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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 3 MARS 1999

SOMMAIRE

PRÉSIDENCE DE M. RAYMOND FORNI

1. Questions au Gouvernement (p. 1963).

FRAUDE ÉLECTORALE À AUBAGNE (p. 1963)

M. Guy Teissier, Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice.

COUVERTURE MALADIE UNIVERSELLE (p. 1964)

M. Jean-Claude Boulard, Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité.

INTERDICTION DES MINES ANTIPERSONNEL (p. 1965)

MM. Robert Gaïa, Lionel Jospin, Premier ministre.

SERVICE PUBLIC POSTAL (p. 1966)

MM. François Brottes, Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'industrie.

EXCEPTION CULTURELLE (p. 1967)

M. Didier Mathus, Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication.

SECOURS EN MONTAGNE (p. 1968)

MM. Roger Meï, Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur.

TVA SUR LA RESTAURATION (p. 1968)

MM. Michel Bouvard, Christian Sautter, secrétaire d'Etat au budget.

ALCOOL ET DROGUE (p. 1969)

MM. Yves Fromion, Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

NOUVEAU CONCOURS D'ENTRÉE À L'ÉCOLE NORMALE SUPÉRIEURE (p. 1970)

MM. Jean-Michel Dubernard, Claude Allègre, ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

RESPONSABILITÉ JURIDIQUE DES SITES INTERNET (p. 1971)

MM. Yves Cochet, Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

SITUATION AU CONGO-BRAZZAVILLE (p. 1971)

MM. Gérard Charasse, Charles Josselin, ministre délégué à la coopération et à la francophonie.

MAÎTRISE DES DÉPENSES DE SANTÉ (p. 1972)

M. Jean-Antoine Leonetti, Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité.

2. Ratification du traité d'Amsterdam. - Explications de vote et vote sur l'ensemble d'un projet de loi (p. 1973).

M. Pierre Moscovici, ministre délégué chargé des affaires européennes.

M. Michel Vauzelle, rapporteur de la commission des affaires étrangères.

EXPLICATIONS DE VOTE (p. 1974)

M. Pierre Lequiller.

PRÉSIDENCE DE M. ARTHUR PAECHT

MM. Henri Nallet, René André, Alain Bocquet, Maurice Ligot, Mme Marie-Hélène Aubert.

VOTE SUR L'ENSEMBLE (p. 1979)

Adoption, par scrutin, de l'ensemble du projet de loi.

Suspension et reprise de la séance (p. 1979)

3. Lutte contre le dopage. - Transmission et discussion du texte de la commission mixte paritaire (p. 1979).

M. Alain Néri, rapporteur de la commission mixte paritaire.

Mme Marie-George Buffet, ministre de la jeunesse et des sports.

DISCUSSION GÉNÉRALE (p. 1982)

MM. André Aschieri, Christian Estrosi, Patrick Leroy, Edouard Landrain, Jean-Claude Beauchaud, Denis Jacquat, Alain Calmat.

M. Jean Le Garrec, vice-président de la commission mixte paritaire.

Mme la ministre.

Clôture de la discussion générale.

TEXTE DE LA COMMISSION MIXTE PARITAIRE (p. 1990)

Adoption de l'ensemble du projet de loi compte tenu du texte de la commission mixte paritaire.

Suspension et reprise de la séance (p. 1993)

4. Cumul des mandats. - Discussion, en deuxième lecture, d'un projet de loi organique et d'un projet de loi (p. 1993).

M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur.

M. Bernard Roman, rapporteur de la commission des lois.

DISCUSSION GÉNÉRALE COMMUNE (p. 1993)

M. Georges Tron.

Renvoi de la suite de la discussion à la prochaine séance.

5. Ordre du jour de la prochaine séance (p. 1999).


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 3 MARS 1999

COMPTE RENDU INTÉGRAL

PRÉSIDENCE DE M. RAYMOND FORNI,

vice-président

M. le président.

La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

1

QUESTIONS AU GOUVERNEMENT

M. le président.

L'ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.

Nous commençons par les questions du groupe Démocratie libérale et Indépendants.

FRAUDE ÉLECTORALE À AUBAGNE

M. le président.

La parole est à M. Guy Teissier.

M. Guy Teissier.

Madame la garde des sceaux, les habitants d'Aubagne, et plus particulièrement ceux de la 9e circonscription des Bouches-du-Rhône, découvrent avec stupéfaction que leur député a triché pour se faire élire.

(« Tiberi ! » sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

M. le président.

Mes chers collègues, un peu de silence, s'il vous plaît ! Poursuivez, monsieur Teissier !

M. Guy Teissier.

Merci, monsieur le président ! Ils constatent avec amertume et perplexité que, dans un Etat de droit comme le nôtre, la fraude massive existe encore (« Tiberi, à Paris ! » sur les bancs du groupe socialiste) au risque de remettre en cause les fondements mêmes de notre démocratie.

Que s'est-il passé en octobre dernier ? Voyant le candidat de Démocratie libérale gagner cette circonscription, détenue par la gauche communiste depuis de nombreuses années, des fonctionnaires, peu scrupuleux sans doute, n'ont pas hésité à franchir le seuil de l'inacceptable en manipulant les résultats de cette élection.

(Vives protestations sur les bancs du groupe communiste.)

M. Maxime Gremetz.

Quel mépris pour les fonctionnaires !

M. Guy Teissier.

Cette magouille organisée (Nouvelles protestations) a été sanctionnée avec fermeté par le Conseil constitutionnel.

M. Maxime Gremetz et plusieurs députés du groupe socialiste.

Et Tiberi, à Paris ?

M. Guy Teissier.

Ce que je dis a l'air de vous contrarier, mesdames, messieurs de la gauche ! Plusieurs députés du groupe socialiste et plusieurs députés du groupe communiste.

Tiberi !

M. Guy Teissier.

Manifestement, cela vous gêne ! (Vives exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

M. le président.

Mes chers collègues, je sais bien que la question n'est pas de nature à apaiser les esprits, mais ce n'est pas une raison pour faire un tel vacarme qui empêche de l'entendre ! (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Maxime Gremetz.

Qu'il ne fasse pas de provocation !

M. Guy Teissier.

Il s'agit effectivement, monsieur le président, d'une question d'actualité.

L'instruction judiciaire récente a entraîné la mise en examen de six personnes et, compte tenu de la gravité de cette affaire, l'incarcération de trois autres.

Cette manipulation de la part d'élus de la République est d'autant plus inacceptable qu'elle semble être assez courante au parti communiste.

(Très vives protestations sur les bancs du groupe communiste.)

M. Maxime Gremetz.

C'est scandaleux ! Et Tiberi ?

M. Guy Teissier.

Souvenez-vous, mes chers collègues, des élections municipales de Sarcelles (Vives protestations sur les bancs du groupe communiste et du groupe socialiste), d'Antony, d'Aulnay-sous-Bois, de Villeneuve-SaintGeorges, toutes gagnées par la gauche et toutes annulées pour irrégularités et fraudes caractérisées ! (Vives protestations sur les bancs du groupe communiste et du groupe socialiste.) Ces procédés, madame la garde des sceaux, sont inacceptables ! Plusieurs députés du groupe communiste.

Tiberi !

M. Guy Teissier.

Ils sont l'expression même du mépris porté aux électeurs et à la démocratie.

De nombreux députés du groupe socialiste et du groupe communiste.

Tiberi !

M. Guy Teissier.

Et que dire des manifestations soviétiformes (« Oh ! » sur les bancs du groupe communiste et du groupe socialiste)...

M. François Goulard.

Très bien !

M. Guy Teissier.

... qu'organise maintenant le parti communiste sous les fenêtres du palais de justice du juge en charge de cette affaire ? (Exclamations sur les bancs du groupe communiste.)

Hier encore, une fausse alerte au feu à la mairie d'Aubagne a été donnée par le premier adjoint au maire (Exclamations sur les bancs du groupe communiste et du groupe socialiste) afin de déclencher, je le cite, un plan ORSEC visant à avertir la population que le maire allait être interpellé par la police et à inciter le public ainsi présent et rassemblé devant la mairie à signer des pétitions qui, madame la garde des sceaux, vous seront adressées. (Exclamations sur les bancs du groupe communiste et du groupe socialiste.)


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 3 MARS 1999

M. le président.

Monsieur Teissier, venez-en à votre question, je vous prie.

M. Guy Teissier.

J'y arrive.

M. le président.

Vous allez épuiser le temps de votre groupe et vous n'aurez pas de réponse du Gouvernement.

M. Guy Teissier.

J'y arrive, monsieur le président, mais j'ai été interrompu longuement ! (Protestations sur les bancs du groupe communiste et du groupe socialiste.)

Tous ces procédés sont scandaleux. Les lois de la République, madame la garde des sceaux, ne s'appliqueraient-elles donc plus à Aubagne et à ses alentours ? (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

Que vous inspirent les pressions exercées sur la justice par ce parti de votre majorité ?

M me Odette Grzegrzulka.

Et celles exercées par Tiberi ?

M. Guy Teissier.

Avez-vous la même appréciation sur l'indépendance de la justice que vos alliés communistes ? Et, surtout, ne trouvez-vous pas choquant le fait qu'un candidat qui dépasse le montant légal de ses comptes de campagne soit déclaré inéligible pendant un an, alors qu'une personne invalidée pour fraude électorale peut se représenter immédiatement devant les électeurs ? (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

M. le président.

Il faut maintenant conclure, monsieur Teissier.

M. Guy Teissier.

Madame la garde des sceaux, seriezvous prête à soutenir une proposition de loi du groupe Démocratie libérale et Indépendants...

M. le président.

Monsieur Teissier, je vous prie de conclure ou je vous retire la parole !

M. Guy Teissier.

... visant à interdire à un candidat fraudeur de se représenter devant les électeurs ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et I ndépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

M. le président.

Mes chers collègues, je vous rappelle que les questions sont généralement posées pour obtenir des réponses. (Exclamations sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.) Un député du groupe du Rassemblement pour la République.

On ne les obtient jamais, les réponses !

M. le président.

Or il reste très exactement quatorze secondes au groupe Démocratie libérale et Indépendants.

La parole est à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice.

Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice.

Monsieur le député, je répondrai brièvement à votre longue question.

M. Francis Delattre.

A sa bonne question !

Mme la garde des sceaux.

J'ai rappelé, il y a quinze jours, devant l'Assemblée nationale les conditions dans lesquelles le Conseil constitutionnel avait annulé l'élection d'Aubagne et j'ai indiqué pourquoi le Conseil constitutionnel s'était contenté d'annuler - il appliquait la loi tout simplement -...

M. Yves Nicolin.

Il faut la changer !

Mme la garde des sceaux.

... et n'était pas allé plus loin.

Par ailleurs, plusieurs plaintes ont été déposées pour fraude électorale. Deux plaintes ont été déposées au mois d'octobre par Mme Alberny et M. Deflesselles. M. Tardito a déposé une plainte pour diffamation contre M. Deflesselles. (Exclamations sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.) Une plainte a également été déposée par M. Belviso, en janvier dernier, pour fraude électorale.

(Protestations sur les bancs du groupe Démocratie libérale et I ndépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

Ce que je peux dire devant l'Assemblée nationale, c'est que l'ensemble de ces plaintes sont examinées par la justice. L'information se poursuit. Neuf personnes ont été mises en examen. Cinq d'entre elles sont placées sous contrôle judiciaire et trois ont été placées en détention provisoire.

Face à ce type de contentieux, il serait de bon ton que l'Assemblée nationale garde toute la réserve qu'il sied concernant des procédures judiciaires. (Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants. - Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

Enfin, monsieur le député, il me semble que vous devriez garder votre sang-froid, car vous n'êtes certainement pas en position de donner des leçons à qui que ce soit. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. - Vives protestations et claquements de pupitre sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Jean-Michel Ferrand.

Vous êtes la ministre de l'injustice ! Plusieurs députés du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.

C'est scandaleux ! Fraudeurs !

M. le président.

Nous passons aux questions du groupe socialiste.

COUVERTURE MALADIE UNIVERSELLE

M. le président.

La parole est à M. Jean-Claude Boulard.

M. Jean-Claude Boulard.

Ma question s'adresse à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Ce matin, le conseil des ministres a adopté un projet de loi portant création de la couverture maladie universelle. Il serait souhaitable, madame la ministre, que vous puissiez présenter à la représentation nationale les principes fondamentaux de ce texte qui va permettre aux plus modestes d'entre nous de bénéficier d'un droit fondamental et très simple : celui de l'accès à la santé. Il serait bon également que vous puissiez, à cette occasion, nous donner votre opinion sur les critiques que nous avons entendues, et qui pour ma part m'ont choqué, selon


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lesquelles cette loi plongerait des millions de personnes dans l'assistance. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité.

Monsieur le député, vous l'avez bien dit (Rires sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants)...

M. Jean-Michel Ferrand.

Rassurez-le !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

...la couverture maladie universelle est sans doute l'une des avancées les plus importantes depuis la Seconde Guerre mondiale. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants. - Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Jean-Michel Ferrand.

Ce n'est pas sérieux !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

C'est en tout cas ce qu'a déclaré ce matin le président d'ATDQuart monde. Il s'est félicité que nous mettions fin à un demi-siècle de résignation dans notre pays, résignation qui faisait que, faute d'argent, on pouvait mourir ou être gravement malade.

M. Laurent Dominati.

C'est faux !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Monsieur le député, je vous remercie du travail que vous avez réalisé en amont. (« Ah ! » sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Vous avez étudié le projet, négocié avec les différents partenaires et, par là-même, permis à ce projet de voir le jour.

Le projet est simple.

Il permet d'abord à tout Français résident régulier, sur présentation d'une simple carte d'identité, de bénéficier du régime général de sécurité sociale. Il s'adresse très clairement à des jeunes en rupture de famille, à des femmes abandonnées par leur mari, qui n'arrivent pas à faire la preuve qu'elles sont à la sécurité sociale... (Rires et exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Cela vous fait rire, mais il y a beaucoup de gens qui sont dans le malheur à cause de cela ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

Mais le texte va au-delà de ce premier volet, que la droite avait envisagé seul. Nous proposons une couverture complémentaire à six millions de Français, aux revenus les plus modestes, qui auront la possibilité d'être soignés gratuitement, sans avance de frais, et par tiers payant.

M. Jean-Michel Ferrand.

Démagos !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Par ce texte, mesdames et messieurs les députés, nous touchons non seulement les plus exclus - chômeurs, bénéficiaires de minima sociaux -, mais aussi des salariés, des commerçants, des artisans, des retraités dont les revenus sont aujourd'hui parmi les plus modestes.

M. Alain Cacheux.

C'est vrai !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Nous avons voulu que les procédures soient simples, qu'il y ait peu de paperasserie et que les droits soient ouverts le plus vite possible. Toute personne faisant la preuve que ses revenus sont inférieurs aux plafonds qui ont été proposés a u Parlement - 3 500 francs pour un célibataire, 7 700 francs pour une famille avec deux enfants - pourra bénéficier de la couverture maladie gratuite après avoir choisi une mutuelle, une assurance, une institution de prévoyance ou la caisse primaire d'assurance maladie. Elle pourra se faire aider par une association - il nous faut, une fois de plus, remercier les associations d'avoir porté ce projet et de nous avoir accompagné tout au long des on élaboration -, un centre communal d'action sociale (CCAS), un comité local d'insertion (CLI), pour l'aider à remplir son dossier qui, je le répète, est très simple.

Monsieur le député, vous avez été choqué, tout comme moi, que certains nous reprochent de mettre en place de l'assistance. Pourtant, les départements les plus riches - je pense, par exemple, à ceux dirigés par MM. Méhaignerie, Pasqua ou Tiberi (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe du Rassemblement pour la République) - ont déjà mis en place cette aide médicale gratuite. Ce faisant, peut-être ne songent-ils pas, eux, à faire de l'assistance, mais tout simplement à permettre à ceux qui le méritent d'avoir accès aux soins.

Vous nous dites, mesdames et messieurs de l'opposition, que la mise en place de la couverture maladie universelle est de l'assistance. Nous considérons, quant à nous, que ne pas soutenir cette mise en place s'apparenterait à de la non-assistance à personnes en danger.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

INTERDICTION DES MINES ANTIPERSONNEL

M. le président.

La parole est à M. Robert Gaïa.

M. Robert Gaïa.

Monsieur le Premier ministre, le 1er mars 1999, cérémonies et déclarations officielles ont salué l'entrée en vigueur de la convention d'Ottawa pour l'interdiction des mines antipersonnel. A ce concert de félicitations se joint l'ensemble des parlementaires du groupe socialiste, tous signataires d'une proposition de loi adoptée à l'unanimité par le Parlement et transposant dans notre droit interne, sans attendre cette entrée en vigueur, les dispositions prises en décembre 1997, à Ottawa.

C'est tout à l'honneur de la France de s'être distinguée en devenant le premier pays du Conseil de sécurité à procéder à cette ratification.

En se dotant d'une commission nationale pour l'élimination des mines antipersonnel, notre pays expérimente aujourd'hui un nouvel espace de dialogue concrétisant la rencontre de trois volontés politiques fortes - celle des opinions publiques, celle du Gouvernement et celle des p arlementaires - contribuant ainsi à développer le concept de désarmement d'initiative citoyenne.

La France se doit de poursuivre son action et de tenir ses engagements. Nous nous félicitons, d'ores et déjà, de l'action menée par nos armées en matière de déminage et de destruction des stocks.

Afin de veiller au respect des dispositions adoptées par notre Parlement et de maintenir l'influence de la France dans ce légitime combat, la représentation nationale souhaiterait, monsieur le Premier ministre, être informée du


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 3 MARS 1999

délai de parution des décrets permettant l'installation de la commission nationale pour l'élimination des mines antipersonnel et des moyens que le Gouvernement entend mettre en oeuvre. Dans une approche plus générale, elle souhaiterait connaître l'état de votre réflexion sur ce nouveau concept qui conjugue lutte contre la prolifération, désarmement, action humanitaire, maintien de la paix et développement.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à M. le Premier ministre.

M. Lionel Jospin, Premier ministre.

Monsieur le député, nous avons tous considéré le 1er mars 1999 comme une grande date, comme une date historique. Elle marque l'entrée en vigueur de la convention d'Ottawa pour l'interdiction de l'emploi, de la production et du transfert des mines antipersonnel.

M. François Rochebloine.

Très bien !

M. le Premier ministre.

Cette arme que l'on a appelé l'arme des lâches non seulement tue pendant que la guerre elle-même tue, mais continue à tuer lorsque la paix est revenue, lorsque l'on a oublié les combats et que les soldats ou les partisans se sont retirés. Des hommes, des femmes et des enfants innocents, en travaillant ou en jouant, sont tués, mutilés, marqués, psychologiquement, dans leur chair et dans leur vie par cette arme des lâches qui continue à tuer. Oui, il était nécessaire que cette arme particulièrement barbare soit mise au ban des nations ! Je rends hommage aux organisations intergouvernementales, internationales, comme aux organisations françaises, nombreuses, qui ont mené la lutte pour cette interdiction...

M. Richard Cazenave.

N'oubliez pas l'action du Président de la République en 1995 !

M. le Premier ministre.

... et dont l'action a été reconnue par l'attribution du prix Nobel.

Dès la mise en place de mon gouvernement, je me suis engagé, en juin 1997,...

M. Richard Cazenave.

Après M. Chirac en 1995 !

M. le Premier ministre.

... à faire en sorte que notre pays signe la convention d'interdiction totale des mines antipersonnel qui était, à cette époque, en négociation.

En décembre 1997, le ministre de la coopération a signé la convention à Ottawa. Le Gouvernement l'a soumise au Parlement au cours de l'été 1998 et, grâce à votre mobilisation, mesdames et messieurs les députés, ainsi qu'à celle des sénateurs, la convention a été ratifiée dès le 8 juillet 1998. Depuis, nous ne cessons d'intervenir auprès d'autres Etats, et notamment auprès des très importants, pour qu'ils signent à leur tour cette convention.

En application de l'article 9 de la loi du 8 juillet 1998, un projet de décret a été élaboré pour instituer une commission nationale pour l'élimination des mines antipersonnel. Ce décret sera prêt très bientôt. La composition de la commission présentera, par rapport au choix fait par d'autres pays, l'originalité de faire une large place aux parlementaires et aux représentants d'organisations non gouvernementales.

M. Jean-Claude Lefort.

Très bien !

M. le Premier ministre.

Pour marquer l'importance que le Gouvernement attache au travail de cette commission, j'ai l'intention de procéder personnellement à sa mise en place.

La France, elle-même, n'a pas eu recours à des mines antipersonnel en opération depuis dix ans. Elle n'en produit plus ni n'en exporte plus depuis longtemps. Elle a procédé, à ce jour, à la destruction des deux tiers de son stock.

M. François Rochebloine.

Oui, 70 % des mines ont déjà été détruites.

M. le Premier ministre.

L'objectif du Gouvernement le ministre de la défense a donné une instruction très précise aux armées en ce sens - est d'opérer la destruction totale du stock d'ici à la fin de l'année 1999 (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste, du groupe Radical, Citoyen et Vert et sur quelques bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants) même si nous gardons quelques milliers de mines afin de continuer à former nos personnels aux actions de déminage qui doivent se poursuivre à travers le monde.

Le Gouvernement, en plein accord avec le Président de la République, reste engagé dans la poursuite du déminage. Je tiens du reste à rendre hommage devant vous aux personnels civils et militaires qui mettent en oeuvre cette politique, avec un courage personnel et des compétences techniques reconnus à travers le monde. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert et sur quelques bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Durant la période 1995-1998, la France a consenti un effort financier de 214 millions de francs sous forme de mesures d'assistance bilatérale au déminage et de contribution à des fonds multilatéraux d'investissement, auxquels il convient d'ajouter 60 millions de francs au titre de la recherche sur les matériels de déminage. Croyez bien, monsieur le député, que les autorités françaises, et en premier lieu le Gouvernement, puisque c'est de sa responsabilité, poursuivront l'effort financier nécessaire à cette mission à nos yeux prioritaire. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert et sur quelques bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

SERVICE PUBLIC POSTAL

M. le président.

La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes.

Monsieur le secrétaire d'Etat à l'industrie, les directives européennes se suivent mais ne se ressemblent pas toujours. Ainsi, nous sommes en train de transposer dans notre droit la directive applicable au secteur postal.

M. Yves Nicolin.

Tout à fait !

M. François Brottes.

Celle-ci vise à garantir la bonne qualité du service public au titre du service universel en laissant par ailleurs à La Poste un secteur réservé le plus large possible. Malheureusement, à peine cette directive entre-t-elle dans les faits que déjà le commissaire européen chargé de ces questions s'apprêterait, dit-on, conformément aux thèses qu'il défend depuis toujours, à annoncer une libéralisation totale du marché postal à la date du 1er janvier 2003.

Quelle est, monsieur le secrétaire d'Etat, la position du Gouvernement sur ce dossier ? Quelles initiatives envisage-t-il de prendre pour éviter de faire peser de sérieuses


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 3 MARS 1999

menaces ne viennent peser sur le service public postal auquel nos concitoyens, vous le savez, sont très attachés ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'industrie.

Monsieur le député, la directive du 15 décembre 1997 cherche effectivement à garantir un service postal de qualité et accessible à tous, sur l'ensemble du territoire. Elle confirme par ailleurs, et ce n'est pas la moindre de ses qualités, la possibilité de réserver un périmètre de service , une sorte de monopole postal aux prestataires du service universel - en l'occurrence, pour la France, La Poste.

C'est ce que le Gouvernement a proposé dans le cadre d'un article inséré dans le projet de loi d'orientation pour l'aménagement du territoire, que votre assemblée a adopté, en première lecture, le 9 février dernier.

La directive prévoit également que le Conseil des ministres et le Parlement européen décideront, avant le 1er janvier de l'année 2000, d'une redéfinition des conditions d'exercice de ce monopole postal, applicable à partir de 2003. Dans cette perspective, le commissaire chargé de ces questions et la Commission européenne pourraient prochainement adopter une nouvelle proposition.

Or certains Etats membres y voient l'occasion d'obtenir ce qu'ils revendiquent depuis longtemps, à savoir une libéralisation totale ou presque du secteur postal. Tel est le véritable enjeu du débat qui vient de s'ouvrir.

Je veux dire clairement à l'Assemblée nationale que cette orientation n'est en rien acceptable aux yeux du Gouvernement, comme j'ai eu l'occasion de le rappeler fin novembre à Bruxelles, devant le conseil des ministres de l'industrie, et il y a quelques jours encore à une délégation de parlementaires européens de toutes tendances.

La position du Gouvernement français est claire : s'il est nécessaire d'approfondir les études disponibles, comme le propose le Parlement européen, afin d'évaluer avec précision les conséquences économiques, sociales et en termes d'emplois d'une redéfinition de la directive, ...

M. le président.

Pouvez-vous conclure, monsieur le secrétaire d'Etat ?

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

... nous ne saurions accepter une libéralisation totale. Nous entendons maintenir un service réservé conséquent pour La Poste en France et pour toutes les postes en Europe. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.) Telle est notre vision du service public, parfaitement adaptée à la conception du service universel exprimée dans la directive européenne dont vous avez parlé.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

EXCEPTION CULTURELLE

M. le président.

La parole est à M. Didier Mathus.

M. Didier Mathus.

Ma question s'adresse à Mme la ministre de la culture et de la communication. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Madame la ministre, des discussions sont depuis quelques jours en cours entre Canal Plus et le groupe Murdoch pour étudier la fusion de Canal Plus et de BSkyB.

Cette nouvelle a jeté le trouble et la consternation dans les milieux de la création en France.

Chacun a en mémoire les déclarations de M. Murdoch à la conférence de Birmingham, dans lesquelles il attaquait violemment l'exception culturelle européenne, affichant son mépris et son hostilité à l'égard des législations nationales favorables à la création cinématographique et audiovisuelle.

M. Murdoch est le propriétaire d'un groupe de presse mondial bâti sur l'absence de toute déontologie et sur une vision ultralibérale de la communication conçue comme un marché ordinaire. Son arrivée en France et sur le continent européen représente un grand danger pour l'ensemble des politiques européennes dans le domaine audiovisuel, pour les entreprises qui travaillent dans ce secteur et pour notre identité culturelle elle-même.

Quelles sont donc les intentions du Gouvernement face à cette menace et de quels moyens dispose-t-il pour s'y opposer ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur quelques bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert et du groupe communiste.)

M. le président.

La parole est à Mme la ministre de la culture et de la communication.

Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication.

Monsieur le député, les discussions actuellement en cours entre le groupe Murdoch et Canal Plus à propos du rapprochement entre Canal et la chaîne anglaise BSkyB préoccupent tout comme vous le Gouvernement. Vous avez rappelé les déclarations de M. Murdoch à la conférence de Birmingham où il critiquait effectivement, et dans des termes particulièrement violents, la défense de la souveraineté culturelle des Etats et de la souveraineté culturelle européenne, et où il s'opposait à tout système de régulation prôné par les pouvoirs publics sur le plan national ou sur le plan européen.

M. François d'Aubert.

Expulsez-le !

Mme la ministre de la culture et de la communication.

Seuls l'intéressent aujourd'hui les 40 % du marché européen qui permettraient à M. Murdoch et à son groupe de s'étendre sur le continent. C'est la raison pour laquelle ceux-ci ont lancé une très vive offensive pour prendre pied en Europe, par tous les moyens. Ils se sont heurtés jusqu'ici à de nombreuses difficultés, comme, récemment, l'opposition du gouvernement italien. Aussi se retournent-ils aujourd'hui vers la France. Rappelons toutefois que, lors de l'échec de la tentative de ce groupe en Italie, le président de Canal Plus, M. Lescure, avait parlé de « la pieuvre Murdoch » et de la culture monopolistique que celui-ci entend développer.

Pour sa part, le Gouvernement reste attaché à ce que les groupes français se renforcent et puissent passer des alliances positives au regard de leur activité de production.

M. Renaud Muselier.

Elle parle, mais elle ne dit rien !

Mme la ministre de la culture et de la communication.

Les dirigeants de Canal Plus doivent savoir que le Gouvernement examinera avec la plus grande vigilance un éventuel rapprochement (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants), quelle qu'en soit la forme, avec le groupe Murdoch, au regard de ses conséquences sur les marchés européens de la télévision payante, les droits sportifs, audiovisuels et cinématographiques, au regard de ses conséquences sur les marchés européens, mais aussi de sa conception de la souveraineté culturelle, nationale et européenne.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 3 MARS 1999

Je crois nécessaire de rappeler que la position de Canal Plus en France reste fonction du maintien de ses devoirs spécifiques vis-à-vis de la production cinématographique.

(Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Soyez enfin assurés, mesdames et messieurs les députés, que le Gouvernement veillera aussi à ce que toutes les autorités compétentes en matière de régulation soient saisies sur le plan national comme sur le plan européen.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

Nous en venons aux questions du groupe communiste.

SECOURS EN MONTAGNE

M. le président.

La parole est à M. Roger Meï.

M. Roger Meï.

Ma question s'adresse à M. le ministre de l'intérieur.

La montagne, en 1998-1999, aura coûté cher en vies humaines, tant du fait des avalanches que du fait de la pratique des sports et des loisirs.

M. Bernard Accoyer.

Non ! Non !

M. Roger Meï.

La méconnaissance de la montagne, les imprudences, le défi sportif sont souvent à l'origine de ces drames. Je n'aurai garde d'oublier le tribut payé par les sauveteurs dont je salue le dévouement. Ne parlons pas des coûts considérables qu'entraîne l'intervention des secours. Soit dit en passant, je reste favorable au maintien du principe de gratuité des secours ; toutefois, dans les cas où certains auraient délibérément mis leur vie et celle d'autrui en danger, il conviendrait de réclamer un remboursement.

Sans doute vous interrogez-vous, mes chers collègues, de voir intervenir sur ce sujet le député d'un département où la neige ne fait son apparition qu'une année sur deux en moyenne. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) C'est que des jeunes de ma circonscription - j'imagine qu'il en est de même chez vous - ont payé de leur vie leur méconnaissance de la montagne et de ses dangers. La montagne, comme la mer, est dangereuse.

M. Patrick Ollier.

C'est un vrai spécialiste !

M. Roger Meï.

Ne croyez-vous pas, monsieur le ministre, le moment venu de mettre en place, après une large concertation avec les professionnels de la montagne, les élus, les assureurs et les associations, une véritable législation ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe communiste, du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. Bernard Accoyer.

Non ! Il n'y connaît rien !

M. Patrick Ollier.

Stupide ! Interdisez aussi de respirer !

M. le président.

La parole est à M. le ministre de l'intérieur.

M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur.

Monsieur le député, comme vous venez de le rappeler, la montagne aura cette année coûté cher en vies humaines.

Je partage l'émotion que vous venez d'exprimer à l'occasion de la disparition de deux jeunes gens originaires de votre circonscription.

Tout comme vous, je reste attaché au principe de la gratuité des services publics, notamment des services publics de secours en montagne.

M. François Fillon.

Très bien !

M. le ministre de l'intérieur.

Je tiens d'ailleurs à rendre hommage au dévouement et au courage de ces sauveteurs.

Qu'ils soient gendarmes, CRS, sapeurs-pompiers, professionnels ou volontaires, membres des unités d'intervention de la sécurité civile, tous ont pris des risques considérables. Dans l'affaire de Pralognan-la-Vanoise, que chacun peut avoir à l'esprit, il est possible de mesurer à quels dangers ils ont dû faire face pour secourir des randonneurs imprudents.

Le problème que vous posez est réel. La loi montagne de 1985 a prévu que les communes peuvent récupérer une partie des frais engagés pour le sauvetage de skieurs, de surfeurs ou de randonneurs imprudents. C'est du reste ce qui devrait se passer dans le cas que je viens d'évoquer.

Il y a également là une affaire de comportement civique, qui peut être illustrée positivement, mais quelquefois aussi, hélas, négativement, par le comportement de certains vis-à-vis du risque - ce que je ne saurais leur reprocher, car nous vivons une époque où les sports à haut risque notamment connaissent une grande vogue - mais également en matière de commercialisation des images où les bons usages doivent être rappelés à chacun. (Applaudissements sur tous les bancs.) Cela dit, il ne m'appartient pas de suggérer des formules désintéressées.

Ajoutons que le code pénal permet d'ores et déjà des poursuites dans certains cas, pour sanctionner les atteintes à la vie et à l'intégralité de la personne. L'entrée en vigueur du nouveau code pénal a introduit le délit de mise en danger délibérée d'autrui ; des poursuites ont déjà été et peuvent être engagées, et des condamnations prononcées sur le fondement de ce texte à l'encontre de skieurs et de surfeurs imprudents. Voilà qui devrait répondre à votre question. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

Nous en venons aux questions du groupe du Rassemblement pour la République.

TVA SUR LA RESTAURATION

M. le président.

La parole est à M. Michel Bouvard.

M. Michel Bouvard.

Monsieur le président, permettezmoi d'indiquer, avant d'aborder ma question, combien les élus de la montagne partagent le sentiment que vient d'exprimer Jean-Pierre Chevènement. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)

M. Renaud Muselier.

Très bien !

M. Michel Bouvard.

Monsieur le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, ma question a trait à la TVA.

Lors de la discussion budgétaire au mois d'octobre, le Gouvernement n'a pas souhaité poursuivre le mouvement de baisse de l'impôt sur le revenu décidée par le gouvernement d'Alain Juppé, ni revenir sur la hausse momentanée de la TVA. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Alain Néri.

Mais la TVA, c'est vous !


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 3 MARS 1999

M. Michel Bouvard.

Vous avez préféré des baisses ciblées de TVA ; aussi avons-nous été plusieurs, notamment sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, à plaider pour une baisse de la TVA applicable à la restauration et, ce, pour trois raisons. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

Mes chers collègues, du calme !

M. Michel Bouvard.

La première tient à la situation d'inégalité dans laquelle se retrouve la restauration traditionnelle. Rappelons qu'il existe plusieurs régimes : l'exonération, la vente à emporter à 5,5 %, les 17,5 %, en application de la loi Gaudin, la pension, la demi-pension à 9,5 %, les mesures de simplification et de forfaitisation pour la restauration rapide.

M. Christian Bataille.

Epicier !

M. Michel Bouvard.

La deuxième raison tient à la concurrence qui menace à notre économie touristique depuis que la Grèce, le Portugal et l'Espagne, après leur entrée dans l'Union européenne, ont baissé leur TVA sur la restauration.

Troisième raison, la baisse de la TVA sur la restauration pourrait créer entre 7 000 et 14 000 emplois.

Monsieur le ministre de l'économie, le 17 février dernier, l'Union européenne à laquelle vous vous référez toujours en la matière, et à juste raison, s'est déclarée prête à un effort en direction des activités à forte intensité de main-d'oeuvre. C'est bien le cas de la restauration quie mploie aujourd'hui 800 000 personnes dont 600 000 salariés. Ma question est donc simple : entendezvous prochainement proposer une baisse de la TVA sur la restauration, attendue tant par la profession que par l'ensemble de la clientèle ? Nous ne saurions, je le précise, nous satisfaire des habituelles réponses fournies dans le passé par M. Sautter qui estime que les riches vont plus au restaurant que les pauvres ou encore qu'on a déjà fait beaucoup pour le tourisme ! Je vous remercie par avance de nous apporter enfin une réponse positive, comme l'a du reste souhaité à plusieurs reprises M. le rapporteur général du budget lui-même. (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et sur divers bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

Monsieur Bouvard, j'ai eu peur que vous ne fassiez à la fois la question et la réponse. (Protestations sur divers bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)

M. Franck Borotra.

Quand Fabius revient-il ?

M. le président.

La parole est à M. le secrétaire d'Etat au budget.

M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat au budget.

Monsieur Bouvard, vous avez fort opportunément rappelé que la majorité qui soutenait le gouvernement de 1995 a accepté une hausse de deux points de la TVA qui a pesé lourdement sur le niveau de vie des ménages. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Exclamationss ur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Nous avons engagé un mouvement en sens contraire puisque, vous le savez, les baisses ciblées auxquelles vous avez fait allusion ont permis de baisser la TVA pour un montant de 12 milliards de francs sur les années 1998 et 1999.

M. Yves Nicolin.

C'est faux !

M. le secrétaire d'Etat au budget.

Vous avez évoqué à propos de la restauration la récente initiative de la Commission de Bruxelles. La restauration est effectivement taxée à 20,6 % alors que les ventes à emporter et la restauration collective ne le sont qu'à 5,5 %. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)

M. Bernard Accoyer.

M. Bouvard l'a déjà dit !

M. Philippe Auberger.

Au fait !

M. le secrétaire d'Etat au budget.

Il l'a dit et je le confirme.

Si l'on portait ces différentes activités au même taux, par exemple à 14 %, cela reviendrait à demander un effort financier à ceux qui profitent des ventes à emporter ou de la restauration collective ; or ceux-ci n'appartiennent pas forcément aux catégories les plus aisées de la population. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) De surcroît, ce sont souvent des jeunes.

Le commissaire Monti, conformément d'ailleurs à uns ouhait que Dominique Strauss-Kahn et moi-même avions émis dans une lettre qui lui avait été adressée le 19 octobre, a envisagé la diminution de la TVA sur les services à haute intensité de main-d'oeuvre.

Malheureusement, la restauration ne figure pas dans le projet que le commissaire a dévoilé. On y trouve les services d'aide à domicile, qui ont besoin d'un soutien, ainsi que les travaux d'entretien du bâtiment.

De toute façon, monsieur Bouvard, le Gouvernement prendra ses décisions dans le domaine fiscal au mois de septembre et, comme d'habitude, ce sont les parlementaires qui en auront la primeur. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

ALCOOL ET DROGUE

M. le président.

La parole est à M. Yves Fromion.

M. Yves Fromion.

Monsieur le Premier ministre, selon diverses sources, un projet de décret viserait à étendre à l'alcool les compétences attribuées à la mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie.

Cette information a reçu une confirmation indirecte à travers les confidences de la présidente de la MILDT à un journal du soir, au mois de janvier.

Eu égard à l'importance de la mesure envisagée, on ne peut qu'être, une nouvelle fois, surpris de la désinvolture apparente sans doute - avec laquelle la représentation nationale est traitée.

En effet, les dispositions envisagées soulèvent des problèmes considérables.

D'abord, un problème économique évident, lié aux c onséquences qu'aurait un amalgame fait entre les drogues et l'alcool. Sans doute convient-il de lutter contre les abus de consommation d'alcool qui constituent un véritable problème de santé publique. Mais ce ne peut être au détriment de la production et de la consommation raisonnable et conviviale de vins et boissons alcoolisées.

Dans le contexte des difficultés européennes aiguës où se trouve l'agriculture française, il serait déraisonnable de prendre des mesures injustement pénalisantes, en termes d'image, donc de ventes, qui affaibliraient l'un de nos principaux secteurs agro-alimentaires et l'un de nos principaux postes à l'exportation.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 3 MARS 1999

Par ailleurs, le parallélisme que vous voulez introduire entre drogues, médicaments, alcool et tabac est de nature à banaliser la consommation des drogues. Vous offrirez ainsi aux partisans de la dépénalisation des produits psychotropes l'occasion rêvée pour exiger un alignement des législations, notamment répressives,...

M. Christian Bourquin.

La question !

M. Yves Fromion.

... entre drogues, alcool et tabac, dès lors que vous aurez institutionnalisé l'amalgame.

Plusieurs députés du groupe socialiste.

La question !

M. Yves Fromion.

Ecoutez-moi au lieu de crier ! Vous réagirez après ! Enfin, troisième et dernière observation, croyez-vous sincèrement que la MILDT soit en mesure de s'intéresser efficacement au problème de la prévention de l'alcoolisme quand on considère objectivement, et sans procès d'intention, les faibles performances à mettre à son actif en matière de lutte contre les drogues depuis sa création ?

M. Christian Bourquin.

La question !

M. Yves Fromion.

Monsieur le Premier ministre, eu égard à l'ampleur des conséquences que je viens de rappeler, pouvez-vous préciser si vous envisagez effectivement de prendre des mesures visant à faire entrer l'alcool dans le champ des compétences de la MILDT ? (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et sur quelques bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

M. le président.

La parole est à M. le secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Monsieur le député, je vous remercie d'avoir entamé, et sur ce ton, un débat nécessaire. Mais si le débat s'impose, rien n'a été tranché pour le moment et, surtout, il n'a pas été décidé d'opérer cet amalgame, comme vous semblez en accuser le Gouvernement.

En revanche, monsieur le député, ce qui compte mais j'ai compris à travers vos propos que vous en étiez d'accord - c'est de réduire les risques pour les individus, jeunes ou moins jeunes. Telle est, en effet, la position du Gouvernement. Nous avons fait ce terrible constat dans le « baromètre jeunes » - quatre ans d'études sur la consommation chez nos jeunes - que la consommation de tabac commence à l'âge de douze ans ou douze ans et demi ; l'alcool prend le relais et s'additionne à partir de quinze ans, dit-on, et, à dix-neuf ans, il y a consommation de drogues illicites.

Ce que nous souhaitons, monsieur le député, c'est non pas stigmatiser les produits mais, puisqu'il s'agit de

« poly-toxicomanies », prendre en charge globalement les personnes.

Cela dit, vous avez tort d'affirmer que la mission interministérielle de lutte contre les drogues et la toxicomanie n'a pas été performante. Elle a la tâche difficile de réunir l'ensemble des ministères intéressés - et ils sont très nombreux - afin que la politique de réduction des risques, de tous les risques, qu'ils proviennent des toxiques légaux ou illégaux, qui est celle du Gouvernement, soit prise en compte, pour améliorer la santé, en particulier de notre jeunesse.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur plusieurs bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

NOUVEAU CONCOURS D'ENTRÉE A L'ÉCOLE NORMALE SUPÉRIEURE

M. le président.

La parole est à M. Jean-Michel Dubernard.

M. Jean-Michel Dubernard.

Ma question s'adresse à M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

Monsieur le ministre, nous nous interrogeons sur la sincérité de vos réponses.

En effet, le 10 février dernier, mon collègue JeanClaude Guibal vous interrogeait sur les étranges modalités de création d'un nouveau mode d'entrée à l'Ecole normale supérieure.

Vous avez répondu sur un ton ironique - je me réfère au Journal officiel , page 1164 - que vous aviez été étonné de trouver dans un journal du soir le texte d'un arrêté que vous auriez pris, alors que vous n'aviez fait que demander au directeur de la recherche de vous préparer un projet, projet que vous n'aviez pas encore reçu. Or l'arrêté créant ce troisième concours, s'il était bien dans le journal du soir en question, apparaissait aussi au Journal officiel , ce même 10 février.

(« Oh ! » sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Alors, monsieur le ministre, trois hypothèses : soit vous avez délibérément caché la vérité à la représentati on nationale (Huées sur les mêmes bancs) ; soit vous aviezo ublié cet arrêté qui datait, en réalité, du 28 novembre 1998 ; soit vous n'êtes pas informé de ce que font en votre nom vos directeurs (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants), ce qui est d'autant plus grave que le français ne serait plus que l'une des options de ce nouveau concours d'entrée à l'Ecole normale supérieure.

(Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

M. Claude Allègre, ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

Monsieur le député, j'ai dit que je n'avais pas sur mon bureau, pour signature, cet arrêté, ce qui est la stricte vérité. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

Mes chers collègues, si vous pouviez écouter la réponse !

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

Mais je voudrais, mesdames et messieurs les députés, m'attacher au fond d'une affaire qui préoccupe bien du monde alors qu'elle est fort simple, et je corrigerai quelques points.

D'abord, la direction de l'Ecole normale supérieure, comme celle d'autres grandes écoles, a accepté d'augmenter d'une manière significative le nombre de ses élèves provenant de pays membres de l'Union européenne.

M. Jean-Louis Debré.

Répondez à la question !

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

Chaque école a été invitée à prendre ses décisions indépendamment. Cet arrêté a donc été préparé par l'Ecole normale supérieure, comme d'autres écoles avaient préparé le leur.

M. Jean-Louis Debré.

Il a été signé par vous !


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 3 MARS 1999

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

Le concours qui a été préparé proposera quatre places. (Exclamations sur les bancs du groupe Rassemblement pour la République et du groupe Union pour la Démocratie française et du groupe Démocratie libérale.)

M. le président.

Messieurs, je vous en prie !

M. Jean-Louis Debré.

Mais il ne répond pas à la question !

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

Par conséquent, il est absurde de penser que des Français qui, dans le concours normal, ont quarante places, pourraient choisir de se présenter à un concours qui n'en offre que quatre ! Il faudrait qu'ils ne sachent pas compter ! La création d'un tel concours est destinée à accroître le rayonnement de nos grandes écoles en Europe et à faire en sorte que les meilleurs étrangers n'aillent pas à Oxford ou à Cambridge mais viennent dans nos grandes écoles.

L'Ecole nationale d'administration l'a compris, l'Ecole polytechnique aussi, et je suis content que l'Ecole normale supérieure ait fait de même. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

Mme Yvette Benayoun-Nakache.

Bravo !

M. le président.

Nous passons aux questions du groupe Radical, Citoyen et Vert.

RESPONSABILITÉ JURIDIQUE DES SITES INTERNET

M. le président.

La parole est à M. Yves Cochet.

M. Yves Cochet.

Ma question s'adresse à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Le 10 février dernier, M. Valentin Lacambre, responsable d'un hébergement sur Internet, a été condamné par la cour d'appel de Paris à verser 405 000 francs à Estelle Halliday pour avoir simplement hébergé un site qui exposait des photos non autorisées par la top model . (Exclamations et rires sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe Union pour la démocratie française et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Je vous en prie ! Cela pose des questions de droit ! Je pense que cette condamnation est doublement inique.

Première injustice, on rend responsable éditorial du contenu d'un site un intermédiaire technique chargé de véhiculer, de transporter, de fournir - automatiquement des informations dont il ne peut, évidemment, connaître le contenu.

Deuxième injustice, par le montant de la condamnation - 405 000 francs ! - on le traite comme le directeur d'une publication lucrative, alors qu'il fournit l'hébergement à titre gratuit.

Pour conserver l'Internet non marchand, et protéger la liberté d'expression, il faut refuser la responsabilité éditoriale des intermédiaires techniques et l'obligation de déclaration préalable des pages Web. Il faut, évidemment, refuser la mort de l'hébergement gratuit.

Monsieur le ministre, quelles mesures comptez-vous prendre pour que les fournisseurs d'accès et de services ne puissent pas être tenus pour responsables de contenus dont ils ne sont pas les auteurs ? (Applaudissements sur divers bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert et sur quelques bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Il n'appartient évidemment pas au Gouvernement de commenter une décision de justice qui vient d'être rendue.

M. Yves Nicolin.

Mais on peut changer la loi ! M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

En revanche, il lui appartient d'éclairer l'avenir et de vous dire quelles sont ses intentions. L'Internet est certainement un des grands sujets de société de cette fin de siècle et du début du siècle prochain. Son dével oppement est porteur d'innovations, d'activités et d'emplois. Il est porteur aussi d'une nouvelle forme de liberté d'expression. Mais qui dit liberté dit responsabilité.

Le problème que vous posez, et qui est juste, est de savoir, dans cette forme nouvelle d'expression, comment doit se matérialiser la responsabilité.

Que font les hébergeurs ? Ils reçoivent sur leurs ordinateurs un très grand nombre de sites et ils permettent à tout un chacun qui utilise l'Internet de les consulter.

S'agissant de l'hébergeur que vous venez d'évoquer et qui a été condamné, il y avait plus de 40 000 sites sur ses ordinateurs. Il lui était donc à l'évidence impossible de connaître le détail de chacun des sites qu'il héberge.

Pourtant, il faut bien que quelqu'un soit responsable.

Il faut bien faire la différence entre l'hébergeur et celui qui produit un site et le met sur le réseau.

M. Yves Nicolin.

Voilà ! M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

L'hébergeur joue un rôle proche de celui de France Télécom, qui n'est pas responsable du contenu des conversations qui peuvent passer sur les fils téléphoniques. En revanche, France Télécom est capable, si la justice le trouve nécessaire, de retrouver l'origine d'un appel.

Il faut donc que les responsables éditoriaux de ce qui est mis sur le Net soient ceux qui produisent le contenu, mais que l'hébergeur, lui, soit capable, si c'est nécessaire les exemples sont nombreux : violation de la loi, terrorisme, pédophilie - de retrouver l'origine de l'émetteur et de permettre à la justice de faire son travail.

Il convient donc que la législation soit adaptée en ce sens. D'ailleurs, je vous informe - mais en bon connaisseur de ces choses, vous devez le savoir - qu'une directive est en préparation à Bruxelles, qui va dans le sens que vous souhaitez. Elle permet de faire la différence entre l'hébergeur, qui est un prestataire de services techniques, et celui qui met sur le réseau un site particulier, qui doit être responsable de son contenu et qui est susceptible d'être poursuivi en justice.

Soit la directive européenne viendra suffisamment tôt et nous nous y adapterons, soit il faudra que la France légifère. Mais il convient d'aller dans ce sens de façon à permettre le développement de l'Internet, la sécurité des personnes et la liberté d'expression. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste, du groupe communiste, sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française et sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

SITUATION AU CONGO-BRAZZAVILLE

M. le président.

La parole est à M. Gérard Charasse.

M. Gérard Charasse.

Ma question s'adresse à M. le ministre des affaires étrangères.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 3 MARS 1999

Monsieur le ministre, la situation préoccupante au Kosovo et en Macédoine a pu faire, pour quelques semaines, disparaître des médias les images et les commentaires sur l'évolution dramatique de la situation dans la région du Congo-Brazzaville. Les affrontements y ont redoublé et les dernières informations en provenance du pays montrent désormais que ce dernier est en proie à une véritable guerre intérieure.

Des quartiers civils sont victimes des bombardements, au-delà des premiers foyers de tensions, puisque, après Brazzaville, Mouyondzi et la région du Pool, les villes de Nkayi et de Dolisie sont touchées à un point tel que le trafic aérien, ferroviaire et routier a été plusieurs fois suspendu très durablement.

Des exactions sont perpétrées et les rapports effectués par des personnes ayant pu sortir du pays sont souvent accablants.

Monsieur le ministre, pouvez-vous confirmer l'intérêt que la France porte à la situation de cette partie francophone du continent africain, partenaire économique et politique de notre pays et de l'Europe ? Pouvez-vous nous confirmer l'intérêt que la France porte à l'avenir de cette région d'Afrique, dont l'importance stratégique n'est plus à rappeler ? Q uelles initiatives concrètes comptez-vous prendre pour que ces territoires et leurs populations puissent retrouver la paix et se consacrer, enfin, à la reconstruction et au développement de leur pays ? Dans quel état d'avancement est le projet de rencontre de conciliation que vous avez suggérée dès le 16 janvier dernier ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert, sur les bancs du groupe socialiste et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

M. le président.

La parole est à M. le ministre délégué à la coopération et à la francophonie.

M. Charles Josselin, ministre délégué à la coopération et à la francophonie.

Monsieur le député, la situation en République du Congo est, en effet, tout à fait préoccupante. Alors que Brazzaville relevait à peine les ruines provoquées par la guerre civile qui a opposé, de juin à octobre, le général Sassou Nguesso au président Lissouba, de nouveaux affrontements, à la mi-décembre, puis à la fin de janvier dernier, sont venus à nouveau endeuiller les populations et dégrader durement les infrastructures.

Vous l'avez fait observer, ce n'est pas seulement Brazzaville qui est concernée. L'intérieur du pays l'est aussi. Plusieurs villes, dont celles que vous avez citées, Dolisie en particulier, sont également en pleine insécurité. On peut dire que l'hinterland entre Pointe-Noire et Brazzaville échappe pratiquement au contrôle du pouvoir central, alors que cette région est essentielle pour l'approvisionnement en énergie et en vivres de l'ensemble du pays.

Si Pointe-Noire échappe à la violence, la présence angolaise y est pour beaucoup. Malheureusement, ses h abitants et l'importante communauté française n'échappent pas aux difficultés que les coupures d'eau et d'électricité, par exemple, provoquent, sans oublier l'afflux de personnes déplacées.

Si j'ajoute que la faiblesse numérique et qualitative des forces engagées laisse le champ libre à toutes les exactions que vous avez décrites, vous comprendrez que la France a, en effet, de vraies raisons de se préoccuper de cette situation.

Les raisons structurelles, on les connaît : les rivalités ethniques ne sont pas d'aujourd'hui, la déliquescence de l'Etat non plus. Mais le commerce accru des armes de plus nombreuses ajoute encore à ce climat de violence.

Malheureusement, nous assistons actuellement à un blocage politique. La réconciliation nationale engagée par le forum organisé dès le mois de janvier 1998 marque le pas. C'est plutôt l'intransigeance qui prévaut dans les discours et, surtout, le choix de la solution militaire.

La France, dès le début, a condamné la reprise des combats. Elle a condamné, avec la plus grande fermeté, les exactions commises. Elle a surtout entrepris de faire passer un certain nombre de messages à l'ensemble des a cteurs de la vie politique congolaise pour qu'ils recherchent les voies d'une négociation. Il en va de la responsabilité de tous. Celle du Gouvernement est engagée, mais je ne voudrais pas que l'on oublie la responsabilité de ceux qui ont fait le choix de reprendre les armes.

La France, monsieur le député, n'oublie pas les responsabilités que l'histoire lui assigne, pas plus que l'importance de la communauté française. Si à Brazzaville il n'y a plus guère que 350 Français - nous avons conseillé, compte tenu de la situation difficile dans cette ville à nos propres agents de revenir dès lors que leur présence n'était pas indispensable -, il reste encore quelque 2 500 Français à Pointe-Noire.

Nous avons, sur le plan humanitaire et sur le plan économique, entrepris de lutter contre les souffrances des populations mais, surtout, nous avons recherché des solutions politiques. Je l'ai dit, c'est sur la voie de la réconciliation nationale qu'il faut s'engager. La discrétion m'interdit d'en dire plus.

Sachez simplement que, dans quelques instants, je rencontrerai l'ambassadeur qui va me rendre compte des réactions des acteurs de la crise congolaise aux propositions de réconciliation que nous leur avons faites.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

Nous passons au groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.

MAÎTRISE DES DÉPENSES DE SANTÉ

M. le président.

La parole est à M. Jean-Antoine Leonetti.

M. Jean-Antoine Leonetti.

Ma question s'adresse à

M. le secrétaire d'Etat à la santé.

Monsieur le secrétaire d'Etat, le 15 février 1999, vous avez adressé à l'ensemble du corps médical une lettre cosignée avec Mme Martine Aubry. On y note un certain nombre de banalités du type « le médecin est celui qui soigne et qui doit continuer à remplir ce rôle ». (Rires et applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) On y apprend que la réforme de l'assurance maladie, fort heureusement, ne peut pas se faire sans le corps médical (« Très bien ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants), mais, surtout, que la modération de l'évolution des dépenses ne peut pas être obtenue par la contrainte. (« Très bien ! » sur les mêmes bancs.)

La méthode douce succède donc à la méthode dure.

En fait, votre méthode dure a été un échec, échec des négociations avec les syndicats représentatifs du corps


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 3 MARS 1999

médical, échec retentissant surtout de votre tentative de durcissement de la régulation des dépenses de santé, strictement comptable, par des dispositions qui ont été annulées par le Conseil constitutionnel grâce à l'action de l'opposition.

Plusieurs députés du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.

Eh oui !

M. Jean-Antoine Leonetti.

Vous déclarez dans cette lettre de séduction, cette lettre d'amour (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie françaiseAlliance), nouveau envers le corps médical, lettre qui manie assez bien le paradoxe et l'hypocrisie, que vous ne souhaitiez pas plus que nous que les dispositions prévues s'appliquent. Lorsqu'on est ministre, il est facile de faire en sorte que des dispositions ne s'appliquent pas. Il suffit de ne pas les proposer ! (Protestations sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)

Plusieurs députés du groupe de l'Union pour la démocratie française.

Eh oui !

M. Jean-Antoine Leonetti.

A la fin de votre courrier, enfin, vous indiquez aux médecins qu'ils peuvent vous écrire ou vous contacter par messagerie électronique. Visiblement, vous cherchez à contourner la représentation syndicale. Il est vrai que ce sont des syndicats de médecins et qu'ils doivent donc être traités moins bien que les autres, et que vous n'avez bien entendu pas écouté la voix de l'opposition lorsqu'elle se faisait porter. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

La question que se posent les médecins est assez simple en fait, et je leur propose de vous l'adresser de manière claire : renoncez-vous oui ou non aux sanctions collectives et aveugles et à la maîtrise strictement comptable des dépenses de santé ? (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

A titre anecdotique, monsieur le secrétaire d'Etat, je vous ai adressé le 10 février 1998, il y a donc plus d'un an, une question écrite sur ce sujet qui n'a toujours pas obtenu de réponse. (« Oh ! » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Je n'étais à cette époque que député.

M. le président.

Voulez-vous conclure, monsieur Leonetti.

M. Jean-Antoine Leonetti.

Si je vous adresse la même question, en tant que médecin, sur la messagerie électronique, puis-je espérer avoir une réponse plus rapidement ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité.

Décidément, monsieur le député, ou bien vous avez du mal à lire notre lettre, ou bien vous posez une fois de plus vos questions d'une façon qui n'est pas correcte. (Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Je connais cette lettre pour l'avoir écrite. Nous n'avons pas dit que le médecin était quelqu'un qui soignait et devait continuer à soigner, mais quelqu'un qui soignait et qui rassurait, et qui devait continuer à le faire (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants), c'est-à-dire qu'il doit avoir le temps, et c'est vrai notamment pour le médecin généraliste, d'accueillir, d'écouter et de comprendre. Si vous connaissez le rôle des médecins, vous savez que c'est très important ! Si, pour vous, ce sont des banalités, les médecins ne l'ont pas perçu ainsi.

M. Jean-Michel Ferrand.

M. Leonetti est médecin ! Il sait de quoi il parle !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Ils nous écrivent par centaines aujourd'hui, non pas pour nous donner des formules toutes faites, car eux acceptent le jeu démocratique, mais pour nous faire part de leurs remarques, de leurs propositions, qui nous seront tout à fait utiles.

Permettez-moi de vous dire que vous êtes mal placés, mesdames, messieurs de l'opposition, vous qui avez mis les médecins dans la rue, pour prétendre que nous ne travaillons pas bien avec les médecins. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.) Vous êtes mal placés, vous qui avez fait le « tout médecin », alors que nous travaillons aussi avec l'industrie pharmaceutique, à qui nous demandons de contribuer à la sécurité sociale, vous qui avez vu annuler l'ensemble des dispositions que vous aviez conclues avec les médecins, pour nous donner des leçons.

M. Jean Ueberschlag.

Ne parlez pas des autres !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Et vous êtes encore plus mal placés, quand nous avons réussi à respecter nos prévisions l'année dernière, et à les respec ter cette année à deux milliards près, alors que les vôtres n'étaient pas respectées à quarante milliards près ! Voilà la réalité ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur plusieurs bancs du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

Merci, madame la ministre, pour cette réponse de séduction. (Sourires.)

Nous avons terminé les questions au Gouvernement.

2 RATIFICATION DU TRAITÉ D'AMSTERDAM Explications de vote et vote sur l'ensemble d'un projet de loi

M. le président.

L'ordre du jour appelle les explications de vote et le vote sur l'ensemble du projet de loi autorisant la ratification du traité d'Amsterdam modifiant le traité sur l'Union européenne, les traités instituant les communautés européennes et certains actes connexes.

Je rappelle que la conférence des présidents a décidé que le vote aurait lieu par scrutin public, en application de l'article 65-1 du règlement.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 3 MARS 1999

La parole est à M. le ministre délégué chargé des affaires européennes.

M. Pierre Moscovici, ministre délégué chargé des affaires européennes.

Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, quelques mots seulement pour remercier la représentation nationale de ce débat très approfondi. Nous avons vraiment traité au fond des choses du contenu du traité d'Amsterdam, de ses apports mais aussi de ses faiblesses ou de ses lacunes.

Après les débats qui avaient conduit à la révision constitutionnelle, ce fut à nouveau une discussion riche, nourrie, sérieuse, jusqu'à une heure très avancée de la nuit. Je ne reviens pas sur l'article additionnel que le Gouvernement a présenté. Le débat a montré qu'une très large majorité d'entre vous se reconnaissaient dans ce texte qui a été substantiellement amélioré par les travaux de la commission des affaires étrangères.

Je vous appelle donc à voter les plus nombreux possible le texte de ce projet de loi qui autorise sans aucun état d'âme la ratification du traité d'Amsterdam signé par notre pays, mais rappelle aussi la détermination forte de la France à voir les institutions de l'Europe rapidement et profondément réformées. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur de nombreux bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

M. le président.

Rendons à César ce qui appartient à César, c'est-à-dire à la commission des affaires étrangères, le travail qui a été mené dans ce cadre.

La parole est à M. Michel Vauzelle, rapporteur de la commission des affaires étrangères.

M. Michel Vauzelle, rapporteur de la commission des affaires étrangères.

Monsieur le ministre, mes chers collègues, si le traité d'Amsterdam n'est pas un bon traité, j'ai eu l'occasion de le dire pendant le débat, il est une étape nécessaire dans la construction européenne. Dans la vie internationale, comme dans la vie tout court, il y a des moments difficiles qui doivent être acceptés avec modestie, réalisme et responsabilité. C'est le cas de l'autorisation que nous donnons au Gouvernement de ratifier ce traité.

Je veux souligner une fois encore combien le Gouvernement mérite la gratitude du Parlement et notamment de l'Assemblée pour le respect dont il a fait preuve à l'égard de la représentation nationale. Nous avons pu, en effet, notamment à la commission des affaires étrangères, exprimer notre volonté, qui était celle du président Fabius mais aussi de la quasi-totalité des parlementaires et des plus éminentes personnalités de la République, que la voix de la France se fasse entendre de manière forte en faveur de la réforme des institutions. Ce faisant, la volonté nationale était respectée et entendue.

La France, tout en étant à la pointe du combat européen, n'est pas isolée en ce domaine, puisqu'elle est rejointe par les Quinze, notamment par l'Italie et par la Belgique. Le Gouvernement a trouvé une méthode qui, en respectant nos institutions, la Constitution, notrer èglement, par une manière exemplaire d'employer l'amendement gouvernemental, nous a permis de nous manifester de la manière que nous souhaitions et qui est, je le crois, très forte.

Enfin, il est apparu tout au long des débats, et quelle que soit la position prise par les orateurs, que la représentation nationale dans son ensemble avait un très vif souci de voir la France trouver sa place face aux menaces qui pèsent sur sa liberté en raison de la mondialisation de l'existence d'un modèle unique et d'une seule et unique superpuissance mondiale désormais.

Ce souci de la liberté de la France est un point qui nous rassemble tous. Nous y répondons de manière différente. Selon nous, pour que la France reste libre, elle doit s'appuyer sur la force que lui apportera l'Union européenne. Elle doit donc partager des compétences avec ses partenaires, dès lors qu'elle conserve sa souveraineté.

Mais, sans aucun doute, et on l'a bien vu dans l'opposition, qui me paraît anti-pédagogique, entre ceux qui s'appellent les « souverainistes » et les « fédéralistes », notre peuple n'y retrouvera pas son compte si, dans les semaines, les mois et les années qui viennent, nous ne savons pas bien expliquer que, pour défendre sa liberté, la France doit trouver dans l'Union européenne un appui.

L'Union européenne doit reprendre à son compte la volonté profonde de la France de défendre sa liberté et son identité culturelle.

La France, quant à elle, pourra accepter des transferts de compétence mais elle devra veiller bien entendu - à ce qu'il ne soit jamais porté atteinte à cette liberté et à cette idendité culturelle - et qui peut le faire mieux qu'ellemême.

Tel est l'enseignement que je tire, pour ma part, de ce débat qui a été, je crois, fort utile. J'espère que l'Assemblée nationale voudra bien manifester la même quasiunanimité que sa commission des affaires étrangères pour autoriser le Gouvernement à ratifier le traité d'Amsterdam. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur de nombreux bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.) Explications de vote

M. le président.

Nous en arrivons aux explications de vote sur l'ensemble du projet de loi.

Je rappelle que s'exprimera un orateur par groupe, en vertu des dispositions de l'alinéa 3 de l'article 54 du règlement, et que chacun disposera de cinq minutes.

La parole est à M. Pierre Lequiller, pour le groupe Démocratie libérale et Indépendants.

M. Pierre Lequiller.

Monsieur le président, monsieur le ministre, mesdames, messieurs les députés, le groupe Démocratie libérale votera pour la ratification du traité d'Amsterdam.

Européens convaincus, nous l'approuvons parce qu'il constitue un progrès pour l'Europe : un progrès en matière de sécurité intérieure dans l'Union, en permettant de contrôler efficacement et en commun les frontières extérieures, condition indispensable pour effacer les frontières intérieures et assurer la libre circulation des personnes ; un progrès sur la voie de l'Europe politique avec la création du haut représentant de la PESC et avec les moyens mis à sa disposition pour définir la stratégie commune ; un progrès pour la citoyenneté et la défense de la personne humaine, en introduisant l'état de droit, consacrant ainsi le principe fondamental du libéralisme politique ; un progrès dans le domaine de la solidarité puisqu'il assigne à l'Europe l'objectif de l'emploi ; un progrès également dans le domaine de l'environnement et de la santé.

Ce traité sera très probablement adopté, à l'image de la réforme constitutionnelle, et nous nous en réjouirons.

Cela dit, ses imperfections et notre ambition pour l'Europe me font aborder l'après-Amsterdam. Il est d'abord urgent, nous l'avons voté ce matin, de réformer les institutions pour répondre à l'urgence de la réunifica-


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 3 MARS 1999

tion de l'Europe. Il faut aussi s'intéresser à l'Europe politique pour permettre à l'Union, en disposant d'un véritable pilier européen de défense dans l'OTAN, d'exister pleinement sur la scène internationale. L'Europe devra être mieux organisée, avec un président du Conseil européen doté d'un mandat plus long, avec une commission réduite et gardant son rôle originel, avec une application effective du principe de subsidiarité. Elle devra enfin défendre ses valeurs de civilisation.

Or, à l'heure où ces nouveaux défis émergent, le Gouvernement français est incapable de se projeter dans l'avenir. Vous restez figés sur votre vision doctrinaire, interventionniste de la France comme de l'Union. Vous ne songez qu'à exporter vos recettes archaïques dont on sait qu'elles ne sont bonnes ni pour la France ni pour l'Europe. Vu de Milan, elles auraient même des relents de vieille gauche, si j'en crois le Premier ministre, pourtant travailliste, Tony Blair.

M. Alain Barrau.

Il n'était pas là !

M. Pierre Lequiller.

En prônant le super-Etat dirigiste et centralisateur, l'impôt européen, le renforcement de la Commission au détriment du Conseil, l'unification des politiques fiscales, économiques et sociales, vous êtes à contre-courant des intérêts de la France et de ceux de l'Europe, celle de la liberté, de la solidarité, de l'initiative, de la subsidiarité, celle qui respecte l'identité des Etats, qui renforce le rôle du politique, celle qui place l'individu au coeur de ses préoccupations, celle enfin que souhaite le Président de la République. Nous voterons Amsterdam parce qu'il permettra de la réaliser.

(M. Arthur Paecht remplace M. Raymond Forni au fauteuil de la présidence.)

PRÉSIDENCE DE M. ARTHUR PAECHT,

vice-président

M. le président.

La parole est à M. Henri Nallet, pour le groupe socialiste.

M. Henri Nallet.

Dans un instant, le groupe socialiste autorisera le Gouvernement à ratifier le traité d'Amsterdam. A l'issue de ce débat, nous voudrions d'abord nous féliciter de ce que nos échanges aient permis de rendre en quelque sorte justice à une partie au moins du traité d'Amsterdam.

Nous n'avons pas dit, et ce n'est pourtant pas l'envie qui m'en manque après avoir entendu M. Lequiller, que les faiblesses du traité d'Amsterdam étaient dues à d'autres que nous.

M. Alain Juppé.

Il fallait le renégocier monsieur Nallet ! C'était toujours possible. On l'a bien fait pour Blair House !

M. Henri Nallet.

Si ce texte ardu, difficile, compliqué, c omporte de larges insuffisances, et en particulier l'absence de réforme des institutions de l'Union, ce pourquoi il avait été prévu, nous avons reconnu très vite qu'il contenait suffisamment de dispositions positives pour être ratifié. Il ne contient en effet pas de clauses inacceptables ou dangereuses pour la France. En dépit de la caricature qui a été présentée sur certains bancs de cette assemblée, nous pensons que les acquis l'emportent sur ses défauts.

Ce texte nous paraît positif parce qu'il réaffirme et protège les droits fondamentaux de l'individu, étend la compétence de l'Union européenne à la lutte contre toutes les discriminations, accroît le pouvoir du Parlement européen, comme nous l'avons toujours demandé, renforce le contrôle de la Cour de justice, permettant l'établissement d'un Etat de droit dans notre union, et, enfin, parce qu'il permettra, si les Etats membres le décident dans quelques années à l'unanimité, de voter à la majorité qualifiée au sein du Conseil dans les matières qui touchent à la circulation des personnes, à l'asile et à l'immigration.

Où est la menace pour notre communauté nationale que voient certains, alors que nous avons déjà décidé de laisser circuler librement les marchandises, les capitaux et la monnaie unique, si ce n'est peut-être dans la volonté de flatter les sentiments les plus obscurs de crainte et d'hostilité à l'autre ? Nous autoriserons la ratification de ce traité parce que nous pensons aussi qu'il peut se révéler un facteur de progrès pour l'Europe : il contribuera au perfectionnement de l'Etat de droit entre les Etats membres ; il permettra une amélioration réelle de la politique étrangère et de sécurité commune ; il autorisera l'institutionnalisation de coopérations renforcées entre ceux qui voudront aller plus loin.

Enfin, le traité d'Amsterdam, grâce à l'action du gouvernement de Lionel Jospin dans les derniers moments de la négociation, concourt à rééquilibrer la construction européenne, à en réorienter le cours.

Si une certaine dérive libérale de l'Europe a souvent été dénoncée sur les bancs de cette assemblée, aujourd'hui, la donne politique, il faut reconnaître, n'en déplaise certains, est en train de changer au sein de l'Union européenne. Loin de s'opposer à cette évolution, le traité d'Amsterdam va dans le bon sens politique. Peut-on, en effet, qualifier de « libéral » un traité qui place l'emploi parmi les objectifs de l'Union, qui intègre le protocole social grâce à la décision des travaillistes britanniques, qui se préoccupe de santé publique, de protection des consommateurs, de développement durable, et qui, pour la première fois dans un traité communautaire, reconnaît l es services d'intérêt économique général parmi les

« valeurs communes » de l'Union ? Il y a là, je crois, motif à soutenir un tel traité.

Bien sûr, il reste ses lacunes. Mais nous reconnaissons que le travail qui a été accompli par la commission des affaires étrangères, son rapporteur et le Gouvernement nous permet de considérer qu'une des conditions que nous avions mises à la ratification du traité est remplie.

En effet, l'engagement qui a été pris en faveur d'une indispensable réforme des institutions de l'Union nous convient.

Je rappelle que la négociation était pratiquement bouclée lors de la constitution du gouvernement actuel,...

M. Hervé de Charette.

Vous aviez la possibilité d'apporter des changements !

M. Henri Nallet.

... lequel ne saurait dès lors se voir imputer cette carence. Il faut au contraire lui savoir gré d'avoir oeuvré pour que la France et deux de ses partenaires importants, l'Italie et la Belgique, expriment, dans une déclaration jointe au traité, leur volonté de voir l'Union procéder à une réforme substantielle de ses institutions avant l'adhésion de tout nouvel Etat membre.

L'article additionnel au projet de loi de ratification, dont nous avons longuement discuté, marquera donc avec force l'attachement et le soutien de la représentation nationale à cette conception, sans pour autant porter atteinte à l'équilibre des pouvoirs publics instauré par la Constitution.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 3 MARS 1999

A l'inverse, la non-ratification du traité d'Amsterdam serait de notre point de vue une impasse qui provoquerait une crise qui risquerait peut-être d'être fatale à l'idée européenne et qui surtout interdirait d'engranger les progrès incontestables que contient le traité.

Le vote favorable du groupe socialiste n'est pas, comme on l'a parfois écrit, un vote de résignation à un texte qui n'a pas été négocié par le Gouvernement que nous soutenons. C'est un vote de raison en faveur d'un traité positif pour la France et pour l'Europe, un traité que, certes, il faudra compléter et dépasser, mais qui, pour l'heure, va dans le sens de l'Europe que nous voulons et que veut le Gouvernement : une Europe plus sociale, une Europe plus sûre d'elle-même, une Europe plus politique. Tel est le sens de notre approbation, mes chers collègues.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et divers bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

La parole est à M. René André, pour le groupe du RPR.

M. René André.

Monsieur le président, monsieur le m inistre, mes chers collègues, le Président de la République a, hier, avec bonheur, replacé le traité d'Amsterdam dans la longue, difficile et si nécessaire construction européenne. « L'Europe - a-t-il rappelé - doit être l'expression des peuples qui la composent... Loin d'être incompatible avec l'idée de nation, l'Europe doit être le lieu politique et spirituel où cette idée peut respirer et s'enrichir avec le plus de force. »

Le groupe du RPR a, par la voix de son orateur, M. Edouard Balladur, tout à la fois confirmé son adhésion à cette conception de l'Europe, qui associe si profondément notre histoire nationale et notre refus du repli frileux. Il a ainsi marqué son approbation du traité d'Amsterdam.

Avec le traité d'Amsterdam, que nous allons ratifier dans quelques instants, la construction européenne a fait un nouveau pas.

Bien sûr - et nous l'avons tous admis sur ces bancs -, ce traité n'est pas la panacée. Il ne règle pas tous les problèmes qui se posent à la construction de l'espace européen. Il ne marque pas non plus la fin d'un processus, loin de là.

A cet égard, je regrette que, par deux fois, l'orateur précédent ait souligné, avec plus ou moins de force - et, en tout cas, à mes yeux, avec maladresse -, le fait que ce traité aurait pu être mieux négocié. Le Gouvernement actuel avait la possibilité de le renégocier comme nous avons, nous, quand nous étions aux affaires, renégocié le traité de Blair House, ce dont personne ne se plaint.

Il aurait également fallu souligner, par honnêteté ou par humilité, que, lorsque ce traité a été signé, les partenaires n'étaient pas les mêmes : il ne faut pas oublier qu'à

M. John Major avait succédé M. Blair.

M. Henri Nallet.

Heureusement !

M. René André.

Ce changement aurait pu peut-être vous faciliter une éventuelle renégociation si vous l'aviez souhaité. Quoi que ce ne soit pas certain, étant donné ce qui s'est passer hier et avant-hier à Milan.

Comme tous ceux qui l'ont précédé, depuis le traité instituant la Communauté européenne du charbon et de l'acier jusqu'au traité de Maastricht, le traité d'Amsterdam apporte sa pierre à un édifice voulu par les peuples européens et leurs dirigeants. Il a fallu conjuguer la passion, la conviction, la détermination, et souvent aussi la patience pour faire avancer au quotidien, en dépit d'innombrables difficultés, l'idée européenne.

Sur tous ces bancs, les zones d'ombre et les insuffisances du traité d'Amsterdam ont été évoquées. Il nous appartient aussi de souligner les avancées qu'apporte le traité à la construction européenne. Il nous appartient également de dire ce qu'il doit à la diplomatie française, conduite par le chef de l'Etat. Le traité permet d'aller de l'avant, notamment en matière de politique étrangère et de sécurité commune, et, comme la France l'a souhaité, un poste de haut représentant pour la politique étrangère est créé. Demain, si les Etats en ont la volonté, l'Europe aura, aux yeux du monde, un visage et un nom.

Un autre point positif doit être rappelé : la reconnaissance d'une ambition sociale commune aux Etats de l'Union. L'Union européenne se dote largement, grâce à la ténacité de la France, d'un titre consacré à l'emploi. Ce n'est qu'une première étape, mais elle nous tient à coeur.

Le Président de la Réublique, je veux ici le rappeler avec force, en a été l'instigateur dès 1996.

(Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Toutefois, dans son intervention d'hier, M. Edouard Balladur n'a pas caché notre déception devant l'échec actuel des négociations sur la réforme des institutions européennes.

L'article additionnel que nous avons voté ce matin n'est pas de pure forme. Il exprime notre conviction profonde : seule une réforme audacieuse des institutions permettra tout à la fois d'accueillir les peuples d'Europe centrale et d'Europe orientale et de mieux associer nos concitoyens à la construction européenne.

Pas d'Europe sans démocratie, pas de démocratie sans le soutien populaire et sans institutions efficaces ! Permettez-moi, à cet égard, de regretter une fois de plus la frilosité dont le Gouvernement a fait preuve lorsque nous avons proposé une modification de la Constitution qui aurait permis de mieux associer nos concitoyens au contrôle de la construction européenne.

M. Jean-Louis Debré.

Très juste !

M. René André.

Fidèles à leur histoire, fiers de l'oeuvre accomplie par le général de Gaulle, par Georges Pompidou et, aujourd'hui, par Jacques Chirac, les gaullistes a pprouveront la ratification du traité d'Amsterdam.

(Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à M. Alain Bocquet, pour le groupe communiste.

M. Alain Bocquet.

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'Assemblée nationale s'apprête à ratifier le traité d'Amsterdam. L'issue du scrutin ne fait en effet aucun doute, puisque le Gouvernement est assuré de trouver une majorité sur tous les bancs de notre assemblée.

M. Francis Delattre.

Pas chez vous !

M. Alain Bocquet.

Et ce n'est pas là le moindre des paradoxes !

M. Christian Jacob.

Le paradoxe, c'est que les communistes soient encore au Gouvernement !

M. Alain Bocquet.

Certes, le traité d'Amsterdam n'est que la suite logique du traité de Maastricht, lui-même suite logique de l'Acte unique européen, et suite encore


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 3 MARS 1999

de bon nombre de conférences intergouvernementales, le tout faisant suite au traité fondateur de Rome. L'alternance politique en France a fait que les gouvernements successifs ont poussé les feux de l'intégration au nom de cette continuité.

Pendant tout ce temps, la société française s'est radicalement transformée. Le chômage, la précarité et la misère se sont développés dans des proportions considérables, à la mesure de l'explosion, en parallèle, des profits financiers.

Les Françaises et les Français vivent dans leur majorité plus difficilement, et les jeunes générations vivent désormais plus mal que leurs aînés.

Un des phénomènes marquant est sans doute l'irruption de la citoyenneté, s'exprimant comme une demande de plus en plus forte de démocratie à tous les niveaux.

Comment, en effet, ne pas constater cette aspiration grandissante des peuples, du nôtre en particulier, à voir leurs attentes prises en compte ? Comment ne pas répondre à leur volonté que la construction européenne soit élaborée et décidée avec eux ? En esquivant ces interrogations fondamentales, l'on prive assurément les citoyens et les peuples d'Europe de véritables projets qui soient porteurs d'espérance.

M. le Président de la République regrettait, hier, dans son adresse aux députés, que « les peuples ne se sentent pas assez concernés par la construction de l'union européenne ». Alors pourquoi a-t-il refusé obstinément de consulter les Français par référendum ? Cela aurait pourtant été le bon moyen démocratique d'y contribuer.

M. Chirac n'a donc pas permis que se déroule le grand débat national qu'exigeait la ratification du traité d'Amsterdam. Ainsi va-t-on aboutir à la ratification en catimini d'un très mauvais traité que l'Histoire jugera peut-être un jour comme étant le produit mort-né d'un mécanisme institutionnel aux rouages décidément bien grippés.

Les députés communistes, quant à eux, ne craignent pas la confrontation d'idées sur l'Europe. Au contraire, ils l'appellent de tous leurs voeux et souhaitent que chacune et chacun puissent y participer et s'emparer des projets de gauche novateurs et porteurs d'avenir pour tous.

Dans leurs interventions, mes amis Robert Hue, JeanClaude Lefort et Guy Hermier ont eu l'occasion de réaffirmer notre choix, notre volonté et notre projet européen. Après eux, je voudrais revenir succinctement sur quelques-uns des aspects de notre ambition euroconstructive pour l'Europe.

Les députés communistes, qui sont européens, sont naturellement pour l'Europe, pour la construire sans réticences ni arrière-pensées.

En nous engageant dans cette construction, nous appelons une Europe conçue comme un espace moderne de codéveloppement de nations décidant souverainement de partager leurs efforts et leurs destins, capables d'affronter positivement les défis contemporains.

Europrogressistes, nous combattons les politiques, les choix ultralibéraux que l'on voudrait nous imposer, afin de promouvoir d'autres choix qui permettent d'avancer vers l'Europe sociale, l'Europe du progrès humain, de l'égalité, d'une citoyenneté élargie et reconnue, vers une Europe réellement solidaire et pacifique.

C'est le sens de notre proposition tendant à renégocier le pacte de stabilité pour lui substituer un pacte pour l'emploi et la croissance.

De la même façon, nous souhaitons, parmi d'autres m esures, que soit instauré un SMIC européen de 1 000 euros et que soit réduite à 35 heures la durée du travail, sans perte de salaire.

Pour être des artisans actifs sinon volontaristes d'un tel projet, il faut être à l'écoute des citoyens, de leurs inquiétudes et de leurs aspirations. En même temps, le changement en France n'est pas conditionné à l'attente d'une évolution en Europe, car cela serait par trop hypothétique.

C'est en permettant aux citoyens d'être partie prenante de la politique européenne de la France que nous leur rendrons l'Europe. Nous pourrions y contribuer en inscrivant le principe du référendum dans la Constitution avant toute ratification d'un traité. De même, un renforcement des pouvoirs du Parlement européen, notamment le pouvoir de contrôle des institutions, rapprocherait l'Europe de l'ensemble des citoyens.

Cette Europe des nations solidaires que nous appelons pourra s'élargir sur cette base. Car comment s'élargir sans instaurer un grand dialogue sur nos visions, nos histoires et nos cultures et sans faire preuve d'enthousiasme en faveur de la liberté et du progrès humain ? Une telle Europe, qui sera forte, ne sera pas alignée sur les Etats-Unis d'Amérique ou sur un modèle ultralibéral prônant une mondialisation de la guerre économique.

Le traité d'Amsterdam entérine une telle logique libérale. C'est pourquoi nous le combattons comme nous nous sommes résolument opposés au traité de Maastricht.

Le pouvoir appartient au peuple et à lui seul. Il n'appartient pas à notre assemblée de voter en lieu et place de notre peuple, que l'on refuse de consulter, le transfert d'un pan entier de notre souveraineté nationale au profit des institutions communautaires.

Ceux qui s'apprêtent à apporter leur soutien au traité d'Amsterdam sont dans le doute plus que dans l'espérance. Ce sentiment est bien réel.

En cohérence avec leur choix europrogressiste, les députés communistes voteront contre ce projet de loi d'un autre âge.

(Applaudissements sur les bancs du groupe communiste.)

M. le président.

La parole est à M. Maurice Ligot, pour le groupe de l'Union pour la démocratie françaiseAlliance.

M. Maurice Ligot.

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'UDF a une longue tradition de soutien à la construction européenne. C'est, de sa part, une conviction profonde, non une attitude de circonstance.

Rappelons-nous que les premiers pas de l'Europe, au sortir de la Seconde Guerre mondiale, ont été accomplis grâce aux initiatives de ses grands anciens. Elle n'a cessé de veiller sur une construction qui s'échelonne sur un demi-siècle maintenant. Elle y a participé fortement, notamment grâce à l'intermédiaire du Président Giscard d'Estaing. Elle a eu aussi à s'opposer aux attaques des eurosceptiques de toutes origines. En un mot, l'UDF n'a cessé de suivre un cap clair : pour elle, l'Union européenne constitue le cadre indispensable à l'avenir des

Etats européens, les six du noyau d'origine, comme aussi ceux des élargissements successifs et ceux qui, à l'Est de notre continent, aspirent à en devenir membres, pour y jouir avec nous de la paix, de la démocratie et de la prospérité.

Ce n'est pas aujourd'hui que l'UDF va changer de cap à propos de la ratification du traité d'Amsterdam.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 3 MARS 1999

Oh ! bien sûr, l'Europe actuelle n'est pas parfaite : son fonctionnement est extrêmement complexe, lourd et difficilement compréhensible par les citoyens.

Elle n'est pas assez démocratique : on l'a bien vu récemment quand la Commission a été accusée de fraude et de corruption et que le Parlement européen n'a pas trouvé de majorité pour voter une motion de défiance.

Elle n'est pas assez efficace : on le voit bien avec les crises balkaniques que les instances européennes sont incapables de résoudre.

Elle n'est pas assez autonome, notamment par rapport aux Etats-Unis, quand il s'agit de prendre des décisions économiques.

Mais qu'en serait-il si chacun de nos pays était isolé ? Qu'en serait-il des relations franco-allemandes si nos deux pays n'étaient pas intimement associés, comme ils le sont au sein de l'Europe ? Bien sûr, tous les orateurs l'ont dit, le traité d'Amsterdam n'apporte pas ce que l'on attendait de lui en matière de renforcement des institutions européennes, de clarification des compétences et de subsidiarité. Avec le traité, l'Europe avance à petits pas, et sans perspective claire. A la différence du traité de Maastricht, qui a donné un élan à l'Europe en créant l'Union économique et monétaire, le traité d'Amsterdam ne porte pas, en germe, la promesse d'un nouveau dynamisme européen. Et l'UDF ne manque pas de le regretter.

M. Jean-Claude Lefort.

C'est sans doute pour ça qu'elle va voter pour !

M. Maurice Ligot.

Mais loin d'être découragés par ce qui n'est pas dans le traité, ou inquiets de ce qui y figure, nous trouvons dans ces hésitations mêmes des motifs et une conviction pour aller de l'avant. Le succès de la mise en place de l'euro ne peut que nous y encourager.

Il nous paraît indispensable que les dossiers laissés sans solution par la conférence intergouvernementale puissent être rouverts sans tarder, pour que les réformes institutionnelles nécessaires et attendues apportent la preuve de la capacité des Quinze à élaborer les compromis nécessaires. Ce n'est en effet qu'avec des institutions plus fortes et plus lisibles pour les citoyens, par conséquent plus démocratiques, que l'Union européenne sera en mesure de mieux réaliser son élargissement et, au-delà, de faire face aux défis que lui posent les difficultés de notre continent et du monde d'aujourd'hui. C'est pourquoi l'UDF a accueilli avec un intérêt particulier l'amendement du Gouvernement à l'article unique du projet de loi de ratification.

Ce que nous croyons indispensable, dans l'intérêt même de la France, c'est d'aller vers une Europe forte, et notre pays doit être à l'origine des initiatives en ce sens.

Une Europe forte pour faire face à la mondialisation et aux dérives qu'elle peut présenter, comme on le voit avec les crises financières de l'Asie du Sud-Est et de l'Amérique du Sud, et la concurrence que les dévaluations des monnaies de ces pays font peser sur certaines de nos industries et activités économiques.

Une Europe forte pour faire face aux dangers qui la menacent sur le continent même et pour être capable de régler les conflits qui y surviennent, sans qu'il soit besoin de faire appel aux Etats-Unis.

Une Europe forte qui puisse progressivement équilibrer, du point de vue politique et économique, la seule puissance mondiale à l'heure actuelle : les Etats-Unis.

Une Europe forte qui consolide les atouts propres de chacun de ses Etats membres.

Seule une Europe forte pourra assurer ce qui est le but final de cette construction politique : la paix ; assurer des conditions équilibrées de concurrence pour son économie et ses entreprises, donc ses emplois ; assurer l'affirmation de son modèle culturel ; assurer à nos nations respectives un avenir indépendant ; que leur isolement condamnerait.

Seule une Europe forte pourra faciliter vraiment la marche vers un élargissement au Centre et à l'Est.

C'est pour que cette force de l'Europe se construise progressivement que nous considérons le traité d'Amsterdam comme une étape, un petit pas en avant. En votant pour la ratification du traité et pour l'amendement présenté par le Gouvernement, à la suite d'une proposition du Président Giscard d'Estaing, amendement qui traduit l'engagement solennel de la France de réaliser des progrès substantiels dans la voie de la réforme des institutions de l'Union, l'UDF continuera à faire avancer l'Europe.

(Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance ; du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

Avant de donner la parole au dernier orateur inscrit dans les explications de vote, je vais d'ores et déjà faire annoncer le scrutin de manière à permettre à nos collègues de regagner l'hémicycle.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

La parole est à Mme Marie-Hélène Aubert.

Mme Marie-Hélène Aubert.

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la diversité des votes du groupe Radical, Citoyen et Vert sur la ratification du traité d'Amsterdam montre que ce groupe constitue, à lui seul, un véritable laboratoire de la gauche plurielle.

(Rires et exclamations sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

En effet, les Verts voteront contre - pour des raisons diamétralement opposées à celles du Mouvement des c itoyens, qui votera également contre - dans une démarche résolument pro-européenne, fédéraliste, assez voisine, d'ailleurs, de celle de nos collègues du parti Radical de gauche, qui, eux, voteront pour. (Applaudissements sur divers bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

Au-delà de cette pluralité apparaît clairement la difficulté, voire l'inanité d'un tel exercice. Celles et ceux qui étaient présents tard la nuit dernière en gardent un goût amer. Il y a unanimité pour reconnaître l'énorme déficit démocratique qui a caractérisé à l'élaboration de ce médiocre traité, auquel ni les parlementaires nationaux ni nos concitoyens n'ont été associés en quoi que ce soit.

Il faudra bien un jour sortir de la méthode intergouvernementale et d'une gestion technocratique qui ont manifestement atteint leurs limites, si l'on veut rendre l'Europe compréhensible et désirable pour l'ensemble de nos concitoyens. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Yves Cochet.

Très bien !

Mme Marie-Hélène Aubert.

J'en viens au fond.

Le traité d'Amsterdam répond-il d'abord à l'objectif qui lui était assigné : réformer les institutions européennes et préparer l'élargissement ? A l'évidence non, et il y a encore unanimité sur ce point. C'est tellement vrai que le


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Gouvernement, sur la suggestion des parlementaires qui, je le rappelle, ne disposent d'aucun moyen de procédure pour amender la forme ou le fond d'un tel texte -, a proposé un article additionnel qui stigmatise en fait cet échec, en rappelant cet objectif essentiel qui devait être atteint mais ne l'a pas été.

Maigre lot de consolation, car c'est bien d'une Constitution européenne que nous avons besoin, ainsi que d'un débat très large sur le projet européen et sur les champs de compétences que nous voulons organiser par subsidiarité, en allant vers le fédéralisme.

Le traité d'Amsterdam répond-il à nos aspirations et à celles de nos concitoyens (« Non ! » sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République) vers un mode de développement plus soutenable, plus vivable, au service de l'emploi, de la solidarité,...

M. Michel Bouvard.

Non !

Mme Marie-Hélène Aubert.

... de l'écologie, de la ou des cultures face à la sacralisation du marché mondial, de la compétitivité économique, de la consommation individ uelle, voulue par une Organisation mondiale du commerce sous influence américaine libérale, qui devient d e plus en plus une organisation commerciale du monde ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

Non plus, malgré les quelques avancées que nous reconnaissons et les intentions louables affichées ici ou là, difficilement crédibles néanmoins si l'on en juge par exemple par la teneur des négociations actuelles sur la PAC et l'Agenda 2000.

Comment croire en effet que nous allons développer de nouvelles politiques communes en matière d'emploi, d'environnement et de politique étrangère, en prônant le maintien du budget européen à environ 1 % du PNB et en menant une véritable bataille de chiffonniers pour préserver nos acquis sans verser un centime de plus ? Si l'on ne veut pas payer ni investir pour l'Europe, c'est que l'on ne veut pas vraiment de l'Europe.

Allons-nous pourtant laisser à la porte de l'Europe les pays candidats qui voient en elle, à juste titre, un espoir de développement et de paix durable ? Car il y a urgence en ce domaine. Les menaces de conflits sont nombreuses dans l'Europe de l'Est et l'ex-Union soviétique ; il suffit de voir ce qui se passe en ce moment même au Kosovo et dans d'autres régions moins connues des médias. Notre faiblesse politique, notre pingrerie et notre imprévision d'aujourd'hui nous coûteront fort cher demain en vies humaines et en argent. Combien faudra-t-il de Kosovos pour que nous le comprenions et pour qu'une véritable politique étrangère et de sécurité commune soit enfin mise en place ? Le traité d'Amsterdam, faute de volonté politique, n'est pas en mesure de répondre à ces légitimes attentes. Alors, prenons-en acte, changeons de méthode et refondons démocratiquement un pacte européen innovant, dynamique, pour un développement soutenable. Nous en avons enfin la possibilité. A l'heure où treize pays sur quinze sont gouvernés par des majorités qui se revendiquent de la gauche, avec le soutien ou la participation des Verts, le refus d'Amsterdam prend une tout autre tournure et ne peut être perçu comme un repli nationaliste.

Certes, un refus provoquerait une crise, mais ne sommes-nous pas déjà en pleine crise européenne ? Pourquoi, alors, ne pas saisir cette occasion pour construire enfin une Europe politique forte, une Europe à visage humain ? (Applaudissements sur divers bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

Je vais mettre aux voix l'ensemble du projet de loi autorisant la ratification du traité d'Amsterdam.

Je rappelle que le vote est personnel et que chacun ne doit exprimer son vote que pour lui-même, et, le cas échéant, pour son délégant, les boîtiers ayant été cou plés à cet effet.

Le scrutin est ouvert.

....................................................................

M. le président.

Le scrutin est clos.

Voici le résultat du scrutin : Nombre de votants ...................................

532 Nombre de suffrages exprimés .................

522 Majorité absolue .......................................

262 Pour l'adoption .........................

447 Contre .......................................

75 L'Assemblée nationale a adopté.

Suspension et reprise de la séance

M. le président.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures cinquante, est reprise à dix-sept heures.)

M. le président.

La séance est reprise.

3

LUTTE CONTRE LE DOPAGE Transmission et discussion du texte de la commission mixte paritaire

M. le président.

M. le président de l'Assemblée nationale a reçu de M. le Premier ministre la lettre suivante :

« Paris, le 3 février 1999

« Monsieur le président,

« Conformément aux dispositions de l'article 45, alinéa 3, de la Constitution, j'ai l'honneur de vous demander de soumettre à l'Assemblée nationale, pour approbation, le texte proposé par la commission mixte paritaire sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif à la protection de la santé des sportifs et à la lutte contre le dopage.

« Veuillez agréer, monsieur le président, l'assurance de ma haute considération. »

En conséquence, l'ordre du jour appelle la discussion du texte de la commission mixte paritaire (no 1364).

La parole est à M. le rapporteur de la commission mixte paritaire.

M. Alain Néri, rapporteur de la commission mixte paritaire.

Madame la ministre de la jeunesse et des sports, voilà bientôt un an, vous avez fait inscrire à l'ordre du jour du Sénat le projet de loi relatif à la protection de la santé des sportifs et à la lutte contre le dopage. Si l'on tient compte des délais de publication des décrets nécessaires, il faudra bien encore une année pour que soit mis


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 3 MARS 1999

en application ce texte dont la nécessité n'échappe plus à personne, aussi bien au Sénat qu'ici à l'Assemblée nationale, que dans notre pays et même au-delà de nos frontières, grâce à votre action, madame la ministre.

Pourquoi un délai aussi long ? En fait, l'élaboration de la loi fut délicate. Elle s'est enrichie de l'expérience acquise avec les révélations de pratiques de dopage à grande échelle de l'été dernier qui furent l'occasion d'une prise de conscience de l'opinion publique et, je l'espère, d'un examen de conscience de quelques-uns.

Le texte que vous propose la commission mixte paritaire est caractérisé par un équilibre entre efficacité et respect des libertés individuelles. Il pose plusieurs principes.

D'abord, celui d'une prévention qui s'appuie à la fois sur l'information, l'éducation et la formation des sportifs et de leur encadrement, en concertation avec les médecins.

Ensuite, le principe d'un renforcement des mesures répressives disciplinaires à l'égard des « tricheurs » et pénales à l'égard des « dealers », appelés encore « pourvoyeurs » ou même « trafiquants de drogue ».

Mme Martine David.

Des escrocs !

M. Alain Néri, rapporteur.

En un mot, il faut mettre hors jeu les tricheurs et hors d'état de nuire les pourvoyeurs, aussi dangereux et aussi nuisibles que le sont les trafiquants de drogue.

Ce projet pose également le principe d'une meilleure prise en compte des contraintes et des limites de l'organisme humain pour éviter, en particulier par des programmes d'entraînement mieux adaptés et l'élaboration de calendriers d'épreuves moins chargés, un surmenage souvent à l'origine de pratiques de dopage.

Il pose enfin le principe d'une responsabilisation des dirigeants sportifs, des fédérations, des sponsors ainsi que des fabricants de substances pouvant être utilisées à des fins de dopage et celui d'un suivi médical des victimes du dopage et d'une alerte de l'institut de veille sanitaire.

Certaines dispositions proposées au cours des deux lectures précédentes ont suscité des craintes chez certains de nos collègues, qu'ils siègent sur ces bancs ou sur ceux du Sénat, qu'ils appartiennent à la majorité ou à l'opposition. Les points essentiels de désaccord portaient sur : Le devoir d'alerte par la transmission des symptômes de dopage à la cellule médicale en charge de recenser les informations sur le dopage et de proposer un suivi médical des sportifs concernés - afin de protéger une personne qu'à juste titre on peut considérer comme en danger, nous pensons qu'il faut mettre en oeuvre effectivement cette alerte ; Le pouvoir d'injonction du conseil de prévention et de lutte contre le dopage à l'égard des fédérations ; Le pouvoir d'injonction thérapeutique des fédérations à l'égard des sportifs dopés ; L a durée de l'instruction et des procédures des contrôles antidopage.

Le débat et la réflexion ont permis de trouver un accord sur ces quatre points.

La transmission de médecin à médecin des informations relatives aux cas de dopage ne déroge pas au principe du secret médical dont les limites sont fixées par la loi, il est sans doute nécessaire de le rappeler encore aujourd'hui.

En second lieu, il appartiendra au conseil de prévention et de lutte contre le dopage de veiller à ce que la vigilance de chaque maillon de la chaîne sportive - du club sportif jusqu'aux services ministériels - ne soit pas en défaut en leur rappelant, directement ou indirectement, s'il le faut, quels sont leurs droits et leurs devoirs.

En revanche, l'injonction thérapeutique a été considérée comme une mesure relevant d'un pouvoir excessif à l'échelon d'une fédération. Aussi a-t-il été décidé, c e qui revient en fait au même, de subordonner le renouvellement de la licence d'un sportif désirant reprendre une activité sportive à la réalisation d'un suivi médical et à l'accord de la cellule médicale.

S'agissant de la durée des procédures, un accord a été trouvé en commission mixte paritaire sur une solution médiane entre les positions initiales du Sénat et de l'Assemblée nationale. La durée retenue permettra une action à la fois efficace et raisonnable en limitant la période pendant laquelle le sportif est dans l'incertitude, soit parce qu'il essaie de « tirer un peu sur la corde » pour gagner du temps - pardonnez-moi l'expression -, soit parce qu'il est confronté au laxisme de fédérations ou d'organismes liés au contrat.

La rédaction de l'article 19, peut-être adoptée trop vite dans l'enthousiasme qui animait la commission pour trouver un texte commun, n'est pas cohérente puisqu'elle permet au CPLD d'exercer son autorité sur les fédérations non agréées.

A ce détail près, que nous ne manquerons pas de corriger dès que l'occasion se présentera - le Gouvernement peut même le faire dès maintenant s'il le désire -, il m'est agréable de vous présenter un texte qui ne manquera pas, j'en suis certain, de faire l'objet d'un vote unanime de notre assemblée, comme ce fut le cas en commission mixte paritaire.

Je ne voudrais pas finir sans revenir sur un point que j'avais soulevé en première lecture. Il s'agit de la nécessité de prendre en considération la « mondialisation » du sport par l'établissement de règles communes à tous les pays et, pourquoi pas, notamment celles que contient notre projet de loi. Or, grâce à vous, madame la ministre, la France n'est plus isolée dans cette lutte pour la protection de la santé des sportifs et contre le dopage, comme le montrent les travaux de la Commission européenne et de la Conférence de Lausanne à laquelle vous venez de participer. L'Italie met également en chantier une loi qui pourrait s'inspirer de celle que nous allons adopter ; l'Espagne se montre aussi intéressée. Les idées cheminent, et elles vont même plus vite qu'on osait l'espérer.

La France se trouve donc dans le peloton de tête de ceux qui entendent assurer un « sport net », une compétition juste, équitable et une protection de la santé publique. Elle en est même l'initiatrice. C'est la fierté du sport français et l'honneur de la France.

Cette loi est faite pour les sportifs, pour les aider, pour les défendre, pour les protéger contre ceux qui, négriers des temps modernes, les exploitent sans scrupule et sans vergogne, mettant en danger leur santé et même leur vie.

Cette loi, nous l'avons voulue, nous l'avons construite avec vous, madame la ministre, et nous la voterons parce que nous aimons les sportifs et le sport, dont nous respectons les valeurs. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 3 MARS 1999

M. le président.

La parole est à Mme la ministre de la jeunesse et des sports.

Mme Marie-George Buffet, ministre de la jeunesse et des sports.

Monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les députés, nous voilà arrivés au terme du travail parlementaire sur le projet de loi que j'ai eu l'honneur de vous présenter.

Ce travail a été d'une grande qualité. Il s'est déroulé dans un esprit constructif, responsable, et il a permis d'enrichir véritablement les propositions du Gouvernement. Je tiens à en remercier tout particulièrement les membres de la commission, son rapporteur et son président.

Je veux également relever comme essentiel le fait que, au-delà de nos différentes sensibilités, un accord profond se soit dégagé autour d'un engagement associant étroitement un enjeu de santé publique et les valeurs que le sport doit porter. J'ai la conviction que l'unanimité des deux assemblées, qui s'est retrouvée au sein de la commission mixte paritaire, n'est pas une unanimité de circonstance liée à la médiatisation de telle ou telle affaire de dopage. Ce rassemblement de la représentation nationale est à l'image de l'attachement des Françaises et des Français à une certaine idée du sport.

Le sport doit être une source d'épanouissement et non d'asservissement, un moyen de liberté et non de dépendance, une porte ouverte sur la citoyenneté et non une école de la tricherie. J'ajoute que, dans le contexte d'une lutte contre le dopage qui a pris une nouvelle dimension européenne et internationale, l'unanimité du Parlement sur des choix d'une grande portée a été un atout de premier plan.

Certes, nous nous garderons bien de donner à la nouvelle loi une valeur de modèle applicable à d'autres réalités. Pour autant, je crois que nous devons bien mesurer à quel point l'attitude déterminée de la France, en particulier à travers le vote de cette nouvelle loi, a permis de porter le débat au niveau international sur des bases claires et d'aboutir à une position commune des quinze pays de l'Union européenne.

C'est avec la même détermination que la France contribue au travail engagé en vue d'aboutir à la mise en place d'une Agence internationale contre le dopage indépendante et transparente. A ce propos, je dois dire que les débats auxquels a donné lieu, dans cette assemblée, la création d'une haute autorité indépendante, ont été d'une grand utilité pour faire prendre en compte une donnée majeure : la lutte contre le dopage doit pouvoir résister à toutes les tentatives de pressions, qu'elles soient économiques, politiques ou sportives.

S'inspirant de cette démarche, la France a formulé une série de propositions précises sur le statut, les missions et le fonctionnement de l'Agence internationale. Nous proposons, en particulier, que la composition et le financement de cette agence se traduisent par une implication des Etats, au côté des instances sportives internationales, notamment du Comité international olympique.

Je le répète ici avec beaucoup de force : la lutte contre le dopage se mènera et se gagnera avec le mouvement sportif. Je devrais dire qu'elle se mène déjà, qu'elle se gagne déjà avec le mouvement sportif. Je pense, par exemple, et je tiens à leur rendre hommage, aux relayeurs qui ont porté la flamme d'un sport net, de Paris jusqu'à la Conférence de Lausanne, à l'initiative du Comité olympique français.

Plus généralement, il faut saluer l'engagement du CNOSF, dont témoigne, notamment, la mise en place d'une agence de prévention contre le dopage et la campagne de prévention conjointe entre le CNOSF et le ministère de la jeunesse et des sports.

Je pense également aux centaines d'initiatives, de manifestations sportives, de rencontres, de débats, organisés par des clubs, des communes, des fédérations, des associations. Cette mobilisation, qui est nouvelle, est significative de la prise de conscience de la gravité du fléau et de la nécessité d'agir ensemble. Ensemble, c'est-à-dire côte à côte, sans confondre les rôles et responsabilités de chacun.

Ceux du Gouvernement et ceux du mouvement sportif sont complémentaires.

Oui, mesdames, messieurs les députés, une dynamique s'est créée ! Non, ce mouvement n'isole pas la France ! Non, et j'y insiste, cette lutte contre le dopage ne se traduit pas par un recul des résultats de la France dans les compétitions internationales. C'est le refus d'un combat éthique qui aurait été pénalisant et nous aurait fait reculer.

Nous avons, vous avez fait un autre choix. Un choix de société, car le sport est bien un élément constitutif d'une culture, d'une identité, d'un humanisme. Et, à travers ses principales orientations et innovations, le projet de loi issu de vos travaux s'inscrit dans une vision du sport avant tout humaine.

Vous avez fait le choix de la priorité absolue à la prévention. La place de la santé et de la médecine est revalorisée, dans le respect du secret médical et des rapports de confiance entre un sportif et son médecin.

Vous avez fait le choix d'une lutte sans concession contre ceux qui organisent le dopage, qui en tirent profit et qui sont restés trop longtemps impunis.

Vous avez fait le choix de la transparence et de l'efficacité en donnant au Conseil national de lutte contre le dopage un statut d'autorité indépendante et de véritables pouvoirs.

Cette loi, nous devons la mettre en oeuvre sans tarder.

Soyez persuadés que le ministère de la jeunesse et des sports se donnera les moyens budgétaires supplémentaires nécessaires. Le Conseil national indépendant sera en place bien avant l'été, je l'espère. Je sais que je peux compter sur votre soutien pour la mise en oeuvre de cette loi.

Bien évidemment, si cette nouvelle loi est indispensable, nous savons qu'elle ne suffira pas. Les dérives qui guettent l'éthique du sport ne se résument pas au dopage.

Les menaces qui pèsent sur cette humanité du sport que j'évoquais sont multiples. Il y a réellement de quoi être inquiet et alarmé quand s'organise un commerce sur des jeunes sportifs de dix à quinze ans,...

M. Alain Néri, rapporteur.

Très juste !

M me la ministre de la jeunesse et des sports.

... quand certains clubs, parmi les plus prestigieux du patrimoine sportif, sont à la merci d'une opération boursière, quand se dessine la perspective d'un match entre deux filiales d'un même groupe,...

M. Alain Néri, rapporteur.

Tout à fait !

M me la ministre de la jeunesse et des sports.

... quand les budgets les plus riches du moment espèrent trouver leur salut en négociant de façon « perso », comme on dit dans le sport, les droits de retransmission, sans se préoccuper de la situation des clubs moins fortunés,...

M me Martine David.

C'est l'esclavage des temps modernes !


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 3 MARS 1999

Mme la ministre de la jeunesse et des sports.

... ou quand certains transferts atteignent des montants qui ne correspondent à aucune réalité économique.

Ces menaces sont autant de défis que le Gouvernement a la volonté de relever avec les acteurs et les actrices du sport, en France et au niveau de l'Union européenne, comme en a décidé, sur la base de ma communication, le conseil des ministres de ce matin. Il faut que tous les gouvernements de l'Union européenne se mobilisent pour garder au mouvement sportif ses structures, son rôle social et citoyen. Je dois vous dire, mesdames, messieurs les députés, que dans l'état actuel de sa rédaction, le document issu de la Commission européenne ne correspond pas au mandat que lui avait confié le conseil des c hefs d'Etat et de gouvernement de Vienne en décembre 1998 et selon lequel elle devait travailler à la sauvegarde de ces structures sportives. Nous avons donc encore un grand chantier à ouvrir en France et au plan européen.

M. Robert Pandraud.

Absolument !

Mme la ministre de la jeunesse et des sports.

Le projet de loi sur le sport que je souhaite vous présenter dans les mois qui viennent portera cette ambition. C'est tout le sens de mon engagement. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste, du groupe socialiste, du groupe Radical, Citoyen et Vert et sur divers bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

Discussion générale

M. le président.

Dans la discussion générale, la parole est à M. André Aschieri.

M. André Aschieri.

Monsieur le président, madame la ministre, chers collègues, le dopage existe. Chacun peut y être confronté dans sa pratique sportive, quel qu'en soit le niveau.

Nier le dopage reviendrait à le cautionner ou, ce qui serait plus grave, à admettre qu'il est inévitable. C'est pourquoi nous attendons avec impatience que ce texte de loi soit définitivement voté. Il permettra de lever un certain nombre de tabous et de dispenser une meilleure information afin de mieux prévenir. Nous devons mener le combat contre le dopage en pensant à tous ces jeunes pour qui le sport est encore porteur de valeurs et de repères.

Cet été fut celui de tous les espoirs et de toutes les désillusions. La France du football a remporté la Coupe du monde. On a vu s'exprimer dans son sillage des valeurs de solidarité exemplaires, des joies partagées par toute une nation « joliment métissée », comme on a pu le lire. Peu de temps après, le Tour de France nous rappelait que le sport cache parfois de tristes vérités.

La France compte actuellement, toutes disciplines confondues, 13 millions de licenciés, sans compter ceux qui pratiquent le sport en passe-temps. Les activités sportives sont reconnues comme un facteur important de développement personnel, d'équilibre, de santé et d'épanouissement de chacun.

Redonnons au sport un crédit en brisant la spirale infernale du dopage.

Le dopage, c'est une atteinte à l'éthique du sport, un détournement des valeurs humaines que le sport doit porter. Il est intéressant de souligner que les affaires de dopage ne concernent jamais les compétitions « Handisport ». Ces compétitions seraient-elles le dernier endroit où le sport n'est pas uniquement un problème de technique et d'argent, mais où il demeure l'expression du dépassement de soi, une somme d'efforts et de victoires durement obtenues ? Ce sont ces compétitions qui intéressent le moins les sponsors. Est-ce une simple coïncidence ? Le mariage de l'argent et du sport est néfaste. Il est à l'origine des pressions insupportables que subissent les athlètes. L'argent corrompt tout. On ne devrait plus inciter le sportif à devenir champion pour gagner de l'argent.

Il y a dans ce domaine encore beaucoup de réformes à faire. Votre propos liminaire, madame la ministre, nous a prouvé que vous allez vous atteler à cette tâche difficile.

Le sport joue un rôle irremplaçable auprès des jeunes dans l'apprentissage des valeurs et du goût de l'effort.

Auprès de certaines populations en difficulté, le club sportif reste le dernier lieu de socialisation quand la famille et l'école ont échoué. Il reste le dernier lieu d'éducation et de transmission des valeurs. C'est dire que les dirigeants sportifs doivent être pour les jeunes des exemples, des références.

Prévenir et éduquer, plutôt que dénoncer, n'est-ce pas une dimension essentielle de notre mission envers la jeunesse ? Je rencontre souvent des jeunes sportifs dans ma circonscription. Pour eux, le sportif de haut niveau représente le pari de l'harmonie entre le corps et l'esprit et aussi celui de la réussite sociale. Préservons, par l'éducation, cette adhésion à la vraie nature du sport et à la morale qui se situe obligatoirement dans le respect de la règle, des autres et de soi-même. Comment accepter que la tricherie devienne pour ces jeunes l'exemple du chemin à suivre pour gagner ? J'ai peur que la plupart d'entre eux ne redoutent pas les conséquences du dopage pour leur santé. Considérant que la pratique du sport leur permet de « s'éclater », comme ils disent, de profiter de la gloire et de l'argent, ils ne se soucient pas de l'avenir. Ils pensent qu'il leur faut gagner et que pour gagner, pour réaliser des performances de plus en plus extraordinaires, ils sont obligés de tricher. Désabusés, sans espoir, quelques-uns pensent que l'avenir n'existe pas. Ils changeront d'avis, fort heureusement, plus tard, mais la prévention est primordiale pour que ces jeunes athlètes ne compromettent pas le reste de leur existence.

Cette sensibilisation à la santé doit déjà se faire au travers du système scolaire. Elle doit être le fruit de l'exercice d'une responsabilité partagée. Les parents et les éducateurs doivent y participer. Le dopage est un aveu de faiblesse pour l'athlète, mais il est surtout un signe d'ir-r esponsabilité pour ses entraîneurs qui n'ont pas confiance en ses capacités de progression. C'est peut-être aussi de l'inconscience et un refus de croire dans les dangers du dopage.

Seule l'action éducative, indispensable pour les sportifs et leur entourage, permettra l'évolution des mentalités et des comportements. Elle seule protégera nos futurs sportifs.

La sensibilisation auprès des jeunes passe aussi par deso pérations dans les cités populaires. Nous saluons, madame la ministre, votre initiative

« 1,2,3... à vous de jouer » qui, avec d'autres que vous préparez, permettra de concilier le sport, ses valeurs humaines et la fête, et de faire que les jeunes cultivent la générosité, l'esprit de tolérance et cette fraternité que nous avons vu s'exprimer à l'occasion de la Coupe du monde.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 3 MARS 1999

Dans le combat contre le dopage, si la composante répressive est nécessaire et légitime, elle ne doit pas occulter le rôle primordial de la prévention pour les sportifs de haut niveau - comme pour tous les autres.

La priorité dans notre action est la mise en place d'un suivi médical de tous les sportifs, y compris de ceux qui se dopent.

Un sportif convaincu de dopage se retrouve souvent seul, profondément seul. Sa situation devient tragique. Il ne peut avouer sa tricherie sans remettre en cause ses performances, sans dévaluer son titre et surtout sans trahir son club qui l'a aidé à tricher. Trop de tabous existent encore qui l'empêchent de se soigner. Il risque alors de devenir un jeune drogué et, plus tard, un exclu.

C'est pourquoi les députés Verts se félicitent que cette assemblée ait voté à l'unanimité l'injonction thérapeutique que nous avions proposée.

Notre amendement partait du principe que les fautifs étaient davantage des malades à soigner que des tricheurs à punir. Cette disposition obligera le sportif déclaré dopé à rencontrer au moins une fois l'équipe sanitaire. Accepter la réalité du dopage pour mieux savoir le soigner est notre objectif. Il est important d'ouvrir un espace de dialogue, dialogue toujours nécessaire à la pertinence de la prévention. Donner la parole aux usagers conduira à une meilleure compréhension du problème.

Enfin, madame la ministre, nous attendons votre nouvelle loi sur le sport, qui devrait donner au mouvement sportif les moyens de préserver le sens de la pratique sportive face à la pression des intérêts financiers.

Avant de conclure, les députés Verts tiennent à saluer le caractère exemplaire de votre méthode de travail. Vous avez pris le temps d'associer les parlementaires, tout au long de cette année. Les députés n'ont pas toujours droit à ces égards. Nous tenons à souligner ici votre initiative.

Vous l'avez compris, madame la ministre, les Verts soutiennent sans réserve votre projet de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert, du groupe socialiste et du groupe communiste.)

M. le président.

La parole est à M. Christian Estrosi.

M. Christian Estrosi.

Nous arrivons au terme de ce marathon législatif qui nous assurera, j'en suis convaincu, madame la ministre, la législation efficace, positive, dynamique en matière de dopage, à laquelle s'était d'ailleurs déjà attaqué votre prédécesseur, notre collègue et ami Guy Drut. Vous lui avez emboîté le pas. Nous ne pouvons que vous en rendre hommage. De même que nous saluons l'appel incessant lancé par le Président de la République, Jacques Chirac, pour que la France se dote d'une telle législation.

En première lecture, au Sénat, ce texte n'avait pas attiré les feux de l'actualité. Les événements dramatiques du Tour de France jouèrent le rôle d'un véritable révélateur. Enfin, les circonstances du calendrier sportif le mirent encore plus en valeur. Peut-être même, madame la ministre, ont-elles renforcé votre motivation à porter le message du Parlement français au niveau européen. Je dois d'ailleurs reconnaître que le combat que vous avez entamé, et qui commence à être entendu modestement, constitue une première étape.

Ce texte et cette actualité ont mis fin à l'hypocrisie qui régnait depuis tant d'années dans les milieux sportifs concernant le dopage. C'est tous ensemble et, dans un bon climat, monsieur le rapporteur, à l'Assemblée nationale, au Sénat et plus récemment dans le cadre de nos travaux communs de la commission mixte paritaire, que nous avons abouti au texte présenté aujourd'hui.

Nous ne pouvions plus laisser salir l'image du sport.

Nous en convenons tous ici. La plupart de ceux qui participent à cette séance sont, de fait, des habitués du budget des sports, des passionnés du sport en général et ils s'intéressent à tout ce qui touche, de près ou de loin, au sport qui constitue un véritable phénomène de société.

Le sport est pour nous cette valeur qui s'appuie sur le dépassement de soi-même, sur la volonté de récompenser le mérite. C'est le moyen de mettre nos jeunes sur un pied d'égalité au départ de la vie, de leur apprendre une hygiène de vie, de leur livrer le secret de la performance.

Après les textes de 1965 et de 1989, il fallait mettre fin à l'hypocrisie et aller beaucoup plus loin. Mais pour autant, il fallait éviter de jeter la suspicion sur l'ensemble des milieux sportifs de notre pays. Et c'est pourquoi l'exercice était d'autant plus difficile à réussir.

D'une certaine manière, nos seize millions de licenciés, nos bénévoles, nos responsables d'associations sportives, nos présidents de fédérations se sont sentis quelque peu visés et montrés du doigt lorsque nous avons engagé ce débat. Mais je crois que nous avons su les tenir à l'écart.

La France qui, depuis des décennies, a remporté tant de titres au plan international, ne pouvait pas laisser penser qu'elle les devait à des champions sous l'emprise de produits dopants. Nous savons, en effet, que seule une minorité de sportifs utilise ces produits et il ne fallait pas jeter la suspicion sur nos champions.

Nous sommes donc dotés aujourd'hui d'une législation, mais il vous reste, madame la ministre, un important travail à accomplir au plan européen, car nous devons affronter une forte concurrence. La France apparaît désormais comme le pays le plus sévère, le plus rigoureux, le plus déterminé, et nos journaux spécialisés annoncent déjà que telle ou telle équipe cycliste étrangère ne s'inscrira pas dans un certain nombre d'épreuves du calendrier français.

M. Alain Néri, rapporteur.

Ce sera dommage pour elle !

M. Christian Estrosi.

En effet, mais nous devons aussi mesurer tout le travail qui nous reste et qu'il vous reste à accomplir pour obtenir que l'ensemble des pays de l'Union européenne harmonisent leur législation sur celle dont nous nous dotons aujourd'hui.

Il faut mettre en place les dispositifs issus de cette loi, et faire en sorte qu'ils soient assez efficaces pour lutter contre ce fléau, mais nous devons en même temps faire confiance aux fédérations délégataires. Car nous avons la chance de disposer d'un encadrement et de dirigeants de très grande qualité. Je souhaite d'ailleurs les voir exercer des responsabilités dans les fédérations internationales, au sein du Comité international olympique. Ils sont peutêtre plus sensibilisés que d'autres pour nous aider à mettre en place ces nouveaux dispositifs au plan européen et au plan international.

Il faut aussi que nous nous dotions des moyens scientifiques de contrôle, comme le réclame le mouvement sportif lui-même depuis des années, par des examens capillaires, cliniques, sanguins, proches, par exemple, de ceux auxquels sont soumis les automobilistes.

Certes, le rôle de l'autorité administrative que nous avons créée par ce texte sera considérable. Il convient de préserver le rôle des fédérations et d'accentuer la lutte contre les pourvoyeurs de médicaments, drogues et autres éléments de dopage, qui doit être des plus sévères.

Une dernière fois cependant, après l'avoir fait en première lecture, en deuxième lecture, lors de la commission mixte paritaire, j'appellerai votre attention, madame la


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 3 MARS 1999

ministre et monsieur le rapporteur, sur l'article 3 de ce texte, qui exige que, pour toute manifestation sportive agréée par une fédération délégataire, chaque participant non licencié fournisse un certificat médical ou une copie certifiée conforme.

Vous avez vraisemblablement raison d'imposer ce dispositif. Mais il risque de poser des difficultés. Certains comités des fêtes, ou associations tentent d'animer la vie économique, touristique et sociale de leur village en organisant certains événements sportifs. Député d'une circonscription dotée de très belles stations dans les Alpes d'Azur comme Valberg, Isola 2000 ou Auron, je peux vous en parler.

Lorsque les touristes viennent en vacances et qu'ils inscrivent leurs enfants à des écoles de ski pour leur faire passer une flèche ou un chamois, par exemple ils ne pensent pas forcément, en partant de chez eux, à se faire délivrer un certificat médical qui leur sera réclamé au départ de l'épreuve.

Cela risque d'avoir d'importantes conséquences économiques sur l'activité touristique. C'est la raison pour laquelle, je le souhaite, madame la ministre, qu'on réfléchisse à la mise en place d'une formule susceptible de concilier les intérêts de tous.

Ce texte est bon. Il est le révélateur de certaines difficultés dans le domaine sportif. Il y a quelques instants, madame la ministre, vous nous avez parlé du prochain texte de loi d'orientation sur le sport que vous souhaitez nous présenter. Je crois que la loi sur le dopage constitue une première étape susceptible de nous amener à résoudre d'autres difficultés de la vie sportive de notre pays.

Vous avez parlé des sportifs qui pouvaient être réduits à de simples opérations boursières et j'ai fait un parallèle avec ce texte. Mais prenez le domaine de la fiscalité et l'exemple des clubs professionnels. La France peut-elle admettre plus longtemps, après avoir remporté la Coupe du monde de football, que nos meilleurs joueurs partent pour des clubs étrangers ? Un tel exemple prouve encore une fois que la France, au sein de l'Union européenne, place ses sportifs en position défavorable et en position de déséquilibre.

Des problèmes se posent aussi en matière de droits de télévision - vous y avez fait référence -, de statut des bénévoles. Tous ces problèmes devront être résolus.

Il faudra également regarder de plus près le rôle que peuvent joueur les métiers du sport dans la vie économique de notre pays ; refléchir à une réforme de l'éducation nationale de façon que le sport y soit présent de manière plus active.

Enfin, madame la ministre, il faudra se pencher sur la coordination des moyens mis à la disposition du sport, comme j'avais eu l'occasion de le rappeler lors de l'examen de son budget pour 1999. On avance toujours qu'il ne représente que 0,2 % du budget de l'Etat. C'est que les financements sont dispersés, et donc peu efficaces. Il peut y avoir d'un côté le ministère de la ville et de l'autre celui des affaires sociales. Tel ministère investit dans le sport, réalise des équipements sportifs... Notre loi de décentralisation même ne répartit pas correctement les compétences en matière de sport. Ce sont autant de sujets qu'il nous faudra rapidement aborder.

En conclusion, madame la ministre, si le sport est un formidable révélateur, le sport doit favoriser des repères aux jeunes. A cet égard, nous avons le droit de formuler des exigences.

Peut-on admettre, au moment où nous nous dotons d'une législation sévère, rigoureuse que des personnes appartenant à divers milieux artistiques, intellectuels revendiquent d'avoir joué sur scène sous l'emprise de stupéfiants. Après tout, la consommation de drogues est une forme de dopage et la performance d'un artiste est similaire à celle d'un sportif.

De même, ceux qui appellent à une dépénalisation de la drogue dans notre pays ne peuvent pas continuer dans cette voie au moment où, madame la ministre, vous faite voter à l'Assemblée une loi rigoureuse concernant le dopage dans le milieu sportif.

Mme Martine David.

Décidément, vous gâchez tout !

M. Christian Estrosi.

De même, nous comprendrions mal que le texte sur la sécurité routière que nous allons examiner en deuxième lecture la semaine prochaine, ne sanctionne pas les conducteurs drogués...

M. Alain Calmat.

Vous n'avez pas écouté ce qu'a dit M. Fromion tout à l'heure !

M. Christian Estrosi.

... aussi sévèrement que les conducteurs ivres.

M. Alain Calmat.

Vous avez un double langage !

M. Christian Estrosi.

Voilà les exemples que je souhaite aussi que nous donnions avec ce texte visant à lutter contre le dopage. Madame la ministre, le groupe du Rassemblement pour la République le votera sans réserve.

(Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

Chers collègues, je vous précise que M. Estrosi a bénéficié du désistement des autres membres de son groupe, ce qui lui a permis de parler quinze minutes. Mais cela aurait dû effectivement vous être indiqué.

La parole est à M. Patrick Leroy.

M. Patrick Leroy.

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la commission mixte paritaire qui s'est réunie le 3 février dernier est donc parvenue à un accord unanime sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif à la protection de la santé des sportifs et à la lutte contre le dopage.

Le groupe communiste se réjouit que la France puisse enfin adopter, sous l'impulsion et grâce à la persévérance de Mme la ministre chargée des sports, une législation dans ce domaine.

Je vais m'attacher ici à faire une projection sur l'avenir, car c'est un message d'espoir que j'entends lancer. Je souhaite, en effet, que la mise en application de cette loi se fasse de manière rapide et efficace, dans le respect, bien entendu, de la présomption d'innocence et des droits de la défense. Il en va non seulement de la protection sanitaire des sportifs, et plus généralement de la jeunesse dans son ensemble, mais également du respect des libertés.

J'espère que l'examen médical préalable à la délivrance de la licence sportive sera bientôt pris en charge par la caisse d'assurance maladie dans le cadre du prochain projet de loi de finances.

M. Alain Néri, rapporteur.

Très bien !

M. Patrick Leroy.

Nous avions formulé cette demande en première et seconde lectures de ce texte. Nous réitérons cette proposition aujourd'hui. En effet, le coût de cette mesure, peu important pour l'Etat - 12 millions de


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 3 MARS 1999

francs par an - peut, par contre, peser lourdement dans le budget des familles modestes et contribuer à les exclure ainsi des pratiques sportives.

Je rappelle également que la qualité et la multiplication des suivis et examens médicaux concourent à l'efficacité du dépistage du dopage et à la protection sanitaire des sportifs. Nous souhaitons donc qu'à l'avenir des efforts accrus soient consentis en faveur de la médecine du sport et de sa revalorisation.

Il est nécessaire, en effet, de lui accorder les moyens financiers suffisants pour permettre aux centres de santé de dispenser soins et prévention en un même lieu, de recruter du personnel compétent et d'améliorer leurs équipements.

J'espère que les discussions actuelles entre les ministères de la jeunesse et des sports et de l'éducation nationale déboucheront rapidement sur la nécessaire réforme de la formation en médecine du sport et sur la mise en place d'une coopération interministérielle en matière d'information, de prévention, de formation initiale et continue sur le dopage dans le milieu scolaire.

Espérons aussi que notre législation nationale sera bientôt suivie d'une législation au niveau européen et international, tant l'harmonisation des règles est essentielle dans ce domaine.

La prise de position commune des ministres européens des sports, à l'initiative de Mme Buffet, a amené le Comité international olympique à ouvrir le débat sur le dopage. Une conférence mondiale sur ce sujet s'est donc réunie le 2 février à Lausanne. Elle peut être considérée comme un pas important dans la prise de conscience internationale, puisque c'était le première fois qu'Etats et mouvements sportifs se réunissaient pour débattre de ces problèmes.

La conférence de Lausanne a toutefois fait apparaître toutes les embûches et pesanteurs qui subsistent encore avant de parvenir à une réglementation internationale et à une réelle prise en compte de ce phénomène négatif de notre société, extrêmement nocif chez les jeunes.

J'exprime donc comme dernier voeu que les ministres des sports et les gouvernements européens concernés organisent rapidement des réunions de travail pour dégager les principes d'une harmonisation des législations en vue de la prochaine conférence internationale prévue en mai prochain.

Le travail conjoint des gouvernements et du mouvement sportif - Comité national olympique sportif français compris - devrait aboutir à la création d'une antenne internationale de lutte contre le dopage, structure totalement indépendante du point de vue de l'appréciation du ou des cas soulevés et des moyens financiers nécessaires à l'accomplissement de sa mission, ainsi qu'à l'instauration de règles internationales communes en matière de prévention, de suivi médical, de sanctions, de procédures et de calendriers sportifs.

Je suis convaincu que tous ces souhaits et ces espoirs seront exaucés, connaissant, madame le ministre, votre inlassable volonté d'y parvenir. C'est pourquoi le groupe communiste votera ce texte.

(Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à M. Edouard Landrain.

M. Edouard Landrain.

Comme l'a dit si bien Michel Voisin : « Depuis le temps qu'on en parlait, il fallait bien que cela arrive ! » (Sourires.)

Le texte va être voté à l'unanimité, et c'est bien ainsi. Il est vrai que le débat a été fructueux et que tout le monde a pu y participer. Vous avez eu, madame la ministre, l'intelligence de retenir un certain nombre de suggestions émanant de tous les bancs.

Nous sommes ainsi parvenus à un bon texte.

Je retiendrai un premier point fondamental, cette loi s'adresse surtout aux sportifs et traite du respect qui leur est dû.

M. François Rochebloine.

Très bien !

M. Edouard Landrain.

La présomption d'innocence, omniprésente, est tout aussi fondamentale. L'anonymat est préconisé partout, dans les relations médicales comme avec les fédérations et avec tous les intervenants. C'est une avancée considérable.

Un autre progrès a été obtenu en matière d'information. Vous avez eu la courtoisie d'accepter, madame la ministre, un de nos amendements qui traitait du problème de la télévision, des médias d'une façon général e. Nous avons voulu qu'ils soient associés définitivement, dans le cadre de la loi, aux efforts que nous ferons contre le dopage et pour la santé des sportifs français. Désormais, on ne pourra plus opposer des impossibilités, techniques ou autres, pour refuser de participer à des campagnes portant sur la santé des sportifs et du sport tout court.

Vous avez également introduit dans le texte une charte de bonne conduite. Cet ajout me plaît car il permet de responsabiliser. Qui accepte de bien se conduire se sent, en effet, responsable. C'est vrai pour les jeunes sportifs, pour les médecins, pour les dirigeants, pour les bénévoles.

On doit se sentir responsable et respecter un code de bonne conduite.

A propos des médecins, nous avons insisté, à l'article 3 en particulier, sur le secret médical mais aussi sur l'obligation faite aux médecins de s'informer et de transmettre les informations. Il est même prévu, par l'intermédiaire de l'ordre des médecins, d'éventuelles sanctions, car qui aime bien châtie bien.

M. François Rochebloine.

Très bien !

M. Edouard Landrain.

Il s'agit là encore d'une avancée considérable tant il est vrai qu'il faut aussi savoir menacer et contraindre et que nous aurions pu manquer de courage pour le faire.

Par contre, le droit à la perquisition a été refusé, sous l'impulsion, notamment, de M. Leonetti. C'est une très bonne chose. On ne peut pas, en effet, avoir le droit de perquisitionner quand il s'agit de problèmes médicaux. Il fallait respecter la déontologie.

De même, nous ne pouvons que nous réjouir de l'introduction du livret individuel. Cette sorte de livret médical suivra les jeunes sportifs et pourra leur apporter un certain nombre de renseignements les concernant.

Le fait que les membres du Conseil de prévention et de lutte contre le dopage soient obligés de prêter serment me paraît également important. Cela donnera une certaine solennité à leur action.

J'apprécie aussi que la cellule scientifique soit tenue de participer à la veille sanitaire.

Je me félicite que, dans son article 11 bis, le texte prévoit que la liste des produits interdits soit la même pour t outes les fédérations, quel que soit leur mode d'utilisation.

Oui, madame la ministre, nous allons voter une bonne loi mais elle ne pourra pas rester franco-française.

M. François Rochebloine. Très bien !


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 3 MARS 1999

M. Edouard Landrain.

La France ne doit pas donner l'impression d'être un îlot de vertu - ou de naïveté - au milieu d'un océan d'hypocrisie, cette hypocrisie qui règne en maître à travers le monde quand il s'agit de sport et de moyens artificiels pour obtenir des performances.

Beaucoup de travail vous attend encore. Il va notamment vous falloir aider les instances dont vous parliez tout à l'heure - le CNOSF, le CIO, enfin sensibilisés au problème. Il va vous falloir, peut-être en vous appuyant sur les textes que nous avons votés, montrer que l'on peut voir les choses sainement au lieu de s'assoupir dans le plaisir des résultats et n'envisager le problème qu'au travers de considérations financières haïssables.

Désormais, c'est la vigilance qui l'emportera, et d'abord en matière médicale. Les laboratoires devront être particulièrement surveillés : ceux qui sont chargés des analyses mais aussi ceux qui fabriquent les médicaments. Je veux parler de ces laboratoires internationaux, pas toujours bien contrôlés, et qui fournissent les pourvoyeurs, auxquels a fait allusion notre ami Néri. Eux, méritent d'être très lourdement sanctionnés. Le sportif doit être respecté, parfois excusé, mais le pourvoyeur doit toujours être puni, très sévèrement puni.

M. Alain Néri, rapporteur.

Très bien !

M. Edouard Landrain.

A cet égard, François Rochebloine avait proposé l'amnistie pour tous les délits antérieurs. Personnellement, je trouvais cela très bien et je regrette que l'on n'ait pas eu l'élégance de le faire, car parmi les sportifs qui ont succombé, certains ont été trompés. La loi n'existait pas.

M. Alain Calmat.

Si !

M. Edouard Landrain.

Elle était en tout cas mal faite puisque nous légiférons à nouveau !

M. Alain Calmat.

Non, elle était mal appliquée, c'est autre chose !

Mme Martine David.

De toute façon, il n'y a pas que des naïfs parmi les sportifs en question !

M. Edouard Landrain.

En tout état de cause, j'ai bien compris les raisons qui ont poussé à ne pas accepter ce geste de clémence. En effet, certains sportifs avaient déjà été punis, tandis que d'autres ne l'auraient pas été. C'étai t difficile. Cela reste cependant un petit regret.

Pour conclure, je dirai qu'il y a encore beaucoup de pain sur la planche. Vous avez parlé de la loi sur le sport.

Mais il faudra aussi, madame la ministre, se préoccuper du bénévolat, du milieu associatif, de la décentralisation en matière sportive - une décentralisation enfin réussie -, de l'école et de l'apprentissage du sport à travers l'enseignement, d'une bonne fusion entre l'éducation nationale et le monde sportif - nous en sommes loin aujourd'hui ! Toujours dans cet esprit de salubrité publique en quelque sorte, je souhaiterais aussi que l'aide aux petits clubs soit accentuée et que la convivialité sur les stades soit respectée. Comment peut-on comparer la consommation de drogue et d'alcool quand il s'agit d'alcool traditionnellement, régionalement admis ?

M. François Rochebloine.

Et consommé sans abus !

M. Edouard Landrain.

C'est aussi cela notre culture ! Je ne vous ferai pas l'injure de parler ici des buvettes.

(Sourires.)

M. François Rochebloine.

Si, si !

M. Edouard Landrain.

Ce n'est pas le moment. Mais le problème est bien réel et il nous faudra l'aborder à nouveau, lucidement, en ayant à l'esprit que cela fait partie de notre vie, indépendamment de l'aide financière considérable ainsi procurée.

Madame la ministre, nous voterons ce texte avec enthousiasme, en espérant que nous serons copiés à travers le monde, et que ce que nous avons mis en place ici pourra servir à l'avenir pour que le sport retrouve enfin toute sa dignité. Ainsi, les enfants qui viendront demain n'auront pas les soucis que l'on aurait pu craindre pour eux, compte tenu des mauvais exemples qui ont pu être donnés. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

M. le président.

La parole est à M. Jean-Claude Beauchaud.

M. Jean-Claude Beauchaud.

Nous en sommes au troisième passage du texte dans cet hémicycle. Aussi, je serai très bref, surtout après l'excellente présentation qui a été faite par vous-même, madame la ministre, et par notre rapporteur, Alain Néri. Comme lui, je me plais à souligner votre méthode de travail. Souvent, on déplore que les textes n'aient pas été suffisamment « pétris » avant leur phase finale. Tel n'est pas le cas de celui-ci, qui a fait l'objet d'un travail approfondi tant en commission qu'en séance publique. Et c'est ainsi qu'à l'issue de son examen en CMP, il donne satisfaction à tout le monde. Je ne reviendrai donc pas sur son contenu. Je m'attacherai plus au symbole.

En fait, cette loi est comme un chemin. On en a commencé le tracé il y a quelques mois maintenant, et cela vous a servi dans vos relations européennes et internationales. Il est important qu'en la matière notre pays donne l'exemple. Nous avons donc tracé le chemin, et je suis persuadé que de nombreuses nations attendaient que nous le fassions. Nous avons, en effet, souvent servi d'exemple, c'est dans notre culture. Il suffit de regarder ce que font les Italiens ou de savoir que les Espagnols, qui étaient bien loin de là, il y a seulement un an, c ommencent également à s'interroger pour s'en convaincre. Vous les rencontrerez d'ailleurs dans peu de temps. Cela prouve que la France peut encore donner l'exemple en la matière.

Mais il ne faut pas en rester là. Quelqu'un a rappelé qu'il existait déjà une loi sur le dopage qui n'avait rien empêché. C'est vrai. Les événements ne portent pas à croire qu'il en ira de même pour celle-là. Il importe, en tout cas, qu'elle puisse trouver son plein épanouissement dans tous les domaines qu'elle traite. Ce texte prendra toute sa valeur si toute la communauté sportive est, comme nous, attachée à préserver la santé des sportifs. La communauté sportive, ce sont avant tout les pratiquants.

M. Henri Nayrou.

Bien sûr !

M. Jean-Claude Beauchaud.

Mais cela comprend aussi les fédérations sportives, le monde médical, les laboratoires, les supporters. Et, dans cet ensemble, il ne faut pas oublier les médias. Ceux-ci ont accompli un très important travail d'information et peuvent continuer à nous aider dans cette voie.

Si nous voulons que, demain, le sport conserve son rôle éducatif et social dans notre société moderne, nous devons nous donner les moyens de faire appliquer très rapidement cette loi. Dès lors, comment, en effet, ne pas souligner l'ampleur du travail qu'il reste à accomplir ? Actuellement tout va très vite. Les événements que l'on sait se sont enchainés après votre présentation au Sénat


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 3 MARS 1999

de ce texte en première lecture. Et je suis tout aussi inquiet que vous, madame la ministre. Je ne voudrais pas que, demain, les jeunes de quinze ans soient réduits à l'état de ces bêtes de concours que l'on voit au salon de l'agriculture.

M. Henri Nayrou.

Belle image !

M. Jean-Claude Beauchaud.

Je ne voudrais pas que des enfants de quinze ans puissent avoir une étiquette, être achetés, pour se retrouver ensuite, au gré de l'argent, en Italie, en Angleterre ou que sais-je encore ?

Mme Martine David.

Ou être cotés en bourse !

M. Jean-Claude Beauchaud.

Ou être cotés en bourse ! Nous devons nous attacher à préserver l'avenir des jeunes sportifs si nous voulons que le sport, qui, je le répète, est un formicdable moyen d'évolution et d'insertion sociale, garde la valeur éducative qu'il a toujours eue.

C'est à la sauvegarde de cette valeur que nous voulons travailler avec vous.

C'est dans cet esprit que le groupe socialiste votera le projet de loi sur le dopage, tout en sachant bien que beaucoup reste à faire pour que le monde sportif évolue.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste, du groupe Radical, Citoyen et Vert et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

M. le président.

La parole est à M. Denis Jacquat.

M. Denis Jacquat.

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la commission mixte paritaire, réunie le 3 février dernier, a trouvé un accord sur les dispositions restant en discussion du projet de loi.

Nous ne pouvons que nous en réjouir.

Nous notons, tout d'abord, que la surveillance médicale des sportifs est renforcée.

Des antennes médicales de lutte contre le dopage seront agréées par les ministères de la santé et des sports.

Elles organiseront des consultations ouvertes aux personnes ayant eu recours aux pratiques de dopage et leur proposeront la mise en place d'un suivi médical.

La délivrance d'une licence sportive sera subordonnée à la production d'un certificat médical attestant l'absence de contre-indication à la pratique des activités physiques et sportives. Comme M. Leroy, je souhaite qu'un jour ce certificat soit délivré gratuitement.

J'indique aussi - ce n'est pas dans le texte, mais c'est dans les esprits - que celui-ci devra être renouvelé tous les ans. La délivrance de chaque licence sportive sera subordonnée à la production d'un nouveau certificat.

C'est le cas actuellement car, ne l'oublions pas, une contre-indication peut apparaître entre-temps. Je le précise car certains auraient voulu des licences à vie.

Un certificat médical sera également nécessaire pour la participation aux compétitions sportives.

La participation aux compétitions sportives organisées ou agréées par les fédérations sportives est subordonnée à la présentation d'une licence. Pour les non-licenciés auxquels ces compétitions sont ouvertes, la présentation d'un certificat ou de sa copie certifiée conforme datant de moins d'un an sera exigée. Cela est indispensable.

M. Alain Néri, rapporteur.

Très bien !

M. Denis Jacquat.

Quand nous entendons dire que des personnes non licenciées peuvent participer à des compétitions sportives, nous ne pouvons qu'être surpris. En cas de décès, qui serait responsable ?

M. Alain Néri, rapporteur.

C'est de l'inconscience !

M. Denis Jacquat.

Nous devons prendre nos responsabilités et nous les avons prises.

En matière de surveillance médicale des sportifs, le texte définit différentes obligations.

Voyons d'abord les obligations des médecins.

Tout médecin qui décèlera des signes trahissant une pratique de dopage sera tenu de refuser la délivrance d'un certificat médical. Il informera la personne des risques qu'elle court et, soit la dirigera vers une antenne médicale de lutte contre le dopage, soit, en liaison avec celle-ci, lui prescrira des examens et un suivi médical.

Le médecin - c'est un point très important - transmettra obligatoirement au médecin responsable de l'antenne médicale les constatations qu'il a faites. Le secret médical sera ainsi respecté.

M. Jean Le Garrec, vice-président de la commission mixte paritaire.

Très bien !

M. Denis Jacquat.

Tout cela s'effectuera - nous l'avons dit et répété - dans le cadre de la médecine d'aptitude au sport.

Examinons maintenant les obligations des fédérations sportives.

Les fédérations sportives sont tenues de veiller à la santé de leurs licenciés. Elles devront prendre à cet effet toutes les dispositions nécessaires pour améliorer les programmes d'entraînement et le calendrier des compétitions. Nous savons que c'est l'importance du calendrier qui très souvent entraîne la pratique du dopage chez les sportifs. Elles développeront également auprès des licenciés une information de prévention du dopage.

Venons-en enfin aux obligations du sportif. Les sportifs qui participent à des compétitions devront en informer les médecins qui les suivent, notamment lors des consultations médicales donnant lieu à prescription. Très souvent, ils l'oublient.

La protection de la santé des sportifs est le premier grand chapitre du projet de loi. Le second est la prévention de la lutte contre le dopage. Les deux sont complémentaires, indissociables.

Concernant la prévention et la lutte contre le dopage, je dis et nous disons oui à la mise en place du conseil de prévention et de lutte contre le dopage, à sa composition, à ses missions de prévention et de contrôle, oui à la lutte contre les agissements interdits, oui aussi à la mise en p lace de sanctions administratives et pénales. Bref, madame la ministre, nous disons oui à tout ce qui est prévu en la matière.

Cependant, j'appuierai la réserve exprimée tout à l'heure par notre ami Edouard Landrain : ce texte de loi ne doit pas rester « franco-français ». Le sport est un phénomène mondial. Nous allons marquer ce jour d'une pierre extrêmement importante pour notre pays en affirmant notre volonté de lutter contre le dopage, mais il ne faudrait pas que les autres pays restent, comme la lecture de la presse nous le fait craindre, dans l'hypocrisie dans laquelle ils se sont enfermés. Par vos déclarations, par votre présence à Lausanne et ailleurs, madame la ministre, vous avez montré votre volonté de « mondialiser » la lutte contre le dopage. On ne peut certes dicter leur politique aux autres pays, mais nous vous demandons de continuer dans la voie dans laquelle vous vous êtes engagée.

Pour conclure, le groupe Démocratie libérale et indépendants votera le projet de loi. J'ajoute, à titre personnel, que notre travail en commun s'est déroulé de


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manière parfaite. Je souhaite ardemment qu'il en soit ainsi pour les textes futurs.

(Applaudissements sur tous les bancs.)

M. le président.

La parole est à M. Calmat.

M. Alain Calmat.

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, à cette étape ultime de la discussion du projet de loi relatif à la protection de la santé des sportifs et à la lutte contre le dopage, nous ne pouvons que nous féliciter du remarquable parcours accompli par le Gouvernement et les deux assemblées, qui a permis l'élaboration d'un texte que je qualifierai de fondamental, dont les répercussions se font déjà sentir non seulement dans notre pays mais également sur le plan international.

Nous avons, madame la ministre, apprécié vos interventions devant les ministres du sport européen et lors du colloque du CIO. A cet égard, nous avons quelque raison de penser que l'adoption de ce texte en deuxième lecture, juste avant l'ouverture de ce colloque, vous a permis de peser avec tout le poids nécessaire dans les discussions et de transformer la grand-messe annoncée en un vrai débat.

M. Jean Le Garrec, vice-président de la commission mixte paritaire.

Tout à fait ! Merci, monsieur Calmat, de le souligner.

M. Alain Calmat.

Je ne regrette donc pas, madame la ministre, d'avoir, avec vous et de nombreux collègues siégeant sur ces bancs - mais tous n'y étaient pas favorables, souvenez-vous -, insisté pour que l'Assemblée nationale procède à cette deuxième lecture avant la tenue du colloque. Je tenais à souligner ce point.

M. Alain Néri, rapporteur.

Très bien ! Il fallait le rappeler.

M. Alain Calmat.

Cependant, madame la ministre, avant de refermer la discussion législative, je souhaiterais attirer votre attention, comme je l'avais déjà fait en deuxième lecture, sur un point qui, malgré l'accord obtenu en commission mixte paritaire, est susceptible de poser quelques problèmes d'interprétation lors de l'application de la loi. Il s'agit de l'ambiguïté qui persiste dans le texte adopté en CMP, à l'article 3 bis, entre les deux fonctions différentes remplies, d'une part, par la médecine d'aptitude au sport et, d'autre part, par celle des soins aux sportifs qui en ont besoin.

Je pense, comme Denis Jacquat, que, pour l'ensemble des parlementaires et vous-même, l'obligation faite à un médecin consultant de transmettre de façon nominale les éléments de reconnaissance de dopage d'un sportif à un médecin de la cellule médicale de l'autorité indépendante ne vise que la première de ces fonctions médicales, la consultation en médecine de soins supposant le strict respect du secret médical. Mais la lettre que vous a adressée madame la ministre, le président du conseil national de l'ordre des médecins, le professeur Glorion, dont j'ai eu copie, montre qu'il subsiste un doute dans son esprit quant à cette distinction. Ce point mérite d'être précisé avant que nous n'adoptions définitivement le texte de la CMP, même si nous ne pouvons pas le modifier - et je m'apprête, bien entendu, à le voter en l'état. M. Denis Jacquat en a parlé. Je l'ai moi-même fait. Nous souhaiterions que vous le fassiez à votre tour, madame la ministre. Les choses seraient plus claires et certainement plus faciles pour les médecins.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

M. le président.

La parole est à M. Jean Le Garrec, président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, et vice-président de la commission mixte paritaire.

M. Jean Le Garrec, vice-président de la commission mixte paritaire.

Madame la ministre, je veux, dans une intervention brève, montrer l'importance que nous attachons à ce texte.

Je remercie tout d'abord le rapporteur, M. Néri, pour l'excellent travail qu'il a réalisé avec l'appui des administrateurs de la commission. Durant tout ce débat, une attention et une écoute extrêmement soutenues ont permis que soit mené un travail efficace.

Je veux aussi vous féliciter, madame la ministre, en mon nom personnel et aussi au nom de la commission pour le courage, la pugnacité et la volonté dont vous avez fait preuve et pour la clarté de vos choix. Vous avez contribué à ce que l'inquiétude qui s'était manifestée, notamment lors de la première lecture, quant à un éventuel isolement de la France en cette matière, s'estompe progressivement. Grace à votre action, avec l'appui du Parlement, vous avez réussi à porter le débat sur le plan international et, par le mouvement engagé en France, à donner un exemple à suivre pour les autres pays.

J'ajoute, après avoir écouté avec attention MM. Landrain et Jacquat, que nous venons de démontrer que, par-delà nos divergences, légitimes, nous sommes capables, sur des sujets de cette importance, non seulement de mener un débat et une réflexion fructueux mais également de trouver un terrain d'accord. Je m'en félicite.

C'est tout à l'honneur de la commission que je suis très fier de présider.

Vous avez dit, madame la ministre, que la loi n'était pas suffisante. Vous avez raison. Elle est un élément important, mais, une fois votée - et je vous fais confiance, madame la ministre, pour que les décrets paraissent rapidement -, l'essentiel restera à faire, à savoir convaincre.

Il nous faudra d'abord convaincre les médecins, même si toutes les précautions ont été prises pour assurer le respect du secret médical. J'ai écouté avec attention M. Calmat qui, en tant que grand sportif et médecin, sait de quoi il parle.

M. François Rochebloine.

Et en tant que Champion du monde.

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

Et en tant que Champion du monde, vous avez raison de le rappeler.

M. Calmat a montré que, malgré toutes les précautions que nous avons prises, des hésitations subsistent. Il nous faut convaincre les médecins qu'en aucun cas le secret médical n'est remis en cause, mais qu'il est, au contraire, consolidé. Il faudra également les convaincre du rôle de santé publique qui leur revient.

Il nous faudra convaincre aussi les milieux sportifs.

C'est déjà commencé. Je vois que les choses bougent mais nous ne sommes pas au bout du chemin.

Pour vous aider, madame la ministre, la commission des affaires culturelles va publier prochainement une petite brochure d'explications, à l'image de ce qu'elle a fait sur l'exclusion, les 35 heures et les emplois-jeunes.

Elle contribuera, modestement, à une meilleure information du milieu sportif et du milieu associatif. L'impact de ces brochures n'est pas négligeable puisque certaines ont été tirées jusqu'à 30 000 exemplaires, la moyenne étant de 15 000 ou 20 000 exemplaires. Ce sera un instrument,


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qui sera d'ailleurs mis à la disposition des députés, pour, d'une manière pédagogique, mobiliser les milieux sportifs en la matière.

Des questions demeurent sur lesquelles il faudra progressivement apporter des réponses. Le financement de la première visite médicale en est une. Vous avez déjà, madame le minsitre, répondu à mes interrogations. Je vous laisse le soin d'y revenir. Mme Aubry m'a écrit qu'elle était tout à fait consciente de l'importance du problème et qu'elle y travaillait. Nous aurons l'occasion dans les mois à venir, et peut-être dans le cadre de la prochaine loi de financement de la sécurité sociale, d'y voir plus clair et de trouver une solution.

Notre réflexion doit donc se poursuivre sur un certain nombre de points. Ce matin, la commission des affaires sociales a décidé de créer une mission de dix membres, animée par M. Beauchaud, destinée à réfléchir sur les structures du sport professionnel. Nous ferons ainsi porter notre réflexion sur ce qui est en train de se passer - vous l'avez évoqué vous-même, madame le ministre, dans votre discours à la tribune - et contribuerons par là même à préparer la grande loi sur le sport. Cette mission se mettra en place dès la semaine prochaine.

Comme vous le voyez, madame la ministre, nous ne nous sommes pas contentés d'apporter notre appui à un texte dont je pense qu'il sera voté à l'unanimité. La commission continue à travailler près de vous et avec vous afin de donner au sport toute sa dimension sociale et éthique, sans oublier la dimension de plaisir et d'épanouissement ! La dimension sociale et éthique du sport ne doit pas faire oublier qu'il est aussi une source d'épanouissement, de joie et de plaisir. Le combat que nous menons en vaut donc la peine.

Vous aurez, madame la ministre, auprès de la commission une écoute attentive et un appui très mobilisé.

(Applaudissement sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à Mme la ministre de la jeunesse et des sports.

Mme la ministre de la jeunesse et des sports.

Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, je remercie très sincèrement la commission, son président et son rapporteur, ainsi que l'ensemble de la représentation nationale pour le travail accompli en faveur de la santé des sportifs et de l'éthique du sport. Je remercie aussi ceux qui, à l'extérieur de cette enceinte, nous ont aidés.

Je pense au groupe de travail présidé par le magistrat Rousselle et le professeur Escande et aussi au conseil de l'ordre des médecins. Tout au long de l'élaboration du projet, ils nous ont non seulement fait part de leurs inquiétudes, mais également soumis des propositions concrètes.

M. le président vient d'en parler mais je tiens à le préciser à nouveau clairement. Monsieur le député Calmat, l'article 3 doit être interprété, comme il est indiqué, en rapport avec l'article 2, c'est-à-dire par rapport à l'aptitude à la pratique du sport.

Je n'aime pas la polémique mais je veux rassurer M. Estrosi sur l'état du mouvement sportif français. Les sportifs français ressentent du soulagement et une formidable envie d'aller de l'avant et de se battre pour un sport net. C'est avant que les bouches s'ouvrent, que les chiffres soient établis et que le numéro vert dopage soit installé que pouvait planer la suspicion sur tous les sportifs.

Aujourd'hui nous mesurons l'ampleur du fléau, mais nous savons également qu'il est loin de concerner tous les sportifs. Il ne touche en fait qu'une minorité d'entre eux, mais il s'aggrave de mois en mois. Il fallait donc réagir très rapidement et très fortement.

Cette mobilisation contre le dopage, je la ressens au niveau des sportifs. Le mouvement sportif français est le seul à avoir eu le courage d'aller en relais jusqu'à Lausanne remettre au président Samaranch son manifeste pour un sport net. Je la sens au niveau des présidents et des responsables de club qui mènent une campagne de prévention absolument remarquable. Je la sens aussi au niveau des bénévoles en faveur desquels des mesures spécifiques ont été annoncées voilà une dizaine de jours, à l'occasion des assises de la vie associative où nous avons été réunis durant un week-end avec 2 500 représentants des associations. Les bénévoles voulaient du temps ; nous avons décidé d'élargir le congé de représentation en procédant par le biais d'un arrêté très simple, pris par chaque ministre, et nous allons retravailler la loi de 1991 après évaluation. Les bénévoles voulaient de la formation ; nous avons doublé le montant du FNDVA et nous examinons la possibilité d'un allongement du temps de formation.

Les bénévoles voulaient de la reconnaissance ; nous avons adopté le principe, que nous mettrons en oeuvre dans le cadre de la loi sur la formation professionnelle, d'une validation des acquis de l'expérience associative.

M. Jean-Claude Beauchaud.

Très bien !

Mme la ministre de la jeunesse et des sports.

Je voudrais enfin vous rassurer, si nécessaire, sur les craintes qui peuvent être exprimées, à tort, à l'égard de l'Union européenne. Les quinze pays de l'Union européenne ont adopté, à l'unanimité, une résolution très précise et très concrète de lutte pour la préservation de la santé des sportifs et des sportives. C'est ensemble que, en ce moment même, à l'initiative de la France, nous travaillons sur la composition et les objectifs du projet d'agence internationale de lutte contre le dopage, que nous présenterons au Comité international olympique.

Permettez-moi enfin, monsieur le député Landrain, de parler des petits clubs. Nous partageons toutes et tous ici la même préoccupation. Je rappelle à chaque fois aux enfants qui m'en parlent que les grands champions, et particulièrement ceux qu'ils connaissent le plus, ont tous démarré dans un petit club amateur avec des bénévoles, des éducateurs et parfois les parents pour donner un coup de main. Ces petits clubs, nous avons besoin de les préserver. Et nous le ferons en leur donnant les moyens de fonctionner. C'est bien dans ce but que j'ai accru la part régionale du FNDS de 37 % en deux ans, que nous prévoirons dans le projet de loi à venir une redistribution, une mutualisation de l'argent qui arrive au sport. Mais nous les préserverons également en défendant le mouvement sportif et particulièrement, j'y insiste avec force, la structure fédérale du mouvement sportif. Si l'on laisse cinq gros clubs créer un club de l'Europe afin de négocier directement avec les médias,...

M. Bernard Roman.

C'est le sport du fric !

Mme Martine David.

Ce sera catastrophique !

Mme la ministre de la jeunesse et des sports.

... il n'y aura plus rien pour la fédération ni même pour la ligue ; il n'y a plus de redistribution du tout. J'en discutais ce matin même avec M. Smith, le ministre anglais de la culture, des médias et du sport. Chez eux, alors que c'est déjà fait, ils vont revenir en arrière. Parce que cela crée une coupure, un fossé entre quelques clubs qui s'en sortent et une majorité qui s'appauvrit. Or nous avons


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pour l'instant, comme nous l'avons fait pour le dopage, besoin d'exprimer au niveau de l'Union européenne la même communauté de pensée afin de préserver les structures fédérales du pouvoir sportif. On ne peut songer à autoriser un quelconque privé à organiser des compétitions sans l'autorisation du mouvement sportif. C'est tout cela qui est en filigrane dans nos projets ; et si j'en crois mes contacts, je compte bien que l'idée d'exception sportive et les propositions que j'ai présentées ce matin au conseil des ministres seront reprises par une majorité des gouvernements de l'Union européenne le 31 mai et 1er juin prochains.

Je ne voudrais pas conclure sur une note pessimiste. Je suis persuadée que nous pouvons retrouver ce qui s'est passé dans l'opinion publique à propos du dopage, dans le but cette fois de redonner au sport tout son plaisir, sa joie, son bonheur, de le préserver ; et ce mouvement, n ous le verrons se développer dans les prochainess emaines.

(Applaudissements sur les bancs du groupe c ommuniste, du groupe socialiste, du groupe Radical, Citoyen et Vert et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

M. le président.

La discussion générale est close.

Texte de la commission mixte paritaire

M. le président.

Je donne lecture du texte de la commission mixte paritaire :

PROJET DE LOI RELATIF À LA PROTECTION DE LA SANTÉ DES SPORTIFS ET À LA LUTTE CONTRE LE DOPAGE

....................................................................

« Art. 1er bis A. - Des antennes médicales de lutte contre le dopage sont agréées par arrêté conjoint du ministre chargé de la santé et du ministre chargé des sports. Elles organisent des consultations ouvertes aux personnes ayant eu recours à des pratiques de dopage.

Ces consultations sont anonymes à la demande des intéressés.

« Elles leur proposent, si nécessaire, la mise en place d'un suivi médical.

« Les personnes ayant bénéficié de ce suivi médical peuvent demander au médecin qui les aura traitées un certificat nominatif mentionnant la durée et l'objet du suivi.

« Les conditions d'agrément et de fonctionnement des antennes médicales de lutte contre le dopage sont fixées par décret.

« Chaque antenne est dirigée par un médecin qui en est le responsable. »

....................................................................

« Art. 1er ter. - Les cahiers des charges des sociétés nationales de programme prévoient des dispositions pour la promotion de la protection de la santé des sportifs et de la lutte contre le dopage. »

« Art. 1er quater. - Les partenaires officiels des événements sportifs et des sportifs en tant que tels s'engagent à respecter une charte de bonne conduite définie par décret.

« Les établissements mentionnés aux articles L. 596 et L. 615 du code de la santé publique contribuent également, dans des conditions définies par décret, à la lutte contre le dopage et à la préservation de la santé des sportifs. »

TITRE Ier DE LA SURVEILLANCE MÉDICALE DES SPORTIFS

....................................................................

« Art. 3. - La participation aux compétitions sportives organisées ou agréées par les fédérations sportives est subordonnée à la présentation d'une licence sportive portant attestation de la délivrance d'un certificat médical mentionnant l'absence de contre-indication à la pratique sportive en compétition, ou, pour les non-licenciés auxquels ces compétitions sont ouvertes, à la présentation de ce seul certificat ou de sa copie certifiée conforme, qui doit dater de moins d'un an. »

« Art. 3 bis. - Tout médecin qui est amené à déceler des signes évoquant une pratique de dopage :

« est tenu de refuser la délivrance d'un des certificats médicaux définis aux articles 2 et 3 ;

« informe son patient des risques qu'il court et lui propose soit de le diriger vers l'une des antennes médicales mentionnées à l'article 1er bis A, soit, en liaison avec celle-ci et en fonction des nécessités, de lui prescrire des examens, un traitement ou un suivi médical ;

« transmet obligatoirement au médecin responsable de l'antenne médicale mentionnée à l'article 1er bis A les constations qu'il a faites et informe son patient de cette obligation de transmission. Cette transmission est couverte par le secret médical. »

« Art. 3 ter. - La méconnaissance par le médecin de l'obligation de transmission prévue à l'article 3 bis ou des prohibitions mentionnées à l'article 12 est passible de sanctions disciplinaires devant les instances compétentes de l'Ordre des médecins. »

« Art. 3 quater. - Supprimé. »

« Art. 4. - Les fédérations sportives veillent à la santé de leurs licenciés et prennent à cet effet les dispositions nécessaires, notamment en ce qui concerne les programmes d'entraînement et le calendrier des compétitions et manifestations sportives qu'elles organisent ou qu'elles agréent.

« Elles développent auprès des licenciés et de leur encadrement une information de prévention contre l'utilisation des substances et procédés dopants.

« Les programmes de formation destinés aux cadres professionnels et bénévoles qui interviennent dans les fédérations sportives, les clubs, les établissements d'activit és physiques et sportives et les écoles de sport comprennent des actions de prévention contre l'utilisation des substances et procédés dopants. »

« Art. 4 bis. - Supprimé. »

....................................................................

« Art. 5 bis. - Les médecins qui traitent des cas de dopage ou de pathologies consécutives à des pratiques de dopage sont tenus de transmettre, sous forme anonyme, les données individuelles relatives à ces cas à la cellule scientifique mentionnée à l'article 9. Un décret en Conseil d'Etat fixe les modalités de cettre transmission et prévoit les garanties du respect de l'anonymat des personnes. »

....................................................................

« Art. 7. - Un livret individuel est délivré à chaque sportif mentionné à l'article 6, ou à son représentant légal, par la fédération sportive dont il relève. Ce livret ne


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contient que des informations à caractère sportif et des informations médicales en rapport avec les activités sportives.

« Seuls les médecins agréés en application de la présente loi sont habilités à se faire présenter ce livret lors des contrôles prévus à l'article 14. »

TITRE II DE LA PRÉVENTION ET DE LA LUTTE

CONTRE LE DOPAGE Section 1 Du Conseil de prévention et de lutte contre le dopage

« Art. 8. - Le Conseil de prévention et de lutte contre le dopage, autorité administrative indépendante, participe à la définition de la politique de protection de la santé des sportifs et contribue à la régulation des actions de lutte contre le dopage. Il comprend neuf membres nommés par décret :

« 1o Trois membres des juridictions administrative et judiciaire :

« un conseiller d'Etat, président, désigné par le viceprésident du Conseil d'Etat ;

« un conseiller de la Cour de cassation désigné par le premier président de cette cour ;

« un avocat général à la Cour de cassation désigné par le procureur général près ladite cour ;

« 2o Trois personnalités ayant compétence dans les domaines de la pharmacologie, de la toxicologie et de la médecine du sport désignées respectivement :

« par le président de l'Académie nationale de pharmacie,

« par le président de l'Académie des sciences,

« par le président de l'Académie nationale de médecine ;

« 3o Trois personnalités qualifiées dans le domaine du sport :

« un sportif de haut niveau désigné par le président du Comité national olympique et sportif français ;

« un membre du conseil d'administration du Comité national olympique et sportif français désigné par son président,

« une personnalité désignée par le président du Comité consultatif d'éthique pour les sciences de la vie et de la santé.

« Le mandat des membres du Conseil est de six ans. Il n'est ni révocable ni renouvelable. Il n'est pas interrompu par les règles concernant la limite d'âge éventuellement applicables aux intéressés. Tout membre dont l'empêchement est constaté par le Conseil statuant à la majorité des deux tiers de ses membres est déclaré démissionnaire d'office.

« Les membres du Conseil prêtent serment dans des conditions fixées par décret.

« Le Conseil se renouvelle par tiers tous les deux ans.

En cas de vacance survenant plus de six mois avant l'expiration du mandat, il est pourvu à la nomination d'un nouveau membre dont le mandat expire à la date à laquelle aurait expiré le mandat de la personne qu'il remplace. Son mandat peut être renouvelé s'il n'a pas excédé deux ans.

« Le premier Conseil de prévention et de lutte contre le dopage comprend trois membres nommés pour deux ans, trois membres nommés pour quatre ans et trois membres nommés pour six ans ; chacune des catégories définies aux 1o , 2o et 3o comportant un membre de chaque série. Le président est nommé pour six ans ; la durée des mandats des autres membres nommés est déterminée par tirage au sort. Le mandat des membres nommés pour deux ans peut être renouvelé.

« Le Conseil de prévention et de lutte contre le dopage ne peut délibérer que lorsque six au moins de ses membres sont présents. Le président a voix prépondérante en cas de partage égal des voix.

« Le Conseil de prévention et de lutte contre le dopage établit son règlement intérieur.

« Les membres et les agents du Conseil de prévention et de lutte contre le dopage sont tenus au secret professionnel dans les conditions et sous les peines prévues à l'article 226-13 du code pénal. »

« Art. 9. - Le Conseil de prévention et de lutte contre le dopage est informé des opérations de mise en place des contrôles antidopage, des faits de dopage portés à la connaissance de l'administration ou des fédérations sportives et des sanctions prises par les fédérations en application de l'article 17. Lorsqu'il n'est pas destinataire de d roit des procès-verbaux d'analyses, il en reçoit communication.

« Il dispose d'une cellule scientifique de coordination de la recherche fondamentale et appliquée dans les domaines de la médecine sportive et du dopage. La cellule scientifique participe en outre à la veille sanitaire sur le dopage. A ce titre, elle transmet les informations qu'elle recueille en application de l'article 5 bis à l'institut de veille sanitaire prévu à l'article L.

792-1 du code de la santé publique. Ces informations sont également mises à la disposition du Conseil et du ministre chargé des sports.

« Il adresse aux fédérations sportives des recommandations sur les dispositions à prendre en application de l'article 4 ainsi que sur la mise en oeuvre des procédures disciplinaires visées à l'article 17.

« Il peut prescrire aux fédérations de faire usage des pouvoirs mentionnés aux articles 13 et 17 dans le délai qu'il prévoit.

« Il est consulté sur tout projet de loi ou de règlement relatif à la protection de la santé des sportifs et à la lutte contre le dopage.

« Il propose au ministre chargé des sports toute mesure tendant à prévenir ou à combattre le dopage et, à cet effet, se fait communiquer par les administrations compétentes ainsi que par les fédérations, groupements sportifs et établissements d'activités physiques et sportives toutes informations relatives à la préparation, à l'organisation et au déroulement des entraînements, compétitions et manifestations sportives.

« Il remet chaque année un rapport d'activité au Gouvernement et au Parlement. Ce rapport est rendu public.

« Il peut être consulté par les fédérations sportives sur les questions scientifiques auxquelles elles se trouvent confrontées. »

....................................................................


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Section 2 Des agissements interdits

....................................................................

« Art. 11 bis La liste des substances et procédés dopants établie par l'arrêté prévu à l'article 11 est la même pour toutes les disciplines sportives. »

....................................................................

Section 3 Du contrôle

« Art. 14. I. Les médecins agréés en application de l'article 13 peuvent procéder à des examens médicaux cliniques et à des prélèvements biologiques destinés à mettre en évidence l'utilisation de procédés prohibés ou à d éceler la présence dans l'organisme de substances interdites.

« Ils peuvent remettre à tout sportif licencié une convocation aux fins de prélèvements ou examens.

« Ils peuvent être assistés, à leur demande, par un membre délégué de la fédération sportive compétente.

« Les contrôles prévus par le présent article donnent lieu à l'établissement de procès-verbaux qui sont transmis aux ministres intéressés, à la fédération compétente et a u Conseil de prévention et de lutte contre le dopage. Un double en est laissé aux parties intéressées.

« Les échantillons prélevés lors des contrôles sont analysés par les laboratoires agréés par le ministre chargé des sports.

« Un décret en Conseil d'Etat détermine les examens et prélèvements autorisés ainsi que leurs modalités.

« II. Sous peine des sanctions administratives prévues aux articles 17 et 18, toute personne qui participe aux compétitions ou manifestations sportives mentionnées à l'article 11 ou aux entraînements y préparant est tenue de se soumettre aux prélèvements et examens prévus au I.

« III. Supprimé. »

....................................................................

Section 4 Des sanctions administratives

« Art. 17. Les fédérations sportives agréées dans les conditions fixées à l'article 16 de la loi no 84-610 du 16 juillet 1984 précitée engagent des procédures disciplinaires afin de sanctionner les licenciés, ou les membres licenciés des groupements sportifs qui leur sont affiliés, ayant contrevenu aux dispositions des articles 11, 12 ou du II de l'article 14.

« A cet effet, elles adoptent dans leur règlement des dispositions définies par décret en Conseil d'Etat et relatives aux contrôles organisés en application du présent titre, ainsi qu'aux procédures disciplinaires prévues en conséquence et aux sanctions applicables, dans le respect des droits de la défense.

« Il est spécifié dans ce règlement que l'organe disciplinaire de première instance de ces fédérations se prononce, après que les intéressés ont été en mesure de présenter leurs observations, dans un délai de trois mois à compter du jour où un procès-verbal de constat d'infraction établi en application du II de l'article 14 et de l'article 16 a été transmis à la fédération et que, faute d'avoir statué dans ce délai, l'organe disciplinaire de première instance est dessaisi et l'ensemble du dossier transmis à l'instance disciplinaire d'appel, laquelle rend dans tous les cas sa décision dans un délai maximum de quatre mois à compter de la même date.

« Les sanctions disciplinaires prises par les fédérations sportives peuvent aller jusqu'à l'interdiction définitive de participer aux compétitions et manifestations sportives prévues à l'article 11.

« Ces sanctions ne donnent pas lieu à la procédure de conciliation prévue par l'article 19 de la loi no 84-610 du 16 juillet 1984 précitée.

« Lorsqu'un sportif sanctionné en application du présent article sollicite le renouvellement ou la délivrance d'une licence sportive, la fédération compétente subordonne ce renouvellement ou cette délivrance à la production du certificat nominatif prévu au troisième alinéa de l'article 1er bis A. »

« Art. 18.

- I. En cas d'infraction aux dispositions des articles 11, 12 et du II de l'article 14, le Conseil de prévention et de lutte contre le dopage exerce un pouvoir de sanction dans les conditions ci-après :

« 1o Il est compétent pour sanctionner les personnes non licenciées participant à des compétitions ou manifestations sportives organisées ou agréées par des fédérations sportives ou aux entraînements y préparant ;

« 2o Il est compétent pour sanctionner les personnes relevant du pouvoir disciplinaire d'une fédération sportive lorsque celle-ci n'a pas statué dans les délais prévus à l'article 17. Dans ce cas, il est saisi d'office dès l'expiration de ces délais ;

« 3o Il peut réformer les sanctions disciplinaires prises en application de l'article 17. Dans ce cas, le conseil de prévention et de lutte contre le dopage se saisit dans un délai de huit jours suivant la date à laquelle il a été informé de ces sanctions en application du premier alinéa de l'article 9 ;

« 4o Il peut décider l'extension d'une sanction disciplinaire prononcée par une fédération aux activités de l'intéressé relevant des autres fédérations, de sa propre initiative ou à la demande de la fédération ayant prononcé la sanction.

« II. La saisine du Conseil est suspensive. Le Conseil statue dans un délai de deux mois à compter de sa saisine dans les cas prévus au 3o et 4o du I. Ce délai est porté à trois mois dans le cas prévu au 2o du I. Il est également de trois mois, à compter de la date de transmission du procès-verbal de constat d'infraction dans le cas prévu au 1o du I.

« III. Le Conseil de prévention et de lutte contre le dopage peut prononcer :

« à l'encontre des sportifs reconnus coupables des faits interdits par l'article 11 et par le II de l'article 14, une interdiction temporaire ou définitive de participer a ux compétitions et manifestations mentionnées à l'article 11 ;

« à l'encontre des licenciés participant à l'organisation et au déroulement de ces compétitions et manifestations ou aux entraînements y préparant reconnus coupables des faits interdits par l'article 12, une interdiction temporaire ou définitive de participer, directement ou indirectement, à l'organisation et au déroulement des compétitions et manifestations sportives mentionnées à l'article 11 et aux entraînements y préparant, ainsi qu'une interdiction temporaire ou définitive d'exercer les fonctions définies au premier alinéa de l'article 43 de la loi no 84-610 du 16 juillet 1984 précitée.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 3 MARS 1999

« Ces sanctions sont prononcées dans le respect des droits de la défense.

« IV. Les parties intéressées peuvent former un recours de pleine juridiction devant le Conseil d'Etat contre les décisions du Conseil de prévention et de lutte contre le dopage prises en application du présent article. »

Section 5 Des sanctions pénales

....................................................................

TITRE

III

DISPOSITIONS DIVERSES

....................................................................

« Art. 23. L'article 35 de la loi no 84-610 du 16 juillet 1984 est abrogé. »

Vote sur l'ensemble

M. le président.

Personne ne demande plus la parole ?...

Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi, compte tenu du texte de la commission mixte paritaire.

(L'ensemble du projet de loi est adopté.)

(Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et du groupe socialiste.)

Suspension et reprise de la séance

M. le président.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-huit heures vingt-cinq, est reprise à dix-huit heures quarante.)

M. le président.

La séance est reprise.

4

CUMUL DES MANDATS Discussion, en deuxième lecture, d'un projet de loi organique et d'un projet de loi

M. le président.

L'ordre du jour appelle la discussion en deuxième lecture : du projet de loi organique relatif aux incompatibilités entre mandats électoraux (nos 1157, 1400) ; du projet de loi relatif aux incompatibilités entre mandats électoraux et fonctions électives (nos 1158, 1400).

La conférence des présidents a décidé que ces deux textes donneraient lieu à une discussion générale commune.

La parole est à M. le ministre de l'intérieur.

M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur.

Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, l'Assemblée nationale aborde aujourd'hui la deuxième lecture des deux projets de loi, organique et ordinaire, portant limitation du cumul des mandats.

Les textes dont vous avez été saisis sont ceux adoptés par le Sénat qui marquent quelques avancées par rapport à la situation actuelle mais demeurent très en retrait du projet initial présenté par le Gouvernement.

M. Philippe Vuilque.

C'est le moins que l'on puisse dire !

M. le ministre de l'intérieur.

Au titre des dispositions organiques limitant les cumuls de mandats et fonctions que le Sénat a acceptées, je noterai l'incompatibilité entre le mandat de représentant au Parlement européen et de parlementaire national.

L e Sénat accepte également qu'un parlementaire n'exerce qu'un seul mandat supplémentaire parmi ceux de conseiller régional, conseiller général ou conseiller municipal, mais exempte de cette règle les conseillers municipaux des communes de 3 500 habitants au moins qui représentent, comme l'a justement noté votre rapporteur, M. Roman, 93 % des communes françaises.

Au titre de la loi ordinaire, le Sénat accepte que nul ne puisse cumuler plus de deux mandats parmi ceux de conseiller régional, conseiller général ou conseiller municip al, mais en exempte les élus des communes de 3 500 habitants ou moins. Il retient le principe d'une incompatibilité entre le mandat de député européen et la f onction de maire d'une commune de plus de 3 500 habitants.

Il accepte aussi le non-cumul entre les fonctions de président de conseil régional ou général, et les fonctions de maire d'une commune de plus de 3 500 habitants.

Il accepte enfin qu'un représentant au Parlement européen ne puisse exercer qu'un seul autre mandat de conseiller régional, conseiller général ou conseiller municipal, mais en limitant toujours l'application de cette règle aux communes de plus de 3 500 habitants.

Autant dire que nous sommes loin du compte. Nous sommes loin du texte que vous avait présenté le Gouvernement, nous sommes loin du texte, a fortiori, qu'avait adopté l'Assemblée en première lecture.

Malgré la force de conviction déployée par mon collègue, Jean-Jack Queyranne, qui défendit ce texte devant le Sénat, ce dernier n'a pas voulu retenir la distinction pourtant importante, à mes yeux, entre les mandats et les fonctions. Il n'a pas voulu retenir la notion de chef d'un exécutif local, qui constitue pourtant le critère d'une loi efficace de limitation des cumuls abusifs.

Le Gouvernement estime cependant qu'une évolution réelle doit s'engager visant à distinguer clairement les fonctions exécutives locales et le mandat de parlementaire. Il n'est pas exact d'affirmer que députés et sénateurs se trouveraient, à l'issue de cette réforme, coupés des réalités locales. Demeurant adjoint au maire, viceprésident de conseil général ou régional, ou même simple conseiller dans ces assemblées, ils continueront d'être en contact étroit avec la vie des collectivités locales et avec les préoccupations de leurs concitoyens.

Le texte proposé par le Gouvernement n'a donc rien d'excessif. L'intérêt public a tout à gagner à ce que les parlementaires se consacrent pleinement à leur mandat national. Ils ne perdront pas de vue les réalités de leur commune, de leur département, de leur région, mais la responsabilité première de ces collectivités ne se confondra plus avec les tâches de législateur ou de parlementaire contrôlant l'exécutif.

Les parlementaires ne sont pas, au palais Bourbon ou au palais du Luxembourg, les simples porte-parole des collectivités qu'ils peuvent présider. L'intérêt national ne


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 3 MARS 1999

peut qu'être mieux servi par des députés et des sénateurs capables de se consacrer davantage à leur fonction législative, qui s'en trouvera ainsi revivifiée. Dans la recherche d'un meilleur équilibre des pouvoirs, la limitation des cumuls de mandats peut jouer un rôle moteur.

Votre commission des lois a donc décidé de rétablir la quasi-intégralité des dispositions que l'Assemblée avait adoptées en première lecture.

Il s'agit d'une part des dispositions figurant dans le projet de loi initial dont vous connaissez l'économie : incompatibilité entre les fonctions de parlementaire ou de représentant au Parlement européen et celles d'un chef d'exécutif local ; impossibilité de cumuler un mandat de parlementaire ou de représentant au Parlement européen avec plus d'un mandat de conseiller municipal, général ou régional ; impossibilité pour un élu local de cumuler plus de deux mandats.

Votre commission des lois a également décidé de rétablir les dispositions que l'Assemblée avait introduites lors du débat en première lecture.

La première concerne le régime indemnitaire des maires. Un amendement du Gouvernement déposé après que l'article 40 a été opposé à un semblable amendement du groupe socialiste, avait permis de prévoir une amélioration des indemnités perçues par les maires dès lors q u'entrera en vigueur la limitation des cumuls de mandats.

Seules sont visées les indemnités des maires, en relevant les taux en fonction des strates démographiques. Il s'agit de faciliter l'exercice à temps plein de ces fonctions de maire. Je vous confirme à nouveau l'accord du Gouvernement pour la prise en compte de cette revalorisation.

D'autres dispositions nouvelles visant à accroître le champ des incompatibilités professionnelles opposables aux parlementaires ont été reprises.

S'agissant des modalités d'exercice de la fonction parlementaire, qu'il ne souhaite pas réglementer à l'excès, le Gouvernement, comme en première lecture, s'en remettra à la sagesse de l'Assemblée. Il estime, en effet, que de telles mesures ne sont pas exactement de même nature que celles qui visent à limiter les cumuls de mandats et fonctions, c'est la raison pour laquelle il ne les avait pas inscrites dans son texte initial.

On peut regretter que le travail nécessaire de polissage du texte ait souffert de l'attitude trop frileuse d'une majorité de sénateurs. Je ne vise évidemment pas l'institution, car je n'oublie pas les propos courageux qui ont été tenus, y compris au sein de la majorité sénatoriale. Jes onge en effet en particulier à l'intervention de M. Peyrefitte.

M. Bernard Roman, rapporteur.

Remarquable !

M. Michel Hunault.

Très bien !

M. le ministre de l'intérieur.

Mais le souci de contrarier un projet du Gouvernement, lié à la certitude de défendre des causes non plaidées et à des peurs non dites ont amené à remplacer le débat constructif par l'immobilisme, le surplace inquiet. Il faut en sortir.

Le Premier ministre a rappelé récemment à quel point la limitation du cumul des mandats correspondait à sa volonté de moderniser la vie politique française et rencontrait le soutien de nos concitoyens. Ce n'est pas servir le rôle du Sénat, me semble-t-il, que d'user de la faculté qu'il détient de la Constitution pour s'opposer à toute réforme en ce domaine.

L'article LO 297 dispose que les incompatibilités opposables aux députés sont applicables aux sénateurs, ce qui à la fois impose un vote conforme par le Sénat du présent projet de loi et interdit de traiter différemment les incompatibilités opposables aux députés et aux sénateurs.

Tenant compte de ces contraintes, le Gouvernement souhaite avancer le plus loin possible. Ce débat se tient publiquement sous le regard des citoyens. Personne ne pourra s'affranchir de leur jugement. La ténacité de l'Assemblée et le soutien qu'elle apporte au projet doivent à présent permettre d'avancer davantage.

Ce texte n'est ni dogmatique, ni puritain. Il introduit un changement notable dans notre vie politique, mais ses objectifs ne sont pas hors d'atteinte. Les règles de noncumul facilitent l'accès de nouvelles générations aux responsabilités politiques. Avec la parité, elles constituent un puissant outil d'évolution. Il ne s'agit pas de les opposer aux réalités historiques et administratives de la France mais de réformer à temps des pratiques qui ne sont pas, somme toute, satisfaisantes.

C'est pourquoi j'appelle l'Assemblée à soutenir ces deux projets de loi, à faire évoluer avec le discernement nécessaire le régime des incompatibilités et des inéligibilités afin de répondre aux attentes de nos concitoyens, et à poursuivre l'effort de conviction nécessaire pour surmonter les immobilismes. (Applaudissements sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert, du groupe socialiste et du groupe communiste.)

M. le président.

La parole est à M. le rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République.

M. Bernard Roman, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République.

Monsieur le président, monsieur le ministre, chers collègues, un peu plus de dix mois se sont écoulés depuis le vote par notre assemblée en première lecture des deux textes qui reviennent à notre examen aujourd'hui.

Le Sénat, saisi en octobre dernier, a fait de ces textes l'usage que l'on sait, confirmant son hostilité à ces projets avec des arguments qui montrent, j'y reviendrai, combien la modernisation de la vie politique se heurte à une fin de non-recevoir au sein de la deuxième assemblée.

Je veux le dire d'emblée, notre position n'a pas changé.

Je dirai même que notre détermination non seulement est restée intacte mais s'est renforcée au fil de ces dix mois.

Elle s'est renforcée car elle se fonde sur un engagement.

La limitation du cumul des mandats fait partie des mesures de modernisation de la vie publique proposées par le Premier ministre et qui demeure une des priorités du Gouvernement.

Elle s'est renforcée car elle se fonde sur une conviction : cette réforme est indispensable pour renforcer et renouveler la démocratie. Un constitutionnaliste la qualifie de « mère de toutes les réformes » car elle est, dit-il, la clef qui ouvre d'autres chantiers institutionnels : l'approfondissement de la décentralisation, la revalorisation de notre Parlement, la parité, dont on parle par ailleurs, l'harmonisation de la durée des mandats. Bref, une multitude de sujets qui touchent à l'organisation de notre démocratie.

Notre détermination s'est renforcée, enfin, car cette proposition de limiter le cumul des mandats et des fonctions rencontre, d'une manière de plus en plus marquée, l'attente des Français récemment encore confirmée par un sondage SOFRESNouvel Observateur.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 3 MARS 1999

Ce sondage le montre, 69 % des Français désapprouvent le cumul maire-député et 74 % le cumul maire-sénateur.

M. Michel Hunault.

On ne légifère pas en fonction des sondages ! M. Bernard Roman, rapporteur.

Certains ont affirmé dans cet hémicycle, que, dans leur ville, les citoyens étaient plutôt satisfaits de voir leur maire assumer des fonctions au Parlement. Or, 62 % des personnes interrogées préféreraient que leur maire ne soit pas parlementaire et, chers collègues, n'en déplaisent à certains, 54 % des sympathisants UDF et 51 % des sympathisants RPR interrogés jugent très sévèrement l'attitude du Sénat. Ce qui démontre, s'il en était besoin, combien il est déplacé, voire pernicieux, de s'abriter derrière le suposé attachement des électeurs au cumul pour le justifier.

Mme Frédérique Bredin.

Absolument !

M. Bernard Roman, rapporteur.

A l'heure de vérité que constitue le vote de la loi, qu'au moins les élus aient la lucidité, sinon le courage, de revendiquer leur propre choix et non d'en faire porter la responsabilité aux citoyens.

M. Philippe Vuilque.

Très bien !

M. Bernard Roman, rapporteur.

Cete modernisation de la vie politique, nous la voulons, et nous pensons que, au-delà de l'argument facile de l'effet de mode, la limitation du cumul des mandats est la première étape indispensable, décisive de cette modernisation. C'était le sens du vote des deux textes par notre assemblée au mois d'avril dernier.

Trois objectifs majeurs avaient été fixés par ces textes pour parvenir à limiter le cumul dans notre pays : la coupure du lien entre la fonction législative et la fonction exécutive locale ; l'interdiction d'exercice simultané de deux fonctions exécutives locales, à laquelle, par ailleurs, nous avons ajouté l'impossibilité d'exercer à la fois une fonction de parlementaire français et de parlementaire européen ; la limitation possible du cumul à deux mandats et non plus à trois, comme c'est le cas actuellement, ce qui nous a conduits à supprimer l'idée de seuil qui était inscrite dans la loi de 1985.

Ces trois objectifs s'appuyaient sur deux principes essentiels : la disponibilité des élus, que réclament de plus en plus nos concitoyens, et le refus de la confusion d'intérêts, qui est, par définition, générée par l'exercice s imultané de ces fonctions.

Notre débat avait permis d'ajouter un certain nombre de dispositions parlementaires en introduisant notamment des incompatibilités qui dépassent le seul cadre des fonctions électives : incompatibilité avec l'exercice d'un mandat au Conseil de la politique monétaire de la Banque de France, dans les tribunaux de commerce, dans les cabinets ministériels ou le cabinet du Président de la République, ou au sein des bureaux des chambres consulaires.

Notre débat nous avait aussi conduits à réintroduire dans le champ des incompatibilités les présidences d'établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre tout en veillant - je sais, monsieur le ministre, que vous y êtes attaché -, pour ne pas compromettre l'indispensable avancée de l'intercommunalité, à ne pas appliquer cette incompatibilité aux maires.

Nous avions aussi, à l'occasion de ce débat, engagé d'une manière décisive, M. le ministre vient de le rappeler, la révision du statut de l'élu, en revalorisant d'une manière sensible l'indemnité des maires.

Nous avions, enfin, introduit un certain nombre de dispositions visant à rendre impossible le contournement de la loi en empêchant, par exemple, les maires ou les présidents de collectivités territoriales de se voir attribuer des délégations importantes lorsqu'ils quittaient leur fonction pour se mettre en conformité avec les textes.

Le Sénat s'est emparé de ce texte et, pour la majorité sénatoriale, c'est non à tout ou presque tout.

(Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

M. Pierre Albertini.

C'est excessif !

M. Bernard Roman, rapporteur.

La droite sénatoriale a rétabli la possibilité de cumuler un mandat national avec une fonction exécutive locale. La droite sénatoriale ae xclu du dispositif les conseillers municipaux des communes de moins de 3 500 habitants, ce qui revient à autoriser le cumul de trois mandats locaux pour les élus de 34 000 communes sur 36 000 communes en France, et donc à légiférer pour un peu plus de 2 500 communes et à créer un dispositif à géométrie variable au bénéf ice des toutes petites communes.

M. Philippe Vuilque.

Eh oui !

M. Georges Tron.

Qui représentent quel pourcentage de population ?

M. Bernard Roman, rapporteur.

Ce vote de la droite sénatoriale ne nous a malheureusement pas surpris. Les sénateurs de droite ont eu recours à tous les arguments qu'ils avaient déjà développés dans le passé chaque fois qu'il s'est agi de s'opposer à la modernisation de la vie politique, comme si rien n'avait changé, comme si la politique devait toujours se résoudre à aller moins vite que la société, que l'attente des Français, comme si la décentralisation n'avait pas, depuis vingt ans, profondément transformé le rapport entre l'élu local et le pouvoir central, comme si le rôle de l'élu local n'avait pas été lui aussi profondément transformé depuis vingt ans, lui conférant une responsabilité plus importante sur des dossiers de plus en plus complexes, le confrontant à des arbitrages essentiels pour lesquels il ne peut s'en remettre éternellement à son administration ou à son cabinet, comme si les élus que nous sommes pouvaient continuer à ignorer ce que les citoyens attendent d'eux en termes de disponibilité et de renouvellement du monde politique, dont la composition, convenons-en, reflète de moins en moins la réalité de la société.

Sommes-nous assez représentatifs de la société que nous sommes censés représenter,...

M. Pierre Albertini.

Non !

M. Bernard Roman, rapporteur.

... de la jeunesse, des femmes ?

M. Philippe Vuilque.

Non !

M. Bernard Roman, rapporteur.

M. Clément posait la question en termes lapidaires lors de nos débats de mai dernier : « Depuis quand les jeunes et les femmes, quelles que soient leurs catégories sociales, représentent-ils à eux seuls l'intérêt national ? » Ils ne les représentent pas à eux seuls, mais les représentons-nous à nous seuls tels que nous sommes aujourd'hui ?


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 3 MARS 1999

Oui, il nous faut, et c'est l'une des ambitions de ce texte, au-delà de la modernisation de la vie politique, redonner tout son sens de mission au mandat politique, et non pas, comme l'a fait M. Larché qui vante le mérite du système français, présenter le mandat parlementaire comme une sorte de couronnement de la carrière politique de notre pays.

Les sénateurs de droite, à l'image du président de la commission des lois du Sénat, ont ainsi manié le paradoxe jusqu'à la contradiction.

M. Philippe Vuilque.

Très juste !

M. Bernard Roman, rapporteur.

Ils déclarent, par la voix du président Poncelet, ne pas être hostiles à la limitation du cumul des mandats, mais adoptent un texte qui va à peine plus loin que celui de 1985. Ils déplorent que les textes ne prévoient pas la situation des ministres, mais estiment qu'il est inutile de légiférer pour les parlementaires. Ils dénoncent le risque que ces lois donnent un pouvoir excessif aux partis et estiment que c'est aux partis de remédier à la pratique du cumul dans leurs rangs.

Comment passer sous silence cette contradiction affligeante : lorsqu'il s'agit de moderniser la vie politique française en introduisant l'égalité entre les hommes et les femmes dans la Constitution, le Sénat s'en réfère aux partis politiques pour la mettre en oeuvre, et il regrette, lorsque l'on propose la limitation du cumul, que cette législation leur donne trop de pouvoir ?

Mme Frédérique Bredin.

Très juste.

M. René Mangin.

Ils sont prêts à tout.

M. Philippe Vuilque.

Rien ne les arrête.

M. Bernard Roman, rapporteur.

Sur le fond des arguments développés par la majorité sénatoriale, le blocage est total. Sur la forme, la manière d'agir du Sénat donne raison à Alain Duhamel qui commentait récemment cette tendance de la majorité sénatoriale à s'arc-bouter sur sa capacité de blocage en constatant que la majorité sénatoriale désosse et déchiquette tous les textes avant de conclure : « Au Palais du Luxembourg, on préfère décidément autopsier plutôt qu'améliorer. »

M. Michel Hunault.

Vous n'aimez pas le Sénat ! (Sourires.)

M. Bernard Roman, rapporteur.

Il est donc clair que nous ne pouvions en aucun cas travailler sur les textes issus de la première lecture du Sénat. Les projets de loi que nous avions votés n'y ont été ni améliorés ni retouchés, ils ont été tout simplement trahis.

Nous proposons donc de revenir au dispositif initial. Il est en cohérence avec notre volonté de moderniser la vie politique pour qu'elle corresponde mieux aux réalités de la société du

XXIe siècle, pour qu'elle réponde mieux à ce que les citoyens attendent de la politique.

Certains à droite, dans les deux assemblées, ont voulu tabler sur les divisions en notre sein. Bernard Plasait, éminent collègue du Sénat, s'est ainsi cru autorisé à déclarer que les députés socialistes n'avaient approuvé ce texte que du bout des lèvres...

M. René André.

C'est bien vrai !

M. Bernard Roman, rapporteur.

... avec sans doute le secret espoir de voir le Sénat réintroduire plus de mesure et de sagesse.

Mesdames et messieurs qui représentez ici l'opposition, vous êtes libres d'appeler mesure votre immobilisme, sagesse votre conservatisme,...

M. Pierre Albertini.

Mais vous allez nous donner des leçons pendant combien de temps encore ? Trop, c'est trop !

M. Bernard Roman, rapporteur.

... mais, aux yeux des Français, il vous appartient de dire si, comme la majorité sénatoriale, vous assumez votre archaïsme. Nous, nous avons choisi l'avenir.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à M. Georges Tron.

M. Georges Tron.

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je pourrais me lancer dans un débat avec M. Roman pour parler du Sénat pendant à peu près un quart d'heure, ce qui serait original. Je vous propose d'essayer de revenir aux textes qui nous intéressent. Il ne serait d'ailleurs pas de mauvais augure que, dans un débat comme celui sur le cumul des mandats, l'on essaie de sortir un peu de ces attaques perpétuelles qui consistent à caricaturer la pensée de ceux qui ne partagent pas votre opinion.

M. François Goulard.

Très bien !

M. Georges Tron.

Il s'agit d'un débat important, celui sur la modernisation de la vie politique. Comme je l'avais expliqué il y a maintenant dix mois, monsieur Roman, nous y entrons sans aucune difficulté. Nous approuvons certaines des dispositions qui sont proposées et nous en suggérons d'autres, comme nous l'avions fait en première lecture.

Que le texte que nous transmet le Sénat ne vous plaise pas, nous avions cru le comprendre, et votre subtilité dialectique pouvait nous épargner ces répétitions qui n'ont pas forcément enrichi le contenu de vos propos. Cela étant, il existe malgré tout un Sénat. Je sais qu'apparemment, cela ne vous plaît pas. Nous allons faire en sorte de considérer qu'il peut légiférer sans être d'accord avec l'Assemblée nationale et sans pour autant avoir comme seules intentions celles que vous lui prêtez et que je trouve profondément caricaturales.

M. René André.

Très bien !

M. Georges Tron.

Le débat sur le cumul des mandats, si l'on entendait uniquement M. Roman, risquerait d'apparaître une nouvelle fois comme un affrontement banal entre la droite et la gauche, alors qu'il devrait nous permettre de réfléchir tous ensemble à la façon de contrer cette idée à la mode qui consiste, de façon récurrente, à déconsidérer toutes celles et tous ceux qui sont issus du suffrage universel, qu'ils aient des responsabilités à l'échelon local ou à l'échelon national. C'est un risque qui me paraît plus dangereux pour la démocratie que le péril représenté par l'existence du Sénat.

M. Pierre Albertini et M. René André.

Très bien !

M. Georges Tron.

Sans aucun doute, pour dépasser nos traditionnels affrontements, il aurait fallu, monsieur le rapporteur, que la majorité s'abstienne de politiser notre réflexion en se livrant systématiquement aux attaques que nous venons d'entendre contre le Sénat. Je n'y reviens pas. C'était une bonne façon de dépasser nos clivages traditionnels que de ne pas se limiter aux textes du Sénat.

C'est d'ailleurs la raison pour laquelle je vais essayer de faire quelques propositions sans entrer dans ce jeu.

Pour dépasser le fameux clivage entre la droite et la gauche, il aurait fallu également que nous ayons quelques garanties concernant l'indispensable projet de réforme du statut de l'élu que vous avez mentionné plusieurs fois, et dont je crois pouvoir dire qu'il est mal engagé.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 3 MARS 1999

Vous nous en parlez beaucoup, et il y a même quelques amendements par-ci, par-là, censés être les prémices de ce fameux statut, mais moi, je lis les déclarations faites par M. le Premier ministre, dont certaines d'ailleurs sont assez récentes. Lors d'un déjeuner au Sénat - ne le prenez pas mal ! (Sourires)...

M. Bernard Roman, rapporteur.

C'est l'environnement qui n'était pas favorable ! (Sourires.)

M. Georges Tron.

... où il a déjeuné avec les membres du bureau, il a déclaré expressément que le coût d'une telle réforme risquerait fort d'être mal perçu par l'opinion. Comme il nous avait expliqué un an auparavant qu'une réforme éventuelle du statut de l'élu local coûterait entre 10 et 15 milliards de francs et que ce n'était pas le choix premier à faire en France - je tiens la dépêche de l'AFP à votre disposition -, ce projet de réforme du statut de l'élu, auquel nous sommes, je crois, tous attachés, me paraît mal engagé, une véritable réflexion sur le statut de l'élu...

Mme Frédérique Bredin.

C'est cela !

M. Georges Tron.

Oui, madame Bredin, une véritable réflexion sur le statut de l'élu.

Mme Frédérique Bredin.

Le Sénat a refusé l'amendement sur la revalorisation des indemnités des maires !

M. Georges Tron.

Cela n'a rien à voir avec le statut de l'élu. Vous démontrez ainsi par A plus B qu'il n'y aura pas de réflexion sur ce statut, et c'est exactement le travers que je souhaitais mettre en évidence. Les quatre amendements portant sur les crédits d'heures ou les indemnités des maires ne sont qu'une toute petite partie du sujet et je serais désolé que vous confondiez le problème du statut de l'élu avec le seul problème des indemnités des maires. Si c'est votre conception, je suis en profond désaccord avec vous sur ce point également.

Les deux textes qui nous sont proposés ont quelques lacunes et ils n'abordent pas les vraies questions, comme la disparité qui existe entre le statut d'un fonctionnaire élu et celui d'un salarié du secteur privé élu.

Un amendement de mon collègue Pierre Albertini proposait de commencer à y remédier en substituant, pour les fonctionnaires, la disponibilité au détachement, solution nuancée s'il en est. Ce n'est pas une avancée révolutionnaire ! Or l'amendement a été rejeté.

M. François Goulard.

Et pour cause ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Georges Tron.

C'est tout de même, qu'on le veuille ou non, un problème de fond. Cela dit, nous n'avions pas d'illusions !

M. Alain Ferry.

Evidemment !

M. Georges Tron.

Un autre amendement proposait de réunir une commission pour réfléchir au problème de la mise en cause pénale des élus, et notamment des maires, dans des conditions telles que nombre de sortants vont sans doute être conduits à ne pas se représenter dans deux ans.

Au moment où la responsabilité de l'un de nos collègues est mise en cause à la suite d'un fait divers tragique qui s'est déroulé dans sa commune, il n'y a pas un seul élu, parlementaire ou maire, qui puisse être insensible à cette question. C'est la raison pour laquelle nous avions déposé un amendement sur ce sujet qui mérite vraiment réflexion. Il a été rejeté. Là encore, c'est regret table, et, pas plus ici que sur le sujet précédent, je ne me contenterai d'un expédient ou d'une réponse rapide.

Je constate enfin que le projet de réforme constitutionnelle que l'on avait annoncé comme imminent lors de la première lecture, projet destiné à établir des incompatibilités entre les fonctions ministérielles et les mandats, n'est plus mentionné nulle part.

J'avais indiqué il y a dix mois que le groupe RPR était prêt à remédier à cette situation, parce que c'est un problème qui se situe dans la droite ligne de nos réflexions, situation au moins aussi sujette à caution que celles traitées par les deux textes de loi. En dépit des promesses, rien sur ce sujet non plus ! Très objectivement, ce n'est pas en occultant les trois sujets que je viens d'évoquer, le statut des fonctionnaires élus, la responsabilité pénale des élus ou la réforme constitutionnelle visant à établir des incompatibilités entre les fonctions ministérielles et les mandats électifs, que nous enrichissons notre débat sur le cumul des mandats.

Le débat s'ouvre donc dans des conditions à peu près similaires à celles qui prévalaient il y a dix mois sur le problème de fond, nonobstant, mais je ne veux pas y revenir, les positions du Sénat.

Nous rappellerons donc notre accord sur plusieurs dispositions importantes des deux textes qui nous sont soumis. Je pense en premier lieu à l'incompatibilité entre les mandats de représentant au Parlement européen et de parlementaire national. Je pense ensuite à la limitation à deux du nombre des mandats, car il n'est nullement démontré que la gestion d'une petite collectivité soit moins accaparante que celle d'une collectivité plus importante. Je pense enfin à l'interdiction de présider deux exécutifs locaux, afin d'éviter le risque de la confusion d'intérêts.

Il n'y a donc pas de la part du groupe RPR d'opposition systématique aux textes qui nous sont proposés, ni de blocage ou de refus.

Ces dispositions allant dans la bonne direction, nous les approuvons et nous ne pouvons que regretter qu'elles ne soient pas complétées par une réforme très importante, celle relative au cumul des fonctions ministérielles et des mandats.

Dans le cours de la discussion, nous rappellerons de façon très forte, au gré de tel ou tel amendement de la majorité, sans doute déposé d'ailleurs par mon éminente collègue Mme Bredin, que ceux qui prétendent améliorer notre système politique en édictant toute une série de restrictions au principe de la liberté de candidature, et donc par définition et en conséquence à celui de la liberté de choix de l'électeur, commettent un contresens manifeste.

A titre d'exemple, refuser de réfléchir à la surreprésentativité de la fonction publique dans notre assemblée et proposer en même temps de limiter l'accès de diverses professions, libérales en particulier, sous couvert de la moralisation de la vie publique, démontrerait à l'évidence que la surenchère politique a pris le pas sur la réelle volonté d'améliorer les conditions d'exercice de la démocratie.

Je vous sais d'ailleurs gré, monsieur le ministre, de rappeler généralement à la mesure et au bon sens - vous l'avez en tout cas fait en première lecture - ceux qui ne mesurent pas combien leurs propositions amplifieraient les travers qu'ils prétendent corriger.

Quoi qu'il en soit, c'est en espérant avoir des réponses aux questions que nous posons, et plus précisément à vous, que nous aborderons en dernier lieu la question fondamentale de la compatibilité entre le mandat parlementaire et une fonction de présidence exécutive locale.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 3 MARS 1999

Pour interdire à un parlementaire d'être maire, président de conseil régional ou général, on nous explique d'abord, comme l'a fait M. Roman, qu'il faut faciliter le rajeunissement, la féminisation ou le renouvellement de la classe politique.

Un argument a été employé plusieurs fois, et je vais le reprendre à mon compte, c'est que c'est une forme de négation de la liberté de choix de l'électeur puisque celui-ci a toute latitude pour accorder ou non une seconde fois sa confiance à celui qui se présente devant lui en étant déjà investi d'un mandat.

Vous avez objecté, monsieur Roman, que les choix sont plus compliqués qu'il n'y paraît et que la loi doit corriger les pesanteurs de notre société. Je vous réponds qu'il s'agit bien d'une question de degré : nous sommes pour des corrections par la loi de certains travers de la société - je vous en ai donné des exemples précis il y a quelques instants - mais contre des interdictions absolues.

C'est d'ailleurs la position que nous avons émise lors du vote sur la parité à l'Assemblée. Vous savez que le groupe auquel j'appartiens s'est prononcé favorablement.

Comment admettre par ailleurs l'idée selon laquelle les députés seraient davantage impliqués dans leur mandat - c'est l'idée de la disponibilité - s'ils n'exerçaient simu ltanément aucune fonction exécutive locale, alors que n'importe lequel d'entre nous sait parfaitement que, à moins de modifier le mode de scrutin actuel, j'y reviendrai, cette interdiction n'aboutirait qu'à les priver d'une base locale et les inciterait à démultiplier leur action sur le terrain pour compenser ce handicap ? On aboutirait en réalité à l'exact résultat inverse de celui que vous nous décrivez.

Qui peut sérieusement prétendre que la démocratie sortirait renforcée parce qu'un député ou un sénateur voterait dorénavant des lois qu'il n'aurait plus l'occasion de mettre en oeuvre directement dans l'administration quotidienne, et donc parfaitement concrète, d'une collectivité territoriale ? Qui peut trouver quelque cohérence à retirer du Parlement les premiers gestionnaires des collectivités territoriales alors qu'à l'évidence, celles-ci sont déjà et seront plus encore demain au coeur de tous les grands débats nationaux ? C'est au moment même où le Gouvernement met en chantier une réforme, voire deux, de la taxe professionnelle, au moment même où nous allons peut-être être appelés à débattre d'une réforme de la taxe d'habitation, alors que nous venons d'achever un débat fort important et fort riche sur l'aménagement du territoire et un autre sur l'intercommunalité, réformes dont vous conviendrez avec moi, mes chers collègues, qu'elles supposent pour le moins que les acteurs quotidiens de la vie des communes, des départements ou des régions puissent donner leur point de vue et apporter leur témoignage, eux qui seront justement chargés de leur mise en oeuvre, c'est à ce moment précisément que le Gouvernement se propose de leur interdire aux uns et aux autres l'accès au Parlement.

C'est tout de même formidablement paradoxal ! Nul ne peut croire que le texte sur l'aménagement du territoire, discuté ici même il y a quelques semaines, aurait pu aborder toutes les questions qu'il soulève au fond sans la présence, sur tous nos bancs, de parlementaires investis de responsabilités locales.

Nul ne peut trouver non plus une explication vraiment convaincante pour justifier que l'examen de votre texte sur les polices municipales, monsieur le ministre, aurait gagné en qualité sans la participation active, issue de leur expérience quotidienne, de certains de nos collègues qui sont à la fois députés et maires.

Autre exemple - et celui-ci est prospectif, je ne m'appuie pas simplement sur le passé : le Parlement, tôt ou tard, mais inéluctablement devra se pencher sur le dossier des retraites.

Chacun connaît ici la situation particulièrement difficile du régime de retraite des agents des collectivités locales : le rapport est aujourd'hui de l'ordre d'une trentaine de cotisants pour dix retraités, mais des projections, qui d'ailleurs précédaient celles de l'actuel commissaire au Plan, établissent que, d'ici à une quinzaine d'années, ce rapport passera à douze cotisants pour dix retraités.

Donc, nous savons tous parfaitement que nous aurons un débat sur ce sujet, quelles que soient les mesures qui seront finalement adoptées.

Or, comment pourrait-il se faire qu'au moment même où le Parlement votera des dispositions qui risquent de bouleverser les finances locales, il n'y ait pas dans l'hémicycle un maire ou un président de conseil régional ou de conseil général pour rappeler la fragilité des équilibres budgétaires dans nombre de collectivités ? Je sais que certains de mes collègues estiment avec d'ailleurs, je le crois, beaucoup de bonne foi - je pense en particulier à vous, monsieur Mangin - que les maires peuvent être remplacés par leurs adjoints, et donc qu'il ne s'agit pas d'un problème incontournable. Je ne partage pas leur opinion - et nous en avons débattu ce matin ensemble - car je considère que les présidents d'exécutif ont une vision globale des problèmes des collectivités que n'ont ni un président délégué ni un maire-adjoint, quelles que soient leurs qualités - et il ne s'agit pas ici de remettre en cause les qualités des uns ou des autres.

Demain, l'Etat aura sans aucun doute la tentation de chercher de nouvelles sources d'économie pour rester dans les marges fixées par les traités européens. En France où la dépense publique occupe une place particulièrement importante, l'Etat sera tenté tout naturellement de rogner sur les crédits des collectivités locales - en 1999, ce n'est pas loin de 300 milliards de fonds de concours divers qui leur seront versés - pour satisfaire aux fameux critères fixés par ces traités.

Que la situation actuelle des finances locales soit en voie d'amélioration n'y change, à mes yeux, pas grandchose. Si demain l'Etat, du fait d'une détérioration de la conjoncture ou de ses propres décisions - décisions qu'il prend aujourd'hui mais qu'il faudra financer demain traverse une passe difficile, il aura d'autant plus la tentation de se retourner vers les collectivités locales que ceux qui sont les plus à même de les défendre ne siégeront plus au Parlement. C'est, me semble-t-il, de bon sens.

Voilà quelques-unes des raisons qui expliquent notre opposition à l'interdiction d'exercer simultanément un mandat parlementaire et une fonction de présidence d'un exécutif local.

Une telle interdiction n'aboutirait, au-delà des incohérences que je viens de soulever, qu'à couper les parlementaires de la réalité quotidienne et à professionnaliser députés et sénateurs, contrairement à ce que souhaitent les Français.


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L'aboutissement logique de cette démarche serait d'ailleurs l'instauration d'un scrutin proportionnel dont chacun sait, au vu des résultats qu'il donne, l'hostilité qu'il nous inspire.

C'est donc en fonction de la position que le Gouvernement prendra sur ce point que nous approuverons ou non les textes qui nous sont soumis. Au jour d'aujourd'hui, et compte tenu de ce que j'ai entendu, ne vous étonnez pas si je vous dis, monsieur le ministre, que le groupe auquel j'appartiens ne les votera pas. (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie franç aise-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

Mes chers collègues, je vous informe qu'à la demande du Gouvernement, la séance de demain matin débutera à neuf heures trente, et non à neuf heures comme il est indiqué au feuilleton.

5

ORDRE DU JOUR DE LA PROCHAINE SÉANCE

M. le président.

Ce soir, à vingt et une heures, troisième séance publique : Suite de la discussion, en deuxième lecture : du projet de loi organique, no 1157, relatif aux incompatibilités entre mandats électoraux ; du projet de loi no 1158 relatif aux incompatibilités entre mandats électoraux et fonctions électives.

M. Bernard Roman, rapporteur au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République (rapport no 1400).

(Discussion générale commune.)

La séance est levée.

(La séance est levée à dix-neuf heures vingt-cinq.)

L e Directeur du service du compte rendu intégral de l'Assemblée nationale,

JEAN PINCHOT


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 3 MARS 1999

ANNEXE AU PROCÈS-VERBAL de la 2e séance du mercredi 3 mars 1999 SCRUTIN (no 160) sur l'ensemble du projet de loi autorisant la ratification du Traité d'Amsterdam modifiant le Traité sur l'Union européenne, les traités instituant les Communautés européennes et certains actes connexes.

Nombre de votants .....................................

532 Nombre de suffrages exprimés ....................

522 Majorité absolue ..........................................

262 Pour l'adoption ...................

447 Contre ..................................

75 L'Assemblée nationale a adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN Groupe socialiste (250) : Pour : 213. - MM. Yvon Abiven , Maurice Adevah-Poeuf , Damien Alary , Mme Sylvie Andrieux , MM. Léo Andy , Jean-Marie Aubron , Jean-Marc Ayrault , Jean-Paul Bacquet , Dominique Baert , Jean-Pierre Baeumler , JeanPierre Balduyck , Jean-Pierre Balligand , Gérard Bapt , Alain Barrau , Jacques Bascou , Christian Bataille , JeanClaude Bateux , Jean-Claude Beauchaud , Henri Bertholet , Eric Besson , Jean-Louis Bianco , André Billardon , Jean-Pierre Blazy , Serge Blisko , Patrick Bloche , Jean-

M arie Bockel , Jean-Claude Bois , Daniel Boisserie , Augustin Bonrepaux , André Borel , Jean-Michel Boucheron , Jean-Claude Boulard , Didier Boulaud , Christian Bourquin , Mme Danielle Bousquet , M. Jean-Pierre Braine , Mme Frédérique Bredin , M. Jean-Paul Bret , Mme Nicole Bricq , MM. François Brottes , Vincent Burroni , Marcel Cabiddu , Alain Cacheux , Alain Calmat , Jean-Christophe Cambadelis , Thierry Carcenac , Christophe Caresche , Mmes Véronique Carrion-Bastok , Odette Casanova , MM. Laurent Cathala , Jean-Paul Chanteguet , Guy-Michel Chauveau , Jean-Claude Chazal , Daniel Chevallier , Didier Chouat , Alain Claeys , Mme Marie-Françoise Clergeau , MM. Jean Codognès , Pierre Cohen , François Colcombet , Mme Monique Collange , MM. Jacky Darne , Camille Darsières , Michel Dasseux , Yves Dauge , Mme Martine David , MM. Philippe Decaudin , Marcel Dehoux , Jean Delobel , François Deluga , Jean-Jacques Denis , Mme Monique Denise ,

M M. Bernard Derosier , Claude Desbons , Michel Destot , Marc Dolez , François Dosé , René Dosière , Mme Brigitte Douay , MM. Tony Dreyfus , Pierre Ducout , Jean-Pierre Dufau , Mme Laurence Dumont , MM. Jean-Louis Dumont , Dominique Dupilet , JeanPaul Dupré , Yves Durand , Jean-Paul Durieux , Jean Espilondo , Claude Evin , Alain Fabre-Pujol , Albert Facon , Mme Nicole Feidt , MM. Jean-Jacques Filleul , Jacques Fleury , Raymond Forni , Jean-Louis Fousseret ,

M ichel Françaix , Christian Franqueville , Georges Frêche , Gérard Fuchs , Robert Gaïa , Roland Garrigues , Jean-Yves Gateaud , Jean Gaubert , Mmes Catherine Génisson , Dominique Gillot , MM. Gaëtan Gorce , Gérard Gouzes , Joël Goyheneix , Mme Odette Grzegrz ulka , M. Francis Hammel , Mme Cécile Helle , MM. Edmond Hervé , Jacques Heuclin , François Holl ande , Jean-Louis Idiart , Mme Françoise Imbert , MM. Claude Jacquot , Maurice Janetti , Serge Janquin , Armand Jung , Jean-Noël Kerdraon , Bertrand Kern , Jean-Pierre Kucheida , André Labarrère , Mme Conchita Lacuey , MM. Jérôme Lambert , François Lamy , Jack Lang , Jean Launay , Mme Christine Lazerges , MM. Gilbert Le Bris , Jean-Yves Le Déaut , Mme Claudine Ledoux , MM. Jean-Yves Le Drian , Michel Lefait , Jean Le Garrec , Jean-Marie Le Guen , Patrick Lemasle , Georges Lemoine , Bruno Le Roux , Mme Raymonde Le T exier , MM. Alain Le Vern , Michel Liebgott , Mme Martine Lignières-Cassou , MM. Gérard Lindeperg , François Loncle , Bernard Madrelle , René Mangin , Jean-Pierre Marché , Daniel Marcovitch , Mme Béatrice Marre , MM. Daniel Marsin , Marius Masse , Didier Mathus , Gilbert Maurer , Louis Mermaz , Roland Metzinger , Louis Mexandeau , Didier Migaud , Mme Hélène Mignon , MM. Gilbert Mitterrand , Yvon Montané , Gabriel Montcharmont , Arnaud Montebourg , Henri Nallet , Philippe Nauche , Bernard Nayral , Henri Nayrou , Mme Véronique Neiertz , MM. Alain Néri , Michel Pajon , Joseph Parrenin , François Patriat , Christian Paul , Germinal Peiro , Jean-Claude Perez , Mmes MarieFrançoise Pérol-Dumont , Geneviève Perrin-Gaillard , Annette Peulvast-Bergeal , MM. Paul Quilès , Alfred Recours , Gérard Revol , Mme Marie-Line Reynaud , MM. Patrick Rimbert , Marcel Rogemont , Bernard Roman , Yves Rome , Gilbert Roseau , Mme Yvette Roudy , MM. René Rouquet , Michel Sainte-Marie , Mme Odile Saugues , MM. Bernard Seux , Patrick Sève , Henri Sicre , Michel Tamaya , Mme Catherine Tasca , MM. Yves Tavernier , Pascal Terrasse , Gérard Terrier , Mmes Marisol Touraine , Odette Trupin , MM. Joseph Tyrode , Daniel Vachez , André Vauchez , Michel Vauzelle , Michel Vergnier , Alain Veyret , Jean-Claude Viollet , Philippe Vuilque et Kofi Yamgnane

Contre : 4. - Mme Yvette Benayoun-Nakache , MM. Julien Dray , Yann Galut et Mme Catherine Picard

Abstentions : 3. - MM. Paul Dhaille , Raymond Douyère et Alain Vidalies

Non-votant : M. Laurent Fabius (président de l'Assemblée nationale).

Groupe R.P.R. (138) : P our : 113. - MM. Jean-Claude Abrioux , Bernard Accoyer , Mme Michèle Alliot-Marie , MM. René André , A ndré Angot , Philippe Auberger , Pierre Aubry , Mmes Martine Aurillac , Roselyne Bachelot-Narquin , MM. Edouard Balladur , Jean Bardet , François Baroin , Christian Bergelin , André Berthol , Léon Bertrand , Jean-Yves Besselat , Jean Besson , Bruno Bourg-Broc , Victor Brial , Philippe Briand , Michel Buillard , Christian Cabal , Gilles Carrez , Jean-Charles Cavaillé , Richard C azenave , Henry Chabert , Jean-Paul Charié , Jean Charroppin , Philippe Chaulet , Jean-Marc Chavanne , Olivier de Chazeaux , François Cornut-Gentille , Alain Cousin , Jean-Michel Couve , Charles Cova , Henri Cuq ,


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 3 MARS 1999

Jean-Louis Debré , Arthur Dehaine , Jean-Pierre Delalande , Patrick Delnatte , Jean-Marie Demange , Yves Deniaud , Patrick Devedjian , Eric Doligé , Guy Drut , Jean-Michel Dubernard , Jean-Pierre Dupont , Christian Estrosi , Jean-Claude Etienne , Jean Falala , François Fillon , Roland Francisci , Pierre Frogier , Yves Fromion , René Galy-Dejean , Henri de Gastines , Hervé Gaymard , Jean-Pierre Giran , Michel Giraud , Jacques Godfrain , L ouis Guédon , Lucien Guichon , Michel Hunault , Michel Inchauspé , Christian Jacob , Didier Julia , Alain Juppé , Jacques Kossowski , Jacques Lafleur , Robert L amy , Pierre Lasbordes , Thierry Lazaro , Pierre L ellouche , Jean-Claude Lemoine , Arnaud Lepercq , A lain Marleix , Philippe Martin , Patrice MartinLalande , Jacques Masdeu-Arus , Gilbert Meyer , JeanClaude Mignon , Charles Miossec , Pierre Morange , Renaud Muselier , Jean-Marc Nudant , Patrick Ollier , Mme Françoise de Panafieu , MM. Robert Pandraud , Jacques Pélissard , Dominique Perben , Pierre Petit , Etienne Pinte , Serge Poignant , Bernard Pons , Robert Poujade , Didier Quentin , Jean-Bernard Raimond , JeanLuc Reitzer , Nicolas Sarkozy , André Schneider , Bernard Schreiner , Philippe Séguin , Frantz Taittinger , JeanClaude Thomas , Jean Tiberi , Georges Tron , Anicet Turinay , Jean Ueberschlag , Léon Vachet , François Vannson , Roland Vuillaume , Jean-Luc Warsmann et Mme Marie-Jo Zimmermann

Contre : 18. - MM. Jacques Baumel , Michel Bouvard , Xavier Deniau , Nicolas Dupont-Aignan , Jean-Michel Ferrand , Robert Galley , Jean de Gaulle , François Guillaume , Jean-Jacques Guillet , Gérard Hamel , Jacques Limouzy , Lionnel Luca , Thierry Mariani , Franck Marlin , Jean Marsaudon , Jacques Myard , Michel Terrot et Jean Valleix

Abstentions : 5. - MM. Jean Auclair , Gautier Audinot , Lucien Degauchy , Jean-Claude Guibal et Mme Jacqueline Mathieu-Obadia

Groupe U.D.F. (70) : Pour : 63. - MM. Jean-Pierre Abelin , Pierre Albertini , Pierre-Christophe Baguet , Jacques Barrot , François Bayrou , Jean-Louis Bernard , Claude Birraux , Emile Blessig , Jean-Louis Borloo , Bernard Bosson , Loïc Bouvard , Jean Briane , Yves Bur , Dominique Caillaud , Hervé de Charette , Jean-François Chossy , René Couanau , Charles de Courson , Yves Coussain , Marc-Philippe Daubresse , Jean-Claude Decagny , Léonce Deprez , Renaud Donned ieu de Vabres , Philippe Douste-Blazy , Renaud Dutreil , Alain Ferry , Jean-Pierre Foucher , Claude Gaillard , Germain Gengenwin , Valéry Giscard d'Estaing , G érard Grignon , Hubert Grimault , Patrick Herr ,

M mes Anne-Marie Idrac , Bernadette Isaac-Sibille , MM. Henry Jean-Baptiste , Jean-Jacques Jégou , Christian Kert , Edouard Landrain , Jacques Le Nay , JeanAntoine Leonetti , François Léotard , Maurice Leroy , Roger Lestas , Maurice Ligot , François Loos , Christian Martin , Pierre Méhaignerie , Mme Louise Moreau , MM. Jean-Marie Morisset , Arthur Paecht , Dominique Paillé , Henri Plagnol , Jean-Luc Préel , Marc Reymann , Gilles de Robien , François Rochebloine , Rudy Salles , André Santini , François Sauvadet , Michel Voisin , JeanJacques Weber et Pierre-André Wiltzer

Contre : 2. - Mme Christine Boutin et M. Pierre Micaux

Abstention : 1. - M. Hervé Morin

Groupe Démocratie libérale et Indépendants (43) : Pour : 38. - Mme Nicole Ameline , M. François d' Aubert , Mme Sylvia Bassot , MM. Jacques Blanc , Roland Blum , Dominique Bussereau , Pierre Cardo , Antoine Carré , Georges Colombier , Francis Delattre , Franck Dhersin , Laurent Dominati , Dominique Dord , Charles Ehrmann , Gilbert Gantier , Claude Goasguen , François Goulard , Pierre Hellier , Michel Herbillon , Philippe Houillon , Denis Jacquat , Aimé Kerguéris , Marc Laffineur , Jean-Claude Lenoir , Pierre Lequiller , Alain Madel in , Jean-François Mattei , Michel Meylan , Alain Moyne-Bressand , Paul Patriarche , Bernard Perrut , Jean Proriol , Jean Rigaud , Jean Roatta , José Rossi , Guy Teissier , Philippe Vasseur et Gérard Voisin

Contre : 1. - M. Joël Sarlot

Groupe communiste (35) : Contre : 33. - MM. François Asensi , Gilbert Biessy , C laude Billard , Bernard Birsinger , Alain Bocquet , Patrick Braouezec , Jacques Brunhes , Patrice Carvalho , Alain Clary , Christian Cuvilliez , René Dutin , Daniel Feurtet , Mme Jacqueline Fraysse , MM. André Gerin , Pierre Goldberg , Maxime Gremetz , Georges Hage , Guy Hermier , Robert Hue , Mmes Muguette Jacquaint , J anine Jambu , MM. André Lajoinie , Jean-Claude Lefort , Patrick Leroy , Félix Leyzour , François Liberti , Patrick Malavieille , Roger Meï , Bernard Outin , Daniel Paul , Jean-Claude Sandrier , Michel Vaxès et Jean Vila

Groupe Radical, Citoyen et Vert (35) : Pour : 16. - MM. Gérard Charasse , Bernard Charles , Michel Crépeau , Jean-Pierre Defontaine , Roger Franzoni , Robert Honde , François Huwart , Guy Lengagne , J ean-Paul Nunzi , Jean Pontier , Jacques Rebillard ,

M me Chantal Robin-Rodrigo , MM. Roger-Gérard Schwartzenberg , Alain Tourret , Emile Vernaudon et Aloyse Warhouver

Contre : 16. - M. André Aschieri , Mme Marie-Hélène Aubert , MM. Pierre Carassus , Roland Carraz , Yves C ochet , Jacques Desallangre , Guy Hascoët , Noël Mamère , Jean-Michel Marchand , Alfred Marie-Jeanne ,

M me Gilberte Marin-Moskovitz , MM. Jean-Pierre Michel , Jean Rigal , Georges Sarre , Gérard Saumade et Michel Suchod

Abstention : 1. - Mme Huguette Bello

Non-inscrits (5) : Pour : 4. - MM. Marc Dumoulin , Charles Millon , JeanPierre Soisson et André Thien Ah Koon

Contre : 1. - M. Philippe de Villiers