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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 28 OCTOBRE 1998

SOMMAIRE

PRÉSIDENCE DE M. LAURENT FABIUS

1. Nomination d'un vice-président de l'Assemblée nationale (p. 7508).

2. Souhaits de bienvenue à deux délégations parlementaires étrangères (p. 7508).

3. Questions au Gouvernement (p. 7508).

PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES (p. 7508)

MM. Gilles Carrez, Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

FRAUDES À LA SÉCURITÉ SOCIALE (p. 7509)

M. Jean-Michel Ferrand, Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité.

SERVICE PUBLIC DES TRANSPORTS (p. 7510)

MM. Jacques Kossowski, Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement.

DÉPLACEMENT D'UN MAGISTRAT DE LA CHANCELLERIE (p. 7511)

M. Pascal Clément, Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice.

ACCUEIL DES HANDICAPÉS À LA RÉUNION (p. 7512)

Mmes Huguette Bello, Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité.

RÉDUCTION DU TEMPS DE TRAVAIL (p. 7513)

Mmes Brigitte Douay, Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité.

DÉCHETS NUCLÉAIRES (p. 7514)

Mme Michèle Rivasi, M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'industrie.

ACCORD AEROSPATIALE-MATRA (p. 7515)

MM. Vincent Burroni, Alain Richard, ministre de la défense.

RENAULT VÉHICULES INDUSTRIELS (p. 7515)

Mme Laurence Dumont, M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'industrie.

DÉPLACEMENT D'UN MAGISTRAT DE LA CHANCELLERIE (p. 7516)

M. Pierre Méhaignerie, Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice.

PLANS DE LICENCIEMENT (p. 7517)

M. Alain Bocquet, Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité.

TASLIMA NASREEN (p. 7518)

Mme Muguette Jacquaint, M. Charles Josselin, ministre délégué à la coopération et à la francophonie.

Suspension et reprise de la séance (p. 7519)

PRÉSIDENCE DE M. PATRICK OLLIER

4. Loi de financement de la sécurité sociale pour 1999. Suite de la discussion d'un projet de loi (p. 7519).

DISCUSSION DES ARTICLES (p. 7519)

L'article 1er est réservé jusqu'après l'article 36.

Avant l'article 2 (p. 7519)

Amendement no 120 corrigé de Mme Fraysse : Mme Jacqueline Fraysse, M. Alfred Recours, rapporteur de la commission des affaires culturelles, pour les recettes et l'équilibre général ; Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. - Rejet.

Amendement no 121 corrigé de Mme Fraysse : Mme Jacquel ine Fraysse, MM. Alfred Recours, rapporteur ; Jean Le Garrec, président de la commission des affaires culturelles ; Mme la ministre, M. Charles de Courson. Rejet.

A mendement no 122 corrigé de Mme Fraysse : Mme Muguette Jacquaint, M. Alfred Recours, rapporteur ; Mme la ministre, MM. Bernard Accoyer, Charles de Courson, le président. - Rejet.

Amendement no 422 de M. de Courson : MM. Charles de Courson, Alfred Recours, rapporteur ; Mme la ministre,

M. Bernard Accoyer. - Rejet.

Amendement no 423 de la commission des affaires culturelles : MM. Maxime Gremetz, Alfred Recours, rapporteur ; le président de la commission des affaires culturelles, Denis Jacquat, rapporteur de la commission des affaires culturelles, pour l'assurance vieillesse ; Mme la m inistre, M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. - Retrait.

L'amendement no 423 est repris par M. Bur.

M. José Rossi.

Suspension et reprise de la séance (p. 7529)

Amendement no 423 repris par M. Bur : MM. François Goulard, le président, le président de la commission des affaires culturelles, Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis de la commission des finances ; Bernard Accoyer, Mme la ministre, M. Yves Bur.

Mme Jacqueline Fraysse.

Suspension et reprise de la séance (p. 7532)

M M. Charles de Courson, Maxime Gremetz, Alfred Recours, rapporteur ; Mme la ministre, M. Jacques Barrot. - Rejet, par scrutin, de l'amendement no 423.


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Article 2 (p. 7534)

MM. Jacques Barrot, Jean-Luc Préel, Bernard Accoyer, Yves Bur, Maxime Gremetz, François Goulard, Germain Gengenwin, Pascal Terrasse, Alfred Recours, rapporteur ;

Mme la ministre.

A mendement de suppression no 370 de M. Préel : MM. Jean-Luc Préel, Denis Jacquat, rapporteur ; Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis ; Mme la ministre, MM. Yves Deniaud, Bernard Accoyer. - Rejet.

Amendement no 306 de M. Préel : MM. Charles de Courson, Denis Jacquat, rapporteur ; Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat à la santé ; Bernard Accoyer. - Rejet.

Renvoi de la suite de la discussion à la prochaine séance.

5. Ordre du jour de la prochaine séance (p. 7542).


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COMPTE RENDU INTÉGRAL

PRÉSIDENCE DE M. LAURENT FABIUS

M. le président.

La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

1

NOMINATION D'UN VICE-PRÉSIDENT DE L'ASSEMBLÉE NATIONALE

M. le président.

L'ordre du jour appelle la nomination d'un vice-président de l'Assemblée nationale.

Je n'ai reçu qu'une candidature, qui a été affichée, celle de M. Raymond Forni.

En conséquence, je proclame M. Raymond Forni, viceprésident de l'Assemblée nationale. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste, du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

2

SOUHAITS DE BIENVENUE À DEUX DÉLÉGATIONS PARLEMENTAIRES ÉTRANGÈRES

M. le président.

Mes chers collègues, vous savez que les relations entre la Finlande et la France sont excellentes. Je suis donc heureux de souhaiter, en votre nom, la bienven ue à une délégation parlementaire conduite par Mme Riitta Uosukainen, présidente du Parlement de la République de Finlande. (Mmes et MM. les députés et les membres du Gouvernement se lèvent et applaudissent.)

Je suis également heureux de souhaiter, en votre nom, la bienvenue à une délégation parlementaire conduite par M. Rawhi Fattouh, député et secrétaire général du Conseil législatif palestinien. (Mmes et MM. les députés et les membres du Gouvernement, debout, applaudissent.)

3

QUESTIONS AU GOUVERNEMENT

M. le président.

L'ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.

Nous commençons par le groupe du Rassemblement pour la République.

PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES

M. le président.

La parole est à M. Gilles Carrez.

M. Gilles Carrez.

Monsieur le ministre de l'économie et des finances, malgré les promesses du Gouvernement de baisser les impôts, les Français constatent ces jours-ci une forte augmentation. Ils viennent, en effet, de recevoir leur avis d'imposition à la CSG, la contribution sociale généralisée, et ils constatent un doublement, un triplement, parfois plus encore de cette contribution que votre gouvernement, appuyé par la majorité plurielle, a fortement augmenté l'année dernière.

Ainsi, M. Martin, un exemple parmi tant d'autres, a vu sa CSG augmenter de 120 %, c'est-à-dire qu'elle a plus que doublé entre 1997 et 1998 : 9 624 francs en 1998 contre 4 407 francs en 1997. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

Plusieurs députés du groupe socialiste.

Pauvre Martin !

M. le président.

Un peu de silence, s'il vous plaît.

M. Gilles Carrez.

Monsieur le ministre, je tiens à votre disposition les deux avis d'imposition.

Malheureusement pour nos compatriotes, l'addition ne va pas s'arrêter là : l'année prochaine, en 1999, il n'y aura pas de baisse d'impôts, contrairement à ce que le Gouvernement prétend. Les classes moyennes, les familles, en particulier, du fait de l'abaissement du quotient familial, vont subir un nouveau tour de vis fiscal.

P lusieurs députés du groupe socialiste.

Certaines familles !

M. Gilles Carrez.

Aussi, monsieur le ministre, ma question est-elle très simple : quand cesserez-vous d'annoncer des baisses d'impôt qui ne se produisent jamais ? (« Très bien ! » sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)

Et ne me répondez pas en parlant de 1995 : ce qui intéresse les Français, c'est l'avenir et non le passé.

(Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants. - Rires et exclamations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Monsieur le député, il ne me serait pas venu à l'esprit de parler de 1995, mais puisque vous avez évoqué cette année, je tiens à apporter une précision car je voudrais que tout le monde comprenne ce que vous avez voulu dire. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

Je suppose, en effet, qu'en évoquant 1995, vous faisiez allusion à la hausse de deux points de TVA décidée par un gouvernement que vous souteniez et que vous avez votée. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemble-


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ment pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Vous avez raison de hurler car, sur ce point, les Français vous ont donné leur sentiment, il y a un peu plus d'un an. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.) Cela étant, cette injustice, car la TVA, chacun le sait, est un impôt injuste puisqu'il frappe tout le monde de la même manière, n'était pas la seule dans notre système fiscal. Ainsi, en matière de cotisations sociales, l'une des grandes injustices tenait au fait que si chacun cotisait sur le salaire de son travail pour financer sa sécurité sociale, personne ne cotisait sur les revenus de son capital. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe socialiste.)

Cettre majorité a donc jugé qu'il convenait que les Français cotisent sur l'ensemble de leurs revenus, qu'ils viennent du travail ou de l'épargne, car il est normal que les prélèvements soient identiques pour la sécurité sociale dont on bénéficie de façon égalitaire.

Il est donc exact, monsieur le député, qu'un changement est intervenu, mais vous oubliez de dire que M. Martin - auquel vous aurez l'amabilité de présenter mes salutations quand vous le reverrez (Sourires) - doit avoir relevé que les cotisations qu'il payait sur son salaire ont diminué plus que n'a augmenté sa CSG. Avec les modifications que nous avons introduites, en effet, les salariés payent moins et ceux dont le revenu ne vient pas du travail payent davantage.

M. Thierry Mariani.

Et les retraités ? M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Je suis navré, monsieur le député, que vous vous soyez fait chahuter par M. Martin à cause du Gouvernement. Vous avez maintenant un argument pour lui expliquer qu'en réalité, parce qu'il est un salarié, il y a gagné, et je suis sûr que vous vous ferez l'écho de cette bonne nouvelle auprès de votre électeur. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

FRAUDES À LA SÉCURITÉ SOCIALE

M. le président.

La parole est à M. Jean-Michel Ferrand.

M. Jean-Michel Ferrand.

Ma question à laquelle s'associe Patrick Ollier, député des Hautes-Alpes, s'adresse à

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Alors que l'ensemble des régimes de santé et de retraite connaissent des difficultés importantes, M. le président de la caisse régionale d'assurance maladie du Sud-Est vient de dénoncer publiquement une situation qui lui paraît intolérable. Il indique que, sur les 25 milliards de francs versés chaque année par sa caisse, 4 milliards concernent des ressortissants étrangers. Il estime que, n'ayant pas les moyens de contrôler efficacement la destination de ces prestations, les risques financiers, c'est-à-dire leur détournement, pourraient porter sur plusieurs centaines de millions de francs.

Il a notamment déclaré à la presse : « Il est fréquent que nous versions une pension à des hommes âgés de quatre-vingt-dix ans, parfois de cent ans. J'en ai même un qui arrive à cent vingt ans, plus vieux que Jeanne Calment. »

La Caisse nationale d'assurance vieillesse conteste ces chiffres. Appuyé par son conseil d'administration et par l'ensemble des syndicats, le président de la CRAM du S ud-Est maintient ses affirmations et demande les moyens d'effectuer les contrôles fiables nécessaires.

Madame la ministre, le système de contrôle actuel s'avérant désuet et inefficace, quelles mesures urgentes entendez-vous prendre, à une époque où le déficit des régimes de santé et de retraite constitue une préoccupation prioritaire et très coûteuse pour les contribuables, a fin de donner aux caisses régionales les moyens modernes permettant de vérifier la fiabilité des informations, notamment les identités, nécessaires aux versements périodiques des avantages vieillesse et veuvage à destination des bénéficiaires de pays étrangers ? (Applaudissements sur divers bancs du groupe du Rassemblement pour la République).

M. le président.

La parole est à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité.

Monsieur le député, je tiens d'abord à rappeler, afin que les Français comprennent bien ce dont il s'agit, que, quand on a cotisé pour sa retraite, on a le droit de la toucher, que l'on soit en France ou à l'étranger, même jusqu'à cent deux ans si l'on vit jusque-là ! Je pars d'ailleurs du principe que les étrangers ne sont pas plus tricheurs que les Français, contrairement à vous.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. Exclamations sur quelques bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)

M. Thierry Mariani.

Ce n'est pas la question.

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Cela dit, je fais partie de ceux qui pensent que chaque franc versé par les Français doit l'être à bon escient. Je vous rappelle d'ailleurs que j'ai fait voter, en 1992, la première loi de contrôle des chômeurs pour éviter les fraudes à l'indemnisation du chômage. Des dispositifs comparables existent pour le RMI, pour les prestations maladie et pour les retraites. Ainsi, plusieurs milliers de personnes sont chargées du contrôle dans les caisses.

Dans la suite de l'examen de la loi de financement de la sécurité sociale, nous avons d'ailleurs évoqué ce matin le contrôle médical et la répression des abus. Le nombre des personnes ayant été radiées à la suite d'un contrôle montrant qu'elles avaient perçu des allocations familiales de manière injustifiée figure chaque année dans le rapport de la CNAF.

De la même manière, la caisse d'assurance vieillesse a des moyens de contrôle qui lui permettent de vérifier certaines données. Lorsqu'il s'agit de cas situés à l'étranger, elle peut faire appel aux services dont nous disposons dans le pays considéré.

(Murmures sur plusieur bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)

Le contrôle existe donc et je souhaite qu'il soit réel, notamment en matière d'assurance maladie, d'allocations familiales et de retraite.

M. Thierry Mariani.

Ce n'est pas possible à l'étranger.

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Je voudrais aussi que, dans cette assemblée, on cesse de penser que nous sommes tous parfaits et que seuls les étrangers sont ses tricheurs. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. - Protestations sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 28 OCTOBRE 1998

M. Jean-Michel Ferrand.

Vous déformez mes propos !

M. François Vannson.

C'est inadmissible !

SERVICE PUBLIC DES TRANSPORTS

M. le président.

La parole est à M. Jacques Kossowski.

M. Jacques Kossowski.

Monsieur le ministre de l'équipement, des transports et du logement, depuis maintenant plusieurs semaines, nous assistons à une multiplication anarchique des arrêts de travail dans l'ensemble des transports en commun de notre pays. Les usagers, en particulier ceux de la région parisienne, vont d'ailleurs connaître de nouvelles difficultés puisque des préavis de grève sont déjà déposés pour la semaine prochaine. Ces grèves trouvent essentiellement leur origine dans le climat d'insécurité croissant auquel sont confrontés de nombreux agents du service public, ainsi que les usagers qu'il convient de ne pas oublier.

De telles perturbations nuisent gravement à la qualité de vie de nos concitoyens, notamment lorsqu'ils doivent parcourir de longues distances pour se rendre tous les jours à leur travail. De plus, de nombreux employeurs hésitent désormais à embaucher des personnes domiciliées loin de leur entreprise par manque de confiance dans la régularité des transports en commun.

Enfin, il convient de rappeler que l'Etat a le devoir d'assurer la protection de ses agents dans l'exercice de leurs fonctions et de veiller à la bonne continuité du service public. La sécurité, ne l'oublions pas, demeure l'un des tout premiers droits du citoyen ; il s'agit d'un acquis né de la République.

Ma question est donc double, monsieur le ministre.

D'abord, quelles dispositions le Gouvernement compte-t-il enfin prendre pour assurer sérieusement la sécurité des voyageurs et des agents publics des transports ? Il ne suffit pas de faire des effets d'annonce. Il faut désormais engager des actions concrètes sur le terrain, traduisant clairement la volonté de fermeté des pouvoirs publics.

Ensuite, ne convient-il pas de mettre en place une obligation de service minimum dans les transports, comme le demandent d'ailleurs de nombreuses associations d'usagers ? Ainsi, il serait possible de garantir le droit de grève des agents publics tout en préservant le droit au transport pour chaque citoyen de notre pays.

(Applaudissements sur plusieurs bancs du Rassemblement pour la République.)

M. le président.

La parole est à M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Je dois vous reconnaître, monsieur le député, et, plus généralement, à l'opposition, une qualité : vous ne changerez jamais.

(Rires et exclamationss ur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Plusieurs députés du groupe du Rassemblement pour la République.

Vous non plus ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

En effet, dès que des conflits et des problèmes apparaissent, vous revenez avec force sur la question du service minimum, comme reviennent à l'automne les feuilles mortes, les souvenirs et les regrets.

(Rires et applaudissements sur les bancs du groupe communiste et du groupe socialiste. - Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) En ce qui concerne la sécurité, problème grave et sérieux, j'ai déjà eu l'occasion d'indiquer à plusieurs reprises que des mesures avaient été prises.

M. Thierry Mariani.

Des mesurettes ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Elles tendent d'abord à améliorer l'humanisation du service public alors que, pendant des années, on a surtout cherché à le déshumaniser en rendant de plus en plus difficiles les rapports entre les salariés des entreprises publiques et les usagers.

Ainsi plus de 800 salariés vont être redéployés à la RATP et à la SNCF et nous accroîtrons les effectifs de police et les moyens techniques utilisés dans ces entreprises.

M. Francis Delattre.

Ce n'est pas le sujet.

M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Je tiens surtout à aller plus au fond sur la question du service minimum, puisque cette question revient sans cesse dans vos propos.

M. Philippe Briand.

Vous n'êtes pas loin du fond ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Si l'on ne prenait en compte que la gêne des usagers - qui est réelle et que personne ne saurait sousestimer...

M. Bernard Accoyer.

Très bien ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

... il faudrait, pour instaurer un service minimum sur la base de vos propositions et comme l'a dit une association d'usagers en soutenant M. Sarkozy qui s'exprimait dimanche soir, interdire le droit de grève pendant les heures de pointe. (« Très bien ! » sur divers bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

C'est votre position, mais ce n'est pas celle du Gouvernement. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste, du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

Nous considérons, comme l'a d'ailleurs rappelé JeanJack Queyranne hier matin, qu'il s'agirait d'une mauvaise solution qui porterait atteinte au droit de grève. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Jean-Paul Charié.

Le service minimum n'est pas une atteinte au droit de grève ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

En ce qui concerne les grèves qui ont d'autres motivations que l'émotion et la solidarité suscitées par des agressions, nous sommes partisans du dialogue social, de la recherche du compromis quand cela est possible, y compris en utilisant la période de préavis pour aboutir à des résultats.

M. Richard Cazenave.

Ils ne respectent pas l'obligation de préavis ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Telle est notre démarche en la matière.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 28 OCTOBRE 1998

Pour ce qui est, enfin, des actions dont vous avez parlé, monsieur le député, engagées à la suite d'agressions, il convient avant tout de ne pas opposer les agents du service public aux usagers. Il faut au contraire faire en sorte de les rassembler. (Rires et exclamations sur plusieurs bancs du Rassemblement pour la République.)

M. Arnaud Lepercq.

N'importe quoi ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Nous devons donc trouver, y compris pour la nécessaire riposte à de tels actes, des formes d'action manifestant la solidarité de tous et ne pénalisant pas les usagers.

En d'autres termes, monsieur le député, alors que vous voulez mettre de l'huile sur le feu (Protestations sur plu-s ieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants) nous voulons mettre de l'huile dans les rouages afin que cela tourne. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe communiste, du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. Arnaud Lepercq.

Mais ils restent grippés !

M. le président.

Nous passons au groupe Démocratie libérale et Indépendants.

DÉPLACEMENT D'UN MAGISTRAT DE LA CHANCELLERIE

M. le président.

La parole est à M. Pascal Clément.

M. Pascal Clément.

Madame la ministre de la justice, je veux vous interroger sur ce qu'il est maintenant convenu d'appeler l'affaire Lemesle.

Nous avons appris hier soir, en lisant Le Monde, qu'un sous-directeur des affaires criminelles et des grâces à la chancellerie avait été évincé de son poste parce qu'il avait écrit dans la collection « Que sais-je ? » un ouvrage intitulé Le Procureur de la République.

A ce sujet, j'ai déjà deux interrogations.

D'abord cet ouvrage contient-il autre chose que le droit positif ? Ensuite, vous lui avez reproché de ne pas avoir fait place à la volonté du Gouvernement d'assurer l'indépendance du parquet. Or, madame la ministre, le Parlement n'est même pas encore saisi d'un projet à ce sujet. Il ne s'agit que d'une intention gouvernementale.

D'ailleurs, avez-vous observé que, page 116, si mes souvenirs sont bons, M. Lemesle précise que ce petit livre a été écrit il y a deux ans, c'est-à-dire avant la remise du rapport Truche à M. le Président de la République ? Il ne pouvait donc évidemment pas faire état des réformes aujourd'hui envisagées.

M. Arnaud Lepercq.

C'est un procès d'opinion !

M. Pascal Clément.

Autrement dit, madame la garde des sceaux, l'éviction de votre sous-directeur, nommé il y a quatre ans par M. Pierre Méhaignerie, qui m'a demandé de l'associer à ma question (Rires et exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert), apparaît comme le fait du prince. Il s'agit d'une forme de censure que l'on n'avait jamais observée de la part d'un ministre de la justice. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste et sur quelques bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

Mesdames et messieurs, vous n'êtes pas nombreux, j'imagine, à connaître cet homme. Alors, respectez ceux qui ont eu l'honneur de le rencontrer ! Cet homme est unanimement respecté de la magistrature pour sa compétence, sa loyauté, son efficacité. Après quatre ans d'exercice d'une lourde responsabilité, lui proposer d'être substitut général à Paris ou à Versailles, a été ressenti, par tous ses collègues, comme un camouflet.

Madame la ministre de la justice, voulez-vous exercer le ministère qui porte le nom de cette belle vertu ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

M. le président.

La parole est à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice.

Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice.

Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, je vais d'abord vous rappeler les faits.

Le mois dernier, ce haut responsable du ministère de la justice, sous-directeur à la direction des affaires criminelles et des grâces publie « Que sais-je ? », intitulé Le Procureur de la République , dans lequel il se livre à un éloge vif et répété des instructions individuelles du garde des sceaux aux procureurs de la République.

Et dans ce même livre, on peut lire : « La possibilité pour le garde des sceaux de donner des instructions individuelles, y compris lorsqu'il s'agit de requérir un nonlieu, une relaxe ou un acquittement, ne paraît pas souffrir la critique. »

(« Et alors ? » sur quelques bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) A plusieurs reprises, dans cet ouvrage, les instructions individuelles sont présentées comme indispensables, et leur suppression est même qualifiée d'aventure.

(Exclamations sur les bancs du groupe Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants).

M.

Pascal Clément.

C'est de la censure !

M.

Richard Cazenave.

La fatwa.

M.

le président.

S'il vous plaît ! Mme la garde des sceaux.

Or la suppression des instructions individuelles, vous le savez, monsieur le député, est au coeur de la réforme de la politique judiciaire voulue par le Gouvernement...

M.

Pascal Clément.

Ce n'est pas la loi ! Mme la garde des sceaux.

... et au coeur de l'engagement pris ici même, dans cette assemblée, par le Premier ministre dans sa déclaration de politique générale, le 19 juin 1997.

(Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. Exclamations sur les bancs du groupe Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Il se trouve que le sous-directeur qui a écrit ce « Que sais-je ? » est justement celui qui est chargé, au sein de la direction des affaires criminelles et des grâces, de concevoir, d'expliquer, de commenter, de mettre en oeuvre, en mon nom et avec ma délégation de signature, la politique pénale voulue par le Gouvernement.

(Exclamations sur les mêmes bancs.)


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 28 OCTOBRE 1998

M. Arnaud Montebourg.

Très bien.

M.

Thierry Mariani.

Censure !

M.

le président.

Je vous en prie ! Mme la garde des sceaux.

Je considère que cette situation ne peut pas durer. Nous ne pouvons pas avoir un haut responsable au ministère de la justice, qui, d'un côté, est chargé de conduire la politique pénale au nom du garde des sceaux, et, de l'autre, écrit exactement et frontalement le contraire de la politique que le Gouvernement entend mener en matière pénale.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, et du groupe communiste et sur quelques bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert. Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Cette contradiction fonctionnelle ne peut évidemment pas durer, et ce haut responsable doit partir.

M.

Patrick Devedjian.

Lamentable.

M.

le président.

S'il vous plaît ! Mme la garde des sceaux.

Je l'ai reçu. Je lui ai proposé de partir dans une juridiction. Je pense qu'un tel poste ne présente pas pour lui les mêmes inconvénients, ...

M.

Jean-Michel Ferrand.

Quelle promotion ! Mme la garde des sceaux ... parce qu'en juridiction un magistrat peut tout à fait critiquer la politique du Gouvernement.

D'ailleurs, beaucoup le font, quelquefois en des termes qui frisent les limites du devoir de réserve. Quoi qu'il en soit, je ne me suis jamais senti autorisée à prendre la moindre mesure parce que je crois au débat public.

Mme Christine Boutin.

La réforme n'est pas votée.

Mme la garde des sceaux.

M. Lemesle a effectivement le droit d'obtenir un poste qui corresponde à la fois aux services rendus et à son ancienneté, ainsi qu'au fait que mis à part ce « Que sais-je ? » je n'ai rien à lui reprocher dans l'exercice de ses fonctions.

(Mêmes mouvements.)

M.

André Santini.

A la Bastille ! Mme la garde des sceaux.

Mais je souhaite évidemment mettre fin à cette contradiction fonctionnelle. D'ailleurs, si je ne le faisais pas, monsieur le député, vous seriez tout à fait fondé à me dire : « Comment, madame la ministre de la justice, vous dites une chose et vos fonctionnaires écrivent l'inverse ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur plusieurs bancs du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. Jacques Myard.

Nul.

Mme la garde des sceaux.

Aussi, pour la bonne marche du service public, pour la clarté qui est le choix de ce gouvernement, M. Lemesle exercera mieux ses fonctions dans une juridiction.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur plusieurs bancs du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M.

le président.

Nous en venons au groupe Radical, Citoyen et Vert.

ACCUEIL DES HANDICAPÉS A LA RÉUNION

M.

le président.

La parole est à Mme Huguette Bello.

Mme Huguette Bello.

Ma question s'adresse à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Au moment où plusieurs organisations désirent attirer l'attention des pouvoirs publics sur la situation des handicapés, je voudrais faire entendre la voix de ceux de la Réunion.

Des efforts ont été réalisés, ces dernières années, pour leur prise en charge avec, notamment la réalisation de structures d'accueil spécialisées. Mais l'effet conjugué d'une croissance démographique forte et du caractère encore récent de cette prise en charge fait que les établissements médico-sociaux restent en nombre insuffisant.

Les capacités d'accueil, quelle que soit la nature du handicap, et cela pour les enfants comme pour les adultes, restent bien en-deçà des demandes.

Alors, les listes d'attente s'allongent : les délais peuvent facilement atteindre trois ans. Certains handicaps sont peu pris en charge, d'autres ne le sont pas du tout. Et il n'y a aucune solution alternative à une interminable attente puisque, dans une île, on ne peut sérieusement orienter les personnes concernées vers un autre département. Tout au plus, pour compenser le manque de places, peut-on appliquer l'amendement Creton qui permet le maintien des adultes dans les structures destinées aux enfants. Cette solution concerne actuellement une centaine de personnes. Mais elle trouve vite ses limites et elle est loin d'être la mieux adaptée.

Aussi est-il indispensable, à côté de la recherche d'autres formes de prise en charge, d'augmenter le nombre de places en créant de nouveaux établissements à la Réunion. Plusieurs projets ont déjà reçu l'aval des instances médico-sociales régionales. Mais, à défaut de financements, ils ne peuvent voir le jour.

C'est pourquoi je souhaite, madame la ministre, voir ce dossier mis à l'étude, de sorte que ceux que la vie a, d'une façon ou d'une autre, blessés, puissent bénéficier, sans plus attendre, de l'accueil digne auquel ils ont droit.

(Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert et sur divers bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

M.

le président.

La parole est à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité, pour une réponse courte.

Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité.

Madame la députée, l'équipement en structures d'accueil pour handicapés à la Réunion reste en effet largement insuffisant : 1 300 places pour les enfants et 900 pour les adultes, à moins de la moitié de la moyenne nationale. C'est la raison pour laquelle j'ai été amenée, comme vous l'avez rappelé, à soutenir, cette année, deux p rojets de création ou d'extension d'établissements médico-sociaux pour handicapés : d'une part, la maison d'accueil spécialisée Bois-d'Olive à Saint-Pierre, d'autre part, le foyer à double tarification pour traumatisés crâniens de Bois-d'Olive.

Le Premier ministre, vous le savez, a annoncé un projet pluriannuel de développement des structures d'accueil des personnes handicapées, sans précédent : 5 500 places en maison d'accueil spécialisée et en foyer à double tarification, 8 500 places en centre d'aide par le travail et 2 500 places en atelier protégé.

Cela doit nous permettre, comme vous l'avez dit, de régler le problème de l'amendement Creton, c'est-à-dire d'accueillir les adultes qui sont aujourd'hui dans des maisons d'accueil pour enfants et de pouvoir libérer des places pour les enfants qui attendent. Et nous savons combien il est difficile pour les parents de savoir que


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l'absence de places ne permet pas à leurs enfants d'aller au bout de leur potentiel et de leur intégration dans la société.

Sachez, madame la députée, que la Réunion fera l'objet d'une attention particulière, et ce d'autant plus que l'Etat est en train d'élaborer avec le conseil général un schéma d'équipement pour les personnes handicapées à la Réunion. Elle aura donc toute sa place dans ce programme.

(Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

Nous en venons au groupe socialiste.

RÉDUCTION DU TEMPS DE TRAVAIL

M. le président.

La parole est à Mme Brigitte Douay.

Mme Brigitte Douay.

Madame la ministre de l'emploi et de la solidarité, n'en déplaise aux esprits négatifs ou franchement hostiles qui, au fond, souhaiteraient qu'elle n e marche pas, la réduction du temps de travail commence à embrayer. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Comme beaucoup de députés peuvent le constater dans leur circonscription, elle suscite un intérêt actif et croissant, notamment dans les PME, qui y voient l'opportunité de sauver ou de créer des emplois en accompagnant la reprise, tout en gagnant de la compétitivité, par une meilleure organisation du travail.

De nombreux accords sont en cours de signature, dans le respect de la lettre et de l'esprit de la loi. Alors que les accords signés dans la métallurgie et l'industrie sucrière ont pu être considérés comme inacceptables, par vousmême ou par des organisations syndicales, alors que d'autres branches sont en négociation, il semble bien que, dans le secteur textile, se dessine un accord de branche généralement présenté comme prometteur par les partenaires sociaux. Le groupe de travail textile de l'Assemblée nationale, qui a reçu les représentants des employeurs et des salariés du secteur, est très attentif à ce projet, qui montre que, même dans un secteur en situation difficile et hautement concurrentiel, des accords de réduction du temps de travail peuvent protéger, voire développer l'emploi, et cela, sans nuire au pouvoir d'achat. A la lumière de ces différentes expériences et perspectives, pourriez-vous nous dire, madame la ministre, dans quelle mesure une nouvelle dynamique de négociation vous paraît enclenchée, et à quelles conditions elle vous paraît pouvoir s'accélérer ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste et sur divers bancs du groupe communiste.)

M. le président.

La parole est à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité.

Vous avez raison, madame la députée, de le dire, le mouvement sur la réduction de la durée du travail est en marche dans notre pays.

(Exclamations sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Il est en marche, malgré des oppositions de principe, de-ci, de-là. Une dizaine de branches ont déjà signé et beaucoup d'autres sont en train de négocier. D'après le bilan des premiers accords, 485 accords conclus ont permis de créer 8 % d'emplois supplémentaires, ...

M. Charles Cova.

Il y a des milliers d'entreprises !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Le mouvement sur la réduction de la durée du travail est en marche aussi puisque un sondage indique que 18 % des entreprises sont en train de négocier...

M. Jean-Michel Ferrand.

Ce n'est pas beaucoup !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

... et que 20 % d'entre elles s'apprêtent à le faire dans les semaines qui viennent.

Comment se déroulent ces négociations ? Pour la première fois peut-être, des chefs d'entreprise exposent à leurs salariés et à leurs représentants quels sont les besoins de l'entreprise pour mieux fonctionner,...

M. Bernard Accoyer.

Ils vous ont attendue !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

... pour mieux utiliser les équipements, pour prendre en compte la saisonnalité, mais aussi pour tourner le dos aux tâches répétitives, pour requalifier le travail et pour obtenir des produits et des services de meilleure qualité dans des délais plus brefs. Quant aux salariés, ils ont fait savoir qu'ils veulent être plus responsables et mettre leur imagination au service de l'entreprise, mais ils souhaitent aussi mieux articuler leur vie professionnelle avec leur vie familiale.

En tout état de cause, ils sont fiers - c'est le mot qui revient le plus souvent - de créer, ensemble, des emplois, c'est ce que nous avons ressenti dans les entreprises que nous avons eu l'occasion de visiter. Aussi, ce grand débat qui devait mettre les entreprises par terre,...

M. Philippe Briand.

Ah ! si le Gouvernement pouvait travailler 35 heures !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

... ou qui devait entraîner des baisses de pouvoir d'achat pour les salariés (« Attendez ! » sur quelques bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants), a abouti à de vraies négociations, où chacun gagne. Demain, nos entreprises seront plus compétitives, nos salariés auront de meilleures conditions de vie et de travail et des chômeurs entreront dans les entreprises.

Dans le textile comme ailleurs, (Exclamations sur plu-s ieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants)...

M. le président.

Un peu de silence !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

... Christian Pierret et moi-même avons négocié (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants), pour prendre en compte les difficultés du secteur et être en mesure de l'aider (Exclamations sur les mêmes bancs) à faire face à la concurrence internationale. Je me réjouis qu'un accord qui sera gagnant pour tous (Exclamations sur les mêmes bancs) soit proposé à l'ensemble des partenaires sociaux de ce secteur. C'est un bon exemple, comme il y en a beaucoup.

Jour après jour (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants), je suis convaincue


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que nous pourrons les compter ensemble ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et sur quelques bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert. - Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) DÉCHETS NUCLÉAIRES

M. le président.

La parole est à Mme Michèle Rivasi.

Mme Michèle Rivasi.

Ma question s'adresse à M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'industrie.

La COGEMA retraite sur son site de La Hague des combustibles irradiés (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République) provenant d'Allemagne, du Japon, des Pays-Bas, de Belgique et de Suisse.

(Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Or vous savez que la quantité de combustibles étrangers déjà retraités (Exclamations sur les mêmes bancs.)...

M. le président.

S'il vous plaît !

Mme Michèle Rivasi.

... s'élève à environ (Exclamations sur les mêmes bancs)...

M. le président.

S'il vous plaît ! Mes chers collègues, je vous demande de respecter un minimum de courtoisie ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur quelques bancs du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. Jean-Paul Bacquet.

Ce sont des malappris !

M. le président.

Madame Rivasi, vous avez la parole !

Mme Michèle Rivasi.

Que la loi ne soit pas respectée ne perturbe pas mes collègues ! Environ 7 000 tonnes de déchets étrangers sont stockés à La Hague, à l'heure actuelle, et on retraite à peu près 5 000 tonnes pour les centrales EDF.

Or on a voté en 1991 une loi - la loi Bataille - interdisant le stockage des déchets étrangers sur le territoire français. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Or ces déchets n'ont pas été rapatriés.

Depuis que la COGEMA a commencé à retraiter des combustibles irradiés étrangers, il n'y a eu que cinq rapatriements, dont deux pour le Japon et trois pour l'Allemagne. Mais certaines catégories de déchets n'ont jamais fait l'objet d'un rapatriement.

Cette situation ne peut plus durer. La France ne peut pas devenir la poubelle radioactive du monde. (« Ah ! » sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Monsieur le secrétaire d'Etat, ma question s'articule en quatre points.

Pouvez-vous nous fournir un rapport d'information détaillé...

M. Jean-Louis Debré.

Non, il ne peut pas !

Mme Michèle Rivasi.

... sur la nature et les quantités de déchets concernés, par catégorie et par pays ? (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Pouvez-vous nous indiquer les raisons pour lesquelles les déchets ne sont pas renvoyés dans les pays concernés, comme la loi en fait obligation ? (Exclamations sur les mêmes bancs.)

Quel dispositif de contrôle comptez-vous mettre en place pour que la COGEMA respecte la loi ? Enfin, irez-vous jusqu'à suspendre les contrats de retraitement concernant les déchets étrangers tant que la loi n'est pas respectée ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur quelques bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

La parole est à M. le secrétaire d'Etat à l'industrie, pour une réponse courte.

M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'industrie.

Madame la députée, l'article 3 de la loi Bataille du 30 décembre 1991 (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste) précise que « le stockage, en France, de déchets radioactifs importés, même si leur retraitement était effectué sur le territoire national, est interdit au-delà des délais techniques imposés par le retraitement ».

En fait, depuis 1977, les contrats de retraitement signés par la COGEMA avec des compagnies d'électricité japonaises, belges, allemandes, suisses et néerlandaises, prévoient le retour dans leur pays d'origine des résidus ultimes issus du retraitement des combustibles irradiés.

Mme Odette Grzegrzukla.

Très bien !

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

Ces résidus doivent être conditionnés sous une forme permettant d'assurer, sans danger pour les populations, leur transport, leur stockage ou leur entreposage de façon sûre et respectueuse de l'environnement.

Ces contrats ont donné lieu à des échanges de lettres avec les gouvernements que j'ai cités, à l'exception du gouvernement belge, de manière à mieux assurer leur sécurité juridique. Les contrats de retraitement étrangers de la COGEMA prévoient donc le retour de l'ensemble des résidus issus du retraitement. Ces résidus sont classés en fonction de leur radioactivité et je ne m'étends pas sur l es différentes classifications qui font l'objet d'une comptabilité précise et d'un traitement spécifique cas par cas.

Il existe un contrôle sur cette comptabilité et sur le retour des déchets.

Les opérations de retour de déchets ont déjà concerné tous les déchets vitrifiés, c'est-à-dire ceux relevant de la première catégorie mais - et je vais y revenir - dans une proportion insatisfaisante.

Une première étape a donc déjà été franchie. Cinq opérations de retour ont été organisées : trois vers le Japon et deux vers l'Allemagne. D'autres opérations de retour sont en cours de préparation.

Les retours n'ont cependant pas encore atteint - d'où mon mécontentement, car cela n'est pas satisfaisant - un rythme de croisière, notamment du fait de l'opposition d'organisations antinucléaires qui souhaitent simultanément que les déchets ne soient pas stockés en France et qu'ils ne repartent pas à l'étranger.

Le gouvernement français s'emploie à corriger cette situation en établissant, avec les gouvernements étrangers et les industriels, des procédures publiques transparentes et régulières de retour.


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Cette opération sera d'ailleurs facilitée par la réduction du volume des déchets qui permettra un retour plus facile et plus sûr.

M. Pascal Terrasse.

Bravo !

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

Le Gouvernement est attaché au strict respect de l'ensemble des dispositions de la loi du 30 décembre 1991. Il n'hésitera pas, si cela est nécessaire, à rappeler à ses partenaires étrangers, qu'ilss e sont engagés à récupérer leurs déchets et par conséquent à faciliter les opérations de retour, car il s'agit bien de contrats qui doivent être honorés.

Par ailleurs, le Gouvernement compte prendre aussi les décisions attendues sur la loi du 30 décembre 1991 concernant les autres voies de traitement des déchets radioactifs - séparation, transmutation -, et procéder rapidement au choix des sites des laboratoires souterrains de recherche.

M. André Billardon.

Très bien !

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

La ligne directrice du Gouvernement, mesdames, messieurs les députés, est marquée tout à la fois par la transparence et la préparation de l'avenir. Et l'information du Parlement et de l'opinion publique fait bien partie de notre souci de transparence absolue. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur quelques bancs du groupe communiste.) ACCORD AEROSPATIALE-MATRA

M. le président.

La parole est à Vincent Burroni.

M. Vincent Burroni.

Ma question s'adresse à M. le ministre de la défense.

Le 22 juillet dernier, le Gouvernement annonçait l'accord conclu entre Aerospatiale et Matra Hautes Technologies. Cette fusion donne naissance à un pôle industriel, civil et militaire de première importance. Etape majeure dans le renforcement préalablement des positions françaises avant la constitution in fine d'un grand ensemble aéronautique européen à vocation civile et militaire, cette fusion porte création du nouveau groupe Aerospatiale-Matra, dont le capital sera détenu à 48 % par l'Etat et entre 30 et 33 % par le groupe Lagardère, partenaire stratégique et premier actionnaire privé, le reste revenant aux salariés et au public. En 1999, plus de 56 000 salariés oeuvreront ensemble à la réussite de cette entreprise.

Monsieur le ministre, ma question sera double : quel sera le statut des personnels de la future entreprise ? Le droit applicable en la matière aux entreprises publiques n'est pas le même que celui prévalant dans les entreprises privées. Aussi les salariés s'interrogent-ils sur les répercussions en termes d'emploi.

Les négociations sur ce sujet ont-elles débuté à ce niveau ? Si oui, pouvez-vous informer la représentation nationale des réactions des syndicats ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à M. le ministre de la défense.

M. Alain Richard, ministre de la défense.

Monsieur le député, vous avez fort bien résumé les objectifs et la teneur de cette opération de regroupement (Rires sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants). Je veux appeler l'attention de l'Assemblée sur ses conséquences tant en termes de potentiel de recherche et développement, de capacité d'innovation industrielle, qu'en termes de fonds propres, pour financer de nouveaux projets majeurs, civils ou militaires.

La situation des personnels des deux entreprises constituant ce nouvel ensemble est régie par la convention collective de leur branche, la métallurgie - c'est la même et par des accords d'entreprise. Le principe qui organisera cette fusion veut que les accords d'entreprise des différentes composantes du groupe restent en vigueur pour chacun des établissements concernés. En d'autre termes, il n'y a pas à en attendre de changements dans la situation sociale des salariés.

La nouvelle organisation industrielle et le rapprochement des capacités des deux entreprises constituantes donnent lieu à des rencontres régulières entre leurs directions et l'ensemble de leurs partenaires sociaux, dont le Gouvernement se tient, bien sûr, régulièrement informé.

Mais je veux souligner, et les présidents des deux entreprises constituantes y ont insisté, que ce projetr eprésente un réel potentiel de développement de l'emploi, compte tenu du gain de compétitivité attendu de ce nouvel ensemble. Il y aura un actionnariat salariés, vous l'avez souligné, et une représentation des salariés au conseil d'administration.

M. Pierre Lellouche.

Vous devez faire attention : DASA et British Aerospace ne vous ont pas attendus !

M. le ministre de la défense.

Je voudrais enfin remarquer, constatant l'intérêt que suscite cette question sur l'ensemble des bancs, que le calendrier de cette opération se déroule conformément à nos espoirs, c'est-à-dire à un rythme extrêmement rapide. Dans les toutes prochaines semaines, l'étape consacrant officiellement la disposition des deux groupes à organiser leur fusion pourra être rendue publique. Naturellement, comme je le fais à peu près à chaque trimestre, je rencontrerai à nouveau les fédérations syndicales concernées par ce nouvel ensemble, ...

M. Christian Cuvilliez.

Et l'Assemblée ?

M. le ministre de la défense.

... dont je veux souligner l'apport positif et la force de proposition. La conduite de cette grande opération industrielle se caractérise en effet par un rapport de confiance entre les représentants des salariés et le Gouvernement, qui avair fait cruellement défaut dans les phases antérieures.

(Applaudissements sur divers bancs du groupe socialiste.)

RENAULT VÉHICULES INDUSTRIELS

M. le président.

La parole est à Mme Laurence Dumont, pour une question courte.

Mme Laurence Dumont.

Monsieur le secrétaire d'Etat à l'industrie, vous nous avez, à plusieurs reprises, assurés de la volonté du Gouvernement de maintenir en France un pôle industriel du poids lourd et nous ne doutons pas de cette volonté. Mais Renault Véhicules industriels, qui emploie 26 000 personnes, dont 16 000 en France, est aujourd'hui lourdement frappé par un dix-huitième plan social qui prévoit la suppression de 672 emplois.

M. Guy Teissier.

Que fait la gauche ?

Mme Laurence Dumont.

Les salariés de RVI sont légitimement inquiets et s'interrogent sur la cohérence et la pertinence des choix stratégiques de l'entreprise, et à leurs conséquences sur l'emploi.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 28 OCTOBRE 1998

Leurs inquiétudes sont d'autant plus fortes que la direction semble faire preuve d'un manque évident de transparence dans ses prises de décision. A Blainville, dans le Calvados, les personnels estiment que les restructurations prévues pour leur seul site conduiront à la suppression de 1 800 emplois en cinq ans sur les 3 000 existants.

Plusieurs députés du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants. Et les 35 heures !

Mme Laurence Dumont.

J'y viens, messieurs, j'y viens.

Monsieur le secrétaire d'Etat, quelle est la position de l'Etat, actionnaire principal de Renault, sur la politique industrielle et de l'emploi menée par RVI ? Plusieurs députés du groupe du Rassemblement pour la République.

Et les 35 heures ?

Mme Laurence Dumont.

Et quelle action mènera-t-il pour accélérer la mise en oeuvre de la réduction du temps de travail (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la Démocratie française) promise par la direction et qui reste, depuis juin dernier, lettre morte ?

M. le président.

La parole est à M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'industrie.

Madame le député, Renault Véhicules industriels a en effet consulté le comité central d'entreprise et le comité d'entreprise du site de Blainville sur son intention de lancer une étude sur une éventuelle réorganisation de la production entre les différents sites français.

Vous aviez comme nous-mêmes regretté, au printemps d ernier, l'insuffisante concertation avec les pouvoirs publics et les élus, préalablement à l'annonce des plans sociaux. Je note avec une réelle satisfaction, et je suis sûr que vous la partagez, que Renault Véhicules industriels a cette fois-ci entendu le message et a décidé d'associer les salariés très en amont de l'éventuelle je souligne le m ot - prise de décisions industrielles. Négociation, concertation et dialogue préalables à toute éventuelle réorganisation, tel est l'état d'esprit qui semble désormais prévaloir.

Il n'est évidemment pas possible de préjuger des résultats de cette étude, discutée avec les organisations syndicales qui y sont étroitement associées. Les objectifs industriels de progrès de l'entreprise ne doivent pas être contraires aux intérêts des salariés. Si une éventuelle réor ganisation de la production devait en résulter, je serais naturellement très vigilant sur les conditions de sa mise en oeuvre.

Plusieurs députés du groupe du Rassemblement pour la République.

Ah !

M. Richard Cazenave.

On est sauvés !

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

En liaison avec Mme Martine Aubry, nous restons très attentifs à l'évolution de la situation des salariés de l'ensemble du secteur automobile.

M. Bernard Accoyer.

Et ceux du Havre ? Et les autres ?

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

Je veux redire ici avec force et clarté la volonté du Gouvernement de ne pas voir se renouveler les plans sociaux à répétition avec abonnement au Fonds national de l'emploi.

M. Alain Néri.

Très bien !

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

Vous avez sans doute pris note, madame le député, de l'ouverture de discussions par Renault sur la réduction-aménagement du temps de travail. Voilà qui marque également une inflexion notable et positive par rapport à un passé récent. Je me félicite que cette nouvelle orientation soit désormais partagée par tous les constructeurs automobiles.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

Nous en venons au groupe UDF.

DÉPLACEMENT D'UN MAGISTRAT DE LA CHANCELLERIE

M. le président.

La parole est à M. Pierre Méhaignerie.

M. Pierre Méhaignerie.

Madame la garde des sceaux, ministre de la justice, ma question porte sur un sujet grave.

En répondant à la question de M. Clément, vous avez oublié deux mots importants. Vous auriez eu totalement raison s'il s'était agi d'instructions au parquet. Mais dès lors qu'il s'agit d'instructions écrites, transparentes et versées au dossier, vous savez parfaitement que beaucoup de magistrats préfèrent connaître la position de l'Etat : il est des moments en effet où l'Etat doit dire, en toute clarté, ce qu'il pense. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe de l'Union pour la Démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Vous savez parfaitement, madame la garde des sceaux, que cette position est partagée par un homme politique respecté sur les bancs du groupe socialiste en l'occurrence M. Badinter. Dès lors que la nomination des magistrats du parquet, véritable cordon ombilical, ne dépend plus du pouvoir politique, mais du CSM...

M. Pascal Clément.

Et c'est le cas !

M. Pierre Méhaignerie.

... il est essentiel que l'Etat continue à jouer son rôle. Et cette attitude, je vous l'assure, est beaucoup plus transparente que le recours à des solutions parallèles et opaques. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la Démocratie française-Alliance.)

M. Jean-Claude Lefort.

Auriez-vous quelque chose à vous reprocher ?

M. Pierre Méhaignerie.

Voilà la raison pour laquelle de nombreux magistrats pensent que la sanction prononcée à l'encontre d'un homme unanimement respecté est une injustice perçue comme un délit d'opinion...

M. Didier Boulaud.

Copinage !

M. Pierre Méhaignerie.

... et sans rapport avec la valeur de l'intéressé. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe de l'Union pour la Démocatie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

M. le président.

La parole est à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice.

Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice.

Monsieur le député, ce n'est pas la rédaction d'un

« Que sais-je ? » qui est reprochée à ce haut responsable, ... Plusieurs députés du groupe de l'Union pour la démocratie française, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.

Mais si !


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 28 OCTOBRE 1998

Mme la garde des sceaux.

... mais bien le fait que, dans le même temps, il exerce ses responsabilités au ministère de la justice pour appliquer une politique différente de celle qui a été la vôtre.

M. Pascal Clément.

Il n'a jamais été déloyal !

Mme la garde des sceaux.

Vous dites préférer les instructions individuelles ; c'est votre droit. Mais moi, je vous dis, au nom du Gouvernement, que nous préférons supprimer les instructions individuelles.

M.

Pascal Clément.

Ce n'est pas la loi ! Ce n'est pas voté ! Mme la garde des sceaux.

En effet, le système d'instructions écrites, à vos yeux parfait, que vous aviez institué, n'a malheureusement pas empêché des gardes des sceaux de saisir leur téléphone et d'envoyer des hélicoptères dans l'Himalaya (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste, et sur plusieurs bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert.), bref, de se livrer à des interventions inadmissibles du pouvoir politique dans les affaires judiciaires et les affaires individuelles.

(Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M.

Didier Boulaud.

Bravo ! Mme la garde des sceaux.

Voilà ce qui est en cause ! Tout magistrat peut émettre une opinion ; là n'est pas le problème. Mais dans cette affaire, il s'agit précisément du responsable chargé, en mon nom, c'est-à-dire au nom du Gouvernement, ... Plusieurs députés du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.

Hélas ! Mme la garde des sceaux.

... d'appliquer la nouvelle politique pénale...

M.

Pascal Clément.

Elle n'est pas votée ! Mme la garde des sceaux.

... et de mettre en oeuvre la réforme que nous avons souhaitée et pour laquelle nous avons été élus.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M.

Pascal Clément.

Ce n'est pas le droit ! Elle n'est pas votée !

M. Michel Terrot.

Parlez-nous de la MNEF !

M.

le président.

Nous en venons au groupe communiste.

PLANS DE LICENCIEMENT

M.

le président.

La parole est à M. Alain Bocquet.

M.

Alain Bocquet.

Ma question s'adresse à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Les efforts entrepris par le Gouvernement en faveur de l'emploi, notamment avec les 35 heures et les emploisjeunes auxquels le groupe communiste a apporté un soutien actif, risquent d'être ruinés par le massacre de l'emploi qui se poursuit avec les plans de licenciements que l'on annonce un peu partout dans notre pays. Des chantiers du Havre, à Levi-Strauss dans le Nord, ...

M.

Philippe Briand.

Accordez vos violons !

M.

Alain Bocquet.

... dont vous venez de recevoir les représentants syndicaux, en passant par Chausson en région parisienne, les Salins du Midi ou encore, on vient de l'entendre, RVI dans le Cavaldos, la même logique prévaut.

Plusieurs députés du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française.

Eh oui !

M

Alain Bocquet.

Le CNPF a beau changer d'enseigne, les agressions du grand patronat contre les salariés ne connaissent aucune trève !

M. Jacques Myard.

Dinosaure !

M. Alain Bocquet.

Dans les conseils d'administration de sociétés avides de rentabilité, les travailleurs sont considérés comme de simples variables d'ajustement. On fait peu de cas de la vie de femmes et d'hommes, on se soucie peu de l'avenir de régions entières victimes de la casse de l'emploi.

Nous ne pouvons accepter cet acharnement contre la politique de gauche, qui se traduit par la multiplication d es licenciements économiques et la délocalisation d'entreprises de France vers l'étranger...

M. Jean-Michel Ferrand.

Ce n'est que le résultat de votre politique ! Et ce n'est pas fini, avec les 35 heures !

M. Alain Bocquet.

... tout en bénéficiant d'importantes aides publiques.

Cette situation ne peut durer.

(Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République).

Il est urgent de prendre les mesures attendues par les salariés et leurs élus. Les plans de reconversion, les travailleurs savent d'expérience ce qu'ils signifient : la droite en a fait beaucoup dans le passé. Ils ne veulent pas lâcher la proie pour l'ombre et ils ont raison.

Les parlementaires communistes ont fait des propositions concrètes...

M. Jean-Louis Debré.

Dites-le à Gayssot !

M. Alain Bocquet.

... pour instaurer un moratoire des licenciements et des droits nouveaux pour les salariés leur permettant d'intervenir réellement en amont. Ces propositions ne sont pas à prendre ou à laisser ; elles ont simplement le mérite d'exister. Il est urgent d'agir à la hauteur de l'enjeu, car l'immobilisme en la matière peut être tragique.

(Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République).

Il y va de la vie et de l'avenir de centaines de milliers d'êtres humains, d'un développement bien compris de nos régions, de notre économie et de l'emploi. Il y va aussi de la réussite de la gauche.

Madame la ministre, nous souhaitons connaître les mesures concrètes et globales que le Gouvernement entend mettre rapidement en oeuvre dans ce domaine essentiel.

(Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)

M. Jacques Myard.

C'est un véritable réquisitoire !

M. le président.

La parole est à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité.

Monsieur le député, la meilleure façon d'éviter les licenciements...


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 28 OCTOBRE 1998

M. Renaud Muselier.

C'est qu'il n'y ait pas d'embauche ?

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

... c'est de favoriser une activité et une croissance forte (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants) et c'est ce que le Gouvernement fait depuis son entrée en fonctions en relançant la croissance et en préparant les emplois de demain.

M. Franck Borotra.

Elle est déboussolée !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Rappelons quand même que le nombre de licenciements a baissé de 20 % durant les huit premiers mois de l'année 1998 par rapport aux huit premiers mois de l'année 1997. Pour autant, cela ne met pas fin à l'angoisse de nombre de salariés confrontés à des licenciements lourds et difficiles même si, parfois, c'est le cas des chantiers du Havre, il était malheureusement difficile de faire autrement, du fait des décisions prises antérieurement.

Tout comme vous, lorsque je reçois les salariés de Levi's, je me pose la même question : quand cette marque aussi reconnue dans le monde entier est capable de produire le fameux jean au quart du prix de vente en boutique, comment peut-elle fermer sa seule usine française à La Bassée ? Cette question, je la poserai à la direction générale Europe Levi's que je recevrai dans quelques jours.

Mais au-delà, nous devons faire en sorte que les entreprises désireuses de licencier en payent le coût dès lors qu'elles en ont les moyens.

Dès ma prise de fonctions, j'ai envoyé des directives à mes services appelant leur attention sur la rigueur du contrôle des plans sociaux. On ne peut se contenter d'un chèque lorsqu'on a de l'argent. Il faut reclasser, ramener des emplois. Cette réalité doit être prise en compte par l'administration du travail, et les plans refusés lorsque ce n'est pas le cas. Un amendement déposé par votre groupe a été accepté dans la loi contre les exclusions, qui permet désormais à l'administration du travail de contrôler a posteriori la réalité des plans sociaux.

Cela dit, et sur ce point aussi je vous rejoins, on ne peut gagner de l'argent et faire payer les restructurations par la collectivité.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

C'est la raison pour laquelle nous avons réduit les préretraites accordées à certains grands groupes qui, chaque année, présentaient des plans sociaux avec 70 % de préretraites payées par la collectivité nationale. Ce taux a été abaissé à 20 % et nous avons multiplié par deux les contributions que les entreprises doivent apporter pour leur financement.

Par ailleurs, je viens de décider d'augmenter la contribution dite Delalande, payée par les entreprise amenées à licencier les salariés fragiles ou de plus de cinquante ans.

Reste la réduction du temps de travail, qui a provoqué tant de cris tout à l'heure. Elle doit être partout utilisée dans les plans sociaux, avant toute autre mesure. D'ores et déjà, 51 accords ont été signés, touchant 10 000 salariés et préservant 1 000 emplois. En deux mois et demi, ce n'est pas si mal. Nous devons poursuivre l'effort. Avec Mme Péry, nous travaillons pour que la formation dans les entreprises permette d'anticiper les emplois et les métiers de demain, afin de les rendre plus compétitives en améliorant encore la qualification de leurs salariés. Et les licenciements ne doivent pas être des phases de rupture et d'isolement, mais bien des périodes où les salariés puissent se former et rebondir positivement.

Voilà l'ensemble des dossiers en cours. Croyez bien que le Gouvernement reste très attentif à chaque licenciement et à chaque plan social présenté : nous savons que, derrière, ce sont des hommes et des femmes qui sont plongés dans l'angoisse, souvent des familles et parfois des régions entières.

(Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste et sur divers bancs du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

TASLIMA NASREEN

M. le président.

La parole et à Mme Muguette Jacquaint.

Mme Muguette Jacquaint.

Ma question s'adresse à

M. le Premier ministre.

Le 10 décembre prochain, nous célébrerons le cinquantième anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l'homme.

M. Pierre Lellouche.

Vous êtes bien placée pour poser la question !

M. Jean Auclair.

Pas vous !

Mme Muguette Jacquaint.

En dépit de ce texte majeur, désormais de portée universelle, des violations des droits humains fondamentaux continuent à être perpétrées de par le monde.

(Vives exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

Un peu de silence !

M. Pierre Lellouche.

Et Pol Pot ! et Staline ! Et Castro !

M me Muguette Jacquaint.

Aujourd'hui, des gens doivent s'exiler pour fuir la torture, l'emprisonnement et même la mort.

Plusieurs députés du groupe du Rassemblement pour la République.

Pas vous ! Pas vous !

Mme Muguette Jacquaint.

Comment ne pas évoquer la situation de Mme Taslima Nasreen, écrivain dont le talent a permis de faire connaître la culture de son pays dans le monde, mais aussi la situation qu'on y réserve aux femmes. En se rendant au Bangladesh au chevet de sa mère mourante...

(« Goulag ! Goulag ! » sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Vous êtes insolents et odieux !

M. Jean-Claude Lefort.

Monsieur le président, c'est scandaleux !

M. le président.

Mes chers collègues, madame Jacquaint a raison. Ecoutez-vous et respectez-vous les uns les autres. Sinon, ne vous étonnez pas qu'il y ait du chahut quand vous posez vos questions.

Je demande qu'on se respecte ! Respectez ceux qui posent des questions, comme ils vous ont respecté en vous écoutant. Et faites silence ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

Poursuivez madame Jacquaint.

Mme Muguette Jacquaint.

Mme Taslima Nasreen non seulement risque la prison mais elle est menacée de mort par le fanatisme, par l'obscurantisme religieux, pour avoir


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défendu dans son pays la liberté d'expression et les droits des femmes. Le 2 octobre, elle lançait un appel au secours. Si vous ne m'écoutez pas, écoutez-la !

« Je me cache désormais. Si je suis arrêtée, je serai mise en prison. Si j'essaie encore de me rendre au tribunal... »

(De nombreux députés du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants quittent l'hémicycle. - Huées sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

Un peu de silence ! Laissez Mme Jacquaint terminer sa question.

Mme Muguette Jacquaint.

« ... dans le but de tenter de négocier une caution, ce sera à mes risques et périls. »

La France, berceau des droits de l'homme, a une responsabilité particulière dans ce combat universel. Au-delà de la solidarité active, notre gouvernement se doit de mobiliser toutes ses capacités d'intervention auprès des dirigeants des Etats qui violent les droits de l'homme.

Monsieur le Premier ministre, en cette année du cinquantième anniversaire de la Déclaration universelle des d roits de l'homme, comment entendez-vous sauver Mme Taslima Nasreen ? (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste, du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

La parole est à M. le ministre délégué à la coopération et à la francophonie.

M. Charles Josselin, ministre délégué à la coopération et à la francophonie.

Madame la députée, le ministère des affaires étrangères suit avec attention la situation de Mme Taslisma Nasreen. Exilée depuis quatre ans, elle a fait le choix, comme vous l'avez rappelé, de rentrer dans son pays pour assister sa mère gravement malade. Son principal ouvrage, La Honte, lui a valu les foudres d'une poignée d'intégristes...

M. Jean-Claude Lefort.

La honte est là-bas...

M. André Gerin.

... sur les bancs de la droite ! M. le ministre délégué à la coopération et à la francophonie.

... qui lui reprochent la dénonciation non seulement du Coran et de ses excès, mais aussi de la situation faite aux femmes dans ce pays. Elle tombe sous le coup de l'article 295 A du code pénal du Bangladesh qui prévoit jusqu'à deux ans d'emprisonnement pour toute personne ayant heurté les sentiments religieux.

Nous avons pris acte des observations du ministère des affaires étrangères du Bangladesh qui souhaite qu'on a borde la question sous l'angle humanitaire. Notre ambassadeur est, évidemment, depuis longtemps alerté.

Nous avons, en outre, demandé à nos partenaires européens que tous leurs ambassadeurs fassent pression et se tiennent prêts à intervenir si d'aventure la situation de Mme Nasreen venait à se dégrader.

M. Jean-Claude Lefort.

Très bien ! M. le ministre délégué à la coopération et à la francophonie.

Vous l'avez rappelé, et c'est évidemment le point de vue du gouvernement français, la liberté d'expression inscrite dans la Déclaration des droits de l'homme dont nous allons célébrer dans quelques jours le cinquantième anniversaire mérite d'être défendue avec fermeté et persuasion partout dans le monde.

Je voudrais vous donner l'assurance que nous nous y employons.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste, du groupe Radical, Citoyen et Vert et sur divers bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)

M. le président.

Nous avons terminé les questions au Gouvernement.

Suspension et reprise de la séance

M. le président.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures cinq est reprise à seize heures vingt, sous la présidence de M. Patrick Ollier.)

PRÉSIDENCE DE M. PATRICK OLLIER,

vice-président

M. le président.

La séance est reprise.

4

LOI DE FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR 1999 Suite de la discussion d'un projet de loi

M. le président.

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 1999 (nos 1106, 1148, tomes I à IV).

Discussion des articles

M. le président.

J'appelle maintenant dans les conditions prévues par l'article 91, alinéa 9, du règlement les articles du projet de loi dans le texte du Gouvernement.

A la demande de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, l'article 1er est réservé jusqu'après l'article 36.

Avant l'article 2

M. le président.

Je donne lecture du libellé du titre II :

« Titre II. - Dispositions relatives aux ressources. »

Mme Fraysse, Mme Jacquaint, M. Gremetz et les membres du groupe communiste et apparentés, ont présenté un amendement, no 120 corrigé, ainsi libellé :

« Avant l'article 2, insérer l'article suivant :

« Après l'article L. 136-6 du code de la sécurité sociale, il est inséré un article L. 136-6 bis ainsi rédigé :

« Art. L. 136-6 bis. - Les entreprises, sociétés et autres personnes morales, assujetties en France, à la déclaration de l'impôt sur les sociétés, au titre de l'article 206 du code général des impôts, sont redevables d'une cotisation sociale assise sur le montant net retenu pour l'établissement de l'impôt sur les sociétés :


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« des revenus de capitaux mobiliers ;

« des plus-values mentionnées aux article 150 A et 150 bis du code général des impôts ;

« des plus-values, gains en capital et profits réalisés sur les marchés à terme d'instruments financiers et de marchandises, ainsi que sur les marchés d'options négociables.

« Pour la détermination de l'assiette de la cotisation il n'est pas fait application des articles 209 bis, 209-11, 210 A, 210 B, 209 quinquies , 210 sexies , 214 A, 216, 220 sexies , 223 H, 223 A à U.

« Le taux de la cotisation sociale est fixé à 14,6 %.

« La cotisation sociale est contrôlée et recouvrée selon les mêmes règles et sous les mêmes sûretés, privilèges et sanctions que l'impôt sur les sociétés.

« Une majoration de 10 % est appliquée au montant de la cotisation sociale additionnelle qui n'a pas été réglée dans les trente jours suivant la mise en recouvrement. »

La parole est à Mme Jacqueline Fraysse.

Mme Jacqueline Fraysse.

Nous considérons que, pour atteindre les objectifs qu'ensemble nous nous fixons, il convient de dégager des moyens nouveaux. Bien entendu, les salariés ne peuvent pas supporter des charges nouvelles. Il y a donc lieu de faire contribuer d'autres ressources que les salaires qui ne représentent plus qu'une part relativement faible des revenus de ce pays.

Nous proposons que les revenus des placements financiers des entreprises, qui ne sont pas réinvestis pour développer l'économie et qui ne participent pas aux créations d'emplois, soient taxés à 14,6 %. Ce ne serait que justice : il n'y a pas de raison que certains revenus contribuent et d'autres pas ! L'an passé, une taxation sur les revenus des placements financiers des familles a été instaurée, qui a rapporté 22 milliards de francs. C'est une bonne façon de dégager de l'argent pour la collectivité publique. De la même manière, l'adoption de notre amendement permettrait d'obtenir des ressources nouvelles. Je précise que nous ne sommes pas maximalistes et que si le Gouvernement ne souhaite pas une taxation aussi élevée que celle que nous proposons, nous sommes prêts à examiner une proposition plus modeste, l'essentiel étant d'enclencher un nouveau processus qui aille dans le bon sens.

M. le président.

La parole est à M. le rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, pour les recettes et l'équilibre général, pour donner l'avis de la commission sur l'amendement no 120 corrigé.

M. Alfred Recours, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, pour les recettes et l'équilibre général.

La commission a rejeté cet amendement.

En effet, il instaurerait une extension de la CSG sur les produits de placement de l'entreprise qui viendrat s'ajouter à l'assiette de l'impôt sur les sociétés. De plus, je rappelle que la CSG était, en principe, assise sur les personnes et qu'il existe par ailleurs d'autres cotisations ou d'autres formes de participation des entreprise au financement de la protection sociale, comme la CSSS sur laquelle nous reviendrons.

S'il est nécessaire de prôner - comme nous le faisons d ans des amendements présentés en commun avec M. Jean Le Garrec à l'annexe au projet de loi - une réforme des cotisations patronales, il ne nous semble pas possible d'anticiper de manière aussi marquée un débat concernant la valeur ajoutée, le chiffre d'affaires et d'autres dispositifs.

M. le président.

La parole est à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité, pour donner l'avis du Gouvernement.

Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité.

Le Gouvernement a le même avis que la commission sur cet amendement, comme sur les deux qui le suivent. Nous souhaitons que le problème des charges patronales soit traité au moment où nous examinerons le rapport annexé au projet de loi ainsi que les amendements déposés par la commission.

J'ai dit dans mon intervention que si nous sommes tous d'accord pour trouver une assiette qui soit pérenne, juste et qui garantisse mieux l'emploi, comme nous l'avons fait l'année dernière avec le transfert des cotisations salariales vers la CSG, nous ne souhaitons pas pour autant arrêter les modalités de la réforme dès la présente loi de financement, car nous ne sommes pas encore d'accord sur le détail de ces modalités.

M. le président.

Maintenez-vous l'amendement, madame Fraysse ?

Mme Jacqueline Fraysse.

Oui.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 120 corrigé.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Mme Fraysse, Mme Jacquaint, M. Gremetz et les membres du groupe communiste et apparentés ont présenté un amendement, no 121 corrigé, ainsi libellé :

« Avant l'article 2, insérer l'article suivant :

« Une réforme du mode de calcul des cotisations patronales à la sécurité sociale sera réalisée sur la base suivante, à compter du 1er janvier 1999 :

« Les entreprises seront catégoriées en fonction de leur taille et de leur activité.

« Les taux différenciés de ces catégories moduleront la cotisation de manière qu'elle soit moins forte pour les entreprises de main-d'oeuvre ainsi que les petites et moyennes entreprises et plus forte pour les plus accumulatrices de capital. Le niveau des contributions est fixé en fonction du besoin de financement de la sécurité sociale.

« Le taux de la catégorie est modulé pour chaque entreprise selon la variation de sa masse salariale dans la valeur ajoutée globale - y compris les profits financiers - et de la valeur ajoutée dans le chiffre d'affaires. Le comité d'entreprise ou, à défaut, les délégués du personnel sont informés de ces résultats. »

La parole est à Mme Jacqueline Fraysse.

Mme Jacqueline Fraysse.

Cet amendement, comme le précédent, concerne le financement de la protection sociale. Nous poursuivons au moins deux objectifs : trouver des ressources nouvelles et favoriser les créations d'emplois et l'augmentation des salaires indispensables à la relance de la consommation intérieure.

L'objet de l'amendement est de moduler les cotisations sociales versées par les entreprises en fonction de leur politique salariale et des créations d'emplois. La réforme de l'assiette des cotisations patronales, telle que nous la


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proposons, et dont nous débattrons plus loin, comme Mme la ministre vient de l'indiquer, allégerait les charges des entreprises à fort taux de main-d'oeuvre et des petites et moyennes entreprises, et augmenterait la contribution des entreprises accumulatrices de capitaux, essentiellement placés dans la spéculation, et donc stériles, voire dangereuses pour le pays.

Cet amendement illustre le fond de notre démarche, qui lie nouveaux modes de financement, recettes nouvelles, politique salariale et politique de l'emploi. C'est une volonté qui est partagée par l'ensemble des composantes de la majorité, et sur laquelle il est urgent d'avancer.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Alfred Recours, rapporteur pour les recettes et l'équilibre général.

Je partage à 120 % l'exposé sommaire de l'amendement déposé par Mme Fraysse, selon lequel « la réforme de l'assiette des cotisations sociales patronales s'impose pour favoriser les entreprises à fort taux de main-d'oeuvre et les PME, et augmenter par conséquent la contribution des entreprises accumulatrices de capitaux ». On est bien sur le terrain de la réforme générale, absolument nécessaire, des cotisations patronales, et dans le prolongement de ce que nous avons fait l'année dernière sur l'assiette des cotisations salariales. La commission ne peut donc qu'être d'accord sur la motivation même qui a conduit au dépôt d'un tel amendement.

Toutefois, la catégorisation des entreprises en fonction de leur taille et de leur activité, et d'autres dispositions de ce genre rendent les choses un peu complexes. Il nous a semblé que les propositions contenues dans des amendements au rapport annexé correspondent mieux à la phase initiale pendant laquelle nous allons devoir réfléchir ensemble sur une réforme des cotisations patronales. C'est pourquoi la commission a rejeté cet amendement.

M. le président.

La parole est à M. le président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

M. Jean Le Garrec, président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

Malgré les explications très claires données par notre rapporteur, la question mérite encore quelques mots complémentaires.

L'importance de l'amendement de Mme Fraysse justifie que nous demandions au Gouvernement de prendre acte de la volonté exprimée par les différentes composantes de la majorité plurielle pour qu'une loi précise, au plus tard pendant le premier semestre 1999, l'ensemble des problèmes. Une nouvelle architecture des cotisations patronales est nécessaire pour répondre à un double objectif : la pérennisation du système de financement de la protection sociale et la capacité à activer davantage les politiques de l'emploi. Nous savons très bien qu'il y a un coût du travail sur les bas salaires et que, par ailleurs, nous avons besoin d'un dispositif d'ensemble qui recycle en partie la ristourne dégressive dont on sait qu'elle constitue une véritable trappe qui tire les salaires vers le bas.

La question est d'importance. Si nous avons déposé c onjointement avec le rapporteur des amendements complétant le rapport annexé à l'article 1er , c'est bien pour que ce débat s'engage et pour que nous puissions obtenir l'accord du Gouvernement sur les grands principes, mais aussi un calendrier.

Bien évidemment, l'amendement de Mme Fraysse reçoit notre accord sur le fond, mais sa complexité ne répond pas à l'objectif commun que nous recherchons.

Cela fera partie du débat. Il est important que nous affirmions une volonté très claire entre nous dans ce double souci de pérennisation et d'activation des politiques d'emploi complétant les politiques engagées : emplois jeunes, lutte contre l'exclusion, réduction du temps de t ravail, croissance économique. C'est un ensemble complet qui doit être bâti, sur lequel vous pouvez être assurée, ma chère collègue, de notre volonté de poser clairement le problème et de dialoguer avec le Gouvernement.

Mme Fraysse a toute liberté de décision, mais je pense qu'après les explications que nous venons de donner il serait peut-être préférable qu'elle retire son amendement même si, sur le fond, on ne peut pas voter contre.

M. le président.

Madame Fraysse, répondez-vous à l'appel de la commission ?

Mme Jacqueline Fraysse.

J'entends le président de la commission et je ne l'invite pas à voter contre, bien sûr.

Le groupe communiste tient à affirmer clairement une démarche. Nous sommes sensibles aux propos tenus, et nous veillerons à ce qu'ils se concrétisent dans les meilleurs délais. Mais je maintiens l'amendement.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Monsieur le président, je ne peux que répéter ce que je viens de dire sur le précédent amendement et que je dirai à propos du suivant. Le Gouvernement respectera l'engagement qu'il a pris, et nous en reparlerons dans le cadre de l'article 1er

M. le président.

La parole est à M. Charles de Courson, pour répondre à la commission.

M. Charles de Courson.

Pas seulement à la commission, monsieur le président.

M. Maxime Gremetz.

Il va voter pour, j'en suis sûr !

M. le président.

Laissez parler M. de Courson.

M. Charles de Courson.

Sur le fond, derrière l'amendement no 121 corrigé, est posé le problème de savoir s'il faut asseoir les cotisations sociales sur la valeur ajoutée.

Mes chers collègues, cette idée hante le débat sur le financement de la protection sociale depuis plus de vingt ans. Je voudrais donner à ceux de mes collègues qui n'ont peut-être pas eu le temps de lire les travaux réalisés sur cette affaire, et qui n'ont pas tous été publiés, les raisons pour lesquelles il ne faut pas aller dans ce sens.

Quel est l'écart entre une assiette constituée par les revenus professionnels - car il n'y a pas que des salariés, il y a aussi des indépendants - et une assiette constituée par la valeur ajoutée ? Ce sont les amortissements et les bénéfices. Si vous substituez l'une à l'autre à montant inchangé, vous allez aggraver les charges pesant sur un certain nombre d'entreprises et alléger celles des autres.

Les entreprises dont les charges vont être alourdies, ce sont d'abord celles qui réalisent des bénéfices. Or ce sont celles-là qui créent l'emploi. Je me souviens qu'en 1983 Pierre Bérégovoy, qui était ministre des affaires sociales, s'était mis dans l'idée que la solution au problème de l'emploi consistait à substituer la valeur ajoutée. Alors jeune magistrat à la Cour des comptes, j'ai réalisé pour le ministre un travail qui, malheureusement, n'a pas été publié. J'en suis arrivé à la conclusion qui est celle que je défends aujourd'hui : après examen, la thèse de la substitution de la valeur ajoutée aurait pour effet non pas de créer l'emploi, mais de le détruire, puisqu'elle soulagerait les entreprises peu bénéficiaires, voire en déficit. Rappelez-vous la situation de la sidérurgie. Il a fallu rembourser


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de l'argent à la sidérurgie. Or ce ne sont jamais les entreprises déficitaires qui créent l'emploi mais celles qui réalisent des bénéfices, qui croissent, qui investissent.

Je vous mets donc en garde, mes chers collègues, sur tous les bancs, et pas seulement sur ceux des auteurs de l'amendement, sur le grand risque que les défenseurs de cette thèse n'aboutissent à l'inverse de ce qu'ils souhaitaient, c'est-à-dire à détruire l'emploi.

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

Ce n'est pas le débat !

M. Charles de Courson.

Mais si ! C'est le fond du débat !

M. Alfred Recours, rapporteur pour les recettes et l'équilibre général.

Mais non !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Ça n'a rien à voir !

M. Charles de Courson.

Par ailleurs, une assiette

« valeur ajoutée » signifie un régime unique de protection sociale en France, car on ne peut pas éclater la valeur ajoutée entre différents régimes. Je vais prendre un exemple. Beaucoup d'entreprises emploient différentes catégories de salariés ou de non-salariés, qui contribuent à la création de la valeur ajoutée. Comment éclaterez-vous le produit de la valeur ajoutée entre ces différentes catégories ? Vous ne saurez pas le faire et vous serez confrontés à un énorme problème. En défendant l'assiette

« valeur ajoutée », vous êtes favorables au régime unique de protection sociale toutes branches confondues. Mes chers collègues, il faut dire les choses telles qu'elles sont ! C'est un problème redoutable pour ceux qui veulent aider la création d'emplois. Je me félicite donc que la ministre de l'emploi et de la solidarité se soit convertie - tardivement, mais je salue les pêcheurs repentis...

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

C'est bien !

M. Charles de Courson.

... à l'idée simple, que l'opposition défend depuis des années, et qu'elle a mise en pratique, peut-être pas suffisamment, de réduire les charges sociales sur la main-d'oeuvre peu ou pas qualifiée, c'est-àdire sur les bas salaires.

Il est vrai que Mme Aubry a repris cette année ce thème de l'opposition après l'avoir combattu l'année précédente, mais elle s'est fait couper l'herbe sous le pied par M. Strauss-Kahn (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste)... mais si, il faut dire les choses telles qu'elles sont - avec la réforme de la taxe professionnelle.

Mme Martine David Ce n'est pas la sécurité sociale qui vous intéresse !

M. Charles de Courson.

Il ne faut donc pas adopter l'amendement no 121 corrigé, parce qu'il aboutirait à l'inverse de ce que recherchent ses auteurs.

Dernier élément, mes chers collègues : quelle usine à gaz ce serait !

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 121 corrigé.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Mme Fraysse, Mme Jacquaint, M. Gremetz et les membres du groupe communiste et apparentés ont présenté un amendement, no 122 corrigé, ainsi libellé :

« Avant l'article 2, insérer l'article suivant :

« Après l'article L. 241-2 du code de la sécurité sociale, il est inséré un article L. 241-2 bis ainsi rédigé :

« Art. L. 241-2 bis. - I. - Tout employeur ayant l a qualité de personne morale de droit privé occupant un ou plusieurs salariés doit s'assurer contre le risque de non-paiement des sommes dues dont il est redevable au titre de cotisations aux organismes du régime général de la sécurité sociale.

« II. - Le régime d'assurance est mis en oeuvre par une association créée par les organisations nationales professionnelles d'employeurs les plus représentatives et agréées par le ministre chargé de la sécurité sociale.

« Cette association passe une convention avec l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale.

« III. - L'assurance est financée par les cotisations des employeurs qui sont assises sur les rémunérations servant de base au calcul des contributions au régime d'assurance chômage défini par la section première du chapitre Ier du titre IV du livre 111 du code du travail.

« IV. - En cas de retard supérieur à deux mois dans le paiement des cotisations, l'union de recouvrement établit les relevés des créances que l'association lui verse dans les huit jours suivant la réception des relevés.

« V. - Un décret précise, en tant que de besoin, les conditions d'application du présent article. »

La parole est à Mme Muguette Jacquaint.

Mme Muguette Jacquaint.

Les difficultés financières auxquelles est confontée la sécurité sociale depuis plusieurs années sont liées avant tout à l'ampleur du chômage qui réduit le nombre des cotisants et à l'austérité salariale qui pénalise les régimes de protection sociale.

Mais il est un aspect important du déséquilibre de la sécurité sociale qui est souvent passé sous silence, je veux parler de la permanence des dettes patronales que la crise n'a fait qu'amplifier. Certes, certaines d'entre elles sont irrecouvrables. Mais il serait dangereux de penser que cela relève d'une fatalité que nous ne pourrions maîtriser.

Dans ce domaine, il y a deux poids deux mesures. Les salariés endettés, par exemple, ne peuvent se soustraire à un prélèvement automatique sur leur salaire brut. Ils font l'objet de saisies-arrêts et de poursuites. Le moindre retard de loyer impayé entraîne des frais supplémentaires.

Au contraire, des entreprises qui ne sont pas en difficulté - car il y en a dans ce pays - font traîner le paiement de leurs cotisations.

Ce n'est pas le cas pour les PMI-PME.

En revanche, tous les journaux économiques indiquent que les grandes entreprises réalisent des bénéfices et des profits énormes. Bien souvent, ce sont elles qui tentent d'échapper à leur obligations, et ce sont, bien sûr, la sécurité sociale et les salariés - lesquels perçoivent des prestations amoindries - qui souffrent d'une telle situation.

La loi du 27 décembre 1973 - article L.

143-11-1 du code du travail et suivants - assujettit les employeurs au paiement de cotisations pour les cas de règlement judiciaire ou de liquidation de biens afin de garantir le versement des sommes dues aux salariés. Ce système fonctionne depuis des années et présente toute garantie.

Nous proposons donc de s'inspirer directement de cette disposition pour instaurer une assurance contre le risque de non-paiement des sommes dues à la sécurité


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 28 OCTOBRE 1998

sociale. Notre souci est de préserver dans ce pays les moyens de la protection sociale et de répondre aux besoins de nos concitoyens.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Alfred Recours, rapporteur pour les recettes et l'équilibre général.

Le dernier taux de non-recouvrement connu, celui de l'année 1997, est de 1,38 %.

M. Charles de Courson.

Sauf en Corse où il est de 10 % !

M. Alfred Recours, rapporteur pour les recettes et l'équilibre général.

Pour l'ensemble de la France, ce taux est de 1,38 %. Il était à la fin de l'année 1996, de 1,93 %. Cela signifie que, en une seule année, le montant des recouvrements a progressé d'environ 30 %.

M. Jean-Luc Préel.

Le Gouvernement pourrait aussi compenser les exonérations de charges !

M. Alfred Recours, rapporteur pour les recettes et l'équilibre général.

Toutefois, en dépit de cet effort important fait sur le recouvrement, ce 1,38 % représente encore 13,9 milliards de francs.

Dans le même temps, nous constatons des taux de recouvrement très différents selon les régions. Ainsi, en Corse, malgré des progrès, le taux de non-recouvrement est encore supérieur à 9 %, ce qui est énorme. Si l'on rapportait ce taux à l'ensemble du territoire national, cela correspondrait à une somme considérable.

Du fait même de ces disparités régionales, la commission n'a pas voulu faire payer une cotisation d'assurance aux entreprises qui, à 99 %, s'acquittent de leurs cotisations à l'URSSAF. Il lui a semblé qu'il était plus judicieux de développer les moyens coercitifs et d'utiliser tous les moyens de droit qui existent pour améliorer encore le recouvrement.

Telle est la raison pour laquelle la commission n'a pas jugé bon de retenir cet amendement.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Je n'insisterai pas sur la nécessité d'améliorer le taux de recouvrement des cotisations de sécurité sociale puisque M. Recours vient de le faire. Toutefois, je ne crois pas qu'on puisse se satisfaire d'une amélioration, ...

Mme Muguette Jacquaint.

Tout à fait !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

... même si elle est importante : le taux de recouvrement étant passé de 1,93 % en 1996 à 1,38 % en 1997.

A ussi ai-je signé une convention d'objectifs avec l'ACOSS, le 3 avril dernier. Elle s'articule autour de trois axes : élaboration d'outils de pilotage du recouvrement pour l'ensemble des caisses ; mise en place d'un suivi au niveau national des créances par catégorie de cotisants, pour pouvoir être plus efficace dans les réactions ; généralisation des procédures amiables de recouvrement, souvent plus efficaces, tout en étant mieux vécues par les cotisants.

Par ailleurs, dans quelques jours seront pris des décrets qui permettront la notification de la contrainte sans recourir nécessairement aux huissiers. Un tel dispositif, associé aux procédures amiables, devrait permettre d'aller plus vite.

Donc, nous nous préoccupons de cette question. Il me paraît souhaitable d'aller jusqu'au bout de cette dynamique, plutôt que de mutualiser un risque, ce qui pourrait avoir pour effet d'inciter les employeurs à ne pas payer leurs cotisations et à se déresponsabiliser. Sachez que c'est à mes yeux un problème majeur.

L a convention d'objectifs signée par l'ACOSS comporte des objectifs très forts en matière de recouvrement, et j'espère que, dès l'année prochaine, nous pourrons annoncer, comme l'a fait M. Recours, une nouvelle baisse du reste à recouvrer.

Le Gouvernement est donc défavorable à cet amendement.

M. le président.

La parole est à M. Bernard Accoyer, contre l'amendement.

M. Bernard Accoyer.

Je veux m'exprimer contre cet amendement, mais aussi rebondir sur l'intervention de M. le rapporteur, qui, dans son rapport, a fait état - il y est revenu hier à la tribune - de l'ampleur des noncompensations d'exonérations par l'Etat. Nous rejoignons là le problème des manques de recettes, dénoncé par le groupe communiste. Il me semble que si, conformément à la loi du 25 juillet 1994, les exonérations de cotisations étaient toutes effectivement compensées par l'Etat, les recettes augmenteraient, si j'ai bien entendu hier M. le rapporteur, de 17 milliards. Voilà pour ma première remarque.

M. Jean-Luc Préel.

Il serait également souhaitable que d ans les contrats d'objectifs passés entre l'Etat et l'ACOSS...

M. le président.

Monsieur Préel, vous n'avez par la parole ! Continuez, monsieur Accoyer.

M. Bernard Accoyer.

Par ailleurs, je voudrais souligner l'opacité qui entoure les remises de cotisations. Cela concerne différents organismes de la fonction publique auxquels ont été délégués la gestion de certaines prestations - je pense notamment aux prestations familiales.

Voilà les points sur lesquels je souhaiterais obtenir des explications, qui me semblent d'autant plus s'imposer qu'une somme de 17 milliards de francs permettrait d'offrir une marge de manoeuvre.

M. le président.

Mes chers collègues, je vous rappelle que vous avez la possibilité de vous inscrire dans les conditions prévues par le règlement. Alors inscrivez-vous et évitez les interpellations entre vous. Le débat n'en sera que plus efficace. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

La parole est à M. Charles de Courson.

Mme Martine David.

Mais il y a déjà eu un orateur contre !

M. Charles de Courson.

L'amendement no 122 corrigé est inutile, puisqu'il aboutirait à majorer les cotisations sociales de ceux qui les acquittent normalement. Avouez que ce serait tout de même un peu extravagant. De plus, lorsque la sécurité sociale atteint l'équilibre, un tel amendement est inutile, sauf à baisser les cotisations des autres.

Par définition, on ne budgète des recettes qu'en tenant compte d'une fraction non recouvrée, sinon les prévisions de recettes manqueraient de sincérité.

Quant à l'Etat, est-il exemplaire dans le paiement des cotisations sociales ?

M. Jean-Luc Préel.

Non !

M. Charles de Courson.

Voilà cinq ans que je répète que la première des injustices réside dans le fait que l'Etat échappe au contrôle de l'assiette. En effet, en raison des


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lacunes existant dans le dispositif juridique, il n'a jamais pris le fameux décret qui aurait permis aux URSSAF de contrôler cette assiette. Il a fallu que la majorité précédente vote un texte pour que la Cour des comptes se voit confier le soin d'effectuer un tel contrôle. Pour ma part, je n'étais pas d'accord avec une telle solution, car j'estime que l'Etat, en tant qu'organisme verseur de cotisations sociales pour les fonctionnaires, doit être traité comme tout le monde.

Mes chers collègues, vous êtes-vous déjà posé la question de savoir s'il existe une base légale au non-paiement par l'Etat de cotisations maladie et de cotisations relatives aux prestations familiales sur les indemnités que touchent les fonctionnaires au-delà du plafond ? Il n'y en a pas.

C'est une anomalie juridique ! Donc, mes chers collègues communistes, vous pourriez aller jusqu'au bout de votre raisonnement, en reconnaissant que le premier à donner le mauvais exemple en matière de non-paiement, c'est l'Etat.

M. Bernard Accoyer.

Absolument !

M. Charles de Courson.

Lorsque l'Etat paiera correctement ses cotisations et qu'elles seront vérifiées par les URSSAF, comme c'est le cas pour tous les employeurs de droit commun du régime général, il pourra commencer à donner des leçons aux entreprises, qu'elles soient petites, moyennes ou grandes. Les grandes entreprises ne sont pas les seules à ne pas payer leurs cotisations sociales, cela arrive aussi aux petites et aux moyennes.

Mme Jacqueline Fraysse.

Pas d'amalgame !

M. Charles de Courson.

Enfin, la Corse. Comme l'a souligné le rapporteur, en Corse, le taux de nonrecouvrement des cotisations sociales est environ huit fois supérieur à la moyenne nationale, puisqu'on approche les 10 % d'impayés, en supposant que les émissions soient faites correctement.

J'ai dit devant le conseil de surveillance des URSSAF qu'il fallait appliquer la loi républicaine dans toutes les parties de la République. Constater des écarts de un à huit dans les recouvrements est absolument anormal et reflète tout simplement le fait que, encore une fois, l'Etat de droit n'est pas appliqué dans une partie du territoire de la République.

M. le président.

Je fais observer à Mme David que j'observe strictement le règlement et que j'ai bien l'intention de continuer dans cette voie. Lisez l'article 56, alinéa 3, et vous verrez, madame, que j'agis en conformité avec le règlement. Que cela vienne de la droite ou de la gauche de l'hémicycle, je ne tolérerai pas que l'on perturbe le déroulement de la séance.

Mme Martine David.

J'espère bien !

M. le président.

Merci, madame.

Je mets aux voix l'amendement no 122 corrigé.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

MM. de Courson, Gengenwin, Jegou, Préel, Méhaignerie et Bur ont présenté un amendement, no 422, ainsi rédigé :

« Avant l'article 2, insérer l'article suivant :

« I. Il est institué un remboursement de la contribution sociale généralisée, de la contribution pour le remboursement de la dette sociale et du prélèvement social en faveur de la Caisse nationale des allocations familiales et de la Caisse nationale d'assurance vieillesse des travailleurs salariés en faveur des ménages non imposables titulaires de revenus de placement.

« II. La perte de recette pour les organismes de sécurité sociale est compensée par le relèvement à due concurrence des taux de la contribution sociale généralisée et de la contribution de remboursement de la dette sociale. »

La parole est à M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson.

Mes chers collègues, vous vous souvenez certainement de la question que j'ai posée hier à

Mme la ministre lors des questions au Gouvernement.

Déjà, l'an dernier, je lui avais fait remarquer qu'en ne prévoyant pas, pour les contribuables ayant de bas revenus, un dispositif d'exonération de la cotisation de 10 % sur les revenus de placement, on allait aboutir à de fortes injustices sociales. J'avais pris l'exemple, que j'ai rappelé hier, de la veuve qui n'a pour seuls revenus qu'une pension de réversion de 2 500 francs et des revenus de placements de 1 000 francs par mois, fruits d'une vie de travail et d'épargne qui avait permis à son couple de mettre de côté 300 000 francs.

M. Pascal Terrasse.

Avec les chiffres que vous citez, il me paraît difficile que ce couple ait pu mettre de côté 300 000 francs !

M. Charles de Courson.

Eh bien, aujourd'hui, elle vient de recevoir une douloureuse de 1 200 francs, soit 10 % sur les 12 000 francs que lui ont rapporté ses placements.

A l'époque, j'avais proposé, avec l'opposition, une solution, laquelle avait été repoussée par Mme la ministre,

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Bien sûr !

M. Charles de Courson.

Cette solution consistait à permettre à tous ceux qui ne paient pas l'impôt sur le revenu de demander le remboursement du montant de la CSG, du CRDS et du prélèvement social qui frappent leurs revenus de placement. Il n'y a pas deux catégories de Français. Il n'est pas possible d'accepter que des gens extrêmement modestes supportent un impôt de 10 % dès le premier franc, alors même que l'impôt sur le revenu est progressif...

M. François Goulard.

Absolument !

M. Charles de Courson.

... et que seuls 48 % des foyers le paient. On voit bien la complète absurdité et l'injustice sociale de cette situation !

M. François Goulard.

Très juste !

M. Charles de Courson.

Par amendement no 422, je propose donc, afin de ne pas « complexifier » le système, que les personnes exonérées du paiement de l'impôt sur le revenu puissent demander le remboursement de la CSG, du RDS et du prélèvement social afférents à leurs revenus de placement.

M. Kofi Yamgnane.

Ce n'est pas bien, cela !

M. Charles de Courson.

Cela permettrait d'établir une cohérence entre le système CSG, CRDS, prélèvement social et l'impôt sur le revenu.

Sinon, mes ches collègues, comment pouvez-vous expliquer à une personne qui vit des revenus de ses placements accumulés pendant trente ans de sa vie et d'une pension mensuelle de 2 000 francs, que vous devez lui prélever 200 francs par mois. Cela est fondamentalement injuste. De tels cas limites existent.

Mes chers collègues, j'en appelle à votre sens républicain et au respect du principe simple selon lequel chacun doit être imposé en fonction de ses facultés contributives.


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Il est totalement contraire au principe d'égalité devant la loi de taxer des personnes ayant 2 000 ou 3 000 francs de revenus mensuels.

Plusieurs députés du groupe socialiste.

Plus les revenus de placements !

M. Charles de Courson.

Votre erreur est de croire que seuls les riches possèdent un patrimoine !

M. le président.

Monsieur de Courson, concluez s'il vous plaît !

M. Charles de Courson.

Vous vous refusez à comprendre que plus des deux tiers des ménages ont un patrimoine et qu'il n'y a pas de relation stricte entre le niveau des revenus et le patrimoine et les revenus de ce patrimoine.

M. Alain Barrau.

Ce n'est pas sans lien !

M. Charles de Courson.

Des millions de Français ont mis de côté 100 000, 200 000 ou 300 000 francs en trente ou quarante ans de vie.

Vous taxez au premier franc des gens touchant 3 000 à 4 000 francs, par mois, alors que nous avons prévu, vous comme nous, l'exonération de la CSG sur les minima sociaux. Des personnes en dessous des minima sociaux vont être taxées au premier franc des revenus que leur rapportent leurs placements.

M. le président.

Monsieur de Courson, concluez.

M. Charles de Courson.

Voilà la question de fond.

J'espère qu'une majorité de cette assemblée votera en faveur du remboursement d'un tel prélèvement, qui est excessif au regard des facultés contributives des intéressés.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Alfred Recours, rapporteur pour les recettes et l'équilibre général.

La commission n'a pas examiné cet amendement. Elle en est d'ailleurs désolée.

M. Charles Cova.

Vous devriez l'accepter !

M. Alfred Recours, rapporteur pour les recettes et l'équilibre général.

Si l'amendement avait été déposé à temps, elle aurait pu l'examiner.

A titre personnel, je rappellerai simplement que sont exonérés les livrets A, les CODEVI, les livrets d'épargne populaire, etc.

M. Charles de Courson.

Pas « etc. »

!

M. Alfred Recours, rapporteur pour les recettes et l'équilibre général.

Une partie du patrimoine financier est donc exonérée.

Cela dit, M. de Courson n'a pas forcément tort sur tout. Si une discussion avait eu lieu en commission à ce sujet, nul doute qu'elle aurait été intéressante.

M. Charles Cova.

Ce débat a déjà eu lieu l'an dernier !

M. Alfred Recours, rapporteur pour les recettes et l'équilibre général.

Il est normal, s'il doit y avoir des différenciations, que ceux qui choisissent des placements plus spéculatifs payent tandis que d'autres ne paient pas.

M. François Goulard.

Et l'assurance vie, c'est spéculatif ?

M. Alfred Recours, rapporteur pour les recettes et l'équilibre général.

J'ai dit « plus spéculatifs ».

M. François d'Aubert.

Et les obligations France Télécom, c'est spéculatif ?

M. François Goulard.

Monsieur Recours, enfin ! Les obligations d'Etat, c'est spéculatif ?

M. Alfred Recours, rapporteur pour les recettes et l'équilibre général.

Il est donc normal que, à titre personnel et par respect des travaux de la commission, j'indique à M. de Courson que, tout en étant prêt à étudier sa proposition ultérieurement, je propose le rejet de son amendement.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

J'ai déjà répondu à cette question hier et Dominique StraussKahn y a répondu également aujourd'hui. Néanmoins, je répéterai de quoi il s'agit.

D'abord, la CSG est un impôt à assiette large, et c'est ce qui fait d'ailleurs son charme, puisque seuls sont exonérés les pensions de retraite ou d'invalidité, les minima sociaux et les intérêts des produits de l'épargne populaire.

M. François Goulard.

Parlez plutôt d'efficacité que de charme !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Je maintiens le mot « charme », car cet impôt présente la caractéristique d'être juste, équitable et d'avoir une assiette large. Je rappelle que tout salarié acquitte la CSG, y compris un salarié à temps partiel payé au SMIC. Dès lors, pourquoi faudrait-il que les revenus du patrimoine, eux, soient exonérés de toute imposition à la CSG ? A l'heure actuelle, il est possible de ne pas être imposable dans notre pays si l'on a peu d'argent, si l'on bénéficie de réductions d'impôt importantes ou si l'on a des revenus de capitaux soumis, non à l'impôt sur le revenu, mais à des prélèvements libératoires.

Pour illustrer mon propos, je ne citerai qu'un seule xemple : actuellement avec un PEA ou un plan d'épargne logement, on est exonéré de fiscalité jusqu'à hauteur de 1,2 million de francs. Par conséquent, si l'on bénéficie à côté d'une retraite ou d'une pension de handicapé qui n'entraîne pas le paiement à l'impôt sur le revenu, on n'a rien à payer. Devrait-on ne pas payer la CSG sur les revenus rapportés par ce 1,2 million d'épargne logement ou de PEA ? De la même manière, on peut avoir 5 millions ou 10 millions placés en assurance vie et bénéficier seulement d'une petite retraite.

M. Patrick Delnatte.

Plafonnez !

M. Charles Cova.

Fixez un seuil !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Beaucoup de membres de professions libérales, de commerçants, d'artisans ont, en raison de l'absence de régime de retraite dans les années passées, constitué un patrimoine ; tant mieux pour eux. Mais il n'y a aucune raison que les salariés paient la CSG dès le premier franc, et que l'ensemble de ces personnes qui, souvent, possèdent un patrimoine très élevé, ne la paient pas.

M. Charles de Courson.

Pas toutes !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Nous avons examiné les chiffres, notamment à la suite du dépôt des premières conclusions du rapport Charpin. Il en ressort que peu de personnes non imposables possèdent un patrimoine suffisamment important pour payer la CSG sur les revenus de ce patrimoine.

D'ailleurs, pour payer 100 francs de plus par mois de CSG, une personne seule doit avoir un patrimoine d'au moin 650 000 francs et un couple un patrimoine de


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1,3 million. Pourquoi une vendeuse à temps partiel devrait-elle payer la CSG sur 2 000 francs alors que des personnes qui ont un patrimoine important - et je m'en réjouis pour elles - en seraient, elles, exonérées ? Telle est la réalité ! C'est vrai que nous avons voulu rééquilibrer les prélèvements entre les revenus du travail et ceux du capital.

C'est vrai que la CSG est un impôt particulièrement juste puisqu'il touche l'ensemble des revenus sauf ceux que j'ai évoqués : retraites, pensions d'adulte handicapé, produits d'épargne populaire. Nous ne pouvons pas vouloir une chose et son contraire. D'où la cohérence de la position que nous avons prise.

M. le président.

La parole est à M. Bernard Accoyer.

M. Bernard Accoyer.

Je propose de sous-amender l'amendement. Mme la ministre n'a en vue que des patrimoines conséquents. Nous pourrions concrétiser l'esprit de l'intervention de notre collègue de Courson et manifester notre attention à l'égard des familles modestes en prévoyant un plafonnement, par exemple au niveau du SMIC. Il pourrait ainsi y avoir une solidarité envers ceux qui sont salariés et ceux qui vivent d'un patrimoine souvent modeste, ceux-là mêmes auxquels pense M. de Courson.

Madame la ministre, vous avez insisté à plusieurs reprises sur certains avantages de la contribution sociale généralisée, en particulier sur l'élargissement de son assiette, mais n'oubliez pas que c'est un outil que vous avez trouvé en arrivant, et que nous devons tous nous féliciter de son efficacité.

M. Claude Evin.

Qui l'a inventée ?

M. Alain Juppé.

Mais l'élargissement de la base a eu lieu en 1995 !

M. Claude Evin.

Il fallait d'abord instituer la contribution !

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 422.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

M. Recours, rapporteur, M. Gremetz, Mme Fraysse et Mme Jacquaint et les commissaires membres du groupe communiste ont présenté un amendement, no 423, ainsi rédigé :

« Avant l'article 2, insérer l'article suivant :

« Les dispositions de la loi no 97-277 du 25 mars 1997 créant les plans d'épargne retraite sont abrogées. »

La parole est à M. le rapporteur pour les recettes et l'équilibre général.

M. Alfred Recours, rapporteur pour les recettes et l'équilibre général.

Je souhaite que M. Gremetz défende cet amendement que nous avons déposé ensemble.

M. le président.

La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz.

Cet amendement tend, comme l'indique son exposé sommaire, à abroger la loi instituant les fonds de pension, dite loi Thomas. Chacun se souvient de ce texte, qui a donné lieu à des empoignades terribles dans cette assemblée sous une autre majorité. La gauche plurielle a trouvé, en arrivant, cette loi très mauvaise, qui favorise les compagnies d'assurances et le CNPF, ...

M. Bernard Accoyer.

Le MEDEF !

M. Maxime Gremetz.

... ardents défenseurs des fonds de pension. Mais les décrets d'application n'ont pas été publiés.

Nous sous sommes interrogés, hier, sur les modalités de financement de ces fonds de pension, ainsi que sur les modalités de leur gestion. Il faut prendre en compte le contexte, qui est celui d'attaques nouvelles et du développement d'une campagne visant à instituer à tout prix de tels fonds.

La droite a déposé un amendement tendant à supprimer l'article 2. Nous aussi, dans un tout autre esprit, mais nous l'avons retiré. Pour la droite, en effet, cet article ne va pas assez loin, il devrait instituer une retraite par capitalisation, donc prévoir la création de fonds de pension. Nous proposons en l'occurrence de donner tous ensemble un message politique fort. Nous voulons renforcer la retraite par répartition. Et il n'est pas question, évidemment, de permettre la création des fonds de pension prévus par la loi Thomas. Ce ne serait que justice de l'abroger. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

Quel est l'avis de la commission sur cet amendement ?

M. Alfred Recours, rapporteur pour les recettes et l'équilibre général.

La commission des affaires sociales l'a en effet adopté.

M. François d'Aubert.

C'est scandaleux !

M. Bernard Accoyer.

Quelle irresponsabilité !

M. Alfred Recours, rapporteur pour les recettes et l'équilibre général.

J'indiquerai les raisons qui l'ont guidée.

Nous considérons que, dans le cadre de la loi de financement, comme dans celui de l'ensemble des actions engagées, la première de nos préoccupations doit être de sauver les retraites par répartition et de pérenniser le système de base auquel les Français sont habitués et qui nous a été légué par l'ensemble des forces politiques...

M. Bernard Accoyer.

Ça ne fait rien s'il coule ! C'est le Titanic de la répartition !

M. Alfred Recours, rapporteur pour les recettes et l'équilibre général.

... issues de la Résistance, il y a plus d'une cinquantaine d'années.

Nous souhaitons donc fortement le maintien de ce régime. Nous voulons qu'il soit pérennisé et que les moyens de son financement soient définis.

Nous avons constaté que, dans la dernière période j'ai pris cette image en commission - un troisième étage a été posé de guingois sur les deux premiers étages des retraites de base et des retraites complémentaires. C'est le troisième étage de la capitalisation, proposée par M. Thomas et adoptée par la majorité précédente.

Nous ne prétendons pas qu'il ne faudra pas, à un moment ou à un autre, ajouter un étage supplémentaire, nous souhaitons aborder ce problème. Cependant, pour discuter en toute clarté, dans un paysage éclairci, de cette question, nous devons auparavant assurer la stabilité, en prenant des garanties, du régime de base et des régimes complémentaires. S'il le faut, d'autres possibilités seront ouvertes, à condition toutefois qu'elles n'entraînent pas une diminution des recettes de cotisations de la sécurité sociale et des recettes fiscales que l'Etat est en droit d'attendre, et qu'elles ne portent pas préjudice aux deux premiers étages de l'édifice, comme on pouvait le craindre avec la loi Thomas.

Telles sont les raisons qui ont conduit la commission à voter sans états d'âme, et même avec une certaine fierté, pour l'abrogation de la loi Thomas. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)


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M. François Goulard.

Il n'y a vraiment pas de quoi !

M. le président.

La parole est à M. le président de la commission.

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

J'ajouterai quelques mots aux excellents propos du rapporteur.

L'adoption de cet amendement était très importante car elle a permis de lever toute ambiguïté dans le débat qui va s'engager avec l'ensemble de la gauche plurielle. C'était bien son objectif.

Nous tenons à assurer la pérennité de la retraite par répartition mais nous nous devons d'engager un débat sur l'avenir du système de retraite. Ce sera l'objet du rapport confié à M. Charpin, dont je tiens à saluer le courage, la lucidité et la précision. Aucun d'entre nous n'ignore en effet les déséquilibres qui apparaîtront à terme du fait de l'évolution du rapport entre actifs et inactifs.

En levant l'ambiguïté créée par la loi sur les fonds de pension nous permettons d'engager sereinement un débat sur les systèmes de retraite par capitalisation à long terme, collectifs, garantissant l'avenir pour tous les salariés et ne se substituant pas au système de retraite par répartition.

Le débat que nous allons engager est donc fondamental.

Il est très important de préciser que les avantages des systèmes qui doivent compléter le système de retraite par répartition doivent bénéficier à l'ensemble des salariés, et pas uniquement à ceux qui peuvent épargner, et cela sans fragiliser les comptes de la sécurité sociale. Ce point n'est pas négligeable, il est même essentiel. Ce débat, nous allons l'engager entre nous et avec le Gouvernement.

Je considère que la mise en place d'un fonds de réserve est un signe de cette volonté d'assurer l'architecture complète du système de retraites. Afin qu'il n'y ait pas d'ambiguïté dans le débat et dans les discusssions que nous allons avoir, il était tout à fait important d'abolir la possibilité d'instituer des fonds de pension, prévue par la loi Thomas, car son existence laisser planer un doute sur notre volonté collective. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

M. le président.

La parole est à M. le rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, pour l'assurance vieillesse.

M. Denis Jacquat, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, pour l'assurance vieillesse.

Je tiens à rappeler ce que j'ai dit l'année dernière concernant la loi Thomas : j'ai toujours regretté que ce texte n'ait pas été examiné pour avis par la commission des affaires sociales.

M. Pascal Terrasse.

Absolument !

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

Très bien !

M. Denis Jacquat, rapporteur pour l'assurance vieillesse.

Le très éphémère président du conseil de surveillance de la CNAVTS que j'ai été l'an passé - car il y a eu une dissolution anticipée - avait rappelé que le choix pour l'employeur entre un avantage sous forme d'un plan d'épargne retraite et une augmentation de salaire était de toute évidence défavorable à l'augmentation salariale et entraînait par conséquent une diminution des cotisations.

Je craignais un « siphonnage » concernant les retraites par répartition, pour reprendre une expression de Jérôme Cahuzac.

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Tout à fait !

M. Pascal Terrasse.

C'est l'évidence !

M. Denis Jacquat, rapporteur pour l'assurance vieillesse.

Ce texte n'était pas parfait, mais la commission des affaires sociales n'a pas pu le dire.

Je pense cependant que nous ne pourrons abroger la loi du 25 mars 1997 qu'après avoir affirmé un principe et mis en place un système de complément de retraite par c apitalisation, indispensable pour que les retraités connaissent le montant de la retraite qu'ils percevront et le taux de remplacement.

Je suis donc, pour l'heure, défavorable à l'adoption de cet amendement, qui vient trop tôt. Nous devons mettre auparavant en place un système de complément de retraite par capitalisation.

M. Bernard Accoyer.

Il existe déjà pour certaines catégories de Français.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement sur cet amendement ? Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Monsieur le député, comme vous le savez, et comme l'a rappelé hier Mme Fraysse, le Premier ministre a, dans sa déclaration de politique générale, dit très clairement que le Gouvernement remettrait en cause la loi Thomas qui, par un certain nombre de dispositions, portait atteinte à l'équilibre financier de nos régimes de retraite par répartition et fragilisait donc notre système de retraites et notre système de sécurité sociale.

Nous l'avons dit à plusieurs reprises, et M. Jacquat vient de le rappeler après le rapporteur et le président de la commission, cette loi privilégiait une approche individuelle permettant d'accorder des avantages sociaux et fiscaux à ceux qui pouvaient plus facilement épargner, ce qui entraînait un risque pour la sécurité sociale puisque rien n'empêchait, par exemple, une entreprise de transformer en épargne salariale, pour ses seuls cadres, ce qui aurait dû constituer des augmentations de salaire, empêchant ainsi que ces sommes soient soumises à cotisation.

Ainsi, la loi Thomas détourne des ressources complémentaires pour la sécurité sociale, elle représente une solution individuelle, et non collective et négociée, enfin, elle est injuste, car elle accorde des avantages à certains seulement. Elle remettait donc en cause les retraites par répartition mais aussi l'équilibre de la sécurité sociale.

Aussi, nous ne pouvons qu'être d'accord avec le souhait d'abroger cette loi.

Je tiens cependant à préciser dans quel contexte nous devons le faire.

Tout d'abord, et nous reviendrons sur ce point à propos de la constitution du fonds de réserve, la priorité absolue du Gouvernement est d'assurer la sécurité et la pérennité des régimes par répartition.

C'est la raison pour laquelle nous aurons un grand débat public après le diagnostic qui portera sur l'état de nos retraites. C'est la raison pour laquelle, dès maintenant, nous créons un fonds de réserve, qui sera alimenté par des sources diverses et permettra de consolider le régime de retraites par répartition. Mais nous ne sommes cependant pas opposés à la constitution d'une épargne à long terme, complétant, et non concurrençant, la retraite par répartition, contrairement à ce que faisait le disposif prévu par la loi Thomas.

M. le ministre de l'économie et des finances, que je remercie d'être avec nous aujourd'hui, et moi-même avons travaillé, dans le cadre de la mission qui a été c onfiée à Didier Migaud et Jérôme Cahuzac, sur l'architecture de ce troisième étage qui, je le répète, constitue un complément de la retraite par répartition et ne se substitue pas à lui.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 28 OCTOBRE 1998

Le système que nous souhaitons mettre en place, dès 1999, je l'espère, aura trois caractéristiques essentielles, à l'inverse de ce que proposait la loi Thomas. Il sera conçu dans un cadre collectif et sera accessible réellement à l'ensemble des salariés, notamment grâce à des dispositifs de solidarité. Les avantages qu'il offrira devront profiter à l'ensemble des salariés et ne pas fragiliser les comptes de la sécurité sociale, aussi bien en ce qui concerne l'assurance maladie que les retraites. Enfin, les partenaires sociaux devront être associés à sa mise en oeuvre et à son contrôle.

Il s'agit de faire en sorte qu'une partie de l'épargne consolide l'effort productif, l'effort d'investissement des entreprises, et donc, à terme, le développement des richesses.

Aussi le Gouvernement est-il d'accord pour à la fois abroger la loi Thomas, consolider le régime par répartition - avec, je l'espère, l'appui du grand nombre d'entre vous -, et élaborer un système d'épargne-retraite respectant les principes que j'ai énoncés tout à l'heure.

Mais un tel amendement ne me semble pas avoir sa place dans la loi de financement de la sécurité sociale.

M. José Rossi.

Ah !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Ne vous réjouissez pas trop vite ! Pas sur le fond, car nous sommes bien au coeur des problèmes de retraite, mais parce qu'il constituerait, sur le plan juridique, un cavalier sans lien direct avec la loi de financement de la sécurité sociale.

C e que nous souhaitons préciser, et Dominique Strauss-Kahn le confirmera dans quelques instants, c'est que le Gouvernement s'engage à abroger la loi Thomas dès que le support juridique adéquat se présentera. Je pense que le DMOS qui sera examiné au début de l'année 1999, pendant que nous préparerons ensemble la consolidation de la retraite par répartition et l'institution d'une véritable épargne retraite ouverte à tous les salariés et ne pénalisant ni la sécurité sociale ni le système de retraite, en offrira l'occasion. Le Gouvernement s'engage à faire abroger cette loi dès que ce sera possible sur le plan juridique, et de travailler avec vous tous à la consolidation d'un système de retraite auquel les Français sont très attachés.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'indsutrie.

M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

J'ai peu de chose à ajouter à ce que vient de dire ma collègue Martine Aubry. Les défauts constitutifs de la loi Thomas ont été clairement énoncés par l'auteur de l'amendement, par les rapporteurs et par Mme Aubry. L'abrogation de cette loi serait même à la limite inutile car les décrets d'application n'ont jamais été pris par ce Gouvernement, en sorte qu'elle ne peut avoir d'application concrète.

Il faut cependant avancer.

En effet, personne n'est hostile à l'idée que, après avoir renforcé notre système de retraite par répartition - et cela fera l'objet des articles qui vont suivre -, un dispositif soit créé permettant à ceux qui le peuvent, c'est-à-dire à une large partie des Français, de mettre un peu d'argent de côté pour leur retraite.

Aujourd'hui, lorsque ceux de nos concitoyens qui ont des revenus moyens, et parfois assez faibles, veulent faire un effort pour leur retraite, le support qu'ils ont à leur d isposition est principalement le livret de caisse d'épargne. Celui-ci n'est pas la meilleure formule pour quelqu'un qui veut faire un effort d'épargne pendant plusieurs dizaines d'années.

Lorsqu'on interroge ceux qui déposent leur argent dans les caisses d'épargne, un très grand nombre répondent qu'ils épargnent par précaution ou en vue d'un projet immobilier, mais aussi pour préparer leur retraite. Et s'ils agissent de cette façon, c'est parce que c'est pour eux le plus simple et qu'ils n'ont pas d'autre possibilité. Mais, ce faisant, ils ne bénéficient pas d'un taux de rendement digne d'une épargne aussi longue.

Il n'y a pas de raison pour que seuls ceux qui sont dans notre pays les plus riches puissent trouver des placements à long terme rémunérateurs quand ceux qui ont des revenus plus modestes seraient obligés de se contenter de rendements plus faibles. Nous devons en conséquence mettre en place un instrument de préparation financière de la retraite, un instrument de placement à long terme ouvert à tous dans les conditions que Mme Martine Aubry vient de rappeler.

D'autre part, et la récente crise financière dont nous sommes peut-être en train de sortir l'a montré, nous savons combien les capitaux qui s'investissent dans les entreprises, en particulier dans les grandes, viennent non seulement d'épargnants individuels, mais aussi de ces fameux fonds de pension, notamment anglo-saxons, dont on a beaucoup parlé. Ces fonds de pension, selon qu'ils décident ou non d'investir dans telle ou telle entreprise, ou de retirer leurs capitaux pour une raison ou une autre, p euvent mettre à mal les plus grandes entreprises industrielles.

Voulons-nous que, dans notre pays, les plus grandes entreprises industrielles, ou bancaires d'ailleurs, soient si largement possédées par des fonds venus d'outre-Atlantique ou du reste de la planète - ils sont évidemment les bienvenus mais ils ne doivent pas être les seuls - qu'elles puissent voir, comme un cas l'a très récemment montré, leurs cours chuter au gré desdits fonds ? Evidemment non.

Nous voulons rester maîtres sur notre territoire, autant que faire se peut. Nous voulons demeurer maîtres de l'avenir de nos entreprises, notamment au travers de leur financement.

Il est donc nécessaire de mettre en place un instrument d'épargne à long terme. Non seulement cela répondra aux besoins des épargnants, mais des masses de capitaux considérables pourront ainsi se constituer et assurer à notre pays la maîtrise de son appareil productif.

C'est la raison pour laquelle le Gouvernement présentera très rapidement, en 1999, un texte spécifique ou, à l'occasion d'un autre texte, un certain nombre d'articles, définissant les caractéristiques de ce produit d'épargne collectif, destiné au plus grand nombre, contrôlé par les salariés, engageant la solidarité, ne mettant pas en cause le système de répartition tout en répondant à un besoin d'épargne individuel et à un besoin d'accumulation du capital sur le sol national.

M. Bernard Accoyer.

Alors, pourquoi attendre ? M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Les objectifs que vous poursuivez sont les mêmes que ceux du Gouvernement. Nous arriverons ensemble, dans les mois qui viennent, à mettre en place ce dont nous avons vraiment besoin et qui a finalement peu de rapport avec la fameuse loi Thomas. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 28 OCTOBRE 1998

M. le président.

Monsieur Gremetz, le Gouvernement vous a lancé un appel. Allez-vous y répondre en retirant l'amendement ?

M. Maxime Gremetz.

Monsieur le président, puisque nous sommes dans la transparence (Sourires), je vous avouerai qu'en adoptant un tel amendement en commission, nous savions que nous accomplissions un geste fort, qui affirmait une volonté et appelait des engagements.

Mais nous n'ignorions pas, messieurs de la droite, qu'une telle initiative ne réjouit pas beaucoup, que, si la disposition était adoptée, vous déposeriez un recours devant le Conseil constitutionnel.

Cela dit, si nous ne voulons pas vous donner cette occasion, nous voulons vraiment que la loi Thomas soit abrogée.

Les ministres se sont engagés en faveur de l'abrogation de la loi Thomas. Dans ces conditions, je retire l'amendement, compte tenu de l'engagement du Gouvernement.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur quelques bancs du groupe communiste.)

M. Pascal Terrasse.

C'est une grande journée !

M. le président.

La parole est à M. le rapporteur, qui confirmera sans doute le retrait de l'amendement dont il est cosignataire.

M. Alfred Recours, rapporteur pour les recettes et l'équilibre général.

Ma confirmation est en effet nécessaire, cher Maxime.

(Sourires.)

L e Gouvernement, par la voix de deux de ses ministres, ... Un député du groupe socialiste.

Excellents ministres !

M. Alfred Recours, rapporteur pour les recettes et l'équilibre général.

... qui sont excellents, à savoir le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie et la ministre de l'emploi et de la solidarité, a en effet pris un engagement.

La présence de M. Strauss-Kahn n'est sans doute pas le fait du hasard. Les ministres ont voulu marquer avec force ce dont nous avions déjà parlé en commission et ce sur quoi nous reviendrons peut-être en discutant de l'annexe, sous une forme ou sous une autre.

Nous ne souhaitions pas que la disposition puisse être considérée comme un cavalier et ne pas passer le cap de certaines institutions ou de certaines renvendications.

P our abroger la loi Thomas, nous l'avons bien compris, nous devons retirer l'amendement, avant de revenir, par d'autres voies, exactement à ce que nous proposions.

M. Maxime Gremetz.

On fait confiance au Gouvernement !

M. Alfred Recours, rapporteur pour les recettes et l'équilibre général.

L'amendement no 423 est retiré.

M. le président.

L'amendement no 423 est retiré.

M. Yves Bur.

Je le reprends, monsieur le président.

M. le président.

La parole est à M. José Rossi.

M. José Rossi.

Monsieur le président, je demande une suspension de séance d'un quart d'heure pour réunir mon groupe.

M. le président.

Elle est de droit.

Suspension et reprise de la séance

M. le président.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-sept heures vingt-cinq, est reprise à dix-sept heures quarante.)

M. le président.

La séance est reprise.

Nous revenons à l'amendement no 423, qui a été retiré puis repris par M. Yves Bur.

M. François Goulard.

Rappel au règlement !

M. le président.

La parole est à M. François Goulard pour un rappel au règlement.

M. François Goulard.

Mon rappel au règlement se fonde sur l'article 58. Nous venons d'assister à une sorte de psychodrame - nous commençons à en avoir l'habitude, cf. la séance du 9 octobre dernier - et à un débat fort animé entre les différents membres de la majorité, pour ne pas dire les différents membres du Gouvernement.

Monsieur le président, la majorité et le Gouvernement s'étant très largement exprimés sur une question évidemment déterminante pour ce projet de loi de financement de la sécurité sociale, nous trouvons particulièrement regrettable que l'opposition n'ait pu, à aucun moment, faire valoir sa position ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

Mme Nicole Bricq.

Vous avez parlé pendant trois heures !

M. Alfred Recours, rapporteur pour les recettes et l'équilibre général.

Et toutes les motions de procédure ?

M. François Goulard.

C'est tout à fait anormal et ce n'est pas conforme au fonctionnement démocratique d'une assemblée comme la nôtre. C'est la raison pour laquelle je demande, monsieur le président, à m'exprimer sur le fond de cet amendement, retiré au terme de ce que je n'hésite pas à appeler une pantalonnade ! (Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie françaiseAlliance. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

M. le président.

Monsieur Goulard, la présidence prend acte de votre rappel au règlement. Je vous rappelle tout de même qu'il est de mon devoir de demander au signataire de l'amendement s'il le retire ou non. S'il le retire, il est bien évident que le débat ne peut plus intervenir et que vous ne pouvez plus avoir la parole.

M. Pascal Terrasse.

Voilà !

M. Maxime Gremetz.

Très bien !

M. le président.

J'ai respecté scrupuleusement le règlement ; je souhaite que vous m'en donniez acte, car je ne voudrais pas qu'il y ait de quiproquo entre nous. Cela étant, l'amendement a été repris par M. Bur...

M. Yves Bur.

Tout à fait !

M. le président.

... je donnerai donc la parole aux orateurs qui s'étaient inscrits préalablement. Mais auparavant, la parole est à M. le président de la commission.

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

Je connais bien M. Goulard et j'apprécie ses qualités, ...

M. Jean-Luc Préel.

Ça commence bien !

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

... même si nous avons le plus souvent des divergences. Car nous discutons au fond et dans le respect mutuel. Je crois qu'il peut m'en donner acte.

Je ne saurais accepter le mot de pantalonnade utilisé par M. Goulard. Je souhaite qu'il le retire. Il ne correspond pas du tout à la manière dont nous travaillons dans la commission.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 28 OCTOBRE 1998

Depuis hier, l'opposition a eu - et c'est légitime, je ne discuterai même pas là-dessus -, à travers trois motions de procédure, l'occasion de s'exprimer longuement au fond.

M. Goulard sait très bien que depuis vingt-quatre heures, nous avons eu largement l'occasion de discuter du problème des retraites et des fonds de pension. Nous avons dit de manière explicite ce que nous voulions, à savoir : la pérennisation des retraites par répartition, la recherche d'un système garantissant collectivement l'avenir du plus grand nombre.

Mme la ministre et les rapporteurs se sont exprimés non pas une fois, mais dix fois ! Nous l'avons dit en commission et en présentant les rapports, je l'ai dit dans mon intervention au nom de la commission des affaires culturelles, familiales, nous l'avons dit en répondant aux motions de procédure et au cours du débat général. Ce problème ne surgit donc pas comme par hasard ! Il a été étudié longuement.

Monsieur Goulard, l'amendement de M. Gremetz a été adopté en commission après un débat assez large qui a permis à chacun de donner son avis. Et je remercie M. Jacquat qui a su exposer avec doigté et modération sa position personnelle.

Nous considérons, comme l'ont nettement indiqué M. Gremetz, M. Recours, les ministres et moi-même, que l'abrogation de la loi sur les fonds de pension - dont les décrets d'application ne sont d'ailleurs pas sortis - est le moyen de dégager le terrain politique et de nous permettre d'aborder au fond, dans des conditions parfaitement claires, les problèmes qui préoccupent chacun d'entre nous et tous nos concitoyens.

Monsieur Goulard, par respect pour vous-même, je souhaiterais que vous retiriez ce terme de « pantalonnade ». Encore une fois, il ne correspond pas du tout à la réalité des débats et des travaux de notre commission que vous respectez, comme moi, qui en suis le président.

M. Claude Evin, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, pour l'assurance maladie et les accidents du travail.

Très bien !

M. le président.

La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan.

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan.

Je ne voudrais pas revenir trop longuement sur le fond de la loi Thomas. Elle souffrait d'un certain nombre de défauts, qui ont été parfaitement décrits, aussi bien par Mme Martine Aubry que par M. Dominique StraussKahn.

Pour résumer brièvement, cette loi comporte un risque de « siphonnage » des régimes par répartition. Parce qu'il s'agit d'une adhésion facultative et individuelle, elle souffre de l'absence de contrôle collectif, ce qui est tout à fait contraire à notre tradition culturelle et historique en matière de retraites. Enfin, elle fixe un pourcentage minimal d'un certain produit financier, à savoir des titres boursiers ; or on a pu voir, ces derniers mois, les conséquences financières que de telles dispositions auraient eues pour ceux qui lui auraient fait confiance, si les décrets d'application avaient été pris en leur temps.

(Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Quoi qu'il en soit, il semble que dans cette partie-ci de l'Hémicycle, nous soyons d'accord pour abolir la loi Thomas.

L'amendement no 423, après avoir été retiré, a été repris par l'opposition. C'est de bonne guerre. Mais s'il avait été adopté, nous courrions le risque d'une censure par le Conseil constitutionnel. Et l'opposition, qui est intelligente et active, aurait réagi en déclarant constitutionnel ce que nous estimons contraire aux intérêts du pays.

C'est la raison pour laquelle, même si cela peut paraître paradoxal, je crois qu'il serait bon que dans cette partie-ci de l'Hémicycle on vote contre, pour éviter toute exploitation politique.

Encore une fois, nous faisons confiance à votre intelligence et à votre réactivité politique. Mais nous n'entendons pas répondre sur ce plan-là, car cela ne ferait que retarder l'examen au fond de cette question très importante.

Mme Nicole Bricq.

L'opposition n'en est pas à une contradiction près !

M. le président.

La parole est à M. François Goulard.

M. François Goulard.

Je dirai à M. Cahuzac qu'à force d'être à fronts renversés on risque de se prendre les pieds dans le tapis ! (Sourires.)

Mme Nicole Bricq.

C'est vous qui vous prenez les pieds dans le tapis !

M. François Goulard.

Je dirai à M. Le Garrec que si un mot l'a blessé, je le retire bien volontiers. Mais il ne m'a pas compris. Je ne visais évidemment pas les travaux de la commission ni les débats que nous avons eus jusqu'à présent, qui ont été incontestablement de très grande qualité, de part et d'autre de l'hémicycle. De fait, nous avons pu débattre aussi bien de l'assurance maladie, de la branche famille que des retraites. Nous l'avons fait selon nos opinions, dans le calme et en exposant ce que nous croyons être la vérité et le bien du pays.

Cela étant, il s'est passé - et vous avez employé le mot, monsieur le président de la commission des affaires sociales - un événement politique, que vous ne pouvez pas nier : le groupe communiste, dont c'est le droit le plus strict, a voulu manifester de façon spectaculaire son opposition absolue aux fonds de pension.

Cette manifestation politique est intervenue précisément au moment où nous sentions que, devant la situation impossible que nous connaîtrons, à terme, en matière de retraites, le Gouvernement amorçait un changement de position : les propos de Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité n'étaient plus absolument hostiles aux fonds de pension, une mission avait été confiée sur ce sujet au commissaire au Plan. On sentait bien que la conclusion était d'avance écrite et qu'on allait reposer le problème des fonds de pension.

Mais ce geste du groupe communiste a entraîné des réactions en chaîne. Ce matin, notre débat a été allongé, à mon avis inutilement, sans doute parce que la majorité recherchait une position de consensus.

Le secrétaire d'Etat à la santé a été chargé d'occuper, au sens propre du terme, la tribune - ce qu'il a fait avec le talent que nous lui connaissons. A la suite de quoi, il semble que la majorité de cette assemblée ait accepté de consentir à cette opposition de principe exprimée par le Parti communiste vis-à-vis des fonds de pension. C'est sur cette position que la discussion s'est engagée tout à l'heure, à la reprise de la séance.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 28 OCTOBRE 1998

Nous avons vu progresser le débat. Les rapporteurs nous ont dit qu'ils étaient d'accord sur l'amendement de

M. Gremetz. Puis le Gouvernement a inversé la manoeuvre.

D'abord, Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité nous a dit qu'elle était d'accord sur l'amendement de M. Gremetz, mais... ensuite, M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie nous a dit qu'il était favorable aux fonds de pension, mais...

Cela constitue, à tout le moins, deux prises de position politiques très importantes de la part des deux principaux ministres de ce Gouvernement ; et cela appelle de notre part, c'est notre droit le plus strict, sinon des questions, du moins des commentaires.

Voilà où nous en sommes. C'est nouveau, étant donné la discussion que nous avons eue jusqu'à présent. C'est un fait politique, qui porte sur un sujet de la plus grande importance pour l'avenir des retraites en France et pour l'ensemble de nos concitoyens. Je crois donc que l'opposition est dans son rôle quand elle souligne ce type de manoeuvre.

Mme Nicole Bricq.

Ce n'est pas une manoeuvre, c'est un débat !

M. François Goulard.

Je ne reprends pas les termes que j'ai employés tout à l'heure. Je dirai simplement que sur des sujets aussi graves, il est des moments où la politique politicienne devrait s'effacer (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste) et où l'intérêt général devrait tous vous guider. (Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

M. le président.

La parole est à M. Bernard Accoyer.

M. Bernard Accoyer.

Je ne reviendrai pas sur le fond, c'est-à-dire sur l'accord politique qui est intervenu au sein de la majorité. C'est aussi cela, la vie politique. Toutefois, je redoute que ce soit un signe défavorable. Car les épargnants et les investisseurs doivent pouvoir avoir confiance en une certaine pérennité de nos intentions.

Ce qui nous intéresse aujourd'hui, c'est l'avenir des retraites. C'est l'avenir des jeunes et des moins jeunes, dont on sait qu'aujourd'hui les ressources pour leurs retraites ne sont pas assurées.

En réalité, il existe un consensus sur notre volonté de résoudre ce problème. J'ai entendu avec intérêt, ces derniers jours, les réponses et les interventions du Gouvernement qui a réaffirmé qu'il fallait sauvegarder le régime des retraites par répartition, mais qu'il faillait aussi, à côté, installer des outils fondés sur la capitalisation.

Madame la ministre, nous sommes d'accord pour sauvegarder le régime par répartition et pour compléter le dispositif. C'est indispensable, en raison de l'impasse financière que nous connaîtrons à partir de 2005, en raison du mécanisme de la CADES qui reporte sur les jeunes générations le financement de la protection sociale d'aujourd'hui et de demain.

Il faut sortir de cette impasse. L'outil existe déjà avec les régimes de retraite par capitalisation et les régimes complémentaires qui ont été créés il y a plus de trente ans et qui sont réservés aujourd'hui - et c'est certainement une injustice - à une seule catégorie de Français : les agents et anciens agents des collectivités publiques. Je fais allusion à la PREFON, au CREF et à la MRIFEN.

Le groupe RPR a déposé un amendement pour étendre le droit à bénéficier de ce type de régime complémentaire par capitalisation aux salariés du secteur privé. La discussion qui s'est instaurée sur cet amendement en commission des affaires sociales a montré qu'il y avait là un vrai problème et une véritable voie d'avenir pour plus d'équité face aux retraites.

Comme peuvent en témoigner les comptes rendus des travaux de la commission, la discussion a malheureusement dérapé vers l'opposition entre le secteur privé et le secteur public. Mais le problème n'est pas là. Il s'agit plutôt de garantir à tous la sécurité du financement des retraites. J'ai été inquiet d'entendre les commissaires socialistes de la commission des finances affirmer que cet amendement était irrecevable. D'ailleurs, Mme la ministre y a fait allusion en évoquant des cavaliers.

Madame la ministre, il convient d'instaurer plus de justice, plus d'équité et plus d'égalité dans l'accès de tous nos concitoyens aux mêmes droits. Je vous fais une proposition. Pour le Gouvernement, il n'y a pas de cavalier.

Vous pouvez donc reprendre cet amendement à votre compte. Vous adresseriez ainsi dès aujourd'hui un signal fort propre à apaiser tous ceux qui sont inquiets pour l'avenir des retraites, sans risquer d'ailleurs de compromettre les régimes par répartition. Je rappelle que les régimes complémentaires de retraite par capitalisation ont été créés à la demande des syndicats représentatifs de fonctionnaires - CFTC, CFDT, FO et CGC...

M. le président.

Concluez, monsieur Accoyer !

M. Bernard Accoyer.

... et qu'ils sont gérés aujourd'hui par l'UAP et le GAN sous la houlette de la CNP.

Madame la ministre, je vous demande donc très solennellement si vous pouvez, dès cette année, reprendre cet amendement au compte du Gouvernement et faire ainsi progresser le financement et l'avenir de nos retraites. Au cas où vous ne le décideriez pas pour cette année, pouvez-vous prendre, pour l'année prochaine, un engagement en ce domaine ? (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à Mme la ministre.

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Effectivement, nous avons eu un débat très large sur les retraites, comme le président de la commission des affaires sociales l'a rappelé. Encore une fois, je ne comprends pas pourquoi vous avez réagi ainsi à la reprise de séance puisque nous avons été amenés à reconnaître à plusieurs reprises - et je l'ai indiqué notamment dès mon discours introductif - que nous n'étions pas d'accord sur la loi instituant les fonds de pension.

Disons les choses telles qu'elles sont : nous avons consulté tant les juristes que le secrétariat général du Gouvernement. Aujourd'hui, il est clair que ni vousmêmes ni le Gouvernement, parce que ce n'est pas l'objet initial du texte et parce qu'il n'aurait pas de conséquences directes sur le financement de la sécurité sociale, ne pouvaient déposer un amendement.

Mais si vous êtes d'accord avec cet article - et je m'en réjouis - cela signifie que vous considérez que la loi Thomas comportait - ou que son application risquait de comporter certaines injustices et iniquités. Je vous donne donc rendez-vous très vite, pour le futur DMOS que l'Assemblée devrait commencer à discuter au début de l'année prochaine.

J'espère que l'Assemblée saura alors voter unanimement pour abroger la loi Thomas et pour mettre en place des dispositifs nouveaux susceptibles de conforter nos retraites


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 28 OCTOBRE 1998

par répartition ainsi qu'un système d'une épargne salariale qui ne comporte pas les risques d'iniquité que vous avez soulevés.

Je vous prends donc au mot. Rendez-vous, très vite, pour voter tous ensemble l'abrogation de la loi Thomas.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

Monsieur Bur, maintenez-vous l'amendement no 423 ?

M. Yves Bur.

Il est maintenu.

Mme Jacqueline Fraysse.

Je demande, au nom du groupe communiste, une suspension de séance de quinze minutes.

M. le président.

Elle est de droit.

Suspension et reprise de la séance

M. le président.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-huit heures, est reprise à dixhuit heures dix.)

M. le président.

La séance est reprise.

La parole est à M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson.

Mes chers collègues, je veux expliquer pourquoi le groupe UDF, à l'origine, je vous le rappelle, de la proposition de loi qui a débouché sur la loi Thomas, votera contre l'amendement Gremetz.

La première raison tient au fait que la majorité plurielle cherche ainsi à masquer ses contradictions. En effet, alors que le groupe communiste est toujours contre toute création de système de retraite par capitalisation, le groupe socialiste a beaucoup évolué et n'est plus hostile au principe.

(Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Alain Néri.

N'exagérons rien !

M. Charles de Courson.

Quant aux critiques qu'a adressées le ministre au système Thomas, elles sont erronées.

D'abord il n'y aura pas de siphonnage, car le système doit être examiné en dynamique et non en statique. En dynamique, en effet, l'accumulation du capital permettra la création de richesses supplémentaires, ce qui accroîtra le volume des cotisations sociales tant pour les régimes de base que pour les régimes complémentaires.

Ensuite, contrairement à ce qu'il a été dit, il ne s'agit pas d'un système individuel : il est géré collectivement.

Mme Nicole Bricq.

Il n'est pas pour tous !

M. Charles de Courson.

Nous avions d'ailleurs prévu la présence des assurés dans les conseils de surveillance des fonds mutualisés.

Enfin, la critique fondée sur le fait que la Bourse fluctue n'est pas davantage recevable. En effet, sur une longue période, ses variations sont intéressantes et les critères de répartition des risques que nous avions choisis permettaient de résoudre le problème.

Dernier point, votre amendement, mes chers collègues, est archaïque parce que nous n'avons jamais été contre les systèmes par répartition. Nous avons toujours présenté la proposition Thomas comme un troisième étage des deux premiers constitués par des retraites fondées sur la répartition. Il ne faut donc pas opposer des éléments qui n'ont pas à l'être.

D'ailleurs, les trois fonctions publiques bénéficient déjà de systèmes par capitalisation avec des avantages fiscaux, alors que cela n'est pas le cas pour les salariés du privé. Il y a donc une inégalité au détriment de ces derniers.

M. Germain Gengenwin.

Très juste !

M. Charles de Courson.

Enfin, il y va de la prospérité de la France : ces fonds de pension sont nécesaires à nos entreprises pour renforcer leurs capitaux propres et accroître leur autonomie, comme M. Strauss-Kahn l'a d'ailleurs rappelé tout à l'heure.

En conclusion, le groupe UDF, constant sur ses positions, votera contre l'amendement Gremetz.

M. le président.

La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz.

Après avoir entendu M. de Courson, j'ai l'impression de ne plus comprendre. Nous avons eu droit à une manoeuvre politicienne, mais il semble que la droite se divise, y compris sur cette manoeuvre politicienne.

(« Non ! non ! » sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe pour la Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Bernard Accoyer.

Nous avons toujours été contre !

M. Maxime Gremetz.

Je n'en doutais pas parce que, pour avoir passé des nuits dans cet hémicycle à débattre de la loi Thomas, je sais que vous êtes des acharnés des fonds de pension. Je ne vois donc pas pourquoi vous voteriez un amendement proposant l'abrogation de la loi Thomas.

(Rires et exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Le laisser entendre est fort, même en matière de politique politicienne !

M. François Goulard.

Vous n'avez rien compris ! C'est trop compliqué pour vous !

M. le président.

Monsieur Goulard, s'il vous plaît !

M. Maxime Gremetz.

Je ne sais d'ailleurs toujours pas si M. Bur maintient l'amendement.

M. Yves Bur.

Oui !

M. le président.

Monsieur Gremetz, permettez-moi de poser les questions qui me concernent. Poursuivez votre argumentation.

M. François Goulard.

C'est votre vote qui nous intéresse, monsieur Gremetz.

M. José Rossi.

Vous voulez aussi voter contre ?

M. Maxime Gremetz.

Je voulais savoir avant de poursuivre mon propos.

M. de Courson se souvient sans doute que, lors de l'examen de cet amendement en commission, avait été soulevé le problème de sa constitutionnalité.

M. François Goulard.

C'est nouveau !

M. Maxime Gremetz.

Nous avons décidé de l'accepter en commission en toute connaissance de cause, avec le rapporteur, avec la majorité, afin de pouvoir avoir ce débat en séance et demander au Gouvernement de prendre une position claire, précise, devant l'ensemble du pays.

(Rires et exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. François Goulard.

Colossale subtilité !

M. Maxime Gremetz.

C'est ce que nous avons fait.

Nous avons ainsi obtenu, je le rappelle, l'engagement clair du Gouvernement en faveur de l'abrogation de la loi Thomas. Deux ministres du Gouvernement se sont exprimés à ce sujet.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 28 OCTOBRE 1998

Puisque vous voulez jouer au plus fin...

M. François Goulard.

Ce n'est pas dur ! (Sourires.)

M. Maxime Gremetz.

... je vais vous dire ce que nous allons faire : nous ne voterons pas cet amendement mais nous allons demander au Gouvernement de transcrire dans le rapport annexé l'engagement...

Mme Martine David.

Très bien !

M. Maxime Gremetz.

... que, dans les plus brefs délais, dès qu'il y aura une possibilité - DMOS ou autre - il proposera l'abrogation de la loi Thomas.

(Applaudissements sur les bancs du groupe communiste, du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Alfred Recours, rapporteur pour les recettes et l'équilibre général.

Par respect pour la majorité qui a obtenu du Gouvernement des engagements précis, et qui va peutêtre en obtenir d'autres à la suite de la demande formulée à l'instant par Maxime Gremetz ; par respect pour l'opposition et pour lui éviter d'être tentée de faire un recours constitutionnel sur un amendement qu'elle aurait elle-même déposé (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants), nous ne pouvons pas accepter l'amendement du néo-fossoyeur de la loi Thomas qu'est

M. Bur.

M. José Rossi.

Nous sommes d'accord ! C'est l'unanimité sur la loi Thomas.

Plusieurs députés socialistes.

Contre !

M. José Rossi.

Mais non, pour !

M. le président.

La parole est à Mme la ministre.

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Je comprends bien que l'opposition tente une deuxième manoeuvre après avoir échoué avec la première, mais nous ne lui donnerons pas la possibilité de pouvoir prétendre, après l'éventuelle annulation d'un amendement proposant l'abrogation de la loi Thomas, que cette dernière serait constitutionnelle, donc bonne, alors que nous considérons bien qu'elle est inique et injuste.

Nous ne lui donnerons pas non plus la possibilité d'affirmer que la majorité a voté en faveur du maintien de la loi Thomas, car nous allons inscrire, dans l'article 1er , un engagement du Gouvernement et de sa majorité d'abroger la loi Thomas, comme nous l'ont demandé Maxime Gremetz et le rapporteur.

Vous ne pourrez plus jouer cette politique politicienne que vous affectionnez tant. Ayez au moins le courage de défendre ce qui correspond à vos convictions. Si vous êtes favorables à la retraite par capitalisation - mais je ne crois pas que cet avis soit partagé sur l'ensemble des bancs de l'opposition - dites-le ! Si vous êtes pour le maintien de la retraite par répartition avec une troisième étape d'épargne à long terme, juste, équitable et qui ne siphonne pas la sécurité sociale, vous voterez, dans l'article 1er , l'engagement d'abrogation de la loi Thomas.

La situation sera alors claire et cela vous évitera d'arguer de je ne sais quels bruits de couloir et d'avancer des allégations fausses. Que vous le vouliez ou non, nous défendrons la retraite par répartition, nous abrogerons la loi Thomas et nous mettrons en place des dispositifs qui seront ouverts à tous, justes et équitables.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

La parole est à M. Jacques Barrot.

M. Jacques Barrot.

Madame la ministre, M. Gremetz n'a pas tout à fait tort : il faut qu'une porte soit ouverte ou fermée. La loi Thomas était ce quelle était, mais je ne c omprends pas pourquoi nous avons dû attendre seize mois pour savoir ce que le Gouvernement voulait faire à son égard.

Je pense personnellement qu'une épargne-retraite est nécessaire et j'estime que, pendant ce laps de temps, on aurait pu, si l'on n'était pas manichéen et si l'on ne voulait pas systématiquement détruire l'oeuvre précédente, reconnaître que l'on pouvait partir de ce texte et l'améliorer. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) La majorité est maintenant condamnée à faire un vrai choix que nous attendons depuis seize mois.

Pour avoir fait voter par la commission des finances, avec l'abstention de députés qui appartiennent aujourd'hui à votre majorité, un premier texte qui fut le préalable de la loi Thomas, je considère que le travail que nous avons réalisé a quelque valeur. Vous pouvez le modifier, mais il est trop facile de prétendre que tout ce qu'ont fait les prédécesseurs ne vaut rien et que, tabula rasa, on remet tout en question. Il est bien dommage que cette mentalité ait prévalu pendant seize mois. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

M. le président.

La parole est à Mme la ministre.

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Monsieur Barrot, nous avons pas pour habitude d'annuler tout ce qu'ont fait nos prédécesseurs. Je suis bien placée pour le dire puisque j'ai pris votre succession. Or bien des mesures que vous avez prises sont toujours en vigueur. Il en est exemple ainsi de loi sur le PSD, bien que de nombreux membres de la majorité estiment qu'elle n'est pas bonne. Nous allons nous borner à l'améliorer et à l'aménager.

Nous n'avons donc ni tabou ni a priori . Nous gardons ce qui nous semble bon et nous améliorons ce qui peut l'être. En revanche lorsque nous sommes en désaccord profond sur un sujet, comme cela est le cas pour la philosophie même de cette loi, plutôt que de bricoler, nous préférons abroger et adopter un nouveau texte clair. C'est ce que nous allons faire.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

Sur l'amendement no 423, je suis saisi par le groupe de l'Union pour la démocratie françaiseAlliance d'une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

....................................................................

M. le président.

Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.

Je rappelle que le vote est personnel et que chacun ne doit exprimer son vote que pour lui-même et, le cas échéant, pour son délégant, les boîtiers ayant été cou plés à cet effet.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 28 OCTOBRE 1998

Je mets aux voix l'amendement no 423.

Le scrutin est ouvert.

....................................................................

M. le président.

Le scrutin est clos.

Voici le résultat du scrutin : Nombre de votants ...................................

135 Nombre de suffrages exprimés .................

135 Majorité absolue .......................................

68 Pour l'adoption .........................

0 Contre .......................................

135 L'Assemblée nationale n'a pas adopté.

(Rires et applaudissements.) Article 2

M. le président.

« Art. 2. - I. - Les dispositions du deuxième alinéa de l'article L. 651-2-1 du code de la sécurité sociale ne sont pas applicables au solde cumulé du produit de la contribution sociale de solidarité résultant de l'application du premier alinéa dudit article, constaté au 31 décembre 1998.

« II. Un prélèvement d'un milliard de francs est opéré en 1999 sur le produit de la contribution sociale de solidarité à la charge des sociétés au profit du budget annexe des prestations sociales agricoles.

« Les dispositions du b du 2o de l'article L. 139-2 du code de la sécurité sociale ne sont pas applicables, pour l'exercice 1999, au régime des exploitants agricoles.

« III. Le code de la sécurité sociale est modifié comme suit :

« 1o Au premier alinéa de l'article L. 651-1, les termes : "aux articles L. 621-3, L. 721-1 et L. 723-1," sont remplacés par les termes : "aux 1o et 2o de l'article L. 621-3, ainsi qu'au profit du Fonds de solidarité vieillesse mentionné à l'article L. 135-1," ;

« 2o L'article L. 651-2-1 est ainsi modifié :

« a) Le deuxième alinéa est ainsi rédigé :

« Le cas échéant, le solde du produit de la contribution résultant de l'application des dispositions de l'alinéa précédent est versé au Fonds de solidarité vieillesse mentionné à l'article L. 135-1. »

;

« b) La première phrase du dernier alinéa est complétée par les mots : "et le Fonds de solidarité vieillesse" ;

« 3o Le premier alinéa de l'article L. 135-3 est complété par un 4o ainsi rédigé :

« 4o Une fraction, fixée par arrêté des ministres chargés de la sécurité sociale et du budget, du produit de la contribution sociale de solidarité à la charge des sociétés, dans les conditions prévues à l'article L. 651-2-1. »

« Les dispositions du présent III entrent en vigueur à compter de l'exercice 1999.

« IV. Le code de la sécurité sociale est modifié ainsi qu'il suit :

« 1o L'article L. 135-1 est modifié ainsi qu'il suit :

« a) Après le premier alinéa est inséré un alinéa ainsi rédigé : « Le fonds a également pour mission de gérer un fonds de réserve pour les régimes d'assurance vieillesse visés à l'article L. 222-1 et aux 1o et 2o de l'article L. 621-3. »

;

« b) Avant le dernier alinéa est inséré un alinéa ainsi rédigé : « Les opérations du Fonds de solidarité vieillesse correspondant à chacune des missions respectivement mentionnées au premier et au second alinéa du présent article sont retracées en deux sections distinctes. »

;

« 2o Au premier alinéa de l'article L. 135-2, les mots : "Les dépenses prises en charge par le fonds visé à l'article L. 135-1 sont les suivantes" sont remplacés par les mots : "Les dépenses prises en charge par le Fonds de solidarité vieillesse au titre du premier alinéa de l'article L. 135-1 sont les suivantes" ;

« 3o L'article L. 135-3 est ainsi modifié :

« a) Au premier alinéa, les mots : "Les recettes du fonds sont constituées par" sont remplacés par les mots : "Les recettes du fonds affectées au financement des dépenses mentionnées à l'article L. 135-2 sont constituées par" ;

« b) Au dernier alinéa, les mots : "le Gouvernement soumet au Parlement les dispositions nécessaires pour assurer l'équilibre financier du fonds" sont remplacés par les mots : "le Gouvernement soumet au Parlement les dispositions nécessaires pour assurer l'équilibre financier de cette section du fonds" ;

« 4o Les articles L. 135-4, L. 135-5 et L. 135-6 deviennent respectivement les articles L. 135-1-1, L. 135-4 et L. 135-5 ;

« 5o Après l'article L. 135-1-1, il est créé une section I intitulée : "Opérations de solidarité" et comprenant les articles L. 135-2 à L. 135-5 ;

« 6o Après l'article L. 135-5, il est créé une section II ainsi rédigée :

« Section II

« Fonds de réserve

« Art. L. 135-6 . - Les recettes du fonds affectées aux missions définies au deuxième alinéa de l'article L. 135-1 sont constituées par :

« 1o Une fraction, fixée par arrêté des ministres chargés de la sécurité sociale et du budget, du produit de la contribution sociale de solidarité à la charge des sociétés, dans les conditions prévues à l'article L. 651-2-1 ;

« 2o Tout ou partie du résultat excédentaire de la première section, dans des conditions fixées par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale et du ministre chargé du budget ;

« 3o Toute ressource affectée au fonds de réserve en vertu de dispositions législatives ou réglementaires. »

Sur cet article, plusieurs orateurs sont inscrits.

La parole est à M. Jacques Barrot.

M. Jacques Barrot.

J'aurais aimé, madame la ministre, avant que nous passions à l'examen de cet article, que vous nous disiez comment vous envisagez le calendrier auquel nous devons nous attendre en 1999. Vous avez confié au Plan - instance tout à fait légitime et qualifiée pour la mener à bien - la mise à plat des problèmes concernant les retraites. Pourriez-vous donner quelques précisions, et nous dire si le Parlement, comme nous le souhaitons, et au vu de ce que le Plan aura élaboré, pourra être saisi, ne serait-ce que dans le cadre d'un débat d'orientation, pour que, peu à peu, la prise de consciences e fasse dans le pays sur les enjeux majeurs qui concernent le régime général ? Je rappellerai qu'un premier effort a été fait à la lumière du Livre blanc de Michel Rocard par Mme Veil et par M. Balladur et il est tout à fait souhaitable que, dans ce domaine, de nouvelles adaptations aient lieu en temps voulu. Je ne parle pas des régimes spéciaux dont le sort, pour certains risquent de connaître une situation de plus en plus difficile.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 28 OCTOBRE 1998

Je souhaite donc de plus amples informations et je formule la demande pressante de voir le Parlement débattre, autrement que par le biais d'un article, du projet de loi de financement de la sécurité sociale de la méthode à suivre pour essayer de traiter le problème à fond.

M. le président.

La parole est à M. Jean-Luc Préel.

M. Jean-Luc Préel.

Le problème des retraites est l'un des défis majeurs qu'il nous faut relever. Avec la diminution des naissances, la prolongation de la durée de vie, l'arrivée du « papy-boom » en 2005, et tout le monde est d'accord sur le diagnostic - on sait qu'il faudra environ 150 milliards de francs par an à partir de 2005.

Il est donc grand temps de s'y préparer et, comme certains orateurs socialistes l'on rappelé, gouverner, c'est prévoir. Or, rien n'est plus simple que de prévoir les besoins des retraites puisqu'ils sont liés aux problèmes démographiques. De très nombreux rapports ont été effectués depuis un certain nombre d'années et tout le monde connaît les chiffres. Nous regrettons donc que le Gouvernement ait cru devoir s'accorder un délai supplémentaire d'une année pour demander un rapport complémentaire qui sera, on l'espère utile.

Notre souhait à tous est de sauvegarder la retraite par répartition. Nous l'avons tous dit et répété et, dans notre esprit, la loi Thomas était un complément. Nous vous remercions d'avoir confirmé son principe en votant contre son abrogation. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

Nous espérons maintenant que les décrets d'application verront le jour rapidement parce qu'il n'y a aucune raison d'attendre.

(Sourires.)

Mme Martine David.

Cela ne va pas être bien long !

M. Jean-Luc Préel.

Le régime de retraite des salariés a été conforté par les mesures prises en 1994, le Gouvernement de l'époque ayant pris des mesures de sauvegarde en fonction de quoi le régime de retraites du régime général est à peu près prêt pour l'avenir. Cependant, nous demandons une réelle responsabilisation qui doit passer par une autonomie réelle de cette branche : le conseil d'administration doit pouvoir définir librement les prestations en fonction des cotisations, ou vice versa, comme les partenaires sociaux savent le faire à l'UNEDIC ou dans les régimes de retraites complémentaires.

Il est normal que l'Etat s'occupe de la solidarité par le biais du FSV.

Se pose le problème Jacques Barrot l'a évoqué il y a quelques instants - des régimes spéciaux : SNCF, fonctionnaires ou CNRACL. Et, dans un premier temps, dans un but de transparence, nous demandons la création d'une caisse de retraite des fonctionnaires, gérée de manière paritaire, afin d'y voir plus clair.

Au-dessus du régime de base et du régime complémentaire, nous demandons un troisième étage favorisant l'épargne-retraite et nous avons compris que M. StraussKahn et Mme Aubry y étaient favorables. Il existe d'ailleurs déjà chez les fonctionnaires et dans les institutions de prévoyance.

L'assurance-vie permet à la plupart des salariés, à la plupart des Français, de conforter le régime de retraite, ainsi que l'épargne que vous ponctionnez très régulièrement.

Cette année, vous ne préparez pas l'avenir notamment avec les deux propositions contenues dans l'article 2.

La première proposition vise à ponctionner la CSSS.

Cette caisse a été instaurée pour aider les commerçants et les artisans. Elle connaît un excédent que vous ponctionnez, à notre avis, à tort. Puisqu'il y a un excédent, il y a deux possibilités : soit augmenter la retraite des artisans et des commerçants aujourd'hui particulièrement modeste, soit diminuer les cotisations. Mais ponctionner cet excédent ne nous paraît pas pertinent.

La deuxième proposition tend à créer un fonds de réserve. Nous ne savons ni par qui il sera géré ni quelles ressources y seront affectées ni quel sera son rôle.

Bien consciente, madame la ministre, que, dans votre projet, il n'y avait pas de réponse à la juste inquiétude des retraités actuels et des futurs retraités, vous avez improvisé ce gadget que nous vous demandons, à juste titre, de supprimer.

M. le président.

La parole est à M. Bernard Accoyer.

M. Bernard Accoyer.

Je ne reviendrai pas sur les propos très pertinents de Jean-Luc Préel. Je soulignerai, en revanche, l'aveu que constitue l'article 2.

L'avenir du financement de nos retraites y apparaît au grand jour. Comme vient de le souligner Jacques Barrot, le problème demeure entier et le Gouvernement, depuis seize mois, n'a rien fait pour répondre à cette urgence, particulièrement inquiétante pour l'avenir des jeunes générations. Or un certain nombre de réformes ont été engagées, notamment la réforme des retraites des salariés du privé en 1993, sans laquelle les déficits auxquels nous devrions faire face, notamment pour le régime vieillesse, seraient sans commune mesure avec ce que l'on connaît.

En 1997, Alain Juppé et Jacques Barrot avaient fait adopter la loi Thomas que nous venons d'évoquer longuement. Il y a trente ans, ont été instaurés les régimes complémentaires par capitalisation, jusque-là réservés aux agents et anciens agents des collectivités publiques. Par un amendement déclaré irrecevable, mais dont nous espérons que le Gouvernement se saisira dans l'avenir, nous souhaitions étendre cette possibilité aux salariés du secteur privé. Des voies sont déjà ouvertes et il convient d'aller plus loin. Au-delà du détournement de fonds que constitue l'affectation des excédents de la CSSS, comme l'a expliqué Jean-Luc Préel, en direction du régime par répartition, j'aimerais savoir ce qui se cache derrière cette cotisation de solidarité des entreprises. Il s'agit, en réalité, d'une taxation sur le chiffre d'affaires. Or, madame la ministre, je ne sais pas si vous avez bien mesuré la portée d'une telle décision par le biais de cet article quelque peu improvisé. En réalité, en taxant le chiffre d'affaires, vous t axez la consommation pour financer la protection sociale.

Madame la ministre, pour une fois, je suis d'accord avec vous. Car si l'on veut lutter contre le dumping social, contre les délocalisations, il faut prendre en compte le fait que ce qui handicape la compétitivité de nos entreprises, c'est le poids des charges sociales, l'âge de notre société et la demande en soins de santé. Si l'on veut à la fois lutter contre les délocalisations et contre le travail au noir c'est un point sur lequel nous sommes unanimement d'accord - il faut explorer la voie de l'instauration d'une taxation sur la consommation. Elle pourrait permettre d'harmoniser les prélèvements sociaux, au niveau européen car nous n'échapperons pas non plus à cette harmonisation.

Madame la ministre, sur cette question de fond particulièrement importante pour l'avenir social du pays, je serais heureux que vous complétiez l'information du Parlement.

M. le président.

La parole est à M. Yves Bur.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 28 OCTOBRE 1998

M. Yves Bur.

Le rapport Briet, qui date de 1995, et donc est toujours d'actualité, relève que les ratios retraités-cotisants seraient pour les prochaines décennies en forte évolution. En l'an 2040, ce ratio se situerait entre 0,77 % et 0,90 %. Notamment, pour les régimes de fonctionnaires et la CNRACL, les besoins de financement sont évalués pour 2015 à vingt, voire trente points de cotisation. La situation est moins catastrophique pour les régimes des salariés du privé.

Or l'article 2 se borne à mettre à contribution la CSSS prévue initialement pour financer, comme l'a rappelé mon collègue Jean-Luc Préel, le déficit des caisses de retraite des artisans, des petits commerçants, des travailleurs indépendants, en général.

Il se trouve que ces régimes ont peut-être moins de besoins par rapport aux rentrées de la CSSS. Et plutôt que d'augmenter les retraites très faibles des petits commerçants et des petits artisans, vous préférez abonder le fonds de réserve au sein du Fonds de solidarité vieillesse, abondement somme toute mineur, mais très symbolique. Je prends le pari aujourd'hui que le fonds de CSSS continuera d'augmenter dans les prochaines années et sera l'un des contributeurs du fonds de réserve prélevé sur le chiffre d'affaires des entreprises.

Cette surcotisation des entreprises risque d'ailleurs de ne pas suffire ; il ne serait pas surprenant, pour assurer la pérennité des régimes de répartition dont nous partageons l'objectif, qu'elle soit également appliquée aux salariés.

Nous déplorons l'aspect purement symbolique du fonds de réserve. N'aurait-il pas mieux valu prendre le temps d'un plan d'ensemble ? Ces 2 milliards sont bien peu de choses par rapport aux 300 milliards dont les régimes de répartition auront besoin à partir de 2005.

Nous ne pouvons que regretter également, d'autres l'ont déjà dit, les imprécisions quant à son mode de gestion et son financement dans le futur. Il aurait été plus cohérent de définir un plan global que de se résoudre à cette annonce symbolique. Ce plan global, que j'espère, après avoir entendu vos explications tout à l'heure, devra indiquer clairement les places respectives de la répartition, que nous sommes partisans de maintenir, et d'une capitalisation ouverte à tous, qui viendra en complément.

Ce plan devra aussi prendre en compte l'avenir des régimes spéciaux ; notre groupe propose, dans un souci de transparence, de créer un régime cantonné, pour identifier les besoins. Il faudra naturellement que vous vous prononciez aussi sur l'évolution de durée de l'activité, qui a forcément des répercussions sur l'âge de la retraite : tous les autres pays ont évolué sur ce point.

Sur les fonds de pension, le groupe communiste a pu croire un moment que le Gouvernement faisait machine arrière ; mais les propos du ministre de l'économie et des finances m'ont paru, de ce point de vue, plutôt rassurants. Il n'a pas parlé d'un fonds de capitalisation généralisée, égalitaire, mais bien de contributions individualisées en fonction des possibilités des salariés.

En permettant la création de ce troisième étage de notre système de retraites, nous répondrons aussi à un devoir d'égalité entre les salariés. Les agents de la fonction publique peuvent, en effet, bénéficier d'un régime de capitalisation, pour peu qu'ils justifient d'un mois minimum de rémunération dans le cadre de la fonction publique. Ce fonds, particulièrement attractif, géré par la Caisse des dépôts et consignations, offre des avantages fiscaux non négligeables, puisque les contributions sont intégralement déductibles du revenu. Vous devez prendre en compte ce qui existe déjà pour les agents de la fonction publique,...

M. le président.

Veuillez conclure, monsieur Bur.

M. Yves Bur.

... et étendre cette possibilité à l'ensemble des salariés, qui ont droit au même traitement.

Enfin, l'instauration des fonds de capitalisation, que nous attendons avec impatience, aura un rôle non négligeable pour l'économie, comme M. le ministre des finances l'a d'ailleurs rappelé tout à l'heure.

M. le président.

La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz.

Nous poursuivons l'examen de la partie relative à la branche vieillesse du projet de loi. Il faut d'abord rappeler que, pendant des années, pour compenser la diminution des recettes de la sécurité sociale découlant du chômage, de la baisse des salaires et de la précarité de l'emploi, on a imposé aux retraités des sacrifices qui ont abouti à une précarisation croissante de leur situation. Les mises à contribution supplémentaires, la baisse de leur pouvoir d'achat depuis 1993 - effet de la loi de M. Balladur, qui instaura l'indexation des pensions de retraite sur l'évolution des prix -, n'ont fait que contribuer à la dégradation de leurs conditions de vie ; sans oublier que beaucoup d'entre eux, en plus de subvenir à leurs besoins, participent également à ceux de leurs enfants et de leurs petits-enfants.

Une telle démarche a naturellement ses limites et nous devons attacher toute l'importance qu'il convient à la mobilisation des retraités de la semaine passée. Le problème demeure.

Les avis peuvent être partagés quant à l'ampleur des conséquences démographiques sur les besoins de financement des retraites. Il n'en reste pas moins qu'il faudra décider quelle part des richesses produites sera désormais consacrée au paiement des retraites, qu'il s'agisse des retraites par répartition ou des retraites par capitalisation.

Nous sommes attachés, nous l'avons dit et je le redis, au système par répartition, comme la majorité de nos concitoyens : c'est le plus juste, le plus solidaire et le plus efficace. Nous prenons acte avec satisfaction de la volonté du Gouvernement de le consolider et de le pérenniser.

Ces raisons nous conduisent à refuser catégoriquement le recours aux fonds de pension, tels qu'ils sont conçus.

C'est sans doute le plus précaire de tous les systèmes de retraite par capitalisation.

Nous avions émis des réserves sur le fonds de réserve - c'est le cas de le dire (Sourires) - et même déposé un amendement à ce sujet, tant nous nous interrogions sur son abondement, sur son objectif et sur la manière de le gérer.

Les débats que nous avons eus précédemment, et particulièrement celui d'à l'instant, l'engagement pris par le Gouvernement d'abroger la loi Thomas, que nous allons inscrire dans l'article 1er du rapport annexé, l'adoption par la majorité de la commission d'un de nos amendements sur les modalités de gestion du fonds, proposant d'instituer un conseil de surveillance élargi où participeraient toutes les parties intervenantes, organisations syndic ales et patronat compris, autant de points qui conduisent à penser que, en dépit des efforts qui nous attendent encore, nous avons progressé ; pour tout dire, nous nous sentons rassérénés, tout au moins plus rassurés quant à l'avenir des retraites par répartition.

M. le président.

La parole est à M. François Goulard.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 28 OCTOBRE 1998

M. François Goulard.

Je ne reprendrai pas les différents points que j'ai développés ce matin. Le FSV nous paraît un curieux réceptacle pour une entreprise aussi importante que celle qui consiste à tenter de sauver nos régimes de retraite par répartition.

Pour ma part, je suis favorable au principe de la constitution d'un fonds de réserve provisionné pour faire face aux déséquilibres certains à venir. Or, justement parce qu'il s'agit d'une tâche considérable, d'une affaire d'une importance nationale, je comprends fort mal pourquoi le Gouvernement n'a pas choisi un outil offrant davantage de visibilité pour nos compatriotes et une plus grande solennité à la politique que l'on prétend mettre en oeuvre. « Que l'on prétend », ai-je dit : en effet les 2 milliards de francs affectés pour l'instant à ce fonds ne constituent en rien une opération de sauvetage, contrairement à ce qui a été avancé.

Quoi qu'il en soit, et faisant crédit au Gouvernement de sa volonté d'y affecter des sommes plus importantes, je crois qu'il fallait concevoir un autre système qu'un fonds aux objectifs purement techniques. Il convenait également, pour la première mise initiale, de choisir autre chose que cette petite partie du reliquat de la malheureuse CSSS qui, quoi qu'on en pense, est un impôt lourd pour ceux qui l'acquittent, mais totalement marginal dans notre système fiscal. Tant sur l'instrument que vous choisissez, en l'occurrence une simple section du FSV, que sur le montant de la première ressource qui y est affectée, le Gouvernement commet visiblement une erreur de choix, une erreur de casting, allais-je dire. De la même façon, l'importance que vous entendez attacher à cette affaire s'accorde mal avec le choix, critiquable, de laisser à un simple arrêté - certes conjoint du ministre chargé du budget et du ministre chargé de la sécurité sociale, le secrétaire d'Etat au budget - le soin de déterminer la quotité de CSSS affectée au fonds de réserve.

Une décision aussi grave que le sauvetage des régimes de retraite par répartition exigeait que toutes les opérations d'affectation de ressources au FSV relèvent de la loi de financement de la sécurité sociale, pour bien illustrer ce caractère de gravité que ce problème revêt à vos yeux.

M. le président.

La parole est à M. Germain Gengenwin.

M. Germain Gengenwin.

Madame la ministre, force m'est de redire ce qui a déjà été dit, tant l'article 2, qui institue un fonds destiné à consolider les régimes par répartition, suscite inquiétudes et interrogations.

Au regard de la gravité de la situation de ces régimes, nous sommes nombreux à penser que le dispositif proposé, doté de 2 milliards de francs, n'est pas à la hauteur - vous-même l'avez reconnu, madame la ministre. Deux milliards de francs, c'est déjà quelque chose, me direzvous ; c'est une mise en route, il suffira de l'alimenter.

Mais, comparé à l'énormité des sommes nécessaires, cela représente peu de choses.

Dans l'immédiat, les ressources du fonds sont constituées à partir des excédents de la contribution sociale généralisée sur les entreprises. Les prévisions de recettes de la CSSS s'élèvent 16,1 milliards de francs pour 1998 : ce n'est tout de même pas rien. Ces excédents devaient à l'origine être versés d'abord au profit de la CANAM, de l'ORGANIC et de la CANCAVA, donc aux régimes des artisans et commerçants, au prorata et dans la limite de leurs déficits comptables, puis au BAPSA et à d'autres régimes non salariés.

Votre article 2 vient modifier ce dispositif d'affectation en substituant aux bénéficiaires du second rang, le BAPSA et les autres régimes non salariés, - le fonds de solidarité vieillesse. En somme, le FSV, au sein duquel est créé le fonds de réserve, aura vocation à recevoir l'intégra lité des excédents de la CSSS après affectation.

Or, aux termes de l'article L.

135-1 du code de la sécurité sociale, le FSV a pour mission de prendre en charge les avantages d'assurance vieillesse à caractère non contributifs relevant de la solidarité nationale. Il n'a donc pas vocation à recueillir les fonds de réserve. Ces excédents ne sont pas près de se tarir, comme le fait remarquer la commission des comptes de la sécurité sociale dans son dernier rapport : « Ainsi, compte tenu de la dynamique de la recette de CSSS qui augmente au rythme du PIB marchand et des besoins prévisibles des régimes, l'excédent de CSSS constaté depuis quelques années apparaît de plus en plus comme une donnée structurelle. » Autrement dit, le produit de la CSSS est

largement supérieur aux besoins. Il serait donc logique, comme l'a fait remarquer Jean-Luc Préel, d'alléger les cotisations en conséquence.

D'après l'exposé des motifs, le fonds de réserve pourrait être abondé par d'autres sources de financement.

Lesquelles ? Il a été question d'une surcotisation. Cette possibilité, que vous n'avez pas exclue ; ce n'est guère compatible avec votre annonce d'allégement des charges.

Pourtant, la loi de financement de la sécurité sociale dont nous discutons devrait fournir au Parlement les éléments essentiels afin de choisir clairement au lieu d'être amené à se prononcer sur des recettes virtuelles.

Un grand responsable syndical que je nommerai pas a proposé d'abonder ce fonds par une surtaxe sur les heures supplémentaires. J'ose espérer, madame la ministre, que v ous ne partagez pas cette opinion. Votre projet mécontente beaucoup de monde, y compris les partenaires sociaux : alors que les régimes de répartition sont gérés paritairement, votre fonds de réserve reste placé sous l'autorité de l'Etat. Cela n'a rien de cohérent...

Pour toutes ces raisons, nous avons proposé un amendement de suppression de l'article 2.

M. le président.

La parole est à M. Pascal Terrasse.

M. Pascal Terrasse.

Je voudrais pour commencer vous faire part de mon sentiment sur à ce qui s'est passé il y a quelques instants. J'ai l'impression que la droite n'a plus grand-chose à dire.

M. Bernard Accoyer.

C'est terrassant !

M. Pascal Terrasse.

Plus grand-chose à dire d'abord aux familles, aux personnes qui vivent en commun et maintenant aux retraités. Passant des jeux politiques aux petits jeux politiques, faute de discours, elle s'amuse...

Je voudrais rendre hommage tout particulièrement à Maxime Gremetz qui a eu raison en commission de nous rappeler combien la loi Thomas est dangereuse pour les retraités.

M. Bernard Accoyer.

Il vous a poussé à faire ce que vous avez fait pour les fonds de pension !

Mme Martine David.

Laissez-le parler !

M. Pascal Terrasse.

Maxime Gremetz nous a justement rappelé le message des milliers de retraités dans la rue la semaine dernière : ils ne veulent pas des fonds de pension. Il faut le répéter. J'espère que, dans le courant de cette semaine, nous aurons l'occasion de revenir sur la loi Thomas et que son abrogation sera inscrite dans le rapport annexe.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 28 OCTOBRE 1998

J'en viens au fonds social vieillesse. Le FSV, créé le 22 juillet 1993, est un établissement public de l'Etat à caractère administratif, disposant d'une autonomie administrative, budgétaire, financière et comptable. C'est en son sein que sera créé, par la loi, un fonds de réserve. On sait que ses ressources, pour cette année, proviennent essentiellement de la CSSS. Comme vient de le rappeler un de nos collègues, la CSSS représente un montant effectivement important qui pèse sur les entreprises. Rappelons toutefois que c'est l'opposition, majorité d'hier, qui l'a alourdi en 1995 !

M. Bernard Accoyer.

C'était pour équilibrer la CANCAVA !

M. Pascal Terrasse.

Il s'agit bien d'excédents après couverture des déficits des caisses, notamment de l'ORGANIC et de la CANCAVA, qui profitent aux artisans et aux commerçants.

Le fonds de réserve sera de 2 milliards de francs. J'espère que d'autres financements, durables, structurels, viendront le provisionner.

Je veux répéter les propos tenus en commission à l'adresse du Gouvernement. Pour l'instant, le fonds de réserve reste intégré au fonds social vieillesse et les partenaires sociaux et les élus de la nation n'y sont pas représentés. Il est nécessaire, pour une meilleure visibilité, de le doter d'un véritable conseil de surveillance ouvert à l'ensemble des partenaires sociaux et aux élus de la nation, qui auront, si ce fonds doit perdurer, à le gérer au mieux et surtout conformément à sa vocation tournée vers les retraites et les régimes par répartition.

M. le président.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Alfred Recours, rapporteur pour les recettes et l'équilibre général.

Rappelons que l'article 2 du projet de loi traite d'abord de l'affectation au budget des prestations sociales agricoles, d'une partie des recettes de la CSSS, à hauteur d'un milliard de francs. Cela va permettre de revaloriser notablement les retraites agricoles. Ce premier point me paraît à lui seul justifier le vote de cet article.

Est ensuite proposée une modification des règles d'affectation de la CSSS, à la charge des sociétés, dans le but de garantir en priorité l'équilibre financier des régimes non salariés, CANAM, et CANCAVA, en finançant leurs déficits éventuels.

Cette garantie assurée, l'excédent bénéficie automatiquement aux autres régimes, avec une diversification de cette participation qui, rappelons-le, est assise sur le chiffre d'affaires des entreprises.

N'est-ce pas là encore une piste possible pour des modifications à venir de l'assiette des cotisations patronales ? Après tout, on pourrait aussi envisager une hausse, par exemple, du taux de la CSSS dans le même temps où on diminuerait les cotisations patronales à due concurrence.

M. Pascal Terrasse.

Ce serait judicieux !

M. Alfred Recours, rapporteur pour les recettes et l'équilibre général.

J'insiste sur ce point : nous sommes d'emblée dans un dispositif qui peut être évolutif.

Troisièmement, je souligne que le fonds de réserve créé à cette occasion pourra être financé non seulement par les excédents de CSSS mais aussi par les excédents de la section de solidarité ainsi que - ce qui est très positif dans le cadre de la préparation de la réforme de l'assiette des cotisations patronales - par toute autre ressource déterminée par voie législative ou réglementaire.

Bien sûr, le moment venu, nous aurons à présenter des propositions pour appliquer cette disposition législative qui donne une base légale à l'abondement du fonds de réserve. C'est une raison de plus de voter l'article 2, qui permettra la revalorisation des retraites agricoles, en même temps que la pérennisation de celles des professions non agricoles non salariés et de celles des salariés.

M. le président.

La parole est à Mme la ministre.

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Je voudrais répondre aux différents orateurs et à M. Barrot qui m'a interrogée sur le calendrier des réformes.

Il faut, nous en sommes tous conscients, trouver des solutions rapidement, ce qui ne veut pas dire dans la précipitation. Car nous savons que ce n'est pas facile ; sinon nous l'aurions fait, les uns et les autres, depuis longtemps.

Nous espérons parvenir à un diagnostic partagé par le plus de monde possible, puisque, je l'ai dit à plusieurs reprises, le commissariat au Plan, à partir d'un premier diagnostic, consulte l'ensemble des organisations patronales, syndicales et l'ensemble des caisses concernées. A partir de ce diagnostic, il nous proposera, au plus tard au mois de février 1999, les scénarios du futur : comment faire avancer les régimes actuels pour qu'en 2005, ils s'autorégulent ? Comment en changer les règles ? Et comment trouver par ailleurs - c'est l'objet du fonds de réserve - des moyens complémentaires indispensables pour faire évoluer les choses.

Le Gouvernement souhaite - mais ça ne dépend pas que de lui - un grand débat public avec l'opinion et avec l'ensemble des groupes politiques. Je le répète - c'est aussi la conviction du Premier ministre - si nous arrivions à travailler ensemble pour préparer les trois étages dont nous avons parlé tout à l'heure, nous n'aurions pas perdu notre temps et les Français nous en sauraient gré à tous.

Nous espérons, dans le courant de l'année prochaine, nous mettre d'accord sur des règles, soit par le biais d'une loi pour que l'ensemble des régimes avance dans le même sens, soit par la voie conventionnelle pour que chaque régime progresse vers des objectifs et des règles communs.

Effectivement, il faut aller vite et j'espère que ce sera fait l'année prochaine, mais, encore une fois, tout ne dépend pas de nous.

Après le rapporteur, je répondrai à M. Accoyer et à M. Préel que nous ne changeons pas les règles de la CSSS. Nous n'en augmentons par le taux, cette année, et nous ne lésons personne...

M. Charles de Courson.

Mais si !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

... puisque les régimes non salariés non agricoles vont être d'abord servis. Et c'est bien parce qu'ils sont en excédent que l'argent qui reste va habituellement vers le FSV. Si celui-ci est lui-même en excédent l'argent va vers le budget de l'Etat. Comme nous souhaitons que ces sommes restent au sein de la sécurité sociale, surtout au moment où nous recherchons des financements pour nos retraites, nous avons décidé de l'inscrire dans le texte jusqu'à ce qu'il soit modifié, alors que jusqu'à présent, nous négociions, année après année, avec le ministère des finances pour décider de ce qui devait revenir respectivement au budget de l'Etat et à la sécurité sociale. Selon nous, les excédents de la CSSS doivent rester dans la sécurité sociale et, pour la plus grande part, aller abonder le fonds de réserve.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 28 OCTOBRE 1998

Je partage l'opinion de M. Goulard : le fonds de réserve n'a pas vocation à demeurer en l'état. Nous devrons réaliser un fonds de retraite qui soit alimenté par divers courants - Dominique Strauss-Kahn a suggéré, par exemple, les parts sociales des caisses d'épargne - et qui soit géré selon des règles claires et transparentes. Mais c'est le débat que nous aurons dans les mois qui viennent qui nous permettra, du moins je l'espère, de mettre en place ce fonds.

Si vous voulez dire que ce n'est pas au sein du FSV qu'il faut gérer en permanence un fonds aussi important que le fonds de retraite, je suis d'accord. Cette année nous n'avons voulu qu'adresser un signe : les excédents vont vers les retraites, car c'est là notre priorité. Mais il est bien clair qu'il faudra gérer ces sommes dans un fonds qui sera certainement autonome, si tout le monde en est d'accord, et avec des modes de gestion et de contrôle tout à fait transparents.

Dans cette attente - peut-être quelques mois, peut-être une année, tout dépendra de ce que nous pourrons décider ensemble l'année prochaine - nous avons porté ces sommes au FSV parce qu'un fonds consacré à la vieillesse, un fonds de solidarité, nous parraissait le meilleur endroit pour les recueillir. D'ici que nous trouvions la solution définitive, je ne suis pas opposée à ce que nous complétions le conseil de surveillance avec les organisations patronales et syndicales, pour bien signifier que, demain, dans le cadre d'un fonds autonome, elles donneront leur avis sur l'utilisation de ces sommes. Après leur avoir donné un réceptacle temporaire, nous construirons ensemble, je l'espère, à partir de l'année prochaine, un vrai fonds pour nos retraites.

Enfin, monsieur Préel, il est exact que l'épargne-retraite existe déjà chez les fonctionnaires avec la PREFON, et aussi pour les hospitaliers avec la CGOS. En fait, ce que nous souhaitons, c'est offrir la possibilité à tous les Français, et pas seulement à certains d'entre eux, de placer de l'épargne à long terme, de manière collective, avec des avantages fiscaux sans doute, mais sans que cela mette en péril nos régimes par répartition. Donner à tous les Français, selon des règles probablement différentes, ce qu'ont aujourd'hui les fonctionnaires et les hospitaliers, voilà l'objectif qui est le nôtre. C'est pourquoi, monsieur Barrot, nous abrogerons la loi Thomas dans le DMOS.

Voilà ce que je souhaitais répondre aux diverses interventions, tout en rassurant Maxime Gremetz et Pascal Terrasse sur le conseil de surveillance.

M. le président.

MM. Préel, Goulard, Accoyer et les membres des groupes de l'Union pour la démocratie française-Alliance, Démocratie libérale et Indépendants, et du Rassemblement pour la République ont présenté un amendement, no 370, ainsi rédigé :

« Supprimer l'article 2. »

La parole est à M. Jean-Luc Préel.

M. Jean-Luc Préel.

Il n'y a pas que la gauche à être plurielle ! Les trois groupes de l'Alliance se sont unis pour présenter des amendements importants.

Le problème des retraites est réel, et nous en sommes tous conscients. Je fais observer que les institutions de p révoyance ont, depuis longtemps, des régimes de retraites complémentaires par capitalisation, le fameux

« troisième étage ».

Si nous voulons supprimer l'article 2, c'est qu'il contient deux mesures qui ne nous conviennent pas du tout.

C'est d'abord, la ponction sur la C SSS, même si elle représente un progrès par rapport à l'année dernière. En effet, alors que vous aviez décidé de ponctionner le régime des clercs de notaires, nous avions déposé des amendements précisant que le prélèvement ne pourrait pas aller au-delà de l'excédent ; vous les aviez refusés.

Pourtant, prélever au-delà de l'excédent, c'est mettre une caisse en déficit ! Ce n'est pas le cas en l'occurrence, nous le reconnaissons, mais le prélèvement sur la C SSS ne nous satisfait pas pour autant. Il semble, par ailleurs, que la MSA serait exclue à partir de 2000, ce qui n'est pas souhaitable.

Quant à créer un fonds de réserve, nous ne sommes pas d'accord, car ce n'est pas une vraie réponse au problème des retraites. C'est un gadget - symbolique, avezvous dit, madame la ministre. Nous en demandons la suppression pour que tout soit bien clair. Il faut préparer en urgence la pérennité de nos retraites par répartition et, effectivement, les compléter, par le troisième étage dans les plus brefs délais.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Denis Jacquat, rapporteur pour l'assurance vieillesse.

Il subsiste, c'est vrai, de nombreuses zones d'ombre dans le dispositif de fonds de réserve qui nous est proposé.

M. François Goulard a d'ailleurs insisté ce matin sur l'importance, visuelle, que devait avoir ce texte.

Faut-il pour autant supprimer tout l'article 2 et renoncer à une idée qui mérite débat ? La mesure proposée est symbolique, selon Mme la ministre elle-même qui vient de la qualifier aussi de « signe ». Certes, ledit fonds de réserve ne répond pas parfaitement au problème majeur qui est soulevé, à savoir celui de l'avenir de nos retraites.

Mais nous sentons, depuis le début de ce débat, que nous voulons tous, d'une part, sauver nos retraites de base dans le cadre de la répartition...

M. Pascal Terrasse.

Très bien !

M. Denis Jacquat, rapporteur pour l'assurance vieillesse.

... et, d'autre part, les consolider, les conforter par une capitalisation complémentaire - le fameux troisième étage ! Mais surtout, et c'est extrêmement important, nous voulons que ce « troisième étage » soit accessible à tous ou, en tout cas, que personne n'en soit exclu.

Je le disais en préambule de mon rapport sur l'assurance vieillesse, la mission Charpin débouchera sur une commission, qui devra présenter des propositions. A quelques jours du quatre-vingtième anniversaire de l'armistice du 11 novembre 1918, je souhaite ardemment que cette mission commission soit la « der des ders » (Sourires) et qu'enfin, on prenne une décision ! En tout état de cause, la commission a émis un avis négatif sur cet amendement.

M. le président.

La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

Il est tout à fait excessif de vouloir supprimer cet article au motif que la création de cette structure de cantonnement et la dotation budgétaire qui lui est affectée cette année seraient symboliques ! Et si on peut juger que cette dernière est insuffisante, on ne saurait taxer la création du cantonnement de « symbolique ».

Pour mieux apprécier la dotation, comparons deux chiffres.

Au vu des économies réalisées sur le régime vieillesse grâce à la mesure prise en 1993 par le gouvernement d'Edouard Balladur, qui avait augmenté le nombre d'annuités, et dont on peut penser ce que l'on veut...


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 28 OCTOBRE 1998

M. Bernard Accoyer et M. Charles de Courson.

C'était courageux !

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

... je ne crois pas que quiconque sur ces bancs puisse trouver cette mesure symbolique : l'année dernière, les économies générées ont été d'un milliard et demi de francs ; cette année, elles sont de deux milliards et l'année prochaine, elles s'éléveront à deux milliards et demi.

M. Bernard Accoyer.

Ça fait 1,5 % de la dette sociale !

M. Jérôme Cahuzac.

Alors, un peu de cohérence : si la mesure proposée dans le présent article, qui porte sur 2 milliards de francs, est symbolique, celle de 1993 que vous qualifiez de courageuse, l'est aussi ! En fait, la présente disposition permet de garantir les régimes par répartition en en provisionnant les besoins de financement.

C'est dire qu'elle est au moins aussi structurelle que celle de 1993. Cessons de la qualifier de symbolique ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Mon avis est évidemment négatif. En parlant de symbole, je voulais plutôt dire que s'efforcer de consolider les régimes par répartition constituait un « signe fort ». Pour le reste, je suis d'accord avec M. Cahuzac.

M. le président.

La parole est à M. Yves Deniaud.

M. Yves Deniaud.

Outre que nous contestons le principe même de cet article, la troisième source de financement qu'il prévoit est d'un flou inadmissible, au regard de l'esprit que la Constitution a voulu donner aux lois de financement de la sécurité sociale. Et le complément d'information que Mme Aubry vient de nous donner à propos des fonds provenant de la mutualisation éventuelle des caisses d'épargne n'est pas fait pour nous rassurer, bien au contraire.

D'abord, la loi de financement de la sécurité sociale étant destinée à déterminer, avec la plus grande précision, les ressources à affecter à ce fonds, si par malheur il était créé, on ne saurait admettre l'imprécision des ressources qui lui seraient affectées « en vertu des dispositions législatives ou réglementaires », autrement dit éventuellement sans que le Parlement soit consulté ! On pourrait y incorporer ainsi des recettes de bric et de broc ! Quant à évoquer les caisses d'épargne, c'est proprement scandaleux. On assiste à une course de vitesse entre deux ministres, celui de l'économie et des finances et celui des affaires sociales et de l'emploi, pour savoir lequel mettra la main sur le magot de l'épargne populaire des Français, avant même que nous ayons débattu de la réforme des caisses d'épargne.

M. le président.

La parole est à M. Bernard Accoyer.

M. Bernard Accoyer.

En tant que porte-parole du RPR, cosignataire de l'amendement de suppression, je veux souligner combien la création de ce fonds de réserve est improvisée. De plus, le prélèvement sur l'excédent de la CSSS constitue un détournement de son objet. Surtout, je veux souligner que la mesure est totalement surréaliste.

Savez-vous, monsieur Cahuzac, que si vous aviez procédé à un calcul actuariel pour évaluer les besoins de consolidation du régime par répartition, à l'échéance de 2010, vous seriez arrivé à une somme de plusieurs milliers de milliards ?

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

Mais nous y serons !

M. Bernard Accoyer.

Certainement pas, en démarrant à 2 milliards cette année ! D'autant que les excédents qui devraient nourrir ce fonds sont très hypothétiques...

Ce n'est plus du symbole, mais de la gesticulation...

M. Gérard Terrier.

Et vous êtes maître en la matière !

M. Bernard Accoyer.

... et elle est inacceptable s'agissant de l'avenir des retraites. Voilà pourquoi nous souhaitons supprimer l'article 2.

Quant à Mme Aubry, j'ai apprécié qu'elle reprenne la proposition du RPR de faire bénéficier tous les Français, en particulier les salariés du secteur privé, des régimes complémentaires de retraite par répartition. L'amendement que nous avions proposé à cet égard a été rejeté par la commission des finances alors qu'il tendait, selon nous, à introduire un peu d'équité. Je me réjouis qu'un certain consensus se fasse sur ce voeu, même si j'aurais préféré q ue le Gouvernement montre d'emblée sa volonté d'équité, en faveur notamment des salariés du secteur privé, en faisant sien notre amendement. Il aurait pu le faire, car la clémence du Conseil constitutionnel quant aux décisions concernant la loi de financement de la sécurité sociale est bien connue.

Néamoins, je me réjouis que Mme la ministre ait annoncé officiellement, aujoud'hui, devant la représentation nationale, qu'elle avait choisi d'aller dans cette direction.

M. le président.

La parole est à Mme la ministre.

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Je ne peux pas laisser dire cela ! Décidément, M. Accoyer fait les questions et les réponses. Je suis donc obligé d'expliquer que je ne suis pas d'accord avec lui, alors que je viens de reconnaître que je voyais certains avantages à ce qu'il avait dit ! Il est vraiment très difficile de se mettre sur votre ligne, monsieur Accoyer !

M. Bernard Accoyer.

J'essaie de me mettre sur la vôtre !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

J'ai dit tout à l'heure que les fonctionnaires et les agents hospitaliers avaient des systèmes d'épargne à long terme qui bénéficiaient d'un certain nombre d'avantages. Il s'agit de la PREFON et de la CGOS. Je rappelle que cela se justifie par le fait que les fonctionnaires - on devrait s'en souvenir quand on critique les agents publics et les fonctionnaires - ne cotisent pas sur leurs primes et que leurs retraites sont, par conséquent, beaucoup plus faibles.

C'est la raison pour laquelle ces régimes leur donnent des avantages complémentaires. Ce que j'ai dit, en revanche, c'est que ce ne sont évidemment pas ces systèmes-là que nous allons reprendre pour les appliquer à l'ensemble des Français. Nous voulons faire en sorte que chaque Français puisse avoir accès à une épargne à long terme, - ce que ne permettait pas la loi Thomas, cela dit, bientôt elle n'existera plus - qui lui garantisse un revenu complémentaire à sa retraite par répartition.

Quant aux modalités, monsieur Accoyer, nous n'en sommes pas là. Soyons déjà d'accord sur les principes, avant d'envisager quelles modalités nous appliquerions à ces fonds.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 370.

(L'amendement n'est pas adopté.)


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 28 OCTOBRE 1998

M. le président.

MM. Préel, Gengenwin, Bur, Blessig, Foucher et Jegou ont présenté un amendement, no 306, ainsi rédigé :

« Supprimer le premier alinéa du II de l'article 2. »

La parole est à M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson.

Au travers de notre amendement, nous voulons poser une question simple : pourquoi prélever un milliard sur l'excédent du produit de la CSSS pour l'affecter au BAPSA, et pourquoi priver le régime agricole du bénéfice des excédents de la CSSS à partir de 2000 ? Mes chers collègues, saviez-vous que le montant de la CSSS qui provient du monde agricole, c'est-à-dire essentiellement des structures mutualistes et du Crédit agricole, s'élève, grosso modo, à un peu plus d'un demi-milliard.

Dans ces conditions, pourquoi priver le régime agricole de toute possibilité de bénéficier des excédents de la

CSSS ? Par ailleurs, d'après le texte du Gouvernement, on va prélever un milliard pour réduire la subvention d'équilibre que verse le ministère de l'agriculture. En effet, mes chers collègues, si vous vous reportez à mon rapport sur le BAPSA, vous verrez que la subvention de l'Etat passe de 7,8 milliards à 4,9 milliards, soit une baisse de 2,9 milliards. Un milliard s'explique par le prélèvement à titre exceptionnel sur la CSSS, et le complément par une surévaluation des recettes de TVA. En conséquence, si nous votons le premier alinéa, nous allons poser au ministre de l'agriculture un énorme problème l'année prochaine.

Comment va-t-il financer le BAPSA, alors même que nous devons continuer - et tout le monde est d'accord sur les bancs de cet hémicycle - à financer les retraites agricoles ? Ceux qui connaissent un peu la mécanique budgétaire savent que le ministre de l'agriculture devra redéployer au moins une partie du milliard qu'il va falloir trouver pour compenser la perte du même montant sur les autres crédits du budget du ministère de l'agriculture ! C'est comme cela que ça va se passer. Ce n'est pas que nous soyons contre le principe - nous avons déposé un amendement qui tend au contraire à pérenniser le prélèvement sur le solde de la CSSS pour l'affecter au régime agricole, qui est la logique même du système de la CSSS. Mais ne faisons pas une politique de gribouille en croyant que nous assurerons durablement le financement des retraites a gricoles, avec un prélèvement d'un milliard non reconductible en 1999.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Denis Jacquat, rapporteur pour l'assurance vieillesse.

Il n'y aura pas de ponction de la CSSS au détriment des régimes de non-salariés, donc non agricoles, compte tenu du report de l'excédent de 1998 sur 1999, et en l'état des prévisions disponibles.

M. Germain Gengenwin.

C'est téméraire de l'affirmer !

M. Denis Jacquat, rapporteur pour l'assurance vieillesse.

Le montant de la CSSS à distribuer en 1999 permettra de combler les déficits prévisionnels des régimes précités et d'attribuer, comme vient de le dire M. de Courson, un milliard de francs au BAPSA. Par ailleurs, il n'est pas normal que le BAPSA reçoive une compensation financière, puisqu'il perd la qualité d'attributaire du second rang de la CSSS.

M. Charles de Courson.

Pourquoi ce n'est pas normal ?

M. Denis Jacquat, rapporteur pour l'assurance vieillesse.

C'est un constat.

J'ajoute que le versement prévu par la disposition précitée, qu'il est proposé de supprimer, a cependant un caractère que je qualifierai d'opportuniste, puisqu'il a pour principal objet de financer le relèvement des petites retraites agricoles en 1999, et d'éviter à l'Etat de contribuer à ce financement. A ce propos, il n'est pas sain de couvrir une dépense permanente par une recette temporaire. C'est bien là l'essentiel.

M. Bernard Accoyer.

C'est bien pourquoi il n'est pas sérieux d'instituer un fonds de réserve !

M. Yves Deniaud.

Eh oui !

M. Denis Jacquat, rapporteur pour l'assurance vieillesse.

Je réponds sur la CSSS. Le fonds de réserve a été évoqué tout à l'heure, mon cher collègue. En tout état de cause, j'indique, en tant que rapporteur, que si l'on supprime le premier alinéa du II, il faut également supprimer le deuxième alinéa, qui en est la conséquence.

La commission a émis un avis défavorable sur l'amendement.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat à la santé.

Je partage le sentiment du rapporteur, je suis contre l'amendement.

M. le président.

La parole est à M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson.

Monsieur le secrétaire d'Etat, vous ne pouvez pas vous contenter de ce genre de réponse !

M. Alfred Recours, rapporteur pour les recettes et l'équilibre général.

Tout à l'heure, c'était trop long, maintenant, c'est trop court !

M. Charles de Courson.

Le fond du problème est de savoir comment vous allez financer de façon durable la revalorisation des petites retraites agricoles,...

M. Bernard Accoyer.

Il n'en sait rien ! Il s'en fout !

M. Charles de Courson.

... alors que vous ne prévoyez qu'une recette exceptionnelle d'un milliard en 1999, non reconductible.

Soit vous nous répondez qu'à partir de 2000, vous modifierez une nouvelle fois le système de répartition de la CSSS, de façon que la MSA soit toujours pérenne.

Mais, à ce moment-là, il ne faut pas voter, comme l'a dit le rapporteur, le premier alinéa du II, qui prévoit qu'à partir de 2000, le régime MSA ne peut plus bénéficier du prélèvement opéré sur la CSSS. En plus, c'est inique puisqu'une partie du monde agricole acquitte la CSSS.

M. Pascal Terrasse.

Cinq cents millions !

M. Charles de Courson.

Oui, mais à partir de 2000, mon cher collègue, ça sera zéro ! C'est pourquoi, monsieur le secrétaire d'Etat, la représentation nationale attend une réponse claire de votre part sur la façon dont sera financée la poursuite de la revalorisation des petites retraites agricoles, à partir de l'an 2000.

M. le président.

La parole est à M. le secrétaire d'Etat à la santé.

M. le secrétaire d'Etat à la santé.

A chaque jour et à chaque année suffit sa peine. Ce financement aura lieu annuellement dans le budget de l'Etat.

M. Charles de Courson.

Mais non !

M. le secrétaire d'Etat à la santé.

N'allongeons pas i nutilement le débat, monsieur de Courson. Nous sommes contre votre amendement, et tout le monde


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 28 OCTOBRE 1998

l'aura compris.

(Ecxlamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe du Rassemblement pour la République.

M. Jean-Luc Préel.

C'est ça, on verra bien demain !

M. le président.

La parole est à M. Bernard Accoyer.

M. Bernard Accoyer.

M. le secrétaire d'Etat était beaucoup plus prolixe, ce matin, lorsqu'il s'est agit de retarder une échéance. Finalement, de dix heures à dix-huit heures, nous avons eu affaire à une obstruction due par les différends au sein d'une gauche désunie ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste).

M. Bernard Accoyer.

Mais revenons-en à la vacuité de la réponse qui vient de nous être opposée.

En réalité, l'invention de ce que l'on appellera le FRRR - les débats semblant durer, il nous faut trouver des abréviations, - l'invention improvisée du FRRR à deux jours de la tenue de la commission des comptes de la sécurité sociale montre bien qu'on est en plein délire.

On n'a absolument pas mesuré la disproportion qui existe entre les 2 milliards affectés à ce FRRR qui représentent, excusez-moi du peu, six semaines de CADES. L'année dernière, la durée de la CADES, c'est-à-dire de la RDS pour nos concitoyens, puisque les feuilles de contribution tombent en ce moment, a même été allongée de cinq ans.

M.

Alfred Recours, rapporteur pour les recettes et l'équilibre général.

Grâce à vous !

M.

Bernard Accoyer.

Grâce à l'excédent de la CSSS, vous auriez pu réduire cette durée. Certes, cela n'aurait été que de six semaines, mais vous auriez fait preuve d'objectivité, de transparence et également de solidariré à l'égard des jeunes générations ! Finalement, en allongeant l'année dernière la CADES de cinq ans, c'est-à-dire à un moment où l'on sait que les régimes d'assurance vieillesse, - par répartition, en particulier, - ne seront plus financés, vous avez faits porter l'effort sur les jeunes générations.

Celles-ci paieront la protection sociale d'aujourd'hui et de demain, les retraites de demain, plus l'assurance maladie ! Il y a là une injustice flagrante ! C'est pourquoi nous considérons qu'il convient de supprimer toutes les dispositions de l'article 2, qui sont improvisées et inefficaces.

M.

Alfred Recours, rapporteur pour les recettes et l'équilibre général.

Et la loi, et la Constitution ! Il n'y a qu'à tout supprimer !

M.

le président.

Je mets aux voix l'amendement no 306.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M.

le président.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

5

ORDRE DU JOUR DE LA PROCHAINE SÉANCE

M.

le président.

Ce soir, à vingt et heures, troisième séance publique : Suite de la discussion du projet de loi, no 1106, de financement de la sécurité sociale pour 1999 ;

MM. Alfred Recours, Claude Evin, Denis Jacquat et Mme Dominique Gillot, rapporteurs au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales (rapport no 1148, tomes I à IV) ; Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (avis no 1147).

La séance est levée.

(La séance est levée à dix-neuf heures trente.)

L e Directeur du service du compte rendu intégral de l'Assemblée nationale,

JEAN PINCHOT


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 28 OCTOBRE 1998

ANNEXE AU PROCÈS-VERBAL de la 2e séance du mercredi 28 octobre 1998 SCRUTIN (no 130) sur l'amendement no 423 repris, par M. Bur, avant l'article 2 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 1999 (suppression des fonds de pension) Nombre de votants .....................................

135 Nombre de suffrages exprimés ....................

135 Majorité absolue ..........................................

68 Pour l'adoption ...................

0 Contre ..................................

135 L'Assemblée nationale n'a pas adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN Groupe socialiste (251) : Contre : 91 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.

Non-votants : MM. Laurent Fabius (président de l'Assemblée nationale) et Jean Glavany (membre du Gouvernement) Groupe RPR (137) : Contre : 19 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.

Non-votant : M. Patrick Ollier (président de séance).

Groupe UDF (68) : Contre : 7 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.

Groupe Démocratie libérale et Indépendants (44) : Contre : 10 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.

Groupe communiste (36) : Contre : 7 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.

Groupe Radical, Citoyen et Vert (33) : Contre : 1 membre du groupe, présent ou ayant délégué son droit de vote.

Non-inscrits (5).