page 00072page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 19 JANVIER 1999

SOMMAIRE

PRÉSIDENCE DE M. FRANÇOIS D'AUBERT

1. Aménagement du territoire. - Suite de la discussion, après déclaration d'urgence, d'un projet de loi (p. 73).

QUESTION PRÉALABLE (p. 73)

Question préalable de M. Jean-Louis Debré : M. Serge Poignant, Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement ; MM. Philippe Duron, rapporteur de la commission de la production ; Alain Ferry, Nicolas Forissier, Jean-Claude Daniel, Yves Deniaud, Jean-Michel Marchand, Félix Leyzour. - Rejet.

DISCUSSION GÉNÉRALE (p. 84)

MM. Georges Sarre, Jean-Claude Lenoir, Patrick Rimbert, Patrick Ollier, Félix Leyzour.

PRÉSIDENCE DE M. PATRICK OLLIER

MM. Yves Coussain, François Huwart, Mme Sylvia Bassot,

MM. Jean-Pierre Balligand, Eric Doligé, Michel Vaxès, Léonce Deprez, Jean-Michel Marchand, Jacques Blanc, Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont.

Renvoi de la suite de la discussion à la prochaine séance.

2. Retrait d'un projet de loi (p. 107).

3. Dépôt de propositions de résolution (p. 107).

4. Dépôt de rapports en application de lois (p. 107).

5. Ordre du jour des prochaines séances (p. 108).


page précédente page 00073page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 19 JANVIER 1999

COMPTE RENDU INTÉGRAL

PRÉSIDENCE DE M. FRANÇOIS D'AUBERT,

vice-président

M. le président.

La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à vingt et une heures quinze.)

1 AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE Suite de la discussion, après déclaration d'urgence, d'un projet de loi

M. le président.

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire et portant modification de la loi no 95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire (nos 1071, 1288).

Question préalable

M. le président.

J'ai reçu de M. Jean-Louis Debré et des membres du groupe du Rassemblement pour la République une question préalable déposée en application de l'article 91, alinéa 4, du règlement.

La parole est à M. Serge Poignant.

M. Serge Poignant.

Madame la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement, nous avons déposé cette question préalable en raison de l'important décalage qui existe entre vos déclarations de simple révision de la loi d'aménagement du territoire de 1995 et vos véritables intentions. Pourquoi vouloir rompre avec cette loi du 4 février 1995 dite « loi Paqua », votée après un large débat national et une concertation sans précédent ? Permettez-moi de vous rappeler rapidement le contexte d'arrivée, en 1993, du gouvernement de M. Balladur.

Malgré les lois de 1992 sur l'organisation territoriale, la désertification des campagnes se poursuivait inexorablement et les mesures prises n'avaient pas permis de l'enrayer. Les grandes agglomérations continuaient à voir leur population s'accroître alors que les villes moyennes stagnaient, 80 % de la population occupant 20 % du territoire. Paris et sa zone d'influence continuaient à concentrer les pouvoirs politiques et la plupart des pouvoirs économiques nationaux. La concentration urbaine était aussi à l'origine d'un mauvais maillage du territoire français avec aucune ville à caractère international à l'exception de la capitale, des villes moyennes en perte de vitesse et des petites villes en développement, mais au prix d'efforts financiers importants, trop importants pour ne pas aller vers un inexorable endettement.

Les zones en crise, de plus en plus nombreuses, cumulaient pertes d'emplois et autres handicaps, en même temps que le fossé se creusait entre les grandes agglomérations et les zones du rural profond. Parallèlement, le développement de l'Union européenne marquait une évolution considérable. En 1990 avait été lancée une réflexion sur un schéma de développement de l'espace communautaire qui devait traduire une politique d'aménagement du territoire. L'Union européenne devenait donc un partenaire important de mise en oeuvre de cette politique au même titre que les collectivités territoriales.

C'est dans un cadre politique où les actions, les objectifs et les pouvoirs s'enchevêtraient, dans un univers économique où la concurrence s'accroissait au sein de l'Union européenne et dans le monde, et dans un contexte de plus en plus difficile que le Gouvernement de M. Balladur décidait de lancer un grand débat qui a abouti à l'adoption de la loi du 4 février 1995. Je salue le travail de longue haleine effectué, notamment celui de l'orateur du groupe RPR aujourd'hui, Patrick Ollier.

Le principal reproche que vous nous faites, madame le ministre, c'est que cette loi n'aurait été appliquée que partiellement. Permettez-moi de vous rappeler que quarante-six décrets d'application et cinquante-deux arrêtés, circulaires et instructions ont été publiés entre 1995 et 1997. Le Conseil national de l'aménagement et du développement du territoire, les conférences régionales, le comité interministériel, les comités de gestion des fonds d'intervention, l'observatoire des finances locales ont été créés. De même, différents Fonds ont été abondés, mê me si nous aurions aimé que cela se réalise plus rapidement : le Fonds national d'aménagement du territoire, le Fonds de gestion de l'espace rural, le Fonds de péréquation des transports aériens, le Fonds d'investissement des transports terrestres et des voies navigables, le Fonds national de développement des entreprises. Je dis tout cela pour rappeler à nos collègues M. Balligand et M. Leyzour ce qu'a fort judicieusement précisé Patrick Ollier en réponse à l'exception d'irrecevabilité.

L'élaboration du schéma national d'aménagement et de développement du territoire n'a malheureusement pu aller jusqu'à son terme, mais la préparation des synthèses régionales, le recueil des propositions de chacun des départements ministériels et la conduite d'études prospectives sous l'égide du Commissariat général du Plan étaient en bonne voie.

M. Patrick Ollier.

C'est vrai !

M. Serge Poignant.

L'avant-projet de schéma national avait été approuvé le 10 avril 1997 lors du CIADT d'Auch.

M. Patrick Ollier.

C'est vrai aussi !

M. Serge Poignant.

Je voudrais aussi vous rappeler rapidement les grandes lignes de ce schéma fondé sur deux grands principes : développer le territoire et l'équilibrer.

Développer le territoire, dans la compétition internationale, c'était agir sur les nouveaux facteurs de la compétitivité que sont l'éducation, l'enseignement supé-


page précédente page 00074page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 19 JANVIER 1999

rieur et la recherche, la santé et l'action sociale, la culture, le sport, et moderniser nos réseaux de communication, à savoir non seulement les télécommunications, mais aussi les infrastructures et les services de transports.

Développer le territoire en mobilisant les acteurs du développement, c'était faciliter les coopérations entre entreprises et acteurs locaux en favorisant l'émergeance de pôles industriels locaux, en mettant à la disposition des acteurs locaux une aide à l'ingénierie du développement, en renforçant l'environnement technologique des entreprises, en facilitant l'accès des entreprises à l'information.

C'était aussi promouvoir le développement des entreprises en renforçant le réseau des petites et moyennes entreprises, en attirant les grandes entreprises, en préservant les fonctions de maillage territorial de l'artisanat et du commerce, en maintenant et développant les entreprises agricoles et forestières, en tirant partie de l'économie touristique, en clarifiant les interventions économiques des collectivités locales. Développer le territoire en agissant au sein de territoires pertinents, c'était prendre en compte la dimension interrégionale de notre espace, c'était favoriser l'émergence des pays, c'était poursuivre la décentralisation.

Equilibrer le territoire en restaurant les grands équilibres territoriaux dans un esprit de solidarité, c'était dynamiser l'espace rural en valorisant les richesses spécifiques, en organisant et en désenclavant le territoire, en renforçant l'attractivité des territoires, en encourageant un mode de développement adapté aux territoires les plus faibles en densité. C'était aussi aménager la ville en organisant le développement urbain, en se dotant des moyens nécessaires à la conduite des politiques urbaines.

Equilibrer le territoire, c'était structurer les aires métropolitaines en veillant à un développement harmonieux de l'Ile-de-France au sein du bassin parisien, mais aussi en organisant les aires métropolitaines sur l'ensemble du territoire et encore en mettant en valeur nos territoires spécifiques tels que les départements d'outre-mer, la montagne, le littoral, les espaces frontaliers.

Enfin, dans la dernière partie de ce schéma, préserver les équilibres entre l'homme et son environnement, c'était préserver le patrimoine naturel, c'était gérer de manière économe les ressources naturelles, c'était conjuguer environnement et développement.

Voilà, en résumé, le schéma qui se dessinait en ce printemps 1997. Pourquoi donc ne pas l'avoir entériné, madame la ministre ?

M. Patrick Ollier.

Eh oui !

M. Serge Poignant.

Pensez-vous que ces objectifs n'étaient appelés qu'à rester de beaux rêves sur des raisonnements des années 60, comme a osé le dire M. Balligand, qui nous avait habitués, ici et en d'autres lieux, à mieux en matière d'aménagement du territoire ?

M. Jean-Pierre Balligand.

Il ne faut pas me chatouiller !

M. Serge Poignant.

Ces objectifs ne sont-ils pas toujours parfaitement d'actualité ? Pour terminer ce rapide bilan, je dois ajouter que, durant cette période, les zonages ont été adoptés. Je veux parler des territoires ruraux de développement prioritaire et des zones de revitalisation rurale, tout autant que des zones urbaines sensibles.

M. Jean-Pierre Balligand.

Et cela a apporté quoi ?

M. Serge Poignant.

Par ailleurs, quarante-deux pays tests ont permis une évaluation à l'issue de la période d'expérimentation et, à ce jour, soixante et onze pays ont été constatés par les commissions départementales.

La loi du 4 février 1995 avait deux autres objectifs que tous appelaient de leurs voeux : la clarification des compétences et la péréquation. La décentralisation engagée en 1982 avait conduit à une nouvelle répartition des compétences, en matière d'aménagement notamment. Mais il est bien certain que demeure encore un recoupement des compétences entre les communes, les départements, les régions et l'Etat qui concourent tous à l'aménagement du territoire, au développement économique et à la protection de l'environnement. Par ailleurs, cette décentralisation était entrée en vigueur sans être accompagnée d'une réforme financière significative. La concertation engagée dans le cadre de la loi du 4 février 1995 avait clairement montré l'insatisfaction à trois niveaux : les mécanismes de péréquation ne fonctionnent pas suffisamment ; la fiscalité locale est devenue, au fil du temps, de plus en plus opaque et illisible ; les concours de l'Etat se sont raréfiés.

Un espoir était né de profonds changements de notre environnement. Pourquoi, madame la ministre, ne pas avoir profité du travail déjà réalisé ? Pourquoi ne pas être repartie de l'esquisse amorcée du schéma national ? Aucun bilan sérieux de la loi de 1995 n'a été effectué de votre part qui puisse légitimer la production d'une nouvelle loi. L'articulation entre les mesures maintenues de la loi de 1995 et les mesures nouvelles proposées est à peine abordée dans l'exposé des motifs. Ce qui est sûr, c'est que depuis votre arrivée à ce ministère, la mise en oeuvre de cette loi a été purement et simplement stoppée. Cela fait un an et demi que tout est bloqué et aujourd'hui vous déclarez l'urgence sur ce texte. Notre pays pouvait-il se le permettre ? Nous considérons qu'il n'y a pas lieu de débattre dans la précipitation, d'autant plus que ce projet de loi, concocté à la va-vite et sur d'autres bases, sera plutôt une loi d'organisation territoriale et environnementale et qu'il aurait dès lors fallu engager une large concertation auprès des élus locaux.

M. Jean-Claude Lemoine.

Très bien !

M. Jacques Pélissard.

C'est vrai !

M. Serge Poignant.

Pourquoi tant de précipitation aujourd'hui alors que tous les maires de France, comme moi, savent qu'ils doivent organiser sur leur commune le recensement qui débutera en mars prochain et reflétera la physionomie de la France ? Nous connaîtrons alors par commune le nombre d'habitants, leurs déplacements, leurs attentes, que vous ne pourrez malheureusement intégrer dans votre réflexion.

Pourquoi donc une telle précipitation aujourd'hui ? Tout simplement parce que la négociation des contrats de plan est engagée, que la réforme des fonds structurels et la mise en harmonie des politiques européennes avec Agenda 2000 et des politiques d'aménagement du territoire sont en cours et que vous voulez faire adopter votre projet de loi avant l'été. Nous ne pouvons bien évidemment accepter cette subite précipitation.

Inacceptable aussi la procédure d'urgence décidée sur le projet de loi relatif à l'organisation urbaine et la simplification de la coopération intercommunale qui viendra en discussion immédiatement après celui-ci et où il sera question des communautés d'agglomérations et de la taxe professionnelle unique. Vous indiquez que votre projet de loi s'inscrit dans un dispositif plus large qui vise à simplifier l'organisation des territoires - texte de M. Chevènement - et à codifier les interventions économiques des


page précédente page 00075page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 19 JANVIER 1999

collectivités territoriales - projet de loi de M. Zuccarelli.

Dans ce cas, la représentation nationale et les commissions permanentes auraient dû être saisies simultanément des trois textes. Comment, par exemple, légiférer aujourd'hui sur un seuil de 30 000, 50 000 ou 100 000 habitants pour définir les communautés d'agglomérations alors que nous discuterons du projet de loi sur l'interc ommunalité dans quelques semaines ? Serons-nous contraints par un seuil défini aujourd'hui et qui pourra avoir des conséquences très différentes selon qu'il sera fixé 30 000 ou à 100 000 ? Ou changerons-nous cet aspect important de la loi quelques semaines après son adoption ? Alors que Charles Pasqua avait tracé une voie, votre projet est un vrai dédale où je crains que chacun ne se perde.

Je pourrais évoquer le décret du 7 juillet dernier encadrant déjà les interventions économiques des collectivités locales, la réforme de la taxe professionnelle décidée dans la loi de finances pour 1999 ou encore la faible ambition de la loi d'orientation agricole. Et que dire, madame le ministre, de votre suggestion adressée en avril dernier à Mme Lebranchu, lors d'un collège organisé par M. Balligand, de rédiger une nouvelle loi sur l'initiative économique et le développement local ? La cacophonie qui règne entre vous et l'incohérence d'ensemble de vos projets vont entraîner l'incompréhension et la déception de ceux qui sont les acteurs quotidiens de l'aménagement du territoire.

On se demande enfin si l'éparpillement législatif, qui fait voler en éclats les bonnes intentions exprimées par le président de l'Assemblée en début d'année, de moins mais de mieux légiférer, n'est pas précisément destiné à rendre encore plus floue une démarche environnementale largement idéologique.

L'article 2 de votre texte, madame la ministre, substitue au schéma national d'aménagement et de développement du territoire huit schémas de services collectifs. Le schéma national constituait un instrument de cohérence indispensable, réévalué et réexaminé tous les cinq ans.

Permettez-moi de vous rappeler que les travaux préparatoires au schéma national avaient donné lieu à des débats ouverts, sincères, instructifs et que seul le changement de majorité de 1997 avait empêché d'entériner ce projet, dont je vous ai rappelé les grandes lignes. L'abandon de ce schéma constitue un fait majeur, eu égard à une politique de l'aménagement du territoire harmonieuse et soucieuse d'intérêt général et d'efficacité.

Un schéma national eût permis par ailleurs de mieux prendre en compte au niveau européen les exigences de la France dans l'élaboration du schéma de développement de l'espace européen et serait ainsi devenu un document de référence au sein de notre Communauté.

Je n'ai nul besoin de vous rappeler que l'intégration européenne a des répercussions politiques, économiques et institutionnelles sur les Etats membres de l'Union, les collectivités territoriales étant directement concernées par cette évolution. La législation européenne s'impose sur beaucoup de points : concurrence, sécurité, environnement et l'Europe est un acteur important de l'économie et de l'aménagement du territoire. Le passage à l'euro va également engendrer un comportement nouveau puisque la performance des territoires sera immédiatement lisible en comparant coûts sociaux et environnementaux. On voit bien alors que la répartition des dépenses et des recettes aura un rôle déterminant sur notre activité, le développement ou la performance de nos territoires.

Par ailleurs, la renégociation de la troisième génération des fonds structurels européens, pour la période 20002006, ne peut être dissociée de notre réflexion. Ces fonds mettent en oeuvre, en l'occurrence, des chiffres considérables dont l'impact sur l'aménagement du territoire sera évident. Mais cette négociation se situe dans un contexte difficile puisque, progressivement, ce sont plus de vingt pays, qui, d'ici à 2006, prélèveront leur part sur ces fonds structurels, alors que la dernière négociation n'en concernait que douze. Si aujourd'hui la population française est concernée par les objectifs actuels, 1, 2 et 5 b, il faut prévoir pour la France une réduction de l'ordre d'un tiers des fonds structurels dans la période à venir.

Ces fonds structurels européens ne peuvent se substituer à l'effort budgétaire de l'Etat et je voudrais, madame la ministre, que vous puissiez veiller à une bonne complémentarité, à une bonne cohérence et à une bonne synchronisation entre toutes les actions car ces fonds doivent s'ajouter et non se retrancher - telles sont nos craintes.

C'est cette superposition des efforts européen et national qui permet de donner l'élan maximum à la politique d'aménagement.

Dans un autre domaine, l'élargissement progressif de l'Europe fait apparaître, avec plus d'acuité encore, les maillons manquants des infrastructures. La France risque de se trouver marginalisée dans la mesure où le centre de gravité de l'Europe est appelé à se déplacer vers le Nord et vers l'Est. Elle est d'ores et déjà la périphérie des Douze. Les deux tiers de notre pays sont isolés en raison du retard en matière d'infrastructures et de l'absence de liaisons rapides entre le Sud et le Nord de l'Europe.

Voilà, madame la ministre, ce qui aurait dû vous inciter à poursuivre l'action engagée. Or vous prévoyez l'arrêt pur et simple de certains engagements déjà pris.

Si nous pouvons approuver l'introduction de la dimension européenne en préambule, à l'article 1er , nous ne pouvons que regretter que cette référence n'apparaisse pas davantage et plus explicitement, surtout dans la suite du texte, notamment quand il s'agit des schémas de services.

Enfin, ces huit schémas ne sont pas exhaustifs - je pense à la justice, que vous n'avez jamais citée. Ils sont construits certes dans une perspective de réponse aux besoins, mais sans véritable objectif de développement et d'évolution.

Vous privilégiez l'existant sur l'investissement et la construction d'équipements et de nouvelles infrastructures. Ces schémas ne doivent pas masquer les besoins nouveaux d'investissements souvent significatifs. Il en est ainsi de la nécessité de poursuivre le développement des infrastructures routières dans nos flux intérieurs et intracommunautaires, qu'ils soient internationaux ou de transit, comme j'ai pu le dire.

Le fait de partir des besoins pour définir l'offre de services ne dispense pas d'accroître quantitativement et qualitativement celle-ci lorsque c'est nécessaire. Sans projet d'envergure, vous vous contenterez malheureusement de répartir la pénurie.

Vous avez proposé que ces schémas soient préparés par l'administration et publiés par décret en raison du calendrier contraignant. Cela aboutit à priver les élus de la nation de décider des grandes orientations qu'eux seuls s'estiment à même de déterminer par rapport au pouvoir technocratique. Nous ne pouvons l'accepter, madame la ministre. Que dire de plus, sinon que cela lèse gravement les droits du Parlement et est contraire aux déclarations du Premier ministre sur le respect dû au Parlement ?


page précédente page 00076page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 19 JANVIER 1999

Vous avez bâti votre projet de loi autour de trois piliers que sont les régions, les pays et les agglomérations.

Le projet de loi Pasqua avait déjà fait des régions les interlocuteurs de l'Etat dans le processus de contractualisation et les chefs de file de l'aménagement du territoire.

Vous précisez le rôle des schémas régionaux d'aménagement, mais vous supprimez les dispositions qui assuraient la cohérence des projets d'équipements régionaux avec les politiques de l'Etat. Cette suppression va sans nul doute aggraver les risques d'incohérence liés à la disparition du schéma national ; même si vous prévoyez la compatibilité du schéma régional avec les schémas de services collectifs, cela paraît constituer à cet égard une garantie bien insuffisante. Par ailleurs, vous renforcez le rôle des conférences régionales d'aménagement du territoire en instituant toutefois une coprésidence entre le préfet de région et le président de région. Quel sera le poids de l'Etat dans les décisions, face aux élus régionaux ? Mais les grands oubliés de votre projet de loi, madame la ministre, sont les départements...

M. Patrick Ollier.

En effet !

M. Eric Doligé.

Je n'osais pas le dire !

M. Patrick Ollier.

Ils sont tout à fait oubliés !

M. Serge Poignant.

... qui participent ô combien à l'aménagement du territoire ! Faute de les avoir pris en compte dans le projet de loi, vous n'avez cessé d'y faire référence dans vos différentes auditions.

Vous ne pouvez faire abstraction de cette structure administrative, bien française. Il n'y a aucun projet, grand ou petit, économique, routier, universitaire, culturel ou environnemental qui puisse se passer d'un financement départemental. Chaque année, les départements engagent des milliards pour l'investissement, soit directement pour financer les infrastructures de communication et de transport, des établissements scolaires, universitaires, les équipements sociaux, culturels et touristiques, le logement,s oit indirectement, principalement pour soutenir les communes. La grande majorité de ces investissements a une incidence directe sur le chiffre d'affaires d'un certain nombre d'entreprises ; mais surtout, ils visent à créer les conditions indispensables à un environnement adapté aux besoins de l'ensemble des entreprises et à leur développement et à une plus grande compétitivité du territoire départemental.

Comment prétendre à la cohésion du territoire quand on exclut un des maillons-clé de cet aménagement du territoire ? Vous savez pertinemment, madame la ministre, que le département a toujours été le cadre de la mise en oeuvre de la nécessaire solidarité territoriale et humaine entre la ville et le milieu rural.

Vous avez qualifié la loi de 1995 de « ruraliste » et vous avez voulu la repositionner, dites-vous. Mais celle-ci proposait des solutions pour réaliser le nécessaire équilibre entre les zones urbaines en difficulté et les zones rurales en voie de désertification.

Aujourd'hui, il ne faut pas que les agglomérations et les pays créent une césure entre l'urbain et le rural - ce qui peut être à craindre - alors que ceux-ci sont complémentaires et interdépendants. Je soulignerai à ce propos - monsieur le rapporteur le sait bien - la nécessaire souplesse qui doit exister pour que des communes périurbaines, lien naturel entre les deux structures, puissent faire partie à la fois de communautés d'agglomération et de pays.

Le pays nous paraît être un espace pertinent de développement et de solidarité, mais il ne doit pas être un échelon territorial supplémentaire. Qu'il n'y ait aucune équivoque sur ce point ! Le caractère trop rigide de votre projet, madame la ministre, risque de freiner l'apparition des pays, d'effrayer les élus et les acteurs locaux !

M. François Sauvadet.

C'est exact !

M. Serge Poignant.

Votre projet de loi abandonne une notion fondamentale ; celle de constatation du pays, synonyme de liberté pour les communes et d'aménagement volontaire, d'engagement volontaire, afin de donner le pouvoir de délimitation au préfet de région.

J'ai en mémoire les années 1991-1992. Ne revenons pas, de grâce ! aux procédures des lois Joxe-Baylet, où les préfectures ayant reçu des instructions ministérielles organisaient des réunions dans les communes non encore fédérées en districts ou communautés de communes pour les inciter, voire les obliger, à se regrouper.

M. Jean Auclair.

Cela n'a pas changé !

M. Serge Poignant.

C'est ainsi que des structures de circonstances, des coquilles vides ont vu le jour, ayant essentiellement pour but de récupérer les dotations de l'Etat, sans projet et sans âme.

M. François Sauvadet.

Cela devrait intéresser M. Balligand.

M. Guy-Michel Chauveau.

Les fusions de communes, en 1970, c'était pire !

M. Serge Poignant.

Il ne faut pas que les projets de loi en discussion ou annoncés ne nous ramènent sept ans en arrière.

Vous reconnaissez l'agglomération comme instrument de la politique d'aménagement du territoire, mais vous nous renvoyez à d'autres textes de lois et vous éludez le débat. La contractualisation avec l'Etat sera possible au sein des contrats de plan Etat-régions en introduisant l'obligation d'un EPCI à taxe professionnelle unique. La réforme fiscale tant attendue devrait être un grand chantier à engager pour cette fin de siècle. Nous ne trouvons rien dans votre projet. Quelle ambition formulez-vous pour nos métropoles à l'heure de la mondialisation ? Encore une fois, pas grand-chose, tandis qu'il aurait été si simple de repartir de ce qui avait été proposé. Alors que le

XXIe siècle sera marqué par l'amplification du mouvement de métropolisation et de concentration urbaine, quelle évolution de notre territoire voulons-nous pour nos métropoles ? La multiplication des liaisons routières, ferroviaires, aériennes intercontinentales favorise la polarisation des activités dans les lieux privilégiés d'articulation avec l'économie mondiale.

L'Allemagne envisage l'émergence de sept ou huit pôles intercontinentaux. En France, pour l'instant, seul Paris et l'Ile-de-France peuvent réellemment rivaliser. Plusieurs aires de métropolisation attractives seront à même de capter, dans le futur, des flux de développement internationaux ; ceux-ci, séparés par des espaces de respiration protégés, entraîneront des territoires environnants dans une dynamique de développement et de revitalisation grâce à une meilleure irrigation des territoires ruraux.

Ce projet pour la France, cette réorganisation du territoire que nous avait proposée la loi de 1995, a disparu dans vos propos. Vous associez aujourd'hui l'agglomération au seul « fait urbain », comme s'il était devenu une


page précédente page 00077page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 19 JANVIER 1999

fatalité. Quel pessimisme pour la France ! Et vous privilégiez le développement des agglomérations au motif que seule la ville créerait de l'emploi. Le développement des zones rurales est relégué au second plan sous l'effet de la prééminence du fait urbain.

Ne nous voilons pas la face, madame la ministre. Le rôle structurant des villes et leur capacité à féconder les territoires qui les entourent, comme vous le dites, n'auront pas la force de rayonnement suffisante pour offrir leur chance à tous les espaces les plus ruraux de notre territoire. Des mesures adaptées aux quartiers urbains, à l'espace rural profond, à la montagne, au littoral, demeureront indispensables, de même qu'une politique de soutien aux villes moyennes, si nous voulons maintenir un tissu de PME-PMI sur le territoire.

Non, vous ne pouvez pas laisser croire que la richesse n'est produite qu'à la ville et qu'il n'y a pas de dynamisme économique propre aux zones rurales ; vous bafouez alors les agriculteurs, les artisans commerçants, qui sont au quotidien le poumon économique de nos territoires ruraux.

M. Guy Hascoët.

Ça en fait, des électeurs !

M. Serge Poignant.

Concernant les services publics - pour lesquels vous avez annoncé un autre projet de loi traitant des droits des citoyens dans leurs relations avec l'administration -, votre texte laisse peser un doute sur vos véritables intentions.

Le CIADT du 15 décembre dernier risque de sonner le glas pour nombre de petites communes rurales. Le Gouvernement a voulu sortir du moratoire sur la fermeture des services publics en milieu rural.

M. François Sauvadet.

C'est une erreur !

Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Alors, on laisse tout en l'état ?

M. Serge Poignant.

L'action du Gouvernement en la matière peut ressembler à un travail de Pénélope. Ce qui est fait le jour se trouve défait la nuit. Vous clamez haut et fort, en octobre dernier, que vous soutenez le milieu rural, avec la loi d'orientation agricole, entre autres, et, en décembre, vous supprimez le moratoire sur la fermeture des services publics, indispensables au maintien d'un minimum de vie sociale en milieu rural.

Vous savez, madame la ministre, que la fermeture d'une école, d'un hôpital, d'un bureau de poste en milieu rural, c'est le non-renouvellement des générations, attirées par la ville, et le risque de mort lente d'une commune ? Par ailleurs, pourquoi prôner l'égal accès des citoyens aux services publics alors que vous encouragez, que vous obligez les collectivités locales qui veulent conserver un minimum de ces services sur leur territoire à engager des moyens financiers dans le cadre de conventions avec des administrations telles que La Poste ? Pourquoi certaines populations devraient, par le biais des impôts locaux, payer deux fois pour les services de l'Etat, par simple transfert de charges ? Est-ce là l'égalité d'accès pour une égalité des chances ? Enfin, comment ne pas aborder la fiscalité locale, qui est de nos jours un frein important à l'aménagement du territoire ? La loi du 4 février 1995 avait permis d'ébaucher une péréquation, timide, certes, mais qui devait être progressive. Votre projet de loi ne donne des moyens supplémentaires qu'aux communautés d'agglomération ayant une taxe professionnelle unique. Vous renvoyez au projet de loi de M. Chevènement et à la réforme de la taxe professionnelle décidée dans la loi de finances pour 1999. La réforme décidée va certainement pénaliser, dès cette année, les collectivités locales, et vous le savez bien.

M. Yves Deniaud et M. Patrick Ollier.

Eh oui !

M. Serge Poignant.

Vous prévoyez la technique de compensation budgétaire, c'est-à-dire celle de la subvention d'Etat, pour équilibrer le manque à gagner subi par les collectivités locales, alors que les élus locaux ont plaidé le dégrèvement fiscal.

M. François Sauvadet.

C'est instituer une tutelle !

M. Serge Poignant.

La compensation budgétaire pose un problème de principe car, en confisquant un pouvoir fiscal autonome pour le remplacer par une subvention d'Etat, on remet en cause le principe d'indépendance des collectivités locales et l'un des fondements de la décentralisation.

M. Patrick Ollier.

Exactement !

M. Serge Poignant.

Notre Constitution indique que les collectivités territoriales s'administrent librement. La compensation budgétaire marque bien votre volonté de recentralisation et d'étatisation de la ressource publique locale.

Par ailleurs, il est regrettable que la réforme de la taxe professionnelle ne conduise à aucune amélioration de la péréquation entre communes, alors que les écarts de richesse ne font que se creuser et que l'inégalité dans l'impôt local ne fait que s'amplifier. Tous les maires, toutes tendances confondues, sont unanimes sur ce point.

Votre projet de loi nous laisse perplexes sur la fiscalité locale d'autant plus qu'il élude totalement le volet économique, et par là même l'emploi, renvoyant au texte de M. Zucarelli. Or vous ne pouvez ignorer que les divers acteurs du développement local se trouvent confrontés à des enjeux économiques majeurs : soutenir la création d'activités, en particulier la création d'entreprises et créer des emplois. Nous aurions en particulier souhaité que l'emploi soit érigé au rang de priorités dans votre texte par la modernisation et le soutien au développement des entreprises et par l'appui aux initiatives locales.

Pour conclure, madame la ministre, mes chers collègues, je voudrais vous dire qu'en cette fin de siècle l'aménagement du territoire arrive à un tournant. Au-delà des schémas de services collectifs et des schémas régionaux, c'est la nouvelle phase de programmation des fonds structurels européens qui doit démarrer à partir du 1er janvier 2000 et les nouveaux contrats de plan doivent être établis pour 2000-2006. Dans ces délais très courts, il vous sera bien difficile, madame la ministre, de mobiliser les élus locaux à quelque niveau que ce soit ; en conséquence, sans cohésion nationale, vous affaiblissez la position de la France au moment où s'engagent des négociations capitales pour l'avenir de notre pays.

La question préalable de l'opportunité de ce texte se pose donc. Nous ne sommes pas contre l'aménagement du territoire, bien au contraire. Nous ne sommes pas hostiles à l'intercommunalité, pas plus qu'à la notion de pays. Mais la loi Pasqua existe et pouvait être appliquée si telle avait été votre volonté. Peut-être méritait-elle d'ê tre complétée dans le contexte de l'évolution européenne et mondiale. Cela était d'ailleurs prévu s'agissant de la clarification des compétences et des mécanismes de péréquation et des réformes fiscales conséquentes. En tout cas, madame la ministre, vous ne pouvez parler d'une simple révision, d'une simple modification ou d'un simple complément de la loi de 1995. Nous considérons votre


page précédente page 00078page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 19 JANVIER 1999

projet comme une rupture de l'équilibre fondamental et une réelle déstructuration de la loi Pasqua qui, je vous le rappelle, avait trouvé un certain consensus.

M. Yves Cochet.

Consensus inefficace !

M. Arnaud Montebourg.

Consensus fictif !

M. Serge Poignant.

« Une loi d'aménagement du territoire n'est pas un moment ordinaire. », avez-vous déclaré

dans votre discours de présentation. Mais votre texte nous paraît faible eu égard à cette déclaration. Il est bien flou et se contenterait d'être bien inutile s'il ne masquait une véritable rupture avec les fortes ambitions clairement affichées pour notre pays dans la loi de 1995.

Ce projet n'ouvre pas les perspectives dont la France, qui ne peut s'abstraire des réalités économiques, a besoin.

La France, c'est un tout, c'est un territoire, c'est une histoire. Et le Parlement a pour préoccupation l'ensemble du territoire dans sa diversité ; une partie du territoire ne saurait être opposée à l'autre. C'est pourquoi, après les concertations régionales et départementales nécessaires, la politique d'aménagement du territoire doit être débattue et arrêtée par le Parlement, garant de l'unité et de l'intérêt national.

Madame la ministre, l'action politique n'a de sens que si elle permet de préparer l'avenir. Le peuple n'attend pas de nous que nous nous déterminions en fonction des modes ou des sondages. Comme vous, nous pensons que notre capacité à infléchir des décisions n'est pas une illusion. Mais, à notre grand regret, cet intérêt suprême, cet élan partagé pour tous et par tous, cette conviction, cette d étermination, cette ambition pour la France dans l'Europe et dans le monde, nous ne le ressentons pas dans votre projet de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie francaise-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Je serai relativement brève puisque nous aurons, au cours de la discussion, l'occasion de revenir longuement sur chacun des points que vous avez abordés.

Le temps qui passe magnifie les événements qui se patinent avec l'âge. Vous dressez ainsi, monsieur le député, un tableau idyllique de la loi de 1995 non seulement dans la phase du débat parlementaire mais aussi dans celle de la mise en oeuvre.

Pourtant, rappelez-vous, le débat parlementaire n'a pas été aussi simple qu'il y paraît. Plusieurs milliers d'amendements avaient été déposés, 500 environ avaient été examinés par la commission de la production et des échanges, et plus de 100 adoptés avec un résultat que tout le monde connaît : une enflure du texte...

M. François Sauvadet.

Oh ! Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

... qui était passé de 24 à 88 articles, ce qui est considérable.

M. Patrick Ollier.

Il s'agissait d'une commission spéciale et non de la commission de la production et des échanges ! Vous êtes mal informée, madame la ministre ! Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Ne vous méprenez pas sur notre intention : nous avons souhaité simplifier, élaguer et aller à l'essentiel.

S'agissant de la phase de mise en oeuvre, votre démonstration se veut habile, elle est hélas ! tout à fait fausse.

Vous ne pouvez, en effet, imputer à l'actuel gouvernement la responsabilité de ce qui s'est passé pendant les deux ans et quatre mois qui ont suivi l'adoption de la loi Pasqua et au cours desquels vous étiez censés la mettre en oeuvre. Seules les dispositions qui ne posaient pas de difficultés ont été adoptées à l'époque. Certes, cela peut f aire illusion du point de vue quantitatif. En tout cas, il n'y a pas eu de schéma national, bien que plusieurs versions de ce texte aient fait l'objet d'essais de rédaction. La dernière version, celle qui était sur mon bureau au moment de la dissolution de l'Assemblée, n'a jamais pu être diffusée car elle n'était qu'un catalogue d'intentions générales sans aucune déclinaison pratique.

M. François Sauvadet.

Ce n'est pas sérieux ! Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l 'environnement.

Nous n'avons pas souhaité nous moquer de la représentation nationale...

M. Yves Deniaud.

Vous préferez vous en moquer aujourd'hui ! Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

... en proposant au vote un travail qui relevait plus d'une étude intellectuelle prospective que d'un travail de planification.

Il n'y avait pas non plus de schémas sectoriels dont rien d'ailleurs n'assurait la cohérence. A cet égard, je vous rappelle qu'il était prévu dans la loi Pasqua que ceux-ci seraient précisés par décret, ce que vous trouvez scandaleux aujourd'hui. Du reste, comme vous n'avez pas cherché à toiletter les schémas hérités de la loi d'orientation des transports intérieurs, il n'y avait aucun dispositif permettant d'assurer la cohérence, ne serait-ce qu'entre les modes de transport, ce que vous déplorez également aujourd'hui.

Pas de dispositif non plus permettant de sortir du moratoire sur les services publics ou garantissant la juste répartition, l'égalité d'accès et la qualité des services. P as de mise en oeuvre surtout des mesures fortes annoncées urbi et orbi au cours de la phase du grand débat concernant les compétences des collectivités locales, la fiscalité locale, la péréquation, l'organisation intercommunale.

Sept des huit rapports annoncés par la loi Pasqua n'avaient pas été réalisés. Une seule des quatre lois promises a été mise en oeuvre, celle qui concernait l'expérimentation ferroviaire.

Depuis, le Gouvernement auquel j'appartiens a fait son travail.

M. François Sauvadet.

Non ! Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Souffrez, monsieur le député, que j'explique un petit peu plus quelle a été la méthode choisie.

Nous avons évalué avec le plus de rigueur et de lucidité possible la loi Pasqua. Nous avons gardé ce qui fonctionnait et continué à mettre en oeuvre ce qui pouvait fonctionner. Nous avons souhaité changer ce qui n'était que bavardage...

M. Yves Deniaud.

Et c'est un avis d'expert ! Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement ... ou ce qui était fondé sur des analyses dépassées. Nous avons ajouté ce qui manquait et retranché ce qui était redondant.

Nous n'avons jamais voulu exclure le département et n'avons pas touché à ses compétences. Le département reste évidemment un interlocuteur de la région, d'une


page précédente page 00079page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 19 JANVIER 1999

part, et de l'Etat, d'autre part, pour la négociation des contrats entre l'Etat et la région. Je ne crois d'ailleurs pas que les fervents défenseurs des départements que vous êtes aient choisi en 1994, au moment de la négociation de la précédente génération des contrats, de faire droit aux demandes d'alors des départements.

Nous avons souhaité, en revanche, clarifier les compétences entre les collectivités et réaffirmer le rôle de chef de file de la région en matière d'aménagement du territoire, tout comme le département l'est en matière d'action sociale. Si tout le monde veut faire un peu de tout, il sera difficile de déterminer clairement les compétences de chacun des niveaux de collectivités territoriales.

M. Eric Doligé.

C'est vrai. Mais alors pourquoi en donner aux agglomérations ? Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Je ne crois pas non plus que la multiplication des infrastructures favorise la polarisation des activités sur quelques sites de stature internationale. Ce qui explique le succès de l'aménagement du territoire à l'allemande, c'est la capacité à construire des réseaux de ville qui coopèrent entre elles, qui sont organisées en grappes et qui ne stérilisent pas le territoire qui les entoure. Dans d'autres domaines également, nous pourrions nous inspirer de l'expérience allemande, mais c'est une autre histoire...

(Applaudissements sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert et du groupe socialiste.)

M. Eric Doligé.

Vous allez nous expliquer cela pendant la campagne des élections européennes !

M. le président.

La parole est à M. le rapporteur de la commission de la production et des échanges.

M. Philippe Duron rapporteur de la commission de la production et des échanges.

Monsieur Poignant, vous avez fait l'apologie de la loi Pasqua. Qui d'ailleurs pourrait le faire mieux qu'un député du groupe RPR ? Vous en faites un dogme intangible.

M. Patrick Ollier.

Ce n'est pas vrai !

M. Philippe Duron, rapporteur, Permettez toutefois qu'on puisse ne pas y adhérer.

Vous avez évoqué les textes d'application de la loi de 1995 qui ont été publiés. On devrait plutôt dresser la liste de ceux qui ne l'ont pas été.

M. Arnaud Montebourg.

C'est une loi creuse comme une dent !

M. Patrick Ollier.

Chiche, faisons la liste !

M. Philippe Duron, rapporteur.

Vous avez fait allusion aux objectifs classiques de l'aménagement du territoire : développer et équilibrer le territoire. Nous y souscrivons complètement. La loi Voynet enrichit simplement ces objectifs en élargissant l'aménagement du territoire à la perspective européenne et en prévoyant un développement durable.

Parfois, j'avais l'impression que, tout en critiquant la loi Voynet, vous en faisiez l'apologie. Vous avez parlé de développement, d'émergence des pays, de poursuite de la décentralisation, de renforcement de l'activité territoriale.

Ne sont-ce pas là les objectifs du présent texte ? J'ai vraiment cru déceler dans votre critique une approbation du projet aujourd'hui en discussion.

M. Patrick Ollier.

C'est une illusion d'optique !

M. Philippe Duron, rapporteur.

On ne peut pas faire de l'aménagement ailleurs que dans des territoires pertinents.

Ce que vous avez réclamé s'opérera dans le pays, dans l'agglomération.

La faiblesse de la loi Pasqua résidait d'abord dans ce que l'on a désigné sous le terme de ruralisme. Ce mot caricature peut-être un peu la réalité.

M. François Sauvadet.

Ah ! Vous progressez, monsieur le rapporteur !

M. Philippe Duron, rapporteur.

Il témoignait en tout cas d'une sorte d'idéalisation du monde rural. Le monde urbain, lui, n'était vu qu'au travers de ses difficultés. Il était stigmatisé. On ne traitait ses problèmes qu'avec des remèdes sectoriels, zonés. Dans le présente texte, ils sont, au contraire, envisagés globalement. On a pris en compte le fait que la ville constitue un élément essentiel de notre territoire. On veut simplement instaurer une solidarité entre les zones les plus riches et les zones les plus en difficulté.

Par ailleurs, vous ne partagez pas le souci du Gouvernement de déclarer l'urgence. N'est-il pas indispensable de cadrer les contrats de plan ? N'est-il pas nécessaire de le faire vite ? Où est la précipitation que vous dénoncez ? Le Gouvernement a décidé de créer deux volets dans les fonds mis à la disposition des contrats de plan : un volet régional et un volet territorial. Ainsi, s'il faut aller vite pour cadrer les contrats de plan, les élus auront tout le temps d'élaborer les projets de pays ou les projets d'agglomération.

Vous présentez la loi Voynet comme un ensemble de dédales. J'y vois au contraire quelques principes clairs et quelques points stratégiques très fortement identifiés.

Vous parlez d'éparpillement législatif là où je note le souci du Gouvernement de réformer de façon cohérente, globale et coordonnée.

Vous regrettez le schéma national. Ce point, j'en conviens, fait l'objet d'un débat entre nous. C'est probablement le débat le plus vrai que nous puissions avoir entre l'opposition et la majorité.

M. François Sauvadet.

Voire au sein de la majorité !

M. Philippe Duron, rapporteur.

D'un côté, il y a l'assurance d'une France qui resterait centralisée, de l'autre, le souci d'être en cohérence avec la décentralisation. Souvenez-vous, vous étiez contre les lois de 1982. Les présidents de régions de l'opposition seront peut-être demain moins farouchement opposés aux schémas de services collectifs qui leur donneront plus de possibilités de territorialiser la planification.

M. Eric Doligé.

Il faut voir le résultat sur le terrain !

M. Philippe Duron, rapporteur.

Vous craignez qu'il y ait des chaînons manquants dans les infrastructures. Il est vrai que certaines liaisons sont encore incomplètes. Ainsi, dans ma région, en Basse-Normandie, nous attendons des voies méridiennes.

M. Yves Deniaud.

C'est vrai !

M. Eric Doligé.

Et qui décide ? C'est l'Etat !

M. Philippe Duron, rapporteur.

Le président Lajoinie pourrait nous rappeler la nécessité de développer les liaisons Est-Ouest, la route Centre Europe-Atlantique.

M. Eric Doligé.

Cela relève de l'Etat, pas de la région !

M. Philippe Duron, rapporteur.

Mais rien ne vous permet d'affirmer que les infrastructures seront abandonnées.

M. Jean Auclair.

Comme le barrage de Chambonchard ! N'est-ce pas, monsieur Lajoinie ?

M. Philippe Duron, rapporteur.

Lorsqu'elle est venue devant notre commission, Mme Voynet nous a dit que tel ne serait pas le cas.


page précédente page 00080page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 19 JANVIER 1999

Vous prétendez que les départements sont oubliés. Ce texte prévoit simplement que la région est le cadre privilégié de l'aménagement du territoire. Cela ne signifie pas que le département devient vide de sens. Nous nous sommes efforcés de lui permettre de donner son point de vue sur la définition des périmètres. Nous avons également précisé qu'il serait associé en amont et en aval de la contractualisation. Le département n'est donc pas abandonné. Il joue un autre rôle à une autre place, voilà tout.

Je terminerai en soulignant une équivoque entre la critique que vous émettez et les arguments que vous avancez pour la soutenir.

M. Patrick Ollier.

On ne vous sent pas convaincu, monsieur le rapporteur !

M. Philippe Duron, rapporteur.

De mon point de vue, votre question préalable ne se justifie pas.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

Dans les explications de vote, la parole est à M. Alain Ferry.

M. Alain Ferry.

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la question préalable qui vient d'être défendue par notre collègue Serge Poignant nous semble pleinement justifiée.

Le projet de loi soumis à note examen se veut, selon l'expression du rapporteur, « une loi de méthode ». C'est reconnaître qu'elle ne remplit pas son objet.

Le Conseil d'Etat dans son rapport annuel de 1991 déplore que « trop de textes de loi ne permettent pas de distinguer l'intention de l'action ». Madame la ministre, votre projet de loi encourt cette critique. Il est placé tout entier sous le signe de la déclaration d'intention.

Vous multipliez les affirmations générales et dépourvues d'implications précises. L'article 1er accumule les pétitions de principe, ce qui lui ôte de toute portée normative. La notion de développement durable relève d'un discours philosophique qui n'a sa place que dans l'exposé des motifs. Qui plus est, on nous assure que ce texte comporte « la prise en compte de la dimension européenne » qui faisait à vos yeux défaut à la loi de 1995.

Mais quelle disposition contraignante accompagne cette déclaration d'intention ? Aucune.

Vous opérez en outre des choix contestables.

Vous cédez à la tentation de l'effet d'affichage en supprimant le schéma national d'aménagement du territoire.

Certes, ce dernier n'était qu'en voie d'élaboration. Mais la phrase de maturation était presque achevée. Un avantprojet avait été approuvé par le gouvernement précédent au printemps 1997. Alors que vous auriez pu assurer sa réalisation, vous avez préféré faire table rase.

M. Jean-Pierre Baeumler.

Vous, vous avez préféré la dissolution !

M. Alain Ferry.

Les huit schémas de services collectifs seront publiés par décret selon le texte présenté par le Gouvernement avant son examen en commission, ce qui signifie que le pouvoir qu'avaient obtenu les élus en 1995 est récupéré par l'administration.

De surcroît, vous alourdissez la procédure de création des pays. Pour contractualiser, ceux-ci devront se constituer en syndicat mixte ou en établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre.

Ces exigences supplémentaires peuvent décourager les initiatives.

Quant aux dispositions relatives aux agglomérations, elles traduisent une vision de l'aménagement opposant une zone urbaine créatrice de richesse et une aire rurale perçue comme un patrimoine à protéger plutôt que comme un lieu de vie.

Enfin, vous n'entreprenez aucune des réformes de fond décisives pour l'avenir. Ainsi, une forte péréquation de la taxe professionnelle est indispensable pour assurer une plus juste répartition des ressources entre les collectivités locales. De même, il faut instituer une réelle fiscalité locale dérogatoire dans les zones rurales menacées de désertification.

Le groupe Union pour la démocratie française-Alliance votera la question préalable. En effet, ce projet de loi traduit une absence de volonté politique.

(Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Rudy Salles.

C'est vrai !

M. Alain Ferry.

Vous compensez cette situation en multipliant les effets d'annonce. En fait, vous nous présentez un discours de politique générale davantage qu'un projet de loi.

En conclusion, madame la ministre, permettez-moi de vous rappeler ce mot d'un philosophe : « Le discours est souvent l'ombre de l'action. »

(Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie françaiseAlliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à M. Nicolas Forissier.

M. Nicolas Forissier.

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, comme l'a clairement montré Serge Poignant, la question préalable de l'opportunité de ce projet de loi d'orientation est parfaitement justifiée.

La loi de 1995 est maintenant presque entièrement appliquée. Elle est entrée peu à peu en vigueur et aurait pu, à long terme, porter ses fruits. Sans doute était-il n écessaire d'y apporter quelques aménagements, de renforcer certains dispositifs, mais, en tout cas, rien ne semblait justifier ce nouveau projet de loi d'orientation.

Du reste, il ne révise que très partiellement la loi de 1995 puisque, sur les 88 articles que comportait celle-ci, 68 ne sont pas modifiés.

Ni l'affirmation du concept très à la mode de développement durable, concept qui figure déjà dans la loi de 1995 et se rapproche de la définition du développement rural donnée dans le code rural, ni la réaffirmation des pays n'exigeait le recours à une nouvelle loi d'orientation.

Quant à la disparition du schéma national d'aménagement du territoire, remplacée par des schémas de services collectifs, elle laisse planer, comme cela a très bien été souligné, de sérieuses menaces de recentralisation de la politique d'aménagement du territoire.

(M. Jean-Claude Ayrault quitte l'hémicycle. - Exclamations et rires sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Yves Deniaud.

M. Ayrault craint que les députés du groupe socialiste ne soient pas assez nombreux pour le vote sur la question préalable !

M. Patrick Ollier.

On devrait passer au vote tout de suite !

M. François Sauvadet.

M. Ayrault est parti rameuter des collègues socialistes !


page précédente page 00081page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 19 JANVIER 1999

M. Yves Deniaud.

Il va téléphoner !

M. Patrick Ollier.

Envoyer des fax !

M. le président.

Monsieur Forissier, ne vous laissez pas interrompre.

M. Nicolas Forissier.

Monsieur le président, j'attendais que les exclamations cessent.

An nom du groupe Démocratie libérale et Indépendants, je voudrais vous dire, madame la ministre, que ce projet de loi apparaît donc inopportun à de nombreux égards. J'ajouterai qu'il nous semble également en décalage avec la réalité.

Quand vous nous présentez les pays comme un des axes forts de votre projet, une de ses innovations, permettez-moi de vous faire part de notre étonnement. Le pays conçu comme bassin de vie et cadre d'un projet commun de développement, nous sommes beaucoup ici, sur ces bancs, à le vivre au quotidien, à le pratiquer sur le terrain, et depuis plusieurs années. Vous reconnaîtrez donc qu'il y a là un certain décalage entre vos discours de principe et la réalité déjà vécue.

Si les lois d'orientation sont utiles à l'aménagement du territoire, car elles définissent les grandes lignes de ce que sera notre organisation territoriale et fournissent des outils aux acteurs de terrain - la loi de 1995 et le grand débat qui a entouré son adoption ont été très utiles en ce sens -, il vient un temps où nous devons accorder la priorité à la mise en oeuvre concrète. En effet, mes chers collègues, ces débats ne doivent pas nous faire perdre de vue que l'aménagement du territoire est avant tout le fruit du travail des élus locaux, des associations, des socioprofessionnels qui se mobilisent et s'organisent pour faire vivre leur territoire.

De ce point de vue, force est de constater que de nombreux projets ont été gelés ces derniers mois, en raison de l'incertitude causée par le dépôt de ce projet. A cet égard, il convient de formuler deux remarques.

Alors que de plus en plus d'élus, notamment des maires en zone rurale, peinent à s'y retrouver dans l'écheveau des schémas, zonages, comités, conseils et autres procédures mises en place pour aménager le territoire, votre projet va le rendre encore plus complexe.

M. Jacques Limouzy.

Bien sûr !

M. Nicolas Forissier.

Ensuite, votre projet va provoquer une grande rupture entre le monde rural et la ville et son agglomération. Par exemple, l'aménagement du territoire, c'est aussi, ne l'oublions pas, des milliers de chefs d'entreprise qui ont fait le pari de s'installer en milieu rural, et nous devrions redoubler d'efforts pour soutenir ces PME-PMI. Or c'est un grand manque de votre texte.

J'insiste sur ce sujet, madame la ministre, parce que vous semblez parfois cantonner les campagnes dans un rôle de parcs de loisirs pour citadins, alors que seules l'activité économique, la présence de PME-PMI et les emplois qu'elles engendrent sont de nature à assurer la survie et le dynamisme des zones rurales.

M. François Rochebloine.

Votons !

M. Nicolas Forissier.

Je ne reviens pas sur l'abandon du moratoire relatif à la fermeture des services publics en milieu rural, dernière bonne nouvelle - si je puis dire qu'ont apprise les habitants de ces régions.

Je pourrais développer bien d'autres raisons encore, mais je sais que le temps m'est compté. (« Oui ! Oui ! » sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance. Sourires.) Madame la ministre, les insuffisances de votre texte et, plus globalement, de votre politique en matière d'aménagement du territoire, telles qu'elles ont été soulignées par M. Poignant, justifient largement que le groupe Démocratie libérale et Indépendants vote la question préalable.

(Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

M. le président.

La parole est à M. Jean-Claude Daniel. (« Au vote ! Au vote ! » sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Jean-Claude Daniel.

Je regrette, mon cher collègue, que vous n'ayez pas été mieux écouté, sinon entendu par vos propres rangs.

M. Eric Doligé.

Il va vous arriver la même chose !

M. Jean-Claude Daniel.

Monsieur Meylan, pour défendre la question préalable, vous avez posé huit ou neuf questions que l'on pourrait résumer en une seule : pourquoi avez-vous abandonné la loi Pasqua ? (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) En qualité d'élu local, j'ai connu la réflexion préparatoire à la loi Pasqua.

(Plusieurs députés du groupe socialiste prennent place dans l'hémicycle.)

M. Maurice Leroy.

Voilà du renfort pour la majorité.

(Rires et exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Jean-Claude Daniel.

Mes chers collègues, je salue, comme vous, une arrivée en nombre de mes collègues.

M. le président.

Monsieur Daniel, poursuivez votre propos, s'il vous plaît !

M. Jean-Claude Daniel.

Lorsque, l'année suivante sur adoption, j'ai rencontré M. Gaudin à Paris, il m'a dit qu'il était désolé, mais qu'il n'avait plus d'argent à distribuer, car il n'en avait eu que pendant six mois. J'ai donc été frustré, comme de nombreux élus locaux.

M. Michel Meylan.

Voilà M. Balligand qui arrive ! (Rires et exclamations sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

M. Guy-Michel Chauveau.

Monsieur le président, nous n'entendons plus l'orateur !

M. Jean-Claude Daniel.

Monsieur Meylan (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants)...

M. le président.

Monsieur Daniel, ne vous laissez pas troubler, continuez votre propos !

M. Jean-Claude Daniel.

Je ne suis pas troublé, monsieur le président, mais un peu de calme ne nous ferait pas de mal.


page précédente page 00082page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 19 JANVIER 1999

Monsieur Meylan, vous nous aviez habitués, au cours du travail en commission, à une lecture intelligente...

Plusieurs députés du groupe du Rassemblement pour la République.

Poignant !

M. le président.

Mes chers collègues, un peu de calme, s'il vous plaît ! Monsieur Daniel, poursuivez. Vous avez la parole pour cinq minutes !

M. Jean-Claude Daniel.

Monsieur Meylan, vous nous aviez habitués à une lecture intelligente, en particulier des propositions nouvelles (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste)...

M. Guy-Michel Chauveau.

Monsieur le président, faites respecter le silence !

M. le président.

Calmez-vous, je vous en prie ! Nous n'en sommes qu'aux explications de vote sur la question préalable ! Poursuivez, monsieur Daniel !

M. Jean-Claude Daniel.

A condition que l'opposition veuille bien m'écouter, monsieur le président !

M. Patrick Ollier.

C'est incroyable, il ne sait pas à qui il parle !

M. Jean-Claude Daniel.

Monsieur Meylan, vous nous aviez habitués à une lecture intelligente (Vives exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants)...

M. Patrick Ollier.

Mais ce n'est pas M. Meylan !

M. le président.

Monsieur Daniel, poursuivez votre propos.

M. Jean-Claude Daniel.

Monsieur Poignant - excusezmoi, mes chers collègues, j'étais en retard de quelques prises de parole - (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants) - vous nous aviez habitués à écouter et à participer à la préparation des amendements.

Bien que, aujourd'hui, tout ne soit pas, dans ce projet, conforme à vos aspirations et que vous exprimiez quelques regrets, vous avez participé avec constance à la préparation d'un texte amendé.

Mme Michèle Alliot-Marie.

Vous ne savez rien, vous n'êtes jamais là, et vous ne connaissez même pas les noms des orateurs !

M. Jean-Claude Daniel.

En ce qui concerne d'abord les schémas de services, vous avez souligné qu'ils n'étaient p as exhaustifs. Effectivement, justice, secteur social, sécurité, d'autres domaines encore, n'y figurent pas. Cela est normal, car il doit rester à l'Etat la mise en oeuvre d'une politique d'équité républicaine. Chacun son rôle ! A insi, centralisme et décentralisation ne seront pas contradictoires, mais complémentaires.

Selon vous, il n'y aurait plus de cohérence en raison de la suppression du schéma national.

M. Maurice Leroy.

C'est vrai !

M. Jean-Claude Daniel.

J'ai d'ailleurs le sentiment que cet argument reviendra de façon récurrente.

M. Patrick Ollier.

Oui, parce qu'il est juste !

M. Jean-Claude Daniel.

Nous estimons, au contraire, que cela permettra de nouveaux échanges avec les collectivités territoriales, la région en particulier, dans la déclinaison des schémas à cette échelle.

Vous avez aussi souligné que les départements étaient les grands oubliés du projet.

M. François Rochebloine.

Eh oui !

M. Jean-Claude Daniel.

Pourtant, il seront parties au SRADT, aux contrats de plan et à la mise en oeuvre opérationnelle. D'ailleurs, ceux qui ne sont pas actuellement enfermés dans une vision étroite de l'avenir le préparent.

Certains présidents de conseil régional, issus de vos rangs, ont même déjà pris le train en marche.

A propos du rôle des préfets, vous craignez une intercommunalité forcée. Nous partageons cette appréciation et c'est bien pourquoi le texte vise à éviter les effets d'aubaine et à faire échec aux chasseurs de primes. Ainsi, un amendement de M. Balligand propose que l'on tienne compte de cinq paramètres : taille en population, TPU, coefficient d'intégration fiscale, projet et charte, compétences.

M. François Rochebloine.

Très bien !

M. Jean-Claude Daniel.

Pour ce qui est du service public, il faut bien prendre en compte le fait que la répartition de la population sur le sol français est différente de ce qu'elle était il y a trente-cinq ans.

Nous devons surtout envisager des implantations permettant d'avoir non pas moins de service public, mais mieux de service public.

Vous avez souligné qu'il était difficile de voir où était pris en compte, dans ce texte, la nécessité de soutenir l'emploi. La réponse est simple : c'est le projet dans son ensemble qui favorise l'emploi.

Vous avez enfin indiqué que la loi Pasqua était à compléter. Je vous remercie de l'avoir compris et de l'avoir dit, car non seulement elle était à compléter, mais elle était aussi à réorienter au travers des hommes, des projets et des actions, au-delà de la logique des guichets et des structures.

Avec cette loi nous changeons de logique. Nous nouons avec les territoires ruraux, urbains et « rurbains » un nouveau pacte de confiance, un nouveau pacte de développement.

M. Eric Doligé.

Ce n'est pas vrai ! Vous ne pouvez pas le croire !

M. Jean-Claude Daniel.

L'Etat, pour sa part, conservera son attachement au pacte républicain, gage de l'équité sur le territoire national.

Pour toutes ces raisons, nous voterons contre la question préalable. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

La parole est à M. Yves Deniaud.

M. Yves Deniaud.

Sans reprendre les arguments développés par Serge Poignant, je tiens à présenter quelques remarques pour répondre aux objections qui lui ont été opposées et qui nous sont opposées depuis l'ouverture de ce débat.

A ceux qui prétendent que la loi Pasqua n'aurait pas été appliquée ou n'aurait pas été applicable, je rappelle que de nombreux textes d'application avaient été pris en deux ans, entre 1995 et 1997. La comparaison avec ce que vous avez fait en la matière depuis deux ans...


page précédente page 00083page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 19 JANVIER 1999

M. Eric Doligé.

Rien !

M. Yves Deniaud.

... serait facile. Nous aurons d'ailleurs l'occasion de revenir sur ces chiffres et sur le bilan.

Je veux également traiter de la méthode.

Vous avez voulu changer la loi Pasqua. Pourquoi pas, puisque vous êtes la majorité et que vous êtes le Gouvernement ?

M. Maurice Leroy.

Voici encore de nouveaux députés socialistes qui arrivent en renfort !

M. Yves Deniaud.

Je salue en effet nos collègues qui ont été arrachés à leur torpeur vespérale et qui veulent bien nous rejoindre. Cela nous fait chaud au coeur.

! (Rires et applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Dans votre méthode, donc, il aurait été nécessaire d'appliquer un peu les recettes de la loi Pasqua.

Notre collègue, M. Balligand, a bien souligné qu'il s'était agi d'une grande opération médiatique. Certes, on peut toujours baptiser une action comme on le souhaite, mais, en l'occurrence, durant les sept mois de préparation, un travail approfondi avait été réalisé en écoutant non seulement les élus de tous les niveaux, à commencer par les élus locaux, mais aussi les représentants des forces économiques et sociales, ceux que l'on appelle les socioprofessionnels : chambre de commerce, syndicats, conseils économiques et sociaux des régions. Ils avaient tous pu s'exprimer. Or rien de tel n'a été fait dans la démarche qui aboutit aujourd'hui, même pas l'évaluation chiffrée des résultats de la loi Pasqua.

M. Joseph Parrenin.

Zéro !

M. Yves Deniaud.

Nous aurions pourtant aimé connaître les effets de la création des zonages, des zones de revitalisation rurale, des TRDP, des zones de redynamisation urbaine.

M. Joseph Parrenin.

Nous ne voulions pas vous faire une telle injure !

M. Yves Deniaud.

Un bilan des implantations d'entreprises, des créations d'emplois et des coûts aurait été inté ressant. Vous n'avez pas cherché à le présenter. Pourtant son intérêt aurait été d'autant plus grand que nous allons connaître une réforme profonde des zonages européens.

En effet, si cette loi pouvait avoir une utilité quelconque, ç'aurait été celle de préparer et d'adapter notre propre système d'aides à l'évolution négative future.

A cause de la mauvaise défense de nos intérêts au niveau de l'Europe, nous allons subir une diminution importante dans le cadre des zonages, qu'il s'agisse de crédits ou de territoires concernés. Il aurait pourtant été utile de prévoir des crédits pour soutenir les actions que l'Europe continuera d'aider et pour compenser ses financements là où elle n'interviendra plus. Telle aurait été la seule utilité que nous aurions pu reconnaître à votre texte. Cela n'est pas le cas, ce qui suffit à justifier que nous votions la question préalable. (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)

M. le président.

La parole est à M. Jean-Michel Marchand.

M. Jean-Michel Marchand.

Cher collègue Poignant, j'ai constaté que vous dressiez un bilan de la loi Pasqua avec beaucoup de nostalgie. Vous en avez cependant relevé à la fois les imperfections et les limites constatées dans sa mise en application.

Vous avez contesté de nombreux aspects du texte proposé, mais je ne reviendrai que sur certains d'entre eux.

En ce qui concerne d'abord l'urgence, je dois souligner qu'elle se justifie parfaitement au regard de tout ce qui nous attend en 1999. Je pense en particulier à la négociation des contrats de plan qui sont d'une importance capitale, quelles que soient les responsabilités que nous exercions dans ce pays.

Pour ce qui est des schémas de services collectifs, nous considérons qu'ils concrétisent le caractère opérationnel et l'efficacité que doit revêtir ce projet de loi.

Vous vous inquiétez aussi de la coprésidence qui sera exercée par le préfet de région et par le président du conseil régional. Or cela témoigne de notre volonté de faire en sorte que cette loi reconnaisse à la fois la prédominance de l'Etat dans les orientations prises, et la nécessité de renouveler les compétences des régions en matière d'aménagement et de développement durable des territoires.

M. Eric Doligé.

Nous verrons le résultat !

M. Jean-Michel Marchand.

Enfin, je rappelle de nouveau que si ce texte reprend certains points de la loi Pasqua, il marque aussi notre volonté de rompre la logique que sous-tendrait ce texte. Nous voulons à la fois que soit prise en compte la réalité de l'implantation des populations sur le territoire, donc les agglomérations, et que soit mise en oeuvre une politique de projets dans le cadre des pays avec la volonté d'aménager et de structurer le territoire. Ce projet traduit aussi l'affirmation d'un concept qui nous est cher, celui de développement durable.

Pour toutes ces raisons, nous ne voterons pas la question préalable.

M. Yves Cochet.

Très bien !

M. le président.

La parole est à M. Félix Leyzour.

M. Félix Leyzour.

Madame la ministre, mes chers collègues, il n'y aurait pas lieu de délibérer si la loi actuelle donnait satisfaction et permettait de régler les problèmes d'un développement équilibré du territoire, d'un développement équilibré de nos territoires. Or tel n'est pas le cas.

Je veux d'abord formuler quelques observations sur les conditions dans lesquelles la loi de 1995 avait été préparée et votée.

Nous savons tous que le thème était le suivant : résorber la fracture territoriale.

M. Edouard Landrain.

Très bien !

M. Félix Leyzour.

Il fallait évidemment tenir compte de l'évolution de la société qui avait provoqué une inégalité entre les territoires que tout le monde pouvait constater.

Sans doute y avait-il le souci de rechercher des réponses au creusement des inégalités, mais chacun s'était rendu compte qu'un autre objectif était visé : opérer un grand rassemblement des élus et des acteurs de terrain autour de M. Balladur qui préparait l'élection présidentielle.

M. Eric Doligé.

Aujourd'hui, c'est Jospin !

M. Félix Leyzour.

Cela n'avait échappé à personne.

Or il se trouve que, dans le camp de ceux qui ont porté ce texte, c'est sur le thème de la fracture sociale que M. Chirac l'a ensuite emporté sur M. Balladur, porteur lui du thème de la fracture territoriale.

M. Maurice Leroy.

La double fracture !

M. Félix Leyzour.

Un peu de pudeur, Maurice Leroy !


page précédente page 00084page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 19 JANVIER 1999

Comme la voie du toujours plus de libéralisme a été empruntée, il n'est pas étonnant que la politique appliquée à partir de 1995 soit allée à l'encontre d'une aménagement équilibré du territoire.

Certes, quelques dispositions intéressantes ont été mises en oeuvre et j'ai eu l'occasion, en tant que rapporteur du budget sur l'aménagement du territoire de faire une petite prospection.

Ainsi, il faut être objectif, quelques fonds ont été créés : le FITTVN, le FGER, le FNDE, le FPTA. Nous avons aussi bénéficié de la mise en place des directives territoriales d'aménagement.

En revanche le schéma national d'aménagement du territoire n'a jamais été élaboré alors qu'il était le pilier c entral du dispositif. Nous n'avons pas vu naître non plus le dispositif d'observation et d'évaluation, les neuf schémas sectoriels non plus que le dispositif de modernisation de l'Etat.

M. Patrick Ollier En deux ans, vous auriez pu le faire !

M. Félix Leyzour.

Les conventions collectives, les conventions des services publics, la polyvalence des services publics, les lois de programmation sectorielles, les dispositions relatives à la mobilité économique des personnes, celles en faveur des zones rurales ou de l'habitat ancien, celles correspondant à la péréquation régionale, à la fiscalité locale, à la taxe professionnelle, à la réforme de la coopération intercommunale qui constituaient l'armature du texte n'ont pas été réalisées de 1995 à 1997, c'est-à-dire par vous-mêmes.

Il y a donc tout à fait lieu de discuter aujourd'hui et d'examiner un nouveau texte. C'est pourquoi le groupe communiste votera contre la question préalable.

(Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et du groupe socialiste.)

M. le président.

Nous en avons terminé avec les explications de vote.

Je mets aux voix la question préalable.

(La question préalable n'est pas adoptée.)

Discussion générale

M. le président.

Dans la discussion générale, la parole est à M. Georges Sarre.

M. Georges Sarre.

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, débattre de l'aménagement du territoire après l'unification de l'Allemagne, le retour de sa capitale à Berlin, l'élargissement de l'Union, le rééquilibrage de notre sous-continent, est une ambition difficile, mais pleine d'intérêt.

Le centre de gravité de l'Europe s'est déplacé vers l'Est.

Une grande zone de dynamisme se fortifie de Londres à Milan.

Elle risque de laisser nos façades atlantique et méditerranéenne en marge de ce développement.

Vous le savez, madame la ministre, les politiques européennes d'aménagement n'existent pas ou pas encore ; les fonds structurels sont appelés à s'amenuiser.

Bref, nous évoquons aujourd'hui l'unique instrument de correction et d'anticipation des déséquilibres territoriaux, de suppression des inégalités liées à la géographie e t à l'espace.

Nous avons à le faire au moment où la vogue du libéralisme tend à priver de légitimité toute intervention publique. Nous savons bien pourtant à quel point elle est nécessaire, que l'on place comme vous, madame la ministre, le développement durable au premier plan de ses préoccupations ou que l'on songe tout simplement à l'avenir de notre nation.

Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Ce n'est pas incompatible.

M. Georges Sarre.

Qui peut maîtriser le temps, réguler, aménager, planifier, organiser, échapper à la tyrannie de l'intérêt à court terme, sinon l'Etat ? Madame la ministre, vous avez apporté à la rénovation de la planification une contribution personnelle, qui permet certes à votre projet, malgré les filtres bureaucratiques, de faire preuve d'une certaine originalité. Je ne vous cacherai pas cependant mes réserves, nos réserves.

Le principal outil d'une politique d'aménagement du territoire reste, à mes yeux, un schéma national, dès lors que l'on situe clairement les enjeux de la concurrence.

M. André Angot.

Eh oui !

M. Georges Sarre.

Comment mettre en cohérence le développement des territoires avec celui de la nation, face aux défis de nos voisins européens ? Comment mettre en oeuvre une planification territoriale cohérente, solidaire, organisée, sans schéma national d'aménagement du territoire ? Votre projet nous indique bien sûr que l'Etat

« fixera les règles et veillera à l'équité ». Le temps me manque pour dessiner les contours de ce qui sépare l'égalité de l'équité. Mais ce rôle de l'Etat, souligné par votre projet, disposera-t-il des outils pour s'affirmer ? Secteur par secteur, les schémas de services collectifs devraient répondre à des objectifs de l'Etat en région.

Mais le cadrage et la planification générale restent nécessaires. Le rôle du Parlement serait fort utile pour préciser le contenu de ces schémas dès lors qu'ils demeurent les seuls outils programmatiques, structurants et d'équipement de notre territoire. C'est là encore affaire de rapport de forces au plan européen et mondial. Je ne propose naturellement pas d'étouffer les régions par les volontés de Paris, mais de prendre appui sur l'expression de la volonté nationale pour relever le défi du libéralisme et du laisser-faire.

Ainsi, secteur par secteur, mais sans cadrage ni planific ation généraux, les schémas de services collectifs devraient répondre à des objectifs de l'Etat en région. A cet égard, il est tout de même surprenant que notre assemblée ne soit nullement informée du contenu de chacun de ces schémas - d'ailleurs, sont-ils définitivement élaborés ? - alors même qu'ils restent les seuls outils programmatiques, structurants et d'équipement de notre territoire prévus dans le projet ? Plus surprenant encore est le fait qu'il soit clairement prévu que notre assemblée soit totalement écartée du dispositif d'élaboration desdits schémas. La représentation nationale n'est-elle pourtant pas directement concernée par la question de l'aménagement du territoire français qui déterminera la capacité de nos régions à relever les défis du libéralisme mondial et ceux que leur imposera bientôt Agenda 2000 avec la baisse annoncée des fonds structurels ? Il y a, à mes yeux, beaucoup de risques, au moment où Agenda 2000 programme la baisse des fonds structurels, à choisir en France de nous désarmer sur ce point.

J'ai lu avec beaucoup d'intérêt, madame la ministre, vos récentes déclarations sur le sens des « pays », qui doivent demeurer des cadres de projet et non devenir des i nstitutions. Certes le triptyque actuel « commune - département - nation » comporte des inconvénients, mais il repose sur le suffrage universel à tous les niveaux.


page précédente page 00085page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 19 JANVIER 1999

La tentation d'y substituer un nouveau triptyque « pays - région - Europe » n'est pas la bonne solution. Car c'est le rôle du suffrage universel et du citoyen qui serait méconnu : il n'y a pas d'instance élue au niveau du pays, et les électeurs - on peut le constater avec regret - ne s'intéressent pas assez à la région et moins encore au Parlement européen, faute d'espace public commun de débat.

M. Jean-Pierre Balligand.

Ni au conseil régional.

M. Georges Sarre.

Vivifier les institutions déjà irriguées par un suffrage universel actif et mobilisé serait de meilleure méthode. Appuyons-nous sur les citoyens, mes chers collègues.

Une bonne politique d'aménagement du territoire a besoin d'être liée à la représentation politique du pays et non à des représentations imaginées, sans ancrage dans la durée ou sans ancrage dans la réalité sociale et politique du pays.

Notre premier objectif - et il est commun - c'est l'emploi : le développement des activités productives, l'articulation entre l'industrie et la recherche, le rôle des services publics méritent que de nouveaux outils d'aménagement soient mis en oeuvre. Fonder sur l'évaluation des besoins locaux l'élaboration des schémas de service est de bonne méthode. Mais le lien avec une politique articulée de construction d'infrastructures et d'équipements nouveaux lorsqu'ils sont nécessaires se fera vite sentir.

Songeons par exemple au désenclavement de certains de nos territoires qui restent isolés aujourd'hui.

En milieu rural spécialement, les préoccupations environnementales, qui doivent beaucoup à votre ténacité, madame la ministre, ne doivent pas méconnaître les exigences du développement économique et de la croissance créatrice d'emplois.

Madame la ministre, je vous accorde que la planification territoriale dans un environnement ultra-libéral est un exercice difficile. Elle n'en reste pas moins l'un des rares outils que nous avons à notre disposition pour préparer un avenir maîtrisé.

M. Gérard Saumade.

Très bien !

M. Georges Sarre.

Vous avez toiletté la loi d'orientation de février 1995 en ayant pour objectif louable de créer les conditions d'un nouvel équilibre entre développement rural et développement urbain.

Mais je crains que vous n'ayez sous-estimé votre plus sûr allié dans ce combat : l'Etat capable de s'affranchir des intérêts à courte vue pour choisir la durée.

Non, décidément, l'Etat ne s'oppose pas aux régions, ni aux départements, ni aux pays, ni aux communes. Il défend notre place en Europe face à des voisins qui sont aussi des concurrents. L'Etat n'est pas le procureur des collectivités locales, il est l'avocat de l'intérêt général.

Il n'est pas l'ennemi de la décentralisation, mais le défenseur des citoyens qui entendent aménager leur territoire selon leurs volontés et non selon la volonté des marchés.

Voilà, madame la ministre, ce que je voulais vous dire dans le cadre du débat général. J'interviendrai à nouveau lors de l'examen des amendements. (Applaudissements sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. André Vauchez.

Très bien !

M. Félix Leyzour.

Très bien !

M. le président.

La parole est à M. Jean-Claude Lenoir.

M. Jean-Claude Lenoir.

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, dans l'arsenal juridique que nous employons dans cette assemblée, il y a un certain nombre de lois appréciées pour les mots qu'on utilise. Les lois d'orientation font partie de celles-là.

Qu'est-ce qu'une loi d'orientation ? C'est une loi qui vise le long terme et fixe les grands objectifs d'une politique publique. Nous en avons connu une récemment : la loi d'orientation agricole.

La vôtre, madame la ministre, porte également le nom de loi d'orientation. Franchement, après celle portant sur le même sujet adoptée en 1995, cette appellation est-elle fondée ? Y a-t-il vraiment dans le texte que vous nous proposez de nouvelles orientations qui justifient ces mots ? D'abord, êtes-vous en désaccord avec la loi de 1995 ? Soixante-huit des quatre-vingt-huit articles que comporte cette loi ont été maintenus. Certaines dispositions, nous le savons bien et Patrick Ollier l'a rappelé tout à l'heure avec autorité, n'ont pas été appliquées parce que le temps n'a pas été donné au précédent gouvernement de publier les décrets.

M. Patrick Ollier.

Tout à fait !

M. Jean-Claude Lenoir.

N'est-il pas important, madame la ministre, sur des textes majeurs, de laisser du temps pour que les choses s'installent progressivement dans le décor administratif de notre pays ? Je prendrai un exemple qui a été avancé au cours du débat de l'après-midi : celui de la loi de 1992 sur l'intercommunalité. Lorsque la nouvelle majorité est arrivée au pouvoir en 1993, qu'en était-il de l'application de cette loi ? Combien de communautés de communes avaient été instituées ? Très peu. Il a fallu attendre 1995 et 1996 pour voir de telles communautés se constituer.

M. Henry Chabert.

Tout à fait !

M. Jean-Claude Lenoir.

Pour autant, la majorité comme le gouvernement de l'époque n'ont pas eu un seul instant l'idée d'abroger un texte qui avait besoin d'être soumis à l'épreuve du temps pour que l'on vérifiât sa pertinence et son utilité.

M. François Sauvadet.

Très bien.

M. Jean-Claude Lenoir.

Vous avancez, madame la ministre, trois orientations nouvelles pour justifier votre texte.

La première est la notion de développement durable. Je n'y reviens pas. D'autres orateurs en ont longuement parlé.

Les deux autres ambitions nouvelles sont la recherche de territoires pertinents et une conception moins dirigiste de l'Etat en matière d'aménagement du territoire.

Sur les territoires pertinents, autrement dit les pays, je voudrais exprimer, madame la ministre, la position de mon groupe : il y est très favorable. Cette notion a émergé du texte de 1995 et nous sommes nombreux aujourd'hui à considérer que l'organisation du territoire en pays est une bonne chose.

Mais, pour que cette organisation soit réussie, il faut que soient réunies quelques conditions que je me permets d'énumérer rapidement.

D'abord, il faut du temps pour que les esprits s'accommodent peu à peu à cette nouvelle organisation.

M. Michel Meylan.

Tout à fait !


page précédente page 00086page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 19 JANVIER 1999

M. Jean-Claude Lenoir.

Il faut ensuite une logique.

Vous l'avez d'ailleurs souligné et peu de personnes iraient contre le raisonnement que vous tenez : il faut une logique de projet tournant le dos à une logique de guichet.

M. Michel Meylan.

Voilà !

M. Jean-Claude Lenoir.

Troisième point : il faut que l'organisation soit lisible. Nous sommes confrontés sur le terrain à des difficultés de plus en plus nombreuses. Les élus et les citoyens sont un peu perdus dans l'enchevêtrem ent des divisions administratives qui peu à peu recouvrent le territoire, rendant sa lisibilité extrêmement difficile. Le citoyen comme l'élu ont besoin de voir clair dans la répartition des compétences et des rôles exercés par les uns et par les autres.

Il faut ensuite de la cohérence.

Je suis favorable, madame la ministre, à une organisation minimale du pays. Chacun sur ce point raisonne en fonction de l'expérience qu'il conduit sur le terrain.

Pour ma part, tout libéral que je sois, j'ai organisé un pays d'une façon peut-être un peu forte à travers un syndicat mixte qui a été mis en place avant même que la loi soit connue de nous.

Pour moi, il existe peu de différence entre une association loi 1901, une structure de droit public ou un syndicat mixte. Je ne vois qu'un immense avantage pour celui qui préside aux destinées d'un pays : c'est que, à ce moment-là, il est soumis aux règles de la comptabilité publique et, dès lors qu'il gère des fonds publics, je trouve que c'est une précaution extrêmement sage.

Il faut ensuite, madame la ministre, pour réussir un pays, de la souplesse et de la liberté.

M. François Sauvadet.

Eh oui !

M. Jean-Claude Lenoir.

Mettre un corset à ceux qui n'en veulent pas est une erreur.

M. Michel Meylan.

Oui !

M. Jean-Claude Lenoir.

J'ajoute, à l'intention de ceux qui l'ont oublié, que de nombreux pays ont déjà été organisés et ont passé des contrats avec leur région. Une loi n'était pas nécessaire pour qu'un tel contrat fût signé.

M. Michel Meylan.

C'est vrai !

M. Jacques Blanc.

Très bien !

M. Jean-Claude Lenoir.

Enfin, et c'est le point le plus important, pour réussir un pays, il faut des moyens.

J'ai entendu cet après-midi toutes sortes de discours qui font rêver. Il est toujours possible d'inventer de nouvelles idées, de nouveaux concepts, de proposer de passer d'une logique de guichet à une logique de projet, par exemple. Vous avez, madame la ministre, qualifié le pays d'espace de projets. Je ne sais pas si on peut l'appeler ainsi, mais ce que je sais, c'est que c'est du « pipeau » s'il n'y a pas de crédits, si l'Etat n'apporte pas son aide pour nous permettre de passer du projet à la réalisation.

M. Jacques Blanc.

Eh oui !

M. Jean-Claude Lenoir.

L'autre point fort que vous avancez dans votre texte est une conception moins dirigiste de l'aménagement du territoire.

En fait, le seul changement notable est la disparition du schéma national d'aménagement du territoire.

Que n'auriez-vous dit, sur les bancs situés à gauche de cet hémicycle, si une majorité de droite, un gouvernement de droite, avait supprimé d'un texte la référence à un schéma national d'aménagement du territoire.

(« Très bien ! » et applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

M. Michel Meylan.

C'est vrai !

M. Jacques Blanc.

Tout à fait !

M. Jean-Claude Lenoir.

L'exercice auquel s'est livré l'orateur qui m'a précédé, et que je respecte tout à fait, était extrêmement intéressant.

Un certain nombre de représentants de la majorité expliquent maintenant qu'on peut à la fois critiquer les i dées libérales - lesquelles sont toujours qualifiées

« d'ultra-libérales » - et en même temps s'affranchir des outils essentiels qui permettent à l'Etat de jouer pleinement son rôle. On voit un certain nombre d'orateurs hésiter sur les mots à employer. Ils veulent justifier un texte qu'ils n'approuvent pas tout en retournant contre l'aile libérale de cette assemblée des fers de lance qui n'atteignent pas leur but.

Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

L'Etat passe son temps à donner des aides !

M. Jean-Claude Lenoir.

L'Etat doit conserver un rôle m ajeur. Vous semblez parfois l'oublier, madame la ministre. Il est d'abord le garant de la cohérence. Il est également le garant de l'équité et de la solidarité nationale.

M. André Lajoinie, président de la commission de la production et des échanges.

Votre discours n'est pas très libéral, monsieur Lenoir !

M. Jean-Claude Lenoir.

Dans le texte que vous nous soumettez, madame la ministre, je ne suis pas sûr que l'Etat continue de jouer son rôle.

M. Yves Deniaud.

Très bien !

M. Jean-Claude Lenoir.

En matière de décentralisation, le rôle donné aux régions dans le texte est assez étonnant.

Le conseil régional se voit investi d'un rôle pivot, « point de rencontre entre une vision de territoire nourrie de la mobilisation des acteurs locaux et une vision d'équilibre et d'intégration organisant l'intérêt national ». Les mots sonnent bien. Mais où est la consolidation de la décentralisation dès lors que les votes des régions n'ont aucun caractère prescriptif ? C'est une vue tout à fait théorique.

Où est le renforcement de la démocratie alors que les structures que vous êtes en train d'organiser éloignent de plus en plus le pouvoir de décision des électeurs et des citoyens ? Ce texte passe également à côté d'orientations qui auraient pu le justifier. On n'y trouve rien sur la clarification des compétences entre l'Etat et les collectivités territoriales, rien sur la fiscalité et la péréquation financière, rien sur la coopération intercommunale, sur la simplification, sur l'organisation démocratique, sur les zonages.

J'entends, bien entendu, la réponse : ça va venir, nous dit-on.

M. Yves Cochet.

Eh oui !

M. Jean-Claude Lenoir.

Mais, madame la ministre, pourquoi n'avoir pas présenté un seul et même texte, qui y aurait gagné en cohérence...

M. François Sauvadet.

Eh oui !

M. Michel Meylan.

Très bien !


page précédente page 00087page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 19 JANVIER 1999

M. Jean-Claude Lenoir.

... et fait franchir à notre pays un bond extraordinaire dans la voie de la décentralisation ? (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Philippe Duron, rapporteur.

L'auriez-vous voté ?

M. Jean-Claude Lenoir.

Mais vous avez préféré découper le dispositif ; ainsi, trois ministres pourront revendiquer chacun leur part dans cette avancée : Mme Dominique Voynet, demain M. Jean-Pierre Chevènement, et ensuite M. Emile Zuccarelli.

M. Jean-Paul Mariot.

Exactement, et cela fera un gâteau !

M. Jean-Claude Lenoir.

De ce fait, notre rapporteur, Philippe Duron, qualifie à raison ce projet de modeste dans sa forme - formule élégante, mais si conforme à la réalité !

M. Philippe Duron, rapporteur.

Et d'ambitieux : soyez complet !

M. Jean-Claude Lenoir.

Madame la ministre, vous me donnez l'impression d'avoir manqué l'occasion d'une vaste réforme qui irait beaucoup plus loin que ce que vous avez proposé. Vous êtes en train de glisser une nouvelle structure, le pays, sans rien remettre en cause parmi celles qui existent déjà. Ce faisant, vous ajoutez à la confusion. Nous voulions du souffle, de l'ambition ; ce n'est pas pour aujourd'hui que le rendez-vous nous est donné et je le regrette.

Monsieur le président, j'en étais exactement à la moitié de mon propos, mais je ne voudrais pas m'attirer la réputation de dépasser systématiquement mon temps de parole.

Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

C'est déjà fait !

M. Jean-Claude Lenoir.

J'en resterai donc là, et

Mme Voynet s'en réjouira certainement.

(Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie françaiseAlliance.)

M. Michel Meylan.

Au moins, c'est clair !

M. le président.

La parole est à M. Patrick Rimbert.

M. Patrick Rimbert.

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le projet de loi d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire que nous examinons fait, on vient de le répéter, partie d'un ensemble qui regroupe également un projet de loi sur l'intercommunalité, préparé par M. Chevènement et un autre, sur les interventions économiques des collectivités territoriales, par M. Zuccarelli. Je n'y vois pas un manque d'ambition, mais bien trois ministres qui se consacrent à un même sujet et à l'aménagement du territoire qui, dès lors, en prend d'autant plus de poids.

Ces trois textes ne présentent pas en fait de ruptures avec le passé. Ils sont le prolongement et l'ajustement des lois de décentralisation de 1982 et 1983, de la loi dite ATR de 1992 et le la LOADT du 4 février 1995. Ils prennent en compte, d'une part, l'expérience acquise sur le plan de l'organisation territoriale qui s'en est trouvée profondément modifiée, d'autre part, les nouveaux enjeux qui sont devant nous : l'Europe, la mondialisation de l'économie et la nécessité d'un développement durable.

Examinons d'abord les leçons du passé. La décentralisation a permis aux élus des diverses collectivités territoriales, régions, départements, communes, de prendre en charge de nouvelles responsabilités et de trouver des réponses locales aux formidables mutations issues des Trente Glorieuses, comme les résumait Fourastié et dont a parlé Mme la ministre, qui n'ont en fait duré que vingt-cinq ans et se sont terminées par une crise. De fait, l'aménagement du territoire n'est plus l'apanage de l'Etat : une coresponsabilité avait été engagée, qui devait se concrétiser par les lois de décentralisation.

Or les deux derniers contrats de plan ont mis en évidence, d'une part, la difficulté de l'Etat à entrer dans un partenariat - une culture, par définition, ne naît pas spontanément -, d'autre part, un manque de hiérarchisatin des priorités de la part de certaines régions, faute sans doute de projets régionaux forts. Des voix se sont même élevées pour regretter que l'intérêt général soit devenu une somme d'intérêts locaux.

La loi du 4 février 1995 en avait tenu compte, et ce projet vient renforcer les précédents textes en instaurant une cohérence accrue entre la politique de l'Etat et le projet régional par une confrontation des projets et une association forte des autres collectivités, des représentants des activités économiques et sociales et des associations.

Le projet régional, plus démocratique, devient le projet de tous et c'est sur cela qu'il peut fonder sa force. La région devient le lieu de cohérence entre les projets territoriaux et la stratégie nationale, notamment celle qui sera inscrite dans les huit schémas de services collectifs.

Vous affirmez par ailleurs, madame la ministre, que la région n'est pas le seul lieu de pertinence de projets d'aménagement. C'est pourquoi il est nécessaire de soutenir les projets de développement des autres collectivités territoriales.

La commune, cellule de base de notre organisation administrative, a perçu depuis longtemps qu'elle n'était plus le territoire pertinent pour répondre à l'ensemble des besoins de ses concitoyens. Aussi les communes ont-elles chaque fois que possible utilisé les outils d'intercommun alité, SIVU, SIVOM, districts, communautés de communes, de villes, etc., offerts par les différentes lois.

La loi ATR de 1992 et la LOADT de 1995 ont encouragé l'intercommunalité en permettant de passer d'une logique de gestion d'équipements et de services d'intérêt commun à une logique de développement global et d'intégration financière. Toutefois, et de nombreuses études le montrent, l'intercommunalité reste trop souvent de circonstance et principalement régie par des motivations soit électorales, soit d'autodéfense, soit essentiellement d'opportunité financière. Il nous faut donc avancer vers des territoires de projets, les seuls pertinents en ce qu'ils mobilisent et associent l'ensemble des habitants, les faisant passer d'un statut de consommateurs dans une logique de guichet à un statut d'acteurs dans une logique de création. C'est pourquoi, et je m'en félicite, votre projet de loi renforce les pays qui, cantonnés jusqu'alors au stade expérimental, accèderont à celui d'acteurs majeurs du développement.

M. Patrick Ollier. Pourquoi avoir attendu deux ans ? M. Patrick Rimbert. Il fallait expérimenter, mon cher collègue.

M. Patrick Ollier. Ça faisait deux ans qu'on expérimentait ! Soit quatre ans au total !


page précédente page 00088page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 19 JANVIER 1999

M. Patrick Rimbert. La loi d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire s'inscrit donc dans le prolongement des lois passées en les adaptant aux enjeux d'aujourd'hui.

Je me rappelle encore la réponse en commission départementale d'un préfet à qui l'on demandait ce qu'était un pays : « Je ne suis que le scribe, faites ce que vous voulez.

On verra bien après à qui cela sert... »

M. Eric Doligé. Ce n'est pas sérieux ! Donnez-nous son nom ! M. François Sauvadet. Ce n'est pas un bon préfet ! M. Patrick Ollier. Il voulait dire que ce sont les élus qui décident ! M. François Sauvadet. Et ce n'était pas à lui qu'il fallait le demander ! M. Patrick Rimbert. Aujourd'hui, grâce à votre loi, on sait à quoi sert le pays. Et on lui en donne enfin les moyens. Il y aura deux contractants : un territoire, en l'occurrence le pays, et l'Etat. C'est cela, un contrat.

M. Jacques Blanc. Et la région ? M. Patrick Rimbert. Mais si l'un des deux contractants ne sait pas à quoi sert le contrat, celui-ci devient évidemment vide de sens.

M. François Sauvadet. C'est une gestion étatique ! M. Patrick Ollier. Ou plutôt technocratique ! M. Patrick Rimbert. Votre texte se devait également de répondre aux attentes non satisfaites et aux enjeux qui sont devant nous. On constate une demande de plus en plus forte de participation aux projets des territoires, au niveau des quartiers pour les villes, au niveau également des structures intercommunales. C'est pourquoi le projet de loi introduit à tous les niveaux des structures où seront représentés non seulement les élus et l'Etat, mais aussi les milieux économiques, sociaux, culturels et associatifs : le conseil national, les conférences régionales et les conseils de développement. Il faudra sans doute un jour aller plus loin, mais c'est déjà une avancée.

Les agglomérations, résultat d'une concentration de la population sur une faible portion du territoire, sont de formes disparates : on y trouve des villes-centres, des communes périurbaines et des bourgs ruraux. Pourtant, toutes portent en elles les défis de l'emploi et de la solidarité. Leur organisation à partir de projets communs est donc nécessaire, mais cet aspect était insuffisamment reconnu par l'ancienne loi. C'est pourquoi le projet de loi érige les agglomérations des territoires de contractualisation pour mettre fin aux concurrences stériles, aux rentes de situations destructrices de solidarité et aux enjeux de pouvoir personnel nuisibles à la construction de projets de développement global et durable. Cette dimension, personne ne peut le nier, avait été oubliée par la loi Pasqua qui a fait preuve d'aveuglement à l'égard des villes et milieux urbains, présentés comme chargés de toutes les valeurs négatives.

Mme Michèle Alliot-Marie. Caricature !

M. Patrick Rimbert. C'est pourtant là où se concentrent les problèmes aujourd'hui. Il ne s'agit pas de délaisser le rural pour la ville mais de prendre en compte un territoire où l'aménagement est nécessaire sans pour autant abandonner les autres.

M. Patrick Ollier. C'est ce qui se passait avant ! M. Patrick Rimbert. Les pôles de développement à vocation européenne et internationale alternatifs à la concentration parisienne doivent être également renforcés par un aménagement à même de mailler de façon équilibrée tout le territoire français.

Si je me permets d'insister autant sur les territoires régions, métropoles d'équilibre, agglomérations et pays -, c'est parce qu'ils représentent à mes yeux un des défis du développement du territoire national. Et la possibilité pour la France de garder sa place en Europe dépend du développement local comme du développement national.

Une question se pose souvent : fallait-il en profiter pour supprimer des échelons administratifs ? Mon prédécesseur à cette tribune évoquait cette possibilité. Et de comparer la France aux autres pays européens qui ont desr égions plus fortes, des régions plus grandes, des communes moins nombreuses, etc. Comment s'y retrouver ? Il s'agit de notre histoire, mes chers collègues ; ne la bradant pas en cédant à la tentation d'une rationalisation esthétique de notre organisation administrative. Construisons la France de demain sur des projets de développement durable et solidaire où chacune de ses collectivités participera en fonction de ses compétences et de sa volonté. L'histoire tranchera entre les collectivités qui se seront donné une priorité, une importance, et les autres.

M. Eric Doligé. C'est l'Etat qui bloque tout ! M. Patrick Rimbert. Les députés socialistes ont beaucoup insisté sur le rôle de l'Etat. L'Etat n'est pas pour nous quelque chose de mauvais par définition, chers collègues de droite. Il doit assurer l'égalité des Français sur le territoire, d'abord en assurant une péréquation financière entre les régions, ensuite en appliquant des mesures discriminatoires pour que chaque territoire pertinent puisse, quels que soient ses moyens, développer ses projets en fonction des problèmes qu'il rencontre.

M. Eric Doligé. Qui bloque les projets de routes et d'autoroutes ? C'est l'Etat !

M. Patrick Ollier.

Pourquoi tout cela ne figure-t-il pas dans le texte ?

M. Patrick Rimbert.

Dans le même état d'esprit, il faut améliorer et préciser les articles relatifs aux différents schémas des services collectifs. Nous sommes plus soucieux d'une stratégie qui prenne en compte les besoins des Français là où ils sont et là où ils vivent.

Mme Michèle Alliot-Marie. Mais c'est le contraire que vous faites ! M. Patrick Rimbert. Les députés socialistes demandent toutefois un engagement plus fort du Gouvernement et des services publics. Nos amendements en font foi.

Enfin, soucieux comme beaucoup de nos collègues d'un suivi par le Parlement des politiques qui seront développées à partir de cette loi, nous avons présenté plusieurs propositions pour empêcher que celui-ci ne soit dessaisi d'un sujet aussi important.

M. Patrick Ollier.

Très bien !

M. Patrick Rimbert.

Un projet de loi est fait pour être discuté. Nous ne sommes pas des godillots.

Mme Michèle Alliot-Marie. Ah bon ? Demandez à M. Ayrault !

M. Christian Estrosi.

Quel aveu ! M. Patrick Rimbert. Si c'est votre pratique, ce n'est pas la nôtre, vous le verrez au cours du débat. (Rires sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)


page précédente page 00089page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 19 JANVIER 1999

Mme Michèle Alliot-Marie. Il faudra tenir jusqu'au bout !

M. le président.

Veuillez conclure, cher collègue ; votre temps de parole est écoulé.

M. Patrick Ollier. Cela mérite quelques minutes de plus ! M. Patrick Rimbert. Je termine, monsieur le président.

Nombre de collègues l'ont souligné, les moyens financiers mis en oeuvre pour appliquer cette loi seront décisifs. Notons à ce propos que la production de textes dont se vante l'opposition a été inversement proportionnelle aux moyens financiers mis en oeuvre par le gouvernement Juppé. A l'opposé, madame la ministre, force est de constater que votre budget augmente, que vous avez abondé des fonds laissés vides par vos prédécesseurs et que vous en avez créé deux nouveaux pour l'aménagement du territoire. La droite parle d'incantations : je trouve cela un peu dur pour votre prédécesseur, mais juste au regard des faits.

Bien entendu, le groupe socialiste soutiendra ce projet d e loi présenté au nom du Gouvernement par Mme Dominique Voynet, persuadé que ses amendements, les questions qu'il pose ainsi que ses demandes recevront une suite favorable dans le cadre de notre débat. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

Mme Michèle Alliot-Marie. Si ce n'est pas le cas, vous voterez contre ? Chiche !

M. le président.

La parole est à M. Patrick Ollier.

M. Eric Doligé. Vous allez voir ce que c'est que de ne pas être un godillot !

M. Patrick Ollier.

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, « intéressons-nous à l'avenir puisque nous y passerons le plus clair de notre temps »...

Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Paul Valéry !

M. Patrick Ollier.

... a écrit Valéry.

Votre texte apporte-t-il les réponses, madame, aux questions posées en matière d'aménagement du territoire pour préparer l'avenir de la France ? Ce projet de loi n'a fait l'objet d'aucun débat, d'aucune concertation nationale. Où est-il le temps où, avec Charles Pasqua, nous avions, pendant un an, parcouru toutes les régions françaises pour écouter et dialoguer ?

M. André Angot.

Eh oui !

M. Patrick Ollier.

Votre projet de loi, qui ne repose sur aucune concertation sérieuse, pourrait-il apporter ces réponses ? Non, car il souffre de plusieurs faiblesses, de nombreuses absences, et surtout de quatre défauts : ce texte repose sur un parti pris idéologique, ce texte ignore les exigences de la cohérence nationale et de la nécessaire solidarité,...

M. Jean-Claude Lemoine.

C'est vrai !

M. Patrick Ollier.

... ce texte qui nie les réalités du quotidien,...

M. Eric Doligé.

Exact !

M. Patrick Ollier.

... ce texte enfin est celui des rendezvous manqués.

M. Jacques Blanc.

Eh oui !

M. Patrick Ollier.

Parti pris idéologique : l'objet premier et essentiel de votre projet de loi, madame la ministre, est de s'opposer à la loi Pasqua et d'en nier l'esprit, alors que celle-ci avait été votée dans un large consensus, après un an de débats populaires et sept mois de travail parlementaire. A un texte consensuel, vous voulez substituer le vôtre qui est loin de l'être, comme le prouvent les débats en commission. Personne ne peut nier que, lorsqu'une commission adopte 150 amendements sur un texte de 36 articles, il ne s'agit plus de modifications mais bel et bien d'une transformation !

M. Eric Doligé.

Tout à fait !

M. Patrick Ollier.

C'est bien parce que notre commission a considéré que ce texte ne correspondait pas à ce qu'il fallait que, rejoignant bien souvent l'opposition, tous ensemble, nous l'avons modifié.

M. Patrick Ollier.

Votre prétexte ? La loi Pasqua n'est pas appliquée, dites-vous, changeons-la ! Faux-semblant et mauvais argument ! Mais je sais qu'il faut toujours répéter pour être compris...

Cette loi, que j'ai eu l'honneur de rapporter dans cet hémicycle,...

M. François Sauvadet.

Et très bien rapportée !

M. Patrick Ollier.

Je vous remercie ! ... promulguée en 1995, organisant le travail pour vingt ans, faisait dès mars 1996, soit un an après, l'objet de 42 textes d'application, soit 23 décrets et 19 arrêtés et circulaires, et de nombreuses expérimentations - dont celles des pays et des directives territoriales - que vous avez interrompues sitôt arrivée au ministère !

M. Christian Estrosi.

Oui, vous avez interrompu les DTA !

M. Patrick Ollier.

Cette loi, deux ans après sa promulgation, disposait de 102 textes d'application. Trouvez-moi d'autres exemples de ce genre ! Je tiens ces documents à votre disposition, pour le cas où vous ne les auriez pas vus. Comment pouvez-vous soutenir, avec 102 textes d'application, soit 46 décrets, 53 arrêtés et circulaires, deux lois et une ordonnance en deux ans, que la loi Pasqua n'a pas été appliquée ? Comment pouvez-vous prétendre que nous n'avons pas fait le nécessaire pour qu'elle monte en puissance et dispose des moyens administratifs et techniques nécessaires à sa mise en oeuvre ? J'ai parlé de faux arguments ; à la vérité, c'est bien de mauvaise foi qu'il s'agit.

M. Christian Estrosi.

C'est sa nature !

M. Patrick Ollier.

Effectivement, madame, et vous avez raison sur ce point, tout s'est arrêté en 1997 quand

M. Jospin et vous-même êtes arrivés au Gouvernement.

Depuis 1997, vous n'appliquez plus la loi Pasqua. Vous vouliez une loi Voynet. Nous y sommes !

M. Christian Estrosi.

Elle n'applique plus la loi, tout simplement !

M. Patrick Ollier.

Vous avez raison, monsieur Estrosi.

M. Christian Estrosi.

Elle est hors la loi !

M. Philippe Duron, rapporteur.

C'est un peu excessif !

M. Patrick Ollier.

Deux ans ont ainsi été perdus pour en arriver à ce texte qui, contrairement à ce que vous affirmez, madame la ministre, n'est pas un texte de modification mais bel et bien, on n'y insiste pas assez, un texte de rupture.

Vous portez là une lourde responsabilité, et si l'aménagement du territoire en est la victime, c'est bien parce que vous n'avez pas voulu ou pas su accepter de


page précédente page 00090page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 19 JANVIER 1999

poursuivre l'action engagée par vos prédécesseurs, quitte à l'améliorer - auquel cas nous aurions été avec vous -, mais sans en briser les premiers élans. Cela, madame, est une attitude idéologique.

Idéologique aussi la politique conduite par votre gouvernement qui recrée une opposition entre ville et campagne. Vous privilégiez d'une manière maladroite les zones urbaines au détriment du monde rural alors que l'Etat, en tant qu'aménageur principal de territoire, doit être avant tout responsable de la cohésion et de l'unité nationale.

M. Christian Estrosi et M. Robert Lamy.

Très bien !

M. Patrick Ollier.

Aménager et développer le territoire, c'est respecter l'urbain et le rural, c'est donner à chacun les instruments adaptés et des moyens proportionnés afin que l'un autant que l'autre puissent organiser leur développement, pour que soit réalisé un véritable équilibre du territoire.

Idéologique aussi ce texte qui consacre le pouvoir du technocrate sur le pouvoir politique, et nous ne sommes pas d'accord du tout sur la manière dont vous avez structuré votre projet de loi.

Mme Michèle Alliot-Marie.

Les députés socialistes non plus, d'ailleurs !

M. Patrick Ollier.

Edouard Balladur et Charles Pasqua avaient pourtant courageusement rétabli la prééminence du politique et des élus par la loi de 1995.

M. François Sauvadet.

C'est vrai.

M. Patrick Ollier.

Dans votre texte, le Parlement n'a plus aucun rôle décisionnel. Pouvons-nous accepter tous ensemble dans cet hémicycle de ne plus jouer aucun rôle pour décider ce que sera notre pays dans vingt ans ? Monsieur Rimbert, j'ai apprécié ce que vous avez dit.

Nous sommes d'accord avec vous...

M. Patrick Rimbert.

Merci !

Mme Michèle Alliot-Marie.

M. Ayrault dit le contraire !

M. Patrick Ollier.

... et nous vous soutiendrons si vous êtes prêt à aller jusqu'au bout en faveur d'un schéma permettant de savoir comment la conduite de la politique de l'aménagement du territoire sera organisée pour les vingt années à venir. Sans le vote du Parlement, en effet, c'est effectivement la prééminence de l'administration et du technocrate sur le pouvoir politique. C'est inacceptable ! (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Je rends d'ailleurs hommage à notre rapporteur, mais vous êtes bien gêné, monsieur Duron, car je n'ai pas entendu dans l'hémicycle les propos très positifs que vous teniez en commission et sur lesquels nous nous sommes retrouvés.

M. Eric Doligé.

Il va y revenir !

M. Patrick Ollier.

Vous aviez raison, mais que ne ditesvous la même chose devant nous tous ? Nous serions là pour vous soutenir !

M. Jean-Claude Daniel.

Merci de soutenir la loi !

M. Patrick Ollier.

Ce n'est pas la loi, mon cher collègue, puisque nous l'avons modifiée en commission !

M. Jean-Claude Daniel.

C'est bien le rôle du Parlement !

M. Patrick Ollier.

Tous ensemble, nous avons rétabli le pouvoir du Parlement.

Retour de l'administratif également lorsque l'on prévoit que le préfet arrête le périmètre du pays. Nous, nous avions simplement voulu que ce soient les élus qui constatent le pays...

M. Patrick Rimbert.

Après avis conforme !

M. Patrick Ollier.

... et que l'administratif se contente d'en publier le périmètre.

M. François Sauvadet Exactement !

M. Patrick Ollier.

En donnant un tel pouvoir au préfet de région, vous transformez le processus et vous retirez aux élus un pouvoir que nous leur avions donné.

Vous privilégiez l'administration par rapport aux élus du peuple. C'est un schéma de pensée étatiste et technocratique. Je ne peux que le constater et nous sommes obligés de le dénoncer vigoureusement.

Mme Michèle Alliot-Marie.

Nous ne sommes pas les seuls ! Certains élus de la majorité disent la même chose !

M. Patrick Ollier.

Vous avez raison, madame ! De nombreux élus de la majorité le disent, mais en commission ou dans les couloirs, pas dans l'hémicycle.

M. Eric Doligé.

Ça va venir !

M. Christian Estrosi.

Ils ont la trouille !

M. Patrick Ollier.

Mais je vous attends, monsieur le rapporteur, car je suis convaincu que vous êtes un homme qui défend honnêtement ses principes. Alors faites-le en séance et nous serons avec vous.

M. Philippe Duron, rapporteur.

Sur ce sujet, j'ai déjà répondu clairement !

M. Patrick Ollier.

Idéologique aussi la décision de supprimer un ensemble de programmes d'équipement ambitieux et d'utilité publique pour désenclaver, rééquilibrer les modes de transport et préparer les grandes liaisons européennes. Je pense à l'annulation du canal RhinRhône et à l'arrêt d'importants programmes autoroutiers.

Mon département est touché, à la frontière de l'Italie. Je sais ce qui se passe quand on interrompt un programme autoroutier !

M. Christian Estrosi.

Et la A-51 ! Et la A-58 !

M. Patrick Ollier.

Effectivement.

M. Christian Estrosi.

La liste est longue !

M. Jean Auclair.

C'est scandaleux !

M. Patrick Ollier.

Combien d'emplois disparus ? Combien d'occasions manquées pour notre développement dans le cadre européen ? (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Ne faites pas rigoler, monsieur Ollier !

M. Patrick Ollier.

Mais madame, ils m'approuvent !

M. Jean Auclair.

Même M. Lajoignie nous approuve ! (Sourires.)

Je n'ai pas besoin de vous pour me faire entendre dans l'hémicycle, vous le savez bien.

M. Patrick Ollier.

Lorsque l'idéologie rejoint l'immobilisme, nous avons votre projet de loi, madame.

M. Didier Quentin.

Tout à fait !


page précédente page 00091page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 19 JANVIER 1999

M. Patrick Ollier.

La majorité plurielle, aujourd'hui, est conservatrice (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste)...

M. Jean Vila.

Un scoop !

M. Patrick Ollier.

... et vous nous le prouvez encore par votre texte. Le progrès est à droite, l'immobilisme est à gauche dans ce projet de loi d'aménagement du territoire.

(Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants. - Rires et exclamations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. André Lajoinie, président de la commission.

Vous en riez vous-même !

M. Patrick Ollier.

Non, je sens que je trouble Mme la ministre ! Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

M. Ollier rigole de lui-même !

M. Patrick Ollier.

Non. Je ris de votre attitude, madame, parce que je suis conciliant.

C'est un texte qui nie les réalités du quotidien.

M. Christian Estrosi.

C'est un texte de déstructuration du territoire national !

M. Patrick Ollier.

Si les campagnes se désertifient encore, parce que nos concitoyens iront chercher dans les villes, que vous privilégiez, les services publics qui leur manquent, ce sont les problèmes des banlieues qui s'aggraveront toujours davantage, et vous le savez.

Nos concitoyens perçoivent que ce sont tout autant et sinon plus des déficits de services publics, des lacunes dans l'organisation des services collectifs, l'insuffisance du tissu d'entreprise, l'archaïsme institutionnel et corporatif qui empêchent réellement le développement local. Faisant obstacle à l'égal accès au service public, ils compromettent l'égalité des chances et l'insertion de tous dans le progrès général de la nation ! Les banlieues qui brûlent, les villes qui grossissent et, comme le tonneau des Danaïdes, consomment les crédits, les hommes et les équipements, tandis que le monde rural se dévitalise et se désertifie comme une peau de chagrin, ce sont les deux faces du même mal : l'absence d'une politique volontariste d'aménagement du territoire.

Ce texte nie une réalité économique, celle des zones rurales, alors que nous sommes le deuxième pays exportateur dans le monde en produits agricoles, alors que, en dehors de l'agriculture, les activités du monde rural, artisanales, commerciales ou touristiques, première source de devises de notre pays, contribuent largement les unes et les autres à l'enrichissement de la nation ! Ce texte, enfin, ignore les exigences de la cohérence nationale et de la nécessaire solidarité.

La disparition du schéma national d'aménagement et de développement du territoire - il faut le répéter, parce que c'est un point essentiel de ce texte - sera grave de conséquences ! Elle sera grave au plan européen, en supprimant l'élément de référence nationale en matière d'aménagement du territoire alors qu'on affirme vouloir s'ouvrir à l'Europe. Les schémas de services collectifs, techniques et détaillés - prévus dans la loi Pasqua sous le nom de schémas sectoriels - ne pourront jamais remplacer le docum ent, indicatif certes, comme tout document de planification établi par l'Etat, mais assurant la cohérence des politiques ayant un effet sur l'aménagement du territoire qu'est le schéma national.

Elle sera grave au plan national où ces références indispensables à la nécessaire cohérence vont disparaître.

« Ce schéma constituait un instrument de cohérence indispensable », a dit tout à l'heure, ici même, le rapporteur du Conseil économique et social. Ce n'est pas une déclaration politicienne ! L'absence de cette référence dans votre projet va laisser les régions seules face à leurs propres schémas.

C'est lorsque l'Etat abandonne les responsabilités que la loi lui confie que l'ordre républicain est menacé, et la décentralisation s'enlise dans l'impuissance ou se perd dans les rivalités. Voilà notre crainte ! Le schéma, on ne sait pas le faire, dites-vous. Quel aveu d'impuissance, madame la ministre ! Dans ces conditions, vous le supprimez. Quel mauvais prétexte ! Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

C'est vous qui ne l'avez pas fait !

M. Patrick Ollier.

En 1997, nous avions préparé un avant-projet. Le voici. Je l'ai montré tout à l'heure.

Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Je l'ai aussi !

M. Patrick Ollier.

Heureusement ! Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

C'est « baratin et compagnie », ce truc !

M. Christian Estrosi.

Prenez le temps de le lire !

M. Patrick Ollier.

Nous l'avions préparé pour venir en débattre au Parlement et, très sincèrement, si vous ne savez pas le faire, laissez-nous le faire à votre place ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Vous avez eu deux ans et quatre mois !

M. Patrick Ollier.

Nous aurions été là pour vous aider, dans l'intérêt national, à faire en sorte que l'on ne perde pas cet élément de cohérence des politiques nationales.

(Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Christian Estrosi.

Il a raison ! Si vous aimez la France, laissez-le faire !

M. Patrick Ollier.

On ne supprime pas une disposition légale au prétexte que l'on n'est pas capable d'y faire face, ou alors, on en tire les conséquences, et celles-ci sont politiques ! Enfin, c'est le texte des rendez-vous manqués.

Dans la perspective d'une politique conduite sur vingt ans, nous avions prévu des échéances, des rendez-vous successifs, notamment en matière de solidarité pour la mise en oeuvre de la péréquation entre les régions. Là, madame la ministre, monsieur le rapporteur, monsieur le président, je suis consterné ! Que la gauche plurielle ne soit pas au rendez-vous de la solidarité et de la péréquation dans un texte que vous dites vous-même majeur pour l'aménagement du territoire, les bras m'en tombent ! Si un groupe politique doit porter le message et le projet de la péréquation et de la solidarité, c'est bien vous ! Nous l'avions prévu dans le texte Pasqua. Vous n'avez même pas été capables de prendre les dispositions nécessaires pour l'achever ! C'est le cas également, dans le même esprit, pour la réforme de la fiscalité locale, la clarification des compétences entre collectivités.


page précédente page 00092page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 19 JANVIER 1999

Démocratie directe pour l'intercommunalité, suppression d'un échelon territorial inutile, pourquoi ne pas débattre de ces problèmes qui sont les vrais problèmes d'aménagement du territoire ? Fiscalité dérogatoire, aide au zonage pour compenser la diminution des aides européennes. Qui a parlé ici, à l'exception d'un ou de deux orateurs de nos groupes, des conséquences de la diminution de 20 % des fonds structurels européens, et de 40 % des zones bénéficiaires ? Plusieurs députés du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.

Très juste !

M. le président.

Veuillez conclure, mon cher collègue !

M. Patrick Ollier.

M. Vasseur a abordé un peu ce prob lème et M. Poignant aussi. Comment allez-vous compenser de tels manques dans les zones qui ne pourront pas toucher ces aides pourtant nécessaires ? Vous n'en parlez pas, c'était le moment idéal pour nous faire des propositions.

Tels sont donc tous ces rendez-vous manqués que nous vous rappellerons tout au long du débat.

M. Michel Meylan.

Quel gâchis !

M. Patrick Ollier.

Les douze orateurs du groupe RPR vous feront tour à tour des propositions concrètes.

M. Poignant en a fait tout à l'heure lors de la question préalable, avec talent. M. Lemoine en fera sur les conséquences déstructurantes de l'abandon du schéma national d'aménagement du territoire, M. Angot sur le décalage avec les projets européens, M. Deniaud sur l'insuffisance financière, M. Martin-Lalande sur les nouvelles technologies des télécommunications, M. Doligé sur le rôle des départements et l'équilibre menacé entre urbain et rural, M. Fromion sur la notion de pays et ses développements souhaitables, M. Chabert sur la ville et les problèmes urbains, M. Estrosi sur les zones de revitalisation rurale, M. Bouvard sur les problèmes spécifiques de la montagne et leur oubli dans ce texte, M. Quentin sur la politique du littoral, le développement des espaces naturels, et M. Mariani sur les services publics en milieu rural. J'espère que vous les entendrez. De nombreux autres parlementaires RPR interviendront sur les articles.

De même, l'UDF et Démocratie libérale, en accord avec nous, feront tout au long de ce débat des critiques constructives...

M. Alain Néri.

Voilà l'Alliance !

M. Patrick Ollier.

... pour mettre en évidence l'inopportunité de votre texte.

En conclusion, ce texte est une suite de pétitions de principe. Aucune des grandes réformes prévues n'y est même abordée.

Absence d'ambition, certes, mais aussi, nous l'avons vu, texte de rupture avec une politique d'aménagement du territoire pourtant indispensable à l'avenir de notre pays.

Les élus et les différents partenaires locaux ne vont pas tarder à s'en rendre compte. Vous aurez alors à leur rendre des comptes ! Le territoire n'est pas, en effet, un sujet de droit. C'est le support de l'action des hommes, ces hommes qui veulent savoir, madame Voynet, avec quelle France nous allons franchir le cap du

XXIe siècle ? Le RPR souhaite que ce soit une seule et même communauté de valeurs et d'intérêts au sein de laquelle les différences ne seraient pas devenues d'inconciliables divergences !

M. Jean Vila.

Il y a vingt minutes qu'il parle !

M. André Lajoinie, président de la commission.

Monsieur le président, faites régner l'équité !

M. Patrick Ollier.

Or ce texte nous conduit vers la fracture territoriale et la divergence.

Nous voulons une France capable d'affronter, par là même unie et sereine, une compétition internationale qui fait fi des solidarités les plus naturelles.

C'est bien de cela que nous voulons débattre, madame Voynet, et, à cause de toutes ces occasions manquées, le groupe RPR ne peut accepter le texte que vous nous proposez. (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à M. Félix Leyzour.

M. Félix Leyzour.

Monsieur le président, madame la ministre, mesdames, messieurs, l'intitulé du projet de loi que nous examinons est par lui-même significatif. Il s'agit d'une loi d'orientation, c'est-à-dire une loi qui dessine une perspective, qui oriente les politiques dont il faudra décider la mise en oeuvre à travers des actions, des programmes, des contrats. C'est un projet qui porte sur l'aménagement du territoire, ce qui est déjà important, mais aussi sur le développement : il ne s'agit pas seulement d'aménager l'existant, mais de se situer dans une dynamique de développement. Enfin, il ne s'agit pas de n'importe quel développement mais d'un développement que l'on veut durable.

Le projet porte modification de la loi du 4 février 1995, dite loi Pasqua, qui, de 1995 à 1997, sous le gouvernement de M. Juppé, n'a pas été beaucoup appliquée.

Les députés de droite, qui s'amusent d'ailleurs beaucoup pendant le débat, ce qui montre le sérieux qu'ils y apportent...

M. Christian Estrosi.

Surtout quand on vous écoute !

M. Félix Leyzour.

Monsieur Estrosi, vous dérapez un peu dans les virages. Il est bien que vous partiez, car depuis le début, vous n'avez fait que tenir des propos qui ne sont pas dignes d'un tel débat. (Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)

Les députés de droite, disais-je, dont l'orateur qui m'a précédé, se demandent pourquoi il faut une nouvelle loi et proposent d'appliquer la loi existante, mais ils ne nous disent pas pourquoi elle n'a pas été appliquée de 1995 à 1997 par ceux-là mêmes qui l'ont portée.

Mme Michèle Alliot-Marie.

On vous a dit qu'elle était appliquée, ne soyez pas sourds.

M. Félix Leyzour.

On entend ici et là qu'elle était inapplicable dans ses dispositions essentielles.

Mme Michèle Alliot-Marie.

C'est tout à fait faux !

M. Félix Leyzour.

Ce qui est vrai quant au fond, c'est que la voie du libéralisme à tout crin choisie après la présidentielle de 1995, s'accommode mal d'un aménagement équilibré du territoire.

Avec le changement de majorité en 1997,...

Mme Michèle Alliot-Marie.

Voilà les rétrogrades !

M. Félix Leyzour.

... une révision de la loi s'imposait donc pour traduire en la matière les nouvelles orientations de la politique gouvernementale.

Mme Michèle Alliot-Marie.

Laquelle ?

M. Félix Leyzour.

Le projet que nous discutons est important par lui-même, mais il prend toute sa dimension dans le contexte dans lequel il s'inscrit.

En effet, il s'inscrit dans un ensemble de textes législatifs comme la loi d'orientation agricole, adoptée ici en première lecture, dont la discussion commence au Sénat,


page précédente page 00093page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 19 JANVIER 1999

la loi sur l'organisation urbaine et la coopération intercommunale, la loi sur les interventions économiques des collectivités territoriales.

Il vient aussi en débat à un moment où, par ailleurs, se prépare au plan européen la réforme de la PAC et des f onds structurels. Sa discussion intervient dans un contexte national et européen qui n'est pas sans rapport direct avec le développement du territoire.

Quels sont les objectifs que vous vous fixez avec ce projet, madame la ministre?

Si j'ai bien lu le texte et tous les documents qui l'accompagnent et si je vous ai bien entendue, on peut résumer les choses en disant que les objectifs visés avec ce projet sont au nombre de quatre : mobiliser les territoires et réduire les inégalités ; consolider les systèmes urbains à vocation internationale ; jeter les bases d'un développement durable ; consolider la décentralisation.

Ces objectifs placent le développement de l'emploi au centre de la démarche. Ce sont des objectifs louables que nous approuvons. Les dispositions du projet de loi vontelles créer le cadre, fournir les moyens, les outils, les leviers permettant de les atteindre ? C'est à ces questions que nous nous sommes efforcés de répondre au cours du travail réalisé par la commission.

C'est sous cet angle, en cherchant à être constructifs, qu'au groupe communiste nous nous inscrivons dans le débat. C'est sous cet angle que je vais situer la suite de mon propos.

Auparavant, je voudrais m'arrêter sur la notion d'aménagement du territoire et sur celle de développement durable.

Qu'entend-on par aménagement du territoire et qu'en attend-on ? Quelles que soient les politiques mises en oeuvre, on aménage toujours le territoire, on le façonne. Même le déménagement du territoire est une forme d'aménagement du territoire, qui se fait contre les activités, contre les hommes. En fait, ce que la population entend par aménagement du territoire, ce qu'elle en attend, c'est un aménagement équilibré du territoire qui prend appui sur la diversité des territoires, en valorise les atouts et répond aux besoins sociaux. Une politique d'aménagement du territoire doit conjuguer l'action contre les inégalités territoriales avec la lutte contre les inégalités sociales. C'est une politique qui entre nécessairement en contradiction avec le libéralisme auquel elle doit s'opposer.

Q u'entend-on aussi par développement durable, expression qui est aujourd'hui de plus en plus utilisée ? Le rapporteur, Philippe Duron, écrit que, issu du constat des risques qu'un développement peu soucieux du devenir de nos enfants fait courir à la planète et à chacun de ses habitants, le développement durable est une stratégie de développement qui cherche à neutraliser ces risques et à optimiser les ressources sur un long terme, en combinant préservation de l'environnement, efficacité économique et équité sociale. La définition n'est pas pour nous déplaire.

Soulignant l'interdépendance des nations face aux enjeux planétaires de l'environnement, le rapporteur indique que ce qui est vrai à l'échelle mondiale l'est à l'échelle européenne et à l'échelle régionale. C'est pourquoi écrit-il, il existe une forte convergence entre les principes défendus par le projet de loi et ceux de l'Union européenne, notamment depuis le traité de Maasricht.

Cette conclusion mérite qu'on s'y arrête.

Nous n'allons certes pas refaire ici aujourd'hui le débat sur le traité de Maastricht et sur le traité d'Amsterdam qui en découle. Quelles qu'aient pu être nos approches et nos prises de position respectives, passées et récentes, sur la construction européenne, si nous avons le souci et la volonté de faire réellement en sorte que l'Europe soit autre chose qu'un marché mettant en compétition les hommes et les territoires, nous avons devant nous, sans gommer nos différences, un vaste champ de convergences, d'actions communes pour faire avancer des réformes progressistes, qu'il s'agisse de la Banque européenne ou du pacte de stabilité monétaire qui corsète les politiques sociales et de développement, un vaste champ avec la réforme de la PAC et des fonds structurels dont dépendent l'aménagement et le développement du territoire, de nos territoires.

Sur de nombreux points, le projet de loi répond à nos préoccupations. La discussion en commission a permis d'amender le texte, de l'étoffer, de le renforcer. Chacun a apporté sa contribution.

Les propositions d'amendement du groupe communiste ont porté et porteront en séance publique sur quelques grands points.

Premièrement, nous considérons que, pour guider l'action de l'Etat et des autres partenaires en matière d'aménagement et de développement du territoire, on ne peut pas se satisfaire de schémas de services dans divers domaines de la vie nationale, envisagés pour vingt ans et décidés par décret. Le Parlement ne peut pas ne pas avoir son mot à dire.

Plusieurs députés du groupe du Rassemblement pour la République.

Il a raison !

M. Félix Leyzour.

Nous savons que notre haute administration est bien formée, compétente, et qu'elle peut, en multipliant les consultations, en sollicitant des avis, tracer à sa façon de grandes perspectives, dessiner de grandes trajectoires. Elle pourrait même le faire indépendamment des changements voulus par la volonté populaire. Pouvons-nous, en tant que parlementaires, nous satisfaire de gérer le quotidien, voire l'annuel, à travers le budget, et ne pas nous sentir concernés par le moyen et le long terme ? Avec d'autres collègues de la majorité plurielle, nous avons proposé d'amender le texte pour affirmer la compétence du Parlement en matière d'aménagement du territoire, ce que la commission a accepté à l'unanimité.

Deuxièmement, nous avons souhaité souligner davantage le rapport direct entre politiques régionales et politique nationale, en liaison avec les politiques européennes qu'il convient, comme je l'ai déjà indiqué, de réorienter.

Troisièmement, nous pensons qu'il faut mieux affirmer le rôle des services publics, qui constituent des éléments structurants de la vie économique et jouent un rôle essentiel comme lien social entre les populations.

Quatrièmement, nous avons considéré qu'il fallait certes tirer le meilleur parti des équipements publics existants, les optimiser, mais qu'il fallait aussi réaliser de nouv elles infrastructures, de nouveaux équipements. La France n'est pas un pays suréquipé. Il convient, en ce domaine, de répondre aux besoins de la population. Du reste, la réalisation d'équipements est source d'activité économique et d'emplois.

Cinquièmement, nous savons que toutes les régions françaises n'ont pas les mêmes capacités de développement et qu'à l'intérieur de chacune d'entre elles subsistent de graves inégalités territoriales et sociales. Il faut donc s'orienter vers des politiques de correction d'inégalités et


page précédente page 00094page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 19 JANVIER 1999

de compensation. Cela doit ressortir davantage et plus clairement de ce texte d'orientation, même si d'autres projets à venir sont censés traiter de cette correction des inégalités.

Sixièmement, il convient de s'occuper des « territoires pertinents » de développement. La région est considérée comme le pivot de l'aménagement du territoire. On peut estimer que c'est un bon niveau d'appréhension des problèmes et de mise en oeuvre de politiques de développement, en liaison avec la politique nationale et les politiques européennes.

Le département est quasi absent du projet au bénéfice des « pays » et des « agglomérations ». Nous avons - et nous n'avons pas été les seuls à le faire - formulé des propositions pour que le département, échelon administratif de l'Etat en même temps que collectivité ayant à sa tête une assemblée élue au suffrage universel et jouant un rôle important dans le domaine de la solidarité sociale et de la mise en oeuvre de diverses politiques d'aménagement, ne soit pas tenu à l'écart. Sa place sera confirmée.

Les autres territoires sont les pays et les agglomérations.

Il s'agit là de réalités dans les relations que les gens entretiennent entre eux et avec leurs activités.

Pour ce qui est « des pays », nous avons proposé qu'ils demeurent des structures souples capables de conduire des réflexions, de mettre en réseaux des collectivités et d'élaborer des projets dans la concertation. Ils ne doivent pas devenir des structures « de pouvoir » entrant en conflit, d'une part avec les communes ou leurs groupements, d'autre part avec les départements. Cette idée a, du reste, été retenue par la commission.

Le texte aborde le sujet des agglomérations, mais les questions financières, qui risquent de peser très lourd pour l'ensemble des collectivités, seront traitées dans la lois ur l'intercommunalité. Les seuils et l'incitation

« à s'agglomérer » doivent faire l'objet d'une réflexion approfondie.

Le projet met l'accent sur l'urbain dans son rôle d'entraînement du développement. Personne ne le conteste.

M. André Angot.

Si !

M. Félix Leyzour.

Mais gardons-nous de distendre, en touchant aux moyens financiers dont elles ont besoin, le tissu des petites et moyennes villes, du monde rural inquiet des orientations que l'Europe veut imprimer à la PAC et aux fonds structurels.

Septièmement, nous demandons que soit engagée une réflexion portant sur la création de fonds régionaux de développement qui permettraient de mobiliser une partie des disponibilités financières en direction des petites et moyennes entreprises pour développer la production et créer des emplois.

Tel est, madame la ministre, chers collègues, l'esprit dans lequel nous abordons le texte soumis à notre examen. Si nous en faisons une approche critique, je rappelle qu'il ne faut pas confondre « l'esprit de critique », qui a quelque chose de systématiquement négatif, et « l'esprit critique » qui est une façon de soumettre un texte au jugement, sans complaisance, pour souligner ce qu'il a de positif, mais aussi ce qu'il a d'insuffisant, voire de négatif, en se fixant pour objectif de l'amender, de le corriger, de l'améliorer. Esprit critique et démarche constructive vont de pair.

N ous formulons nos propositions et prenons en compte celles des autres. Notre objectif est de parvenir à un texte en phase avec les préoccupations de la population et des élus, qui présente un contenu de gauche et qui permette, dans son application, d'avancer dans le sens d'un accroissement de la démocratie, de la justice, de l'égalité entre nos territoires et leurs populations. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste, du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

(M. Patrick Ollier remplace M. François d'Aubert au fauteuil de la présidence.)

PRÉSIDENCE DE M. PATRICK OLLIER,

vice-président

M. le président.

La parole est à M. Yves Coussain.

M. Yves Coussain.

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, préoccupation majeure dans les années soixante et soixante-dix, l'aménagement du territoire est progressivement passé, dans les années quatre-vingt et quatre-vingt-dix, au rang des accessoires politiques.

Référence facile et sujet de revendication obligé dans nos discours, il a laissé la place à d'autres exigences ponctuelles, nées de la crise économique ou de l'urgence de répondre aux conflits et déséquilibres dus à un déficit de volontarisme éclairé en matière d'aménagement du territoire.

La loi d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire de 1995 a permis de relancer ce grand débat qui intéresse tous nos compatriotes dans leur vie quotidienne et concerne toutes nos régions qui s'interrogent sur leur avenir face aux grands bouleversements sociétaux et techniques.

Cette loi affichait de fortes ambitions et fixait de grands objectifs à la nation.

Il est vrai que certains d'entre eux n'étaient envisageables qu'à très long terme. Mais n'est-ce pas le fondement même de l'aménagement du territoire que de proposer une vision à longue échéance ? L'aménagement du territoire peut-il s'inscrire ailleurs que dans la durée ? Votre insistance sur le terme « durable » nous paraît donc justifiée, car il faut répéter les évidences. Elle justifie aus si a posteriori les ambitions de la loi de février 1995, à laquelle on ne peut reprocher, comme beaucoup, qu'elle n'ait pas été appliquée.

Plus de quarante décrets et cinquante arrêtés ou circulaires sont parus à cet effet. Des fonds sont mis en oeuvre, les zones ont été définies. Malgré les réticences de Bercy ou d'autres administrations, le traitement discriminatoire est entré dans notre droit pour vaincre les inégalités.

C'est un progrès considérable pour les esprits et le fonctionnement de notre République.

Vous nous proposez aujourd'hui un projet modifiant la loi du 4 février 1995. Je considère quant à moi qu'il fait plus que la modifier et marque une rupture sur des points essentiels.

L'enjeu est trop important pour notre pays, pour nos régions et nos concitoyens, et nous sommes tenus d'adopter une stratégie constructive. Nous essaierons de vous faire progresser, si nous le pouvons, vers un texte permettant à notre espace national de se placer dans une position compétitive sur le plan économique, susceptible d'offrir un environnement et un cadre de vie agréables et sécurisants à nos concitoyens et à nos descendants.

Pour faire, comme nous le voulons, avancer l'obligation d'aménagement du territoire, il faut trouver des bases fortes et porteuses d'équilibre et d'avenir.


page précédente page 00095page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 19 JANVIER 1999

Dans ce dessein, déterminons d'abord les lacunes de votre projet, avant de réfléchir à la façon de l'améliorer ! Que ne trouve-t-on pas, dans votre loi d'orientation pour l'aménagement du territoire, qui devrait y figurer ? En premier lieu, une clarification des compétences, s'avère aussi urgente que capitale. Il n'y aura pas d'aménagement harmonieux sans compétences clairement définies. Les conflits de compétences que nous rencontrons dans nos régions et dans nos communes sont sources de complications, de procédures inutiles, assorties de contrôles qui s'empilent. Les procédures l'emportent sur les projets ; les mieux informés s'arrangent de financements croisés, mais les vrais entrepreneurs se découragent.

La décentralisation a été engagée voici maintenant un peu plus de quinze ans ; nous avons aujourd'hui besoin de recadrer la place de chaque collectivité. Ce n'est pas, comme nous l'avons entendu cet après-midi, parce que cette clarification n'a pas été effectuée, il y a un an ou deux, qu'il ne faut pas l'entreprendre aujourd'hui.

Votre projet de loi n'aborde pas cette organisation des compétences. C'est une grave lacune, même s'il est prévu que de futurs textes en traitent partiellement.

Un autre sujet s'impose dès que l'on parle de toute démarche dans l'aménagement du territoire : la péréquation des ressources financières. Les inégalités entre les collectivités, qu'elles soient communales, régionales ou d épartementales, sont choquantes et criantes. Elles écartent toute possibilité de développement équilibré et harmonieux de nos territoires, et accentuent au contraire les écarts entre ceux-ci. Un examen détaillé des comptes montre que l'Etat investit plus et engage davantage de dépenses de fonctionnement dans les régions riches que dans les régions pauvres, tout simplement parce que les premières ont les moyens d'avoir des projets et des équipements auxquels l'Etat participe, alors que les secondes ne peuvent se le permettre. Voilà qui contribue à creuser les écarts. Votre projet de loi est muet sur le sujet.

Les objectifs et principes contenus dans la loi du 4 février 1995 sont-ils maintenus ? Dans l'affirmative, quelles mesures comptez-vous prendre pour approcher progressivement ces objectifs, dont on sait qu'ils seront longs à atteindre ? Et n'est-ce pas une raison pour ne pas perdre de temps ? Un autre volet majeur de tout aménagement du territoire concerne la construction d'un réseau de communic ations modernes irriguant l'ensemble du territoire national et offrant à tous les territoires des liaisons sûres et performantes. Vouloir aménager le territoire en laissant des zones complètement enclavées est une erreur. Il n'y aura pas de développement économique, on n'attirera pas de nouvelles activités et de nouvelles populations dans des territoires mal desservis par les réseaux routier, ferroviaire, aérien, comme par les réseaux de l'information ou le téléphone. Les infrastructures, nous dites-vous, ne sont qu'un élément du développement ; c'est vrai, mais elles en sont un élément indispensable. Ignorer cette exigence est une lacune grave.

Madame la ministre, chers collègues, la clarification des compétences, la péréquation des ressources, la construction d'un réseau efficace de communication sont les principes à la base de l'aménagement du territoire. Il n'en est pas question dans ce texte : nous regrettons ces oublis et ces absences.

Je souhaite maintenant vous dire quelles inquiétudes soulève ce qui, par contre, est présent dans le texte. Il contient des germes de complication, de recentralisation et de technocratisation, de confusion et de conflit.

Le risque de complication réside dans les structures à mettre en place au niveau des pays pour contractualiser les projets de développement. De nombreux échelons déjà existants sont perçus comme autant de collecteurs d'impôts et autant de niveaux de procédure administrative, qui, de plus en plus, n'apparaissent que comme des contraintes.

Depuis plusieurs années, les communes se sont regroupées en communautés, parfois à marche forcée. Cette étape à peine surmontée, il est tout à fait inopportun de créer un nouvel étage dans l'empilement territorial. Laisser entendre, dans ce projet de loi, que les pays auront l'obligation de se constituer en EPCI ou en syndicat mixte découragera, soyez-en sûrs, de nombreuses initiatives de regroupement volontaire autour de projets de développement.

Pourquoi ne pas adopter, au niveau des pays, la souplesse de contractualisation des contrats d'agglomérations ? Ce projet présente un deuxième risque, celui de la technocratisation liée au déficit de démocratie. Ce déficit est évident en ce qui concerne l'adoption des schémas de services collectifs. Les objectifs assignés à ceux-ci sont très flous. Les indications dont on dispose sur leur contenu sont inexistantes ou très rares. La responsabilité de ce contenu est laissée à la concertation des partenaires ; or, ceux-ci seront nombreux et divers, et l'arbitrage sera rendu par l'administration. Le décret se substituera à la loi. Tout le monde donnera son avis, sauf le Parlement.

Les orientations de l'aménagement du territoire sont une affaire de choix politique de la part des élus qui doivent leur légitimité aux urnes ; ce n'est pas une affaire de gestion de l'administration.

Le risque de la recentralisation, voisin de celui de la technocratisation, est inhérent à la non-clarification des compétences que je regrettais tout à l'heure et découle de l'uniformisation des procédures. La France est un pays aux aspects multiples. Ses territoires ont des niveaux et des modes de développement divers, des niveaux d'évolution en matière d'intercommunalité très variables. Les projets et ceux qui les portent ne peuvent être coulés dans le moule d'une procédure unique. La loi d'orientation doit ouvrir la voie à l'expérimentation et à la différence.

Une autre objection majeure à la philosophie de votre texte touche à l'opposition qui y est sous-jacente entre la ville et la campagne. Ici, l'on crée des richesses ; là, on se remet d'une dure semaine ou d'une dure année de travail.

Cette opposition est artificielle et réductrice ; elle ne tient pas compte de la capacité du monde rural à créer des richesses et à prendre des initiatives. Je dirai même que les nouvelles techniques de l'information, les logiques de la société d'information auront des effets opposés à ceux de la société industrielle et peuvent relancer l'espace rural.

Il faut donner à celui-ci les moyens de profiter des changements sociétaux inévitables. Vous vouliez rééquilibrer la loi Pasqua, que vous estimez trop ruraliste. Vous créez désormais un déséquilibre au détriment du rural.

Dans le même registre, il est créé une concurrence entre les agglomérations et les pays dont on ne sait trop comment ils vont s'imbriquer. Cette concurrence se traduira dans de nombreux cas par la domination de l'agglomération sur le monde rural environnant. Elle n'est pas favorable au développement des territoires concernés et peut être un frein à la construction de projets solides sur des espaces géographiques cohérents alliant ville et campagne.


page précédente page 00096page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 19 JANVIER 1999

La confusion règne enfin dans la présentation successive de textes dont la cohérence et la complémentarité ne sont pas évidentes. Le projet sur l'organisation urbaine et la simplification de la coopération intercommunale, le projet relatif aux droits des citoyens dans leurs relations avec l'administration concernent également l'aménagement du territoire. Leur présentation simultanée, ou au moins l'établissement formel d'un lien entre ces trois projets de loi, aurait permis une meilleure compréhension.

Nous parlions tout à l'heure de nécessaire clarification des compétences au niveau des structures territoriales.

Cette clarification est également souhaitable dans le domaine des compétences ministérielles.

Telles sont, madame la ministre, chers collègues, nos remarques et critiques sur votre projet : il comporte des oublis fâcheux, des dispositions inadaptées.

Des progrès ont été accomplis en commission et j'en rends hommage à notre rapporteur, Philippe Duron. Je souhaite, avec l'UDF, que de nouvelles améliorations soient apportées en séance. C'est dans ce dessein que, avec nos collègues du RPR et de Démocratie libérale, nous vous proposerons des amendements importants.

Nous souhaitons d'abord rétablir un schéma national, qui est la condition d'une cohésion territoriale relevant des missions de l'Etat. Nous vous proposerons donc à cet effet la suppression de l'article 2.

Nous voulons ensuite rétablir la légitimité démocratique dans l'adoption des schémas de services collectifs.

La commission a approuvé à l'unanimité le principe de leur adoption par le Parlement. Elle propose également d'introduire une simplification dans les procédures de pays et d'élever le seuil à partir duquel les aires urbaines peuvent se constituer en agglomérations.

Nous faisons, vous le voyez, une lecture très critique du texte proposé, mais nous nous engageons dans ce débat avec la volonté d'améliorer un projet important pour nos territoires et nos concitoyens.

(Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie franç aise-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à M. François Huwart.

M. François Huwart.

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le projet visant à réorienter par une nouvelle loi les objectifs et les règles de l'aménagement de notre territoire est nécessaire, indispensable même, mais difficile.

Nécessaire et louable parce qu'il est au coeur du pacte républicain, de la volonté gouvernementale de réduire les inégalités sociales et territoriales, de répartir plus harmonieusement les hommes et les activités, de créer des solidarités nouvelles entre des régions, des bassins de vie, des villes et des campagnes dans des domaines qui touchent tous à la vie quotidienne de nos concitoyens : l'emploi, la santé, l'éducation, la culture, les loisirs et la protection de l'environnement. Toutes choses auxquelles les principes républicains disent que toutes et tous doivent y accéder de la façon la plus égale possible.

Difficile, parce que la tendance naturelle de nos sociétés, depuis des décennies, n'est évidemment pas celle de l'harmonie et de la justice dans ces domaines.

Difficile, parce que efficacité économique ne rime pas facilement avec justice et qu'une forte dose de volonté est nécessaire pour concilier, équilibrer, rééquilibrer les tendances qui ont conduit à la concentration urbaine et à la désertification des campagnes, même si l'on doit nuancer le constat.

Difficile parce que notre pays a le génie de la complication des structures et des institutions, hésitant sans cesse entre les habitudes séculaires de la centralisation et le foisonnement des initiatives locales libérées par la loi de décentralisation de 1982.

Entre l'Europe, l'Etat, les régions, les départements, les structures de coopération intercommunale, qu'elles soient d'agglomérations ou de pays, à vocation unique ou multiple, à fiscalité propre ou de simples projets, et, enfin, les c ommunes, l'architecture de nos institutions est si compliquée qu'elle déroute nos concitoyens et les élus eux-mêmes, accaparés par un nombre déraisonnable de réunions, par l'enchevêtrement des compétences et le démêlage des financements croisés.

Au-delà de la lourdeur et de l'inefficacité des procédures, cette complexité manifestement excessive pose le très sérieux problème de la transparence de l'action publique et de son contrôle démocratique.

Dans ce contexte, la question se pose de la place de l'Etat, de l'efficacité de ses politiques, de son rôle de régulateur ou de coordinateur. Car il est coincé entre, d'une part, les exigences grandissantes des politiques européennes, si teintées de libéralisme qu'elles mettent en question l'avenir de nos services publics, et, d'autre part, le respect de la libre administration des collectivités territoriales. C'est, me semble-t-il, madame la ministre, à toutes ces questions que votre projet de loi tente de répondre.

Manifestement, les choix que vous avez faits ne sont ni celui de la recentralisation rampante dont j'entends qu'on vous accuse injustement, ici ou là, ni celui de la simplification et de la clarification des institutions de la décentral isation, tâche infiniment plus importante et plus complexe dont, quoi qu'elle soit nécessaire, on peut comprendre qu'elle n'ait pu être envisagée dans les priorités immédiates du Gouvernement, au même rang que la lutte contre le chômage, l'insécurité et la précarité.

Sans remettre en cause la complexité des structures, votre choix est donc d'améliorer le fonctionnement des procédures, de les rendre globalement plus cohérentes entre elles en créant des espaces dits pertinents de coopération, en intégrant l'échelon européen, l'échelon régional, les pays et les agglomérations, par la voie de la contractualisation.

Votre texte ne modifie pas l'architecture de la maison.

Il organise les circulations et élargit les ouvertures sur l'Europe et sur les préoccupations parfaitement légitimes de développement durable et de protection de l'environnement. Son ambition n'est pas démesurée, vous l'avez dit vous-même, mais son apparence est un peu compliquée et n'exclut pas qu'on vous fasse ici et là, notamment chez les radicaux, le reproche d'une démarche un peu technocratique et, en même temps, paradoxalement, d'inspiration un peu libérale, plus soucieuse de la demande que de l'offre, comme vous l'avez reconnu.

Tel qu'il est, avec, incontestablement, une réorientation positive des objectifs dans le sens d'une meilleure prise en compte des problèmes urbains, il ne nous paraît pourtant pas satisfaisant, et j'exprimerai très rapidement nos préoccupations.

Nous avons bien compris que le rôle de l'Etat, régulateur et correcteur des inégalités spatiales, est réaffirmé.

Mais nous pensons que la substitution de schémas collectifs, dans huit domaines, au schéma national d'aménagement du territoire ne permettra pas de maintenir au niveau national un lien suffisamment global et cohérent entre les politiques locales et sectorielles.


page précédente page 00097page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 19 JANVIER 1999

Nous comprenons bien que le choix des schémas de services est plus compatible avec la dimension européenne de l'aménagement du territoire. Mais nous sommes convaincus de la nécessité de réaffirmer le rôle de l'Etat et du commissariat au Plan comme gage d'unité territoriale dans le cadre de la République. C'est une divergence importante qui tient à la conception que nous avons de l'Europe, fédération d'Etats et pas de régions - celles-ci étant au demeurant trop petites en France -, et à notre souci de conserver au département, seule collectivité importante de proximité, un rôle que nous estimons pour l'instant irremplaçable.

En clair, nous ne sommes pas prêts à accepter l'affaiblissement, même relatif, du rôle de l'Etat et la dilution progressive de ses liens avec les départements au bénéfice d'un axe Europe-régions. C'était le sens de l'un de nos amendements.

Notre deuxième préoccupation tient au sens qu'il faut donner au concept d'aménagement durable, mis aujourd'hui en avant.

Nous sommes, n'en doutez pas, convaincus de la nécessité de mettre en place un développement durable, mais la transposition de cette notion à l'aménagement du territoire, c'est-à-dire l'idée d'aménagement durable, nous pose problème. Nous nous interrogeons très sérieusement sur les conséquences que pourrait entraîner la confusion entre développement durable et aménagement durable, cette dernière notion présentant à nos yeux le risque de trop figer la situation en matière de constructions, d'équipements, d'infrastructures indispensables pour terminer le maillage, aujourd'hui insuffisant.

M. François Sauvadet.

Voilà une bonne question !

M. François Huwart.

C'est le problème du juste équilibre entre les préoccupations environnementales, le développement économique et l'emploi.

M. François Sauvadet.

Deuxième bonne question !

M. François Huwart.

D'ailleurs, l'un de nos amendements tend à supprimer la subordination de la création de pays à l'avis des organismes directeurs des parcs naturels régionaux. Nous sommes très attachés à une politique de revitalisation harmonieuse des milieux ruraux fragiles, et, par conséquent, inquiets d'une situation dans laquelle les préoccupations environnementales, qui doivent par ailleurs absolument être prises en compte, pourraient constituer un frein excessif au développement économique des pays.

Cela m'amène à un troisième point, qui concerne la relation ville - campagne ou, si vous préférez, milieu urbain - milieu rural.

Nous ne sommes pas de ceux qui opposent, y compris avec des arrière-pensées politiques, la ville à la campagne, et si nous pensons comme vous qu'il fallait mieux prendre en compte les problèmes urbains, nous croyons que l'espace rural et les petites villes doivent être considérés comme un espace de rééquilibrage d'une société où la concentration urbaine a engendré des problèmes sociaux inextricables.

M. Alain Tourret.

Très bien !

M. François Huwart.

Dès lors, il nous apparaît que le lien entre les agglomérations et les pays doit être mieux établi, de sorte que les agglomérations n'apparaissent pass eulement concentrées sur la résolution de leurs problèmes, difficiles il est vrai, mais soient plus ouvertes sur les pays voisins qui regroupent des collectivités souvent pauvres en équipements et en moyens financiers.

Pour nous, c'est un des enjeux majeurs du rééquilibrage de notre aménagement du territoire. Autant le problème urbain nous paraît être bien abordé par votre texte comme par celui de M. le ministre de l'intérieur, autant le développement des pays et de la majorité de notre territoire est le point faible du texte de loi. Espaces de contractualisation, de coopération, de projets, les pays risquent de bien mal jouer leur rôle de rééquilibrage parce qu'ils n'en auront pas les moyens, même s'ils contractualisent, parce qu'on ne fait pas des pays capables d'investir si ceux-ci sont constitués d'une addition de collectivités sans grands moyens.

M. François Sauvadet.

Bravo !

M. François Huwart.

Je souhaitais donc, madame la ministre, vous faire part de l'inquiétude, voire de l'inc ompréhension que nous percevons chez un grand nombre d'élus ruraux et départementaux. Nous ne devons pas laisser se développer chez eux le sentiment qu'ils pourraient être les laissés pour compte d'une loi dont l'importance ne leur échappe pas. Il faut absolument mieux formaliser le lien nécessaire entre les agglomérations et les pays.

Telles sont les raisons pour lesquelles le projet de loi d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire ne recueille pas l'adhésion des députés radicaux de gauche en l'état et les raisons pour lesquelles nous serons très attentifs à l'évolution de sa discussion.

(Applaudissements sur divers bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert et du groupe socialiste, et sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à Mme Sylvia Bassot.

Mme Sylvia Bassot.

« L'effort multiséculaire, qui fut longtemps nécessaire à notre pays pour réaliser et maintenir son unité malgré les divergences des provinces qui lui étaient successivement rattachées, ne s'impose plus désormais. Au contraire, ce sont les activités régionales qui apparaissent comme les ressorts de sa puissance économique de demain ». Cette réflexion visionnaire, livrée il y a un peu plus de trente ans par le général de Gaulle dans un discours à Lyon, pourrait être aujourd'hui encore le fil conducteur de la philosophie qui habite les élus de tous bords en matière d'aménagement du territoire.

Chacun s'accorde à dire qu'il faut favoriser l'éclosion d'un modèle français de développement associant modernité et tradition, unité nationale et identités régionales.

Ce nouveau modèle doit rendre compatibles une centralisation efficace mais limitée, une décentralisation élargie mais contrôlée et une déconcentration des décisions au plus près de la population.

Le projet de loi que nous examinons aujourd'hui semble avoir été élaboré dans cet esprit, tout comme la précédente loi d'aménagement du territoire, dite « loi Pasqua ».

Le point central du texte est, à mon sens, l'affirmation du statut des pays à l'article 19 et l'introduction des agglomérations à l'article 20. Le pays constitue en effet une des mailles importantes du territoire régional, caractérisée par l'existence de fortes interdépendances entre les diverses composantes rurales et urbaines qui le forment et une communauté manifeste d'intérêts entre les divers agents économiques et sociaux.

Ces deux articles me conduisent à vous faire part de quelques réflexions positives ou critiques sur les pays et les agglomérations.


page précédente page 00098page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 19 JANVIER 1999

En ce qui concerne les éléments positifs, je saluerai d'abord le renforcement de la contractualisation dans le cadre du contrat de plan,...

M. Jean-Pierre Balligand.

Bravo !

Mme Sylvia Bassot.

... élément nécessaire d'une politique d'aménagement du territoire dont l'échelon régional est le pivot.

Une autre avancée est à souligner : la clarification apportée par la commission entre les compétences des pays et des parcs régionaux lorsqu'il y a superposition des territoires.

Il faut noter aussi que la commission a approuvé un autre amendement qui confirme vos propos, madame la ministre, selon lesquels les pays existants ne seraient pas remis en cause. Cette mesure permet aux pays déjà constitués d'avancer dans leur réflexion sans être paralysés par la nouvelle loi, ce qui est important pour des départements comme l'Orne, où le territoire est déjà entièrement quadrillé en pays constatés par arrêté préfectoral.

M. Jean-Claude Lenoir.

Très bien !

Mme Sylvia Bassot.

En ce qui concerne les éléments négatifs, j'indiquerai que le projet de loi n'est pas uniquement une loi d'orientation définissant une politique d'aménagement du territoire. Il comporte plusieurs dispositions qui en font une loi d'organisation territoriale ayant des conséquences sur l'édifice institutionnel.

L'ambiguïté est grande devant l'objectif de créer soit une intercommunalité de territoires s'appuyant sur les agglomérations et les pays, soit une intercommunalité de projets s'appuyant sur des schémas de services collectifs.

A mon avis, le texte n'est pas assez clair pour empêcher tout risque de voir le pays devenir un échelon administratif ou politique supplémentaire, ce qui inquiète considérablement les élus locaux.

Ils craignent des coûts de fonctionnement supplémentaires et un manque de clarté pour le citoyen, qui aura à l'évidence beaucoup de mal à se repérer dans ce salmigondis de structures qui s'empilent les unes sur les autres.

Et, en fin de parcours, c'est une fois de plus le contribuable qui pourrait être la victime d'un alourdissement de l'administration, source de dépenses nouvelles, et donc d'impôts sans cesse croissants.

Par ailleurs, je souhaite vraiment que vous preniez en compte la position de la commission, qui est celle de tous ceux qui ont déjà une certaine expérience dans la mise en place des pays et qui prônent la souplesse et la liberté de choix dans la forme de leur organisation juridique.

(Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

Il est tout à fait possible de contrôler les fonds publics accordés aux communautés de communes et EPCI en tant que maîtres d'ouvrage de projets.

Je fais partie de ceux qui préfèrent que les subventions aillent à ceux qui réalisent des investissements créateurs d'emplois plutôt qu'à ceux qui animent et conçoivent, et qui sont forcément budgétivores en matière de frais de fonctionnement.

M. Jacques Blanc et M. André Angot.

Très bien !

Mme Sylvia Bassot.

Enfin, il me paraît tout à fait surprenant que l'on demande au Parlement d'étudier une forme de contractualisation avec un territoire qui n'a pas encore été créé par la loi, je veux parler des agglomérations.

Alors que, dans quelques semaines, nous serons appelés à examiner le projet de loi sur les interventions économiques des collectivités locales, et dans quelques jours à débattre sur les seuils retenus pour ce type de regroupement dans le cadre du projet de loi sur l'intercommunalité, on nous demande aujourd'hui d'approuver des seuils pour la contractualisation de ces agglomérations, ce qui revient en fait à les définir déjà dans ce projet de loi.

En clair, on nous présente une voiture flambant neuf, arborant fièrement sa vignette verte sur le pare-brise, mais qui ne peut pas rouler car il lui manque le moteur et les roues.

(Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

Le pire est que l'on n'est même pas assuré que le moteur et les roues que l'on ajoutera plus tard soient adaptés à la carrosserie que vous nous livrez aujourd'hui.

M. Jacques Blanc.

Tout à fait !

Mme Sylvia Bassot.

Il aurait donc été plus judicieux, comme de nombreux députés l'ont fait remarquer, d'examiner le projet de loi de M. Chevènement avant le vôtre, madame la ministre, même si la galanterie en avait souffert.

Pour conclure, au-delà du discours incantatoire ou naïf sur le rôle de l'Etat et la décentralisation, c'est une prise de conscience collective et un effort de tous les niveaux et de tous les partenaires qui peuvent mener au succès.

La compétence d'aménagement du territoire étant partagée, la responsabilité doit se partager. L'Etat tout seul ne parviendra à rien.

Mais c'est lui qui peut lancer le processus et entraîner l'adhésion.

Encore faut-il que le pouvoir politique le souhaite et envoie un message clair aux collectivités locales et aux élus. Ce n'est malheureusement pas vraiment le cas avec ce projet.

(Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

M. le président.

La parole est à M. Jean-Pierre Balligand.

M. Jean-Pierre Balligand.

La loi Voynet et la loi Chevènement, qui nous sera soumise dans quelques semaines, ont la particularité de se situer dans un triple contexte.

L'absence de recadrement, de simplification et de renf orcement de l'intercommunalité depuis la loi du 6 février 1992, dite loi d'administration territoriale de la République, d'abord.

Les difficultés, ensuite, pour ne pas dire l'absence d'application de la loi d'orientation du 4 février 1995, dite loi Pasqua, qui reposait encore largement sur une conception centralisatrice de l'aménagement du territoire.

La concomitance, enfin, entre la négociation de la prochaine génération des contrats de plan Etat-régions pour la période 2000-2007 et la réforme en 1999 des zonages et des fonds structurels communautaires, laquelle prévoit une réduction de 15 % des zones éligibles, un recentrage des fonds, réduits de six à trois, et une plus grande concentration stratégique des aides.

Ces lois répondent simultanément à un triple constat.

Tout d'abord, la nécessité d'avancer sur la voie d'une intercommunalité plus intégrée et la recherche de territoires urbains, périurbains et ruraux plus pertinents et plus solidaires.


page précédente page 00099page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 19 JANVIER 1999

En second lieu, la crise de nos concepts d'aménagement du territoire et de planification régionale, à l'image d'un schéma national que l'Etat n'a plus les moyens d'assumer. Mon collègue Ollier préside la séance et ne pourra donc pas me répondre, mais je rappelle que j'ai été l'un des cinq parlementaires ayant présidé, sous l'ancienne législature, avec Patrick Ollier, Jean François-Poncet et d'autres, les commissions thématiques qui préparaient le schéma national. Ce travail a été fait, c'est vrai, mais à un moment donné il devait se transformer en un document qui serait présenté au Parlement. Or cette décision n'a jamais été prise. Non parce que les élections sont arrivées immédiatement après ce travail, c'est faux, mais tout simplement parce que le pouvoir politique ne savait pas comment présenter ce document à l'Assemblée nationale.

C'est cela la réalité et il n'est pas indigne de le dire ! En tout cas, on ne peut récrire l'histoire. C'est pour cela qu'une réflexion a été engagée afin que le nouveau gouvernement essaye de présenter un schéma des services collectifs.

Mais une autre crise est liée à la décrédibilisation de la démarche contractuelle, du fait du désengagement financier de l'Etat, qui, je le rappelle, n'a pas honoré sa signature sous l'ancienne législature. C'est pour moi la chose la plus grave qui se soit produite depuis les lois de décentralisation ; à un moment donné, l'Etat, sous l'ancienne majorité, n'a pas honoré la signature des contrats de plan.

M. Eric Doligé.

Ah oui ?

M. Jacques Blanc.

Il a raison ! C'est vrai !

M. Jean-Pierre Balligand.

Cela a abouti à une certaine décrédibilisation, et les présidents de région n'ont pas fait leur travail puisqu'ils se sont même substitués à l'Etat ! (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

Laissez parler M. Balligand, s'il vous plaît !

M. Jean-Pierre Balligand.

Je veux aussi parler de l'absence de concentration sur les orientations structurantes, ciblées et stratégiques d'un projet, de la faiblesse ou de l'insuffisant ciblage de nos fonds - je pense en particulier au FNDE - et de notre système de péréquation qui était si annoncé dans la loi Pasqua et qui a été si peu réalisé.

M. François Sauvadet.

Il fallait le faire !

M. Jean-Pierre Balligand.

Mais depuis la loi Pasqua, votée sous le gouvernement Balladur, il y a eu un autre gouvernement, mes chers collègues : le gouvernement Juppé qui a passé son temps à ne pas appliquer la loi Pasqua ! Un député du groupe du Rassemblement pour la République.

Vous pouviez le faire !

M. Jean-Pierre Balligand.

Nous essayons donc de rouvrir le chantier.

J'évoquerai aussi la difficulté de sortir du moratoire sur les services publics, parce qu'il faut être lucide,...

M. Jacques Blanc.

Ah !

M. Jean-Pierre Balligand.

... - oui, il y a une difficulté, j'ai l'habitude de parler clair - ou encore d'une décentralisation restée au milieu du gué.

Enfin, troisième constat, celui de l'intégration européenne de notre territoire et la nécessité d'articuler plus é troitement politiques nationales et politiques européennes sur sept ans, en appui des stratégies régionales et des coopérations interrégionales, mais aussi, dans le même temps, de découpler les moyens, afin de ménager certaines zones qui ne seront plus éligibles et de garder une maîtrise de l'aménagement de notre territoire, décidé de façon la plus décentralisée possible.

Face à ces enjeux que j'ai essayé d'analyser avec lucidité, c'est pour que l'aménagement du territoire redevienne une politique d'ambition que nous avons justement demandé et obtenu la procédure d'urgence. Il aurait été d'ailleurs difficilement admissible que les décalages de calendriers persistent en favorisant les préarbitrages entre les préfets et le Gouvernement, autrement dit entre l'Etat et l'Etat, tant en matière de contrats de plan Etat-régions, d'élaboration des documents de programmation - DOCUP - que de schémas de services collectifs, et ce avant le vote et l'adoption de la loi pour l'aménagement et le développement durable du territoire.

De plus, le débat qui s'ouvre aujourd'hui va enfin permettre de lever l'ambiguïté d'un projet de loi que lui a conférée une série d'arbitrages interministériels successifs.

La loi Voynet risquait, en effet, d'apparaître comme une simple correction de la LOADT du 4 février 1995, qualifiée en son temps par certains de « loi à crédit ». Il doit donc en être autrement.

Qu'en est-il ? Le projet de loi qui nous est soumis présente les ambitions louables de donner priorité au « développement durable », d'intégrer la dimension européenne, de réengager territorialement l'Etat par les schémas de services collectifs et le volet infrarégional des prochains contrats de plan qui intégrera, plus démocratiquement que cela n'a été fait jusqu'ici, les bassins de vie et d'emploi à partir des projets qu'ils auront élaborés, de régionaliser les procédures via les schémas régionaux, tout comme de consacrer de nouveaux espaces pertinents que sont les pays redéfinis par rapport à la loi de février 1995 et les agglomérations, en permettant davantage aux acteurs de se « prendre en main », en association avec leurs partenaires économiques et sociaux.

Alors que la loi Pasqua péchait par ruralisme, par statisme...

M. Jacques Blanc.

C'est méprisant !

M. Jean-Pierre Balligand.

... et non-applicabilité de la plupart de ses dispositions,...

M. François Sauvadet.

Non-application ! Ce n'est pas la même chose !

M. Jean-Pierre Balligand.

... le nouveau texte reconnaît le fait urbain et joue sur les dynamiques et complémentarités des territoires.

M. Jacques Blanc.

C'est du mépris pour l'exode rural !

Mme Yvette Benayoun-Nakache.

Vous vous y connaissez, vous, en mépris !

M. Jean-Pierre Balligand.

Il s'agit donc là d'un texte exigeant, tout comme le seront les amendements déposés, tant il est vrai que le but du jeu est de relancer l'intercommunalité en milieu urbain, d'encourager la cohérence des projets locaux qui seront éligibles à la contractualisation et de stimuler les marchés locaux de l'emploi, sans vision de court terme, mais au contraire en faisant de la programmation pluriannuelle.

Dans cette perspective, je souhaiterais que la dimension territoriale et notamment infrarégionale de la loi soit traitée comme il se doit, et que soit encouragée et renforcée la dynamique créée par la loi ATR du 6 février 1992.


page précédente page 00100page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 19 JANVIER 1999

C'est pourquoi je voudrais revenir sur les raisons de l'échec de nos politiques d'aménagement du territoire jusqu'ici.

Les oppositions rural-urbain ou le discours du nécessaire « rééquilibrage » entre le rural et l'urbain, le renvoi dos à dos des régions et des départements, ces problématiques sont non seulement largement dépassées, mais elles ne permettent pas de mettre en évidence les conditions d'un développement durable et concerté entre villes et campagnes et de conjuguer décentralisation et aménagement du territoire au service de l'emploi et de la cohésions ociale, dans un contexte européen de concurrence aiguisée.

Plus encore et plus fondamental à mes yeux : ce qui alimente le « non-choix » ou la difficulté de la posture réformatrice dans notre pays, c'est, au-delà de nos travers centralisateurs, notre incapacité à organiser une nouvelle

« gouvernance » à l'échelle des microterritoires, des territoires « intermédiaires » ou encore des zones de moyenne et petite chalandise. Aujourd'hui, ne pas encourager les intercommunalités initiées par la loi du 6 février 1992 ce serait prendre le risque de passer à côté d'une dynamique territoriale, inégale c'est vrai, mais significative et essentielle à la modernisation de la décentralisation et au développement local.

Les citoyens doivent pouvoir identifier, reconnaître et participer à la gestion de leurs territoires de vie et de travail, sans les brouillages engendrés par les financements croisés, le morcellement communal, la concurrence entre les collectivités locales, les élections au second degré, l'absence d'impôts modernes notamment. Nous devons nous poser la question de la légitimité et de l'efficacité de l'action publique devant les citoyens envers lesquels nous, élus, sommes redevables. C'est pour cette raison qu'il importe d'accompagner et d'encourager l'émergence d'un pouvoir local légitime, à la fois proche et pertinent, repo-s ant sur la « communautarisation » des politiques publiques, des ressources humaines et des moyens financiers, comme je l'ai préconisé il y a trois ans dans le rapport Pour un acte II de l'aménagement du territoire et de la décentralisation que j'avais remis à Lionel Jospin.

Prenons acte de la reconnaissance, par la loi Voynet, des deux nouvelles catégories de territoires, ni trop vastes ni trop étriquées : d'un côté, l'agglomération, à condition que cette dernière soit responsabilisée sur des actions réellement structurantes et légitimée, à terme, par le suffrage universel ; de l'autre, les « pays », ou, plus exactement, ce que j'appelle des unités fédératives de bassins d'emploi constitués en intercommunalités et ayant vocation à nouer des complémentarités entre villes et campagnes. Je rappelle qu'une grande majorité des 1 241 communautés de communes en fonctionnement recensées au 1er janvier 1998 - contre cinq communautés de villes pour toute la France ! - se composait de communautés rurales et que 10 millions d'habitants sont concernés par l'intercommunalité à fiscalité propre de moins de 50 000 habitants.

M. Eric Doligé.

Eh oui !

M. Jean-Pierre Balligand.

Le volet infrarégional des prochains contrats de plan Etat-région permettra un progrès qu'il convient de saluer : l'affectation de 20 % des enveloppes à des projets d'initiative locale et la contractualisation de l'Etat et des régions avec les agglomérations et les pays qui satisferont à des conditions d'intégration suffisantes, dans un délai intéressant de trois ans. Pour ce faire, il serait souhaitable que l'intercommunalité fédérative de bassins, pour contractualiser avec la région et l'Etat sur le mode « un projet-un territoire-un contrat », puisse bénéficier de véritables moyens et d'incitations nouvelles, au même titre que le monde urbain. L'encouragement à l'adoption de la taxe professionnelle unique assortie de la possibilité de prélever une fiscalité additionnelle, la réforme de nos systèmes de péréquation, sont des facteurs clefs du développement des territoires.

Enfin, il faut raisonner aux bonnes échelles d'interdépendance et de complémentarités. Il serait ainsi regrettable que les pays soient renvoyés au seul monde rural et

« grand rural » et que l'option du « tout-urbain », au travers de la promotion des communautés urbaines et des communautés d'agglomération, s'avère discriminatoire sur le développement de nombreux territoires. L'égalité républicaine vaut aussi en matière d'intercommunalité. C'est ce que j'appelle le parallélisme des formes et des moyens, ce qui ne veut pas dire l'uniformité.

M. François Sauvadet.

Ce n'est pas réaliste !

M. Jean-Pierre Balligand.

En portant le seuil de constitution des futures communautés d'agglomération à un niveau suffisamment élevé, on permet aux « pays » d'atteindre une taille suffisante et d'entrer dans l'urbanité.

Autrement dit, on permet aux villes petites et moyennes d'assumer leurs fonctions urbaines de façon concertée avec les communes rurales qui les entourent.

Précisons enfin sur ce point que la question n'est pas de transformer les pays en nouvelles entités administratives. Il s'agit d'assurer leur transparence financière et démocratique, de leur donner un vrai substrait juridique et de leur laisser pleine latitude d'action.

Il faut viser un véritable changement culturel dans notre approche des territoires et du partage des responsabilités, et ce moins que jamais en termes doctrinaires de pouvoir - il est des collectivités locales qui dépensent de l'énergie à persévérer dans leur être plutôt qu'à s'ou vrir à de nouvelles dimensions et à faire évoluer leurs fonctions -, qu'en termes d'efficacité et de légitimité de l'action publique.

L'Etat, quant à lui, ne nous a pas toujours apporté la preuve qu'il savait, ou qu'il pouvait intervenir en réel partenariat avec les collectivités locales. Il doit indiquer clairement son ambition, notamment en matière de schémas collectifs de services publics, pour lesquels cohabitent encore à la fois une logique de régulation macroéconomique et des logiques régionales, et ce qu'il compte financer et ne plus financer. Si on ne dégage pas de moyens pour privilégier l'agglomération, comment peutont contractualiser et être crédible ? En bref, il faut faire collectivement en sorte que cette loi d'orientation ne soit pas une fois de plus une loi de désorientation.

Ce texte n'annonce pas le grand soir de l'aménagement du territoire,...

M. François Sauvadet.

Ni même le petit matin !

M. Jean-Pierre Balligand.

... mais il présente l'avantage de mettre des outils au service des collectivités territo-r iales, des acteurs territoriaux. Le groupe socialiste l'approuve donc ainsi que le projet de la loi Chevènement car ils nous permettront d'engager une vraie modernisation territoriale de la France. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

La parole est à M. Eric Doligé.

M. Eric Doligé.

Madame la ministre de l'aménagement durable du territoire - vous avez remarqué que j'ai placé le mot « durable » au bon endroit ! -, j'allais vous appeler


page précédente page 00101page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 19 JANVIER 1999

madame la ministre de la ville, de l'urbain ou de l'agglomération, mais je ne sais pas encore, nous verrons quel sera le texte en final ! Vous avez fait, dans l'exposé des motifs de votre projet de loi, un constat que je peux rejoindre en certains points puisque vous nous dites que le territoire national souffre de déséquilibres graves en matière économique, sociale, culturelle, de transports, de pollution et de sécurité. Cela bien sûr justifierait votre texte. Mais si l'on regarde d'un peu plus près quelle est la réalité, on s'aperçoit que l'Etat ne joue pas son rôle. En effet, il change continuellement les règles du jeu et ne tient pas ses engagements. Je vais vous donner quelques exemples, que nous avons tous vécus et que, malheureusement, nous continuons à vivre chaque jour dans nos collectivités.

Dans le domaine économique, d'abord. Pour faire du commerce et créer des emplois, il faut pouvoir circuler et, pour pouvoir circuler, il faut des routes nationales. Or, lequel d'entre nous n'a pas vu la construction de sa route nationale retardée, voire annulée par des décisions que vous avez prises ? Chacun d'entre nous ici, quels que soient les bancs sur lesquels il siège, a vu des constructions d'autoroutes annulées ou retardées. Quant aux aéroports, je n'ose en parler ! S'agissant du TGV, les décisions ne sont pas prises très rapidement et il me semble que certaines voies navigables ont disparu.

M me Yvette Benayoun-Nakache.

Dans quel pays vivons-nous !

M. Eric Doligé.

C'est pourtant cela l'aménagement du territoire et cela ne relève pas de nos collectivités territoriales. Ce n'est ni au pays, ni au département, ni à la commune qu'il revient de décider en matière de TGV, d'aéroport, de voie navigable, de route ou d'autoroute.

C'est à vous le Gouvernement, l'Etat, que cela incombe.

Le constat est le même dans le domaine social et de la santé. Nous manquons de 14 000 lits médicalisés. Les départements jouent leur rôle vis-à-vis des personnes âgées et si des difficultés existent dans nos maisons de retraite, c'est bien parce que l'Etat ne finance pas les lits qu'il a promis.

En matière de sécurité - c'est peut-être un mauvais exemple parce que j'ai lu tout à l'heure dans le journal que le Gouvernement avait quelque peu reculé en la matière sous la pression de l'opposition - ce n'est pas faire de l'aménagement du territoire que nous empêcher d'avoir, dans nos secteurs ruraux, des gendarmeries et des commissariats permettant d'assurer la sécurité à laquelle tous les citoyens ont droit.

Voilà, les vrais problèmes ne sont pas abordés. Il faudrait définir les compétences, les clarifier, les répartir, achever la décentralisation, la déconcentration. Or dans ce projet de loi, il n'y a rien de tout cela et nous en sommes tous conscients. Le texte est totalement muet en la matière.

Vous avez un remède à ces maux, c'est aggraver le déséquilibre entre le monde urbain et le monde rural, c'est inverser la loi Pasqua. La majorité estime que celle-ci est trop favorable au rural - je ne vois pas en quoi cela pouvait être gênant ! Dès lors, vous inversez la situation.

Vous allez concentrer dans les villes l'économie, la richesse, la pauvreté également d'ailleurs et l'habitat social. Comme cela a été fait pendant des années, vous allez à nouveau refuser au secteur rural le droit à un habitat social. Il ne faudra pas se plaindre de l'hypertrophie urbaine dans les années à venir ! Je souhaite quant à moi que l'on revitalise les services.

Or que fait-on actuellement en matière d'aménagement du territoire, et ce n'est pas de la responsabilité des collectivités locales ? On ferme des postes, des gendarmeries, des gares, des hôpitaux. Est-ce cela l'aménagement du territoire ? Je suis d'ailleurs surpris de constater que les mêmes collègues qui, sur le terrain, râlent en permanence contre les fermetures d'hôpitaux, de gendarmeries, de commissariats, les oublient totalement dès qu'ils arrivent à Paris et n'en parlent jamais dans l'hémicycle. Le parisianisme est dangereux pour les députés de province.

Je suis inquiet également car votre texte et celui de M. Chevènement proposent à certains endroits, certes de façon assez discrète, de diluer un peu plus les compétences. Des propositions quelque peu inquiétantes à cet égard sont faites s'agissant des collèges et du secteur social.

Que voit-on se profiler ? Si l'on est pessimiste, mais nous sommes optimistes sinon nous ne serions pas élus, c'est une disparition possible des départements, de certaines communes, dont les attributions pourraient sinon être limitées au social pour les départements, à l'état civi l pour les communes. J'ai l'impression que ce qui fonctionne bien sur le plan du territoire, c'est-à-dire les communes et les départements, gêne certains.

Madame la ministre, allez-vous accepter les amendements proposés par la majorité ? J'ai eu le sentiment que le rapporteur faiblissait quelque peu en la matière. Allezvous accepter de reconnaître le rôle du Parlement ? Les départements et les communes marchent. Pourquoi leur causer des préjudices ? Nous regrettons qu'après avoir fait un constat relativement juste, vous proposiez de mauvaises solutions et, qu'une fois de plus, l'Etat refuse ses responsabilités. M. Balligand a dit que l'Etat n'avait pas tenu sa parole. Mais je pourrais vous donner une liste incroyable de cas dans lesquels il n'a pas tenu sa parole depuis deux ans bien qu'il ait signé des documents et fait engager des dépenses aux collectivités, ce qui est encore plus grave.

J'ai lu dans votre déclaration de cet après-midi, madame la ministre, que vous repoussiez à 2003 la signature des contrats de plan avec les pays, les agglomérations. Cela signifie que l'aménagement du territoire sera encore retardé de trois ou quatre ans et que, pendant ce temps, l'Etat pourra, une fois de plus, faire lanterner des collectivités, ce que je regrette amèrement. Tout à l'heure, on nous a parlé d'urgence et je suis particulièrement surpris de voir quelle est votre notion de l'urgence lorsque vous nous parlez de 2003 - c'est votre déclaration, je l'ai sous les yeux ! Pour nous, aménager le territoire, c'est laisser la liberté aux collectivités. Ce n'est pas créer des échelons supplémentaires, des pays, des agglomérations, que l'on va transformer progressivement. C'est confirmer le rôle des régions, des départements et des communes. Je regrette, madame la ministre, que vous ayez choisi d'aller à l'inverse de ce qui est souhaitable en matière d'aménagement du territoire. En tout cas, je souhaite que l'Etat respecte sa parole et qu'il n'empêche pas les collectivités de participer pleinement à l'aménagement du territoire. (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)

M. le président.

La parole est à M. Michel Vaxès.

M. Michel Vaxès.

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, mon intervention ne portera que sur deux aspects des évolutions structurelles, ter-


page précédente page 00102page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 19 JANVIER 1999

ritoriales et politiques que votre projet de loi d'orientation pour l'aménagement et le développement durable vise à promouvoir.

La loi de votre prédécesseur était sant nul doute excessivement marquée par l'objectif d'une maîtrise étatique centralisée de l'aménagement du territoire. Nous l'avons combattue.

Votre projet s'en démarque nettement puisque la démarche proposée porte l'ambition d'associer plus fortement les acteurs locaux, l'Etat devant veiller à assurer la cohérence territoriale et la réduction des inégalités.

L'instrument de cette mise en cohérence reposerait pour l'essentiel sur la contractualisation avec les régions auxquelles seraient associés les pays et les agglomérations.

Nous partageons tout à fait l'objectif de réduction des i négalités, mais nous observons simultanément que l'action de l'Etat pour renforcer cohésion et équité reste encore teintée d'une excessive timidité.

Il le resterait si l'intervention de l'Etat continuait de relever d'une logique de répartition plutôt que d'une mobilisation substantielle des moyens et de l'ambition de répondre de manière adaptée aux besoins croissants des territoires et des populations les plus déshéritées.

Quand nombre de clignotants sont passés au rouge dans des domaines aussi variés que la recherche, l'équipement sanitaire, les infrastructures de transport, le logement, les services publics sur tous les territoires, y compris l'Ile-de-France, l'heure n'est plus de rechercher des délocalisations mutilantes ou seulement une répartition moins injuste de moyens demeurant constants.

L'heure est de promouvoir sur tous les territoires le développement d'équipements dont tout le monde s'accorde à souligner qu'ils sont insuffisants au regard des besoins des femmes et des hommes de notre pays.

S'il faut, sans aucun doute, fixer des priorités parce que tout ne peut pas être fait partout et tout de suite, il faut que celles-ci visent précisément à réduire les inégalités en tirant l'essentiel vers le haut, partout où l'urgence l'exige.

Nous apprécions, madame la ministre, la volonté affichée de favoriser l'implication et l'initiative locale, pour promouvoir des projets diversifiés mieux adaptés aux réalités et aux besoins. Mais nous savons aussi qu'une ambition nationale, même fortement affichée, sans une mobilisation des moyens, risque, malgré la plus louable des intentions, de voir s'aggraver encore les disparités de développement des territoires et les inégalités de traitement des citoyens.

C'est pourquoi, tout en nous félicitant d'une démarche qui veille à nourrir ces objectifs d'aménagement de la réflexion et des propositions locales, nous considérons que l'échelon de l'Etat continue de constituer un niveau essentiel de régulation comme en témoignent les enjeux l iés aux politiques publiques, sociales, économiques, industrielles dont nous savons les effets structurants décisifs sur l'aménagement des territoires national et régionaux.

Ma seconde réflexion portera sur les implications institutionnelles, dont témoignent non seulement l'effacement relatif de l'échelon national mais celui, tout aussi évident, de la commune et du département.

Sans remettre en cause la place donnée aux régions, aux pays et aux agglomérations, il me paraît dommageable que la commune, foyer de démocratie, lieu par excellence de l'expression de la démocratie directe, le plus proche de l'émergence des aspirations et des besoins du citoyen, ne soit jamais citée dans le texte qui nous est soumis sinon sous le vocable très général de collectivité territoriale et qu'elle reste, pour l'essentiel, tenue à l'écart des procédures contractuelles à venir.

De même, il me paraît dommageable que n'apparaisse p as l'institution départementale, pourtant riche de compétences très importantes en matière d'action sociale, de transports collectifs interurbains, d'infrastructures routières, d'aménagement rural, d'aide aux communes, et forte d'un ancrage territorial proche des gens et des élus municipaux.

Nous débattrons bientôt du projet de loi relatif à l'organisation urbaine et à la simplification de la coopération intercommunale. Nous aurons l'occasion d'affirmer la nécessité, voire l'urgence, d'une audacieuse impulsion de la mise en commun des volontés, des énergies, des compétences, des projets et des moyens dans le cadre de coopérations indispensables à la mise en oeuvre de politiques de reconquête urbaine et rurale, de développement économique et de réduction des inégalités sociales.

Il ne s'agit donc pas de remettre en cause un mouvement qui vise à organiser les solidarités et à impulser les développements harmonieux sur des territoires pertinents, mais seulement de s'inquiéter d'un affaiblissement possible de la démocratie. Pourquoi se priver de l'apport irremplaçable des échelons communaux et départementaux dans les processus d'élaboration partenariales des politiques d'aménagement ? Un bon aménagement est un aménagement qui contribue à mieux répondre aux aspirations de nos concitoyens.

On ne fera pas leur bonheur à leur place, il est donc indispensable de les associer à cette construction, la commune et les départements étant porteurs du lien entre les citoyens, les régions et l'Etat.

Il convient de les encourager à le faire valoir pleinement. L'aménagement du territoire y gagnera en cohérence et en adéquation entre les besoins des Français et les réponses des différents échelons institutionnels qu'ils se sont donnés et auxquels ils sont si fortement attachés.

(Applaudissements sur les bancs du groupe communiste, du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

La parole est à M. Léonce Deprez.

M. Léonce Deprez.

Monsieur le président, madame la m inistre, mes chers collègues, je vous livrerai une réflexion toute simple et très personnelle, après avoir entendu tout ce qui a déjà été dit depuis plusieurs heures.

Je ne suis pas sûr que les Français qui ne nous écoutent pas ce soir - sans doute fort heureusement mais qui liront demain des extraits de nos débats dans la presse souhaitent que les députés qu'ils ont élus s'opposent et « se chamaillent » sur le thème de l'aménagement du territoire. Je crois même plutôt que s'il y a un sujet qui, dans leur esprit, devrait répondre à une ambition commune, quelle que soit l'origine des députés - géographique et politique -, c'est l'aménagement du territoire.

Je vous livrerai donc cette première observation, qui a déjà été faite : 68 articles de la loi Pasqua ayant été m aintenus et 20 autres étant remplacés par le projet de loi qui porte votre nom, madame la ministre, pourquoi, très franchement, ne pas commencer par souligner la complémentarité entre les deux textes ? Ce serait une très bonne entrée en matière et l'occasion d'inviter tous les députés à se regrouper et à se comprendre. On éviterait de leur donner la tentation de s'affronter, au détriment même de l'objectif qu'est le combat commun pour l'aménagement du territoire.


page précédente page 00103page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 19 JANVIER 1999

Je suppose que vous avez à l'esprit cette formule de la loi Pasqua, selon laquelle : « La politique d'aménagement et de développement du territoire concourt à l'unité, à la solidarité nationales. » Nous voulons croire que c'est aussi

votre volonté, madame la ministre. Pourquoi ne pas commencer à le dire très nettement ? Ce serait aussi l'occasion d'inviter tous les Français à se comprendre et à comprendre la nécessité d'une politique d'aménagement du territoire susceptible de les rassembler.

Deuxième observation : la suppression du schéma national prévu dans la loi du 4 février 1995, comme vous l'avez entendu dire et répéter, est contraire à la logique d'une politique nationale d'aménagement du territoire.

Certes, vous avez donné vos raisons. Mais j'ai entendu en commission - nous y avons passé une dizaine d'heures au moins, M. le président Lajoinie ayant tenu à donner la parole à tout le monde - bon nombre de députés déclarer que l'aménagement du territoire était un devoir national et qu'il fallait qu'une volonté nationale s'exprime.

Mais les choix stratégiques qui constituent le cadre des schémas des services collectifs qui se substituent à ce schéma national ne sont-il pas, en réalité, les composantes d'un schéma national d'aménagement du territoire qui devrait dire son nom ? Madame la ministre, d'ailleurs, n'avez-vous pas dit en commission : s'il vous plaît d'appeler « schéma national » les schémas des services collectifs, libre à vous ? Je vous propose donc d'exprimer notre liberté de législateur, en appelant « schéma national » l'ensemble des schémas des services collectifs.

Cela permettrait de réconcilier bon nombre de députés, qui se sont braqués contre ce rejet du schéma national.

Car ce schéma s'impose à l'esprit de tous ceux qui veulent oeuvrer, au niveau régional, pour l'aménagement du territoire. Or ce n'est possible que si on dispose, au niveau national, de lignes directrices.

Une autre idée force justifie ce schéma national : plus la compétition économique est rude, plus la volonté politique doit être forte de corriger les inégalités territoriales ; plus l'économie se mondialise, plus l'aménagement du territoire doit devenir un devoir national.

Le schéma national doit être l'expression de ce devoir national, qui est un devoir de justice sociale. Je le dis comme je le pense. Et c'est bien ce qui nous motive, au cours des combats que nous menons les uns et les autres dans nos régions respectives. Personnellement, c'est ce qui m'a motivé dans le Nord-Pas-de-Calais, qui a souffert plus que d'autres régions depuis un bon nombre d'années et même de décennies.

M. Alain Cacheux.

C'est vrai !

M. Léonce Deprez.

Troisième observation : pour que le schéma national mobilise l'énergie et entraîne l'adhésion des Français, il faudrait compléter vos schémas de services collectifs par un schéma de services de justice et de services de sécurité. Je l'ai dit en commission. A en croire les réponses de M. le rapporteur...

M. Alain Cacheux.

Un excellent rapporteur !

M. Léonce Deprez.

En effet...

... ce ne serait pas du ressort du ministère de l'aménagement du territoire ! Aujourd'hui, nous rétorquons : si ! Certes, nous ne l'aurions peut-être pas prétendu il y a quelques années. Mais comment ignorer, dans les services collectifs retenus, qui devraient être les composants d'un schéma national, l'architecture qu'impose, au niveau du territoire français, une organisation de la justice, devoir essentiel de l'Etat pour l'ensemble de ses citoyens ? Comment ignorer qu'une préoccupation majeure des Français concerne aujourd'hui leur sécurité ? Ces schémas de services collectifs apporteraient une réponse lisible, à travers le territoire, aux besoins d'une justice plus efficace et plus proche des citoyens et d'une sécurité mieux répartie. Nos concitoyens doivent sentir la justice et la sécurité proches d'eux en toute partie du territoire national. Ils pensent jour et nuit à leur sécurité.

Comment pourrions-nous ne pas y penser, au moment où nous discutons de l'aménagement du territoire ? Quatrième observation : une politique nationale d'aménagement du territoire ne peut être une addition de schémas régionaux d'aménagement et de développement du territoire.

M adame la ministre, je vous demande de bien comprendre que ce que nous avons dit ce soir est important. Si vous aviez entendu les élus régionaux du NordPas-de-Calais, vous auriez ressenti à quel point cela correspond à une idée-force. Les régions qui ont souffert et qui ont payé beaucoup à la France, qui ont accompli bien des sacrifices et consenti des décennies d'efforts, considèrent que, quels que soient les schémas régionaux, la volonté de l'Etat doit s'imprimer sur le territoire. C'est le cas d'une région comme le Nord-Pas-de-Calais.

Nous avons donc besoin de lignes directrices dépassant l'addition des seuls schémas de services. Les schémas régionaux ne peuvent se substituer à une politique d'aménagement du territoire clairement définie par l'Etat pour assurer le rééquilibre de la vie économique et sociale entre les régions de France, à partir d'infrastructures dont le financement est d'abord national.

Ma quatrième proposition est donc que la planification régionale soit en cohérence avec une planification nationale, tant à l'égard de l'organisation du territoire qu'à l'égard du plan de développement économique, qui doit encadrer et échelonner dans le temps les efforts d'investissements générateurs de croissance. En disant cela, je suis fidèle à la pensée du grand général de Gaulle qui l'a dit depuis longtemps, idée reprise par ses disciples, y compris en commission de la production et des échanges. N'est-ce pas, monsieur Ollier, qui présidez la séance ce soir ? Cinquième observation : nous saluons la volonté de prendre, en prolongement de la loi Pasqua, les pays comme entités de base de l'aménagement du territoire.

Mais nous disons aussi attention ! Il ne faut pas courir le risque de voir les agglomérations prendre la place des pays. Bien entendu, ce n'est pas votre intention, mais pour éviter ce danger, nous proposons que le seuil limite de reconnaissance d'une agglomération passe de 50 000 à 100 000 habitants. Je pense que, sur ce point, nous serons entendus par le rapporteur et peut-être par le Gouvernement. Il est très important de bien faire comprendre aux élus locaux que le pays peut représenter un espoir de revitalisation de leur territoire et de rééquilibre de la vie à travers les régions.

Nous souhaitons que les pays soient d'abord reconnus au niveau départemental, ce qui, me semble-t-il, a été retenu par le rapporteur. Le département paraît le mieux adapté pour juger de la pertinence des territoires, quitte à demander à la conférence régionale de ratifier cette reconnaissance.


page précédente page 00104page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 19 JANVIER 1999

Une autre observation a déjà été formulée : il faut assurer la cohérence avec les parcs naturels. Il faut que certaines délégations de compétence puissent être données aux parcs. Je n'insiste pas, car il me semble qu'une solution a été mise au point en commission.

Enfin, je regrette, comme cela a déjà été souligné, que la réponse à la question « Qui fait quoi » ? ne figure pas dans la loi. Nous attendons avec impatience la loi Chevènement. Le pays ne doit pas être un étage supplémentaire de collectivité territoriale. Il faut bien le définir comme un large espace de solidarité économique et sociale, dynamisé par les projets de développement dont les communautés de communes doivent être les maîtres d'ouvrage.

Il faut faire des structures intercommunales les animatrices de ces pays plutôt d'exiger la création de structures supplémentaires à l'étage supérieur. Sur ce point encore, M. le rapporteur nous a entendus. Les agglomérations doivent épauler les pays et non les étouffer. C'est un point fort que je me permets de rappeler.

M. le président.

Monsieur Deprez, je vous demanderai de conclure ! Je terminerai en soulignant que les moyens financiers n'ont pas été suffisamment précisés. Mais comme vous allez nous répondre que cela fera l'objet d'une prochaine loi, attendons demain.

En tout cas, madame la ministre, vous devez vous efforcer de nous entendre pour approuver nos amendements qui répondent à la volonté que je viens d'exprimer.

Je ne comprendrai pas que vous ne fassiez pas le même effort que celui que nous sommes prêts à accomplir dans l'intérêt de tous les Français. Nos compatriotes ne nous demandent pas autre chose que de mettre en valeur le territoire auquel ils sont attachés, quelle que soit leur région. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à M. Jean-Michel Marchand.

M. Jean-Michel Marchand.

Votre projet de loi, madame la ministre, est la première étape d'une année essentielle pour l'organisation de l'aménagement de notre territoire dans sa dimension hexagonale, nationale et européenne. C'est ainsi que 1999 verra la négociation des contrats de plan Etat-régions, la renégociation des fonds structurels, des zonages européens, de la politique agricole commune.

Votre projet de loi d'orientation précise le cadre et donne de la cohérence aux différents textes législatifs qui concourent à l'aménagement du territoire et au développement durable. C'est la loi d'orientation agricole, la loi sur l'organisation urbaine et l'intercommunalité, la loi sur les interventions économiques des collectivités territoriales, la politique de services publics.

Votre projet de loi d'orientation s'inscrit encore dans les priorités stratégiques de la politique gouvernementale que sont l'emploi et la cohésion sociale en créant les conditions et en donnant les moyens d'un développement économique durable.

Le texte dont nous allons débattre complète, d'une part, la loi du 7 janvier 1983 quant à la répartition des compétences entre les communes, les départements, les régions et l'Etat et modifie, d'autre part, la loi du 4 février 1995 relative à l'aménagement du territoire. Il reprend le concept de pays, mais rompt avec le caractère trop ruraliste de la loi Pasqua. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Alain Cacheux.

Très bien !

M. Jean-Michel Marchand.

Les huit schémas de services collectifs, en remplacement d'un schéma national qui n'a jamais vu le jour, garantissent le caractère opérationnel de la loi avec le souci de renforcer la décentralisation tout en conservant à l'Etat son rôle de cadrage et de régulation.

M. Alain Cacheux.

Très bien !

M. Jean-Michel Marchand.

L'Etat reste un garant de la réduction des inégalités territoriales et du renforcement de l'unité et de la solidarité, essentiels pour les territoires défavorisés.

L'Etat n'est plus le seul acteur de l'aménagement du territoire et les citoyens souhaitent encore plus être associés aux décisions qui les concernent ; ils souhaitent participer plus concrètement et de manière permanente à la réflexion et à la construction de leur cadre de vie et de travail. Votre texte confirme cette volonté de dialogue et de participation citoyenne en donnant aux élus et aux acteurs socio-économiques et associatifs et aux citoyens les moyens et le pouvoir d'influer sur les schémas de services collectifs, les moyens et le pouvoir pour donner de la cohérence aux schémas régionaux d'aménagement et de développement.

Les schémas de services collectifs sont élaborés en liaison étroite avec les préoccupations et les besoins des populations. Ils sont aussi les indicateurs des orientations stratégiques que vous entendez mener avec la majorité plurielle. J'en veux pour preuve le schéma multimodal des transports de marchandises et le schéma multimodal de transport de voyageurs, celui sur l'énergie et celui sur les espaces naturels et ruraux. Tous sont définis sur le long terme. Ils seront évalués et actualisés à la lumière des résultats constatés.

Vous initiez une véritable politique de projet dont le cadre national est défini par le Gouvernement en concertation avec tous les acteurs locaux.

Cette politique de projet est élaborée puis mise en oeuvre après contractualisation avec l'Etat au sein des territoires pertinents que sont les pays et les agglomérations, nouveaux lieux d'organisation du territoire.

C'est en leur sein que pourront s'exprimer complémentarité et solidarité entre territoires urbains et territoires ruraux et entre les différentes composantes des communautés d'agglomérations.

La volonté gouvernementale de faire des pays et des agglomérations des partenaires des contrats de plan au même titre que les régions est un signe fort. Elle permet de voir se concrétiser les projets élaborés et favorise un développement local durable.

Le développement durable : voilà un concept qui nous est cher à nous les Verts et la France s'est engagée à le promouvoir après les sommets internationaux de Rio, de New York et de Kyoto. Il faut évoquer aussi le traité d'Amsterdam, certes bien imparfait par ailleurs, qui place le développement durable parmi les objectifs fondamentaux de l'Union européenne.

Nous nous engageons dans un modèle de croissance qui économise les ressources naturelles, privilégie les stratégies de long terme, veille à l'équité sociale et à la soli darité, se met au service du développement local et de


page précédente page 00105page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 19 JANVIER 1999

l'emploi, en prenant en compte les qualités de l'environnement. Dans cet esprit, il est impératif que les politiques d'aménagement prennent réellement en compte la nécessité d'une gestion économe et efficace du développement. Minimiser les coûts collectifs, repenser les systèmes de transports, intégrer les enjeux de la biodiversité et des espaces naturels, préserver les ressources raréfiées, surexploitées ou menacées, économiser l'énergie et promouvoir les énergies renouvelables, tels sont les enjeux majeurs du développement durable.

Nous savons bien que l'environnement ne peut plus, ne doit plus être un critère d'ajustement du développement économique, tout comme nous savons bien que la réalisation d'infrastructures lourdes n'induit pas de développement systématique s'il n'y a pas au départ une volonté forte au service d'un projet collectif.

Le développement durable est donc bien l'affaire de tous, hommes et femmes, acteurs de leur avenir, solidaires et responsables de pratiques démocratiques s'appuyant sur une participation citoyenne au service du progrès social, du progrès économique, du progrès culturel, dans des espaces où les ressources seraient mieux utilisées, les espèces et les milieux mieux préservés. C'est aussi l'affaire de l'Etat au travers de la fiscalité et des aides publiques.

Nous savons aussi combien les services publics participent à l'aménagement du territoire. Le Gouvernement s'est engagé à permettre à chacun un égal accès à des ser vices modernes, performants, équitablement répartis sur le territoire des services, ayant recours aux nouvelles technologies de l'information et répondant aux besoins nécessaires de chaque citoyen.

Le moratoire institué en 1993 n'a pas évité les suppressions et le statu quo en matière d'implantation ne peut constituer une politique. Les adaptations indispensables devront donc prendre en compte les besoins des populations, permettre l'accessibilité de tous et conserver aux services publics toute leur qualité.

En milieu rural, éloignées des centres urbains, les maisons de services publics répondent le mieux à ces besoins.

Et je veux saluer de cette tribune le dynamisme de ces milieux ruraux avec l'exemple de la commune de Vihiers dans ma circonscription, qui a inauguré samedi dernier la première maison de service public du département du Maine-et-Loire.

M. Alain Cacheux.

Très bien !

M. Jean-Michel Marchand.

Pour conclure, il est bon de rappeler tout l'intérêt du texte proposé. Il affirme le rôle régulateur de l'Etat qui détermine les objectifs et les orientations d'aménagement et de développement durable en proposant les schémas de services collectifs.

Son intérêt, c'est aussi une volonté fermement exprimée d'une politique de projet s'appuyant sur les élus, les acteurs locaux, les citoyens, avec les pays et les communautés d'agglomérations.

Son intérêt, c'est encore de renforcer la décentralisation en reconnaissant à la région la compétence de l'aménagement et du développement durable du territoire. Il reste beaucoup à faire pour donner à la région les outils juridiques, pour coordonner les projets et leur donner de la cohérence. Il faudra encore du temps pour que nosr égions françaises, trop petites et trop nombreuses, puissent tenir toute leur place dans une politique de coopération interrégionale et dans la politique européenne d'aménagement du territoire.

Votre texte, madame la ministre, est un projet de loi d'orientation. L'important, ce sont donc les directions que vous tracez, et les moyens et les outils que vous vous donnez pour sa mise en oeuvre. (Applaudissements sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert et du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à M. Jacques Blanc.

M. Jacques Blanc.

Pour le député de la Lozère que je suis, qui a eu la chance d'assister au CIAT de juillet 1993 à Mende, de participer au débat national et de conduire ensuite, comme président de région, le débat régional sur la loi Pasqua, l'ouverture de ce débat est un moment de tristesse puisque le présent texte ne reprend pas l'ambition qui avait alors été développée, et, au-delà des mots, certes sympathiques, n'ouvre pas de perspectives.

Madame la ministre, comment d'ailleurs pourriez-vous être crédible en matière d'aménagement du territoire, a lors que le gouvernement auquel vous appartenez menace de fermer des gendarmeries et des subdivisions de l'équipement et de supprimer des postes partout ? Vous nous expliquez que la loi Pasqua reposait sur le postulat simplificateur et dépassé d'une France écartelée entre la désertification des campagnes et l'hyperconcentration des agglomérations. Or nous devons précisément porter remède à ces maux. Nous devons précisément empêcher la désertification et l'hyperconcentration tout en créant un équilibre en misant pleinement sur l'atout espace dont jouit notre pays.

Examinons rapidement ce que vous avez retiré et ajouté à la loi de 1995.

Dès l'article 1er , vous faites disparaître la grande ambition qui sous-tendait la loi Pasqua en ne précisant plus que la politique d'aménagement constitue un « objectif d'intérêt général », que « des dispositions dérogatoires modulant les charges imposées à chacun » devront être fixées et qu'il s'agit de « réduire les écarts des ressources entre les collectivités territoriales ». Cette première modification de la rédaction montre que vous renoncez aux modulations financières et aux mesures fiscales de solidarité que nous avions prévues, par exemple dans les secteurs prioritaires de développement rural. S'agissant de ces derniers, vous avez d'ailleurs abandonné l'engagement qui avait été pris de présenter un texte les concernant plus particulièrement.

Bien sûr, vous en parlez de l'espace rural, mais d'une manière méprisante. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Nous croyons, quant à nous, que l'on peut inventer un modèle de développement aussi bien dans l'espace rural que dans les grandes villes. Mais vous brisez cette ambition. Il n'y a plus de schéma national, plus d'engagement d'une politique forte vis-à-vis de l'espace rural, plus de liberté de structure des pays.

Vous avez aussi supprimé le canal Rhin-Rhône.

M. François Sauvadet.

Eh oui !

M. Jacques Blanc.

Or nous nous étions lancés dans des aménagements du canal de Sète au Rhône, espérant remonter ensuite du Rhône jusque dans les réseaux des canaux européens. Madame la ministre, il faudra assumer cette décision. Pour notre part, nous la dénonçons, tout comme la remise en cause d'un certain nombre d'équipements, tel l'aménagement de la RN 88.

Qu'apportez-vous en contrepartie ? Vous nous parlez de « développement durable ». Certes, les termes sont sympathiques et nous approuvons l'objectif mais vous n'en avez pas l'exclusivité. Nous souhaitons tous un développement qui protège le capital naturel et l'environnement pour les générations futures. Du reste, nous n'avons pas attendu votre arrivée au ministère pour lancer, par


page précédente page 00106page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 19 JANVIER 1999

exemple, des programmes concernant la vallée du Lot ou d'autres opérations visant à protéger notre environnement.

Vous inventez également les agglomérations. Mais quels seront leurs moyens ? Mme Bassot a fort justement posé la question.

Vous mettez, il est vrai, une teinte de régionalisation.

Mais cela ne va pas très loin. Je considère, quant à moi, que c'est une décentralisation qui ne va pas au bout.

D'ailleurs, vous recentralisez avec les schémas nationaux.

Qui va les décider ? En tout cas, les nouveaux schémas ne manquent pas : schémas de services collectifs de l'énergie, des espaces naturels et ruraux.

Faire allusion à l'Europe est une bonne chose même si vous n'allez pas assez loin puisque vous ne vous engagez pas à défendre à Bruxelles les objectifs 5b et 2. Veillez à ce que vous ferez à Bruxelles car la disparition de ces objectifs, c'est la condamnation de l'espace rural pour demain.

Vous nous parlez de contractualisation. Les régions sont prêtes. Encore faut-il que vous respectiez les différents contrats. Le gouvernement précédent ne l'avait pas fait et je n'avais pas manqué, à l'époque, de le faire observer à M. Gaudin. Je constate que vous n'avez pas fait mieux. Je crains même que vous n'étaliez sur une année supplémentaire la réalisation des contrats en cours. Il y a là un enjeu majeur. Engagez-vous. Le niveau régional me paraît tout à fait adéquat.

M. Jean-Claude Daniel.

Engagez-vous sur le schéma culturel !

M. Jacques Blanc.

C'est un bon niveau, car il ne supprime pas le dialogue et n'empiète pas sur le rôle des départements, des communes, des pays ou des agglomérations.

M. le président.

Monsieur Blanc, je vous prie de conclure !

M. Jacques Blanc.

Madame la ministre retrouvez le souffle de la loi Pasqua, auquel je me permets de rendre hommage, tout comme au président de séance qui en fut un merveilleux rapporteur.

(Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

M. le président.

La parole est à Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont.

M me Marie-Françoise Pérol-Dumont.

Rarement, madame la ministre, un projet de loi aura suscité autant de prises de position, souvent passionnées, avant même qu'il ne vienne en discussion à l'Assemblée. Cette appropriation est, bien sûr, la preuve de l'intérêt de nos concitoyens pour le sujet abordé et de la conscience de son importance, qui peut être vitale pour l'évolution équilibrée de notre pays dans les années à venir. Sans doute convient-il de s'en réjouir.

Il conviendra cependant aussi que le débat que nous engageons aujourd'hui remette ce projet de loi en perspective, en désamorçant les procès d'intention dont nous avons déjà eu quelques exemples aujourd'hui.

Il faudrait également qu'il permette d'infléchir ce texte en enrichissant le projet initial à la lumière des expériences de chacun, car elles sont tout aussi pertinentes, sinon plus, que les concepts doctement énoncés dans les multiples colloques et réunions consacrés à ce sujet depuis trop d'années. Tel est bien le sens du millier d'amendements qui ont été étudiés par la commission de la production au cours des semaines qui viennent de s'écouler.

Le texte que vous nous proposez, madame la ministre, s'il envisage une approche de l'aménagement du territoire plus pragmatique que la loi de 1995, ne se situe néanmoins pas en opposition systématique à celle-ci. Aussi une approche idéologique et a priori polémique serait-elle inopportune et inefficace. Comme M. Deprez, je souhaiterais donc une approche plus consensuelle de votre texte.

Il faut d'ailleurs souligner que ce projet de loi ne comporte que 36 articles, à mettre en parallèle avec les 88 articles de la loi Pasqua dont on a pu constater qu'elle a eu fort peu d'effets sur les disparités territoriales dont souffre notre pays. Il s'agit d'une vérité qu'il est difficile de cacher, même si, on le comprend, elle a le don de fâcher quelque peu nos collègues de l'opposition.

C'est pourquoi nous sommes en droit d'attendre de votre future loi qu'elle apporte une véritable plus-value opérationnelle par rapport à la loi de 1995, tout en confirmant le cadre juridique et financier de l'organisation actuelle des différents échelons de collectivités.

Cependant la plus-value du cadre législatif ne serait pas atteinte si l'on se contentait d'affirmer que le développement doit être durable - quel que soit l'intérêt de ce nouveau concept - ou que l'échelon local, absent du premier texte, doit être mieux pris en compte.

Il convient donc de bien mettre en cohérence les nouvelles dispositions législatives avec le paysage institutionnel français, que votre loi, madame la ministre, n'a pas, me semble-t-il, pour objectif de modifier.

On attend également que cette loi tranche enfin le débat sur les rôles respectifs des collectivités locales et des structures de concertation que doivent être les pays, sans les confondre, en souhaitant que ce texte confirme la nécessaire coopération entre les différents échelons territoriaux. Il serait en effet impensable que l'on adopte un texte dont le contenu légaliserait un travail séparé des différentes collectivités, où les régions dialogueraient avec pays et agglomérations, laissant de côté départements et communes qui seraient réduits à n'être que des observateurs de ce dialogue, ne participant au débat qu' a posteriori pour apporter leur obole financière ! On attend aussi que cette loi clarifie les domaines d'int ervention entre les futures agglomérations et les anciennes formes de coopération au sein des aires urbaines - mises en oeuvre depuis le début de la décent ralisation - qu'elles soient districts, communautés urbaines ou autres.

En revanche, nul ne souhaite à ce stade, me semblet-il, que votre texte vienne perturber un paysage institutionnel déjà chargé et introduise des doutes sur la pertinence du schéma institutionnel existant, fruit de notre histoire d'autant que, en définitive, il ne fonctionne pas si mal.

Si j'ai bien compris, madame la ministre, vous ne souhaitez pas mettre à mal les coopérations installées. Vous n'avez pas la volonté de casser ce qui existe, mais vous voulez proposer une vision globale d'un aménagement équilibré du territoire national structuré en agglomérations et en pays, deux outils au service du développement et non deux fins en eux-mêmes.

A ce propos, il convient de saluer la prise en compte de la notion d'agglomération qui constitue l'une des grandes nouveautés par rapport à la loi de 1995, laquelle appréhendait - cela a été dit, mais il est bon de le rappe-


page précédente page 00107page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 19 JANVIER 1999

ler - l'aménagement du territoire sous le seul angle de lar uralité. Agglomération et pays sont deux notions complémentaires qu'il ne faut surtout pas opposer comme certains ont la velléité de le faire à des fins strictement politiciennes. Elles doivent au contraire être conçues comme les deux pieds d'un aménagement équilibré du territoire.

Qu'espérez-vous, mesdames, messieurs, collègues de l'opposition, en tentant de faire s'opposer citadins et ruraux ? Pourquoi s'acharner à construire autant de murs entre les hommes plutôt que des ponts ? Votre choix, madame la ministre, notamment à travers les schémas sectoriels, de concevoir l'aménagement du territoire à partir des nécessités du terrain est significatif d'une volonté d'éviter les rigidités et de tenir compte des besoins exprimés au plus près des citoyens.

Il faudra cependant veiller à ce que cette approche horizontale, qui s'inscrit dans un nouveau souffle de la décentralisation, ne contribue pas a contrario à exacerber les déséquilibres territoriaux dans la mesure où les territoires les plus dynamiques pourraient avoir plus de facilités à concevoir des projets de développement.

A ce stade, permettez-moi d'insister sur la nécessité, à l'heure des grands échanges européens, de mettre à niveau les infrastructures d'accès aux zones du territoire qui restent encore fortement handicapées par leur enclavement, handicap accentué par la continentalisation de l'Europe qui, en repoussant notre pays vers l'ouest, pourrait si, l'on n'y prenait garde, en faire une sorte de corne isolée de l'Europe.

C'est pourquoi il faut bien rappeler le rôle régulateur de l'Etat, sa fonction d'arbitre et intégrer à ce texte l'impératif de procédures de péréquations financières - abordées dans le texte précédent, mais jamais mises en pratique - tant il est vrai qu'aménager le territoire c'est s'opposer aux phénomènes de concentrations dominants en donnant plus à ceux qui ont moins.

Les moyens financiers sont certes indispensables pour soutenir les projets de développement, pour corriger des déséquilibres qui vont croissant, mais la sous-consommation actuelle de certaines lignes budgétaires montre bien qu'il faut surtout davantage de lisibilité et de simplicité dans les procédures d'affectations financières, et que les besoins ne se situent pas exclusivement à ce niveau.

Il faut aussi rappeler le rôle significatif des services publics en termes d'aménagement territorial et leur importance essentielle dans les zones fragiles, qu'elles soient urbaines ou rurales. Sans doute, serait-il opportun de rappeler l'intérêt que pourrait revêtir une relance de la politique de délocalisations administratives bien préparées, qui auraient le double effet de désengorger l'Ile-de-France et de mieux mailler le reste du territoire, politique à laquelle le gouvernement précédent avait malheureusement mis un frein regrettable.

Pour conclure, permettez-moi, madame la ministre, de me féliciter que ce projet de loi veuille redonner la parole aux acteurs locaux tout en consolidant la décentralisation.

J'émets également le souhait que ce texte, ainsi que celui relatif à l'organisation urbaine et à la simplification de la coopération intercommunale que nous allons étudier dans les semaines à venir, permette d'enrichir la coopération entre les différents échelons territoriaux et favorise un réel partenariat entre tous les acteurs concernés au service d'un développement harmonieux du territoire national.

Il ne faut pas oublier pour autant que l'action publique n'a pas tous les pouvoirs en la matière et que les choix des grands groupes privés, entre autres, ont aussi un rôle déterminant. Ainsi quelle que soit son ambition - et elle est louable - le projet de loi que nous allons voter, ne peut être qu'un des maillons de la chaîne de la solidarité territoriale. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

2

RETRAIT D'UN PROJET DE LOI

M. le président.

J'ai reçu, le 14 janvier 1999, une lettre de M. le Premier ministre par laquelle il déclare retirer de l'Assemblée nationale pour le déposer au Sénat le projet de loi relatif aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, no 900, qui avait été d éposé sur le bureau de l'Assemblée nationale le 13 mai 1998.

3 DÉPÔT DE PROPOSITIONS DE RÉSOLUTION

M. le président.

J'ai reçu, le 28 décembre 1998, de M. Thierry Mariani, une proposition de résolution tendant à la création d'une commission d'enquête chargée d'étudier l'opportunité et l'application des conventions prévoyant l'organisation de cours d'enseignement de la langue et de la culture d'origine et les mesures susceptibles de mieux encadrer cet enseignement.

Cette proposition de résolution, no 1325, est renvoyée à la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, en application de l'article 83 du règlement.

J'ai reçu, le 12 janvier 1999, de M. Philippe Vasseur, une proposition de résolution tendant à la création d'une commission d'enquête sur les conditions du cumul des missions de conception et de maîtrise d'oeuvre par les architectes des bâtiments de France.

Cette proposition de résolution, no 1326, est renvoyée à la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, en application de l'article 83 du règlement.

4 DÉPÔT DE RAPPORTS EN APPLICATION DE LOIS

M. le président.

J'ai reçu, le 23 décembre 1998, de M. le Premier ministre, en application de l'article 62 de la loi no 95-101 du 2 février 1995 relative au renforcement de la protection de l'environnement, un rapport d'activité 1997 établissant le bilan de fonctionnement du fonds de modernisation de la gestion des déchets et évaluant les conditions d'utilisation de la taxe sur le traitement et le stockage de déchets.


page précédente page 00108page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 19 JANVIER 1999

J'ai reçu, le 24 décembre 1998, de M. le Premier ministre, en application de l'article 1er de la loi no 97-60 du 24 janvier 1997 tendant, dans l'attente du vote de la loi instituant une prestation d'autonomie pour les personnes âgées dépendantes, à mieux répondre aux besoins des personnes âgées par l'institution d'une prestation spécifique dépendance, le rapport annuel du Comité national de la coordination gérontologique.

J'ai reçu, le 15 janvier 1999, de M. le Premier ministre, en application de l'article 18 de la loi de finances pour 1998 (no 97-1269 du 30 décembre 1997), un rapport établissant, en concertation avec les élus locaux, le bilan de l'application du dispositif de défiscalisation dans les départements et territoires d'outre-mer et dans les collectivités territoriales de Mayotte et de SaintPierre et Miquelon.

J'ai reçu, le 15 janvier 1999, de M. le Premier ministre, en application de l'article 10 de la loi no 80-572 du 25 juillet 1980 sur la protection et le contrôle des matières nucléaires, un rapport sur l'application des dispositions de cette loi.

5

ORDRE DU JOUR

DES PROCHAINES SÉANCES

M. le président.

Aujourd'hui, à quinze heures, première séance publique : Questions au Gouvernement ; A seize heures quinze : Dépôt du rapport annuel de la Cour des comptes ; Suite de la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi, no 1071, d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire et portant modification de la loi no 95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire.

M. Philippe Duron, rapporteur au nom de la commission de la production et des échanges (rapport no 1288).

A vingt et une heures, deuxième séance publique : Suite de l'ordre du jour de la première séance.

La séance est levée.

(La séance est levée le mercredi 20 janvier 1999, à une heure quinze.)

L e Directeur du service du compte rendu intégral de l'Assemblée nationale,

JEAN PINCHOT

ERRATA

LOI D'ORIENTATION AGRICOLE (Première lecture) Au compte rendu intégral de la 3e séance du 5 octobre 1998 (Journal officiel , Débats de l'Assemblée nationale, no 74, du 6 octobre 1998) Page 5915, 1re colonne, amendements nos 68 et 641, avantdernière ligne : Au lieu de :

« entre les agriculteurs et les entreprises », Lire :

« entre les agriculteurs, les transformateurs et les entreprises ».

Au compte rendu intégral de la 2e séance du 7 octobre 1998 (Journal officiel , Débats de l'Assemblée nationale, no 76, du 8 octobre 1998) Page 6094, 2e colonne, amendement no 91, 3e alinéa, avantdernière ligne : Au lieu de :

« à titre personnel », Lire :

« à titre professionnel ».

Au compte rendu intégral de la 1re séance du 12 octobre 1998 (Journal officiel , Débats de l'Assemblée nationale, no 79, du 13 octobre 1998) Page 6293, 1re colonne, article 29 quater , III, 2e alinéa, 3e ligne : Au lieu de :

« par un commissariat du Gouvernement », Lire :

« par un commissaire du Gouvernement ».

Page 6396, 1re colonne, article 253-2, 5e ligne : Au lieu de :

« en vertu de l'article 529 », Lire :

« en vertu de l'article 259 ».

LOI DE FINANCES POUR 1999 (Première lecture) Au compte rendu intégral de la 3e séance du 15 octobre 1998 (Journal officiel , Débats de l'Assemblée nationale, no 82, du 16 octobre 1998) Page 6730, 1re colonne, 4e alinéa, 5e ligne : Au lieu de :

« présentant le délai », Lire :

« présentant le détail ».

Page 6730, 1re colonne, 26., II, : Supprimer le 2e alinéa (1.).

Page 6739, 1re colonne, amendement no 550, second alinéa, antépénultième ligne : Au lieu de :

« la rédaction mentionnée », Lire :

« la réfaction mentionnée ».

Page 6739, 2e colonne, amendement no 553, second alinéa, 1re ligne : Au lieu de :

« Au 2e alinéa du I », Lire :

« Au 2e alinéa du 1 ».

Au compte rendu intégral de la 3e séance du 16 octobre 1998 (Journal officiel , Débats de l'Assemblée nationale, no 83, du 17 octobre 1998) Page 6884, 1re colonne, tableau « 1o Pour les locaux à usage de bureaux », année 2000, 3e circonscription, tarif réduit : Au lieu de :

« 9 F », Lire :

« 19 F ».

Au compte rendu intégral de la 1re séance du 17 octobre 1998 (Journal officiel , Débats de l'Assemblée nationale, no 84, du 18 octobre 1998) Page 6906, 2e colonne, dernière ligne : Au lieu de :

« convocation de location-gérance », Lire :

« convention de location-gérance ».

Page 6907, 1re colonne, IX, C, 1er alinéa, avant-dernière ligne : Au lieu de :

« l'article 1467 bis », Lire :

« l'article 1467 ».

Au compte rendu intégral de la 2e séance du 17 octobre 1998 (Journal officiel , Débats de l'Assemblée nationale, no 84, du 18 octobre 1998) Page 6936, tableau « Désignation des matières ou opérations imposables », colonne « Unité de perception », ligne « oxyde d'azote et autres composés oxygénés de l'azote » : Insérer le mot : « Tonne ».


page précédente page 00109page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 19 JANVIER 1999

Page 6972, 2e colonne, 15., 2o , a , 3e alinéa, 3e ligne : Au lieu de :

« immeubles ruraux dans les territoires », Lire :

« immeubles ruraux situés dans les territoires ».

Page 6973, 1re colonne, 25., 1re ligne : Au lieu de :

« L'article 1840 F septies », Lire :

« L'article 1840 G septies ».

LOI DE FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE (Première lecture) Au compte rendu intégral de la 2e séance du 29 octobre 1998 (Journal officiel , Débats de l'Assemblée nationale, no 91, du 30 octobre 1998) Page 7632, 1re colonne, l'amendement no 42 est ainsi rédigé :

« Rédiger ainsi le 2e alinéa (1o ) du III de l'article 15 :

« 1o Il est inséré après le 12e alinéa (11o ) un alinéa ainsi rédigé : ».

Page 7632, 1re colonne, l'amendement no 43 est ainsi rédigé :

« Rédiger ainsi l'avant-dernier alinéa (2o ) du III de l'article 15 :

« 2o Il est ajouté un alinéa (5o ) ainsi rédigé : ».

Au compte rendu intégral de la 1re séance du 30 octobre 1998 (Journal officiel , Débats de l'Assemblée nationale, no 92, du 31 octobre 1998) Page 7734, 2e colonne, amendement no 435, 2e alinéa, 1re ligne : Au lieu de :

« article L.

335-1 », Lire :

« article L.

355-1 ».

Page 7766, 2e colonne, avant-dernière ligne : Au lieu de :

« faire connaître », Lire :

« faire reconnaître ».

Page 7768, 1re colonne, 5., a , 6e alinéa, 4e ligne : Au lieu de :

« pour l'information du système », Lire :

« pour l'informatisation du système ».

Page 7768, 2e colonne, 1er alinéa, avant-dernière ligne : Au lieu de :

« ce thème avec les médecins hospitaliers », Lire :

« ce thème avec les représentants des médecins libéraux mais également avec les médecins hospitaliers ».

Page 7768, 2e colonne, 2e alinéa, 4e ligne : Au lieu de :

« entend des soutenir », Lire :

« entend soutenir ».

Page 7768, 2e colonne, b , 2e alinéa, dernière ligne : Au lieu de :

« 1 million de fournées », Lire :

« 1 million de journées ».

Page 7770, 2e colonne, D. - 2e alinéa, avant-dernière ligne : Au lieu de :

« les dispositifs de professionnelle », Lire :

« les dispositifs de formation professionnelle ».

Page 7771, 1re colonne, 3e alinéa, avant-dernière ligne : Au lieu de :

« revenu de la majorité », Lire :

« revenu de la grande majorité ».

Page 7771, 1re colonne, 5e alinéa, avant-dernière ligne : Au lieu de :

« se prolonger par réforme », Lire :

« se prolonger par une réforme ».

Page 7789, 2e colonne, amendement no 117, dernière ligne : Au lieu de :

« 1er septembre 1999 », Lire :

« 1er semestre 1999 ».

LOI DE FINANCES POUR 1999 (Première lecture) Au compte rendu intégral de la 3e séance du 16 novembre 1998 (Journal officiel , Débats de l'Assemblée nationale, no 104, du 17 novembre 1998) Page 9040, 1re colonne, II, 1o , 2e alinéa, 2e ligne : Au lieu de :

« article 22 quater B », Lire :

« article 244 quater B ».

Page 9056, 2e colonne, article 69, dernier alinéa (IV), 1re ligne : Au lieu de :

« article 9 quinquies FA », Lire :

« article 39 quinquies FA ».

LOI DE FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR 1999 (Nouvelle lecture) Au compte rendu intégral de la 1re séance du 26 novembre 1998 (Journal officiel , Débats de l'Assemblée nationale, no 111, du 27 novembre 1998) Page 9615, 2e colonne, 5e alinéa, 7e ligne : Au lieu de :

« en est ainsi », Lire :

« en est saisi ».

Page 9617, 1re colonne, 1re ligne : Au lieu de :

« (direction 93/104/CE) », Lire :

« (directive 93/104/CE) ».

Page 9637, 2e colonne, amendement no 4, 3e alinéa, avantdernière ligne : Au lieu de :

« charge des sociétés visées », Lire :

« charge des sociétés visé ».

LOI DE FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR 1999 (Lecture définitive) Au compte rendu intégral de la 2e séance du 3 décembre 1998 (Journal officiel , Débats de l'Assemblée nationale, no 114, du 4 décembre 1998) Page 10066, 2e colonne, article 2, IV, 4o , 2e ligne : Au lieu de :

« articles L. 135-1 », Lire :

« articles L. 135-1-1 ».

Page 10073, 2e colonne, article 25, II, 1o , dernière ligne : Au lieu de :

« articles L. 138-1 et L. 138-9 », Lire :

« articles L. 138-1 à L. 138-9 ».

Page 10074, 1re colonne, tableau de calcul du montant de la contribution : Au lieu du signe :

« », Lire le signe :

« + ».

COLLECTIF 1998 (Première lecture) Au compte rendu intégral de la 2e séance du 3 décembre 1998 (Journal officiel , Débats de l'Assemblée nationale, no 114, du 4 décembre 1998) Page 10105, 2e colonne, 2e alinéa, 3e ligne : Au lieu de :

« 238 ter , 239 quater », Lire :

« 238 ter , 239 ter , 239 quater ».

Page 10109, 2e colonne, amendement no 76, 2e rectification : Au lieu de :

« qui acquiert un logement neuf ou en l'état futur d'achèvement, entre le 1er janvier 1999 et le 31 décembre 2002 », Lire :

« qui, entre le 1er janvier 1999 et le 31 décembre 2002, acquiert un logement neuf ou en l'état futur d'achèvement ».

Page 10117, 1re colonne, article 14, 1er alinéa, 3e ligne : Au lieu de :

« et de taxes sur », Lire :

« et de taxes perçues sur ».

Page 10130, 2e colonne, 1er alinéa, avant-dernière ligne : Au lieu de :

« le montant devra être arrêté », Lire :

« le montant de cette taxe devra être arrêté ».

Page 10133, 2e colonne, dernier alinéa, avant-dernière ligne : Au lieu de :

« entre la Banque et la Banque mondiale », Lire :

« entre la France et la Banque mondiale ».

Page 10134, 2e colonne, article 19, 1re ligne : Au lieu de :

« Il est intitulé au titre de », Lire :

« Il est institué au titre de ».


page précédente page 00110page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 19 JANVIER 1999

SÉCURITÉ ROUTIÈRE (Première lecture) Au compte rendu intégral de la 3e séance du 10 décembre 1998 (Journal officiel, Débats de l'Assemblée nationale, no 117, du 11 décembre 1998) Page 10415, 2e colonne, 2e alinéa, 2e ligne : Au lieu de :

« à des frais mentionnés », Lire :

« à des faits mentionnés ».

Page 10415, 2e colonne, article L.

29-10, II. - 4o , 1re ligne : Au lieu de :

« qui a servi où qui était », Lire :

« qui a servi ou était ».

Page 10424, 1re colonne, amendement no 13, dernière ligne : Au lieu de :

« l'auteur véritable l'infraction », Lire :

« l'auteur véritable de l'infraction ».

LOI DE FINANCES POUR 1999 (Nouvelle lecture) Au compte rendu intégral de la 2e séance du 16 décembre 1998 (Journal officiel, Débats de l'Assemblée nationale, no 119, du 17 décembre 1998) Page 10630, 1re colonne, article 14, 2e alinéa, 6e ligne : Au lieu de :

« le législataire », Lire :

« le légataire ».

Page 10686, 1re colonne, amendement no 8 rectifié, 3e alinéa, 1re ligne : Au lieu de :

« I. - Art. 302 bis K.-I. - A compter », Lire :

« Art. 302 bis K.-I. - A compter ».

Page 10686, 2e colonne, 2., dernière ligne : Au lieu de :

« et exprimés comme suit », Lire :

« et exprimées comme suit ».

Page 10712, remplacer la ligne de points par :

« II. - Budgets annexes

« Non modifiés à l'exception de :

«

................................................................... »

« 7009 Part de la taxe de l'aviation civile affectée au budget annexe de l'aviation civile (intitulé nouveau) ...............................................

1 279 546 356

«

................................................................... ».

Page 10752, 2e colonne, amendement no 151, 4e alinéa, avantdernière ligne : Au lieu de :

« au I de l'article », Lire :

« au 1 de l'article ».

Page 10753, 1re colonne, 2e alinéa, dernière ligne : Au lieu de :

« mentionné au 3 du 1 de l'article 39 », Lire :

« mentionné au 3o du 1 de l'article 39 ».

Page 10755, 2e colonne, 3e alinéa : Au lieu de :

« Art. 1753 bis b », Lire :

« Art. 1753 bis B ».

LOI DE FINANCES POUR 1999 (Lecture définitive) Au compte rendu intégral de la séance du 18 décembre 1998 (Journal officiel, Débats de l'Assemblée nationale, no 121, du 19 décembre 1998) Page 10810, 2e colonne, après le 4e alinéa, supprimer la ligne de points.

Page 10810, 2e colonne, après le titre « II. Ressources affectées », insérer une ligne de points.

Page 10816, dernière ligne : Au lieu de :

« II. Budgets annexes. - Non modifiés », Lire :

« II. Budgets annexes

« Non modifiés à l'exception de :

«

......................................................................

« 7009 Part de la taxe de l'aviation civile affectée au budget annexe de l'aviation civile (intitulé nouveau) ...............................................

1 279 546 356

«

................................................................... ».

Page 10824, 2e colonne, après le 4e alinéa, insérer une ligne de points.

Page 10825, 1re colonne, après l'article 64 AC, insérer une ligne de points.

COLLECTIF 1998 (Nouvelle lecture) Au compte rendu intégral de la 1re séance du 22 décembre 1998 (Journal officiel, Débats de l'Assemblée nationale, no 123, du 23 décembre 1998) Page 10976, 2e colonne, dernier alinéa, 1re ligne : Au lieu de :

« du 2e alinéa », Lire :

« du 3e alinéa ».

Page 10995, 2e colonne, 1er alinéa, 4e ligne : Au lieu de :

« sont exonérés des droits de timbre », Lire :

« sont exonérées des droits de timbre ».

CONSEILS RÉGIONAUX (Lecture définitive) Au compte rendu intégral de la 2e séance du 22 décembre 1998 (Journal officiel, Débats de l'Assemblée nationale, no 123, du 23 décembre 1998) Page 11030, 1re colonne, 2e alinéa, 1re ligne : Au lieu de :

« qui n'ont pas obtenu au moins de 3 % », Lire :

« qui n'ont pas obtenu au moins 3 % ».

ANIMAUX DANGEREUX ET ERRANTS (Lecture définitive) Au compte rendu intégral de la 2e séance du 22 décembre 1998 (Journal officiel, Débats de l'Assemblée nationale, no 123, du 23 décembre 1998) Page 11045, 1re colonne, article 211-5, 1re ligne : Au lieu de :

« Art. 211-5. - L'accès des chiens », Lire :

« Art. 211-5. - I. L'accès des chiens ».

COLLECTIF 1998 (Lecture définitive) Au compte rendu intégral de la 3e séance du 22 décembre 1998 (Journal officiel, Débats de l'Assemblée nationale, no 123, du 23 décembre 1998) Page 11056, 2e colonne, G, 2e alinéa, avant-dernière ligne : Au lieu de :

« 324 sexies du même code », Lire :

« 234 sexies du même code ».

Page 11057, 2e colonne, article 199 decies F, dernière ligne : Au lieu de :

« d'un permis de conduire », Lire :

« d'un permis de construire ».


page précédente page 00111

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 19 JANVIER 1999

TRANSMISSION DE PROPOSITIONS D'ACTES COMMUNAUTAIRES

M. le Premier ministre a transmis, en application de l'article 88-4 de la Constitution, à M. le président de l'Assemblée nationale, les propositions d'actes communautaires suivantes : Communication du 23 décembre 1998 No E 1195. Proposition de décision du Conseil sur les arrangements monétaires relatifs aux collectivités territoriales françaises de Saint-Pierre-et-Miquelon et Mayotte.

No E 1196. Proposition de décision du Conseil relative à la conclusion par la Communauté européenne de l'accord intérimaire sur le commerce et les mesures d'accompagnement entre la Commission européenne, la Communauté européenne du charbon et de l'acier et la Communauté européenne de l'énergie atomique, d'une part, et le Turkménistan, d'autre part. Projet de décision de la Commission relative à la conclusion au nom de la Communauté européenne du charbon et de l'acier et de la Communauté européenne de l'énergie atomique, d'une part, et le Turkménistan, d'autre part (COM [98] 617 final).

No E 1197. Proposition de décision du Conseil relative à l'acceptation, par la Communauté européenne, de l'amendement au texte de l'accord de la Commission générale des pêches pour la Méditerranée portant établissement d'un budget autonome pour ladite organisation (COM (98) 690 final).

No E 1198. Proposition de règlement (CE, Euratom) du Conseil instituant un Office européen d'enquêtes antifraude (COM (98) 717 final).

Communication du 5 janvier 1999 No E 1199. Proposition de décision du Conseil autorisant la République française à appliquer ou à continuer à appliquer des réductions ou des exonérations concernant les droits d'accises sur les huiles minérales utilisées à des fins spécifiques, conformément à la procédure prévue à l'article 8, paragraphe 4, de la directive 92/81/CEE (COM [98] 748 final).

Communication du 8 janvier 1999 No E 1200. Proposition de règlement (CE) du Conseil concernant l'instrument financier pour l'environnement (Life) (COM [98] 720 final).

Communication du 12 janvier 1999 No E 1201. Décision du Conseil autorisant certains Etats membres, conformément à la directive 92/81/CEE, à appliquer ou à continuer à appliquer à certaines huiles minérales des réductions de taux d'accise ou des exonérations d'accises, et portant modification de la décision 97/425/CE (COM [98] 793 final).

CONVOCATION DE LA

CONFÉRENCE DES PRÉSIDENTS La conférence, constituée conformément à l'article 48 du règlement, est convoquée pour le : mardi 19 janvier 1999 à dix heures au 4e bureau.