez personnellement de la mise en _uvre rapide de ces mesures par les services du ministère des finances. A titre personnel, je regrette simplement que le taux de déduction fiscale n'ait pas été porté à 100 % au lieu de 90 % dans le cadre du premier dispositif. Une telle mesure, dont l'impact financier serait faible, conférerait à ce dispositif fiscal une force symbolique plus grande et une meilleure lisibilité, renforçant son impact auprès des entreprises, donc son efficacité culturelle.

En conclusion, le long travail d'élaboration du projet et le dialogue constructif entre les commissions et les rapporteurs de l'Assemblée et du Sénat ont permis d'aboutir à un texte qui répond globalement aux principales orientations de la mission d'information sur les musées, et à l'objectif de faire de ceux-ci de vrais outils de démocratisation culturelle. Si le Gouvernement ne vient pas, au cours de notre discussion, modifier l'économie du texte, le groupe Démocratie Libérale soutiendra volontiers cette modernisation du droit des musées.

M. Marcel Rogemont - L'après-midi commence bien !

M. Georges Hage - C'est donc par la procédure d'urgence que le Parlement aura examiné la réforme de l'ordonnance de 1945 portant organisation des musées de France. Cette procédure répond mal aux attentes, et ce n'est pas en légiférant ainsi que l'on rattrape le temps perdu.

M. le Président de la commission - Ah bon ?

M. Georges Hage - C'est faire peu de cas des précieux travaux de la mission d'information de notre Assemblée. Et le fait d'apposer un label de qualité sur des institutions que, en quelque sorte, on désacralise pour favoriser les initiatives locales ne résout pas certains problèmes cruciaux : insuffisance des personnels et des équipes scientifiques, insuffisance des moyens budgétaires pour l'achat et la conservation des _uvres, gratuité, fiscalité, nature des collections publiques, inaliénabilité des _uvres...

L'orateur de la onzième heure que je suis doit avouer que ce texte, que le groupe communiste votera, lui laisse un sentiment d'inachevé, que confirme le juridisme savant de notre rapporteur.

M. Michel Herbillon - Faut-il considérer cela comme une qualité ou comme un défaut ?

M. Georges Hage - Le temps s'en va, certes, mais la fin imminente de cette législature justifie-t-elle à elle seule une telle précipitation ?

M. Marcel Rogemont - Mais nous travaillons à ce texte depuis dix ans !

M. Bruno Bourg-Broc - Nous arrivons au terme de l'examen d'un projet dont les derniers débats ont permis de corriger les imperfections. Je salue particulièrement l'apport fructueux de nos collègues du Sénat à l'élaboration du texte définitif.

Il était important d'offrir un cadre législatif nouveau à des lieux de culture qui ont souvent su s'adapter pour répondre aux nouvelles attentes du public. Il fallait donc réformer l'ordonnance de 1945.

Je regrette cependant que le champ d'application du texte n'ait pas été mieux précisé. De ce fait, il concerne aussi bien les musées de l'Etat ne relevant ni de la direction des musées de France, ni du ministère de la culture qu'un ensemble très large de musées dépendant principalement des collectivités locales. En somme, l'article 14 demeure, sur le fond, inchangé en dépit des réserves que nous avons exprimées en première lecture, et la notion de « musée contrôlé » n'est pas mieux définie que dans le projet initial. Ainsi, je le souligne, une nouvelle fois, sous couvert d'un label « musée de France », l'Etat étend son contrôle sur un nombre très largement accru de musées.

Je suis satisfait des modifications apportées à l'article 7 du projet initial qui introduisait un avis préalable de l'Etat sur les acquisitions. Le Sénat a estimé très justement que les services de l'Etat n'avaient pas à connaître des acquisitions des musées nationaux. La CMP l'a suivi et choisi de soumettre toute acquisition d'un bien destiné à enrichir les collections d'un musée de France à l'avis d'instances scientifiques. Gageons que la publication du décret qui doit préciser la composition et les modalités de fonctionnement de ces instances ne contournera pas la volonté exprimée par le législateur.

La CMP a également suivi la proposition sénatoriale visant à modifier l'article 11 ainsi que l'opposition l'avait réclamé sans succès sur ces bancs. De ce fait, tout projet de restauration d'un bien faisant partie d'une collection d'un musée de France est précédé de la consultation des instances scientifiques déjà citées. Ces spécialistes pourront être reconnus compétents en raison de leur expérience professionnelle et pas uniquement en fonction de leur qualification. Voilà qui aidera, je l'espère, une gestion au plus proche ! Mais cette fois encore, le respect des intentions du législateur est suspendu au texte du décret.

Sur le plan fiscal, les dispositions affectant le produit brut des jeux dans les casinos et l'affectation du prélèvement de 1 % à l'acquisition de trésors nationaux ont été supprimées, mais je constate avec un certain soulagement que l'article 15 nonies proposé par le Sénat et retenu par la CMP rend possible la si nécessaire réduction d'impôt sur les sociétés ou d'impôt sur le revenu en cas d'achats de trésors nationaux par des entreprises. Dans le même esprit, l'article 15 decies exonère le vendeur de la taxe si la vente est faite au profit d'un musée de France ou d'une collectivité locale. Il est bon que le mécénat d'entreprise, dont notre patrimoine a tant profité, soit ainsi encouragé. Je salue donc la sagesse de la CMP, qui a bien voulu reconnaître la pertinence des amendements proposés par l'opposition et nos collègues du Sénat.

M. le Rapporteur - Et de la mission de l'inspection générale des finances !

M. Bruno Bourg-Broc - Cependant, le texte me laisse perplexe. Je sais le régime protecteur apporté par les nouvelles dispositions de l'article 8 au statut des collections. Néanmoins, la notion de « déclassement » des biens appelle une grande vigilance de notre part. Cette possibilité existe en droit mais elle est, de facto, inusitée, si bien que les collections ont acquis une inaliénabilité pratique. Pourquoi, alors, donner une nouvelle actualité à cette procédure ?

J'avoue avoir changé d'opinion à ce sujet, car j'ai été ébranlé par les avis exprimés par diverses associations auxquelles nous n'avons peut-être pas été assez attentifs. Je vous ai entendue, Madame la ministre, et j'ai lu les déclarations de madame la directrice des musées, mais les arguments avancés ne m'ont pas convaincu. La procédure est certes encadrée, mais les garanties apportées sont-elles suffisantes ? Je n'en suis pas certain et je ne souhaite pas que nous exposions notre patrimoine à la tentation du mercantilisme.

Compte tenu de ces réserves, le groupe RPR s'abstiendra lors du vote, tout en reconnaissant l'importance des progrès accomplis.

M. Marcel Rogemont - Il me paraît utile de rappeler que ce projet est le fruit d'une longue préparation, à laquelle nombre d'entre nous ont participé. Il ne s'agit donc en rien d'une loi préparée et votée à la sauvette, ou dans l'urgence, et chaque lecture constatera les progrès manifestes que permettra l'adoption du texte.

C'est un progrès tangible que de créer un label des musées tant les initiatives foisonnent, qui mêlent l'excellent, le bon et le moins bon. Aujourd'hui, c'est une boussole que nous offrons au public.

C'est un autre progrès tangible que de replacer la relation au public au c_ur des responsabilités des musées. Il y avait lieu, en effet, de réaffirmer avec force l'utilité sociale des musées, et de promouvoir la médiation culturelle.

Certes, la médiation culturelle existe déjà dans beaucoup de musées, mais elle sera reconnue plus encore et préconisée par la loi.

C'est un progrès tangible de doper les capacités d'achats contrôlés de biens culturels par le mécénat, tant il est vrai que davantage de fonds doivent être mobilisés pour aider l'Etat à maintenir notre patrimoine sur le territoire national, à l'accroître et à le présenter au public.

C'est ainsi que, pas à pas, nous nous acheminions vers un consensus lorsque, patatras, j'ai appris, en lisant la presse, que nous avions partie liée avec le pouvoir irresponsable de certains élus, qui effraye l'ex-directrice des musées de France. Pire encore, explique-t-elle, il est toujours tentant pour un maire de se dire qu'il existe un moyen facile de trouver de l'argent... et donc de créer un filon pour le marché de l'art.

Ces propos, venant de quelqu'un qui a exercé ces responsabilités, sont étonnants. Je peux vous affirmer, pour avoir consulté des juristes, qu'un maire peut vendre en toute légalité un bien culturel appartenant à la commune, après délibération du conseil municipal. Or il n'y a quasiment jamais eu de vente d'un bien appartenant à un musée ou à une commune depuis la dernière guerre. C'est la présente loi qui va instituer l'inaliénabilité irrévocable de tous les dons, legs et biens achetés avec l'aide de l'Etat. Pour les autres biens, l'avis d'une commission nationale sera requis. Cette protection n'existait pas auparavant. Dès lors, les propos de l'ancienne directrice des musées de France, outre qu'ils sont méchants, voire insultants pour les élus locaux, soulignent une réalité surprenante : l'inaliénabilité est plus dans les esprits que dans les textes. Et on nous reproche de vouloir l'inscrire dans la loi...

Nous attendions ce texte depuis une dizaine d'années. Nous le voterons sans réserve. En effet, une loi est une _uvre humaine, qui recherche certes l'excellence, mais sans être sûre de l'atteindre. Si des modifications sont ou deviennent nécessaires, elles seront faites. Il ne faut pas que le procès en excellence qu'on cherche à nous faire nous force à ne rien entreprendre !

Cette modernisation de l'environnement et du fonctionnement des musées inscrit plus que jamais les musées au c_ur des politiques de démocratisation culturelle. Voilà pourquoi le groupe socialiste votera ce projet de loi (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Christian Kert - Nous avons voté ce texte en première lecture et nous confirmons ce vote aujourd'hui, après avoir exprimé quelques réserves. La première raison en est que la philosophie générale de ce texte place le public au c_ur de la vocation du musée, cependant que se trouve quelque peu modernisé un édifice sur lequel on n'avait pas passé le torchon depuis 55 ans. Ce souci du public aurait pu conduire à réserver plus d'une seule place aux associations au sein du Haut conseil des musées de France.

Le mode de préparation de ce texte nous a convaincus de sa qualité. La mission qu'Alfred Recours a conduite dans un climat de consensus a permis d'aborder l'ensemble des questions avec passion, mais sans emportement politique. Il n'y a pas unanimité dans les analyses, mais tous les moyens de comparaison nous ont été donnés. Le débat mené avec les sénateurs en CMP a montré que des concessions avaient su être faites, sans nuire à l'ensemble de l'édifice.

Des amendements déposés par chacun des groupes politiques, ont permis de faire avancer sensiblement le texte, même si vous n'étiez pas très enthousiaste à leur égard et Bercy encore moins. Ce ministère, une fois n'est pas coutume, a fait preuve d'imagination et le volet fiscal du projet traduit une vision plus libérale qu'à l'origine des liens entre les musées et l'économie.

En ce qui concerne le caractère inaliénable des collections, nous sommes parvenus à une solution qui entrouvre une porte sans dogmatisme. Nous approuvons donc le fait que toute acquisition soit soumise à l'avis d'instances scientifiques, dont les modalités de fonctionnement seront fixées par décret. On peut simplement regretter ce renvoi permanent à des textes réglementaires. Nous approuvons également ce « verrou » selon lequel le Haut comité des musées de France est consulté pour toute aliénation, avec droit de préemption de l'Etat.

La notion de mise en réseau est consacrée. Les prêts et dépôts des _uvres appartenant à l'Etat seront organisés par décret. Le Haut conseil formulera des recommandations relatives à leur circulation. Je suis enfin particulièrement satisfait que les spécialistes de la restauration des _uvres soit reconnus non seulement en fonction de leur qualification, mais aussi de leur expérience professionnelle.

Reste que les dispositions sur le caractère inaliénable des _uvres ont alarmé des conservateurs et des associations. L'une d'elle écrit que la loi qui va nous être soumise ouvre la possibilité de vendre ce patrimoine rassemblé par nos prédécesseurs pendant des siècles.

M. Michel Herbillon - Caricature !

M. Christian Kert - Il faudra donc faire une explication de texte et montrer que le Parlement est soucieux de garantir la pérennité des collections.

La CMP a connu une autre avancée décisive, concernant les dispositions fiscales. Bercy a dû consentir quelque sacrifice et c'est tellement inhabituel qu'on ne peut même pas regretter, Madame la ministre, que ce ministère se soit substitué au vôtre en cours de débat. En matière de mécénat, la France avait pris du retard sur bon nombre de ses voisins qui ont compris bien avant nous que le 1 % culturel ne suffisait pas. Les dispositions évitent de taxer, ainsi que cela avait été proposé en première lecture, la Française des jeux ou les casinos. En voilà qui auront senti le vent du boulet et qui peuvent toujours craindre que l'idée ne rebondisse.

Enfin, nous voterons ce texte parce qu'il contient des dispositions de moindre importance, mais qui faisaient défaut. Je n'en citerai qu'une, dont de récents événements ont montré qu'elle était indispensable : la disposition selon laquelle l'Etat peut mettre en demeure un propriétaire de remédier à la situation de péril que connaît un monument classé. M. Sarre évoquait la grève du personnel du musée de l'homme qui craint que le déménagement des collections d'ethnographie et de la bibliothèque du musée ne préfigure sa fermeture. En Provence, une municipalité a voulu fermer un musée d'art et de traditions populaires, sous couvert de le transporter dans un autre musée. L'article 12 comble un vide juridique dont il est étonnant qu'il n'ait pas créé de situation d'urgence dans le passé.

Pourquoi fallait-il légiférer ? Pour distinguer les lieux de mémoire collective de ces échoppes qui abusent du terme générique de musée à des fins commerciales (M. le président de la commission approuve). Pour continuer à être ouverts sur le monde, les musées avaient besoin d'une règle du jeu. Le caractère inaliénable des collections doit en être la base. C'est ainsi que je comprends ce texte, et les conservateurs qui soulignent que la tradition française inclut le caractère inaliénable et imprescriptible des collections, l'apprécieront. Nous n'envisageons que des exceptions rares et encadrées. C'est sur cette base que nous accepterons de voter ce texte (Applaudissements sur les bancs de la commission).

M. le Rapporteur - Je voudrais répondre à quelques objections. Monsieur Sarre, les articles 4 et 12 répondent à vos préoccupations en ce qui concerne le contrôle et la mise en demeure nécessaires pour assurer la sécurité des collections.

Ce qu'avait proposé M. Herbillon à l'Assemblée en ce qui concerne les artistes vivants avait été suggéré, lors d'une audition menée pour la commission, par Mme Françoise Cachin, alors directrice des musées de France. Il n'a fait que reprendre ce que nous avions tous entendu alors (M. Michel Herbillon approuve).

M. Hage m'a accusé de faire du juridisme, ce dont je serais bien incapable, même si, députés de la nation, nous sommes là pour faire du droit. Mais quel dommage que M. Bourg-Broc ne m'ait pas soutenu, comme il l'a fait aujourd'hui à la tribune, lors de la CMP ? Si cela avait été le cas, nous en serions restés à la rédaction de l'Assemblée nationale et n'aurions pas eu besoin d'un compromis. Mieux vaut tard que jamais...

Notre collègue Hage parle de précipitation. Non : l'élaboration de ce texte, au contraire, aura été exemplaire. C'est grâce au travail préalable d'une mission d'information de l'Assemblée nationale pendant près de deux ans qu'un projet de loi a pu être rédigé ; la procédure législative elle-même, qui a commencé au mois de mars et s'achèvera en janvier par la promulgation de la loi, aura duré neuf mois.

A Marcel Rogemont, et aussi à Georges Sarre, je voudrais dire que le label est d'abord une charte, culturelle, scientifique, et de service public.

A vous, Monsieur Kert, je dirai que nous sommes sur la même longueur d'onde. En cas d'ambiguïté, nos débats eux-mêmes auront valeur juridique ; or l'Assemblée nationale s'est exprimée à l'unanimité en faveur d'une protection absolue de nos collections publiques dans le respect de certains principes, en particulier celui de la libre administration des collectivités locales.

Nous avons un bon texte, qui même s'il doit un jour être complété, va constituer un socle juridique. Il démontre que des parlementaires qui ont assez de passion pour les musées pour y consacrer près de deux ans ne sont pas des débiles sans culture ! Il en est de même pour les maires et les conseillers municipaux, qui sont les plus attachés à la conservation de leur patrimoine local.

Ni débiles, ni casseurs de patrimoine, ni vendeurs des trésors nationaux, nous pouvons être fiers de ce que nous avons fait pour défendre notre patrimoine (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. le Président de la commission des affaires culturelles - Je partage l'exaspération d'Alfred Recours, que vous me permettrez de dissimuler sous un peu d'humour.

En écoutant des membres importants de la majorité plurielle comme M. Sarre et M. Hage, je pensais à Soubise à la recherche de son armée. Heureusement, Madame la ministre, le soutien du groupe socialiste vous est acquis. Je vous propose qu'on organise une conférence à l'Académie des Beaux-arts sur le thème « De l'impossibilité de vente des bijoux de la couronne et de la protection du patrimoine national » ! Il est quand même exaspérant que sur un texte aussi clair, qui crée des garanties juridiques, les difficultés de communication soient aussi grandes. Peut-être les explications sont-elles à chercher dans des arrière-pensées politiciennes...

Monsieur Sarre, le label « musée de France » devrait résonner agréablement à vos oreilles.

M. Georges Sarre - Pourquoi ?

M. le Président de la commission des affaires culturelles - Parce que c'est joli, parce qu'il y a « musée » et parce qu'il y a « France ».

M. Georges Sarre - Là, ça devient drôle !

M. le Président de la commission des affaires culturelles - Ce label crée des obligations - conserver et présenter une collection « en vue de la connaissance, de l'éducation et du plaisir du public » - et donne aux musées des moyens de reconnaissance. Les « personnes morales de droit privé sans but lucratif » visées sont en général des structures associatives, des fondations, et pourront être les établissements publics de coopération culturelle dont nous allons débattre tout à l'heure.

Pour le Haut conseil nous avons retenu une composition équilibrée. Laissons là les critiques : c'est petit.

Je retiens, comme M. Recours, que pendant plus d'un an des parlementaires issus de tous les groupes ont travaillé ensemble, que le Gouvernement les a écoutés et a déposé en conséquence un projet de loi, que le débat parlementaire aura duré près de dix mois. C'est dire que ce texte est exemplaire de la collaboration qui est possible entre le Parlement et le Gouvernement dans l'élaboration des textes. Le reste est secondaire, je n'oserais dire médiocre ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

Mme la Ministre - Précipitation, disiez-vous, Monsieur Hage ? Le rapporteur et le président de la commission vous ont déjà répondu. Non, alors que la fin de cette législature approche, il ne s'agit pas de précipitation, mais de sens des responsabilités. J'ai trouvé en arrivant au ministère un projet qui était, pour employer un terme de marine, totalement « empanné ». Si le président Le Garrec n'avait pas pris l'initiative de confier une mission à M. Recours et à l'ensemble des parlementaires qui s'intéressaient au sujet, je ne suis pas sûre que j'aurais été plus productive que mes prédécesseurs.

Peu de textes auront été autant que celui-ci préparés en synergie entre le Gouvernement et le Parlement. Cela m'a bien aidée à faire bouger des services que des années de préparation infructueuse avaient sans doute un peu découragés.

Monsieur Sarre, le rapporteur et le président vous ont déjà répondu, et, pas plus qu'eux je ne peux admettre l'objection d'un dessaisissement de l'Etat. Le label unique permettra d'entraîner des musées qui n'en sont pas nécessairement coutumiers à assumer des missions et des contraintes de service public. Ce projet répond également à la grande question de la décentralisation, autrement dit du juste concours des initiatives entre l'Etat et les collectivités territoriales. Je ne peux pas croire, Monsieur Sarre, que vous y soyez défavorable.

En matière de déclassement, toutes les conditions nécessaires ont été posées, même si nous avons tous à faire un effort pédagogique pour apaiser certaines inquiétudes suscitées par l'article 8.

A propos du Musée de l'Homme, et sans me substituer au ministre de l'éducation nationale à qui je transmettrai vos propos, je signale que le transfert des collections au musée du quai Branly n'a qu'un seul but, mieux les conserver, mieux les exposer.

Monsieur Herbillon, merci de nous avoir donné acte du formidable développement des musées, dû aux efforts de l'Etat et des collectivités territoriales. Permettez-moi de souligner le constant effort de notre majorité dans ce domaine. Le Gouvernement n'a évidemment pas l'intention de nuire à la pérennité de nos collections, ni de favoriser le déclassement ou la sortie des _uvres.

M. Michel Herbillon - Ma réflexion concernait leur circulation.

Mme la Ministre - Alors nous nous rejoignons ! La politique d'échange que nous voulons développer vise à exhumer certaines _uvres, pour le profit de tous. Je vous remercie aussi d'avoir rappelé le dispositif qui confie les dépôts de l'Etat antérieurs à 1910 aux collectivités locales, qui ont gagné leurs galons en matière de protection du patrimoine. Sur l'article 8, je vous dirai comme à M. Kert que nous aurions préféré, nous aussi, qu'on en reste à la rédaction initiale. Mais le Sénat a été inspiré par sa grande pratique du droit, notamment en matière de domanialité publique. Et le texte issu de la CMP assure effectivement toute la sécurité souhaitable pour nos collections. Mais je regrette que cet article 8 lève des inquiétudes telles que M. Bourg-Broc renonce à le soutenir...

Je remercie M. Rogemont d'avoir placé le débat dans la perspective de la politique culturelle globale. Oui, ce texte constitue une innovation majeure pour la politique muséale de la France. Il place l'accueil du public au premier plan tout en garantissant la protection efficace de nos collections. Monsieur Kert, ce texte ne se borne pas à « sauvegarder » l'essentiel, il institue le dispositif de protection dont nous manquions, et cela résulte du travail de l'ensemble des parlementaires, qui ont su concilier un nouvel essor du service public et notre tradition de conservation du patrimoine national. Je les en remercie donc très sincèrement (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. le Président - Conformément à l'article 113, j'appelle l'Assemblée à statuer sur les amendements.

Mme la Ministre - L'amendement 2 est d'ordre rédactionnel. La dernière phrase du quatrième alinéa de l'article 3 impose « en cas du retrait du label musée de France », à la demande du bénéficiaire, que les biens acquis dans certaines conditions impliquant un concours financier ou une intervention de l'Etat, soient transférés à un autre Musée de France. Préciser ensuite « dans ce cas », cela risquerait de n'imposer cette condition qu'aux seuls musées ayant bénéficié de concours financiers publics. Cette restriction serait intempestive.

M. le Rapporteur - Je rappelle, dans un souci pédagogique, qu'à ce stade du débat, seul le Gouvernement peut déposer des amendements. L'amendement 2 du Gouvernement lève une ambiguïté et nous ne pouvons qu'y être favorables.

L'amendement 2, mis aux voix, est adopté.

Mme la Ministre - Avec l'amendement 1, le Gouvernement vous propose une architecture fiscale plus simple et mieux ciblée. Il souhaite que sa formule se substitue, et non s'ajoute à un dispositif qui s'est révélé inefficace.

Après avoir pensé à un plafonnement à 10 % de l'impôt sur les sociétés, le Gouvernement a entendu les observations pertinentes de la CMP.

Aussi cet amendement conserve-t-il la limite de 50 % adoptée par le Sénat.

Je rappelle que le Gouvernement ne revient pas sur l'article 238 bis-O AB qui prévoit la possibilité, après agrément du ministre de l'économie, d'une réduction d'impôt égale à 40 % des sommes consacrées à l'achat de trésors nationaux. Pendant dix ans, ils devront être placés en dépôt auprès d'un musée de France ; ils ne peuvent être cédés pendant ce délai et ne pourront pas sortir du territoire national.

M. le Rapporteur - Cet amendement 1 reprend le texte du Sénat, à une différence près : il supprime celui que j'avais fait adopter par la CMP, et qui prévoyait de maintenir des dispositions anciennes, parallèlement aux nouvelles. Je ne regrette pas de l'avoir déposé, car il a alimenté la discussion, qui, du coup, a moins porté sur d'autres aspects peut-être plus importants... (Sourires).

La commission ne peut qu'être favorable à la proposition du Gouvernement.

C'est un fait que l'application de l'article 238 bis-O A n'a pas été satisfaisante du fait des contraintes exercées par les services fiscaux, lesquels opposaient notamment une condition stricte d'exposition au public.

Je crois avoir dissipé toute ambiguïté sur les raisons qui nous ont conduits à accepter la demande du Gouvernement.

L'amendement 1, mis aux voix, est adopté.

M. Bruno Bourg-Broc - Abstention !

M. Georges Sarre - Abstention sur l'ensemble !

L'ensemble du projet de loi, modifié par les amendements qui viennent d'être adoptés, mis aux voix, est adopté.

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ÉTABLISSEMENTS PUBLICS DE COOPÉRATION CULTURELLE -deuxième lecture-

L'ordre du jour appelle la discussion en deuxième lecture de la proposition de loi relative à la création d'établissements publics de coopération culturelle.

M. Michel Duffour, secrétaire d'Etat au patrimoine et à la décentralisation culturelle - Chacun peut noter le très fort intérêt que suscite le nouvel outil décentralisé de coopération que constitue l'établissement public de coopération culturelle. Je salue aussi la rigueur des analyses des deux assemblées, et en particulier la vôtre, Monsieur le rapporteur. Lors de la deuxième lecture intervenue au Sénat la semaine dernière, plusieurs amendements de simplification ont été adoptés à l'initiative du sénateur Renar. Il vous reviendra de choisir in fine la rédaction la mieux adaptée pour traduire des approches somme toute consensuelles.

Deux points adoptés par le Sénat appellent en revanche un avis défavorable du Gouvernement.

Il s'agit en premier lieu de l'article additionnel visant à exonérer les EPCC à caractère industriel et commercial de l'impôt sur les sociétés. Le Gouvernement considère qu'un tel article, en ce qu'il incite à la réalisation du maximum de bénéfices, est contradictoire avec une démarche de service public, fondée sur une politique tarifaire adaptée. D'autre part, tel qu'il est rédigé, cet amendement comporte une exception lourde au principe d'égalité devant l'impôt.

Le deuxième point de différence entre vos assemblées et le Gouvernement tient à l'article 3, lequel traite de la possibilité pour les EPCC à caractère administratif de recruter des agents en contrat à durée indéterminée de droit public. Le Gouvernement y est fermement opposé car il est résolu à ne compromettre en aucune façon les statuts existants des fonctions publiques - et, singulièrement, de la filière culturelle. D'autre part, le nombre d'emplois concernés est très restreint : si l'on veut bien considérer que la loi donne l'entière responsabilité aux partenaires de déterminer le caractère de l'établissement et qu'elle autorise les subventions d'équilibre aux EPCC à caractère industriel et commercial, il ne subsiste aucun risque de requalification d'un établissement à l'occasion d'un contentieux portant sur un contrat de travail. La loi n'est plus silencieuse et le juge pourra désormais s'appuyer sur la volonté explicite du législateur. Enfin, il reste possible d'individualiser dans un établissement public à caractère administratif une activité accessoire de type commercial - par exemple une librairie ou une boutique de musée - et de procéder aux recrutements afférents dans le cadre du droit du travail.

Si vos efforts n'ont pas permis d'aboutir à un texte conforme, je considère que nous sommes très près du but pour que soit posé ce premier jalon essentiel de la décentralisation culturelle (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et du groupe socialiste).

M. Marcel Rogemont, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales - La présente proposition de loi vise à créer un nouvel outil pour les politiques publiques culturelles et à favoriser leur gestion en commun par les différents partenaires publics. Elle tend à additionner les énergies, dans un esprit de responsabilités partagées. Un large consensus s'est du reste dégagé sur ses objectifs et je remercie tous ceux qui y ont concouru. De même, j'ai bon espoir que nous parvenions rapidement à une position commune avec le Sénat.

S'agissant du statut, il me semble utile de rappeler que l'EPCC peut être un établissement à caractère administratif ou à caractère industriel et commercial. Dès lors, faisons confiance aux fondateurs pour faire le bon choix. Ainsi, le caractère administratif sera de mise pour un musée, compte tenu des collections qui ont un caractère public et il en ira de même pour un conservatoire ou une école d'art. De la même façon, il est patent que le spectacle vivant ressortira du caractère industriel et commercial. Nous n'avons pas souhaité préciser ce point dans la loi afin de ne pas attenter à la liberté des fondateurs et de ne pas limiter le champ, nécessairement étendu, de l'EPCC.

Il convient ensuite de préciser que ce texte n'a pas vocation à résoudre tous les problèmes qui se posent dans le secteur culturel.

Ainsi, nombre d'élus considèrent à bon droit que la fonction publique territoriale est lourde et qu'en dépit de leur diversité les filières culturelles ne prennent qu'imparfaitement en compte la richesse des situations d'emploi. Sans doute leur réflexion est-elle fondée, mais il ne revient pas au présent texte d'y remédier.

De même, les reconductions de CDD occupés par là même personne sur un même poste pose un problème de principe non négligeable et la Commission européenne a demandé au Gouvernement de proposer une solution institutionnelle, mais, là encore, on ne réglera pas cette question de fond au travers du texte instituant les EPCC.

La proposition de loi n'a pas davantage vocation à trancher sur le statut fiscal des activités culturelles à caractère non lucratif. A cet égard, le Sénat nous propose de supprimer l'impôt sur les sociétés pour les EPCC. Mais pourquoi cet impôt plutôt que la TVA sur les subventions ou la taxe professionnelle ?

Dès lors, il me semble essentiel de ne pas s'écarter de notre objectif initial, lequel fait l'objet d'un large consensus.

En adoptant cette proposition de loi, nous répondons enfin à la demande des élus qui attendent depuis longtemps un dispositif adapté pour conduire, en coresponsabilité avec l'Etat, des politiques culturelles proches de leurs administrés et novatrices (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Bruno Bourg-Broc - Lors de la première lecture de cette proposition de loi, un large consensus a été atteint et je m'en réjouis. En ouvrant plus largement le statut d'établissement public au service public de la culture, la politique culturelle gagne en clarté. De même, la nouvelle structure juridique qu'il nous est proposé d'instituer offrira la personnalité morale et l'autonomie financière nécessaires tout en appliquant de véritables contrôles financiers et de légalité. Ainsi, nous contribuons une nouvelle fois à l'effort de décentralisation culturelle, laquelle doit favoriser l'accès de tous à la culture.

Du reste, nos collectivités avaient besoin d'une structure juridique favorisant les synergies. Dès lors, je me félicite que ce texte affirme le principe de coopération entre les collectivités territoriales. L'Etat, les régions, les départements, les communes trouvent ici un moyen précieux de conjuguer leurs efforts. Cette coopération s'exprimera notamment dans le choix des directeurs. Ce texte intéresse tous les acteurs de notre politique culturelle : l'Etat, les collectivités locales et, bien sûr, les personnels et professionnels du spectacle. Et je tiens à regretter une nouvelle fois que ces derniers n'aient pas été mieux associés à la préparation de ce texte et qu'il soit notamment fait peu d'écho aux besoins des entreprises culturelles productrices de spectacles vivants.

J'ai souligné en première lecture l'enjeu d'une telle proposition. Elle crée moins une nouvelle catégorie qu'un véritable nouveau type d'établissements publics. Ces organismes ne relèveront pas d'une collectivité territoriale de rattachement et les communes et départements pourront désormais subventionner des établissements de ce type malgré le caractère industriel et commercial du service. Mais le texte aurait pu ouvrir de nouvelles possibilités dans le mode de recrutement des personnels de la fonction publique, en permettant aux personnels des services publics concernés de conserver le bénéfice de leur contrat à durée indéterminée. Ce n'est pas le cas et je le regrette vivement.

M. le Rapporteur - Mais c'est le cas !

M. Bruno Bourg-Broc - Des établissements nationaux bénéficient pourtant d'une telle faculté, comme le Musée et le domaine national de Versailles, le centre Georges Pompidou ou la réunion des musées nationaux. Le Sénat, qui a unanimement adopté le texte, a tenu bon sur cette question, compte tenu de la spécificité des personnels. Je suis porté à le suivre. L'Etat, les collectivités ne peuvent être présents dans un nombre croissant de domaines sans faire preuve de souplesse.

On ne peut vouloir clarifier, on ne peut condamner un recours excessif de nos collectivités à la gestion privée, on ne peut publiciser, sans proposer de conserver une certaine souplesse. Le Sénat proposait d'étendre cette possibilité à un secteur limité qui offre un bon moyen pour l'Etat d'expérimenter de nouvelles formes de recrutement. Notre commission a choisi de ne pas en tenir compte, préférant suivre la position du Gouvernement. C'est dommage : il y avait là, pour l'avenir et dans certains domaines d'activité, de quoi répondre à la situation précaire des contractuels de l'Etat sans recourir aux lourdeurs des titularisations. C'était aussi un bon moyen de répondre aux nécessités démographiques de recrutement de la fonction publique. Au demeurant, j'ai bien entendu les objections de notre rapporteur.

La proposition de loi s'en trouve affadie, elle ne se dote pas des moyens qu'appellent les exigences de l'action culturelle, lesquelles ne sont pas moindres au niveau local qu'à l'échelon national. Le Parlement avait l'occasion de manifester son unité devant un sujet relevant de l'intérêt public, ce qui est rare. Pourtant le groupe RPR, ne pouvant voter le texte, choisit de s'abstenir.

M. Georges Hage - En cette deuxième lecture, nous prenons acte de l'évolution du texte. Ce nouveau type d'établissement public offrira une structure juridique fiable aux partenariats entre l'Etat et les collectivités ou entre les collectivités elles-mêmes. Qui plus est, il ouvrira le champ à la multiplication d'initiatives culturelles, mettant en valeur toute créativité locale. Notre assemblée a d'autre part ouvert la possibilité de créer ces établissements sans la participation de l'Etat qui aura donc, comme les autres partenaires, la faculté de décider d'y entrer ou non. Mais le souci que nous avons exprimé en première lecture, demeure : il faut que soit prégnante la présence de l'Etat, comme régulateur et garant d'une politique culturelle nationale. Avec la création du nouveau type d'établissement public, l'Etat voit sa responsabilité accrue. Il devra plus que jamais veiller aux déséquilibres conjoncturels qui risquent d'engendrer une décentralisation à la carte et des disparités entre les territoires.

Ce type d'établissement comme son futur fonctionnement participent des évolutions qui émergent dans le champ culturel : la culture suscite aujourd'hui des connivences, des échanges ressentis par les publics eux-mêmes, les créateurs, les professionnels. En conséquence, la composition et le fonctionnement du conseil d'administration ainsi que la nomination du directeur, illustrent ce besoin de collégialité - encore faut-il l'écouter et l'intégrer.

Reste un désaccord plus fondamental entre nos deux assemblées qui porte sur l'emploi et les statuts. Le Sénat propose qu'il soit possible aux EPCC à caractère administratif de recruter des contractuels sur des contrats à durée indéterminée n'ayant point d'équivalent dans la fonction publique. Nous avions alors émis un avis défavorable. Il est vrai que certains arguments militent en faveur de la proposition du Sénat mais, aux yeux des personnels, cela déroge au code général de la fonction publique. Toutefois, en refusant de considérer cette souplesse nouvelle, ne va-t-on point susciter la création systématique d'EPIC ?

Par ailleurs, nous réitérons notre souhait de voir rénover la grille des métiers du champ culturel dans la fonction publique territoriale comme dans la fonction publique en général.

La commission rétablit le texte dans sa version de première lecture, et la différence entre nos deux assemblées demeure. Mais ce travail me laisse un goût d'inachevé, comme un refus de creuser le débat assez pour se donner vraiment les moyens de la réflexion et du choix. Pour l'heure, le groupe communiste émettra un vote favorable.

M. Christian Kert - Dès la première lecture, on a relevé la difficulté propre à la préparation de la discussion d'une proposition de loi. Son auteur, en effet, ne bénéficie pas des moyens humains et matériels d'une commission permanente. Il lui est donc difficile, par exemple dans le cas présent, de consulter l'ensemble des acteurs culturels. C'est ce qui s'est passé en première lecture, où les animateurs du spectacle vivant se sont sentis quelque peu délaissés. En deuxième lecture, cette lacune a dû être atténuée, car les consultations ont eu lieu au gré des demandes d'audition. Les résultats auxquels nous parviendrons aujourd'hui devraient donc faire que les futures EPCC répondent à l'attente de tous.

L'objectif demeure évidemment le même : créer un nouveau type d'établissement public pour permettre aux grandes institutions culturelles, essentiellement en région, d'affirmer leur identité et leur personnalité. Nous le savons, dans le maillage culturel de notre territoire, les collectivités territoriales sont pleinement parties prenantes. De ce fait, elles sont souvent confrontées à un problème de cohérence entre leurs différents interlocuteurs ; le problème se pose aussi quand il s'agit de mettre en place des financements croisés. L'enjeu du texte est d'offrir à cette coopération une structure juridique, dont le statut devra répondre à trois préoccupations essentielles.

Il doit d'abord être adapté à la spécificité des services culturels, tout en maintenant un partenariat équilibré entre les collectivités territoriales et l'Etat. Ici se situe d'ailleurs un des points d'achoppement avec le Sénat. Dans son texte de première lecture - auquel les amendements de la commission proposent aujourd'hui de revenir - l'Assemblée précisait que la présence de l'Etat n'était pas toujours indispensable dans la création d'un EPCC, même si elle reste toujours possible. L'article 2, voté conforme, confirme d'ailleurs la possibilité de créer un EPCC entre collectivités et sans l'Etat. Il ne s'agit pas d'entériner un désengagement de l'Etat. Mais, puisque c'est un partenariat que nous voulons instaurer, la loi n'a pas à imposer les partenaires qui composeront l'établissement. C'est une démarche volontaire qu'ils devront faire, et cela dans une large concertation, que le texte organise bien. L'Etat restera de toute façon présent par la tutelle du Préfet, qui s'exerce lors de la signature de l'arrêté de création de l'établissement.

Demeure en revanche la question humainement essentielle du statut des personnels et des directeurs et j'entends ce qu'en dit notre rapporteur. Comme nous l'avons dit en première lecture, on ne saurait voter une loi qui ne réglerait pas ces problèmes de statuts. Très vite les élus territoriaux se heurteraient à l'hostilité des personnels que la création des EPCC laisserait dans l'incertitude, voire sur le bord du chemin professionnel. A l'initiative de son rapporteur, la commission a de nouveau supprimé la disposition du Sénat qui permettait aux EPCC de recruter, par des contrats à durée indéterminée, des agents destinés à occuper des emplois permanents dans des activités de communication, de diffusion culturelle, d'édition ou à caractère commercial comme cela existe déjà dans de nombreuses structures culturelles. La version proposée par le Sénat lors de sa deuxième lecture introduit une souplesse en quelque sorte encadrée, qui ne gêne en rien l'évolution plus globale, actuellement en cours, de la fonction publique. Je regretterai que cette version ne soit pas maintenue, car la gestion culturelle nécessite des compétences très pointues.

Enfin, qu'en est-il du volet fiscal ? Les sénateurs ont eu le souci, dans un nouvel article 4, d'exonérer les EPCC de l'impôt sur les sociétés, ce qui est opportun pour ces établissements d'intérêt général. Cette préoccupation, nous l'avions exprimée le 11 octobre dernier, en demandant si la loi ne devrait pas prévoir la « vie fiscale » de ces établissements. Comme l'a précisé le rapporteur du Sénat, cet article pose le problème de la fiscalité des services publics culturels en France. C'est un vrai débat, et il faudra le traiter un jour, si nous ne le faisons pas aujourd'hui.

En revanche, les sénateurs ne m'ont pas entendu sur la question de savoir qui déclenche le processus de sortie de l'EPCC. Si ses partenaires ne sont plus en harmonie sur les objectifs ou les modes de gestion, comment se séparer ? Cette question reste sans réponse. Quelques amendements proposent d'anticiper sur la sortie de l'établissement, et je les soutiendrai. Pour le reste, nous confirmerons notre vote favorable de première lecture.

M. Gilbert Gantier - A l'issue de la première lecture de cette proposition d'origine sénatoriale, un large consensus a été trouvé, dont on ne peut que se féliciter. Certes, des divergences subsistent, mais sur le principe, nous sommes tous d'accord : un nouvel outil de décentralisation culturelle est nécessaire, car élus, créateurs, artistes et responsables souffrent de l'absence d'une structure permettant d'organiser le partenariat entre l'Etat et les collectivités territoriales. Le texte remédiera à cette carence. Il le faut, car les collectivités interviennent largement dans le domaine culturel, au point que leurs dépenses en ce domaine sont équivalentes à celles de l'Etat. Le texte devrait donner une nouvelle impulsion à la décentralisation culturelle.

Deux divergences demeurent cependant entre députés et sénateurs, mais je ne doute pas que la CMP permettra de trouver un terrain d'entente.

La première concerne la procédure de création des EPCC. Comme l'a souligné le rapporteur au Sénat, il semble inutile, dans le cas où l'Etat participe à la constitution de l'établissement, qu'une décision concordante du préfet exprime l'accord de l'Etat avant la publication de l'arrêté de création. Cet ajout alourdit la procédure et fait craindre que le droit d'initiative donné aux collectivités territoriales ne soit ainsi remis en cause. L'arrêté de création suffirait à officialiser l'accord de l'Etat. Je préférerais donc que l'on en reste à la version du Sénat.

La seconde divergence est plus importante. Elle porte sur le statut des personnels. Les sénateurs ont prévu la possibilité pour les EPCC de recruter des personnels en CDI pour occuper des emplois permanents auxquels ne correspond aucun cadre d'emploi de la fonction publique territoriale. Cette disposition est essentielle au bon fonctionnement des services de communication, d'édition, d'organisation de manifestations exceptionnelles, de restauration et des boutiques.

Puisque ce problème a été résolu pour les établissements nationaux grâce à l'article 3 de la loi de 1984 portant dispositions relatives à la fonction publique d'Etat, pourquoi ne le serait-il pas pour les EPCC ? La proposition des sénateurs est d'ailleurs très restrictive, la possibilité de recrutement des non-fonctionnaires ne concernant qu'un petit nombre de postes.

Il ne s'agit pas de remettre en question les principes de la fonction publique mais simplement d'offrir une souplesse nécessaire. A quoi bon favoriser l'implantation en régions de ces établissements s'ils n'ont pas les moyens de mener une véritable politique de diffusion culturelle comme peuvent le faire certains établissements nationaux ?

Ces réserves mises à part, je constate que l'équilibre général du texte est maintenu. Le groupe Démocratie libérale soutiendra donc cette proposition qui répond à la préoccupation permanente des collectivités locales, des artistes et des professionnels de la culture. Nous sommes sur la bonne voie, et il serait vraiment dommage que la CMP ne parvienne à concilier les points de vue.

Enfin, nous souhaitons aussi, par ce vote, rappeler notre attachement au développement de la décentralisation culturelle (Applaudissements sur les bancs du groupe DL, du groupe du RPR et du groupe UDF).

La discussion générale est close.

M. le Rapporteur - Je me félicite, comme mes collègues, que la navette ait permis une concertation renforcée. C'est une bonne chose. Je rappelle à Bruno Bourg-Broc que les seules complications possibles, en matière de statut du personnel, concerneraient les entités de droit privé qui se transformeraient en EPCC à caractère administratif. Encore faut-il souligner que le personnel d'origine conserverait son statut : le CDI.

A cet égard, le problème du recrutement de personnel de droit public en CDI concerne l'ensemble de la fonction publique territoriale. Il n'y a donc pas lieu d'établir une distinction pour les EPCC.

Je suis d'accord avec Christian Kert : personne ne doit être laissé au bord du chemin - et personne ne le sera, qu'il s'agisse de salariés passant du secteur public au secteur privé ou l'inverse. Il convient donc de ne pas créer des problèmes imaginaires.

Enfin, Monsieur Gantier, il ne me semble pas possible que l'Etat doive attendre la parution du décret portant création d'un EPCC pour donner son avis. Mais j'espère, comme vous, que la CMP trouvera une solution satisfaisante.

M. le Président - En application de l'article 91, alinéa 9, du Règlement, j'appelle dans le texte du Sénat les articles du projet de loi sur lesquels les deux assemblées n'ont pu parvenir à un texte identique.

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ARTICLE PREMIER

M. le Rapporteur - L'amendement 1 est de retour au texte adopté par l'Assemblée nationale en première lecture. Il faut en effet disposer explicitement que les collectivités et leurs groupements peuvent constituer un EPCC sans la participation de l'Etat.

M. le Secrétaire d'Etat - Sagesse.

L'amendement 1, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - Les amendements 2, 3 et 4 sont de retour au texte adopté par l'Assemblée en première lecture.

Les amendements 2, 3 et 4, acceptés par le Gouvernement, sont adoptés.

M. le Rapporteur - L'amendement 5 précise que la politique de l'EPCC est déterminée par le conseil d'administration à partir des propositions faites par le directeur, dont il souligne donc la responsabilité.

M. Christian Kert - L'amendement 10 est défendu.

M. le Secrétaire d'Etat - Avis favorable à l'amendement 5, qui précise le rôle du directeur sans rien enlever des pouvoirs du conseil d'administration.

L'amendement 5, mis aux voix, est adopté.

M. Christian Kert - L'amendement 12 est défendu.

M. le Rapporteur - L'amendement 6 reprend la même idée : les directeurs des EPCC sont choisis sur une liste, après appel à candidature. Mais l'amendement 12 ajoute qu'ils sont choisis « sur la base d'un projet artistique et culturel ». Or tous les EPCC n'ont pas de tel projet. Ne mettons pas trop de précisions dans la loi ; Monsieur Kert, accepteriez-vous de retirer cet amendement ?

M. Christian Kert - Oui.

M. le Secrétaire d'Etat - Je suis favorable à l'amendement 6.

L'amendement 6 est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 7 est un retour au texte de l'Assemblée.

L'amendement 7, accepté par le Gouvernement, est adopté.

M. Christian Kert - L'amendement 13 est défendu.

M. le Rapporteur - Il s'agit d'inscrire dans la loi les conditions de sortie de l'EPCC. Mais les statuts ont toujours vocation à prévoir ce genre de choses. Ce sont les intéressés, c'est-à-dire les collectivités territoriales et éventuellement l'Etat, qui doivent régler ces modalités lors de l'élaboration du statut.

M. le Secrétaire d'Etat - Avis défavorable. Les conditions de sortie de l'EPCC relèvent des partenaires et sont réglées lors de l'élaboration du statut. Il faut leur laisser cette liberté.

M. Christian Kert - Je ne partage pas votre optimisme quant à la sagesse des partenaires.

L'amendement 13, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Christian Kert - L'amendement 14 est défendu.

L'amendement 14, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'article premier, modifié, mis aux voix, est adopté.

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ART. 4

M. le Rapporteur - Je me suis déjà longuement exprimé sur cet article, par lequel le Sénat exonère d'impôt sur les sociétés tous les EPCC. Il s'agit d'une question de caractère général qui n'a pas à être traitée ici et par l'amendement 8 la commission propose la suppression.

M. le Secrétaire d'Etat - Favorable. Je me suis déjà exprimé sur ce sujet au Sénat et ici même.

L'amendement 8, mis aux voix, est adopté et l'article 4 est ainsi supprimé.

L'ensemble de la proposition de loi, mis aux voix, est adopté.

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      SÉCURITÉ DES TRANSPORTS -CMP-

M. le Président - M. le Premier ministre soumet à l'Assemblée nationale le texte de la commission mixte paritaire sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif à la sécurité des infrastructures et systèmes de transport et aux enquêtes techniques après événement de mer, accident ou incident de transport terrestre.

En conséquence l'ordre du jour appelle la discussion du texte élaboré par la commission mixte paritaire sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif à la sécurité des infrastructures et systèmes de transport et aux enquêtes techniques après événement de mer, accident ou incident de transport terrestre.

Mme Odile Saugues, rapporteure de la CMP - Plus que jamais, la sécurité des infrastructures et des modes de transports est une exigence et, depuis la première lecture, de nouveaux drames nous rappellent la nécessité de conforter la législation en la matière.

La commission mixte paritaire s'est réunie le 21 novembre. Je ne traiterai que des dispositions majeures qui faisaient encore débat.

En première lecture, l'Assemblée avait adopté un amendement intégrant tous les tunnels routiers de plus de 300 mètres, dans le cadre de la procédure de sécurité renforcée.

Nous avions conscience des difficultés posées par cet amendement, mais il fallait sortir du flou de la rédaction initiale concernant les critères permettant de déterminer qu'un ouvrage présente ou non des risques particuliers.

Si nous nous rallions à la rédaction proposée par le Sénat, nous espérons que cette séance sera enfin pour le Gouvernement l'occasion de nous préciser les critères qui seront retenus dans le décret.

A l'article 8 bis, il est apparu souhaitable de mieux prendre en compte la sécurité des populations riveraines des plates-formes aéroportuaires.

Ce souci rejoint celui du Premier ministre, qui a annoncé le 15 novembre l'examen prochain d'un projet de loi sur ces questions.

A l'article 8 ter, le Sénat était, en première lecture, revenu sur une disposition importante de la loi SRU qui permettait d'effectuer des opérations de renouvellement urbain en zone C à la condition qu'elles ne se traduisent que par une faible augmentation de la population. Mais sa rédaction introduisait des éléments d'incertitude, notamment en ouvrant la possibilité de construire, dans ces zones exposées au bruit, des immeubles collectifs. Cette conséquence n'était nullement le but recherché par les auteurs de cet amendement.

Nous sommes parvenus à un accord qui préserve les opérations de réhabilitation ou de démolition-reconstruction permises par la loi SRU et qui écarte toute augmentation de population dans ces zones, étant entendu que l'habitat individuel n'est pas concerné.

Ainsi, nous mettons un point final à un débat ancien entre nos deux assemblées, puisque le Sénat avait intégré cet article de la loi SRU dans la saisine du Conseil constitutionnel.

Sur ma proposition, la commission mixte paritaire a également adopté un amendement relatif au stockage souterrain de gaz naturel, d'hydrocarbures et de produits chimiques. Le Sénat avait rejeté cette disposition d'origine gouvernementale pour des raisons de procédure.

Il est vrai que ces questions, après le dramatique accident de Toulouse, exigeaient des réponses rapides et que la traduction législative de la directive Seveso II ne pouvait plus attendre.

On pourra naturellement déplorer l'adoption d'un texte aussi important à la hussarde, - à la sauvette, diront certains. Mais quel est le poids réel de ce reproche au regard du risque d'un nouvel accident ?

Nous nous privons sans doute d'un intéressant débat, mais il fallait traduire dans notre droit ces dispositions majeures.

Enfin, le Sénat et l'Assemblée sont revenus sur le dispositif relatif au respect des interdistances dans les tunnels.

En première lecture, le Sénat avait, à l'invitation du Gouvernement, adouci le dispositif introduit par l'Assemblée nationale à ma demande.

L'immobilisation du véhicule avait disparu, les peines d'amende étaient allégées, la peine d'emprisonnement en cas de récidive était divisée par deux et la référence à l'intervalle de 50 mètres entre deux véhicules de plus de 3,5 tonnes s'était égarée vraisemblablement dans un tunnel administratif.

En commission mixte paritaire, nous sommes parvenus à un accord équilibré et qui préserve le caractère dissuasif des mesures.

L'immobilisation du véhicule est de nouveau permise. La peine d'emprisonnement en cas de récidive est portée à 6 mois. Surtout, nous ne faisons plus de distinction entre les différentes catégories d'ouvrages pour connaître les peines encourues.

Il y avait là un risque de contentieux important, mais également une aberration, car on suggérait qu'une infraction lourde de conséquences pouvait être tolérée dans certains tunnels !

En conclusion, la philosophie du texte issu de la commission mixte paritaire demeure intacte. Les concessions intervenues de part et d'autre loin de porter atteinte à son équilibre, apportent souvent des précisions utiles.

Ce texte nous donne les moyens de traduire notre volonté de sécurité dans les faits, pour répondre le mieux possible à l'attente légitime de nos concitoyens (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement - Je voudrais tout d'abord vous exprimer ma satisfaction et celle du Gouvernement face au travail accompli sur ce projet par les deux assemblées. L'accord intervenu en CMP porte sur un texte enrichi par des propositions issues des deux assemblées et de tous les groupes. Je voudrais bien sûr remercier tout particulièrement votre rapporteur, qui est pour beaucoup dans les avancées accomplies. Je veux aussi souligner l'excellent état d'esprit, loin des clivages partisans, qui ont caractérisé nos discussions.

L'incendie du tunnel sous la Manche, ceux des tunnels du Mont-Blanc et du Gothard ou du funiculaire de Kaprun, l'accident du Concorde, le naufrage de l'Erika, l'explosion de l'usine AZF à Toulouse attestent une nécessité impérieuse d'éviter de telles catastrophes, même si le risque zéro n'existe pas.

On ne saurait se contenter d'édicter des normes techniques et de construction : il faut avoir une vision globale de la sécurité et de la prévention des accidents.

Ce texte tend tout d'abord à définir un corps de règles permettant de vérifier, lors de la conception, de la mise en service et durant l'exploitation des ouvrages ou des systèmes de transports, que les dispositions prises aboutissent à un niveau de sécurité optimal.

Il vise également à soumettre aux mêmes règles les infrastructures ou systèmes de transport publics appartenant à une même catégorie, quel que soit le maître d'ouvrage.

Il facilitera l'analyse détaillée des causes des incidents de transports ou des événements de mer, dans l'unique souci d'en tirer rapidement les enseignements.

Enfin, il donne une base légale au pouvoir d'investigation auprès des tiers extérieurs à l'administration et aménage les rapports entre les enquêtes techniques et les procédures judiciaires.

Le dialogue très constructif entre les parlementaires des deux assemblées et le Gouvernement a permis d'améliorer le texte initial et d'en élargir la portée, ce qui a conduit la CMP à proposer un titre adapté.

L'article 2 bis crée un établissement public chargé de concourir à une politique intermodale de transport dans le massif alpin, zone sensible où il est nécessaire de rééquilibrer les flux de transport entre la route et le rail pour accroître la sécurité des déplacements. Vous savez l'importance que j'accorde à ce nouvel outil, qui contribuera à réaliser les engagements que j'ai pris devant vous à plusieurs reprises et devant les Rhône-alpins, à l'issue de la concertation sur les conditions de réouverture du tunnel du Mont-Blanc. La France et l'Italie ont maintenant des objectifs communs précis en matière de traversées alpines, que le récent sommet de Périgueux vient encore de confirmer et d'affiner.

L'amendement déposé au Sénat par M. Delfau visait à créer un établissement public similaire, destiné à financer la réalisation d'infrastructures transpyrénéennes. Il a été retiré par son auteur après avoir provoqué un débat très intéressant. Comme la proposition plus généraliste de M. Le Cam en CMP, il n'a fait l'objet d'aucune opposition sur le fond. Conformément aux engagements que j'ai pris au Sénat, j'ai lancé une réflexion interministérielle sur le sujet, qui trouve sa concrétisation dans l'amendement 1 que j'ai déposé aujourd'hui.

Sans du tout remettre en question l'accord intervenu en CMP, cet amendement tend à créer un second établissement public, qui recueillera une partie des fonds issus de l'ouverture minoritaire du capital de la société autoroutière ASF, afin de l'affecter au développement de l'intermodalité sur tout le territoire, y compris donc au niveau des franchissements pyrénéens.

M. Michel Bouvard avait souhaité en première lecture que les dispositions de l'article 3, applicables aux systèmes de transport public guidé, le soient aussi aux remontées mécaniques utilisées par une entreprise pour le transport de personnels. Le Gouvernement l'a entendu et le Sénat a accepté l'amendement que j'ai présenté en ce sens.

L'article 8 bis étend le champ des autorisations instituées par le projet initial aux travaux de construction, d'extension ou de modification substantielle des infrastructures aéroportuaires dont l'exploitation présente des risques particuliers pour la sécurité des usagers.

Les tragiques attentats de New York et de Washington ont également conduit à introduire, dans ce même article, des mesures destinées à améliorer la sûreté du fret aérien ainsi que le contrôle des biens et des produits utilisés à bord des aéronefs.

L'article 9 bis vise à renforcer les pouvoirs des agents chargés du contrôle des transports terrestres. Il permet également aux agents des exploitants d'aérodromes agréés par le préfet de relever les contraventions aux règles de stationnement dans les aéroports, comme cela se fait déjà depuis longtemps dans les cours des gares SNCF.

Les articles additionnels 15 bis et 23 permettent aux médecins rattachés aux organismes permanents, ou à ceux désignés pour assister les enquêteurs techniques, de recevoir communication à leur demande des résultats des examens ou des prélèvements effectués sur certaines personnes impliquées dans les accidents, incidents de transport terrestre ou aérien ou événements de mer.

Illustrant l'esprit d'ouverture dont ont fait preuve les deux assemblées, ces modifications ajoutent à l'efficacité du dispositif initialement envisagé.

La CMP a par ailleurs introduit certaines modifications au texte adopté par le Sénat.

En premier lieu, elle a introduit une division et un article additionnels relatifs au stockage souterrain de gaz naturel, d'hydrocarbures et de produits chimiques, ainsi que mon collègue Christian Pierret l'avait proposé au Sénat, suscitant de longs débats. La Haute assemblée aura certainement la sagesse de la suivre le 19 décembre prochain, lorsque le texte lui sera soumis une dernière fois. Il s'agit en effet de transposer la directive européenne dite « Seveso 2 » et de prévenir ainsi les risques que le dramatique accident de Toulouse a illustrés. Pour m'être rendu sur place à deux reprises, je mesure toute l'utilité d'introduire ces dispositions.

Par ailleurs, pour les systèmes de transport faisant appel à des technologies nouvelles ou comportant des installations multimodales, pour les ouvrages portuaires, fluviaux ou pour les infrastructures aéroportuaires qui présentent un risque pour la sécurité, la CMP a rétabli le texte de l'Assemblée nationale en ce qui concerne la réalisation des travaux.

Ceux-ci ne pourront commencer qu'à la notification de l'avis du représentant de l'Etat sur le dossier de sécurité, ou à l'expiration d'un délai de quatre mois à compter de son dépôt.

Le Gouvernement approuve cette démarche, de même que les modifications apportées par la CMP à l'article 8 bis, qui étendent le régime des autorisations des travaux de construction, d'extension ou de modification substantielle des infrastructures aéroportuaires à celles dont l'exploitation présente un risque particulier pour les populations riveraines.

La CMP propose également de modifier l'article 21, relatif aux sanctions encourues en cas de non-respect de la distance de sécurité entre deux véhicules dans les tunnels.

En premier lieu, il est proposé que l'ensemble des tunnels soit concerné. Ensuite, la peine d'emprisonnement serait portée de 3 à 6 mois. Enfin, l'alinéa relatif à l'immobilisation et à la mise en fourrière, supprimé par le Sénat en première lecture, serait rétabli dans la rédaction de l'Assemblée nationale.

Le Gouvernement juge ces dispositions délicates à mettre en _uvre. L'extension à l'ensemble des tunnels, y compris ceux qui ne présentent aucun danger particulier, ne semble pas très pertinente. De plus, la sanction doit être proportionnée à l'infraction ; or, outre le passage de 3 à 6 mois, le texte peut laisser penser que la même sanction est applicable à la première infraction et à la récidive. Je souhaite que Mme la rapporteure précise que les peines prévues ne concernent que la récidive.

Enfin, la CMP propose d'introduire un nouvel article 24, qui porte sur la participation d'enquêteurs techniques de nationalité étrangère aux investigations menées sur le territoire national à la suite d'un accident aérien. Il est le pendant de l'article 10 pour les événements de mer et le Gouvernement ne peut qu'y être favorable.

Le texte issu des travaux de la CMP répond à l'attente de nos concitoyens. Dès sa promulgation, qui devrait intervenir avant la fin de cette année, je ferai en sorte que toutes les mesures réglementaires d'application soient prises dans les meilleurs délais (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et du groupe socialiste).

M. Jérôme Lambert - Le projet de loi que nous examinons après l'accord intervenu en commission mixte paritaire a fait l'objet de nombreuses discussions et a été complété au cours du processus législatif. Le travail parlementaire aura ainsi permis d'améliorer les dispositions qui nous étaient proposées, en renforçant la sécurité aérienne et en précisant les modalités de réalisation des travaux de construction ou d'extension des infrastructures aéroportuaires.

Le Gouvernement s'était engagé à renforcer la sécurité aérienne après les attentats du 11 septembre dernier, il avait aussi promis de mieux associer les populations concernées par la construction d'une troisième plate-forme aéroportuaire dans le bassin parisien, suite à la réunion interministérielle du 15 novembre, qui a arrêté un plan global pour les aéroports français.

Je ne reviendrai pas sur la nécessité - et l'obligation juridique - de mieux assurer la sûreté des vols aériens, notamment en matière de contrôle des colis et des bagages transportés. Je me contenterai de reprendre l'argumentation développée par vous, Monsieur le ministre, devant le Sénat.

Vous avez montré que si 80 % du fret et des colis postaux peuvent être efficacement contrôlés par des appareils de détection radioscopique, les 20 % restant introduisent un facteur de risque intolérable eu égard aux dangers que nous connaissons. Le seul moyen efficace d'assurer la sécurisation de ce fret est de responsabiliser le chargeur au stade du conditionnement et du stockage du produit. Les ajouts au code de l'aviation civile qui précisent les compétences des militaires de la gendarmerie et des officiers de police, ainsi que celles des agents des douanes montrent que le Gouvernement entend assumer pleinement ses responsabilités en matière de sécurité publique. Oui, la sécurité aérienne doit être maximale, même si nous savons que le risque zéro n'existe nulle part.

En ce qui concerne la protection des populations riveraines aux abords des aéroports, notre Assemblée a été bien inspirée de créer un article L.211-1 au code de l'aviation civile, qui précise les conditions d'exploitation de ces infrastructures. Le Sénat a introduit un ajout afin que soit examinée la compatibilité des constructions existantes ou en projet avec la sécurité des populations riveraines. Cette notion de « risque pour les populations riveraines » a été réaffirmée par la commission mixte paritaire, conformément au souhait du Gouvernement. Le dramatique accident de Gonesse a montré quels étaient les risques encourus. A l'impossible, nul n'est tenu, mais il appartient aux pouvoirs publics de les limiter au maximum.

Ces nouvelles dispositions législatives s'intègrent dans la politique aéroportuaire cohérente et équilibrée du Gouvernement tout en confortant Air France dans des choix techniques et économiques qui permettent à cette entreprise de mieux résister que ses concurrents à la crise du secteur aéronautique. Je rappelle qu'un projet de loi devra être déposé, début 2002, afin de garantir une meilleure protection des populations riveraines, en reprenant les recommandations de l'ACNUSA. Il faudra veiller à une meilleure maîtrise de l'urbanisation autour des aéroports, la nouvelle rédaction de l'article L. 147-5 du code de l'urbanisme nous y engage fortement.

Alors que la sécurité est une préoccupation prioritaire pour nos concitoyens, le Gouvernement et l'ensemble de la représentation nationale s'accordent à penser que la prévention des risques est au moins aussi importante que la répression des fautes. Les dispositions de ce texte sont largement positives. Le groupe socialiste lui apportera son soutien.

Mme Catala remplace M. Ollier au fauteuil présidentiel.

PRÉSIDENCE de Mme Nicole CATALA

vice-présidente

M. Gilbert Gantier - Nous voilà de nouveau saisis du projet de loi concernant la sécurité des infrastructures.

Lors de la première lecture, mon collègue Claude Gatignol avait souligné le caractère incomplet et imparfait d'un texte dont l'intitulé voulait forcer le consensus. Comment pourrait-on en effet se prétendre opposé à l'amélioration des conditions de sécurité dans les transports ?

Le Parlementaire que je suis se félicite, néanmoins, de constater que grâce à la qualité du travail et à l'esprit de conciliation dont ont fait preuve les deux assemblées...

M. le Ministre - Et le Gouvernement.

M. Gilbert Gantier - ...et le Gouvernement, c'est vrai, des améliorations significatives ont été apportées au texte initial.

Elles ont permis de trouver un accord en commission mixte paritaire le 21 novembre dernier.

Les événements tragiques qui se sont déroulés ces dernières années, le récent drame du Saint-Gothard nous ont fait prendre conscience de la priorité à accorder à la sécurisation des infrastructures.

A cet égard, l'objectif poursuivi par votre projet de loi, Monsieur le ministre, n'est pas discutable.

Sur le détail des dispositions, je me montrerai plus critique.

Comment ne pas regretter la volonté centralisatrice du Gouvernement qui reconnaît au seul représentant de l'Etat le pouvoir de se substituer aux collectivités territoriales dans les procédures de contrôle ?

Comment ne pas déplorer le délai trop long accordé aux services de l'Etat pour valider la réalisation d'un ouvrage ? Claude Gatignol avait dit qu'un délai de 2 mois était suffisant puisque la DDE connaît les projets bien en aval. Il n'a malheureusement pas été écouté.

Certes, Monsieur le ministre, vous avez indiqué que pour les ouvrages les plus modestes, vous veilleriez à ce que le délai mentionné dans le décret soit raccourci le plus possible... mais c'est toujours une durée de 4 mois qui figure dans le projet de loi !

J'émettrai, enfin, une critique concernant la méthode employée par le Gouvernement.

Je pense au déferlement d'amendements déposés au Sénat à la dernière minute et dont l'Assemblée nationale n'avait pas eu à connaître lors de la première lecture.

Il s'agit pourtant d'articles additionnels comportant des dispositifs très lourds en matière de sécurisation du fret aérien ou de compétences reconnues aux exploitants d'aérodromes. Je ne parle pas de la péripétie de la directive Seveso déposée, retirée puis précipitamment redéposée !

Voilà une attitude peu respectueuse du travail parlementaire et bien contraire au sérieux et à la sérénité que réclame un débat sur la sécurité.

Voilà, de plus, que je prends connaissance cette après-midi même, d'un nouvel amendement du Gouvernement qui me paraît pour le moins discutable !

Créer un établissement public administratif doté d'un conseil d'administration « étatisé » et financé, en partie, par des recettes provenant de la privatisation de la Société des Autoroutes du Sud de la France est une curieuse idée de dernière minute.

Certes, votre exposé des motifs est habile et cherche à présenter cet amendement de manière consensuelle... mais il s'agit d'un jeu de dupes !

C'est pourquoi, après avoir opté en un premier temps pour un vote favorable, le groupe Démocratie libérale préfère s'abstenir sur ce texte.

M. Georges Hage - Je tiens tout d'abord à excuser mon collègue Gilbert Biessy qui ne peut être présent aujourd'hui et m'a demandé de vous lire son intervention, ce que je vais faire.

Compte tenu de l'urgence de ce texte, une brève période s'est écoulée entre la première lecture à l'Assemblée nationale et celle du Sénat. Il a été adopté, dans chaque Assemblée, à l'unanimité, démontrant ainsi que le débat sur la sécurité dans les transports dépasse les clivages politiques.

Le groupe communiste est profondément attaché à ce projet de loi, pour plusieurs raisons : il instaure une véritable politique de prévention des accidents dans le domaine des transports et tend à tirer tous les enseignements des accidents.

La sécurité, dans ce domaine, reste un vaste sujet qui nous concerne tous, Gouvernement, parlementaires, élus en général, riverains et usagers.

L'augmentation des transports terrestres, aériens ou maritimes demande la mise en place de mesures de sécurité exceptionnelles.

Il est donc indispensable que les moyens les plus adaptés soient mis en _uvre. Nous devons éviter que des drames ne se reproduisent, même si le risque zéro n'existe pas.

Pour toutes ces raisons, le projet de loi que nous examinons aujourd'hui revêt une importance particulière.

Ce texte renforce la sécurité des infrastructures de transport. Il est l'aboutissement de plusieurs années de travail et constitue un véritable cadre législatif. Il présente des avancées considérables dans le domaine de la prévention des accidents et dans l'harmonisation des procédures de suivi - ce qui constitue l'un des moyens d'assurer au plus haut degré la sécurité des ouvrages et systèmes de transport, qu'ils soient terrestres, fluviaux ou maritimes.

Je tiens aussi à rendre hommage - c'est mon collègue qui parle - à la sagesse de nos collègues sénateurs qui ont travaillé dans des conditions difficiles.

Ils ont bien voulu retenir un amendement déposé par le Gouvernement sur la directive Seveso 2, relatif aux nouvelles installations de stockage de gaz, d'hydrocarbures et de produits chimiques.

Dans sa précédente intervention, M. Biessy avait fait part de sa satisfaction à propos des engagements pris par le Gouvernement sur la mise en _uvre d'une politique intermodale des transports dans le massif alpin. Beaucoup restait cependant à faire, notamment pour trouver les sources de financement.

Grâce à l'introduction d'un article 2 bis, portant création de l'établissement public chargé de la mise en _uvre de la politique en question, nous y voyons plus clair ! En effet, le paragraphe C étend les ressources pour permettre à cet établissement de bénéficier non seulement des dividendes des sociétés autoroutières, mais aussi de subventions et de recettes diverses. Il est bon que cette solution originale puisse concourir au financement d'une partie des infrastructures, notamment ferroviaires. Elle permettra en outre de faire progresser l'intermodalité et de décongestionner les axes routiers : moins de bruit, moins de pollution, depuis des années, les gouvernements successifs étaient pour, mais aucun n'a pris les mesures qui s'imposaient. A l'inverse, l'action en faveur de la route a été fortement développée, le nombre de cheminots n'a cessé de diminuer et des milliers de gares ont été supprimées.

Ce projet de loi va permettre de poursuivre l'objectif que le Gouvernement s'est fixé depuis 1997, en faveur de la réorientation des modes de transport.

L'action engagée par le Gouvernement auquel vous appartenez, Monsieur le ministre, traduit un effort sans précédent pour équilibrer les modes de transport.

J'en veux pour preuve le dernier sommet franco-italien qui s'est tenu à Périgueux le 27 novembre, qui apporte des réponses concrètes aux questions souvent évoquées dans cet hémicycle.

Ainsi, la ligne ferroviaire Lyon-Turin bénéficiera d'une mise en service anticipée dès 2012. Je profite du reste de l'occasion pour rappeler l'urgence de l'électrification de la ligne Chambéry-Grenoble.

Dès 2002, un premier service d'autoroute ferroviaire de l'entrée de la Maurienne à Turin devrait être mis en place avec un service complet comportant 20 à 30 navettes quotidiennes à l'horizon 2005-2006.

Enfin, l'ouverture du tunnel du Mont-Blanc interviendra fin décembre sous certaines conditions pour les véhicules légers et fin janvier, après une large concertation avec les différents partenaires, pour les poids lourds.

S'il reste beaucoup à faire, notamment pour désenclaver les Alpes du Sud, votre politique est approuvée par une forte majorité de nos concitoyens. Le présent texte traduit une volonté de développement équilibré, concernant l'amélioration des modes de transports actuels et la poursuite de l'effort en faveur des transports les plus respectueux de l'environnement.

Ce projet constitue, Monsieur le ministre, une chance de répondre aux aspirations de nos concitoyens à la sécurité dans les transports et à la réorientation des modes de transports.

Vous pouvez compter sur le soutien du groupe communiste.

M. Christian Kert - Ce texte n'est pas si mal que ça ! Certes, il n'est pas parfait mais comment être exhaustif lorsqu'il s'agit d'aborder les problèmes de sécurité ? De même, le sujet incite à la modestie car l'expérience invalide souvent les hypothèses de départ et les nouvelles techniques utilisées pour renforcer la sécurité ne sont pas toutes éprouvées. Nous avons voté ce projet de loi en première lecture car nous avons considéré qu'il répondait pour l'essentiel aux préoccupations de nos concitoyens en matière de sécurité des transports. Le vote était du reste intervenu dans un contexte hautement émotionnel, après les catastrophes des tunnels du Mont-Blanc et du Gottard.

Je me félicite que plusieurs de mes recommandations figurant dans mon rapport sur la mise en sécurité des tunnels français aient été reprises et je remercie tout particulièrement notre rapporteure d'avoir adopté deux amendements qui s'en inspirent directement. Ils tendent à garantir la prise en compte de l'environnement global avant de lancer tout nouveau projet d'infrastructure de transport. A cet égard, soyons attentifs à ne pas renouveler certaines aberrations telles que la situation à l'entrée du tunnel du Mont-Blanc en zone d'avalanches - ce qui interdit d'y stocker les camions qui posent problème - ou la reconstruction de l'aéroport Marseille-Provence en baies vitrées en face de la zone de l'étang de Berre classée Seveso III !

Je me réjouis de même que la CMP se soit déroulée dans un climat de grande compréhension, même si elle n'a pas permis de lever toutes les interrogations.

Ainsi, la transposition de la directive Seveso s'est effectuée au travers d'un amendement, ce qui n'a pas permis d'avoir un véritable débat sur un sujet qui méritait mieux que d'être traité un peu à la sauvette. De même, j'ai bien entendu ce qu'a dit M. Gantier sur votre proposition d'amendement destiné à introduire un article additionnel après l'article 2 bis alors que la CMP s'est prononcée. D'aucuns vous reprocheront, Monsieur le ministre, d'enfreindre quelque peu la tradition parlementaire !

Troisième observation, j'ai trouvé - et notre rapporteure le sait bien - que nous avions en CMP la main un peu lourde en matière de sanctions ! Nous allons remplir les prisons de délinquants de la route alors que nous laissons en liberté des gens qui mériteraient davantage d'y aller !

Quatrième réflexion, le texte ne répond pas aux préoccupations qui s'expriment en matière de transport de matières dangereuses dans le monde confiné des tunnels. Ne serait-il pas opportun de dresser une liste annexe des matières dangereuses ? Quid également du fonctionnement des structures de transport binationales ? Est-il suffisant de s'en remettre à d'éventuels accords internationaux ?

Enfin, s'agissant de la répartition des compétences et des responsabilités, nous redoutons que le rôle majeur confié au préfet dans la procédure de contrôle de la sécurité des ouvrages se traduise par un accroissement de la tutelle de l'Etat sur les collectivités territoriales susceptibles de déresponsabiliser les élus locaux.

Au-delà de ces différents points, n'est-il pas temps de revenir sur le « tout routier » ? Pouvez-vous, Monsieur le ministre, indiquer à la représentation nationale comment vous envisagez l'avenir du transport routier dans notre pays ? Qu'en sera-t-il du tracé Lyon-Turin ? Au-delà du ferroutage, des solutions alternatives telles que le transport des matières inertes par voies fluviales sont-elles envisagées ? (Assentiment de M. le ministre) Je considère pour ma part que l'abandon de la liaison Rhin-Rhône a été une erreur et qu'il faut relancer la réflexion sur le « mer-routage », notamment sur la liaison Fos-sur-Mer-Livourne afin de désengorger les voies terrestres transalpines.

Compte tenu des éléments très positifs qu'il contient, nous voterons votre texte.

M. Bruno Bourg-Broc - Sans rapport avec le présent débat, je tiens à préciser que dans le scrutin public relatif à la création des EPCC, le groupe RPR s'est abstenu ; le texte n'a donc pas été adopté à l'unanimité.

Compte tenu de l'importance du projet de loi sur la sécurité des transports et de la nature des enjeux, je me félicite que la commission mixte paritaire soit parvenue à un accord.

La discussion de ce texte intervient en effet dans un contexte particulier, étant donné la menace terroriste et le nouvel accident du tunnel du Gothard. Il n'était donc que temps de légiférer sur ces questions.

Au terme de la procédure parlementaire, je n'entrerai pas dans le détail d'un texte dont nous approuvons globalement les dispositions. Après l'avoir amélioré, le groupe RPR, soucieux de renforcer la sécurité des réseaux de transport de notre pays, l'a voté en première lecture et s'apprête naturellement à approuver le compromis élaboré en CMP.

Tirant les leçons d'une actualité dramatique - incendie du tunnel sous la Manche, catastrophe du tunnel du Mont-Blanc, drame du funiculaire de Kaprun, incendie du Gothard - ce projet de loi poursuit deux objectifs essentiels.

Le premier est de définir un corps de règles permettant de vérifier, aux étapes clés de la vie des ouvrages ou des systèmes de transport terrestre, que les dispositions envisagées aboutissent à une sécurité optimale. Le second est de soumettre aux mêmes règles les infrastructures et les systèmes de transport publics appartenant à une même catégorie, quel que soit le maître d'ouvrage.

Le groupe RPR approuve ce projet de loi puisqu'il s'agit de soumettre à un contrôle renforcé les ouvrages d'art réputés sensibles, tels que les tunnels, au moment de leur conception mais aussi préalablement à leur mise en service. Je le redis toutefois, comme l'ont fait en première lecture mes collègues Michel Bouvard et Christian Estrosi : il faut veiller à ce que les règles édictées s'appliquent aussi bien à l'Etat qu'aux collectivités locales. Celles-ci font depuis de nombreuses années des efforts d'investissements conséquents pour améliorer la sécurité des réseaux et se doter d'ingénieurs de mêmes compétences que ceux de l'Etat. Nous avons notamment attiré votre attention, Monsieur le Ministre, sur un dispositif qui risque dans certains cas de porter atteinte à la relative autonomie des collectivités locales en matière d'investissement et de construction d'infrastructures, alors même que chacun admet la nécessité d'accroître la décentralisation.

Je souhaite également évoquer, Monsieur le ministre, l'article L.118-5 supprimé par le Sénat, selon lequel les ouvrages d'art présentant des risques particuliers incluent notamment les tunnels routiers de plus de 300 mètres. Mon collègue Michel Bouvard, qui maîtrise particulièrement bien ce sujet, s'est prononcé en CMP pour le rétablissement de cet article. Il a souligné les risques qu'entraîne sa suppression, notamment en montagne, car elle aboutit à confier au pouvoir réglementaire la définition des ouvrages concernés par la procédure très stricte prévue par la loi. Notre rapporteure, Mm Saugues, a reconnu elle-même qu'il y a bien là une difficulté, tout en estimant que seul un décret pouvait arrêter plusieurs critères définissant les ouvrages à risques. Je vous demande donc, Monsieur le Ministre, d'être particulièrement attentif à la rédaction de ce décret. Si déjà vous pouviez nous en dévoiler les grandes lignes, nous y serions très sensibles.

La sécurité dans les ouvrages routiers peut aussi être mise en cause par un défaut de signalisation des matières dangereuses. Le groupe RPR a déposé un amendement, voté à l'unanimité en séance publique, qui réprime plus durement la non-signalisation ou la non-déclaration du transport de matières dangereuses, qu'il s'agisse de transport terrestre, maritime ou ferroviaire. L'amende prévue pour ces infractions est quintuplée et portée à 30 000 euros. Je me félicite que le Sénat ait maintenu cette sanction.

Pour ce qui est du non-respect de la distance de sécurité dans les tunnels, nous avions été unanimes, à l'Assemblée, à voter un texte comportant des sanctions sévères. II me semble néanmoins sage, la peine de suspension du permis de conduire ayant été portée à trois ans au maximum, que la peine d'amende soit passée de 9 000 à 3 750 euros. Je souhaite aussi que l'autorité judiciaire fasse une application éclairée de la disposition relative à l'immobilisation et à la mise en fourrière des véhicules lorsqu'il s'agit du transport d'animaux et de produits frais.

Enfin, le Gouvernement s'apprête à défendre un amendement à propos de la ventilation du produit de l'ouverture minoritaire du capital de la société autoroutière ASF. Je n'ai pas d'objection majeure à la raison de fond qui motive le dépôt de cet amendement un peu tardif toutefois, vous le reconnaîtrez, Monsieur le ministre, puisque nous en avons pris connaissance quelques instants seulement avant le début de cette séance. Le groupe RPR est très attentif aux prérogatives du Parlement, que vous semblez ce soir, sinon ignorer totalement, du moins maltraiter ! Je le déplore, et je rappelle que le Conseil constitutionnel, par ses décisions du 25 juin 1998 et du 29 juin 2000, a resserré sa jurisprudence sur les amendements introduits après la réunion d'une CMP, que celle-ci ait ou non abouti. Il a jugé que ces amendements devaient remplir l'une des conditions suivantes. Ou bien l'amendement est dicté par le besoin d'une coordination avec d'autres textes en cours d'examen, ce qui n'est pas le cas. Ou bien il doit être lié à la nécessité de respecter la Constitution, ce qui n'est pas notre propos. Ou encore l'amendement doit permettre de corriger une erreur matérielle : ce n'est toujours pas le cas. Enfin, l'amendement doit être en relation directe avec une disposition du texte, mais - nuance de taille - une disposition restant en discussion. Sommes-nous vraiment dans ce cas ? D'un point de vue strictement juridique, peut-être, car le Sénat a apporté d'infimes modifications rédactionnelles. Mais qu'en est-il de l'esprit de la jurisprudence constitutionnelle et de notre Règlement ? Ils n'admettent pas qu'on revienne sur le fond, et de façon aussi tardive, sur une disposition sur laquelle les deux assemblées s'étaient finalement mises d'accord.

Ce dépôt tardif est regrettable, car nous aurions sans doute pu améliorer par voie d'amendement ce nouveau dispositif. Ainsi vous n'avez pas respecté l'exercice effectif de notre droit d'amendement. Certes, je reconnais la nécessité de contribuer efficacement aux infrastructures ferroviaires et intermodales, y compris dans les Pyrénées. Mais les Pyrénées n'ont pas surgi de terre ces dix derniers jours, depuis la CMP. Certes je reconnais volontiers que favoriser le multimodal et le ferroutage, c'est contribuer à améliorer la sécurité sur nos réseaux, notamment routiers. Mais la remarque de forme que je viens de formuler est importante. Et nous sommes trop souvent conduits à la faire au Gouvernement auquel vous appartenez.

Au-delà de ces remarques, le groupe RPR votera ce projet.

La discussion générale est close.

Mme la Présidente - Conformément à l'article 113, alinéa 3, du Règlement, je vais appeler l'Assemblée à statuer d'abord sur l'amendement dont je suis saisie.

M. le Ministre - L'amélioration de la sécurité dans les transports et la protection de l'environnement impliquent de contribuer au rééquilibrage des parts modales du marché des transports de la route vers les modes alternatifs plus sûrs et moins polluants, au premier rang desquels figure le rail. C'est pourquoi le Gouvernement a souhaité proposer, lors de la première lecture de ce texte à l'Assemblée, la création d'un établissement public destiné à concourir à la mise en _uvre d'une politique multimodale des transports dans le massif alpin. Cet amendement, accepté par l'Assemblée nationale comme par le Sénat, s'inscrit donc désormais à l'article 2 bis de ce projet de loi.

Cependant, le Sénat a débattu d'un amendement similaire à cet article 2 bis, qui tendait à instaurer le même type d'établissement public pour financer les liaisons transpyrénéennes. Le Gouvernement avait demandé et obtenu son retrait, tout en reconnaissant que les problèmes de transport de marchandises de part et d'autre des Pyrénées sont du même ordre que ceux que pose ce même transport à travers les Alpes. Enfin, prenant acte qu'il fallait désormais envisager un cadre durable pour favoriser le transport intermodal, je me suis engagé à travailler en ce sens. Lors de la CMP, cette question est également revenue en discussion, soulevée par le sénateur Le Cam, et a suscité un nouveau débat entre députés et sénateurs. Sans qu'il apparaisse de véritable opposition de fond à son encontre, la création d'un autre établissement public multimodal plus généraliste n'a cependant pu être retenue à ce stade des travaux parlementaires.

Après avoir mené les réflexions interministérielles nécessaires, le Gouvernement confirme sa volonté de créer un établissement public propre aux Alpes, compte tenu des enjeux particuliers aux transports dans ce massif montagneux. J'estime cependant nécessaire d'en créer un second, à vocation plus générale, qui pourrait contribuer efficacement au financement des infrastructures ferroviaires et intermodales, y compris dans les Pyrénées. Cet autre établissement public serait susceptible, pour assurer sa fonction de financement, de recueillir une partie du produit de l'ouverture minoritaire du capital de la société autoroutière ASF. L'amendement 1 rectifié du Gouvernement est donc la concrétisation de son dialogue avec les parlementaires des deux assemblées.

Je souhaite que cette dynamique intermodale soit amplifiée par la mise en place, d'une part, du pôle alpin, et d'autre part d'un fonds de développement de l'intermodalité. Ce dernier sera abondé à partir du produit de l'ouverture du capital d'ASF pour un montant d'environ 760 millions d'euros. Ce fonds contribuera principalement, mais pas uniquement, au financement de grands projets ferroviaires, passagers ou fret, comme par exemple la ligne Perpignan-Figueras, les contournements de Nîmes et de Montpellier, le TGV Lyon-Satolas-liaison alpine ou le TGV Rhin-Rhône. Même s'il aurait mieux valu - je le reconnais - que cet amendement intervienne plus en amont de nos débats, reste que la réflexion était déjà engagée à ce sujet. Et je sais qu'il y a une volonté partagée de développer cette intermodalité, qui ne signifie pas une hostilité à la route : c'est vrai que le ferroutage me tient à c_ur, mais, dans « ferroutage », il y a le fer et la route... Je crois que vous tiendrez à adopter cet amendement pour marquer la volonté commune des pouvoirs publics de réaliser cette politique intermodale que chacun appelle de ses v_ux.

Mme la Rapporteure - Cet amendement avait déjà été présenté en commission mixte paritaire par le sénateur  Le Cam ; le président de la CMP s'y est opposé pour des raisons non de fond, mais de forme, de sorte que la commission ne l'a pas retenu. A titre personnel, je comprends les arguments du ministre. Par cohérence avec la décision de la CMP, je m'abstiendrai, mais je comprendrais que le vote de mon groupe soit positif.

Je souhaitais par ailleurs répondre à M. le ministre sur l'article 21 pour préciser ce que souhaite l'Assemblée : voir sanctionner plus sévèrement les récidivistes, ceux qui s'obstinent, nonobstant les risques, à ne pas respecter la distance de sécurité entre les véhicules dans les tunnels. Nous savons, Monsieur le ministre, que vous vous apprêtez à aggraver les amendes encourues en ce cas, ce qui est bien. Quant à la décision prise par le Sénat d'allonger la durée maximale de suspension du permis de conduire, la durée retenue doit être comprise comme la durée de suspension la plus longue possible, ce qui ne signifie pas qu'elle sera appliquée dans tous les cas.

L'amendement 1 rectifié, mis aux voix, est adopté.

L'ensemble du projet de loi, compte tenu du texte de la commission mixte paritaire modifié par l'amendement, mis aux voix, est adopté.

Mme la Présidente - Je constate que le vote est unanime.

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STATUT DES SOCIÉTÉS D'ÉCONOMIE MIXTE LOCALES (deuxième lecture)

L'ordre du jour appelle la discussion, en deuxième lecture, de la proposition de loi tendant à moderniser le statut des sociétés d'économie mixte locales.

M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement - La proposition adoptée par le Sénat le 17 octobre et soumise à discussion en seconde lecture devant votre Assemblée vise à moderniser le statut des sociétés d'économie mixte locales. Ce texte, et les objectifs qui le sous-tendent, correspondent à une préoccupation de votre Assemblée, les débats auxquels il a donné lieu le 27 juin dernier dans cette enceinte l'ont montré. Vous le savez, les objectifs premiers de cette proposition sont de rendre plus sûr le recours aux sociétés d'économie mixte, notamment en précisant la responsabilité de leurs dirigeants et de leurs administrateurs, et d'en moderniser les mécanismes de fonctionnement en clarifiant les relations entre les collectivités locales et leurs SEM.

L'urgence et d'autant plus grande que ce mode d'intervention économique des collectivités locales se développe ; aujourd'hui près de 50 000 salariés sont au service de près de 1 500 SEM. Par ailleurs, l'évolution du droit européen rendait indispensable l'actualisation du régime juridique des SEM.

La seconde lecture du Sénat, le 17 octobre, a permis des progrès significatifs, puisque neuf articles ont déjà fait l'objet d'un vote conforme. Il en est notamment ainsi de l'ouverture du droit au fonds de compensation pour la TVA, dès lors que l'équipement financé par la SEM est destiné à être incorporé au patrimoine d'une collectivité locale, ou de la possibilité pour les SEM locales en cours de constitution ou nouvellement créées de soumissionner dans le cadre d'une procédure de délégation de services publics.

Le Sénat a d'autre part introduit quelques modifications au texte adopté le 27 juin par votre assemblée, auxquelles le Gouvernement ne s'est pas opposé. Tel est le cas de la possibilité donnée à une SEM locale de se voir accorder un nombre d'avances équivalent au nombre de collectivités locales et groupements actionnaires, à la condition que ces avances ne servent pas à rembourser une autre avance.

De même, l'article premier bis, qui permet aux collectivités locales d'apporter leur soutien financier aux SEM locales _uvrant pour la promotion économique du territoire, pourrait être adopté en l'état, étant précisé que cette mesure n'autoriserait en aucun cas les collectivités locales à déléguer à ces sociétés leur compétence en matière d'aides aux entreprises.

Semblent aussi pouvoir être retenues en l'état les dispositions relatives au statut des élus mandataires des collectivités locales, aux SEM locales de coopération transfrontalières, aux sociétés d'aménagement régional ou aux élus mandataires des collectivités locales exerçant des responsabilités au sein des sociétés d'assurance mutuelles.

En revanche, le Gouvernement est opposé à trois dispositions introduites par le Sénat.

S'agissant de l'autorisation pour les collectivités locales d'allouer des avances aux SEM locales dans le cadre des conventions publiques d'aménagement, disposition qui figure à l'article 6, le Gouvernement considère qu'une telle mesure ouvrirait une possibilité d'avances dérogatoire aux dispositions définies par la présente proposition. Cela serait d'autant plus dommageable que les opérations conduites par ce type de SEM sont parmi les plus délicates et ne permettent pas toujours une parfaite maîtrise des calendriers et des budgets, ne serait-ce qu'en raison de l'aléa foncier.

En outre, un tel dispositif irait à l'encontre des mesures de transparence votées dans la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains.

S'agissant de la substitution des districts à leurs communes membres au sein des syndicats mixtes, mesure qui figure à l'article 15, le Gouvernement y est opposé à la fois parce que les districts seront transformés le 1er janvier 2002 et parce que cette disposition rendrait plus complexe la coopération intercommunale.

Enfin, le Gouvernement est défavorable à la suppression de l'article L.481-1 du code de la construction, qui soumet les contrats des SEM locales de logement social aux procédures de publicité et de mise en concurrence prévues par le code des marchés publics, garantissant ainsi l'indispensable transparence des opérations conduites.

Je constate que votre commission des lois rejoint la position du Gouvernement, et propose elle aussi de supprimer ces trois dispositions.

Le Gouvernement ne s'opposera pas à deux propositions de votre commission, dont la première consiste à abaisser le seuil de participation des actionnaires, autres que les collectivités locales et leurs groupements, à 10 % du capital social des SEM locales, au lieu de 20 % actuellement. Bien que cette mesure tende à entraîner une répartition moins équilibrée du capital, elle préserve la notion d'économie mixte à laquelle le Gouvernement est, vous le savez, très attaché.

La seconde proposition est de réintroduire l'article L. 1523-3 du code général des collectivités territoriales relatif aux modalités du contrôle technique, financier et comptable exercé par les collectivités locales sur les opérations d'aménagement dont elles ont délégué la réalisation à des SEM locales. Cette mesure permet d'assurer la bonne information des collectivités, objectif qui ne peut qu'emporter l'adhésion du Gouvernement.

En conclusion, le Gouvernement considère que le texte qui vous est soumis aujourd'hui répond parfaitement aux objectifs que j'ai rappelés et modernisera donc un mécanisme juridique particulièrement adapté aux contraintes de gestion que rencontrent les collectivités locales, en permettant l'association de crédits publics et privés au service de l'intérêt général (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et du groupe socialiste).

M. Jacky Darne, rapporteur de la commission des lois - Il s'agit donc pour nous de moderniser le statut des sociétés d'économie mixte locales pour combler les lacunes de la loi du 7 juillet 1983, afin que l'économie mixte demeure l'outil essentiel d'intervention des collectivités locales qu'elle est devenue. A ce jour, quelque 1 200 SEM emploient 65 000 salariés, et leurs investissements s'élèvent à 60 milliards de francs. L'objectif recherché est de mieux équilibrer droit commercial et intérêt général, de définir la nature des concours financiers qui peuvent être attribués aux SEM, de préciser les responsabilités des intervenants et de renforcer la transparence des procédures. Il s'agissait aussi de trouver des solutions à des problèmes particuliers, qu'il s'agisse de la réintégration des biens après liquidation, de l'exercice de la coopération internationale ou de la récupération de la TVA.

Le travail législatif s'est fait dans de bonnes conditions car nombreux sont les tenants de l'économie mixte, sur tous les bancs. Je rends hommage à la volonté de rapprochement du rapporteur du Sénat, M. Paul Girod. Les sénateurs ont d'ailleurs introduit, à l'article premier, de nouvelles rédactions pertinentes relatives aux apports en compte courant que je proposerai à l'Assemblée de reprendre.

Toutefois, trois divergences de fond demeurent, dont la première me conduira à proposer le rétablissement de l'article premier A, supprimé par le Sénat, et qui autorise les collectivités territoriales et leurs groupements à détenir jusqu'à 90 % du capital des SEM.

La première lecture a permis à l'Assemblée de passer de 20 à 10 %, mais le Sénat n'a pas voulu conserver cette disposition. Trop souvent pourtant, des actionnaires ne sont là que par complaisance. Permettre de réduire la part des capitaux privés, tout en conservant un maximum à 80 %, éviterait des ambiguïtés.

Deuxième divergence : le Sénat a prévu d'inclure dans les conventions publiques d'aménagement les conditions dans lesquelles les collectivités feraient l'avance de fonds nécessaires à une mission. Il autorise ainsi des avances en compte courant pour une opération spécifique. Si les participations financières des collectivités sont en général nécessaires, elles doivent faire partie de la convention. Le code de l'urbanisme ne prévoit pas d'autre possibilité de financement. Il faut exclure toute possibilité d'avance. Que l'opération soit in fine excédentaire ou déficitaire, c'est à la collectivité que reviendra de toute façon le bénéfice ou la charge de financer ce qui manque, et le terme d'avance n'a donc pas lieu d'être. Nous avons créé une possibilité d'avance en compte courant générale pour la société, qui répond largement à ses besoins financiers.

Troisième divergence : le Sénat a supprimé l'article 484 du code de la construction et de l'habitation, qui soumet les contrats des SEM de logement social aux procédures de publicité et de concurrence prévues par le code des marchés publics. Le Sénat a présenté cela comme une modification formelle, alors que toute mise en concurrence serait du même coup évitée pour les marchés inférieurs à 32,7 millions, soit environ 40 % des marchés. Cette modification est contraire à l'objectif de transparence que poursuit le texte (M. Olivier de Chazeaux approuve) Quelques amendements vous seront proposés pour améliorer certaines dispositions de la loi SRU dont l'usage a montré qu'elles devaient être modifiées. Je suis persuadé que la bonne volonté des sénateurs et la nôtre nous permettront d'aboutir prochainement à un texte commun (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Francis Delattre - Il s'agit d'un texte relativement consensuel, qui s'efforce de moderniser les relations entre les SEM et les collectivités territoriales et prend en considération les difficultés rencontrées par les élus.

Nous ne ferons pas une affaire fondamentale de la part, 80 ou 90 %, qui doit rester publique. Le rapporteur essaie de conférer plus de souplesse au système et même son amendement initial nous convenait, puisqu'il permettait de disposer de plus de partenaires actifs.

En ce qui concerne les rapports financiers des partenaires - opérations d'aménagement, avances... - il faut être prudent. Nous avons connu des difficultés. Une avance doit être remboursée ou incorporée au capital avant qu'on puisse en accorder une autre.

Un flou artistique entoure les marchés des SEM, dont on ne sait s'ils relèvent du code des marchés publics ou de la loi de 1983. Il faut absolument clarifier ce point et je pense que c'est le code des marchés publics qui doit s'appliquer exclusivement (M. Olivier de Chazeaux approuve). Par ailleurs, les dirigeants des SEM ne doivent pas pouvoir être poursuivis pour prise illégale d'intérêts. Nous approuvons également le système d'assurance prévu, qui est une sage précaution.

Au final, nous arriverons à trouver un accord avec le Sénat sur ce texte technique mais important pour ceux qui travaillent au quotidien avec les SEM. La mesure la plus importante est que les travaux effectués par les SEM et qui sont ensuite intégrés dans le patrimoine des collectivités locales soient éligibles au fonds de compensation de la TVA. Je remercie le Gouvernement de ne pas avoir opposé l'article 40 à cette mesure d'équité (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF et du groupe du RPR).

M. Dominique Frelaut - C'est pour moi un plaisir, revenant à l'Assemblée nationale pour assurer l'intérim de mon ami Jacques Brunhes, nommé secrétaire d'Etat au tourisme, d'examiner un texte concernant les collectivités territoriales. Ce projet est en outre largement consensuel, même s'il subsiste des divergences avec le Sénat et nous souhaitons le voir aboutir.

Il y a loin entre le texte initial et celui que nous examinons aujourd'hui et c'est tant mieux. Je voudrais d'abord rendre hommage à Camille Vallin qui, avec l'actuel président des SEM, dont il a été le prédécesseur, a largement contribué à l'évolution de leur statut.

A l'origine, il s'agissait d'établir une égalité de traitement entre les SEM de construction de logements sociaux et les OPHLM qui ne disposaient pas des mêmes aides de la collectivité, alors que tous les locataires ont les mêmes besoins ! Le présent texte donne des moyens d'action supplémentaires aux collectivités. Avec 60 milliards de chiffre d'affaires, les SEM représentent un pouvoir économique important. Les dépenses d'investissement des collectivités territoriales représentent 375 milliards soit 70 % des équipements civils de la nation. Les SEM vont dorénavant pouvoir jouer un rôle d'impulsion plus actif, d'autant plus nécessaire que l'activité économique connaît un tassement.

Les collectivités sont entrées dans l'ère de l'intercommunalité. Le texte mentionne certes les groupements de communes, mais les SEM de groupement sont loin d'être les plus nombreuses. Il faudra donc veiller à ce que les élus municipaux, issus du suffrage universel, ne voient pas leur rôle amoindri dans les SEM qui se créeront dans un cadre intercommunal. Les formes de représentation ne sont en effet pas définitivement fixées et le congrès des maires insiste pour que les élus ne soient pas privés de leurs responsabilités au bénéfice de responsables désignés par d'autres voies que le suffrage universel.

Si la plupart des articles ont été votés conformes, des divergences subsistent, qui ont été atténuées par l'orateur précédent, ce qui montre qu'elles sont peut-être surmontables, mais qui affectent l'équilibre du projet et l'efficacité de la réforme.

Il en est ainsi de la participation au capital des actionnaires privés. Nous souhaitons que les collectivités locales puissent détenir jusqu'à 90 % du capital. La règle des 80 % est manifestement inadaptée aux opérations d'aménagement ou de service public.

Une des avancées majeures est que les collectivités actionnaires puissent octroyer à la SEM des avances de compte courant mais il convient de les protéger d'un risque financier excessif. C'est pourquoi nous souhaitons retourner au texte voté par l'Assemblée en première lecture. Nous sommes également attachés à ce que les SEM soient explicitement soumises à l'obligation d'un compte rendu annuel aux collectivités partenaires, même lorsqu'elles ne participent pas directement au financement de l'opération.

Les SEM peuvent donc être un des principaux outils d'intervention des collectivités locales dans des domaines aussi importants que le logement, l'aménagement et le développement économique, qui fait partie des compétences des communautés d'agglomération à taxe professionnelle unique. Le groupe communiste, qui défend le principe de cette réforme depuis plusieurs années, confirmera son vote de la première lecture et souhaite qu'un accord se dégage de la CMP.

M. Franck Dhersin - Les SEM n'étant ni plus ni moins que des outils au service d'une politique, il y a deux aspects dans le texte dont nous discutons aujourd'hui.

D'un point de vue exclusivement technique, la réforme qu'il opère va dans le bon sens. Il donne en effet aux SEM les moyens de contribuer au développement économique local, tout en rendant plus transparentes les relations qu'elles entretiennent avec les collectivités locales.

Conçues comme un instrument permettant aux collectivités territoriales d'exercer pleinement leurs compétences, dans le respect tant du principe de la liberté de commerce et d'industrie que de l'intérêt général, les SEM contribuent de façon importante au développement local. Elles contribuent à la bonne marche de certains services publics : elles gèrent 30 % du réseau des transports publics et 20 % du parc national de stationnement. Mais depuis quelques années, elles sont confrontées à l'inadaptation de certaines dispositions législatives, notamment de la loi Sapin, ainsi qu'à une jurisprudence aussi abondante qu'incertaine des juges administratifs et judiciaires.

Les ambiguïtés concernent les relations contractuelles et financières entre les collectivités locales et les SEM locales, le droit des sociétés appliqué à l'économie mixte et le statut des administrateurs mandataires des collectivités actionnaires.

Cette proposition de loi assez consensuelle vise en premier lieu à accroître la souplesse de gestion des SEM, en donnant aux collectivités la possibilité de détenir sous certaines conditions des comptes courant d'associés. Je ne peux que souscrire à cette libéralisation du statut économique des SEM qui tend à les aligner sur les sociétés anonymes.

En effet l'évolution du droit depuis 1993 a eu pour effet simultané d'interdire aux collectivités locales de soutenir financièrement les SEM et de placer celles-ci dans une situation plus défavorable que celle des entreprises privées intervenant dans le même secteur d'activité. Or les SEM doivent être considérées comme des entreprises publiques locales. S'il a semblé préférable au Sénat de ne pas modifier, pour l'instant, les seuils fixés par la loi du 7 juillet 1983, notre groupe pour sa part soutient le relèvement du plafond de participation des collectivités publiques à 90 %.

Ce texte cherche à concilier la loi Sapin sur les marchés publics et les modalités d'attribution d'une délégation de service public à une SEM.

Enfin, cette proposition de loi exonère des dispositions du code électoral relatives à l'inéligibilité et à l'incompatibilité des élus locaux agissant en tant que mandataires de leur collectivité au sein du conseil d'administration ou du conseil de surveillance d'une SEM, à condition qu'ils n'exercent pas d'autres fonctions dans la société. C'est une consécration de la jurisprudence administrative.

La proposition de loi initiale prévoyait que la rémunération des élus locaux mandataires ne pouvait faire l'objet d'une incrimination pour prise illégale d'intérêt. Cette disposition, qui n'était que la transposition de la jurisprudence de la Cour de cassation, a été supprimée par l'Assemblée au mois de juin. Je crains que les magistrats interprètent cette suppression comme une autorisation à poursuivre les élus.

J'en viens à l'aspect politique de ce texte.

L'élu libéral que je suis ne saurait accepter un développement sans fin des SEM, qui conduirait à une sorte de néo-socialisme municipal.

Sur le plan économique, l'efficacité des SEM reste à démontrer, tandis que le système des délégations de service public à des entreprises privées a fait ses preuves. Sur le plan juridique, le régime hybride des SEM n'est pas sécurisant pour les élus locaux et favorise les conflits entre intérêt électoral et intérêt local. Les SEM ne sont utiles que pour pallier la carence de l'initiative privée ou pour initier un projet.

Notre groupe, s'il est du point de vue technique, pour les réformes introduites par cette proposition, ne partage pas la vision politique sous-jacente. C'est pourquoi il s'abstiendra.

M. Olivier de Chazeaux - J'avais exprimé en première lecture l'approbation de ce texte plutôt consensuel par le groupe RPR. Je me réjouis des améliorations qui ont été apportées tant ici même qu'au Sénat.

Cependant deux points font encore problème.

S'agissant du plafond de participation, peut-être pourrions-nous nous rapprocher du Sénat en renonçant à le fixer à 90 %. Il me semble d'ailleurs qu'en première lecture, le Gouvernement avait manifesté son souhait de ne pas aller au-delà de 80 %.

Par ailleurs, le Sénat a voté des dispositions tendant à exonérer les SEM de logements sociaux des procédures de transparence. Je n'y suis pas favorable ; nous avons tout à gagner à appliquer les dispositions du code des marchés publics à l'ensemble des SEM.

Nous défendrons deux amendements. L'un, soutenu par de nombreux parlementaires, ne devrait pas faire de difficulté. L'autre concerne la possibilité pour des SEM d'avoir des sociétés filiales.

La discussion générale est close.

Mme la Présidente - En application de l'article 91, alinéa 9, du Règlement, j'appelle maintenant, dans le texte du Sénat, les articles de la proposition de loi sur lesquels les deux assemblées du Parlement n'ont pu parvenir à un texte identique.

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ARTICLE PREMIER A

M. le Rapporteur - L'amendement 1 tend à revenir au texte que nous avons adopté en première lecture en fixant à 10 % et non 20 % la participation minimum des actionnaires autres que les collectivités territoriales.

M. le Ministre - Comme en première lecture, le Gouvernement s'en remet à la sagesse de l'Assemblée.

L'amendement 1, mis aux voix, est adopté, et l'article premier A est rétabli et se trouve ainsi rédigé.

L'article premier, mis aux voix, est adopté, de même que l'article premier bis.

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ART. 3

M. le Rapporteur - L'amendement 11 tend à harmoniser cet article avec la loi sur les nouvelles régulations économiques.

L'amendement 11, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

L'article 3 ainsi modifié mis aux voix, est adopté.

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ART. 6

M. le Rapporteur - L'amendement 2 tend à supprimer la possibilité ouverte par le Sénat à la collectivité contractante d'octroyer des avances, ne serait-ce que par cohérence avec le code de l'urbanisme.

M. le Ministre - Avis favorable, la disposition introduite par le Sénat ne prévoyant ni règles prudentielles ni mesures de transparence et d'information, et les opérations d'aménagement étant celles qui exposent les collectivités locales aux risques financiers les plus importants.

L'amendement 2, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 3, qui revient également au texte de l'Assemblée nationale, tend à obliger la SEM à rendre compte à la collectivité, même lorsque celle-ci ne participe pas directement à l'opération. En effet, dès lors qu'une commune est concernée, il est indispensable qu'elle soit informée.

L'amendement 3, accepté par le Gouvernement, est adopté.

L'article 6 modifié, mis aux voix, est adopté, de même que les articles 8, 13 et 14.

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ART. 15

M. le Rapporteur - L'article 15, introduit par le Sénat, apporte une complication d'autant plus inutile qu'elle vise les districts qui seront supprimés au 31 décembre 2001. L'amendement 4 tend donc à le supprimer.

M. le Ministre - Je partage l'avis de votre rapporteur. J'ajoute que le Gouvernement est favorable à l'adoption du mécanisme de substitution limité à ce cas de figure et donnera un avis favorable à l'adoption de l'amendement 12 de la commission qui rend sans objet l'article 15.

L'amendement 4, mis aux voix, est adopté.

En conséquence, l'article 15 est supprimé.

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APRÈS L'ART. 15

M. le Rapporteur - M. le ministre a déjà présenté et défendu l'amendement 12 de la commission, identique à l'amendement 9 de MM. Rimbert et Marcovitch.

Ils permettent d'harmoniser les dispositions de la loi SRU avec le code général des collectivités territoriales. Il instaure un mécanisme de représentation-substitution au profit des communautés d'agglomération.

M. le Ministre - Comme j'ai le souci de la souplesse et que cet amendement la permet, j'y suis en effet favorable.

Les amendements 12 et 9, mis aux voix, sont adoptés.

M. le Rapporteur - La commission a émis un avis favorable sur l'amendement 10 rectifié, dont l'objet est de permettre, en complétant un article du code de l'urbanisme, d'appliquer une procédure de révision d'urgence aux anciens POS.

M. le Ministre - Il s'agit d'une mesure temporaire, puisqu'elle est limitée au 1er janvier 2004 et subordonnée à la prescription préalable d'une révision générale du POS. Le Gouvernement y est favorable.

L'amendement 10 rectifié, mis aux voix, est adopté.

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ART. 16

M. le Rapporteur - Avec l'amendement 5, qui tend à supprimer l'article 15, il s'agit de rendre obligatoire la procédure du code des marchés publics, c'est-à-dire de faire appel à la concurrence, dès lors que l'on dépasse 1,3 million de francs - et non pas 35 millions comme ce serait le cas si cet article était maintenu.

L'amendement 5, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté. En conséquence, l'article 16 est supprimé.

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APRÈS L'ART. 16

M. Franck Dhersin - Cet amendement 8, présenté par Michel Bouvard, vise à supprimer l'accord exprès de chaque collectivité territoriale en matière de création de filiales par une société d'économie mixte. Cette modification permettrait d'aligner les modalités de prise de participation au capital de sociétés filiales sur celui des modifications essentielles des statuts, afin que cette prise de participation ne soit pas plus difficile que la modification du capital social, ou celle de l'objet social.

En effet, lors des assemblées générales ordinaires ou extraordinaires, le représentant de la collectivité locale n'a besoin d'aucune habilitation spécifique.

M. le Rapporteur - La commission est défavorable. C'est le contraire qu'il convient de faire ! L'objet est de favoriser l'information et de renforcer le contrôle des collectivités locales sur les SEM, d'éclairer les élus. Prendre une participation dans une filiale est une opération tout à fait importante. Il est nécessaire que, préalablement, l'assemblée délibère.

M. le Ministre - Dans le même esprit, le Gouvernement estime que les collectivités locales doivent être entièrement impliquées ; et d'autant plus que les prises de participation peuvent aboutir à de véritables démembrements des activités des SEM.

Ces participations peuvent en outre être risquées, tant pour la SEM locale que pour les collectivités éventuellement appelées à partager ce risque.

Avis défavorable.

L'amendement 8, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Francis Delattre - Notre amendement 7, auquel l'amendement 6 de M. de Chazeaux est identique, est certes, un cavalier législatif, mais il tend à remédier à certaines incohérences résultant de la loi sur le cumul des mandats, par ailleurs excellente. On a en effet vu, lors des dernières municipales, des collègues élus maires en mars et qui se sont retrouvés, après les démissions successives des uns et des autres, avec un dernier mandat de conseiller régional. Ils étaient amenés, puisqu'on ne peut démissionner de son dernier mandat, à démissionner de leur mandat de maire ou de conseiller général. Tout le monde semble d'accord pour dire que c'est aberrant. Dans l'esprit de la loi, c'est en effet le dernier mandat auquel on s'est présenté qui est effectivement le dernier mandat.

Notre amendement vise à sortir de cette situation ridicule et qui a déjà donné lieu à des contentieux.

On m'a dit qu'un autre texte allait rectifier le tir, mais on ne connaît pas la date de sa présentation à l'Assemblée nationale.

M. le Rapporteur - La commission exprime une grande compréhension quant au fond de l'argumentation. Elle a néanmoins repoussé ces amendements car ces dispositions ont déjà été adoptées dans le projet de loi relatif à la démocratie de proximité qui sera discuté au Sénat le 8 janvier. Il dépend de vous qu'il soit voté rapidement.

M. Francis Delattre - Nous maintenons notre amendement.

M. le Ministre - Nous sommes sensibles à vos arguments, mais il s'agit d'un cavalier, vous le dites vous-même. Puisque cette disposition sera discutée très prochainement dans le cadre d'un autre projet, vous feriez mieux de retirer votre amendement.

Les amendements 6 et 7, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

L'ensemble de la proposition de loi, mis aux voix, est adopté.

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SAISINE POUR AVIS D'UNE COMMISSION

Mme la Présidente - J'informe l'Assemblée que la commission des finances, de l'économie générale et du plan a décidé de se saisir pour avis du projet de loi autorisant l'approbation de la décision du Conseil de l'Union européenne du 29 septembre 2000 relative au système des ressources propres des Communautés européennes.

Prochaine séance mardi 4 décembre, à 9 heures.

La séance est levée à 19 heures 45.

                      Le Directeur-adjoint du service
                      des comptes rendus analytiques,

                      Louis REVAH

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ERRATUM

au compte rendu analytique de la 3ème séance du mardi 27 novembre 2001

Page 13, à l'antépénultième ligne du 3e paragraphe, lire :

M. Lionnel Luca - M. Mamère aura au moins eu le mérite d'être plus clair en défendant la France girondine... (le reste sans changement).

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ORDRE DU JOUR
DU MARDI 4 DECEMBRE 2001

A NEUF HEURES : 1ère SÉANCE PUBLIQUE

1. Questions orales sans débat.

2. Fixation de l'ordre du jour.

A QUINZE HEURES : 2ère SÉANCE PUBLIQUE

1. Questions au Gouvernement.

2. Explications de vote et vote, par scrutin public, sur l'ensemble du projet de loi relatif à la Corse, en nouvelle lecture.

3. Discussion, en lecture définitive, du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2002.

4. Explications de vote et vote, par scrutin public, sur l'ensemble du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2002, en lecture définitive.

5. Discussion du projet de loi de finances rectificative pour 2001 (n° 3384).

M. Didier MIGAUD, rapporteur général au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du plan. (Rapport n° 3427).

M. Jean-Yves LE DRIAN, rapporteur pour avis au nom de la commission de la défense nationale et des forces armées. (Avis n° 3428).

VINGT-ET-UNE HEURES : 3ème SÉANCE PUBLIQUE

Suite de l'ordre du jour de la deuxième séance.


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